La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
L'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2007 (n° 515).
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission mixte paritaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, mes chers collègues, je commencerai par relever les principaux aspects de cette loi de finances rectificative pour 2007.
Le premier est assurément la maîtrise de la dépense, dont les objectifs ont été tenus : le plafond de 266,9 milliards d'euros a été strictement respecté, les différents décrets d'avance ont été totalement gagés, le collectif lui-même n'a ouvert en net aucun crédit supplémentaire, ce qui s'explique notamment par une gestion satisfaisante de la réserve de précaution.
Quant aux recettes, qui avaient été prudemment évaluées, elles font apparaître une plus-value de 4 milliards par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale, laquelle a permis de réduire le déficit de façon substantielle en le ramenant des 42 milliards initialement prévus à 38,3 milliards. Monsieur le ministre, j'attire votre attention sur la grande sagesse, voire la rigueur, dont l'Assemblée nationale et le Sénat ont fait preuve en veillant à ne pas dégrader les perspectives de baisse du déficit en exécution par rapport à la prévision.
S'agissant du texte de la commission mixte paritaire, laquelle s'est réunie hier après-midi, il propose tout d'abord une solution équilibrée, issue de longues discussions, pour l'investissement d'une réduction d'ISF dans les fonds propres des petites et moyennes entreprises par le biais de fonds intermédiés, FCPI ou FCPR, que nous avons associés aux fonds d'investissement de proximité déjà inscrits dans le dispositif de la loi TEPA. Ces fonds intermédiés bénéficieront d'un sous-plafond de 20 000 euros sur la réduction d'impôt totale de 50 000 euros, le taux de cette dernière différant selon que l'investissement est fait directement – 75 % – ou par le biais de fonds intermédiés – 50 %. Toutes les précautions ont été prises vis-à-vis de Bruxelles. Dans un premier temps, le dispositif est soumis à la règle de minimis, en attendant que les négociations européennes, dont nous espérons qu'elles aboutiront d'ici au milieu de l'année, fixent des lignes directrices permettant de l'élargir.
Cette loi de finances rectificative a été pour nous l'occasion de nous montrer très imaginatifs s'agissant des nouvelles taxes liées au développement durable. Nous avons en particulier confirmé la taxe pour la contribution durable aux activités de pêche marine. Cette taxe, qui s'appliquera à compter du 1er janvier aux poissons, aux crustacés et aux mollusques marins,...
…représentera 2 % du prix hors taxe à la consommation finale. Toutefois, les préoccupations que nous avions exprimées ici même il y a quinze jours ont été satisfaites, puisqu'elle ne s'appliquera qu'à partir d'un chiffre d'affaires de 763 000 euros,…
…ce qui correspond au seuil retenu pour le régime normal de la TVA. Cette taxe contribuera à honorer les engagements, pris il y a un mois et demi tout à fait légitimement auprès des marins pêcheurs, dont chacun connaît les difficultés, de mettre en place rapidement un plan ambitieux de modernisation de notre flotte de pêche et d'amélioration de l'ensemble de la filière.
L'écopastille constitue une autre taxe contribuant au développement durable.
Celle-ci fonctionnera sur le mode d'un malus déclenché à partir d'une émission de plus de 160 grammes de CO2 par kilomètre. Au terme de longs débats, nous avons écarté la familialisation,…
Au contraire ! Il nous est apparu indispensable que la fiscalité de l'environnement ainsi créée reste pure et ne courre pas deux lièvres à la fois, en mélangeant des objectifs de politique familiale – qui doivent relever plutôt des allocations familiales – et de réduction de CO2.
Je crois que ce faisant, nous avons fait du bon travail.
Monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur les conditions dans lesquelles le Parlement – Assemblée nationale, Sénat, puis CMP – est appelé à travailler. Nous faisons de notre mieux, mais nous devons travailler dans la précipitation. Ainsi, s'agissant de ces mesures importantes, l'une est arrivée…
…une ou deux heures avant la dernière réunion de la commission des finances, l'autre à peine quelques minutes auparavant.
Dans ces conditions, il est très difficile de faire du bon travail. En outre, M. Migaud, le président de notre commission des finances, attend toujours les études d'impact de ces deux taxes, qui nous sont pourtant promises dans tous les colloques que nous pouvons tenir sur les finances et la fiscalité publique.
La CMP s'est également, et comme toujours, beaucoup occupée des collectivités territoriales. Deux dispositions intéressantes ont été prises pour améliorer des taxes existantes. Tout d'abord, s'agissant de la taxe sur la publicité, qui porte à la fois sur l'affichage et sur les emplacements publicitaires, nous avons suivi nos collègues sénateurs qui souhaitent la revaloriser. Le nouveau dispositif prendra effet au 1er janvier 2009, laissant ainsi toute l'année 2008 pour régler la question en concertation avec les professionnels. Ensuite, le dispositif de la taxe sur les spectacles a été amélioré : toute collectivité – intercommunalité, département ou région – qui aura financé un équipement dans ce domaine pourra désormais, dans le cadre de délibérations concordantes de l'ensemble des collectivités concernées, bénéficier pour partie du produit de cette taxe, qui est actuellement strictement affecté aux communes.
Enfin, sur proposition du sénateur Alain Lambert, qui est l'auteur d'un rapport sur la révision générale des politiques publiques, la CMP a décidé la création, au sein du comité des finances locales, d'une commission consultative d'évaluation des normes.
La commission consultative d'évaluation des charges, présidée par notre ancien collègue Philippe Auberger, qui fonctionne depuis quelques années à la satisfaction générale, pourrait lui servir de modèle. Bien entendu, monsieur le ministre, pour tout projet de loi ayant un impact important en termes de normes et de finances locales, cette instance sera consultée. Elle le sera aussi s'agissant des textes européens, dont les normes jouent aussi un rôle très important dans les comptes locaux.
Tels sont les points principaux qui ont été discutés en commission mixte paritaire, dans le cadre d'un travail extrêmement constructif avec nos collègues sénateurs. Je vous propose, chers collègues, d'adopter ce projet de loi de finances rectificative pour 2007, moyennant les propositions de la commission mixte paritaire et les quelques amendements du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire montre combien nos débats ont permis d'enrichir le projet de loi initial. Le Gouvernement a présenté un certain nombre d'amendements, qu'il s'est efforcé de transmettre au Parlement le plus tôt possible – avec probablement quelques ratées (Sourires) – même si l'Assemblée nationale en particulier a pu manquer de temps pour examiner certains d'entre eux. Je pense notamment aux dispositions relatives à l'écopastille, il est vrai parvenues tardivement. Vous le savez, je suis attaché à ce que vous puissiez légiférer dans les meilleures conditions,…
…et les délais dans lesquels vous avez dû débattre du bonus-malus doivent rester exceptionnels.
Ce sont mes résolutions de fin d'année. (Sourires.)
Ces délais s'expliquent par l'attentisme que suscitaient les annonces de l'éco-pastille sur le marché automobile. Reporter l'intégration de la mesure au texte que M. Borloo vous présentera dans le courant de l'année prochaine aurait posé un problème pour la commercialisation des véhicules. En outre, il était préférable qu'elle trouve sa place dans un texte budgétaire.
Les parlementaires aussi ont présenté beaucoup d'amendements, tendant, par exemple, à préciser le financement de la prime à la cuve ou à améliorer substantiellement certains dispositifs, comme la taxe sur les poissons, qui a fait l'objet d'un travail approfondi dans chaque assemblée, ou la réduction à deux mois du délai de réponse de l'administration fiscale aux observations des très petites entreprises. Ce mécanisme « miroir » entre les droits de l'administration fiscale et ceux des administrés est une bonne chose et nous entendons aller plus loin dans ce sens.
La commission mixte paritaire a encore approfondi ce travail législatif, et nous disposons désormais d'un texte équilibré, que ce soit sur la taxe « poissons » ou sur le dispositif d'affectation de la réduction d'ISF aux PME. Le Gouvernement n'était pas favorable à l'adoption au Sénat de la disposition – fort débattue – relative aux centres de gestion agréés. Je suis néanmoins conscient que le chantier reste devant nous. Il faudra trouver une solution.
Je regrette le maintien de la réforme de la taxe sur la publicité, introduite un peu brutalement au Sénat. Je ne vous propose pas de supprimer cette disposition votée à l'unanimité par le Sénat, mais je pense qu'il faudra profiter du délai d'un an – elle ne s'appliquera qu'au 1er janvier 2009 – pour engager une concertation très approfondie avec la profession et affiner les modalités de ce dispositif à partir du 1er janvier 2009, car nous ne pouvons pas en rester là. Cela représente une économie importante pour les collectivités, mais, je le répète, le Gouvernement reste extrêmement prudent sur ce sujet.
Je voudrais saluer, comme l'a fait votre rapporteur, la création de la commission consultative sur les normes. Elle se place dans le droit-fil des propos tenus par le Premier ministre, en juin ou en juillet, lorsqu'il avait reçu les présidents d'exécutifs locaux. Il faudra maintenant donner vie à cette commission. C'est un travail compliqué de répertorier, puis de donner un avis sur l'ensemble du système normatif qui pèse sur les collectivités locales. Je salue le travail du sénateur Alain Lambert sur le sujet.
Comme l'a indiqué Gilles Carrez, ce texte fait mieux que le projet de loi de finances initiale, puisqu'il améliore le solde budgétaire. Nous avons strictement maîtrisé les dépenses, tout en finançant les priorités sur lesquelles le Président de la République s'est engagé devant les Français.
Ce texte poursuit également la modernisation de notre fiscalité. Nous renforçons les procédures fiscales ; nous faisons un effort en direction des personnes aux revenus modestes ; nous élargissons le régime fiscal du mécénat et du patrimoine historique. Enfin, avec l'éco-pastille, nous modernisons notre fiscalité dans un sens plus favorable à l'environnement. Sur tous ces points, nos débats ont été, me semble-t-il, libres et responsables et ont permis d'améliorer le texte initial.
Je voudrais remercier l'ensemble des parlementaires qui ont participé à nos débats, et plus particulièrement le rapporteur général Gilles Carrez, qui, avec sa compétence habituelle et ses talents pédagogiques, a su défricher des secteurs souvent complexes, les rendant ainsi intelligibles, afin que l'Assemblée puisse voter en toute connaissance de cause.
Je voudrais également remercier le président de la commission des finances, Didier Migaud, pour la qualité de son travail et celui de la commission. Je salue ses capacités à gérer la situation un peu étonnante d'un président de commission, issu de l'opposition, solide sur ses convictions et accomplissant sa tâche avec l'impartialité qui s'impose. Cela représente un bel équilibre, un bel exercice que je salue.
Ce projet de loi conclut, d'une certaine façon, un long cycle budgétaire, commencé vers le mois de septembre. Nos débats sans concession, mais caractérisés par un respect mutuel, s'inscrivent résolument dans la trajectoire de réforme de nos politiques publiques et d'assainissement progressif des finances de l'État. J'ai la conviction que vous partagez tous ce souci, quels que soient les bancs sur lesquels vous siégez, même si certains contestent les voies et moyens accompagnant ce processus.
Pour conclure, je souhaite remercier la présidence de l'Assemblée pour la qualité de sa gestion des débats et l'ensemble des collaborateurs de la commission et du Gouvernement pour le travail accompli. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en première lecture, le groupe Nouveau Centre a porté une appréciation globalement positive sur le projet de loi de finances rectificative.
Monsieur le ministre, le groupe Nouveau Centre souhaite vous féliciter pour vos qualités d'ouverture. Vous pratiquez le dialogue avec le Parlement, tant avec la majorité qu'avec l'opposition – ce que je trouve très bien. Cela change d'un certain nombre de ministres précédents.
Ce projet de loi comporte des avancées positives que le Nouveau Centre approuve : un effort de clarification des relations financières entre, d'une part, l'État et la sécurité sociale et, d'autre part, l'État et la SNCF ; la lutte contre la fraude avec la mise en place du dispositif de « flagrance fiscale » ; l'amélioration du dialogue entre l'administration et le contribuable ; enfin, le soutien au renforcement des fonds propres des PME, même si l'accouchement a été difficile - l'amendement que nous avions déposé avec M. Fourgous et deux autres collègues a finalement abouti à une solution équilibrée – et s'il faudra encore discuter avec la Commission de Bruxelles.
Cependant, le groupe Nouveau Centre regrette le mauvais calibrage d'un certain nombre de mesures, partiellement liées, comme l'a rappelé M. Gilles Carrez, aux mauvaises conditions d'examen de textes qui nous ont été soumis extrêmement tard. L'éco-pastille en est un bel exemple. Ainsi, le bonus-malus sur les voitures neuves les plus fortement émettrices de CO2 pénalise les familles nombreuses et les utilisateurs de véhicules flexfioul.
Si le groupe Nouveau Centre a salué ce premier pas vers une fiscalité écologique, nous avons toutefois souhaité amender ce dispositif dans deux directions.
Le premier amendement concernait une « familialisation » du dispositif. Nous avions proposé que les taux d'émission de dioxyde de carbone soient réduits de cinq grammes par enfant à partir du deuxième enfant. Il nous a été reproché en commission de perturber le dispositif. Nous persistons cependant à dire que ce système n'est pas adapté à la situation des familles nombreuses. Vous aurez du mal à leur expliquer le bien-fondé de cette mesure. En effet, les familles nombreuses qui ont choisi d'avoir cinq ou six enfants verront pratiquement toujours leur véhicule soumis au malus.
Le deuxième amendement visait à éviter une pénalisation excessive des véhicules flexfioul. Le groupe Nouveau Centre avait proposé soit de les exclure du champ de la mesure, soit d'appliquer un abattement de 50 % sur la taxe sur les émissions de dioxyde de carbone, mesure à laquelle le Gouvernement avait donné son accord, ainsi que sur le barème, mais qui a été malheureusement repoussée en commission mixte paritaire. Alors que tout le monde était d'accord, ce qui était un minimum, il est curieux que cette mesure ait été repoussée. Nous regrettons donc de ne pas avoir été entendu sur ce sujet en commission mixte paritaire. Mais le Gouvernement comme le Parlement pourront se rattraper lors de l'examen du projet de loi Borloo – on peut toujours espérer !
Monsieur le ministre, nous n'échapperons pas à une discussion de fond sur les éco-taxes. Le rapporteur général du Sénat comme celui de l'Assemblée ont-ils raison de rappeler qu'il ne faut courir qu'un seul lièvre à la fois ? Je ne le crois pas. L'exemple du flexfioul est typique. On ne peut pas mener une politique en sa faveur grâce à un certain nombre de mesures fiscales et voter simultanément une éco-taxe qui aboutit exactement au résultat inverse. On peut craindre que l'État ne soit schizophrène, en menant une politique qui encourage et une autre qui décourage. Cette situation n'est pas tenable. J'ai donc contesté en commission mixte paritaire la position du rapporteur général du Sénat, en lui faisant remarquer qu'il ne pouvait prétendre que l'on ne peut courir qu'un lièvre à la fois. La politique vise précisément à trouver, même si ce n'est pas simple, les bons équilibres entre plusieurs objectifs. À cet égard, les exemples que je viens de citer sont typiques. Je suis persuadé que notre rapporteur général évoluera, car il s'agit d'un homme très ouvert. L'idée monomaniaque – si je puis dire – selon laquelle chaque mesure ne peut avoir qu'un objectif n'est pas tenable. Sinon, vous serez en complète contradiction avec vous-même, comme c'est le cas avec l'éco-pastille. Il faut réfléchir à ces sujets au fond et ne pas rester sur cette idée monomaniaque.
Le groupe Nouveau Centre se félicite de l'adoption de son amendement sur les biocarburants, qui diminue à due concurrence la proportion de la TIC applicable au super éthanol – nous avons été cohérents avec la politique antérieure menée –, afin de conserver le principe d'une fiscalité nulle et de maintenir la compétitivité de ce carburant.
Nous regrettons cependant que le Gouvernement ait réduit le niveau de la défiscalisation sur le bioéthanol et le diester, alors que les matières premières agricoles qui alimentent cette nouvelle industrie ont connu des hausses considérables. Le prix des oléoprotagineux, du blé et du maïs ne permettent pas de réduire la défiscalisation, malgré la hausse du prix du pétrole. Vous nous avez dit : « on applique la formule DIREN », mais, à notre avis, elle est totalement inadaptée, puisque, pour ce qui est de la filière bioéthanol, le panachage entre blé, maïs et céréales, d'une part, et le sucre de betterave ou de canne, d'autre part, a complètement changé. Dès l'année prochaine, nous vous « ressortirons » l'argument, et vous serez obligé, monsieur le ministre, d'augmenter la défiscalisation, dans un contexte budgétaire extrêmement difficile.
Il faut savoir s'en tenir à une ligne politique, sinon les industriels sont complètement déstabilisés. J'ai dîné hier soir en compagnie de quelques collègues avec le directeur de l'entreprise Roquette qui vient de terminer la construction de son site bioéthanol : il se demande s'il va le mettre en route. L'entreprise Soufflet est dans la même situation, puisqu'elle a commencé, elle aussi, à investir dans cette voie. Les industriels s'interrogent. Doivent-ils investir ou geler leur décision, compte tenu des changements de position des gouvernements successifs ?
Le groupe Nouveau Centre n'était pas un grand zélateur de la taxe sur les poissons. Nous pensons que lorsqu'un secteur est en difficulté, il faut financer les aides par le biais de l'impôt général. Il nous semble un peu curieux d'aider une branche en créant une taxe sur celle-ci.
De plus, il reste un grand nombre de problèmes sur lesquels nous n'avons pas obtenu de réponses précises. L'eurocompatibilité, par exemple, est un sujet très difficile.
Hier, nous avons passionnément discuté, en commission mixte paritaire, pour savoir si cette taxe entrait dans l'assiette de la TVA. En l'état actuel des textes, je pense que la réponse est positive. La taxe de 2 % sera en fait de 2,40 %, puisque de la TVA sera perçue sur la taxe.
Un autre problème se pose : celui de la déductibilité de la taxe au regard de l'impôt sur les sociétés. En l'absence, dans le texte adopté, de dispositions le permettant, elle ne sera pas déductible. Or, chacun sait que, dans un marché, la création d'une taxe n'est pas forcément supportée par le consommateur. Elle l'est parfois par les entreprises, par la distribution, selon les équilibres économiques du moment dans la filière. Là encore, il est manifeste que nous n'avons pas disposé de suffisamment de temps pour préciser les différentes composantes de ce nouvel impôt.
La situation de nos finances publiques, qui demeure très fragile, préoccupe plus particulièrement le groupe Nouveau Centre. Le projet de loi de finances rectificative ne contient pas de mesures supplémentaires de redressement de nos finances publiques. La discussion au Sénat et en CMP n'a rien changé à ce diagnostic. La réduction du déficit public n'est pas structurelle, mais, pour 80 % le fruit de plusieurs réductions exceptionnelles, soit 3,1 milliards sur les 3,7 milliards. Vous en connaissez tous l'origine : une économie de constatation sur le prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne et trois mesures non reconductibles, dont la plus importante est l'accélération du versement par anticipation du dividende d'EDF pour un peu moins d'un milliard.
En outre, si le Gouvernement a fait preuve de réalisme sur l'évaluation des recettes fiscales, il a, compte tenu des prévisions macro-économiques, pris un risque de surestimation des recettes liées à l'imposition sur les sociétés. Monsieur le ministre, les acomptes ayant été versés le 15 décembre, disposez-vous d'éléments vous permettant de savoir si vos prévisions, que nous estimons assez optimistes, confirment votre thèse ou l'infirment en tout ou partie ?
Est-il prudent de penser que l'impôt sur les sociétés va passer de 45,9 milliards dans la loi de finances initiale à 51,1 milliards en loi de finances rectificative ? En effet, ces évaluations ne tiennent pas compte d'un certain nombre de phénomènes nouveaux : la chute des profits bancaires, c'est-à-dire des provisions extrêmement importantes constituées dans les banques, qui représentent une part non négligeable du versement de l'impôt sur les sociétés ; les fortes hausses des profits pétroliers, qui n'entraînent pas de hausse significative de l'impôt sur les sociétés en France – ainsi, à peine 5 % des énormes bénéfices de Total sont réalisés en France, soit un versement très faible eu égard à ce que le groupe réalise au plan mondial. Par conséquent, la réévaluation à la hausse, à hauteur de 5,2 milliards d'euros, des recettes apportées par cet impôt paraît très fragile.
Le Nouveau Centre souhaite donc alerter le Gouvernement sur ce risque de dégradation de la conjoncture économique, du fait du risque croissant de récession aux États-unis, ce qui pourrait fort bien réduire les recettes fiscales et aggraver encore le déficit budgétaire.
En conclusion, le Nouveau Centre regrette que le Gouvernement ne s'engage pas davantage dans la révolution culturelle que nous souhaitons et qui consisterait à privilégier les mesures d'économie sur celles qui augmentent la dépense publique et la dépense fiscale.
Espérons que les propositions découlant de la revue générale des politiques publiques débouchent dès 2008 sur des économies durables !
Ainsi, le Nouveau Centre a formulé trois propositions concrètes d'économie : la réduction des exonérations de charges accordées aux grandes entreprises en matière d'exonération de cotisations sociales ; un pacte de solidarité à négocier entre l'État et les collectivités territoriales ; le plafonnement des niches fiscales. Sur les premier et troisième points, nous commençons à travailler en commission des finances pour être en mesure de vous faire des propositions au printemps.
Souhaitant encourager le Gouvernement dans la voie de l'assainissement de nos finances publiques, le groupe Nouveau Centre, comme en première lecture, votera en faveur de ce projet de loi de finances rectificative pour 2007. Il donne rendez-vous au Gouvernement pour la discussion du projet de loi de finances pour 2009 : nous verrons alors si les objectifs de réduction des déficits publics et du niveau de notre endettement public se traduisent dans les faits ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai mon intervention par quelques éléments de macro-économie pour commenter ce collectif budgétaire.
Le projet de loi de finances rectificative est bâti sur une hypothèse de croissance de 2 % pour 2007. La loi de finances initiale 2007 tablait sur des objectifs de 2,25 à 2,5 %. Mais notre Premier ministre, François Fillon, avoue lui-même aujourd'hui que nous serons probablement plus proches de 1,9 %. Pour notre part, nous craignons que la croissance soit encore inférieure et le déficit plus important qu'annoncé dans ce texte. Des interrogations demeurent, en effet, sur les recettes fiscales supplémentaires annoncées ; Charles de Courson vient de le souligner pour ce qui concerne l'impôt sur les sociétés.
La croissance, monsieur le ministre, ne se décrète pas, pas plus que la confiance : nous l'avions dit au moment de l'examen de la loi TEPA cet été. À cet égard, les prévisions de l'INSEE pour 2008, publiées ce matin, nous laissent perplexes, tout comme les Français, avec la morosité en prime !
Oui, les Français s'inquiètent tous sur l'évolution de leur pouvoir d'achat, à l'exception de ceux que vous avez gâtés cet été, qui ne peuvent pas consommer davantage. Bref, vos mesures n'ont pas eu d'effet sur une relance réelle sur la consommation.
Cette inquiétude se fait plus grande devant l'effet sournois, mais réel, d'une inflation que vous persistez à sous-estimer. Je vous le dis, monsieur le ministre, le désarroi de nombre de nos concitoyens devant les augmentations de prix est profond, et la réalité est plus cruelle que vous le mesurez, dans leur vie de tous les jours.
Ce collectif budgétaire est aussi l'illustration d'une mauvaise méthode : précipitation, voire improvisation. J'en prendrai trois exemples : l'éco-pastille, la taxe « poissons » et la redevance audiovisuelle.
S'agissant de l'éco-pastille, où est le grand texte sur la fiscalité écologique attendu après le Grenelle de l'environnement ?
Le débat que nous avons eu sur ce sujet, notamment sur la familialisation, a été improvisé, approximatif et tardif – vous en êtes, vous-même, convenu, monsieur le ministre. Il reste donc inabouti, comme Charles de Courson vient de le faire remarquer. Celui sur les biocarburants n'a pas été abordé sous l'aspect scientifique. Il n'est donc pas étonnant que les associations quittent aujourd'hui la discussion de l'après-Grenelle, mesurant déjà l'écart entre les annonces faites et la réalité.
Les exemples de la taxe « poissons » et de la redevance télévision nous montrent, s'il en était besoin, l'intrusion permanente du Président de la République dans l'hémicycle, avant même la mise en oeuvre des préconisations du comité Balladur sur la réforme des institutions !
Devant la contestation des pêcheurs bretons en novembre dernier, le Président de la République a annoncé l'adoption par voie législative d'un mécanisme de compensation qui réintègre le coût du gasoil dans le prix du poisson vendu à l'étal. Le lendemain, alors qu'il recevait les pêcheurs à Paris, Michel Barnier est revenu sur les déclarations du Président, pour indiquer que ce mécanisme de compensation devrait veiller à ne pas pénaliser le consommateur. Nous voilà à nouveau en plein débat sur le pouvoir d'achat !
Le 28 novembre dernier, le Gouvernement annonçait, de nouveau, la mise en place d'une éco-contribution de 1 à 2 % sur le prix de vente final du poisson. C'est donc dans la cacophonie la plus totale – les députés « marins » UMP ne voulant pas, à juste raison, endosser la responsabilité d'une rédaction approximative d'un amendement contestable – que le Gouvernement a fait adopter un amendement à la loi de finances rectificative, qui prévoit l'application d'une taxe de 2 % sur la vente du poisson à la première vente, c'est-à-dire au niveau des mareyeurs.
Face aux engagements pris par le Président de la République au Guilvinec d'adopter un mécanisme de compensation d'ici à la fin de l'année, le Gouvernement a agi dans l'urgence et la confusion. Les mesures adoptées à la sauvette par les députés de la majorité n'auront pas les effets escomptés et risquent, de plus, d'avoir des conséquences sur toute la filière.
L'article adopté le 6 décembre à l'Assemblée a mobilisé toute la filière contre lui. De surcroît, l'euro- compatibilité de cette disposition n'est même pas assurée.
L'augmentation du coût du gasoil est un problème complexe, je vous le concède, dont les répercussions ne sont pas les mêmes selon les flottilles. Il nécessite une réflexion approfondie, en concertation avec l'ensemble des acteurs de la filière, ce qui n'a pas été le cas.
Au lieu de cela, le Gouvernement a agi de manière précipitée et improvisée en adoptant des dispositions inefficaces et pour le moins dangereuses. Ceux qui connaissent bien le milieu de la pêche nous mettent en garde : si cette disposition venait à être définitivement adoptée, elle aurait de graves conséquences. Concentrer le poids de la taxe sur une seule partie de la filière risque de peser lourdement sur ceux qui y seront assujettis. Ce sont ainsi toutes les activités de transformation et de valorisation du poisson qui se trouveraient pénalisées, au bénéfice des produits d'importation déjà transformés.
Dans un contexte de relations tendues, la répercussion du surcoût pourra difficilement se faire vers la distribution ; elle risque de se faire au détriment du prix du poisson payé au pêcheur, en contradiction avec l'objectif du dispositif.
Même amendé au Sénat, solution qui a été retenue en commission mixte paritaire, l'article 22 quater ne résout en rien le problème de l'augmentation du coût du carburant : il ne fera que masquer les difficultés rencontrées par les pêcheurs et constitue une menace pour la filière de transformation et de valorisation des produits de la mer, et se répercutera sur les consommateurs.
Autre sujet illustrant vos mauvaises méthodes : le débat sur la redevance audiovisuelle. Nous, au parti socialiste, nous réclamons, depuis 2004, le maintien de l'exonération de redevance pour les retraités modestes, contrairement à la réforme du ministre des finances d'alors, Nicolas Sarkozy.
Le débat a été relancé dans le cadre du projet de loi sur le pouvoir d'achat, puisque les exonérations temporaires prennent fin cette année. On nous avait alors accusés de démagogie. Que n'avons-nous entendu, ici et au Sénat ! M. Marini, rapporteur général du Sénat, nous a accusés de vouloir jouer les bons apôtres et a déclaré que nos amendements relevaient de la manoeuvre politicienne. Vous-même, monsieur le ministre, probablement un peu agacé, avez répondu que le Gouvernement s'était exprimé mille fois sur le sujet. Tout cela pour en arriver à cette demi-mesure réduisant de moitié le montant de la taxe de la redevance audiovisuelle pour les 700 000 à 800 000 Français concernés.
Où en sommes-nous aujourd'hui ?
Hier, le Président de la République a décidé de maintenir, pour des raisons d'affichage – élections municipales et cantonales obligent –, l'exonération temporaire pour un an seulement. Nous sommes confrontés à des injonctions présidentielles qui ne font que repousser le problème après les élections de 2008. Au total, textes et intentions se chevauchent, et le pouvoir d'achat est toujours malmené. Bref, nous ne faisons pas du bon travail : alors que nous avons, mardi, voté le projet de finances pour 2008, les prévisions sont déjà fausses du fait des décisions que nous prenons aujourd'hui. Il faudra nous dire, monsieur le ministre, si les amendements du Gouvernement viendront préciser la pensée présidentielle.
Je voudrais revenir sur les quelques mauvais coups supplémentaires contenus dans cette loi de finances rectificative. Naïvement, les Français pensaient que leurs mutuelles les protégeraient des franchises médicales. Or l'article 45 quater nous montre, en intervenant sur les contrats entre assurés et mutuelles, que les Français seront directement soumis aux franchises.
Vous ajoutez dans ce collectif budgétaire des mesures qui augmentent les exonérations et les cadeaux accordés cet été dans la loi TEPA. Vous avez déjà instauré l'impôt choisi, et en relevant à 20 000 euros, en doublant donc, le plafond des sommes placées en fonds d'investissement de proximité et en exonération d'ISF, vous montrez une fois de plus qu'il n'y en a jamais assez pour les nantis, et cela alors que nous n'avons pas encore de retour sur l'impact de la mesure prise il y a cinq mois.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne travaillons pas dans de bonnes conditions. Le Parlement est manipulé, nous le dénonçons. Les Français ne sont pas entendus, nous le regrettons. Les réponses qu'ils obtiennent sont des réponses de circonstance, de pure opportunité. Décidément, nous ne pouvons voter ce collectif budgétaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les propos de notre collègue Jean Launay, au demeurant toujours excellents,…
…sont quelque peu déprimants, et fort peu justifiés eu égard au contenu de ce projet de loi de finances rectificative.
Nous avons réussi à contenir la dépense publique et les déficits publics et à avoir des recettes fiscales supplémentaires. Par conséquent, c'est ce que nous pouvons appeler une bonne loi de finances rectificative.
Nous y avons, de plus, introduit, quelques dispositions fiscales opportunes comme la taxe sur les livraisons de poissons, qui ne grèvera pas le budget des ménages. Assise sur les chiffres d'affaires supérieurs à 762 000 euros, elle ne sera pas répercutée par le poissonnier sur son prix de vente mais par le grossiste. À cet égard, la CMP a particulièrement bien travaillé.
Avant de revenir sur les dispositions adoptées par la CMP, je ferai trois remarques à M. Launay.
Certes, bien des choses ont changé depuis le 6 mai dernier, mais pour autant le fait que le Président de la République soit présent au Parlement n'est pas une nouveauté. C'est au contraire une tradition de la Ve République. S'il ne peut s'exprimer dans l'hémicycle, il s'exprime dans les médias, transmet des messages personnels aux parlementaires et aux ministres,...
…voire s'adresse aux pêcheurs du Guilvinec. Dieu merci, lorsque le Président de la République s'engage, cela se traduit en actes, et dans des délais rapides. C'est ainsi qu'en l'espace de quelques jours, un engagement du Président a pu faire l'objet d'une disposition législative. Nous ne pouvons que nous en féliciter. En effet, qu'attendent les Français du Président de la République et de sa majorité ? Non pas des tergiversations mais de l'action, de l'efficacité. Et c'est le cas.
Ensuite, monsieur Launay, la croissance est bien au rendez-vous : 1,9 % pour l'ensemble de l'année 2007 quand certains orateurs du groupe socialiste affirmaient que jamais la barre des 1,5 % ne serait dépassée. Voilà de bonnes perspectives qui placent la loi de finances rectificative et la loi de finances pour 2008 sous de bons auspices : les hypothèses de croissance étaient prudentes et elles ont été conformes à la réalité.
Enfin, nous aurons l'occasion cet après-midi de débattre longuement de l'exonération de la redevance dans le cadre de la discussion du projet de loi pour le pouvoir d'achat. Cela nous permettra de prolonger le débat qui a déjà eu lieu sur tous les bancs de l'hémicycle. Inutile de vous targuer d'être à l'origine de cette mesure et de nous accuser.
J'en viens aux dispositions adoptées par la CMP.
Tout d'abord, la réforme de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel. Un amendement du Sénat, retenu par la CMP, exonère de taxe les livraisons de gaz au profit des réseaux de chaleur alimentant les logements des particuliers, en particulier le parc du logement social, ce qui aura, nous l'espérons, des répercussions dans le calcul des charges des ménages. C'est une disposition parfaitement adaptée, dont nous nous félicitons.
Nous regrettons toutefois que le Sénat ait supprimé la taxation du produit du PMU au profit des communes. Je suis certain qu'Éric Woerth, en tant que maire, partagera mon opinion.
Autre mesure dont nous nous réjouissons pour son apport à la création culturelle de notre pays : le crédit d'impôt en faveur de l'industrie phonographique. Le Sénat a amendé le dispositif voté par l'Assemblée nationale, qui élargissait le champ des dépenses éligibles à ce crédit d'impôt, en étendant le bénéfice de cette mesure aux albums de nouveaux talents « dont la moitié au moins sont d'expression française ou dans une langue régionale en usage en France », tel le patois de la Marne (Sourires.).
Je ne reviendrai pas sur l'éco-pastille, sur laquelle M. de Courson a fait de bonnes remarques, comme à son habitude. Mais j'insisterai sur le fait que travailler rapidement ne veut pas dire travailler dans l'urgence.
La commission des finances de notre assemblée met toujours à profit la qualité des réflexions de ses membres et des travaux préparatoires des administrateurs. Le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique est, pour sa part, particulièrement bien entouré. Cela implique que des échanges fructueux permettent de trouver, en temps et en heure, les meilleurs mécanismes pour mettre en oeuvre les nouveaux dispositifs fiscaux.
S'agissant de la taxe sur la publicité applicable au 1er janvier 2009, nous aurons l'occasion d'y réfléchir pendant un an, en réunissant l'ensemble des professionnels du secteur, de manière à élaborer le dispositif le plus adapté.
Pour l'éco-pastille, nous verrons comment le dispositif fonctionne. Chacun conviendra que ce dernier est bien calé. Sa « familialisation », à laquelle nous étions tous attachés, n'était pas au point. C'est la raison pour laquelle il sera opportun d'y revenir lors de la discussion budgétaire, l'année prochaine. Nous avons plusieurs mois devant nous.
Le groupe UMP votera donc les conclusions de la CMP, monsieur le ministre, réaffirmant son soutien à votre action, comme depuis le début de la discussion budgétaire.
Pour finir, permettez-moi de vous dire que le plaisir que vous disiez avoir à échanger avec les parlementaires est partagé : le groupe UMP est très heureux de travailler avec vous et vos collaborateurs, comme avec ceux des autres ministères.
Je remercie également les collaborateurs de la commission des finances et des commissions saisies pour avis, ainsi que l'ensemble des personnels de notre assemblée, sans lesquels nous ne pourrions débattre aussi passionnément. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire. Conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisi.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 1 .
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
Je suis saisi d'un amendement n° 2 . La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.
Cet amendement vise à intégrer la taxe sur les livraisons de poissons dans la base de la TVA. La modification apportée à l'article 22 quater est en effet contraire aux dispositions de l'article 78 de la directive relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, selon lequel la base d'imposition de la TVA doit obligatoirement inclure les impôts, droits, taxes et prélèvement, à l'exception de la TVA. La mesure retenue fragilise juridiquement un texte qui matérialise les engagements pris par le Président de la République.
Par ailleurs, comme plusieurs questions ont porté, lors de la CMP, sur la possibilité de déduire cette taxe du résultat, je précise que celle-ci sera neutre : elle n'aura pas d'incidence sur le calcul du résultat des professionnels concernés. Une instruction administrative précisera ce point.
Nous avons eu une longue discussion à ce sujet en CMP. Nous aurions souhaité que cette taxe ait la même assiette que la TVA : pour un poisson valant 100, la taxe de 2 % s'appliquerait sur les 100, au même titre que la TVA. En fait, cela n'est pas possible. La TVA s'appliquera donc sur 102, ce qui porte la taxe à 2,4 %. Nous sommes donc contraints de revenir sur l'amendement déposé par Jean Arthuis.
Par ailleurs, si je comprends bien, la taxe ne pourra être déduite ni de l'impôt sur les sociétés, s'il s'agit d'une société, ni des BIC, s'il s'agit d'une entreprise individuelle. Ce qui est logique puisqu'elle intervient en aval.
Pas du tout ! Vous qui ne cessez de vous plaindre du fait que les députés ne sont pas suffisamment associés à l'élaboration de la loi, vous devriez au contraire vous réjouir que nous y participions de si bonne manière.
En commission mixte paritaire, j'ai jeté un froid en rappelant que le droit communautaire exigeait que cette taxe soit incluse dans l'assiette de la TVA : pour un prix hors taxe de 100, il faudrait donc retenir 102 auquel s'appliquerait le taux de 19,6 %. Certains l'avaient contesté. Aujourd'hui, le ministre confirme ce que tous ceux qui prennent la peine de lire les directives communautaires savaient – et celle qui est en cause date de plus de vingt ans.
Se pose toutefois un problème pour le reversement. Rien n'interdit en effet au Gouvernement de se fonder sur les 2,4 % au lieu des 2 % pour abonder le fonds destiné à venir en aide aux pêcheurs, par des dotations ou d'autres moyens. Le ministre n'a rien dit à ce sujet. Est-il prêt à s'engager sur ce point ?
Ensuite, cette taxe peut-elle être considérée comme une charge au regard de l'IS ou des BIC, comme c'est le cas, si mes souvenirs sont bons, de celle sur l'élimination des carcasses de viande, qui, elle, est déductible ?
Enfin, est-elle eurocompatible ?
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner des précisions sur les points que je viens de soulever, avant de passer au vote sur l'amendement n° 2 ?
Décidément, la tâche des parlementaires n'est pas toujours simple ! Nous travaillons souvent dans l'urgence, ce dont les députés nouvellement élus se plaignent, qu'ils appartiennent à la majorité ou à l'opposition. Certains vont même jusqu'à parler de bricolage.
De surcroît, ce Gouvernement change régulièrement d'avis. J'en veux pour preuve ce qui s'est passé avec la redevance audiovisuelle. Comme nous voulions continuer à exonérer de cette redevance les foyers âgés modestes, le Gouvernement nous traitait d'irresponsables ; or, aujourd'hui, il change subitement de position !
Cet exemple précis montre que le Gouvernement cafouille. L'explication donnée par le ministre a été laborieuse – peut-être est-ce parce que la nuit a été longue. Nous aurions souhaité avoir des explications claires,…
Sur quoi ?
Je n'ai pas voulu vous imposer la litanie des articles du code concernés, mais je peux le faire, même si je ne suis pas certain que cela donne beaucoup d'éclaircissements.
J'ai dit que la taxe était intégrable à la base de calcul de la TVA. Quant à la neutralité fiscale, certes le commerçant paye sur 100 plus 2 % de taxe, soit sur 102, mais il bénéficie de la déduction de la taxe. Voilà donc une opération neutre pour le calcul de son résultat.
Monsieur le ministre, nous avons bien compris la mécanique, même si elle est un peu compliquée. Le résultat, et vous l'avez dit vous-même, c'est qu'elle assure un boni de 0,4 aux caisses de l'État. Mais ce boni sera-t-il rétrocédé à la filière pêche ?
Vous auriez pu faire autrement pour que le système soit vraiment neutre : pour cela, il aurait fallu fixer un taux de 1,8 % . Toutefois, vous n'avez pas retenu cette solution.
L'aide va-t-elle servir une fois de plus à « détourner » 0,4 % vers les caisses de l'État qui, reconnaissons-le, en ont bien besoin ?
Le calcul n'est pas aussi simple à faire. Nous allons travailler avec la filière sur les possibilités de reversement, sous une forme ou sous une autre, en matière de cotisations sociales. S'il y a un boni, nous aviserons, mais je vous avoue que les finances de l'État supporteraient bien quelques bonis !
Je suis saisi d'un amendement n° 3 .
La parole est à M. le ministre, pour le soutenir.
Il s'agit d'un amendement de précision.
Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean Launay, pour le groupe SRC.
Je ne pensais pas faire d'explication de vote, mais M. Chartier ayant demandé que les prises de parole soient inversées…
Monsieur Launay, M. Chartier n'y est pour rien. C'est moi le responsable.
Poursuivez, mon cher collègue.
Je me suis vraiment demandé s'il avait vraiment quelque chose à dire puisqu'il n'a fait que me répondre.
S'agissant du sujet fondamental de la croissance, nous avons dit que nous contestions l'hypothèse de croissance de 2,25 à 2,5 %. Nous ne sommes pas des oiseaux de mauvais augure, mais nous dénonçons ce qui nous semble exagérément optimiste. La prévision de croissance que nous avions faite, 1,8 à 1,9 % et non 1,5 %, se réalise, ce qui est bien inférieur à ce qu'il faudrait à la machine économique de notre pays pour qu'elle fonctionne mieux.
S'agissant de la taxe « poissons », la conviction du ministre m'a semblé toute relative. Pour sa part, le rapporteur général a fait preuve de son opiniâtreté bien connue pour tenter de nous convaincre, et c'est son rôle. Toutefois, des interrogations techniques demeurent, notamment celle de l'eurocompatibilité de la taxe que j'ai déjà évoquée.
Enfin, monsieur le ministre, nous n'avons pas eu de réponse sur la redevance audiovisuelle. Je ne doute pas que vous mettrez en oeuvre avec la plus grande célérité la décision présidentielle qui est intervenue hier et qui vient interférer dans notre débat. Qu'en sera-t-il de sa traduction dans les comptes de la loi de finances rectificative pour 2007 ?
Monsieur Launay, au début de la discussion budgétaire vous annonciez bien 1,5 % de croissance. C'était faire preuve de pessimisme, car les chiffres sont là qui confirment les prévisions gouvernementales, et l'on peut s'en féliciter. Cela étant, je n'ai jamais dit que vous étiez des oiseaux de mauvais augure.
C'est vrai, la croissance a sa part de psychologie, et c'est la raison pour laquelle il faut marquer notre volonté de poursuivre dans la voie de la réduction du déficit budgétaire, de la contrainte des dépenses publiques, de l'engagement des dépenses d'avenir et de tout ce qui alimente les moteurs multiples de la croissance.
J'ai le sentiment que le Gouvernement est plus que jamais au rendez-vous, et le groupe UMP aussi. J'espère que le groupe socialiste partagera aussi progressivement ce point de vue, afin que l'on poursuive encore davantage l'ouverture dans cet hémicycle.
Le groupe UMP votera donc le projet de loi de finances rectificative pour 2007.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, le groupe Nouveau Centre votera ce collectif budgétaire.
Je souhaite appeler mes collègues, de quelque sensibilité qu'ils soient, à ne tomber, ni dans le pessimisme noir, ni dans l'optimisme béat.
La situation est difficile. Même si vous étiez au pouvoir, mesdames, messieurs de l'opposition, il ne vous serait pas possible d' à une politique extrêmement active en matière de contrainte des dépenses publiques.
Et soyons bien conscients que la situation économique est plus difficile que beaucoup le pensaient il y a encore six mois.
On peut faire de la démagogie, jouer les pères Noël, mais cela ne dure pas très longtemps, car après Noël vient le 1er janvier !
Soyons raisonnables et votons le projet de loi de finances rectificative pour 2007 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2007, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements qui viennent d'être adoptés par l'Assemblée.
(L'ensemble du projet de loi, ainsi modifié, est adopté.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures quarante, est reprise à dix heures cinquante.)
L'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs (no 510).
La parole est à M. Michel Raison, rapporteur de la commission mixte paritaire.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme, mes chers collègues, au terme de l'examen du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, l'Assemblée nationale et le Sénat ont enrichi le texte de pas moins de treize articles, qui en comporte désormais trente-neuf. Il devrait contribuer à rendre du pouvoir d'achat aux consommateurs en renforçant la concurrence sur le marché des biens de grande consommation, dans le secteur des communications électroniques, des banques et de la vente à distance. Les apports de nos deux assemblées devraient également renforcer la confiance du consommateur en lui garantissant une plus grande transparence et une meilleure information.
Dans le titre premier, nous avons adopté le passage au « triple net », expression qui mérite quelques explications à destination du grand public. Contrairement à ce qu'affirment, à grand renfort de publicité, certains grands distributeurs, le texte leur permettra – si, toutefois, ils le souhaitent – de baisser les prix, puisqu'ils pourront désormais revendre les produits à prix coûtant. J'insiste sur l'importance d'une telle mesure. En 2005, ce n'est pas si vieux, le « triple net » apparaissait comme véritablement révolutionnaire, suscitant alors le scepticisme, voire l'opposition de certains parlementaires, dont je faisais d'ailleurs partie. Les débats que nous avons eus, la démarche progressive privilégiée par la loi Jacob-Dutreil, ont permis d'aboutir à un quasi-consensus, au point d'ailleurs qu'au mois de juillet, industriels et distributeurs – les deux principaux acteurs de la filière – en faisaient l'une des principales revendications de leur plate-forme commune. Il a fallu que nous nous y rallions pour que les distributeurs se lancent dans la surenchère et se mettent à réclamer, à coups de campagnes alarmistes et de désinformation éhontée, la négociabilité des tarifs, qui n'est rien d'autre que la légalisation de la discrimination tarifaire. Ils sont allés jusqu'à nous accuser de voter une loi qui, non seulement, ne ferait pas baisser les prix, mais n'aurait d'autre objet que de contenter les marchés financiers.
Il nous appartient de faire de la pédagogie pour expliquer que nous avons donné aux distributeurs toute latitude pour faire baisser les prix, en les autorisant à réintégrer la totalité des avantages financiers qui leur sont consentis par leurs fournisseurs. Ils ont le droit de ne pas le faire, mais ils devront alors assumer la responsabilité de leur décision.
Ce n'est pas de la pédagogie, c'est de la propagande ! (« Parole d'expert ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous avons également confirmé la possibilité pour les grossistes de pratiquer un seuil de revente à perte minoré lorsqu'ils vendent leurs produits à des petits commerçants indépendants. Cette mesure, que le Sénat avait partiellement remise en cause, a finalement été rétablie par la commission mixte paritaire, car elle est essentielle pour les petits commerces de proximité qui animent nos territoires. Elle contribue en effet à maintenir la compétitivité de leur prix sur des produits symboliques, principalement des grandes marques, aux yeux du consommateur.
La commission mixte paritaire a également confirmé l'article introduit par le Sénat, qui modère les marges des pharmaciens d'officine, ce qui représente un gain de 100 millions d'euros pour l'assurance maladie et une économie de 30 millions d'euros pour les patients et les assurances complémentaires.
Nous avons également adopté l'article 2 qui crée une convention unique retraçant la totalité de la relation commerciale, conclue avant le 1er mars, et qui devrait permettre de rapprocher les négociations « à l'avant » des négociations « à l'arrière ». Le Sénat a maintenu la disposition introduite par notre assemblée consistant à offrir la souplesse nécessaire pour que cette convention puisse s'adapter à l'évolution de la relation commerciale en cours d'année, afin de tenir compte de la diversité des produits dont elle fait l'objet.
Le Sénat a également maintenu l'article 3, qui offre aux interprofessions agricoles la possibilité d'insérer dans des contrats types des clauses de révision en cas de fortes variations des cours des matières premières agricoles, ainsi que la disposition introduite par notre assemblée pour sanctionner les prix abusivement bas en cas de hausse des cours des matières premières. Dans un contexte de hausse structurelle de certaines matières premières comme les céréales ou le lait, c'est une bonne nouvelle non seulement pour les producteurs, mais surtout pour les transformateurs à qui il est souvent reproché d'augmenter anormalement leurs tarifs. Il faut bien tenir compte de la hausse des matières premières, mais aussi de l'évolution des autres composantes du prix, comme les tarifs publicitaires ou les prix des carburants – qui ont une incidence sur ceux des emballages ou sur ceux des transports.
Nos deux assemblées ont également adopté la dépénalisation du refus de communication des conditions générales de vente.
Pour conclure sur le titre premier, la commission mixte paritaire a validé l'article introduit par le Sénat autorisant les commerces de détail d'ameublement à ouvrir le dimanche.
Cet article a été longuement débattu au Sénat et à l'occasion de la commission mixte paritaire.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, j'étais au départ plus que réservé sur cette disposition, d'autant que, dans un premier temps, l'auteur de l'amendement avait envisagé d'y inclure les commerces d'équipement de la maison et de bricolage. Pour peu, tout le commerce était concerné !
Compte tenu de l'existence d'un accord collectif étendu très protecteur pour les salariés du commerce d'ameublement, j'ai finalement souscrit à cette proposition dans la mesure où elle était strictement réservée à ce secteur. Toutefois, je suis conscient que, même dans le cas du commerce d'ameublement, si cette décision permet de régler certains problèmes propres à la région parisienne, elle risque également d'en provoquer en province.
Je tiens également à souligner que cette mesure ne préjuge pas les conclusions du rapport que le Conseil économique et social doit rendre sous peu : son avis donnera sans aucun doute un éclairage intéressant sur la question complexe du travail le dimanche. La réflexion se poursuivra dans les prochaines semaines. Il est vrai que les règles encadrant le repos dominical sont excessivement complexes et sans doute inadaptées à certains types de commerces ou à certaines zones géographiques, je pense notamment à la région parisienne. Je souhaite toutefois que nous procédions avec circonspection et que, disposant de tous les éléments, nous puissions prendre une décision éclairée qui soit adaptée aux différentes situations et dont la souplesse suffisante permettra notamment de prendre en considération les spécificités des différents types de commerces et des zones géographiques.
En ce qui concerne le titre II et les communications électroniques, l'Assemblée et le Sénat ont adopté l'article 6, qui limite à dix jours le remboursement des avances et des dépôts de garantie, et fixe un délai semblable pour la résiliation des contrats de communications électroniques.
La commission mixte paritaire a maintenu l'article, ajouté par notre assemblée, qui oblige à mentionner sur les contrats la date de fin de l'engagement, ainsi que celui qui subordonne à l'accord exprès des consommateurs la poursuite à titre onéreux de la fourniture de services accessoires à un contrat principal.
L'article 7, quant à lui, qui consacre la gratuité des temps d'attente téléphonique et l'accès aux services après vente via des numéros non surtaxés, satisfait une demande formulée de longue date par les consommateurs.
De même le Sénat a-t-il suivi notre Assemblée qui avait permis au consommateur ayant souscrit à un contrat de vingt-quatre mois de résilier son engagement par anticipation à partir du treizième mois, mais a modifié le montant de la pénalité, la ramenant de 33 % à 25 %. Les sénateurs ont également prévu qu'aucun contrat ne pourra présenter de durée minimale d'engagement supérieure à vingt-quatre mois et ont accepté en commission mixte paritaire de se rallier à notre demande de suppression de l'interdiction de subordonner le bénéfice de points de fidélité au réengagement du consommateur, interdiction qu'ils avaient introduite. Ils sont convenus en effet que celle-ci comportait des effets pervers : elle risquait de nuire aux consommateurs et de remettre en cause dans des secteurs extérieurs à la téléphonie le système des points de fidélité.
Le Sénat a également souscrit à notre proposition de rendre effectives les allégations de gratuité de certains numéros de téléphone pour les appels passés depuis des téléphones portables, ainsi que d'appliquer le tarif d'une communication nationale aux appels émis depuis un portable vers les services de renseignements téléphoniques. La commission mixte paritaire a par ailleurs validé le principe et amélioré la rédaction de la disposition qui rend obligatoire l'information par ces services du coût de la mise en relation préalablement à celle-ci.
Conformément à la volonté du Sénat, la totalité de ces mesures sera applicable aux personnes physiques, qu'elles agissent ou non à des fins professionnelles.
En ce qui concerne le secteur bancaire, le relevé annuel des frais bancaires verra enfin le jour, ce qui répond également à une forte demande des associations de consommateurs : c'est du reste, monsieur le secrétaire d'État, une mesure à laquelle vous étiez très attaché.
Notre assemblée a souhaité, pour que ce relevé soit le plus complet possible, que celui-ci inclue les agios perçus en cas de découvert.
Elle a également souhaité renforcer la transparence en matière de prêt immobilier. Le Sénat nous a du reste suivi sur le sujet en prévoyant qu'une fois par an le prêteur informera l'emprunteur du montant du capital restant à rembourser.
Nos deux assemblées ont également enrichi le texte de dispositions qui concernent la consommation dans ses divers aspects : il en est ainsi du droit de renonciation du consommateur, qui souscrit un contrat d'assurance dans le cadre d'un démarchage à domicile, ou des mesures visant à remédier aux abus constatés en matière de vente à distance, notamment dans le secteur du commerce électronique. Notre assemblée a ainsi rendu obligatoire l'information du consommateur sur les délais de livraison.
Le Sénat y a ajouté plusieurs dispositions, comme l'obligation pour le professionnel de mettre à disposition un numéro de téléphone non surtaxé permettant d'entrer effectivement en contact avec lui, le renforcement de l'information sur le droit de rétractation, le principe en vertu duquel le remboursement de la totalité des sommes versées s'effectue sous la forme d'un paiement, le remboursement sous forme d'avoirs ou de bons d'achat devant faire l'objet d'un accord exprès du consommateur.
Le Sénat a souhaité que l'ensemble de ces dispositions soient applicables aux consommateurs et aux non-professionnels.
J'ajoute que mon homologue du Sénat et moi-même vous proposons aujourd'hui un amendement visant à préciser que l'ensemble des dispositions relatives à la vente à distance, qui figurent dans ce texte, entreront en vigueur au 1er juin 2008.
Le Sénat a également introduit la faculté pour le juge de se saisir d'office des dispositions du code de la consommation, ce que nous avions préalablement refusé.
Enfin, à l'initiative de la commission des lois, et plus précisément de MM. Bertrand Pancher et Jean-Luc Warsmann, notre assemblée a transposé la directive sur les pratiques commerciales déloyales, et la commission mixte paritaire est revenue sur la dépénalisation, souhaitée par le Sénat, de ces pratiques. Je m'en félicite évidemment.
Chacun aura pu observer que je n'ai pas encore commenté l'article 8ter : monsieur le président, il me semble avoir le droit de dépasser mon temps de parole pour le faire.
Cet article autorise en effet le Gouvernement à définir le montant et les modalités de versement de la redevance due par le futur exploitant d'un réseau mobile de troisième génération, sous réserve évidemment que ce futur exploitant voie le jour. Je fais naturellement référence à la quatrième licence.
Je ne vous cache pas que les conditions d'adoption de cet article, introduit par un amendement du Gouvernement, ainsi que son contenu ont jeté un certain trouble parmi nous.
Il s'agit-là d'une affaire importante, qui aurait mérité un véritable débat, en particulier à l'Assemblée, laquelle a été privée de toute discussion par la procédure d'urgence, cet amendement ayant été introduit au Sénat, ce que je le regrette.
C'est la raison pour laquelle j'ai déposé un amendement, sous-amendé par M. François Brottes et adopté à l'unanimité de la commission mixte paritaire, disposant que le Gouvernement organisera un débat au Parlement sur le sujet avant toute mise en oeuvre de cet article. Monsieur le secrétaire d'État, j'appelle votre attention sur l'importance de cet amendement et je souhaite que vous preniez devant nous l'engagement de vous y conformer strictement.
Nous avons, je pense, respecté la philosophie du texte, laquelle visait à agir vite, à la fois pour renforcer la concurrence et rendre du pouvoir d'achat aux consommateurs et pour conserver à cette loi toute sa valeur, qu'elle perdrait si elle ne permettait pas aux distributeurs et aux fournisseurs de signer leurs contrats dans les plus brefs délais.
Nous aurons encore à débattre de grands dossiers, notamment à l'occasion du projet de loi de modernisation de l'économie. Je souhaite que nous y soyons pleinement associés : je ne doute pas que la commission des affaires économiques et son président y veilleront.
Je souhaite enfin remercier tous les députés qui ont participé activement à nos débats sur ce projet de loi, ainsi que les administrateurs de l'Assemblée nationale, dont l'aide sur ces dossiers, tant sur la forme que sur le fond, a été précieuse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de loi nous revient du Sénat, et il faut bien constater que la Haute assemblée a fait preuve d'une véritable prouesse en aggravant le contenu d'un texte déjà bien mauvais à de multiples points de vue. La méthode est à cet égard détestable, qui consiste à faire adopter en catimini des remises en cause importantes d'acquis sociaux sans aucun débat en commission et sans aucune discussion préalable avec les partenaires sociaux. Chapeau bas monsieur le secrétaire d'État ! Vous êtes très fort, vraiment très fort, dès qu'il s'agit de saigner la France du travail au profit de la France des dividendes. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
« Pouvoir d'achat», allez-vous rétorquer, alors que, vous le savez très bien, à la détérioration du pouvoir d'achat, la seule riposte valable consiste à revaloriser les salaires, à maîtriser les loyers, à réduire les prix de l'énergie, à remettre en cause les rentes de situation des compagnies des eaux et à mettre un terme aux pratiques bancaires abusives. Tournant le dos à cette politique audacieuse, vous laissez croire que la solution à ce grave problème est au contraire de libéraliser et de déréglementer. Ce projet de loi s'inscrit dans cette logique, que renforcent encore les amendements adoptés au Sénat
Il en est ainsi du travail le dimanche, puisque vous vous attaquez au repos dominical, lequel est un acquis social qui s'enracine dans une tradition séculaire, voire millénaire, et qui veut que tout créateur et travailleur se repose après une semaine de dur labeur non seulement pour méditer, religieusement pour certains,…
… pour se réunir en famille et échanger avec les enfants, mais encore pour maintenir des liens sociaux si nécessaires à l'équilibre de tout individu.
En ouvrant, en faveur des magasins d'ameublement, une nouvelle brèche, et de taille, dans ce repos commun vous contribuez à renforcer l'atomisation de notre société. Vous la déstructurez encore un peu plus en vouant les loisirs à la seule consommation individuelle. De fait, cette dérogation supplémentaire au principe du repos dominical prépare la déréglementation généralisée des horaires hebdomadaires qui permettra la remise en cause de l'ensemble des durées légales. C'est au fond toujours la même méthode : comme la remise en cause des régimes spéciaux de retraite prépare une dégradation globale du régime général, la remise en cause du repos dominical prépare la refonte, évidemment inspirée par le MEDEF, du code du travail en son entier.
Je dois toutefois reconnaître que cet amendement adopté au Sénat est pleinement cohérent avec le reste du projet de loi. L'objectif est en effet toujours le même : doper le plus possible les profits de la grande distribution ! D'un côté, vous lui offrez un cadeau indécent en permettant l'ouverture le dimanche, alors que la véritable réforme consisterait à remédier à la faiblesse des rémunérations de salariés travaillant le plus souvent à temps partiel dans des conditions très dégradées ; de l'autre, vous institutionnalisez à la fois la concurrence déloyale des grandes surfaces vis-à-vis du petit commerce et le racket de la grande distribution envers des petits producteurs.
Je voudrais, à ce propos, rappeler une disposition qui est au coeur du projet de loi. La loi Galland, certes, n'était pas parfaite, mais elle avait du moins le mérite de protéger le petit commerce en mettant un terme à la pratique du prix d'appel abusivement bas, même si, il est vrai, elle a été dévoyée par le développement des marges arrière.
Or le Gouvernement, en proposant sous l'influence de la grande distribution d'intégrer la totalité des marges arrière dans le calcul du seuil de revente à perte, veut en réalité revenir à la pratique des prix d'appel prédateurs. En raison de cette disposition, le seuil de revente à perte baissera de manière dramatique tandis que, parallèlement, les conséquences de la chute brutale des prix d'achat aux fournisseurs pèseront lourdement non seulement sur les PME et les producteurs agricoles, mais également sur les conditions de travail dans la distribution.
La guerre des prix risque de conduire à la disparition du petit commerce de proximité qui ne pourra évidemment pas faire face aux prix d'appel. Le présent projet constitue une première étape dans un contexte où l'on prépare la fin des restrictions à l'implantation de grandes surfaces préconisée par le rapport Attali.
Rappelons à ce propos que l'artisanat et le commerce alimentaire de proximité, qui représente 25 % de parts de marché du secteur alimentaire, emploient encore 428 000 personnes contre 630 000 pour la grande distribution, de surcroît, si la grande distribution a créé 1 200 emplois nets en 2006, le plus souvent à temps partiel et sous-qualifiés, dans le même temps, l'artisanat et le commerce alimentaire de proximité en ont créé 3 600, selon les chiffres de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution.
Rappelons aussi que le petit commerce contribue à l'aménagement du territoire et à la sociabilité rurale et urbaine, alors que le développement des zones commerciales accompagne la rurbanisation et l'artificialisation des terres, mais aussi l'atomisation de la société que j'ai dénoncée au début de mon intervention.
À terme, quand elle sera seule sur le marché, la grande distribution pourra alors de nouveau augmenter ses prix de vente, et ce d'autant plus facilement qu'aucune concurrence réelle n'existe entre ces distributeurs sur les zones d'achalandise. Les grands réseaux de distribution, de plus en plus concentrés, disposeront alors d'un monopole de fait dans chaque zone.
Aussi, le consommateur ne retirera à terme aucun des bénéfices qu'il aura pu hypothétiquement obtenir dans un premier temps. Non seulement il paiera le même prix qu'auparavant, voire plus cher, mais il sera obligé d'utiliser sa voiture pour faire ses courses à plusieurs kilomètres, au prix d'une augmentation de ses dépenses d'essence et d'une pollution accrue, en contradiction avec les conclusions du Grenelle de l'environnement. Je pense aussi aux difficultés des personnes âgées pour s'approvisionner loin de chez elles et dans des grandes surfaces labyrinthiques. Pendant ce temps, les marges arrière s'ajouteront aux bénéfices des grandes centrales d'achat dont je rappellerai le résultat pour 2006 : 1 857 millions d'euros pour Carrefour et 600 millions d'euros pour Casino !
Le dispositif mis en place nuit également aux fournisseurs. Déjà aujourd'hui, la baisse des prix à la vente est inégalement partagée entre distributeurs et fournisseurs, compte tenu du rapport de force défavorable pour les fournisseurs. Cinq centrales gèrent plus de 86 % des achats de la grande distribution et s'approvisionnent, par exemple, directement ou non, auprès de 590 000 exploitations agricoles. Dans ces conditions, ce sont les centrales d'achat qui fixent les prix de leurs fournisseurs malgré les gros efforts d'organisation des professions agricoles. Et les producteurs en viennent à vendre aux distributeurs à des prix inférieurs aux coûts de production, mettant en cause la survie même de leur exploitation.
Les rémunérations consenties pour la coopération commerciale participent de cette domination économique. Or la suppression des marges arrières annoncée par Nicolas Sarkozy est un véritable trompe-l'oeil : il s'agit en réalité d'un tour de passe-passe consistant à conserver des rémunérations dépassant parfois la moitié du prix, le plus souvent sans correspondre à la moindre « coopération commerciale », – au demeurant de moins en moins justifiée.
Les marges arrière, après avoir explosé ces dernières années – plus 32,5 % en 2005, plus 33,1 % en 2006 – sont, en quelque sorte, institutionnalisées alors que la logique voudrait qu'on les supprime purement et simplement en tant que pratique totalement opaque, plaçant le distributeur en situation abusivement dominante vis-à-vis de son fournisseur : si celui-ci refuse de payer, il suffira de menacer de le référencer…
Ainsi, j'ai eu avant-hier sous les yeux les bons de commandes d'un ami coutelier qui m'a détaillé le parcours du combattant de la négociation avec un grand distributeur bien connu – dont je tairai le nom. Dans de pareilles conduitions, même la fabrication en Chine devient trop coûteuse… C'est à vomir, monsieur le secrétaire d'État ! Pour vérifier la réalité de ces prestations, nous avions proposé de mentionner en pied de facture les accords de coopération commerciale consentis en contrepartie des rémunérations intégrées dans la facture, mais notre amendement a été repoussé.
Un signe que le Gouvernement n'a aucune volonté de remédier à ces abus est le sort réservé à un autre amendement déposé par les députés communistes et républicains. Consommateurs et producteurs reprochent fréquemment à la grande distribution de répercuter plus facilement les hausses que les baisses de prix à la production, et de prélever une marge excessive à leur profit. C'est pourquoi nous avions déposé un amendement mettant en place un double affichage du prix de vente au consommateur et du prix d'achat au producteur. Grâce à cet amendement, le consommateur aurait pu vérifier par lui-même les marges obtenues par les distributeurs, amenant ceux-ci à assumer toute leur responsabilité dans les trop grands écarts de prix. Or cet amendement, voté par l'Assemblée nationale mardi 27 novembre dans la soirée, a été repoussé par le Sénat sous votre pression, monsieur le secrétaire d'État, avec mépris pour l'Assemblée…
J'ai le compte rendu des débats sous les yeux, monsieur le rapporteur ! Avec mépris pour l'Assemblée, disais-je, puisque le secrétaire d'État est allé jusqu'à proposer, par dérision, un affichage en francs !
Je vous renvoie au compte rendu : l'intention étant bien de tourner notre amendement en ridicule.
Quel mépris pour notre assemblée ! Sous la pression des lobbies de la grande distribution, vous battez immédiatement en brèche les quelques avancées qu'elle propose !
Défendre les plus aisés au détriment des plus modestes : quand allez-vous cesser de mener cette politique de classe ?
Je dis bien : cette politique de classes, expression qui s'applique très bien à ce cas précis.
En ce qui vous concerne, c'est pour la lutte des places que vous allez très souvent à l'abreuvoir ! (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Pour les raisons que je viens de décrire, les députés communistes et républicains…
…voteront contre ce projet, malgré les quelques bonnes dispositions améliorant les droits des consommateurs dans les secteurs des banques et des communications électroniques, dont nous étions, avec beaucoup d'autres ici, les défenseurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le groupe Nouveau Centre se réjouit des débats intenses et constructifs, au Sénat comme à l'Assemblée, suscités par le texte relatif au développement de la concurrence au service des consommateurs. Ce projet était très attendu par les Français et répond à l'une des questions centrales de la campagne présidentielle : le pouvoir d'achat. Les dernières enquêtes d'opinion montrent sans ambiguïté que le pouvoir d'achat est devenu le premier sujet de préoccupation des Français. Or l'augmentation du coût des matières premières qui se répercute sur le prix des produits alimentaires rend ce problème particulièrement sensible.
Ce texte constitue le deuxième pilier de l'action du Gouvernement en faveur du pouvoir d'achat, le premier étant lié aux mesures prises en juillet dans le cadre de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat. Il sera complété par le projet de loi relatif au pouvoir d'achat actuellement en débat dans notre assemblée et par la future loi de modernisation de l'économie, qui viendra en discussion au Parlement au printemps 2008.
Le projet de loi dont nous achevons aujourd'hui l'examen est divisé en trois grands axes : la modernisation des relations commerciales, les mesures relatives au secteur de la téléphonie, enfin, les mesures relatives au secteur bancaire.
En ce qui concerne les mesures relatives à la réforme de la loi Galland, le constat est aujourd'hui unanime : cette loi n'a pas empêché des dérives aux effets ravageurs. La fixation des prix s'est progressivement transformée en une opération d'entente entre grands industriels et grands distributeurs, tout cela au détriment des consommateurs et des PME. Notre collègue Jean Dionis du Séjour n'a pas manqué de le rappeler lors de l'examen en première lecture : « Les marges arrière ont été et sont encore un des nids de la corruption à la française. »
La grande distribution s'est, dans un premier temps, satisfaite de ce système. Cependant, sous la pression des hausses des matières premières, ce système est devenu fou, ce qui explique la prise de distance de la grande distribution par rapport à un système dont elle a largement profité. La loi Dutreil de 2005, autorisant les distributeurs à réintégrer une partie des marges arrière dans leur prix de vente final, n'a pas suffi à enrayer ce mécanisme inflationniste. Sur ce point, la position du groupe Nouveau Centre n'a pas changé depuis 2005. Lors de l'examen de la loi Dutreil, nous étions les seuls à demander la suppression totale des marges arrière. Nous sommes donc ravis de voir aujourd'hui tous ces nouveaux convertis !
L'article 1er du texte, fixant le seuil de revente à perte au « triple net », va dans donc le bon sens. Néanmoins, soyons clairs, il n'aura aucun impact sur le caddie des Français, tant que nous n'aurons pas recentré la négociation commerciale sur le prix du produit en supprimant la non-négociabilité des conditions générales de vente et en réintégrant la coopération commerciale dans le contrat unique de négociation.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez indiqué que ce débat serait renvoyé à la prochaine loi de modernisation de l'économie. Nous en prenons acte. Nous regrettons pourtant vivement que cette mesure ait été reportée à un prochain texte car c'est l'ensemble du dispositif qui permettra au consommateur de bénéficier pleinement de cette mesure.
Je souhaite en outre revenir sur une mesure introduite au Sénat dans le cadre du titre premier. Je veux bien sûr parler de l'amendement relatif à l'ouverture dominicale des commerces de détail d'ameublement. Les débats au Sénat et en commission mixte paritaire montrent bien le caractère particulièrement sensible du sujet. Si les grandes enseignes présentes en milieu très urbain réclament la possibilité d'ouvrir le dimanche, les magasins indépendants situés dans des villes moyennes n'y sont en revanche pas favorables.
Le groupe Nouveau Centre tient donc à alerter le Gouvernement sur les problèmes d'équilibre que pourrait engendrer une généralisation pure et simple de l'ouverture des commerces le dimanche. Il est à craindre que l'accroissement des dérogations en faveur d'une ouverture dominicale remette en cause l'équilibre fragile instauré entre les différentes formes de commerce que sont la grande distribution et le commerce de détail, au détriment de ce dernier. Face aux propositions de dérogation à l'interdiction du travail dominical, le groupe Nouveau Centre fondera sa position sur trois critères essentiels. Premièrement, nous veillerons à ce que les mesures envisagées ne fragilisent pas le petit commerce face à la grande distribution. Deuxièmement, nous serons tout aussi vigilants à l'égard des entreprises situées en zone transfrontalières – l'ouverture des commerces le dimanche chez certains de nos partenaires européens ne doit pénaliser ni nos emplois, ni notre société. Troisièmement, enfin, nous souhaitons que d'éventuelles dérogations soient conditionnées à des mesures sociales négociées avec les partenaires sociaux – pour ce qui touche – au respect des repos dominicaux, notamment pour les femmes en charge d'enfants à la majoration des taux horaires et à la récupération.
Très bien !
En tout état de cause, l'approche décentralisée des autorisations relatives au travail dominical devra être conservée afin de traiter au mieux les réalités économiques au sein de nos territoires. D'ailleurs, le président de la commission des affaires sociales lui-même souhaite que le Gouvernement diffère les mesures d'application jusqu'au début du mois d'avril, au moment de l'examen du texte sur la modernisation de l'économie, ce qui serait un bon moyen d'examiner à nouveau cette question sur le fond et non dans la précipitation.
Ensuite, outre les mesures visant à la modernisation des pratiques commerciales, le projet introduit des mesures spécifiques en vue de garantir le bon exercice de la concurrence dans deux secteurs emblématiques : les communications électroniques et les services bancaires. Dans ces deux secteurs, l'exercice de la concurrence se révèle souvent problématique du fait non seulement de la spécificité de l'offre, mais aussi de certaines pratiques en vigueur dans lesquelles il convient de remettre de l'ordre.
Pour ce qui est de la téléphonie, le groupe Nouveau Centre tient à rappeler que beaucoup a été fait ces dernières années pour fluidifier le marché des télécoms. Ce secteur stratégique, qui le sera encore plus dans les années à venir, a besoin de retrouver une dynamique concurrentielle. Qui va nous faire croire qu'un secteur dont les parts de marché des trois principaux acteurs ne varient pas – 49 % pour Orange, 35 % pour SFR et 16 % pour Bouygues –, est concurrentiel ? Un marché concurrentiel est un marché dans lequel les parts de marché évoluent. Si elles sont gelées, c'est qu'il y a probablement une entente.
Du reste, la commission de la concurrence en a tranché.
C'est la raison pour laquelle le groupe Nouveau Centre accueille favorablement l'ouverture d'une quatrième licence. L'amendement adopté au Sénat permettra au Gouvernement de revoir, par décret, les modalités financières attachées à cette quatrième licence et de procéder ainsi à un nouvel appel d'offre. Il s'agit là d'une mesure absolument nécessaire pour réinjecter de la concurrence dans le secteur de la téléphonie mobile.
Cependant, compte tenu des enjeux économiques, industriels et d'aménagement du territoire pour la France, le groupe Nouveau Centre regrette que le Parlement ait été dessaisi de ce débat essentiel.
Le fait qu'une partie de nos concitoyens ne soient pas couverts par la téléphonie mobile n'est pas aujourd'hui acceptable. Là encore, les cahiers des charges lors des premiers appels d'offres ont été défaillants sur ce point. Nous comptons sur vous, monsieur le secrétaire d'État, pour qu'un débat soit organisé au Parlement, comme nous avons pris soin de le préciser en commission mixte paritaire.
Pour ce qui concerne le secteur bancaire, l'obligation pour les banques de fournir à leurs clients un relevé annuel de leurs frais bancaires, comprenant les agios grâce à un amendement que nous avons défendu avec le rapporteur, est une bonne mesure. En effet, l'image des banques dans l'opinion se dégrade progressivement, principalement à cause de l'augmentation des frais bancaires. Ces frais paraissent complexes aux yeux des clients, ils sont peu lisibles, et, surtout, le lien entre leur montant et le service réellement rendu est parfois difficile à établir. Ce relevé permettra donc au consommateur d'être mieux informé, de négocier avec son banquier et, le cas échéant, de faire jouer la concurrence.
Le groupe Nouveau Centre aurait cependant souhaité aller encore plus loin en matière de concurrence et de mobilité bancaire. Nous avions proposé un amendement visant à instaurer, à l'instar du Royaume-Uni où le taux de la mobilité bancaire est bien plus élevé qu'en France, un service d'aide au changement de compte, simplifiant les démarches des consommateurs désireux de changer de banque. Cet amendement, pourtant adopté en commission des affaires économiques, a été rejeté en séance publique. Le groupe Nouveau Centre ne manquera pas de revenir sur ce dossier, notamment dans le cadre du projet de loi relatif au pouvoir d'achat.
Pour conclure, monsieur le secrétaire d'État, le groupe Nouveau Centre tient à rappeler que ce projet va dans le bon sens : celui du pouvoir d'achat et de la protection des consommateurs. En favorisant un environnement plus concurrentiel dans les secteurs bancaire et des communications électroniques, tout en fixant des règles claires et indispensables dans le contexte tendu des relations commerciales, il ne peut que bénéficier au consommateur. Nous voterons donc en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, tout d'abord, je voudrais vous remercier, monsieur le secrétaire d'État, de nous avoir communiqué bien en amont le texte de ce projet de loi, nous permettant ainsi de faire notre travail de parlementaires dans de bonnes conditions. Il fallait le souligner.
Je voudrais aussi, au nom du groupe UMP, remercier vos équipes pour la qualité des échanges que nous avons eus sur ce texte, et bien sûr notre rapporteur, Michel Raison, pour son écoute et son travail approfondi dans chacun des domaines abordés par ce projet de loi.
En révisant profondément l'encadrement des relations commerciales, le titre Ier bouleverse totalement le secteur de la grande distribution. En effet, en instaurant le triple net, et donc en révisant à la baisse le seuil de revente à perte, la loi permet aux enseignes de pratiquer une véritable concurrence sur les prix. C'est une véritable réforme. Ne parlons pas de réformette !
Les consommateurs, je n'en doute pas, seront les premiers à tirer bénéfice de cette mesure, par une baisse des prix. Et c'est une bonne chose.
Certes, même au sein de notre groupe, certains auraient souhaité que le texte aille plus loin dans le sens de la libéralisation des prix. Nous vous avons bien entendu, monsieur le secrétaire d'État, et nous savons que le Gouvernement réfléchit notamment à une réforme sur ces sujets.
Mais, étant donné les enjeux, nous mesurons la juste mesure prise aujourd'hui par ce texte de loi. Il convient avant d'aller plus loin, d'évaluer avec discernement les conséquences des différents scenarii, notamment en envisageant des mesures d'accompagnement destinées au petit commerce et aux PME, qui ne doivent en aucun cas être pénalisés par des mesures prises trop hâtivement.
S'agissant de l'ouverture des magasins le dimanche,…
…nous avons suivi le Gouvernement pour ce qui concerne les magasins d'ameublement. Mais nous vous alertons, monsieur le secrétaire d'État, sur la disparité qui existe, sur notre territoire, entre les besoins de ceux de nos concitoyens qui vivent dans les très grandes agglomérations et les besoins de ceux qui vivent dans les périphéries de villes de taille moyenne. La situation en France est très contrastée, et nous attendons du Gouvernement qu'il en tienne compte.
La seconde partie de la loi introduit des mesures spécifiques en vue de garantir le bon exercice de la concurrence dans deux secteurs emblématiques : les communications électroniques et les services bancaires. On sait que dans ces secteurs, la concurrence joue mal, en raison de la spécificité de certaines offres, en raison du lien qui existe entre le fournisseur de services et le client, mais aussi, il faut le reconnaître, en raison de certaines pratiques dans lesquelles il convenait de mettre de l'ordre.
La loi répond à des attentes fortes des consommateurs en matière de téléphonie : nous avons tous notre propre expérience de relations difficiles avec les opérateurs. Et paradoxalement, avant cette loi, plus les relations étaient difficiles avec un opérateur, plus celui-ci pouvait gagner de l'argent...
En effet, soit on attendait longtemps au téléphone, ce temps d'attente étant facturé, soit on avait des difficultés à sortir d'un contrat, de sorte qu'on restait lié à l'opérateur.
Ce projet de loi permet de grandes avancées dans les relations des consommateurs avec les opérateurs de télécommunication. Je n'en citerai que trois.
C'est, tout d'abord, la mise en place de la gratuité du temps d'attente sur les hot lines des opérateurs. Peut-être pouvons-nous noter que certains d'entre eux l'avaient déjà instaurée, grâce à la médiation et à la concertation entre le Gouvernement et eux-mêmes. Mais cette pratique était loin d'être généralisée. Elle le sera grâce à ce texte.
C'est aussi l'interdiction pour les opérateurs d'utiliser des numéros surtaxés pour les relations avec leurs clients.
C'est enfin – et cela répond à une attente, pour développer la concurrence – la possibilité de résilier son contrat à partir du douzième mois d'abonnement, moyennant un certain dédit raisonnable.
Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais revenir sur un point qui a fait l'objet d'un débat important dans cet hémicycle et au Sénat : je veux parler de la non-facturation des temps d'attente de tous les centres d'appel. Il semble bien naturel de ne pas payer un service qui n'est pas rendu. Et le temps d'attente est loin d'être un service.
Nous savons qu'il est pour l'heure techniquement impossible de mettre concrètement en place une telle mesure. Il était donc sage de retirer l'amendement déposé…
Merci, monsieur le président.
…sous peine d'introduire dans la loi une disposition techniquement inapplicable. Mais nous ne saurions pour autant éluder cette importante question. Nous devons étudier les moyens de faire progresser les techniques, afin de pouvoir un jour généraliser la gratuité des temps d'attente dans les centres d'appel.
S'agissant du quatrième opérateur, je suis très heureuse, comme l'ensemble de mes collègues du groupe UMP, qu'un débat s'instaure au Parlement. Nous sommes tous convaincus qu'il faut développer la concurrence dans le monde des mobiles. Mais nous sommes tous convaincus également qu'il faut absolument étudier les différents scenarii possibles pour le développement de cette concurrence. Nous sommes donc très heureux de pouvoir, dès l'année prochaine, débattre de ce sujet au sein de cet hémicycle.
Dernier grand domaine abordé par ce projet de loi : les relations des consommateurs avec leurs banques. Le texte renforce les droits du consommateur dans ses relations avec sa banque. Je suis très heureuse aujourd'hui de voir le rôle du médiateur étendu à tous les litiges.
Mes chers collègues, au moment où le pouvoir d'achat est la préoccupation numéro un de nos concitoyens, ce texte permet de développer la concurrence dans des secteurs très importants : la grande distribution, les services de télécommunication et les banques. Il touche véritablement au quotidien de tous les Français. Le groupe UMP y est très favorable et apportera donc son plein soutien à ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous arrivons au terme d'une discussion qui, à certains moments, a été vive, et pas forcément constructive. Mais je ne suis pas sûr que nous devions vous en vouloir, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur. En effet, ce n'est pas votre courtoisie ni votre engagement qui sont en cause, mais plutôt le fait que vous étiez pieds et poings liés par des décisions qui semblaient vous échapper.
En clair, nous avons plutôt légiféré au rythme des déclarations de Michel-Édouard Leclerc sur certains sujets, celui-ci n'étant en la matière que le porteur des conclusions du serment du Fouquet's. (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Au final, nous avons un texte incomplet, bancal, et qui sera presque totalement inefficace.
Incomplet d'abord, parce qu'il ne comporte aucune disposition relative à l'action de groupe, alors qu'il aurait été tout à fait normal qu'elle y figure.
Nous ne pouvions qu'attendre cette proposition venant de la part d'un secrétaire d'État qui l'avait lui-même théorisée quand il était parlementaire.
Ce n'était pas le jour… Ne serait-ce, monsieur le secrétaire d'État, que parce qu'il vous reste à convaincre bon nombre de gens dans les rangs de votre majorité… Même au mois d'avril, il n'est pas sûr que ce sera le jour !
Pourtant, la proposition que nous avions soumise à nos collègues était excellente. Bien encadrée, elle donnait la possibilité de déposer un recours aux seules associations de consommateurs reconnues, tout en prévoyant une procédure de recevabilité.
Mais vous ne deviez rien accepter de nous, et peu de nos collègues du groupe UMP, de sorte que vous n'avez pas pu faire valoir le point de vue qui était pourtant le vôtre.
Ce texte est encore incomplet par le fait que, au-delà de quelques améliorations bienvenues sur le plan de transparence – clarification des frais bancaires, dispositions dans le domaine des assurances –, il ne prévoit rien sur le surendettement. Vous avez même refusé qu'on en parle, au motif que cela tuerait l'économie !
Oh oui, monsieur le rapporteur, mais, pour le moment, ce sont des familles frappées par le surendettement que vous continuez à laisser tuer.
Si, monsieur le rapporteur, même si vous n'avez pas exactement utilisé ce terme. En fait, vous avez expliqué qu'il ne fallait pas « freiner l'économie ».
Cela ne vous gêne pas que les familles souffrent… Par contre, le fait de ne pas légiférer ne peut que jouer en faveur des organismes de crédit à la consommation notamment, qui font l'essentiel de leur beurre, comme on dit, sur le dos des plus fragiles.
Et puis, ce texte, c'est la peau de chagrin en ce qui concerne la tarification des appels vers les numéros surtaxés, surtout avec l'abandon de l'amendement qui avait été adopté en séance sur la proposition de Mme Zimmermann, d'ailleurs membre de votre groupe. Cela aussi, c'est passé à la trappe, parce que, entre-temps, les lobbies se sont manifestés. Nous le savons, puisque nous avons nous-mêmes reçu un certain nombre de courriers électroniques. Les lobbies, eux, ont été écoutés, ce qui n'est pas le cas de tout le monde. On sait que le lobbying des opérateurs est très fort. Et comme le disait tout à l'heure M. de Courson, il est clair que l'entente fonctionne assez correctement. Il n'est sans doute même pas nécessaire qu'ils se téléphonent les uns les autres. Ils sont assez grands pour connaître leurs réactions. Il est clair que les situations sont figées pour les uns et pour les autres, et que les consommateurs attendront.
Ce texte est également bancal. S'agissant des marges arrière, monsieur de Courson, vous avez fait une erreur : les socialistes étaient déjà favorables à leur suppression au moment de la loi Dutreil.
Comme vous, c'est vrai. Mais nous l'étions déjà, et nous le sommes encore.
La seule différence, monsieur de Courson, c'est que vous, tout en disant que vous n'êtes pas d'accord, vous voterez ce texte, alors que nous, nous disons que ne nous sommes pas d'accord, mais nous irons jusqu'au bout : nous ne le voterons pas.
En fait, les marges arrière, c'est un système que l'on a essayé de moraliser à plusieurs reprises : en 1996, en 1999, en 2005, et encore aujourd'hui. Je vous garantis qu'on y reviendra en 2008 ou en 2009. C'est un système mafieux, et je pèse mes mots. Pourquoi un système mafieux ? Tout simplement parce que c'est un système dans lequel les gens qui sont lésés ne peuvent même pas porter plainte et témoigner. S'ils le font, ils seront économiquement tués par les grands opérateurs des GMS. C'est en cela que ce système est mafieux.
Et puis, il y a le fameux SRP, le seuil de revente à perte, qui n'est pas un vrai SRP, puisqu'il n'intègre pas un certain nombre de charges obligatoires des magasins. En particulier, il ne prend pas en compte le personnel. Vous avez beaucoup parlé du pouvoir d'achat, mais je ne suis pas sûr que celui des personnels des GMS ait été au centre de vos préoccupations.
Ce SRP, je l'ai dit, permettra aux grandes surfaces multi-produits de tuer les grandes surfaces mono-produits par des baisses de prix sur des périodes relativement longues. J'ai souvent pris l'exemple de la grande surface spécialisée dans les articles de sport, qui sera forcément en difficulté par rapport à la grande surface généraliste, car celle-ci pourra baisser, pendant une longue période, ses prix sur les articles de sport.
Ce texte incomplet est également bancal, car vous n'avez pas voulu traiter le scandale du retour des invendus, des délais de paiement et du référencement, autrement dit de tout ce qui permet à la grand distribution de faire de l'argent sur le dos des PME et des consommateurs.
Pour ne mentionner que les délais de paiement, d'après M. Leclerc – je le cite car c'est surtout lui qui s'exprime, mais l'exemple est valable pour les autres –, représentaient 11 milliards d'euros. Mais les taux d'intérêt étaient alors de 3 %. Comme ils atteignent aujourd'hui 5 %, cela signifie que les délais de paiement s'élèvent en fait à 18 milliards, lesquels pèsent pour les deux tiers sur les PME – puisque deux tiers de l'approvisionnement des grands distributeurs proviennent, de leur aveu même, des PME. Apparemment, cette situation ne vous a fait ni chaud ni froid…
Bancal et dangereux, le texte est également inefficace : pour redonner du pouvoir d'achat, il suffisait de jouer sur les délais de paiement. Mais vous n'avez pas voulu le faire. Il fallait aussi aller au bout des mesures relatives aux communications surtaxées : vous l'avez également refusé. En revanche, vous avez donné satisfaction à ceux qui considéraient que la bonne solution était de vendre des téléphones à crédit et de « tenir » les consommateurs avec des formules parfois contestables.
Le bilan sera à l'image de la « baisse Sarko » de 2005 : vous trouverez des indices pour attester une baisse des prix, mais, curieusement, les consommateurs ne verront rien. Je ne vous rappellerai pas, sinon pour la forme, l'enquête de Familles rurales en 2006, qui montrait une hausse générale des produits, d'ailleurs plus forte encore pour les marques de distributeurs. Bref, encore un coup d'épée dans l'eau.
Par ailleurs, le comportement du Gouvernement a été scandaleux. Je pense d'abord à l'ouverture des commerces le dimanche.
Tout le monde y est opposé : les associations culturelles, sportives, familiales ou religieuses, les syndicats de salariés, mais aussi l'ensemble des propriétaires des petites et moyennes surfaces des enseignes d'ameublement.
Pas du tout : allez donc en parler aux employés qui ont de petits salaires !
Vous le savez, puisque vous avez sans doute reçu à ce sujet les mêmes e-mails que nous. J'en ai même reçu certains de collègues de la majorité qui me demandaient, parce que j'étais membre de la CMP, de lutter contre les positions de leurs collègues de l'UMP ! J'ai aussi vu, monsieur le secrétaire d'État, vos amis de l'UMP contester votre réponse lors des questions au Gouvernement : personne ne peut le nier.
Voilà la situation que vous avez créée.
D'autres points nous séparent. Pour notre part, nous préférons par exemple voir les jeunes sur des stades plutôt que dans des allées de supermarchés, ces nouveaux temples du XXIe siècle, temples de la consommation qui remplaceront sans doute ceux de nos ancêtres.
L'ouverture dominicale donnera-t-elle plus de pouvoir d'achat aux consommateurs ? Non : on va seulement déplacer leurs dépenses vers les grandes surfaces. Les petites surfaces seront concurrencées par les grandes, situées à la périphérie des villes. C'est là qu'on ira désormais se promener et faire ses courses. En clair, ce sera Ikea plutôt que Monsieur Meuble.
On est venu nous dire qu'il était temps de légiférer pour ceux qui étaient hors-la-loi. L'argument est extraordinaire : il suffit donc de dire au Parlement que l'on est hors-la-loi pour lui demander de changer la loi ! Autrefois, être hors-la-loi rendait passible des tribunaux, cela n'autorisait pas à demander aux parlementaires de vous sauver la mise !
Or c'est bien ce que vous avez fait, chers collègues de la majorité. Cela marquera malheureusement les annales de notre assemblée.
Autre argument entendu : « On n'y peut rien, c'est un amendement d'origine parlementaire ». La ficelle est grosse.... Ce n'est pas à de vieux élus qu'on la fera !
Mais il y a un autre scandale. Pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, avez-vous présenté l'amendement relatif à la quatrième licence – disposition au demeurant intéressante – au Sénat et non à l'Assemblée nationale ? Aucun député ne peut l'accepter, et ce d'autant moins qu'aucune urgence ne le justifiait : la disposition était prête depuis longtemps. Cela révèle un double mépris de la part du Gouvernement : mépris des députés bien sûr – peut-être aviez-vous peur du débat –, mais aussi mépris des sénateurs, car c'est laisser entendre qu'ils seraient plus dociles. Votre attitude, je le répète, était scandaleuse.
Voilà donc une occasion ratée. Ce n'est pas grave, dites-vous : on se retrouvera après les municipales. La particularité des gouvernements issus de l'actuelle majorité, c'est d'affirmer systématiquement que les textes qu'ils présentent ne sont pas parfaits et que l'on y reviendra. De grâce, présentez-nous enfin un texte parfait et non une nouvelle version tous les six mois ! Ne vous servez pas du prochain véhicule pour évacuer des sujets en débat ! Je suis persuadé qu'au mois d'avril prochain, on nous dira encore qu'il faut reporter à plus tard le débat sur tel ou tel sujet.
Vous avez voulu faire un coup médiatique pour l'affichage, mais il a fait plouf, notamment pour ce qui concerne l'ouverture des commerces le dimanche.
Au fond, les consommateurs, à qui l'on a fait miroiter des gains, seront assez grands pour constater bien vite que tel n'est pas le cas. Les PME, elles, ont déjà compris que vos mesures ne leur profiteraient pas, bien au contraire. Restent les GMS, les grandes et moyennes surfaces, qui gagneront sur tous les fronts.
Le vote de ce texte pourrait s'accompagner par ces mots : « Avec les félicitations de M. Leclerc et de ses amis, de Metro, d'Ikéa et de Conforama. » J'imagine en effet, monsieur le secrétaire d'État, que telle sera la teneur de leurs cartes de voeux… Eh bien nous, nous ne nous y associerons pas et nous voterons clairement et avec détermination contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. Patrick Roy, pour un rappel au règlement.
Un vrai rappel au règlement, s'entend !
Bien sûr, monsieur le président !
Le débat de ce matin devrait être l'occasion pour chacun de dresser un bilan et d'exposer à nouveau ses arguments.
J'y viens, monsieur le président : nous sommes au coeur du sujet. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La droite peut rigoler, comme toujours !
En effet !
Alors, disais-je, que notre débat a été marqué par l'urgence et le bricolage, on nous annonce l'ouverture des magasins le dimanche. Vous conviendrez que ce n'est pas un mince sujet, et que nous n'en avons jamais débattu ! Personne ici ne peut le nier.
Nos concitoyens me demanderont des comptes sur cette affaire : sans doute, m'interrogeront-ils, en avez-vous beaucoup débattu ? Pas du tout, répondrai-je : j'ai dû demander un rappel au règlement pour l'évoquer quelques instants, pressé par le président qui estimait que le sujet ne méritait pas que l'on s'y attarde et qu'il fallait passer au vote. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je pourrai également leur raconter qu'une quinzaine de collègues seulement étaient présents en séance : peut-être même y a-t-il ici davantage de fonctionnaires que de députés ! (Mêmes mouvements.)
Même le président Méhaignerie a fait part de son mécontentement : pour une fois, nous l'avons applaudi.
Vous me direz sans doute que l'ouverture dominicale ne concerne que les magasins de meubles, mais vous savez bien que c'est ouvrir la porte à tous les autres !
Je vais devoir vous interrompre, monsieur Roy : nous sommes décidément très loin du règlement.
Je dirai donc à mes électeurs que l'on n'a pu aborder ce sujet si important que quelques secondes, car il fallait se dépêcher. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
C'était très pertinent ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ces flots de démagogie ne transformeront pas pour autant ce que vous dites en vérité, monsieur Roy.
Je tiens à dire, monsieur le secrétaire d'État, que votre travail et celui de vos services a été utile à l'intérêt général.
Il fallait le souligner, car on pourrait croire le contraire après avoir entendu M. Gaubert et M. Chassaigne, qui ont par ailleurs pris une part importante dans nos débats et dont on connaît les qualités…
…mais avec lesquels nous ne saurions être d'accord sur le fond.
La majorité était d'accord, monsieur le secrétaire d'État, pour que le texte soit déposé en urgence. Car il y a bien urgence à apporter des éléments positifs pour le pouvoir d'achat des Français.
Ce que vous avez déclaré, monsieur Gaubert, n'est pas acceptable. S'agissant des relations commerciales, la majorité à laquelle vous apparteniez a fait voter en 2001 la loi relative aux nouvelles régulations économiques : on ne vous a pas entendu, à l'époque, parler des marges arrière !
Que n'avez-vous alors réglé le problème ? Votre majorité était aux affaires, et vous faisiez vous-même partie du Gouvernement, madame Lebranchu ! Il faut être prudent : les boomerangs reviennent souvent dans la figure de ceux qui les envoient ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Si nous approuvons votre texte, monsieur le secrétaire d'État, c'est parce que, s'agissant des relations commerciales, il fallait prendre des décisions. Je veux rappeler que les mesures prises par Nicolas Sarkozy lorsqu'il était à Bercy – vous étiez alors, monsieur le secrétaire d'État, président de la mission d'information sur les relations commerciales que j'avais lancée – ont fait baisser les prix des grandes marques de 3,5 %. On ne peut pas faire semblant, monsieur Gaubert, d'ignorer les conséquences indéniables de ces mesures sur les prix.
Quant au calendrier, monsieur Gaubert et monsieur Chassaigne, laissez donc la majorité et le Gouvernement en décider. Des rendez-vous réguliers ont été fixés : ils seront respectés. Luc Chatel avait pris une part prépondérante, en son temps, au débat sur les actions de groupe – des noms d'oiseaux avaient même été échangés dans cet hémicycle. Le problème sera donc réglé, mais quand le Gouvernement aura achevé les négociations sur le sujet.
Mme de La Raudière a fort bien expliqué les progrès que ce texte apportait sur les prix des télécommunications. D'autres doivent en effet être réalisés, notamment sur les temps d'attente, mais, ainsi que Mme de La Raudière l'a fort bien expliqué, il y a une difficulté technique à régler : rendez-vous est pris, monsieur le secrétaire d'État, pour que le problème soit réglé dès que celle-ci aura été résolue. Je siégeais comme vous, monsieur Gaubert, à la commission mixte paritaire : je ne puis laisser dire que nous avons fait autre chose que notre travail.
En ce qui concerne le secteur bancaire, je tiens à rendre hommage au rapporteur pour son remarquable travail.
Vous avez remercié tous les collaborateurs, monsieur le rapporteur, mais je tiens également à dire que vous avez défendu avec courage ce que la majorité avait décidé. Cela mérite d'être reconnu. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
J'en termine rapidement, monsieur le président. Ce texte est donc un bon texte. Il permet des progrès considérables en matière de pouvoir d'achat. Mais après m'être exprimé sur le fond, je me permettrai maintenant une observation sur la forme.
L'urgence, que j'approuve, ayant été déclarée, il n'y a pas eu de navette entre les deux assemblées. Et nous avons été, il est vrai, quelque peu étonnés de voir des amendements qui n'auraient jamais dû apparaître de cette façon.
Au nom de la commission et de la majorité, je tiens à dire que nous avons mal vécu cet épisode. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Je ne vous demande pas de m'applaudir…
Je veux simplement que l'on respecte le Parlement et le dialogue qu'il entretient avec le Gouvernement, et que nos collègues sénateurs sachent que nous n'accepterons plus cette méthode.
Je reconnais néanmoins qu'il y avait urgence à régler ces problèmes, d'où la nécessité de cet amendement sur l'ouverture des magasins le dimanche. Un groupe de travail présidé par M. Mallié est chargé d'y réfléchir et proposera des solutions avant le mois de mai. Je suis, à titre personnel, réticent à l'égard d'une ouverture systématique mais, en tant que président de la commission, j'accepte le débat et je suis prêt à trouver des solutions qui répondent aux nécessités des uns et aux ambitions des autres. C'est un travail qui prend du temps.
Il était également urgent de régler la question des magasins d'ameublement : le Sénat a saisi cette occasion pour proposer un amendement en ce sens. J'ai approuvé cet amendement – je l'assume – sous réserve, monsieur le rapporteur, de supprimer une liste inacceptable. Le Sénat en a été d'accord ; prenons un peu de temps avant de décider si nous devons aller plus loin.
Enfin, l'amendement relatif à la quatrième licence m'a également surpris. Nous ne sommes ni pour ni contre cette mesure, mais nous considérons qu'un débat est impératif. Vous l'avez accepté, monsieur le secrétaire d'État, c'est pourquoi le rapporteur et moi-même avons souhaité sous-amender votre amendement afin que l'Assemblée puisse se prononcer et déterminer, le moment venu, les conditions d'attribution de la quatrième licence.
Voyez, chers collègues de l'opposition : lorsque surgit un problème de fond ou qu'une question se pose, nous essayons d'apporter la solution en dialoguant avec le Gouvernement. En ce qui concerne cet amendement, la solution viendra de ce débat que nous souhaitons tant. J'en suis très satisfait et je remercie M. le secrétaire d'État de l'avoir accepté. Mais je ne peux pas laisser dire que nous n'aurions pas respecté le Parlement. Certaines pratiques, je le reconnais, sont inacceptables. Je l'ai dit, le rapporteur l'a rappelé, et je pense que tout le monde ici est d'accord : c'est notre rôle de veiller à ce qu'elles ne se reproduisent plus.
Quant à ce texte, la majorité unie lui apportera tout son soutien et le prouvera dans quelques instants, monsieur le secrétaire d'État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme Marylise Lebranchu, pour un rappel au règlement, qui naturellement doit porter sur l'organisation de nos débats.
C'est pour moi un déchirement de ne pas pouvoir répondre à M. Ollier… (Sourires.)
Je laisserai de côté la quatrième licence, Jean Gaubert en ayant fort bien parlé tout à l'heure, pour n'évoquer que le travail du dimanche. Je rappelle à M. Ollier, qui m'a mise en cause tout à l'heure, que lors de l'examen de notre texte sur les nouvelles régulations économiques, c'est M. Charié, membre de l'actuelle majorité, qui avait défendu la suppression des marges arrière, et que l'opposition de l'époque avait voté ces dispositions. Malheureusement, le contrôle que nous avions alors envisagé n'a jamais, par la suite, été mis en place, le secrétaire d'État le sait bien. Notre grand souci venait de ce que de nombreuses PME refusent encore de fournir les pièces justifiant leurs comptes de peur que cela dégrade leurs relations avec la grande distribution.
Monsieur le président, cela n'a strictement rien à voir avec le règlement !
Il s'agit du règlement, monsieur le président, c'est évident ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il faudra donc, j'en suis persuadée, revenir sur cette question. La grande distribution prétend – par le biais de l'ILEC, l'Institut de liaisons et d'études des industries de consommation – que les marges arrière lui permettent de négocier avec les grands producteurs, français et européens : mais les deux tiers des PME n'ont pas la force de le faire ! Assurément, cela posera un problème.
J'en viens au débat sur le travail du dimanche. Le dépôt d'un amendement en commission mixte paritaire prive le Parlement de ce débat. Je rappelle à nos collègues de la majorité que certaines personnes gagnent moins de 1 100 euros par mois. Vous venez pourtant de leur annoncer qu'une négociation s'ouvrira bientôt pour permettre le travail du dimanche dans les magasins d'ameublement – en votant aujourd'hui cette disposition. Il est évident que les chefs de rayon, qui gagnent 50 euros par mois de plus que leurs collègues, seront contraints de renoncer à leur repos dominical car il leur sera impossible de confier leur rayon à un étudiant.
Et un dossier aussi lourd échappe à la discussion du Parlement ! C'est notre rôle de le dire ici, et nous sommes tous d'accord pour débattre de la question des zones touristiques et du problème de fond que pose le travail du dimanche.
Si, monsieur Ollier ! Quand M. Lefebvre prend la parole pour commenter longuement un communiqué de presse de M. Ayrault, c'est aussi un rappel au règlement…
Je voulais simplement dire que le travail du dimanche doit être considéré comme une question de société.
Les personnes dont je parle sont très angoissées. On nous parle sans cesse de vie de famille, d'équilibre familial. Le Président de la République lui-même s'inquiète pour les enfants seuls après dix-sept heures : que pensera-t-il des enfants seuls le dimanche ? Le travail du dimanche mérite un débat de fond car il remet en cause tous nos fondamentaux. La majorité fait une erreur, et j'espère qu'elle reviendra sur sa position ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je rassure M. Ollier, mon rappel au règlement sera très bref. Les parlementaires de la majorité peuvent eux aussi faire des rappels au règlement ! Je voudrais dire deux choses qui concernent la conduite de nos travaux. Hier, lorsque nous avons commenté le communiqué de presse de M. Ayrault, c'était justement pour dénoncer sa présence trop brève : il se contente de venir en séance pour faire des rappels au règlement. Aussitôt après, il sort de l'hémicycle et fait un communiqué…
Nous avons dû à notre tour faire un rappel au règlement pour que le débat ait enfin lieu !
Je voudrais faire une remarque qui me paraît essentielle : l'opposition ne cesse depuis hier de mettre en cause les amendements d'origine parlementaire. En effet, le groupe UMP a déposé hier un grand nombre d'amendements sur le texte pour le pouvoir d'achat. L'opposition nous l'a reproché, prétendant que si nous déposions des amendements, c'est que le Gouvernement avait mal travaillé. On ne peut à la fois prétendre revaloriser le rôle du Parlement et refuser les amendements des députés et des sénateurs !
Comme vous le voyez, il s'agit bien d'un rappel au règlement. On ne peut pas dire que le Parlement ne fait pas son travail…
Il est important, sur des sujets aussi essentiels, que les parlementaires utilisent leur droit d'amendement, à l'Assemblée comme au Sénat !
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le vice-président de la commission mixte paritaire, monsieur le rapporteur, je voudrais, au terme de ce débat et avant que votre assemblée ne se prononce, répondre sur quelques points.
Tout d'abord, je voudrais vous remercier, monsieur le rapporteur, pour le travail intense que vous avez accompli en étroite coopération avec mes services et pour la très grande qualité de votre contribution. Vous avez amélioré le texte sans le dénaturer, tout en faisant preuve d'une grande détermination pour faire accepter vos propositions.
Je remercie également le président de la commission des affaires économiques, qui tout en soutenant l'action du Gouvernement, a laissé la commission jouer pleinement son rôle dans le processus parlementaire.
Vous l'avez dit, mesdames et messieurs de la majorité, ce deuxième volet de la politique du Gouvernement en faveur du pouvoir d'achat, est un texte important. Après les salaires, les heures supplémentaires, nous agissons sur les prix, avec pour objectif de favoriser la concurrence, dont je vous rappelle qu'elle reste un moyen au service des consommateurs, et non un objectif. Les dispositions de ce texte, en agissant sur la grande distribution, sur les relations entre les fournisseurs et les distributeurs, et sur les services, bénéficieront aux consommateurs.
Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur, l'importance du « triple net », avancée audacieuse – souvenez-vous du rapport Canivet et de la frilosité de certains vis-à-vis de cette disposition. Dès le 1er janvier prochain, le triple net, en intégrant la totalité des marges arrière dans les prix à la consommation, permettra de réintroduire de la liberté dans le jeu concurrentiel entre distributeurs et de la transparence dans les relations entre l'industrie et le commerce.
Il nous faudra aller plus loin encore, plusieurs d'entre vous l'ont souligné. C'est pourquoi Mme Marie-Dominique Hagelsteen, ancienne présidente du Conseil de la concurrence, travaille actuellement à la question de la négociabilité. Mais nous devrons prendre en compte l'impact d'une telle mesure pour les PME et envisager des mesures pour les délais de paiement et l'abus de position dominante. Tel sera l'objet du projet de loi de modernisation de l'économie, que nous vous présenterons prochainement.
J'ai un peu de mal à suivre M. Gaubert et M. Chassaigne lorsqu'ils prétendent que ce texte va doper la grande distribution…
…et que je serais sous influence. À croire M. Gaubert, les grands distributeurs, pour me remercier, m'enverront leurs meilleurs voeux de fin d'année… Ce n'est pourtant pas ce que je lis dans la presse nationale !
J'ai du mal à vous comprendre, monsieur Gaubert : vous souhaitez la suppression des marges arrière, mais vous refusez la négociabilité… Il faudra m'expliquer techniquement comment y parvenir ! Vous affichez votre hostilité à l'égard de la grande distribution tout en soutenant des amendements qui reprennent leurs propositions, notamment à propos des marges arrière.
De même, vous voulez augmenter le pouvoir d'achat tout en réduisant les délais de paiement, ce qui a forcément un impact sur l'ensemble de la chaîne…
…et sur le prix final pour les consommateurs.
S'agissant des services bancaires, des avancées importantes ont été adoptées, comme en matière de téléphonie. Certaines étaient attendues depuis longtemps par les consommateurs.
J'en viens maintenant, monsieur le président de la commission, mesdames et messieurs les députés, à l'amendement sénatorial concernant le travail du dimanche. Je vous rappelle que le repos dominical est un principe ancien – il est né au début du XXe siècle – de notre droit du travail. Je me tourne vers le président de la commission des affaires sociales, M. Méhaignerie, qui est intervenu sur cette question hier : le principe demeure.
En effet, madame la garde des sceaux. Toutefois, je vous rappelle qu'il fait aujourd'hui l'objet de pas moins de 180 dérogations !
Aujourd'hui, six à sept millions de nos concitoyens travaillent le dimanche, d'une manière ou d'une autre : notre législation est donc inadaptée. Dans le seul secteur de l'ameublement se conjuguent la volonté des consommateurs de faire des achats en famille, celle des entreprises qui réalisent ce jour-là environ 24 % de leur chiffre d'affaires, et celle des salariés qui bénéficient de conditions de rémunération avantageuses – salaire doublé, journées de récupération – qui augmentent leur pouvoir d'achat. Il y a donc lieu de réfléchir à la question du travail du dimanche, surtout dans les grandes agglomérations. Les sénateurs se sont donc interrogés…
…et ils ont adopté cet amendement. Le Gouvernement l'a naturellement soutenu pour ce secteur précis, et par rapport à une dérogation particulière. Nous souhaitons maintenant travailler plus avant avec le Parlement, avec l'Assemblée nationale notamment, pour mettre à plat ces dispositions et tenir compte des disparités géographiques. La question ne se pose pas en effet de la même manière dans les grandes agglomérations,à Vélizy, en région parisienne, et dans le monde rural, comme à Chaumont, en Haute-Marne. À Plan-de-Campagne, par exemple, près de Marseille, les syndicats – FO, la CGT et la CFTC – ont signé un accord pour travailler le dimanche. Les réalités diffèrent considérablement d'un point à l'autre du territoire. Nous allons bien entendu reprendre ce chantier avec les organisations de salariés et les partenaires sociaux pour assouplir notre législation et adapter notre droit du travail au monde d'aujourd'hui, tout en préservant, je le répète, le principe du repos dominical.
Enfin, monsieur le président de la commission, vous avez rappelé l'importance de la quatrième licence UMTS, qu'un certain nombre d'interlocuteurs, dont M. de Courson, jugent nécessaire pour accroître la concurrence dans le secteur de la téléphonie. J'ai compris que vous désapprouviez la méthode employée : le débat au Parlement, que vous avez à juste titre demandé par voie d'amendement, permettra à votre assemblée de s'exprimer sur cette question.
Au terme de ce débat, je remercie à nouveau les députés de la majorité pour leur soutien…
…à un texte qui augmentera le pouvoir d'achat et renforcera le droit des consommateurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Travailler le dimanche ou respecter le repos dominical, il faut choisir !
Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire, conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement.
Je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur l'amendement dont je suis saisi.
La parole est à M. le rapporteur de la CMP, pour soutenir l'amendement n° 1 .
Avant de défendre mon amendement, permettez-moi de revenir rapidement sur la question des marges arrières. Ce n'est pas parce que l'Assemblée décide, au détour d'un amendement, de supprimer la coopération commerciale que celle-ci disparaîtra pour autant. Elle continuera d'exister, mais elle sera intégrée dans la composition même du prix et, que ce soit sur le plan juridique ou sur celui de la capacité de négociation des PME, il sera plus facile pour la grande distribution de « massacrer » certains fournisseurs.
Ce sera intégré dans le prix, dans ce que l'on appelle la « négociabilité ». Je vous mets en garde, mon cher collègue, car au final, vous défendez la même chose que Michel-Édouard Leclerc. Je ne vous comprends plus !
Auparavant, monsieur le président, permettez-moi une deuxième remarque sur le surendettement, à l'adresse de Jean Gaubert. Je connais bien le sujet et je maintiens que ce n'est pas de cette façon que l'on résoudra le problème : je refuse de mettre sous tutelle 95 % des Français sans pour autant régler la question des 5 % de Français surendettés.
Pour ce qui est de mon amendement n° 1 , il prévoit un délai de mise en oeuvre des mesures applicables aux professionnels de la vente à distance afin de leur permettre de s'adapter aux dispositions en cause – faute de quoi les dispositions relatives à la vente à distance, que nous avons votées, seraient immédiatement applicables. Ce délai, d'environ cinq mois à compter de la promulgation de la loi, est identique à celui que la commission mixte paritaire a prévu pour les professionnels du secteur des communications électroniques concernés par le chapitre Ier du titre II du projet de loi.
Un amendement identique a évidemment été déposé au Sénat, où il sera vraisemblablement adopté.
Le Gouvernement est favorable à cette mesure d'harmonisation de la mise en oeuvre du texte.
Tout au long de ce débat, le groupe SRC a salué les avancées de ce texte. Nous sommes tout à fait capables de nous entendre avec la majorité dès lors qu'il s'agit de progresser. Mais nous conservons des regrets importants, s'agissant par exemple de l'action de groupe, devenue nécessaire à la protection des consommateurs.
Nous y viendrons, mais quel dommage de ne pas être allés au bout, alors que nous disposons du véhicule parlementaire ! M. Ollier a rappelé tout à l'heure les contraintes de calendrier de la majorité. Mais prenez garde à ce que ces contraintes ne repoussent pas l'examen de ce texte important et, me semble-t-il, consensuel…
…à une date indéterminée.
S'agissant des marges arrières ou, comme vous le dites, de la coopération, ou encore de la négociabilité, nous devons faire preuve d'une extrême vigilance. Car aujourd'hui, le problème majeur en France, c'est qu'à force de vouloir tirer sur les prix – et ce n'est pas à notre président de séance que j'aurai besoin de le démontrer, il connaît trop bien les filières concernées –, de mauvaises relations se sont instaurées entre l'oligopole de la grande distribution et les petits producteurs. Je pense aux produits agricoles, mais aussi à de nombreux produits issus de PME.
Nous sommes face à un lourd dossier, et je reste persuadée que, pour instaurer une certaine éthique dans les relations commerciales, nous devons travailler ensemble à des mesures de contrôle. Le texte que nous avions voté en prévoyait une série, mais elles n'ont jamais été mises en oeuvre par le gouvernement suivant. Et maintenant, il n'y a même plus les fonctionnaires nécessaires…
Le problème, surtout en matière alimentaire, n'est pas forcément lié à la concurrence européenne ou mondiale – comme on a pu le dire au cours de ce débat –, mais à la différence des marges entre la distribution et la production. Aujourd'hui, en pleine crise à la fois des produits agricoles et des prix du gazole, les marges des producteurs sont écrasées et la valeur ajoutée dans le secteur agro-alimentaire devient de plus en plus infime. Certains producteurs arrivent même à une valeur ajoutée nette nulle. Mais la grande distribution continue de s'assurer, à elle ou aux grands groupes, des marges extrêmement confortables. Il y a là un vrai sujet, celui de l'éthique en économie. Car le consommateur ne s'y retrouve pas, et personne ne souhaite que sa propre entreprise soit mise à genoux par la grande distribution – c'est pourtant ce qui arrive le plus souvent.
S'agissant des délais de paiement, je suis persuadée que les PME sont devenues la plus grande banque française, en termes de prêt aux entreprises ! Il est grand temps de travailler à nouveau sur ce sujet. Il existe déjà un texte, monsieur Chatel, mais il a été rangé dans les tiroirs à la fin 2002, et, j'ignore pourquoi, il n'en est jamais ressorti, alors qu'il traite de façon très intéressante du système bancaire que représentent les délais de paiement. Nous avons fort à faire sur ce sujet. Nous avons déjà travaillé sur les délais de paiement de l'État et des collectivités territoriales : il est grand temps de parler des PME.
Enfin, nous sommes opposés à l'ouverture du dimanche. Nous sommes en train d'assister, dans les centres villes et les villes moyennes, à une expansion des magasins de petit ameublement et de décoration. Trois chambres régionales de commerce et d'industrie ont publié d'excellents documents, qui montrent que ces magasins de qualité tirent vers le haut tout le commerce des petits centres-villes ou de certains quartiers commerciaux. Il s'agit de petites entreprises, souvent dirigées par des artisans ou par ce que l'on appelle, au grand dam des puristes de la langue française, des designers. Ce sont des gens très attentifs à leurs marges, car ils protègent des productions françaises, s'agissant par du bois, par exemple, dans le sud de la France. Ils ressentent aujourd'hui une très forte inquiétude, car ils craignent de ne pas pouvoir tenir le coup s'ils doivent travailler tous les jours : ils sont la plupart du temps deux à travailler, avec un salarié, et il est exclu d'embaucher un étudiant à temps partiel sur une tâche aussi complexe. Or tous ces professionnels sont aujourd'hui directement touchées, parce que les grands magasins d'ameublement, que vous avez favorisés en adoptant cet amendement, ont tous un rayon de petit ameublement et de décoration.
Au salon « meubles et objets », vous avez rencontré, monsieur le secrétaire d'État, tous ces petits producteurs, qui dirigent des PME ou des TPE et emploient de dix à cinquante salariés : ils font de gros efforts de technologie pour rester présents sur les marchés français, européen et mondial. En permettant aux grandes surfaces d'ameublement d'ouvrir le dimanche, vous allez faire perdre aux PME et TPE ce petit « plus » qui donne aux consommateurs l'envie d'aller acheter chez eux, en centre-ville. Nous mettons en danger aujourd'hui tout ce secteur d'activité. Et ce que vous venez de faire pour l'ameublement, vous le ferez sans doute pour d'autres secteurs – je pense aux Dégriff' et autres Marques Avenue.
Nous avons besoin d'un débat, non pas sur les grandes surfaces commerciales qui créent des emplois et qui ont effectivement besoin de travailler le dimanche, mais sur le choix de la chaîne économique qui dégagera la meilleure valeur ajoutée, de la production jusqu'au commerce, tout en protégeant le consommateur. Il nous faut un État stratège en termes de politique économique, qui comprenne qu'avec une simple ouverture des magasins le dimanche, il ne fera que favoriser les importations au détriment de notre balance commerciale, et mettre à genoux les PME, alors qu'elles sont aujourd'hui performantes en France, en Europe et dans le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Le groupe Nouveau Centre votera ce texte. Nous espérons toutefois y apporter des améliorations à l'occasion du nouveau texte qui nous sera proposé au printemps prochain. Quant à l'amendement voté, il est arrivé trop vite, nous empêchant d'avoir une véritable discussion au fond sur l'ouverture du dimanche. Nous disons non à un libéralisme échevelé et à une liberté totale, mais oui à un assouplissement négocié avec les partenaires sociaux et bien réparti géographiquement. Voilà la ligne raisonnable que nous devons suivre ! (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l'amendement qui vient d'être adopté.
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite du projet de loi sur le pouvoir d'achat.
La séance est levée.
(La séance est levée à douze heures vingt-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton