…à une date indéterminée.
S'agissant des marges arrières ou, comme vous le dites, de la coopération, ou encore de la négociabilité, nous devons faire preuve d'une extrême vigilance. Car aujourd'hui, le problème majeur en France, c'est qu'à force de vouloir tirer sur les prix – et ce n'est pas à notre président de séance que j'aurai besoin de le démontrer, il connaît trop bien les filières concernées –, de mauvaises relations se sont instaurées entre l'oligopole de la grande distribution et les petits producteurs. Je pense aux produits agricoles, mais aussi à de nombreux produits issus de PME.
Nous sommes face à un lourd dossier, et je reste persuadée que, pour instaurer une certaine éthique dans les relations commerciales, nous devons travailler ensemble à des mesures de contrôle. Le texte que nous avions voté en prévoyait une série, mais elles n'ont jamais été mises en oeuvre par le gouvernement suivant. Et maintenant, il n'y a même plus les fonctionnaires nécessaires…
Le problème, surtout en matière alimentaire, n'est pas forcément lié à la concurrence européenne ou mondiale – comme on a pu le dire au cours de ce débat –, mais à la différence des marges entre la distribution et la production. Aujourd'hui, en pleine crise à la fois des produits agricoles et des prix du gazole, les marges des producteurs sont écrasées et la valeur ajoutée dans le secteur agro-alimentaire devient de plus en plus infime. Certains producteurs arrivent même à une valeur ajoutée nette nulle. Mais la grande distribution continue de s'assurer, à elle ou aux grands groupes, des marges extrêmement confortables. Il y a là un vrai sujet, celui de l'éthique en économie. Car le consommateur ne s'y retrouve pas, et personne ne souhaite que sa propre entreprise soit mise à genoux par la grande distribution – c'est pourtant ce qui arrive le plus souvent.
S'agissant des délais de paiement, je suis persuadée que les PME sont devenues la plus grande banque française, en termes de prêt aux entreprises ! Il est grand temps de travailler à nouveau sur ce sujet. Il existe déjà un texte, monsieur Chatel, mais il a été rangé dans les tiroirs à la fin 2002, et, j'ignore pourquoi, il n'en est jamais ressorti, alors qu'il traite de façon très intéressante du système bancaire que représentent les délais de paiement. Nous avons fort à faire sur ce sujet. Nous avons déjà travaillé sur les délais de paiement de l'État et des collectivités territoriales : il est grand temps de parler des PME.
Enfin, nous sommes opposés à l'ouverture du dimanche. Nous sommes en train d'assister, dans les centres villes et les villes moyennes, à une expansion des magasins de petit ameublement et de décoration. Trois chambres régionales de commerce et d'industrie ont publié d'excellents documents, qui montrent que ces magasins de qualité tirent vers le haut tout le commerce des petits centres-villes ou de certains quartiers commerciaux. Il s'agit de petites entreprises, souvent dirigées par des artisans ou par ce que l'on appelle, au grand dam des puristes de la langue française, des designers. Ce sont des gens très attentifs à leurs marges, car ils protègent des productions françaises, s'agissant par du bois, par exemple, dans le sud de la France. Ils ressentent aujourd'hui une très forte inquiétude, car ils craignent de ne pas pouvoir tenir le coup s'ils doivent travailler tous les jours : ils sont la plupart du temps deux à travailler, avec un salarié, et il est exclu d'embaucher un étudiant à temps partiel sur une tâche aussi complexe. Or tous ces professionnels sont aujourd'hui directement touchées, parce que les grands magasins d'ameublement, que vous avez favorisés en adoptant cet amendement, ont tous un rayon de petit ameublement et de décoration.
Au salon « meubles et objets », vous avez rencontré, monsieur le secrétaire d'État, tous ces petits producteurs, qui dirigent des PME ou des TPE et emploient de dix à cinquante salariés : ils font de gros efforts de technologie pour rester présents sur les marchés français, européen et mondial. En permettant aux grandes surfaces d'ameublement d'ouvrir le dimanche, vous allez faire perdre aux PME et TPE ce petit « plus » qui donne aux consommateurs l'envie d'aller acheter chez eux, en centre-ville. Nous mettons en danger aujourd'hui tout ce secteur d'activité. Et ce que vous venez de faire pour l'ameublement, vous le ferez sans doute pour d'autres secteurs – je pense aux Dégriff' et autres Marques Avenue.
Nous avons besoin d'un débat, non pas sur les grandes surfaces commerciales qui créent des emplois et qui ont effectivement besoin de travailler le dimanche, mais sur le choix de la chaîne économique qui dégagera la meilleure valeur ajoutée, de la production jusqu'au commerce, tout en protégeant le consommateur. Il nous faut un État stratège en termes de politique économique, qui comprenne qu'avec une simple ouverture des magasins le dimanche, il ne fera que favoriser les importations au détriment de notre balance commerciale, et mettre à genoux les PME, alors qu'elles sont aujourd'hui performantes en France, en Europe et dans le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)