La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre une lettre l'informant de sa décision de charger M. Denis Jacquat, député de la Moselle, d'une mission temporaire auprès de Mme la ministre de la santé et des sports.
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Germinal Peiro et plusieurs de ses collègues relative à l'extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux de l'agriculture (nos 357, 2219).
La parole est à M. Germinal Peiro, rapporteur de la commission des affaires sociales.
Il faudrait peut-être suspendre la séance, en attendant que la droite arrive ! Les députés de l'UMP ne s'intéressent pas au sujet.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée des aînés, mes chers collègues, nous ouvrons ce matin la discussion de la proposition de loi relative à l'extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aux aides familiaux de l'agriculture.
Il y a huit ans, presque jour pour jour, le Gouvernement de Lionel Jospin, dont Jean Glavany était ministre de l'agriculture, faisait adopter une loi instaurant le régime complémentaire obligatoire pour les chefs d'exploitation.
Je pense aux vieux paysans de notre pays, à ceux de Bretagne, du Nord, d'Alsace, de Provence, des Pyrénées, d'Auvergne…
…qui, pour la plupart sont nés avant ou pendant la deuxième guerre mondiale.
Je pense aux femmes qui ont suppléé leurs maris durant les années de captivité.
Je pense à tous ces vieux paysans qui, entre les années cinquante et les années quatre-vingts, ont fait passer l'agriculture française d'une agriculture autarcique à une agriculture de production, et qui ont fait de la France l'une des premières puissances mondiales en matière agricole.
Je pense à ces femmes et à ces hommes qui sont les victimes d'un système social défaillant et qui se retrouvent à présent isolés, avec des retraites qui ne leur permettent pas de vivre décemment, comme c'est d'ailleurs le cas pour de nombreux artisans ou commerçants.
Madame la secrétaire d'État, ces femmes et ces hommes ne réclament pas l'aumône, mais des mesures de justice qui leur permettraient de vivre dans la dignité.
Ce matin, je pense à ceux qui ont quitté la section des aînés du syndicat majoritaire pour créer l'Association nationale des retraités agricoles de France, au début des années quatre-vingt-dix. Je pense à Guionie Château, à Maurice Bouyou et au président actuel de l'association, Henri Drapeyroux. Ce sont eux qui, avec leurs amis de l'ANRAF de tous les départements, ont créé un mouvement capable de réunir des milliers et des milliers de retraités. Ce sont eux qui ont permis que la cause des retraités agricoles soit entendue.
En 1994, sous le Gouvernement Juppé, les premières mesures de revalorisation ont été prises. Cependant, il faut dire les choses comme elles sont, c'est sous le Gouvernement de Lionel Jospin que le problème des retraites agricoles a été véritablement pris à bras-le-corps.
C'est sous le Gouvernement de Lionel Jospin qu'a été mis en place un plan quinquennal, de 1997 à 2002, conformément aux engagements de celui qui était devenu Premier ministre. Il faut rappeler ce plan quinquennal non seulement parce qu'il n'avait pas eu de précédent, mais aussi parce qu'il n'a jamais eu de suite à la même hauteur.
Ce plan a bénéficié d'une participation de l'État d'un milliard de francs en 1998, de 1,6 milliard de francs en 1999, 2000 et 2001, et de 2,2 milliards de francs en 2002. Il a permis de relever les retraites de base des chefs d'exploitation de 29 %, celles des aides familiaux de 49 % et celles des conjoints de 80 %.
Par la suite, malgré nos demandes, aucun gouvernement ne s'est engagé sur un plan quinquennal et n'a consenti le même effort financier.
À l'issue de ce plan, les retraites de base des chefs d'exploitation avaient atteint le niveau des celles des salariés. Afin d'atteindre les 75 % du SMIC que réclamait l'ANRAF à l'époque – taux sur lequel Lionel Jospin s'était engagé –, il fallait créer un régime complémentaire obligatoire, existant dans tous les régimes d'assurances vieillesse à l'exception de celui de l'agriculture. C'est ce que nous avons fait en 2001 et en 2002. La création de ce régime s'est faite à partir d'une initiative parlementaire. Ce n'était pas un projet de loi du Gouvernement, mais une proposition de loi d'un député dont j'ai eu l'honneur d'être le rapporteur.
À l'époque, le gouvernement de Lionel Jospin s'était engagé à soutenir cette proposition. Le Premier ministre était venu ici, dans l'hémicycle, tenir ces propos : nous connaissons les difficultés du régime et le déséquilibre démographique qui conduit à compter quasiment trois retraités pour un actif ; le Gouvernement va s'engager à participer financièrement à la mise en place du régime complémentaire obligatoire.
Sans cet effort du Gouvernement de Lionel Jospin, ce régime n'aurait jamais été créé. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Le régime complémentaire obligatoire a bénéficié à 465 000 chefs d'exploitation dans notre pays qui ont perçu un complément de retraite correspondant à environ 1 000 euros par an aujourd'hui.
Cependant, ce régime avait été limité aux chefs d'exploitation. Pourquoi ? Disons-le simplement : pour des raisons financières.
D'abord, il fallait limiter la contribution des actifs. À l'époque, j'ai moi-même mené les négociations avec l'ensemble des syndicats agricoles et les jeunes agriculteurs. Forcément, ils demandaient que la contribution soit la plus basse possible. Les parlementaires, le Gouvernement et les professionnels s'étaient mis d'accord pour que cette contribution ne dépasse pas 3 %. Elle est restée à 2,97 %.
La contribution des actifs devait donc être complétée par une participation de l'État. Comme tout n'était pas réalisable, ce régime a été limité aux chefs d'exploitation. Cependant, dès 2002, nous avions prévu la possibilité de l'étendre aux conjoints et aux aides familiaux.
À présent, nous nous retrouvons exactement dans le même cas de figure. Le texte en discussion est une proposition de loi émanant d'un député et soutenue par un groupe politique : le groupe socialiste et apparentés.
Nous attendons de ce gouvernement qu'il adopte la même attitude que le gouvernement Jospin : qu'il accepte d'étendre le régime complémentaire obligatoire aux conjoints et aux aides familiaux, en prévoyant d'apporter une contribution de l'État sans laquelle cette extension est impossible.
L'extension du régime aux conjoints et aux aides familiaux bénéficierait à 363 000 personnes, pour un montant de prestations de 413 millions d'euros, selon les chiffres de la Caisse centrale de la mutualité agricole. Pour mémoire, l'actuel régime complémentaire obligatoire des chefs d'exploitation verse 465 millions d'euros de prestations, et la participation annuelle de l'État atteint 145 millions d'euros. En gros, la participation de l'État représente le tiers des prestations versées, le reste provenant des cotisations.
Si l'on gardait le même rapport, l'effort demandé à l'État représenterait un tiers des 413 millions d'euros, c'est-à-dire 130 à 140 millions d'euros par an.
Sans doute fera-t-on, au cours de la discussion, d'autres comparaisons avec certains cadeaux fiscaux consentis à d'autres catégories sociales.
Je n'irai pas plus loin, mes chers collègues, mais je dois vous dire que cette proposition de loi a été amputée de ses articles 1er, 2, 7 et 8, en application de l'article 40 de la Constitution, selon lequel un député ne peut engager l'État à des dépenses supplémentaires.
Cela étant nous attendons la réponse du Gouvernement, car nous avons, malgré tout, maintenu notre texte : outre qu'il a le mérite de poser le problème des retraites agricoles, il permettra de mesurer l'engagement du Gouvernement. Aujourd'hui, les promesses du Président de la République seront honorées ? Et celles de tous les membres du Gouvernement ?
L'engagement même de nos collègues de droite, qui, en 2002, nous reprochaient l'insuffisance d'un régime fermé aux conjoints, sera-t-il honoré ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Telle est la vraie question, mes chers collègues, celle qui trouvera sa réponse ce matin ; et je sais que, au fond des campagnes, bon nombre de retraités l'attendent. Je ne me fais aucun souci au sujet du soutien, non seulement des collègues du groupe SRC, mais aussi de la gauche en général ; peut-être, d'ailleurs, certains collègues d'autres groupes ne s'opposeront-ils pas au texte : ils auront l'occasion de s'exprimer ce matin. Je souhaite surtout que nos collègues de l'UMP s'en tiennent à leurs engagements et à leurs promesses.
Ils mettraient ainsi en oeuvre ce qu'ils nous réclamaient en 2002 sous le gouvernement Jospin. Ce n'est pas une question de malice politique, mes chers collègues. C'est tout simplement une question de justice et de dignité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Pensez à ceux qui vivent avec 500 euros par mois et se retrouvent isolés ; essayez de vous détacher de la pression politique des groupes, qui s'exerce dans la majorité plus encore que dans l'opposition. Essayez de vous libérer de ce carcan, et votez en votre âme et conscience : les vieux paysans de France vous regardent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, la proposition de loi en discussion tente de répondre à un problème que nous connaissons tous, et qui fait l'objet de toute l'attention du Gouvernement. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Il s'agit de la question des retraites agricoles, en particulier du niveau des pensions versées à ceux qui ont travaillé sur les exploitations sans avoir le statut de chef d'exploitation.
Qui ignore, monsieur Peiro, l'implication et le dévouement des conjoints participant aux travaux d'exploitation, travaux dont je sais combien ils sont difficiles ?
Monsieur Néri, s'il vous plaît ; n'interrompez pas sans cesse l'orateur.
De tous temps, les conjoints ont largement contribué aux exploitations agricoles. Cependant cette question se heurte, vous le savez, à celle, tout aussi préoccupante, de la pérennité financière du régime de protection sociale agricole dans un contexte démographique et économique défavorable.
Dans le discours qu'il a prononcé le 23 février 2008 au Salon international de l'agriculture, Nicolas Sarkozy a indiqué qu'il voulait réduire les « poches de pauvreté »…
…et étudier en priorité des mesures en faveur des conjoints et des veuves.
Le Premier ministre a donc annoncé une série de mesures de revalorisation des petites retraites agricoles le 9 septembre 2008, lors du salon de l'élevage. Ces mesures ont été mises en oeuvre dans les lois de financement de la sécurité sociale pour 2009 et 2010.
Je veux rappeler que le Gouvernement s'est fixé comme priorité de favoriser l'augmentation des ressources des personnes âgées qui perçoivent de faibles revenus, en particulier chez les retraités agricoles.
Le Gouvernement s'est donc engagé dans un vaste plan de revalorisation des retraites afin d'améliorer les pensions versées lorsqu'elles sont insuffisantes, selon une logique verticale,…
…et à couvrir davantage les exploitants et travailleurs agricoles, logique horizontale.
Le Gouvernement poursuit d'abord et avant tout l'objectif d'atteindre un montant de retraite équivalent à 75 % du SMIC pour un exploitant ayant normalement cotisé et bénéficiant ainsi d'une carrière complète, contre 72 % aujourd'hui.
Dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 figurait notamment la suppression des coefficients de minoration, ou encore l'abaissement du seuil de durée de carrière pour ouvrir droit aux revalorisations. Ce dispositif a permis d'augmenter directement les montants moyens des retraites de 188 000 personnes.
Dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, un nouveau volet de mesures a été prévu : relèvement du plafond au dessus duquel la majoration de retraite de base ne peut être servie, rachat de cotisations, modalités de reversement au conjoint survivant des points de retraite complémentaire obligatoire. En 2010 et 2011, la revalorisation des retraites agricoles se poursuivra.
Tout cela concrétise l'engagement du Gouvernement et de mon collègue Bruno Le Maire (« Où est-il ? » sur les bancs du groupe SRC) d'améliorer la situation des retraités agricoles les plus modestes tout en assurant la pérennité du régime agricole, dans un contexte budgétaire pourtant difficile.
Depuis 2008, le coût de ces mesures pour l'État a été de 381 millions d'euros par an. S'agissant du régime de retraite complémentaire obligatoire, s'il était nécessaire de l'instituer en 2002, encore fallait-il lui assurer un financement suffisant et pérenne. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Or c'est bien le Gouvernement socialiste de l'époque qui, tout en créant ce régime de validation des droits gratuits pour les exploitants agricoles, n'a pas pris la peine de le financer durablement.
Vous distribuez des milliards aux plus aisés, et vous venez nous faire la leçon au sujet de quelques millions en faveur des plus pauvres ! C'est une honte !
Permettez-moi de vous rappeler que c'est le Gouvernement actuel qui a financé de façon pérenne l'actuelle retraite complémentaire obligatoire. (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)
Il doit surtout financer le bouclier fiscal en faveur des plus riches !
Depuis 2009, l'insuffisance des cotisations liée au déséquilibre démographique des professions agricoles – un cotisant pour trois retraités – est désormais compensée par des ressources fiscales, donc par la solidarité nationale, pour un montant de 187 millions d'euros. Cela représente un tiers des ressources du régime complémentaire.
D'ailleurs, monsieur Peiro, si, en 2002, le Gouvernement socialiste n'a pas souhaité étendre le bénéfice de la retraite complémentaire obligatoire au-delà des chefs d'exploitation, c'est précisément à cause du déséquilibre démographique et financier du régime.
La proposition de loi que nous examinons revient sur cette question, sans apporter de réponse satisfaisante au problème du financement, pas plus que vous n'en aviez trouvé en 2002.
La proposition que vous faites, monsieur Peiro, pointe certes un vrai problème mais elle n'apporte pas de solution pérenne. D'ailleurs, aucune solution ne peut être trouvée sans contrepartie contributive suffisante. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Votre dispositif repose sur un financement mal assis et insuffisant : mal assis car l'assiette proposée est celle des salaires différés ; insuffisant car il ne peut couvrir le montant de la réforme prévue, laquelle coûterait 500 millions d'euros à la collectivité. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez envisagé un relèvement des droits sur les alcools. Cette augmentation se retournerait bien évidemment en premier lieu contre une partie du secteur agricole en enchérissant le coût de certains produits : dans le contexte actuel, ce n'est pas envisageable.
Ces propos sont incroyables ! Quelle honte ! Vous distribuez des milliards aux plus aisés et vous voulez nous donner des leçons pour quelques millions !
L'égalité, il faut d'abord la pratiquer et ne pas se contenter d'en parler !
En outre il faudrait, dès la première année d'entrée en vigueur du texte, abonder le régime d'un milliard d'euros supplémentaires ! C'est d'ailleurs, mesdames et messieurs les députés, la raison pour laquelle l'article 40 a été opposé à cette proposition.
Nous sommes tous d'accord, monsieur Peiro : l'exclusion des conjoints et des aides familiaux du régime complémentaire de retraite obligatoire est un sujet auquel on ne peut rester insensible. J'ai moi-même rencontré des exploitants sur le terrain ; ils m'ont fait part de leurs difficultés, et j'ai ressenti à quel point les attentes étaient fortes.
L'année 2010 sera celle de la réforme des retraites.
C'est dans le cadre global de cette réforme qu'une solution viable au problème des conjoints et aides familiaux pourra être trouvée.
Le régime social agricole est soutenu par la solidarité nationale et la solidarité interprofessionnelle, et n'est alimenté que partiellement par les cotisations, lesquelles représentent moins de 20 % des recettes. Ces cotisations sont faibles car elles s'appliquent à des revenus modestes.
Beaucoup a été fait pour rééquilibrer les comptes sociaux (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) ; il ne s'agirait pas, aujourd'hui, de fragiliser l'édifice patiemment reconstruit. Faut-il en effet rappeler qu'en 2008, c'est ce gouvernement qui a repris la totalité du déficit du régime agricole, soit près de 8 milliards d'euros, et équilibré le financement de la branche maladie en lui attribuant de nouvelles recettes, comme la taxe sur les véhicules de société pour 1,2 milliard d'euros ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Désormais, la branche maladie et la branche famille du régime des non salariés agricoles sont structurellement équilibrées. Seul demeure le déficit de la branche vieillesse. Pour 2009, celui-ci a été évalué à 1,16 milliard d'euros,…
C'est deux fois moins que le coût de la TVA réduite pour les restaurateurs !
…et la caisse centrale de la mutualité sociale agricole devra recourir à l'emprunt pour équilibrer ses comptes.
À la fin de 2008, le Premier ministre a indiqué que le Gouvernement s'engageait à trouver des réponses à ce déficit structurel. Devant les parlementaires, lors de la présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, le Gouvernement a réitéré cet engagement en précisant que les conditions du retour à l'équilibre de la branche seraient étudiées dès 2010. C'est une priorité du Gouvernement. Il est d'ailleurs dans l'intérêt des exploitants et des retraités eux-mêmes de ne pas fragiliser la pérennité du système de retraite de leurs enfants.
Au regard des éléments que je viens de développer, le Gouvernement ne peut que s'opposer à cette proposition de loi. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Le débat sur les retraites va être engagé ; le Premier ministre l'a rappelé hier. Lui et le Président de la République ont pris un engagement devant les Français : celui d'assumer toutes leurs responsabilités sur cette question. Nous entendons dire aussi que le parti socialiste pourrait participer à la recherche d'une solution consensuelle, et nous nous en réjouissons.
Nous veillerons à discuter avec les partenaires sociaux, tout comme nous veillerons à préserver l'avenir et à réduire les inégalités. Ce n'est que dans ce cadre que l'extension de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux pourra être envisagée. Je vous invite donc, dans l'intérêt de notre système de retraites, à ce prochain rendez-vous républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) )
Mon rappel se fonde sur l'article 58 du règlement et porte sur le déroulement de nos travaux.
Au nom de mon groupe, j'exprime notre indignation, car ni le ministre de l'agriculture ni le ministre des affaires sociales ne sont présents ce matin.
Certes, mais ce débat est extrêmement important, car les retraités agricoles et leurs conjoints sont à ce jour dans une situation de grande détresse. Avec Germinal Peiro, nous avons reçu une délégation de leur association qui nous a expliqué que certaines personnes en étaient arrivées à ne plus cotiser à une mutuelle tant leur revenu était insuffisant. Or ni les ministres ni les membres de l'UMP ne sont là. Les 330 députés de votre groupe ne sont représentés que par une toute petite délégation.
En réalité, vous ne voulez pas de ce texte ! C'est une forme de mépris envers les personnes concernées et la représentation nationale. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales, qui a combattu avec virulence cette proposition socialiste, n'est pas là non plus. Je tenais à donner ces précisions à notre assemblée.
Le contexte dans lequel se trouvent aujourd'hui les retraités, mais aussi les actifs de l'agriculture, aurait nécessité une présence en nombre de votre part, comme une marque de respect envers ceux qui souffrent en ce moment. On relève en effet pour l'année 2009 une diminution moyenne de 34 % du revenu agricole.
Des dizaines de milliers de personnes du monde de l'agriculture dépendent du RSA. Ce matin, un journal parisien, donc peu lu par les professions agricoles, consacre deux pages à la crise de l'agriculture en titrant : « Une profession en danger ». Suivent les témoignages d'un éleveur laitier disant qu'il va demander le RSA, d'un exploitant céréalier qui avoue ne plus se verser de salaire, d'un éleveur bovin qui déclare vivre avec moins de 700 euros par mois. Telle est aujourd'hui la réalité du monde agricole ! Et celle des retraités et de leurs conjoints est encore plus dure. La France, qui se veut une grande nation agricole, a le devoir d'être un peu plus respectueuse de ceux qui la nourrissent. Or telle n'est pas l'image que vous donnez ce matin !
Une fois de plus, madame la secrétaire d'État, vous allez, au nom du Gouvernement, demander la réserve du vote, ainsi que le vote bloqué, qui n'aura lieu que la semaine prochaine et qui permet au président du groupe UMP, Jean-François Copé, de dire à ses troupes que ce n'est pas la peine de venir et que cela ne sert à rien de débattre avec les socialistes. Or nous avons des propositions à faire : c'est pour cette raison que nous sommes là ce matin. Nous ne sommes pas venus seulement pour critiquer.
Je vous le rappelle, mesdames et messieurs de la majorité, même si vous êtes peu nombreux ce matin : vous êtes au pouvoir depuis 2002. Pourtant, en ce qui concerne les retraités agricoles, et notamment les conjoints, rien n'a été fait. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Seul le gouvernement de Lionel Jospin et la majorité qui le soutenait ont agi, il importait de le rappeler.
Si vous n'êtes pas nombreux ce matin, c'est parce que vous êtes gênés ! Vous devriez faire preuve de responsabilité et de respect à l'égard d'hommes et de femmes qui méritent la reconnaissance et la solidarité nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je ne peux pas laisser croire aux Français que nous nous désintéressons de cette question cruciale. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Si M. Lemaire n'est pas présent ce matin, c'est qu'il s'occupe des problèmes des pêcheurs.
La France doit être prise en charge globalement. Si vous vous intéressez tant aux retraites, je vous donne rendez-vous pour le débat à venir sur cette question. Nous vous attendons alors pour avoir un débat global. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
On ne risque pas de donner la parole à un député du groupe UMP puisqu'il n'y en a quasiment pas !
Monsieur Mallot, cela vous a peut-être échappé, mais c'est à Mme Biémouret que j'ai donné la parole ! Nous allons l'écouter.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, j'associe à mon intervention mon collègue Philippe Martin. Nous avons tous deux une pensée pour M. Valmont Pis, à ce jour décédé, qui a été le premier président de l'AICRA – l'association intercantonale des retraités agricoles – dans notre département et qui a combattu pour les retraités agricoles.
La proposition de loi qui vous est présentée aujourd'hui est la traduction concrète d'une revendication portée par les adhérents de l'Association nationale des retraités agricoles de France depuis de nombreuses années.
L'extension de la retraite complémentaire obligatoire est une mesure simple pour tous les retraités agricoles. Elle s'inscrit dans le prolongement des avancées sociales, comme l'allocation personnalisée d'autonomie, réalisées sous le gouvernement de Lionel Jospin entre 1997 et 2002. Elle représente une mesure de solidarité envers nos aînés. Elle permet surtout l'instauration d'une mesure de justice sociale et d'efficacité économique respectant le principe d'un système par répartition.
L'objectif d'un rapprochement progressif entre le minimum garanti des retraites et le SMIC passe par l'extension du bénéfice de la RCO aux conjoints et aux aides familiaux. C'est la méthode qui avait été utilisée sur l'initiative de notre collègue Germinal Peiro pour atteindre en 2002 les 75 % du SMIC net pour les chefs d'exploitation.
Lors des discussions, en décembre 2001 et en février 2002, les parlementaires de l'ensemble de ces bancs s'accordaient à viser l'objectif d'une retraite complémentaire pour tous, non seulement pour les chefs d'exploitation, mais aussi pour les conjoints et les aides familiaux. Huit ans après, le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, prend ses responsabilités en présentant cette proposition de loi. Le moment est venu de vérifier les intentions du Gouvernement et de sa majorité vis-à-vis de cette mesure de justice sociale. Ce débat est l'occasion d'entrevoir les limites entre les discours compatissants et les actes concrets.
Les retraites des conjoints et des aides familiaux figurent parmi les revenus les plus modestes. Est-il nécessaire de rappeler le montant des pensions actuellement versées ? Les revenus des retraités agricoles se situent le plus souvent sous le seuil de pauvreté. Il est indigne de laisser perdurer une telle situation touchant des milliers de personnes. Il est injuste de les laisser subsister avec quelques centaines d'euros par mois.
À travers mon intervention, je souhaite rappeler le rôle du conjoint ou des aides familiaux dans l'organisation quotidienne du travail sur une exploitation. Le statut de collaborateur a reconnu leur existence et leur travail. Ce sont les conjointes qui ont toujours été à la pointe des évolutions des exploitations, avec le développement de productions innovantes, comme le gavage dans le sud-ouest, la transformation de la production, l'embellissement des exploitations, ainsi que le tourisme et l'accueil à la ferme.
Potentiellement, l'extension de la retraite complémentaire obligatoire représente un gain de pouvoir d'achat de l'ordre de quatre-vingts euros par mois. Cette somme représente une amélioration sensible de leur pouvoir d'achat pour la consommation courante, l'achat de médicaments ou encore des heures d'aide ménagère pour les plus âgés et les plus dépendants.
Malgré ses promesses, le Gouvernement fragilise un peu plus cette catégorie de la population en instaurant les franchises médicales, en augmentant le forfait hospitalier et en effectuant de faibles revalorisations des pensions. La politique menée par le Gouvernement accentue la précarité de nombreux retraités agricoles en réduisant leur pouvoir d'achat. Il mène une politique injuste vis-à-vis des plus faibles et privilégie les hauts revenus avec le bouclier fiscal. Les retraités agricoles ont urgemment besoin d'un bouclier social comme la retraite complémentaire.
Nous posons aujourd'hui la question de la reconnaissance du rôle joué par les femmes. Le caractère invisible des conjointes d'exploitants dans les dispositions actuelles équivaut à admettre leur statut d'infériorité. En adoptant ce texte, nous avons l'opportunité d'améliorer de manière significative le quotidien de plusieurs dizaines de milliers de nos concitoyens. Les conjointes d'exploitants agricoles attendent la juste reconnaissance de leur travail.
Comment ce gouvernement, pour qui le « travailler plus pour gagner plus » est un slogan emblématique, peut-il oublier celles et ceux qui ont, durant toute leur vie, travaillé très dur ? Ce serait un signe fort de montrer qu'il n'oublie pas les petites gens de notre pays.
Cette proposition est une mesure de justice sociale et de dignité vis-à-vis de celles et ceux qui ont permis, durant ces cinquante dernières années, d'assurer les progrès de l'agriculture française. La parité hommes-femmes reste à conquérir dans de nombreux domaines, à commencer par les retraités agricoles. Il convient d'appliquer cette mesure visant à redonner de la dignité à de nombreuses personnes qui ont permis à la France de devenir d'abord autosuffisante, puis une puissance agricole mondiale.
Aujourd'hui, à l'occasion de cette journée d'initiative du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, et sous les yeux de nombreux retraités agricoles, nous avons une occasion unique de mettre un terme à une discrimination sociale qui doit disparaître.
Le rejet du texte serait un message négatif adressé à des milliers de retraités agricoles. Il s'accompagnerait d'une grande frustration dans nos campagnes où le sentiment d'abandon, voire de désespoir, gagne peu à peu du terrain.
Le monde agricole est actuellement touché de plein fouet par une crise sans précédent La colère gronde chez les actifs ; il serait préjudiciable d'accabler les aînés agricoles pour rajouter un sentiment d'injustice étendu à toute la France rurale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mesdames, messieurs les députés, je débuterai mon intervention par une simple remarque.
Une nouvelle fois, les conditions du débat, dans le cadre des séances réservées aux groupes parlementaires, sont pour le moins « limite », voire inacceptables. En encourageant la désertion de l'hémicycle par l'application du troisième alinéa de l'article 44 de la Constitution, le Gouvernement ne sert pas l'intérêt de nos concitoyens.
Cette attitude est d'autant plus regrettable que la majorité parlementaire, aux ordres du Gouvernement et du Président de la République, fait systématiquement l'autruche pour ne pas répondre à la détresse des agriculteurs retraités ou en activité.
Ainsi, lors du débat sur la proposition de loi sur le droit au revenu des agriculteurs, que j'avais déposée au mois d'octobre 2009 avec les députés de la Gauche démocrate et républicaine, tous les parlementaires, élus de l'opposition comme de la majorité, avaient soulevé l'intérêt de certaines dispositions immédiatement applicables. Cependant le Gouvernement et sa majorité avaient déjà préféré botter en touche plutôt que de répondre sur le fond aux préoccupations de nos agriculteurs. « Circulez, il n'y a rien à voir ! »
Après les propos tenus en commission des affaires sociales sur la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, vous persévérez en trouvant tous les subterfuges possibles pour éviter les échanges, les débats, sur des sujets de fond qui concernent le quotidien de centaines de milliers d'hommes et de femmes. Tantôt vous arguez de la non-recevabilité financière des propositions de loi, tantôt vous jugez les débats si inutiles que vous désertez, comme aujourd'hui, les bancs de l'hémicycle.
À court d'arguments – Germinal Peiro était présent –, vous m'avez fait le coup de la « prématurité » du débat sur le revenu des agriculteurs, prétextant que le projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche était en cours d'élaboration, Vous vous êtes servi du même argument en commission sur le texte que nous examinons, en affichant d'abord votre approbation sur le fond, pour mieux ajouter que « le seul bémol » était « sa date de discussion », que nous devions nous montrer « prudents », en attendant un débat « global » sur « la casse des retraites » voulue par le Président de la République.
Ces arguties font mal à notre France rurale, celle des travailleurs de la terre. Elles font également mal à notre noble mission de parlementaires et de représentants de la nation. Lorsque je parcours le contenu du projet de loi de modernisation de l'agriculture adopté en conseil des ministres, je mesure mieux à quoi ressemble votre définition spécieuse du mot « prudence ». Je vous suggère de remplacer systématiquement ce terme par le mot « indifférence » ou par le mot « mépris » dans vos interventions. Cela aura au moins le mérite de la clarté pour ceux qui nous écoutent. Cela donnera aussi plus de relief à des débats où l'hypocrisie et les faux-semblants règnent en maîtres dans les rangs de la majorité parlementaire.
Madame la secrétaire d'État, en vous écoutant, je pensais à l'empereur Héliogabale qui servait à ses invités de très beaux plats, lesquels étaient en réalité des dessins figurant au menu, chaque convive devant exprimer son contentement.
Pourtant, nous le savons tous, depuis la création, au sortir de la Seconde guerre mondiale, d'un régime de retraite spécifique,distinct du régime général, pour les non-salariés agricoles, le fossé financier s'est progressivement élargi entre retraités des deux régimes, ce qui a contribué à installer durablement les anciens exploitants agricoles et leurs familles parmi les plus faibles niveaux de vie nationaux.
Depuis sa mise en place effective par la loi du 10 juillet 1952, le régime de retraite des non-salariés agricoles a été l'objet de plusieurs réformes, visant notamment à la reconnaissance juridique et à l'intégration au sein du régime agricole des conjoints et aides familiaux, à l'amélioration des niveaux des pensions de base et à l'adoption d'un régime complémentaire obligatoire.
Ces évolutions législatives furent notamment marquées par les avancées significatives de la période 1998-2002, qui visaient une revalorisation globale des montants des pensions de retraite du régime agricole et une véritable reconnaissance des conjoints de chefs d'exploitation, la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 créant ainsi un statut de conjoint collaborateur. L'aboutissement de ces réformes fut la mise en place d'un régime de retraite complémentaire, avec l'adoption de la loi du 4 mars 2002 visant à garantir un niveau de pension égal à 75 % du SMIC pour une retraite complète.
Le bilan des sept dernières années en matière de justice sociale se révèle en revanche amer pour les retraités agricoles, en particulier les plus pauvres d'entre eux. L'écrasante majorité des 1 800 000 retraités actuels de ce régime ont des revenus caractéristiques d'une situation d'extrême pauvreté, bien en deçà des 880 euros par mois du seuil de pauvreté fixé selon la définition européenne et bien loin des 700 euros de ce même seuil si l'on prend pour base 50 % du revenu médian. À cela s'ajoutent d'insupportables inégalités de traitement des droits à retraite entre hommes et femmes, héritées de l'application tardive de mesures en faveur de la reconnaissance des conjoints et aides familiaux, qui placent la majorité des femmes d'exploitants ayant soldé leurs retraites dans des situations désastreuses et scandaleuse. Voilà qui contredit tout objectif de parité et d'égalité entre les sexes, alors même que les besoins sociaux et de santé des personnes âgées bénéficiaires s'accroissent considérablement.
Chaque année depuis 2007, le Président de la République ressert les mêmes plats, les mêmes discours copiés-collés, sur le caractère indigne du niveau des pensions des non-salariés agricoles mais sans jamais mettre ses actes en cohérence avec son verbe. Que dire, en effet, du plan de revalorisation des petites retraites agricoles adopté par le Gouvernement, quand, pour l'immense majorité des personnes concernées, il se matérialise par moins de 30 euros supplémentaires par mois ! Ce n'est pas l'aumône que vous demandent les retraités agricoles, ce sont des pensions dignes, oui, dignes, des pensions d'un niveau suffisant pour vivre : 85 % du SMIC.
Aussi, même si cette proposition de loi, examinée dans le cadre d'une niche parlementaire, demeure forcément incomplète, mon cher collègue Peiro, elle permet d'apporter une première réponse immédiate, de nature à faire bénéficier les aides familiaux et les conjoints du régime complémentaire obligatoire. Les députés communistes, républicains et du Parti de gauche la soutiennent. J'avais d'ailleurs déposé une proposition de loi semblable il y a un peu plus d'un an, qui incluait également des dispositions tendant à élargir l'accès au régime complémentaire obligatoire pour les carrières incomplètes et à améliorer de façon substantielle le niveau des pensions de réversion de ce même régime.
Je soutiens donc sans réserve le principe d'une extension du régime complémentaire obligatoire aux statuts de conjoints et aides familiaux, remis à plus tard dans le texte de 2002 instituant ce même régime. Ce régime bénéficierait directement aux personnes les plus démunies, en particulier les femmes, qui ont contribué sans reconnaissance économique ni sociale à la vie des exploitations, ces femmes qui ont exercé une réelle activité professionnelle tout au long de leur vie, souvent spécifique dans le cadre d'une division sexuelle du travail, avec des tâches physiques propres, mais aussi, fréquemment, les taches quotidiennes de suivi et de gestion de l'exploitation, en sus de la tenue de la maison.
Comment concevoir qu'elles ne puissent pas recevoir de la solidarité nationale une juste rétribution de leurs efforts trop longtemps passés sous silence ? Leurs attentes, comme leurs souffrances, méritent plus que le repli stratégique du Gouvernement derrière la ligne Maginot de l'élection présidentielle, avec un Président de la République juché comme un coq sur son tas de blé. (Sourires sur les bancs du groupe SRC.) Par vos crampes mentales, je dirais même morales, vous offrez une terrible illustration des propos de Simone de Beauvoir, qui parlait si bien des femmes : « Ce qu'il y a de scandaleux dans le scandale, c'est qu'on s'y habitue. » (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cependant, nous savons aussi que, au-delà du régime complémentaire, il faut assurer un financement pérenne des retraites agricoles, avec des niveaux de pensions bien supérieurs. Alors que, pour les géants de l'industrie agroalimentaire, pour les géants de la grande distribution, tout est permis pour s'assurer des marges indécentes sur le dos des exploitants agricoles, alors que plus de 340 milliards d'euros des contribuables ont été généreusement mis à la disposition du secteur bancaire, qui compte des géants historiquement liés au secteur agricole, il serait impossible pour le Gouvernement de trouver les ressources pour financer les retraites agricoles ! Cette mauvaise foi n'est pas supportable.
Allez donc dire, cher collègue, aux personnes âgées, dans nos exploitations agricoles que le débat d'aujourd'hui est une comédie !
Depuis quand vous intéressez-vous aux agriculteurs ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous en prie, mes chers collègues.
Monsieur Chassaigne, vous seul avez la parole. Veuillez donc poursuivre.
Mes chers collègues de la majorité, pensez-vous vraiment qu'il est aujourd'hui impossible de trouver l'argent pour financer les retraites agricoles ? En votre âme et conscience, pensez-vous vraiment que cet argent n'existe pas, lorsque l'on voit, chaque jour, les résultats des entreprises du CAC40, les salaires faramineux de certains, l'indécence de ceux qui vivent dans le plus grand luxe, alors que d'autres vivent dans la misère ? Cette mauvaise foi n'est pas supportable ! Avec vous, les agriculteurs sont condamnés à travailler à perte toute leur vie, avant de passer leurs vieux jours dans la misère !
Ce n'est décidemment pas notre façon de considérer le travail de ceux qui nous nourrissent. Il est temps, grand temps, de replacer l'humain avant tout dans nos politiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Tout à l'heure, en introduisant votre propos, vous avez fait référence, monsieur le rapporteur, à ces vieux paysans qui ont transformé notre pays. Vous avez alors égrené les noms d'un certain nombre de départements et régions de notre beau pays mais vous n'avez pas cité le département du Tarn.
Plusieurs députés du groupe SRC. Il ne pouvait pas tous les citer !
Mes chers collègues, s'il vous plaît, je pense que, pour la dignité de notre débat, chaque orateur a le droit de s'exprimer à cette tribune quel que soit le groupe auquel il appartient. Ne vous plaignez pas – je vous le dis avec beaucoup de solennité – de l'absence de vos collègues si, lorsqu'ils viennent, ils ne peuvent s'exprimer. Un minimum de dignité doit être respecté pour tout le monde.
Pour ma part, en tant que président de séance, j'ai toujours fait respecter la parole de tous, y compris celle des orateurs socialistes qui, en commençant, ont dépassé le temps qui leur était alloué. Je l'ai permis pour que le débat soit possible.
Retrouvons donc un peu de calme et de dignité. Si nous étions tous d'accord, cela se saurait, et nous ne siègerions pas sur des bancs différents. Chacun a le droit de s'exprimer.
Monsieur Folliot, vous avez donc, vous seul, la parole.
Je crois effectivement le sujet particulièrement important, essentiel même.
Me reviennent à l'esprit quelques échanges que j'ai pu avoir ces dernières semaines sur les foires et marchés de nombreuses communes de ma circonscription, par exemple les marchés d'Alban, de Réalmont, de Montredon-Labessonnié et, samedi dernier, de Lacaune. Ces questions sont abordées avec une certaine pudeur.
Dans nos campagnes, dans le secteur agricole, on ne s'ouvre pas facilement à autrui des difficultés que l'on rencontre chaque mois pour joindre les deux bouts. Cette situation difficile, cette précarité réelle, vécues en milieu rural, ne s'affichent pas. Les personnes concernées ne sauraient en tout cas se satisfaire de scènes du type de celles auxquelles nous venons d'assister, qui font se succéder invectives, provocations et contre-provocations. J'ai l'intime conviction que ce débat est suffisamment important pour qu'un certain calme, une certaine sérénité et, en tout cas, une écoute et une compréhension mutuelles s'imposent. C'est à ces conditions que nous pourrons progresser sur cet important dossier.
C'est finalement à une situation de grande injustice que nous devons essayer de répondre.
À ce stade de notre discussion, j'aurai une pensée pour mon père, qui a longtemps été aide familial. Dans les années cinquante, lors de ce que l'on appelait les migrations rurales, il a quitté l'Ouest de la France, plus précisément le département de la Mayenne, pour le Tarn, où il est ensuite devenu ouvrier agricole, avant de travailler pour une coopérative agricole et de finir sa vie professionnelle comme inséminateur artificiel. Un vécu familial me paraît apporter une sensibilité particulière à un tel débat, portant sur des questions essentielles.
Je veux également souligner l'intérêt spécifique d'une telle proposition de loi, qui présente le mérite de s'efforcer de résoudre le problème qu'elle pose. La situation des retraités agricoles, aides familiaux et conjointes d'exploitants est effectivement particulièrement préoccupante dans notre pays.
Tout au long de leur vie, ces personnes ont consacré leur temps et leur énergie à un travail souvent rude et mal reconnu, se levant chaque matin, quel que soit la météo du jour, pour la traite. Ainsi ne sont-elles pas reconnues – avec tout ce que la reconnaissance emporte – comme elles le mériteraient, une fois arrivés leurs vieux jours. Dès lors, la perspective de, peut-être, devenir dépendant ou de devoir aller en maison de retraite n'est pas sans les inquiéter. Vu la modestie de leurs pensions, les plus basses de notre pays, d'un montant mensuel d'environ 500 euros, comment pourront-ils payer ?
Il est donc de notre devoir de prendre les mesures et de trouver les moyens financiers de nature à réduire les poches de pauvreté dans lesquelles se trouvent les conjoints et aides familiaux de l'agriculture.
Le groupe Nouveau Centre et apparentés considère que, à la suite des différentes revalorisations et à la création, au mois de février 2002, du régime complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles, cette proposition de loi permettra une nouvelle avancée importante. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je me permets de vous rappeler que, lors des explications de vote en première lecture à l'Assemblée nationale, le 11 décembre 2001, l'approbation unanime de ce texte, tous groupes confondus, s'est accompagnée de nombreuses réserves concernant l'exclusion des conjoints et des aides familiaux.
Ainsi, notre collègue Charles de Courson, député de la Marne, avait fait, à l'époque, état de « graves insuffisances dont l'exclusion des veuves, des conjoints et des aides familiaux »…
… et il avait déclaré qu'il aurait été préférable de « les inclure tout de suite dans le régime, quitte à réduire les prestations ».
La présente proposition de loi permettra, en effet, de revaloriser de plusieurs dizaines d'euros par mois le montant des retraites des conjoints et des aides familiaux et d'avancer dans la direction de la parité entre les hommes et les femmes, les conjoints étant, pour leur très grande majorité, des femmes.
Il s'agit donc d'une mesure allant dans le sens de l'équité et de la justice sociale dans un contexte de crise économique qui touche plus particulièrement le secteur de l'agriculture. Les chiffres, portés à notre connaissance, relatifs à l'évolution du revenu agricole ces derniers mois sont, à cet égard, tout à fait symptomatiques. Il importe d'autant plus de se montrer solidaire avec une population qui a oeuvré toute sa vie pour que notre agriculture fonctionne efficacement, exporte et assure cette mission essentielle de nourrir toute la population de notre pays.
Les auteurs de la proposition de loi mettent en avant le rôle essentiel joué par les conjoints et les aides familiaux dans le monde agricole. Ces deux catégories de personnels non-salariés agricoles, ont largement contribué au développement de l'agriculture française. Insuffisamment reconnues, mais elles n'ont pas été intégrées dans la loi initiale, comme je l'ai précédemment souligné.
En 2002, l'ensemble du plan de revalorisation des petites retraites agricoles a permis d'atteindre l'objectif de 75 % du SMIC. Ce plan a été accompagné d'une série de mesures, telle la mise en place du statut de conjoint collaborateur. Celui-ci a permis aux femmes d'exploitants d'acquérir une place véritable sur l'exploitation au-delà du statut domestique d'épouse.
Nous soutenons les objectifs poursuivis par cette proposition de loi qui consiste, notamment, à prolonger l'effort de reconnaissance des conjoints en leur ouvrant droit à la retraite complémentaire obligatoire et à reconnaître également le bénéfice de la RCO aux aides familiaux.
Si nous soutenons cette proposition de loi, nous pensons cependant qu'une réflexion est nécessaire pour déterminer les conditions de financement d'une telle mesure d'extension.
Nous sommes, en effet, tout à fait conscients de la spécificité du régime agricole et de son caractère très déséquilibré sur le plan démographique…
… avec un nombre de cotisants relativement faible face à un nombre de bénéficiaires très élevé. Nous avons entendu certains de vos propos, madame la secrétaire d'État, mais il est essentiel que vous nous éclairiez davantage sur la façon dont le financement du régime de retraite complémentaire obligatoire en faveur du conjoint et des aides familiaux peut être envisagé. Ne serait-il finalement pas utile de nous retrouver en commission pour tenter de trouver, de la manière la plus consensuelle qui soit, une solution pour financer cette mesure ?
Les centristes ont toujours démontré leur profond attachement au monde rural en luttant pour la mise en place d'une véritable régulation du secteur agricole au niveau national et communautaire afin de garantir des revenus décents aux acteurs du monde agricole. Il est essentiel de le souligner. En effet, dans un contexte économique peut-être plus favorable au secteur de l'agriculture – et non dans la situation de baisse du revenu agricole que nous connaissons – le problème des cotisations pour les ressortissants du régime agricole ne se poserait assurément pas avec la même acuité.
Au nom de la continuité de nos prises de position que j'ai précédemment expliquées, parce qu'il en va finalement de notre honneur et de notre devoir s'agissant d'une question élémentaire importante et essentielle de justice, le groupe Nouveau Centre et apparentés est favorable à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi du groupe SRC nous donne aujourd'hui l'occasion d'aborder le sujet important des retraites agricoles, préoccupation que je partage avec nombre de mes collègues de la majorité. En dépit de la qualité du rapporteur – on peut dire qu'il a de la suite dans les idées – son texte n'a cependant pas résisté à l'analyse de la commission des affaires sociales.
Je veux, à mon tour, vous faire part de mes remarques avec toute la modération qui caractérise toujours mes propos.
La méthode et le calendrier sont discutables : j'ai le sentiment que, une fois de plus, vous nous proposez un tour en gabare sur la Dordogne à moins que ce ne soit balade en canoë ! (Sourires.) Je reste songeur et je me demande si le groupe SRC, habituellement si prompt à dénoncer le rôle supposé des groupes d'influence dans les débats de cet hémicycle, n'aurait pas tout bonnement choisi de mettre son temps de parole au service de quelque lobby régional ! (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
J'en veux pour preuve les propos introductifs de notre rapporteur ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ma seule certitude est que cette proposition de loi ne sert qu'à draper ou à camoufler de réelles manoeuvres électorales ! (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Sinon pourquoi inscrire aujourd'hui, alors que l'échéance approche, une proposition de loi qui a été déposée en 2007 ? (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La méthode du groupe socialiste est habituelle, en particulier sur ce sujet. En mars 2002, déjà, vous vous êtes empressés de légiférer sur le même sujet à deux mois d'importantes élections. Visiblement vous n'avez pas retenu la leçon : ça ne marche pas, le monde agricole n'est pas dupe ! Alors, évidemment, cela vous donne une tribune pour égrainer vos contrevérités habituelles avec toute la mauvaise foi que l'on vous connaît ! (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La réalité, c'est que cette majorité a non seulement hérité de vos promesses électorales, mais c'est elle et elle seule – car jamais vous n'avez apporté votre voix à l'adoption de quelque budget que ce soit – qui les a concrétisées.
Et cette majorité ne s'est pas arrêtée en si bon chemin, puisqu'elle a simplifié le dispositif de revalorisation des retraites, elle a relevé le plafond des pensions, elle a augmenté les pensions de réversion des personnes veuves tout en leur facilitant l'accès à la réversion des points de retraite complémentaire obligatoire dont, je vous le concède, vous avez eu l'idée.
Vous êtes comme les laboratoires pharmaceutiques, vous augmentez toujours la dose homéopathique vis-à-vis des plus faibles ! Voilà la vérité !
Ainsi, dans le seul budget de 2010, 57 millions d'euros sont consacrés à l'amélioration des retraites agricoles. La réalité, c'est que c'est cette majorité et elle seule qui a trouvé les solutions pour garantir l'équilibre financier du régime social agricole et qu'elle a aussi su préserver sa gouvernance en confortant les caisses de mutualité sociale agricole dans leur expertise et leur rôle de proximité
En vérité, monsieur le rapporteur, et je vous le dis en toute amitié, votre proposition de loi est contre-productive. Quelle idée saugrenue, en effet, que de prévoir à l'article 8 du texte originel un gage se référant aux articles 402 bis et 403 du code général des impôts ? Faut-il rappeler qu'il s'agit des droits sur les alcools, qui s'élèvent actuellement à 217,21 euros par hectolitre, que vous proposez tout simplement d'augmenter ? (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
J'imagine que les producteurs de Montbazillac et autres Bergerac seront ravis et vous adresseront leurs félicitations !
Certes, vous avez évité de recourir à l'article 302A du même code général des impôts qui, lui, concerne les taxes sur les tabacs, production à laquelle, je le sais, vous êtes très attaché. Votre message est clair : c'est la fin de la solidarité nationale, puisque le monde agricole devrait financer lui-même l'amélioration de son régime de retraite !
Si vous cherchiez à séduire les retraités agricoles c'est raté !
Finalement votre collègue socialiste, et néanmoins président de la commission des finances, vous a évité de commettre une erreur irréparable en maniant avec célérité le casse-noix de l'article 40. On ne peut que saluer sa clairvoyance !
De même, je veux dire mon intérêt pour les récentes déclarations de la première secrétaire du parti socialiste qui a pris des positions fortes sur l'évolution plus globale du régime des retraites en France. Il paraît sage, en effet, de se donner le temps d'une large concertation sur un sujet qui concerne l'ensemble de nos concitoyens, quelle que soit leur profession.
C'est là une attitude qui pourrait utilement inspirer le groupe SRC. Il n'est pas trop tard, mes chers collègues, de renoncer à défendre un texte moribond qui arrive à contretemps.
Pour toutes ces raisons, la majorité vous rendra un dernier service en rejetant cette proposition de loi. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je voudrais dire à M. Ayrault qui nous donne, avec beaucoup de pathos, des leçons sur la situation du monde agricole, qu'avant d'être député, j'étais agriculteur.
Je l'étais, notamment, lorsque vous étiez au pouvoir. J'ai connu de très graves crises…
… telles que les effondrements du cours de la viande bovine (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) ; j'ai connu la crise de la vache folle. Je n'avais pas le sentiment que cela troublait plus que cela la majorité de l'époque. Je vivais alors, monsieur Ayrault, avec moins de 700 euros par mois ! J'ai même vécu avec la moitié de la moitié de 700 euros par mois !
Vous ignorez une chose : mes vieux parents retraités qui touchaient, à l'époque, beaucoup moins que 500 euros par mois, me donnaient un peu d'argent pour passer le cap. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous ne connaissez visiblement pas la solidarité entre les générations. Je tenais donc à la verser au débat. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
C'est un sujet fondamental. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Telle est, mesdames, messieurs, ma contribution à ce débat qu'il conviendra de reprendre le moment venu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je tiens à indiquer, en préambule, à M. Herth que je suis, moi aussi, fils de paysans et que j'en suis fier. Je n'ai cependant absolument pas la même approche que lui.
Aujourd'hui, je ne vous parlerai pas de la crise agricole et du découragement des agriculteurs ; je voudrais simplement vous convaincre de l'absolue nécessité d'adopter la proposition de loi de mon collègue Germinal Peiro, car ce n'est pas une question politique, mais une question de dignité et de justice. Il s'agit du droit à la retraite, un droit auquel certains n'ont toujours pas accès en France parce que l'État néglige ses devoirs.
Aujourd'hui, les non-salariés agricoles, les aides familiaux, ceux qui ont passé leur vie à oeuvrer sur une exploitation, ne perçoivent que quelques centaines d'euros par mois. La proposition de Germinal Peiro est simple : reconnaître, enfin, le travail de toutes ces personnes – souvent des femmes – qui ont assumé, soutenu et épaulé le chef d'exploitation. Ce travail gratuit a nourri les Français et compte beaucoup dans la puissance agricole de la France. Cette proposition de loi permettrait à 360 000 personnes de vivre au-dessus du seuil de pauvreté. Elle serait, enfin, le signal de notre reconnaissance à leur égard.
François Fillon avait déclaré, le 9 septembre 2008, que le Gouvernement allait mettre en place « un véritable filet de sécurité qui garantira un montant minimum de retraite à tous les non-salariés agricoles justifiant de plus de dix-sept ans et demi d'activité ». Or qu'a fait le Gouvernement depuis pour aider les retraités de l'agriculture ? Il a timidement mis en place la réversion aux veuves de la retraite complémentaire obligatoire et il autorise les retraités à travailler un peu plus longtemps en cumulant emploi et retraite !
De 1998 à 2002, le Gouvernement de Lionel Jospin a réalisé un effort budgétaire sans précédent de plus de 4,3 milliards d'euros en direction des retraités agricoles.
Sur cette période, la retraite minimale pour une carrière complète, a été revalorisée de 29 % pour les chefs d'exploitation, de 45 % pour les personnes veuves, et de 79 % pour les aides familiaux et conjoints.
En novembre 2008, M. Barnier, alors ministre de l'agriculture, avait déclaré dans cet hémicycle à propos du montant des retraites agricoles : « Les chiffres que vous avez cités nous interpellent. J'ai souvent parlé de retraites insuffisantes et de situations indignes. »
Pour mettre un terme à cette situation indigne, pour reconnaître l'oeuvre des aidants familiaux dans notre agriculture, je vous demande donc de voter ce texte.
Hélas, la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable, pour des raisons de recevabilité financière.
Pourtant, le coût pour la collectivité de l'extension du régime aux conjoints et aux aides familiaux serait d'environ 400 millions d'euros pour l'ensemble des bénéficiaires, soit un ordre de grandeur compatible avec l'état des finances publiques.
La recevabilité financière du plan de relance n'a pas été mise en cause. L'accroissement de la dette publique n'a pas reçu d'avis défavorable.
À l'heure où les revenus agricoles ont diminué de plus de 30 % en un an, alors que notre agriculture connaît une crise majeure, je ne crois pas que 400 millions d'euros pour sortir les conjoints et les aides familiaux de la pauvreté posent un problème de recevabilité financière à nos finances publiques.
Comme cela a été dit lors des débats en commission, ce texte résulte d'une initiative parlementaire, le financement additionnel repose donc sur les seules cotisations des actifs. Il appartient à l'État de prendre ses responsabilités, comme l'avait fait le gouvernement de Lionel Jospin avec Jean Glavany.
Par conséquent, mes chers collègues, pour un peu plus de justice et de progrès, je vous demande de voter ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Tâchez de les écouter dans le calme, monsieur Chassaigne, comme vous-même avez été écouté.
M. Chassaigne a toujours été très présent lors des débats concernant la protection sociale agricole, ce qui n'est pas le cas de la plupart d'entre vous, mes chers collègues. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C'était habituellement beaucoup plus tranquille et beaucoup moins spectaculaire.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes réunis ce matin pour examiner la proposition de loi socialiste relative à l'extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux de l'agriculture, mais, en réalité, pour évoquer la question de prestations versées sans cotisations, point que n'a abordé directement aucun des orateurs socialistes.
Chacun, ici, s'accordera à reconnaître l'importance de cette question spécifique des limites de la retraite complémentaire obligatoire, qui constitue l'un des éléments particulièrement sensible d'un premier ensemble plus vaste, celui que l'on appelle les petites retraites agricoles et, parmi elles les « laissés pour compte », qui est malheureusement et singulièrement une expression consacrée, vous le savez, en matière de retraite des non salariés agricoles.
Nous ne disposons pas d'un temps suffisamment extensible pour faire le tour de la question du financement du régime des non-salariés agricoles, qui est pourtant la question essentielle, Germinal Peiro le sait bien, nous avons déjà eu l'occasion d'en discuter de façon beaucoup plus calme et moins démonstrative qu'aujourd'hui. Elle n'est pas du tout abordée dans le débat qui nous est proposé à travers cette proposition de loi. C'est pourtant le vrai sujet. C'est ainsi d'ailleurs, en abordant la question des financements et des solutions possibles, que nous avons pu en général faire avancer les choses.
Nous sommes nombreux, sur ces bancs, à côtoyer les femmes et les hommes du monde rural que nous représentons particulièrement.
Un grand nombre d'entre eux sont des ressortissants du régime agricole et dépendent à ce titre de la MSA, dont nous connaissons bien les enjeux. Nous sommes, presque de façon charnelle, très sensibles à de nombreuses situations personnelles, chacun l'a dit.
Parmi les personnes concernées, particulièrement chez nos aînés, madame la secrétaire d'État, il y a de nombreuses femmes qui ont bien souvent commencé à travailler avant l'âge de onze ans, sans statut et sans salaire, et qui vivent avec un montant de ressources d'une faiblesse absolument scandaleuse, probablement les plus basses du pays.
Tout ce que nous avons engagé depuis 2002, nous l'avons mis en oeuvre, année après année, et nous le poursuivons depuis 2007. Les avancées ont été considérables. Ce n'est pas terminé car c'est encore insuffisant, mais nous sommes mobilisés pour nous acheminer vers l'objectif des 80 % du SMIC pour tous les Français.
Je reconnais qu'il m'est arrivé moi-même de ferrailler face au gouvernement de ma propre majorité pour parvenir à une vision partagée avec l'État sur un sujet qui est souvent très complexe et qu'il est dommage de simplifier à l'extrême, qu'il est facile d'aborder avec des déclarations d'intention ou des incantations, en faisant en général semblant d'ignorer une partie des réalités qui sous-tendent la situation réelle. Je vais en dire quelques mots. Malheureusement, c'est ce qui ressort de la présente proposition de loi.
(Mme Catherine Vautrin remplace M. Maurice Leroy au fauteuil de la présidence.)
Le financement du régime, c'est un enjeu que je suis au moins obligé de citer, à défaut d'en développer tous les tenants et aboutissants. Je me suis attaché, lorsque j'étais rapporteur spécial du BAPSA, puis en tant que président du comité de surveillance du FFIPSA, à défendre la reconnaissance de l'intégrité de ce régime et à assurer précisément son financement par des ressources pérennes. En effet, il s'agit d'un régime particulier, qui n'a rien à voir avec les régimes spéciaux.
Il est particulier, en premier lieu, parce qu'il n'est pas géré de la même façon que le régime général, il l'est spécifiquement par la caisse centrale et les caisses régionales des mutualités sociales agricoles. Il apparaît d'ailleurs qu'il est plutôt mieux géré que le régime général. Il ne s'agit pas d'une caisse nationale, mais d'une gestion qui fonctionne en subsidiarité, les décisions étant prises d'abord dans les territoires, avant de remonter démocratiquement, grâce à des milliers de représentants élus, jusqu'au niveau central.
Je le répète, sa gestion est exemplaire, mais elle a surtout l'avantage de permettre aux femmes et aux hommes du monde rural de maîtriser leur destin, de piloter une organisation centrée autour de la personne, de développer une ingénierie sanitaire et sociale très riche, innovante, diverse, sur tout le territoire national.
Dans ce cadre, les MSA gèrent pour leurs ressortissants les quatre branches, famille, maladie, travail et vieillesse. Ces branches sont gérées dans le seul cadre du monde agricole, même si deux d'entre elles sont à présent adossées au régime général. Ce n'est pas un régime spécial au moins pour la bonne raison, essentielle, qu'il y a parité du rapport entre cotisations et prestations avec le régime général. C'est un élément très important, que vous proposez de remettre en cause une fois de plus, en affaiblissant, ce faisant, le régime.
Simplement, il y a eu un problème au cours des dernières décennies, dû au grave déséquilibre démographique de la population agricole, et, de la même façon que la démographie s'équilibre à l'intérieur du régime général, on a créé en 1975 un mécanisme de compensation démographique avec le régime général, qui est venu abonder le régime agricole au fur et à mesure que la population agricole baissait et, avec elle, la part des prestations, qui représentent aujourd'hui à peu près 20 % des ressources.
Cette compensation n'est pas un cadeau, elle est normale ; elle obéit à un principe de répartition solidaire des cotisations de l'ensemble des travailleurs, qu'ils soient salariés ou non, et quel que soit le régime auquel ils cotisent : c'est la solidarité interprofessionnelle. À aucun moment, chers collègues socialistes, vous ne l'avez évoquée. Cette compensation, si elle est importante, est incomplète. Pour le reste, il existe un pacte entre la nation et le monde agricole, qui décharge au fond les régimes sociaux ; c'est l'État qui finance la différence.
Ainsi, l'extension de la RCO à de nouveaux non-cotisants n'a rien à voir avec la problématique de revalorisation des petites retraites, et c'est là que, comme le disait Antoine Herth, vous envoyez le régime agricole dans le mur.
L'important, c'est d'abord évidemment d'élargir l'accès aux retraites de base, aux pensions de réversion et au minimum vieillesse et, surtout, d'en organiser le financement pour les augmenter.
Vous réécrivez l'histoire de façon assez étonnante. Vous parlez de cinq années d'attentisme où vous ne relevez que la mensualisation des retraites. Il faut donc rappeler la réalité : lorsque nous avons été élus en 2002, nous avons découvert dans le BAPSA une créance abyssale sur l'État, sans le début de la moindre réflexion sur son financement.
Nous avons trouvé quatre années entières de report de charges, car c'est l'ensemble du régime que vous ne financiez pas. Ce n'était pas du tout la faute des gestionnaires du régime ; cela relevait de votre seule responsabilité, et vous laissiez littéralement pourrir la situation. Cette situation, nous l'avons assainie, peu à peu, l'État payant sa créance. Il a fallu du temps. Surtout, nous avons pris la décision de mettre en place un financement pérenne avec la taxe sur les véhicules de société, que vous avez contestée quand nous l'avons proposée à l'Assemblée nationale.
Puis, nous nous sommes attaqués au financement de la retraite complémentaire obligatoire pour les retraités qui n'avaient pas cotisé. C'était une mesure généreuse, votée à l'unanimité. Vous revendiquez aujourd'hui de l'avoir mise en place, sauf que vous n'aviez prévu aucun financement pour cela, sinon du déficit. Le gouvernement de Lionel Jospin vous avait donné l'aval comme par hasard moins d'un mois avant l'élection présidentielle, ce qui ne vous a pas beaucoup réussi. Vous ne saviez pas comment la financer, c'est nous qui l'avons fait.
Vous dites le contraire dans l'exposé des motifs !
Puis nous avons engagé la mise en oeuvre des préconisations du rapport Garnier, fruit d'un travail de fond, que vous vous permettez de qualifier de « tardive augmentation minime »,…
…ce qui est faire preuve d'un mépris absolument inouï, alors que vous n'aviez abordé ni la question de la simplification du dispositif de revalorisation des retraites ni celle de leur augmentation. L'application de ce plan s'est faite à la suite des propositions que nous avions faites avec Marc Le Fur et Daniel Garrigue.
Nous nous sommes attaqués aux vrais problèmes, ceux des seuils ouvrant des droits, faisant passer le nombre d'années de carrière exigible de 37,5 années à 22,5 ans, bientôt à 17,5 ans pour bénéficier du montant minimum de retraite. Nous avons supprimé les coefficients de minoration. Nous avons aussi prévu de reverser au conjoint survivant 54 % des points de RCO attribués à titre gratuit à un chef d'exploitation. Nous allons relever le plafond au-dessus duquel la majoration de retraite de base ne peut être servie.
J'ai travaillé sur le sujet. Je ne débarque pas, contrairement à vous, monsieur Mallot.
Je n'en donne pas toute la liste, à laquelle il faut rajouter la revalorisation de plus de 11 % depuis le 1er janvier des pensions de réversion pour toutes les personnes veuves dont les ressources sont inférieures à 800 euros, sans oublier la revalorisation du minimum vieillesse, l'ASPA aujourd'hui, et l'élargissement de l'accès à un plus grand nombre.
Chers collègues, j'ai souhaité apporter cette contribution au débat afin de mettre en lumière toute la réalité de cette proposition de loi. Elle feint de mépriser tout le travail de réforme du financement et de progrès social que nous avons accompli depuis la précédente législature. Elle dénie l'accélération que nous sommes en train de lui donner. Elle accuse ce progrès d'être insignifiant alors que les prestations qu'elle propose avec l'extension de la RCO lui sont tout simplement inférieures.
Enfin, les évolutions que nous donnons et allons donner à ces mécanismes représentent une vraie réforme, une intégration des retraités agricoles aux mêmes droits que ceux de l'ensemble de nos concitoyens, pour aller le plus rapidement possible vers les 80 % du SMIC, tout en conservant la spécificité de leur régime.
J'ai évoqué les mécanismes de ce régime pour bien différencier deux questions : celle du montant des retraites et des seuils, d'abord, ce qui passe par l'organisation de leurs financements et concerne plusieurs centaines de millions d'euros, celle de la RCO telle qu'elle est présentée par nos collègues socialistes ensuite.
Ce fut une mise en place historique et unique parce qu'elle correspondait pour partie au paiement d'une prestation pour laquelle il n'y avait pas eu de cotisation. Il n'y a pas d'autre exemple d'un tel effort dans notre pays. Les partenaires sociaux n'ont pas été sollicités, l'État, sous notre gouvernement, l'a totalement prise en charge.
Non seulement nos collègues socialistes font semblant d'ignorer les mesures qui sont à l'oeuvre, peut-être pour ne pas rester à la traîne, mais ils masquent également le rendez-vous que nous aurons cette année sur la question des retraites et de l'ensemble de la branche vieillesse. Les solutions que nous devront mettre en oeuvre à ce moment-là devront être plus partagées avec l'ensemble des partenaires sociaux et, bien sûr, d'une plus grande ampleur. En somme, elles devront aller au-delà de l'incantation et des fausses solutions partielles et spectaculaires, et être donc beaucoup plus efficaces que ce qui nous est présenté.
Il me semble que ce grave sujet mérite mieux qu'une simple ruse électoraliste, imaginée bien loin des exigences du régime et de notre modèle social, et évidemment conçue comme une rampe de lancement vers les prochaines échéances régionales.
C'est parce que nous conserverons un très haut degré d'exigence sur ce sujet lors de notre prochain rendez-vous sur le financement des retraites,…
…que le groupe UMP rejettera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je souhaite tout d'abord faire observer à notre collègue Antoine Herth que le mouvement des retraités agricoles n'est pas un simple lobby régional. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.) C'est un mouvement d'ampleur nationale qui s'est développé dans les années quatre-vingts et quatre-vingt-dix face à une situation d'injustice caractérisée. J'ai rencontré, non loin de Strasbourg, les retraités agricoles alsaciens ; je souhaiterais que M. Antoine Herth fasse de même ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ceux-là existent aussi ; ils sont nombreux et se font entendre.
C'est grâce à ce mouvement qu'une prise de conscience a eu lieu et que, depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, des dispositions ont été prises, sous les majorités successives.
J'avais présenté en 1997, en tant que parlementaire en mission, un programme de revalorisation pluriannuelle des retraites agricoles, et je reconnais que c'est le gouvernement de Lionel Jospin qui l'a mis en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Toutefois, je fais observer à Germinal Peiro que son amendement sur la RCO…
Oui, en raison de l'article 40, c'était une proposition de loi.
Cette proposition a certes été votée fin 2001, mais c'est sous le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin que le dispositif a été financé.
Par la suite, nous avons continué à avancer, sous le gouvernement de Dominique de Villepin, avec la remise en cause des minorations.
Il est vrai néanmoins que, depuis 2007, malgré les engagements pris lors des élections présidentielles, les promesses faites sur différentes estrades, le mouvement est interrompu, et que la rupture est évidente. (Rires et applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La situation est grave, en raison de deux problèmes majeurs.
Le premier est toujours celui des minorations. Je déplore, sur ce point, que la prochaine avancée ne soit prévue que pour janvier 2011, car nous pourrions aller plus vite. C'est une injustice flagrante puisque, à la différence des autres régimes, les retraites agricoles ne sont pas proportionnelles au temps de cotisation et que, en-dessous d'un certain seuil, de très fortes minorations s'imputent sur le montant des pensions.
Le second problème tient au minimum qui doit être garanti aux retraités agricoles. Des dispositions ont certes été votées dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, mais les critères sont tellement restrictifs que la moitié seulement des crédits a été utilisée. Et pour l'année 2010, alors qu'il y a près de deux millions de retraités agricoles, les sommes en cause n'atteignent que 17 millions d'euros. Cela prouve bien qu'il y a un problème dans la mise en oeuvre de ce dispositif.
De très nombreux retraités agricoles touchent, après des carrières complètes, des pensions plus proches de 500 euros que des 800 euros du minimum. Qui plus est, l'écart entre ce minimum, d'une part, et le minimum vieillesse et les pensions du régime général, d'autre part, a continué à se creuser. En outre, bien souvent, les bénéficiaires de ce dispositif ont été touchés par le revenu fiscal de référence. Le bouclier fiscal pour les uns, le revenu fiscal de référence pour les autres !
Je pense qu'en matière de retraites, il faut chercher le consensus, notamment pour ce qui est des retraites agricoles.
J'avais déposé sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale plusieurs amendements qui avaient reçu le soutien d'une partie de mes collègues.
Je dis très clairement que je voterai cette proposition de loi. La procédure utilisée est peut-être un détournement, mais il n'est pas possible de procéder autrement à cause de l'article 40. Je voterai cette proposition parce c'est une proposition de justice et qu'elle met en jeu la solidarité nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, chers collègues, le projet de loi de modernisation de l'agriculture présenté la semaine dernière en conseil des ministres oublie une fois de plus la situation difficile des conjoints et aides familiaux de l'agriculture, tout particulièrement la détresse dans laquelle se trouvent ceux d'entre eux désormais à la retraite et dont le niveau de vie est indigne d'un grand pays agricole comme le nôtre. Le projet de loi s'adresse d'abord au secteur agricole et très peu aux hommes et femmes qui le font vivre ; on ne peut que le regretter.
Nous le savons, notre agriculture est performante et compétitive ; pourtant nos agriculteurs, de moins en moins nombreux, voient leurs revenus chuter. Les derniers chiffres sont catastrophiques : on estime la baisse du revenu des agriculteurs à 34 % en 2009, après une baisse de 20 % en 2004.
Catastrophique, la réalité sur le terrain l'est encore bien plus que les statistiques. Le Lot n'échappe pas à cet appauvrissement généralisé du secteur. Mais que dire alors de la situation des retraités agricoles ? J'ai eu à plusieurs reprises l'occasion de dénoncer ici même cette injustice, tout particulièrement la situation de ceux des retraités qui ne sont pas salariés agricoles : les conjoints et aides familiaux.
Je crois pouvoir dire qu'ils sont les oubliés de la République depuis maintenant plusieurs années, années qui coïncident avec des politiques menées par la même majorité parlementaire qu'aujourd'hui. En effet rien n'a été fait pour eux, ou si peu, sur le plan législatif depuis la loi du 4 mars 2002 tendant à la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.
Voulue et adoptée par la gauche et la « majorité plurielle », comme on l'appelait alors, cette réelle avancée s'est inscrite dans un mouvement de fond en faveur de la justice sociale, lequel a également visé l'augmentation du niveau des pensions des retraites du secteur agricole.
C'est de cette époque également que date la mise en place du statut de conjoint collaborateur, qui a permis aux femmes d'exploitants d'acquérir une place véritable dans l'exploitation, au-delà du statut domestique d'épouse. Ce fut l'occasion de reconnaître enfin leur travail si précieux.
Aujourd'hui, malgré les discours du Président de la République, dans le Jura en septembre 2009 ou, plus récemment, dans l'Orne lors de ses voeux à la France rurale, plus aucune amélioration statutaire concernant ces catégories n'est à mettre au crédit du Gouvernement. La volonté politique ne peut se traduire uniquement par des discours ; elle doit se traduire par des actes, des décisions, des textes votés. Or, en la matière, on attend désespérément de l'actuelle majorité.
Pourtant, l'article 5 de la loi du 4 mars 2002 dispose que le Conseil supérieur des prestations sociales agricoles est chargé de faire des propositions sur l'extension du dispositif aux conjoints et aides familiaux. À l'époque, il avait été convenu qu'un équilibre économique devait être trouvé pour le dispositif afin d'enclencher le mouvement. C'est ainsi que la volonté d'aboutir à une solution partagée et consensuelle a conduit le législateur à limiter le bénéfice de la retraite complémentaire obligatoire aux seuls chefs d'exploitation et d'entreprise agricole. Toutefois, la volonté d'étendre ce régime aux conjoints et aides familiaux a été affichée depuis le début.
C'est donc l'objet de la présente proposition de loi, que les députés radicaux de gauche ont cosignée et dont ils approuvent la totalité du dispositif. Il s'agit bien pour nous de parachever le travail législatif entamé en 2002. Si la reconnaissance des conjoints a été améliorée, il convient désormais de prolonger cet effort en leur ouvrant droit à la retraite complémentaire obligatoire.
Pour les aides familiaux, l'extension est également très attendue. Aujourd'hui, en contrepartie de leur aide, le chef d'exploitation ou d'entreprise est tenu de les nourrir et de les loger, mais non de rémunérer le travail qu'ils fournissent. Ce statut minimal permet fort heureusement d'obtenir une protection sociale. C'est pourquoi, en leur accordant le bénéfice de la retraite complémentaire, nous irions plus avant dans la reconnaissance non seulement de leurs droits mais plus encore de leur activité et de leur existence sociale au sein d'un secteur de plus en plus sinistré.
Madame la secrétaire d'État, chers collègues de la majorité, vous porterez la responsabilité de l'échec de cette proposition, et surtout vous devrez expliquer à ces conjoints et aides familiaux de l'agriculture que ce texte du groupe SRC était irrecevable. Vous devrez expliquer l'inexplicable !
D'autant plus que les grandes orientations préconisées par cette proposition de loi font consensus entre la majorité et l'opposition. Rappelez-vous, mes chers collègues : le Président de la République en avait fait l'une de ses promesses de campagne. Alors pourquoi attendre ? Pourquoi la majorité préfère-t-elle que le débat sur cette question soit lancé ultérieurement, au moment de la réforme du système des retraites,…
…au risque de diluer cette problématique fondamentale du régime des conjoints et aides familiaux au milieu d'une multitude de mesures ?
Pourquoi risquer de reléguer ce sujet pourtant essentiel au second plan, voire de le faire disparaître, lors de la réforme générale ? Pourquoi ne pas lancer le vaste débat qui s'impose dès maintenant et adopter les mesures nécessaires ? La situation de tant de conjoints et aides familiaux est désormais critique ; ils ne peuvent plus attendre.
J'en appelle donc aux députés de la majorité. Mesdames, messieurs, quand on incarne la souveraineté nationale, il est des moments où il faut avoir le courage de ses choix et plus encore de ses votes, des moments où il faut prendre ses responsabilités de législateur en adoptant des textes attendus et nécessaires pour ceux qui souffrent et attendent justice et reconnaissance. C'est donc sans hésiter que les députés radicaux de gauche apporteront leurs suffrages à ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous débattons d'un sujet grave, sérieux, qui concerne de nombreux concitoyens, et je ne suis pas là pour jouer la comédie.
Sur les bancs de l'opposition, cher collègue, nombreux sont les agriculteurs et agricultrices.
Il faut croire, mesdames et messieurs, que l'histoire a tendance à se répéter. Décembre 2001 : notre assemblée examinait la proposition de loi de notre collègue Germinal Peiro tendant à la création d'un régime complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles. Janvier 2010 : notre même collègue présente un second texte, une proposition de loi relative à l'extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux de l'agriculture.
Ce texte vise à rétablir un équilibre, voire à réparer une injustice, en étendant le régime de RCO prévue par la loi de 2002 à deux catégories qui n'en bénéficient pas encore, à savoir les conjoints et les aides familiaux. Je rappelle que, selon le code rural, les aides familiaux comprennent tous « les ascendants, descendants, frères, soeurs et alliés au même degré du chef d'exploitation ou d'entreprise et qui participent à sa mise en valeur comme non-salariés ».
L'incompréhension est d'autant plus grande que le chef de l'État indiquait en 2007 vouloir se saisir de la question. Or rien n'a été fait. Il s'agit là d'un nouvel effet d'annonce, sur un sujet très important et qui mérite toute notre attention. L'extension défendue dans cette proposition est l'une des doléances des retraités agricoles, les « parents pauvres » de notre système social.
La situation inacceptable qu'ils subissent n'a que trop duré. Il nous appartient, en adoptant ce texte, de rétablir la parité entre, d'une part, les exploitants et, d'autre part, les conjoints et aides familiaux. Ces derniers perçoivent les retraites les plus basses de tous les régimes d'assurance vieillesse : environ 500 euros par mois, en dessous du seuil de pauvreté ! Les femmes subissent en outre une discrimination injuste, en ce qu'elles touchent moins pour une cotisation égale, alors qu'elles ont participent pleinement à la vie de la ferme, aux travaux des champs, à la gestion de l'exploitation agricole.
C'est pourquoi nous proposons, comme le suggère le président de l'Association départementale des retraités agricoles de la Dordogne, l'ADRAD, de relever le niveau de retraite à 85 % du SMIC, soit une revalorisation de 80 euros par mois du montant de la retraite.
Notre collègue de l'UMP a tout à l'heure critiqué des oublis dans nos propos, mais la majorité n'oublie-t-elle pas, quant à elle, qu'il est fort possible de trouver des ressources financières, dans les niches fiscales, dans le bouclier fiscal ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) De même, nous pouvons taxer les indemnités des grands patrons du CAC 40. Hier, une question a été posée au Gouvernement : quand un patron est sur le point de percevoir 2 millions d'indemnités par an, soit trois ou quatre SMIC par jour, c'est qu'on peut trouver de l'argent pour revaloriser les retraites agricoles de 80 euros par mois ! (Mêmes mouvements.)
Cette proposition de loi, vous l'aurez compris, chers collègues, constitue une seconde avancée pour nos concitoyens agriculteurs, ici présents, durement touchés par des crises qui n'en finissent pas.
Face à la hausse des prix des produits de première nécessité, du coût de l'énergie, aux déremboursements en matière de santé et aux taxes que doivent supporter les malades et les familles, la faible revalorisation des pensions de retraite est une forme de provocation, en particulier à l'égard des retraités agricoles ! La grande précarité que connaît le monde agricole met, une fois de plus, en danger la vie de nos territoires ruraux.
Je conclus en vous demandant qu'ensemble, madame la secrétaire d'État, nous fassions un geste significatif vers les retraités agricoles pour leur marquer la reconnaissance de la nation pour tous les efforts qu'ils ont fournis pour l'entretien et la valorisation de nos territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous nous retrouvons aujourd'hui pour aborder la proposition de loi, déposée par notre collègue Germinal Peiro, visant à étendre le régime de la retraite complémentaire obligatoire aux autres non-salariés agricoles que sont les conjoints et les aides familiaux.
Tout d'abord, je tiens à saluer la qualité du travail accompli par le rapporteur, même si je note que cette proposition de loi a été déposée il y a deux ans – ce qui relativise un peu les choses.
Nous sommes tous très attachés à notre agriculture française et à celles et à ceux qui la font vivre au quotidien, souvent dans des conditions difficiles. Le travail est ingrat, s'effectue dans des conditions souvent pénibles ; il ne faut compter ni sa peine, ni ses heures, ni ses efforts ; il faut aussi composer avec une nature capricieuse qui, en quelques minutes, peut ruiner plusieurs mois d'un dur labeur. Être agriculteur, à coup sûr, n'est pas un métier comme les autres. C'est un engagement total, beaucoup de sacrifices et parfois même un véritable sacerdoce. C'est un métier où les remises en question sont permanentes et les incertitudes une partie intégrante, malheureusement, du quotidien. De plus, un agriculteur est aujourd'hui un vrai chef d'entreprise qui doit sans cesse s'adapter aux aléas climatiques, aux variations des marchés, aux progrès technologiques, à la rigueur des réglementations, aux exigences des consommateurs.
C'est pourquoi je me bats depuis toujours pour qu'une attention tout à fait spécifique soit portée aux agriculteurs par les pouvoirs publics. Qu'après toute une vie de travail, les agriculteurs puissent bénéficier d'une retraite décente me semble une évidence et un objectif à atteindre très rapidement. En effet, notre agriculture est au coeur de tous les enjeux : ceux de la souveraineté alimentaire des peuples, de la préservation des ressources naturelles de notre planète, des équilibres économiques de nos territoires, de notre modèle de croissance pour demain.
Pour être constamment à l'écoute et aux côtés des agriculteurs, je mesure leurs attentes. Dans le contexte sans précédent de crise que nous connaissons, ces attentes sont exacerbées.
En effet, les agriculteurs français, nous le savons tous, subissent la crise la plus grave que le secteur agricole, toutes productions confondues, ait connue ces trente dernières années. Leur désespoir est réel. Aujourd'hui, beaucoup ne peuvent plus vivre dignement de leur métier en raison d'une baisse de leur revenu. Après avoir baissé de 20 % en 2008, leur revenu net a encore chuté de 32 % en 2009, retombant au niveau d'il y a vingt ans. C'est inacceptable ! Celles et ceux qui exercent ce beau et dur métier méritent toute notre attention, notre mobilisation et notre plus grand respect.
Notre majorité n'est pas restée immobile : elle s'est toujours mobilisée pour répondre aux attentes bien légitimes des agriculteurs – Antoine Herth et Yves Censi l'ont rappelé. Je salue le travail très important qu'accomplit depuis des semaines le ministre de l'agriculture, Bruno Le Maire, pour convaincre nos collègues européens de la nécessité de parvenir à des prix plus stables et plus rémunérateurs. Chaque agriculteur doit pouvoir vivre du prix de son travail et de sa production ! Je sais, madame la secrétaire d'État, que ce dossier des retraites est pour vous une priorité et je vous remercie de faire en sorte que, le moment venu, satisfaction soit donnée aux conjoints et aides familiaux de l'agriculture.
Dans ce contexte, plus que jamais, il est de notre devoir d'être aux côtés de nos agriculteurs et de les accompagner. Tel est l'objectif de la proposition de loi de Germinal Peiro qui nous est soumise aujourd'hui. Nous sommes tous ici présents convaincus du bien-fondé de ce texte.
Comme je l'ai d'ores et déjà précisé en commission des affaires sociales la semaine dernière, je ne renie pas mes propos exprimés en 2002 lors du vote du nouveau régime complémentaire obligatoire. Je déplorais alors l'exclusion des conjoints et des aides familiaux de ce régime. Mes paroles étaient sincères, et je reste favorable à une amélioration de leur prise en charge.
Nos agriculteurs méritent toute notre considération et surtout une large adhésion, dépassant les clivages politiques stériles et indignes de la gravité des problèmes, pour remédier à leur situation. Des évolutions ont eu lieu en France depuis une vingtaine d'années et tous les ministres successifs, toutes tendances politiques confondues, y ont apporté leur contribution.
Des questions importantes demeurent encore, auxquelles nous avons le devoir d'apporter une réponse concrète et responsable telles que, par exemple, la revalorisation significative des petites retraites agricoles. Comme vous l'avez fort justement précisé dans votre rapport, monsieur Peiro, les montants des pensions des deux millions de retraités non salariés agricoles – sur les quatre millions de retraités agricoles que compte notre pays – sont parmi les plus bas de tous nos régimes sociaux. De nombreux efforts ont été entrepris grâce à l'implication des différents ministres successifs, grâce à la mobilisation de nombreux parlementaires de tous bords et grâce à la ténacité des associations qui défendent les intérêts des agriculteurs. Mais, comme chacun le sait, la situation reste perfectible.
S'agissant des veuves de chef d'exploitation, le bénéfice de la réversion de la RCO doit être accordé à tous les conjoints survivants éligibles sans faire de distinction selon l'origine des points.
Nous sommes tous conscients que l'examen de cette proposition de loi, malgré son irrecevabilité, a permis un échange constructif sur de vraies questions à la veille des prochains débats sur les retraites. Ces questions appellent de vraies réponses dans les mois à venir. Il en va de notre crédibilité vis-à-vis de nos agriculteurs. Il ne sera ni compris ni acceptable de reporter indéfiniment des décisions nécessaires et attendues.
Mais les enjeux que soulève la proposition de loi relative à l'extension du régime de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux de l'agriculture ne peuvent être dissociés de la discussion d'ensemble sur les régimes de retraite. Bien évidemment, le risque existe que lorsque nous en débattrons, certains de nos collègues, moins sensibles aux difficultés spécifiques des agriculteurs, nous reprochent de vouloir porter des revendications trop catégorielles. Soyons alors tous aussi unanimes sur la nécessité d'agir tout de même spécifiquement en direction du monde agricole pour convaincre nos collègues de l'urgence à prendre les mesures sociales attendues. (Applaudissements sur divers bancs.)
Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les retraités agricoles attendent. Mais le débat se clarifie. Le groupe SRC, soutenu par le groupe GDR, dans la logique de la loi Jospin-Peiro de 2002, propose l'extension de la RCO aux conjoints d'exploitants et aux aides familiaux. Il s'agit en effet de remédier à des situations indignes – ce qualificatif a été utilisé par des députés UMP en commission, et je suis donc surpris qu'ils ne le reprennent pas dans l'hémicycle.
En commission, la droite nous a répondu : « On verra plus tard, au moment du débat sur les retraites. » Aujourd'hui, en l'absence du ministre de l'agriculture, elle nous dit, par la voix de Mme la secrétaire d'État et du porte-parole de l'UMP sur ce texte : « Non, on ne verra pas. C'est non. » Nous saluons évidemment les uns et les autres l'évolution du groupe Nouveau Centre qui, lui, a clairement indiqué qu'il voterait cette proposition de loi. Le porte-parole de l'UMP a tenu tout à l'heure des propos excessifs – embarrassé, il a tenté de sauver la face – en nous accusant étrangement de soutenir des lobbies régionaux.
Je ne sais pas ce qu'est un lobby régional, mais je sais quels lobbies soutient l'UMP !
…pour les remercier de leur aide et pour prendre à leur égard des engagements, notamment celui de ne pas supprimer le bouclier fiscal. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) C'est un engagement comme un autre. On a les lobbies qu'on peut. Les vôtres sont connus. (Mêmes mouvements.)
On ne joue pas, nous, dans la même catégorie, chers collègues de l'UMP !
Le débat sur les retraites portera bien sûr sur l'âge et sur les durées de cotisation, mais il y a deux problèmes que nous ne pourrons pas éviter de traiter si l'on veut trouver le consensus nécessaire. Le premier, c'est la prise en compte de la pénibilité dans les régimes de retraite. Et les agriculteurs savent ce qu'est la pénibilité ! Le second, c'est le montant des retraites versées. On évoque souvent le programme du Conseil national de la Résistance. Je rappelle qu'il s'agissait de mettre en place des dispositifs de retraite permettant de fournir un revenu décent à celles et ceux qui avaient achevé une dure vie de travail. C'est sous cet angle qu ‘il faut aborder la question, et nous le faisons : nous avons fait des propositions, notamment dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 puis pour 2010 ; certaines ont été soutenues par des députés UMP isolés, mais toutes ont été rejetées.
Il faut donc en revenir au dispositif Jospin-Peiro de 2002 qui a constitué une avancée importante en augmentant de 29 % la pension de 900 000 retraités. Depuis lors, la revalorisation des retraites agricoles fait du sur-place, tous les orateurs précédents l'ont rappelé.
Des annonces ont été faites à une époque par le Président de la République et par le ministre de l'agriculture d'alors, M. Barnier, mais elles ont été suivies d'effets extrêmement faibles. L'objectif du PLFSS d'atteindre 639 euros par mois pour les anciens exploitants et 506 euros par mois pour leur conjoint a abouti à un échec relatif : à peine 10 % des agriculteurs retraités ont bénéficié du dispositif, pour des montants dérisoires – un euro par jour en moyenne et, pour la moitié d'entre eux moins d'un euro, une pièce jaune par jour. C'est tout de même par grand-chose. Je rappelle que le budget prévoyait 116 millions d'euros pour cette mesure : à peine la moitié a été consommée. Il existe donc une marge de manoeuvre.
On nous annonce à nouveau des avancées pour 2010. Elles devraient porter sur 60 000 agriculteurs – et non 600 000 comme pourrait le faire croire une coquille dans le rapport de la commission –, qui bénéficieraient de 20 euros de plus par mois, soit une pièce jaune par jour…
Quelles sont les revendications des retraités agricoles ? Le montant de la pension minimum pour une carrière complète à 85 % du SMIC, soit 880 euros ; le relèvement du plafond de ressources du ménage à 880 euros pour tous les régimes ; la suppression de la prise en compte de la bonification pour enfant dans le calcul du plafond ; la suppression du critère de neutralisation des années rachetées de conjoint participant et de l'exigence d'une carrière complète pour les conjoints ; enfin, dès 2010, l'abaissement de la durée maximale d'assurance dans le régime non salarié agricole à dix-sept ans et demi au lieu de vingt-deux ans et demi. À cet égard, la proposition de loi présentée par Germinal Peiro a l'avantage de pousser à l'action et de pouvoir produire un résultat concret pour les uns et pour les autres.
On nous parle évidemment de la question du financement. Cela coûterait 400 millions d'euros pour 360 000 bénéficiaires. Je rappelle que le bouclier fiscal coûte à la République plus de 500 millions d'euros. Il y a donc des ressources trouvables. Je rappelle aussi que le salaire pour emploi fictif de M. Proglio – étant à 100 % affecté à EDF, il ne devrait rien percevoir de Véolia – s'élèvera à 450 000 euros par an, soit un siècle de retraites agricoles. Enfin, pour mémoire, j'indique que l'abaissement à 5,5 % de la TVA sur la restauration représente un coût de 2,5 milliards d'euros pour les finances publiques. Il y a donc, je le répète, des ressources. L'argument du financement pour s'opposer à ce texte ne tient pas ! Si l'UMP ne vote pas le dispositif proposé, c'est qu'elle le rejette sur le fond et qu'elle est totalement indifférente à la situation pourtant indigne des bénéficiaires – si l'on peut dire – des retraites agricoles. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ce débat serait mal venu, nous dit-on. Ce n'est d'ailleurs pas une nouveauté : à chaque fois que la gauche introduit un débat dans cet hémicycle, ce n'est jamais ni l'heure, ni le temps, ni le moment. Madame la secrétaire d'État, vous êtes encore nouvelle, aussi voulais-je vous rappeler que nous qui le sommes un peu moins, nous avons l'habitude d'entendre toujours ces mêmes arguments et qu'ils ne changent pas grand-chose à ce que nous pensons. Non seulement ce débat serait malvenu mais, d'après ce que vous nous avez dit, on devrait même se contenter de ce qui existe déjà au motif que la solidarité soutient déjà beaucoup le régime agricole. Certes, ce dernier point est vrai, mais pourquoi le soutient-elle ?
Jean Mallot vient d'évoquer le programme du Conseil national de la résistance : le système de retraite est fondé sur le financement des retraites par les cotisations des actifs. Je reconnais avec vous que les choses ont beaucoup changé. Mais il reste que les enfants des retraités de l'agriculture cotisent aujourd'hui dans d'autres régimes que celui de leurs parents, ce qui rend nécessaire et normale la mise en place d'une compensation. À quel niveau ? Cela mérite d'être précisé pour chacun, mais, en tout cas, cette compensation est légitime. Vous viendrait-il à l'idée de reprocher aux anciens mineurs de percevoir une retraite qui n'est plus assise sur les cotisations de mineurs en activité ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la secrétaire d'État, ce chapitre est clos : vous pourrez demander à vos services de ne plus vous suggérer de défendre à la tribune ce genre d'arguments ; ils sont à la fois malvenus et inopérants.
Voter ce texte serait coûteux nous dites-vous aussi. Certes, mais que représentent les quelque 500 millions d'euros que vous évoquez par rapport aux 2,5 milliards distribués avec la suppression de la TVA sur la restauration,…
…et par rapport aux montants en jeu avec le bouclier fiscal.
Nous parlons de 500 millions pour améliorer la retraite de nos concitoyennes – la plupart des personnes concernées sont des femmes – qui, aujourd'hui, touchent moins de 4 000 euros par an.
Ainsi, le salaire de M. Proglio représente cinq cents fois la retraite annuelle d'une conjointe d'exploitant agricole. Et certains trouvent cela tout à fait normal ! Nous vivons dans un pays extraordinaire : quand cela arrange, on trouve les moyens, mais quand ce n'est pas le cas, et malgré la détresse des paysans que l'on ne manque pas de venir décrire à la tribune, on prétend qu'on ne peut pas payer.
Madame la secrétaire d'État, vous avez évoqué les 8 milliards d'euros qu'il a fallu éponger, et vous avez raison. Mais d'où provient cette ardoise ? En 2002, selon le ministre de l'agriculture de l'époque, M. Gaymard, elle s'élevait à 600 millions d'euros, soit, peu ou prou, celle que nous avions trouvée en 1997, ce qui signifie que nous avions financé l'ensemble des mesures mises en place par notre majorité, tout comme celles prises avant notre arrivé au pouvoir. Nous avons seulement appliqué le principe de la continuité de l'État. (Approbation sur les bancs des groupes SRC et GDR.) De la même façon lorsque la droite est revenue aux affaires, il restait à financer une partie de la retraite complémentaire obligatoire, mesure qu'elle avait votée, ce qu'elle n'aurait pas fait si elle avait estimé qu'elle n'était pas bonne. Pourtant, monsieur Herth, vous qui êtes, ce matin, le responsable du groupe UMP, si j'ai bien compris vos propos, les agriculteurs retraités doivent savoir que vous n'auriez pas voté la RCO puisque vous avez estimé qu'il était scandaleux que nous l'ayons fait.
Vous n'avez jamais été que dans la majorité, mais je vous souhaite d'être un jour dans l'opposition. Vous constaterez alors que si elle ne vote pas les budgets, c'est parce qu'elle est en désaccord avec certaines mesures. Cela ne signifie pas qu'elle s'oppose à des revalorisations ; au contraire, son vote est négatif parce qu'elle estime que ces dernières sont insuffisantes. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
D'ailleurs, depuis 2002, il n'y a pas de quoi être fier du budget de l'agriculture ! Les insuffisances ont succédé aux insuffisances, et pas seulement en matière de retraite. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur Herth, vous gagneriez à rester dans le registre dans lequel on vous connaît : celui de la modération.
Les excès de vos propos ne vous vont pas, et de nombreux collègues ont constaté qu'à contre-emploi vous étiez tout de même moins bon que d'habitude.
La discussion générale est close.
La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales.
Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur le fond du débat ; dans la discussion générale, les orateurs se sont exprimés, chacun selon leurs convictions.
Ancien ministre de l'agriculture, j'ai demandé chaque année une revalorisation des retraites du secteur agricole, mais aussi de celles du secteur de l'artisanat et du commerce. Quel était le contexte à l'époque où j'occupais cette fonction, il y a longtemps ? J'ai dû parcourir le pays pour convaincre le monde agricole qu'il fallait payer des cotisations pour la retraite. Beaucoup d'agriculteurs disaient alors : nous capitalisons tout au long de notre vie, nous n'allons pas payer des cotisations qui vont encore diminuer notre revenu !
Je vous accorde que ce qui était vrai il y a trente ans l'est moins aujourd'hui mais, à l'époque, j'ai dû plaider devant les autres régimes qui nous accusaient de trop en faire.
Aujourd'hui, le régime de retraite agricole est financé à 18 % par les cotisations, à 40 % par l'État, et à 40 % par les autres secteurs, compte tenu du rapport entre le nombre de cotisants et celui de retraités. Il est donc clair que les discussions sur ce sujet doivent avoir lieu au cours du débat budgétaire. Ainsi, en rejetant la proposition de loi de Germinal Peiro, la commission des affaires sociales ne s'est pas prononcée sur le fond,…
…les interventions des commissaires membres de la majorité en témoignent.
J'avais, dès le départ, appelé l'attention de Germinal Peiro sur l'application de l'article 40 de la Constitution. Je lui avais dit que je souhaitais qu'un débat de fond ait lieu en commission pour alimenter la réflexion du Gouvernement. En revanche, dès lors que le président de la commission des finances appliquait l'article 40, il était clair que le texte était vidé de l'essentiel de sa substance. Quel est alors l'intérêt d'en discuter ?
Nous avons tout de même un devoir de vérité à l'égard du monde agricole : nous savions très bien que ce texte ne pouvait pas aboutir, et il nous appartenait de ne pas créer d'illusions. Cette discussion doit avoir lieu dans le cadre du débat budgétaire. Je respecte les propositions qui sont faites, elles ont d'ailleurs été soutenues par beaucoup de collègues de la majorité. Mais elles doivent être traitées à l'occasion du double rendez-vous de la discussion sur les retraites et du prochain débat budgétaire. Nous aurons alors un devoir de vérité.
Cela nous concerne tous.
Il s'agira de rapprocher les systèmes de retraite du secteur privé et du secteur public. Hier, lors de son audition par notre commission, le président des Semaines sociales de France affirmait que le montant des dépenses de protection sociale en France avait dépassé celui de la Suède. Il représente 598 milliards d'euros, soit plus de 30 % de la richesse du pays.
Le véritable débat et le vrai devoir, c'est, à l'intérieur de cette enveloppe, de rapprocher le secteur privé et le secteur public. Il faudra ainsi demander à ce dernier, pour lequel, par exemple, seuls sont pris en compte pour le calcul des pensions les six derniers mois d'activité, de participer à la solidarité nationale.
Il n'est donc pas question de ne pas aborder les problèmes de fond. Ils le seront dans le cadre du rendez-vous consacré aux retraites, et dans celui du prochain budget. Mais le groupe socialiste savait parfaitement en inscrivant cette proposition de loi à l'ordre du jour que le président de la commission des finances, Didier Migaud, qui est l'un de ses membres, allait appliquer l'article 40 de la Constitution. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le débat de fond s'est tenu en commission, et j'ai transmis au Gouvernement l'ensemble de nos réflexions.
Mes chers collègues, à tout moment de l'année, tous les groupes peuvent vouloir faire adopter de multiples propositions de loi augmentant la dépense publique : si nous les suivions, nous ne pourrions plus parler de maîtrise des dépenses publiques dans notre pays. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Pour le bouclier fiscal, il n'est pas question de maîtrise des dépenses !
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je ne peux pas laisser dire que le Gouvernement déserte. Vous le savez, le ministre de l'agriculture est en permanence sur le terrain…
Il défend l'agriculture et les agriculteurs pour lesquels il dessine un avenir.
Je ne peux pas non plus laisser dire que le Gouvernement n'agit pas. Les pensions de réversion ont été revalorisées de 11 %, et 400 millions d'euros ont été dégagés pour l'amélioration des retraites agricoles depuis 2008.
Je le répète, votre proposition n'en est pas une ; c'est une posture. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Au fond, elle n'est pas dans l'intérêt des agriculteurs puisque la seule source de financement que vous ayez trouvée consiste à taxer les produits agricoles, en particulier les alcools ! L'effet d'une telle mesure serait absolument catastrophique pour la viticulture qui est déjà en difficulté.
Soyons responsables ! Les agriculteurs et les retraités ont besoin de soutien, et non pas de paroles et de promesses creuses. Le Gouvernement traite en responsabilité chacun des problèmes, et il continuera de procéder ainsi.
Monsieur Folliot, vous avez raison de dire que la majorité souhaite depuis toujours que les conjoints et les aides familiaux puissent bénéficier, comme chaque Français, d'une retraite complémentaire. Encore faut-il assurer le financement de cette mesure ; c'est la seule question qui se pose.
Reste à savoir quand le Gouvernement traitera cette question. Certains ont émis l'idée de le faire lors de l'examen du projet de loi de modernisation agricole, pourquoi pas ? Vous savez cependant que le régime de retraite agricole est financé à 40 % par la solidarité interrégimes, il est donc logique d'aborder ce sujet lors du grand débat sur la retraite, car à cette occasion, le Président de la République l'a dit, tout sera mis sur la table : la pénibilité du travail agricole, le montant des retraites et, surtout, la parité, qui constitue un enjeu majeur.
Aussi, en vertu de l'article 44, alinéa 3 de la Constitution, et en application de l'article 96 du règlement de l'Assemblée nationale, le Gouvernement demande la réserve du vote sur les articles et sur les amendements en discussion. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Malheureusement, chaque fois qu'une proposition de loi émanant de l'opposition est examinée le jeudi, le Gouvernement demande la réserve, incertain qu'il est quant à la mobilisation des députés de sa majorité.
La combinaison de la réserve, du vote bloqué et du vote solennel amène, en fait, la plupart des textes à être reportés à la semaine suivante, afin que, les députés de la majorité étant enfin présents, le Gouvernement puisse être certain du rejet des initiatives de l'opposition.
Cette façon de procéder, depuis que vous avez voté la révision constitutionnelle, relève d'une sorte de parlementarisme au rabais qui ne grandit pas l'institution, et qui fait jouer aux parlementaires, notamment aux parlementaires de la majorité, un rôle que, pour ma part, je trouve regrettable.
Je regrette que Mme la secrétaire d'État ait pu être choquée par des propos tenus par certains de mes collègues de l'opposition. Pour autant, si sa présence ici est légitime et si la Constitution et notre règlement lui confèrent le droit de parler au nom du Gouvernement, nous sommes, pour notre part, dans notre droit lorsque nous regrettons, et je ne veux pas l'offenser, qu'un tel sujet n'ait pas permis à deux ministres dont les fonctions ministérielles et le poids politique sont supérieurs aux siens, de siéger parmi nous. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues, je pense m'exprimer avec la plus grande courtoisie possible.
M. Le Maire, plutôt que de siéger au banc du Gouvernement pour discuter des retraites agricoles, a préféré traiter ce matin de la survie du thon rouge. Nous sommes, comme lui, très sensibles à la biodiversité marine.
Nous avons pu constater, ces dernières semaines, avec la taxe carbone ou les mesures concernant le thon rouge, que la majorité UMP, le Gouvernement et le Président de la République faisaient beaucoup d'efforts pour tenter de séduire les écologistes. Mais il nous semble que la présence de M. Le Maire au banc du Gouvernement était nécessaire, tout comme celle de Xavier Darcos, ministre des affaires sociales, qui, ce matin, a préféré faire campagne en tant que tête de liste aux élections régionales en Aquitaine, alors que celui qu'il affronte, Alain Rousset, est, quant à lui, présent sur ces bancs pour manifester sa solidarité avec les retraités de l'agriculture. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues, seul M. Cahuzac a la parole.
Veuillez conclure, monsieur Cahuzac.
Nos collègues de la majorité et Mme la secrétaire d'État avancent plusieurs prétextes pour expliquer que ce texte ne doit pas être adopté. M. Herth, qui est le porte-parole du groupe UMP sur ce texte, est peut-être moins expérimenté que M. Méhaignerie (Protestations sur les bancs du groupe UMP)…
Dire de M. Herth qu'il est moins expérimenté que M. Méhaignerie n'est pas injurieux : c'est un constat.
Je suis désolé si j'ai choqué d'autres collègues qui se sentent également moins expérimentés que M. Méhaignerie.
Quoi qu'il en soit, je rappelle à M. Herth et à Mme la secrétaire d'État que, lorsque des parlementaires décident d'augmenter la charge publique, ils n'ont pas d'autre choix que de gager cette dépense. Ainsi, depuis 1958, tous les parlementaires, de quelque bord qu'ils soient, ont toujours gagé les mesures d'augmentation de la dépense publique qu'ils proposent par une augmentation des droits sur les alcools et les tabacs.
Je vous invite, mon cher collègue, à assister, au moins une fois dans votre vie, à un débat budgétaire. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Vous apprendrez ainsi qu'il revient alors au Gouvernement de lever ce gage, ce qui signifie qu'il accepte la mesure et que celle-ci ne contribuera donc pas à augmenter la taxe sur les tabacs et les alcools. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Je suis désolé d'avoir à vous rappeler ce mécanisme parlementaire élémentaire.
J'ai cru comprendre que Mme la secrétaire d'État n'envisageait pas, le cas échéant, de lever le gage. Si tel était le cas, le Gouvernement prendrait la responsabilité de renchérir le coût de ces produits. Or, je n'imagine pas qu'il le fasse. Si ces dispositions devaient être acceptées, le gage serait forcément levé. Vos inquiétudes, monsieur Herth, n'ont donc pas de raisons d'être. Au demeurant, je n'ai pas compris le lien que vous établissiez entre les retraites agricoles des conjoints et la crise de la vache folle, que vous avez cru devoir évoquer tout à l'heure à la tribune.
Sur le fond…
…et en conclusion, madame la présidente, il ne s'agit pas de savoir si les uns ont bien fait et les autres mal fait : les retraités jugeront. Nous n'avons pas à le faire à leur place.
Vous estimez que nous n'en avons pas fait assez, nous jugeons que vous agissez insuffisamment ; au fond, ces jugements n'ont rien d'étonnant et n'ont que peu d'intérêt.
Le seul jugement qui compte est celui des retraités agricoles.
Nous pourrions retrouver le climat consensuel qui régnait dans cette assemblée lorsque la proposition de loi de Germinal Peiro sur la retraite complémentaire des chefs d'exploitation fut adoptée. Vous aviez voté le principe de cette retraite complémentaire et nous avions voté son financement. Aujourd'hui, nous vous proposons de voter avec nous la création d'une retraite complémentaire pour les conjoints et aides familiaux du secteur agricole. Soit Mme la secrétaire d'État annonce que le cas échéant, elle lèvera le gage, soit elle prend l'engagement que ce dispositif sera adopté lors d'une discussion budgétaire, et nous pouvons, dès lors, discuter. En tout état de cause, si nous aboutissions à un tel consensus, nous voterions ensemble un dispositif dont les retraités de l'agriculture ont besoin. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
J'en termine, madame la présidente, mais je vous plains de ne pas parvenir à obtenir de vos amis qu'ils m'écoutent. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Vous regrettiez leur absence, monsieur Cahuzac. S'ils se manifestent, c'est qu'ils sont présents…
Je comprends mal votre énervement, chers collègues.
Je vous suggère d'examiner attentivement ce que vous vous apprêtez à faire, car les retraités de l'agriculture sont nombreux à ne pas comprendre que l'on avance une excuse budgétaire pour refuser de voter un dispositif qui coûte 400 millions d'euros. Certes, cette somme n'est pas négligeable. Mais puis-je vous rappeler que Mme Lagarde a fait un chèque du même montant à Bernard Tapie…
…et que le seul bouclier fiscal nous coûte deux fois plus cher chaque année ? Mes chers collègues,…
Ça suffit, maintenant. Cela fait trois fois que je vous demande de conclure !
Mes chers collègues, vous êtes nombreux à dénoncer, dans vos discours aux retraités agricoles, la situation indigne qui leur est faite. Or, c'est ici que nous décidons.
Nous regrettons votre indulgence à l'égard de Bernard tapie et votre dureté à l'égard des retraités de l'agriculture. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Il est très facile de distiller des propos insultants (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC) et de se déclarer désolé ensuite. Je constate, monsieur le député, que vous ne me reconnaissez aucun crédit. Un peu de respect, s'il vous plaît, pour les règles de la République ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Je ne peux pas vous laisser insulter non seulement cet hémicycle, mais les membres du Gouvernement, dont je suis.
Je n'ose imaginer que ce propos relève du sexisme. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Un détail semble vous avoir échappé, qu'il m'appartient de vous rappeler : je suis en charge des aînés ; la question des retraites relève donc autant, sinon plus, de mes prérogatives que des vôtres. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le rapporteur. (« Au revoir, monsieur Rousset ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Maintenant que tout le monde a salué le départ de M. Rousset, je vous demande d'écouter M. Peiro, mes chers collègues.
Au terme de la discussion générale, je veux souligner que ce débat aura été utile. Il était attendu depuis huit ans et il est normal qu'il ait eu lieu dans cet hémicycle.
Nous débattons de ce sujet lors de chaque examen d'un projet de loi de finances !
Nous avons entendu les positions des uns et des autres. Sur un plan purement politique, qu'avons-nous pu observer ce matin ? Le groupe socialiste et apparentés, le groupe communiste et ses alliés,…
…le groupe Nouveau Centre, par la voix de Philippe Folliot, ainsi que certains députés non inscrits, notamment Daniel Garrigue, se sont prononcés en faveur de ce texte. En vérité, les seuls à s'y opposer sont, chacun en conviendra, nos collègues de l'UMP.
Toutefois, pour bien connaître mes collègues Yves Censi, Antoine Herth et Georges Colombier, j'ai pu mesurer la difficulté avec laquelle ils ont exprimé leur position. Leur démonstration, selon laquelle il ne serait pas possible de voter ce texte en raison du problème que pose son financement, tournait en rond. (« Au revoir, monsieur Cahuzac ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues, nous sommes exactement dans le même cas de figure qu'en décembre 2001 et février 2002. Nous examinons, ce matin, une proposition de loi. Or, comme vous le savez, l'article 40 de la Constitution interdit aux parlementaires d'accroître les dépenses de l'État. Dès lors, nous accuser de ne pas tout prévoir, c'est nous faire un faux procès, et vous le savez parfaitement. Ce que nous attendions du Gouvernement, c'est qu'il se saisisse de ce texte et que, comme le gouvernement Jospin l'a fait en 2002, il reconnaisse comme une nécessité absolue le cofinancement du régime complémentaire obligatoire.
Vous avez laissé pourrir la situation ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Mes chers collègues, si vous écoutiez le rapporteur, notre débat gagnerait en clarté.
Poursuivez, monsieur le rapporteur.
Nous attendions en effet du Gouvernement qu'il prenne ses responsabilités sur un sujet qui est pendant depuis huit ans, et de nos collègues de la majorité actuelle qu'ils mettent en oeuvre ce qu'ils réclamaient eux-mêmes en 2002. Je pourrais relire les interventions d'Alain Marleix, de Thierry Mariani, de Georges Colombier et de Charles-Amédée de Courson sur ce sujet – mais au moins nos collègues du Nouveau Centre, membres de l'UDF à l'époque, ont-ils gardé la même position.
Les uns et les autres accusaient alors le gouvernement Jospin de ne pas aller assez loin.
Ils n'avaient pas de mots assez durs pour réclamer l'extension de ce régime aux conjoints et aux aides familiaux.
Et, aujourd'hui, ils nous expliquent que cette extension n'est pas possible. Ce n'est pas sérieux !
Au reste, permettez-moi de vous rappeler – le président Méhaignerie a dû s'absenter – la teneur du débat qui a eu lieu en commission des affaires sociales. Je ne citerai pas les propos tenus par nos collègues de gauche, car ils sont évidemment d'accord avec nous, mais des extraits des interventions de nos collègues de droite.
Denis Jacquat : « Je remercie le rapporteur pour sa constance et son sérieux dans la défense des retraités agricoles. Comme il l'a fort justement rappelé, nous avons toujours joué le jeu, puisqu'il y a eu unanimité, ici même, sur la proposition de 2002. Aujourd'hui, nous regardons la présente proposition de loi avec les yeux de Chimène, car la précédente était en effet insuffisante. »
M. Élie Aboud : « Bravo, monsieur le rapporteur, pour l'habileté politique, mais aussi pour votre attachement au monde agricole. »
M. Bernard Perrut : « La situation de l'agriculture est une préoccupation pour beaucoup d'entre nous. Tous ceux qui font vivre notre grand jardin français méritent toute notre attention, du point de vue économique comme du point de vue social. »
M. Perrut poursuit : « Cette proposition est tout à fait louable. Nous partageons évidemment le souci de reconnaître la contribution des conjoints et des aides familiaux. »
M. Georges Colombier : « Je voudrais à mon tour remercier Germinal Peiro, avec qui j'ai l'habitude de travailler. »
M. Dominique Dord : « Élu d'une région de montagne qui compte beaucoup de petites exploitations, je partage totalement l'objectif de fond visé par cette proposition, et je tiens à remercier germinal Peiro pour son travail, tout particulièrement pour son rapport. »
« Alors que les propositions de loi de l'opposition sont bien souvent, notamment dans leurs exposés des motifs, des tracts politiques contre le Gouvernement, ce document-ci nous grandit, car il échappe à toute polémique. »
M. Vincent Descoeur : « Sur le principe, cette extension du régime complémentaire obligatoire ne serait que justice et il est judicieux que l'on veuille en faire bénéficier au premier chef les conjoints, dont le rôle est aujourd'hui très mal reconnu. J'approuve donc l'esprit comme le fond de ce texte et, si j'avais été député en 2002, j'aurais certainement mêlé ma voix à ceux qui demandaient alors davantage. »
M. Philippe Morenvillier : « La proposition de Germinal Peiro est généreuse et elle remet, en quelque sorte, l'église au milieu du village ! Il s'impose, en effet, de rendre justice à ces conjoints et à ces aides familiaux, qui ont souvent fourni un travail ingrat pour faire vivre l'exploitation. »
Encore une fois, je n'ai cité que des extraits des interventions de nos collègues UMP, et je pourrais continuer. Elles sont consignées dans le rapport n° 2219 de la commission des affaires sociales. Voilà la réalité des choses !
Vous vous êtes également réjoui plusieurs fois de ce que nous avons fait !
Sur le fond, je suis persuadé que, les uns et les autres, vous approuvez cette proposition et que vous souhaiteriez qu'une telle avancée soit possible. Il vous faut donc convaincre votre gouvernement, mes chers collègues, et, je vous l'assure, c'est possible ! Nous l'avons fait, en 2002, sous le gouvernement Jospin, et nous avons abouti à un vote unanime, à l'Assemblée nationale et au Sénat, du texte créant un régime complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles. Pourquoi vous taisez-vous aujourd'hui ? Pourquoi renoncez-vous à cette avancée sociale que chacun réclame ?
Non, monsieur Herth, nous n'agissons pas sous la pression d'un lobby régional – franchement, Antoine, cette parole est malheureuse !
Bien entendu, nous nous préoccupons de la situation d'une partie de nos concitoyens, mais c'est une question de justice sociale et, sur ce point, nous devrions pouvoir nous mettre d'accord. Car enfin, regardons les chiffres que nous a fournis la Caisse centrale de la mutualité agricole : le coût de cette prestation versée à 363 000 bénéficiaires s'élèverait à 413 millions d'euros. Vous savez que je n'ai jamais fait de démagogie. Ainsi, en 2002, lorsque nous avons créé ce régime, j'avais précisé qu'il ne pouvait pas être mis en place sans une contribution des actifs.
Cela a été tout l'objet des négociations que nous avons menées pendant un an avec les actifs, et c'est pour cela que le principe en a été limité aux chefs d'exploitation : les actifs voulaient absolument que leur contribution se trouve réduite. Nous nous sommes mis d'accord sur une contribution à hauteur de 3 % – elle n'est actuellement que de 2,97 %. Aujourd'hui, je continue à dire la même chose, et je me refuse à faire de la démagogie en affirmant que ce régime doit fonctionner sans aucune contribution. Quelques collègues de droite m'en ont fait le reproche, me disant : « La création de la RCO est une bonne chose, mais il est tout de même dommage que l'on fasse contribuer les actifs. Il aurait fallu que l'État prenne ce régime totalement en charge. »
Je ne tiendrai pas les mêmes propos. Je considère que le régime complémentaire obligatoire de l'agriculture est le seul régime cofinancé par l'État, et qu'il est normal qu'il s'appuie sur une part de contribution des actifs, proportionnelle à leurs possibilités.
Mais nous savons aussi que le déséquilibre démographique est tel – un actif pour trois retraités actuellement – qu'il est impossible d'étendre le régime sans une participation de l'État.
De ce point de vue, nous sommes forcément déçus, mes chers collègues, non pas par votre position – que vous exprimerez lors d'un scrutin public mardi prochain, ce qui permettra de voir nominativement ce que chacun a voté –, mais par la position du Gouvernement. En effet, le Gouvernement ne respecte pas les engagements du Président de la République, les promesses qu'il a faites à Rennes en 2007, mais aussi à Poligny à l'automne dernier. Il a affirmé qu'il fallait porter une attention particulière au problème des retraités agricoles, et que l'on ne pouvait pas laisser les conjoints au bord de la route.
On ne compte plus les déclarations des ministres qui se sont engagés dans ce sens depuis des années, sans parler des déclarations que vous avez faites dans vos départements, mes chers collègues.
En fait, vous tenez deux discours : l'un devant les assemblées générales de retraités agricoles, où vous affirmez les soutenir, et un autre à l'Assemblée, où vous expliquez qu'il faut voter contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Cette position est inadmissible, et je veux vous rappeler à la raison, car les choses ne sont pas perdues. Aujourd'hui, le Gouvernement refuse de financer ce régime, il repousse cette avancée sociale. Financer un tiers de 400 millions d'euros, ce serait trop ! Ces 130 millions d'euros constituent vraiment une somme extraordinaire ! Pourtant, ce n'est qu'un cinquième de ce que vous avez rendu, l'année dernière, aux 14 000 foyers fiscaux français les plus riches ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Oui, vous leur avez rendu 600 millions d'euros, en application du bouclier fiscal ! C'est cela, la réalité !
Par ailleurs, vous dépensez 4 milliards d'euros par an pour exonérer de charges sociales les heures supplémentaires, alors que l'on sait très bien, aujourd'hui, que cela a pour effet de priver d'emploi de nombreux Français, augmentant d'autant le chômage. Les sources existent, mes chers collègues. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Quand il s'agit de trouver des solutions pour les amis du Fouquet's, on les trouve !
En revanche, quand il s'agit de trouver des solutions pour les gens qui gagnent 500 euros par mois, vous venez nous expliquer que ce n'est pas possible !
Parce que je crois à votre honnêteté, à votre sincérité, je ne peux me résoudre, mes chers collègues, à ce que vous restiez sur cette position injuste.
Je vous ai dit ce matin que la France des retraités agricoles vous regardait. En vérité, c'est la France tout entière qui vous regarde ! Et en matière de justice sociale, il n'y a pas à faire de différence : ce que nous faisons aujourd'hui pour les retraités agricoles doit s'inscrire dans un plan pour plus de justice sociale et fiscale dans notre pays. Par conséquent, je vous appelle à un sursaut : vous avez jusqu'à mardi prochain pour vous ressaisir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Philippe Folliot.
Quel est le fondement de votre rappel au règlement, monsieur Folliot ?
C'est le même que celui invoqué tout à l'heure par M. Cahuzac, madame la présidente.
Le groupe Nouveau Centre déplore l'utilisation quasi systématique de la réserve et du vote bloqué, sans parler du scrutin public solennel…
Cette utilisation est de droit, monsieur Folliot, elle est permise par la Constitution et ne saurait faire l'objet d'un rappel au règlement ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ce n'est pas à vous de répondre, madame la présidente, c'est au Gouvernement ! Qu'est-ce que c'est que cette manière de présider ?
Permettez-moi de dire, madame la présidente, que les procédures actuellement utilisées ne me paraissent pas vraiment correspondre à la réhabilitation du Parlement et au renforcement de son rôle, dont se prévaut le Gouvernement. Ce n'est pas en procédant de la sorte que l'on améliorera l'image du Parlement.
Par ailleurs, en ce qui concerne les procès d'intention qui ont été faits au Gouvernement, et plus particulièrement à Mme la secrétaire d'État, je veux dire que celle-ci est tout à fait légitime pour exprimer la position du Gouvernement. Sa compétence, sa connaissance du dossier et l'investissement dont elle fait preuve ne sauraient être remis en cause, quels que soient les désaccords qui peuvent exister entre les positions qu'elle a défendues et les nôtres. Il n'est, en aucun cas, acceptable qu'un membre du Gouvernement soit mis en cause comme cela a été le cas.
Sur le fond du dossier, des échanges ont eu lieu, certains riches et intéressants, d'autres relevant davantage de postures – que l'on peut supposer être en rapport avec les prochaines échéances électorales. Les esprits ayant tendance à s'échauffer, certaines positions un peu trop tranchées sont émises, ce qui est regrettable au regard de l'importance de ce débat : je préférerais que ne soient échangés que de vrais arguments, tels ceux que l'on a pu entendre de la part de M. Censi ou de M. le rapporteur.
Les personnes qui nous regardent attendent de la représentation nationale autre chose que les excès auxquels nous avons pu assister durant la matinée.
Mme la secrétaire d'État a dit des choses importantes…
J'ai pratiquement terminé, madame la présidente.
Si le rendez-vous de mardi prochain est un rendez-vous manqué, il faudra faire en sorte que, lors de l'examen de la loi de modernisation de l'agriculture ou lors du grand rendez-vous sur les régimes de retraite – je pense à ce qu'a dit le président de la commission des affaires sociales à ce sujet –, personne n'oublie ce qui a été dit ce matin, et quels sont les objectifs à atteindre en matière de justice sociale.
Mon rappel au règlement est fondé sur l'article 58 de notre règlement, madame la présidente.
Je veux vous dire, madame la secrétaire d'État, que les propos de mes collègues intervenus précédemment ne comportaient aucune arrière-pensée sexiste à votre égard, aucune expression de mépris fondée sur le fait que vous êtes secrétaire d'État et qu'à ce titre, vous ne représenteriez pas suffisamment le Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je vous demande donc, madame la secrétaire d'État, de ne pas considérer que les membres de mon groupe avaient l'intention de vous mettre en cause.
Si nous nous exprimons avec fermeté, et même avec colère, c'est parce qu'en effet, les questions évoquées ce matin sont assez importantes pour nécessiter la présence du ministre de l'agriculture. Cette présence aurait constitué un signe de respect à l'égard du Parlement, et pas seulement de l'opposition.
Tel est le message que nous entendons faire passer. La présence du ministre des affaires sociales aurait également été justifiée, car la question des retraites ne saurait être traitée uniquement par votre secrétariat d'État, comme vous le savez fort bien.
Ce dossier nécessitera l'intervention du Président de la République et du Premier ministre. Demander simplement la présence de deux ministres, en particulier celle du ministre de l'agriculture, n'a rien de méprisant à votre égard, madame la secrétaire d'État.
Je veux terminer en disant, comme l'a fait notre collègue du Nouveau Centre, que le recours – certes constitutionnel, madame la présidente – à l'article 44, alinéa 3, de la Constitution par le Gouvernement et la majorité a une conséquence importante. Comme pourront s'en rendre compte ceux qui assistent à nos travaux, il n'y aura aucun vote ce matin, ni sur les amendements ni sur les articles.
Le travail sur le texte que vous auriez pu accomplir avec nous, mes chers collègues de la majorité, consistant à modifier ou à supprimer certaines dispositions, vous est désormais interdit : c'est un vote bloqué qui aura lieu la semaine prochaine, et seuls les amendements du Gouvernement seront soumis au vote. Nous avons là un nouvel exemple concret de la manière dont on traite la représentation nationale !
Au fond, que restera-t-il de ce débat ? Le diagnostic d'une situation très difficile sur le plan social, et des solutions avancées par le groupe SRC, exposées au moyen de la proposition de loi présentée par notre rapporteur Germinal Peiro. En revanche, il me paraît important de souligner, surtout à l'attention de ceux qui assistent pour la première fois à une séance à l'Assemblée nationale, qu'il n'y aura pas un seul vote, comme l'a décidé le Gouvernement que vous représentez, madame la secrétaire d'État. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La fébrilité qui s'est manifestée ce matin sur les bancs de la majorité et du Gouvernement et le ton très dur du président de la commission des affaires sociales, Pierre Méhaignerie…
…me semblent refléter une inquiétude de votre part : vous sentez qu'il y a un malaise et, choisissant de l'ignorer, vous avez peur de la colère qui monte dans le monde agricole.
Vous savez que le salon de l'agriculture va avoir lieu prochainement et vous vous demandez comment les choses vont se passer.
Le reproche que vous nous faites, c'est d'avoir réussi, grâce à notre initiative, à mettre en débat cette question des retraites agricoles. Malgré les mesures que vous prenez, vous n'avez pas pu empêcher que nous évoquions, à l'Assemblée nationale, la situation du monde agricole et de ses retraités. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Marc Laffineur. (« Il vient d'arriver ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Premièrement, il me semble que la fébrilité est plutôt du côté de l'opposition que de celui de la majorité. (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe UMP.) Pour notre part, nous avons tenu un discours responsable, et non pas, comme vous, un discours démagogique.
Deuxièmement, il y a bien eu mise en cause de Mme la secrétaire d'État, ce que je trouve inadmissible, (Protestations sur les bancs du groupe SRC), car elle a toute capacité, toute compétence pour répondre aux questions posées par l'opposition. Les propos tenus par M. Cahuzac étaient à la limite du sexisme et m'ont paru, je le répète, tout à fait inadmissibles. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Allons, calmez-vous, mes chers collègues, seul M. Laffineur a la parole !
Troisièmement, vous mettez en cause la présidence de l'Assemblée nationale…
Je n'ai pas de leçons à recevoir de vous, monsieur Martin !
Vous mettez en cause, disais-je, la présidence de l'Assemblée, ce qui est tout aussi inadmissible. Un débat très large a eu lieu au sein de la commission…
…et si nous sommes là aujourd'hui, c'est parce que nous avons procédé à une réforme de la Constitution qui permet de donner beaucoup plus de pouvoir à l'opposition. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Alors que vous avez refusé de voter cette réforme de la Constitution, aujourd'hui vous réclamez plus ! Je vous appelle à faire preuve d'un peu de dignité, mes chers collègues. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Les sujets que nous évoquons sont suffisamment graves pour que chacun évite de faire de la démagogie. Un vote solennel va avoir lieu la semaine prochaine, ce qui sera beaucoup plus important que le vote auquel nous aurions pu procéder aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues, je vais maintenant appeler les articles de la proposition de loi dans le texte dont l'Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n'a pas adopté de texte. Je vous invite à reprendre sereinement la discussion, lors de laquelle chacun aura la possibilité de s'exprimer.
L'article 1er et l'article 2 ont été déclarés irrecevables par la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire. Nous en venons donc à l'article 3.
Sur l'article 3, plusieurs orateurs sont inscrits. Je vous rappelle, mes chers collègues, que vous disposez chacun de deux minutes pour vous exprimer.
La parole est à Mme Frédérique Massat.
Madame la présidente, vous avez tout à fait raison : il nous faut retrouver le calme dans nos débats. Mais il faut dire aussi que les écarts de langage qui ont eu lieu dans cet hémicycle ne sont pas de notre fait.
Comme vous l'avez dit, monsieur Laffineur, les enjeux du texte que nous examinons aujourd'hui sont très importants. Mais, précisément au regard de ces enjeux, lancer un débat sur le sexisme supposé d'un de nos collègues n'est vraiment pas sérieux.
Je souhaite également saluer la présence de nombreuses personnes aujourd'hui dans les tribunes, ce qui démontre l'importance du sujet dont nous débattons.
Il est réconfortant pour un parlementaire de voir que les propositions de loi sont suivies avec attention, non seulement par les téléspectateurs, mais aussi, in situ,par des personnes qui ont fait le déplacement. Voir tous ces visages au-dessus de nous nous conforte dans la décision que nous avons prise de déposer la présente proposition de loi.
En tant qu'élue de la montagne, je voudrais dire que l'enjeu de ce texte est absolument majeur. Dans les territoires de montagne, en effet, nous connaissons de plus en plus de difficultés pour maintenir l'activité agricole et, au-delà, inciter de jeunes agriculteurs à s'installer. Or nous savons bien que, au-delà de la dimension économique de l'activité agricole, celle-ci représente un véritable enjeu en termes d'aménagement du territoire. Aujourd'hui, un nombre croissant d'exploitations sont abandonnées, faute d'avoir été reprises par les enfants des agriculteurs. De fait, la faiblesse du revenu que touchent les agriculteurs pose de réelles difficultés. En outre, étant donné l'implication que ce mode de vie suppose de la part de la famille – on l'a dit, il y a les conjoints, mais aussi les enfants et les aides familiaux –, c'est bien plus qu'une simple activité ou qu'un métier.
C'est donc par respect envers toutes ces personnes et pour les encourager vraiment à poursuivre dans l'agriculture que nous avons déposé ce texte. Aujourd'hui, tout le monde ayant reconnu qu'il s'agit là d'une nécessité, la sagesse serait vraiment, madame la secrétaire d'État, de nous aider à faire adopter ces propositions permettant l'extension de la retraite complémentaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Il y a quelques semaines, j'intervenais dans cet hémicycle pour dénoncer la volonté du Gouvernement de repousser l'âge de départ à la retraite pour ceux qui, tout au long de leur vie, avaient exercé des métiers pénibles. Je remercie Jean Mallot d'avoir rappelé que les agriculteurs, leurs conjoints et les aides familiaux entrent eux aussi dans cette catégorie.
Aujourd'hui, je considère que vous leur infligez une double peine en leur refusant le droit à une retraite complémentaire. Que sont devenues les promesses faites en 2007 par le Président de la République et comment faut-il interpréter ses déclarations du 27 octobre dernier sur la « solidarité de la nation française pour le travail des paysans français, de leurs conjoints et de leurs familles » ? Mes chers collègues de l'UMP – je m'adresse à ceux, peu nombreux, qui sont encore là ce matin –…
…vous semblez avoir oublié toutes les critiques que vous aviez adressées à la loi que nous avions votée en 2002 et qui avait représenté une avancée considérable.
Aujourd'hui, vous reniez vos propositions, parce que ces hommes et ces femmes qui sont soumis au port de charges lourdes et à de longues journées de travail, et dont les revenus sont incertains, ne vous intéressent plus. Refuserez-vous donc à ces hommes et à ces femmes qui meurent plus tôt que d'autres la maigre reconnaissance que représente une retraite complémentaire ? Et quelle retraite, en comparaison des revenus de ce pauvre M. Proglio, dont Mme Lagarde faisait l'éloge hier dans cet hémicycle !
Le revenu du président d'EDF et de Veolia s'élève à 13,5 millions de francs – je préfère convertir, on perçoit mieux l'ordre de grandeur… (Sourires.) Et que dire du bouclier fiscal, qui, si vous consentiez à le supprimer, permettrait largement de financer notre proposition ?
Votre gouvernement pouvait tout à fait contourner l'article 40. Je m'interroge donc : le monde agricole, qui nous écoute aujourd'hui, ne serait-il pas devenu, finalement, le mal-aimé du Président de la République et du Gouvernement ?
Pourquoi ? Peut-être – je le dis pour faire sourire – parce que ce monde rural n'a pas suffisamment oublié l'ancien Président de la République, Jacques Chirac ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ceux qui, en 2002, nous reprochaient de ne pas faire assez, trouvent aujourd'hui que nous voulons en faire trop. Il faut tout de même un peu de cohérence !
Mais peut-être, après tout, est-ce une bonne chose que le règlement autorise la majorité et le Gouvernement à demander un report du vote. En effet, ce matin, vous n'êtes pas assez nombreux – vous êtes même minoritaires – et nous aurions pu faire adopter cette proposition de loi. Vous avez donc trouvé ce subterfuge pour repousser le vote à mardi prochain. On dit que la nuit porte conseil : peut-être les quatre jours qui vont nous séparer du vote vous amèneront-ils à réfléchir, à faire en sorte que, de la perche que nous vous tendons, vous ne fassiez pas une gaffe (Rires) en refusant de voter ce texte de justice.
Ce matin, nous demandons en effet simplement justice et dignité pour ceux qui se sont engagés, sans mégoter, dans le travail pour nourrir la population de France. Souvenez-vous que ceux qui, aujourd'hui, sont à la retraite, sont les mêmes qui, au lendemain de la guerre, ont fait l'effort de redresser notre pays. Il faut donc un juste retour des choses : la nation a un devoir de solidarité envers ceux qui ont travaillé pour permettre à tous les enfants de France de pouvoir manger au lendemain de la Libération. Que ceux d'entre vous qui l'auraient oublié se souviennent des cartes d'alimentation !
Au regard de tout cela, est-ce vraiment, aujourd'hui, un effort considérable, madame la secrétaire d'État, que ces 413 millions ? Et, sur cette somme, il n'y en a qu'un tiers à la charge de l'État, c'est-à-dire 138 millions ! Vous nous dites qu'il est impossible de les trouver parce que nous sommes en dehors de la session budgétaire. Mais, d'autres collègues l'ont dit avant moi, le bouclier fiscal représente 900 millions,…
Et, dans mon département, les soixante-deux personnes les plus riches vont se partager 3 millions d'euros !
Monsieur Néri, je suis désolée, mais vous n'avez plus la parole.
La parole à M. Michel Ménard.
Je regrette que l'on nous reproche de faire de la démagogie avec cette proposition de loi. Si je fais partie des premiers signataires du texte, c'est parce que j'ai bien conscience que les retraites agricoles sont très faibles. Je pense particulièrement aux petits agriculteurs, dont mes parents faisaient d'ailleurs partie – c'est pour cela que je connais bien la situation –, qui n'ont pu économiser, se constituer un patrimoine pendant leur période d'activité et doivent donc vivre avec des retraites vraiment très faibles.
Tel est bien le sens de cette proposition de loi : améliorer le revenu des agriculteurs, et particulièrement la pension des retraités qui avaient de petites exploitations. En 2007, selon les statistiques de la Caisse centrale de la mutualité agricole, le montant moyen du régime de base pour les conjoints était de 3800 euros par an, ce qui représente 320 euros par mois ! Comprenez-vous bien ce que représente un tel niveau de retraite ?
Il est vrai que le régime de retraite complémentaire pour les agriculteurs a été mis en place beaucoup plus tard que pour les autres régimes des non-salariés, mais beaucoup d'agriculteurs n'avaient de toute façon pas les moyens de cotiser pour leur retraite, parce qu'ils avaient déjà bien du mal à vivre sur leur petite exploitation.
L'objectif d'un revenu s'élevant à 75 % du SMIC pour les agriculteurs ayant normalement cotisé – c'est ce que vous avez dit, madame la secrétaire d'État –, est une très bonne chose ; c'est une avancée. Mais qu'en est-il des autres, de ceux qui n'ont pas cotisé pendant toute la durée de leur parcours professionnel, alors qu'ils ont travaillé plus de quarante ans ? Or l'enjeu est bien là : beaucoup de personnes n'ont pas eu les moyens de cotiser et doivent néanmoins vivre convenablement pendant leur retraite.
Quant à moi, je n'accepte pas que l'on nous dise que l'article 40 ne permet pas d'adopter cette proposition de loi.
En effet, lorsqu'il s'agit de trouver 2,5 milliards pour ramener la TVA à 5,5 % dans la restauration, on trouve des solutions. Ne cherchez donc pas des prétextes pour refuser une amélioration des conditions de vie des agriculteurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la secrétaire d'État, cette proposition de loi n'est pas de l'ordre de la posture. Elle vise simplement à gommer une profonde injustice, une injustice insupportable dont les retraités agricoles sont victimes depuis trop longtemps, et plus particulièrement leurs conjointes et les aides familiaux.
Il est grand temps de leur témoigner toute notre reconnaissance, mais pas par de belles paroles et par des boniments. À cet égard, nous avons tous entendu le Président de la République, le Premier ministre, le ministre de l'agriculture, les députés de la majorité, dont M. Méhaignerie, et vous-même, tout à l'heure, déclarer, la main sur le coeur, toute votre solidarité envers les agriculteurs français.
Cela ne peut plus durer. Cette solidarité, nous avons, avec la présente proposition de loi, l'occasion de la prouver.
Pas la peine de se cacher derrière des prétextes : le financement, tous nos collègues l'ont démontré, à commencer par Germinal Peiro, il est possible de le trouver. C'est une question de volonté politique.
En ce qui concerne la date, vous dites qu'il est trop tôt, qu'il faut attendre la loi de modernisation et le grand débat sur les retraites. Non, il n'est pas trop tôt pour réduire une profonde injustice, surtout lorsqu'il est question des retraités agricoles, qui n'ont que trop attendu et n'ont plus le temps d'attendre.
De très nombreux membres de l'Association nationale des retraités agricoles de France – il est bon d'insister sur ce point – sont lassés, fatigués, écoeurés, malheureux de devoir se battre sans relâche depuis plus de trente ans pour être entendus et de ne voir leurs pensions revalorisées qu'au compte-goutte.
Je voudrais aussi vous signaler que cette proposition de loi concerne plus particulièrement les femmes. Voter ce texte, ce serait reconnaître non seulement l'immense travail des agricultrices (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC), leur courage et leur dévouement, mais aussi leur sens de l'innovation, car elles ont souvent été des pionnières. J'en connais bien des exemples, dans mon département, mais je crains ne pas avoir le temps de les détailler.
Cette extension de la retraite complémentaire aux conjoints et aux aides familiaux n'est que justice. J'irai même plus loin : il est insupportable d'envisager de retarder cette mesure, quand on considère le montant des pensions versées aujourd'hui à celles et ceux qui ont porté l'économie agricole de notre pays, cette agriculture dont nous avons été tous fiers. Cela serait indigne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame, j'ai moi-même eu le grand honneur d'être secrétaire d'État. Je puis donc vous dire que nul, ici, ne met en doute votre compétence, mais un secrétaire d'État ne peut pas engager le Gouvernement quand il est au banc des ministres sans l'accord de son ministre de tutelle et du ministre du budget. Or, personne ne vous en veut de n'être ni ministre du budget ni ministre des affaires sociales ! (Sourires.)
Je me souviens de certaines phrases – je regrette de ne pas avoir eu le temps de les retrouver – qui m'avaient été adressées lors de réunions de commission. Il s'agissait alors des commerçants et des artisans, et l'opposition d'alors m'avait dit que, si j'étais seule au banc des ministres lors de la discussion, ils refuseraient de siéger. Vous voyez que les choses se sont un peu améliorées ! (Sourires.) Bref, il n'y a vraiment pas là matière à procès.
Pour en revenir au sujet d'aujourd'hui, il n'est pas possible, on n'a pas le droit de dire que les 130 millions d'euros en question mettront la France à genoux. Tout à l'heure, M. Méhaignerie essayait même d'enfoncer un coin, entre les agriculteurs et les fonctionnaires, en disant que, au fond, il fallait commencer par revoir le fonctionnement du régime public et du régime privé.
Eh bien, je vais vous la donner, la solution : les quelque milliers de postes de fonctionnaires qui ont été supprimés permettent à eux seuls de dégager la capacité financière suffisante au niveau du ministère du budget ! Bref, s'il faut vraiment trouver ces 130 millions, nous pouvons vous y aider.
Mais, tout de même, 130 millions, pour des gens qui ont garanti l'indépendance alimentaire de la France, et alors que l'on va demander aux générations suivantes de continuer à le faire, puisque, dès 2050, chacun devra avoir ce problème à l'esprit, ce n'est rien ! Ces 130 millions, il est possible de les trouver, même quand on est seul au banc des ministres, même en dehors de la loi de finances car il suffirait de faire un transfert de ligne de crédits,…
…ce qui éviterait d'ailleurs le gel budgétaire qui va se produire. Même en s'en tenant au montant des sommes du gel budgétaire, on a de quoi réaliser plusieurs fois ces 130 millions !
De grâce, allez donc voir tous ensemble, en délégation, votre ministre du budget. Prenez vos responsabilités et revenez ensuite, sabre au clair, nous dire que vous avez gagné. Nous vous applaudirons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mes chers collègues, avant de poursuivre nos débats, je voudrais que nous en finissions une fois pour toutes avec ce sujet : madame la secrétaire d'État est présente parmi nous, elle est membre du Gouvernement et a toute sa place ici. Je pense que ce n'est vraiment pas le sujet…
…et qu'il serait bon d'arrêter de discuter sur ce point.
J'ai eu, comme vous, le grand honneur d'être secrétaire d'État chargée des personnes âgées. Je sais donc combien ce domaine est important ; il englobe un grand nombre de situations. Je vous remercie donc d'être parmi nous ce matin. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le rapporteur.
Je voudrais revenir au fond. Le texte, on le sait, a été amputé de ses articles 1er, 2, 7 et 8 ; il est resté quatre articles, qui nous ont permis de mener ce débat.
L'article 3 ouvre la discussion sur les contributions et sur le financement : il ne faut donc pas le négliger, même si j'ai bien conscience que ce n'est pas par ce seul article que nous réglerons l'ensemble du financement ; je l'ai déjà dit, ce régime ne peut pas tenir, il ne peut pas être mis en place et étendu sans un engagement financier de l'État.
Avec cet article, nous ouvrons une contribution pour les aides familiaux. Bien entendu, on ne peut pas leur demander de contribuer lorsqu'ils sont en activité : ils ne perçoivent pas en effet de salaire. Voici les termes du code rural : « les descendants d'un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l'exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d'un contrat de travail à salaire différé ». Ne recevant pas de salaire, ils ne peuvent donc pas verser de contribution ; c'est pourquoi l'article 3 prévoit le versement d'une contribution au moment du versement du salaire différé.
La parole est à M. Michel Ménard, premier orateur inscrit sur l'article.
J'appelle les députés de l'UMP à la sagesse : rejoignez-nous, chers collègues, pour voter cette proposition de loi, qui se situe dans la continuité de la loi adoptée le 4 mars 2002, qui créait le régime de retraite obligatoire pour les non-salariés agricoles.
Il s'agit d'améliorer la situation des conjoints et des aides familiaux, qui sont insuffisamment pris en compte. Germinal Peiro a bien rappelé que tel était l'objectif envisagé à moyen terme depuis la loi du 4 mars 2002 – adoptée à l'unanimité : celle-ci prévoyait une seconde phase législative d'amélioration du dispositif.
Ce texte constitue une mesure de justice sociale ; c'est la réponse à une demande des associations de retraités ; c'est aussi une réponse à un engagement de campagne de Nicolas Sarkozy. Enfin, cette extension était souhaitée par l'opposition du mois de mars 2002 : vous êtes maintenant la majorité ; il serait logique que, comme d'ailleurs le Nouveau Centre, vous souteniez maintenant cette proposition de loi.
Marylise Lebranchu l'a rappelé : il est tout à fait possible, voire facile, de financer cette mesure. La question est donc celle-ci : souhaitez-vous améliorer la situation des conjoints de retraités et des aides familiaux…
…ou bien privilégiez-vous d'autres mesures pour votre électorat plus aisé ?
Vous nous avez dit, au cours des débats sur ce texte présenté par Germinal Peiro, que nous cédions à une tentation préélectorale. Je ne sais pas si c'est ce que retiendront de ce débat les retraités agricoles qui sont devant leur téléviseur, et ceux qui vont tout à l'heure reprendre leur bus – dans lequel ils avaient passé la nuit pour assister depuis les tribunes à cette discussion.
Je ne crois pas qu'ils auront retenu que nous cédions à une tentation préélectorale ; il est abusif de prétendre une chose pareille ! Que vont-ils retenir ? Tout simplement quelques chiffres, de ces chiffres dont ils ont été abreuvés depuis l'automne dernier, avec le sauvetage des banques, avec les revenus astronomiques de certains chefs d'entreprises. Les chiffres, ils les connaissent ! Et aujourd'hui, on leur dit que pour améliorer leur situation, il suffirait que l'État participe à hauteur de 130 millions d'euros pour que leurs justes revendications soient satisfaites, face à une injustice connue de tous, et sur laquelle nous sommes d'accord. Ces 130 millions, c'est epsilon ! Marylise Lebranchu vous proposait même de vous aider à les trouver.
Nous décrivons la situation, et vous êtes d'accord avec nous sur ce point. Nous proposons des solutions, faciles à mettre en oeuvre que vous refusez. Voilà ce qu'ils retiendront de ce débat. Et il est regrettable que vous ayez décalé le vote à mardi prochain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je voudrais en revenir au fond de l'article 4 : la cotisation que nous avons évoquée à l'article 3 sera calculée forfaitairement sur le salaire différé des aides familiaux.
Je voudrais aussi reprendre le débat sur le financement, en donnant quelques chiffres qui ont peut-être été oubliés en chemin. Ce sont des chiffres de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole. Pour les mesures de revalorisation de 2009, 116 millions d'euros avaient été inscrits dans la loi de finances. En réalité, seuls 73 millions ont été employés à cette fin : 43 millions d'euros n'ont pas été utilisés pour revaloriser les retraites agricoles en 2009.
Pourquoi ? Eh bien parce qu'entre les annonces – qui pouvaient paraître généreuses – et la réalité, il y a eu une différence majeure : les décrets d'application ont sérieusement restreint les choses. Ils ont notamment instauré un plafond, ce qui est d'ailleurs assez unique en matière de retraites.
Les retraités agricoles ne veulent pas bénéficier d'une aide sociale – qui pourrait être plafonnée ; ils veulent bénéficier de droits, et chacun sait que le montant de la retraite est la somme des droits que l'on a acquis au cours de sa carrière. Ces droits acquis peuvent venir de cotisations, mais aussi de droits gratuits, attribués au cours des revalorisations passées.
On a pourtant instauré un plafond de 750 euros, qui limite le niveau des retraites. Beaucoup de retraités agricoles qui étaient persuadés de pouvoir bénéficier d'une revalorisation ont été extrêmement déçus lorsque ces mesures ont été revues à la baisse. Cela représente 43 millions d'euros !
De nombreux intervenants l'ont souligné : nous sommes réalistes ; nous ne vous demandons rien d'extraordinaire. Encore une fois, je ne veux pas mettre ces montants en rapport avec ceux des cadeaux fiscaux faits aux classes les plus aisées de notre pays ; mais tout de même, essayez de regarder la réalité en face ! On peut améliorer ce régime. On peut étendre le régime de la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles aux conjoints et aux aides familiaux.
Vous en étiez persuadés lorsque vous étiez dans l'opposition. Pourquoi avez-vous changé d'avis maintenant que vous êtes dans la majorité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Plusieurs intervenants socialistes se sont succédé pour expliquer que l'actuelle majorité, lorsqu'elle était dans l'opposition, réclamait une réforme qu'elle refuserait aujourd'hui.
Il faut bien constater qu'il s'agit ici d'une proposition de loi socialiste !
Je rappelle que, lorsque vous étiez au pouvoir, vous avez refusé cette mesure !
Certes. Mais vous avez tout de même attendu d'être dans l'opposition pour demander son application ! Vous savez très bien que vous auriez pu agir : les décrets d'application sont passés juste avant les élections présidentielle et législative. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Et vous n'aviez ni prévu, ni même imaginé un quelconque mécanisme de financement !
Eh oui, comme toujours avec les socialistes : aucun financement n'est prévu !
Aucun, absolument aucun financement n'était prévu : cette loi n'était qu'une incantation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Et vous connaissez très bien la fragilité du financement du régime agricole. Nous avons travaillé sur le sujet, avec certains d'entre vous – dont certains sont absents, d'ailleurs, car ils s'intéressent plus au travail de fond qu'au spectacle. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous nous retournez cet argument : vous aurez beau nous expliquer pourquoi vous avez refusé cette mesure, il n'en demeure pas moins que vous ne l'avez pas acceptée. Vous pouviez pourtant le faire à ce moment-là.
De plus, à l'époque, la présidence de la commission des finances était aussi socialiste : vous aviez donc tous les pouvoirs et toutes les majorités pour pouvoir le faire.
Ensuite, il y en a assez d'essayer de faire croire que vous avez prévu ces mesures-là lorsque vous étiez au pouvoir en 2002, et qu'il ne s'est rien passé. Vous êtes autistes…
On vous l'a pourtant expliqué tout à l'heure, et Mme la secrétaire d'État y est revenue : l'ensemble de l'assainissement des comptes du régime social agricole auquel nous nous sommes attaqués a représenté, lorsque Jean-François Copé était ministre du budget, 8 milliards d'euros. L'extension de la retraite complémentaire obligatoire n'est pas aujourd'hui un problème financier, c'est un problème de choix stratégique : vous savez très bien qu'on ne peut pas intervenir en matière de revalorisation des retraites, et notamment des petites retraites, sans une réflexion extrêmement fine, à cause des systèmes de seuils ; sinon, on risque de tout déséquilibrer et de créer des inégalités criantes.
J'ajoute enfin que nos collègues socialistes nous ont reproché d'être peu nombreux : je fais remarquer que cette proposition de loi socialiste a été signée par 210 membres du groupe, et que je ne compte pas plus d'une quinzaine de députés socialistes présents ! Vous êtes tout de même très peu nombreux pour présenter votre propre proposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Censi, je ne voudrais pas engager maintenant une polémique. Mais je veux, très simplement, rappeler les faits.
Il ne faudrait pas être sans arrêt à front renversé.
Vous n'allez pas nous reprocher de n'avoir pas, en 2002, étendu cette retraite aux conjoints alors que vous refusez de le faire aujourd'hui ! Je vous rappelle qu'en 2002, nous faisions une avancée considérable. Et vous en étiez d'accord, puisque cette loi avait été votée à l'unanimité.
J'ai dit tout à l'heure, dans mon propos liminaire, pourquoi nous avions alors limité cette mesure aux chefs d'exploitation : c'était pour des raisons financières ; c'était parce qu'on ne pouvait pas placer trop haut la contribution financière des actifs, et c'était à cause de la nécessaire participation financière de l'État – nous n'avons jamais dit le contraire. Voilà pourquoi nous avions limité la mesure aux chefs d'exploitation. Elle a tout de même concerné 465 000 personnes ! Ce n'est pas rien, convenez-en.
Ne venez donc pas nous faire ce reproche ! J'en ai assez entendu sur la création du régime complémentaire obligatoire. Aujourd'hui, monsieur Censi, la situation est différente ; huit ans après, il est à nouveau temps de faire un pas en avant.
Il est à nouveau temps de faire évoluer ce régime dans le sens de la justice sociale.
Voilà pourquoi nous avons déposé cette proposition de loi ; voilà pourquoi nous disons qu'avec un peu de volonté politique, il est possible de voter ces mesures. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Dans ce débat, il faut retenir deux mots et une interrogation : continuité ou rupture ?
Germinal Peiro a bien fait de rappeler le travail de fond qui avait été fait de 1998 à 2002 et les conditions du financement budgétaire et du plan quinquennal, régulier, qui avait été mis en oeuvre. Il a bien fait aussi de rappeler ce régime complémentaire obligatoire pour les chefs d'exploitation. À cette époque, notre collègue Colombier avait dit : « l'État devra assumer ses responsabilités et s'engager dans une programmation budgétaire pluriannuelle ». Alain Marleix lui-même disait : « il est indispensable de prévoir une intervention de l'État à travers une participation financière ; ce ne sont pas les cotisations qui permettront de financer le régime ».
Dans ce débat, nous partagions l'idée qu'il était nécessaire d'intervenir pour améliorer la situation des chefs d'exploitation, mais aussi – c'est ce que nous proposons aujourd'hui – celle des conjoints et des aides familiaux.
Aujourd'hui, je constate que ce débat qui s'était noué entre nous est en train de se rompre. Loin des promesses du Président de la République et du Gouvernement, vous créez, vous accentuez la fracture puisque, depuis sept ans, les mesures prises n'ont pas l'ampleur de celles qui avaient mises en oeuvre auparavant.
La vérité, le Premier ministre l'a dit, c'est qu'il n'y a plus rien dans les caisses.
La vérité, M. le ministre de l'agriculture l'a indiqué aux représentants des groupes d'études sur les fruits et les légumes qu'il recevait hier matin, c'est qu'il n'a plus aucune marge de manoeuvre financière et que le Gouvernement ne lui laissera pas dépenser un euro de plus dans le cadre de son budget.
La vérité, c'est que vous avez fait d'autres choix, dommageables pour les finances publiques, celui du bouclier fiscal, celui des niches fiscales et des niches sociales.
La vérité, c'est que vous affaiblissez la respiration démocratique en reportant les votes sur cette proposition de loi à mardi prochain.
La vérité, André Chassaigne l'a souligné, c'est que nous ne nous habituons pas au scandale, et vous avez tort, monsieur Herth, de chercher à faire croire que ce débat ne serait qu'électoral et régional.
Ce n'est pas une posture, madame la secrétaire d'État.
Je rappellerai les propos d'Alain Marleix au cours de la discussion de février 2002 : « compte tenu du message fort qu'elle adresse aux retraités agricoles, compte tenu aussi du travail effectué, notamment à partir des propositions de loi […], le groupe RPR votera ce texte ».
Aujourd'hui, vous confirmez la rupture alors que la dignité de ce débat commandait une continuité dans l'action.
L'article 5 prévoit l'attribution de points gratuits puisque nous proposons de mettre en place un régime qui s'adresserait à des personnes qui n'ont pas cotisé et, comme nous l'avions fait en 2002, aux actuels retraités.
Alors que nous nous acheminons vers la fin du débat, je voudrais insister sur le fait que ce texte s'adresse essentiellement à des femmes. Les conjoints d'exploitation sont à 80 %, 90 %, voire 95 %, des femmes. Tous ceux qui parmi nous connaissent le monde rural savent le rôle qu'ont joué les femmes dans la vie des exploitations agricoles de notre pays. Je crois que, au moins sur ce point, nous pourrions être d'accord. Les femmes ont tenu la maison quand les maris étaient en captivité. Et si le système social d'assurance vieillesse en agriculture a été défaillant, il l'a été particulièrement pour les femmes. En effet, ce régime s'est mis en place progressivement à partir de 1952, mais n'a concerné, au début, que les chefs d'exploitation. Aujourd'hui, ce sont ces femmes-là, celles qui faisaient deux journées, une aux champs et une autre à la maison, qui réclament justice. Aujourd'hui, ce sont ces femmes-là qui nous demandent, puisque nous nous déclarons favorables à la parité, de la mettre en application. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la secrétaire d'État, tout le monde est d'accord pour dire qu'il n'est pas normal qu'une discrimination sexiste soit faite dans les entreprises : le salaire moyen des femmes, à qualification égale, est de 20 à 25 % inférieur au salaire des hommes. Eh bien, ces femmes-là nous demandent, elles aussi, la parité. Elles savent qu'elles ne pouvaient pas entrer dans le régime comme les chefs d'exploitation, mais elles considèrent que leur travail dans l'agriculture, auprès de leur famille et de leur époux, a été largement l'équivalent de celui des hommes.
Ce texte s'adresse à elles car c'est à elles que nous devons penser en priorité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
L'amendement n° 1 prévoyait simplement de substituer au 1er janvier 2008 le 1er juillet 2010 comme date d'entrée en fonction du régime. Le 1er janvier 2008 avait été prévu parce que j'avais déposé cette proposition de loi en novembre 2007. La moindre des choses, pour être cohérent, serait donc de reporter cette date au 1er juillet 2010.
Je dois vous informer que la commission des affaires sociales a rejeté cet amendement.
L'avis du Gouvernement est défavorable puisque le dispositif lié à l'article 5 est rejeté.
Sur l'article 6, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à Mme Marylise Lebranchu.
M. Censi nous dit : en fait, vous nous demandez de faire aujourd'hui ce que nous vous avions demandé de faire en 2002. C'est exactement cela : instituez ce matin le régime que vous aviez réclamé en 2002. C'est tout.
Vous nous répondez que ce n'est pas possible parce qu'il n'y a pas d'argent.
Vous n'avez pas eu une seule année de décroissance. Donc notre pays est plus riche, et les bases d'imposition sont plus importantes. Même avec la crise, sur laquelle on pourrait revenir, nous avons davantage les moyens aujourd'hui de financer cette mesure.
Pour les commerçants et les artisans, nous avons trouvé une solution, c'était la fameuse TACA, la taxe sur les grandes surfaces. À l'époque, elle n'était pas intégrée au budget général et permettait, d'une part, de soutenir le régime de retraite des artisans et des commerçants entre 300 et 600 millions suivant les cas, d'autre part, d'aider les maires à rénover leur centre-ville.
Cette taxe a crû de façon exponentielle. Elle rentre totalement dans le budget de l'État et si vraiment, vous n'avez rien d'autre à proposer au ministre, demandez-lui 130 millions d'euros sur la taxe prélevée sur les grandes surfaces qui se servent largement de l'agriculture…
Prélever 130 millions sur la TACA, c'est rien, le ministre du budget ne s'en rendra même pas compte, d'autant que les grandes surfaces ne cessent d'augmenter, mètre carré après mètre carré, leurs bénéfices.
Donc, si vous ne voyez pas l'opportunité d'augmenter les recettes de l'État – ce que, politiquement vous assumez –, demandez par exemple que la TACA nourrisse le régime de retraite des conjoints auxquels on doit rendre hommage. Je n'aime pas le pathos, mais quand je reçois dans ma permanence des femmes qui ont perdu leur mari, et dont la pension de réversion ne leur permet pas de garder la maison qu'elles ont acquis en décohabitant de leurs enfants, j'ai honte.
Ces 130 millions, vous les pouvez les trouver, et, si vous voulez, je vous montrerai où est cette ligne budgétaire dont on parle trop peu. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
L'argument principal, madame Lebranchu, pour ne pas accepter votre proposition n'est pas que nous n'avons pas d'argent.
Comment avons-nous financé le régime agricole que vous n'aviez pas financé ? Où avons-nous trouvé les 8 milliards d'euros pour combler le déficit ?
Les arguments, vous ne les entendez pas parce que vous ne connaissez pas le sujet, chers collègues. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous avons comblé ce que l'on appelait le déficit du régime agricole, qui est un régime social, madame Lebranchu, dois-je le rappeler ?
Vous avez évoqué la situation des commerçants et artisans. Dois-je vous rappeler qu'ils ont financé leur propre régime de retraite complémentaire obligatoire ? Le régime agricole est le seul, historiquement, qui a été financé par la solidarité nationale par l'octroi de points gratuits.
Personne ne considérait que c'était une solution définitive, parce que c'est un régime qui veut vivre debout, aux côtés et dans le même respect que le régime général, ce que je souhaite et ce qui n'a pas toujours été le cas lorsque vous étiez aux affaires.
Debout, cela signifie la parité entre les prestations et les cotisations.
Deuxièmement, monsieur le rapporteur, si j'égrenais toutes les mesures qui ont été prises, avec tous les montants, vous constateriez que ceux-ci dépassent largement les 130 millions d'euros, ne serait-ce que depuis 2009. Nous en sommes à 300, 400, 500, 600 millions d'euros, uniquement sur les augmentations des retraites.
C'est la vérité.
Vous êtes revenu sur les 116 millions d'euros inscrits en loi de finances et vous avez prétendu que le seuil de 750 euros prévu dans le décret avait empêché de dépenser 43 millions d'euros. Mais ce seuil existait déjà bien avant le décret – celui-ci ne l'a pas modifié. Je rappelle que la décision a été prise, suivant le souhait du Président de la République, de porter ce seuil à 800 euros, le 10 janvier 2010.
Donc tenez-vous au courant, s'il vous plaît, avant de nous accuser de ne rien faire.
Non seulement, ils ne votent pas les budgets mais en plus, ils ne les lisent pas !
Cet article 6 est le dernier article de la proposition de loi. Ce sera donc ma dernière intervention.
L'article 6 prévoyait de confier la gestion du régime d'assurance complémentaire des conjoints et des aides familiaux à la MSA, cela ne vous surprendra pas. Mais, puisque vous voulez des nouvelles de la MSA, je vais vous en donner.
Aujourd'hui, la MSA nous indique que l'État n'arrive pas à honorer ce qu'il doit payer.
Nous en sommes à 15 millions d'euros de retard chaque année depuis quatre ans.
L'État doit 60 millions d'euros à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, monsieur Censi. Voilà la réalité.
Le président national pourra vous le confirmer par écrit, si vous le lui demandez.
Je voudrais terminer ce débat en faisant plusieurs observations.
D'abord, le système complémentaire d'assurance vieillesse facultatif, qu'on appelait COREVA dans l'agriculture, n'a pas fonctionné. C'est pourquoi nous avons voulu un régime complémentaire obligatoire.
Nous avons souhaité un régime complémentaire obligatoire par répartition parce que nous ne croyons pas au régime par capitalisation que le Président de la République défendait il y a deux ans. Nous ne croyons pas non plus que vous ferez avancer ce dossier en le noyant dans le débat général sur les retraites. C'est encore une promesse qui ne sera pas tenue.
Nous croyons au contraire que, depuis huit ans que nous avons mis en place le régime pour les chefs d'exploitation, il est temps de faire un pas supplémentaire. Je vous rappelle d'ailleurs que la loi prévoyait qu'un rapport nous indiquerait comment nous pourrions élargir le régime aux conjoints et aux aides familiaux.
Ensuite, je voudrais revenir sur une remarque du président Méhaignerie. Je m'excuse de parler en son absence, mais j'ai été choqué quand il a dit que les agriculteurs ne voulaient pas cotiser parce qu'ils préféraient capitaliser. De qui parle-t-on ? Ceux qui sont le plus affectés par l'indigence des retraites agricoles, ce ne sont pas les agriculteurs de la Beauce et de la Brie, ce ne sont pas les chefs d'entreprise agricoles qui travaillent des milliers d'hectares.
Ceux qui sont affectés par l'indigence du montant des retraites, ce sont les agriculteurs qui vivent encore sur des exploitations familiales, sur des petites et moyennes exploitations.
Ce sont eux à qui on imposait des cotisations basées sur le revenu cadastral. Comme celui-ci était faible, forcément leurs cotisations étaient très faibles.
Ne nions pas l'existence de ces petits paysans, ne nions pas le fait que la misère existe en agriculture, même chez les actifs puisque, dans certains départements, comme l'Aveyron, 10 % des agriculteurs ont perçu le RMI ou le RSA.
Nous devons regarder les choses en face et ne venez pas nous dire que les retraités agricoles de l'Aveyron sont riches, monsieur Censi, nous ne vous croirons pas. Je ne sais pas d'ailleurs ce que ces retraités penseront de vos propos de ce matin.
La vérité, mes chers collègues, c'est que nous avons l'occasion de permettre une avancée sociale. Tout le monde a dit que c'était une mesure de justice : vous-même l'avez dit en commission des affaires sociales, vous-même le disiez en 2002.
Alors, mes chers collègues, soyez cohérents et demandez au Gouvernement de faire le même effort que celui qu'avait réalisé le gouvernement Jospin. Nous sommes exactement dans le même cas de figure, dans le cadre d'une proposition de loi. Mais, au lieu de dire non comme le Gouvernement le fait aujourd'hui, le gouvernement Jospin avait dit oui, avait accepté de mettre le régime en place et s'était engagé à faire participer l'État.
Votre refus est inacceptable, inadmissible. J'espère que mardi, par scrutin public, les collègues de cette assemblée, dans leur ensemble, vous ramèneront à la raison et feront avec nous une nouvelle avancée sociale qui ne sera que justice pour les retraités agricoles de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Les articles 7 et 8 ont été déclarés irrecevables par la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi auront lieu le mardi 26 janvier, après les questions au Gouvernement.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Débat sur les collectivités territoriales et la recentralisation;
Proposition relative aux services sociaux d'intérêt général.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma