La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à M. Gérard Charasse, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse au ministre du travail, et porte sur les retraites.
Les parlementaires radicaux de gauche prennent toujours la parole avec émotion sur ce sujet puisqu'ils ont été, en 1910, les inventeurs du premier système de retraites ouvrières et paysannes, en application de leur programme de Nancy. Trois ans auparavant, nous avions d'ailleurs créé le premier ministère du travail.
Cette mise en perspective redouble nos inquiétudes. Vous faites voter une réforme dans des conditions démocratiques douteuses, une réforme qui ne règle rien – vous en avez fait l'aveu –, une réforme fondée sur des préjugés qui, l'un après l'autre, sont démentis par la réalité ; une réforme, enfin, qui a mis la France dans la rue.
Notre inquiétude est d'autant plus vive que vous savez, comme nous tous ici, que les ménages anticipent très négativement cette réforme. Les demandes de départ anticipé redoublent, dans le privé comme dans le public. Nous allons donc vers une aggravation mécanique du déséquilibre financier et vers une déstabilisation de notre système de production. S'ajoute à cela une fébrilité de l'État face aux mouvements sociaux qui ne préjuge rien de bon dans la gestion démocratique et républicaine du conflit en cours.
Monsieur le ministre, allez-vous différer le vote de ce texte jusqu'à l'ouverture, enfin, de vraies négociations avec les partenaires sociaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Monsieur Charasse, fallait-il ne pas faire de réforme ? Fallait-il simplement regarder les comptes de l'assurance vieillesse se dégrader sous le coup de la démographie ? Les études qui paraissent aujourd'hui encore montrent que la société française vieillit. Nous pouvons nous enorgueillir qu'il y ait plus de soixantenaires et de centenaires. Mais il faut bien préparer notre régime de retraite pour affronter cela.
La crise a également fait s'effondrer durablement les recettes de nos régimes de retraites. Nous devions réagir, c'était le souhait du Président de la République, et nous l'avons fait.
Vous dites depuis des semaines et des semaines que cette réforme est injuste. Le sentiment qui nous anime à la fin de ce débat, au regard du texte que j'espère voir approuvé après cette séance de questions au Gouvernement, est que cette réforme est efficace puisqu'elle va bien amener un équilibre de nos régimes de retraites dès 2018. Et cet équilibre est la garantie d'un régime de retraites solide et durable pour les Français, notamment pour les jeunes.
C'est également une réforme juste, parce que ceux qui ont commencé à travailler tôt continueront à partir à soixante ans ou avant.
Ceux qui ont eu un travail pénible, et qui en ont été affectés, partiront aussi à soixante ans. Juste, cette réforme l'est également parce qu'elle prend en compte de nombreuses catégories de population, je pense notamment aux femmes, qui ont fait l'objet d'un grand débat dont nous pouvons nous enorgueillir.
Cette réforme était indispensable à la protection de notre système de retraites, et nous sommes fiers, Gouvernement et majorité présidentielle, de l'avoir faite. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est M. Jacques Remiller, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Éric Woerth.
Selon les chiffres de l'Institut national de la statistique publiés ce matin, La France comptera 73 millions d'habitants en 2060 et un tiers de la population devrait dépasser les soixante ans. Cette forte augmentation est transitoire et correspond au passage à ces âges des générations du baby-boom. Ainsi, la France pourrait compter 200 000 centenaires en 2060, alors qu'ils étaient seulement 15 000 en janvier 2010.
Tous ces chiffres montrent bien l'urgence qu'il y a à réformer notre régime de retraites. Car, je vous le rappelle, dès 2014, les soixante ans et plus seront plus nombreux que les moins de vingt ans ; et si les projections se vérifient, il n'y aura plus que cinq actifs pour six inactifs environ dans cinquante ans.
Après des semaines de discussion et des débats animés, nous allons adopter définitivement tout à l'heure la réforme des retraites.
Plusieurs députés du groupe SRC. Ce n'est pas encore fait !
Ce texte est à la fois nécessaire et juste. Nécessaire, parce qu'il permet le retour à l'équilibre de nos régimes de retraite ; juste, parce que les efforts sont partagés, en ménageant ceux qui ont commencé à travailler jeunes et ceux dont la santé s'est altérée en raison de leur travail.
Le choix que le Gouvernement a fait correspond à l'histoire et à la tradition de notre pays en s'appuyant notamment sur la solidarité intergénérationnelle.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner votre avis sur les chiffres publiés par l'INSEE ce matin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Monsieur Remiller, votre question est tout à fait d'actualité puisque ce matin sont effectivement parues dans la presse de toutes récentes études de l'INSEE sur la démographie. Comme vous l'avez très bien dit, nous allons avoir de plus en plus de centenaires en France et c'est tant mieux. Ils pourraient être 200 000 dans les années 2060.
Dans notre société, la proportion des plus de soixante ans va également augmenter.
Je me souviens d'une parole forte de Dominique Strauss Kahn prononcée à la télévision : « Si on vit cent ans, on ne va quand même pas continuer à avoir la retraite à soixante ans ». C'est exactement ce que nous dit l'étude de l'INSEE.
Cette étude met en avant la réalité de notre régime par répartition, qui permet de financer par les actifs les inactifs, c'est-à-dire les retraités. Et plus les retraités sont nombreux – la société française vieillissante, le nombre de retraités va évidemment augmenter, passant de 15 à 18 millions –, moins on peut laisser supporter cette charge, notamment aux jeunes actifs, …
…sans ajuster, modifier, réformer notre régime de retraite. C'est ce que le Gouvernement a fait, avec courage, mais aussi avec l'appui sans faille de la majorité présidentielle, que je veux saluer une fois de plus.
Ce n'est pas facile de faire une réforme des retraites. Il est nettement plus simple de ne jamais en faire. Nous n'avons pas emprunté la voie de l'irresponsabilité. Au contraire, nous avons pris le chemin de la responsabilité.
Le vieillissement de la société française est une chance ; c'est aussi, au fond, une bonne nouvelle pour les Françaises et les Français. C'est la preuve de l'efficacité de notre système de protection sociale et de santé. Nous devons nous en enorgueillir et en tirer les conséquences pour notre système de retraite. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Anny Poursinoff, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.
Ce week-end, les résidents de « La Marquise », bâtiment parisien de la place des Vosges, abandonné depuis 1966, ont été évacués par la police. Le Gouvernement a ainsi expulsé trente-deux jeunes précaires qui avaient trouvé là un toit depuis un an. Soutenue par le collectif Jeudi Noir, cette occupation témoigne de la profonde crise du logement, qui touche particulièrement les jeunes.
Depuis 1998, le prix de l'immobilier a triplé à Paris et la part du revenu consacrée au loyer dépasse souvent 50 %. Près de 10 millions de personnes sont touchées par la crise du logement. Premières victimes de cette crise, les jeunes sont aussi frappés par la crise économique – l'ampleur de leur taux chômage en témoigne. Alors que 70 % des contrats proposés aux moins de trente ans sont des CDD, comment ceux-ci peuvent-ils justifier de trois fiches de paye et d'un CDI, comme l'exigent les bailleurs ?
D'après l'INSEE, 10 % des logements sont vides à Paris, sans compter les bureaux. Que dire de la mixité sociale quand les populations les plus fragiles mais aussi les classes moyennes sont exilées loin des centres villes ?
À quelques jours du début de la trêve hivernale, cette brutalité aux dépens de toute une génération est inadmissible. Cinq ans après les événements de Clichy-sous-Bois, quelles réponses propose le Gouvernement à la crise sociale que nous traversons ?
Monsieur le secrétaire d'État, quand comptez-vous enfin mettre en application la loi de réquisition et obligerez-vous les collectivités à construire des logements sociaux de façon équilibrée sur l'ensemble du territoire, afin que la loi DALO ne reste pas une coquille vide ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Madame Poursinoff, je vous prie d'excuser l'absence de M. Benoît Apparu, qui présente actuellement le projet de budget du logement devant la commission des finances du Sénat.
Vos analyses sur la crise du logement sont exactes – vous êtes du reste une experte en la matière. Cette crise a une origine : moins de 280 000 constructions de logements ont été construits en France durant les cinq ans où M. Jospin a gouverné. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous me forcez à avoir la cruauté de vous rappeler les chiffres : en 2002, il n'y a eu que 40 000 constructions de logements sociaux en France…
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.Cela fait huit ans que vous êtes au pouvoir !
En 2009, nous en avons construit 120 000, soit trois fois plus que lorsque vous avez quitté le pouvoir – deux fois plus en prenant en compte l'ensemble des logements ! Encore n'est-il pas tenu compte d'un programme massif de rénovation urbaine dans nos quartiers en grande difficulté, de près de 40 milliards d'euros.
Voilà la situation réelle, madame Poursinoff. C'est le sujet sur lequel, pendant la période Jospin, vous avez le plus échoué, et c'est le domaine dans lequel cette majorité a fait le plus d'efforts. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question s'adresse à M. le ministre de la jeunesse et des solidarités actives. (« Au secours ! » sur quelques bancs du groupe SRC.)
Il y a un an, le Premier ministre…
…me confiait une mission sur l'économie sociale et solidaire (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC), avec pour objectif de définir les moyens d'une politique de développement de l'économie sociale et de l'entrepreneuriat social.
Au mois d'avril dernier, j'ai rendu un rapport déclinant – autour de cinquante propositions – les axes d'une politique répondant aux grands enjeux actuels de l'économie sociale et solidaire : l'identification et la lisibilité de son périmètre, l'accès au financement et l'intégration aux politiques publiques.
La semaine dernière, vous avez annoncé un certain nombre de mesures s'inscrivant – dans le cadre de vos attributions ministérielles – dans la logique des principales préconisations de ce rapport.
L'activité économique – 10 % du PIB – développée par les associations, les mutuelles, les coopératives, les fondations et les entreprises sociales est très dynamique dans notre pays : elle a généré 35 000 emplois supplémentaires en 2009, pourtant année de crise économique.
Novatrice et créatrice d'emplois, l'économie sociale et solidaire porte également des valeurs fortes qui participent à la cohésion sociale. Profits limités, échelles de salaires mesurées, finalité sociale du projet, fonctionnement démocratique : l'économie sociale et solidaire place l'initiative au service de l'homme, porte un message de confiance dans l'esprit d'entreprise et redonne du sens au travail.
Hier, en présence des principaux acteurs du secteur, le Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire a été installé – dans une configuration renouvelée – par M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État à l'emploi et vous-même, monsieur le ministre. Quelles actions, comptez- vous mettre en oeuvre (« Aucune ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC) pour assurer aux entreprises et aux structures de l'économie sociale et solidaire leur développement et leur pérennité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de la jeunesse et des solidarités actives.
Monsieur le député, votre rapport est en effet remarquable (Exclamations et rires sur les bancs des groupes SRC et GDR) et le Gouvernement, sous l'autorité de François Fillon, entend bien mettre en oeuvre ses principales préconisations. Nous l'avons démontré hier avec Christine Lagarde et Laurent Wauquiez lors de l'installation du Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire.
Un Français sur deux sollicite une coopérative bancaire, deux Français sur trois sont inscrits à une mutuelle, trois Français sur quatre sont inscrits à une association. Ce secteur, qui place l'homme au coeur de ses préoccupations, est névralgique et nous avons l'intention de l'encourager, car il permet de générer des emplois non délocalisables. Désormais, il représente 10 % de l'activité économique française. Dans le cadre du grand emprunt, nous avons donc décidé avec le Premier ministre…
…de mettre en oeuvre un investissement sur la ressource humaine : 100 millions d'euros seront consacrés à des actions de capital-risque ou à des prêts bonifiés.
Nous avons décidé de territorialiser nos actions dans quatre régions tests…
…pour développer les actions des chambres régionales de l'économie sociale et solidaire. Demain, je signerai un engagement avec des partenaires privés…
…en vue de créer une fondation qui permettra de répondre à l'aspiration de la jeunesse dans ce secteur. Bien d'autres préconisations de votre rapport, monsieur le député, seront mises en oeuvre. Le secteur de l'économie sociale et solidaire est un enjeu de cohésion sociale qui est au centre des préoccupations du Gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Germinal Peiro, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, la façon dont votre Gouvernement a conduit la réforme des retraites laisse à l'ensemble de nos concitoyens une désastreuse impression d'échec et de gâchis. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Cet échec est le vôtre, monsieur le Premier ministre,…
…celui du Gouvernement et du Président de la République, sur un sujet où il convenait de rechercher l'unité des Français et non d'attiser leurs divisions.
C'est un échec sur le fond, car la grande majorité des Français a compris que votre réforme est injuste.
Elle est injuste parce qu'elle appuie son financement sur les revenus des salariés en épargnant les revenus du capital.
Elle est injuste car les personnes qui travaillent à dix-huit ans devront cotiser quarante-quatre ans alors qu'elles effectuent les travaux les plus pénibles.
Elle est injuste pour ceux qui ont des carrières incomplètes et qui devront travailler jusqu'à soixante-sept ans pour ne pas être pénalisés – nous pensons en particulier aux femmes.
C'est un échec sur le fond : vous avouez vous-même que cette réforme ne règle pas le problème et qu'il faudra la reprendre en 2013.
Mais c'est aussi un échec sur la forme : il n'y a pas d'exemple sous la Ve République d'un gouvernement et d'un Président aussi sourds aux attentes de nos concitoyens (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), aux propositions de l'opposition et des partenaires sociaux.
Avec une réforme injuste et mal conduite, vous avez affaibli la France tant sur le plan du moral de nos concitoyens qu'au plan économique et social. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, la grandeur des politiques consiste à reconnaître ses échecs et d'en tirer les leçons. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question est simple. Allez-vous, monsieur le Premier ministre, reconnaître votre échec (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP) et vous attacher sérieusement à reprendre les négociations et à rouvrir le dialogue social ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, cette réforme est d'abord le rendez-vous de la responsabilité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Les régimes de retraites n'étaient plus financés, sinon à crédit, ce qui revient au même dans la mesure où l'on fait appel aux marchés financiers à partir du mois de novembre pour payer les retraites des Français.
Cette réforme est aussi le rendez-vous entre un homme politique, le Président de la République, et cette situation. C'est faire preuve de hauteur de vues que d'accepter d'affronter l'impopularité, passagère, liée à la conduite d'une telle réforme, forcément difficile à mener.
Nous sommes fiers – le Gouvernement et la majorité – d'avoir porté cette réforme. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous sommes fiers d'avoir porté une réforme juste.
Cette réforme est juste car tous ceux qui ont commencé à travailler tôt – quatorze, quinze, seize, dix-sept ans – pourront partir plus tôt. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Lorsque vous étiez au gouvernement, cela ne vous a pas dérangé de fixer l'âge de la retraite à soixante ans et, dans le même temps, de dire à ceux qui ont commencé à quatorze ans de travailler pendant quarante-six ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Jamais, vous ne vous êtes posé cette question ! (Mêmes mouvements.) Jamais non plus, vous ne vous êtes posé la question de la situation des femmes. (Mêmes mouvements.) Où sont les réalisations du parti socialiste sur ce sujet ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.) Vous ne manquez jamais une occasion de nous donner des leçons, mais où sont vos réalisations ? Nulle part ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous sommes fiers d'avoir mis en oeuvre un dispositif qui sera de nature à répondre aux inquiétudes des Français quant à la pérennité de leur système de retraite. Les jeunes ne disent pas autre chose quand ils descendent dans la rue. Ils se demandent s'ils auront le même système de retraite. La réponse est oui (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) parce que nous avons eu le courage de le réformer, ce qui n'est pas votre cas ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Philippe Boënnec, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de la santé et des sports, notre assemblée entame l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Tous les Français sont attachés à notre système de protection sociale,…
Le contexte actuel d'après-crise pèse sur les comptes sociaux. Assurer les dépenses et les recettes de santé pose un véritable problème de société. Nous devons collectivement relever des défis d'une ampleur sans précédent et avoir l'audace et la volonté de réformer notre protection sociale.
En effet, les dépenses de santé vont croître en raison de l'allongement de la durée de la vie, du coût des nouvelles thérapies et du désir légitime de vivre plus longtemps et en bonne santé. Pour faire face à ces défis et à leurs conséquences financières, il est indispensable que nous agissions en deux sens.
D'une part, il faut assurer une bonne gestion : nous devons utiliser au mieux nos crédits de santé. Le rapport de la Cour des comptes rappelle ainsi que, chaque année, un million de radiographies du crâne sont réalisées, pour la plupart inutiles selon la Haute Autorité de santé. Or chaque euro dépensé pour le soin doit être un euro utile. Il faut donc améliorer le contrôle et l'évaluer.
D'autre part, nous ne pourrons échapper plus longtemps à l'indispensable réflexion sur la pérennisation à long terme des ressources, et il nous faut étudier les pistes permettant de trouver les ressources nécessaires. Si la santé n'a pas de prix, elle a un coût. Pour que les Français continuent de bénéficier d'un bon système de protection sociale, outre une bonne gestion – c'est un gage de responsabilité –, il faut réfléchir à une nouvelle assiette de prélèvement ; nous ne pourrons en faire l'économie.
Madame la ministre, quelle est votre analyse de l'équilibre des dépenses et des recettes de la sécurité sociale ?
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Boënnec, vous l'avez rappelé, nos compatriotes plébiscitent un système de santé qui leur assure une qualité élevée des soins et un système de protection sociale qui leur garantit un niveau élevé de prise en charge solidaire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans sa branche maladie – que je vous présente en ce moment avec François Baroin (Mêmes mouvements) –, comporte trois orientations.
D'abord, la protection des plus démunis, des plus fragiles. Ainsi, grâce à un relèvement de l'accès à la complémentaire santé, le nombre de bénéficiaires potentiels passe de deux à trois millions.
Il s'agit ensuite de relever le défi de la modernisation et des nouvelles thérapies que vous évoquez. À ce titre, 4,7 milliards d'euros d'argent frais seront injectés dans notre système de santé.
Enfin, vous avez parlé de bonne gestion ; vous avez raison. Des gains en efficience sont possibles ; c'est pourquoi plusieurs référentiels proposés par la Haute Autorité de santé doivent être instaurés au titre de la maîtrise médicalisée.
Vous posez des questions importantes. Faut-il changer de système ? Nous sommes entièrement d'accord, sur tous les bancs de cette Assemblée, pour nous situer dans le cadre du pacte voulu par le général de Gaulle en 1945 (Exclamations sur les bancs du groupe GDR) : chacun paie selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Je crois ce système bon, parce qu'il est juste.
Faut-il augmenter les dépenses de santé ? Pourquoi pas ? Mais il faut réfléchir à toutes les économies que nous pourrons réaliser et à toutes les marges d'efficience que nous pourrons ménager avant de prélever dans le portefeuille des Français.
Pour ce qui est de la dépendance, le débat vient de s'engager ; il fera l'objet d'études et de concertations et, bien entendu, l'Assemblée nationale y sera en première ligne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, je vais vous lire une citation que vous identifierez peut-être : « J'ai dit que je ne relèverais pas l'âge légal de la retraite, pour un certain nombre de raisons. » (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
« Et la première, c'est que je n'en ai pas parlé pendant ma campagne présidentielle. Ce n'est pas un engagement que j'ai pris devant les Français. »
« Je n'ai pas de mandat pour cela. Et ça compte pour moi. »
Qui a dit cela sur RTL en mai 2008 ? Est-ce Pinocchio ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Non : c'est Nicolas Sarkozy, Président de la République, qui, de nouveau, a menti (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP), qui a trahi la confiance des Français !
Il avait dit : « Travailler plus pour gagner plus ». Le résultat ? Sept cent mille chômeurs de plus !
En revanche, il est une catégorie qui se porte bien : les riches, grâce à la loi TEPA, grâce au bouclier fiscal. Nicolas Sarkozy et ses amis du Fouquet's (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), c'est la consanguinité avec les affaires : le fils à l'établissement public de La Défense, et maintenant le frère qui, avec la société Malakoff Médéric, va encaisser les royalties de la loi sur les retraites !
Monsieur le Premier ministre, allez-vous rendre la parole aux Français pour qu'ils disent leur avis sur la réforme des retraites (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et, plus généralement, sur votre politique ? Allez-vous organiser un référendum (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP) pour que le peuple souverain se prononce ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Monsieur Brard, la démocratie, c'est vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe GDR.) La démocratie, c'est le Parlement, c'est le Sénat, c'est l'Assemblée nationale, c'est le Gouvernement de la Ve République. Et cette démocratie s'apprête à se prononcer sur un texte majeur du quinquennat (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), qui permet la sauvegarde, la protection, le sauvetage de notre régime de retraites. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) C'est de cela qu'il s'agit !
En effet, monsieur Brard, le Président de la République a tenu les propos que vous rapportez. Personne ne dit le contraire. (« Ah ! » sur les bancs du groupe GDR.) Du reste, vous l'avez répété en boucle pendant au moins deux cents heures : nous avons eu le temps de nous en souvenir. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Il l'a dit ; mais il l'a dit dans un contexte assez différent de celui d'aujourd'hui, monsieur Brard. (Protestations sur les bancs des groupes GDR et SRC.) Depuis, il y a simplement eu la crise ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Il faudrait tout de même ouvrir les yeux ! Il y a eu la plus grande crise que le monde ait eu à affronter depuis 1930 ; et cette crise a profondément changé la donne. Elle a changé la croissance et notre regard sur le monde, en particulier sur le monde économique. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Ne nous dites donc pas que le Président de la République, dans cette situation, n'aurait pas dû prendre la décision qu'il a prise.
Oui, Nicolas Sarkozy a eu raison d'appeler à une réforme des retraites ; oui, il a eu le courage de le faire (Protestations sur les bancs du groupe GDR) ; et je suis persuadé que la population française saura lui en rendre grâce. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous-mêmes, vous le remercierez, comme vous avez remercié cette majorité chaque fois qu'elle a réformé les retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) En 2003, vous disiez que vous n'accepteriez jamais l'allongement de la durée de cotisation. Qu'avez-vous fait depuis ? (Mêmes mouvements.) Vous avez accepté la réforme de François Fillon, qui passait par l'allongement de la durée de cotisation. (Mêmes mouvements.)
Demain, vous irez un peu plus loin, et vous accepterez le report de l'âge légal de départ à la retraite ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Jean-Pierre Nicolas, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance.
L'action du Gouvernement a été déterminante pour faire du plan de relance un véritable succès face à la crise. Nous pouvons tous mesurer la rapidité avec laquelle il a été mis en oeuvre mais aussi et surtout la pertinence du choix opéré par le Président de la République et par le Gouvernement de privilégier l'investissement productif. C'est ainsi que 1 500 chantiers ont été mis en oeuvre et que de nombreux dispositifs ont permis de soutenir l'activité économique des entreprises, principalement des PME.
Les résultats de ces choix sont tangibles puisque la France est le pays d'Europe qui a connu la plus petite rétractation de son PIB. Cette stratégie a d'ailleurs été saluée par le FMI.
La France a également fait le choix d'axer le plan de relance sur le soutien au pouvoir d'achat et sur des mesures sociales.
Les ménages aux revenus les plus modestes ont ainsi bénéficié de mesures de solidarité et d'efforts exceptionnels de la part de l'État. Le logement et la rénovation urbaine ont eux aussi fait l'objet de mesures spécifiques.
Dans le domaine de l'emploi, 3,7 milliards d'euros ont été mobilisés pour le financement de mesures exceptionnelles telles que l'aide à l'activité partielle pour prévenir les licenciements, l'aide à l'alternance pour les jeunes ou le dispositif « zéro charge » destiné à faciliter l'embauche dans les entreprises.
À l'inverse de certains pays, la France a repoussé l'exercice de facilité et d'inefficacité qui consistait à baisser la TVA. On voit où en est la Grande-Bretagne, aujourd'hui contrainte de faire marche arrière alors que son PIB a connu une baisse de 4,6 % en 2009.
L'État a donc tout mis en oeuvre pour amortir la crise économique et financière.
Monsieur le ministre, pouvez-vous faire le point sur les mesures sociales du plan de relance, et plus particulièrement sur celles en faveur des ménages et de l'emploi ? (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance.
Monsieur Nicolas, il y a un peu plus de dix-huit mois, dans cette assemblée, lors du débat sur le plan de relance, des voix venues des bancs de la gauche lui ont reproché l'insuffisance des mesures destinées à soutenir le pouvoir d'achat.
Aujourd'hui, les résultats sont là. Tout d'abord, la France est, en 2009, le pays qui a connu la plus petite récession du monde développé, avec une réduction de 2,5 % de son PIB contre 4,9 % en Allemagne, à titre de comparaison. Et, lorsque les résultats sont bons en matière d'activité économique, cela a des conséquences en matière sociale : nous avons eu moins de chômage que les autres pays.
Grâce au plan de relance, la France a su sauvegarder 400 000 emplois sur deux ans. Je le sais parce que je les ai comptés. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Chaque fois que le Gouvernement est intervenu pour sauvegarder une entreprise au bord du dépôt de bilan en lui fournissant les moyens de continuer son activité, nous avons pu faire le compte des emplois préservés et des inscriptions en moins à Pôle emploi. Ce calcul n'est pas bien difficile à faire, mais il est sans doute plus difficile à admettre de la part de jeteurs de sort comme vous l'êtes, mesdames, messieurs de l'opposition.
Pour ce qui est du pouvoir d'achat, objet de toutes vos récriminations, il faut souligner qu'il a augmenté de 1,6 % en 2009 et, en 2010, de 1,3 %. Autrement dit, nous avons sauvé le pouvoir d'achat grâce au plan de relance. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Marie-Line Reynaud, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, votre majorité s'apprête à voter la reforme des retraites. Vous croyez en avoir fini, vous pensez que le plus dur est passé. Pourtant, le plus dur est à venir, et c'est vous qui avez créé les conditions de ces difficultés futures. La crise a bon dos.
Vous êtes passés en force, sourds aux propositions socialistes, aux demandes de négociations des syndicats. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Votre méthode laissera de profondes traces sociales dans tout le pays. Comment faire confiance à un Gouvernement qui ne dit pas la vérité ? Comment faire confiance à un Gouvernement qui préfère l'injustice au dialogue ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Vous avez divisé la France alors qu'il fallait la rassembler. Vous avez voulu dresser les Français les uns contre les autres. Le prix de ce désordre est une reforme qui ne règle rien.
En déposant un amendement prévoyant qu'il faudra tout reprendre en 2013, vous reconnaissez que votre réforme est incomplète, insuffisante et non financée. Votre amendement est un aveu. Il est symptomatique de votre imprévoyance et de votre méthode de réforme, aussi brutale qu'artisanale. Ce manque de sérieux touche aussi les comptes publics et fait craindre le pire aux jeunes en ce qui concerne leur avenir.
Monsieur le Premier ministre, vous aviez promis de tout régler en 2003, puis vous avez affirmé que la réforme de 2010 était la bonne. Vous dites maintenant qu'il faudra recommencer en 2013. Vos promesses de circonstance font perdre à la France la confiance dans la parole politique. Le mieux est de tout remettre en négociation dès demain pour aboutir à une réforme juste et partagée, qui suscite l'adhésion de tous les Français.
Ma question est simple : quand allez-vous donc rouvrir les négociations ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Madame la députée, vous n'avez pas vraiment l'air de croire en ce que vous dites. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous nous reprochez d'être passés en force. Mais est-ce passer en force que de consacrer sept mois à la discussion sur les retraites ? Est-ce passer en force que d'avoir appelé à la réforme des retraites dès le mois de juin 2009, comme l'a fait le Président de la République ? Est-ce passer en force que de rencontrer plus de cinquante fois l'ensemble des partenaires sociaux ? Est-ce passer en force que de consacrer plus de deux cents heures au Parlement à examiner amendement après amendement, arguments et contre-arguments après arguments et contre-arguments ? Est-ce passer en force que de recevoir tous les partis politiques de ce pays pour leur demander leur opinion ?
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Vous ne les avez pas écoutés !
Est-ce passer en force que d'accepter que le texte connaisse vingt évolutions successives depuis son premier examen devant votre assemblée, le Gouvernement ayant accepté d'aller encore plus loin dans le lien établi entre pénibilité et retraite en faisant passer le taux d'incapacité justifiant un départ anticipé de 20 % à 10 % ?
Est-ce passer en force que d'avoir su regarder la réalité des choses, à savoir le naufrage annoncé du système de retraite par répartition ?
Nous voulons défendre le système par répartition par des actes quand vous ne le défendez que par des mots. Lorsque vous avez été au pouvoir, jamais vous n'avez réformé le moins du monde le système de retraite. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je sais que vous n'aimez pas que nous disions cela. Pourtant, c'est la vérité : vous n'avez fait que créer le COR et le Fonds de réserve des retraites.
Laissez-moi vous dire que ce n'est pas vraiment un bilan formidable que cette irresponsabilité du parti socialiste face à un problème aussi important. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Philippe Meunier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la ministre de la justice, garde des sceaux.
Nos compatriotes sont très nombreux à ne plus comprendre les décisions de justice ; ils sont plus nombreux encore à ne plus accepter les remises de peines automatiques.
La ville de Lyon a subi une semaine de violences perpétrées par des casseurs, véritables prédateurs, qui ont volé, pillé et agressé la population. Dès les premiers jours des décisions de justice ont été rendues : quelques sursis mais surtout des relaxes. Ces décisions sont d'autant plus surprenantes que la justice a emprisonné plusieurs semaines un retraité ayant tiré sur des cambrioleurs surpris à son domicile. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Il est intéressant de voir comme la gauche a des réflexes pavloviens quand il s'agit de sécurité. (Mêmes mouvements. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Il a fallu l'exaspération des Lyonnais et l'appel du parquet pour qu'enfin les premières décisions de prison ferme soient prononcées par les tribunaux lyonnais.
Quant à la question des remises de peines automatiques, nos compatriotes n'acceptent plus de voir des condamnés effectuer la moitié de leur peine de prison. Surtout, ils n'acceptent plus de voir la longue liste de victimes agressées par une partie de ces délinquants tout juste libérés.
Madame la garde des sceaux, face à la défiance de plus en plus grande des Français à l'encontre de nos institutions judiciaires, que mettez-vous en oeuvre et que comptez-vous faire pour que la politique pénale voulue par nos compatriotes soit véritablement prise en compte et appliquée sur l'ensemble du territoire ? Quelle est votre réflexion au sujet de cette question des remises de peines automatiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur le député, soyez assuré que la justice est fermement décidée à sanctionner ceux qui, en marge des manifestations notamment, ont commis des exactions, car ceux-là ne sont pas des manifestants : ce sont des délinquants.
Vous parliez des décisions prises par la justice : elles sont lourdes. Sur le plan national, 1 200 personnes ont été placées en garde à vue, 730 ont fait l'objet de poursuites pénales, plus de la moitié ont fait l'objet de déferrements et, sur l'ensemble de ces 1 200 procédures, il n'y a eu que cinq relaxes.
Pour ce qui est de Lyon, il y a eu 249 gardes à vue. Cent soixante-six personnes ont fait l'objet de réponses pénales, la moitié de déferrements ; il n'y a eu aucune relaxe des délinquants. (« Alors ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Ces affaires sont suivies et continueront de l'être. Nous le devons à nos concitoyens.
Je vous rappelle la philosophie de la loi de 2004 sur le crédit de réduction de peine. Le but premier de la loi est de lutter contre la récidive. La réduction de peine est en quelque sorte une « carotte » que l'on peut réduire lorsque le comportement n'est pas celui que l'on peut attendre d'un détenu, lorsqu'il ne montre pas la volonté de réellement se réinsérer dans la société.
Je vous rappelle également que pour les récidivistes, le crédit est de la moitié, précisément pour jouer ce rôle de contrainte.
La sécurité dépend de notre capacité à réellement lutter contre la récidive. Lutter contre la récidive, c'est aussi préparer la réinsertion, et la réduction de peine en est un des moyens. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Colette Langlade, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne la réforme des retraites.
Je souhaite tout d'abord revenir sur les contrevérités entendues ici ou là ces derniers jours : le vote imminent du texte n'est pas une victoire pour la France et encore moins pour votre gouvernement ; votre méthode, à mi-chemin entre le mépris de tous ceux qui, au Parlement, dans les syndicats ou parmi les Français, ont une voix dissidente, et le passage en force contre les institutions, le débat démocratique et, pire, le dialogue social, marque votre échec.
Ce n'est pas parce qu'on dit n'importe quoi en boucle, que l'on a raison.
Nous connaissons tous ici le véritable visage de votre projet : une vision à court terme pour combler les déficits dus à l'incurie de vos budgets.
Vous nous parlez de courage ; nous vous demandons d'être honnête. (Protestations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Honnête à l'égard des femmes, des seniors, des jeunes, des carrières longues, bref, honnête à l'égard des Français.
Votre réforme est injuste et inefficace, d'autant que vous nous donnez rendez-vous en 2013 puisqu'il faudra reprendre tous les débats à ce moment-là. De fait, les jeunes générations, pour ne citer qu'elles, devront cotiser plus et, étant donné qu'elles ne valideront pas l'ensemble de leurs trimestres de cotisations, percevront des retraites plus faibles.
Les socialistes ont formulé des propositions (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP) qui sont loin des caricatures que vous en avez faites. Nous demandons une véritable politique de l'emploi, de l'équité dans la répartition des efforts à travers notamment la contribution des revenus du capital. Nous préconisons d'instaurer un dispositif qui tienne compte du parcours professionnel. Nous suggérons la mise en place d'une surcotisation pour valider les années d'études et les stages.
Aussi, je vous demande solennellement de prendre vos responsabilités et de rouvrir le débat dans de bonnes conditions et dans le respect de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Madame la députée, nous sommes maintenant à quelques minutes du vote du texte et l'on peut espérer qu'après le Sénat, l'Assemblée nationale va bien vouloir l'approuver.
Vous dites qu'il n'y a pas eu de discussions, pas de débat : il y a eu approximativement soixante rencontres avec les organisations syndicales, deux cents heures de débat à l'Assemblée nationale et au Sénat. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous dites que le texte n'a pas bougé. Au demeurant, madame la députée, sans vouloir être offensant, je ne me souviens pas que vous ayez été des plus présentes dans le débat en question. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous le dis comme je le pense, et vous pouvez toujours dire ce que vous voulez. (Très vives exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Plusieurs députés du groupe SRC se lèvent et apostrophent M. le secrétaire d'État. – Claquement de pupitres.)
Vous dites que, sur les questions fondamentales de la pénibilité, du sort des mères de famille, nous n'aurions pas avancé. (Claquements de pupitres sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous en prie ! (Tumulte et claquements de pupitres prolongés sur les bancs du groupe SRC.)
Nous avons avancé. Vous pouvez crier tant que vous voulez, cela ne m'empêchera pas de continuer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Claquement de pupitres ininterrompus sur les bancs du groupe SRC.)
Vous dites qu'il faut reprendre le débat là où il a été laissé.
On se calme, chers collègues ! Madame Hoffmann-Rispal, monsieur Roy, monsieur Lemasle, monsieur Vidalies, je vous en prie ! (Exclamations prolongées et claquement de pupitres sur les bancs du groupe SRC.)
Ce débat sera repris lors de la grande confrontation de 2012. Je prends le pari avec vous que le parti socialiste, comme à l'habitude, va faire ce qu'il a fait en 2003 et en 1993. Vous allez hurler… (« Dehors ! » sur les bancs du groupe SRC. – Tumulte)
Vous allez vociférer, mais vous allez récupérer la réforme. Vous n'aurez pas le courage de revenir dessus parce qu'elle est juste, parce qu'elle est efficace, parce que si nous ne le faisions pas, c'est tout le système par répartition qui serait remis en cause. Vous avez fait la même chose en 1993, en 2003 et en 2007. (Bruit ininterrompu sur les bancs du groupe SRC.) Soyez-en assurée, la réforme que nous avons mise en oeuvre est celle qui permettra de sauver le système par répartition. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP, dont plusieurs députés se lèvent. – Protestations véhémentes sur les bancs du groupe SRC.)
Probablement est-ce parce que j'ai failli oublier de vous donner la parole, monsieur le secrétaire d'État, que vous avez émis quelque appréciation sur le travail des députés. Ici, l'Assemblée c'est l'Assemblée ; le Gouvernement c'est le Gouvernement. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Le secrétaire d'État nous doit des excuses !
La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, comme l'avait annoncé le Président Sarkozy en novembre 2007, lors de la cession de 3 % du capital d'EDF, 5 milliards d'euros issus de cette vente seraient consacrés à la rénovation des campus universitaires.
Nous voulons que M. Tron s'excuse pour les propos qu'il vient de tenir à l'encontre de Mme Langlade !
Trois ans après le lancement de ce plan, vous allez inaugurer, à la Cité de l'architecture, l'exposition et la présentation des projets imaginant les campus de demain avec comme priorité, voulue par le Président de la République, la qualité de vie des étudiants, mais aussi l'ambition scientifique et pédagogique ainsi que l'insertion du projet dans un tissu socio-économique régional. (« Des excuses de M. Tron ! » sur les bancs du groupe SRC.)
En tout, cinquante-huit chantiers, répartis sur douze pôles universitaires, dont les premiers devraient être lancés avant la fin de l'année, vont transformer et valoriser nos universités en privilégiant le cadre de vie pour les meilleures formations. Ce sera le cas de Grenoble.
Ces restructurations des campus autour de leurs grands champs de disciplines permettront des regroupements, voire des fusions, entre universités et grandes écoles.
Nos universités doivent être un atout et une référence sur la scène internationale, face aux grandes universités anglo-saxonnes notamment. Nos étudiants doivent s'y retrouver, s'y épanouir et se former. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Des excuses de M. Tron ! » sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui, je l'espère, va s'exprimer dans le calme.
Monsieur le député, comme vous l'avez dit, le plan campus, qui mobilise 5 milliards d'euros, vise à changer le visage et l'image de l'université française.
Ce plan, le Président de la République l'a voulu parce que, en 2007, 38 % de nos campus universitaires étaient vétustes. Avec la réforme de l'autonomie des universités, ce plan rendra sa fierté à l'université française. (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)
Cette opération concerne 730 000 étudiants, quarante-six universités et quarante écoles. Ce sont des campus verts, ouverts sur la ville, des bibliothèques, des restaus U, des cafétérias, des logements étudiants, des infrastructures sportives, des laboratoires, des amphithéâtres. La qualité de vie, la qualité environnementale sont au coeur de cette opération, (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
C'est cet après-midi, à la Cité de l'architecture, que des universités, qui travaillent d'arrache-pied depuis deux ans, présenteront leurs projets pour la première fois, avec le soutien d'un grand nombre de collectivités territoriales que je tiens ici à remercier. Le Président de la République annoncera le démarrage de cinquante-huit chantiers d'ici à la fin de l'année.
Vous le voyez, avec le dixième mois de bourse pour les étudiants les plus défavorisés, avec l'autonomie des universités, le plan « Réussir en licence » et les campus, nous donnons clairement à la jeunesse de France la preuve qu'elle est aujourd'hui notre priorité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Martine Faure, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, avant de poser ma question, je veux dire à M. Tron que ses propos sont inadmissibles… (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Voyou !
…et nous demandons des excuses. (« Absolument ! » sur les bancs du groupe SRC. – « Non ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, depuis la rentrée vous baignez dans l'autosatisfaction. Vous nous parlez de votre ambition pour l'école, de lutte contre l'illettrisme, d'assurer la réussite de chaque élève et de proposer un nouveau pacte de carrière aux enseignants. Le tableau est idyllique, mais, en fait, vous nous décrivez un village à la Potemkine, et ce bel affichage sert surtout à masquer une réalité alarmante.
Aujourd'hui, des centaines de jeunes stagiaires se débattent dans de grandes difficultés. Certains ont déjà démissionné et la masterisation dont vous vous gargarisez ne servira pas de sésame sans véritable formation initiale. De très nombreux remplacements ne sont pas assurés, ce qui rompt avec le principe de continuité du service public, pour la plus grande satisfaction des sociétés privées prétendument spécialisées dans le soutien scolaire.
Conformément à vos préconisations, le nombre d'élèves par classe a fortement augmenté, ce qui contredit vos déclarations sur le suivi de chaque élève, clé de la réussite éducative. Appliquer obstinément la formule « moins de moyens pour plus de résultats » vous conduit à supprimer un nombre important de postes d'enseignants spécialisés.
Monsieur le ministre, à défaut de construire, allez-vous cesser au moins de démolir ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Madame la députée, votre tableau me semble bien éloigné de la réalité que rencontrent les Français au quotidien dans notre école. En cette rentrée 2010, nous avons voulu moderniser notre système éducatif, par exemple avec la réforme du lycée qui permettra à chaque élève de construire son parcours de manière individualisée, avec une orientation progressive, réversible, avec une personnalisation de l'enseignement liée à l'accompagnement personnalisé, ce qui constitue une vraie nouveauté.
Oui, la lutte contre l'illettrisme est une priorité du Gouvernement. C'est pour cela que nous avons mobilisé, à la fois les enseignants de primaire, de premier degré et de maternelle. J'ai nommé 100 inspecteurs de l'éducation nationale, un par département, chargés précisément de ce grand chantier, pour faire en sorte que nous revenions à l'apprentissage des fondamentaux que sont la lecture, l'écriture, afin que nos élèves ne quittent pas l'école primaire sans les maîtriser.
Je ne peux pas vous laisser dire que le nombre de démissions de professeurs stagiaires serait sans précédent. J'ai regardé les chiffres de près : au mois d'octobre, le niveau de démissions était inférieur à celui de l'année dernière, ce qui veut dire que le système d'accompagnement de nos jeunes professeurs fonctionne, à la fois de par l'accueil, le tutorat et les stages qui leur sont proposés.
Madame la députée, la vérité, c'est que, depuis huit ans, le parti socialiste n'a rien dit sur l'école, comme sur beaucoup d'autres sujets. Heureusement, le Gouvernement de François Fillon considère que c'est une priorité. L'éducation nationale est le premier budget de l'État et il continuera à augmenter de 1,6 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Lucien Degauchy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, le week-end dernier, les pays du G 20, réunis en Corée du Sud, sont parvenus à un accord sur la réforme du système bancaire et financier accusé d'avoir provoqué la crise financière. Il s'agit là d'un accord historique destiné à réformer l'actionnariat et le conseil d'administration du FMI.
Il faut se réjouir que cette réunion ait permis de montrer l'importance d'une coordination des grandes puissances pour sortir de la crise
Madame la ministre, alors que, dans quelques jours, le chef de l'État présidera le G 20,…
…pouvez-vous nous rappeler les mesures que prendra la France dans le cadre de ce G 20 spécialement consacré au volet financier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Monsieur Degauchy, vous avez raison : vendredi et samedi derniers, en Corée du Sud, les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales des vingt pays les plus importants en termes de PIB, représentant environ 85 % de l'économie du monde, se sont retrouvés pour conclure trois points importants.
Premièrement, ils se sont mis d'accord sur une réforme du Fonds monétaire international dont le bilan est satisfaisant pour la France, qui n'a pas joué la variable d'ajustement, et qui a permis la représentation des grands pays émergents, le maintien de six des pays du G 7 – dont la France, qui a préservé son siège et donc son droit de vote.
Deuxièmement, les pays représentés ont décidé de coordonner leurs politiques économiques à travers la question des changes : ils s'interdiront dorénavant tout protectionnisme en matière de politiques de changes.
Ce changement profond augure bien du troisième point : la confirmation de l'agenda défini par le Président de la République pour la présidence française du G 20, qui avait identifié trois thèmes – le système monétaire international, les matières premières et les produits financiers dérivés sur les matières premières, la gouvernance mondiale.
Le système monétaire international devra être modifié pour préserver les pays émergents, pour diversifier les réserves. Cet objectif a été confirmé le week-end dernier à Séoul.
En ce qui concerne les matières premières et les produits dérivés, il a été constaté que l'ensemble de la régulation financière avait progressé mais que nous devions avancer encore sur la question. Bruno Le Maire y travaille lui aussi.
Pour ce qui est de la gouvernance enfin, la réforme du Fonds monétaire international et le maintien de la place de la France constituent un véritable progrès et augurent bien de la présidence française. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, nous découvrons avec stupeur un article qui programme de nouveaux transferts de charges de l'État vers l'association nationale qui soutient financièrement l'insertion professionnelle des personnes handicapées, l'AGEFlPH. Très concrètement, cela signifie que cette association aura demain moins de moyens pour agir en faveur de l'accès à l'emploi des personnes handicapées.
Lorsque l'on connaît le taux de chômage de cette population qui atteint près de 20 %, soit plus du double du taux de chômage au plan national, c'est un nouveau coup dur porté à l'une des avancées majeures de ces dernières années.
Avec cette nouvelle mesure, sur deux ans, 80 millions d'euros seront ponctionnés sur la politique visant l'intégration professionnelle des personnes handicapées. Cette ponction s'explique par le fait que vous n'avez plus les moyens de financer ce qui relève pourtant de votre responsabilité : la formation professionnelle de ces demandeurs d'emploi.
Le déficit qui en résultera pour les organismes oeuvrant pour l'insertion professionnelle aura pour conséquence une diminution des aides accordées aux travailleurs handicapés pour compenser leur handicap et de celles accordées aux entreprises pour les accueillir.
Vous justifiez cette mesure, prise sans concertation, par une dérive des finances publiques due à la crise.
Loin de tout esprit polémique, je me référerai seulement au rapport de la Cour des comptes pour l'année 2009, selon lequel un tiers du déficit est imputable à la crise et deux tiers aux politiques gouvernementales, c'est-à-dire à vos choix politiques, qu'il s'agisse du paquet fiscal ou de la réforme de la taxe professionnelle.
Nous ne pouvons accepter que la réduction des déficits publics porte alors sur les populations les plus vulnérables. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Madame la députée, je vous réponds à la place de Nadine Morano, retenue au Sénat.
Il n'est nullement question de revenir sur le montant des fonds consacrés à la formation professionnelle des adultes handicapés. Il ne s'agit que de transferts de crédits, et si l'État peut procéder à ces transferts, c'est tant mieux. Il n'y a pas de réduction des fonds ni de l'effort du pays vis-à-vis de la population handicapée.
Ainsi, nous aurons revalorisé de 25 % l'allocation pour adulte handicapé pendant les cinq années de présidence de Nicolas Sarkozy. Cette allocation augmentera de 150 euros sur l'ensemble du quinquennat.
Nous allons par ailleurs créer 50 000 places en établissements, du reste prévues par le plan handicap en cours d'élaboration.
J'ajoute que 73 % des crédits ont été délégués.
La réforme des retraites, quant à elle, élargit l'accès à la retraite anticipée des travailleurs handicapés. Peu de pays permettent aux personnes handicapées de partir en retraite anticipée. Cette population est amenée à doubler, voire tripler, simplement parce que l'on reconnaîtra le statut de travailleur handicapé, ce qui sera tout à la fois plus simple et plus sûr pour cette population. Nous prévoyons le maintien à soixante-cinq ans de l'âge de l'annulation de la décote pour tous les handicapés et les aides familiaux.
Enfin, les parents d'enfants handicapés pourront reprendre une activité à temps partiel tout en continuant à bénéficier de l'assurance vieillesse des parents au foyer.
Autant de mesures tout à fait légitimes en faveur de la population handicapée.
Handicap
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)
L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur le texte de la commission mixte paritaire relatif au projet de loi portant réforme des retraites.
Dans les explications de vote, la parole est à Mme Marisol Touraine, pour le groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, M. Tron n'est plus là. Décidément, l'insulte et le mépris auront été de mise jusqu'au bout, dans ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC . – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Je tiens à dire que les attaques insultantes qu'il a proférées à l'encontre de notre collègue Colette Langlade s'adressaient en fait à tous les socialistes, et tous les socialistes se sont sentis concernés par ces attaques inacceptables. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Au fond, cela se situe bien dans la logique de ce que vous avez fait et dit depuis l'ouverture de ce débat.
Plusieurs députés du groupe SRC. Le voilà ! Le voilà ! (M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique, entre dans l'hémicycle. – Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
On comprend bien que certains ministres perdent leurs nerfs, puisque la vérité, c'est que, avec ce vote, vous tournez le dos au mouvement du progrès social, vous refusez la volonté d'une société de justice et de solidarité (Protestations sur les bancs du groupe UMP), héritée du Conseil national de la Résistance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La vérité, c'est que votre politique est d'ores et déjà un naufrage et que ce qui devait être la grande réforme du quinquennat s'est transformé en piteuse citrouille législative. Vous rêviez d'audace réformatrice et vous vous retrouvez avec un pays en crise, qui a perdu confiance, qui a, surtout, perdu confiance en vous. À aucun moment vous n'avez su convaincre, avançant un jour des explications fondé sur le déficit démographique de long terme et, le lendemain, invoquant le déficit né de la crise.
La vérité que retiennent les Français, c'est que votre bilan tient en trois mots : provocation, irresponsabilité, injustice. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
Provocation, car vous vous êtes entêtés jusqu'à la dernière seconde à humilier les Français, à dédaigner les organisations syndicales, à ignorer l'opposition. En quelques semaines vous aurez réussi le prodige de coaliser le pays entier contre votre projet, de mettre en scène votre mépris du Parlement et d'enterrer la possibilité d'une réforme durable, alors même – c'est là votre grande faute – que cette réforme était nécessaire (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) et alors même que les Français la jugeaient indispensable. Cependant il fallait une autre réforme ; les Français demandaient une réforme qui soit juste et qui soit responsable. Votre projet, lui, est irresponsable.
Vous disiez vouloir rendre confiance aux jeunes générations. Vous avez, pour toute réponse, supprimé le fonds de réserve qui leur était destiné et vous les acculez à prendre des assurances privées.
Vous assuriez légiférer pour le long terme et assainir les finances durablement. Pourtant, après 2018, c'est le trou noir et dès 2013 il faudra tout reprendre, tant votre refus de mettre à contribution les revenus du capital fragilise la situation.
Et tout cela pour quoi ? Pour un projet dont l'injustice est le fil conducteur et dont l'injustice vous collera longtemps à la peau. Oui, il est injuste de faire reposer tout l'effort sur les salariés, notamment sur les plus modestes, sans mettre à contribution les revenus du capital. Oui, il est injuste d'obliger ceux qui ont commencé à travailler à dix-huit ans à cotiser quarante-quatre ans avant de partir en retraite.
Oui, il est injuste de relever l'âge légal de départ en retraite, ce qui ne pénalisera pas les cadres alors que les ouvriers et les employés – à condition, évidemment, qu'ils aient un emploi – se verront taxer de deux années de travail supplémentaires.
Il est plus qu'injuste, monsieur le ministre, de refuser à tous ceux qui sont usés par des métiers pénibles de partir plus tôt en retraite. Il est injuste d'imposer aux salariés précaires, aux femmes qui ont eu des carrières hachées, d'attendre soixante-sept ans pour percevoir une petite retraite sans décote.
Cela étant, nous le disons fortement, pour les socialistes, la fin du débat parlementaire ne marquera pas la fin du débat politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.) En effet nous n'acceptons pas qu'à cause de vous, les Français renoncent à l'espoir d'une réforme juste, durable et financée. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, au cours de ces derniers mois, vous nous avez beaucoup parlé de courage, mais vous avez choisi la facilité, celle de faire payer les faibles et de vous attaquer aux plus modestes.
« Le courage, disait Jean Jaurès, c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel ». C'est parce que vous avez renoncé à l'idéal social de la France, parce que vous avez dramatiquement ignoré la réalité de notre pays, que les socialistes voteront contre votre réforme des retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce n'est pas seulement sur un texte de loi que nous sommes appelés aujourd'hui à voter, mais sur l'organisation par le Président de la République et par ce Gouvernement d'une régression sociale sans précédent, sur l'une des étapes de la déconstruction méthodique des acquis du programme du Conseil national de la Résistance, sur la remise en question du droit social par excellence que constitue le droit à la retraite à soixante ans.
Cette forfaiture du Président de la République (Murmures sur les bancs du groupe UMP) face aux agences de notation et aux exigences antisociales de l'Europe libérale est d'autant plus révoltante que M. Sarkozy avait martelé, en 2007 puis en 2008, qu'il n'avait pas reçu de mandat des Français pour réformer le système des retraites, et qu'il s'était auparavant déclaré fermement attaché au droit à la retraite à soixante ans, qu'il avait soi-disant voté !
Un mensonge entraînant les autres, vous avez, messieurs les ministres, menti aux Français pour tenter de faire avaler le sirop amer de votre réforme antisociale : mensonges par action ou par omission sur vos comparaisons européennes, gage, selon vous, de la pertinence de votre démarche ; mensonges sur la démographie, sur la situation des femmes face à la retraite, sur les carrières longues, sur la pénibilité, sur le maintien du niveau des pensions, sur votre volonté de sauvegarder la retraite par répartition alors même que vous donniez un avis favorable à des amendements visant à accroître la part des retraites par capitalisation au détriment de celle du régime général. Excusez du peu !
Comme si cela ne suffisait pas, vous avez conduit cette réforme à la hussarde, poussés en cela par le Président de la République, pour qui la moindre anicroche sonne comme un affront personnel auquel il faut répondre par la force et l'autoritarisme, bien loin, malheureusement, de la sérénité qu'on serait en droit d'attendre d'un chef d'État.
Cette réforme, dont les principales dispositions étaient déjà actées à l'Élysée avant même les premières concertations, a donné lieu à un simulacre de dialogue avec les partenaires sociaux, auquel a succédé un véritable putsch parlementaire, puis un passage en force au Sénat.
Notre démocratie est en berne après cette démonstration d'autoritarisme parlementaire et exécutif, d'autant plus vaine que vous proposez désormais un large débat en 2013. Que ne l'avez-vous fait dès cette année ? Quel aveu d'incompétence et de vanité !
Cependant, mes chers collègues, la fin du débat parlementaire – si tant est que l'on puisse appeler cela un débat – ne siffle pas la fin du match.
Vous refusez de voir et d'entendre que 70 % des Français refusent votre réforme (« Non ! Non ! » sur les bancs du groupe UMP) : 57 % se prononcent contre le report de l'âge légal de départ en retraite de soixante à soixante-deux ans ; 65 % contre le passage à soixante-sept ans pour toucher une retraite sans décote et la même proportion juge inefficaces vos concessions sur la pénibilité et sur les carrières longues.
Par ailleurs, 70 % de nos concitoyens soutiennent les mobilisations qui ont commencé en mars 2010, je vous le rappelle. Depuis le 24 juin, le mouvement social ne s'est pas affaibli, loin s'en faut.
Alors que vous enterrez déjà la mobilisation, sachez que dans ma circonscription, au Havre et dans son agglomération, sont toujours en grève – ce matin, les pompiers les ont même rejoints – Total Raffinerie de Normandie, Total Fluides, la CIM, Eliokem, Petrochemicals, SNCF, Chevron, la centrale EDF, Fouré Lagadec, Dresser, Vinci, Ponticelli, Konecranes, Aircelle, Lafarge, Yara, pour ne citer que les plus grandes des entreprises en grève dans ma circonscription. Et vous parlez de « grève de fonctionnaires » !
Demain jeudi, à travers le pays, ils seront des millions dans la rue. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous serons parmi ces citoyens, ces salariés du privé et du public, les personnels dockers, portuaires, hospitaliers, enseignants, les agents territoriaux, les retraités, les jeunes. Votre autisme a conduit à cette contestation populaire, transformant la mobilisation contre votre réforme en un mouvement de révolte beaucoup plus large contre votre politique fiscale et économique, contre vos mesures sociales régressives, contre le mépris, le dédain et le cynisme avec lesquels vous traitez les travailleurs et les gens modestes.
Exaspérés par cette contestation populaire qui enfle, vous tentez de restreindre le droit de grève ou de casser la mobilisation en réquisitionnant les personnels grévistes dans les entreprises. Vous vous obstinez à diviser le peuple : jusqu'où comptez-vous aller ?
Ne voyez-vous pas que, partout, dans le public comme dans le privé, chez les jeunes autant que chez les retraités, le peuple refuse de se mettre à genoux et de se laisser ainsi humilier en abdiquant sur l'un de ses droits sociaux les plus emblématiques des luttes ouvrières ? Avez-vous oublié que le peuple ne se soumet jamais à un pacte de subordination à un chef, fut-il élu, et que le scénario des luttes revendicatives ne se décrète pas à l'Élysée ?
Le Président, ce gouvernement et cette majorité ont aujourd'hui perdu la bataille de l'opinion ; c'est désormais le peuple français qui, comme aux tournants de notre histoire, porte les valeurs républicaines que vous bafouez sans vergogne.
Les députés du groupe GDR seront toujours aux cotés du peuple qui se bat pour ses droits pour en acquérir de nouveaux et ils voteront résolument contre votre réforme rétrograde. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur divers bancs du groupe SRC.)
Le scrutin public sur le texte de la commission mixte paritaire est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe Nouveau Centre.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, la CMP s'est conclue par un accord. Le Sénat l'a approuvé hier. Nous arrivons donc aujourd'hui au terme des débats parlementaires.
Pour le Nouveau Centre, la réforme de notre système de retraite est indispensable pour sauvegarder notre système de retraite fondé sur la répartition et pour donner confiance à nos jeunes qui ont l'impression de cotiser aujourd'hui sans pouvoir bénéficier de droits à la retraite.
Cette réforme est nécessaire pour des raisons démographiques…
…liées au papy-boom et à l'augmentation de la durée de vie. Ces raisons démographiques entraînent la nécessité d'une réforme fondée sur la démographie.
C'est pourquoi le Nouveau Centre approuve l'augmentation de la durée d'activité pour liquider la retraite portée de soixante à soixante-deux ans, et le report pour pouvoir bénéficier d'une retraite sans décote de soixante-cinq à soixante-sept ans, d'autant que ces reports sont progressifs : un trimestre par an.
Le Nouveau Centre approuve également l'utilisation du fonds de réserve des retraites pour financer les déficits d'ici à 2018. II ne serait pas raisonnable d'emprunter pour financer ces déficits alors que nous disposons d'une réserve de 33 milliards.
Cependant, le Nouveau Centre regrette vivement – j'ai eu l'occasion de le répéter à de nombreuses reprises tout au long des débats – que le Gouvernement n'ait pas profité de cette loi réformant les retraites pour s'engager vers une vraie réforme d'équité : un régime universel unique à points ou, mieux, à comptes notionnels, géré par les partenaires sociaux, avec mise en extinction des régimes spéciaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.) Une telle réforme aboutirait à ce que chacun de nos concitoyens paie une cotisation unique, et à ce que sa retraite soit calculée selon les mêmes critères pour tous.
Cependant, l'idée progresse. Le texte prévoit que, en 2013, une réflexion sera engagée sur les conditions de mise en oeuvre d'un régime universel. Nous regrettons ce délai. En effet, la mise en place d'une telle réforme demande du temps. Or celui-ci nous est compté. Il est grand temps d'engager la réflexion. Nous sommes persuadés, comme beaucoup de nos concitoyens, que le régime universel est la vraie réponse.
Le Nouveau Centre a émis des doutes également sur le financement de cette réforme. L'équilibre ne semble pas assuré en 2018. Les travaux du COR, réalisés sur des bases économiques optimistes, montrent un besoin de financement de 48 milliards. Or seulement 23 milliards semblent couverts.
Une forte participation de l'État – à hauteur de 15 milliards –, est prévue chaque année pour équilibrer le régime des fonctionnaires, ce qui, compte tenu de l'endettement de l'État, signifie un financement par la dette.
Nous étions favorables à des financements complémentaires, notamment par la CSG, permettant d'assurer l'équilibre de nos retraites et d'obtenir des avancées sociales significatives pour les polypensionnés, les petites retraites, notamment celles des veuves. Des avancées sont intervenues au cours des débats en faveur des mères de famille, des carrières longues, des polypensionnés et des salariés effectuant des travaux pénibles. Un système basé sur les comptes notionnels réglerait ces problèmes.
La pénibilité est prise en compte. Francis Vercamer, auteur d'un brillant rapport, est intervenu sur le sujet et plusieurs de ses amendements ont été repris. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe NC.) L'important est d'améliorer la prévention, de définir la pénibilité, de conforter l'observatoire de la pénibilité puis de prévoir des compensations. L'abaissement à 10 % du taux d'incapacité ouvrant droit à des aménagements de fin de carrière constitue un progrès, mais il faudrait prendre en compte les effets différés de certains cas d'exposition à des conditions ou à des produits potentiellement nocifs.
Le Parti socialiste répète à l'envi qu'il avait un projet et qu'il reviendra sur les mesures de report d'âge. Après avoir contesté les réformes précédentes, il les a entérinées : il n'envisage plus de revenir à trente-sept annuités et demie. Il ne reviendra pas davantage demain aux soixante ans : il entérinera également les soixante-deux ans.
Le projet du Parti socialiste étant fondé sur la fiscalité, que devient, dès lors, le principe de la répartition qui repose sur la solidarité inter-générationnelle, selon laquelle les cotisations des actifs financent les retraites des aînés ? Non, son projet n'est pas sérieux. Charles de Courson a d'ailleurs brillamment démontré l'absurdité des mesures financières proposées : il n'est pas financé.
Les excès de langage que nous venons d'entendre –étonnants d'ailleurs dans la bouche de Mme Marisol Touraine – ôtent tout crédit à ses propos.
Le Nouveau Centre approuve les mesures principales du texte issu de la CMP et renouvelle son souhait d'une mise en oeuvre rapide d'une réforme instituant un régime unique par points ou par comptes notionnels. Il lui paraît également fondamental de relancer le dialogue social, notamment sur les questions de l'emploi des seniors et de l'entrée des jeunes dans le monde du travail.
En conclusion, le Nouveau Centre votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous allons, dans quelques instants, voter la réforme des retraites…
…après plus de 65 heures de débat à l'Assemblée nationale, 145 heures de débat au Sénat et la réunion de la commission mixte paritaire.
Au lieu de dire « nous allons voter », il serait plus juste de préciser, en entendant les voix de l'opposition, que c'est la majorité présidentielle, composée de l'UMP et du Nouveau Centre, qui va voter cette réforme. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UMP et NC.)
Néanmoins ce sera une décision du Parlement français et, lors de la promulgation du texte, ce sera une loi de la République qui s'imposera à tous. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Pour ma part, je reste persuadé que cette réforme n'est ni de droite ni de gauche. Elle a pour but essentiel de préserver un système de retraite par répartition, système de solidarité entre les générations issu de 1945.
Je reste aussi persuadé, même si cela peut vous paraître utopique, que nous aurions pu, et même que nous aurions dû, avoir une plus large majorité pour adopter des mesures qui n'ont, à mes yeux, pas le goût de la victoire de la majorité sur l'opposition, ni du Parlement sur la rue, ni non plus du Gouvernement sur les syndicats,…
…mais celui de la victoire de l'intérêt général sur les corporatismes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC.)
Cette victoire, nous aurions pu la construire ensemble et la partager, dans un grand rendez-vous de la lucidité, du courage et de la responsabilité. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
La lucidité nous aurait permis de constater que la durée de vie de nos concitoyens s'allonge. Le rapport de l'INSEE nous permet de faire ce constat aujourd'hui encore mieux qu'hier.
Nous avions le choix entre diminuer les pensions – comme le propose le Parti socialiste –, augmenter les cotisations ou allonger la durée du temps de travail. Nous avons choisi la troisième voie, comme l'ont d'ailleurs fait toutes les démocraties européennes. Elles sont même allées bien au-delà des deux ans que nous avons proposés, et bien avant nous. Elles nous ont généralement précédés de dix ans. Ainsi, de l'Allemagne à l'Espagne, de l'Autriche à l'Angleterre et de la Suède à l'Italie, tous les pays européens affichent aujourd'hui une durée de temps de travail, quelles que soient leurs orientations politiques et quelle que soit la couleur politique de leurs dirigeants, plus proche de soixante-six ans que de soixante-deux ans.
Le deuxième rendez-vous qui était nécessaire est celui du courage.
Il est plus facile de donner à tous que de demander un effort à chacun (Murmures sur les bancs du groupe GDR), et d'écrire et de commander des rapports que de les mettre en application. À ce rendez-vous, la gauche a toujours été absente. Elle l'a été en 1993, en 2003, en 2007, en 2010. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. - Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Vous commandez des rapports, mesdames, messieurs de l'opposition ; nous les mettons en oeuvre.
Le troisième rendez-vous qui était nécessaire est celui du courage, qui est aussi celui de la vérité.
Qui peut croire que le modèle français, isolé du reste du monde par je ne sais quel miracle, aurait pu échapper à des mesures qui s'imposent à l'ensemble des grands pays économiques, dans un monde ouvert économiquement et financièrement ?
La gauche a choisi d'étouffer les voix de la raison.
La voix de Dominique Strauss-Kahn a vite été oubliée. Certains sont même allés jusqu'à dire que le rapport du FMI qui proposait d'aller jusqu'à soixante-deux ans n'engageait pas son président, laissant croire que le FMI décidait sans Dominique Strauss-Kahn. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Martine Aubry, elle-même, a vite été rappelée à l'ordre à la suite de son imprudente expression de vérité et elle a dû se réfugier dans la pensée unique de la gauche, figée sur le tabou des soixante ans.
Le mensonge est allé jusqu'à expliquer à notre jeunesse que vous vous battiez pour elle et pour un monde nouveau alors que vous vous battiez contre elle, pour conserver un monde ancien et lui faire payer demain notre égoïsme présent. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Enfin, en refusant, avec les syndicats, de discuter des mesures d'âge, vous avez empêché un dialogue constructif, et c'est la majorité, seule, qui a mis en place les mesures en faveur des carrières longues, des handicapés et des mères de famille et celles concernant la pénibilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Vous vous êtes arc-boutés sur la seule idée de faire retirer le projet ! Vous saviez pourtant que cela n'était politiquement pas possible et socialement non souhaitable.
Personne ne vous croit. Plus vous parlez, plus les Français savent que vous mentez !
En fait, avec autant de projets que d'ambitions personnelles et de groupes parlementaires à l'Assemblée nationale, vous avez poussé les jeunes à manifester, au risque de les exposer à la violence. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Vous avez espéré bloquer le pays au risque de fragiliser une économie convalescente. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UMP et NC. - Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Surtout, vous avez choisi les attaques personnelles contre le ministre chargé du dossier ou contre le Président de la République, attaques qui vous servent en réalité de programme.
En fait, certains analysent la crise comme un simple avatar de l'histoire économique qui se répète rituellement.
Ils n'ont pas compris que rien ne reviendra comme avant, qu'un monde nouveau est à construire, probablement plus responsable et plus juste, et que celui-ci doit se faire dans une démocratie moderne et apaisée. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nos concitoyens n'ont pas besoin de vendeurs de rêves. Ils ont besoin de créateurs d'espoir.
Il faut désormais tourner le dos à ces séquences d'un autre âge, dans lesquelles la polémique de la rue vient contester la légitimité des urnes. (Bruits et claquements de pupitre sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je conclus, monsieur le président.
Les syndicats ont déjà anticipé ce dialogue social. Ils proposent avec responsabilité de nouvelles rencontres. La majorité y sera présente. (Les députés des groupes SRC et GDR scandent « Temps de parole ! » en continuant à claquer leur pupitre.)
Plutôt que de travailler moins, nous devons travailler mieux. Plutôt que de se combattre, nous devons nous unir. L'UMP, dans son honneur et sa responsabilité, votera cette réforme de retraite équilibrée et solidaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP dont de nombreux membres se lèvent, et sur les bancs du groupe NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire,
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 574
Nombre de suffrages exprimés 569
Majorité absolue 285
Pour l'adoption 336
Contre 233
L'Assemblée a adopté. (Les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement. – Huées sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures cinquante, sous la présidence de M. Maurice Leroy.)
Monsieur le président, madame la ministre de la santé et des sports, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, mes chers collègues, les dispositions de ce quatorzième projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'histoire, dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail, consacre des moyens importants au financement solidaire de notre système de santé.
Fixé à 167,1 milliards d'euros, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie proposé pour 2011 dégage de nouvelles marges de manoeuvres : 4,7 milliards d'euros supplémentaires, soit 2,9 % de plus qu'en 2010, et également beaucoup plus que l'inflation prévue qui est de 1,5 %. En dépit d'un contexte économique encore durement marqué par la crise, l'ONDAM qui nous est proposé n'est donc ni un ONDAM d'austérité ni un ONDAM drastique.
Ainsi, le financement de la revalorisation du tarif des médecins généralistes est assuré. Le « C = CS » est enfin conclu ; c'est la condition essentielle de la revalorisation, largement justifiée, et déjà entreprise par la loi « Hôpital, patients, santé, territoires », de la médecine de premier recours.
Ce n'est pas pour autant un ONDAM irresponsable. Il s'inscrit dans une stratégie globale, pluriannuelle, de maîtrise des dépenses publiques et de réduction de nos déficits. En effet, son niveau est conforme aux orientations indiquées par le Président de la République dans le cadre des conférences sur les déficits.
Le projet de loi met en oeuvre les préconisations du rapport Briet sur le pilotage de l'ONDAM : son article 34 élargit en effet des missions du comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie ; les pouvoirs renforcés de celui-ci lui permettront donc d'intervenir plus tôt dans l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale, en émettant un avis dès le 15 avril ; il pourra même nous apporter son expertise en amont du vote de la loi de financement.
En vérifiant ainsi qu'il est construit sur des bases et des hypothèses réalistes, ces mesures doivent concourir à un meilleur respect de l'ONDAM.
Ce projet de loi renforce par ailleurs d'autres mécanismes de pilotage des dépenses. Ainsi, pour que les tarifs des actes évoluent de façon cohérente avec le progrès des techniques médicales, l'article 35 prévoit un réexamen quinquennal systématique de la hiérarchisation des actes et prestations : un acte d'aujourd'hui n'est probablement plus au même niveau qu'il y a quelques années.
De même, l'article 36 prévoit d'étendre au secteur des dispositifs médicaux les mécanismes de régulation conventionnelle des dépenses dans le cadre d'accords pluriannuels.
Par ailleurs, ce projet de loi simplifie la procédure d'indemnisation à l'amiable des victimes d'une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C.
Il règle également le financement de la campagne de vaccination contre la grippe A, en rectifiant le budget de l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, et en ajustant le taux de la contribution spéciale des organismes complémentaires à la réalité des dépenses constatées.
Enfin, l'article 40 prévoit l'expérimentation de maisons de naissances. Si la commission n'a pas adopté cet article, je continue pour ma part à croire que ces structures peuvent répondre aux attentes de certaines mamans et de certains professionnels, et qu'elles méritent, à ce titre, d'être au moins expérimentées, pourvu que des garanties soient données quant à la sécurité du dispositif.
S'agissant de l'hôpital, le projet de loi, s'appuyant sur la loi HPST du 21 juillet 2009 qui a doté le secteur hospitalier des réformes structurelles dont il avait besoin, poursuit les réformes entreprises depuis plusieurs années pour améliorer l'efficacité des établissements de santé.
L'article 37 étend ainsi, afin d'orienter le patient de façon optimale, la procédure de mise sous accord préalable du service du contrôle médical aux transferts effectués par des établissements de santé vers les centres de soins de suite et de réadaptation pour une économie estimée, d'après les études d'impact, à au moins 10 millions d'euros par an. La commission en a décidé autrement, madame la ministre, en supprimant cet article destiné à améliorer l'efficacité du recours aux structures de soins de suite et de réadaptation intégrées aux établissements hospitaliers et à favoriser un report de ces soins de l'hôpital vers les soins de ville. Je souhaite que l'Assemblée nationale rétablisse cette disposition en séance publique, en ciblant l'entente préalable sur les établissements considérés comme sur-prescripteurs.
Nous vous avons entendue hier sur ce sujet, madame la ministre.
Concernant la tarification à l'activité, l'article 41 optimise le processus de convergence intersectorielle en disposant que celle-ci s'oriente désormais vers les tarifs les plus bas, quel que soit le secteur concerné, public ou privé.
Par ailleurs, les futurs déploiements de la tarification à l'activité dans les secteurs des soins de suite et de réadaptation et de la psychiatrie sont mieux anticipés. Ainsi l'article 42 distingue, tant au sein de l'objectif quantifié national que de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, les montants afférents aux activités de SSR et de psychiatrie, sans toutefois scinder ces objectifs en deux. L'idée est d'aboutir, à terme, à un objectif commun de dépenses pour l'ensemble des établissements exerçant les activités de soins de suite et de réadaptation puis, dans un second temps, pour l'ensemble des établissements exerçant une activité de psychiatrie.
Concernant les établissements de santé, il faut également se féliciter que l'article 45 assure la continuité des missions des deux fonds médicaux et hospitaliers que sont le fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins et le fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés, ce qui devrait utilement permettre d'assurer le développement des relations des nouvelles ARS avec les professionnels de santé libéraux et favoriser la réussite du plan « Hôpital 2012 », centré sur l'amélioration de l'efficience hospitalière.
S'agissant des accidents du travail et des maladies professionnelles, le projet de loi améliore la prévention des accidents du travail dans le secteur agricole et prend mieux en considération les victimes de l'amiante. Ainsi l'article 50 étend au régime agricole les dispositifs d'incitations financières à s'engager dans une démarche de prévention des accidents du travail, dispositifs introduits, pour les entreprises du régime général, par le texte de l'an dernier pour 2010. Cela améliorera l'efficacité des cotisations supplémentaires en leur fixant notamment un montant minimal et donnera une base légale à l'octroi par les caisses de mutualité sociale agricole d'aides financières simplifiées sous forme de subventions diverses.
Par ailleurs, le projet de loi prend mieux en compte les victimes de l'amiante.
En premier lieu l'article 49 modifie le régime de prescription des demandes d'indemnisation adressées au FIVA dans un sens plus favorable aux victimes, puisqu'un délai plus long leur sera laissé pour faire valoir leurs droits. Il retient une durée de prescription égale à dix ans, au lieu de quatre actuellement, et offre également un délai supplémentaire pour les personnes dont les dossiers ont été rejetés en 2009 et 2010.
En second lieu, l'article 52 assure le financement du fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante – le FIVA – et du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, le FCAATA. Je constate que M. Guy Lefrand est satisfait de cette disposition.
Enfin, le phénomène de sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles continue d'être mieux pris en compte avec le maintien de l'augmentation de la contribution de la branche AT-MP à la branche maladie à 710 millions d'euros.
Telles sont, madame la ministre, les principales orientations du projet de loi. Elles méritent, je crois, d'être complétées sur trois points, sur lesquels la commission a pris quelques initiatives.
Le premier concerne la vie conventionnelle.
Elle va redémarrer en 2011, sur des bases nouvelles, à la suite, notamment, de récentes élections aux unions régionales des professions de santé. Pour enrichir le dialogue conventionnel, la commission avait adopté deux amendements : le premier ramenant de six à trois mois la période pendant laquelle toute revalorisation tarifaire était gelée ; le second, après le succès du CAPI – le contrat d'amélioration des pratiques individuelles – tendant à intégrer le contrat d'amélioration des pratiques individuelles à la convention médicale. Malheureusement, je le regrette, l'article 40 est passé par là ; il faudra peut-être rouvrir le débat.
La seconde mesure concerne la responsabilité civile professionnelle des médecins : la peur d'une ruine consécutive à une condamnation dissuade malheureusement un grand nombre de praticiens d'exercer l'obstétrique, la chirurgie ou l'anesthésie. Aujourd'hui, ce sont des spécialités sinistrées. Le problème est bien connu depuis 2002, mais les solutions apportées n'ont jamais été à la hauteur de l'enjeu consistant à ramener ces spécialités à l'ordre du jour. Nous avons donc prévu l'intervention de l'ONIAM – l'office national d'indemnisation des accidents médicaux – en relais des assureurs, pour garantir l'indemnisation des victimes et la sécurisation des praticiens.
Madame la ministre, le débat est ouvert, car je crois savoir que cet article est, lui aussi, tombé sous le coup de l'article 40. Or certaines conclusions du rapport de la mission de M. Johanet sont intéressantes, mais il est grand-temps d'agir. Pendant ces quelques jours de débat, il faudra donc que nous agissions ensemble dans le domaine de l'assurance en responsabilité civile professionnelle.
Enfin, troisième mesure, nous avons adopté plusieurs amendements tendant à développer les soins à domicile – je pense notamment à la dialyse – qui apportent un surcroît de confort aux patients, tout en permettant une meilleure maîtrise des charges de l'assurance maladie.
Pour l'ensemble de ces raisons et sous la réserve des amendements qu'elle propose, ainsi que sous la réserve – éventuelle – d'ouvrir le débat avec le Gouvernement, la commission des affaires sociales propose à l'Assemblée nationale d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Bérengère Poletti, rapporteure de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social.
Monsieur le président, madame et monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la deuxième fois cette année, la commission des affaires sociales a souhaité consacrer un rapport spécifique au domaine médico-social. Cette innovation était devenue indispensable, compte tenu de l'importance croissante de ce secteur dans nos politiques publiques et de son caractère prioritaire pour notre majorité,
Pour autant, la place du secteur médico-social dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale est encore insuffisamment établie : une annexe au projet vient certes utilement informer le Parlement sur le rôle et le budget de la CNSA – la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie –, mais le Parlement ne vote pas ce budget. Lors de l'examen du PLFSS, il ne vote que l'ONDAM médico-social, tandis que les ressources propres de la CNSA et les prestations que ces ressources financent sont du ressort du projet de loi de finances. Convenez que cela n'est pas très lisible et qu'il sera indispensable, lors de la réforme annoncée de la dépendance, de réformer et de simplifier cette dimension institutionnelle, afin de garantir une information pleine et entière du Parlement sur ces politiques publiques essentielles.
Après cette introduction institutionnelle, revenons au fond du dossier.
Le secteur médico-social constitue une priorité politique du Gouvernement et de cette majorité depuis de nombreuses années. Année après année, les plans « Solidarité grand âge » et « Handicap » sont mis en oeuvre et se traduisent par une ouverture de nouvelles structures et une augmentation incontestable des moyens mis à disposition des établissements existants.
L'année prochaine verra cette priorité franchir une nouvelle étape, avec la discussion au Parlement de la réforme de la dépendance, qui constitue l'un des engagements du Président de la République. Cela a été rappelé lors de son intervention télévisée du 14 juillet dernier : la réforme de la dépendance constituera, après l'indispensable réforme des retraites, le grand chantier social de l'année 2011.
En effet, la dépendance constitue, selon toutes les enquêtes d'opinion, l'une des premières préoccupations des Français qui voient bien qu'il est essentiel que nos aînés soient pris en charge dans la dignité, lorsqu'ils atteignent la fin de leur vie et qu'ils sont atteints de difficultés physiques ou cognitives. Or, en 2050, un Français sur trois aura plus de soixante ans et plus de 15 % de la population sera âgée de plus de soixante-quinze ans. Le nombre de personnes dépendantes devrait ainsi augmenter de 1 % par an jusqu'en 2040.
En attendant cette grande réforme, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, dans la prolongation des exercices précédents, continue de faire du secteur médico-social une priorité en prévoyant une progression de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie médico-social de 3,8 %, contre 2,9 % pour l'ONDAM global. Cette progression se décompose en +4,4 % pour les personnes âgées et +3,3 % pour les personnes handicapées.
Avant de développer mes observations sur le budget pour 2011, je veux revenir un instant sur l'exercice 2010.
L'article 8 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une diminution de 100 millions d'euros de l'ONDAM personnes âgées pour 2010, au prétexte que ces crédits ne seront pas intégralement dépensés par la CNSA. Je pense qu'il s'agit d'une erreur et la commission des affaires sociales a suivi mon analyse en adoptant l'amendement n° 89 .
Certes, il ne s'agit pas, comme l'an dernier, d'un rebasage au sens strict du terme, puisque ces crédits sont réinjectés dans la base de l'ONDAM 2011, mais cela constitue une remise en cause du principe prévu par la loi du report automatique des crédits non consommés à la clôture de l'exercice.
Ce refus est en parfaite cohérence avec la proposition n°l de la mission d'information relative à la CNSA que j'ai eu l'honneur de rapporter : « Éviter à l'avenir tout nouveau débasage de l'ONDAM médico-social ». Ce refus est également en cohérence avec la proposition de créer un volet budgétaire pérenne pour l'aide à l'investissement.
Pour 2011, l'ONDAM médico-social progressera donc de 3,8 %, ce qui, combiné à des ressources propres de la CNSA qui retrouvent un certain dynamisme, permettra de financer un objectif global de dépenses en progression de 4,5 %. Cet objectif global de dépenses pour 2011 marque une nouvelle étape dans le changement de mode de gestion initié en 2010 : les objectifs sont désormais bâtis à partir de l'estimation des seuls crédits nécessaires aux besoins de financement effectifs de l'année.
Il convient donc de distinguer l'évolution des crédits de paiement prévus par l'OGD – l'objectif global de dépenses – de l'année, correspondant aux seuls besoins de financement des places en service au cours de cette année, déterminés en fonction de leur rythme d'ouverture, de celle des autorisations d'engagement constituées par les enveloppes anticipées à la disposition des agences régionales de santé pour autoriser des places nouvelles, déterminées en fonction des objectifs annuels des plans gouvernementaux.
En conséquence, le suivi de la progression des moyens du secteur médico-social doit désormais s'appréhender à la fois au travers des volumes d'enveloppes anticipées représentatives de la montée en charge des plans gouvernementaux et de l'évolution de l'OGD, traduisant leur rythme effectif de mise en oeuvre sur le terrain.
C'est cette évolution qui m'a conduite à proposer, à l'occasion de l'examen du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale, une modification de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, afin de prévoir que le Parlement soit informé du montant des autorisations d'engagement que la CNSA sera autorisée, chaque année, à déléguer aux agences régionales, montant qui viendra largement prédéterminer l'ONDAM médico-social des années ultérieures, soumis au vote du Parlement.
Cet objectif global de dépenses en progression de 4,5 % et les autorisations d'engagement dont disposeront les ARS l'an prochain permettront au Gouvernement de respecter scrupuleusement les plans « Solidarité grand âge » et « Handicap » en termes d'ouverture de places et de médicalisation des structures, ce qui est tout à fait remarquable en ces temps de difficultés budgétaires.
Je souhaite néanmoins attirer l'attention du Gouvernement sur le fait que le plan « Solidarité grand âge » doit s'achever en 2012. Compte tenu du délai d'ouverture de nouvelles structures, une réflexion doit s'engager dès 2011 sur la mise en place d'un nouveau plan de création de maisons de retraite à même d'accompagner le vieillissement de la population.
En conclusion, je tiens à souligner l'effort soutenu et considérable porté par le Gouvernement et par la majorité qui le soutient en faveur des personnes âgées et handicapées, c'est-à-dire des personnes les plus fragiles de notre société. Le présent projet s'inscrit parfaitement dans cette continuité et, malgré la crise, malgré les difficultés budgétaires, nous poursuivons, loi de financement après loi de financement, cet effort. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la famille.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, que dire cette année des mesures du projet de loi de financement relatives à la branche famille, sinon qu'elles sont préoccupantes pour les unes, décevantes pour les autres ?
Préoccupantes d'abord pour ce qui concerne l'équilibre financier de la branche.
La dégradation financière de la branche famille atteint un niveau historique, avec 2,6 milliards de déficit en 2010 et une prévision de 3,2 milliards pour 2011. Cela est d'autant plus inquiétant que la branche famille est la seule parmi les branches de la sécurité sociale qui dégage structurellement des excédents, en raison de la composition de son financement.
Aux effets directs de la crise, qui entraîne un réel ralentissement des recettes, s'ajoute une augmentation des dépenses de la branche les plus sensibles à la conjoncture, comme les allocations logement et le poids des droits familiaux de retraite.
Pour la première fois dans son histoire, le projet de loi de financement prévoit une reprise des déficits accumulés de la branche depuis 2009 par la Caisse d'amortissement de la dette sociale – la CADES –, ce qui devrait permettre d'assainir temporairement la situation de la branche.
Toutefois cela ne règle pas le problème, puisque ce que le Gouvernement donne d'un côté, il le reprend de l'autre. MM. Bur et Warsmann ont eu l'occasion de le rappeler au cours du débat relatif à la loi organique.
En effet, à partir de 2011, la branche sera privée de 0,28 point de CSG au profit de la CADES, ce qui ne sera pas compensé par les trois recettes dont le rendement est décroissant. Cela entraînera une perte de 200 millions d'euros en 2012 et d'un milliard en 2013. Dans ces conditions, la branche famille ne retrouvera pas l'équilibre avant 2020.
Pour la première fois depuis une vingtaine d'années, la branche famille n'a donc plus assez de réserves pour engager une réforme des prestations sans revenir sur les prestations existantes. Cela est d'autant plus inquiétant que, apparemment, le mouvement est déjà en marche, puisque les deux mesures que le Gouvernement nous propose dans ce PLFSS sont des mesures d'économie, et quelles mesures : la suppression de la rétroactivité du versement des aides au logement et la suppression du versement de la PAJE à compter du jour de naissance de l'enfant.
La suppression de la rétroactivité du versement des aides au logement touchera les jeunes, les familles les plus modestes, les femmes seules, les familles qui ont des difficultés à accéder à l'information et tous ceux dont la situation personnelle change brutalement : les veuves, les femmes divorcées, les chômeurs. Avec cette mesure, c'est encore une fois aux plus modestes et aux plus fragiles que vous vous en prenez. Très concrètement, une personne isolée, rémunérée au SMIC, avec un enfant, pourrait perdre jusqu'à 828 euros. Une famille de trois enfants, dont les parents touchent chacun le SMIC, perdrait 381 euros d'aide au logement. En temps de crise, je crois que vous ne mesurez pas ce que cela représente dans le budget d'une famille.
Il aurait pourtant été possible de réaliser des économies en étant plus juste. Je pense, notamment, à la fiscalisation des majorations de pension pour les parents de trois enfants, ou encore à la baisse du plafond du quotient familial. Ces dispositions méritent d'être étudiées. Tel n'a pas été le choix du Gouvernement.
La seconde mesure prévoit la suppression du versement de la PAJE à compter du jour de naissance de l'enfant.
Cela représente une faible économie, mais c'est un fort signal négatif donné aux parents qui pourront perdre jusqu'à 178 euros de prestation. Je rends hommage aux membres de la commission des affaires sociales qui ont, à l'unanimité, choisi de supprimer cet article lors de son examen, la semaine dernière. Je m'en félicite et je souhaite que la position unanime des députés soit entendue par le Gouvernement. J'y ajoute la suspension des allocations familiales en cas d'absentéisme scolaire sur simple décision de l'inspecteur d'académie et le projet de réforme des aides au logement pour les étudiants auquel nous avons heureusement échappé.
L'année 2010 a été riche de déconvenues pour les familles. Il leur faudra compter aussi avec la suppression de l'exonération de quinze points de cotisations patronales en faveur des particuliers employeurs. Elle a permis une démocratisation de l'emploi d'une garde d'enfant à domicile et l'amélioration des conditions de travail de milliers de salariés. Sa suppression brutale au 1er janvier aura pour seuls effets un développement du travail au noir, une baisse de salaire, si ce n'est le licenciement de nombreux employés à domicile, doublé d'une baisse des recettes de cotisations pour la sécurité sociale. Quel est l'intérêt d'une telle mesure ?
Dans le même temps, des réformes essentielles attendent.
Je pense essentiellement au congé parental, dont de nombreux rapports ont montré le caractère obsolète. Le Président de la République avait d'ailleurs souhaité, dans son discours du 13 février 2009 sur la politique familiale, que s'engage une réflexion sur l'évolution du congé parental, selon lui « immense gâchis » pour les femmes maintenues en dehors du marché du travail et pour les familles qui voient leur pouvoir d'achat diminuer. Or rien ne bouge !
Il y a pourtant un consensus sur la nécessité de mettre en place un congé parental partagé entre le père et la mère, plus court et mieux rémunéré. C'est pourquoi nous avons adopté en commission un amendement d'appel qui vise à prévoir la possibilité du partage du complément de libre choix d'activité entre le père et la mère. Malheureusement, en application de l'article 40, il n'a pas pu venir en discussion. Je pose donc la question aux ministres : cette réforme doit avoir lieu pour que le choix de s'occuper de son enfant ne pénalise plus les femmes. Quand envisagez-vous de l'inscrire à l'ordre du jour ?
Je pense également à la réforme de l'allocation de soutien familial, dont la Cour des comptes et le Haut conseil de la famille ont proposé une refonte complète. La commission a adopté un amendement de suppression de l'allocation différentielle, dont on connaît les effets pervers, et qui doit être remplacée par un complément offert à toutes les mères seules touchant une pension alimentaire insuffisante.
J'en viens à la question de la garde des jeunes enfants.
Ce sujet est d'autant plus important qu'il a un lien très direct avec la réforme des retraites telles que vous l'avez conçue et qui, avec le report de l'âge du départ à la retraite à taux plein de soixante-cinq à soixante-sept ans, pénalisera lourdement les femmes.
C'est la réalité, monsieur Bur !
Les difficultés dues aux carrières incomplètes, les inégalités professionnelles seront amplifiés par votre réforme au moment de la retraite. Les femmes, qui n'auront pas trouvé de solution de garde et auront mis leur carrière entre parenthèses ou mis fin à leur carrière professionnelle, seront les premières touchées par l'injustice de votre réforme. L'offre de garde est donc un sujet qui mérite toute notre attention.
Le Président de la République s'était d'ailleurs engagé à créer, d'ici à 2012, 200 000 offres de garde supplémentaires. Où en est-on aujourd'hui ? Il est vrai que l'effort financier est considérable et la mobilisation réelle, ce que je salue. La convention d'objectifs et de gestion, signée en avril 2009 entre l'État et la Caisse nationale d'allocations familiales, prévoit une augmentation de 7,5 % par an des crédits du fonds national d'action sociale pour les quatre années à venir. Elle fait de la conciliation des vies familiale et professionnelle la priorité à l'horizon 2012 et prévoit une augmentation de 10,1 % des crédits consacrés à la petite enfance.
En parallèle, le plan « Espoir banlieues », lancé début 2009, comporte un volet relatif à l'accueil en zone urbaine sensible. C'est une excellente initiative. Reconnaissez mon objectivité ! Toutefois, au-delà des bonnes intentions, qu'en est-il concrètement ? On constate que le taux de couverture des besoins, c'est-à-dire le nombre de places offertes pour 100 enfants, a chuté de 48,3 au 1er janvier 2007 à 47,4 au 1er janvier 2009, alors qu'il nous faudrait atteindre au moins les soixante places !
De plus, il nous faut trouver des solutions pour les parents ayant des horaires atypiques ; développer les modes de garde collective, moitié moins nombreux que la garde individuelle ; aider les familles monoparentales à trouver un mode de garde et les accompagner. Nous devons également prendre en compte un possible désengagement des collectivités locales du fait de leurs difficultés financières. Déjà en 2009 et 2010, les crédits du FNAS n'ont pas été consommés en totalité parce que les collectivités locales n'avaient pas les capacités financières suffisantes pour réaliser de tels projets d'investissement. Il est à craindre que ce retrait pèse sur la création de places d'accueil collectif dans les années à venir. La branche famille doit impérativement rester aux côtés des collectivités et garantir un soutien financier conséquent. Cette situation est évidemment le fruit de la politique d'étranglement budgétaire dont sont victimes les collectivités locales. On en mesure ici très nettement les conséquences négatives.
Quelques points fondamentaux devraient faire l'objet d'une attention particulière.
Il convient ainsi d'améliorer le pilotage de l'offre de garde au niveau local et mieux accompagner les communes. Il est également nécessaire d'accroître l'attractivité des métiers de la petite enfance. Sur ce point nous attendons vivement, madame la ministre, monsieur le ministre, le bilan du plan « Métiers de la petite enfance » lancé en 2008. Nous devons développer les crèches de personnel car nous sommes en retard en ce domaine. Enfin, il faut absolument trancher la question de l'accueil des enfants à l'école maternelle. Depuis quelques années, 15 000 places en moyenne sont supprimées à chaque rentrée scolaire.
À Nantes, que je connais bien, en dépit des efforts considérables consentis en faveur des familles, cette non-scolarisation des enfants de moins de trois ans a le même effet que si la ville décidait de fermer chaque année deux crèches.
La politique du Gouvernement ruine les efforts des collectivités locales. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
La politique du Gouvernement, par le biais de l'éducation nationale, remet également en cause ce que la branche famille tente de développer. Cela est incohérent et coûteux pour les finances publiques. Je souhaite, madame la ministre, monsieur le ministre, que vous puissiez me répondre sur ce point. Au final, ce sont les parents, et encore une fois les plus modestes, qui sont pénalisés.
Je vais terminer mon propos par le sujet de la protection de l'enfance
Le fonds national de financement de la protection de l'enfance, prévu par la loi du 5 mars 2007, a enfin été créé cette année. Nous pouvons nous en féliciter. Cependant, l'histoire n'est pas terminée. Nous avons le fonds, mais il nous manque maintenant le financement. Le 15 juillet 2010, seulement 30 millions d'euros provisionnés par la CNAF ont été répartis, à raison de 10 millions d'euros par an d'ici à 2012, entre les départements pour 70 % et l'État pour 30 %. Cela est insuffisant compte tenu des difficultés financières des départements. C'est pourquoi la commission a adopté deux amendements qui visent à verser une partie des allocations familiales et de l'allocation de rentrée scolaire aux services de l'aide à l'enfance quand un enfant est placé.
Ce ne sont que des appels lancés au Gouvernement pour qu'il réalise la gravité de la situation. J'espère qu'ils seront entendus. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale porte, cette année, son lot de changements, tout particulièrement par rapport au PLFSS de l'an passé, puisqu'il avait été alors décidé, souvenons-nous-en, de renoncer à traiter les déficits cumulés, laissant le poids de cette non-décision à l'ACOSS et au système de financement dans son ensemble, et ce dans des conditions, rappelons-le, parfois assez périlleuses.
Nous avons perdu un peu de temps, mais, cette année, de grands changements sont abordés dans le PLFSS. Nous les découvrons ensemble dans le volet « Recettes » de ce projet de loi.
En premier lieu, il s'inscrit dans la continuité du projet de loi portant réforme des retraites. Les effets du report de l'âge légal de départ à la retraite resteront, bien sûr, faibles en termes d'impact financier sur la branche vieillesse en 2011, principalement en raison de la montée en charge progressive de la réforme. Toutefois cette dernière implique des financements nouveaux qui se matérialisent dans le cadre de ce PLFSS, mais également, comme nous l'avons constaté la semaine dernière en commission, dans le cadre du projet de loi de finances examiné tout récemment. Ainsi près de 3,6 milliards d'euros en 2011 seront affectés au fonds de solidarité vieillesse. On peut cependant regretter que les mécanismes d'affectation des recettes, autrement dit la « tuyauterie », soient aussi complexes et soient contraints de passer par des « organismes pivots », en l'occurrence la CNAM.
En effet, les nouvelles recettes prévues dans le cadre du PLFSS – celles issues en particulier de l'effort supplémentaire demandé aux hauts revenus et aux revenus du capital, mais aussi aux entreprises – sont affectées à l'État. Celui-ci transférera, en contrepartie, une fraction du produit de la TVA sur certains biens et services médicaux, à l'assurance maladie qui, elle-même, transférera au FSV l'équivalent sous la forme d'une fraction du forfait social et du produit de la C3S additionnelle. Si l'on peut comprendre l'intention, qui est d'affecter aux divers organismes des recettes qui semblent cohérentes avec l'objet de leur financement – c'est le cas de la TVA sur les biens médicaux à la CNAM –, cela se fait au prix d'une grande complexité.
Le second changement crucial concerne le traitement de la dette sociale, que j'ai appelé de mes voeux dès l'an passé, et qui est organisé par l'article 9 du PLFSS. Au total, 130 milliards d'euros seront transférés à la CADES sur la période 2011-2018. Cela permettra, dès 2011, une reprise de l'ensemble des déficits cumulés du régime général en 2009 et 2010, ainsi que le déficit 2011 de la branche maladie, à hauteur de 68 milliards d'euros, et programmera une reprise progressive des 62 milliards d'euros de déficits cumulés de la branche vieillesse sur la période couverte par la réforme des retraites.
Je ne reviens pas sur le schéma de transfert par le biais, en particulier, de la mobilisation des actifs et de la recette du FRR. Je tiens toutefois à souligner qu'en cohérence avec la position adoptée par la commission des finances, à l'initiative de votre rapporteur pour avis et conjointement avec le rapporteur général, conformément à la position retenue par le Parlement sur ce point, je proposerai, dans le cadre de ce PLFSS, de poursuivre l'opération de clarification souhaitée pour assurer le transfert de dette prévu.
Les recettes issues de la réduction des niches sociales et de la taxation du secteur de l'assurance, que le Gouvernement souhaitait initialement affecter à la CADES, l'ont finalement été à la CNAF, dans le cadre de la première partie du projet de loi de finances. L'option initiale du Gouvernement nous a, en effet, semblé difficilement acceptable au regard de la règle organique qui impose à la CADES d'être mise en mesure de faire face à son échéance, ce que de telles recettes – non pérennes pour deux d'entre elles – ne permettaient manifestement pas de faire.
Je poursuis aujourd'hui ce mouvement de cohérence en vous proposant, dans le cadre de l'article 9 du PLFSS qui énumère les recettes affectées à la CADES, de supprimer le renvoi à ces recettes non pérennes et de prévoir, en contrepartie, l'affectation à la CADES de 0,28 point de CSG en provenance de la branche famille. Ce taux de 0,28 % correspond au rendement attendu en 2011 des trois recettes initialement prévues à hauteur de 3,2 milliards d'euros. Ce « swap », comme on a pu le dire, est une garantie importante pour la CADES…
…qui va être amenée, dès 2011, à amortir des montants de dette jamais atteints auparavant et à solliciter, pour ce faire, les marchés financiers, la recette étant pérenne pour 2011 et pour 2012. Je le souligne très clairement : il n'est en aucune manière question d'accepter pour autant une fragilisation du régime général !
Cette situation ne fait que confirmer que l'on ne peut financer notre sécurité sociale avec des recettes non pérennes, (Approbations sur les bancs du groupe UMP), que de telles recettes, si légitimes soient-elles puisqu'il s'agit essentiellement de réductions de niches, ne sont pas à la hauteur des enjeux du financement de la sécurité sociale.
C'est pourquoi la commission des finances a adopté le principe d'un amendement visant à combler l'écart entre les prélèvements sociaux pesant sur les revenus du capital et les cotisations et prélèvements frappant les revenus du travail, par la création d'une taxe additionnelle à la CSG, de cinq points, sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, dont le rendement potentiel est élevé : plus de 5,3 milliards d'euros par an.
Il me semble aujourd'hui essentiel d'en appeler à une réflexion générale sur les modalités de financement de la sécurité sociale. Tel est l'objet de cet amendement. Le débat fiscal souhaité par le Président de la République au printemps prochain ne doit pas faire l'impasse sur les finances sociales, ni sur le niveau et le type de recettes qui doivent venir financer notre modèle social. Je ne manquerai pas de faire entendre cette voix dans la perspective du débat qui s'ouvrira au printemps.
Mes chers collègues, le modèle social est un peu en bout de course. La réduction des dépenses se compte en quelques dizaines de millions d'euros, avec un effort considérable, là où notre besoin de financement se chiffre en dizaines de milliards d'euros. C'est à ce carrefour que nous sommes rendus.
J'en viens aux aspects du texte relatifs aux dépenses.
Si la réforme des retraites va permettre de rétablir l'équilibre de l'ensemble des régimes de retraite à l'horizon 2018, assurant temporairement la sauvegarde de notre système de retraite par répartition, et si l'on peut attendre un retour à l'équilibre à moyen terme de la branche famille, qui est structurellement excédentaire, la situation de l'assurance maladie est plus préoccupante.
Des progrès remarquables ont été réalisés dans la maîtrise des dépenses de santé ces dernières années. Entre 1999 et 2004, la croissance annuelle des dépenses du régime général était comprise entre 5 et 7 %. Depuis 2005, elle est ramenée, au prix d'efforts considérables, sous 4 % par an. Elle sera même contenue à 3 % en 2010, avec un respect strict de l'ONDAM pour la première fois depuis sa création en 1997.
Les progrès sont particulièrement marqués pour les soins de ville, pour lesquels l'objectif de dépenses était déjà respecté en 2009. Cela révèle une connaissance de plus en plus poussée de la nature des dépenses et l'amélioration des techniques de pilotages.
J'insiste sur le fait que cette maîtrise n'est pas uniquement le fruit de mesures de rigueur ; il y a eu aussi des dispositions d'efficience, systémiques, permettant de réaliser des économies tout en améliorant la qualité des soins : maîtrise médicalisée, mise en place de référentiels de prescription, lutte contre la fraude.
Je me félicite à cet égard que, dans le cadre du sous-objectif relatif aux établissements de santé, les crédits de la dotation annuelle de financement psychiatrie permettent le financement des centres experts en santé mentale,…
…et je vous en suis particulièrement reconnaissante, madame la ministre.
Les 2,4 millions d'euros votés dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 sont reconduits et permettront de financer huit centres, organisés en réseau, lequel a pour objectif de rassembler, dans une même démarche innovante, équipes de soins et acteurs de la recherche pour combler le retard diagnostique, améliorer la prise en charge, bref répondre aux familles et aux patients qui, dans le domaine de la psychiatrie, subissent trop souvent l'errance et l'isolement.
Les mesures d'économies prises chaque année pour limiter la progression de l'ONDAM sont de plus en plus sophistiquées. La mise en place d'un forfait pour les bandelettes d'auto-test de glycémie, dont on peut estimer le nombre à un milliard, est une mesure particulièrement intéressante, même si elle est d'une sophistication extrême. La fin de la prise en charge automatique des frais de transport des ALD me paraît être aussi une excellente chose, ces dépenses augmentant très vite sans être toujours médicalement justifiées. Ces deux mesures ne rapporteront cependant chacune que 35 et 20 millions d'euros. Elles traduisent une gestion très fine des dépenses mais sont en même temps inquiétantes car l'effort à réaliser est de plus en plus contraint. Si, avec une très bonne maîtrise des dépenses d'assurance maladie, l'on conserve un déficit de 11 milliards d'euros, le statu quo est difficilement tenable.
Mes chers collègues, ce PLFSS est cohérent dans la mesure où il présente des objectifs ambitieux et des mesures intéressantes permettant de les tenir, mais il apporte aussi la preuve que notre modèle social est poussé à ses extrémités et qu'une rénovation en profondeur est nécessaire. Elle passe par la réaffirmation de nos valeurs fondamentales que sont la solidarité et l'universalité.
Nous devons inéluctablement trouver des ressources justes. (Applaudissements sur divers bancs des groupes UMP et SRC.)
La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales.
Parlez librement, monsieur le président ! Dites ce que vous avez sur le coeur !
C'est ce que je ferai, comme toujours !
Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, quelle évaluation portons-nous sur cet immense budget de 590 milliards d'euros et comment adapter le modèle social français ?
Je suis d'accord avec François Baroin : le Gouvernement a fait des choix équilibrés, très prudent quant au rythme de réduction des déficits mais déterminé à maintenir un modèle social généreux ; nous ne pouvons pas le critiquer sur ce point.
Dans la période de crise que nous venons de traverser, notre système a constitué une chance, un atout pour notre pays et un formidable amortisseur de crise, les comparaisons européennes le démontrent. À ma connaissance, aucun pays en Europe n'a autant utilisé les prestations sociales pour atténuer les effets de la crise.
Selon le rapport de M. Cotis, directeur général de l'INSEE, les revenus des 20 % de Français les moins aisés sont améliorés de 54 % après prestations. Il est vrai que le système social français corrige plus les inégalités que notre système fiscal.
En 2009, la France a été le seul pays dont les prestations ont fortement augmenté, mais le résultat politique n'a pas été à la mesure des efforts du Gouvernement car les 7 milliards de prestations supplémentaires pour les catégories les moins aisées ont été presque totalement étouffés par les 600 millions du bouclier fiscal. Cela nous fait réfléchir sur le poids des symboles.
Notre modèle social est vraiment l'un des plus solidaires. Il ne mérite ni les caricatures, ni certains propos démagogiques, ni certains titres rapides, quand on lit par exemple que 8 millions de Français ne peuvent pas avoir accès aux soins. C'est vraiment très schématique lorsque l'on compare notre système social à celui de nos voisins.
Dans un pays trop souvent porté vers le pessimisme, nous avons entendu ce matin sur les radios que c'était en France que l'on avait l'espérance de vie la plus longue, tant pour les hommes que pour les femmes, tout simplement parce que nous avons un système de santé extrêmement développé et que nous restons le deuxième pays au monde en termes de dépenses de santé.
Le reste à charge est toujours trop élevé, mais il est passé de 9,5 en 2008 à 9,4 % en 2009. C'est vraiment l'un des plus bas d'Europe et nous sommes dans un monde ouvert, je le rappelle en permanence. L'accès à une couverture complémentaire sera amélioré ; c'est juste.
Je veux également souligner le choix d'un ONDAM ambitieux pour 2011 et 2012. Un tel objectif, fixé à 2,9 % pour 2011, démontre une volonté de maintenir notre dispositif de protection sociale à un niveau élevé.
Quant aux retraites, dont nous avons beaucoup parlé, nous n'avons pas évoqué l'audition du président de la confédération française des retraités, M. Bellanger.
Lui au moins reconnaît que la réforme proposée par le Gouvernement est la seule qui permette de maintenir le pouvoir d'achat des retraités (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), non seulement de ceux d'aujourd'hui mais également pour ceux de demain.
Le revers de la médaille de cet immense budget, c'est l'aggravation des déficits. Le modèle social français ne doit pas jouer contre l'emploi. Comment donc concilier efficacité et solidarité ?
D'abord, il ne faut pas énoncer de contrevérités. Parler comme certains de recul des acquis sociaux, c'est ignorer la réalité, faire preuve de mauvaise foi et commettre une erreur profonde, mais c'est aussi rendre un mauvais service au pays, qui ne mesure pas le coût de notre système social.
Nous devons ensuite combattre certaines fragilités.
L'article 12 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, relatif à l'annualisation des allégements généraux de cotisations, que j'avais proposée avec Gilles Carrez l'année dernière, est une mesure de moralisation. Elle constitue certes un poids pour certaines entreprises de services, mais elle est juste et nous vous en remercions.
Pour optimiser les dépenses d'assurance maladie, il subsiste des marges d'efficience. Nous devrons ainsi mieux maîtriser les exonérations liées aux affections longue durée et parvenir à réduire les disparités de moyens selon les établissements et les régions. L'écart de consommation est de l'ordre de 500 euros par habitant, ce qui est vraiment beaucoup.
Nous attendons avec impatience les résultats du travail de la MECSS mené par Pierre Morange, Jean Mallot et Dominique Tian pour mieux lutter contre la fraude sociale.
Que le département des Bouches-du-Rhône puisse faire diminuer de dix mille en un an le nombre de bénéficiaires du RMI sans qu'il y ait la moindre protestation montre qu'il existe des marges d'efficience dans la délivrance de nombreuses prestations, il faut avoir l'honnêteté de le souligner.
J'ai souvent parlé de la nécessité de responsabiliser les acteurs. À défaut d'ORDAM, dont j'attends toujours la création, madame la ministre,…
…j'ai obtenu qu'un rapport soit déposé par le Gouvernement pour évaluer l'intérêt de créer un sous-objectif de l'ONDAM destiné à contribuer à la réduction des inégalités régionales concernant la santé. Pour y parvenir, nous devrons corriger les disparités régionales dans la consommation de soins. Cela me paraît être un élément important.
Replacer le modèle social dans un monde ouvert, c'est poser le problème des systèmes centralisés. Je suis convaincu que les systèmes centralisés rendent l'âme l'un après l'autre dans tous les pays du monde. Le système français reste trop déresponsabilisant et n'appelle pas à l'initiative. Agences régionales de santé, ORDAM, rapprochement des marges entre les différentes régions, c'est certainement une voie française pour adapter notre modèle social.
Pour conclure, je vous soumettrai deux réflexions issues de la voie social-démocrate en Europe.
Tout d'abord – M. Brard n'est pas là, mais il appréciera –…
…a eu ces mots : « L'État providence omniprésent qui retirerait à la population son pouvoir de décision et déciderait à sa place n'est pas viable financièrement et, de surcroît, inefficace et anti-humain. » (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La seconde réflexion est celle d'un conseiller de Tony Blair nommé Anthony Giddens.
Selon lui, nous vivons dans un monde nouveau et nous devons trouver un chemin nouveau dans ce monde (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), c'est-à-dire assurer la pédagogie du monde nouveau. Cela implique d'en appeler à la responsabilité de tous, y compris des parlementaires, pour que chacun assume sa tâche au mieux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à Mme Marisol Touraine.
Madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous nous retrouvons pour débattre de l'avenir de notre protection sociale dans un contexte que nous ne pouvons ignorer.
La majorité a voté il y a quelques instants son projet de réforme des retraites,…
…et c'est dans ce contexte que s'inscrit le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale. Si les Français sont descendus et continueront de descendre dans la rue, pour manifester avec vigueur leur refus du texte que vous avez adopté, c'est qu'ils y voient avec raison la déconstruction de notre modèle social et la remise en cause de tout ce qui fondait le pacte social issu du Conseil national de la Résistance.
Ce n'est pas le projet de loi que vous proposez aujourd'hui qui les amènera à changer d'avis. Ce texte s'inscrit en effet dans la logique qui est la vôtre depuis huit ans, qui s'est accélérée avec l'arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, et qui consiste à imposer l'idée que la protection sociale coûte trop cher. C'est ce que nous entendons répéter à longueur de débats, en commission, dans l'hémicycle.
Les Français devraient se résoudre à l'idée que tout cela coûte trop cher et qu'il leur faudra, dans quelques mois ou quelques années, accepter de payer directement ce qui était jusqu'alors assumé par la solidarité collective.
Ne vous y trompez pas : les socialistes affirment clairement et fortement qu'il est indispensable de rétablir l'équilibre des comptes de la protection sociale.
Si les comptes continuent de dériver, la protection sociale ne pourra plus, demain, être assurée. Nous ne pouvons pas vendre aux Français de la monnaie de singe, leur laisser croire que nous pourrons leur payer une retraite, une assurance maladie, une politique familiale dignes de ce nom si nous laissons filer les déficits.
Par ailleurs, les socialistes sont également déterminés à examiner l'efficacité des politiques sociales. Ce n'est pas parce que vous mettez 100 euros sur une politique que ces 100 euros sont bien utilisés, qu'ils vont à ceux qui en ont le plus besoin ou aux politiques les plus utiles.
Cette double exigence de lutte contre les déficits et de garantie de l'efficience des politiques sociales est la nôtre. C'est ce que nous avons exprimé à l'occasion du débat sur la dette sociale.
Cependant, nous ne déduisons pas de ce constat, comme vous, qu'il faut systématiquement revoir à la baisse, sans s'interroger sur l'affectation des dépenses, le niveau des prestations et des politiques servies aux Français. La politique que vous menez depuis 2002, de manière accélérée depuis 2007, vise en réalité à réduire le champ d'implication des politiques collectives et à accroître le reste à charge pour les assurés.
Ce projet de loi témoigne de la même irresponsabilité envers l'avenir que votre projet sur les retraites, car il ne permet pas d'éviter la dérive des comptes, il prévoit le rétrécissement des politiques sociales à travers une hausse de la fiscalité qui ne dit pas son nom, et il ne propose aucune politique structurelle. Bref, vous ne garantissez pas la pérennité des politiques sociales.
Tout d'abord, votre texte ne permet pas de résoudre la question du déficit puisque vous prévoyez encore en 2014, comme nous pouvons le lire en annexe, un déficit global de plus de 19 milliards d'euros.
Vous avez systématiquement opté pour le court terme. C'est le cas pour les retraites : vous avez sacrifié les générations à venir sur l'autel du court terme et du présent, la mesure la plus spectaculaire en étant le siphonage du fonds de réserve des retraites qui avait précisément pour objet de garantir aux générations qui arriveront à la retraite après 2020, et seront confrontées à une situation démographique particulièrement grave, qu'elles pourraient compter sur une solidarité collective renforcée. C'est cette solidarité que vous avez mise à mal.
La même irresponsabilité prévaut en ce qui concerne la CADES. Vous avez imposé, malgré les protestations vigoureuses de votre majorité, une modification de la loi organique qui rallongera la durée de vie de celle-ci. Et vous proposez une usine à gaz absolument invraisemblable puisque vous procédez à un véritable « rapt » des ressources de la sécurité sociale d'aujourd'hui pour garantir la dette sociale demain, comme si la sécurité sociale était dans une forme si spectaculaire qu'elle puisse se passer de près de 4 milliards d'euros de CSG, comme si cela avait un sens de fragiliser notre politique familiale.
S'agissant de l'assurance maladie, vous ne vous préoccupez pas davantage d'assurer son équilibre. La persistance du déficit vous sert en réalité à justifier la diminution progressive des remboursements. Vous répétez fréquemment, madame la ministre – et c'est exact –, que la prise en charge est en moyenne de 93 % ou 95 % à l'hôpital.
Elle est de 97 % !
De même, il est exact que la sécurité sociale assure une prise en charge à hauteur de 77 % du risque maladie. Toutefois, si nous prenons en considération la globalité des dépenses liées à la maladie, non pour les affections de longue durée mais pour les soins courants, qui concernent 80 % ou 85 % des Français, jour après jour, qu'il s'agisse d'une fracture, d'une angine, d'une grippe ou d'une maladie plus significative sans être classée ALD, nous nous apercevons que la prise en charge est de moins de 55 % ; certains analystes estiment même qu'elle frôle les 50 %.
Ainsi, notre système est en train de se dédoubler, avec une prise en charge qui reste excellente pour le gros risque, mais avec une diminution pour les petits risques et les soins courants. Au cours de ces quatre dernières années, la prise en charge de la sécurité sociale a diminué de deux points alors que les transferts vers les complémentaires ont augmenté dans la même proportion, ce qui est d'autant plus significatif que vous accroissez le coût des complémentaires de santé.
Votre politique, en effet, augmente la fiscalité sans le reconnaître. Les socialistes sont prêts à débattre de la question fiscale. Nous ne sommes pas, contrairement à ce que vous affirmez, des apôtres de l'impôt pour l'impôt ; nous ne pensons pas qu'il est forcément une bonne chose ; il faut qu'il soit juste, bien réparti et bien utilisé. Néanmoins ce qui est une exigence démocratique absolue, c'est que les augmentations d'impôt ne soient pas passées sous silence. Il faut que nos concitoyens sachent la vérité sur la manière dont vous traitez les politiques sociales.
Or vous développez un discours d'affichage qui, rappelant certaines promesses du candidat Nicolas Sarkozy, prétend ne pas remettre en cause le dogme posé en 2007, c'est-à-dire ne pas augmenter les prélèvements obligatoires. Cependant vous augmentez en même temps tout ce qui peut l'être sans entrer dans la catégorie des prélèvements obligatoires, franchises médicales en tête.
Vous accroissez ainsi la fiscalité en catimini, sans l'avouer, si ce n'est à Bruxelles. Vos propres prévisions, monsieur le ministre, prévoient que 1 % supplémentaire de richesse nationale sera prélevé en 2011 par rapport à 2010 ; c'est une augmentation d'un point des prélèvements obligatoires, soit 20 milliards d'euros d'impôt en plus. Au lieu d'avancer masqués, avouez-le ! Avouez que, compte tenu de la situation et des dépenses qui s'imposent, vous souhaitez augmenter la fiscalité.
Encore faudrait-il que cette hausse de la fiscalité soit juste et pertinente ; or ce n'est pas le cas. Vous avez décidé d'instituer une taxe de 3,5 % sur les contrats d'assurance maladie dits responsables qui concernera en réalité la quasi-totalité des couvertures complémentaires.
Cela ne relève pas du PLFSS !
Cela affecte le PLFSS, madame la ministre, puisque cela sera retiré à la CADES et financera la branche famille. Je comprends bien que cela vous dérange, vous en particulier (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), car cela revient à considérer que les contrats responsables ne sont absolument plus favorisés par rapport aux autres.
Ils le restent !
Il aurait été parfaitement logique de taxer les contrats qui remboursent de façon extrêmement libérale les dépassements d'honoraires, contribuant ainsi à solvabiliser ces dépassements.
Or votre politique ne fait aucune différence sur ce point. Cette taxe est dangereuse puisque les organismes complémentaires doivent effectuer de plus en plus de prises en charge : en augmentant le coût de la couverture complémentaire, vous allez évincer de l'accès aux soins un nombre croissant de Français.
On peut discuter des chiffres, car les études ne s'appuient pas toutes sur les mêmes données et certaines sont plus sérieuses que d'autres, mais 15 % à 25 % des Français – vous voyez que je suis extrêmement prudente – déclarent avoir renoncé à des soins, cette année, pour des raisons financières.
Si l'on prend aussi en compte les Français qui les ont reportés, le pourcentage augmente de manière très significative pour représenter jusqu'à 40 % de nos concitoyens.
Le Gouvernement aurait pu adopter une politique de prélèvements plus juste au lieu de taxer spécifiquement les contrats d'assurance complémentaire, ce qui revient à pénaliser les ménages modestes. Les organismes complémentaires ont d'ores et déjà annoncé des hausses de prix de l'ordre de 5 à 10 % pour les mutuelles ou les contrats d'assurance. De telles augmentations ne sont pas négligeables, et moins encore dans les circonstances actuelles.
Toutes ces mesures aboutissent à une diminution de la prise en charge publique des dépenses de santé. Les dispositions du PLFSS consacrées à l'assurance maladie s'inscrivent très directement dans le prolongement de la politique menée depuis 2004 : de façon très régulière et systématique, par petites tranches successives, le Gouvernement impose chaque année de nouveaux reculs sur les remboursements, d'une ampleur suffisamment limitée pour ne pas provoquer de réaction excessive, mais qui, accumulés les uns aux autres, dessinent, sans débat public ni consultation des Français, une politique systématique de transferts des dépenses de santé vers les organismes complémentaires et les ménages.
Il serait trop long de retracer l'ensemble des reculs que vous avez imposés, mais je vous en rappelle les plus importants : le forfait de 1 euro par acte médical, la franchise de 50 centimes par boîte de médicaments et par acte d'auxiliaire médical,…
C'est plafonné !
…le forfait de 2 euros sur les transferts sanitaires – en attendant la suite –, le forfait de 18 euros sur les actes hospitaliers lourds, le déremboursement, sans aucune cohérence, de très nombreux médicaments. Soit un médicament est utile, soit il ne l'est pas ; on peut à la rigueur concevoir qu'existe un taux intermédiaire, mais la prolifération des taux de remboursement rend non seulement illisible l'accès aux médicaments, mais incompréhensibles les choix que vous faites. Je poursuis l'énumération des reculs : augmentation de 10 % à 40 % de la pénalisation pour non-respect du parcours de soins. La liste est assez fastidieuse, j'en conviens,…
…mais elle est le strict reflet de votre politique. Je vous rappelle par ailleurs que le forfait journalier a augmenté de 71 % depuis 2003. Dès lors, madame la ministre, comment voulez-vous qu'un ménage modeste, sans couverture complémentaire ou dont l'assurance ne prend pas en charge l'intégralité du forfait journalier, puisse faire face à une facture de 540 euros, un demi-SMIC, après trente jours d'hospitalisation ? C'est évidemment une situation inacceptable, mais vous poursuivez dans cette voie cette année encore, avec une constance remarquable.
En effet, le cru 2010-2011 n'est pas avare en coups de bâton pour les assurés : augmentation de 91 euros à 120 euros du seuil des actes hospitaliers donnant lieu à un forfait de 18 euros ; perte du bénéfice du régime ALD pour les hypertendus ; augmentation du ticket modérateur de 65 % à 70 % pour les médicaments à vignette bleue ; hausse du ticket modérateur de 35 à 40 % pour certains dispositifs médicaux ; instauration d'un forfait de prise en charge pour les dispositifs d'autocontrôle de la glycémie. N'en jetez plus ! On se demande ce que va nous réserver l'année prochaine !
Chaque année, le champ de ce qui est remboursé se rétrécit, les déremboursements se multiplient alors même que la preuve de leur réussite reste à faire. Il est absolument évident que, depuis 2004, vous avez accumulé les déremboursements sans que cela change quoi que ce soit à l'évolution des dépenses de santé, au comportement des assurés ou à celui des professionnels de santé. Certes, il doit y avoir une maîtrise médicalisée, mais elle ne passe absolument pas par des déremboursements. Ceux-ci n'ont aucun effet sur l'évolution de la maîtrise des dépenses. En revanche, ils ont un effet extrêmement fort sur l'accès aux soins de nos concitoyens, et pas seulement pour les plus modestes : les classes moyennes elles-mêmes en viennent à s'interroger sur l'intérêt du maintien du système de sécurité sociale.
Je ne m'étendrai pas sur un point que Mme Clergeau a évoqué : dans le cru 2010-2011, vous ajoutez un élément particulièrement indigne, à savoir la révision à la baisse des mesures de politique familiale. Cela a gêné jusque dans vos rangs. Nous verrons comment se déroulera le débat en séance publique. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Chercher à économiser quelques dizaines de millions d'euros sur le dos des familles aux revenus modestes qui bénéficient de la PAJE ou de l'APL – on évoque une allocation de 178 euros pour la PAJE – prouve que vous en êtes vraiment réduits, pour tenter de tenir le cap de votre politique, à multiplier les coups de bâton sur la tête de nos concitoyens les plus modestes.
Quant à la réforme structurelle de maîtrise médicalisée des dépenses, elle est totalement absente. Or des solutions sont possibles. Nous le répétons : des réformes structurelles sont nécessaires.
Tout d'abord, sur le plan du financement, l'attitude du Gouvernement à l'égard des niches fiscales est particulièrement timorée. Nous réclamons depuis des années que l'ensemble des revenus participe au financement de nos régimes sociaux. Nous avons eu ce débat pour les retraites, mais cela vaut évidemment pour l'ensemble de la protection sociale. Certes, vous avez accepté une mini-augmentation du forfait social, mais ce n'est pas suffisant. On ne comprend hélas que trop bien pourquoi vous voulez protéger les détenteurs de stock-options ou les bénéficiaires de parachutes dorés et autres bonus. Vous acceptez d'augmenter le forfait social sans aller jusqu'à appliquer à ces revenus le même taux de prélèvement que sur les revenus du travail : sur le plan de la stricte logique budgétaire, cela n'a aucun sens.
En ce qui concerne l'allégement Fillon, nous nous réjouissons que vous ayez finalement décidé, comme vous y invitait la Cour des comptes, d'annualiser son mode de calcul. L'année dernière, lorsque vous étiez au ministère du budget, monsieur Woerth, vous aviez rejeté notre amendement qui allait en ce sens, en prétextant qu'il était irresponsable. Le Gouvernement a donc changé d'avis, et c'est bon signe : cela veut dire que les propositions socialistes vont dans le sens de l'histoire. Il y a deux ans, vous expliquiez qu'il n'était pas envisageable de toucher à la fiscalité des stock-options. Votre successeur a fini par accepter de prévoir un forfait social pour les stock-options. Je prends le pari que nous finirons par avoir une fiscalité sociale sur ces revenus qui soit cohérente avec l'ensemble du PLFSS.
Mais, cette année encore, le Gouvernement s'est arrêté au milieu du gué, puisque vous n'avez retenu, monsieur le ministre du budget, que la moitié des propositions de la Cour des comptes, qui recommandait aussi de prendre en compte, pour calculer l'allégement Fillon, l'ensemble des éléments de rémunération soumis à la CSG. Cela rapporterait environ 2 milliards supplémentaires, et ce serait logique, conforme à l'esprit même du dispositif qui vise à favoriser l'emploi des moins qualifiés.
Monsieur le président de la commission des affaires sociales, vous dites que la politique sociale est parfois en contradiction avec la politique de l'emploi et les exigences en matière de compétitivité de l'économie française, exigences qui sont évidemment les nôtres. Mais de multiples études montrent que notre politique sociale constitue un atout pour attirer les investissements étrangers. Un pays voisin, la Grande-Bretagne, a un système totalement différent du nôtre, mais c'est notre pays qui accueille le plus d'investissements étrangers en Europe. Cela prouve bien qu'il y a un avantage comparatif à pouvoir faire bénéficier les salariés de l'école gratuite ou de l'hôpital gratuit. En outre, la compétitivité de l'économie française ne dépend pas seulement de la question des coûts et des cotisations, mais aussi de la capacité à innover, à inventer, à avancer et à former les salariés. Si l'on compare ce qui se passe en Allemagne et en France, on voit d'un côté un pays qui a saisi à bras-le-corps la question de l'innovation et de l'économie de l'intelligence, et, de l'autre, un pays un peu…
…à bout de souffle, cherchant à préserver les acquis des découvertes économiques et technologiques sans être suffisamment à l'offensive sur le terrain de l'innovation. Je pense à l'industrie pharmaceutique, qui aurait, elle aussi, besoin de découvrir de nouvelles molécules.
Au-delà de la recherche de nouvelles recettes, il est temps d'engager des réformes de structure. Ne nous faites pas croire, madame la ministre, messieurs les ministres, que vous avez vous-mêmes engagé la maîtrise médicalisée. Il suffit de lire les annexes du PLFSS consacrées aux programmes de qualité et d'excellence pour s'apercevoir que l'impact de la maîtrise médicalisée reste très limité. L'essentiel du redressement avant la crise tient à des augmentations de prélèvements et à une diminution des remboursements. Madame la ministre, vous et les rapporteurs nous racontez une très belle histoire, celle du redressement par la maîtrise médicalisée : elle n'a que l'inconvénient d'être fausse. Les caisses se sont un peu remplies avec les déremboursements, mais cela ne permet pas d'avoir une vision d'avenir sur le système de santé, vision d'avenir dont les Français ont besoin.
En effet, nous avons collectivement à relever un certain nombre de défis : défi des déserts médicaux, que risque d'aggraver la diminution de 20 % du nombre de médecins dans les quinze ans à venir ; défi des atteintes à la santé du fait des environnements de vie, et d'abord des conditions de travail, qui sont à la source des inégalités de santé ; défi des maladies chroniques, de plus en plus importantes, comme le cancer, le diabète, les maladies mentales ou cardio-vasculaires, que nous savons aujourd'hui mieux prévenir, mieux dépister et soigner, mais qui nécessitent un suivi continu des patients que notre organisation ne sait pas toujours bien assurer.
Pour faire face à ces défis, nous pensons qu'une réforme de l'organisation des soins est nécessaire. Malheureusement, la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » n'a pas permis de répondre à cette exigence. Nous avons besoin d'améliorer tout à la fois la qualité des soins dispensés aux Français, les conditions d'exercice des professionnels et l'efficacité de nos dépenses. L'objectif est que les inégalités face à la santé soient réduites et que l'amélioration de la prévention soit effective.
À cet égard, contrairement aux idées reçues, il reste beaucoup à faire : seul un tiers des patients diabétiques reçoit des soins de prévention conformes aux bonnes pratiques ; la moitié seulement des femmes de cinquante à soixante-quinze ans, employées ou ouvrières, bénéficie du dépistage organisé du cancer du sein alors que l'on sait qu'il est extrêmement efficace ; les inégalités territoriales s'accentuent, il y a 50 % de médecins de plus en Île-de-France ou en Provence-Alpes-Côte-d'Azur qu'en Picardie ou en Normandie ; la permanence des soins le soir ou le week-end n'est plus assurée partout ; les refus de soins demeurent ; les dépassements d'honoraires explosent – vous n'avez qu'à demander autour de vous, les gens ne font que parler du coût des consultations.
L'hôpital subit cette désorganisation de la médecine de proximité ; depuis 1990, le nombre de visites aux urgences a doublé, ce qui est à la fois coûteux et inefficace. À l'inverse, l'hôpital ne fait pas suffisamment confiance aux professionnels de ville pour le suivi des patients après l'hospitalisation.
Mais l'hôpital public est la première cible de votre politique, qui veut en aligner le fonctionnement sur celui d'une entreprise.
Mon Dieu !
Vous levez les yeux au ciel, madame la ministre, comme vous le faites depuis des années. Mais regardez ce qui se passe dans les hôpitaux : les médecins n'en peuvent plus (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), les personnels soignants non plus…
Mais non, ce n'est pas Mme Zola ! Je voudrais vraiment que Zola soit totalement dépassé. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je ne ferai pas de commentaire sur Mme Zola, parce qu'il y en avait deux.
Mais, franchement, vous arrive-t-il d'aller voir les médecins et les professionnels de santé dans les hôpitaux publics ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Il y a deux ou trois semaines, l'hôpital Tenon, en région parisienne, a dû fermer son service d'urgences pendant le week-end et renvoyer ses patients vers l'hôpital Saint-Antoine. Quant aux bâtiments flambant neufs de l'hôpital Rothschild, ils ne peuvent ouvrir, faute de personnel pour les occuper. Vous pouvez toujours prétendre que vous ne touchez pas au personnel : la vérité, c'est que vous avez fait de l'hôpital public votre cible. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Je vois que ce thème de l'hôpital public vous excite, vous êtes contents ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Allez-y, les médecins et les personnels soignants vous entendent et ils savent qui défend l'hôpital public. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Ils savent que la droite veut mettre fin à tout ce qui permet l'excellence du système de santé.
Alors, évidemment, il n'y a pas que l'hôpital public et il faut aller au-delà. Mais les professionnels de santé libéraux, madame la ministre, ne vous clament pas leur amour, leur passion.
Quand je dis « vous », ce n'est pas votre personne que je vise, mais le Gouvernement. Ces professionnels vous expliquent qu'ils voudraient être pris en considération. En réalité, les jeunes médecins ne s'installent plus dans certains territoires, ce qui pose un problème. Le Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins ne finance plus de projets innovants, alors que c'est sa vocation, parce que vous en réduisez la portée.
Les réalités locales montrent qu'il faut changer de braquet, modifier les modes de rémunération des professionnels…
… favoriser les délégations de compétence, impulser les pratiques de groupe, encourager les pratiques innovantes.
Mais, tout cela, vous le renvoyez aux calendes grecques. Ce n'est pas de cette manière que vous donnerez aux Français le sentiment que vous vous préoccupez de leur santé.
Il est temps de passer un nouveau contrat avec les professionnels de santé, de marquer sa confiance à l'hôpital public et de lui donner confiance, de dire aux professionnels libéraux qu'ils ont toute leur place à jouer dans notre système de santé. Mais il faut le faire en ayant des exigences en termes de qualité des soins, d'égalité d'accès pour nos concitoyens, de sauvegarde de l'avenir de notre système de protection sociale.
C'est ce à quoi vous refusez de vous atteler ; c'est cela que votre projet de loi de financement de la sécurité sociale abandonne manifestement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
Madame Touraine, vous venez de défendre cette motion de rejet…
…avec les convictions qui sont les vôtres. Encore une fois, j'ai entendu l'addition de propos convenus traduisant l'impuissance, le paradoxe absolu de la contradiction, et l'incapacité des socialistes à apporter des réponses concrètes (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Vous ne pouvez pas prétendre vouloir préserver le modèle social sans assumer que ce choix suppose une forte augmentation des prélèvements obligatoires pour financer les régimes de retraites à hauteur de 45 milliards d'euros.
S'agissant de la CADES, vous ne pouvez pas nier la réalité de l'impact de la crise sur les déficits de la sécurité sociale. Même avec le sourire et une voix aimable, vous ne pouvez pas réfuter le caractère global de notre approche concernant le dispositif de transfert de 130 milliards d'euros de déficits et le financement basé sur des propositions de réduction de niches fiscales, et, dans le même temps, dire que nous avons souligné nous-mêmes une contradiction concernant la CRDS. Pour la CADES comme pour le reste, le Gouvernement a clairement réaffirmé son choix : refus d'une augmentation des prélèvements obligatoires en général et de la CRDS en particulier.
Vous ne pouvez pas non plus, madame Touraine, au nom du groupe socialiste, fuir vos responsabilités. Vous les avez fuies lors des débats sur les retraites et la CADES. Votre intervention montre que vous êtes en train de les fuir s'agissant du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Et les quatre ans de plus pour la CADES, ce n'est pas une fuite ? Faire payer les générations futures, ce n'est pas une fuite ?
Comment allez-vous expliquer aux Français que vous voulez restaurer un dispositif qui doit s'adapter avec le temps ? Grâce à sa démographie vigoureuse, notre pays devrait compter 74 millions d'habitants en 2060. Il faut vivre avec son temps.
Vous refusez le monde moderne ; vous ne voulez pas vous adapter ; vous travaillez avec un regard dans le rétroviseur ; vous proposez de vieilles lunes qui ont échoué ; vous vous enrobez dans un dogme – les soixante ans pour le départ en retraite – qui nous a fait beaucoup de tort.
En ce qui concerne l'hôpital, je parle sous le contrôle de Roselyne Bachelot, mais nombre d'entre nous exercent des responsabilités à la tête des hôpitaux et connaissent le sujet. Vous avez refusé toutes les avancés contenues dans les textes présentés, notamment le dernier, porté par Roselyne Bachelot et traitant de la modernisation des conseils de surveillance, de la mise en place des agences régionales de santé, de la taxe à l'activité et de la répartition des subventions publiques.
Sans nier la réalité de l'évolution des différents postes budgétaires au sein de la médecine hospitalière qui nécessite une maîtrise médicalisée, vous fuyez une nouvelle fois vos responsabilités : vous n'apportez aucune réponse politique concrète et responsable.
Avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement trouve le juste équilibre entre, d'un côté, la préservation du modèle social auquel vous vous dites attachés sans apporter de réponse pour le sauver, et, de l'autre, la nécessité de maîtriser nos dépenses sur l'un des postes les plus importants du budget de l'État.
La stratégie du Gouvernement est de maîtriser les dépenses de ce secteur, comme celles de l'État, comme celles liées au financement des collectivités territoriales.
Pour la première fois depuis 1997, nous allons tenir l'objectif national des dépenses d'assurance maladie. Pour 2011, nous le fixons à 2,9 %.
Cela n'a jamais été atteint ? Mais, madame Touraine, ce taux représente quand même presque le double de l'augmentation du coût de la vie prévue l'an prochain.
Cela veut dire que notre pays, dans les secteurs de la santé, de la solidarité et de la sécurité sociale, affirme une priorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Dans les domaines de l'assurance maladie, de la solidarité, de la protection des personnes âgées et des plus démunis, offrir une croissance de la dépense deux fois plus forte que l'inflation, c'est un choix politique fort et puissant.
Mais nous devons mieux maîtriser cette évolution des dépenses.
Voilà quelques éléments de réflexion inspirés par vos propos, madame Touraine. Je ne doute pas que nous aurons encore l'occasion de nous retrouver, sur ces bancs ou ailleurs.
Je n'oublie rien de nos échanges sur la CADES ou de vos positions. En revanche, encore une fois, je n'ai noté ni proposition alternative sérieuse…
…et adaptée aux circonstances, ni prise de conscience réelle de la crise de 2008-2009.
La responsabilité du Gouvernement, c'est d'assumer dans la durée l'effacement progressif de cet endettement et de ces déficits.
Il me semble qu'un parti de l'opposition qui se dit parti de gouvernement devrait offrir des propositions alternatives crédibles, qui ne peuvent pas se résumer à une augmentation de la fiscalité – mais, dans ce cas, il faudrait l'assumer politiquement et beaucoup plus clairement – ou à des critiques stériles. Malheureusement, le sens de vos interventions se résume toujours à cela : « rien ne va », « il faut », et puis rien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous en venons aux explications de vote sur la motion de rejet préalable.
La parole est à M. Gérard Bapt, pour le groupe SRC.
Le groupe socialiste approuvera bien entendu la motion que vient de présenter Mme Touraine.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Quelle surprise !
Non pas, monsieur le ministre, parce qu'elle a une voix aimable, mais parce que son exposé a été d'une force implacable… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
…où la rigueur du raisonnement n'obérait effectivement pas une certaine élégance dans la formulation.
Monsieur le ministre, vous nous citez un chiffre de l'ONDAM – 2,9 % – que vous trouvez particulièrement généreux. Mais, si l'on tient compte de vos prévisions telles qu'elles apparaissent dans l'annexe B – une hausse de 2 % du PIB en volume et de 1,5 % de l'inflation –, la progression de l'ONDAM est inférieure à celle du PIB en valeur, soit 3,5 %.
Après avoir observé les dénégations de Mme la ministre et de M. le président de la commission des affaires sociales quand Mme Touraine a affirmé que le poids de la charge de santé pesait de plus en plus sur les ménages, je suis tenté de revenir sur ce point. Reprenons les chiffres fournis par la CNAM elle-même : nous sommes plusieurs députés, de la majorité comme de l'opposition, à aller régulièrement entendre le directeur général de l'UNCAM. Entre 2000 et 2009, la part des dépenses de santé prises en charge par l'assurance maladie de base est passée de 78,2 % à 76,8 %. Ce n'est pas l'épaisseur d'un trait. C'est une évolution qui, sur la période, permet une augmentation de 41 % des dépenses prises en charge par l'assurance maladie. Quant au reste à charge, ce n'est pas seulement ce qui reste à la charge du ménage après que l'assurance de base et les assurances complémentaires sont intervenues. Les assurances complémentaires perçoivent des cotisations. Il s'agit donc d'un montant global qui inclut les cotisations de complémentaires et le reste à charge direct des ménages. Or il a augmenté de 53 % entre 2000 et 2009. Cela prouve donc que le reste à charge augmente tendanciellement davantage que la part des dépenses prises en charge par l'assurance maladie.
Vous opposiez aussi des dénégations sur le refus de soins. Tous, ici, nous partageons une valeur fondamentale du pacte social : chacun doit pouvoir accéder aux soins dont il a besoin.
Les actes d'un colloque organisé récemment à Chamonix par Guy Vallancien et Claude Le Pen – peu suspects d'appartenir à l'opposition ou de présenter une vue déformée de la situation – font état d'un baromètre fourni par Europ Assistance. Ce baromètre indique que le taux d'augmentation de reports de soins est de 12 points en France, soit le plus élevé d'Europe, entre 2008 et 2009. Cet indicateur donne une idée de la crise et des difficultés que rencontrent nos compatriotes pour accéder aux soins, que ce soient des consultations ou, désormais, des actes de chirurgie ou des examens lourds.
Voilà pourquoi, madame la ministre, nous pensons que l'évolution actuelle est très lourde pour les ménages et qu'il faut voter en faveur de la motion présentée par Mme Touraine.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, c'est avec une grande attention que j'ai écouté notre collègue Marisol Touraine, qui a défendu la motion de rejet préalable avec une grande pondération, avec une grande modération dans le choix des mots et des arguments. Tout le monde l'a remarqué. (Sourires.)
Nous devons examiner la loi de financement de notre protection sociale pour 2011, c'est-à-dire les dépenses de santé, de retraite, de la politique familiale qui concernent chacun de nos concitoyens et représentent une somme de 470 milliards d'euros. Rejeter ce texte serait sans doute irresponsable. Je ne suis pas certain que nos concitoyens nous en seraient reconnaissants.
Il est permis de considérer que le projet n'est pas parfait. Mais les débats et l'examen des amendements permettront, avec la bienveillance des ministres, d'améliorer ce texte important.
Commençons par signaler une bonne nouvelle : cette année, comme déjà depuis quelque temps, nous n'aurons pas à financer le déficit, puisqu'il a été transféré à la CADES comme ceux de 2009 et de 2010. Il n'y a donc plus de déficit à financer dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous avons même financé le déficit prévisionnel de la branche retraite jusqu'en 2018. C'est donc réglé de ce côté-là. Il est vrai que le mode de financement de ce déficit n'a pas réellement convenu au Nouveau Centre qui était opposé à l'allongement de quatre ans de la durée de vie de la CADES jusqu'en 2025. Nous n'avons pas approuvé non plus le prélèvement de la CSG pour la branche famille qui s'en trouve fragilisée.
Si nous ne voulons pas reconstituer des déficits, il nous faudra voter les lois de financement de la sécurité sociale en équilibre à partir de 2012. Y manquer reviendrait à créer d'autres déficits qu'il faudrait financer par un nouveau prolongement de la CADES, ce qui est inadmissible.
Il nous restera donc à faire des efforts pour financer la famille et la santé, en équilibrant les recettes et les dépenses et en améliorant l'efficacité.
J'aurais encore beaucoup à dire, monsieur le président, mais vous m'incitez à m'arrêter.
J'aurais l'occasion d'intervenir lors des débats. Bien entendu, le Nouveau Centre ne votera pas cette motion de rejet.
Merci, monsieur le président. Il n'y a que vous qui me compreniez ici, ainsi que mes collègues et mes amis.
Reconnaissons-le : ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est remarquable, et à plus d'un titre.
Malheureusement, le pire est à venir pour vous, cher collègue.
Ce projet de loi prévoit le plus important déficit de l'histoire de la sécurité sociale. C'est un beau record. Il a été unanimement rejeté par toutes les caisses.
Ici même, à l'Assemblée nationale, il est très timidement soutenu par les députés de l'UMP et du Nouveau Centre. Je vous rassure, les députés du Nouveau Centre vont se ressaisir et voteront le texte. Mais ces députés de votre majorité sont allés jusqu'à rejeter certaines dispositions du texte en commission.
Il faut dire que ce texte est totalement inadapté aux enjeux. Lorsqu'il faudrait prévoir de nouveaux financements, il construit une usine à gaz. Lorsqu'il faudrait favoriser l'accès aux soins de nos concitoyens, il entérine de nouveaux déremboursements et augmente la taxation des mutuelles complémentaires : une hausse de 10 % est aujourd'hui évoquée, qui sera immanquablement reportée sur les assurés. Rien n'est prévu pour limiter les dépassements d'honoraires, ni pour réorganiser la permanence des soins, ni pour assurer le financement de l'hôpital public, ni pour soutenir une politique familiale. Nous dénoncerons d'autres exemples de ce type au cours des débats.
Ce PLFSS a pour objectif de poursuivre le travail de casse entamé par la réforme des retraites que l'UMP et le Nouveau Centre viennent de voter il y a quelques heures, et de laisser toujours plus de champ libre aux assurances privées. Il vise également à favoriser le développement des cliniques privées au détriment de l'hôpital public, de plus en plus maltraité.
Contrairement à l'angélisme du Gouvernement, qui mise sur une conjoncture fantasmée, il est peu probable que le déficit structurel de la sécurité sociale se résorbe, même en cas de retour à une conjoncture normale. Depuis votre retour aux affaires en 2002, jamais les prospectives du Gouvernement en la matière n'ont été consacrées dans les faits et dans les bilans.
Pour toutes ces raisons, et pour toutes celles que nous aurons l'occasion de détailler au cours des débats, nous voterons la motion de rejet préalable de nos collègues socialistes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame Touraine, M. Préel évoquait votre pondération : je suis convaincu que, si Émile Zola avait entendu votre discours, il aurait pu ajouter un chapitre à Germinal.
La « déconstruction de notre modèle social » : ce sont de grands mots qui pourraient faire sourire, une heure après que nous avons sauvé notre système de retraite par répartition universel et solidaire.
Vous évoquez une protection sociale trop chère. Elle est effectivement coûteuse : 462 milliards d'euros, cela représente 8 000 euros par Français, et 20 000 euros par Français actif.
Il faut avoir ces chiffres en tête lorsque nous abordons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Dans ce projet, nos recettes augmentent de 4,2 %, et l'ONDAM est fixé à 2,9 %. C'est un équilibre vertueux qu'il convient de saluer.
Cet ONDAM est équilibré entre l'ONDAM de ville et l'ONDAM hospitalier, à 2,8 %. Et, lorsque vous évoquez un abandon du petit risque, je ne vois pas comment, à partir de ces chiffres, vous pouvez en arriver à de telles conclusions.
Vous avez dressé la liste des économies qui peuvent être réalisées sans atteinte à la qualité ni au parcours de soins. Ces économies représentent 2,4 milliards d'euros, soit 0,5 % du budget total. Étant donné les chiffres d'ONDAM que nous annonçons, cela est donc intégralement redistribué, pour un meilleur parcours de soins. À vous écouter, on pourrait augmenter à loisir toutes les dépenses, mais je n'ai pas entendu un mot dans vos propos concernant les financements.
J'attends avec plaisir ce débat que vous avez dit souhaiter. Engagez le débat, pour nous exposer enfin votre programme et vos propositions.
J'ai également une pensée pour mes confrères, ceux qui, au quotidien, soignent 65 millions de Français.
Vous évoquez l'échec de la maîtrise médicalisée des dépenses : c'est appeler à demi-mot à une maîtrise comptable. Mes confrères seront très réceptifs aux propositions que vous faites, et ne manqueront pas de vous les rappeler à l'occasion des prochaines campagnes électorales.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
J'ai reçu de M. Yves Cochet et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Monsieur le président, madame la ministre de la santé et des sports, mes chers collègues, je voudrais, pour commencer, m'arrêter sur les conditions dans lesquelles est examiné ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Nous n'avons eu que quelques jours pour étudier les soixante articles du projet de loi, ses annexes, les 300 pages de l'étude d'impact et les 200 pages des six programmes de qualité et d'efficience.
Ces conditions sont symptomatiques de votre mépris pour le travail parlementaire, et plus généralement pour le débat démocratique.
Examen à marche forcée, absence de concertation : ce sont les mêmes recettes que vous avez appliquées, avec le succès que l'on constate, pour la réforme des retraites, dont ce texte poursuit la logique de transfert vers les assurés sociaux d'une part toujours plus grande des dépenses de protection sociale.
Le temps dont nous avons disposé pour étudier ce texte est inversement proportionnel à l'autosatisfaction manifestée par le Gouvernement.
Pourtant, il n'y a vraiment pas de raisons de se réjouir : le déficit prévu cette année sera le second plus important de l'histoire de la sécurité sociale, après celui de l'an dernier ; toutes les caisses sont dans le rouge et ont unanimement rejeté votre projet de loi, ce qui est exceptionnel.
Pour tenter de contenir ce déficit, vous présentez de ridicules mesures de maîtrise des dépenses qui, si elles n'ont qu'un effet homéopathique sur les déficits, sont autrement plus dommageables en ce qui concerne l'accès aux soins de nos concitoyens.
Quant aux hôpitaux publics, qui sont au bord de l'asphyxie depuis quelques années, ils sont aujourd'hui maintenus en respiration artificielle.
Nos concitoyens, qui ont de plus en plus de mal à faire face aux dépenses de santé, payent le prix de votre inaction.
Le reste à charge a considérablement augmenté, notamment depuis 2005. À partir de cette date sont en effet venus s'ajouter au forfait hospitalier : la participation forfaitaire de 1 euro pour chaque acte réalisé par un médecin ou analyse de biologie médicale ; la participation forfaitaire de 18 euros sur les actes supérieurs à 91 euros ; la pénalité pour les consultations hors parcours de soins ; la baisse du remboursement, voire le déremboursement total, d'un certain nombre de médicaments ; les franchises médicales ; et, cette année, de nouveaux déremboursements de médicaments et de dispositifs médicaux.
Le mensuel Que choisir a calculé que les dépenses en volume qui restent à la charge des ménages ont augmenté de 50 % sur la période courant de 2001 à 2008, quand, dans le même temps, le revenu disponible des ménages ne progressait que de 29 %.
Aujourd'hui, le reste à charge pour les personnes qui ne sont pas en ALD est estimé à 45 % des dépenses de santé. Encore ce calcul n'intègre-t-il ni le prix des mutuelles ni les dépassements d'honoraires. Ainsi, selon le calcul de l'UFC-Que choisir, en transférant 500 millions d'euros de dépenses supplémentaires aux complémentaires, les nouvelles mesures de déremboursement prévues par ce PLFSS pourraient représenter, si elles étaient intégralement reportées sur les consommateurs, un surcoût annuel des primes d'assurance santé de 22 euros par personne. Quant à la taxe sur les contrats d'assurance elle pourrait entraîner un surcoût de 26 euros par an de ces mêmes primes d'assurance.
Il faut encore ajouter les dépassements d'honoraires que vous refusez de plafonner dans la loi, malgré nos demandes réitérées. Ils sont de plus en plus indécents et ne sont pas pris en compte dans le calcul du reste à charge. Ils sont particulièrement lourds pour les actes chirurgicaux. Que choisir en donne quelques exemples édifiants : 1 142 euros à la charge d'une femme ayant dû subir une hystéroscopie avec curetage, et cela après déduction des remboursements de sa mutuelle ; 612 euros pour une opération de la prostate ; et jusqu'à 4 500 euros de dépassement pour la pose d'une prothèse de la hanche dans une clinique huppée dont je tairai le nom, mais que vous pouvez trouver dans cette publication.
Une étude du CREDOC publiée en juillet dernier montre que le sentiment d'être mieux soigné lorsque l'on a de l'argent ou des relations et de vivre dans un système de soins à deux vitesses s'est diffusé dans la société française. La proportion de nos concitoyens qui déclarent avoir renoncé à des soins pour des raisons budgétaires est ainsi passée de 3 % en 1980 à 13 % aujourd'hui, avec une forte dégradation à partir de 2005. Il n'y a donc vraiment aucune raison de se réjouir.
La pénurie médicale, contre laquelle vous ne faites pas grand-chose, vient encore aggraver ces difficultés d'accès aux soins. Je ne comprends pas pourquoi vous persistez dans votre refus de donner à la filière universitaire de médecine générale les moyens de son développement, alors que cette discipline, pilier de notre système de santé, est l'une des plus touchée par le manque de médecins.
Quelques mesures courageuses figuraient dans la loi HPST, telle la déclaration d'absence des médecins de ville, qui permettait d'organiser la permanence des soins, dont je rappelle qu'elle concerne tous les médecins, et pas seulement les généralistes. Hélas, vous êtes revenus sur ces mesures – ce qui prouve, au passage, que vous pouvez revenir sur un texte voté. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
C'est dans les hôpitaux publics que l'asphyxie de notre système de santé est la plus forte et la plus visible. La généralisation de la tarification à l'activité vous donne la possibilité de réduire de façon drastique les budgets des hôpitaux. À force de supprimer des postes et des services, ça craque de tous côtés et nous sommes parvenus aujourd'hui à un point de rupture.
La situation à l'AP-HP en fournit une édifiante illustration. La réduction du personnel soignant et non soignant soumet ceux qui restent à une formidable pression, à des cadences de travail infernales, voire au harcèlement de leur direction, jusqu'au moment où le dévouement fait place à la fatigue, au découragement et à l'arrêt maladie de trop, qui finit de dégrader la situation. C'est ce qui s'est passé au début du mois dans le service des urgences de l'hôpital Tenon qui a dû fermer, faute de personnel. Nous n'avions encore jamais vu ça !
Beaucoup de témoignages nous parviennent, montrant que la situation est tout aussi tendue à Lariboisière, à la maternité de Bichat, à Beaujon, à Jean-Verdier, à Henri-Mondor ou à Louis-Mourier de Colombes. Quant aux hôpitaux de ma circonscription – Max-Fourestier à Nanterre ou l'hôpital Foch de Suresnes, qui ne font pas partie de l'AP-HP –, ils sont dans la même situation.
Cet état des lieux catastrophique ne vous empêche pas de répéter que 67 % des établissements hospitaliers sont à l'équilibre ou en excédent pour l'exercice 2009.
C'est vrai !
Ce n'est pas l'avis de la Cour des comptes. En effet, si, dans son dernier rapport, elle indique, en s'appuyant sur les bilans transmis par les établissements de santé, que leur déficit total semble diminuer, elle chiffre à 37 % – et non pas à 33 % – des établissements soumis à la T2A ceux présentant un déficit, contre 51 % en 2008 et 60 % en 2007 et 2006. Elle s'empresse d'ajouter que ces chiffres sont à manier avec prudence, car, selon elle, l'ampleur des déficits est camouflée par des reports de charges, des provisionnements et autres artifices comptables. La Cour estime ainsi qu'il faut amplifier de près d'un quart les déficits de 2008, et conclut que, « au total, les établissements non déficitaires sont l'exception ». Je recommande la lecture de ce chapitre du rapport de la Cour des comptes, qui poursuit en détaillant les raisons du déficit. J'en citerai quelques exemples.
La première raison est le mirage de l'ONDAM et des MIGAC. Vous vous félicitez de la progression des enveloppes MIG – mission d'intérêt général – et AC – aide à la contractualisation –, censées mieux prendre en compte la spécificité et les missions de service public des hôpitaux. Elles ont effectivement augmenté de 41 % entre 2006 et 2009. Mais cette progression se fait dans le cadre d'une enveloppe fermée : l'ONDAM hospitalier, qui inclut l'incidence de la progression de l'activité, les revalorisations tarifaires et les dotations accordées par la tutelle, notamment les MIGAC. Or, écrit la Cour des comptes, « toute progression de l'un de ces trois termes a vocation à être compensée par les autres ».
Ainsi, concrètement, si les établissements de santé augmentent leur activité, le Gouvernement diminue les tarifs hospitaliers, avec toutes les conséquences qui s'y attachent.
Encore cette mauvaise solution touchait-elle jusqu'ici tous les établissements de santé, publics et privés. Mais depuis deux ans, vous faites pire, puisque, pour financer les éventuels dépassements de dépenses, vous gelez les enveloppes servant à financer les missions de service public, ainsi réduites à des variables d'ajustement de l'ONDAM hospitalier, ce qui est inadmissible. Ainsi 400 millions ont été gelés cette année, pour assurer cet équilibre. L'utilisation des services publics comme variable d'ajustement résume, hélas, assez bien votre politique.
Une autre cause du déficit des hôpitaux est l'évolution tarifaire : comment pouvez-vous demander aux directions hospitalières d'établir des budgets sur plusieurs années et en équilibre, si les tarifs des différentes activités, et donc leurs recettes, évoluent sans cesse ? Le rapport d'information de l'Assemblée nationale sur le fonctionnement de l'hôpital souligne le manque de visibilité qu'entraînent ces incessantes modifications.
On colle à la réalité.
S'ajoutent à cette situation que vous créez les fluctuations de la demande de soins et la concurrence des cliniques privées, qui ne cesse de s'accroître du fait de vos choix. Il est clair que votre logique marchande pénalise jusqu'à les détruire toutes les activités publiques. C'est grave dans bien des secteurs, et particulièrement pour la santé.
S'ajoute à ces décisions la façon dont le plan Hôpital 2007 a été conduit. Un trop grand nombre de projets mal dimensionnés ont été acceptés dans le cadre de ce plan, alors même que l'enveloppe de l'État, qui s'élevait à 6 milliards d'euros, n'était pas revalorisée en conséquence, ce qui a réduit le taux de subvention, rapidement ramené de 100 % à 43 %, le reste étant financé par des emprunts. La façon dont a été financé Hôpital 2007 constitue, écrivent les rapporteurs de la Cour des comptes, « l'explication essentielle – même si ce n'est pas la seule – de la progression remarquable de l'endettement du secteur ».
D'autres difficultés s'ajoutent encore avec la généralisation de la T2A. Elle a en effet modifié le travail des praticiens du public, désormais responsables du codage de leurs actes. Si cette pratique est habituelle pour les praticiens du privé, rémunérés à l'acte, il n'en est pas de même pour ceux du public. Les erreurs de codage peuvent avoir de graves conséquences financières. Ainsi, en 2008, une anomalie repérée à l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille pourrait lui avoir coûté 40 millions d'euros, alors que le déficit de son budget s'était élevé à 58,4 millions d'euros cette année-là.
Quant aux pertes de recettes liées aux insuffisances de la chaîne de facturation dues notamment aux nombreuses évolutions réglementaires et tarifaires, elles seraient, toujours selon la Cour des comptes, comprises entre 5 et 15 % du budget des hôpitaux.
Si l'on ajoute à tout cela vos décisions concernant la progression de l'ONDAM, qui, chaque année, est inférieure à l'évolution naturelle du budget des hôpitaux, calculée en prenant en compte les revalorisations salariales, l'augmentation du prix des médicaments, des charges d'énergie – il vient d'être annoncé une augmentation de 3 % des tarifs de l'électricité – ou celle des cotisations retraite pour le personnel de la fonction publique hospitalière, on peut dire que le Gouvernement décide, de fait, de faire voter sciemment l'insuffisance budgétaire des hôpitaux publics.
Pour 2011, notre collègue Jean Leonetti, président de la Fédération hospitalière de France, a estimé à 3,23 % la progression du budget des hôpitaux, compte tenu de ces contraintes. Face à cela, madame la ministre, vous décidez de fixer l'ONDAM hospitalier à 2,8 %. Encore une fois, vous faites voter sciemment le déficit des hôpitaux publics. D'ailleurs, la Cour des comptes indique qu'« une partie de la réponse au déficit des hôpitaux est entre les mains de la tutelle ». Il ne s'agit donc nullement d'une épidémie qui, curieusement, ne frapperait que l'hôpital public, ni de la responsabilité des directeurs qui seraient tout aussi curieusement devenus brusquement incompétents, incapables de gérer le budget de leur établissement. Il s'agit bien de choix politiques et stratégiques.
Le comble est que vous utilisez ce déficit organisé pour faire pression sur l'activité des médecins et des soignants, pour diminuer les personnels et les services offerts, qui seraient trop coûteux. C'est une véritable spirale de démantèlement progressif des établissements publics de soins. Il s'agit, je le répète, de choix délibérés, instaurant, chaque année un peu plus, la privatisation des soins.
Vous faites souvent référence à ce qui se passe dans d'autres pays, notamment en Allemagne. C'est effectivement un bon exemple des objectifs que vous poursuivez, car, dans ce pays, deux CHU, dont celui de Hambourg, viennent d'être vendus au secteur privé. C'est un bel exemple de ce que vous envisagez de faire.
C'est incroyable de dire des choses pareilles ! C'est un mensonge absolu !
Non, ce n'est pas un mensonge. Vous pouvez vérifier : les hôpitaux de Hambourg ont bel et bien été vendus.
C'est de la folie !
Oui, c'est de la folie pour nos concitoyens, et c'est extrêmement préoccupant.
Ce n'est pas ce que j'ai l'intention de faire !
Les centres hospitalo-universitaires ont pourtant un rôle irremplaçable, non seulement en matière de qualité et de continuité des soins, mais aussi en matière d'enseignement, car ce sont eux qui forment les jeunes soignants, des médecins et des chirurgiens aux infirmiers, en passant par les kinésithérapeutes ou les diététiciens, qui sont au coeur des progrès médicaux, de la recherche et du rayonnement de la France à l'échelle internationale.
Alors que vos discours prétendent défendre l'accès aux soins de qualité pour tous, qui faisait jusqu'ici l'originalité et la fierté de notre pays, grâce à son système de protection sociale solidaire, au maillage de ses nombreux hôpitaux publics, tous vos gestes font le contraire.
Le dernier en date est cette disposition présentée à l'article 40 du PLFSS, instaurant des « maisons de naissance » pour, paraît-il, « démédicaliser » la grossesse et l'accouchement, qui « ne sont pas des maladies », comme vous dites. C'est vrai, ce ne sont pas des maladies, ce sont même des moments heureux dans l'immense majorité des cas, à condition que tout se passe bien : sinon, ce sont des drames. Si un suivi rigoureux permet de détecter les grossesses à risque, il ne permet pas de dire à l'avance si l'accouchement sera normal. Personne ne peut prévoir une souffrance foetale grave nécessitant l'intubation immédiate du nouveau-né, encore moins une hémorragie de la délivrance exigeant transfusion sanguine massive et geste chirurgical immédiat, car, dans ces circonstances, le pronostic vital se joue en quelques minutes.
Pour nous rassurer, on nous explique que ces « maisons de naissance » démédicalisées seront adossées à des hôpitaux hautement équipés. Pourquoi ne pas proposer l'expérimentation de nouvelles pratiques souhaitées légitimement par les mères et les couples au sein même de l'environnement sécurisé des maternités ?
Vous faites au contraire le choix de fermer, plutôt que de moderniser les petites maternités publiques de proximité, en prétextant de leur danger. Mais les maisons que vous envisagez, elles, ne sont pas dangereuses ?
En réalité, là encore, votre démarche est de privatiser tout ce qui peut l'être et de transférer aux hôpitaux publics « adossés » comme vous dites, les cas graves, trop dangereux et trop coûteux pour intéresser le privé.
Cet article 40 n'est pas seulement inacceptable par la démarche qui le sous-tend, il l'est aussi par le danger qu'il représente. Il a d'ailleurs été majoritairement repoussé par la commission des affaires sociales qui, dans le cadre d'un échange sérieux, a su prendre ses responsabilités.
En ce qui concerne la branche famille, Mme Morano s'est encore illustrée cette année, lors de son audition devant la commission des affaires sociales, par un raisonnement assez singulier : « Nous avons décidé d'appliquer, l'année prochaine, les mécanismes normaux d'augmentation de toutes les allocations familiales. Nous aurions pu faire un autre choix politique, celui de geler ces prestations… » Bravo, Madame la secrétaire d'État et merci ! Car, au fond, vous nous dites – de façon un peu binaire – que tout va bien, puisque vous auriez pu faire pire ! C'est d'autant plus croustillant que, en l'occurrence, le pire a été fait l'année dernière, puisque, en pleine crise économique, vous avez décidé de geler la base mensuelle de calcul des allocations familiales.
Aujourd'hui, vous vous félicitez de sa revalorisation a minima, alors qu'entre 7 % et 13 % de la population française – selon le seuil retenu – vit sous le seuil de pauvreté, dont un tiers sont des familles monoparentales. Du côté des agents des CAF, les témoignages ne manquent pas pour décrire leurs difficultés, voire leur détresse. Le président du conseil d'administration du réseau des caisses d'allocations familiales s'est inquiété d'une probable « implosion » de l'institution. Selon lui, les moyens humains alloués aux caisses sont insuffisants pour répondre à l'augmentation de la demande sociale dans le contexte de grave crise économique que nous connaissons.
Partout en France, des agences ont été contraintes de fermer leurs guichets, au détriment de leur mission d'accueil et d'information, pour tenter de rattraper le retard dans le traitement des dossiers.
Je pense également aux professionnels de la petite enfance qui se sont mobilisés avec les parents contre le fameux « décret crèches » qui abaisse les normes qualitatives et de sécurité dans les établissements d'accueil des tout-petits.
Alors que les besoins augmentent, vous alourdissez les charges de la CNAF, puisque vous envisagez de faire peser sur elle la totalité de la majoration de pension de retraite de 10 % pour enfant – une mesure qui, je le rappelle, concerne la branche vieillesse. Au total, l'augmentation des dépenses atteint les 4 % pour une augmentation des recettes de seulement 0,9 %, soit un déficit prévisionnel de 3,3 milliards d'euros en 2011.
Il convient d'ajouter à cela votre lamentable gestion de la dette sociale, qui prévoit, entre autres, le transfert de ressources dynamiques de la branche famille vers la CADES …
… pour les remplacer par des taxes non pérennes et insuffisantes, constituant un manque à gagner pour les politiques sociales et familiales de 1,2 milliard d'euros en 2013.
Si l'on y ajoute les deux mesures de réduction des dépenses que vous prenez pour 2011, la suppression de la rétroactivité des aides au logement et le décalage de la date d'ouverture du droit à la PAJE, c'est 300 millions d'euros que vous prenez aux familles.
Cela ne fait pas beaucoup d'économies au regard des sommes en jeu, mais cela fera sans aucun doute beaucoup de dégâts sociaux.
Permettez-moi d'ajouter que votre ambition est bien limitée, si vous vous satisfaisiez d'abaisser le déficit de 3,3 à 3 milliards d'euros…
…. en rognant sur les droits des jeunes parents et des jeunes qui s'installent. En mesurant tout cela, on se demande ce qui justifie votre autosatisfaction.
La sécurité sociale est au bord du gouffre, et avec ce PLFSS, vous faites un nouveau pas en avant vers votre projet final dont vous évitez de parler. C'est celui du grand patronat, (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP)…
Il y avait longtemps ! Cela nous manquait. N'oubliez pas de citer le MEDEF !
…celui de Denis Kessler, membre du Conseil national des assurances et ancien vice-président du MEDEF… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…
Denis Kessler veut en finir avec l'héritage du CNR dont vous vous réclamez, mais les mesures que vous prenez sont révélatrices et tous vos amis disent clairement ce que vous ne dites pas. Claude Bébéar, président d'honneur du groupe AXA,…
…voit dans chaque assuré social un client. Dans une note de l'Institut Montaigne qu'il dirige, il milite pour « la suppression des cotisations patronale, remplacées par des cotisations salariales susceptibles de se transformer ensuite en primes d'assurance ». C'est, précise-t-il, « le changement stratégique central à mettre en oeuvre ». Je pense qu'il sera très satisfait de constater ce que vous faites.
Cela n'engage que lui ! Nous ne sommes pas responsables de ses déclarations pas plus que vous n'êtes responsable de celles de Staline !
C'est aussi votre feuille de route.
L'objectif à terme, lorsque les déficits que vous construisez deviendront insupportables, est d'imposer le passage d'une assurance maladie solidaire et universelle à un système d'assistanat pour les plus pauvres, le reste de la population – ceux qui peuvent encore payer – étant orienté vers les assurances privées.
C'est ce que vous tentez de mettre en oeuvre avec votre réforme des retraites, et que vous voulez poursuivre dans quelques mois avec la dépendance.
Le problème, votre problème, c'est que nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à voir où vous allez et à en mesurer la gravité. C'est ce qui explique la résistance acharnée et durable à laquelle vous vous heurtez avec votre réforme des retraites,…
Erreur ! Signet non défini., rapporteur. Hors sujet !
…qui, ajoutée à toutes les autres, montre la cohérence de votre projet résolument tournée contre les peuples.
La même politique menée dans tous les pays d'Europe conduit aux mêmes souffrances populaires et aux mêmes révoltes en Grèce, en Espagne, en Allemagne, et j'en passe.
…tournés vers l'utilisation des richesses produites pour répondre aux aspirations de tous et non aux intérêts égoïstes de quelques-uns. Les moyens existent aujourd'hui en France, en Europe et bien au-delà, de financer une sécurité sociale universelle et solidaire où chacun cotise selon ses moyens, les plus aisés participant davantage, et où chacun reçoit selon ses besoins que l'on soit riche ou pauvre.
Les moyens existent et nous le montrons dans notre proposition de loi sur les retraites que vous n'avez pas dû lire, puisque vous allez répétant que nous ne proposons rien. C'est un mensonge de plus. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Il faut dire que dans cette matière, au point où vous en êtes, un de plus, un de moins...
La vérité n'est pas que nous n'avons pas d'idée, comme vous tentez de le faire croire, c'est que nos idées ne vous plaisent pas. (Rires sur les bancs du groupe UMP.)
Nos idées vous dérangent, vous et vos amis fortunés, celles et ceux auxquels vous distribuez les cadeaux fiscaux et autres largesses.
Qu'il s'agisse de taxer les revenus du capital au même niveau que ceux du travail – ce qui ne serait que justice – ou de moduler les cotisations des entreprises en fonction de leur politique sociale et salariale, pour ne citer que ces deux exemples.
Ces pistes de financement originales, pérennes et crédibles sont de plus en plus comprises et partagées par nos concitoyens qui mesurent chaque jour davantage ce que votre modèle de société envisage de leur faire subir.
C'est bien là votre cauchemar. C'est ce qui explique votre recours, désormais érigé en méthode de gouvernement, au mépris et à l'autoritarisme brutal, bafouant la démocratie la plus élémentaire.
Mes chers collègues, je vous invite à vous méfier de ce lamentable calcul qui pourrait bien se retourner contre vous à force de sous-estimer la colère qui s'exprime.
Erreur ! Signet non défini.. Demandez aux Chinois !
Pour toutes ces raisons, ce texte mérite d'être renvoyé en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
Votre motion de renvoi me donne l'occasion de rappeler quelques faits, tant sur les dépenses que sur les recettes de notre système de santé. Nous avons les dépenses parmi les plus élevées du monde : nous sommes à la deuxième place sur le podium des dépenses de santé et à la première place au niveau européen.
On ne peut pas dire que notre pays ne fait pas des efforts considérables et justifiés pour notre système de santé. Nous avons les dépenses hospitalières les plus élevées du monde avec le maillage hospitalier le plus resserré. Nous finançons ces dépenses par un système de protection sociale extrêmement performant qui laisse le reste à charge le plus faible ou parmi les plus faibles de tous les pays occidentaux.
Au sein des pays de l'OCDE, c'est chez nous que le nombre de médecins pour 100 000 habitants est le plus élevé. Bref, nos atouts sont considérables.
Au niveau des dépenses, ce système solidaire mobilise des fonds extrêmement importants. À vous entendre, madame Fraysse, il y aurait d'un côté l'argent qui sortirait de je ne sais où – l'argent de la sécurité sociale – et le reste, c'est-à-dire l'argent provenant des organismes complémentaires et le reste à charge assumé par les ménages, qui proviendrait de la poche des ménages. Mais tout vient de la poche des ménages !
Il faut bien comprendre ce qu'est un système de sécurité sociale solidaire.
Ce que propose la gauche – cela est nettement ressorti de nos débats tant sur le PLFSS que sur les retraites –, c'est d'assécher les revenus du capital au seul profit des retraites…
…pour ne pas avoir à envisager des mesures d'âge. Vous vous comportez comme ces metteurs en scène de théâtre qui font sortir les figurants d'un côté pour les faire rentrer de l'autre…
Les revenus du capital, on nous les a servi pour le financement des retraites, du sport, de la culture ; voilà qu'on nous les ressert pour financer la santé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Il est clair désormais que ce débat est derrière nous.
Un financement solidaire de la santé repose sur des prélèvements qui ont un impact sur le revenu des ménages. En ce qui concerne l'assurance maladie, 47 % des revenus de la sécurité sociale proviennent des cotisations sur les salaires, 37 % de la CSG – impôt inventé par la gauche, je me permets de le rappeler, et non progressif –…
…et 15 % de taxes affectées. Je veux bien que l'on augmente les ressources de la solidarité, mais ne faites pas croire aux Français qu'il n'y aura aucun impact sur leurs revenus !
Bien entendu, il y aura un fléchage à ce niveau et ce que l'on prendra pour la santé ne sera pas consacré à l'éducation, au logement ou à d'autres postes de dépenses au moins aussi importants pour améliorer l'état de santé de nos concitoyens.
Il faut être honnêtes avec les Français. Il faut leur dire d'où vient l'argent.
J'ai parlé des revenus solidaires pour la sécurité sociale, mais s'agissant des organismes complémentaires, ce sont aussi des revenus solidaires.
Un mot des augmentations qui seraient entraînées par le PLFSS. On parle toujours des charges qui sont mises au compte des organismes complémentaires, mais on omet de parler des économies que nous leur proposons dans le PLFSS. Quand on baisse le prix de certains médicaments ou les tarifs de certaines professions de santé, c'est au bénéfice des organismes complémentaires. Le solde de toutes les mesures contenues dans le PLFSS, c'est 129 millions d'euros pour les organismes complémentaires. Or un point d'augmentation des taux de cotisation ramène dans la caisse des organismes complémentaires 320 millions d'euros. Quand j'entends les augmentations proposées par les organismes complémentaires, je dis que le calcul n'est pas sérieux. Peut-être existe-t-il d'autres causes, mais en tout cas, elles ne sont pas liées au PLFSS.
La taxe sur les conventions d'assurance à taux réduit a, en effet, un impact sur les organismes complémentaires à hauteur de 1,1 milliard d'euros. Mais, madame Fraysse, puisque vous faites référence à la Cour des comptes, je vous signale que les avantages fiscaux et sociaux consentis aux organismes complémentaires ont été chiffrés à près de 7 milliards d'euros par la Cour des comptes.
Nous demandons aux organismes complémentaires dont la situation financière est confortable de participer à l'effort de la collectivité. Nous leur laissons des marges de manoeuvre et des avantages considérables. Je signale d'autre part que le déport des dépenses au débit, si j'ose dire, de l'assurance maladie – du fait du passage de plus en plus nombreux de malades dans le système de l'ALD à 100 % – entraîne des moindres prises en charge, autrement dit une économie de 600 millions par an pour les organismes complémentaires. Leur demander dans les circonstances que nous traversons de participer à la hauteur de 1,1 milliard d'euros alors que nous leur laissons 6 milliards d'avantages fiscaux, c'est tout de même ce qui s'appelle les aider massivement !
D'autant que, d'une certaine façon, nous finançons les organismes complémentaires non seulement en amont, mais également en aval : grâce à l'augmentation du plafond ouvrant doit à l'aide à la complémentaire santé, le nombre des bénéficiaires potentiel de l'ACS – j'en ai parlé lors de la séance des questions au Gouvernement – devrait passer de deux à trois millions, soit un accroissement de 50 %… Tout cela représente un effort financier considérable.
Voilà ce que nous faisons. Il faut avoir le courage de dire la vérité aux Français.
Notre système ne pourrait-il être plus efficient ? Bien sûr que si ! Est-ce que tout va bien ? Bien sûr que non ! Ne voit-on pas des personnels en burn out dans certains de nos hôpitaux ? N'y a-t-il pas des zones touchées par la désertification médicale ? Mais quelle ministre de la santé serais-je si je ne le reconnaissais pas ? C'est pour cela qu'il faut des mesures financières, c'est pour cela qu'il faut investir dans la modernisation de notre système de santé, c'est pour cela que nous consentons une augmentation de l'ONDAM bien supérieure à la richesse nationale en nous apprêtant à injecter 4,7 milliards d'euros d'argent frais dans le système.
C'est pour cela encore que nous voulons des réformes de structure, conséquentes, construites, grâce aux agences régionales de santé, grâce à plusieurs mesures concourant à une meilleure gouvernance de l'hôpital, grâce à toutes sortes de dispositions permettant aux professionnels libéraux de mieux assurer leur mission.
Madame Fraysse, les marges de manoeuvre dont je parle ne seront pas dégagées au détriment de l'hôpital public, qui ne cesse – et je m'en réjouis – de gagner des parts de marché. Nous avons les chiffres ; je vous les donne ; la vérité vous dérange peut-être, mais je vous la dois. La part de l'hôpital public dans notre hospitalisation augmente. C'est bien la preuve que nous lui donnons les moyens de fonctionner, et je tiens à lui rendre hommage. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Contrairement à ce que vous prétendez, il n'a jamais été dans mes intentions de brader nos établissements à des groupes de santé.
Où êtes-vous allée chercher cela, madame Fraysse ? (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Si cela se fait en Allemagne, c'est la responsabilité des Allemands ; mais arguer de ce que font les Allemands pour m'en accuser, ce n'est pas loyal, madame Fraysse ! On n'a pas le droit de dire cela !
Les marges d'efficience, mesdames et messieurs les députés, nous les connaissons.
Madame Fraysse, quand le nombre d'infirmiers anesthésistes, pour cinq mille actes d'anesthésie, passe de quatre à trente-quatre, n'allez pas me dire que nous n'avons aucune marge de manoeuvre ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Quand celui des médecins pour un lit de pneumologie passe de un à dix, n'allez pas me dire que nous n'avons pas des marges de manoeuvre !
À l'évidence, je le répète, des marges d'efficience existent.
Voici, mesdames et messieurs les députés, ce que nous voulons faire grâce au PLFSS pour 2011 : protéger les plus fragiles, dégager des marges d'efficience et moderniser notre système public de santé.
Voilà pourquoi je vous invite à ne pas voter la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous en venons aux explications de vote sur la motion de renvoi en commission.
Pour le groupe SRC, la parole est à Mme Michèle Delaunay.
Madame la ministre, par moments, vous avez eu des accents de la Callas ! (Rires.)
Vous avez répondu à Mme Fraysse par des arguments généraux que, pour certains, nous partageons.
Toutefois, madame la ministre, y a-t-il un seul des exemples donnés par Mme Fraysse qui ne soit étayé par les faits, rendu crédible par des chiffres et que nous ne puissions vérifier ?
Il y a donc certainement quelque chose qui cloche, et qui explique la divergence entre les deux explications. Ce qui cloche,…
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est vous !
…c'est que vous nous proposez un PLFSS qui constitue une sorte d'élagage sommaire, qui se borne à quelques branches…
… et qui, de manière générale, pénalise les moins fortunés d'entre nous. Il ne comporte aucune réforme structurelle d'envergure et aucune de ses mesures ne concerne certaines rentes de situation… (Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP.)
…que la Cour des comptes nous a désignées.
D'un côté, un reste à charge qui augmente et qui pénalise les plus pauvres ; des déremboursements anarchiques, erratiques, défiant le bon sens, et qui, eux aussi, vont pénaliser les plus modestes ; et cette augmentation des contributions des mutuelles qui, malgré ce que vous avez dit, rejaillira sur les cotisations, obligeant certains à y renoncer. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) De l'autre, une stabilisation tout à fait discutable de l'ONDAM ; des hôpitaux publics qui, Mme Fraysse l'a montré, se remplissent certes de malades – vous avez raison sur ce point –, mais bien souvent des plus pauvres d'entre eux, d'où un surcroît de charges, et qui, en revanche, se vident parfois de leurs médecins ; des dépassements d'honoraires enfin qui semblent aujourd'hui constituer une sorte de « bouclier médical », à côté du bouclier fiscal… C'est à croire que ces dépassements constituent un tabou, alors qu'ils deviennent de plus en plus indécents et que la plupart des Français ne peuvent plus les supporter.
C'est à cause de ce déséquilibre que nous voterons la motion de renvoi en commission défendue par Mme Fraysse. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
Monsieur le président, une fois de plus, j'ai écouté avec attention le plaidoyer de Mme Jacqueline Fraysse, présenté avec une conviction sincère et que je respecte.
Pas ça ! Ce n'est pas possible ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
Mais cette loi, on l'a dit, est importante et nécessaire, puisqu'elle sert à financer la santé, les familles et les retraites de tous nos concitoyens. Il est donc urgent d'en venir à sa discussion.
Nous en avons déjà assez longuement débattu en commission, où nous avons examiné quelque 470 amendements. Nous avons donc eu l'occasion de nous exprimer sur le sujet.
Le texte mérite d'être encore amélioré ; je ne reviens pas sur le report de la dette sociale à la CADES, ni sur la branche famille, qu'il s'agisse du prélèvement d'une part de CSG ou des articles 54 et 55, respectivement relatifs à l'APL et à la PAJE.
En matière de santé, nous appelons tous de nos voeux l'égal accès de tous à des soins de qualité – Mme la ministre vient de le dire – et, j'y insiste pour ma part, à tarif opposable, car les dépassements d'honoraires posent un véritable problème que la discussion devra nous permettre de résoudre.
L'ONDAM va augmenter de 2,9 %, c'est-à-dire de 4,7 milliards d'euros par rapport à l'an dernier. Cette augmentation assez substantielle à une période où l'inflation est extrêmement faible, est un bol d'air, si j'ose dire, pour la santé.
Plusieurs amendements ont été approuvés en commission. À ce propos, j'ai entendu avec inquiétude Jean-Pierre Door, pourtant rapporteur de la commission des affaires sociales, appeler de ses voeux le rétablissement d'amendements que nous avons rejetés. Un rapporteur doit pourtant, par définition, défendre l'avis de la commission ; il n'a pas à donner un avis personnel.
J'espère donc qu'il émettra tout à l'heure un avis favorable au maintien de ce qui a été voté en commission.
Ce n'est pas la première fois que cela arrive ! On n'est jamais trahi que par les siens !
J'espère également que nous améliorerons encore le texte en adoptant de nouveaux amendements.
Voilà pourquoi il est urgent de passer à la discussion des articles et donc de rejeter cette motion de renvoi en commission.
Mme Fraysse nous a présenté un dossier particulièrement précis. On peut regretter que sa principale référence soit l'UFC-Que Choisir : les parlementaires peuvent peut-être en trouver d'autres.
Reste que le dossier était précis et les chiffres clairs ; et surtout, l'idéologie était bien assise sur ses bases.
Les réformes menées aujourd'hui dans le cadre du projet de loi portant réforme des retraites et du PLFSS pour 2011 exerceront leurs effets à la fois sur les dépenses et sur les recettes. Surtout, elles permettront de réduire très sensiblement le déficit tendanciel, qui s'élèvera à 21 milliards d'euros, ce qui représente une nette amélioration par rapport à 2010,…
Conscient malgré tout du fait que la crise économique a lourdement grevé la sécurité sociale, le Gouvernement a choisi de consacrer en priorité ses efforts à la préservation de notre modèle social, auquel nous sommes tous attachés, sur quelque banc que nous siégions. Ainsi, près de 7 milliards d'euros issus de la suppression ou de la réduction de niches seront affectés au financement de la sécurité sociale. Au total, comme les ministres l'ont indiqué hier soir, ce sont plus de 8 milliards d'euros de recettes nouvelles.
Voilà pourquoi nous ne pouvons retarder nos travaux, madame Fraysse. L'augmentation de 2,9 % de l'ONDAM représente 4,7 milliards d'euros supplémentaires qui seront consacrés à notre système de soins l'année prochaine. Et de nombreux exemples montrent la volonté de cette majorité – Gouvernement et Parlement associés – d'agir pour préserver notre système social.
La lutte contre les dépenses injustifiées sera poursuivie, à l'aide de référentiels validés par la Haute autorité de santé. Les remboursements seront recentrés sur la prise en charge des thérapies et des médicaments les plus efficaces. L'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé sera accrue, dans le prolongement des efforts consentis depuis deux ans pour améliorer le taux d'accès à une couverture complémentaire. Une série de dispositions sont envisagées pour accroître les gains d'efficience des établissements de santé, dont la poursuite de la convergence entre public et privé.
Le texte prend aussi un engagement en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées : Bérengère Poletti l'a rappelé, le taux d'ONDAM sera calculé au plus près des prévisions d'ouverture de places nouvelles pour limiter la constitution d'excédents.
Le PLFSS propose enfin l'allongement du délai de prescription applicable aux demandes d'indemnisation des victimes de l'amiante – sujet qui nous intéresse tous particulièrement –, ainsi que le renforcement des dispositifs de lutte contre la fraude. Tout cela, mes chers collègues, vise à permettre de maintenir des soins de qualité pour tous.
Ces divers sujets ont été abondamment évoqués en commission. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le texte nous semble donc prêt à être discuté dans cet hémicycle. En effet, les nombreux amendements adoptés en commission, déjà évoqués, montrent que la commission a fait son travail. En outre, les interventions des ministres hier soir, notamment celle de Mme Bachelot, nous ont clairement montré leur volonté de tenir compte des avis et des choix des commissaires. Nous lui en savons gré.
Mes chers collègues, il faut d'urgence faire des choix. La demande de renvoi en commission est illogique. Je le répète, votre dossier est clair, vos chiffres sont précis, et votre idéologie, elle aussi, est claire.
Vous venez de démontrer le contraire de ce à quoi vous vouliez parvenir : il n'est pas nécessaire de renvoyer le texte en commission. Le groupe UMP ne votera donc pas cette motion. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
Dans la discussion générale, la parole est à Mme Michèle Delaunay. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, je m'exprime également au nom de notre collègue Catherine Lemorton, qui ne pouvait être présente.
Nous nous souvenons tous d'une audition récente au cours de laquelle les quatre ministres venus défendre le PLFSS se sont successivement exprimés avec le même talent qu'aujourd'hui, mais dans un registre totalement différent, pour se féliciter des excellents chiffres qu'ils nous présentaient.
On connaissait déjà les emprunts, c'est-à-dire les dettes, présentés comme des crédits ; nous avons découvert des déficits présentés comme des profits par rapport à ce qu'ils auraient pu être, c'est-à-dire par rapport à des déficits encore plus graves.
En réalité, notre système de sécurité sociale est en péril. Je ne dis pas cela pour insinuer subrepticement l'idée que certains, ici, ont malheureusement à l'esprit, celle de sa privatisation, mais pour appeler à une réforme structurelle, à une redéfinition de la santé qui en fasse une santé durable et pour tous.
Au lieu de cela, nous voilà engagés dans une sorte d'exercice imposé, très éloigné de ce que vivent les Français, dont l'expérience nous enseigne au contraire que nous avons beaucoup à faire pour garantir l'égalité d'accès à la santé.
La prévention est devenue la condition sine qua non de la pérennité de notre régime d'assurance sociale.
Nous savons qu'une grande majorité d'affections, d'accidents, de drames sont évitables. Nous pourrions diviser notre facture par deux si nous investissions, y compris par la manière forte, dans la prévention et le dépistage. Or ce matin en commission, lors de l'examen du budget de la mission « santé », nous avons constaté que ces crédits diminuaient.
Il y a également beaucoup à faire en matière d'accès aux soins alors que plusieurs études récentes viennent confirmer qu'un grand nombre de Français renoncent aux soins ou reportent le moment d'en bénéficier. Selon un sondage réalisé par l'institut Viavoice pour le Collectif interassociatif sur la santé, 26 % des personnes interrogées déclarent avoir déjà renoncé à des soins, avec parmi elles une surreprésentation de personnes dont les revenus sont inférieurs à 1 500 euros par mois…
Oui, je sais que pour contester ces chiffres, on invoque le fait qu'il s'agit de soins dentaires ou oculaires ou d'équipements optiques, comme si ceux-ci n'étaient pas indispensables.
Parmi ces personnes, disais-je, il y a une surreprésentation de bénéficiaires de la CMU et de 25-34 ans, des jeunes pour lesquels la santé est pourtant l'outil principal d'autonomie, de progrès personnel et, pour tout dire, de liberté.
L'UFC-Que choisir fait quant à elle le constat que les complémentaires sont devenues un préalable à l'accès aux soins et que les patients potentiels, pour ne pas dire les consommateurs, ont tous connu une inflation de leurs primes d'assurance – directement supportées par les ménages, rappelons-le, à hauteur de 76 %. Ce sont ces primes que vous proposez indirectement d'augmenter, accroissant ainsi le nombre de ceux qui renonceront au bénéfice d'une complémentaire.
L'analyse du PLFSS pour 2011 montre que la fin de l'exonération de la taxe sur les contrats d'assurance et les déremboursements aboutiront à un surcoût total de 48 euros par personne.
Mon troisième exemple est issu de la lettre d'octobre 2010 du Fonds de financement de la CMU. D'après une étude de l'Institut de recherche et de documentation en économie de la santé, on trouverait parmi les personnes ayant renoncé aux soins 21 % des bénéficiaires de la CMU complémentaire, 15,3 % des bénéficiaires d'une assurance complémentaire privée et 30,4 % des gens sans complémentaire.
La France s'enfonce dans une situation structurelle de renoncement aux soins, ce qui met en cause l'ensemble de votre politique de santé et va de manière inéluctable en augmenter le coût.
Regardez donc le monde autour de vous au lieu de dire de telles bêtises ! Cessez de raisonner dans un cadre strictement franco-français !
Vous ne nous avez pas habitués à des termes aussi déplacés, monsieur le président. Ou alors, c'est que vous nous autorisez le même vocabulaire !
N'acceptons pas cette critique et mesurons plutôt ce que cela représente pour les personnes pénalisées.
Dois-je rappeler, monsieur le président, que 38 000 consultations ont été réalisées dans les centres d'accueil de Médecins du monde et que ce chiffre est en augmentation, spécialement pour ce qui est des mineurs ?
Aggravation de l'inégalité de l'accès à la santé, aggravation de l'inégalité de l'accès aux soins, y a-t-il plus grave inquiétude pour les Français ? Y a-t-il sanction plus lourde pour l'ensemble de votre politique ?
Nous ne sommes pas seulement comptables de la compétitivité de notre pays sur le marché mondial ou de l'état financier de nos banques, renflouées quand il en était besoin, …
…nous sommes également comptables de la santé de chaque Français. Sinon, comment nos concitoyens pourraient-ils se réaliser, être autonomes ou contribuer à notre effort commun ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, « La sécurité sociale est la garantie, donnée à chacun qu'en toutes circonstances il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes. »
L'ordonnance du 4 octobre 1945 dont je viens de citer un extrait n'est pas dépassée, quoi qu'en dise M. Baroin. Nous ne sommes pas ringards quand nous refusons que la droite démantèle ce que le général de Gaulle avait souhaité mettre en oeuvre aux côtés des forces de gauche engagées dans la Résistance.
Vous nous accusez, monsieur le ministre, de ne pas avoir vu que le monde avait changé. Mais de quel monde parlez-vous ? De celui qui est dans la rue ou de celui des salons mondains ?
Je parle du concept d'État providence, madame !
L'an dernier, 13 % de la population française a renoncé à des soins faute d'argent. Cela a l'air de vous faire sourire, monsieur le ministre, moi pas du tout.
C'est ce que vous disiez auparavant qui me faisait sourire.
Des inégalités se creusent de manière dramatique. Elles vont encore s'aggraver du fait de votre réforme injuste des retraites, de votre incapacité à créer des emplois utiles et de votre incapacité à entendre les partenaires sociaux. C'est la répartition injuste de la richesse qui provoque les grèves et les manifestations.
En 2008, selon l'INSEE, 13 % de la population française vivait sous le seuil de pauvreté, soit avec moins 950 euros par mois – il faut l'entendre – alors qu'un président de directoire bancaire peut gagner un salaire fixe de 550 000 euros par an, avec la perspective d'un bonus de plus de 1 million d'euros.
Que nous propose ce projet de loi de financement de la sécurité sociale sinon une stratégie à courte vue ? Que nous propose l'État sinon de renoncer à ses responsabilités au profit des intérêts privés ? Que nous propose le Gouvernement pour gérer la dette sociale sinon un jeu de bonneteau en guise de gestion des déficits sociaux ?
Prolonger la durée de vie de la caisse d'amortissement de la dette sociale et alourdir son endettement, piocher dans le Fonds de réserve des retraites, c'est faire peser sur les générations futures les conséquences de votre incapacité à faire face à nos dépenses actuelles. Nous sommes bien loin d'un développement responsable et durable.
Face aux déficits sociaux, que fait le Gouvernement ? Il demande à ceux qui se lèvent tôt de travailler encore plus et de payer encore plus.
Sommes-nous condamnés à basculer dans l'insécurité sociale ? Je dis bien l'insécurité sociale, car c'est bien le chemin que vous nous proposez.
Les crises globales que nous traversons, qu'elles se situent sur un plan financier, économique ou environnemental, ne pourront être résorbées grâce à un nouveau tour de passe-passe.
Penser résoudre tous nos maux par la croissance est une illusion.
Les écologistes affirment que les comptes sociaux ont vocation à s'équilibrer non par une politique de court terme fondée sur le déremboursement, mais par une politique d'extension de l'assiette fiscale, d'éducation à la santé et de prévention renforcée.
Nous avons besoin d'une réforme fiscale en profondeur, qui rétablisse l'équité contributive et qui mette en oeuvre une réelle fiscalité écologique et solidaire. Il est grand temps que les coûts environnementaux et sociaux des activités soient pris en compte.
Lors du débat sur les retraites, à propos de la question de la pénibilité, nous avons souligné qu'il n'était plus besoin de démontrer que l'utilisation massive de pesticides, la manipulation de produits toxiques, le port de charges lourdes, les horaires atypiques ou encore le démantèlement des équipes de travail avaient des conséquences sur l'espérance de vie. Combien de temps les victimes de l'amiante ont-elles dû attendre avant de recevoir une reconnaissance ! Reconnaissance qui ne remplacera jamais les vies perdues…
Les épidémies modernes – cancers, maladies cardio-vasculaires, obésité, diabète, allergies, dépression – sont la conséquence de nos modes de vie, de nos conditions de travail et de notre environnement. En France, près de 8 millions de personnes sont touchées par une affection longue durée. Pourtant, ces maladies sont largement évitables.
Nous avons besoin d'une autre approche de la politique de santé, fondée sur une prise en compte globale de la personne : chacun doit pouvoir être acteur de sa santé.
C'est vrai.
Je suis heureuse de vous l'entendre dire, madame la ministre. Cela passe par une véritable politique d'éducation à la santé et de prévention, une refonte de l'accès aux soins primaires, une amélioration de la répartition et de la coordination de l'offre de soins sur l'ensemble du territoire. Vous le voyez, c'est tout le système de santé qu'il faut refonder.
La santé n'est pas un luxe, c'est un droit. Un droit pour toutes et tous, y compris pour les étrangers malades qui séjournent sur notre sol.
N'oublions pas nos aînés, en particulier ceux qui perdent leur autonomie. La création d'une cinquième branche de la sécurité sociale ne devra pas être bradée au profit d'intérêts privés.
La santé n'est pas une marchandise. L'approche comptable donnant la part belle au secteur lucratif ne fait qu'aggraver les injustices et les inégalités.
Il existe d'autres remèdes, tournés vers le respect d'un pacte social fondé sur une réelle solidarité.
Tout au long de ces débats, nous, écologistes, exprimerons nos propositions. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous entamons aujourd'hui la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, moment majeur de notre vie parlementaire puisque nous sommes appelés à nous prononcer sur la somme considérable de 470 milliards d'euros pour les régimes obligatoires de base et le Fonds de solidarité vieillesse.
Chacun de nos concitoyens est concerné puisqu'il s'agit des dépenses prises en charge par la collectivité nationale concernant la santé, la retraite, la famille. Nous devons assurer leur financement et leur répartition sachant que les recettes dépendent de la situation économique et de l'emploi et qu'elles pèsent en outre sur le coût du travail.
Cette année, le contexte est un peu particulier. La crise économique n'est pas terminée, même si les prévisions de croissance sont meilleures, mais surtout nous venons de prendre des décisions importantes concernant notre régime de retraite et le financement de la dette sociale.
La réforme des retraites était indispensable en raison de données démographiques incontestables liées au phénomène du papy-boom et à l'augmentation de la durée de vie. La réponse démographique est juste. Elle sera progressive, avec un trimestre par an. Le chemin vers l'équité a été entamé. Il devra être poursuivi pour aller vers un régime universel à points ou à comptes notionnels impliquant l'extinction des régimes spéciaux.
Cette année, malgré une modeste augmentation des pensions en avril sur la base de l'inflation, le déficit prévisionnel sera de 8,6 milliards d'euros et celui du FSV de 3,8 milliards d'euros. Ces déficits ont été transférés à la CADES et sont donc financés. En principe, même si nous avons des doutes à ce sujet, l'équilibre financier est assuré jusqu'en 2018 grâce à un effort important de l'État, financé toutefois par la dette de celui-ci, ce qui n'est guère satisfaisant.
Les déficits jusqu'ici non financés de 2009 et de 2010 et le déficit prévisionnel pour 2011 viennent d'être transférés à la CADES, avec prolongation de sa durée de vie de 2021 à 2025 – dénoncée par le Nouveau Centre – et retrait de 0,28 point de CSG à la branche famille compensé par des taxes non pérennes, ce que nous ne pouvons approuver. L'article 9 devra être modifié et nous attendons l'amendement du Gouvernement. En revanche, nous approuvons le principe de l'utilisation du Fonds de réserve des retraites pour financer le déficit de la branche retraite d'ici à 2018.
La branche famille n'est décidément pas gâtée. Nous lui retirons un financement assuré pour le remplacer par un financement précaire alors qu'elle est déjà déficitaire.
Par ailleurs, cette branche fait l'objet de deux articles controversés.
D'abord, l'article 54, consacré à l'aide personnalisée au logement, prévoit de revenir sur la rétroactivité de trois mois pour prendre en compte la date de dépôt du dossier. Il conviendrait à tout le moins de prendre en compte la date de la demande car les conséquences du report de l'allocation peuvent ne pas être négligeables.
L'article 55 ensuite tend à reporter le versement de la prestation d'accueil du jeune enfant du premier jour du mois de la naissance de l'enfant au mois suivant. C'est là une mesure profondément mesquine. J'ai déposé un amendement de suppression de cet article, adopté à la quasi-unanimité par la commission. Je souhaite que le Gouvernement accepte cette suppression. Il n'en demeure pas moins que l'annexe B, pourtant fondé sur des données économiques plutôt optimistes, montre que le déficit de la branche famille est appelé à perdurer.
Si les déficits de la branche vieillesse et du FSV sont en principe couverts par l'utilisation du FRR, nous devons à l'avenir voter des budgets équilibrés pour les branches famille et maladie pour ne pas recréer des déficits à transférer à nouveau à la CADES, ce qui nécessiterait une nouvelle prolongation à raison de deux ou trois ans par année de déficit.
Il n'est pas possible de demander à nos enfants de payer nos propres dépenses. Cela implique, notamment pour l'assurance maladie, de veiller à l'efficience, mais surtout de prévoir des recettes équilibrant chaque année les dépenses sans reporter hypocritement le financement vers les assurances complémentaires ou le reste à charge, ce qui grève tout autant le pouvoir d'achat que l'augmentation de la CSG.
Pour l'assurance maladie, l'ONDAM 2010 est en voie d'être respecté, même si l'on note un dépassement modeste de l'enveloppe hospitalière et des augmentations assez importantes des transports sanitaires et des soins infirmiers. Cependant, de nombreux établissements publics, mais aussi privés, connaissent de réelles difficultés et le déficit des hôpitaux serait de l'ordre de 700 millions. Des jeux d'écriture au niveau des amortissements permettraient de cacher une réalité très délicate, comme semble le montrer la Cour des comptes.
L'ONDAM 2011 est prévu en augmentation de 2,9 % seulement, donc une augmentation modeste compte tenu du vieillissement de la population, des améliorations technologiques, de la nécessité d'investir. Cela représente cependant une augmentation de 4,7 milliards, ce qui n'est pas rien dans le contexte économique que nous connaissons, et une inflation très modérée. Cependant, l'évolution tendancielle est naturellement de l'ordre de 4 %. Pour tenir cet ONDAM qui ne sera que de 2,8 % pour les établissements et la médecine de ville, il faudra trouver des économies de l'ordre de 2,4 milliards. Cela ne se fera pas sans douleur.
Qui plus est, ces 2,8 % sont amputés d'emblée puisque vous mettez en réserve 500 millions et que la revalorisation des infirmières dans le cadre du LMD est comprise dans ce montant, de même que la revalorisation de la consultation à 23 euros.
Par ailleurs, le projet de loi a repris les propositions de M. Briet concernant le comité d'alerte, qui se prononcera en avril et septembre, avec un abaissement du seuil à 0,5 %. C'est pourquoi un amendement très intéressant a été débattu en commission, prévoyant que l'ONDAM s'applique à législation constante et que toute mesure nouvelle, notamment réglementaire, doit s'accompagner du financement correspondant.
Je ne reviens pas sur la construction de l'ONDAM qui ne se fait pas sur des bases médicales, sur les besoins de santé du pays, mais d'un point de vue économique.
En revanche, je désapprouve le principe du maintien des sous-objectifs. La création des ARS a eu le mérite de revenir sur la coupure absurde entre la prévention et le soin, la ville et l'hôpital, le sanitaire et le médico-social, avec un responsable unique de la santé au niveau régional. Il est donc absurde de continuer à voter des sous-objectifs qui contribuent à faire perdurer les séparations que la création des ARS devait supprimer.
La logique voudrait que nous votions désormais des enveloppes régionales, des ORDAM calculés sur des bases objectives donnant toute latitude aux ARS d'arbitrer en fonction des besoins régionaux, des coopérations, des réseaux.
Je ne suis pas contre.
Nous y viendrons sans doute un jour, mais que de temps perdu ! Comme le dit Yves Bur dans son rapport, citant Marguerite Yourcenar, il est dangereux d'avoir raison trop tôt. Décidément, M. Bur est un fin lettré, qui se réfère à des auteurs vendéens puisqu'il a déjà cité Clemenceau. (Sourires.)
Notre volonté, certainement unanime, est de permettre l'accès de tous à des soins de qualité – c'est l'un des buts de la loi HPST –, mais aussi à tarifs opposables.
Les dépassements d'honoraires demeurent un problème majeur et insupportable, surtout lorsqu'ils sont excessifs, ne respectant pas le fameux « tact et mesure ». Dans certaines régions et pour certaines spécialités, les patients ne peuvent avoir accès à des praticiens de secteur 1. Ce problème serait sans doute moins aigu si la CCAM clinique avait été mise en place, prévoyant notamment une visite annuelle longue, et si la revalorisation des actes suivait le coût des charges sociales, fiscales et assurantielles.
La loi HPST avait laissé aux partenaires un délai, jusqu'au 15 octobre 2009, pour mettre en oeuvre le secteur optionnel prévu depuis 2004. Un protocole a été effectivement signé entre l'assurance maladie, les complémentaires et les syndicats médicaux, mais vous n'avez pas voulu l'agréer, madame la ministre.
Parce qu'il était incomplet.
Certes, le secteur optionnel n'est pas la panacée. Me semble-t-il, l'ensemble des spécialités cliniques devrait être concerné. Mais il s'agissait d'un pas permettant de résoudre une partie des problèmes. Quand verra-t-il le jour ? D'ici là, devrons-nous nous contenter d'observer les dépassements en les déplorant ?
Une évolution des rémunérations est aujourd'hui souhaitée par beaucoup, avec notamment une part forfaitaire et une part à la performance. Le contrat d'amélioration des pratiques individuelles signé par de nombreux médecins prévoit ainsi un engagement à appliquer de bonnes pratiques, à développer la prévention, à assurer un meilleur suivi des patients. Le CAPI sera sans doute intégré dans la future convention, ce qui serait souhaitable.
J'espère donc qu'une nouvelle convention pourra être signée, précisant les engagements nationaux et laissant une certaine marge de manoeuvre au niveau régional. Lorsqu'une convention est signée, c'est bien que des accords ont été acceptés. Reporter de six mois l'application est incompréhensible, sauf si l'on veut retarder d'autant le coût financier. Un amendement voté prévoit de ramener l'application à trois mois. Pour ma part, je souhaite qu'un accord signé entre partenaires responsables soit d'application immédiate. Le report est incompréhensible, à moins de mettre en doute la responsabilité des signataires.
Certaines mesures du projet de loi sont étonnantes. Il en est ainsi de l'article 20 prévoyant de taxer les médicaments orphelins. Les maladies orphelines concernent, par définition, peu de patients pour chaque maladie. Pourtant, un traitement efficace est espéré. L'industrie n'a pas tendance à s'engager dans la recherche de médicaments qui ne concernerait que peu de personnes. Il est donc nécessaire de l'inciter. Taxer les médicaments orphelins pour une somme modeste est parfaitement contre-productif. Nous devrions, au contraire, tout faire pour aider la recherche et le développement de traitements des maladies orphelines. La commission a supprimé cet article. J'espère que le Gouvernement acceptera cette décision.
L'article 40 concernant les maisons de naissance est tout aussi incompréhensible. Alors que le Gouvernement, avec les fermetures des petites maternités, s'est engagé à assurer la sécurité, comment accepter les maisons de naissance ? Que des femmes souhaitent accoucher à domicile, voire dans leur baignoire, pourquoi pas ? C'est leur liberté. Mais que le Gouvernement préconise l'expérimentation de maisons de naissance est étonnant. Comment savoir a priori que l'accouchement se passera sans incident pour la femme et l'enfant ?
La commission, dans sa sagesse, a supprimé cet article qui, je l'espère, ne sera pas rétabli, sauf s'il place ces maisons au sein même des services de gynécologie obstétrique.
Plusieurs mesures concernent le financement qui va se traduire par un report vers les assurances complémentaires, lesquelles augmenteront leurs cotisations, ou vers le reste à charge.
On peut admettre la diminution du remboursement des médicaments à vignette bleue de 35 % à 30 %. La question est de savoir si ces médicaments sont efficaces ou non. S'ils le sont, ils méritent d'être remboursés. Depuis longtemps, je plaide pour un remboursement à la pathologie, certains médicaments étant indispensables pour certaines indications et pas pour d'autres. Ainsi, le Duphalac est indispensable pour l'encéphalopathie hépatique, mais ne l'est pas pour la constipation.
Il est prévu de taxer les contrats dits solidaires. J'avais compris que le Gouvernement avait souhaité favoriser le parcours de soins, l'engagement à suivre certaines préconisations. Taxer ces contrats à 3,5 %, outre que cela conduira les complémentaires à augmenter leurs cotisations et donc à peser sur le pouvoir d'achat, n'est-ce pas un signal contre-productif ?
Augmenter le seuil de 90 euros à 120 pour les examens techniques pris en charge à 100 % relève d'une logique économique. Je rappelle que le seuil en vigueur correspondait au K50. Celui-ci a-t-il été relevé dans la même proportion ? Il ne semble pas.
D'autres économies sont également envisagées, comme la limitation de l'utilisation des bandelettes glycémiques pour les diabétiques non insulinodépendants et les transports sanitaires pour les malades en ALD. Qu'un meilleur contrôle de la justification soit nécessaire, j'en suis tout à fait d'accord. Mais je mets en garde le Gouvernement car, pour une économie modeste, le dégât politique sera considérable. Souvenons-nous des conséquences de la mise en oeuvre de l'ordonnancier bizone par Philippe Séguin. Toutes ces mesures auront, en outre, une incidence sur les complémentaires santé.
Les affections de longue durée pèsent lourdement sur les dépenses de santé et sur l'augmentation de celles-ci. Vouloir les contrôler est justifié. Revoir l'entrée et la sortie peut se concevoir intellectuellement, mais en espérer des économies substantielles est étonnant, car une maladie encore bénigne ou guérie coûte peu. Sortir, comme il est envisagé, l'hypertension artérielle non compliquée peut avoir des conséquences graves – c'est ce que pensent beaucoup de cardiologues et de néphrologues. En effet, il est nécessaire de traiter et de suivre l'hypertension artérielle, qui peut avoir des conséquences importantes au niveau des vaisseaux, des yeux et des reins et conduire à l'insuffisance rénale. La petite économie réalisée aujourd'hui pourrait fort coûter bien plus cher demain.
Je ne comprends pas non plus pourquoi, alors que vous cherchez des économies, que vous souhaitez développer la chirurgie ambulatoire, que dans tous les pays les ophtalmologues, avec un cahier des charges précis, peuvent opérer en cabinet les cataractes, vous n'acceptez pas cette mesure par ailleurs réclamée par la CNAM. En France, cela concernerait 450 000 interventions.
Pourquoi le devis concernant les prothèses dentaires, dont le principe a été voté dans la loi HPST, pourtant d'application immédiate sans décret, n'est-il pas appliqué ? La loi prévoyait que soit mentionné le prix d'achat. Il semble, madame la ministre, que vous souhaitiez revenir sur ce prix d'achat pour mentionner le prix de vente.
La loi prévoit l'expérimentation de l'intégration dans le forfait des EHPAD des médicaments. Le bilan de l'expérimentation vous a été rendu. Il montrerait que la coordination a bien fonctionné entre le pharmacien référent et le coordinateur, mais que l'intégration des médicaments dans le forfait conduit à des effets pervers prévisibles : sélection des personnes, appel échappatoire à l'HAD ou transfert à l'hôpital plus coûteux. Il n'y a pas de corrélation entre pathos et coût du médicament. Il serait donc sage de renoncer à cette disposition ou d'en prolonger l'expérimentation pour les établissements qui resteraient volontaires.
La sécurité de la dispensation des médicaments est un problème majeur pour écarter les erreurs et la iatrogénie. La PDA constitue un progrès. Les décrets sont prêts depuis de nombreux mois. Pourquoi ne sortent-ils pas ?
Avant de conclure, je souhaiterais revenir sur les établissements de santé. Nous avons la chance d'avoir en France trois systèmes – les établissements publics, les établissements privés lucratifs, les établissements privés non lucratifs – que beaucoup considèrent comme un modèle. Ils ont failli disparaître dans la loi HPST, mais leur existence a été confirmée avec les ESPIC. Ils assurent les missions de service public sans dépassement d'honoraires. Cependant, ils sont soumis à un différentiel de charges sociales et fiscales de l'ordre de 6 %. Un coefficient correcteur a été envisagé, et même voté ici l'année dernière. Il serait justifié. J'espère que vous l'accepterez.
Enfin, j'avais déposé plusieurs amendements pour améliorer le sort des veufs et veuves en augmentant notamment le plafond de ressources, et le sort des orphelins. Malheureusement, ils n'ont pas passé l'obstacle de l'article 40.
Pour conclure, dans un contexte économique difficile et après le vote de la reprise de la dette sociale par la CADES et de la réforme des retraites, le Nouveau Centre souhaite qu'à l'avenir, les lois de financements de la sécurité sociale soient votées en équilibre pour ne pas recréer de nouveaux déficits.
Ce texte est important puisqu'il permet de financer les dispositions concernant la santé, la retraite et la famille. La branche famille est fragilisée par le prélèvement d'une partie de la CSG et par deux dispositions qu'il conviendrait de rectifier. Pour la santé, l'ONDAM est très volontariste.
Le Nouveau Centre souhaite que le texte soit amélioré pour permettre l'égal accès de tous à des soins de qualité, mais aussi à tarif opposable. Nous avons déposé soixante-dix amendements. Je souhaite que vous en acceptiez quelques-uns, car ils sont tous justifiés. Merci pour votre écoute et merci d'avance pour vos réponses.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma