La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale (no 2915).
Madame la présidente, monsieur le ministre du budget, mes chers collègues, je suis très heureux de parler devant un hémicycle aussi fourni, passionné par ce projet de loi extrêmement important, comme chacun en convient…
Nous sommes donc appelés à nous prononcer sur le texte issu de la CMP concernant la reprise de la dette sociale par la Caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES.
La CMP s'est conclue sur un accord, ce qui n'a rien d'étonnant car sa composition avait été soigneusement préparée. Habituellement, le président de la commission saisie au fond préside la CMP et les rapporteurs des commissions saisies au fond ou pour avis en font partie. Curieusement, et il s'agit là en quelque sorte d'une première, nos collègues Jean-Luc Warsmann et Yves Bur, pourtant fins connaisseurs du dossier, mais qui avaient émis un avis différent de celui du Gouvernement, ont été écartés de la CMP. Voilà qui ne renforce pas le pouvoir du législatif par rapport à l'exécutif.
Il y a un autre fait curieux : alors que la commission des lois et la commission des affaires sociales avaient refusé cette proposition de prolongement de la CADES, le vote du parti majoritaire a été malgré tout quasiment unanime. On peut se demander qui a changé d'avis entre les réunions des commissions et la séance publique !
Venons-en au fond.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire lors de la commission spéciale réunie à Bercy, à laquelle vous nous aviez conviés, monsieur le ministre – nous avions commencé avec votre prédécesseur, Éric Woerth, qui est bien connu –,…
…mais aussi lors du débat dans notre assemblée, particulièrement dans mon explication de vote, le Nouveau Centre approuve le principe du transfert de la dette sociale à la CADES. Il approuve le principe de l'utilisation du Fonds de réserve des retraites pour financer le déficit prévisionnel de la branche retraite d'ici à 2018, mais il ne peut accepter la prolongation de la durée de vie de la CADES jusqu'en 2025 et le transfert de 0,28 % de CSG de la branche famille vers la CADES.
La CADES, créée par Alain Juppé en 1996 pour reprendre la dette sociale, a vocation à assurer le financement des déficits constatés. C'est pourquoi, pour le Nouveau Centre, il est logique de transférer à la CADES les déficits aujourd'hui non financés de 2009 et de 2010, ainsi que le déficit prévisionnel pour 2011, que nous voterons dans quelques jours, pour un total de 68 milliards d'euros. Mais nous demandons qu'à compter de 2012 les lois de financement de la sécurité sociale soient votées en équilibre pour ne pas créer de nouveaux déficits.
La branche vieillesse devrait en principe être équilibrée. Il reste à veiller à l'efficience des dépenses de santé et à équilibrer les dépenses indispensables par des recettes correspondantes. Il s'agit en effet des dépenses qui doivent être assumées par notre génération. Est-il responsable d'accepter des déficits qui seraient à nouveau transférés à la CADES, avec sans doute une nouvelle prolongation de celle-ci ?
De même, le Nouveau Centre accepte le principe du financement par le FRR, à raison de 2,1 milliards par an, du déficit prévisionnel de la branche vieillesse et du fonds solidarité vieillesse, le FSV, d'ici à 2018, dont le montant s'élève à 62 milliards. Il serait en effet curieux, alors que le FRR dispose aujourd'hui de 33 milliards, d'emprunter pour financer le déficit de la branche vieillesse.
Mais nous avons posé deux conditions. Il faut que l'équilibre soit réellement obtenu en 2018 – et nous avons, hélas ! quelques doutes sérieux sur ce point – et que nous nous engagions avec volontarisme dans une réforme systémique à points ou à comptes notionnels pour assurer l'équité et l'équilibre financier.
J'ai eu l'occasion d'insister – peut-être très lourdement aux yeux de certains – tout au long des débats concernant la réforme des retraites, sur cette innovation majeure. Je ne peux que me réjouir que le Sénat ait voté un amendement en ce sens prévoyant une réflexion nationale en 2013.
Finalement, nous devrions donc être satisfaits. Malheureusement, la solution retenue pour financer cette reprise de dette est contraire à nos principes.
À l'origine, la CADES devait terminer sa courte vie en 2009. Nous ne devrions donc plus en parler mais, en 1998, Martine Aubry a confié à la CADES 13 milliards et, pour ne pas augmenter les prélèvements, a prolongé sa durée de vie de cinq ans, c'est-à-dire de trois ans par année de déficit.
En 2004, Philippe Douste-Blazy lui a transféré 50 milliards et, en appliquant le même principe courageux, a prolongé sa durée de vie de sept ans, jusqu'en 2021.
De nombreux parlementaires avaient alors dénoncé cette dérive. En 2005, avec Yves Bur, j'avais, au nom de l'UDF, approuvé la proposition de Jean-Luc Warsmann, ici présent, prévoyant que tout nouveau transfert de dette à la CADES devait s'accompagner d'une recette correspondante.
En effet, chaque génération doit payer ses propres dépenses. Le Conseil constitutionnel a donné à cette disposition de bon sens et de bonne gestion la valeur d'une loi organique. C'est pourquoi, en 2009, le transfert d'un nouveau déficit de 34 milliards s'est accompagné d'une recette correspondante de 0,2 % de CSG. Malheureusement, il s'agissait d'un transfert provenant du FSV, lequel, bien entendu, alors qu'il était équilibré, s'est retrouvé en déficit faute de financement, ce que j'avais dénoncé à l'époque.
Le projet de loi et, aujourd'hui, le texte de la CMP nous proposent de faire sauter le seul verrou vertueux de notre législation en revenant sur la disposition de la loi organique de 2005, pour permettre de prolonger la durée de vie de la CADES de 2021 à 2025. La CADES aura ainsi été prolongée de seize ans et les dépenses de 2011 seront payées en 2025.
Certes, et vous l'avez dit à plusieurs reprises, monsieur le ministre, le report de quatre ans ne constitue pas la durée d'une génération, mais au total le report aura été de seize ans et nos dépenses d'aujourd'hui seront bien payées en 2025, donc sans doute par nos enfants.
En outre, le projet de loi avait prévu trois recettes nouvelles, dont deux non pérennes. Finalement, ces recettes seront transférées à la branche famille en échange de 0,28 % de CSG. Si le financement de la CADES semble ainsi assuré, la branche famille, déjà déficitaire, va se trouver déstabilisée. Est-ce raisonnable ?
Le Nouveau Centre souhaite le maintien d'un financement simple de la CADES.
La CRDS à base large aurait dû être augmentée. Les services de Bercy ont calculé que l'incidence de l'augmentation de la CRDS pour financer le déficit aurait été de 0,05 % du PIB, ce qui est négligeable.
Une augmentation faible de la CRDS ne pèserait pas sur le pouvoir d'achat, ou beaucoup moins que les diverses augmentations subies par nos concitoyens. Je pense à la hausse des impôts locaux, des tarifs d'EDF au mois d'août – en attendant la prochaine, certainement dans quelques jours –, des franchises médicales, du forfait journalier, sans oublier les déremboursements de médicaments ou encore les augmentations de cotisations des complémentaires santé.
Le coup de rabot sur les niches sociales et fiscales, que le Nouveau Centre approuve, conduira bien entendu à des rentrées fiscales complémentaires, qui ne seront plus disponibles pour le pouvoir d'achat.
Par conséquent, le Nouveau Centre approuve la reprise des déficits par la CADES pour 68 milliards. Il approuve également l'utilisation du Fonds de réserve des retraites pour financer le déficit prévisionnel de 62 milliards de la branche vieillesse et du Fonds de solidarité vieillesse d'ici à 2018. Il demande que les lois de financement de la sécurité sociale, à compter de 2012, soient votées en équilibre pour ne pas recréer de déficit : il s'agit d'avoir des recettes correspondant aux dépenses. Nous espérons que la branche vieillesse sera équilibrée et qu'une réforme systémique sera rapidement engagée.
Mais le Nouveau Centre désapprouve le fait que ce texte fasse sauter le seul verrou vertueux existant dans notre législation, qu'il prolonge de quatre ans la durée de vie de la CADES en faisant payer nos dépenses de 2009 à 2011 par les actifs de 2025 et qu'il fragilise la branche famille en lui prenant une recette sûre, la CSG, remplacée par des recettes non pérennes.
C'est pourquoi le Nouveau Centre votera contre le texte de la CMP, comme il l'avait fait unanimement contre le projet en première lecture.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure de la commission mixte paritaire, nous arrivons ce soir à la conclusion de nos débats sur le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale, dont le texte a été modifié par les deux assemblées.
Nous en avons tous bien compris l'enjeu majeur et pouvons tous nous accorder sur le constat qu'il est urgent d'éponger les déficits et de rééquilibrer les comptes sociaux, sans transmettre aux générations futures le poids de nos dettes actuelles.
La situation est en effet grave en raison du contexte, qui se caractérise, d'un côté, par la diminution drastique des recettes pour la sécurité sociale due à la crise et, de l'autre, par l'impératif absolu de réduire les déficits publics.
Ainsi, le Gouvernement a pris ses responsabilités pour la reprise des dettes du régime général pour la période allant de 2009 à 2011. De plus, il s'engage à financer les déficits futurs pour la branche vieillesse jusqu'à ce que celle-ci retourne à l'équilibre, en 2018.
Aux reproches incessants qui nous ont été faits par l'opposition, qui critique dix années de politique sociale désordonnée, je veux dire que la Caisse d'amortissement de la dette sociale a été créée pour combler des déficits sociaux et que ce problème, récurrent depuis de nombreuses années, a affecté tous les gouvernements quels qu'ils soient.
Qu'avez-vous fait d'ailleurs lorsque vous étiez au pouvoir, à part engranger les bénéfices de l'embellie économique des années 1998 à 2000,…
Grâce à notre politique ! Vous ne pouvez pas en dire autant : il n'y a rien à engranger.
…sans vous préoccuper ni des dépenses de maladie, ni des dépenses de retraite ?
Nous nous répétons parce que c'est essentiel et que le constat n'a pas changé !
Mes chers collègues, seule Mme Vasseur a la parole ; merci de l'écouter !
Ce sont ces années d'inaction que nous devons payer aujourd'hui et le Gouvernement ne se dérobe pas ; il assume ses responsabilités et propose une solution durable au problème de la dette sociale.
Afin que chacun puisse exprimer son point de vue, vous avez tenu, monsieur le ministre, à réunir une commission de la dette sociale, dans laquelle les groupes politiques des deux chambres du Parlement ont été représentés.
Elle a permis de convenir de trois grands principes, que vous avez énoncés et auxquels nous adhérons : pas d'augmentation des prélèvements obligatoires, ce qui est une mesure de bon sens en période de reprise de la croissance ; pas de report sur les générations futures ; pas d'immobilisme, car il est impossible d'attendre plus longtemps.
Le schéma de financement de reprise de la dette sociale se fonde sur trois mécanismes.
Premièrement, un allongement exceptionnel et limité à quatre ans de la durée de vie de la CADES, de 2021 à 2025, pour amortir le déficit de crise de 34 milliards d'euros.
Deuxièmement, le décaissement anticipé du Fonds de réserve des retraites pour les déficits à venir de la branche vieillesse de 2011 à 2018, soit 62 milliards d'euros. Soyons réalistes : pourquoi ne pas utiliser ce fonds de réserve en cas de période difficile ?
Ce n'est pas du tout un pillage, c'est une utilisation logique d'un fonds dont c'est la vocation !
Enfin, le troisième mécanisme, c'est la poursuite de la réduction de niches fiscales pour couvrir les 34 milliards d'euros de déficit structurel.
Le Parlement a amélioré le texte en adoptant notamment au Sénat une clause de garantie des ressource et de retour à meilleure fortune – c'est l'amendement Vasselle – et à l'Assemblée nationale un amendement de Marie-Anne Montchamp sur la pérennité des ressources. Nous leur en savons gré.
Lors de la réunion de la CMP, le Sénat, par la voix de son rapporteur, s'est satisfait de la version proposée par l'Assemblée nationale.
Monsieur le ministre, votre projet de loi apporte une réponse globale au problème posé, avec un allongement très modéré de la durée de la CADES, la prise en charge des déficits passés, présents et à venir – dont les déficits vieillesse jusqu'en 2018, date du retour à l'équilibre ; il forme un tout cohérent avec la réforme des retraites qu'il nous faut désormais financer.
C'est dans le même esprit de lucidité et de responsabilité qui nous a animés jusqu'ici que le groupe UMP votera les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
S'exprimer devant un hémicycle presque plein comme celui-ci, quelle émotion ! (Sourires.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la rapporteure, monsieur l'ex-rapporteur de la commission des lois, mes chers collègues, nous allons, à l'occasion de l'examen de ce projet de loi organique, d'étonnement en étonnement.
En 2005, la majorité UMP s'était donné une règle, adoptée à l'unanimité, cochon qui s'en dédit : tout nouveau transfert de dette à la CADES devait être compensé par une augmentation des recettes de cette caisse. Aujourd'hui, cette règle gêne la majorité UMP : qu'à cela ne tienne, elle la change ! On prolonge donc la durée d'amortissement de la caisse, mais sans lui assurer les ressources correspondantes. Première source d'étonnement.
Je ferai un petit commentaire : dès lors, quelle confiance peut-on accorder au Président de la République, qui voudrait inscrire dans la Constitution des règles d'équilibre pour le budget de l'État ? Si tel était le cas, nous passerions notre temps à Versailles, réunis en Congrès, pour prévoir des exceptions constitutionnelles pour l'année considérée !
C'est exactement cela.
Autre source d'étonnement : le rapporteur de la commission des lois, saisie au fond, entraîne avec lui – par la force de ses convictions – l'unanimité de la commission pour rejeter le texte.
Sujet d'étonnement encore : le rapporteur de la commission des affaires sociales fait de même.
Autre source d'étonnement : les ressources transférées pour compenser – partiellement – la charge pour la CADES ne sont pas pérennes. Tiens, tiens ! La commission des finances déplace alors le trou, en reportant les ressources non pérennes vers la branche famille.
Nouvelle source d'étonnement : au moment du vote en séance publique, les opposants de l'UMP se sont évaporés – sauf sept d'entre eux, dont les rapporteurs de la commission des lois et de la commission des affaires sociales, MM. Warsmann et Bur.
Encore une source d'étonnement : ce jour-là, le président de la commission des affaires sociales ne prend pas part au vote ; peut-être n'avait-il pas envie de se prononcer ?
Autre sujet d'étonnement, que je partage avec notre collègue Vidalies qui s'est exprimé sur ce point tout à l'heure : lorsqu'il s'est agi de réunir la CMP, les deux rapporteurs et le président de la commission des affaires sociales ont disparu. Avis de recherche !
Il est vrai que c'était la condition nécessaire pour que cette CMP normalisée par l'UMP puisse aboutir ! Elle a, si j'ai bien compris, conclu ses travaux en adoptant le texte par huit voix pour le texte et six voix contre : si MM. Warsmann et Bur avaient été là, le résultat aurait été inversé. Pas besoin d'avoir fait de longues études mathématiques pour le comprendre !
Autre sujet d'étonnement – heureux : l'un des deux rapporteurs est réapparu ce soir.
Il n'est donc peut-être réapparu que momentanément.
Autre source d'étonnement, cher Jean-Luc Préel : tout à l'heure, le groupe Nouveau Centre, opposé au texte comme il l'a montré en première lecture par son vote, n'a pas voté pour autant la motion de rejet préalable défendue par Alain Vidalies. Comprenne qui pourra.
C'est très cohérent, bien sûr. Il faut reconnaître certaines qualités au Gouvernement et à la majorité de sa majorité : ils sont cohérents, et ils ont de la suite dans les idées.
Patiemment, chaque année, ils mettent en déficit, et progressivement en faillite, la sécurité sociale, en reportant la charge sur les générations futures, et sur le marché des assurances privées – en tout cas pour ceux de nos concitoyens qui en ont les moyens.
Quatre textes sont actuellement en discussion à l'Assemblée nationale : le projet de loi de finances pour 2011 ; le projet de loi de financement de la sécurité sociale, que nous examinerons dans quelques minutes ; le projet de loi de réforme des retraites ; et ce projet de loi organique sur la gestion de la dette sociale, qui constitue en quelque sorte la clé de voûte du dispositif.
Ce sont donc 130 milliards d'euros qui doivent être transférés à la CADES : 34 milliards correspondent à un déficit « de crise » – pour cela, on augmente de quatre ans la durée de vie de la caisse, sans lui allouer de ressources supplémentaires ; 34 milliards d'euros forment une dette « structurelle » – c'est la dette définie comme n'étant pas due à la crise, et qui est donc, monsieur le ministre, de votre responsabilité.
Cette dette-là est transférée à la CADES, avec désormais une ressource pérenne, venue de la CSG, puisque la monnaie de singe a été envoyée vers la branche famille.
Enfin, il y a 62 milliards d'euros de déficits futurs, dus à l'assurance vieillesse pour les déficits des années 2011 à 2018 : c'est le Fonds de réserve des retraites qui y pourvoira – voilà pour le stock, 32 milliards, et le flux, puisque les canaux d'alimentation sont désormais dirigés vers la CADES. Le Fonds de réserve des retraites est ainsi liquidé !
C'est ce que vous faites. Ce serait bien que vous compreniez ce que vous faites, parce que c'est grave. C'est très simple, aussi. D'ailleurs le ministre, lui, a bien compris…
Vous essayez de vous défausser, monsieur Vitel, mais vous êtes bien en train de couler le système !
D'ici à 2018, vous aurez transféré une part de la charge des retraités vers l'UNEDIC et les collectivités locales, via le RSA ; vous aurez aspiré les excédents des régimes complémentaires.
Mais bien sûr que si, vous êtes déjà en train de le faire, et vos collaborateurs ont travaillé sur le sujet. On connaît la maison !
Tous ces constats, et ce projet de loi organique, sont la preuve – s'il en fallait une – que votre soi-disant réforme des retraites n'est pas financée.
J'ajouterai un autre constat, qui se lit dans le PLFSS pour 2011 – car tout n'est pas dit ici : d'autres menaces s'accumulent ; d'autres nuages s'amoncellent. Le PLFSS nous annonce en effet un déficit persistant pour les quatre branches, au moins jusqu'en 2014, le total hors vieillesse – c'est-à-dire le total non pris en compte dans les transferts des déficits à venir – s'élevant à près de 45 milliards d'euros.
Monsieur le ministre, la question est claire, et j'espère que vous allez me répondre – pas comme la dernière fois. Qu'allez-vous faire de ces 45 milliards d'euros ? Prévoyez-vous aussi de les transférer à la CADES, et si oui dans quelles conditions ?
C'est une question précise, et il faut y répondre.
Pourtant, d'autres voies pouvaient être choisies. Chaque année, de PLFSS en PLFSS, nos amendements ont été repoussés. Mais nous ne sommes pas les seuls à rechercher des solutions. Il faut reconnaître à Mme Montchamp une forme de constance : l'an dernier, déjà, elle proposait un relèvement de 2,2 points du taux de la CRDS, en retirant, « par souci de justice fiscale », la CRDS des impositions prises en compte pour le calcul du droit à restitution dans le cadre du célèbre bouclier fiscal.
L'an dernier, Mme Montchamp avait été désavouée par la majorité UMP ; cette année, elle a récidivé en commission des finances, mais avec succès : son amendement, qui prévoit d'augmenter de cinq points les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et sur un certain nombre de produits de placement – et dont le rendement est évalué, tenez-vous bien, monsieur Vitel, à 5,4 milliards d'euros par an au moins – a été adopté.
Je vous pose donc une question précise. Pourquoi ne pas avoir adopté cet amendement à l'occasion du présent texte ? Pourquoi ne pas envoyer à la CADES ces ressources pérennes ? On pouvait parfaitement le faire ; vous ne le faites pas.
Ne serait-ce pas que vous anticipez le rejet possible de votre amendement en séance publique, à la demande du Gouvernement et de l'UMP ? On peut le craindre.
Pas de procès d'intention : nous verrons bien ce que fera le Gouvernement.
En tout cas, la démonstration est faite qu'il est possible de trouver 5,4 milliards d'euros par an ; vous auriez pu le faire, vous ne l'avez pas fait.
Pour le moment, vous vous contentez de prolonger la durée de la dette que vous avez délibérément accumulée. Cela, nous ne l'acceptons pas.
Depuis quelques semaines, les jeunes de notre pays se sont joints au mouvement social qui s'oppose, entre beaucoup d'autres sujets, au projet de loi sur les retraites.
La droite s'en offusque. Mais, mes chers collègues de l'UMP, ce que vous reprochez aux jeunes, ce n'est pas de descendre dans la rue ; ce que vous leur reprochez, c'est de vous avoir démasqués.
Ils ont très bien compris ce qui se passe dans l'enchevêtrement des quatre textes que nous examinons : les jeunes d'aujourd'hui, qui auront vingt-cinq à trente ans en 2020, devront alors assurer par leur travail et leurs cotisations les retraites de leurs parents et de leurs grands-parents – c'est normal ; ils devront aussi faire face à la pause démographique des papy-boomers, arrivés en masse à la retraite à ce moment-là, et pour cela ils ne disposeront plus du Fonds de réserve des retraites que vous dilapidez dès aujourd'hui. La cigale, à ce moment-là, se trouvera fort dépourvue.
Monsieur Gilard, arrêtez donc de lire ostensiblement L'Humanité ! (Sourires.)
Mais ils devront encore – merci, monsieur Sarkozy – assumer la dette sociale de leurs aînés, jusqu'en 2025 désormais, c'est-à-dire payer nos feuilles de soins des années 1999-2000.
Ils ont parfaitement compris l'avenir que vous leur préparez. De celui-là, nous ne voulons pas ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Malgré l'accord arraché au forceps par le Gouvernement aux députés de sa majorité et confirmé en commission mixte paritaire, le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale a suscité, et suscite toujours, de très vives critiques, voire une franche opposition.
Il faut dire que ce texte technique en apparence, ne portant soi-disant que sur la durée de vie de la CADES, est en fait une pièce essentielle du mécano gouvernemental en matière de financement de la dette sociale ; c'est la pièce qui conditionne l'équilibre bien hypothétique de la réforme des retraites, et qui autorise la Caisse d'amortissement de la dette sociale à lancer 130 milliards d'euros d'emprunt. Cette opération coûtera en fait aux contribuables plus de 180 milliards d'euros ; les deux tiers des 50 milliards d'euros d'intérêts iront directement dans les poches d'investisseurs étrangers et des marchés financiers.
Tout à fait conscient de ces enjeux financiers énormes, sans compter les enjeux politiques, mais sous couvert encore de la crise, le Gouvernement demande au Parlement d'autoriser cette opération sans prévoir en face les recettes pour rembourser ce transfert de dettes. Il nous demande de l'affranchir du respect des règles constitutionnelles et organiques en vigueur, en l'occurrence celle posée par le législateur en 2005 prévoyant que tout transfert de dette à la CADES doit être gagé par le transfert d'une ressource nouvelle afin de ne pas prolonger la durée de vie de cette caisse. Pour parler très simplement, vous vous asseyez sur vos propres principes ; vos roulements de muscles d'alors se sont révélés n'être que fanfaronnades.
Or, « lancer des emprunts lorsque l'on sait que l'on n'a pas l'argent nécessaire pour les rembourser, cela s'appelle faire de la cavalerie ». « C'est insensé, ce n'est pas responsable de faire des emprunts à long terme pour payer les déficits de fonctionnement ». « C'est faire peser une partie du coût des boîtes de médicaments, des prestations sociales et des soins médicaux sur les Français qui travailleront en 2022. » De qui viennent ces fortes déclarations ? Eh bien tout simplement du président et rapporteur de la commission des lois, soutenant jusqu'au bout la position de la commission saisie au fond, qui avait supprimé l'article 1er du texte transférant à la CADES une dette nouvelle, reportant de quatre années la date d'apurement de la dette sociale.
La commission des affaires sociales saisie pour avis a également refusé le principe même de l'allongement de la durée d'amortissement de la dette sociale et voté à la quasi-unanimité la suppression de l'article 1er, en attendant un plan B de financement.
Pour justifier une telle position de rejet, notre collègue Yves Bur, rapporteur pour avis, déclarait dans cet hémicycle : « Malgré la crise, il n'est pas moralement possible de continuer à recourir aux facilités du passé » et il invitait les membres de la majorité à « cesser de se décharger de nos responsabilités financières sur nos jeunes ».
Clopin-clopant, à l'issue d'une séance de nuit tendue et plus que confuse, y compris dans le décompte des votes, le Gouvernement est parvenu à sauver les meubles, mais au prix d'une reddition peu glorieuse des thuriféraires de l'orthodoxie budgétaire.
Grâce à l'appui du rapporteur de la commission des finances, jugeant acceptable ce report de quatre ans de la durée de vie de la CADES au regard des circonstances, tolérant une transgression à la règle organique pour permettre à Nicolas Sarkozy de respecter, tout du moins en apparence, sa promesse de non-augmentation des prélèvements obligatoires, l'article 1er a été rétabli. Il a même été complété pour préciser la nature et l'assiette des impositions affectées à la CADES afin d'évacuer les critiques légitimes portant sur le caractère insuffisamment solide, pérenne et dynamique du panier de recettes de 3,2 milliards d'euros que le Gouvernement ambitionnait de lui affecter.
Pour tenter de calmer la fronde des députés UMP et Nouveau Centre, Mme Montchamp est allée jusqu'à s'engager à changer en loi de finances l'affectation des trois nouvelles taxes sur les assurances prévues pour alimenter la CADES.
Une nouvelle partie de bonneteau entre les recettes de cette caisse et celles de la sécurité sociale commençait alors.
Le problème, mes chers collègues, c'est que ce petit jeu de dupes prive la sécurité sociale, plus exactement la branche famille, de près de 1,2 milliard de recettes de CSG, et ce dès 2013. Cette politique du sapeur Camember, pour reprendre l'expression d'Yves Bur…
J'ai de bonnes lectures, je lis les rapports et j'étais présent en commission, monsieur Bur.
Cette politique du sapeur Camember, disais-je, qui consiste à combler un trou en en creusant un autre, fait que 27 milliards d'euros de prestations familiales ne pourront pas être versés dans les années à venir.
Nous n'avons pas été les seuls à refuser cette ponction inacceptable sur la branche famille. Six présidents de caisse ont pris position contre. L'UNAF a exhorté les parlementaires à renoncer à sacrifier la politique familiale, pourtant si chère au Président de la République.
L'appel à l'honneur, au courage, de notre collègue Warsmann vous demandant de « voter librement », de « savoir écarter les amicales pressions » a malheureusement trouvé peu d'écho au sein de la majorité.
En revanche, l'appel à la discipline du chef de file des députés UMP a, lui, été entendu. Rappelée à l'ordre, la majorité faisait allégeance à son président et passait outre à deux décisions ultra-majoritaires pourtant de ses commissions, dont celle de la commission saisie au fond. Pour éviter que la voix discordante de certains ténors de la majorité opposés au coeur même de ce projet de loi ne puisse encore s'exprimer, deux des rapporteurs du texte pour l'Assemblée nationale ont été tout simplement écartés de la commission mixte paritaire et le président de la commission des affaires sociales a préféré nous priver de sa présence.
Sans surprise donc, la commission acquise au Gouvernement a approuvé le texte dans les mêmes termes que celui qui avait été adopté le 19 octobre dernier, dans les circonstances houleuses que je viens de rappeler.
Les députés communistes, républicains, du parti de gauche, ultra-marins et verts confirment aujourd'hui leur vote contre ce projet de loi.
Nous n'acceptons ni la prolongation de la durée de vie de la CADES, ni la tuyauterie financière retenue par le Gouvernement qui creusera encore davantage le déficit du régime général, préparant une hausse de la CRDS mais éludant le débat sur d'autres sources de financement de la protection sociale.
Nous refusons également le pillage du Fonds de réserve des retraites, entraînant bien sa mort clinique. L'utilisation dès maintenant de plus de 30 milliards de ces actifs, alors que la loi interdisait de les consommer avant 2020, est totalement inacceptable.
En traitant avec autant de désinvolture la question des déficits sociaux que vos politiques ont créés et creusent chaque jour davantage, vous prenez une lourde responsabilité vis-à-vis des générations futures. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Dans une Assemblée nationale pourtant marquée par le fait majoritaire, encore accru par le climat de tensions sociales actuelles,…
…chacun a pu constater la force des oppositions au projet du Gouvernement de prolonger la durée de vie de la CADES : la commission des finances, saisie pour avis, qui critique, la commission des affaires sociales, saisie pour avis, qui refuse, la commission des lois, saisie au fond, qui refuse, une nouvelle tentative devant la commission des lois pour faire approuver cette position, rejetée à l'unanimité, le vote dans l'hémicycle dans les conditions que l'on sait, une commission mixte paritaire composée de manière inédite depuis 1958 dans le but d'être une chambre d'enregistrement – ce qu'elle a été.
Et nous voilà ce soir.
Mes chers collègues, j'ai eu l'occasion depuis le début de ce débat, tant en commission qu'en séance, d'exprimer les très fortes motivations qui m'amenaient à voter contre ce projet de loi. J'ai informé le Président de la République de cette position, j'ai voté contre le projet dans cet hémicycle, et je voterai à nouveau contre ce soir.
Mais je voudrais profiter de cette intervention pour envisager l'hypothèse que ce texte soit voté.
Quelles en seraient les conséquences ?
Première conséquence, la loi de financement de la sécurité sociale pourrait autoriser le lancement d'emprunts massifs, qui seraient remboursés par la création d'un nouveau prélèvement obligatoire, que paieraient les personnes qui travailleront en France entre 2022 et 2025.
Je ne souhaite absolument pas entrer dans la polémique. Est-ce un transfert aux générations futures ou pas ? Je n'en sais rien. Je me permets simplement de soumettre ce fait à l'attention de chacun : tous les enfants scolarisés aujourd'hui dans les écoles primaires de notre pays et qui choisiront de débuter leur vie professionnelle sans s'expatrier mais en travaillant en France commenceront leur vie professionnelle en payant un nouveau prélèvement obligatoire.
Cette taxe aura pour objet de rembourser une partie du coût des boîtes de médicaments, des soins médicaux et des prestations sociales que les Français auront dépensé entre 2009 et 2011. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Deuxième conséquence, la Caisse d'amortissement de la dette sociale sera autorisée à lancer de nouveaux emprunts, à condition que leur remboursement soit achevé en 2025 et que des recettes lui soient accordées pour les rembourser.
J'entends, de-ci, de-là, une interprétation des textes qui me semble totalement contraire à l'ordre constitutionnel et organique.
Selon cette interprétation, le texte ainsi voté permettrait au législateur ordinaire d'autoriser, dans une loi de financement de la sécurité sociale, la CADES à lancer des emprunts en mettant en face des recettes pour les rembourser, mais des recettes qui seraient prélevées sur le régime de sécurité sociale ou sur les organismes contribuant au financement de la sécurité sociale avant d'être transférées à la CADES.
Une telle interprétation me semble incompatible avec les textes constitutionnels et organiques en vigueur, même après l'approbation de ce projet de loi organique.
Si on autorise un gouvernement à l'avenir à proposer, dans la loi de financement de la sécurité sociale, de transférer 10 milliards d'euros à la Caisse d'amortissement de la dette sociale et de rembourser ces 10 milliards d'euros avant 2025 en transférant une recette existante à la sécurité sociale – au hasard, une part de CSG – alors, optiquement, l'emprunt ainsi réalisé pourrait être remboursé tous les ans avant 2025 mais, au même rythme, se construirait une nouvelle dette sociale d'un montant supérieur aux 10 milliards d'euros transférés.
Mes chers collègues, depuis que la CADES existe, c'est-à-dire depuis 1996, le coût d'amortissement de la dette sociale est de 40 %. Si l'interprétation que je viens de décrire était permise, on autoriserait la CADES à lancer un emprunt de 10 milliards d'euros et à retirer des recettes au régime de sécurité sociale pour le rembourser. Mais, à l'issue du remboursement de l'emprunt, avant 2025, on aurait généré une dette sociale de 14 milliards d'euros.
En proposant la CADES, le gouvernement d'Alain Juppé…
Il a proposé une caisse d'amortissement, pour que les dettes sociales soient remboursées au fil des ans.
Lorsque le législateur organique a introduit, en 2005, une date de fin de la CADES – je peux en témoigner à cette tribune ayant été l'auteur de l'amendement – que cherchait-il ? Il voulait qu'il y ait une date de fin de la dette sociale.
Il n'était pas question de créer, au fur et à mesure qu'on rembourse la dette sociale, une dette sociale encore plus élevée et de se retrouver, à la date de fin de la CADES, avec une dette encore supérieure. Le projet de loi qui vous est présenté et qui décale de 2021 à 2025 ne change rien à ce principe.
C'est important, madame la présidente, et en plus c'est le rapporteur initial du texte.
Il me semble extrêmement important, pour le respect de notre ordre juridique constitutionnel et organique, qu'il soit constaté à ce stade, avant que la loi ne soit promulguée, qu'une interprétation qui autoriserait l'amortissement d'une dette sociale en retirant des recettes au régime de sécurité sociale est contraire à notre ordre juridique. Elle ne serait autorisée par notre ordre juridique que si les régimes de sécurité sociale étaient excédentaires, auquel cas il serait possible de leur retirer une partie des recettes créant l'excédent pour accélérer le remboursement de la dette sociale. Tant qu'ils ne sont pas excédentaires, ce n'est pas autorisé.
Cette question mérite d'être réglée avant la promulgation de la loi, il y va de l'ordre juridique de notre pays.
Si cette question n'était pas réglée, si cette interprétation était autorisée, cela reviendrait à autoriser le recours à des procédés qui ont mené la IVe République à sa perte. En effet, on transformerait en quelque sorte la CADES en compte spécial du Trésor, qui serait autorisé à faire des impasses budgétaires, à faire de la cavalerie budgétaire. Mes chers collègues, si cette interprétation n'était pas interdite, c'est un des acquis de la Ve République qui s'effondrerait.
En cette période où la fragilité financière de notre pays n'a jamais été aussi grande, il est, je crois, du devoir de chacune et de chacun de préserver notre pays de tels errements. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et NC.)
Je voudrais tout d'abord féliciter M. Warsmann pour son courage. Lui au moins ne démord pas de sa logique, et c'est très bien.
Monsieur le ministre, ce tout petit texte de deux articles s'avère finalement très révélateur de votre politique en matière de gestion de la dette sociale.
Nous parlons quand même de 130 milliards d'euros à combler à l'horizon 2018.
En 2005, par une loi organique dont on connaît la portée, vous avez décidé, avec la foi du charbonnier à l'époque, qu'il fallait absolument éteindre la dette sociale au plus tard en 2021. Vous l'avez même gravé dans le marbre d'une loi organique. Cinq ans plus tard, nous voilà en train de détruire cette belle intention et votre projet repousse à 2025 l'amortissement final de la dette sociale par la CADES. Quel revirement en cinq ans ! Comment pouvez-vous remettre en cause la loi organique que vous avez vous-même votée ? Si encore cette loi avait été proposée par un autre camp, mais non, c'était votre loi organique. Et voilà que vous la remettez en question.
Sur la forme, la discussion de ce texte nous a valu de bons moments à l'intérieur de la majorité parlementaire. On a vu deux commissions, celle des lois, celle des affaires sociales, voter contre le projet du Gouvernement.
On a vu la rapporteure, Mme Montchamp, prise dans une tourmente dont elle a eu le plus grand mal à se dépêtrer après moult interventions, interruptions de séance et sévères rappels à l'ordre du Gouvernement. On se souvient de cette séance, il y a quelques semaines.
Tout cela a donné l'image d'une grande division entre vous sur un sujet de la plus haute importance. C'est en effet un sujet majeur. Il en va tout simplement de la survie de notre système de protection dont on connaît les déficits calamiteux du moment. Alors que les déficits avoisinaient une dizaine de milliards avant la crise, ils se situeront entre 20 et 30 milliards pour les années 2009-2011. Et tous ces déficits s'accumulent à la CADES qui n'avait pas vocation à durer, et encore moins à supporter des déficits de cette ampleur.
En 2018, la dette cumulée avoisinera 130 milliards d'euros, des chiffres qui donnent le tournis et peuvent donner à penser à certains de nos concitoyens que l'on peut vivre avec. C'est une grave erreur. Cette dette ne se résorbera pas d'un coup de baguette magique. Elle est là et bien là. Et que propose le Gouvernement en charge des affaires ? De pratiquer la politique de l'autruche : je ne veux rien voir, donc je renvoie à plus tard son extinction, à 2025 au lieu de 2021 ! C'est franchement irresponsable.
On peut essayer de comprendre votre position. Une reprise forte de la croissance, gage de nouvelles recettes, pourrait effacer la dette, mais qui peut croire que cela puisse intervenir dans les prochaines années ? Et quand bien même une partie de la dette serait épongée par ces recettes, tout le monde s'accorde à dire aujourd'hui qu'à ce niveau de déficit la croissance n'y suffira pas et qu'il faudra inéluctablement trouver des recettes nouvelles en augmentant soit la CRDS, instituée à cet usage, soit la CSG, soit les deux – pourquoi pas ?
Quand je dis que vous ne faites rien, j'exagère un tout petit peu.
Dans un premier temps, vous avez affecté des recettes non pérennes à la CADES, montrant ainsi le peu d'intérêt que vous portez à l'extinction de la dette. Dans un deuxième temps, sous d'amicales pressions, vous y affectez 0,3 % de CSG ponctionnée à la branche famille qui reçoit en échange des recettes incertaines. Joli tour de passe-passe qui consiste à déshabiller Pierre pour habiller Paul !
Nous ne pouvons partager cette manière de procéder qui n'est pas à la hauteur des enjeux. En fait, vous menez dans le mur notre belle sécurité sociale, symbole de solidarité, de redistribution et du vivre ensemble. Comment va-t-on sortir de cette ornière d'une profondeur extrême ? Il faudra un remède de cheval que les gouvernants de l'après 2012 auront à administrer au plus vite. C'est ce qui s'appelle laisser l'ardoise aux suivants. C'est ce que nous dénonçons avec force et ce que certains de la majorité, conscients et soucieux de cette inadmissible dérive, auraient voulu exprimer s'ils l'avaient pu. Privés de CMP, ils ont été bâillonnés, à l'exception notoire de M. Warsmann, qui vient ce soir de montrer son courage.
Il est évident que nous voterons résolument contre ce texte tellement il nous paraît marquer le démantèlement programmé de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'histoire moderne de notre dette sociale débute le 24 janvier 1996 quand, dans le but de résorber l'endettement de la sécurité sociale, Alain Juppé crée la contribution au remboursement de la dette sociale – la CRDS –, qu'il fixe à 0,5 % quel que soit le revenu concerné. La dette d'alors, d'un montant de 30 à 38 milliards d'euros, est transférée à une caisse – la CADES – créée à cet effet le 1er février 1996. Le CRDS et la CADES, créés pour une durée de treize ans, devaient disparaître le 31 janvier 2009.
Le 29 septembre 1997, le gouvernement de la gauche plurielle de l'époque, de Lionel Jospin et de Martine Aubry, transfère 13 milliards supplémentaires et repousse, sans augmenter la CRDS, la perception de celle-ci par la CADES jusqu'au 31 janvier 2014.
En 2004, Philippe Douste-Blazy transfère de nouveau 50 milliards et la date butoir de 2014 est alors abrogée jusqu'à l'extinction de la dette, mais en 2005 une nouvelle date est fixée : la CADES disparaîtra en 2021.
Aujourd'hui, plus de quatorze années plus tard, le CRDS est toujours à 0,5 % – je le déplore – et la durée de vie de la CADES a été rallongée de douze ans. Elle a repris, depuis sa création, 135 milliards d'euros. Très bien gérée par un personnel d'une compétence extrême, que je me permets de saluer en ma qualité de membre du conseil d'administration de cette institution où je siège avec notre collègue Gérard Bapt, elle aurait toutes les chances d'avoir totalement amorti, en 2021, la dette dont le refinancement lui a été confié. Mais nous nous retrouvons aujourd'hui dans une situation bien difficile.
Nous avons en effet besoin de prévoir de transférer à nouveau 130 milliards d'euros à la CADES. Comment faire face à cette situation sans augmentation des prélèvements obligatoires ?
C'est le défi qui nous est lancé aujourd'hui.
Effectivement, on peut, en premier lieu, prolonger la durée de vie de la CADES de quatre ans afin de couvrir 34 milliards de déficit de crise ; ensuite, proposer un panier de recettes affectées à la CADES qui, obligatoirement, s'éloignent des principes fondamentaux ayant présidé à sa création.
La CRDS a en effet le mérite de matérialiser, pour chacun d'entre nous, le remboursement des dépenses passées de protection sociale, mais vous savez tous qu'aujourd'hui couvrir le déficit par une augmentation de la CRSD nécessiterait d'en doubler le taux, ce qui n'est ni possible ni souhaitable.
Aujourd'hui, beaucoup d'interrogations existent, toujours au sujet de ce panier de recettes. La question est posée de savoir si les mesures proposées sont opportunes, pertinentes et de nature à garantir le financement du remboursement de la dette sociale.
Par exemple, le produit de la réduction des niches ne devrait-il pas plutôt être affecté en priorité à la réduction des déficits de l'État ?
N'y a-t-il pas un risque que la suppression de l'exonération spéciale sur les contrats solidaires et responsables soit répercutée sur les assurés ?
Il faudra, bien sûr, s'interroger sur l'exposition au risque de la CADES, qui s'intensifie toujours après les reprises de dettes, compte tenu de l'importance des refinancements à court terme nécessaires.
Je reste par ailleurs très inquiet car les déficits futurs de l'assurance maladie ne sont pas traités. Or les projections les situent à 23 milliards d'euros pour 2012 et 2013. Nous devrons donc réviser le panier de recettes à cette échéance, compte tenu des faiblesses intrinsèques que j'ai évoquées plus haut.
Mes chers collègues, ce texte ne nous enthousiasme pas tous.
Mais aujourd'hui, en l'absence d'augmentation des prélèvements sociaux obligatoires et de la fiscalité – c'est un engagement que nous avons pris devant les Français –,…
…ce texte répond à l'urgente exigence de la situation intenable dans laquelle se trouvent nos comptes sociaux. C'est pourquoi, mes chers collègues, je le voterai et vous demande à tous d'en faire autant.
Mais je suis convaincu qu'il sera ensuite rapidement de notre responsabilité de trouver des solutions pérennes, stables et lisibles à nos déficits sociaux abyssaux. Sinon, nous ne pourrons, à terme, conserver le niveau de prestations auquel sont habitués nos compatriotes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La discussion générale est close.
La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure de la commission mixte paritaire.
Naturellement, j'ai écouté avec beaucoup d'attention tous les collègues qui se sont exprimés sur ce texte. Je voudrais simplement revenir sur les propos qui ont été tenus par le président de la commission des lois. Selon lui, le texte que nous allons adopter ce soir, du moins je l'espère,…
…ferait pâlir Madoff tant il entraînerait de turpitudes en raison de ce qu'il a défini comme un effet de cavalerie. Je veux simplement dire ce soir que le fait de contenir la dette sociale, de la contingenter, de se proposer de l'amortir pour avoir une vision assainie de ce que sont nos comptes sociaux et faire apparaître de manière claire la nature de leurs besoins de financement, compte tenu des risques et du vieillissement de notre population, me paraît être une mesure de sauvegarde pour l'avenir de nos comptes sociaux. C'est ce que je voulais dire en réponse à une déclaration qui me semble par trop pessimiste.
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
Madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames, messieurs, puisque nous arrivons à la conclusion de ce débat, je voudrais d'abord remercier les membres de l'Assemblée nationale pour leur participation utile. Il s'est dit des choses précieuses, intéressantes, sur un enjeu essentiel de la stratégie du Gouvernement en matière de réduction des déficits publics, à savoir l'objectif intangible de revenir à 6 % l'année prochaine. Pour 2013, nous avons pour but de revenir au niveau de déficit d'avant la crise et nous avons fixé un objectif de retour à l'équilibre budgétaire autour de 2016. Dans cet esprit, les pouvoirs publics portent un regard exigeant sur la dette sociale. Ajouter la question des 130 milliards a supposé, de la part du Gouvernement, une réflexion globale.
Personne n'aurait souhaité porter en bandoulière, avec fierté, l'allongement de la durée de vie de la Caisse d'amortissement de la dette sociale. Personne n'aurait voulu en faire un dogme, l'ériger en idéologie. Je dis cela en réponse à Jean-Luc Warsmann.
Si cela ne vous intéresse pas, vous pouvez sortir !
Mais cela ne m'empêchera pas, en effet, de poursuivre ma démonstration.
Monsieur Mallot, vous pouvez sortir même si cela vous intéresse !
Au président Warsmann, qui s'est profondément et puissamment engagé, qui s'est démarqué de la logique majoritaire, je veux dire que nous comprenons, que nous respectons son attitude, mais que nous ne pouvons pas nous arrêter au simple argument de forme sur le principe même de l'application d'une règle d'or mise en place en 2005, une règle que personne ne remet en cause,…
…mais personne n'avait souhaité la crise en 2008-2009.
Et c'est bien parce que nous avons connu cette crise que les déficits se sont accumulés et que nous sommes devant cette obligation, cette exigence, ce devoir, cette responsabilité. Mais je conçois que l'exigence, le devoir, la responsabilité fassent partie d'un vocabulaire que vous avez oublié depuis très longtemps, mesdames, messieurs les membres du groupe socialiste. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Cet allongement de la durée de vie de la CADES est raisonnable. Il ne nous éloigne pas de la génération de prise en charge de cette responsabilité de la reprise de la dette de crise. Cet esprit de responsabilité souffle aussi sur l'utilisation du Fonds de réserve des retraites. C'est encore le même esprit qui nous a animés lorsque nous avons décidé d'affecter au financement de la branche famille les 3,2 milliards provenant de la réduction des niches sociales. Le point d'équilibre est atteint.
Nous pouvons avoir la conscience tranquille, car nous avons assumé le portage de la dette sociale pour de nombreuses années. Ajoutez le débat que nous avons eu sur les retraites au débat de qualité sur le projet de loi de finances pour 2010 et le projet de loi de programmation des finances publiques jusqu'en 2014, et à la question de la dette sociale : vous aurez alors la vision globale d'une fusée à plusieurs étages dont chaque moteur donne de l'énergie au suivant, le tout permettant la réduction indispensable, incontournable, intangible, du niveau des déficits. Ne faites pas comme si vous aviez oublié que la crise était passée par là ! Ne faites pas comme si vous aviez oublié qu'il y a encore six mois l'euro était menacé ! La réduction des déficits est au coeur des politiques publiques que nous devons tous conduire au service du pays. Le vote du projet de loi sur la gestion de la dette sociale va dans cette direction. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.
(L'ensemble du projet de loi organique est adopté.– Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Je confirme que le texte est adopté. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Les chiffres sont là. (Protestations redoublées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures trente, est reprise à vingt-deux heures quarante.)
La séance est reprise.
Je confirme bien que le texte que nous avons examiné a été adopté. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Tricheurs !
Madame Dumont, vous n'avez pas la parole. Si vous souhaitez vous exprimer, demandez à le faire, sans quoi nous ne pourrons pas travailler dans de bonnes conditions.
Madame la présidente, je vous demande solennellement de nous annoncer le résultat du vote qui vient d'avoir lieu.
Je vous l'ai déjà dit : le texte a été adopté. (Nouvelles protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous avons parfaitement compté et j'ai déclaré le texte adopté. Nous allons passer maintenant au projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La discussion est tendue, car le sujet est extrêmement grave, chacun en conviendra.
Madame la présidente, vous avez annoncé le résultat du vote, comme c'est votre rôle de le faire. Il est vrai que, dans des circonstances comme celles qui ont présidé à ce vote, alors que des députés sont entrés dans l'hémicycle de part et d'autre peu de temps avant, un vote par assis et levé aurait permis de mettre tout le monde d'accord.
J'ai bien noté, madame la présidente, pour vous avoir posé directement la question lors de la suspension de séance, qu'il n'est pas d'usage d'indiquer le nombre des votants lorsque le vote a eu lieu à main levée. Il me semble que cela devrait changer, car en cas de suspicion cela nuit à la qualité de nos travaux.
Je demande donc au nom de mon groupe que la Conférence des présidents prenne acte du fait que nous souhaitons désormais, lors d'un vote à main levée, pouvoir obtenir les résultats chiffrés de ce vote.
Monsieur Brottes, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt votre commentaire. Lors de la suspension de séance, je vous ai rappelé que vous disposiez d'un outil qui est le scrutin public. Vous avez fait le choix de ne pas le demander, alors que le scrutin public indique avec précision le vote des uns et des autres.
Madame Dumont, vous n'avez pas la parole !
Monsieur Brottes, vous connaissiez comme moi les conditions de ce vote, et rien ne vous empêchait de demander un scrutin public. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je vous remercie, madame la présidente. Si vous me permettez d'évoquer un souvenir personnel, sans interférer en rien avec votre autorité, pour avoir été vice-président de l'Assemblée pendant trois ans et avoir présidé des séances aussi animées,…
…j'estime que les noms d'oiseau qui ont été lancés n'ont rien à voir avec la qualité des fonctionnaires qui sont au plateau et qui n'auraient jamais accompagné une décision de la présidence ne reflétant pas le fait majoritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous en sommes maintenant au projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Brouhaha sur les bancs du groupe SRC.)
Allons, on a deux minutes pour maudire ses juges, puis on s'incline et on discute de choses sérieuses.
L'enjeu décisif auquel nous sommes aujourd'hui confrontés est de réduire notre déficit en agissant sur la dépense sans provoquer d'effet récessif alors même que la croissance est en pleine reprise.
Cette exigence concerne, à côté du budget de l'Etat et des concours de ce dernier aux collectivités locales, les comptes sociaux, à court et moyen terme.
Nous devons, dans une période de réduction de la dépense publique, assurer la pérennité d'un système social unique par le niveau de protection qu'il assure. C'est un défi de taille. Si nous voulons garantir aux générations futures un confort social similaire au nôtre, il nous faut relever ce défi.
Notre système social est au coeur de la cohésion nationale. Nous avons pu constater, pendant la crise, l'importance de son rôle d'amortisseur. Mais il en porte aujourd'hui les cicatrices. Il est donc impératif que nous résorbions ses déficits et que nous assurions son équilibre à long terme.
La stratégie que je vous propose pour 2011 au nom du Gouvernement répond à cet impératif. Elle s'inscrit dans une trajectoire globale, à moyen terme, visant à préserver le formidable atout que constitue notre sécurité sociale.
Mes collègues déclineront, avec compétence, chacun des dispositifs de ce projet de loi. Je veux souligner que la crise…
… a mis en lumière la stratégie du Gouvernement. En 2008-2009, l'État a perdu 54 milliards de recettes, dont 28 milliards seulement au titre de l'impôt sur les sociétés. Devant cet effondrement complet, le Gouvernement aurait pu augmenter les impôts pour compenser de telles pertes. Il ne l'a pas fait, par la volonté du Président de la République, qui a pris des engagements envers les Français en 2007 et qui les tiendra jusqu'à la fin de cette législature. Il ne l'a pas fait car c'eut été une erreur économique fatale. Prélever de l'impôt supplémentaire aurait amplifié la crise.
Il a également choisi de ne pas céder à la demande d'augmenter un certain nombre de minima sociaux et le SMIC. Le modèle économique français reposant sur la consommation, on sollicitait la dépense publique pour l'accompagner un peu plus. Le Gouvernement a écarté également cette piste, à juste titre.
Ces deux éléments fondateurs de la stratégie d'accompagnement de la crise ont permis de mettre en lumière le rôle remarquable des amortisseurs sociaux qui ont permis à notre pays de résister bien mieux que la plupart des pays de l'Union européenne – deux fois mieux que l'Allemagne – de sortir de la crise plus tôt que les autres pays et d'entrer dans une période de croissance, que nous souhaitons accompagner pour qu'elle soit durable et plus rapide.
L'addition des bonnes nouvelles depuis la fin de l'été nous a d'ailleurs permis d'éviter de prendre des mesures trop douloureuses dans le cadre de la loi de finances, et des mesures relativement maîtrisées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Si la crise est derrière nous, si la stratégie face à la crise a été la bonne – les résultats sont là –, si la stratégie de sortie de crise qui nous permet de conforter la croissance s'avère payante, les cicatrices de la crise marquent les caisses de l'État et de la sécurité sociale.
Le déficit du régime général pour 2010 s'élève à 23,1 milliards d'euros. C'est une amélioration encourageante puisque la commission des comptes de la sécurité sociale de juin dernier annonçait près de 27 milliards d'euros de déficit.
Je tiens à rappeler ces chiffres car même si le déficit est bien sûr très élevé, cette évolution conforte la stratégie que je viens d'évoquer.
Je rappelle, au risque de me répéter, mais c'est l'un des fondements de la pédagogie, que face à une crise sans précédent, la France a fait des choix financiers et budgétaires responsables. Ces choix nous ont permis de faire partie des premiers pays à sortir de la récession : dès le deuxième trimestre 2009, notre croissance est redevenue positive.
Les indicateurs économiques s'orientent dans le bon sens, ce qui est très encourageant. Nous avons constaté qu'en 2010 la masse salariale retrouvait sa croissance, et ce pour le plus grand bien de nos finances sociales, assises pour l'essentiel sur les revenus du travail.
Aujourd'hui notre pays doit réduire son déficit public, sans que les mesures adoptées soient récessives. Le choix du Gouvernement pour ce faire est donc très clair : utiliser comme levier la dépense et non les prélèvements obligatoires.
Notre objectif, intangible, est de réduire notre déficit public à 6 % du PIB en 2011. Il s'agit d'une stratégie d'ensemble, qui s'inscrit dans la durée grâce à la loi de programmation des finances publiques : passer à 6 % l'an prochain, c'est un effort de 40 milliards ; à 4,6 % l'année suivante, c'est encore un effort de 30 milliards ; à 3 % en 2013, nous reviendrons au niveau de déficit d'avant la crise ; la loi de programmation des finances publiques que l'Assemblée vient de voter fixe ce pourcentage à 2 % en 2014, et nous avons fixé le retour à l'équilibre budgétaire pour 2016, comme nos amis et voisins allemands.
Parmi les défis qui nous attendent, celui de la maîtrise de nos dépenses sociales sera probablement le plus déterminant dans les années à venir. Ce qui est en jeu en effet, c'est bien l'avenir de notre système de sécurité sociale. Le financement de ce système sera le défi majeur des dix prochaines années.
Notre pays est à très juste titre attaché à son système de sécurité sociale, car la protection sociale, depuis 60 ans, est à la fois le vecteur et la concrétisation du développement économique et social des États de l'OCDE.
Dans ces États, entre 1985 et 2005, les dépenses publiques de protection sociale sont passées de 18 % à 21 % de la richesse nationale. Cette hausse importante traduit plusieurs facteurs communs à l'ensemble de ces pays : la hausse continue des dépenses de santé, sous l'effet notamment de l'innovation technique et thérapeutique et du développement des maladies chroniques ; la hausse des dépenses de retraite, en raison de l'impact de l'allongement, heureux, de l'espérance de vie ; la hausse des dépenses pour l'emploi et des prestations sous conditions de ressources, octroyées par les États-providence en réponse à la montée du chômage et de la précarité.
Notre système social était en 2005 le deuxième système le plus protecteur de l'OCDE, après la Suède, avec des dépenses sociales publiques de l'ordre de 29 % et des dépenses totales – dépenses privées comprises – représentant environ 32 % du PIB. Il est même le plus protecteur si l'on prend uniquement en compte le niveau des dépenses publiques en matière d'assurance maladie.
Des éléments conjoncturels expliquent, dans la période récente, une nouvelle augmentation des dépenses de protection sociale en France.
Dans notre pays, la crise économique a induit une forte hausse du ratio des prestations de protection sociale : le poids de ces dépenses dans le PIB était de 31 % en 2009, contre 29 % en 2008.
Cette hausse s'explique par les mesures en faveur de l'emploi et du pouvoir d'achat instaurées par le Gouvernement face à la crise. Leur rôle d'amortisseur a permis à la France de mieux résister et de connaître une récession, certes, mais plus modeste et mieux maîtrisée. C'est également le recul prononcé du PIB qui a poussé le ratio global à la hausse.
Plus structurellement, à l'avenir, dans tous les pays, les dépenses de santé et de retraite continueront d'augmenter, ainsi que les dépenses pour la prise en charge de la dépendance.
Nous devons nous réjouir de ces évolutions car elles participent de notre bien-être social.
Mais nous ne pouvons pas nous permettre de laisser ces dépenses s'accroître à un rythme incompatible avec la croissance économique. J'ajoute qu'à l'heure actuelle tous nos partenaires prennent des mesures pour rendre soutenable la hausse des dépenses sociales. Je ne ferai pas l'injure à nos amis socialistes, qui écoutent d'une oreille distraite l'exposé des enjeux du projet de loi de financement de la sécurité sociale, de leur rappeler les mesures prises par le gouvernement Zapatero, par leurs amis . (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cela vous gêne, et vous l'écartez d'un revers de main. Bien sûr que cela vous gêne…
… qu'un gouvernement de gauche, qui partage vos options quant aux principes fondamentaux, agisse ainsi. Vous portez en bandoulière de belles idées en étant incapables d'assumer vos responsabilités, incapables d'assumer les choix du passé,…
… incapables d'assumer qu'un gouvernement responsable, certes de gauche, accepte pour sauver son pays, son modèle économique, son modèle social, de diminuer les traitements des fonctionnaires et d'augmenter les impôts. C'est cela que fait le gouvernement espagnol ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le gouvernement portugais est dans le même esprit, or il partage aussi vos idées. Mais vous, vous fuyez vos responsabilités. Et alors que nos amis proposent des mesures plus difficiles encore – je pense à la Grande-Bretagne –, vous devriez vous féliciter des choix du Gouvernement, des choix équilibrés qui visent à préserver l'essentiel en maîtrisant les dépenses, en assurant la protection sociale, en préservant notre modèle social, en affectant les économies faites sur les niches fiscales et sociales à plus de 70 % à la protection de ce modèle.
Sept des dix milliards des niches seront affectés au remboursement des déficits de la sécurité sociale. Alors, assumez ces choix, écoutez-les au moins,…
… accompagnez-les pour partie, prenez vos responsabilités, comme les autres responsables de gauche en Europe les assument aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 que nous vous présentons, Éric Woerth, Roselyne Bachelot, Nora Berra et moi-même au nom du Gouvernement, nous donnera les moyens d'amorcer une réduction pérenne du déficit des comptes sociaux. Ce projet de loi est exigeant, cohérent et responsable…
…de même que le projet de budget était historique, responsable et équitable.
Pour réduire les déficits, le Gouvernement choisit de poursuivre la maîtrise des dépenses : c'est la colonne vertébrale de notre action. Et ce sont les dépenses de la branche maladie qui contribuent largement au déficit des comptes sociaux que nous voulons maîtriser.
Ensuite, nous choisissons une action dans la durée en proposant un financement de la dette sociale sans augmentation d'impôts et en réformant nos retraites.
Nous trouvons de nouvelles recettes en réduisant les niches sociales et en instaurant des prélèvements exceptionnels dans le cadre de la réforme des retraites.
Le premier enjeu est de maîtriser les dépenses de l'assurance maladie. En 2010, ce sera la première fois, depuis sa création en 1997, que l'ONDAM voté par les parlementaires sera respecté, alors que jusque-là, le dépassement a été de 1,5 milliard d'euros en moyenne !
Au-delà des chiffres, je tiens à souligner les efforts importants qui ont été faits pour garantir une meilleure gouvernance de ce dispositif afin d'en améliorer le pilotage. Le Gouvernement a ainsi décidé de renforcer le suivi des dépenses. En 2010, il a placé en réserve des crédits hospitaliers et tenu compte des sous-consommations dans le champ médico-social, pour un peu plus de 500 millions d'euros en tout. Par cette amélioration de la gouvernance, il entend s'assurer qu'à l'avenir ses objectifs seront tenus chaque année.
Cette capacité à maîtriser la dépense ne se fait ni au détriment de l'accès aux soins pour tous, ni au détriment de la qualité des soins offerts, ni au détriment de notre capacité à financer les évolutions technologiques, si importantes dans la sphère médicale. Bien au contraire, notre objectif est de faciliter, grâce aux économies que nous réalisons, l'accès de tous à la médecine de demain.
Au plus profond de la crise, le Gouvernement a choisi d'assumer la préparation de l'avenir grâce au grand emprunt autour de la recherche-développement, dont le budget est sanctuarisé. Il permettra à la France, dans quelques années seulement, d'être en pole position pour les pôles universitaires, les centres de recherche et de développement. C'est le même esprit, le même souffle qui nous anime en ce qui concerne la recherche autour de la médecine de demain.
La maîtrise de ces dépenses passera, dans les années à venir, par le respect d'un ONDAM à 2,9 % en 2011 et 2,8 % en 2012.
Pour respecter l'objectif en 2011, nous devrons réaliser 2,4 milliards d'euros d'économies par rapport à la progression tendancielle des dépenses.
Les mesures retenues visent à accentuer l'efficacité de la dépense.
Nous souhaitons renforcer l'efficacité et la performance du système de soins. Notre objectif est bien d'atteindre la meilleure adéquation possible entre les dépenses de santé, leur efficacité médicale et leur coût. L'enjeu est de recentrer progressivement les dépenses d'assurance-maladie sur celles qui sont considérées comme les plus utiles au plan médical. C'est un impératif autant économique que sanitaire.
En faisant ces choix, le Gouvernement ne remet pas en cause le caractère solidaire de notre assurance maladie. Je ne doute pas que certains d'entre vous monteront à cette tribune en faisant assaut de démagogie pour démontrer le contraire. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Vous aurez tort, sur ce point comme sur beaucoup d'autres. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je voulais juste vérifier si vous n'étiez pas endormis !
C'est la majorité qu'il faudrait réveiller : elle n'a plus personne dans l'hémicycle !
Nous faisons en sorte de préserver ce système pour que la solidarité telle qu'elle existe reste possible à l'avenir. La France est aujourd'hui l'un des pays développés où le reste à charge des ménages est le plus limité : 8 % des dépenses contre 12 % en Allemagne ou 16 % en Suède. Pour qu'elle conserve cette spécificité, les décisions prises par le Gouvernement sont indispensables.
Dans les prochaines années, pour maîtriser les dépenses conformément à l'ONDAM, nous souhaitons mettre en oeuvre les propositions du rapport Briet. Vous devriez vous intéresser au débat, monsieur Mallot ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Votre majorité s'intéresse-t-elle au débat ? Il n'y a personne sur ses bancs !
Vous n'allez tout de même pas prétendre que vous êtes majoritaires, maintenant !
Nous attendons avec beaucoup d'intérêt vos contre-propositions !
Le Gouvernement renforcera le rôle du comité d'alerte. Pour améliorer la sincérité de l'ONDAM, le comité émettra un avis sur sa construction. Nous avons dès cette année, avec Roselyne Bachelot et Éric Woerth, sans attendre la modification de la loi, demandé au comité d'alerte d'examiner les hypothèses sous-jacentes à l'ONDAM pour 2011. Dans son analyse du 14 octobre, le comité d'alerte n'a pas relevé d'erreur manifeste entachant la construction de l'ONDAM. Cela confirme la sincérité de l'objectif qui vous est présenté.
Le Gouvernement souhaite ensuite que le pilotage des crédits relevant de l'ONDAM soit maîtrisé en fonction de l'exécution constatée au fur et à mesure de l'année. Pour 2011, 530 millions d'euros de crédits hospitaliers, médico-sociaux et de soins de ville seront mis en réserve. Si de nouvelles dépenses sont nécessaires en cours d'année ou si l'ONDAM n'est pas respecté, nous y puiserons. Le projet de loi de programmation des finances publiques doit faire de cette mise en réserve une règle qui s'appliquera à la construction de tous les PLFSS de la période 2011-2014.
Enfin, dès cette année, l'information des parlementaires concernant la construction de l'ONDAM et son exécution sera améliorée.
Deuxième enjeu…
Vous verrez bien, madame Dumont !
Nous souhaitons proposer des solutions financières à long terme pour les retraites et la dette sociale. Le PLFSS traduit sur le plan des comptes sociaux les engagements pris dans le cadre de la réforme des retraites. Cette réforme courageuse apporte une réponse juste et équilibrée à un problème démographique. Ce n'est pas une réponse dogmatique, idéologique, à l'instar de ce que vous avez fait au début des années quatre-vingt, et ensuite avec les 35 heures, pour avoir une statue miniature aux côtés de Blum. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Pour assurer l'équilibre du régime de retraite à long terme, le Gouvernement a engagé cette réforme structurelle de notre système. Je veux rendre hommage à Éric Woerth, Georges Tron, François Fillon, pour leur démarche pédagogique tout au long de ces dernières semaines.
Désormais, cette réforme est validée par la représentation nationale. Elle agira à la fois sur les dépenses et les recettes. Pour les dépenses, les mesures monteront en charge progressivement dans la décennie à venir. Les premiers effets de la réforme apparaîtront dès 2011 dans les comptes des régimes.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 comprendra, en complément des mesures fiscales déjà prises dans le projet de loi de finances, les mesures de financement associées à cette réforme. Il s'agit de la taxation des stock-options et des retraites chapeaux, de l'annualisation des allégements généraux de cotisations sociales, à hauteur de 2 milliards d'euros.
Le rendement attendu de ces mesures sera affecté au Fonds de solidarité vieillesse, qui prendra en charge une partie des dépenses de solidarité versées par les régimes de base au titre du minimum contributif.
Pour aborder sereinement l'avenir, il nous faut d'abord solder les dettes du passé, en l'occurrence la dette sociale, et les débats furent pour le moins animés. Le PLFSS traduit l'accord que le Gouvernement a trouvé pour le financement de la dette sociale.
La CADES sera chargée de reprendre 130 milliards d'euros de dette : d'une part, un peu moins de 80 milliards d'euros de dette à venir d'ici à la fin de l'année 2011, ce qui soulagera la trésorerie de l'ACOSS – nous l'avons vu avec Mme Montchamp –, d'autre part, les déficits que connaîtra la branche vieillesse jusqu'au retour à l'équilibre du système de retraite en 2018.
Pour cela nous avons opté pour trois moyens distincts : une hausse des recettes de la CADES, représentant 3,2 milliards d'euros par an jusqu'en 2025. Cette somme doit permettre de reprendre l'équivalent des déficits structurels du régime général ; l'allongement de la durée de vie de la CADES de quatre ans,…
Ni vous ni moi n'en sommes responsables. Elle s'est imposée et elle a laissé des traces. Il est pour le moins effrayant de voir le porte-parole du parti socialiste (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) draguer, le temps d'un week-end, l'extrême gauche,… (Mêmes mouvements)
…faire des clins d'oeil à M. Besancenot (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et l'entendre défendre la retraite à soixante ans à taux plein, sans que le parti socialiste réagisse à de tels propos ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Assumez vos responsabilités.
Il est pour le moins stupéfiant d'entendre le porte-parole du parti socialiste prendre le contre-pied de la première secrétaire de la rue de Solférino sur ce sujet comme sur tant d'autres.
Il est pour le moins consternant de constater votre incapacité (Protestations sur les bancs du groupe SRC) à produire des projets alternatifs, à définir une ligne, à offrir une synthèse, tout simplement à être un parti de gouvernement responsable. (« Très bien » sur les bancs du groupe UMP.)
Sur la question des retraites, de la dette sociale, des finances publiques ou du financement de la sécurité sociale, j'attends avec beaucoup d'impatience vos contre-propositions ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
L'utilisation du Fonds de réserve des retraites doit servir, dans la limite de 62 milliards d'euros, à amortir les déficits vieillesse du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse qui seront accumulés entre 2011, année de mise en oeuvre de la réforme, et 2018, date à laquelle la réforme produira son plein effet en permettant le retour à l'équilibre du système de retraite.
Le Fonds de réserve des retraites apportera à la CADES ses actifs, mais aussi le prélèvement de 2 % sur les revenus du capital – pour un rendement de 1,5 milliard d'euros en 2011 – qui lui est affecté.
Notre schéma de financement de la dette sociale est équilibré : d'une part, il n'impose pas aux générations futures le poids de la dette de nos contemporains ; d'autre part, il accompagne la sortie de crise grâce à des prélèvements supplémentaires mesurés et ciblés, qui ne se traduisent pas par une augmentation des impôts. Le débat sur la CADES a montré là encore que le Gouvernement refusait le choix de la facilité,…
….refusait le choix de l'augmentation de la CRDS, le choix que vous privilégiez !
Troisième enjeu, madame Dumont, garantir les recettes de notre modèle social. Sur les 10 milliards d'euros de niches fiscales et sociales réduites ou supprimées, plus de 70 % seront affectés au financement de la sécurité sociale : 3,5 milliards d'euros de recettes provenant de niches sur les sociétés d'assurance seront consacrés au financement de la dette sociale et affectés à la branche famille pour compenser le transfert de CSG à la CADES. Ensuite, 3,8 milliards d'euros, dont 3 milliards d'euros de recettes provenant de niches fiscales et sociales, permettront de financer la réforme des retraites. Enfin, 450 millions d'euros de recettes, provenant de l'augmentation du taux du forfait social, de la taxation de la rémunération sur les tiers et du plafonnement de la déduction CSG viendront, pour une très large part, abonder la branche maladie.
Il faut y ajouter l'augmentation des cotisations patronales – 0,1 point – pour un rendement de plus de 450 millions d'euros, qui permettra le retour à l'équilibre de la branche accident du travail - maladies professionnelles.
Il s'agit, le président Pierre Méhaignerie et le rapporteur Yves Bur le savent bien, d'un effort sans précédent. L'année prochaine, plus de 8 milliards de recettes nouvelles seront affectés à la sécurité sociale.
Grâce à l'ensemble de ces mesures, le solde du régime général devrait passer de 23,1 milliards d'euros de déficit cette année à moins 21,3 milliards d'euros l'année prochaine, soit une réduction de 7,3 milliards d'euros du déficit tendanciel que nous connaîtrions en 2011 si nous ne prenions aucune mesure.
C'est le début d'une trajectoire de réduction du déficit des comptes sociaux, qui sera maintenue après 2011. Le Gouvernement a dû prendre ces mesures car la crise a fragilisé nos comptes sociaux, c'est indiscutable. L'effort de maîtrise et de réduction des dépenses devra se poursuivre dans les années à venir. C'est le sens de la programmation des finances publiques. C'est une absolue priorité si nous voulons garantir la pérennité de notre modèle de sécurité sociale. C'est ce que nous venons de faire pour les retraites. Nous le poursuivons ce soir pour le financement de la sécurité sociale.
Comme tous nos concitoyens, nous sommes très attachés au modèle social français.
C'est un modèle qui s'est construit après la deuxième guerre mondiale pour répondre aux nécessités d'une époque. Aujourd'hui, il est important de permettre à notre système d'évoluer parce que notre environnement a changé. Le nier, c'est ne pas être de son temps. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Vouloir s'accrocher à ce que vous avez présenté comme des acquis sociaux, c'est ne pas voir que le monde bouge. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.) C'est considérer que la France est une île et ne pas se rendre à l'évidence que l'idéologie, le dogme, une partie de votre modèle se sont effondrés et que vous n'avez pas produit d'alternative politique crédible, adaptée aux temps modernes. Certains considèrent cette nécessaire évolution comme un abandon, c'est votre cas. Évoluer, c'est s'adapter, préserver l'essentiel. Nous devons être réalistes et audacieux ; nous le sommes. Ne pas l'être, c'est se condamner à subir la réalité.
Vos propositions, si l'on réussit à lire entre les lignes, ne sont ponctuées que par des points d'interrogation !
Vous suivre, c'est subir la réalité. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous, nous essayons de transformer la réalité pour préserver l'essentiel. Tel est le sens de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je veux remercier Roselyne Bachelot, saluer Eric Woerth, et accompagner Nadine Morano et Nora Berra dans cette entreprise qui vise à préserver l'avenir de ce modèle – que nul ne conteste – pour les générations suivantes tout en réduisant notre déficit public.
Nous devons éloigner l'épée de Damoclès qui plane sur la tête de chaque Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Tout le monde peut constater que la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale s'engage dans de très mauvaises conditions. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour l'immense majorité d'entre eux, nos collègues de l'UMP ont choisi de déserter leurs bancs, ce qui est regrettable.
En outre, tout à l'heure, un vote a été considéré comme acquis un peu trop rapidement dans des conditions que nous contestons. Il nous semble, madame la présidente, que vous n'avez pas pris en compte le fait que certains députés UMP ont voté contre le texte et que certains n'ont pas pris part au vote. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. le ministre s'est autorisé à donner des leçons aux parlementaires que nous sommes sur le fonctionnement de l'Assemblée nationale. J'observe qu'il approuve, ce qui inadmissible. Qu'il s'en tienne à son rôle de ministre, ce ne sera déjà pas si mal ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je prends le compliment pour ce qu'il est.
Par ailleurs, au cours de son intervention, M. le ministre a cru bon d'utiliser des propos provocateurs, polémiques, parfaitement déplacés. Nous lui répondrons avec un peu plus de hauteur.
Pour ramener un peu de calme dans l'hémicycle et permettre à nos collègues UMP de nous y rejoindre, je vous demande une suspension de séance d'un quart d'heure, madame la présidente.
Il faut reconnaître que ce n'est pas une bonne journée pour l'opposition ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous constatez que la démagogie dont vous faites preuve depuis plusieurs jours autour des retraites est en train d'échouer.
Vous constatez que le Parlement que nous respectons tous continue à jouer son rôle et à voter des projets.
Nous savons très bien que personne ici n'a vu une minorité du côté de l'UMP. (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Vous savez très bien qu'avec les trois votes de l'UMP dont il a été question, on arrive à cinquante-quatre voix contre quarante-sept : c'est le comptage que j'ai moi-même effectué. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Dans ces conditions, vous le savez aussi, si vous aviez eu un doute, si vous aviez pensé être majoritaires, vous auriez demandé un scrutin public, qui aurait évidemment prouvé que vos allégations sont parfaitement mensongères. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
…minoritaires à l'Assemblée, que vous devez perdre votre sang-froid. Nous avons voté à propos de la CADES ; nous en sommes maintenant au PLFSS, à propos duquel nous allons écouter les ministres et les rapporteurs.
Ne vous mettez donc pas martel en tête.
Quoi qu'il en soit, c'est la première fois que je vois un groupe parlementaire contester la présidence de la sorte. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C'est la première fois que je vois l'évidence d'un vote contestée par un groupe minoritaire. (Nouvelles exclamations.) Dans cet hémicycle, la décence a toujours voulu que l'on respecte les décisions de la présidence,…
…quelle que soit la personne qui préside, qu'elle appartienne à la droite ou à la gauche, à l'UMP, au Nouveau Centre ou au groupe socialiste.
Vous avez choisi la violence verbale (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) ; vous avez choisi la démagogie (Même mouvement.) ; vous avez choisi de ne pas respecter la loi et le règlement qui s'appliquent dans cet hémicycle. (Même mouvement.) Vous avez choisi de ne pas être des députés responsables. (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Non, le groupe UMP n'acceptera pas vos provocations régulières et les insultes que vous proférez à l'endroit de la présidence comme du groupe majoritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Mallot, voilà un certain temps que nous nous connaissons. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Eh oui : je suis un ancien parlementaire ; je suis entré ici il y a dix-sept ans, en 1993.
Vous pouvez adresser des noms d'oiseaux et des insultes aux ministres : ce sont des piqûres de moustique sur une peau d'hippopotame ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.) Nous sommes là pour ça.
Quant à l'évocation d'un souvenir à la tribune après ce qui s'est passé, il s'agit simplement de rappeler au respect de la dignité des fonctionnaires de l'Assemblée,…
…qui sont neutres. Car, étant donné que les fonctionnaires présents au plateau derrière la présidence sont aussi là pour assumer les votes, par vos propos, vous remettez en cause leur dignité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
En quoi l'exécutif remettrait-il en cause les conditions de la présidence de séance en rendant hommage à des fonctionnaires ?
De quoi je me mêle ? Mais tout cela a des conséquences sur la qualité de nos travaux et de la discussion sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous attendons, le Gouvernement attend de l'opposition des contre-propositions, des éléments de réflexion ; nous attendons de l'opposition qu'elle prenne ses responsabilités. (Même mouvement.) Nous n'attendons pas des noms d'oiseaux ni des quolibets.
Quand on joue, il faut savoir perdre. Vous avez tenté des coups – le coup du rideau, sous le tapis, sur plusieurs textes. (Même mouvement.) Vous avez tenté ces opérations les unes après les autres.
La suspension de séance devait permettre de restituer à nos débats calme et sérénité ; mais vous avez continué, et vous continuez encore. (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Si vous voulez trouver du répondant, vous en trouverez, chaque fois que vous irez sur le terrain de la polémique et de la provocation. Venez sur celui des contre-propositions, des solutions alternatives ; le Gouvernement vous y attend toujours. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Elle vous a été demandée par le responsable de notre groupe – puisque c'est Jean Mallot qui a la délégation. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je constate à regret que vous laissez le débat se poursuivre après que nous avons formulé cette demande.
En outre, M. le ministre est une fois de plus sorti de son rôle. Il n'est pas admissible, monsieur le ministre, que vous veniez nous donner des leçons sur le fonctionnement du Parlement, quels qu'aient été vos titres auparavant ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Ce n'est pas acceptable ; c'est même insupportable !
Vous le savez, depuis le début de cette législature, le Parlement reçoit en permanence des ordres de l'exécutif, y compris à propos du mode de fonctionnement de notre assemblée. Vous l'avez fait dans les couloirs, et maintenant, vous le faites au micro ! La manière dont vous venez de vous comporter montre que vous ne supportez rien, pas même que l'on vous oppose des arguments, …
…et vous vous en tirez avec des formules de cour de récréation, si vous me permettez l'expression. Vous donnez des leçons à propos d'attitudes qui ne vous conviennent pas, mais vous n'en venez jamais au fond – pour une raison assez simple : vous n'êtes pas très fier, ce soir, de la manière dont votre majorité s'est comportée au cours du débat.
Car vous êtes en train de faire à propos des comptes de la sécurité sociale ce qui s'appelle une entourloupe aux générations futures. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Et, pour tenter de maquiller cette entourloupe, vous donnez des leçons aux parlementaires !
Madame la présidente, je vous demande de faire respecter la règle qui prévaut ici : le Gouvernement gouverne, s'occupe de l'exécutif, et n'a en aucun cas à se mêler du fonctionnement de l'Assemblée nationale ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Mes chers collègues, voici la règle que je vais respecter : la suspension de séance étant de droit, je vais donc l'accorder, non sans avoir rappelé au préalable que vous aviez à votre disposition tout à l'heure une procédure que vous auriez pu utiliser, celle du scrutin public. (Approbation sur les bancs du groupe UMP. –Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous ne l'avez pas fait ; j'ai assumé mes responsabilités en faisant le compte des votes.
La loi que nous avons précédemment examinée a été adoptée.
Je vais donc suspendre la séance, avant que nous n'écoutions Mme la ministre de la santé et des sports.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures vingt, est reprise à vingt-trois heures trente-cinq.)
Nous reprenons l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les ministres, mesdames et messieurs les députés, la politique que je mène repose sur un impératif essentiel : des soins de qualité accessibles à tous.
Ce choix consiste à privilégier une approche médicale et une action sur les comportements. C'est ainsi que nous pouvons dégager des marges de manoeuvre pour moderniser notre système de prise en charge.
La politique du Gouvernement consiste donc d'abord à s'adresser à tous, en particulier aux plus fragiles. Cela suppose de maintenir un taux de prise en charge d'autant plus élevé que la pathologie est grave et coûteuse.
Beaucoup d'idées fausses sont trop fréquemment véhiculées sur notre système de santé et notre système de prise en charge. Je tiens à rappeler un simple fait : notre système d'assurance maladie garantit un niveau de prise en charge parmi les plus élevés du monde. Le reste à charge des ménages a en effet diminué l'année dernière, se situant à 9,4 % contre 9,5 % en 2008.
Cet impératif sera bien entendu préservé dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
Dans leur quasi-totalité, les efforts d'économie prévus dans la construction de l'ONDAM 2011 ne portent pas sur les assurés.
L'impact net des charges nouvelles sur les organismes complémentaires ne sera que de 129 millions d'euros l'année prochaine, si l'on tient compte des économies liées à la maîtrise médicalisée, des diminutions de prix des médicaments et des gains d'efficience dont ils vont également bénéficier.
Il convient de rappeler qu'un point de hausse des cotisations décidé par les organismes complémentaires absorbe 320 millions d'euros de charges nouvelles. Et encore, je n'aborde pas la question du déport de charges du fait de l'entrée dans le dispositif de prise en charge à 100 % qui, chaque année, transfère 600 millions d'euros de charges des complémentaires vers l'assurance maladie.
Les économies décidées dans le cadre de ce PLFSS auront donc un impact direct très marginal sur l'évolution des primes et donc sur le pouvoir d'achat des ménages.
Je partage toutefois la volonté du Parlement de minimiser l'impact sur l'assurance maladie complémentaire des mesures décidées dans le cadre du PLFSS. C'est pourquoi je serai favorable à l'amendement des deux rapporteurs Jean-Pierre Door et Yves Bur à l'article 3, qui prévoit que le trop-versé par les complémentaires au titre de leur participation au financement de la campagne anti-grippe sera réaffecté à ces organismes dans des délais raisonnables.
Cet impératif du maintien d'un niveau de prise en charge élevé sera en outre renforcé. Le Gouvernement propose en effet, à travers l'article 18, de soutenir l'accès à une assurance complémentaire de santé. Cette mesure de justice prolonge les efforts réalisés par votre assemblée en vue d'améliorer le taux de couverture des assurés, lequel constitue un facteur décisif d'accès aux soins.
D'autres mesures de justice vous sont par ailleurs proposées par le biais d'amendements du Gouvernement, comme l'extension du congé d'adoption aux pères ou l'amélioration de la coordination entre régimes du calcul des droits à pension d'invalidité.
Ce très haut niveau de prise en charge doit également s'apprécier au regard de la possibilité offerte à nos concitoyens d'accéder à des thérapies innovantes et à des soins coûteux.
Il faut rappeler que notre système d'assurance prend en charge chaque année plus de 300 millions d'euros de molécules nouvelles.
Cet accès à l'innovation ne peut toutefois être maintenu dans la durée que si notre système de prise en charge se recentre en continu sur les médicaments les plus efficaces et les actes qui améliorent le service médical rendu au patient.
Cette logique nous a conduits à vous proposer, à l'article 35, un dispositif de révision systématique – tous les cinq ans au plus – des actes nouvellement inscrits dans la classification commune des actes médicaux. Cette même logique justifie de ne maintenir les incitations fiscales que lorsqu'elles sont strictement nécessaires.
À cet égard, j'ai bien perçu les inquiétudes de votre assemblée concernant l'article 20, qui prévoit la suppression des exonérations pour les médicaments orphelins dont le chiffre d'affaires dépasserait le seuil de 20 millions d'euros par an. Je tiens à vous rassurer : l'accès à des médicaments innovants pour soigner des maladies rares ne sera aucunement remis en cause. Les médicaments orphelins représentant plus de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires correspondent à seulement quinze molécules sur cinquante-sept.
Je souhaite toutefois répondre à vos préoccupations légitimes. Je serai favorable à l'amendement de Jean-Pierre Door, qui propose d'élever le seuil à 30 millions d'euros. À défaut, et comme me l'a suggéré Guy Lefrand, je proposerai un amendement renvoyant aux partenaires conventionnels le soin de définir ce seuil.
Maintenir ce haut niveau de prise en charge suppose toutefois de maîtriser les dépenses à la source, c'est-à-dire de privilégier une approche médicale et une action sur les comportements.
Cette stratégie commence à porter ses fruits. L'ONDAM a en effet été strictement respecté cette année et on peut observer un ralentissement continu de l'évolution des dépenses d'assurance maladie depuis quatre ans : 5 % par an de 2000 à 2007 contre seulement 4 % en 2007, 3,5 % en 2008 et 2009 et 3 % en 2010.
Le niveau actuel du déficit de la branche maladie est trompeur car il est essentiellement dû à l'effondrement des recettes. Le solde hors crise de la branche maladie ne représente que 30 % du solde total en 2010, soit 4,4 milliards d'euros sur 14 milliards d'euros de solde tendanciel.
En outre, si l'on retranche de ce solde structurel les économies liées à un ONDAM à 3 % pour 2010, soit environ 2 milliards d'euros, et les recettes supplémentaires, soit 900 millions d'euros, on pourrait conclure que le solde hors crise n'est que d'environ 2 milliards d'euros en 2010.
Ces éléments confortent le Gouvernement dans sa stratégie consistant à privilégier les gains d'efficience. Cette stratégie sera encore renforcée à travers ce projet de loi.
Tout d'abord, certains outils de maîtrise de la dépense qui ont fait leur preuve verront leur champ d'application étendu.
Nous vous proposons ainsi, à l'article 34, de compléter la mise en oeuvre des recommandations du rapport de Raoul Briet sur le pilotage des dépenses d'assurance maladie.
Toute proposition utile étant la bienvenue, le Gouvernement acceptera deux amendements de Dominique Tian à l'article 34, visant pour l'un à donner un caractère public à l'avis du comité d'alerte sur le PLFSS et, pour l'autre, à renforcer le contrôle des membres du comité sur le projet de loi soumis au Parlement.
Je serai également favorable à un amendement de Jean-Pierre Door concernant l'extension de la régulation des dépenses de médicaments prescrits en établissement de santé et remboursés sur l'enveloppe soins de ville, de même qu'à un amendement du rapporteur, qui reprend les propositions de Guy Lefrand, Philippe Vitel et Jean-Marie Rolland, s'agissant des prises en charge alternatives à l'hospitalisation complète, notamment le développement de la dialyse à domicile. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
J'ai conscience, par ailleurs, des vives préoccupations suscitées par l'article 37 du projet de loi, qui propose d'étendre le mécanisme de mise sous entente préalable aux transferts des patients des hôpitaux vers les soins de suite et de réadaptation – SSR – ou vers les centres de rééducation. Il ne s'agit en aucune façon de faire intervenir les services médicaux de l'assurance maladie chaque fois qu'un établissement décidera de prescrire une rééducation en SSR pour un patient. Cela ne serait ni faisable, au regard des 900 000 séjours annuels en SSR, ni souhaitable, car ces transferts doivent rester fluides.
Je comprends donc vos inquiétudes. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé un amendement qui, s'inspirant très largement des propositions de Guy Lefrand, Jean-Luc Préel, Claude Leteurtre et Dominique Tian, précise que ces contrôles devront cibler uniquement les établissements plus gros prescripteurs…
…et sur le fondement d'un programme déterminé à l'avance, en début d'année, par l'agence régionale de santé sur proposition de l'organisme local d'assurance maladie.
Par ailleurs, je donnerai un avis favorable à la proposition d'Yves Bur…
…prévoyant qu'un rapport fasse le point sur l'application de cette mesure avant la fin de l'année prochaine, afin de corriger toute malfaçon s'il y a lieu.
L'autre piste consiste à renforcer la maîtrise à la source des dépenses et à développer l'accès à l'information, ce qui, en retour, rend possible un pilotage effectif de la dépense et une action sur les comportements.
Je vous propose, à l'article 36, la mise en place d'un accord-cadre avec les différents syndicats concernés par la liste des produits et prestations – LPP –, de façon à définir par la voie conventionnelle les modalités d'échanges d'informations, de suivi des dépenses remboursées, les procédures, ainsi que l'amélioration de l'efficience de ces dépenses, qui représentent plus de 5,7 milliards en montants remboursés par l'assurance maladie en 2009.
Dans cette optique, le Gouvernement reprendra une excellente initiative d'Yves Bur, que celui-ci n'a pu intégralement mener à son terme en raison des contraintes pesant sur le droit d'amendement, et qui prévoit des incitations pour les médecins à s'équiper de logiciels d'aide à la prescription, ainsi que la référence aux médicaments génériques dans les critères de certification de ces logiciels par la Haute autorité de santé.
Je serai également favorable à la proposition de Valérie Boyer qui donne la possibilité de fixer par décret les conditions de validité de la prescription, ainsi que les modalités de délivrance des produits et prestations inscrits sur la LPP pour limiter les gaspillages.
En outre, le Gouvernement acceptera l'amendement du rapporteur Jean-Pierre Door, qui reprend une idée de Jean-Luc Préel, Claude Leteurtre et Dominique Tian, consistant à établir un rapport annuel dressant le bilan de l'expérimentation FIDES sur la facturation individuelle directe des établissements de santé. Cette expérimentation doit, en effet, doter à terme l'assurance maladie d'une vision beaucoup plus précise des dispensations d'actes et de soins à l'hôpital afin d'améliorer la gestion du risque dans ce domaine.
Après la préservation des plus fragiles et la maîtrise des dépenses à la source, un troisième point très important est le maintien du cap d'un ONDAM maîtrisé qui nous permettra de nous doter des marges de manoeuvre nécessaires pour continuer à moderniser notre système de santé.
Notre système de santé a besoin de moyens supplémentaires et nous les lui donnons : 4,7 milliards d'euros supplémentaires. Mais sa modernisation passe également par des outils qui ne relèvent pas que de la seule augmentation, substantielle par ailleurs, des moyens financiers.
Je pense, en premier lieu, au développement et à l'expérimentation de modes de prise en charge nouveaux afin de mieux répondre aux besoins de nos concitoyens. Je remercie Bérangère Poletti pour son amendement, auquel je serai favorable, visant à prolonger de deux ans l'expérimentation sur la réintégration des médicaments dans les forfaits de soins des EHPAD.
Je veux surtout évoquer l'article 40 du projet de loi, qui prévoit une expérimentation de maisons de naissance sur cinq sites. Ce projet ne vise rien d'autre qu'à assurer une sécurité de prise en charge maximale à une pratique qui existe déjà, au moyen d'un cahier des charges exigeant et d'une évaluation très précise. Je connais vos craintes et je tiens à y répondre dès maintenant : l'existence de la maternité ne sera évidemment pas remise en cause avec ce projet d'expérimentation de maisons de naissance : il ne s'agit pas de substituer un mode de prise en charge à un autre ;…
…des conditions de sécurité maximales devront être réunies pour que les femmes puissent accoucher dans ces maisons de naissance, la première étant, comme nous en avons discuté avec Guy Lefrand, la proximité immédiate avec une maternité, pour assurer un transfert rapide de la parturiente dès la moindre complication.
Des garanties doivent être apportées sur ces deux points. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement précisant, d'une part, que la maison de naissance doit être attenante à la maternité et, d'autre part, que l'activité réalisée au sein de la maison de naissance sera prise en compte dans l'évaluation du niveau d'activité de la maternité qui conditionne son autorisation. En outre, je remercie Jean-Pierre Door pour ses propositions, que j'accepterai volontiers, car elles permettent de préciser que l'activité des maisons de naissance sera limitée aux grossesses non risquées.
Cette expérimentation doit permettre de diversifier les modes de prise en charge en laissant le choix aux femmes, mais elle doit également garantir un niveau de sécurité maximal. Il ne faut courir aucun risque en la matière et je serai particulièrement vigilante sur les modalités de mise en oeuvre de ce nouveau dispositif.
La modernisation de notre système de santé sera, en deuxième lieu, le fait des initiatives locales portées par les acteurs de terrain.
Nous avons déjà profondément modifié la gouvernance à l'hôpital grâce à la loi Hôpital, patients, santé et territoires, dont Jean-Marie Rolland a été le brillant rapporteur.
Mais le Gouvernement a souhaité aller plus loin en reprenant une proposition jugée irrecevable par la commission des finances, proposition du président Pierre Méhaignerie, à qui je rends hommage, qui vise à instaurer plus de fongibilité dans l'utilisation des dotations régionales aux mains des agences régionales de santé. Cette proposition donnera plus de souplesse aux ARS pour soutenir les initiatives locales dans un sens favorable à la réduction des inégalités de santé.
La modernisation passe, enfin, par la prise en compte des réalités nouvelles qui se font jour dans notre système de santé : je pense bien évidemment au débat que nous aurons, cher Jean-Pierre Door, sur la réforme du dispositif de la responsabilité civile médicale des professionnels de santé.
Un amendement a été déposé par le Gouvernement réécrivant l'article 44 de la LFSS pour 2010 ; cet amendement reprend une proposition qu'Yves Bur n'a pu déposer en étendant aux sages-femmes le bénéfice protecteur de l'article 44.
Et le Gouvernement n'entend pas en rester là. Christine Lagarde, François Baroin et moi-même avons confié à Gilles Johanet une deuxième mission pour mettre en place une solution de mutualisation plus large permettant de mieux couvrir les sinistres potentiellement les plus élevés. Je suis consciente que nous avons une obligation de résultat afin de sauvegarder l'attractivité de l'exercice libéral de certaines spécialités médicales à risque. Les solutions auxquelles nous souhaitons aboutir devront toutefois s'inscrire dans un cadre où la responsabilisation du praticien sur ses actes est maintenue.
Mais il faudra également tenir compte de certains cas très spécifiques, comme les pathologies évolutives liées à un accident de naissance et consolidées à l'âge adulte. La prise en compte de ces cas qui, potentiellement, sont susceptibles de générer les indemnisations les plus élevées, est d'ailleurs fortement souhaitée par les représentants des professionnels principalement concernés. Je souhaite toutefois que nous donnions du temps à la mission que mène actuellement Gilles Johanet, car c'est dans la sérénité et dans la concertation que pourra être mise en place la solution permettant de mieux couvrir les risques pour les professionnels et de conforter l'attractivité de ces professions.
Tels sont, mesdames, messieurs les députés, les principaux points qui ont donné lieu à discussion et sur lesquels je souhaite manifester mon esprit d'ouverture. J'aborde l'intégralité de la discussion de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale dans le même esprit d'ouverture et avec un seul but : préserver le système de santé et de protection sociale que nos compatriotes ont plébiscité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi de financement de la sécurité sociale s'inscrit dans un contexte de sortie de crise et de reprise économique parfaitement décrit par François Baroin. Dans ce contexte, tout le sens de l'action que nous menons avec le Président de la République, c'est de moderniser notre système de protection sociale pour le sauvegarder et le transmettre aux générations futures.
C'est ce que nous vous proposons avec ce PLFSS, qui nous permet à la fois de poursuivre les efforts de rationalisation des dépenses et de tenir nos engagements pour renforcer la solidarité envers les plus fragiles.
Les mesures prévues pour les branches dont j'ai la responsabilité avec Nadine Morano et Nora Berra reflètent ces orientations. J'aborderai successivement la famille, le médicosocial, la vieillesse et la branche AT-MP.
Le déficit de la branche famille s'établit à 2,6 milliards d'euros en 2010. Il serait de 3,2 milliards en 2011, mais nous proposons, avec Nadine Morano, deux mesures qui permettent de le réduire à 3 milliards en harmonisant les modalités de versement de deux prestations de la branche famille : la PAJE et l'allocation logement.
S'agissant de l'allocation logement, l'idée est d'aligner la date d'effet sur celle des minima sociaux, ce qui revient à supprimer la période de rétroactivité de trois mois. Cette mesure permet d'économiser 240 millions d'euros partagés entre la branche famille et l'État.
La seconde mesure harmonise la date d'effet de l'allocation de base de la PAJE sur celle des autres prestations familiales. En année pleine, cela devrait permettre de réduire les dépenses de la branche famille de 64 millions d'euros.
Votre commission des affaires sociales a proposé de supprimer cette dernière mesure, mais je tiens à en rappeler les objectifs : simplifier les modalités sans remettre en cause le principe de la PAJE. Si nous voulons rétablir progressivement l'équilibre des comptes, il nous semble important de retenir ce type de mesure qui procure une économie substantielle sans porter atteinte à notre politique en faveur des familles.
On préfère taper sur les familles modestes plutôt que sur Mme Bettencourt !
On ne remet pas en cause les politiques mais on harmonise les modalités techniques et pratiques de calcul.
J'insiste sur ce point : nous préservonsévidemment le caractère solidaire de notre politique familiale.
D'abord, en dépit des difficultés financières, aucune prestation familiale n'est réduite ni supprimée. En 2011, elles feront l'objet d'une revalorisation, conformément aux mécanismes en vigueur. En outre, nous tiendrons notre engagement de développer la garde d'enfants pour répondre aux besoins des familles et améliorer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, notamment pour les femmes.
Nous nous sommes ainsi engagés à trouver, d'ici à 2012, 200 000 offres d'accueil supplémentaires. Ce plan est en bonne voie avec 1,3 milliard d'euros supplémentaires qui lui sont consacrés dans le cadre de la signature de la convention d'objectifs et de gestion pour 2009-2012 entre l'État et la Caisse nationale d'allocations familiales. C'est un effort exceptionnel en temps de crise ou de sortie de crise. Nadine Morano insistera, dans quelques minutes, sur l'importance de nos actions dans ce domaine qui est au carrefour de plusieurs enjeux : les conditions d'accueil du jeune enfant, le bien-être des femmes et des couples, la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, l'égalité salariale, dont nous avons tant discuté dans le cadre du projet de loi sur les retraites.
Pour ce qui est du secteur médicosocial, nous avons tenu, avec Nora Berra, à renforcer dans ce PLFSS la transparence vis-à-vis du Parlement et la solidarité envers les publics les plus exposés, les plus fragiles.
En 2011, la construction de l'ONDAM médicosocial comporte deux évolutions majeures : une plus grande transparence et une gestion plus rigoureuse des crédits. Dans ce contexte, l'ONDAM médicosocial connaîtra une forte progression de 3, 8 % en 2011.
Le financement inscrit dans l'ONDAM est adapté à la réalité des ouvertures de places. Là aussi, un changement de méthode était absolument nécessaire. Nous adaptons les financements à l'ouverture réelle de places : ils correspondront aux dépenses effectivement réalisées au cours de l'année 2011 par les établissements et services qui ouvriront ou qui se médicaliseront, et non aux simples autorisations d'engagement.
Cette nouvelle méthode de financement permettra d'éviter la constitution d'excédents au sein de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie tout en maintenant l'engagement du Président envers les publics les plus fragiles. Elle est plus sincère et plus respectueuse du vote du Parlement que la pratique antérieure, qui reposait sur des ouvertures théoriques de places dans l'année considérée. Cette pratique permettait indirectement de dégager des marges de manoeuvre pour financer les investissements. À terme, nous devons donc réfléchir – et nous commençons à le faire avec Nora Berra – à un mécanisme pérenne et transparent pour financer l'investissement dans les établissements médicosociaux, mais cette remise à plat était totalement indispensable, puisque le chiffre présenté ne correspondait pas à la réalité du terrain.
Dès cette année, nous vous informerons également du montant des objectifs d'engagement de création de places dans les établissements. Cela se fera sans attendre l'entrée en vigueur des dispositions que vous avez adoptées dans la loi organique sur la gestion de la dette sociale, grâce à un amendement de Bérengère Poletti et d'Yves Bur.
Le projet du Gouvernement prévoit par ailleurs de restituer 100 millions d'euros de l'ONDAM médicosocial à l'assurance maladie en 2010. Votre commission a adopté un amendement visant à supprimer cette disposition. J'estime cependant qu'elle est nécessaire et qu'elle ne remet absolument pas en cause notre politique en faveur du secteur médicosocial. C'est une simple mesure de bonne gestion qui ne change rien au nombre de places qui seront créées en 2010. Ces crédits provenant de l'assurance maladie, il est assez naturel qu'ils y retournent, comme nous l'impose le contexte financier. Il est donc normal de rendre à l'assurance maladie tout ou partie des crédits dont le secteur médicosocial n'a pas besoin pour financer ses dépenses de l'année. J'insiste d'ailleurs sur ce point : la CNSA anticipe à ce stade de l'année une sous-consommation pour un montant compris entre 160 et 250 millions d'euros, ce qui laisse de la marge.
Cette mesure de restitution à l'assurance maladie nous permettra cette année de respecter l'ONDAM, pour la première fois depuis sa création en 1997. Je sais que M. Bur et le président de la commission des affaires sociales y sont sensibles.
Pour les personnes handicapées, nous poursuivrons la mise en oeuvre du plan handicap lancé par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap au mois de juin 2008.
En ce qui concerne les dépenses envers les aînés, elles connaîtront en 2011 une progression notable avec un taux d'évolution de l'ONDAM personnes âgées de 4,4 %.
Quant à la mise en place du plan Alzheimer, qui constitue l'une des priorités du Président de la République, c'est un axe majeur de notre action qui se déploiera, conformément aux objectifs, durant toute l'année 2011.
S'agissant de la branche vieillesse, les déficits de la CNAV et du FSV s'établiront respectivement à 6,9 milliards et 3,8 milliards d'euros. Nous avons engagé la réforme du système des retraites – vous l'aurez remarqué (Murmures sur les bancs du groupe SRC) – pour apporter une réponse durable et structurelle à cette situation et sauvegarder nos régimes par répartition en revenant à l'équilibre en 2018.
Cette réforme commencera à produire ses effets dès 2011. Sans réforme, le déficit de la CNAV aurait été de 10 milliards d'euros l'an prochain, alors qu'il sera de 6,9 milliards après l'entrée en vigueur des mesures prévues.
En 2011, ce sont évidemment les mesures en faveur des recettes qui seront à l'origine de l'amélioration des comptes, car les mesures d'âge n'entreront en vigueur que progressivement. Moins efficaces sur le plan financier la première année, elles monteront en puissance au fil des années.
Au total, les recettes nouvelles donneront lieu à 3,5 milliards de financements nouveaux en 2011, dont 3,2 milliards bénéficieront à la CNAV. Le PLFSS pour 2011 comprend certaines des mesures de financement de la réforme des retraites ; les autres figurant dans le PLF, c'est François Baroin qui vous les a détaillées.
Les rendements attendus de ces mesures seront affectés au Fonds de solidarité vieillesse. On continuera ainsi à clarifier le financement des dépenses de retraite entre les mesures contributives, qui relèvent des caisses de sécurité sociale, et les mesures de solidarité, que le FVS doit financer.
En 2011, les recettes nouvelles affectées au FSV permettront aux caisses de lui transférer une partie des dépenses liées au financement du minimum contributif.
À côté de ces mesures de recettes, les mesures d'âge rapportent environ 1,7 milliard d'euros à l'ensemble des régimes de retraite obligatoires, de base et complémentaires, dont un peu plus de 200 millions bénéficient à la seule Caisse nationale d'assurance vieillesse.
En ce qui concerne la branche AT-MP, l'allongement du délai de prescription pour les victimes de l'amiante est une mesure de solidarité fondamentale. Nous répondons ainsi à une attente très forte des associations de victimes de l'amiante et des organisations syndicales. Plusieurs arrêts récents de la Cour de cassation ont en effet souligné que le régime actuel de prescription quadriennale du FIVA était difficile à mettre en oeuvre. Pour 2009 et 2010, quelque mille victimes ou leurs ayants droit ont vu leur dossier frappé de prescription, ce qui est évidemment inacceptable.
Il fallait remédier à cette situation. À la suite de la concertation menée avec les partenaires sociaux et les associations de victimes, nous avons défini de nouvelles règles de prescription, plus claires, plus lisibles, mieux adaptées à la prise en compte de la situation des victimes de l'amiante et de leurs ayants droit. Cette réforme permettra au FIVA d'assurer un traitement de masse et une indemnisation rapide des victimes.
Ainsi, le régime de prescription est modifié selon trois axes. D'abord, dans un souci d'égalité de traitement, le délai de prescription sera calculé à partir d'un point de départ identique – le certificat médical – pour toutes les victimes, que leur maladie soit d'origine professionnelle ou environnementale. C'est bien de cette manière que fonctionnait le FIVA mais la Cour de cassation l'a remise en cause pour défaut de base légale. Ensuite, le délai de prescription passera de quatre à dix ans. Enfin, dans un souci d'équité avec l'allongement du délai de prescription, un délai supplémentaire de deux ans sera accordé aux personnes dont les droits à l'égard du FIVA seraient aujourd'hui prescrits.
Telles sont, mesdames et messieurs les députés, les priorités de mon ministère dans le PLFSS pour 2011. Comme l'a dit François Baroin, ce projet de loi permet d'amorcer le redressement de nos comptes sociaux après deux années de crise sans précédent. Avec ce texte, comme avec la loi portant réforme des retraites, nous prenons nos responsabilités envers les générations futures pour assurer la pérennité de notre modèle social. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, la France consacre à la protection sociale plus de 30 % de sa richesse nationale. Cet État protecteur et généreux est au coeur de notre contrat social. Jour après jour, la crise économique nous a d'ailleurs révélé l'importance de la solidarité et de la justice sociale.
Ce qui doit nous rassembler alors que nous abordons l'examen de ce projet de loi, c'est notre attachement à la sécurité sociale et au principe de solidarité nationale sur lequel elle repose. Mais pour mettre nos finances publiques au service de cette cohésion, nous devons passer d'une culture de la dépense à une culture de l'efficacité de la dépense. C'est ainsi et seulement ainsi que nous parviendrons à garantir à chaque Français le maintien de ce très haut niveau de protection sociale et à nous montrer responsables à l'égard des générations futures.
Comme les autres branches de la sécurité sociale, la branche famille connaît une nouvelle fois cette année l'impact de la crise économique. C'est en effet vers un déficit de l'ordre de 2,6 milliards d'euros que nous nous dirigeons aujourd'hui pour 2010, 3,2 milliards d'euros pour l'année 2011 avant mesures et 3 milliards d'euros après mesures. La branche famille a, de ce point de vue, une particularité : la crise économique affecte en effet non seulement les recettes mais également les dépenses de la branche.
C'est pourquoi le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 se veut un budget de responsabilité. À cette fin, deux mesures permettent une harmonisation des dates de versement des prestations.
La première aligne les dates d'effet de l'allocation logement sur les minima sociaux en supprimant la période de rétroactivité de trois mois, ce qui permet de rapporter 240 millions d'euros, partagés à parité entre branche famille et État.
La deuxième harmonise la date d'effet de l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant sur les autres prestations familiales. Elle sera désormais versée à compter du mois suivant la naissance de l'enfant. En année pleine, cette mesure devrait permettre de minorer les dépenses de la branche famille de l'ordre de 64 millions d'euros.
Mesdames et messieurs les députés, si notre devoir est d'investir dans la politique familiale, dépense d'avenir s'il en est, il nous faut aussi savoir tenir le cap de la raison économique. L'assainissement de nos finances publiques est non seulement possible mais indispensable pour garantir la pérennité de notre investissement en faveur des familles. C'est pourquoi je vous demande de voter en faveur de ces deux mesures de responsabilité et d'économies.
Je tiens à le réaffirmer devant vous : crise ou pas, le Gouvernement continue et continuera à soutenir les familles.
La France consacre 100 milliards d'euros, soit 5,1 % de son produit intérieur brut à sa politique familiale. Cette exception française, qui nous permet d'avoir l'un des meilleurs taux de natalité en Europe et de garantir un taux d'emploi des femmes élevé, nous la préservons et nous la sauvegardons envers et contre la crise. En dépit des difficultés financières, le Gouvernement a choisi de ne remettre en question aucune des prestations familiales. D'ailleurs, en 2011, elles feront l'objet d'une revalorisation de 1,5 %, conformément aux mécanismes en vigueur. Plusieurs millions d'euros seront ainsi consacrés à la prise en compte de l'évolution du coût de la vie des familles.
Au-delà de cette solidarité envers les plus fragiles d'entre nous et envers les familles, le Gouvernement continue à agir en faveur de la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, au service de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Comme vous le savez, le Président de la République s'est engagé à faire de l'accueil des jeunes enfants sa grande priorité en matière familiale.
Si c'est le Président de la République qui s'y est engagé, on peut craindre le pire !
Une enveloppe de 1,3 milliard d'euros servira à créer 200 000 places d'accueil supplémentaires d'ici à 2012. C'est un effort sans précédent et inédit en période de crise.
Les premiers résultats sont là : 46 000 enfants ont été accueillis l'an dernier en plus de l'accueil collectif. Nous allons enfin pouvoir offrir aux familles, à toutes les familles, une plus grande souplesse et la possibilité de choisir un mode de garde approprié à leur rythme de vie. Je rappelle, à titre d'illustration, que l'État s'était engagé à favoriser les crèches d'entreprise grâce à la réforme du crédit d'impôt famille. Cette mesure a permis la création de plus de 1 500 places de crèche l'an dernier.
Nous voulions également que les mères des quartiers sensibles aient plus facilement accès à des modes de garde pour pouvoir envisager une vie professionnelle. L'opération « Crèche espoir banlieue » a bénéficié d'un financement final de l'État de 73 millions d'euros qui a permis de créer près de 3 000 places, dont plus de 1 000 en Île-de-France.
L'État s'est également engagé à développer la garde d'enfants dans le cadre de l'accueil individuel, et a ainsi fixé un objectif de 100 000 places nouvelles auprès des assistantes maternels à l'horizon 2012.
Entre l'an dernier et cette année, 21 300 enfants supplémentaires ont pu être accueillis chez les assistantes maternelles, grâce à un ensemble d'outils portés par les lois de financement de la sécurité sociale précédentes, qu'il s'agisse de l'extension du prêt à l'amélioration de l'habitat accordé aux assistantes maternelles ou de l'autorisation donnée à une assistante maternelle de garder quatre enfants au lieu de trois.
En ce qui concerne les personnes handicapées, nous poursuivons avec la même détermination la mise en oeuvre du plan handicap voulu par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap du 10 juin 2008.
Ainsi, ce sont plus de 50 000 places – 38 000 pour adultes, 12 000 pour enfants – qui pourront être ouvertes à l'horizon de sept ans. Les objectifs du plan seront tenus en 2011, malgré le contexte budgétaire difficile que nous connaissons.
Au-delà de la poursuite des objectifs du plan, le Gouvernement souhaite s'engager aux côtés des personnes handicapées au travers de deux mesures phares.
La première concerne le relèvement du plafond de ressources de l'aide à la complémentaire santé afin d'éviter que les bénéficiaires de l'AAH en soient exclus du fait de la revalorisation de 25 % de son montant qui, le Président de la République l'a rappelé, se poursuivra jusqu'en 2012. Cette mesure représentera un effort de 23 millions d'euros en 2011, 64 millions d'euros en 2012 et 82 millions d'euros en 2013, sur le budget de l'assurance maladie.
La seconde mesure concerne les personnes en arrêt de travail à la suite d'un accident qui les a fait basculer dans le champ du handicap. Elles auront la possibilité d'accéder à des actions de formation professionnelle tout en continuant à percevoir des indemnités journalières, afin d'augmenter leurs chances de maintien dans l'emploi et d'éviter la désinsertion professionnelle.
Comme vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement tient à la politique de solidarité envers les familles et les personnes handicapées. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 comporte, dans sa partie médico-sociale pour les personnes âgées, deux orientations.
D'une part, l'ONDAM médico-social progresse moins que les années précédentes. Cela s'explique par le mode de financement de ce secteur qui vise à mettre fin aux sous-consommations récurrentes depuis cinq ans. Je ne reviendrai pas sur ce point qu'Éric Woerth vous a présenté tout à l'heure.
D'autre part, ce projet de loi marque l'importance que le Gouvernement accorde à la prise en charge de nos aînés. L'évolution de l'ONDAM personnes âgées en est la démonstration : avec un taux de 4,4 %, c'est l'objectif de dépenses qui progresse le plus.
Je le dis solennellement, les objectifs du plan de solidarité grand âge sont maintenus. Les autorisations d'ouverture déjà délivrées par les ARS, tant pour les établissements d'hébergement que pour les services de soins infirmiers à domicile, ou encore pour les accueils de jour et les hébergements temporaires, représentent, à la fin de 2010, 91 % des objectifs initiaux du plan. Cela signifie que près de 85 000 places, sur les 93 000 prévues par le PSGA, ont déjà été autorisées.
Je veux rassurer ceux qui en douteraient : les places restantes, dont le financement s'élève à 55 millions d'euros, seront créées par les ARS au cours des deux dernières années du plan. Le rapport de Bérengère Poletti sur la partie médico-sociale du projet de loi, rapport dont je salue la qualité, détaille ce financement à partir des informations que le Gouvernement s'était engagé à fournir à la commission des affaires sociales. Le début du plan a vu davantage de places d'établissement se créer, afin de favoriser le choix de vie à domicile de nos aînés. Je souhaite que, pour ces créations, un rééquilibrage s'opère, dans les deux dernières années du plan, au profit des services à domicile.
En ce qui concerne la médicalisation des maisons de retraite, le rythme ne sera pas ralenti. Je rappelle que cette politique permet de renforcer de manière significative le rôle des personnels soignants auprès des personnes âgées dépendantes, renforcement qui se traduit par une progression de crédits de l'ordre de 30 % pour neuf établissements sur dix.
Comme les années précédentes, 80 000 nouvelles places passeront en financement dit PATHOS en 2011. Cette médicalisation est l'occasion, pour un certain nombre d'établissements, d'intégrer des dépenses qui relèvent de la ville au titre du tarif global : dispositifs médicaux, professionnels de santé, actes de radiologie ou de biologie.
En 2011, une étude spécifique sera menée, afin de connaître précisément le montant de ces dépenses. Elle permettra de déterminer l'impact sur l'enveloppe de ville du passage des EHPAD au tarif global, et d'en tirer toutes les conséquences.
L'année 2011 verra également se poursuivre l'expérimentation relative aux médicaments dans les EHPAD. Cette expérimentation aurait dû se terminer à la fin de 2010, pour une intégration dans les forfaits soins en janvier 2011. Un bilan d'étape, qui vient d'être réalisé, a montré qu'il était nécessaire de poursuivre cette expérimentation pendant deux années supplémentaires. Le Gouvernement est bien évidemment favorable à ce report, qui ne pourra que renforcer la préparation d'une réforme importante pour l'amélioration de la prise en charge de nos aînés.
L'année 2010 a permis de réaliser des avancées très importantes dans la mise en place du plan Alzheimer. Les premiers pôles d'activités et de soins adaptés ont été créés. Le mode de fonctionnement des accueils de jour a été revu. Des référents Alzheimer ont été désignés dans chacune des agences régionales de santé. En 2011, l'implication des ARS dans la mise en oeuvre de ce plan sera totale, afin de permettre la création de 600 pôles d'activités et de soins adaptés et de 170 équipes mobiles de soins infirmiers à domicile renforcés. Je rappelle que la totalité des crédits des unités d'hébergement renforcées a déjà été allouée pour le secteur médico-social et le secteur sanitaire.
Deux innovations majeures verront par ailleurs le jour en 2011, comme l'a annoncé le Président de la République le 17 septembre dernier.
La première est la généralisation des maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades d'Alzheimer, les MAIA, qui est l'une des mesures phares du plan Alzheimer : trente-cinq nouvelles MAIA verront le jour, en plus des dix-sept qui sont actuellement expérimentées.
La seconde innovation est le déploiement – en complément des accueils de jour et d'hébergement temporaire dédiés aux malades d'Alzheimer – de soixante-quinze nouvelles plateformes de répit permettant de diversifier l'accompagnement aux aidants.
Éric Woerth vous l'a dit, il y aura bien un nouveau plan d'aide à l'investissement dans les établissements médico-sociaux en 2011. Au-delà des réserves déjà mobilisables par la CNSA, le niveau de ce plan sera déterminé en fonction des excédents constatés au 31 décembre. Mais, je tiens à le dire ici, le mode de financement de l'investissement dans ce secteur, uniquement fondé sur les excédents de la CNSA, n'est pas soutenable à long terme. Je souhaite qu'à l'avenir, les mécanismes de soutien à l'investissement en faveur des établissements médico-sociaux soit clarifié.
Au total, pour le secteur médico-social des personnes âgées, la progression des ressources en 2011 permettra de financer des mesures nouvelles, qui se réaliseront effectivement dans l'année, pour un montant total de 412 millions d'euros. En fonction des résultats de l'étude sur les liens entre l'enveloppe de ville et l'enveloppe médico-sociale à l'occasion du passage au tarif global, des transferts pourront venir abonder l'enveloppe « personnes âgées » en 2011.
Je dirai, pour conclure, que l'année 2011 est, pour le médico-social, une année de maturité. Après les réformes des années passées, favorisant l'efficience des établissements et la structuration au niveau régional, avec les agences régionales de santé, nous allons améliorer le circuit de financement du secteur. Nous créons en effet un cercle vertueux entre les crédits inscrits en loi de financement de la sécurité sociale, leur gestion par la CNSA, les autorisations données par les ARS et leur engagement final, une fois les projets réalisés. Cette amélioration est salutaire pour les décideurs publics et les acteurs médico-sociaux. Elle ne peut être que bénéfique pour les personnes âgées elles-mêmes. Elle permet également de mieux maîtriser la progression des crédits alloués chaque année au secteur médico-social. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l'équilibre général.
Madame la présidente, mesdames et monsieur les ministres, mes chers collègues, au sortir d'une crise financière exceptionnelle qui aura durement impacté les finances publiques comme les finances sociales, ce PLFSS, que je qualifierai de convalescence, illustre à la fois les dégâts financiers causés par cette crise et les défis qui sont encore devant nous.
Alors que nous n'arrêtons pas, depuis quinze ans, de courir derrière un équilibre financier dont l'horizon, hélas, semble toujours s'éloigner, alors que notre pays a été et reste incapable de générer une croissance forte et durable, il s'agit pour nous d'apporter enfin de vraies réponses aux défis qui se posent à la France et qui sont la condition de tout redressement.
Ces défis sont de trois ordres.
Comment renforcer la compétitivité du « site France » pour créer plus de croissance, plus d'emplois et plus de richesses au service des Français ?
Comment renoncer aux facilités des déficits et de l'endettement social, et imposer l'équilibre des dépenses sociales comme la norme et non plus l'exception budgétaire, s'agissant des dépenses courantes ?
Comment accélérer les réformes structurelles de notre système de soins, pour le rendre réellement plus performant, à dépense égale ?
Alors que la crise constitue, pour tous les pays qui nous entourent, une occasion de revoir et moderniser le fonctionnement de leurs États et de l'ensemble de leurs dispositifs de solidarité, alors que l'Allemagne, la Suède ou les Pays-Bas, sans parler bien sûr de l'Espagne ou de la Grande-Bretagne, taillent résolument dans les dépenses publiques, qu'ils considèrent comme un handicap incompatible avec une compétition européenne et internationale féroce, serons-nous les derniers à entretenir l'illusion que seule la France pourra continuer à financer à crédit un millefeuille social qui semble être hors de contrôle de toute volonté politique ?
Notre premier devoir, c'est l'ardente obligation de replacer la France dans une situation de compétitivité offensive afin de mieux profiter de toutes les opportunités de la globalisation et de la croissance mondiale.
Dans un rapport que j'ai remis au Premier ministre l'an dernier, j'avais souligné cette priorité pour sortir notre pays, pour sortir le « site France », d'une léthargie économique qui nous condamnerait longtemps encore à une croissance limitée à 1 ou 1,5 % du PIB.
Comme l'Allemagne, nous devons tout faire pour que nos entreprises redeviennent les fers de lance de la croissance en encourageant l'innovation, en supprimant toute bureaucratie inutile et en les allégeant de toutes charges qui ne sont pas liées au travail et à l'emploi.
Nous devons faire nôtre ce principe : ce qui est social, c'est ce qui donne du travail.
À cet égard, comme me l'avait demandé le Président de la République, j'avais proposé de substituer au financement de la branche famille par les entreprises un cocktail de contributions, dont la plus emblématique était une augmentation de la TVA de l'ordre de trois points, une TVA compétitivité, pour stimuler nos entreprises et faire participer les importations au financement de notre protection sociale.
Quoi qu'il en soit, il me paraît urgent, mes chers collègues, de faire de la compétitivité notre première priorité.
Seule une France plus compétitive, plus offensive, peut renouer avec une croissance durablement plus forte que les 1,5 % réalisés en moyenne au cours de ces dix ou quinze dernières années. C'est là que se situe la clé des emplois futurs, c'est là que se situe aussi la clé de l'équilibre des finances sociales.
Notre deuxième devoir, c'est de faire de l'équilibre des finances sociales la norme et non plus l'exception, une exception qui n'est que l'expression d'une fuite en avant illustrée il y a quelques heures encore par la préférence donnée aux facilités d'une dette perpétuellement étalée.
La sauvegarde d'une protection sociale solidaire ne sera durablement assurée que par un équilibre financier structurel.
Cela passe bien évidemment par la modernisation de notre millefeuille social, illustration d'un empilement galopant de droits nouveaux qui deviennent autant de droits acquis pour l'éternité, leur financement se faisant évidemment à crédit. Ce millefeuille social est indigeste pour les finances sociales, il pèse sur la croissance et le dynamisme économique et hypothèque gravement l'avenir pour nos jeunes.
Certes, nous devons nous réjouir – il faut le dire et le répéter – que le déficit pour la sécurité sociale soit moindre que prévu en 2010. Il se situe malgré tout à plus de 27 milliards d'euros, FSV compris, et sera encore de 26 milliards en 2011 !
Ce qui devrait nous inquiéter encore davantage, c'est la résistance des déficits à l'horizon 2015, malgré des hypothèses de croissance très volontaristes, pour ne pas dire trop optimistes : une croissance du PIB de 2,5 %, et de la masse salariale de 4,5 %, jusqu'en 2014.
Le vrai défi pour les finances sociales, c'est d'en assurer l'équilibre pour une croissance moyenne du PIB se situant entre 1 et 1,5 %.
Un tel équilibre permettrait d'espérer la constitution de quelques réserves dès que la croissance serait supérieure à ce niveau, pour compenser les déficits inévitables en période de ralentissement économique.
Un tel objectif pourrait être envisagé si la réforme des retraites, dont nous assurons le financement jusqu'à l'horizon 2018, était complétée par un financement supplémentaire pour l'assurance maladie. En effet, la préparation de ce PLFSS a illustré la difficulté de mobiliser des économies supplémentaires portant sur la dépense de santé sans toucher au niveau de prise en charge.
La seule réponse à ce nouveau déficit structurel ne peut pas être le désengagement de l'assurance maladie au profit des assurances complémentaires santé ou du reste à charge personnel ; et ce d'autant plus que, dans le même temps, des taxes nouvelles sur les assurances santé sont imposées pour financer in fine la branche famille, dont le financement est devenu incertain en raison du tour de swap-swap destiné à rassurer les marchés sur la solidité du financement de la CADES.
Dans le cadre de la feuille de route pluriannuelle, cette réflexion s'impose : après la réforme des retraites, c'est la réforme du financement de l'assurance maladie qui est urgente.
Troisième piste de réflexion qui s'impose : comment accélérer les réformes structurelles de notre système de soins pour le rendre réellement plus performant, à dépense égale ?
Les programmes d'économies visant à limiter l'évolution des dépenses – 2,4 milliards d'euros pour 2011 afin de limiter l'évolution de l'ONDAM à 2,9 % – sont de plus en plus difficiles à boucler. Ils le seront davantage encore à l'avenir si l'on ne souhaite pas entamer le coeur même de la solidarité face à la maladie.
Ce qui me préoccupe aujourd'hui, c'est de savoir si nous disposons des moyens pour optimiser de façon soutenue le parcours de soins.
En effet, si les mesures d'économies annuelles semblent encore incontournables, malgré la difficulté, cette approche par la maîtrise des dépenses reste trop ponctuelle et ne semble plus à la hauteur des enjeux.
La mise en place des ARS, madame la ministre, trouve ici tout son sens. Elles devraient être les pilotes d'un parcours de soins optimisé : chaque malade doit être pris en charge là où son état l'exige ; chacun doit bénéficier des soins de qualité requis par son état de santé, avec le souci de l'efficience. C'est à ce prix que nous pourrons enfin économiser des dépenses hospitalières encore excessives par rapport à nos voisins européens.
Ainsi, j'avais estimé à 2 milliards d'euros les économies possibles si les 18 % de personnes séjournant à l'hôpital alors que leur état ne l'exige pas étaient mieux prises en charge en amont comme en aval.
Comment mesurer la performance du parcours de soins afin de pouvoir mesurer celle de notre système de santé ? Voilà un indicateur qui me paraît bien plus opérationnel que les programmes de qualité et d'efficience, qui me semblent bien sommaires par rapport à cet enjeu.
Il est impératif, à cet égard, de renforcer rapidement les systèmes d'information, de pousser le dossier médical, qui a vocation à être un outil au service de la qualité comme de l'efficience.
Sans système d'information réactif, le pilotage de notre système de santé permettra à tous les conservatismes, à tous les corporatismes, de retarder, année après année, les évolutions nécessaires.
L'accélération nécessaire et incontournable de ces réformes structurelles au quotidien ne nous dispensera pas pour autant d'une réflexion sur les recettes supplémentaires dont a besoin notre système de santé.
À défaut de trancher, nous continuerons de régler cette insuffisance de financement par la dette : longue vie à la CADES !
Je conclurai, madame la présidente, en rappelant qu'il est malsain de vouloir rassurer les créanciers de la dette sociale au détriment du financement de la sécurité sociale. Il est essentiel qu'un financement pérenne et dynamique soit garanti à l'assurance maladie comme à la branche famille.
Nous aurons l'occasion, tout au long de ce débat, de finaliser le financement de la réforme des retraites, de gager la reprise d'une dette de 130 milliards d'euros par la CADES, tout en préservant la solidarité face à la maladie grâce un objectif de dépenses qui augmentera de 2,9 %.
Personne ne peut sérieusement affirmer que nous rationnons notre système de santé, alors qu'il bénéficiera d'une rallonge de 4,6 milliards d'euros en 2011.
Pas un Français ne s'est vu refuser des soins pendant ces deux années de crise que nous venons de traverser. Chaque Français pourra continuer à se faire soigner au mieux grâce à la solidarité nationale, qui s'exprime à travers ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je voulais le répéter.
C'est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales a approuvé le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui nous est proposé par le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse.
Madame la présidente, mesdames et monsieur les ministres, mes chers collègues, l'an dernier, à cette même tribune, je vous présentais le projet de loi de financement de la sécurité sociale en vous indiquant que 2010 serait une année fondamentale de réforme pour notre système de retraite.
En effet, le 22 juin 2009, le Président de la République avait clairement annoncé les choses lors de sa déclaration devant le Congrès : « 2010 sera un rendez-vous capital. Il faudra que tout soit mis sur la table : l'âge de la retraite, la durée de cotisation et, bien sûr, la pénibilité. Toutes les options seront examinées ! Les partenaires sociaux feront des propositions. Je n'ai nullement l'intention de fermer le débat au moment même où je l'ouvre ! Mais quand viendra le temps de la décision, à la mi-2010, que nul ne doute que le Gouvernement prendra ses responsabilités. C'est une question d'honneur, c'est une question de morale à l'endroit des générations qui vont nous suivre. »
Ces responsabilités, le Gouvernement, avec un soutien sans faille de sa majorité, les a prises en présentant un projet de réforme des retraites qui permet de sauver le système de retraite par répartition de la situation financière très difficile dans laquelle il se trouve aujourd'hui, et risquait de l'être encore plus demain. Ce projet de réforme, juste, efficace et équilibré (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),…
…que nous voterons cet après-midi, prévoit bien sûr le relèvement progressif des bornes d'âge à 62 et 67 ans, comme l'ont fait tous nos partenaires européens, mais aussi de nouvelles recettes frappant les hauts revenus et les entreprises.
Les dispositifs législatifs instituant ces nouvelles recettes sont répartis entre la première partie du projet de loi de finances et la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
À l'article 3 du projet de loi de finances figure la contribution supplémentaire de 1 % sur les hauts revenus et sur les revenus du capital. À l'article 5 du même texte figure la suppression du seuil de cession pour l'imposition à l'impôt sur le revenu des gains de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux réalisés par les particuliers. Enfin, à l'article 6, figure le déplafonnement de la quote-part des frais et charges dans le régime des sociétés mères.
Les autres mesures de recettes de la réforme des retraites figurent dans le présent projet. Son article 10 vient majorer les prélèvements perçus sur les retraites chapeaux, en supprimant l'abattement sur les rentes dont bénéficient les entreprises ayant choisi le prélèvement à la sortie et en créant un prélèvement additionnel de 14 % sur l'ensemble des rentes versées, prélèvement dont la commission souhaite exonérer les plus petites rentes. L'article 11 augmente, quant à lui, le taux des prélèvements sur les stock-options. Enfin, l'article 12 prévoit l'annualisation du calcul des allégements généraux de charges sociales.
La difficulté est que ces recettes ne sont aujourd'hui pas affectées au système de retraite mais au budget de l'État et à la CNAM. Le Gouvernement propose donc, à l'article 14, un dispositif permettant de transférer des recettes de la CNAM vers le FSV. En contrepartie de ces nouvelles recettes, le FSV prendra à sa charge une partie des dépenses du minimum contributif, dispositif de solidarité aujourd'hui directement pris en charge par les régimes.
Grâce à cette prise en charge, le solde de la CNAV en 2011 ne devrait être négatif que de 6,9 milliards d'euros, contre 10,5 milliards en l'absence de réforme. Cette amélioration de 3,6 milliards d'euros du solde en 2011 provient d'une réduction des dépenses de 0,7 milliard et d'une hausse des ressources de 2,9 milliards, ce surcroît de ressources correspondant essentiellement au nouveau transfert en provenance du FSV pour le financement d'une partie des dépenses liées au minimum contributif.
Au final, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 constitue donc la première étape de la mise en oeuvre de cette vaste réforme des retraites que nous nous apprêtons à adopter et qui doit, à l'horizon 2018, nous ramener à l'équilibre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Vote solennel sur le projet de loi portant réforme des retraites ;
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
La séance est levée.
(La séance est levée, le mercredi 27 octobre 2010, à zéro heure trente-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séancede l'Assemblée nationale,
Claude Azéma