La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à la défense.
La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial de la commission des finances de l'économie générale et du plan, pour la préparation de l'avenir, pour dix minutes.
M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial de la commission des finances de l'économie générale et du plan, pour la préparation de l'avenir. Monsieur le président, monsieur le ministre de la défense, mes chers collègues, l'actualité en témoigne : nous vivons dans un monde de surprises et d'incertitudes, dans lequel notre effort de défense et de prévention des risques est plus que jamais nécessaire.
Cette année, près de 50 % des réponses à notre questionnaire budgétaire sont classifiées – l'année dernière cette proportion n'était que de 35 % – : cela ne simplifie pas la tâche du rapporteur spécial.
Le budget de la mission « Défense » s'élèvera, en 2009, à 47,8 milliards d'euros d'autorisations d'engagement, et à 37,4 milliards de crédits de paiement. La hausse inhabituelle des autorisations d'engagement est destinée à faciliter les commandes globales de matériels, afin de bénéficier, grâce à un effet de série, des meilleures conditions d'achat.
La mission met en oeuvre un véritable plan de modernisation qu'il convient de saluer et qui se traduira par de nombreux redéploiements. La fermeture de quatre-vingt-deux unités, le transfert de trente-trois autres et la suppression totale de 54 000 emplois militaires et civils, d'ici à 2014, constituent un effort sans équivalent dans les autres administrations françaises.
À ce jour, la mission n'a subi aucune annulation de crédits, ce qui n'était pas arrivé depuis longtemps ; elle a trop souvent été traitée comme une variable d'ajustement budgétaire. Le niveau des reports de charges de 2,6 milliards d'euros tend toutefois à assombrir ce tableau.
Parmi les éléments positifs, il faut noter les efforts consacrés au renseignement. Le budget du programme « Environnement et prospective de la politique de défense » s'élèvera à 1,8 milliard d'euros en autorisations d'engagement, soit une hausse de 10 %, qui témoigne de l'indiscutable volontarisme du chef de l'État. Après l'augmentation du crédit impôt-recherche, les études amont bénéficient d'une hausse de crédits de près de 3 %. Le soutien aux exportations et à la diplomatie de défense reçoit également un coup de pouce.
Le renseignement est essentiel, car il ne sert à rien de disposer d'une des meilleures armées du monde si l'état-major n'a pas les moyens de savoir ce qui se passe de l'autre côté de la montagne. Cet été encore, nous avons constaté que l'absence de renseignements pouvait être lourde de conséquences. Ainsi, en quelques mois, la France a été prise en défaut à trois reprises : au Tchad, en février 2008 ; en Somalie, avec l'affaire du Ponant ; enfin, en Afghanistan, en août dernier. Dans les trois cas, aucun moyen aérien n'était disponible pour fournir au centre de commandement des images de la situation en temps réel.
La location dans l'urgence de drones d'origine israélienne révèle bien nos manques capacitaires. Le seul drone récent aujourd'hui opérationnel, le système SDTI, ne peut pas encore être déployé simultanément sur deux théâtres d'opérations : s'il est attendu au Kosovo, son déploiement en Afghanistan ne semble toujours pas être possible. Faute de crédits suffisants, la direction du renseignement militaire a d'ailleurs renoncé au drone HALE – HALE pour « haute altitude longue endurance » – et se contente du programme MALE – MALE pour « moyenne altitude longue endurance » -, dont les retards de mise en service s'accumulent.
L'armée a d'ailleurs reconnu que les drones avaient été les principales victimes de la loi de programmation militaire 2003-2008. Pendant la crise tchadienne de février, nos forces n'ont pu disposer, pour obtenir des images en temps réel, que d'un Transall du commandement des opérations spéciales. Chacun des vecteurs, satellites, drones et avions, est pourtant nécessaire pour pouvoir disposer de l'ensemble des capteurs.
Il faut également rappeler l'importance de l'intelligence économique. Dans la guerre économique mondiale, nous devons assurer la sécurité de nos entreprises qui produisent la richesse de notre pays. Il nous reste donc, en ce domaine, de gros efforts à faire pour égaler nos voisins anglo-saxons.
M. Louis Giscard d'Estaing, également rapporteur spécial pour la mission « Défense », abordera, dans un instant la question de la préparation et de l'emploi des forces et du soutien de la politique de défense, en traitant des problèmes de personnels et de fonctionnement. Pour ma part, je me consacrerai plutôt aux questions d'équipement.
Les crédits du programme « Equipement des forces » s'élèveront à 20,9 milliards d'euros en autorisation d'engagement et à 12,2 milliards d'euros en crédits de paiement. L'augmentation des crédits prévus en 2009 permettra la passation de commandes groupées. L'année 2009 sera marquée par des niveaux de commandes et de livraisons de matériel rarement atteints, monsieur le ministre ; nous pouvons donc vous remercier.
Le système de forces Dissuasion recevra une enveloppe de 2,9 milliards d'euros, qui permettra de poursuivre la modernisation des différentes composantes de la dissuasion nucléaire grâce aux missiles M51 dont un troisième et dernier lot sera commandé, et grâce aux missiles ASMPA, en cours de production. La construction du SNLE nouvelle génération, Le Terrible, qui pourra directement utiliser le missile M51, sera achevée ; ses essais à la mer devraient débuter prochainement. Le SNLE nouvelle génération Le Vigilant sera adapté au missile M51, et le Mirage 2000N sera mis au standard K3.
Le système de forces Engagement et combat sera doté de 11,9 milliards d'euros.
Dans le domaine aérien, la montée en puissance des escadrons de Rafale se poursuivra avec la livraison de quatorze appareils. Soixante autres exemplaires du Rafale seront également commandés, pour un montant de 4,7 milliards d'euros, ainsi que 1 000 armements air-sol modulaires.
Dans le domaine naval, seront commandés un deuxième sous-marin nucléaire d'attaque Barracuda, pour 1,4 milliard d'euros, de même que trois frégates multi-missions FREMM, pour 2,3 milliards ; s'y ajouteront 150 missiles de croisière navals.
Les quatre-cinquièmes du globe sont recouverts d'eau. La mondialisation a multiplié le trafic maritime et les échanges par voie navale ont pris une grande importance. L'une des missions des armées consiste à garantir la sécurité de ce commerce, celle de l'approvisionnement de notre pays et de nos ressortissants en mer, alors que les menaces se multiplient.
Dans le domaine terrestre, nos forces recevront huit hélicoptères de combat Tigre ; les livraisons de véhicules blindés de combat d'infanterie prévues, et celles d'équipements Félin pour fantassin permettront, respectivement, d'équiper un groupe tactique interarmes, et deux régiments.
Le système de forces Commandement et maîtrise de l'information bénéficiera d'une enveloppe de 2,1 milliards d'euros.
La priorité accordée à la fonction stratégique Connaissance et anticipation se traduit par le renforcement des moyens d'observation spatiale, avec la préparation du programme MUSIS, qui devrait être lancée en 2010. Les moyens de reconnaissance et de surveillance aérienne sont également renforcés, ainsi que des moyens de renseignement d'origine électromagnétique, notamment grâce à la rénovation des deux avions Transall Gabriel. La numérisation des forces se poursuivra et les moyens de communication par satellite seront renforcés.
Le système de forces Projection mobilité soutien recevra 1,3 milliard d'euros de crédits. Le financement du programme A400M, malheureusement en retard, se poursuivra tandis que le premier hélicoptère NH 90 sera livré à la marine nationale, probablement en fin d'année.
Je tiens d'ailleurs à appeler votre attention, monsieur le ministre, sur la masse des spécifications nationales qui ont été exprimées par chacun des pays ayant commandé cet hélicoptère.
C'est très juste !
M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. De ce fait, il n'y a jamais plus de quatre ou cinq appareils identiques sur une chaîne de production. Ainsi, les forces armées des États scandinaves, arguant de la grande taille de leurs pilotes, ont obtenu que le poste de pilotage de leurs appareils soit un peu plus grand que celui de la version livrée aux autres pays !
En effet.
M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Selon les responsables d'EADS, la chaîne de fabrication du NH 90 ressemblerait plus à un atelier d'artisanat à façon qu'à une chaîne d'assemblage industriel : on en arriverait à faire un travail d'artiste ! Ce problème mérite que nous y réfléchissions. J'insiste notamment sur la nécessité de restreindre les surspécifications nationales, en fait rarement justifiées, qui amoindrissent nos performances sur le marché.
De même, il faut limiter les intrusions à répétition de la sphère politique dans le processus industriel, même s'il semblerait que les autorités françaises, s'avèrent moins intrusives que les autorités allemandes, britanniques, espagnoles ou italiennes.
Malgré les inconvénients de ce travail multilatéral, la coopération européenne doit être poursuivie, tout d'abord parce qu'elle rapproche et fait travailler ensemble des personnels issus de différents pays, naguère ennemis et maintenant alliés et partenaires, mais aussi, parce qu'elle seule permet d'atteindre des masses critiques dans un domaine aussi particulier et coûteux que celui de la défense.
La liste des équipements qui devraient être soit commandés, soit livrés en 2009 est fort longue. Nous devrons être vigilants sur la date de livraison de l'Airbus A400M.
Monsieur Fourgous, merci de bien vouloir conclure.
M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Ce budget va dans le bon sens. Il tend notamment à améliorer le rapport entre dépenses opérationnelles et dépenses administratives, et leurs parts respectives de 40 et 60 % vont s'inverser. Je vous en félicite, monsieur le ministre.
Les crédits ouverts pour 2009 contribueront en outre à renforcer la compétitivité de nos industries de défense. Tous les ans, le marché mondial de la sécurité représente 250 milliards d'euros et croît de 10 %. Il faut donc donner un coup de pouce à nos industriels ; nous devons les aider à accroître leur compétitivité.
Ce budget permet également de mieux nous protéger et de préparer notre pays aux nouvelles menaces.
Monsieur Fourgous, votre temps de parole est épuisé.
M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. La modernisation de notre armée dépend de sa capacité d'innovation, mais aussi de la conclusion de partenariats ambitieux et des progrès de l'externalisation.
Ce budget est une première étape de l'ambitieuse loi de programmation militaire pour les années 2009 à 2014. La commission des finances a adopté les crédits de la mission « Défense » ; je vous invite à faire de même.(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues je vous demande de bien vouloir désormais respecter scrupuleusement vos temps de parole.
La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial de la commission des finances de l'économie générale et du plan, pour le budget opérationnel de la défense, pour dix minutes.
M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan pour le budget opérationnel de la défense. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission de la défense, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le programme 178 « Préparation et emploi des forces », dont je suis le rapporteur, est le plus important des quatre programmes de la mission « Défense ». Il recouvre notamment les aspects humains de nos forces – recrutement, rémunérations et charges sociales –, mais aussi l'entraînement, la projection, la disponibilité et les opérations extérieures.
En 2009, les crédits de ce programme bénéficieront d'une hausse substantielle, puisque les autorisations d'engagement s'élèveront à 22,4 milliards d'euros, en hausse de 6,3 %, les crédits de paiement, d'un montant de 21,8 milliards d'euros, enregistrant, quant à eux, une progression de 2,4 %. Ces augmentations témoignent de la volonté d'améliorer la condition matérielle des militaires, leur entraînement, ainsi que la disponibilité des matériels. Il est vrai que la bonne exécution du budget 2009 dépendra de celle du budget 2008. À ce jour, aucune annulation n'a été décidée et je souhaite, sans doute autant que vous, monsieur le ministre, que ce soit le cas jusqu'à la fin de cette année.
En application du plan de modernisation présenté le 24 juillet dernier par le Premier ministre pour faire suite au Livre blanc sur la défense et la sécurité, des réductions d'effectifs débuteront dès l'année prochaine. D'ici à 2014, 82 unités seront supprimées et 33 autres transférées. Dans le même temps, un renforcement opérationnel de 65 régiments et bases militaires est prévu, afin d'atteindre la masse critique recherchée.
L'armée de terre sera la première concernée. Ses effectifs seront réduits de 26 500 hommes et vingt régiments ou bataillons devront disparaître. L'armée de l'air perdra huit bases aériennes, notamment celles de Colmar, de Reims, de Metz ou de Cambrai. Quant à la marine, elle perdra 6 000 hommes, mais un seul de ses sites d'importance fermera : la base aéronavale de Nîmes-Garons.
En 2014, la défense aérienne de la France reposera sur une flotte de 350 avions de combat, dont 270 en ligne, armée de l'air et forces aéronavales confondues. Ce parc plus homogène sera constitué de Rafale F3 et de Mirage 2000D. Cette rationalisation a une contrepartie positive, puisque 65 unités bénéficieront d'un renforcement opérationnel ; 80 bases de défense, appelées à regrouper plusieurs unités dont les fonctions de soutien seront mutualisées, doivent être en effet être constituées d'ici à 2014. Certains régiments d'artillerie seront dissous, mais d'autres seront renforcés, et certaines unités de fantassins recevront le renfort de compagnies de combat. Ces restructurations, qui seront réalisées entre 2009 et 2014, devraient aboutir à une réduction globale du format des effectifs de 54 000 postes, effort d'autant plus significatif qu'il doit répondre au contrat opérationnel résultant du Livre blanc.
En contrepartie, la défense a obtenu de bénéficier directement du produit de la cession des implantations devenues vacantes. Toutefois, afin de dédommager les collectivités qui perdront des unités militaires, il est probable que nombre de biens immobiliers seront cédés pour un euro symbolique, ce qui réduira les rentrées financières escomptées. Sur cette question – je pense notamment aux cessions de fréquences –, je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, d'éclairer notre assemblée sur les perspectives finales pour 2008 et vos prévisions pour 2009.
Par ailleurs, je souhaite appeler votre attention sur deux sujets de préoccupation majeurs : les OPEX, c'est-à-dire les opérations extérieures menées par la France, et le maintien en condition opérationnelle du matériel, le MCO.
Depuis près de deux décennies, la France doit gérer en permanence non seulement la participation de plus de 10 000 militaires à des OPEX, mais aussi le prépositionnement d'environ 8 000 soldats dans des pays amis. Les effectifs participant aux OPEX fluctuent naturellement en fonction du contexte international. Ainsi, alors que l'évolution de la situation en Bosnie-Herzégovine avait permis le départ de la quasi totalité des troupes françaises, la déclaration d'indépendance du Kosovo a ravivé les tensions et requis un léger renforcement du dispositif dans ce pays.
En outre, la création de l'EUFOR au Tchad et le renforcement des effectifs présents en Afghanistan n'ont pas été entièrement compensés par la réduction de la présence militaire française en Côte d'Ivoire. Il en résulte une hausse de 5,8 % des effectifs déployés en OPEX. Le surcoût de ces opérations a encore vraisemblablement augmenté de 167,3 millions d'euros en 2008. Pouvez-vous nous le confirmer ?
Le projet de budget pour 2009 prévoit 525 millions de crédits pour les OPEX – 510 millions pour la défense et 15 pour la sécurité –, contre 475 millions en 2008 et 375 en 2007. Déjà en hausse de 100 millions en 2008, la budgétisation des OPEX augmentera ainsi encore de 50 millions en 2009. Les appels réitérés du Parlement, en particulier de la commission des finances de l'Assemblée, par la voix de son rapporteur général, à une plus grande sincérité dans ce domaine ont donc été entendus. En effet, les sommes inscrites sont en augmentation constante depuis 2003, où nous étions partis de zéro.
Les dépenses réelles ont toutefois continué à augmenter au cours des dernières armées, passant de 685 millions d'euros en 2007 à 852 millions en 2008. Les crédits inscrits en loi de finances ne correspondent donc qu'à la moitié des dépenses réelles des opérations extérieures. Pour maîtriser davantage cette charge financière, qui pourrait atteindre un milliard d'euros en 2009, j'appelle l'attention du Gouvernement sur la nécessité de faire participer d'autres pays à certaines OPEX auxquelles la France est partie prenante, mais qui sont menées sous mandat international.
En Côte d'Ivoire, où je me suis rendu en compagnie de Jean-Michel Fourgous, il est grand temps d'impliquer davantage les pays de l'Union africaine. Nous devons sensibiliser ceux-ci à leur responsabilité dans la résolution de la crise, qui dépend de l'aboutissement du processus électoral. Des troupes africaines participent déjà à l'ONUCI, l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire, mais l'essentiel de la préparation et de l'organisation des élections est assuré par le dispositif militaire français.
Au Tchad, où une opération européenne est en cours, il est également nécessaire de trouver d'autres relais parmi les pays de l'Union européenne. La France assure aujourd'hui la quasi totalité d'une logistique aérienne particulièrement coûteuse, alors que les opérations menées sur le terrain s'apparentent parfois davantage à une oeuvre humanitaire qu'à une opération militaire nécessitant des moyens importants.
Il faudra, en outre, mieux appréhender les possibilités de remboursement des opérations sous mandat international. Au Liban, par exemple, notre participation donne lieu à un remboursement, mais sous une forme et selon des critères qui nécessitent une véritable culture de la négociation avec les services de l'ONU.
Quant à notre dispositif de forces prépositionnées à l'étranger, il sera profondément remanié pour des raisons d'économies. Ainsi les implantations françaises en Allemagne seront réduites. Le 16e bataillon de chasseurs, actuellement basé à Saarburg, sera transféré à Illkirch dans le Bas-Rhin. Il reste à décider de l'avenir du 110e régiment d'infanterie et du 3e régiment de hussards, qui appartiennent à la brigade franco-allemande. Des discussions sont en cours avec l'Allemagne. À ce propos, je tiens à souligner que le surcoût de nos forces prépositionnées en Allemagne, avec 160 millions d'euros, représente 50 % du total du surcoût des forces prépositionnées.
La présence militaire française en Afrique, qui s'appuie sur quatre bases – au Sénégal, en Côte d'Ivoire, au Gabon et à Djibouti – fait également l'objet d'une importante réorientation, qui concernera notamment le 43e bataillon d'infanterie de marine présent à Abidjan. La France ne conserve, pour l'instant, que deux des trois bases situées sur la façade atlantique de l'Afrique : celles de Dakar et du Gabon. Quant à celle de Djibouti, située sur la côte est du continent, elle se trouve à proximité d'un axe essentiel du commerce maritime mondial et des champs pétrolifères du Moyen-Orient.
Selon les préconisations du Livre blanc, une de ces trois implantations devrait disparaître. Compte tenu du contexte géopolitique, la pérennité de l'implantation française à Djibouti paraît s'imposer, bien qu'il soit question d'installer une nouvelle structure militaire aux Émirats arabes unis. Il faudra prendre en considération les surcoûts de notre présence à Djibouti, notamment le versement de 30 millions d'euros de taxes et redevances.
J'en viens maintenant à la disponibilité du matériel, qui conditionne le caractère opérationnel de nos forces.
La marine est la seule armée qui dispose d'un bon taux de disponibilité, compris entre 70 et 90 %. Toutefois, notre porte-avions est indisponible à 100 %, puisqu'il est actuellement immobilisé pour quinze mois et ne reprendra ses essais en mer que dans quelques semaines.
La situation est plus délicate pour l'armée de terre. Ainsi, le taux de disponibilité du véhicule blindé AMX-10 RC ne dépasse pas 53 % et celui des hélicoptères Puma et Gazelle est compris entre 45 % et 70 %. Plus préoccupants encore sont les problèmes techniques persistants du char Leclerc, qui limitent sa disponibilité au tiers du parc. Cependant, une partie d'entre eux a été volontairement mise « sous cocon ». La quinzaine de chars déployés au Sud Liban démontrent – j'ai pu le constater – la qualité de ce matériel, mais force est de reconnaître que le coût de son MCO, notamment sur ce type de terrain, est élevé.
Un important motif de satisfaction réside dans le fait que la disponibilité du Rafale, en service depuis maintenant deux ans, s'est sensiblement améliorée, passant de 45 % en 2006 à 50 % en 2007 et à 65 % en 2008. Une formule satisfaisante de gestion des pièces détachées a en effet été trouvée avec le fournisseur.
En revanche, la situation devient critique en matière de transport et de ravitaillement, pourtant indispensables au soutien de nos forces sur des théâtres éloignés des voies maritimes, comme l'Afghanistan et le Tchad. Ainsi, les Hercule C130 ne sont disponibles qu'à 60 % et les Transall à 52 %. Le nombre de ces appareils se réduit également en raison du vieillissement du parc. Il est donc impératif d'adopter une solution de transition en attendant la livraison retardée de l'A400M.
Avant de conclure, monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la situation des réserves opérationnelles. Une diminution significative des crédits qui leur sont alloués présenterait un risque majeur, pour deux raisons. À un moment où la réserve opérationnelle ne dispose plus de « réservoir » naturel de recrutement parmi les élèves officiers de réserve, il convient en effet à la fois de fidéliser ceux qui sont engagés dans cette voie et d'accroître l'attractivité pour de nouvelles recrues disposant de formations supérieures ou spécialisées recherchées, conformément au diagnostic du Livre blanc sur la défense et la sécurité.
En conclusion, le projet de budget pour 2009 devrait permettre de relever trois défis majeurs : la mise en oeuvre de la première annuité du plan de modernisation de la défense ; l'amélioration de l'entraînement de nos forces, dont l'actualité nous a cruellement rappelé à quel point elle était nécessaire, malgré les problèmes de disponibilité des matériels et la volatilité des prix des carburants ; enfin, l'amélioration du maintien en condition opérationnelle du matériel. Sur ce dernier point, les problèmes liés à la jeunesse de certains matériels commencent à s'estomper, mais les retards des programmes d'hélicoptères de transport NH90 et d'avions A400M conduiront à maintenir en activité plus longtemps que prévu des Puma et des Transall, dont certains ont déjà plus de trente-cinq ans de service.
Sous réserve des précisions que vous voudrez bien nous apporter, monsieur le ministre, j'émets donc un avis favorable au budget opérationnel des forces pour 2009 et j'invite notre assemblée à l'adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, pour dix minutes et pas une seconde de plus. (Sourires.)
M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial. A peine 40 secondes !
Mme Patricia Adam. Pourquoi êtes-vous aussi strict avec M. Boucheron ?
Je vous rassure, ma chère collègue : cette précision vaut pour tout le monde.
Vous avez la parole, monsieur Boucheron.
M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si j'avais à qualifier ce budget, je dirais que c'est celui du retour au monde réel. Nous commençons en effet à construire l'armée réelle, après avoir trop longtemps couru derrière l'armée rêvée. Cela traumatisera quelques stratèges ou certains bureaux d'études qui se nourrissent d'illusions budgétaires.
Ce budget est marqué par les trois incertitudes majeures de la période : les conséquences de la crise financière, élément de déstabilisation stratégique ; l'évolution de la situation afghane et la mutation nécessaire de la stratégie de la coalition ; la nouvelle politique américaine et les espérances qu'elle fait naître d'un rapport moins arrogant de l'Amérique au reste du monde.
Monsieur le ministre, votre politique budgétaire devait relever cinq défis : le dynamitage de la bosse financière, la gestion sociale de la RGPP, l'inflation otanesque et la relance européenne, l'adaptation de l'outil aux vraies menaces opérationnelles et la nécessité pour l'État de revoir son rapport à nos industriels, dont certains traversent des difficultés qu'il ne faudrait surtout pas sous-estimer.
Le monde réel, c'est d'abord celui de nos finances. Ainsi, vous tentez de sortir des modèles virtuels d'armée inadaptés à nos finances et aux menaces et vous freinez les commandes de programmes coûteux, hérités de la guerre froide et consommatrices de masses financières aussi insurmontables que paralysantes.
Le monde réel, c'est aussi la réalité des alliances, avec une PESD totalement en panne, malgré la priorité affichée par la présidence française de l'Union, et une OTAN affaiblie conceptuellement par des élargissements inconsidérés et son utilisation au service exclusif des intérêts stratégiques de l'équipe Bush.
Le monde réel, c'est la réalité des OPEX, qui sont de moins en moins des actions d'observation, d'interposition ou de protection, et de plus en plus des actions de guerre confrontées aux menaces asymétriques, aux attaques suicides et à la criminalité transnationale. Je cite pour mémoire les nouveaux défis que sont la piraterie, la cybercriminalité et la protection de nos flux de communication spatiaux.
Le monde réel, c'est également la synergie des crises d'un occident en difficulté, perçu comme matérialiste, arrogant, peu respectueux des ressources naturelles et vivant dans une totale irresponsabilité financière, un occident aujourd'hui coincé entre les pays qui refusent son système et le combattent par le terrorisme et ceux qui l'adoptent jusqu'à la caricature par des enrichissements illégitimes et des développements incontrôlés. La France est très loin d'être la première responsable de cette situation, mais elle n'en est pas moins associée, amalgamée à cette vision du monde occidental. À nous de démontrer qu'entre l'intégrisme et le poker financier, il existe d'autres perspectives pour la jeunesse du monde.
Votre budget s'élève à 32 milliards d'euros, en augmentation de 5,4 %. C'est un bon budget, même s'il compte 1,6 milliard de recettes exceptionnelles, peau de l'ours mille fois vendue.
Ah non !
M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis. Il intègre la RGPP, dont on ne peut qu'approuver le principe, dès lors que l'intégralité des économies de fonctionnement engendrées financeront le titre V. Les 8 000 suppressions de postes nettes – 6 000 militaires et 2 000 civils – ne seront acceptables que si elles si elles s'inscrivent dans le cadre d'une redéfinition des missions et d'un accompagnement social adapté. Je salue au passage la budgétisation triennale glissante, qui nous permettra de travailler au plus près des réalités. Si l'on met de côté le service de la dette, le budget de la défense est le deuxième budget de l'État, derrière celui de l'éducation nationale, qui en représente le double.
Je laisse aux rapporteurs de la commission des finances le soin d'analyser les recettes exceptionnelles. Avaler les pics de paiement de la gestion précédente est une bonne chose, mais il est risqué de les financer avec des cessions immobilières calculées avant la chute des prix, en pariant sur la cession de fréquences radio aléatoires et en sous-estimant les coûts des déménagements et l'explosion prévisible du projet Balard.
Le différentiel avec l'ancienne programmation est au moins de 4 milliards d'euros, monsieur le ministre. Vous conviendrez avec moi que l'abandon du deuxième porte-avions ne bouche pas totalement le trou. Quels sont donc les autres arbitrages ? La seule faiblesse de ce budget réside dans cet improbable équilibre.
Je passe sous silence les OPEX que Bercy finance à 50 % de leur montant probable en 2009 – 560 millions d'euros au lieu de 833 en 2008 –, l'accompagnement social des restructurations calculé un peu juste et l'explosion du maintien en condition opérationnelle – 2,9 milliards d'euros – qui pose le vrai problème de la conception de nos matériels.
Je vais simplement, monsieur le ministre, proposer quelques commentaires sur une série de sujets sensibles.
En ce qui concerne le renseignement, je salue l'effort de création de 140 postes à la DGSE et l'augmentation de 60 % de sa dotation en matériel, ainsi que la création du conseil national du renseignement, coordonnant la DGSE, la DRM, la nouvelle DCRI, la DPSD, les douanes et TRACFIN. Je me félicite également du rapprochement de la DGSE et de la DCRI pour la lutte antiterroriste.
Il n'y avait pas eu des réformes aussi profondes depuis le ministère Joxe des années quatre-vingt--dix. Cette réforme mérite de faire l'unanimité sur nos bancs et permettra, je l'espère, d'augmenter les performances vers la connaissance du trafic d'armes, la protection de nos technologies sensibles, la surveillance des fonds souverains et des paradis fiscaux. Les projets MUSIS et CERES complètent ces moyens en donnant une perspective européenne de long terme.
Pour ce qui est des OPEX, il nous faut réfléchir à nos priorités. Actuellement, le Liban coûte 79 millions d'euros, le Kosovo 103 millions d'euros, la Côte d'Ivoire 116 millions d'euros, le Darfour 230 millions d'euros, l'Afghanistan 270 millions d'euros. Mes chers collègues, pensez-vous que ces chiffres reflètent nos priorités politiques ? Personnellement, je n'en suis pas sûr et c'est pourtant la vraie question.
Saluons le phénomène rare que constitue la fin de l'OPEX en Bosnie. Cependant, n'oublions pas que la part civile sera de plus en plus importante : il faudra envoyer sur place des gendarmes, des juges, des médecins, des instituteurs.
Pour nos industriels, c'est peu de dire que les clignotants ne sont pas au vert. Les ingénieurs de l'A400 M sont mobilisés sur l'Airbus et on ne connaît pas vraiment le maître d'oeuvre de son moteur ; les mises au point du NH90 marine sont interminables ; les drones ont du mal à voler en dehors du SIDM qui marche parfaitement – avec cinq ans de retard.
M. Yves Fromion, rapporteur pour avis. C'est faux !
M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis. Comment c'est faux ?
M. Yves Fromion, rapporteur pour avis. Le Sperwer fonctionne parfaitement ! Il a été utilisé en Afghanistan !
Mes chers collègues, pas de dialogue !
M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis. Comme exemple de réalisation européenne, vous repasserez, cher collègue !
Le temps nous a donné raison et nous n'avons finalement pas à regretter de ne pas être monté sur le radeau de l'Eurofighter, dont la catastrophe financière et technique s'annonce majeure. L'ISF, dont le général Petraeus annonce l'arrêt, était un piège tendu à la France, qui se referme maintenant sur ceux qui y ont participé. Profitons-en pour saluer ici les performances opérationnelles du Rafale, dont on dit qu'elles sont le double de celles du Mirage-9. Il n'en reste pas moins, monsieur le ministre, qu'EADS souffre encore des conséquences de l'interventionnisme intempestif de l'ancien Président de la République, d'un regain du nationalisme industriel interne et d'une priorité donnée aux clients privés par rapport aux clients étatiques.
En ce qui concerne la DGA, je crois à la nécessité d'arbitrer entre la réponse aux besoins opérationnels des armées et celle du soutien au secteur recherche et au développement. Les armées ne peuvent indéfiniment attendre d'improbables et coûteux prototypes. Il est nécessaire de livrer à nos forces les équipements utiles sur les terrains de la guerre, là ou elle a lieu.
En ce qui concerne l'OTAN, la position franco-allemande arrêtée à Bucarest était juste. Il s'agit de stopper un élargissement inconsidéré aux conséquences juridiques incertaines et vécues par la Russie comme une tentative américaine d'étouffement. Le bouclier antimissile est à remiser au placard des provocations inutiles.
M. Philippe Vitel. Et l'Iran ?
M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis. Cette initiative est dangereuse pour l'Alliance et pour l'Europe, il est temps de considérer définitivement la Russie comme un partenaire et non comme un adversaire.(Murmures sur divers bancs du groupe UMP.)
En Afghanistan, deux opérations distinctes cohabitent : celles menées par la coalition et Enduring freedom. Un renforcement très important de l'effort américain dans cette zone est imminent. Nous ne devrons pas nous laisser entraîner dans une stratégie de technologisation de la guerre conforme au dogme du zéro mort américain ; on sait qu'il y en a eu 500, sans compter les victimes civiles afghanes.
La situation de l'Europe de la défense démoraliserait les optimistes les plus forcenés.
Mais non !
M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis. Nous verrons !
Pour le Président de la République, c'est l'une des priorités de la présidence française. Il vous presse donc d'annoncer une série de mesures tellement nombreuses qu'elles donnent le sentiment de cacher l'absence de progrès politique majeur dans ce domaine.
La France et la Grande-Bretagne représentent 50 % des dépenses militaires de l'Europe et 75 % des dépenses de recherche et développement. Toute la problématique est dans ces deux chiffres : nous sommes liés financièrement à la Grande-Bretagne, qui ne veut pas d'Europe de la défense et qui, épuisée par sa participation à la guerre d'Irak, est contrainte de racheter à un prix exorbitant sa nouvelle force de dissuasion sur les étagères américaines.
Merci de conclure, monsieur Boucheron.
M. Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis. Je vais conclure, monsieur le président.
L'Allemagne n'a fait aucun effort financier et elle est hésitante sur le principe du passage des OPEX de présence aux OPEX d'action. Le grand projet qu'on attend est l'état-major européen et sa capacité de planification autonome.
Monsieur le ministre, dans le contexte international, l'Europe apparaît un peu plus sage, un peu plus respectueuse de l'homme, un peu moins impériale. Il est illusoire de penser que ses seules qualités lui permettront d'exister. Elle doit aussi peser sur les rapports de force. Il faut que chacun soit convaincu que, pour faire entendre notre voix, nous devons, entre autres moyens, disposer des forces réellement opérationnelles et adaptées aux conflits difficiles.
En conclusion, le budget de la défense est l'un des éléments de la posture internationale de la France. Il est constitutif de notre influence politique, dont personne ne peut évaluer les retours. Le monde dans lequel nous entrons est un monde dont les ressources naturelles seront de plus en plus rares et disputées, un monde de grandes tensions. Ce budget tente de dégripper une machine budgétaire bloquée et d'entreprendre des réformes que beaucoup attendaient depuis longtemps. C'est un pari difficile. Personne ne peut vous reprocher de le tenter et la commission des affaires étrangères en espère le succès.
La parole est à M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le soutien et la logistique interarméees, pour cinq minutes.
M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le soutien et la logistique interarméees. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette année encore, j'ai l'honneur de vous présenter l'avis budgétaire de la commission de la défense portant soutien et logistique interarmées.
Comme vous le savez, le projet de loi de finances pour 2009 de la mission « Défense » s'inscrit dans un contexte de réformes de fond, impulsées par la révision générale des politiques publiques et par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.
Le soutien et la logistique interarmées rassemblent les actions du programme 212 « Soutien de la politique de défense » et l'action « Logistique interarmées » du programme 178 « Préparation et emploi des forces ». Ces différentes actions regroupent les fonctions de soutien transverses, telles que le secrétariat général de l'administration ou les services de santé et des essences des armées. Ce rôle crucial montre la responsabilité qui est la nôtre de veiller à ce qu'ils disposent des moyens suffisants pour exercer leurs missions, mais aussi de mener un suivi attentif des réformes nécessaires dont ils sont l'objet.
Cet avis est, comme l'année dernière, décomposé en deux parties distinctes, consacrées respectivement aux fonctions de soutien et à celles de logistique.
La première partie rassemble les crédits du programme 212, qui connaît d'importants changements de périmètre dans le projet de loi de finances pour 2009. Au titre des transferts entrants, le programme 212 intègre deux nouvelles actions issues du programme 167 et relevant de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation, à savoir « Promotion et valorisation du patrimoine culturel » et « Communication ». Cela représente plus de 90 millions d'euros d'entrées en autorisations d'engagement. Si la vocation transverse de la sous-action « Communication » justifie son entrée dans le programme 212, il n'est en pas forcément de même pour la sous-action « Promotion et valorisation du patrimoine culturel ».
À côté de ces transferts s'ajoute la création d'une nouvelle sous-action au sein du programme 212, à savoir « Restructurations », abondée à hauteur de 300 millions d'euros d'autorisations d'engagement. Il s'agissait d'un engagement du Gouvernement, qui est tenu.
Symétriquement, le programme a connu des transferts sortants, d'un montant bien plus élevé. Je constate en effet que, en un an, les autorisations d'engagement de ce programme ont connu une diminution conséquente, de l'ordre de 25 %, passant de 3,5 milliards d'euros à 2,6 milliards d'euros, laquelle s'explique par la sortie de la contribution au fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État, ce qui représente 900 millions d'euros, ainsi que par le transfert de dépenses d'infrastructure assurées par le compte d'affectation spéciale immobilier.
Ce compte est notamment abondé par des cessions immobilières – 972 millions d'euros – et des cessions de fréquences : 0,5 milliard d'euros. Cela signifie que ce budget repose en grande partie sur des recettes exceptionnelles. Nous pensons que ce montage n'est concevable qu'à titre transitoire et de façon décroissante. Pour cette année, il nous semble que, compte tenu des efforts demandés à toutes les administrations, le dispositif doit être validé. Il permet en effet au programme 212 d'atteindre l'essentiel de ses objectifs ; par ailleurs, le Gouvernement nous a assurés de son caractère exceptionnel.
Le périmètre de l'avis « Soutien et logistique interarmées » regroupe également une partie des sous-actions composant le programme 178, à savoir la sous-action « Commandement interarmées » et l'action 5 portant logistique interarmées.
Pour ce qui est des actions menées en 2008 au titre de cette action, je relève les points suivants : la réalisation des objectifs de certification interarmées, qui permettent à la France de participer pleinement à des opérations multinationales, en particulier dans le cadre européen ; la participation des fonctions de soutien à l'effort de rationalisation par la contraction des effectifs ; l'allocation de moyens importants pour la mise en oeuvre de la réforme de carte militaire. Cette réforme est nécessaire. Elle conduira à la création de bases de défense. C'est le sens de la nouvelle sous-action « Soutien des forces par les bases de défense », abondée à hauteur de 79 millions d'euros en autorisations d'engagement et 83 millions d'euros en crédits de paiement.
L'avis budgétaire que je vous soumets propose des pistes de rationalisation supplémentaires.
Tout d'abord, il serait utile d'encourager, dès 2009, une intégration plus poussée du service des essences de la marine au service des essences des armées.
Deuxièmement, il y aurait intérêt à examiner en profondeur le dispositif de garantie des tarifs pétroliers. Il ne couvre que 15 % des achats de carburants, ce qui le rend peu efficace, et est soumis aux contraintes lourdes du code des marchés publics, ce qui le rend coûteux.
Enfin, il sera particulièrement intéressant de faire le point sur la place et les moyens spécifiques qu'il convient d'accorder aux réservistes, en particulier au sein du service de santé des armées.
La période que nous connaissons se caractérise par d'importants changements, guidés par la recherche d'une efficacité croissante. Il s'agit d'un processus naturel d'amélioration du fonctionnement des services, dont la militarisation du SEA est symbolique, et en rien d'une remise en cause de leur compétence, le service de santé des armées étant souvent cité en exemple.
Mes chers collègues, avant de conclure mon propos, je tiens à saluer les personnels administratifs et de soutien, trop souvent cantonnés dans l'ombre. Chacun d'entre nous a en mémoire la tragique embuscade survenue les 18 et 19 août, en vallée d'Uzbin, en Afghanistan. Comme vous le savez, le 8e RPIMa de ma chère ville de Castres en a payé le plus lourd tribut.
Veuillez conclure, monsieur le rapporteur.
M. Philippe Folliot, rapporteur pour avis.Je conclus, monsieur le président.
J'ai pu, à cette occasion, constater le caractère exemplaire de la prise en charge des blessés par le SSA, du lieu de l'accrochage jusqu'aux hôpitaux parisiens, et le travail remarquable mené par les services du ministère de la défense pour prendre en charge et accompagner les victimes et leurs familles. Je tiens, en votre nom, à leur rendre un hommage tout particulier et je suis convaincu, monsieur le ministre, que vous saurez vous en faire l'écho.
Mes chers collègues, dans le contexte économique et budgétaire difficile que nous connaissons, ce budget permet de maintenir l'essentiel de l'effort d'équipement tout en conduisant les réformes nécessaires à la modernisation de nos armées.
Après examen attentif des propositions pour 2009, je vous propose, à l'instar de la commission de la défense et des forces armées, d'adopter ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Yves Fromion, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour l'environnement et la prospective de la politique de la défense, pour cinq minutes.
Je compte sur vous, monsieur Fromion.
M. Yves Fromion, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour l'environnement et la prospective de la politique de la défense. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Livre blanc donne une visibilité particulière au programme 144. En effet, celui-ci recouvre le périmètre de la fonction « Connaissance et anticipation » dont le Livre blanc fait une priorité fondatrice de notre politique de défense et de sécurité. Cela vaut tout particulièrement pour le renseignement et la recherche de défense, sur lesquels je vais centrer mon intervention.
S'agissant du renseignement, l'effort budgétaire est réel. Alors qu'en 2008, la progression des dotations était des plus modestes, avec 0,3 % en autorisations d'engagement et 2,5 en crédits de paiement, le projet de loi de finances pour 2009 prévoit une augmentation de 22,5 % pour les autorisations d'engagement et de 7,2 % pour les crédits de paiement.
Ces mouvements permettent la création nette de 51 postes au bénéfice de la DGSE, les créations envisagées au cours de la prochaine loi de programmation s'élevant au total à 690 postes. Il s'agit de recruter les personnels très qualifiés, indispensables au fonctionnement des équipements de recueil du renseignement technique, ainsi qu'à l'analyse des données recueillies. Ils autorisent également une progression de 12,6 % des crédits de fonctionnement de la DGSE, ce qui permettra de faire face aux dépenses induites par les nouveaux équipements, et enfin une hausse de 22,2 % des dépenses d'investissement de la DGSE en crédits de paiement et de 94,5 % en autorisations d'engagement, qui augure bien de la capacité ultérieure du service à faire face à l'augmentation considérable des besoins en matière de renseignement technique. Il faut souligner à cet égard que les flux interceptés ont connu une augmentation exponentielle, d'un rapport de un à mille en dix ans. La DRM et la DGSE vont approfondir leur politique de mutualisation des équipements dans ce domaine.
J'en profite d'ailleurs pour adresser ici remerciements et compliments aux personnels de nos services de renseignement pour leur efficacité et le dévouement dont ils font preuve ; nous pouvons être fiers d'eux.
J'en viens à la recherche de défense, et je dois malheureusement constater que la situation est moins satisfaisante sur ce point. Si le Livre blanc souligne son rôle stratégique, on peut déplorer qu'on n'en ait pas tiré les conséquences en fixant un objectif mobilisateur. Alors que ce document a décrit dans le détail les cibles à atteindre s'agissant des matériels devant être mis à la disposition des forces, il n'a malheureusement déterminé aucun objectif d'engagement financier souhaitable pour la recherche. Une telle démarche aurait pourtant eu le mérite de donner une visibilité politique beaucoup plus forte à l'impératif de renforcement de la recherche de défense, à l'horizon des deux prochaines lois de programmation. Un objectif d'un milliard d'euros pour les études amont s'impose à mon sens, compte tenu de l'effort considérable engagé par certains de nos partenaires et de l'émergence de nouveaux acteurs particulièrement dynamiques et ambitieux.
Or le projet de loi de finances pour 2009 ne prévoit pas de véritable rupture s'agissant des crédits d'études amont, pour lesquelles est prévue une progression modeste de 2,4 %. À l'exception des études amont nucléaire, les autres catégories d'études voient au mieux leurs dotations stabilisées, comme pour l'espace, quand elles ne baissent pas légèrement, ce qui est le cas des « autres études amont ». De fait, la rareté des ressources en matière de R&T va conduire la DGA à davantage séquencer ses projets.
Ce n'est pourtant pas le moment de baisser la garde. Face à la réduction du format des armées et à l'étalement des programmes d'armement, la recherche est l'un des seuls moyens de maintenir les compétences acquises par les industriels français dans un très large spectre de domaines. Elle constitue aussi un véritable outil de dissuasion stratégique en adaptant par anticipation nos équipements aux menaces, permettant ainsi à notre pays de tenir sa place dans ce qu'il convient de nommer la course à la suprématie technologique. Les États-Unis la mènent depuis longtemps avec succès, l'Union soviétique en a fait les frais, mais d'autres acteurs émergents, comme la Chine, ne doivent pas être négligés. Au demeurant, même si une augmentation des moyens est souhaitable, elle ne permettra pas à elle seule de faire face à ce défi ; il est donc nécessaire d'accroître l'efficacité de notre outil de recherche et, pour cela, trois pistes doivent être poursuivies.
Il faut, en premier lieu, intensifier la coopération européenne en la matière ; je pense, monsieur le ministre, que vous nous en direz quelques mots. L'Agence européenne de défense est sur le point de rendre publique sa stratégie de R&T ; elle doit jouer un rôle de pépinière de projets. Il faut cependant être réaliste : compte tenu de l'extrême concentration des budgets de R&T de défense en Europe, l'essentiel des programmes majeurs en coopération continuera longtemps encore de concerner un nombre réduit d'acteurs, d'où l'importance de notre rôle, à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne.
Le deuxième axe d'effort porte sur une optimisation des synergies entre recherche civile et recherche militaire. Cela passe par une meilleure association des différents acteurs ; de ce point de vue, l'équipe Défense installée au sein du CNES a permis des réalisations intéressantes, tout en améliorant les relations entre le ministère de la défense et le CNES. Par ailleurs, une utilisation plus souple des crédits du programme 191 « Recherche duale » permettrait d'en faire une réserve destinée à favoriser de manière réactive la mise en place de projets de recherche duaux intéressant la défense. Une autre voie de progrès en matière de R&T duale consisterait enfin à rendre éligibles aux crédits du programme cadre de recherche et développement de l'Union européenne certains sujets concernant la défense et la sécurité. Les esprits ont beaucoup évolué en la matière, et la Commission pourrait n'y être plus hostile.
Il faut en troisième lieu mettre l'accent sur les technologies et secteurs de souveraineté. Le domaine des composants électroniques est sans doute le plus critique pour l'autonomie européenne, en raison d'une dépendance presque complète à l'égard des fournisseurs extra-européens et de leur soumission à la réglementation américaine ITAR. Limiter les effets d'une telle dépendance doit être l'un de nos axes d'effort prioritaires, et l'AED a certainement vocation à jouer là un rôle moteur.
Un mot enfin du secteur spatial, qui mérite une attention spéciale, car il est également un domaine de souveraineté critique.
La stagnation des crédits d'études amont prévue en 2009 en la matière ne constitue pas un bon signal, et il faudra veiller à ce que les années ultérieures permettent de revenir à un niveau plus compatible avec le degré de performance exigé par les futurs systèmes spatiaux.
Contraint par la force de m'acheminer vers ma conclusion, je vous engage, chers collègues, en vertu des progrès significatifs enregistrés par les financements du programme 144 à suivre l'avis positif de la commission de la dépense et à voter unanimement pour l'adoption des crédits du programme « Environnement et prospective de la politique de défense ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Défense
La séance est suspendue pour quelques instants.
(La séance, suspendue à dix heures vingt, est reprise à dix heures trente.)
La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-Louis Bernard. rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour les forces terrestres, pour cinq minutes.
M. Jean-Louis Bernard, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour les forces terrestres. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, 2008 a été une année particulièrement difficile pour l'armée de terre, avec le dramatique accident de Carcassonne et la tragique embuscade en Afghanistan. La mort de dix soldats en opération extérieure doit rappeler à l'ensemble de nos concitoyens que, même si nos forces interviennent principalement dans le cadre d'opérations de maintien de la paix ou de sécurité civile, elles sont aussi engagées dans des zones de combat intense, avec de véritables opérations de guerre.
Lors de mes auditions et déplacements, j'ai mesuré l'impact de ces événements sur les personnels, mais nos soldats ne marquent ni abattement ni renoncement. Ils réaffirment leur engagement et leur volonté de servir leur pays, y compris dans des conditions difficiles.
Ils bénéficient des meilleurs équipements disponibles. Certes il est toujours possible de les améliorer, mais les armées savent que les choix que nous sommes amenés à faire interviennent dans un contexte budgétaire contraint et que tout ne peut pas être immédiatement corrigé.
J'en viens aux grandes orientations pour l'armée de terre dans le projet de loi de finances pour 2009.
Ce budget atteint 9,24 milliards d'euros, les crédits de personnel demeurant le premier poste de dépense avec 7,5 milliards d'euros. Plus de 600 millions d'euros seront consacrés à l'entretien des matériels. Pour les équipements, l'armée de terre engagera près de 3,5 milliards d'euros en 2009.
Ce budget intervient en même temps qu'une réforme d'ampleur du ministère de la défense. Tous les services vont participer aux économies ; l'armée de terre contribuera de manière très importante aux efforts. Quatre des treize régiments d'artillerie seront dissous, ainsi que trois des onze régiments du génie. En outre, de très nombreuses unités de l'armée de terre seront déplacées, ce qui conduira à abandonner une trentaine de garnisons en métropole. Ces mesures auront un impact important sur les territoires. La réduction programmée est très nettement supérieure à celle qui découlait de la professionnalisation.
Cette restructuration exigera le déploiement d'importants dispositifs d'accompagnement des personnels. Il importe de maintenir un recrutement attractif, en particulier pour les militaires du rang qui constituent la base opérationnelle de l'armée de terre. Plusieurs mesures devraient contribuer à faciliter les départs ; je pense notamment aux reclassements dans les fonctions publiques ou au versement d'un pécule. Ce pécule est versé en deux fois, le second versement étant soumis à l'obligation d'avoir retrouvé un emploi au plus tard un an après avoir quitté les armées. Le contexte économique actuel doit nous inciter à la plus grande prudence sur la portée de cette mesure. Nous devrons donc être particulièrement attentifs afin d'ajuster, si besoin, les mesures d'accompagnement dans le courant de l'année.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des précisions sur le nombre de personnes qui pourraient bénéficier de ces dispositifs et sur le montant des crédits disponibles pour les financer ?
Le Livre blanc a insisté sur la nécessité d'un effort en faveur des matériels de l'armée de terre, vieillissants et aux limites de leurs capacités. En matière d'équipement, la priorité est sans nul doute celle de l'aéromobilité : comme l'ont souligné nos collègues dans leurs rapports sur ce sujet, l'armée de terre est en rupture de capacité, alors que nos hélicoptères sont très sollicités en opérations extérieures.
Je me suis rendu auprès du 5e régiment d'hélicoptères de combat de Pau, où les premiers Tigre sont en service. J'ai apprécié les performances de cet appareil qui contribuera grandement à renforcer nos capacités. Toutefois, le standard actuel n'est pas doté de toutes les mesures d'autoprotection, ce qui retarde son engagement en opération.
La situation me semble donc stabilisée et en bonne voie pour les hélicoptères d'attaque. Ce n'est malheureusement pas le cas pour les hélicoptères de manoeuvre.
Je déplore que la commande de NH90 ne soit pas encore intervenue, et qu'aucune commande nouvelle ne soit prévue en 2009. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous assurer que la commande interviendra bien au premier trimestre 2009, de façon à ne pas retarder encore les livraisons prévues à partir de 2011 ?
Les deux autres équipements qui me préoccupent sont, d'une part, les véhicules blindés – même si l'entrée en service des VBCI devrait améliorer la situation – et, d'autre part, l'équipement individuel du fantassin.
Le programme FELIN va prochainement être expérimenté en Afghanistan. Il constitue une avancée appréciable mais aucune concession ne doit être faite sur cet équipement de première nécessité.
Pour répondre aux besoins des forces engagées en opérations, l'armée de terre a développé le concept d'« adaptation réactive ». Ce choix est tout à fait pertinent, mais il ne doit pas remplacer une juste anticipation des besoins. La réforme du pilotage des programmes devrait d'ailleurs contribuer à améliorer l'adéquation entre les besoins et les moyens en dotation.
Je tiens enfin à attirer votre attention, mes chers collègues, sur l'importance de la fin d'exécution 2008 et sur les ressources exceptionnelles.
L'entrée dans la prochaine loi de programmation militaire ne pourra se faire dans de bonnes conditions que si les réserves sont levées en 2008, avec un financement extérieur au ministère de la défense pour le surcoût OPEX. Le budget 2009 de l'armée de terre ne sera tenable que si les ressources exceptionnelles prévues sont effectivement versées. Si une quelconque régulation budgétaire remettait en cause ces recettes, l'armée de terre serait contrainte de réduire son niveau d'entraînement, ce qui aurait inévitablement des conséquences sur ses capacités opérationnelles.
En conclusion, je considère le budget pour 2009 comme globalement satisfaisant, même s'il nous faudra être très vigilants au cours de l'exécution. Au vu de l'ensemble de ces éléments, la commission de la défense a émis un avis favorable aux crédits de l'armée de terre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Marguerite Lamour, rapporteure pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées pour la marine, pour cinq minutes.
Mme Marguerite Lamour, rapporteure pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées pour la marine. L'examen du projet de budget de la défense pour 2009 intervient, chacun l'a dit, dans un contexte bien particulier puisqu'il s'agit, tout à la fois, de la première traduction des orientations stratégiques et capacitaires préconisées par le Livre blanc, de la première concrétisation des évolutions structurelles induites par la révision générale des politiques publiques et, enfin, de la première année de la loi de programmation militaire 2009-2014 dont les contours nous ont été dessinés et qui devrait nous être soumise dès le début de l'année prochaine.
Les crédits figurant dans ce budget de transition auront donc une résonance au-delà de la seule année 2009. C'est pourquoi je me suis attachée, dans mon avis, à retracer les moyens dont sera dotée la marine en 2009 et à évaluer si ceux-ci correspondent au contrat opérationnel fixé par le Livre blanc et aux objectifs de rationalisation définis par la RGPP.
Les marins, dans leur grande majorité, acceptent le principe et les objectifs de la réforme et sont prêts à consentir des efforts de réorganisation et d'économie nécessaires. Fiers de leur métier et de leur engagement, ils aspirent, avant toute chose, à naviguer sur des bâtiments en bon état et à disposer des équipements nécessaires pour répondre aux besoins opérationnels. Ils s'inquiètent donc principalement de l'état de la flotte – souvent vieillissante et difficile à entretenir – et du niveau d'entraînement et d'activité réduit en 2008 en raison des tensions sur le prix du carburant.
Les personnels de la marine, notamment les civils, s'interrogent bien sûr aussi sur leur situation personnelle, leur carrière et leurs conditions de vie. Néanmoins ils sont prêts à évoluer et à se remettre en question. L'état-major de la marine et les commandements des forces ont fait de gros efforts d'information et de transparence pour ne pas laisser leurs hommes dans l'attente et le doute, mais c'est maintenant à nous, mes chers collègues, de fixer, dans la prochaine loi de programmation militaire, des objectifs clairs et raisonnables d'activité et d'équipement, et de mettre en place les moyens nécessaires. Il nous faudra aussi, par la suite, veiller fermement à ce que les engagements pris soient tenus.
Nous devons à nos armées transparence et sincérité.
Je reviens au projet de budget de la marine pour 2009.
Je ne détaillerai pas ici les crédits des programmes 178 et 146 : je vous renvoie pour cela à mon rapport écrit. Je vais simplement souligner quelques éléments qui distinguent ce budget des précédents.
Les crédits du programme « Préparation et d'emploi des forces navales » comprennent 4,6 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et 4,5 milliards d'euros de crédits de paiement.
S'agissant de la politique de ressources humaines, le Livre blanc a prévu que le format général de la marine devait être ramené à 44 000 hommes en 2014-2015, contre 48 000 actuellement. Dès 2009, 1 935 postes seront supprimés ou transférés. Pour la marine, les suppressions de postes ne constituent pas un problème majeur, car, de façon globale, les départs attendus sont supérieurs, sur la période 2008-2015, aux réductions d'effectifs demandées. La difficulté sera surtout de parvenir à faire coïncider les départs naturels et les réductions de postes. Il faudra pour cela ajuster les nouveaux recrutements aux besoins les plus urgents, mettre en oeuvre des formations adaptées aux spécialités, assurer un soutien spécifique aux mobilités géographiques inévitables et, bien entendu, accompagner les départs et les reconversions. Des crédits sont, d'ores et déjà, prévus en 2009 pour un plan d'accompagnement social des restructurations.
Quant au fonctionnement courant et à l'activité des forces, l'accroissement de plus de 18 % des dotations destinées au carburant opérationnel est un point tout à fait positif, mais le reste des crédits connaît une nouvelle fois une forte contraction alors qu'une bonne partie de ces charges est réellement incompressible.
Je tiens à souligner la forte hausse des crédits de maintien en condition opérationnelle naval : les autorisations d'engagement augmentent de 21 % et les crédits de paiement de 8,2 %. Cela permettra notamment de financer la passation de contrats d'entretien pluriannuels « CAP 2008 ». Ces contrats constituent un progrès pour l'industriel, et tout particulièrement pour DCNS qui assure la grande majorité du MCO industriel de la marine, car ils lui confèrent une meilleure visibilité et lui permettent de programmer au mieux son activité et son développement. Cette plus grande attention accordée au MCO est une avancée importante, car la tentation est souvent grande de réduire les crédits d'entretien afin de préserver les capacités d'acquisition des équipements neufs.
S'agissant des équipements, justement, le contrat opérationnel de la marine, fixé par le Livre blanc, est très ambitieux : il maintient, voire renforce, la totalité des missions actuellement exercées, tout en resserrant le parc d'équipements sur des moyens hauturiers, modernisés et polyvalents. Les principaux crédits d'équipements de la marine pour 2009 confirment, dans le contexte général de modération des dépenses, la volonté de préserver l'essentiel de la modernisation déjà entreprise sous la précédente loi de programmation militaire, tout en prenant en compte les orientations et priorités dégagées par le Livre blanc.
Je ne reviendrai pas longuement sur le report du second porte-avions. Il est logique dans le contexte budgétaire actuel et répond à l'obligation de faire des choix. Cependant, la nécessité de doter la France d'un second porte-avions demeure, car elle conditionne la permanence à la mer du groupe aéronaval.
Parmi les engagements pris par le budget 2009 en cohérence avec les objectifs du Livre blanc, je citerai simplement les commandes du second SNA Barracuda, et des trois dernières FREMM, dont deux en format FREDA de défense aérienne. De son côté, l'aéronavale attend avec impatience l'arrivée des NH90 qui doivent remplacer les Super Frelon en fin de vie, ainsi que la poursuite des livraisons de Rafale au standard F3, afin d'assurer le remplacement progressif des Super Étendard modernisés, qui doivent être retirés du service en 2015.
Quelques mots pour terminer sur la mission de sauvegarde maritime, qui relève simultanément de la défense nationale et de l'action de l'état en mer.
Le Livre blanc a confirmé que la marine devait disposer des moyens de présence en haute mer adaptés à cette mission. Or, aujourd'hui, ces moyens sont à bout de souffle et leur remplacement ne semblent pas figurer dans la prochaine loi de programmation militaire.
Il faut conclure, madame Lamour,
Mme Marguerite Lamour, rapporteure pour avis Je me pose donc la question : pourquoi le budget de la défense doit-il supporter l'ensemble de la charge budgétaire de la sauvegarde maritime ? Ne peut-on pas envisager un meilleur partage de la responsabilité budgétaire entre les différents ministères ?
En conclusion, je vous propose de donner, comme l'a fait la commission de la défense, un avis favorable à l'adoption des crédits « Marine » du programme « Préparation et emploi des forces » pour l'année 2009. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Claude Viollet, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées pour l'air, pour cinq minutes.
M. Jean-Claude Viollet, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées pour l'air. Publié en juin 2008, le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale a globalement confirmé les missions de l'armée de l'air et consacré sa prééminence dans la maîtrise de la troisième dimension. Dans un contexte stratégique de plus en plus complexe, la capacité de mobilité et de réactivité des forces aériennes est en effet essentielle pour répondre aux menaces les plus diverses avec précision et rapidité.
Un mois plus tard, le Gouvernement a rendu public le plan de réforme du ministère de la défense qui décline les conclusions de la révision générale des politiques publiques engagée depuis 2007. L'armée de l'air apportera une forte contribution à cet effort de restructuration, dans la foulée des réformes déjà réalisées pour la mise en oeuvre du plan AIR 2010.
Parallèlement, le budget de la défense pour 2009 s'insère dans une double démarche pluriannuelle : celle de la loi de programmation des finances publiques et celle de la loi de programmation militaire 2009-2014 qui vient d'être déposée sur le bureau du Parlement.
C'est pourquoi, si mon avis retrace, comme il est de tradition, les moyens humains, matériels et financiers de l'armée de l'air en 2009, je mettrai l'accent, dans cette période charnière, sur les programmes d'équipement qui lui permettront de remplir avec efficacité son contrat opérationnel, fixé par le nouveau Livre blanc.
Quelques mots, tout d'abord, sur les moyens de préparation et d'emploi des forces inscrits au programme 178 : comme le recommande le Livre blanc, les personnels ne seront plus que 50 000 en 2014-2015.
Ce resserrement débute dès 2009 avec une réduction de 4 382 emplois, et s'accompagnera d'un effort d'optimisation de l'administration générale et du soutien commun. Au total, ces restructurations devraient engendrer une réduction de 15 900 aviateurs d'ici à 2015, soit 25 % des effectifs de l'armée de l'air, ce qui est considérable.
L'accompagnement social et professionnel d'une telle réforme sera donc essentiel, tant pour les départs que pour le recrutement et la fidélisation. Nous y reviendrons d'ailleurs avec l'examen de deux amendements du Gouvernement, en avance sur l'examen de la loi de programmation militaire, et sur lesquels a travaillé notre commission.
Autre conséquence de la réforme du ministère, les implantations seront densifiées et des bases de défense expérimentales seront constituées. L'armée de l'air passera ainsi de trente-sept implantations en 2008 à vingt-neuf en 2012. En 2014, toutes les implantations seront intégrées aux soixante-dix-huit bases de défense métropolitaines, dont vingt seront commandées par des aviateurs. Dès 2009, quatre bases de défense expérimentales seront constituées sur les bases aériennes de Creil, Avord, Nancy et Djibouti.
Le plan de fermeture permettra de dégager, à terme, 5 700 postes.
Toutes ces évolutions auront un impact important sur les infrastructures, qu'il conviendra de bien prendre en compte si l'on veut assurer le succès final de la réforme.
Comme pour les autres armées, les crédits de fonctionnement courant, hors dotations carburant, connaîtront une forte réduction en 2009. Pour l'armée de l'air, cela correspondra à une nouvelle économie de 8 millions d'euros, qui se traduira forcément par des difficultés dans le fonctionnement quotidien des bases. Il serait regrettable que la première année de mise en oeuvre de la réforme et de constitution des bases de défense soit associée, pour les personnels, à une dégradation de leurs conditions de vie et de travail.
Je serai plus positif sur le MCO, qui recevra en 2009 un volume de crédits en net accroissement. Cette évolution devrait permettre de stabiliser la disponibilité des matériels aéronautiques, mais elle ne sera pas suffisante pour améliorer la situation très dégradée des stocks de rechanges. Dans ce domaine, la SIMMAD et l'expertise du SIAé jouent un rôle essentiel pour garantir la cohérence du MCO et la maîtrise des coûts.
Un point d'inquiétude, cependant : l'ancienneté d'une partie des aéronefs de l'armée de l'air pèse sur le niveau global de la disponibilité et rend le MCO de plus en plus complexe et coûteux. C'est une donnée qui ne devra pas être oubliée par la LPM car il serait dangereux de sacrifier l'entretien de l'existant au profit des nouveaux équipements.
J'en viens justement aux équipements prioritaires pour l'avenir.
Le Livre blanc a conforté l'armée de l'air dans l'ensemble de ses missions tout en procédant à une réduction de son format. Afin de respecter son contrat opérationnel, elle doit concentrer ses efforts autour de deux axes : la modernisation des moyens pérennes et l'adéquation des équipements nouveaux au juste besoin, tout en ayant soin de mesurer systématiquement le rapport coût-efficacité. J'espère que ce sera la ligne de conduite de la prochaine LPM, qui devra prendre un certain nombre de décisions en matière capacitaire, donner aux armées les moyens de les réaliser et de s'y tenir.
Les priorités s'imposent d'elles-mêmes :
Il s'agit tout d'abord de consolider l'aviation de combat, autour du Rafale F3 et de la remise à niveau des Mirage 2000 D et 2000 N, afin notamment de tenir la posture de dissuasion aéroportée, avec les deux escadrons équipés du missile ASMPA, et d'atteindre d'ici à 2015 l'objectif fixé par le Livre blanc d'un parc unique de 300 avions de chasse polyvalents, dont 270 en ligne. Pour conforter dans l'avenir la supériorité du Rafale au combat et ses chances à l'exportation, la France doit également s'engager rapidement dans la commande de missiles METEOR.
Il convient ensuite de renouveler les moyens de l'aéromobilité, avec les programmes A400M et MRTT. Je ne reviendrais pas ici sur le retard de l'A400M, et ses causes, nous en avons beaucoup parlé. Je veux toutefois apporter mon soutien à cet avion, qui sera très utile aux armées lorsqu'il sera livré, et insister pour qu'en attendant, nous trouvions une solution qui nous permette de réduire notre déficit capacitaire en matière de fret. J'ai eu l'occasion d'évoquer l'acquisition, ou la location, d'A 330-200 en version cargo, rapidement disponibles, et qui pourraient ultérieurement être « rétrofités » en MRTT.
Enfin, dans le cadre de la fonction stratégique de « connaissance et anticipation », il convient d'avancer dans l'équipement en drones. Le SIDM devrait enfin être opérationnel au début de l'année 2009 et faire son baptême du feu en Afghanistan, mais il s'agit d'un système intérimaire qui n'a pas vocation à durer au-delà de 2015-2016. Une décision doit être prise en 2009 si l'on veut éviter une rupture capacitaire.
Merci de conclure, monsieur Viollet.
M. Jean-Claude Viollet, rapporteur pour avis. Je ne saurais conclure sans dire quelques mots sur le renouvellement de la flotte gouvernementale.
Je ne conteste pas la nécessité de disposer d'un système de communications gouvernementales modernes, variées et sécurisées. Je m'interroge simplement sur la méthode utilisée pour passer commande, durant l'été 2008, de deux Falcon 7X et d'un A330, sans aucun débat budgétaire préalable. Alors que l'armée de l'air souffre de carences capacitaires avérées qui menacent la réalisation de ses contrats opérationnels, je voudrais être certain que le renouvellement de la flotte d'avions à usage gouvernemental ne se fera pas au détriment d'autres équipements, tout aussi prioritaires pour la nation.
La commission de la défense nationale et des forces armées, à la sagesse de laquelle je m'en étais remis, a majoritairement émis, le 28 octobre dernier, un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Cornut-Gentille, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forcées armées, pour l'équipement des forces, pour cinq minutes.
M. François Cornut-Gentille, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour l'équipement des forces. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour tenir compte de l'environnement international comme de la réalité financière, le Livre blanc a procédé à des réajustements significatifs pour l'équipement des forces. L'objectif demeure néanmoins très ambitieux et c'est lui qui justifie la réorganisation dans les années à venir de notre défense.
Pour 2009, les autorisations d'engagement passent de 10,7 milliards d'euros à près de 21 milliards, soit une hausse de près de 95 %. Quant aux crédits de paiement, ils progressent de 7,7 %, passant de 11,3 milliards d'euros à 12,2 milliards d'euros.
Dans les commandes majeures, on trouve soixante exemplaires du Rafale et 16 454 équipements FELIN. Il faut également insister sur la commande du deuxième sous-marin nucléaire d'attaque Barracuda et de trois frégates FREMM.
Enfin, pour l'armée de terre, on peut souligner les commandes de cinquante-trois véhicules à haute mobilité, de 332 VBCI, de cinquante véhicules de transport logistiques et, enfin, la commande de vingt-deux NH 90 qui aurait dû intervenir en 2008.
En ce qui concerne les livraisons, il faut principalement signaler deux aéronefs spécialisés dans le recueil du renseignement électromagnétique, huit Tigre, soixante-quinze torpilles MU 90, quatorze Rafale, trente-quatre canons Caesar, une deuxième frégate anti-aérienne HORIZON ainsi que plusieurs équipements d'information et de communication particulièrement utiles en opération.
La pression sur le MCO, qui voit ses crédits passer de 2,2 milliards d'euros à 3 milliards, demeure extrêmement forte.
Je souhaite pointer du doigt quelques difficultés d'inégale importance sur les équipements.
Tout d'abord, l'absence de décision concernant les MRTT risque, si elle se prolonge, de peser sur les capacités françaises de dissuasion. De la même manière, on semble repousser encore davantage les décisions concernant les drones. Enfin, dans le spatial, le discours très volontariste du Livre blanc n'a pas encore sa véritable traduction financière.
Plus grave, les déboires sur le programme décisif de l'A400M se révèlent chaque jour plus importants. J'ai vu, monsieur le ministre, que vous vous engagiez fermement pour sortir de l'ornière. Je voudrais que vous puissiez non pas nous rassurer mais nous dire la vérité sur ce programme. À ce jour, y voyez-vous plus clair sur les capacités de l'industriel à produire l'avion, et dans quel délai ? Êtes-vous assuré de la détermination de tous les partenaires européens à faire aboutir le programme ? En quelques mois, les problèmes techniques rencontrés sur l'A400M ont dégénéré d'abord en problèmes opérationnels pour nos armées, puis en problèmes industriels. Aujourd'hui, ils prennent une dimension politique. J'aimerais que vous nous fassiez le point sur cette question.
Enfin, sur le MCO, la fidélisation des personnels constitue un sujet d'inquiétude. La réforme actuelle donne les moyens d'engager la déflation des effectifs. Elle n'apporte aucun outil pour maintenir les compétences nécessaires. Je voudrais insister sur le fait que plusieurs états-majors sont préoccupés sur cette question.
Par ailleurs, je souligne que le bon déroulement de la programmation militaire est largement conditionné par une série de cinq facteurs qu'il importera de suivre au fil des mois, étant entendu que le poids de la crise financière pèsera certainement sur ce budget.
L'exécution du budget 2008 est décisive et l'importance des reports à l'aube de 2009 sera une première indication sur notre capacité à tenir la ligne annoncée.
Le budget 2009 prévoit 1,6 milliard de recettes exceptionnelles, fondées notamment sur les recettes immobilières, principalement la cession de l'îlot Saint-Germain. Pouvez-nous confirmer, monsieur le ministre, qu'elles seront au rendez-vous ? Si ce n'était pas le cas, quelles en seraient les conséquences ?
Je me réjouis que l'on progresse encore dans la budgétisation des OPEX. Néanmoins, quelques incertitudes demeurent, notamment sur notre capacité à effectuer quelques retraits pour être crédibles budgétairement.
L'autre point décisif sur le programme, c'est évidemment l'importance de l'export pour trouver l'équilibre sur certains programmes, je pense en particulier au FREMM et au Rafale.
Enfin, depuis août, les Français ont compris que nous étions engagés en Afghanistan dans des opérations à haute intensité. Il est évident que c'est à la lumière de cette réalité que nous devons suivre le programme 146.
Merci de conclure, monsieur Cornut-Gentille.
M. François Cornut-Gentille, rapporteur pour avis. Cela m'amène à faire, pour conclure, monsieur le président, deux propositions sur lesquelles je souhaite recueillir, monsieur le ministre, votre réaction :
D'une part, renforcer le contrôle du Parlement dans le recours à la procédure dérogatoire d'acquisition pour urgence opérationnelle. En 2008, 100 millions d'euros seront dépensés dans ce cadre. Je pense qu'il est normal d'avoir une information sur le sujet.
D'autre part, moderniser les procédures de validation opérationnelle pour garantir à la fois la rigueur de leur évaluation mais aussi leur plus grande réactivité lorsque le besoin opérationnel se fait pressant. Guy Teissier, le président de la commission de la défense et des forces armées avait insisté sur deux sujets sur lesquels les termes du débat ne sont pas d'une clarté absolue, à savoir le Tigre et le FELIN. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Sainte-Marie, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour l'espace, les communications et la dissuasion, pour cinq minutes.
M. Michel Sainte-Marie, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour l'espace, les communications et la dissuasion. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Livre blanc a donné une place éminente aux deux instruments clés de l'autonomie stratégique de la France que sont la dissuasion nucléaire et l'espace. La première est confortée, tandis que de nouvelles ambitions sont affichées en matière spatiale. Ce dernier point méritera d'être confirmé au cours de la prochaine loi de programmation militaire, car le projet de budget pour 2009 ne comprend pas de rupture en matière d'investissements spatiaux.
S'agissant de la dissuasion nucléaire, la continuité l'emporte. En 2009, les crédits progressent fortement en raison de la conclusion de plusieurs contrats pluriannuels. De manière plus générale, il s'agit de faire face à la « bosse » de financements résultant des décisions prises les années antérieures, notamment en 2004 lors de l'entrée en phase de production du programme M51, pour limiter les appels de crédits au cours de la LPM 2003-2008.
En ce qui concerne la composante océanique, sa modernisation se poursuit normalement ; elle est entièrement tournée vers l'échéance de 2010, qui verra arriver en service le M51 sur le SNLE Le Terrible.
L ' essentiel des ajustements concerne donc la composante aéroportée, à la suite de la décision du Président de la République d'en réduire le volume d'un tiers. Cette mesure va permettre une économie évaluée à 92 millions d'euros s'agissant des programmes d'armement. En outre, à partir de 2011, une économie de fonctionnement de 56 millions d'euros par an pourra être réalisée.
Je ferai une observation s'agissant de cette composante, observation partagée, je crois, par plusieurs de mes collègues. Les avions ravitailleurs jouent un rôle primordial pour les forces aériennes stratégiques et le grand âge des KC135 en service est une source d'inquiétude. Il me semble regrettable qu'aucune décision ne soit prise pour en assurer le renouvellement dans le projet de loi de finances pour 2009.
Nous allons les prendre.
M. Michel Sainte-Marie, rapporteur pour avis. J'en viens aux crédits affectés au secteur spatial.
Si celui-ci a été présenté comme une priorité politique ces dernières années, force est malheureusement de constater que les effets de cet affichage ne se retrouvent guère dans les chiffres : la somme des écarts entre crédits votés et consommés représente 70 % d'une annuité moyenne des crédits destinés à l'espace. Cette tendance persistera en 2009, avec une baisse de 0,8 % des crédits de paiement. La prochaine loi de programmation débute donc pour le moins avec prudence, ce qui suppose ensuite une croissance particulièrement soutenue pour atteindre l'objectif fixé par le Livre blanc, c'est-à-dire un doublement des crédits en moyenne annuelle.
Pour 2009, deux points sont à relever.
Tout d'abord, la mise en service du deuxième satellite Hélios II est reportée pour des raisons techniques liées au lanceur. Attention, sous peine de prendre des risques accrus sur la fiabilité du satellite, la mise en orbite ne pourra pas être décalée au-delà de l'automne prochain.
C'est ce qui est prévu.
M. Michel Sainte-Marie, rapporteur pour avis. Tant mieux.
Ensuite, une nouvelle réduction de la cible à atteindre pour les stations sol du système de communications Syracuse III a été décidée, ce qui est particulièrement préoccupant. Les dernières stations devraient être livrées en 2016, soit seulement un an avant la fin de vie prévisible des satellites. Surtout, on en arrive désormais au nombre minimum de stations sol compatible avec le contrat opérationnel et avec la capacité de la France à jouer le rôle de nation cadre dans des opérations extérieures.
Un mot à ce stade sur le projet d'établissement d'un partenariat public-privé en matière de télécommunications spatiales, qui comprendrait notamment la cession des deux satellites Syracuse III à un opérateur privé. S'il ne faut pas s'interdire a priori ce type de solution, il faut, à mon sens, le faire sans remettre en question la coopération étroite avec l'Italie en matière spatiale militaire et en définissant un cadre juridique, opérationnel et financier intéressant pour l'État.
Vous avez raison.
M. Michel Sainte-Marie, rapporteur pour avis. Permettez-moi de terminer par des perspectives à plus long terme, pour lesquelles les sujets de satisfaction sont plus nombreux.
Ainsi, alors que l'incertitude était encore grande l'an dernier, nous l'avions relevée ici, sur la capacité du programme MUSIS à assurer le remplacement d'Hélios II à partir de 2015, les études engagées par anticipation en 2008 permettent désormais d'envisager le lancement de la phase de conception dans les temps.
Par ailleurs, les études nécessaires au lancement d'un programme de renseignement d'origine électromagnétique spatial, dit CERES, vont débuter pour une mise en service prévue à partir de 2016.
Enfin, en matière d'alerte avancée, l'effort s'inscrit dans une perspective de plus long terme, avec la mise en place d'une première capacité opérationnelle en 2019. L'alerte avancée doit contribuer à l'autonomie française, voire à terme européenne, d'appréciation des situations ainsi qu'à la crédibilité de la dissuasion.
Lors de l'examen des crédits de l'espace, des communications et de la dissuasion, je m'en suis remis à la sagesse de la commission. Celle-ci a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
La parole est à M. Guy Teissier, président de la commission de la défense nationale et des forces armées.
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense nationale et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les évolutions géostratégiques intervenues dans notre monde depuis un certain 11 septembre ont bouleversé l'environnement dans lequel s'inscrit notre stratégie de défense. Les menaces d'un ennemi à la fois multiforme et insaisissable sont diffuses, difficiles à anticiper, et nous imposent d'être souples et réactifs. De ce fait, assurer la sécurité de nos concitoyens et la défense de nos valeurs fondamentales est devenu d'une redoutable complexité. Pour relever ce défi, il nous faut nous doter d'une panoplie de moyens aussi large que possible, ambition qui, à elle seule, légitime l'effort proposé par le Président de la République tel qu'il a été présenté dans le Livre blanc.
Ce projet de loi de finances est placé sous le signe du courage politique et, surtout, de la cohérence. Permettez -moi de relever, tout d'abord, qu'il est cohérent avec les priorités du Livre blanc. Il a été prévu que les crédits de la mission « Défense » progressent chaque année au rythme de l'inflation, par exception à la règle applicable aux autres missions de l'État dont les crédits seront stabilisés. Cela marque clairement un engagement et une volonté politiques forts.
Oui !
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense. Par ailleurs, ce projet de loi de finances constitue la première annuité de la future loi de programmation militaire dont nous aurons à débattre dans les semaines qui viennent. Bien entendu, dans un monde parfait, nous aurions souhaité que la loi de programmation militaire soit examinée en même temps que le projet de loi de finances qui en constitue la première annuité.(Approbations sur divers bancs.)
Mme Patricia Adam. Ça, c'est bien vrai !
Mais un monde parfait cela ne serait pas drôle !
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense. On peut toujours en rêver !
Ce projet de loi de finances a une importance encore plus grande du fait qu'il s'agit de la première année d'application du plan de modernisation présenté le 24 juillet dernier suite à la révision générale des politiques publiques. Il est cohérent avec la programmation triennale des finances publiques. Au-delà de la gestion des finances publiques qui s'en trouve améliorée, c'est une visibilité qui est donnée sur la progression des dépenses de la mission « Défense » nécessaire tant pour nos militaires et les civils qui travaillent à leurs côtés que pour nos industriels.
Enfin, ce projet de loi de finances est cohérent avec les engagements de la France dans le monde. Notre engagement en Afghanistan, que nous avons conforté le 22 septembre dernier, a montré que nos hommes sont prêts au sacrifice suprême. Nous avons, pour ce qui nous concerne, une obligation morale, celle de leur fournir les moyens nécessaires à leur mission.
Comme nous le savons tous, la réussite de la mise en oeuvre du Livre blanc dépend de la « manoeuvre ressources humaines ». C'est pourquoi nous ne pouvons que nous féliciter du fait que le projet de loi de finances comporte les moyens de financement du plan d'amélioration de la condition des personnels à hauteur de 89 millions d'euros. A cela s'ajoute une augmentation d'un tiers des ressources consacrées à la reconversion des militaires, pour 20 millions d'euros.
Cette manoeuvre des ressources humaines suppose que les conditions de départ soient attractives. C'est pourquoi nous soutiendrons les deux amendements du Gouvernement, qui ont été un peu remodelés, visant à mettre en place des dispositifs incitatifs au départ. Nos armées s'apprêtent en effet à entrer dans une période de six années cruciales, au cours desquelles elles vont supprimer 54 000 emplois, dont 8 400 dès 2009. La réussite de cette première année sera essentielle.
Je veux souligner le caractère imaginatif, dans le meilleur sens du terme, du dispositif de mise à disposition immédiate des ressources exceptionnelles en matière de cession immobilière, qui permettra d'en récolter le fruit dès l'année prochaine. Je tiens également à souligner le courage politique du Gouvernement, donc de vous-même, monsieur le ministre, qui a confirmé le principe du retour à la défense de la totalité des économies qu'elle pourrait réaliser. L'expérience montre que ce principe est hautement motivant et nous ne pouvons que nous en féliciter.
Cependant, au-delà des montants des crédits, il convient de mettre en exergue l'ambition des objectifs qui les sous-tendent. Ce projet de loi de finances donne à notre pays les moyens de conforter son rôle moteur dans la construction européenne. Par son effort financier, la France veut aussi donner à ses armées les moyens d'une interopérabilité avec les armées alliées, je pense notamment aux moyens de commandement et de communication. Or cette interopérabilité est le gage de la crédibilité de notre politique visant à conforter le projet européen de politique européenne de sécurité et de défense. Dans le contexte de la présidence française de l'Union européenne, il s'agit d'un effort essentiel au plan politique.
Comme rien n'est jamais parfait, nous aurions aimé, monsieur le ministre, un effort encore plus soutenu au profit de la recherche et du développement, comme cela vient d'être relevé par mon collègue Michel Sainte-Marie. Si l'on examine les crédits d'études en amont, la progression de 2,4 % nous paraît peut ambitieuse par rapport aux besoins. Or, les enjeux en matière de recherche sont bien connus : maintien de la base industrielle et technologique de défense, préservation du potentiel d'innovation chez nos industriels, maintien de l'avance technologique de la France, crédibilité de notre positionnement vis-à-vis de nos principaux alliés, comme cela a été dit par notre excellent collègue François Cornut-Gentille.
Par ailleurs, nous pensons qu'un effort accru aurait pu être consenti au profit des réservistes, comme cela a été excellemment souligné par notre collègue Louis Giscard d'Estaing.
Au plan de la présentation des dépenses, nous aurions apprécié un effort accru de transparence dans deux domaines en particulier. D'une part, lorsque les programmes d'équipement font l'objet de réduction ou de décalage dans le temps, il pourrait être opportun que les coûts induits par les décalages soient clairement identifiés, en distinguant les dépenses liées à l'indemnisation des industriels et les coûts liés à l'attente des nouveaux matériels…
C'est une bonne idée !
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense. …– locations provisoires, prolongation de matériels anciens -…
Nous le ferons !
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense. …avec ce que cela représente en MCO…
M. Michel Voisin. Quelle dérive !
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense. …et en consommation supplémentaire d'énergie, et j'invite notre collègue MichelVoisin à garder la sienne ! (Rires.)
Par ailleurs nous avons compris que la cession de la majorité des immeubles parisiens du ministère de la défense à la SOVAFIM donnera lieu au paiement, par le ministère, de loyers puisque les immeubles seront cédés occupés. Dans ce contexte, la présentation des dépenses locatives induites, au regard des recettes exceptionnelles attendues par les cessions immobilières, nous permettrait de percevoir aisément ce que représente le produit net des recettes exceptionnelles liées à ces cessions immobilières.
Enfin, nos armées vont être dotées de matériels nouveaux qui remplaceront les équipements susceptibles d'être cédés à titre onéreux à des pays qui souhaitent profiter d'une telle opportunité. Cela ne pourrait-il pas donner lieu à la création d'une ligne de recettes exceptionnelles affectées à la défense ? Même si les montants concernés ne devraient pas être très importants, la transparence à laquelle nous sommes très attachés en tant que parlementaires y gagnerait. Je souligne à cet égard qu'avec de projet de loi de finances, nous pouvons montrer à la communauté militaire la réelle considération que lui porte la représentation nationale. Ce projet, et surtout son exécution, sont donc attendus avec impatience et vigilance tant ils conditionneront l'avenir de notre défense.
Le Président de la République et le Gouvernement ont tenu à ce que notre effort soit consolidé, après six années de progression réelle mais insuffisante. Les possibilités sont là, pour les matériels comme pour les hommes. Il nous appartient, en tant que parlementaires, d'y veiller. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Dans la discussion, la parole est à M. Jean-Jacques Candelier, premier orateur inscrit, pour dix minutes.
M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, depuis l'élection du Président de la République, nous assistons à un véritable chamboulement de nos armées. Entre la RGPP, le nouveau Livre blanc et la loi de programmation militaire, on ne sait plus vraiment quelle est la cohérence de tous les chantiers lancés. Rassurez-vous, monsieur le ministre, je n'ai pas pris de Kalachnikov !
Au nom de la RGPP, on prend prétexte de la nécessaire modernisation, que personne ne conteste, pour appliquer les dogmes de suppression de fonctionnaires du Gouvernement. C'est ainsi que la saignée des personnels continue, avec 8 250 postes en moins l'année prochaine.
M. Michel Voisin. Ça commence !
M. Jean-Jacques Candelier. Cette prétendue modernisation va se traduire par 54 000 suppressions d'emplois d'ici à 2014.
M. Michel Voisin. Eh oui !
M. Jean-Jacques Candelier. La composante civile est lourdement touchée avec, à terme, environ 20 000 postes en moins. Or je rappelle que, en l'espace de douze ans, ses effectifs sont déjà passés de 145 000 à 72 000 personnes.
La création d'un service interarmées du soutien vise précisément à détruire le soutien. Les économies réalisées sur ces fonctions sont un prélude à une privatisation de ces services. Cette crainte est fondée : elle est instruite par l'expérience des industries de défense. J'y reviendrai.
Ces « dégraissages » ne correspondent pas, comme on veut le faire croire, à de nouvelles données stratégiques. Ils sont la conséquence du besoin de faire des économies.
Pour les réinvestir !
M. Jean-Jacques Candelier. Mutualisation, externalisation ou recentrage sur leur coeur de métier : comme dans le secteur privé, les personnels du ministère de la défense ont désormais le malheur de devoir se soumettre à ces mots barbares qui fondent toute politique de coupes dans les coûts.
Le risque est que la logique comptable ait des conséquences désastreuses et irrémédiables en matière de cohérence et d'efficacité. C'est pourquoi certains estiment que les gains espérés à terme pourraient se transformer en surcoûts. En outre, on nous dit que la diminution des effectifs devrait s'accompagner d'une revalorisation de la condition des personnels de défense, qu'ils soient civils ou militaires d'ailleurs. En fait, à défaut de revalorisation de leur traitement, les suppressions de postes sont, à ce jour, la seule récompense qu'entrevoient les personnels.
Par ailleurs, au-delà des mesures financières, il n'existe aucune mesure de reclassement cohérent de ces personnels. Là encore, une véritable modernisation aurait dû se traduire par la mise en place d'une politique de gestion des emplois et des compétences. Ce n'est pas le cas.
Ce budget entérine la fermeture des sites : 83 seront supprimés d'ici à 2015. La nouvelle carte militaire a été présentée sans concertation ni avec les organisations syndicales ni avec les agents. Les personnels civils des sites transférés ou dissous vont connaître un véritable bouleversement de leur vie familiale et professionnelle. En cas de refus de mobilité, ils connaîtront les pires difficultés pour retrouver du travail dans leur bassin d'emploi, car la RGPP est appliquée à toutes les fonctions publiques.
Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2009 remet à l'ordre du jour l'interdiction d'embaucher des ouvriers d'État, ce qui n'est pas satisfaisant. Il est regrettable que l'action du ministre ne se place pas, de ce point de vue, dans la continuité de celle de son prédécesseur.
Il faut le dire : toutes ces évolutions sont en partie liées à notre intégration complète dans l'OTAN. Ce projet de budget contribue à la perte de notre indépendance militaire. La vraie question qu'il faut se poser est la suivante : sommes-nous prêts à sacrifier notre souveraineté, et donc notre défense nationale, aux visées hégémoniques des États-Unis ? Ce sont celles-ci qui conduisent à notre enlisement en Afghanistan. Aujourd'hui, ce sont les armes qui parlent au détriment des solutions politiques. Le nouveau Président des États-Unis, lui-même, a déclaré vouloir intensifier la guerre dans ce pays.
M. Guy Teissier, président de la commission de la défense. Comme la Corée !
M. Jean-Jacques Candelier. Cet enlisement a un coût humain. Nous le déplorons tous, mais il a également un coût très important au budget : chaque année, on observe un surcoût par rapport au budget prévisionnel pour les opérations extérieures. Ainsi, en 2008, les OPEX devraient coûter quelque 833 millions d'euros, soit quasiment le double des 460 millions prévus ! Dans le projet de loi de finances pour 2009, elles sont provisionnées à hauteur de 510 millions d'euros. Cela paraît un minimum compte tenu de la prolongation de notre engagement en Afghanistan. Notre alignement sur l'OTAN a également des incidences budgétaires directes. Ainsi, notre contribution financière en faveur de cette organisation augmente de près de 10 %, pour atteindre 115 millions d'euros. On ne peut que le déplorer, car cette organisation met gravement en péril le maintien et la recherche de la paix et le besoin de coexistence pacifique et d'amitié entre les peuples. En lieu et place des choix actuels, la France s'honorerait à agir pour la dissolution de l'OTAN, vestige de la guerre froide, et à développer au contraire une culture de paix.
Cela étant dit, cette mission « Défense » consent également un effort important en matière de renouvellement des équipements. C'est appréciable car, je le dis comme je le pense, on peut être radicalement opposé aux logiques de guerre tout en pensant que nos forces doivent avoir des moyens convenables pour effectuer leurs missions.
M. Jean-Michel Fourgous, rapporteur spécial. Tout le monde est opposé aux logiques de guerre !
M. Jean-Jacques Candelier. La télévision l'a rappelé : nombreux sont, parmi nos soldats, ceux qui achètent par leurs propres moyens une partie de leur matériel eux-mêmes. Nul besoin d'avoir fait Saint-Cyr pour comprendre que cela pose un énorme problème. D'ailleurs, l'opinion a été sensibilisée à l'importance de consentir un effort, après avoir vu, cet été, à la télévision, nos victimes en Afghanistan.
Toutefois, je m'interroge sur le financement de ce renouvellement. Le budget étant resserré à cause de certains cadeaux fiscaux, pourquoi Nicolas Sarkozy s'est-il déclaré favorable à la cession d'immobiliers aux communes pour un euro symbolique ? Combien de casernes faudra-t-il fermer pour financer ce budget ?
De même, les orientations du Livre blanc sont confirmées, ce qui semble annoncer une augmentation des crédits pour la dissuasion nucléaire. Or, pour 2009, celle-ci représente 3,9 milliards d'euros, soit plus de 10 millions d'euros par jour. Mieux vaudrait ouvrir la voie à un désarmement nucléaire multilatéral, puisque, dans ce domaine, la dissuasion n'est aucunement une assurance-vie : on sait bien que ce n'est pas l'arme nucléaire qui protégera nos soldats engagés en OPEX. Mettre un couvercle sur ce tonneau des Danaïdes permettrait d'effectuer d'importantes d'économies, par exemple pour moderniser nos forces conventionnelles, qui doivent être adaptées aux réalités des conflits modernes.
Ce budget défense s'inscrit dans la loi de programmation militaire pour 2009-2014, que nous n'avons pas encore eu le temps d'étudier en détail. Outre les privatisations industrielles, je veux dénoncer la logique qui préside à la création des nouvelles organisations institutionnelles. Qu'il s'agisse de la création du Conseil de défense et de sécurité nationale, enceinte dans laquelle le Président de la République décidera de la politique de sécurité, ou de la présidence, par le chef de l'État, du nouveau Conseil national du renseignement, on ne peut que déplorer une concentration exorbitante des pouvoirs, au détriment des ministères de tutelle. L'américanophilie du Président l'incite à copier les structures qui existent aux États-Unis !
L'hostilité des personnels à ce budget est réelle. Nous l'avons mesurée lors les manifestations du 11 octobre dans les rues de Paris, après celles qui s'étaient déroulées en région, le 18 juin. Plusieurs milliers de salariés du ministère et des sociétés nationales ont tenu à dire « non » au plan Morin et à la casse de notre outil de défense.
Les salariés rejettent les 54 000 suppressions d'emplois motivées par une logique comptable, ainsi que la nouvelle carte militaire et les externalisations. Depuis le 30 septembre, la CGT les a consultés sur les évolutions. Soixante référendums ont déjà eu lieu, dans autant de sites, qui réunissent environ 24 000 personnes. À ce jour, plus de 90 % d'entre elles ont dit leur hostilité aux évolutions en cours. C'est dire si les personnels rejettent ce massacre.
En guise de conclusion, je veux réaffirmer que la défense de la nation et le maintien de la paix sont l'affaire du peuple. C'est pourquoi je regrette que les évolutions libérales, technocratiques et autoritaires actuelles éloignent de plus en plus nos concitoyens de leur armée. Ce budget risque de creuser davantage le gouffre qui sépare la Grande Muette de nos concitoyens. C'est pourquoi, nous ne le voterons pas.
La parole est à M. Philippe Folliot.
M. Philippe Folliot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de ce budget est d'autant plus important qu'il concrétise plusieurs évolutions, comme le Livre blanc, la RGPP et la loi de programmation militaire. Il eût été plus logique d'examiner celle-ci avant le budget ; mais je suis convaincu, monsieur le ministre, que vous regrettez vous aussi ces aléas du calendrier parlementaire.
Ce budget marqué par une augmentation significative de 5,4 % se caractérise par une grande sincérité. C'est une qualité importante dont nous vous savons gré.
M. Michel Voisin. Un coup de brosse à relire pour le ministre !
M. Philippe Folliot. Car vous avez voulu, au-delà des choix que vous avez effectués, que ce budget soit le plus conforme possible aux perspectives de réalisation, ce qui vous a amené, par exemple, à évaluer à 516 millions les surcoûts des OPEX.
Il traduit également vos priorités en matière de défense. L'accent est mis sur le renseignement, l'équipement et le caractère opérationnel des forces. Une réforme profonde de notre défense est nécessaire, car la situation actuelle est intenable. Ceux qui m'ont précédé à la tribune ont souligné qu'il n'était pas possible de continuer ainsi. On connaît nos difficultés en matière d'aéromobilité et de transport. Drones, chalands de débarquement et autre équipements sont à bout de souffle
M. Jean-Claude Viollet. Cela ne date pas de cette année !
M. Philippe Folliot. Parce qu'il est essentiel de dégager des crédits pour équiper nos forces, nous nous réjouissons de la mesure d'exception qui a été prévue. La communauté de la défense doit avoir conscience que tous les efforts qui seront consentis dans le cadre de la réforme reviendront à votre ministère. Nous y veillerons.
Mais ce budget comprend un autre élément important : il constitue une étape essentielle dans l'amélioration de la condition militaire. Comme nombre d'entre nous, vous tenez particulièrement à cet axe. Si le général de Gaulle a pu dire : « Il n'y a de richesse que d'hommes », n'est-ce pas vrai surtout pour votre ministère ? Le choix de la carrière militaire est en effet spécifique : cet engagement débouche, dans certaines circonstances exceptionnelles, sur le sacrifice suprême. La communauté nationale doit le savoir et par conséquent permettre aux militaires d'assumer leur mission dans de bonnes conditions, car une armée, fût-elle la mieux équipée du monde, ne pourra jamais fonctionner si ses hommes ne se dévouent pas, jusqu'à l'ultime sacrifice, à la communauté nationale.
Hier matin, j'étais avec ceux du VIIIe RPIMA de la section CARMIN 2, qui était, le 18 août, dans la vallée d'Uzbin. En recevant leur témoignage, j'ai pu apprécier la qualité et la profondeur de leur engagement, symbole de celui de tous nos militaires, désireux de servir le pays et la nation.
Le groupe Nouveau Centre soutiendra sans réserve votre budget. Dans un contexte économique aussi difficile, il n'aurait pas pu être meilleur.
La parole est à M. Michel Voisin.
M. Michel Voisin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si le monde était parfait, nous n'aurions pas besoin de militaires, et il serait inutile de discuter ce budget. Malheureusement, tel n'est pas le cas.
Toutefois, monsieur le ministre, le budget de la défense que nous examinons est, je le dis sans ambages, un bon budget. L'effort de notre pays en matière de défense se poursuit, ce qui mérite d'être souligné en cette période de crise économique et financière. Le budget est en hausse de plus de 5 %, ce qui représente une augmentation de 1,6 milliard d'euros. Celle-ci place de fait la défense parmi les priorités du Gouvernement. Le groupe UMP se félicite de cet effort, à l'heure votre ministère se voit imposer des opérations extérieures souvent difficiles, ainsi que des réformes et des restructurations majeures. Ce sujet est susceptible de nous réunir, quel que soit le groupe auquel nous appartenons, et je sais que notre collègue Jean-Michel Boucheron, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, a émis, à titre personnel, un avis favorable à l'adoption de ce budget.
Cette année, la défense trouve à une confluence : mise en place des mesures de la RGPP ; Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale ; annonce des restructurations militaires par le Premier ministre en juillet ; réforme de la Constitution soumettant à l'autorisation du Parlement le prolongement des OPEX ; renforcement de nos troupes et événements en Afghanistan ; présentation prochaine de la loi de programmation militaire pour 2009-2014, sur laquelle nous serons amenés à nous prononcer en début d'année.
Un grand nombre des mesures que nous examinons aujourd'hui sont issues directement de la mise en oeuvre de la stratégie du Livre blanc par la loi de programmation militaire. D'autres l'ont souligné avant moi, mais je dois le répéter à mon tour : j'aurais trouvé plus logique que celle-ci soit examinée avant ce budget.
Elle a été déposée sur le Bureau de l'Assemblée nationale.
M. Michel Voisin. Dans ce cas, elle nous parviendra peut-être un quart d'heure avant que nous ne la discutions ! Mais il est vrai que la logique administrative n'est pas toujours la nôtre.
Si le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale est l'ossature de notre stratégie de défense, la loi de programmation militaire représente le moyen d'y parvenir. Lors de sa présentation, le Président de la République a pris des engagements très clairs vis-à-vis de votre ministère : l'important effort qui lui sera demandé pour se moderniser et se réorganiser permettra de dégager des marges budgétaires qui lui seront intégralement reversées. Le Président s'est également engagé à ce que nos forces armées, qui seront, certes, moins nombreuses, soient mieux équipées et mieux formées. Les parlementaires de la majorité seront particulièrement vigilants au respect de cet engagement majeur pour notre outil de défense.
Nous autres, qui suivons ces questions, parfois depuis bien longtemps, savons que le débat sur l'équipement – devrais-je dire le sous-équipement ? – de nos forces est récurent. S'il correspond parfois à la réalité, c'est aussi un moyen de pression efficace de nos armées pour obtenir suffisamment, voire plus que les autres.
Les événements dramatiques survenus cet été en Afghanistan ont de nouveau suscité un début de polémique. Mais, pour avoir discuté, comme M. Folliot, avec les militaires chargés de ces questions, je m'inscris en faux contre bien des affirmations. La surmédiatisation a induit certains mensonges sur notre défense. Pour avoir appris la nouvelle avec beaucoup d'émotion et de peine, et avoir suivi la présentation solennelle du Président de la République, nous savons que tout ce qui a été dit à ce sujet n'est pas commission nforme à la réalité.
Ce sont des fils de France qui sont morts pour la France. Nous devons en faire le deuil dans le silence et le respect. (Assentiment sur divers bancs)
Mme Françoise Olivier-Coupeau. Tout à fait !
M. Michel Voisin. Des efforts ont déjà été faits et les objectifs de la loi de programmation 2003-2008 ont été respectés, mais les retards pris par certains programmes comme le NH-90 ou l'A400M nécessitent le maintien en activité de matériels déjà anciens et traduisent bien les difficultés que connaissent un certain nombre de programmes de la défense.
C'est pourquoi je me réjouis, au nom du groupe UMP, de l'effort très important fait cette année pour assurer l'équipement de nos forces, aussi bien dans le cadre de l'urgence opérationnelle – avec la commande de tourelleaux téléopérés pour véhicules de l'avant blindés, de brouilleurs pour lutter contre les engins explosifs, de cabines blindées pour camions de transports, etc. – afin de répondre à l'urgence en Afghanistan, que pour préparer l'avenir.
Au total, 17 milliards d'euros seront consacrés en 2009 à l'équipement de nos forces. Je n'insiste par sur les commandes de matériel que d'autres collègues ont déjà évoquées. Ces commandes doivent permettre à nos armées d'envisager l'avenir, d'autant que le programme 144, « Environnement et prospective de la défense » augmente de plus de 10 % en autorisations d'engagement et de 4.9 % en crédits de paiements, et que les études amont progressent de 2.9 %.
Je rappelle également que 10 % des crédits de recherche et développement en France sont engagés dans le secteur de la défense, ce qui représente plus de 3 milliards d'euros et nécessite une mobilisation humaine et industrielle tout à fait considérable.
Parmi les différentes priorités de votre budget, monsieur le ministre, je souhaite revenir sur le financement du surcoût des OPEX, qui préoccupe nombre d'entre nous, en particulier au sein de la commission de la défense.
La récente révision constitutionnelle soumet à l'autorisation du Parlement toute poursuite d'une OPEX au-delà de quatre mois. Les députés se sont prononcé favorablement, en septembre dernier, sur le maintien de nos troupes sur le théâtre afghan. Pourriez-vous nous dire, monsieur le ministre, quand nous serons consultés sur les autres opérations en cours ? Je pense au Liban, à la Côte d'Ivoire, au Tchad, aux Balkans, et cette liste n'est pas exhaustive.
Les parlementaires étant dotés de cette nouvelle compétence, il faut mieux les informer sur ces questions. Comment peut-on imaginer d'organiser cette information en lien avec le travail effectué par la commission de la défense ?
Plus de 12 500 militaires français sont aujourd'hui engagés dans le cadre des OPEX. Ces opérations occasionnent un surcoût depuis des années. Pour 2008, selon les informations que vous nous avez données en commission, monsieur le ministre, elles coûteront plus de 800 millions d'euros alors que la dotation de la loi de finances 2008 s'élève à 460 millions. La dotation a beau augmenter au budget 2009, cet effort certes important ne couvrira sans doute pas le surcoût de nos opérations, d'autant que les récents événements dans la région des Grands Lacs africains confirment les incertitudes du contexte international.
A l'heure où un certain nombre d'entre nous s'interrogent sur notre présence au sein de certaines OPEX, la question de leur financement demeure particulièrement importante.
Pour terminer, je veux vous interroger sur deux sujets. Il s'agit d'abord de la modification de la chaîne opérationnelle dans la gendarmerie. Le Parlement est très attaché au statut militaire des gendarmes.
Moi aussi !
M. Michel Voisin. Très bien ! Dans ce cas, vous allez pouvoir nous confirmer que la chaîne de commandement au sein de la gendarmerie, bien que cette dernière passe sous contrôle du ministère de l'intérieur, restera militaire et que le patron de l'administration dans le département n'interférera pas dans cette chaîne de commandement.
Mme Françoise Olivier-Coupeau. Excellente question.
M. Michel Voisin. En second lieu, les amendements dont nous allons discuter ensuite m'avaient, comme Jean-Pierre Soisson, fortement…
M. Bernard Cazeneuve. Contrarié. (Sourires.)
M. Michel Voisin.… contrarié, lorsqu'ils ont été déposés en commission. Vous m'avez, depuis lors, donné l'explication.
Mme Patricia Adam. Laquelle ?
M. Michel Voisin. Permettez-moi cependant de vous dire que même s'ils ont été plus délayés…
« Délayés » ?
M. Michel Voisin. C'est-à-dire qu'on nous donne quelques informations en plus !
Quand même, donc, étant donné la réponse que vous aviez apportée à l'une de mes questions…
Veuillez conclure.
M. Michel Voisin. J'y arrive, mais c'est très important, monsieur le président.
Je n'en doute pas !
M. Michel Voisin. …quand vous m'aviez répondu que, sur les moyens d'accompagnement, il y aurait une discussion au Parlement. Je trouve donc cavalier d'aborder cette question simplement par voir d'amendements. Je sais qu'ils n'ont pas été rédigés au ministère de la défense et que les amendements qu'on va nous soumettre sont nécessaires pour mener à bien la réforme. Toutefois j'aurais souhaité qu'on le fasse sous une forme plus respectueuse du Parlement. Après la réforme constitutionnelle, cela mérite d'être souligné.
Cependant, monsieur le ministre, pour ne pas gêner votre travail de réforme, le groupe UMP votera ces amendements.
Je tiens enfin à rendre un hommage appuyé…
Vous avez largement dépassé votre temps de parole.
M. Michel Voisin.… aux personnels féminins et masculins de la défense qui, avec courage et abnégation, servent notre pays. Je leur dis toute notre admiration.
Je le répète, ce budget de la défense est un bon budget,…
Très bon !
M. Michel Voisin.… et le groupe UMP dont je suis le porte-parole le votera sans aucune réserve. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Patricia Adam pour dix minutes.
Mme Patricia Adam. Je vais essayer de m'y conformer, monsieur le président.
C'est la règle.
Mme Patricia Adam. Monsieur le ministre, je vous ai déjà dit, lorsque vous avez présenté votre budget devant la commission, qu'il me semblait beaucoup plus réaliste que les précédents, et plus sincère ; en tout cas je l'espère. Nous vérifierons.
M. Christophe Guilloteau. Cela commence bien.
Mme Patricia Adam. Il faut toujours se méfier de la suite, quand un discours de l'opposition « commence bien ».
Alors, arrêtez tout de suite !
Mme Patricia Adam. C'est avec raison que nous avions dénoncé la cavalerie budgétaire pratiquée au temps de votre prédécesseur. Vous êtes même allés plus loin que nous, en chiffrant le volume d'engagements non financés à 40 % du budget d'équipement par an. Il est seulement dommage que cette opération vérité n'ait pas été menée plus tôt. Cela aurait peut-être permis d'éviter la suppression brutale, dès 2009, de milliers d'emplois, dans un contexte rendu plus difficile par une crise qui va aller en s'accentuant.
Pour tout dire, nous restons quelque peu dubitatifs devant ce projet de budget pour 2009. Il est le premier jalon de la mise en oeuvre du livre blanc, de la RGPP et de la loi de programmation militaire, dont nous avons pris connaissance il y a une semaine. Nous aurions aimé examiner ce projet au préalable ; cela a été souligné sur tous les bancs. De plus, nous sommes plus que surpris, et inquiets, d'y voir figurer un article 10 qui fait craindre une privatisation « par appartements » de DCNS. Mme Olivier-Coupeau y reviendra.
Il est vrai qu'en ces temps de disette budgétaire – je pense à la recherche, à l'éducation – la mission « Défense » apparaît bien portante, et sauvegardée, il faut le reconnaître. Hors pensions, ses ressources totales progresseront de 5,4 % et, en matière d'équipement, l'effort est réel et important, puisque c'est le premier budget d'investissement de l'État, avec une augmentation prévue de 10 %. Nous espérons tous qu'il sera respecté, car nous savons l'urgence des besoins pour l'ensemble des forces.
Pourtant, monsieur le ministre, derrière ces bons chiffres, il faut rappeler aussi qu'il y a des territoires touchés, des emplois perdus, des programmes annulés ou étalés, de l'activité en moins, donc de profondes inquiétudes chez les personnels civils et militaires ainsi que de lourdes conséquences sur le plan industriel.
Vous nous dites, en quelque sorte, que c'est le prix à payer, pour tenir le cap fixé par le chef de l'Etat.
Sur le papier, tout semble en effet se tenir. Les objectifs en matière d'équipement sont plus réalistes. Les contrats opérationnels sont revus, même si nous savons tous qu'on ne les atteint jamais. La réorganisation de la carte militaire et la baisse importante des effectifs devraient permettre, dans un premier temps, de maintenir puis d'augmenter les crédits d'équipement, de soutenir le plan d'accompagnement des restructurations et des départs, d'améliorer la situation des personnels.
Bref, monsieur le ministre, vous nous présentez une sorte de cercle vertueux d'une logique implacable, une matrice, semble-t-il, parfaite. Nous aimerions y croire, mais nous sommes obligés de constater que l'édifice est fragile. Il reste beaucoup trop d'interrogations et d'incertitudes, de réponses qui se veulent rassurantes mais qui peinent à convaincre.
Dans le contexte économique actuel – Mme Lagarde envisageait hier une croissance de 0,2 % à 0,5 % et d'autres prévisions sont plus pessimistes – la défense sera touchée comme tous les autres budgets. Il faudra en tenir compte pour l'exécution du budget 2009 et de la LPM. Nous partageons complètement les craintes exprimées par le chef d'état-major des armées devant la commission de la défense : en effet le solde 2008 pèse d'entrée sur le budget 2009 et seule une exécution budgétaire équilibrée pour 2008 peut garantir la cohérence de la programmation. Nous attendons d'avoir les éléments chiffrés qui permettront d'en juger.
Quant aux recettes exceptionnelles pour 2009, ces 1 367 millions qui proviendraient de cessions de fréquences et d'emprises immobilières, lorsque nous demandons des précisions, nous restons sur notre faim. Comment garantir qu'on parviendra à un tel montant, alors que le marché immobilier est victime de la crise économique ?
Pour ce qui est de l'affectation aux équipements des économies réalisées sur les crédits de personnel et de fonctionnement, comme le préconise le Livre blanc, elle ne sera pas effective sur l'exercice 2009. Nous y reviendrons à propos des amendements qui en précisent l'exécution.
En définitive, vous regrettez d'avoir hérité d'une équation insoluble, mais vous nous livrez aujourd'hui une équation à multiples inconnues, qui repose sur des hypothèses bien trop incertaines. Nous ne souhaitons pas vous blâmer, mais c'est la réalité ; autant l'assumer. Nous devrons le faire, vous également.
Enfin, monsieur le ministre, en tant qu'élue d'un grand port militaire dont les chantiers ont construits des bâtiments symboliques, le Charles de Gaulle, les BPC, la Jeanne d'Arc dont la vie se termine, je me dois de vous interroger sur son avenir.
Nous sommes très inquiets. DCNS Brest connaît un creux dans son plan de charge. En 2006, un millier de personnels de sous-traitants travaillaient pour DCNS, aujourd'hui ils sont moins de soixante.
Vous avez également décidé de fermer le groupe d'études sous-marines de l'Atlantique, qui représente certes peu d'emplois mais est un acteur essentiel d'un pôle d'excellence breton autour de la mer ; je remercie d'ailleurs votre cabinet de nous avoir reçu à ce propos. Un tel pôle est très important pour des projets nouveaux d'industrialisation et la diversification, notamment dans le secteur de l'écologie.
Monsieur le ministre, ayant lu dans un certain nombre de rapports des éléments qui m'ont inquiétée, je vous pose la question : quelles sont les perspectives pour Brest au niveau industriel, en matière de recherche et de développement ?
Enfin, quel est l'avenir du port militaire ? Je pose la question, car j'imagine que vous savez quel rapport j'ai à l'esprit.
Quel rapport ?
Mme Patricia Adam. Qu'en est-il du transfert des sous-marins nucléaires d'attaque à Toulon, décidé en 2002, par une autre majorité, certes, au nom d'une logique industrielle et opérationnelle ?
Les raisons invoquées par votre prédécesseur Mme Alliot-Marie sont-elles toujours valides ? Pour mémoire, elle disait que les considérations liées à l'aménagement du territoire justifiaient la décision de maintenir les SNA à Toulon.
Votre soutien à cet égard ne m'étonne guère, monsieur Vitel. (Sourires.)
Or j'ai cru comprendre que l'aménagement du territoire n'était pas, ou n'était plus, une condition en matière de défense.
Je l'entends, je le comprends, même si je pense que le dialogue est toujours nécessaire.
Je pense en particulier à la RGPP.
J'espère que seul l'intérêt supérieur de l'État – j'insiste sur ces mots – présidera à votre décision. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un débat budgétaire doit s'attacher à deux points essentiels : d'abord son volume global et son évolution d'une année sur l'autre ; ensuite la méthode qui régit la répartition entre les différentes lignes et son incidence sur les hommes et leur matériel.
Comme l'a relevé le président Guy Teissier, nous devrons veiller à la bonne articulation entre les différents textes, sachant que votre budget, monsieur le ministre, met en oeuvre les conclusions du Livre blanc et la RGPP.
Ce budget répond totalement aux objectifs ainsi tracés, en augmentation de 5,4 %. Il est exceptionnel dans un contexte financier global très fragilisé.
Par ailleurs, grâce aux économies réalisées en interne, par la réorganisation du ministère, les restructurations des implantations, l'interarmisation et la mutualisation des moyens, que nous demandons depuis de nombreuses années au Nouveau Centre, ce budget atteint le double objectif d'améliorer la condition du personnel et de progresser dans l'équipement des forces. Je suis persuadé qu'il ne s'agit là que d'une première étape et que vous saurez, monsieur le ministre, trouver d'autres ressources pérennes.
En effet, une meilleure coopération militaire européenne, là encore dans la mutualisation des moyens, mais aussi en R et T, peut générer d'importantes économies, avec l'avantage de l'efficacité entre armées, grâce à des équipements compatibles.
Équipements compatibles, R et T, nous renvoient vers deux chantiers qui restent ouverts, celui des industries de l'armement et l'Agence européenne. Cette dernière a un rôle certain à jouer en matière de promotion de projets, alors même que les crédits prévus en 2009 dans ce secteur sont en stagnation bien que notre retard soit évident. La recherche est le pivot de nos industries, tout conflit étant étayé de technologies nouvelles. Les États-Unis l'ont bien compris et notre dépendance en matière de surveillance de l'espace en est la meilleure preuve.
Par ailleurs, les auditions nombreuses menées au sein de la commission nous confortent certes dans les choix budgétaires. Les ressources attribuées sont conformes aux décisions qui relèvent du Livre blanc : la France doit rester une puissance militaire et conserver sa force de dissuasion autonome et souveraine.
Les dépenses d'équipement augmentent de 10 % et la provision OPEX augmente de 50 millions d'euros, conformément aux engagements souhaités par le Président sur le terrain et soutenus par le vote de notre assemblée. Sur ces engagements extérieurs, une nouvelle donne se profile et nous y sommes confrontés : la piraterie en mer et l'enlèvement de civils – comme nous l'avons encore vécu la semaine passée. Nos armées se sont brillamment illustrées, mais là aussi les moyens consacrés sont souvent très limités. Je pense qu'il est nécessaire d'aborder cette nouvelle forme de combat avec une analyse précise.
Il est vrai que les marges financières nouvelles et indispensables passent par la suppression de postes, soit un peu plus de 8 000 emplois militaires en moins pour 2009. Néanmoins, cela ne remet pas en cause la capacité opérationnelle de nos forces, ni le flux de recrutement indispensable pour conserver une armée jeune, condition nécessaire pour des engagements requérant des forces physiques.
En ce qui concerne les postes civils, dont près de 20 000 seront supprimés d'ici à 2015, c'est dans le plan d'accompagnement social que nous devons rester exemplaires : 140 millions y sont consacrés en 2009. Aides au départ, reconversion, mobilité sont ainsi concernés.
Le personnel civil est inquiet. Le plan de restructuration des implantations les touche. Je vous demande, monsieur le ministre, d'être particulièrement attentif aux situations nouvelles créées pour ces personnes. À chaque fois que cela sera possible, le maintien sur site, soit dans l'armée, soit dans les administrations territoriales, devrait être la règle.
Le déplacement est souvent plus coûteux. Par ailleurs, rester dans le même secteur permet au conjoint de conserver son emploi, car, dans le contexte actuel, c'est une difficulté supplémentaire qui leur serait imposée. L'exigence de mobilité ne peut être la même pour le personnel civil que pour le personnel militaire.
Avec mon collègue Michel Sordi, nous voulons vous citer l'exemple du départ de la BA 132 à Meyenheim, remplacée sur site par l'armée de terre. Le personnel civil peut ainsi être facilement réemployé. Nous avons là une cinquantaine de personnes aptes à poursuivre leur travail, sans connaître les contraintes d'un déplacement. Je compte sur vous pour examiner cette proposition avec bienveillance.
Membre parlementaire de l'AP-OTAN, j'observe avec intérêt la proposition du Président de la République, Nicolas Sarkozy, de voir la France revenir, sous conditions, dans le commandement intégré de l'OTAN. Même si aucune décision définitive n'est prise aujourd'hui, je souhaite connaître les prévisions budgétaires et l'articulation de cette dépense nouvelle.
Un dernier mot concernant la réserve opérationnelle. Elle est devenue, avec la professionnalisation, le véritable lien armée-nation ; lien intergénérationel indispensable à la cohésion nationale.
Sa dotation est inchangée dans le budget 2009. C'est une lacune, même si 92 millions d'euros y sont consacrés. En conclusion, monsieur le ministre, ce budget novateur suit les recommandations du Livre blanc, garantissant à la France son rang de puissance militaire. Nous comptons sur votre vigilance pour que son exécution soit conforme à ce que nous allons voter aujourd'hui, avec beaucoup d'enthousiasme pour ma part. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a très longtemps que, dans notre pays, les questions de défense ne s'étaient retrouvées, comme depuis quelques mois, au centre de l'actualité et de la réflexion collective.
Dès son accession à la présidence de la République, Nicolas Sarkozy a manifesté sa volonté de voir s'engager une réflexion permettant d'aboutir à une réforme de notre appareil de défense qui devait répondre a trois impératifs : assurer à notre pays une sécurité complète – lorsque l'on parle de pays, nous incluons bien évidemment nos compatriotes d'outre-mer, que nous devons assurer de notre total soutien et auxquels nous devons apporter un très haut niveau de sécurité –, permettre à la France de tenir dans le monde sa place de membre permanent du Conseil de sécurité, et développer, compte tenu des conditions nouvelles des relations internationales, le continuum défense-sécurité. Tout cela dans une conjoncture financière difficile et face à ce qu'il est convenu d'appeler « la bosse », héritage de la volonté de ces dernières années de rattraper le temps perdu à l'époque où le budget de la défense était trop souvent considéré comme une variable d'ajustement.
De cette volonté est né, après de longs mois d'une concertation et de réflexion sans précédent, le Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale, présenté par le chef de l'État aux armées, et à travers elles, au pays, le 17 juin dernier. Les principaux objectifs de ce Livre blanc sont, d'une part, la définition d'une stratégie globale pour la France, et, d'autre part, la constitution d'un support pour les futures lois de programmation militaire.
C'est peu dire que les conclusions du Livre blanc ont suscité de vives réactions, en particulier dans les armées. L'effort qui leur est demandé, à peine treize ans après celui nécessaire à la mise en place de la professionnalisation, est important et sera, par endroit, douloureux. Mais ce que je sais des hommes et des femmes qui servent notre pays, ce que j'entends également par la voix de leur état-major, c'est que cette nécessaire réorganisation qu'ils vont devoir conduire, ils la conduiront bien, conscients des enjeux qu'elle représente pour l'efficacité de notre défense.
L'élu local que je suis sait également que, dans le cadre de la réorganisation territoriale actuellement amorcée, certaines régions vont devoir faire face aux départs d'implantations. L'État s'est engagé à accompagner financièrement ces mutations.
Sur le terrain, l'animation et la coordination interministérielle du dispositif national d'accompagnement a été confié à Hubert Falco, qui ne ménage pas sa peine. Je tiens à lui rendre hommage.
Notre commission de la défense a désigné deux de ses plus brillants membres, François Cornut-Gentille et Bernard Cazeneuve, pour suivre les conditions dans lesquelles cette réforme sera conduite. Une fois de plus, la représentation nationale montre sa capacité à remplir le rôle régalien de contrôle des politiques publiques, qui est le sien.
Mais il serait partial de se focaliser sur les efforts demandés et de laisser de côté les avancées importantes qui sont annoncées. Certes, il est prévu une réduction des effectifs des armées de plus de 54 000 personnes d'ici à 2014. Cependant, la priorité est donnée à la mise en oeuvre de technologies complexes et capitales, en particulier dans le domaine spatial.
Il est prévu de consacrer à notre effort de défense un budget de l'ordre de 377 milliards d'euros sur les douze prochaines années. Il s'agit donc bien d'une évolution en profondeur de nos armées et de notre défense. Notre histoire nous y engage, tout comme la diversité de la menace contemporaine.
L'histoire est importante quand on parle défense et choses militaires. Chaque fois que, dans notre passé, de Bouvines à Verdun en passant par Austerlitz, nous avons disposé d'un appareil de défense adapté à la situation, nous avons été forts. Chaque fois, de Crécy à la percée de Sedan, en passant par les champs de bataille de 1870, que nous avons été fin prêts pour la guerre « d'avant » nous avons été submergés.
Il nous faut donc nous adapter à la nouvelle donne, tant tactique que stratégique.
Nous devons conduire cette adaptation avec un triple souci : renforcer le pilier européen de la défense ; renforcer la relation OTAN, grâce à l'interopérabilité des systèmes ; maintenir notre capacité de souveraineté et d'autonomie, assurant à nos forces le degré de liberté nécessaire à leur déploiement.
Au-delà de ces grands axes, il convient que nous nous interrogions sur le devenir de nos industries de défense, garantie de notre indépendance. Elles participent à notre présence dans le monde en même temps qu'elles assurent à notre pays une importante quantité d'emplois de haut niveau et de considérables rentrées de devises.
Ce secteur, plus que tout autre, doit disposer d'une vision à long terme et d'une rénovation de sa relation très particulière avec ce client très particulier qu'est l'État. C'est lui, et ce n'est pas chose facile, en ces temps de pénurie financière, qui doit, en ayant, pour reprendre le mot de Talleyrand, « de l'avenir dans l'esprit », favoriser la recherche, les études en amont et, de façon générale, le maintien des compétences.
Il y va de notre avenir, tant il est vrai, et quelques exemples voisins nous le prouvent, qu'il ne faut que peu de temps pour perdre un savoir-faire qu'il sera ensuite pratiquement impossible de retrouver.
Dans quelques semaines, peut être quelques mois, nous voterons la loi de programmation militaire 2009-2014. Elle devra être la mise en oeuvre complète et concrète de notre nouvelle politique de défense et de sécurité. La communauté nationale devra y être impliquée, car cet exercice sera une occasion unique de rapprocher l'institution militaire de la société, de mieux faire comprendre à nos concitoyens quels sont les risques de crise afin qu'en cas de situation particulièrement grave, telle une augmentation brutale des tensions internationales amenant à l'émergence d'un conflit de haute intensité, ils acceptent les efforts et les sacrifices qui pourraient leur être exceptionnellement demandés.
En ce sens, la LPM devra pouvoir s'inscrire dans ce climat de grande incertitude souligné par le Livre blanc, prendre en compte l'impératif d'une vigilance permanente et prévoir l'éventualité d'une surprise stratégique qui imposerait une rapide remontée en puissance de nos moyens de défense. C'est paradoxalement avant que le Parlement ait validé ce document fondamental pour l'avenir de notre défense que nous examinons ce budget triennal 2009-2011 qui couvre donc la première moitié de la future LPM.
Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons qu'en être satisfaits, car il est effectivement la traduction directe des conclusions du Livre Blanc. Le budget consacré est, avec un peu plus de 32 milliards d'euros, proportionnellement à la hauteur des 377 milliards d'euros que le Livre blanc alloue aux douze prochaines années. Nous voterons surtout, au-delà de la progression de 5 % des ressources totales, la hausse de plus de 10 % en faveur des équipements, qui permettra d'assurer le financement des livraisons prévues en 2009 et la hausse du MCO à hauteur de 8 %, ainsi que le maintien en condition opérationnelle des matériels qui attendent patiemment, certains d'ailleurs depuis longtemps, leurs éventuels remplaçants.
En ce qui concerne les effectifs, en 2009, 22 257 postes seront proposés au recrutement et 8 250 postes seront supprimés ; 140 postes seront proposés dans le cadre connaissance et anticipation.
Cela aidera à développer chez nous cette culture du renseignement absolument nécessaire pour agir en toute connaissance de cause, comprendre le monde et les situations, savoir quand la force peut et doit être utilisée en support de notre action diplomatique.
La récente création de la DCRI, la nomination d'un coordinateur du renseignement à l'Élysée sont un début de réponse à ces nécessités.
L'effort prévu dans le domaine spatial, qui devient une priorité de notre défense, marque clairement ce virage vers le besoin de savoir pour agir juste.
Faire face aux crises, c'est aussi les prévenir, c'est-à-dire savoir les anticiper pour les empêcher d'éclater. En ce sens, l'effort poursuivi en matière de recherche et développement est fondamental. Bien sûr, il permet le développement et la dynamisation de notre industrie de défense, quelle que soit la taille des entreprises concernées, afin de leur permettre de répondre durablement aux besoins de nos forces armées et surtout d'assurer leur pérennité et leur indépendance vis-à-vis de la seule commande nationale. Nous ne pouvons que louer vos efforts, monsieur le ministre, pour booster notre industrie à l'exportation. Ces efforts de recherche et développement doivent aussi être un des vecteurs essentiels de notre ambition européenne en étant le moteur de l'élaboration d'une industrie européenne de défense rationalisée et compétitive.
Au moment où les États-Unis investissent dans des budgets de recherche et développement colossaux sur des projets tels le submersible Aircraft dont on ne sait s'il sera un avion submersible ou un sous-marin volant ou sur le Hot Eagle, projet majeur d'aéronef suborbital qui fera passer La guerre des étoiles du virtuel au réel (Sourires), donnons-nous les moyens d'une vraie coopération européenne permettant le partage des coûts de recherche et d'expertise et, par extension, la préparation des futures consolidations industrielles européennes.
En ce sens, monsieur le ministre, l'agence européenne de défense et I'OCCAR qui sont deux organisations complémentaires et essentielles pour le développement des capacités européennes de défense tireraient un grand bénéfice d'un rapprochement.
Il semble qu'un accord de coopération doive être conclu dans quelques jours. Vous est-il possible de nous en dire plus, monsieur le ministre ?
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues nous fêterons mardi le quatre-vingt-dixième anniversaire de la fin de la Première guerre mondiale. Prenons la dimension des sacrifices consentis et ayons en ce moment une pensée pour les 8 millions de personnes qui ont perdu leur vie durant ce conflit. Malheureusement, la leçon n'a pas été entendue : combien de millions d'hommes et de femmes ont, depuis 1918, fait le sacrifice leur vie pour défendre leur liberté et l'intégrité de leur territoire ? C'est le cas des dix soldats français qui, le 19 août, ont péri en Afghanistan sous les couleurs de tous les pays unis au combat pour défendre un idéal d'un monde libre, solidaire et fraternel. Mes chers collègues, c'est, hélas, au prix de la guerre que nous construirons la paix. Continuons à bien nous y préparer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, l'examen de votre budget nous donne l'occasion d'éprouver les conditions dans lesquelles seront mises en oeuvre les orientations définies par le Président de la République – et qu'il vous revient d'exécuter – au lendemain de l'adoption du Livre blanc, qui redéfinit notre stratégie pour plusieurs années, et de celle de la révision générale des politiques publiques.
Je profite de cet exercice de vérité pour formuler quelques remarques et vous poser quelques questions.
Tout d'abord, ce budget semble être une condamnation très ferme de l'action conduite par votre prédécesseur sous l'autorité du précédent Président de la République. À cet égard, nous devons rendre hommage à l'honnêteté et à la rigueur intellectuelle qui ont présidé à votre démarche depuis votre entrée en fonction, monsieur le ministre, car vous avez été le premier à dénoncer le décalage très important entre le nombre de programmes qui ont été engagés sous la précédente législature et les capacités de financement de l'État pour assurer leur bonne exécution.
Dans le projet de budget pour 2009 comme dans la loi de programmation militaire qui a été présentée au conseil des ministres, et dont nous aurons à débattre au début de l'année 2009, figurent un certain nombre de décisions concrètes qui témoignent, s'il en était besoin, de ce décalage entre les capacités de financement et les programmes lancés et de l'importance de l'épreuve de vérité dans laquelle vous vous êtes engagé.
Je prendrai deux exemples. Premièrement le programme du porte-avions 2, lancé en coopération avec les Britanniques, selon une propulsion classique, et qui devait renforcer les éléments d'interopérabilité et générer des économies, s'est traduit par un surcoût de 250 millions d'euros par rapport à ce qu'il aurait coûté si nous l'avions fait seuls, et permettra en outre aux Britanniques de construire leur porte-avions – alors que la France y renonce – avec un design payé par nous !
Deuxième exemple, le montage financier des frégates européennes multi missions, les FREMM, que vous avez qualifié de baroque.
Sur les dix-sept prévues, vous n'en retenez que neuf. En outre, 1319e du financement des FREMM devait être assuré par le ministère du budget et 619e par le vôtre, monsieur le ministre. Si le financement par votre ministère a toujours été prévu, il n'en est pas de même pour le ministère du budget. Nous avons attendu ces crédits en loi de finances rectificative 2007 comme on attend Godot dans la pièce de Beckett !
Or le projet de porte-avions ne figure plus dans le budget pour 2009, ce qui permet de réduire de 3 milliards le niveau des crédits d'équipement. Dans la loi de programmation militaire, vous ne reconnaissez cependant comme valide que la tranche ferme des FREMM, avec un étalement de ce programme.
Vos arbitrages tiennent compte du décalage que nous dénoncions entre les capacités de financement et les programmes engagés. Il nous reste maintenant à observer ensemble si le modèle de substitution que vous nous proposez est valable ou non. C'est l'objet de la mission que le président de la commission de la défense a confié à François Cornut-Gentille et à moi-même. Nous souhaitons, par-delà des sensibilités politiques différentes, conduire ce travail avec la plus grande honnêteté intellectuelle, l'objectif étant de mesurer l'adéquation entre les objectifs et les moyens mobilisés dans l'intérêt du pays et de nos armées.
Comme l'ont dit Patricia Adam, Jean-Michel Boucheron et les orateurs de la majorité, le modèle que vous avez construit repose sur une architecture parfaitement organisée, mais dont les hypothèses méritent d'être validées. Votre modèle repose sur l'idée que les équipements de demain devront être financés par un effort très important de réduction de dépenses de fonctionnement résultant de la déflation des effectifs à hauteur de 54 000 personnels dont on attend environ 2,7 milliards d'économies auxquels s'ajoutera 1,2 milliard d'économies résultant de la rationalisation des implantations militaires sur le territoire national. Nous attendons également des recettes exceptionnelles à hauteur de 3,5 milliards d'euros résultant de la vente par le ministère de ses actifs immobiliers et d'un certain nombre de ses fréquences.
En face de ces économies censées financer le nouveau niveau d'équipement, il y aura des dépenses d'infrastructures, 1,2 milliard d'euros. La restructuration des armées sur le territoire commence par coûter avant de rapporter.
Ce qui est normal, personne ne le conteste. Aux dépenses d'infrastructure s'ajoutent des dépenses d'accompagnement social chiffrées à 900 millions d'euros et des dépenses pour assurer le regroupement de votre ministère dans le Balargone. Celles-ci seront financées dans le cadre d'un partenariat public-privé dont la principale caractéristique, rappelons-le, est de permettre aux entreprises privées de faire des profits et aux collectivités publiques de financer des déficits !
Le montage global qui nous est proposé appelle de notre part un certain nombre de questions. Pour que le modèle que vous présentez, monsieur le ministre, fonctionne, il doit être hors pensions, ce que nous avons obtenu de votre part. Nous n'avons donc aucune raison de douter de la parole qui nous a été donnée, même si nous constatons que le modèle est extrêmement tendu au plan budgétaire et qu'il le sera davantage encore en raison notamment de la crise. Alors que le nombre des départs à la retraite augmentera, il faudra veiller à ce que les pensions soient financées hors ressources du ministère de la défense. Si nous avons une grande confiance dans le ministre de la défense, cela n'exclut pas une certaine méfiance à l'égard du ministre du budget. Nous devrons donc rester extrêmement vigilants. Je souhaite que vous nous apportiez toutes les assurances concernant la fiabilité de cette hypothèse.
Par ailleurs, le modèle sera financé par des ressources extrabudgétaires, avez-vous déclaré, monsieur le ministre. Pour le budget 2009, celles-ci sont évaluées à 1,6 milliard d'euros.
Vous connaissez l'évolution du marché de l'immobilier. Vous savez donc, dans le contexte de crise qui prévaut, à quel point ces ressources sont aléatoires, ce qui risque de compromettre l'ensemble du modèle. Quelles garanties pouvez-vous nous donner ?
Vous escomptez que les cessions immobilières vous rapporteront de l'argent que vous pourrez investir dans le modèle. Or beaucoup d'emprises immobilières seront cédées à l'euro symbolique aux collectivités locales. Avez-vous évalué le différentiel entre les recettes escomptées et ce que vous percevrez effectivement ?
Autre question : quel est l'impact des OPEX sur votre budget ? En effet, 500 millions d'euros sont provisionnés pour les opérations militaires extérieures. Vous avez évoqué devant la commission de la défense 60 millions d'euros de recettes interministérielles dont 30 millions seraient prélevés sur votre ministère et 30 autres millions sur le budget des autres ministères : même quand on est socialiste, 500 plus 30 égale 530 ! (Sourires sur tous les bancs.) Si l'on rajoute les 30 millions de réserve interministérielle, on arrive à 560 !
Il y a au moins des choses que l'on sait faire : on se rassure comme on peut ! (Sourires.) Vous nous avez souvent reproché de ne pas savoir compter, nous vous faisons la démonstration du contraire !
Mais comment allez-vous passer de 530 millions à 800 millions ? De notre point de vue, le compte n'y est pas.
La différence sera-t-elle prélevée, comme il est de tradition, sur le titre V ? J'ai bien entendu, monsieur le ministre, que des progrès ont été accomplis afin que tel ne soit pas le cas, mais si cela l'était, l'équilibre du modèle serait compromis.
Concernant la politique industrielle et les crédits destinés à financer des équipements, beaucoup dépendra du coût auquel on sera capable de les réaliser et des relations que votre ministère entretiendra avec les industriels. Tout étalement ou remise en cause de programmes conduiront à l'augmentation de leur coût. C'est pourquoi il est important de respecter les calendriers. L'édredon doit entrer dans la valise.
L'article 10 de la loi de programmation militaire remet en cause l'unicité de DCNS et risque de conduire à sa filialisation et à sa privatisation, ce qui serait une rupture culturelle avec le fonctionnement de cette entreprise et pourrait même compromettre sa profitabilité. Récemment, le Président de la République a déclaré aux Chantiers de l'Atlantique qu'il était favorable à un rapprochement entre les Chantiers de l'Atlantique et DCNS, rapprochement dont je ne vois pas très bien sur quelle synergie industrielle il repose.
Nous avons vu, hier, l'État entrer dans le capital des Chantiers de l'Atlantique. Quelle est la stratégie de votre ministère concernant ce rapprochement industriel ? Quelle est votre stratégie industrielle pour DCNS ? De votre réponse dépendra en grande partie la fiabilité de la politique industrielle et du modèle global que vous soumettez à notre approbation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette année, le budget de la défense revêt un caractère particulier, et ce pour plusieurs raisons.
Pour la première fois, il est présenté dans le cadre d'une programmation triennale qui doit permettre une meilleure visibilité de son action. Depuis 2007, le Président de la République a engagé une profonde modernisation de notre défense. La revue générale des politiques publiques conduit à une restructuration de notre outil militaire en termes d'implantations géographiques, de réduction de ses effectifs et de réorganisation de ses structures.
Les conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale imposent l'adaptation de notre outil de défense aux nouvelles menaces et aux nouveaux risques : le terrorisme, la prolifération nucléaire et les cyber-attaques. Ces risques nous imposent d'anticiper et de connaître l'évolution des crises, de nous doter de moyens supplémentaires d'intervention et de renseignement, ainsi que de renforcer notre capacité de projection et de mobilité.
La loi de programmation militaire 2009-2014, qui sera prochainement examinée par le Parlement, définira les moyens que nous mettrons à la disposition de nos armées en compétences et en nombre. Cette loi couvrira la première étape de la mise en oeuvre de la nouvelle stratégie de sécurité nationale définie par le Livre blanc. Elle amorcera une réforme profonde des armées, avec une adaptation et une modification des forces.
Aujourd'hui, 60 % des ressources humaines sont consacrées à l'administration générale et au soutien, 40 % aux forces opérationnelles : ce ratio doit être inversé.
L'année 2008 a été difficile pour notre armée avec le dramatique accident de Carcassonne et la perte de dix de nos soldats en Afghanistan.
C'est peut-être en matière d'opérations extérieures qu'il nous faudra à l'avenir faire des choix de lieux, de nombres, de tactique, de participation. En effet, sauf modification de posture, nous nous préparons progressivement à engager un milliard d'euros. La France est aujourd'hui présente sur 29 théâtres d'opérations extérieures ; c'est sans doute trop. Depuis quelques années, nous avons ouvert davantage de théâtres d'opérations que nous n'en avons fermé.
Nous devrons pourtant nous interroger sur le redéploiement de nos forces : l'armée doit concentrer ses moyens en hommes et en matériels lorsque les circonstances l'exigent. En Europe, la France déploie, parfois trop seule, des forces militaires importantes, notamment au Kosovo. L'Europe de la défense devrait constituer une priorité sur son propre territoire. La présidence française de l'Union aurait dû nous permettre de renforcer cette exigence.
Deux de nos théâtres d'opérations extérieures sont à mes yeux emblématiques : le Liban et l'Afghanistan. J'ai eu le privilège de me rendre sur ces deux théâtres. Je vous le demande : faut-il conserver aujourd'hui au Liban la forme actuelle de déploiement militaire ? La présence de nos chars Leclerc en si grand nombre y est-elle opportune ? Il serait à mon sens logique de redéfinir de manière substantielle notre présence sur place, étant donné l'investissement personnel du Président de la République pour ramener la paix dans cette région du monde.
Quant à l'Afghanistan, quoi qu'en disent certains, notre présence s'y impose. Être une grande nation a un prix : être là, au côté de vingt-quatre autres pays européens, lorsque la paix du monde est menacée. Garantissons simplement à nos soldats les moyens nécessaires en termes de transports, d'armement, de communication, d'écoute, de renseignements. Nos soldats sont fiers de leur engagement, conscients de leur mission et du sacrifice qu'ils sont susceptibles de faire pour notre sécurité. Ne les décevons pas ! L'exercice budgétaire 2009 sera observé par la nation et par les autres pays.
Le budget qui nous est présenté aujourd'hui, et qui s'élève à 32 milliards d'euros, est riche de défis. Son exécution devra faire l'objet d'une attention particulière. Monsieur le ministre, dans les conditions économiques actuelles, la progression du budget de la défense témoigne de notre volonté de faire partie des grandes nations militaires. Les redéploiements militaires, les regroupements, les commandes corrigées ne sont rien pour un pays qui, comme le nôtre, veut être respecté et reconnu et contribue à nous permettre de vivre en paix.
Aussi voterai-je sans état d'âme ce budget de la défense nationale pour 2009. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, dans un entretien que vous avez récemment accordé au journal Le Figaro, vous déclariez que la modernisation des armées se traduirait par 54 000 suppressions d'emplois d'ici à 2015.
Ce mot de modernisation, employé sans retenue par tous les membres du gouvernement auquel vous appartenez, masque souvent la volonté de détricoter des pans et des dispositifs entiers de notre société. Cette volonté, nous l'avons déjà dénoncée lors des débats sur la loi de modernisation de l'économie, avec le démantèlement du code du travail ; nous la constatons également aujourd'hui dans l'éducation nationale, avec la réforme des lycées.
Ainsi, derrière ce chiffre, ce sont des vies d'hommes et de femmes qui sont en jeu. Je songe particulièrement au personnel civil travaillant sur des sites militaires tel celui du centre de santé des armées de Mondeville, qui doit fermer dans moins d'un an, en juillet 2009. Les ouvriers d'État et les fonctionnaires seront donc concernés par ces suppressions d'emplois que vous qualifiez de mesures de modernisation. Vous admettrez, monsieur le ministre, que, pour ces personnes, ce dernier mot ne correspond pas tout à fait à la même réalité que pour vous.
Il y a plus grave. Les conditions que le ministère de la défense propose aujourd'hui à ce personnel civil, s'agissant des primes de départ ou de la mobilité, sont tout simplement inacceptables : vous ne lui laissez aucune liberté de choisir entre la mutation sur un autre site militaire et le départ volontaire.
Les précédents plans, entre 1997 et 2008, prévoyaient une augmentation croissante de l'indemnité de départ jusqu'à la quarantième année d'ancienneté, moyennant un effet de seuil à partir de la vingtième année, ce qui portait le montant maximal à 91 470 euros. Mais l'actuel plan PARM s'inscrit dans une tout autre logique, qui condamne les ouvriers d'État à accepter d'être mutés sur d'autres sites, puisque leur prime de départ volontaire décroît à partir de la vingt-cinquième année d'ancienneté, où le montant maximal demeure le même, avant de tomber à 52 470 euros pour quarante ans de travail au service de l'État.
En outre, ce dispositif interdit de fait aux ouvriers d'État l'accès à la prime de départ, réservée à celles et ceux que plus de deux ans séparent de l'ouverture du droit à la retraite. Pour les fonctionnaires, cette indemnité n'est accessible qu'aux volontaires, plus de cinq ans avant l'ouverture du droit de pension.
En prévoyant de fermer des sites militaires – par exemple celui de Mondeville – en juillet 2009, on ne laisse que quelques mois aux familles des personnels civils pour « accepter » une proposition de mutation, le plus souvent à plusieurs centaines de kilomètres, alors même que dans le Calvados, par exemple, la moyenne d'âge des ouvriers d'État est de 53 ans.
Monsieur le ministre, par ces 54 000 suppressions d'emplois, vous avez lancé le plus grand plan social qu'ait connu la France. C'est votre choix. Mais attachez-vous au moins à accompagner le plus dignement et le plus efficacement possible l'évolution ainsi imposée aux familles concernées, en particulier celles de civils qui, souvent depuis plusieurs décennies, servent l'État français. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Dans le budget dont nous débattons aujourd'hui, les crédits d'équipement atteignent un niveau élevé, incluant, à hauteur de 1,61 milliard d'euros, les crédits exceptionnels prévus par le projet de LPM que nous examinerons en 2009.
Néanmoins, le retard accumulé ces dernières années est tel que, malgré cet effort, les livraisons de matériels neufs seront relativement peu importantes (M. le ministre rit) – pas assez, en tout cas, pour satisfaire les besoins opérationnels de nos armées. Ceux qui, comme moi, ont eu le privilège de partir en mission dans plusieurs de nos théâtres d'opérations extérieures ont pu constater qu'ils manquaient de certains matériels, s'agissant notamment de l'aéromobilité.
La fabrication de ces équipements nécessite de toute évidence l'intervention d'opérateurs industriels. Or, et c'est là un vif sujet d'inquiétude, certaines annonces du Président de la République, d'une part, et certains articles de la LPM, de l'autre, laissent augurer un avenir très sombre pour notre industrie de défense. Sur ce point, je reprendrai, en les développant, les propos de mon brillantissime collègue Bernard Cazeneuve.
Faut-il comprendre que les autres ne sont pas bons ? (Rires et exclamations sur divers bancs.)
Lui l'est particulièrement, monsieur le ministre ! (Même mouvement.)
Ainsi des propos que le Président de la République a tenus à Saint-Nazaire, aux Chantiers de l'Atlantique-Aker Yards, qui venaient de subir une OPA sauvage de la société coréenne STX. Nous apprenons aujourd'hui même que l'État entrerait à hauteur de 33 % à leur capital, ce dont nous nous réjouissons, car cela permettrait de conforter l'emploi, notamment sur les sites de Saint-Nazaire et de Lorient. Mais, dans ce même discours, le Président créait la surprise – y compris la vôtre et celle de Bercy – en annonçant un rapprochement entre construction navale civile et militaire, entre STX et DCNS.
En 2004, le Gouvernement avait choisi de concentrer l'industrie navale française de défense, par le rapprochement entre DCN et Thalès. Cette opération, baptisée « Convergence », a été réalisée en 2006. Elle préfigurait la consolidation européenne actuellement en cours, et dont atteste le projet de création d'une filiale commune à DCNS et FinmeccanicaWASS dans le domaine des torpilles.
En outre, un rapprochement avec l'allemand TKMS serait à nouveau d'actualité, alors que la multiplication des programmes nationaux concurrents – F-125 et FREMM, K-130 et Gowind, MHD et BPC, U-216 et Scorpène – entraîne une intensification contre-productive de la concurrence entre les deux groupes sur le marché de l'export.
Ce choix de rapprochement entre les industriels de la défense est en totale contradiction avec un éventuel rapprochement franco-français entre constructions navales civile et militaire. Il risquerait d'enrayer la dynamique européenne dans laquelle nous nous inscrivons…
… que nous soutenons ; il risquerait en particulier de compromettre nos relations avec les industriels allemands.
Nous aimerions donc, monsieur le ministre, que vous nous éclairiez précisément sur les conséquences du discours de Saint-Nazaire.
L'autre sujet de vive inquiétude pour les parlementaires que nous sommes, mais aussi et surtout pour les personnels, est l'unicité de nos entreprises de défense, en particulier celle, une fois encore, de DCNS.
En 2003, lors du changement de statut de DCN, l'Etat s'était engagé à préserver le statut de société de plein exercice de l'entreprise. Or le PLM 2009-2014, dont nous examinons aujourd'hui la première annuité, propose la suppression de l'article 78 de la loi du 28 décembre 2001, qui figeait les conditions d'apport d'activité à une filiale.
Une fois encore, nous ne nous opposons nullement à une diversification de notre industrie de défense, qui serait profitable à nos entreprises et à la sous-traitance – à condition d'être pérenne et de rester, dans le cas d'entreprises comme DCNS, sous contrôle majoritaire de l'État. Or l'article 78 satisfaisait à cette condition en soumettant la filialisation à un seuil effectif de 250 personnes et de 375 millions d'euros de chiffre d'affaires. Mais en supprimant purement et simplement ces seuils, on mettrait un terme à l'unicité de DCNS.
En somme, ce que vous nous proposerez demain, c'est, en votant la LPM, d'instaurer un outil législatif permettant la « vente par appartements » de DCNS.
Si je l'évoque dès aujourd'hui, c'est qu'il y a urgence, et que de fortes angoisses se font jour dans l'entreprise quant à l'unicité, mais aussi quant aux conditions sociales qui seront garanties aux ouvriers d'État et aux anciens fonctionnaires, civils ou militaires, ayant conservé un lien avec l'État.
Aux termes du décret interministériel de mai 2002, ceux-ci ne peuvent être mis à la disposition d'une entreprise que si celle-ci est détenue majoritairement par l'État. Or le projet de LPM, « afin de faciliter l'adaptation du groupe à l'évolution de ses activités », prévoit que les ouvriers d'État et les fonctionnaires pourraient être mis à la disposition d'entreprises françaises ou européennes dès lors que l'État détiendrait au moins 33 % de leur capital. En outre, il ne fait pas référence au volontariat, élément pourtant fondamental de la clause de mobilité des ouvriers d'État. Ainsi, l'on pourrait assister demain à la dispersion des compétences de DCNS et à des mutations forcées de personnels, ce qui n'est pas sans évoquer les drames humains qu'engendre aujourd'hui la RGPP.
Nous vous le demandons donc, monsieur le ministre : la France a-t-elle encore une stratégie industrielle, notamment en matière de construction navale ? On nous annonce le mariage de la construction navale civile et de défense, alors même que nous attendons un bilan du rapprochement entre DCN et Thalès : quelle valeur ajoutée ce changement a-t-il produite ? Quels changements s'agissant de la gamme des produits? Quelles synergies, quelles modifications stratégiques ? Quels gains en matière d'exportation, à l'heure où seule l'exportation semble pouvoir préserver le plan de charge de certains établissements ?
Quel est le projet industriel de l'État actionnaire et patron ? Quels sont ses projets capitalistique, stratégique ? Entendez-vous vraiment dissoudre la construction navale dans une nébuleuse d'activités diverses, c'est-à-dire faire le contraire de ce qui a été fait pour EADS ?
Nous craignons vivement, monsieur le ministre, que vous adoptiez une approche idéologique : faire vite, sans savoir bien quoi, ni selon quelle stratégie.
Sans doute la LPM sera-t-elle l'occasion d'évoquer à nouveau ces sujets ; mais nous avons besoin de vos réponses dès aujourd'hui, tant, je vous l'ai dit, l'inquiétude est grande, et parce que le groupe SRC entend défendre notre industrie de défense, mais aussi l'avenir de ses salariés, comme il l'a fait à propos de la RGPP. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, je profite de l'occasion de ce débat pour vous faire part de mes préoccupations s'agissant de l'aéromobilité des troupes françaises et vous demander de bien vouloir nous faire connaître les orientations du Gouvernement en ce domaine.
Dans leur excellent rapport du 30 janvier 2008, mes collègues Alain Marty, Michel Sordi et Jean-Claude Viollet ont pointé du doigt les insuffisances de la projection de nos forces.
L'aéromobilité des forces françaises se trouve aujourd'hui entravée par le vieillissement de la flotte des aéronefs, avions ou hélicoptères, dont le remplacement est toujours repoussé alors qu'ils sont fortement sollicités.
Notre parc d'avions de transports et de ravitailleurs est aujourd'hui mourant. Seuls 60% des cinquante-cinq Transall sont disponibles et certains appareils atteignent l'âge canonique de quarante ans. Il en va de même pour les quatorze Hercules C-130 : leur taux de disponibilité avoisine les 65% et leur retrait n'est prévu qu'en 2025. Seule fait exception la flotte des A310 relativement récente, qui n'est toutefois pas équipée pour le transport de fret.
La majorité de nos avions nécessite donc soit un renouvellement, soit une modernisation. Faute de quoi, nos capacités de projection d'ici à 2020 risquent d'être réduites à bien peu de chose d'un point de vue opérationnel.
Pour ce qui est de la flotte d'hélicoptères de nos forces armées, qui est constituée de 576 appareils, la situation actuelle est encore plus préoccupante. Seules vingt-quatre machines sont récentes, dix Tigre et quatorze Caracal, soit 4 % du total.
Monsieur le ministre, force est de constater que les capacités de manoeuvre aéromobiles de l'armée de terre reposent à ce jour sur une flotte en fin de vie dont la disponibilité technique opérationnelle est fortement affectée par l'âge des appareils. De ce fait, l'interopérabilité avec les flottes alliées est considérablement réduite.
La marine dispose, quant à elle, de 93 hélicoptères. Toutefois la situation est là encore assez précaire puisque, en dépit de l'âge moyen du parc, d'environ douze ans, son taux de disponibilité n'est que de 44 %.
Nous sommes bien conscients des contraintes budgétaires qui s'imposent à vous, monsieur le ministre, et de la difficulté qu'il y a à résoudre les problèmes de l'aéromobilité française. Les régler à court terme ne serait d'ailleurs pas réaliste s'agissant d'un aussi vaste domaine. Cependant, je crois nécessaire d'effectuer une redéfinition, au moins temporaire, du nombre et des modalités des interventions françaises dans le monde et, surtout, de consentir un effort particulier pour la maintenance de la flotte, en attendant son renouvellement.
J'en viens à présent au programme Rafale, destiné à remplacer à terme la totalité des avions de combat de l'armée de l'air, Mirage et Jaguar, ainsi que les Super-Étendard modernisés de la marine. Cette opération permettra de faire des économies pour l'entretien et pour la formation des pilotes, et de réduire la flotte de 680 à environ 300 avions. À long terme, l'État réalisera donc des économies importantes.
Il m'apparaît extrêmement important que ce programme continue à être soutenu afin que nous poursuivions la préparation de l'avenir de notre pôle aéronautique dans une perspective européenne. De l'avenir du Rafale à l'étranger dépend la future place du groupe Dassault Aviation dans le leadership européen en matière de construction aéronautique, civile et militaire.
Je rappelle aux détracteurs du Rafale que ce programme revient moins cher que ce que n'aurait coûté une participation à l'Eurofighter. Toutefois, monsieur le ministre, si ce programme devait être ralenti dans les années à venir, pensez-vous que l'export pourrait contribuer à maintenir une cadence industrielle à même d'assurer sa cohérence ?
J'en viens maintenant au dernier point de mon intervention, la loi de programmation militaire pour 2009. Cette dernière prévoit une accélération du renouvellement de la flotte de surface. Au cours de la présentation du Livre blanc, le Président de la République a indiqué qu'une décision concernant la construction d'un second porte-avions serait prise à l'horizon des années 2011-2012. Il m'apparaît primordial de trouver une solution à la situation actuelle. Tous les sept ans, la France se trouve en effet dépourvue de force aérienne de projection car le Charles de Gaulle, son seul porte-avions, se voit immobilisé en rade de Toulon pendant plusieurs mois pour des travaux de réfection. Dans le cadre de la mutualisation des forces armées européennes, une solution pourrait sans doute être trouvée avec nos partenaires européens, notamment avec les Britanniques qui ont, comme nous, une très grande étendue de côtes à protéger. Aussi aimerais-je savoir si la construction d'un porte-avions franco-européen est définitivement écartée ?
Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, pour vos réponses à ces trois questions qui ont toutes pour enjeu la projection de nos forces vers des théâtres extérieurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Défense » est l'une des rares à voir son budget augmenter de manière substantielle. Ce serait donc un bon budget, comme tout le monde s'accorde à le dire. (Sourires.) Faut-il pour autant s'en réjouir dans la conjoncture actuelle ? La défense doit-elle, par les temps qui courent, constituer une priorité de la politique de l'État et du Gouvernement ? Si je peux comprendre votre satisfaction réelle et légitime, monsieur le ministre, permettez que je m'interroge, comme nos concitoyens, sur de tels choix politiques assumés par le Président de la République, le Premier ministre et vous-même. En période de récession et de crise économique mondiale, doit-on faire porter l'effort de la nation sur la modernisation de nos armées et de ses équipements ? Un effort dont vous avez vous-même souligné l'ampleur : « L'énorme effort de modernisation du ministère se concrétise par un énorme effort de la nation en faveur de l'équipement des forces », avez-vous déclaré.
Dans une période de crise que tous les spécialistes annoncent comme durable, et qui sera peut-être plus dévastatrice encore pour l'emploi que ne le fût la crise de 1929, il est pour le moins inquiétant de voir des choix politiques et des arbitrages budgétaires privilégier autant les programmes d'armement, lesquels sont, dans ce budget, en hausse de plus de 10 %, s'élevant à 17 milliards d'euros. Par ces temps de disette, monsieur le ministre, vous devez faire beaucoup d'envieux parmi vos collègues !
Mais, « gouverner c'est choisir ». Et si vos choix sont clairs, ils n'en sont pas moins très inquiétants !
Il m'est toujours très difficile d'expliquer à mes concitoyens de Wallis-et-Futuna qui souffrent, et dont l'hôpital, pour ne parler que de lui, est dans une situation catastrophique et indigne de notre République, que le Gouvernement, leur gouvernement, a prévu pour 2009 d'acquérir pas moins de quatorze Rafale et huit hélicoptères Tigre.
Alors, monsieur le ministre, je comprends très bien votre satisfaction d'avoir un budget pour 2009 qui bénéficie de plus de 37 milliards d'euros de crédits de paiement et de 5,4 % de crédits supplémentaires. Seule la mission « Enseignement supérieur et Recherche » fait mieux avec une hausse de 6,5 % !
Mais ce budget fait suite à la revue des programmes d'armement, au très controversé Livre blanc et à la parfois très discutable révision générale des politiques publiques. Il se veut la première traduction financière d'une vaste réforme de notre outil de défense, une réforme nécessaire mais dont le prix a été très élevé puisqu'elle s'est soldée par d'importantes restructurations et des baisses d'effectifs massives.
Dès lors, le coût réel de ce budget se manifeste d'abord dans la suppression, dès l'année prochaine, de quelque 8 250 postes. Pour la première fois de son histoire, le ministère de la défense verra sa masse salariale chuter : en 2009, elle n'atteindra que 11,7 milliards d'euros. Des effectifs moins importants, des salaires pas toujours situés au niveau d'expertise de nos militaires et des équipements toujours plus nombreux, toujours plus chers à l'achat, toujours plus coûteux à l'entretien et pas toujours des plus rentables comme l'illustre l'exemple de notre char Leclerc, le meilleur du monde mais aussi le plus cher et le plus fragile !
Ce budget est aussi celui qui entérine la nouvelle carte militaire structurée autour de 90 bases de défense, après la fermeture progressive et programmée de 83 sites, décision parfois incompréhensible – c'est le cas, entre autres, pour le Centre national d'aguerrissement en montagne de Briançon, si cher à mon collègue Joël Giraud.
Enfin, ce budget doit être mis en perspective avec la future loi de programmation militaire dont nous débattrons, ici même, au début de l'année prochaine. Ce texte, examiné en conseil des ministres la semaine dernière, prévoit de consacrer 185 milliards d'euros à la défense de 2009 à 2014, dont plus de la moitié sera destinée à l'équipement.
Dans cette même période, notre armée perdra 54 000 postes. Êtes-vous certain, monsieur le ministre, que notre armée sera plus performante avec moins de postes mais plus de moyens matériels ?
Les suppressions de postes et les fermetures de sites suffiront-elles pour financer de tels investissements ? Vous évoquez vous-même une « bosse budgétaire », avant de rappeler la promesse du Président de la République selon laquelle toutes les économies réalisées au sein du ministère de la défense seront affectées au budget de la défense. Je suis au regret de vous dire, monsieur le ministre, que cela fait déjà quelque temps que les promesses du Président de la République n'engagent que ceux qui y croient.
N'est-ce pas ce même Président de la République qui avait promis qu'il serait le Président du pouvoir d'achat ? On attend encore aujourd'hui qu'il nous le prouve !
Et d'ailleurs, pourquoi toutes les économies réalisées par ces restructurations devraient-elles être réinvesties au sein de votre ministère ? Pourquoi ne pas en faire profiter les territoires lésés par la fermeture des sites ou bien les affecter à des politiques publiques de soutien et de relance de notre économie ? Ou encore les investir en direction des populations les plus fragilisées par la grave crise que nous connaissons. Les projets ne manquent pas, les besoins non plus. J'aurai d'ailleurs l'occasion d'en évoquer quelques-uns dès cet après-midi avec votre collègue de l'outre-mer lors de la discussion du budget de sa mission, qui ne bénéficie pas, hélas ! du même traitement de faveur que le vôtre.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un contexte de crise, le budget de la mission « Défense » pour 2009 sert une stratégie solide. Beaucoup en France réfléchissent aujourd'hui sur le rôle de l'État. En matière de défense, un large accord se dégage pour affirmer que l'État est attendu, qu'il doit avoir une vision stratégique et des moyens cohérents. C'est pour nos concitoyens un facteur important de confiance. Et nous sommes nombreux ici à souhaiter qu'il en soit ainsi.
Restent certaines incertitudes. D'abord, l'engagement en faveur de la défense atteint-il le niveau que nous souhaitons ? Est-il bien compris par nos concitoyens ? L'interpellation de M. Likuvalu me paraît à cet égard intéressante et révélatrice de ce que pensent certains Français, trop nombreux de mon point de vue. Tous les spécialistes des questions de défense qui se sont exprimés ce matin ont été très positifs à l'égard de ce budget et, au fond, très consensuels sur la stratégie à mener et ses traductions budgétaires. Mais je crains que les choses ne soient plus compliquées dans l'opinion, souvent à gauche mais pas uniquement.
Dans une ambiance de crise, chacun comprend qu'il faut protéger, mais certains souligneront, d'ici à quelques semaines ou quelques mois, la question des choix. On sera alors tenté de regarder sous un autre angle les questions de défense.
Il est donc indispensable de maintenir un effort politique très important en termes de pédagogie et de partage de ces enjeux. C'est aussi notre responsabilité en tant que parlementaires.
Après les événements tragiques du mois d'août, le débat qui s'est installé dans l'opinion a montré que nos concitoyens réagissaient mieux qu'on ne pouvait le craindre. Mais passé le moment de la tragédie et de la crise dans l'action, il ne faut pas relâcher l'effort sur ce terrain.
Je souhaiterais maintenant vous interroger sur la construction de la politique européenne de sécurité et de défense, nos relations avec l'OTAN et les conséquences en matière budgétaire.
Comment progresse la politique européenne de sécurité et de défense ? Quels seront les moyens opérationnels – la question du porte-avions a été utilement posée – et les conséquences budgétaires de cette politique ?
S'agissant de nos relations avec l'OTAN, le Président de la République et vous-même vous exprimez sur ce sujet depuis quelques mois. Les progrès que nous attendons dans la construction de la politique européenne de sécurité et de défense sont-ils bien au rendez-vous pour justifier l'évolution de notre relation avec l'OTAN ? Par ailleurs, quelles seront les conséquences budgétaires de cette évolution ?
Plus largement, n'est-ce pas le bon moment pour poser, avec nos alliés en Europe et dans le monde, la question de l'effort des uns et des autres en matière de défense ? L'actualité nous montre qu'un chapitre nouveau de la discussion internationale s'ouvre ainsi qu'une réflexion sur l'évolution de la gouvernance européenne. Les questions financières et économiques sont souvent mises au premier plan. Mais celles relatives à la défense pourraient trouver leur place dans ce temps fort.
S'agissant de la réforme de l'outil de défense, plusieurs collègues ont évoqué la question des recettes exceptionnelles qui devraient atteindre 1,6 milliard d'euros en 2009. Au vu du contexte immobilier actuel, quelle est la réalité de cette somme ? Il ne faudrait pas, en effet, se satisfaire de pistes trop incertaines. Au reste, la situation financière complique aussi les partenariats public-privé. C'est un élément dont on doit tenir compte.
Si les baisses d'effectifs liées à la réforme des armées ont été précisées, je constate que le volet relatif à l'externationalisation est abordé avec plus de discrétion. J'aimerais donc connaître vos orientations en la matière.
J'en viens maintenant à la loi de programmation militaire et à l'après loi de programmation militaire – 377 milliards d'euros sont prévus sur douze ans. Aujourd'hui, en cette période de crise, chacun comprend, dans le monde politique et au-delà, qu'un effort est nécessaire. À cet égard, dans un climat plutôt favorable à la dépense publique, on peut considérer que la loi de programmation militaire et l'après loi de programmation militaire s'envisagent de manière raisonnable. Mais après la crise, après la phase de bousculement des repères budgétaires, on risque d'aboutir à une confusion, à moyen et long terme. Lorsque nous en reviendrons à la sagesse et à l'équilibre budgétaire, la défense sera-t-elle la variable d'ajustement ? Je ne le souhaite pas, car dans une bonne compréhension du retour de l'État, la défense est l'une des priorités qu'il faut servir dans la durée. Cette alerte est importante, car après la période quelque peu lyrique de compréhension budgétaire actuelle, le retour à la vérité budgétaire ne doit pas se faire sur le dos des enjeux de défense. Il vaut mieux le dire aujourd'hui plutôt que de pleurer demain.
Alors faut-il souhaiter le retour de l'État ? Oui, dans le débat actuel à la fois nécessaire et parfois un peu confondant. Mais il y a bien un enjeu sur lequel l'État est attendu, c'est celui de la politique de défense, avec des choix pour 2009 que nous approuvons, mais qu'il faudra tenir dans la durée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
(Mme Danièle Hoffman-Rispal remplace M. Rudy Salles au fauteuil de la présidence.)
Madame la présidente, monsieur le président de la commission de la défense, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, première année du budget triennal qu'appelaient de leurs voeux un certain nombre de parlementaires de l'opposition comme l'a rappelé M. Boucheron, première année d'exécution de la loi de programmation militaire adoptée en conseil des ministres et déposée sur le bureau de votre assemblée, le projet de budget 2009 s'inscrit dans un contexte difficile en raison de la crise financière internationale.
Mme Adam, M. Likuvalu d'une autre façon, et M. Mariton d'une autre façon encore, ont exprimé des doutes et se sont interrogés sur ce budget au vu du contexte économique actuel. S'agissant de la mission « Défense » que vous examinez aujourd'hui, j'y vois plutôt la confirmation des choix que nous avons faits en faveur de l'équipement, car les dépenses d'équipement de défense sont productives et contribueront à injecter dans l'économie de l'activité et des liquidités.
L'impact est important puisque l'industrie de défense représente 165 000 emplois directs et au moins autant d'emplois indirects, soit au total 350 000 emplois, et un chiffre d'affaires de 15 milliards d'euros. J'ajoute que notre activité de défense est en général duale. Aujourd'hui, l'activité de Dassault est civile à 70 % et Airbus n'aurait pas existé sans industrie de défense. Nous nous associons à la volonté du Gouvernement de mener des politiques contracycliques. La défense dépense aussi 1,2 milliard d'euros par an dans les infrastructures – certains y ont fait allusion à propos des restructurations –, ce qui irrigue les grands groupes du BTP mais aussi des PME sur tout le territoire.
L'investissement de défense est une composante déterminante de l'investissement public dont le dynamisme doit permettre d'atténuer les effets de la crise en 2009.
Monsieur Mariton, monsieur Likuvalu, on peut en effet se demander quel est l'intérêt de consacrer autant d'argent à la défense alors que tant de besoins s'expriment par ailleurs. En guise de réponse, je vous rappellerai cette phrase du général de Gaulle : « Un État qui viendrait à manquer à sa défense en viendrait à se détruire lui-même ». Cela suffit pour répondre à la nécessité de maintenir, sur le long terme, notre outil de défense.
Avant de répondre à vos questions, je voudrais retracer en quelques mots les étapes qui ont conduit à ce projet de budget.
Je remercie M. Boucheron, qui fut président de la commission de la défense sous une autre majorité, ainsi que nombre de parlementaires de l'actuelle majorité, d'avoir souligné la sincérité de ce budget. En effet, ce budget est sincère et cohérent. Si certains ont parlé de retour au réel, je préfère dire qu'il est cohérent avec les orientations du Livre blanc, avec la révision générale des politiques publiques et la réforme de notre ministère, avec les missions assignées dans le Livre blanc, avec les formats et les contrats opérationnels des armées.
Il est sincère parce que l'énorme exercice auquel nous nous sommes livrés depuis des mois – l'état des lieux en septembre 2007 et la revue de l'ensemble des programmes d'armement – nous a fourni, comme ce ne fut probablement jamais le cas, une vision sur le moyen terme permettant de considérer que le budget que nous vous présentons est tenable.
Merci, monsieur Soisson !
Parallèlement, la réforme du ministère, portant principalement sur notre dispositif d'accompagnement et de soutien, et qui se traduit par d'importantes réductions d'effectifs – 54 000 au total – nous a donné des marges de manoeuvre supplémentaires pour financer la condition des personnels et l'équipement des forces. Je vous signale que cette réduction d'effectifs permettra de dégager 3 milliards d'euros destinés à l'équipement des forces. En année pleine, 1,5 milliard d'euros pourra être consacré à l'équipement des forces et à l'amélioration des conditions du personnel. J'aurai l'occasion d'y revenir.
Le budget triennal respecte donc les engagements pris : la France, malgré l'état de ses finances publiques, ne baisse pas la garde et demeurera l'une des quatre puissances militaires de la planète. Certains d'entre vous, le président Teissier notamment, ont rappelé à quel point il y avait une connexion directe entre notre influence en matière de politique étrangère et notre capacité militaire. Nous resterons l'une des grandes puissances militaires appuyant la politique étrangère de la France, mais en même temps nous faisons les efforts d'adaptation et de modernisation nécessaires et nous prévoyons les nouvelles priorités fixées par le Livre blanc.
L'augmentation des ressources que vous avez tous signalée proviendra, en 2009, des recettes exceptionnelles émanant de cessions d'actifs immobiliers ainsi que de cessions de fréquences résultant du réaménagement du spectre électromagnétique.
Ces recettes seront inscrites sur deux comptes d'affectation spéciale qui sont créés dans la loi de finances, l'un relatif aux cessions immobilières, l'autre à la valorisation de la ressource spectrale. Monsieur Teissier, monsieur Boucheron et monsieur Giscard d'Estaing, je vous indique que ces ressources sont plus sûres que les ressources budgétaires parce qu'elles ne sont pas soumises à régulation et qu'elles sont reportables d'une année sur l'autre. La crise économique annoncée par l'ensemble des institutions internationales n'affectera pas ces ressources car nous allons les faire porter par une société foncière, probablement la Sovafim, qui affectera cette somme de 1 milliard d'euros liée aux cessions immobilières. Cette société prendra ensuite le temps de revendre les biens immobiliers quand le marché le permettra.
Par ailleurs, monsieur le président Teissier, vous m'avez interrogé sur l'impact des loyers entre le moment où nous procéderons aux cessions d'actifs immobiliers parisiens et le moment où nous emménagerons à Balard. Je vous répondrai que cet impact est nul car la défense est d'ores et déjà soumise au versement de loyers budgétaires sur ses implantations parisiennes. Il est donc simplement prévu que ces loyers seront versés à la société foncière appartenant au secteur public plutôt qu'au budget général.
Jean-Michel Boucheron s'inquiétait du montage de Balard. Il est clair que la décision que nous prenons, c'est-à-dire de vendre les actifs immobiliers à Paris, impose que Balard se fera en partenariat public-privé. C'est le montant sur lequel nous sommes en train de travailler, avec la mise en perspective de la réalisation de ce projet pour la fin de l'année 2013.
Je rappelle que le seul fait de réaliser Balard et de rassembler l'ensemble des états-majors et des services nous permettra d'économiser 20 à 25 % des effectifs de tous les services centraux. Il s'agit donc d'une opération de rationalisation très intéressante.
En ce qui concerne les recettes exceptionnelles issues des cessions de matériel de guerre déclassé, leur montant annuel, monsieur le président de la commission, s'élève à quelque 15 millions d'euros par an. Ce chiffre figure dans les documents budgétaires au titre des attributions de produit mais nous pouvons probablement en améliorer la visibilité.
La maîtrise de la masse salariale est un autre sujet que nombre d'entre vous ont abordé. Pour la première fois de l'histoire récente du ministère, la masse salariale ne progressera pas en dépit du grand programme d'amélioration de la condition du personnel. Elle diminuera même puisqu'elle s'établira à 11,7 milliards d'euros en 2009 contre 11,8 milliards d'euros en 2008. Et, en 2014, elle sera inférieure à ce qu'elle est aujourd'hui. Nous pourrons donc progressivement réaffecter cette masse de RCS sur l'équipement des forces et l'amélioration de la condition du personnel.
Certains ont évoqué la manoeuvre des ressources humaines, à savoir la suppression de 8 400 emplois. J'ai eu l'occasion de revenir sur le sujet devant la commission de la défense mardi dernier. Cette manoeuvre de suppression de 8 400 emplois sur l'année 2009 porte, pour 6 300 d'entre eux, sur les militaires et, pour 2 100, sur les civils. Sur les 6 300 suppressions d'emplois militaires, 4 000 reposeront sur la régulation des flux, c'est-à-dire sur le non-recrutement ou le non-renouvellement des contrats, 1 100 sur le reclassement du personnel militaire dans la fonction publique – c'est l'engagement du Premier ministre – et 1 200 sur les départs incités financièrement. Quant aux 2 100 suppressions d'emplois civils, la moitié sera liée aux départs à la retraite ou au non-remplacement, 350 à la mobilité externe et 500 à l'indemnité de départ volontaire, c'est-à-dire au départ incité financièrement.
Ces économies, mesdames et messieurs les députés, nous permettront de financer la revalorisation de la condition du personnel à hauteur de plus de 100 millions d'euros – il s'agit d'un programme jamais mis en oeuvre –, dont 74 millions d'euros pour les militaires et près d'une vingtaine de millions d'euros pour les civils. J'ai voulu en effet que le programme d'amélioration s'effectue à due proportion des personnels civil et militaire. Il va au-delà des mesures générales applicables à l'ensemble de la fonction publique – MM. Folliot, Voisin et Likuvalu ont évoqué le sujet. Je tiens également à répondre à Mme Dumont que je ne saurais considérer que l'indemnité de départ volontaire des ouvriers d'État telle que nous l'avons fixée est un scandale. En effet, selon l'ancien système en plateau, les ouvriers d'État, de la vingt-cinquième année aux deux dernières années avant leur départ à la retraite, touchaient la même indemnité, ce qui engendrait un effet d'aubaine non incitatif que nous avons décidé de corriger. C'est la raison pour laquelle le nouveau système se traduit par une montée en puissance plus importante en début de carrière, un plateau autour de la vingt-cinquième année et une réduction progressive jusqu'à la quarantième. Ainsi, après trente-six ans de carrière, l'indemnité de départ volontaire d'un ouvrier d'État s'élève à quelque 70 000 euros. C'est un effort non négligeable qu'il convient de resituer dans le contexte actuel.
Par ailleurs, je tiens à souligner que l'engagement de mettre en oeuvre le plan d'amélioration de la condition militaire tel que l'avait prévu Michèle Alliot-Marie en février 2007 a été tenu dans le cadre de la réforme et de la mise en oeuvre des statuts particuliers. Nous nous sommes occupés des militaires du rang en 2008 et nous passerons aux sous-officiers et officiers en 2009 avant de terminer en 2010 par les officiers supérieurs et les sous-officiers les mieux rémunérés.
Si l'on considère le rapport entre le repyramidage des salaires et la progression des rémunérations, on ne saurait absolument pas parler, comme certains l'ont fait, d'un bradage. Ainsi, la rémunération annuelle d'un lieutenant de premier échelon entre mon arrivée, en 2007, et 2001, au terme du plan d'amélioration de la condition militaire, augmentera de deux mois et demi de solde ! L'effort consenti par les militaires et le personnel civil est donc largement récompensé par la République et par le Gouvernement. C'est parce que nous faisons cet effort de restructuration majeure que nous permettrons à tous nos personnels militaires de recevoir, selon les catégories, entre un demi-mois et trois mois de salaire supplémentaire au terme de ce plan.
Monsieur Mariton, vous qui avez un grand souci de la dépense publique, vous pouvez constater que nous agissons conformément au discours que nous tenons depuis des années lors de chaque campagne électorale : une administration et une fonction publique rationalisées et moins pléthoriques mais mieux payées. Nous en montrons là un très bel exemple, qui pourrait être repris par l'ensemble des administrations de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Messieurs Hillmeyer et Voisin, nous veillerons évidemment à ce que l'accompagnement social soit individualisé. J'ai donné comme consigne à chaque « Monsieur Restructuration » nommé dans chaque préfecture, ainsi qu'aux personnels du ministère de la défense, de faire un travail de dentellier. Une mécanique d'horlogerie doit permettre à chaque cas d'être l'objet d'un traitement particulier afin que puissent être abordées les questions relatives à l'indemnité de départ volontaire et aux aides à la mobilité – 10 000 euros pouvant être doublés dans certains secteurs. Il conviendra également d'accompagner les personnels déplacés en matière de logement : un accord sera bientôt signé avec une société privée qui leur cherchera un logement, un autre accord étant signé avec une autre société qui accompagnera le reclassement du conjoint. Bref, l'accompagnement social sera le plus individualisé possible. J'ai pris cet engagement auprès du personnel.
J'ai rencontré la semaine dernière les 400 salariés ainsi que les représentants syndicaux d'un établissement qui fermera. Je regrette de ne pas avoir pris les articles de presse parus quelques jours plus tard : tous sont convenus que l'effort consenti et la méthode mise en oeuvre permettaient, sinon d'effacer le traumatisme du départ, du moins de faire bénéficier chaque famille de la politique sociale la plus exemplaire possible.
Enfin, je tiens à souligner que nous pourrons mettre en oeuvre ce plan d'accompagnement social dès le début de l'année prochaine : tel est l'objet des amendements que vous examinerez. Ce plan était inscrit dans la loi de programmation militaire. Les décrets d'application sont prêts. Ils ont été arbitrés et validés par le Premier ministre. Le ministère de la défense restera toutefois le premier employeur au niveau de l'État puisqu'il recrutera encore l'année prochaine 21 000 personnels militaires et 1 300 civils.
Il est vrai, monsieur Louis Giscard d'Estaing – je mentirais si je disais le contraire –, que j'aimerais pouvoir faire plus en matière de réserve opérationnelle afin de donner un coup de main important à nos forces armées. Nous y mettons le même niveau de crédits – 92 millions d'euros.
L'effort d'équipement, vous l'avez tous signalé, est considérable puisqu'il passe de 15,4 milliards d'euros à 17 milliards d'euros – soit 10,2 %.
Cet effort nous permettra de faire de nouvelles commandes, de Rafale, notamment. Vous avez eu raison, monsieur Mothron, d'insister sur ce programme, surtout lorsqu'on le compare à l'Eurofighter. En fonction de nos réussites à l'exportation, nous ferons éventuellement évoluer non pas la commande pluriannuelle mais les commandes annuelles parce que nous voulons maintenir la ligne industrielle du programme Rafale, qui exige une production minimale de onze avions. De bons succès à l'exportation dans les mois à venir nous permettraient d'engager une discussion avec la société Dassault en vue d'alléger la charge budgétaire et de la réorienter vers d'autres programmes que vous appelez tous de vos voeux, qu'il s'agisse du NH90 ou d'autres programmes de l'armée de terre ou de la fonction « Connaissance et anticipation ».
En ce qui concerne la révision des contrats, monsieur le président de la commission, il serait bon, en effet, de vous donner avec précision l'ensemble des éléments relatifs au coût de ces révisions et à la manoeuvre utilisée. Je m'engage à fournir ces éléments à la commission de la défense.
La priorité accordée à la fonction « Connaissance et anticipation » pour l'espace sera concrétisée dès 2009 au travers de 400 millions d'euros, avec le lancement de la phase de conception du système successeur d'Hélios : Hélios II sera bien lancé en octobre 2009.
Par ailleurs, monsieur Boucheron, vous qui évoquiez l'insuffisance de l'Europe de la défense, je tiens à vous signaler que lundi prochain, au cours du conseil européen, les ministres de la défense signeront la lettre d'intention du lancement du programme MUSIS. J'ai obtenu de mes partenaires que le segment sol du programme MUSIS soit confié à l'Agence européenne de défense, qui, créée en 2004, est le fruit de la volonté franco-britannique dans le cadre de l'accord de Saint-Malo de 1998. Reconnaissons que, jusqu'à aujourd'hui, l'AED n'a pas eu grand-chose à se mettre sous la main. Vous verrez lundi, à l'issue du conseil européen des ministres de la défense, que, pour une fois, l'Agence aura du travail pour les années à venir. Nous lançons un nouveau programme de déminage maritime, ainsi qu'un programme de remise à niveau des hélicoptères de l'ex-Pacte de Varsovie, visant à améliorer notre capacité d'aéromobilité à travers un trustfund – c'est une initiative franco-britannique. Nous lançons également un programme sur l'insertion des drones dans l'espace aérien, un programme sur les hélicoptères lourds avec nos amis allemands et, enfin, sur la suggestion d'Yves Fromion, un programme sur les technologies sensibles, notamment sur celles nous permettant d'être ITAR free, pour nos exportations.
L'effort de recherche et de développement est donc sensible, même s'il reste insuffisant. C'est qu'il convient d'engager une vraie coopération industrielle en matière de défense au plan européen. Il nous faut redessiner les frontières de l'industrie française afin d'éviter notamment que des bureaux d'études continuent de se pencher sur les mêmes travaux – cela fait partie des tâches sur lesquelles je me suis engagé depuis quelques semaines. Je souhaite que l'approche soit identique en matière industrielle avec nos partenaires européens – j'évoquerai plus loin les CNS.
MM. Fourgous et Cornut-Gentille ont évoqué le fait que la question des drones manque de clarté : je veux prendre mon temps avant de définir des orientations, afin de choisir la meilleure option, notamment en ce qui concerne les drones MALE. Laissons-nous, je le répète, le temps nécessaire, plutôt que de prendre une décision que, à terme, nous ne pourrions pas financer, en raison de certaines incertitudes. Du reste, nos partenaires allemands et nous-mêmes avons décidé d'analyser dans les mois à venir de façon très précise le programme relatif aux drones MALE. J'examine des solutions alternatives avec la plus grande attention. C'est à l'issue de ces travaux que nous prendrons notre décision.
Quant aux drones existants, monsieur Fourgous, trois SDTI se trouvent en Afghanistan depuis la mi-novembre et sont opérationnels pour la région centre depuis quelques jours. Pour ce qui est du drone SIDM, il est en évaluation opérationnelle au sein des forces et sera déployé en Afghanistan au début de l'année 2009.
À propos de la flotte gouvernementale, monsieur Viollet, la méthode utilisée n'a rien d'anormal. L'ensemble des informations figure dans le projet annuel de performances du programme 146. Comme vous le savez, puisque nous en avons parlé ensemble en commission, les appareils actuels ne correspondent plus aux besoins : l'allonge de l'A 319 est très insuffisante et les Falcon, qui ont plus de trente ans d'existence, doivent être renouvelés, d'autant que leur système de protection présente des failles. Il s'agit donc non pas d'accroître cette flotte,…
…mais de remplacer nombre de ces avions par des matériels plus performants, récents et moins coûteux en MCO.
Pour ce qui concerne l'A400M, monsieur Cornut-Gentille, vous avez raison : des solutions intermédiaires existent et il nous faudra les examiner. Nous travaillons sur celles que vous avez proposées – A330-200, CASA, location – en partenariat avec l'organisme qui est sans doute votre excellente source... S'agissant des livraisons de 2009, j'évoquerai les 8 hélicoptères Tigre, les 14 Rafale, les 96 VBCI qui permettront d'équiper un régiment, les 34 canons automoteurs à roue Caesar, la seconde frégate antiaérienne Horizon et les missiles antiaériens ASTER.
Madame Lamour, nous confirmons le caractère prioritaire de la mission de sauvegarde maritime. Les 9 avisos A 69 seront rapidement transformés en patrouilleurs et permettront d'attendre l'arrivée des 18 patrouilleurs hauturiers BATSIMAR qui seront livrés à partir de 2017 et des 8 bâtiments de soutien et d'assistance hauturiers BSAH qui remplaceront, à partir de 2014, une flotte disparate de 11 remorqueurs et bâtiments de servitude.
Monsieur Bernard, la commande d'hélicoptères NH90 sera bien effectuée, mais il fallait prendre le temps de discuter avec l'industriel sur certains points. En effet, M. Fourgous évoquait l'extraordinaire complexité de ce programme où chacun y est allé de ses spécifications, ce qui explique d'ailleurs que nous disposions de 23 versions différentes !
Quant au programme MRTT, monsieur Sainte-Marie, nous nous donnons également le temps de la réflexion au sujet des avions ravitailleurs. Nous étudions la possibilité d'un partenariat public-privé sur ce dossier ; voilà pourquoi la décision sera prise au cours de l'année 2009 ou 2010, après le vote de la loi de programmation militaire.
L'amélioration des taux de disponibilité des matériels est un combat quotidien, comme l'ont relevé Mme Lamour, M. Giscard d'Estaing et bien d'autres. Il est déterminant pour l'efficacité et le moral de nos forces. J'ajoute, monsieur Giscard d'Estaing, que si un taux de disponibilité de 50 à 60 % peut paraître faible, il n'est guère plus élevé pour les plus grandes armées – et même pour l'armée américaine.
Il est néanmoins exact que le taux de disponibilité opérationnelle est très mauvais en ce qui concerne les hélicoptères et notamment le super-Frelon, puisqu'il n'atteint pas 15%. Avec le super-Puma nous arrivons à maintenir un excellent taux dans un contexte d'opération extérieure, certes au détriment des forces nationales, mais tous ceux qui ont été en Afghanistan ont pu constater que le taux de disponibilité opérationnelle des hélicoptères Caracale avoisinait 100 %. Ces derniers ont accompli un travail formidable, mieux décrit par des articles et des dépêches que je ne saurais le faire.
En outre, l'augmentation de 8 % du budget du MCO est assortie d'un énorme effort de réforme des structures qui a déjà commencé avec le SIAé et avec le service de soutien de la flotte qui donne d'excellents résultats. Il convient de continuer cette réforme avec le matériel terrestre. De la sorte, 2009 sera une année décisive pour le plan de réforme du MCO terrestre puisque seront créés la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres – le SIMMT –, qui assumera la maîtrise d'ouvrage déléguée, ainsi que le service de maintenance industrielle terrestre – le SMITER.
À propos de l'architecture de la RGPP, monsieur Cazeneuve, laissez-moi répondre à quelques-unes de vos inquiétudes. Le modèle est prévu, bien sûr, hors pensions. Du reste, une partie du personnel n'a pas forcément droit à pension. Quant aux cessions gratuites, elles sont limitées aux 24 sites reconnus comme ayant un contrat de redynamisation. Il n'est pas question d'accepter la vente à l'euro symbolique d'un patrimoine immobilier situé en plein centre d'une ville où la pression immobilière est considérable, et qui ne souffre d'aucun problème de reconversion économique.
Ainsi, je ne vois pas pourquoi, à Montpellier, nous vendrions à l'euro symbolique un ensemble immobilier en plein centre qui peut faire l'objet de la meilleure reconversion économique qui soit. Je ne vois pas pourquoi, pour évoquer un cas plus breton même si Nantes ne fait pas partie de la Bretagne (Sourires), nous vendrions à l'euro symbolique un immeuble qui, là aussi, peut faire l'objet d'une facile reconversion. Il me semble en revanche de bonne politique d'y procéder dans des communes où la reconversion est difficile.
En ce qui concerne la recherche, monsieur Fromion, tout le monde souhaiterait, certes, que nous atteignions l'objectif d'un milliard d'euros. Reste que le périmètre des études amont progresse de 2,5 % par rapport à 2008. Et si l'on considère le périmètre plus large des études de défense qui englobe les subventions aux écoles et organismes de recherche, nous atteignons une hausse de 6,5 %, c'est-à-dire de 1,57 milliard d'euros pour 2009. Il nous faut redéfinir les contours, recomposer l'ensemble de ce sujet. Les conclusions de votre récent rapport sur la question vont dans le même sens. Je relève par ailleurs que nous menons cet effort autant que possible en coopération. L'effort de R et T représente environ 20 % et, pour l'espace, 60 millions d'euros sont affectés à la recherche.
MM. Guilloteau, Boucheron, Giscard d'Estaing, Mothron, Voisin ont évoqué le financement des OPEX. La provision va passer de 460 à 510 millions d'euros. À partir de l'année prochaine nous disposerons, monsieur Cazeneuve, d'un système de réserves de précaution qui nous permettra d'être en partie financés dans le cadre du budget interministériel. Aussi l'ensemble du budget français participera-t-il aux OPEX. Par ailleurs, ainsi que l'ont souhaité de nombreux députés, nous analysons chaque mission menée en OPEX.
Avant la fin du mois, je présenterai au Président de la République des propositions de réduction de notre présence sur certains théâtres d'opération. Il me semble en effet utile de disposer de cette radiographie de l'ensemble de nos opérations extérieures et d'examiner celles qui méritent d'être éventuellement reconsidérées.
Monsieur Cornut-Gentille, nous avons consacré 100 millions d'euros à des programmes d'urgence. Il me paraît naturel que la commission de la défense en soit régulièrement informée.
Ainsi, au Tchad, nous prévoyons de transférer l'opération en cours à l'ONU à partir du 15 mars. Nous avons pour le moment présenté l'idée que la France contribuerait, dans le cadre de cette opération de l'ONU, à combler les lacunes capacitaires en termes de transports, de soutien hospitalier et de santé. Pour le reste, nous examinons la possibilité de réduire voire supprimer notre présence en Bosnie dans la mesure où les missions militaires sont pour l'essentiel remplies. Enfin, nous sommes en train de revoir la situation de nos forces prépositionnées sur la façade atlantique, et celle de nos forces à Djibouti, au Gabon, sans oublier l'implantation de la base stratégique majeure aux Émirats Arabes Unis – qui ne retranche rien à la pertinence de notre présence à Djibouti.
Monsieur Voisin, j'étais hier soir à Saint-Astier et je vous confirme que la gendarmerie restera militaire. Elle est sous l'autorité fonctionnelle du ministère de l'intérieur depuis 2003. Le ministre de la défense n'a plus d'autorité sur la gendarmerie départementale depuis la même année. Il s'agissait d'une décision de cohérence permettant au ministère de l'intérieur de disposer dans chaque département d'une analyse complète des besoins dans les secteurs couverts par la police, d'une part, et par la gendarmerie, de l'autre. La gendarmerie conservera son système hiérarchique propre mais demeure placée sous l'autorité fonctionnelle du ministère de l'intérieur représenté dans chaque département par le préfet.
Sur l'Europe de la défense, monsieur Boucheron, je vous trouve très sévère. Je me suis rendu devant le Parlement européen, j'ai discuté avec les groupes politiques qui le composent et j'observe que tous mes collègues ministres de la défense des pays de l'Union européenne constatent que les progrès réalisés au cours de la présidence française seront très importants – je vous en ai déjà donné des exemples.
Au sujet du groupe aéronaval, nous sommes sur le point de prendre une décision qui tendra à améliorer la coordination, à disposer en permanence d'un porte-avions ou d'un porte-aéronefs européen en mer, à mener des exercices nous permettant de parvenir à une interopérabilité totale et à permettre aux bâtiments qui accompagnent un porte-avions de provenir éventuellement d'autres pays européens. Nous pouvons constater, à travers ces exemples, que nous construisons l'Europe de la défense.
En la matière, selon le point de vue adopté, la bouteille est à moitié vide ou à moitié pleine. Si l'on est profondément européen comme je le suis, on n'en verra que le côté vide. Toutefois, songeons que l'Europe de la défense n'a que dix ans d'existence. Il y a encore quinze ans, cette expression était taboue, personne ne l'employait, n'évoquant que l'UEO, bras armé de l'Union européenne. Aujourd'hui, l'Europe de la défense est une réalité. S'il fallait en donner un exemple, je citerai le fait qu'en moins de trois mois nous nous sommes montrés capables de mener une opération contre la piraterie dans le Golfe d'Aden. On pourrait estimer que la définition d'une défense européenne manque de volonté politique, mais reconnaissons qu'à 27 pays, dont certains ne jugent pas la défense prioritaire, nous ne pouvons obtenir une construction uniforme. Il faut en effet travailler avec ceux qui considèrent que la défense est un élément majeur de leur politique.
Le port de Brest reste un poumon stratégique, si je puis dire ; aussi, madame Adam, la pérennité du port militaire n'est-elle absolument pas menacée. La France est une grande nation maritime qui garde une marine de haute mer et le port de Brest, compte tenu de la présence de la Force océanique stratégique, a un rôle qui ne sera pas démenti.
À propos de DCNS, je souhaite que nous participions à une recomposition européenne.
J'ai demandé à Dassault de discuter avec nos collègues britanniques sur un certain nombre de sujets. J'ai demandé à DCNS de discuter avec les Allemands. Nous nous réunirons dans les semaines à venir avec les industriels espagnols et avec ma collègue d'outre-Pyrénées afin d'essayer de sauver l'accord entre Navancia et DCNS. Il est un moment où les politiques doivent se mêler de ce genre de problèmes.
J'ai demandé à DCNS d'ouvrir des discussions avec les Allemands de la même manière que je l'ai demandé à Nexter. En effet, nous avons besoin de nous organiser. Nous ne pouvons pas continuer à être en concurrence – et je ne parle même pas de la concurrence à l'exportation – sur toute une série de programmes alors que nous consacrons 2,5 fois moins d'argent pour les forces armées que les Américains !
Mais pour cela, nous avons besoin de procéder à une adaptation de nos outils. C'est pourquoi il faut donner à DCNS la possibilité de créer des filiales…
…en partenariat avec des entreprises européennes, et cela sans que nous y soyons majoritaires, comme la loi nous y oblige aujourd'hui.
Je souhaite que des personnels de DCNS, dont la compétence est reconnue dans l'Europe entière, puissent être mis à la disposition de ces filiales. C'est d'ailleurs l'un des moyens d'assurer le maintien de l'emploi.
Vous le voyez, la loi de programmation militaire n'a absolument pour but de privatiser DCNS. Elle vise au contraire à lui permettre d'être l'un des pivots majeurs de la restructuration de l'industrie navale.
De plus, le plan de charge de DCNS est assuré pour vingt ou vingt-cinq ans. Cette entreprise sait où elle va. Grâce aux programmes SNA Barracuda, SNLE et FREMM, elle est capable de discuter avec ses partenaires européens en étant dans une situation favorable. Je souhaite donc simplement que nous ayons des outils juridiques nous permettant de développer des actions communes.
Je ne prendrai qu'un seul exemple : l'EADS des torpilles. La création d'une filiale commune implique qu'une partie de nos personnels puissent y travailler, en conservant leur statut. Cela doit pouvoir se faire sans que nous soyons forcément majoritaires dans cette filiale, ou à 5050. Une participation minoritaire majeure nous permettant d'avoir un droit de contrôle et de regard suffirait. Il nous faut accepter l'idée que nous puissions ouvrir des portes pour participer à cette restructuration.
J'ajoute que les sites de Toulon et de Brest ont un plan de charge qui leur permet de ne pas redouter l'avenir.
Mesdames, messieurs les députés, tous ces efforts de redéploiement et de réforme n'ont qu'un seul but : garantir à nos armées les moyens d'assumer leurs missions, qui comptent parmi les plus nobles, mais aussi les plus exigeantes. Vos collègues Folliot et Bernard ont eu raison de rappeler le lourd tribut que nos armées ont payé au mois d'août dernier, avec le courage que l'on sait.
Je sais pouvoir compter sur votre soutien dans cette entreprise difficile mais indispensable pour que la France demeure une des grandes puissances militaires de la planète. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Nous en arrivons aux questions.
Nous commençons par le groupe GDR.
La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour une première question.
Une première question à laquelle le ministre a déjà partiellement répondu.
Le Gouvernement se dit prêt à privatiser DCNS, tout comme la Société nationale des poudres et explosifs, la SNPE. Pour ce faire, le projet de loi de programmation militaire inscrit ces groupes industriels d'armement sur la liste des sociétés privatisables.
DCNS et SNPE sont leaders en France dans leurs domaines, mais dans votre esprit, monsieur le ministre, le développement des capacités industrielles passe obligatoirement par une fusion de DCNS avec son alter ego allemand TKMS.
Concernant la SNPE, la branche de propulsion nucléaire et spatiale est promise au groupe aéronautique Safran : une fois le projet de loi de programmation voté, un décret ouvrirait la voie à la privatisation des activités de défense du groupe chimiste, qui représentent la moitié de son chiffre d'affaires, soit 693 millions d'euros.
En clair, la fabrication du propergol, carburant des missiles nucléaires et de la fusée Ariane, serait assurée par une entreprise privée ! Sous couvert de créer un pôle français dans la propulsion nucléaire et spatiale, on s'apprête à céder la propulsion de missiles et la dissuasion nucléaire à un groupe côté en Bourse et dont l'un des actionnaires est l'américain General Electric.
Les sociétés DCNS et SNPE sont au coeur de notre défense nationale. Personne ne comprendrait que l'on dénationalise à ce point des actifs aussi stratégiques, surtout au moment où le Président proclame son attachement à la dissuasion nucléaire et à l'indépendance nationale.
De même, en dehors des aspects stratégiques, je pense que les déboires de l'affaire EADS militent pour la plus grande précaution : l'Europe est faite pour nous absorber.
Monsieur le ministre, ne craignez-vous pas les conséquences de cette mise en pâture de nos fleurons aux marchés financiers, tant du point de vue de la perte d'autonomie nationale, que du point de vue de l'emploi et des droits et garanties sociales des personnels ?
Monsieur Candelier, je ne reviendrai pas longuement sur DCNS. Il s'agit de nous permettre de développer des activités nouvelles dans le cadre de partenariats industriels. Et cela, au contraire de ce que vous suggérez, constitue le moyen de permettre aux ouvriers d'État qui travailleront dans ces filiales de conserver leur statut tout en bénéficiant de nouvelles charges d'activité. Honnêtement, des discussions que nous avons pu avoir, il ressort que cette évolution est plutôt bien vécue par les personnels de l'entreprise. Pas tous, mais enfin, une grande partie.
S'agissant de SNPE, l'État a depuis longtemps le projet de regrouper les acteurs de la propulsion missilière solide, de manière à consolider les savoir-faire stratégiques de cette filière.
Ce n'est pas parce que ces savoir-faire sont essentiels et fondamentaux pour notre défense qu'ils ne peuvent pas être assurés par le secteur privé. Je me permets de vous signaler, monsieur le député, que le M51 et les missiles sont faits par EADS, qui est une entreprise privée.
Ce que nous voulons, c'est faire en sorte que la SNPE, à travers sa restructuration, soit en mesure de conserver les savoir-faire, les compétences qui sont absolument indispensables à l'industrie française, et notamment à la dissuasion, ou encore à l'industrie que vous évoquez, c'est-à-dire Ariane.
Tout cela n'est pas dans la loi de finances, mais dans la loi de programmation militaire. Nous avons trop tardé, s'agissant de SNPE, à engager des restructurations dont nous avons absolument besoin si nous voulons préserver des savoir-faire d'une importance majeure pour la souveraineté de notre pays.
Le comité Balladur sur la réforme des institutions avait mis en exergue les lacunes et les manques de l'information du Parlement sur les négociations diplomatiques et les accords de défense.
Aujourd'hui, l'augmentation faramineuse du coût des OPEX dans le budget de l'État est une tendance inquiétante, d'autant plus que les parlementaires ne sont pas associés à tous les tenants et aboutissants de ces dépenses.
En particulier, 5 500 hommes, dont 40 gendarmes, sont déployés au titre des « forces de présence », en vertu d'accords de coopération et de défense, notamment en Afrique. Ces accords ont des implications budgétaires directes.
Il ne s'agit ni de porter atteinte au droit du Président de la République de négocier les traités ni de donner au Parlement le droit de modifier les conventions internationales soumises à son examen, ce que le droit international ne permet pas. Il s'agit de faire en sorte que les commissions compétentes des assemblées soient tenues informées des négociations en cours, afin notamment que le Parlement puisse se prononcer sur la validité des accords de défense.
D'ailleurs, rejoignant les préconisations du Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale, le président de la commission de la défense, notre cher collègue Guy Teissier, s'était inquiété de ces questions. Mais à ma connaissance, son interrogation légitime est restée lettre morte.
Dans le même esprit, je vous demande s'il est prévu d'instaurer une procédure de contrôle spécifique pour les contrats d'armements. Celle-ci serait salutaire.
Monsieur le ministre, si le Président de la République a posé le principe de la transparence sur ces accords susceptibles d'entraîner nos forces armées dans des interventions extérieures dont les enjeux sont considérables, y compris pour le budget, il vous reste à nous préciser les modalités d'information de la représentation nationale sur leur contenu intégral et sur les modalités de leur approbation par le Parlement.
Comme vous le savez, monsieur le député, dans son discours du Cap, le Président de la République a souhaité que nous revoyions nos accords de défense. Ils correspondaient à une époque de notre histoire désormais révolue. Ils font l'objet de discussions avec nos partenaires. Un ambassadeur a été nommé pour cela. Le Parlement sera informé.
D'ailleurs, comme vous le savez, grâce à la révision constitutionnelle que vous n'avez pas votée, le Parlement sera d'autant plus associé que les accords de défense lui seront transmis pour information, et pour vote dans certains cas de figure. Par conséquent, vous devriez être heureux.
Nous en venons à la question du groupe UMP.
La parole est à M. Étienne Pinte.
Monsieur le ministre, le 5 septembre dernier, je vous ai écrit au sujet du devenir des immeubles du 5e régiment du génie à Versailles. Comme vous ne m'avez pas répondu, je suis obligé d'y revenir dans le cadre de la discussion de votre budget.
Le 5e régiment du génie va nous quitter d'ici à trois ans. Son casernement est quasiment neuf. Il se pose donc un problème d'affectation. Trois hypothèses sont envisageables.
Première hypothèse : la rétrocession au domaine, dans le cadre d'une convention que le ministère de la défense avait signée avec l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles. Mais je ne vois pas le domaine utiliser de façon fonctionnelle ces casernements quasiment neufs.
La deuxième hypothèse est celle qui a ma préférence. Dans le cadre de la convention que vous avez signée avec le ministère chargé de la recherche et de l'enseignement supérieur, ce site pourrait être reconverti au sein d'un campus universitaire. À Versailles, il nous manque environ 500 chambres pour étudiant.
Troisième hypothèse : la réaffectation de ces casernements à des fins qui seraient définies par le ministère de la défense.
Où en est votre réflexion, monsieur le ministre ?
Permettez-moi, monsieur le député, de vous présenter mes excuses si on ne vous a pas répondu en temps et en heure.
En ce qui concerne l'emprise occupée actuellement par le 5e régiment du génie, qui sera dissous en 2010, il est prévu qu'elle reviendra à l'établissement public du musée et du domaine national de Versailles. Mais j'ai demandé au préfet des Yvelines d'organiser une réunion avant la fin de ce mois pour que les différentes solutions soient examinées : il y a ce que vous proposez, ce que proposent un certain nombre d'élus de la région de Versailles, et ce que propose le maire de la ville.
Quant aux logements pour étudiants, il est déjà prévu qu'une partie de la caserne Vauban, en centre-ville, y soit affectée. Mais il me semble que la ministre de l'enseignement supérieur est des Yvelines. Elle peut donc aussi avoir une idée sur ce sujet. (Sourires.)
Bien entendu, vous serez invité à la réunion qu'organisera le préfet, et je suis à votre entière disposition pour examiner la meilleure affectation de l'ensemble des immeubles du 5e RG.
Je mets aux voix les crédits de la mission « Défense », inscrits à l'état B.
(Les crédits de la mission « Défense »sont adoptés.)
J'appelle maintenant, après l'article 59 du projet de loi de finances, plusieurs amendements qui portent articles additionnels, pouvant être rattachés à la mission « Défense ».
Je suis saisie d'un amendement du Gouvernement, n° 42, deuxième rectification.
Cet amendement fait l'objet de trois sous-amendements, nos 315 , 278 rectifié et 279 .
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n°42 , deuxième rectification.
Comme je l'ai dit devant la commission de la défense mardi dernier, cet amendement a pour but de permettre d'inscrire dès maintenant dans la loi le pécule d'incitation au départ pour le personnel militaire. Il était inscrit initialement dans la loi de programmation militaire, mais pour accélérer les choses, nous proposons de l'inscrire dans le projet de loi de finances.
J'ai déjà présenté cette mesure, et compte tenu de l'heure avancée, il n'est probablement pas utile que j'entre plus avant dans le détail. Il s'agira d'inciter prioritairement au départ les officiers et sous-officiers de carrière les plus âgés, ainsi que les militaires du rang, afin de pouvoir continuer à recruter de nouvelles compétences au sein du ministère, tout en permettant le repyramidage de ses effectifs.
Les décrets d'application sont prêts. Plus vite nous aurons voté ce texte, plus vite nous pourrons entrer dans le concret.
La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement et pour soutenir le sous-amendement n° 315 .
L'amendement du Gouvernement n'a pas été examiné par la commission des finances. Je donnerai donc un avis à titre personnel.
Cet amendement pose un principe, que le ministre vient de rappeler. Il convient cependant de préciser que le versement de ce pécule d'incitation sera limité dans le temps. C'est l'objet de mon sous-amendement, qui insère cette précision dès le début de l'article.
Deuxièmement, l'exonération de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu relève d'un principe de cohérence, par rapport à la non-imposition des indemnités de licenciement. Nous y sommes donc tout à fait favorables.
En ce qui concerne la question de l'impact de cette mesure, le ministre y a répondu par avance, puisqu'il a évoqué l'hypothèse selon laquelle le dispositif pourrait concerner 1 200 personnes. Il serait intéressant que l'on se projette dans les années suivantes, afin de connaître dans leur totalité les conséquences de cet amendement, auquel je donne, à titre personnel, un avis favorable, complété par le sous-amendement que je viens de défendre.
Ces sous-amendements, dont nous avons débattu en commission, concernent le remboursement du pécule en cas de retour à un engagement militaire ou à un emploi dans l'une des fonctions publiques. Cela ne doit valoir que dans la mesure où la situation dans le retour à l'emploi est au moins équivalente. On perdrait en effet l'aspect incitatif au départ s'il devait y avoir remboursement total du pécule, même en cas de rémunération moindre.
Je ne soutiendrai votre amendement, monsieur le ministre, que si vous vous engagez à préciser dans le décret d'application que la nouvelle situation du bénéficiaire sera prise en compte pour déterminer le montant du reversement éventuel.
Je suis favorable au sous-amendement de M. Giscard d'Estaing, qui apporte une clarification utile. Quant à ceux de M. Viollet, j'ai déjà eu l'occasion de lui indiquer que j'y suis tout à fait favorable sur le fond. Je propose même d'associer la commission et lui-même aux discussions interministérielles. Cela dit, je préfère que cette précision figure dans les décrets d'application plutôt que dans la loi.
Sous réserve qu'on puisse s'assurer que ces dispositions figureront dans le décret, je retire les deux sous-amendements.
(Les sous-amendements nos 278 rectifié et 279 sont retirés.)
Je me suis déjà exprimé sur ces amendements, notamment pour vous indiquer que nous y étions favorables dans la mesure où ils pouvaient contribuer à la réussite de la restructuration de nos armées.
Les dispositions de la loi du 19 décembre 1996 relative aux mesures en faveur du personnel militaire dans le cadre de la professionnalisation des armées sont donc abrogées. Mais la loi prévoyait également qu'un rapport serait remis chaque année au Parlement. Cette disposition sera-t-elle respectée ?
Cet amendement concerne l'indemnité de départ volontaire des ouvriers d'État du ministère de la défense. J'ai déjà présenté le dispositif correspondant en répondant à plusieurs députés.
La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial, pour donner l'avis de la commission et présenter le sous-amendement n° 313 .
Il s'agit d'un sous-amendement rédactionnel.
J'en profite pour interroger le ministre sur l'alinéa 3 de l'amendement qui concerne le régime d'indemnisation du chômage. Est-il prévu que le dispositif des cotisations à ce régime et la compensation éventuelle aux organismes soit pris en charge ?
Comme pour l'amendement précédent, l'avis de la commission est favorable.
La version initiale de l'amendement, avant qu'elle ne soit rectifiée par le Gouvernement, faisait référence aux ouvriers d'État de la gendarmerie nationale jusqu'au 31 décembre 2008, étant entendu que l'article 9 du projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale dispose qu'il y aura rattachement organique et opérationnel de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur. Le seul problème, c'est que ce texte attend d'être inscrit à l'ordre du jour du Sénat, peut-être en janvier ou en février.
J'avais déposé un amendement qui a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 : seul le Gouvernement a le droit d'aggraver la charge publique. (Sourires.) De fait, l'amendement du Gouvernement dit aujourd'hui que les ouvriers d'État de la gendarmerie nationale continueront à bénéficier, jusqu'à la date qui sera éventuellement modifiée lors de l'approbation du projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie, des dispositions du présent amendement.
Pour autant, je souhaite attirer l'attention sur le fait que la loi ne pouvant s'appliquer, c'est l'ensemble des dispositions de la loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale qui ne peuvent s'appliquer. J'aurais aimé, monsieur le ministre, que vous nous confirmiez que, jusqu'à l'approbation de la loi, on reste dans la situation ante et que, en particulier, le dispositif mettant fin au principe de réquisition ne saurait s'appliquer.
J'indique à M. Giscard d'Estaing que, en effet, l'indemnité de chômage est prise en charge dans le cadre du budget de l'État. Par ailleurs, monsieur Viollet, nous n'avons fait que prendre en compte vos observations devant la commission. Nous avons rectifié l'amendement pour que vous ne soyez pas privé de cette oeuvre législative majeure. (Rires.)
(Le sous-amendement n° 313 est adopté.)
(L'amendement n° 43 , deuxième rectification, sous-amendé, est adopté.)
La parole est à M. Guy Teissier, président de la commission, pour soutenir l'amendement n° 265 .
Lors de l'examen de la loi de modernisation de la sécurité civile en 2004, nous avons accordé une prime de feu aux marins-pompiers de Marseille et aux sapeurs-pompiers de Paris, qui sont deux unités à statut militaire. Les conditions extrêmes dans lesquelles ces pompiers sont amenés à intervenir justifiaient une amélioration du niveau de leur pension. Le décret du 26 mai 2005 a précisé que cette prime correspond bien à une hausse de pension de 0,5 %. Cependant, il limite le bénéfice de cette augmentation aux seules pensions liquidées à compter du 14 août 2004. Cette disposition engendre une différence de traitement entre pompiers selon la date de liquidation de leur pension.
Il me semble nécessaire de vérifier les conditions d'application de la loi en examinant dans le détail la situation du régime de retraite de ces pompiers militaires. Mon amendement demande donc le dépôt d'un rapport du Gouvernement sur ces éléments, de façon que nous disposions d'éléments précis pour proposer une éventuelle amélioration du dispositif législatif.
L'amendement vise à établir un bilan de la situation du régime de retraite de ces catégories en vue d'une éventuelle amélioration du dispositif législatif. Comme le président Teissier appartient au groupe UMP, favorable à la coproduction législative, je propose que ce rapport et ce bilan puissent être faits sous l'oeil vigilant d'un membre de la commission de la défense.
Pourquoi pas, en effet, un parlementaire du département des Bouches-du-Rhône ?
(L'amendement n° 265 est adopté.)
Nous avons terminé l'examen des crédits relatifs à la défense.
La suite de la discussion de la seconde partie de la loi de finances pour 2009 est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009 :
Outre-mer.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures cinquante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma