La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à la politique des territoires (nos 3805, annexe 31, 3812, tome 6).
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la présidente, madame la rapporteure spéciale, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames et messieurs les députés, depuis bientôt cinq ans, les réformes conduites par le Gouvernement permettent de bâtir une France plus forte, plus dynamique et plus compétitive. Notre objectif, c'est de libérer les énergies, en permettant à chaque territoire d'exprimer son dynamisme et de jouer tous ses atouts.
Cette exigence traverse l'ensemble des actions conduites par le Gouvernement. Aussi la mission interministérielle « Politique des territoires » ne reflète-t-elle que partiellement notre effort d'aménagement du territoire qui bénéficie, au total, de 5,4 milliards d'euros.
Le budget de la mission que vous examinez aujourd'hui s'établit, quant à lui, à 341 millions d'euros et respecte ainsi les plafonds fixés par la loi de programmation des finances publiques, Ces crédits, en hausse de 6 % par rapport à 2011, contribueront directement au renforcement de notre politique d'aménagement, qui s'organise autour de deux maîtres mots : compétitivité et solidarité.
Premier objectif : la compétitivité de l'ensemble de nos territoires, car le temps est révolu où l'on pouvait opposer deux France, l'une naturellement tournée vers l'avenir et l'autre qui, parce qu'elle serait plus en retrait, aurait besoin d'investissements publics considérables pour tenter se moderniser. Notre conviction, c'est qu'aujourd'hui tous les territoires ont des atouts majeurs, des atouts certes différents, mais qui doivent permettre à chacun d'entre eux d'affirmer son modèle de développement. Et, si nous investissons, c'est pour enclencher un cercle vertueux qui libérera leur dynamisme.
Second objectif : la solidarité, car tous nos territoires doivent bénéficier des infrastructures et des services publics qui sont le socle du modèle républicain, bien sûr, mais aussi celui de l'attractivité économique et démographique. Exigence d'équité territoriale et politique de croissance vont ainsi de pair.
Permettez-moi, mesdames et messieurs les députés, de revenir quelques instants sur la contribution de cette mission à la réalisation de ces deux objectifs.
Pour renforcer notre compétitivité, nous conduisons une politique ambitieuse de développement économique des territoires, avec un soutien particulier accordé aux pôles d'innovation et de croissance qui jouent le rôle de moteur pour leur environnement. À travers le programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », le Gouvernement soutiendra ainsi la politique des pôles de compétitivité et celle des grappes d'entreprises à hauteur de 14 millions d'euros en 2012.
De plus, nous mobiliserons 32,6 millions d'euros au titre de la prime d'aménagement du territoire, afin de permettre l'émergence de projets créateurs d'emplois dans les zones les plus fragiles comme dans celles qui sont très ouvertes aux investissements internationaux.
Enfin, nous ferons un effort budgétaire particulier dans le cadre des contrats de projet État-région, les CPER, afin de consacrer 42,7 millions à des projets majeurs de reconversion. Je pense, entre autres, aux anciens bassins miniers dans le Nord Pas-de-Calais, en Lorraine et dans le Carmausin.
Accompagner les territoires en transition, afin d'éviter que des déséquilibres ne puissent se creuser, c'est un axe majeur de la politique du Gouvernement. C'est pourquoi nous investirons 21 millions d'euros dans le cadre des contrats de restructuration des sites de défense et des plans locaux de redynamisation. Nous alimenterons ainsi les foyers locaux de développement économique.
Cette politique de compétitivité se double d'un effort de solidarité qui garantit la préservation des grands équilibres territoriaux et l'égal accès des citoyens aux services publics. Les 152 millions d'euros du programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » contribuent directement à la mise en oeuvre de cette politique d'investissement au service de la solidarité territoriale et du développement des services publics. Je pense notamment aux crédits engagés à hauteur de 99,7 millions d'euros dans les CPER afin de moderniser les équipements publics des collectivités territoriales, de soutenir les investissements dans le numérique et de contribuer au développement des massifs et des sillons fluviaux.
Un effort particulier sera naturellement fait, une fois encore, en direction des zones rurales. Les crédits du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire bénéficieront ainsi à des projets structurants, avec, par exemple, 25 millions d'euros consacrés aux pôles d'excellence rurale.
Dans le même esprit, des moyens seront dégagés au service de trois priorités, afin de renforcer la vitalité du tissu rural et d'offrir un haut niveau d'équipements et de services à tous les Français, où qu'ils se trouvent : garantir un accès facilité aux services public pour les habitants des territoires ruraux, tout d'abord, avec l'expérimentation « plus de services au public », à laquelle nous consacrerons 5 millions d'euros ; poursuivre notre effort en faveur de l'accès aux soins, ensuite, en soutenant la création de nouvelles maisons de santé pluridisciplinaires avec 10 millions d'euros supplémentaires : appuyer, enfin, la mise en oeuvre du programme national du très haut débit.
J'ajoute que seront notamment poursuivis, dans le cadre du programme « Interventions territoriales de l'État », le plan exceptionnel d'investissement en faveur de la Corse, pour 18,8 millions d'euros, ainsi que les dispositifs de l'action 2 « Eau et agriculture en Bretagne », à hauteur de 9,2 millions d'euros ; cette action traduit l'engagement sans faille du Gouvernement dans la lutte contre les algues vertes.
Vous le savez, mesdames et messieurs les députés, dans le cadre de l'effort d'économies supplémentaires annoncé par le Premier ministre le 24 août dernier, le plafond de la mission a été révisé à la baisse de 3 millions d'euros. Cette diminution, qui porte sur le programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », est soutenable au regard, notamment, de certaines marges de manoeuvre identifiées sur les CPER.
Tels sont les principaux points sur lesquels je souhaitais revenir aujourd'hui, sachant que Bruno Lemaire a déjà eu l'occasion de vous présenter en détail ce budget le lundi 24 octobre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Nous en venons aux interventions des porte-parole des groupes.
La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe GDR.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, une fois encore, j'ai la sensation, en présentant la position des députés communistes et du parti de gauche sur les crédits de cette mission « Politique des territoires », que nous examinons, après cinq années de disette, les rebuts d'une politique délaissée, avec désormais moins de 340 millions d'euros de crédits de paiement, plutôt qu'une mission budgétaire en bonne et due forme.
Les montants dérisoires accordés à cette mission prouvent combien la politique d'aménagement du territoire a été marginalisée depuis 2007. Au gré des remaniements, le ministère de l'aménagement du territoire n'a cessé, depuis le début de la législature, de passer de main en main, d'être morcelé et marginalisé. La politique d'aménagement du territoire s'est fondue en une quête de compétitivité, se limitant à tenter de répondre aux enjeux de la compétition internationale par une politique de spécialisation et de concentration des activités autour de quelques grands pôles nationaux.
Chers collègues de la majorité, ce budget bafoue une nouvelle fois les principes de cohésion et de solidarité territoriales qui ont marqué l'histoire de notre pays, et met à mal les perspectives de développement équilibré de l'ensemble de nos territoires.
Lors de la présentation liminaire des crédits de cette mission en commission élargie, M. le ministre Le Maire avait dévoilé un amendement visant à satisfaire à l'exigence de coupes budgétaires formulée par le Premier ministre, en affirmant, rien de moins, que le coup de rabot de 3 millions supplémentaires sur les crédits de paiement de la mission serait sans incidence sur cette politique. Comment ne pas voir dans ces propos une confirmation du dédain du Gouvernement pour la politique d'aménagement du territoire ? Couplé à la suppression massive de services publics, cet abandon a contribué à creuser les inégalités territoriales en termes d'emplois, de revenus, d'attractivité et, plus largement, de qualité de vie pour nos concitoyens.
J'ai déjà soulevé en commission élargie le cas spécifique du développement industriel ; il est particulièrement emblématique de votre politique. Plus de 500 000 emplois industriels ont été perdus depuis 2002. La spécialisation et la concentration des moyens sur les pôles de compétitivité, dont les résultats demeurent modestes, ont eu pour effet de renforcer la désindustrialisation de territoires déjà fragilisés. Et le saupoudrage de contrats territoriaux et de sites ou l'action tout juste symbolique des commissaires à la réindustrialisation ne parviennent pas à masquer les extrêmes difficultés bancaires et de développement que rencontre sur ces territoires le tissu des petites et moyennes entreprises industrielles.
Dans le même temps, les grands groupes transnationaux poursuivent inlassablement leurs délocalisations totales ou partielles d'unités de production vers des pays ateliers aux contraintes sociales réduites, répondant par là même aux exigences de rentabilité à deux chiffres de leurs actionnaires. Il y a deux semaines, j'interrogeai le Premier ministre sur les fermetures d'entreprises industrielles qui s'accélèrent dans notre pays en citant des cas concrets, relevant de ces deux logiques : Preciturn dans le Puy-de-Dôme et la Haute-Loire, Fonderie du Poitou dans la Vienne, Fralib dans les Bouches-du-Rhône ; M. le ministre chargé de l'industrie a préféré me répondre que tout allait bien et que les transnationales françaises se portaient à merveille !
Les besoins sont immenses pour restaurer une véritable politique publique territorialisée de développement industriel. Pouvoir réindustrialiser nos territoires requiert une politique d'envergure dotée de moyens considérables. Celle-ci doit se construire en visant plusieurs objectifs : il faut, pour commencer, redonner du sens au principe d'équité territoriale, en accordant la priorité au développement des ressources en emplois et en qualification sur les bassins industriels quelle que soit leur taille ; ensuite, assurer le financement de la croissance des entreprises industrielles, particulièrement les PME, en desserrant l'étau en matière d'accès au crédit avec la création d'un grand pôle public de financement du développement industriel et de l'emploi. Nous le voyons, il faut aller bien au-delà de la simple amorce d'un fonds public d'intervention comme le Fonds stratégique d'investissement qui n'a ni les moyens ni les outils suffisants qui lui permettraient servir de levier à ce développement.
Face au manque de cohérence et d'envergure de cette mission, nous avons besoin de réaffirmer une véritable politique d'aménagement pour tous les territoires en redonnant une véritable ambition à l'action de l'État, notamment sur les territoires fragiles et aux besoins reconnus.
Pour toutes ces raisons, les députés communistes et du Parti de gauche, comme l'ensemble du groupe GDR, voteront contre les propositions de crédits pour cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Merci, monsieur Chassaigne, et bravo pour avoir scrupuleusement respecté votre temps de parole de cinq minutes !
J'avais la délicatesse, monsieur Chassaigne, de ne pas être à une seconde près ! (Sourires.)
La parole est à M. Raymond Durand, pour le groupe Nouveau Centre.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons à présent l'examen d'une mission essentielle, car elle vise avant tout à assurer la cohésion territoriale de la République.
Dans le contexte budgétaire actuel, plus contraint que jamais, l'évolution des crédits affectés à cette mission témoigne de la volonté du Gouvernement de développer de façon solidaire et équilibré les territoires nationaux. Les crédits de paiement en légère hausse montrent qu'il se donne, en effet, les moyens d'intervenir dans l'accompagnement des territoires.
À ce titre, le groupe Nouveau Centre tient à saluer les plans en cours et souhaite revenir sur deux points : les contrats État-région et les pôles d'excellence rurale.
J'aborderai tout d'abord les différents contrats État-région. Nous sommes aujourd'hui à mi-parcours des contrats 2007-2013. Le temps d'un bilan de mi-parcours est arrivé et force est de constater que les crédits d'État qui financent les CPER, sont programmés à 51 %. La dynamique est donc enclenchée, et sur la bonne voie.
Je note que plus de 1,8 million d'euros ont été alloués aux transports.
Nous tenons, notamment avec mon collègue Stéphane Demilly, à saluer la modernisation des canaux du nord de la France dans la perspective de l'ouverture du canal Seine-Nord Europe. Ici, les réseaux secondaires n'ont pas été oubliés ; c'était indispensable pour la cohérence de l'ensemble.
Il devrait en être de même pour le réseau ferré. Pour le groupe Nouveau Centre, la mise à niveau du réseau ferroviaire hors TGV est de première nécessité. Ce réseau a été trop longtemps négligé face au TGV et l'état de certaines lignes est littéralement catastrophique. La question est d'importance, car ce sont les lignes des déplacements quotidiens de proximité pour nos concitoyens.
Par ailleurs, 500 millions d'euros ont été consacrés aux grandes filières agricoles dans l'ensemble des régions françaises, le plus souvent en cofinancement des programmes européens. Cette ligne de crédit est fondamentale : le soutien de l'agriculture française est plus que jamais nécessaire.
Je remarque enfin que 150 millions d'euros ont été dédiés aux politiques intégrées sur les grands bassins fluviaux, notamment avec le plan Rhône. Concilier la prévention des inondations et les pressions du développement urbain et des activités humaines en zone inondable, respecter et améliorer le cadre de vie des habitants et assurer un développement économique de long terme : autant d'objectifs que nous soutenons avec vigueur.
J'aborderai maintenant le second objet de mon intervention : la question des moyens alloués à l'animation des pôles d'excellence rurale. Le groupe Nouveau Centre partage tout à fait les objectifs fixés aux PER et soutient avec vigueur cette politique au service des territoires.
Il est en effet vital que ces territoires accroissent leur capacité économique et puissent répondre aux besoins des populations dans le domaine des services au public. Une chose est sûre aujourd'hui : la diversité des ressources économiques des territoires ruraux est un atout qu'il convient de mieux prendre en compte afin d'assurer un meilleur développement de ces territoires.
Au même titre que les productions agricoles ou agroalimentaires, les richesses naturelles des territoires, les savoir-faire techniques, les spécialisations artisanales et industrielles, le patrimoine, les loisirs sportifs et culturels doivent être valorisés.
Cette question est d'autant plus prégnante que la typologie des populations rurales évolue grandement. Aussi est-il important de mettre en place de nouveaux modes de présence dans les territoires ruraux. Ces projets constituent à l'évidence un réservoir de croissance et de développement durable. Nous nous félicitions que le label pôle d'excellence rurale ait été attribué à 149 projets le 25 août dernier. Les élus locaux que nous sommes ont tout loisir de l'observer : les territoires sont plus que jamais soumis à une forte concurrence, dans la sphère économique comme dans la sphère sociale. Les enjeux sont immenses, car ils concernent la mutation économique des territoires et le renforcement de leur attractivité, particulièrement dans les zones rurales.
Nous pensons que les objectifs et les moyens donnés à cette mission répondent à ces enjeux ; aussi le groupe Nouveau Centre apportera-t-il son soutien au vote des crédits de la mission « Politique des territoires ». (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La mission interministérielle « Politique des territoires » regroupe 334,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et 340,8 millions d'euros en crédits de paiement pour l'année 2012.
Ce budget a été réduit de 3 millions d'euros pour contribuer au redressement des finances publiques.
Le ministre de l'aménagement du territoire, lors de la réunion en commission élargie, a précisé que ce coup de rabot de trois millions d'euros décidé par le Premier ministre dans le cadre de la réduction du déficit public n'aurait pas d'incidence majeure sur la politique d'aménagement du territoire. Ce montant sera réparti entre les contrats de projets État-régions, pour un million d'euros, et les pôles de compétitivité et les grappes d'entreprises, pour deux millions. Compte tenu des taux de consommation de chacun de ces dispositifs et des engagements actuels, il ne devrait pas en résulter de difficulté majeure. Ce qui répond aux inquiétudes d'André Chassaigne.
Je souhaiterais revenir sur quelques points qui concernent l'attractivité de nos territoires.
Premièrement, améliorer la couverture du territoire en téléphonie mobile. C'est une priorité. Aujourd'hui, 97 % des communes sont couvertes. Mais il reste encore des zones blanches : six cents millions d'euros d'investissements sont prévus pour améliorer la situation et donc remédier aux dysfonctionnements. La demande est forte.
Deuxièmement, faciliter l'accès aux soins, le Gouvernement a prévu d'allouer 10 millions d'euros en 2012 afin d'aider et soutenir la création de maisons de santé pluridisciplinaires. Je tiens à souligner l'effort budgétaire du Gouvernement pour remédier aux problèmes de démographie médicale.
Il faut savoir que les temps d'attente pour avoir accès à un spécialiste varient du tout au tout en fonction des territoires. Il faut compter cinq à six mois pour les territoires ruraux contre deux à trois semaines à Paris. Vous avez pleinement conscience de cette situation dommageable, qui doit être très rapidement réglée.
M. le ministre de l'aménagement du territoire a estimé que les critères retenus par les agences régionales de santé pour l'ouverture d'une maison de santé sont trop rigides pour permettre de régler les difficultés de nos territoires, notamment des zones de montagne. Ce qui répond très clairement à une des interrogations dont j'avais saisi le ministre en commission élargie ; je l'en remercie. Les critères démographiques, peu adaptés, interdiraient toute implantation au motif de l'insuffisance de population ; l'obligation de disposer de deux médecins pour pouvoir créer une maison médicale ne pourra être satisfaite partout. Un allégement s'impose.
La politique du territoire est fondée sur le principe d'égalité entre les territoires. Le Gouvernement oeuvre dans ce sens et je me félicite qu'il ait adopté des mesures pour enrayer ces situations inacceptables. Il est en effet prévu de créer 250 maisons de santé pluridisciplinaires – 193 sont déjà ouvertes – et ce nombre devrait être porté à 231 au 31 décembre 2011.
Je pense également à l'attribution de bourses aux étudiants qui s'engagent à s'installer en zones rurales : 400 bourses de 1 200 euros par mois ont été ouvertes. Vous avez précisé à juste titre, et je vous soutiens, que si cela ne suffisait pas, le Gouvernement irait plus loin.
Troisièmement, le Gouvernement travaille pour permettre aux habitants des territoires ruraux l'accès effectif à un socle de services publics.
Je vous ai fait part, lors de la réunion de la commission élargie, de mon souhait de voir créer des relais de services publics dans chaque chef-lieu de canton. Vous avez immédiatement répondu à cette sollicitation en affirmant une volonté forte de créer 3 000 relais de services publics sur notre territoire. Ce dispositif fonctionne bien ; il repose sur l'utilisation de nouvelles technologies et de dispositifs innovants.
Les relais de services publics contribuent parfaitement à rapprocher le service public du citoyen. L'expérimentation « Plus de service au public » dont vous avez parlé, madame la ministre, dotée de 5 millions d'euros, confortera ce programme. Permettez-moi toutefois de rappeler que la dotation d'équipement des territoires ruraux doit permettre le financement en fonctionnement de l'ouverture d'un relais de services publics ; ce sujet est récurrent depuis un an.
Quatrièmement, vous avez convenu que l'échéance de 2025, fixée pour le déploiement du numérique, était très éloignée. Vous avez largement contribué au déblocage d'une partie du grand emprunt et je vous sais très attachée, d'une part, au financement du fonds d'aménagement numérique du territoire et, d'autre part, au déploiement rapide de la fibre optique. Les schémas d'aménagement numérique des collectivités permettront une optimisation de la volonté gouvernementale de couvrir rapidement le territoire national. Je sais que vous êtes consciente qu'il s'agit là d'un sujet de préoccupation majeure pour les territoires ruraux ; pour l'installation des équipements comme pour la pérennisation des financements, plus nous irons vite, mieux ce sera.
Enfin, j'ai bien noté que l'année 2012 sera consacrée aux objectifs suivants : la redynamisation des territoires affectés par le redéploiement des armées ; le soutien au développement des pôles de compétitivité et aux grappes d'entreprises ; l'accompagnement des mutations économique, à travers le fonds national de revitalisation des territoires et la prime d'aménagement du territoire, ou PAT ; le renforcement de l'attractivité des territoires ruraux, auxquels je suis très attaché ; la coordination de la mise en oeuvre des contrats de projets et des programmes opérationnels des fonds européens ; l'analyse de la mobilité et de la prise en compte de l'aménagement des territoires dans les transports, à travers la notion de train d'équilibre du territoire et le schéma national des infrastructures de transport.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera le budget « Politique des territoires ». (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Catherine Quéré, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Madame la ministre, nous ne pouvons que déplorer la faiblesse des crédits affectés à la mission « Politique des territoires ». Même si vous proclamez que leur baisse n'entraînera pas de difficulté majeure, vous faites de cette mission dont les enjeux sont si importants une mission mineure.
Cela explique certainement le malaise que nous constatons dans nos circonscriptions, c'est-à-dire un sentiment d'abandon total. Cette souffrance de nos territoires est due sans aucun doute à la terrible, injuste et aveugle révision générale des politiques publiques de ce gouvernement.
À l'heure où la crise accroît le risque de pauvreté, les services publics devraient être l'amortisseur à ne pas sacrifier. Nos territoires sont victimes des conséquences néfastes d'une politique purement comptable, sans concertation et qui n'a été suivie d'aucun bilan.
Qu'il s'agisse des réformes de la carte hospitalière, judiciaire, scolaire ou militaire, de l'abandon du fret ferroviaire ou de l'assistance en ingénierie technique, aucun secteur n'aura été épargné.
Ce n'est pas un hasard si le groupe SRC a déposé une proposition de loi visant à instaurer un bouclier rural au service des territoires. Ce sentiment d'abandon, dangereux pour la cohésion républicaine, explique sans aucun doute le vote des élus locaux aux dernières sénatoriales.
Les collectivités territoriales et locales pourront de moins en moins remédier aux défaillances de ces politiques en raison de l'étranglement financier dont elles sont victimes.
Après le gel des dotations financières, c'est un coup de rabot supplémentaire de 200 millions d'euros sur leur budget qui est prévu, alors qu'elles sont les acteurs majeurs de l'aménagement du territoire.
Par exemple, la création des maisons de santé pluridisciplinaires n'est possible que parce que les collectivités jouent le jeu. Pourtant, la santé publique relève normalement de l'État ! Qui plus est, en les bridant ainsi financièrement, vous portez un mauvais coup à la politique de l'emploi local et à la croissance. Comment pourraient-elles continuer à investir sans moyens ? D'autres choix et d'autres voies sont possibles.
Au sujet des pôles de compétitivité, nous émettons les plus grandes réserves sur le dispositif d'affichage qui repose essentiellement sur les exonérations fiscales, certes très tentantes, mais qui seront vite saturées pour chaque entreprise.
Au sujet du désenclavement numérique, outre que l'échéance de 2025 est beaucoup trop lointaine, nous regrettons la liberté totale laissée aux opérateurs privés. À n'en pas douter, ceux-ci favoriseront les secteurs à forte densité dans un souci de rentabilité et laisseront les zones les moins rentables qui, alors, se tourneront bien sûr vers les collectivités.
Au sujet des pôles d'excellence rurale, nous regrettons les restrictions des aides pour chaque nouvel appel à projet.
Nous sommes aussi très inquiets des nouveaux dispositifs de cadencement pour les trains d'équilibre des territoires. Le risque est grand d'entraîner une moins-value en termes de service.
Nous regrettons également la stagnation des crédits de la prime d'aménagement du territoire alors qu'il s'agit d'un outil important d'aménagement.
On ne peut que constater les contradictions entre votre volontarisme affiché et les résultats de votre politique sur le terrain. Ce n'est pas ainsi que nos territoires pourront relever le défi de la compétitivité. Votre politique des territoires manque totalement d'ambition et c'est tout naturellement que le groupe SRC ne votera pas ce budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Sur ces crédits, je suis saisie d'un amendement n° 5 du Gouvernement.
La parole est à Mme la ministre.
Madame la présidente, avant de présenter cet amendement, permettez-moi de saluer le travail remarquable réalisé avec les rapporteurs Arlette Grosskost et Jacques Le Nay qui nous a permis de parvenir à une diminution de crédits de 3 millions d'euros dans le cadre de la mission.
La réduction portera sur les contrats de projets État-régions dont les décaissements sont plus lents qu'initialement prévu et sur les pôles de compétitivité mais sans que cela remette en cause la contractualisation 2010-2012.
La parole est à M. Jacques Le Nay, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
Cet amendement présenté par le Gouvernement a été voté en commission élargie ; j'émets donc un avis favorable.
(L'amendement n° 5 est adopté.)
Je mets aux voix les crédits de la mission « Politique des territoires », modifiés par l'amendement n° 5 .
(Les crédits de la mission « Politique des territoires », ainsi modifiés, sont adoptés.)
Nous avons terminé l'examen des crédits relatifs à la politique des territoires.
Nous abordons l'examen des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » (nos 3805, annexes III et IV, 3807, tome 1).
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Au coeur de la politique du Gouvernement, il y a la conviction que la vitalité de notre agriculture est non seulement un atout pour notre pays, mais aussi l'un des piliers de notre souveraineté : la France est une grande puissance agricole.
Et l'enjeu aujourd'hui n'est pas seulement de conserver ce rang, mais de répondre aux grands défis qui sont devant nous pour accroître encore ce rayonnement à l'échelle européenne et internationale.
Notre vision de l'agriculture n'est pas une vision nostalgique qui s'efforcerait de recréer les conditions d'un âge d'or par définition disparu. Le monde agricole a changé, tout comme le monde rural. Mais, loin de les condamner à un quelconque déclin, les évolutions de la société et de l'économie ont tout pour bénéficier à l'agriculture française. Cela tient à une raison très simple : aujourd'hui, partout en Europe, ce sont les exigences de qualité, de sécurité et de soutenabilité qui s'expriment – qualité des produits et sécurité alimentaire, bien sûr, mais aussi soutenabilité durable des modes de culture et d'élevage.
Ces exigences sont autant de chances pour notre agriculture ; encore faut-il parvenir à répondre à la question des coûts – autrement dit à renforcer notre compétitivité. Ce projet de loi de finances marque à cet égard une avancée majeure.
Le budget de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales » traduit la triple ambition portée par Bruno Lemaire : armer le secteur agricole pour lui permettre de relever les défis qui sont devant lui, consolider toutes les avancées réalisées depuis bientôt cinq ans en honorant les engagements pris par le Gouvernement, poursuivre la modernisation de notre politique agricole pour la rendre plus efficace encore dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques.
Pour atteindre ces objectifs, la mission bénéficiera en 2012 de près de 3,6 milliards d'euros en crédits de paiement, en parfaite cohérence avec les plafonds inscrits dans la loi de programmation des finances publiques. Ce budget, stable pour les autorisations d'engagement et en légère diminution pour les crédits de paiement, respecte chacun des engagements pris par le Gouvernement.
Premier engagement : renforcer la compétitivité de notre agriculture, en agissant sur tous les facteurs. Je pense tout d'abord à la consolidation des filières agricoles, dans le cadre des plans de développement lancés en 2011. Ainsi, 60 millions d'euros permettront de poursuivre notre politique d'investissement dans la modernisation des bâtiments d'élevage afin en particulier de réduire les coûts énergétiques des exploitations.
Je pense ensuite à l'effort engagé par l'ensemble du monde agricole pour concilier productivité et respect de l'environnement. C'est une exigence sociale, bien sûr, mais c'est aussi une arme économique au service de la conquête de nouveaux marchés. La dotation pour les mesures agro-environnementales est donc stabilisée à 42 millions d'euros tandis que les crédits nécessaires pour couvrir le renouvellement des contrats de prime herbagère agro-environnementale sont inscrits à hauteur de 17 millions d'euros.
Je pense enfin à la maîtrise des coûts de production, et d'abord des coûts du travail. C'est une nécessité absolue pour maintenir la vitalité de notre tissu agricole et pour renforcer notre compétitivité. Nous agissons donc sur deux plans : nous avons tout d'abord allégé le coût du travail occasionnel, avec une exonération de charges à hauteur de 491 millions d'euros en faveur des exploitants employant des travailleurs occasionnels, en particuliers lorsqu'ils sont demandeurs d'emploi. Cette mesure, dite TO-DE (travailleurs occasionnels - demandeurs d'emploi), bénéficie à 90 000 entreprises et à plus de 900 000 salariés.
Mais nous allons cette année plus loin encore. Vous le savez, le Gouvernement a beaucoup travaillé avec vous, notamment avec Bernard Reynès, Charles de Courson, Jean Dionis du Séjour et Christian Jacob, que je remercie tout particulièrement. Le résultat, c'est une mesure qui, si elle est jugée eurocompatible, permettra d'alléger non plus seulement le coût du travail occasionnel mais également celui du travail permanent.
Nous vous proposons ainsi d'exonérer les entreprises agricoles de leurs cotisations conventionnelles dans des proportions qui permettront de réduire d'un euro par heure le coût de travail des salariés payés au SMIC. C'est évidemment une avancée considérable, qui témoigne de la détermination du Gouvernement à rendre notre agriculture plus compétitive.
Naturellement, à l'heure où la réduction des déficits est plus que jamais une nécessité absolue, cette mesure sera neutre sur le solde de l'Etat : des recettes supplémentaires ont d'ores et déjà été votées en première partie.
Notre deuxième engagement est de consolider l'effort de modernisation de notre agriculture Ainsi, dans le prolongement du plan pour une pêche durable et responsable, le Gouvernement continuera d'accompagner les secteurs de la pêche et de l'aquaculture. Les crédits prévus pour les « contrats bleus » sont ainsi maintenus et représentent 10 millions d'euros. De plus, un programme de recherche relatif à la sélection génétique des huîtres fera l'objet d'une dotation spécifique. Enfin, les ajustements nécessaires de la flotte, notamment pour le thon rouge ou l'anguille, seront financés à hauteur de 11 millions d'euros.
Le budget 2012 traduit également les ambitions du Gouvernement en matière de politique forestière. L'objectif d'accroissement de la récolte de bois dans le cadre d'une gestion durable a ainsi été inscrit dans le contrat d'objectifs et de performance de l'Office national des forêts pour la période 2012-2016.
Nous poursuivons également dans la voie tracée depuis bientôt cinq ans en maintenant notamment les mesures qui soutiennent le revenu des exploitants agricoles. Ainsi, 165 millions d'euros sont ainsi consacrés à la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante et 248 millions d'euros aux indemnités compensatoires de handicaps naturels.
Troisième engagement : renforcer l'efficacité des administrations en charge de notre politique agricole. Depuis 2007, le ministère de l'agriculture a pleinement participé à la réforme de l'État et à la modernisation des politiques publiques. Notre objectif, vous le connaissez, est très simple, c'est d'améliorer le service rendu aux citoyens tout en réalisant des gains de productivité. Le développement de la télédéclaration, la simplification du processus de gestion des aides ou encore l'optimisation des fonctions-supports nous permettent ainsi de réduire de 373 postes les effectifs de la mission. Nous poursuivrons cet effort en rationalisant le pilotage des actes en matière de sécurité sanitaire et en mettant progressivement fin aux missions d'ingénierie concurrentielle.
Parallèlement, la réforme des opérateurs agricoles porte ses fruits. Elle a conduit à la constitution de FranceAgriMer, de l'Agence de services et de paiement, de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail ainsi que de l'Institut français du cheval et de l'équitation. Tous sont aujourd'hui opérationnels et cette rationalisation dégage les économies prévues dans le cadre du budget triennal : tous les opérateurs respectent en effet les objectifs de réduction des dépenses de fonctionnement qui leur ont été fixés.
Dans le cadre de la réduction de 1 milliard d'euros supplémentaire des dépenses annoncée par le Premier ministre le 24 août, nous accentuons cet effort d'économies avec une baisse de 22 millions d'euros du plafond de la mission.
L'effort demandé est indispensable, mais il est aussi réaliste et supportable. Il portera notamment, à hauteur de 15 millions d'euros, sur les crédits du programme « Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires ». Les 7 millions d'économies complémentaires seront répartis entre chacun des programmes qui composent la mission.
Ce budget témoigne donc, une fois de plus, de l'ambition portée par ce Gouvernement pour notre agriculture : plus que jamais, nous nous mobilisons pour l'armer face aux défis qui nous attendent. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.
Apporter des solutions à la situation économique dégradée de nombreuses filières et renforcer la compétitivité de notre agriculture sont les maîtres-mots de cette mission.
Dans un contexte budgétaire toujours plus contraint, force est de constater que le budget de l'agriculture, l'alimentation, la pêche, la forêt et les affaires rurales a été bien défendu : les crédits ils demeurent stables, ce qui est déjà bien. Avec 5,5 milliards d'euros dont 3,7 milliards d'euros en autorisation d'engagement, les montants sont donc comparables à ceux de l'an dernier. Qui plus est, ils sont conformes à loi de programmation des finances publiques 2011-2013. Cela ne peut que réjouir les centristes qui se battent sans relâche pour cela – on sait notamment toute l'importance que Charles de Courson attache au respect de cette planification.
Nous saluons en particulier la sanctuarisation d'un certain nombre de dépenses d'intervention, qui ont été protégées.
C'est le cas du développement des filières, doté de 60 millions d'euros, et de l'installation des jeunes agriculteurs d'euros dont les crédits atteignent 167 millions d'euros. Cela témoigne d'une vraie volonté politique.
Nous saluons aussi les efforts consentis en faveur de la prime herbagère et de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels. Je le répète, tout ceci n'était pas évident dans le contexte budgétaire que nous connaissons, mais cela a été fait.
À l'occasion de ce budget, nous souhaitons mettre l'accent sur deux aspects particuliers : la compétitivité de notre agriculture au sein de l'Union européenne et le problème de l'eau.
La préservation de la compétitivité de notre agriculture au sein de l'Union européenne est pour le Nouveau Centre un véritable cheval de bataille du Nouveau Centre. Le budget 2012 voit la poursuite des mesures d'exonération des cotisations patronales de sécurité sociale des travailleurs occasionnels du secteur agricole ; nous saluons cette sanctuarisation.
Au-delà, nous avons beaucoup travaillé en 2001 sur la baisse des charges sur le travail permanent. À la suite d'une proposition de loi que Charles de Courson, les membres du groupe NC et moi-même avons déposée en avril, un débat public s'est instauré, qui a donné lieu à un engagement du ministre de l'agriculture, que je salue, et du Premier ministre. Bernard Reynès a ensuite conduit un travail approfondi, que notre groupe a grandement apprécié. Cette vraie initiative parlementaire a abouti, chose que je n'ai vue que rarement en neuf ans de vie parlementaire. Ainsi, les charges sociales sur le travail permanent diminueront de 210 millions d'euros. Nous espérons que cette mesure sera jugée euro-compatible.
Pour avoir fait le voyage à Bruxelles avec Bernard Reynès, je suis optimiste et je suis même prêt à parier avec Germinal Peiro, qui semble lui plutôt pessimiste…
Nous avons fait un pas en avant dans la bonne direction : pour les agriculteurs, voir les charges sociales baisser d'un euro par heure, ce n'est pas rien !
Pour autant, nous ne sommes pas au bout de notre combat. Certes, l Gouvernement a un bilan en la matière avec la diminution des charges sur le travail occasionnel et sur le travail permanent. Au-delà, il faut engager la restructuration du financement de la protection sociale. Le Nouveau Centre est résolument engagé dans ce qui sera à mon sens le grand débat du rendez-vous présidentiel de 2012.
Un mot enfin sur la question de l'eau, qui est absolument essentielle pour le sud et l'ouest de notre pays.
L'eau est bien sûr un facteur de production essentiel, mais aussi un facteur limitatif. Nous devons en particulier prendre la mesure du changement climatique qui se déroule en France. De 1945 à 2005, la température moyenne en Aquitaine a augmenté de deux degrés et nous vivons donc une véritable méditerranéisation de notre région.
Parce qu'il ne saurait y avoir d'agriculture compétitive sans maîtrise de l'eau, nous nous étions réjouis d'entendre Nicolas Sarkozy annoncer le 9 juin dernier un grand plan sur cinq ans de stockage de l'eau, faisant porter l'effort notamment sur les lacs collinaires et sur les rivières moyennes qui quadrillent notre territoire. Nous déplorons toutefois que ce plan ne trouve aucun commencement d'exécution dans le présent budget et nous défendrons donc un amendement destiné à y affecter 24 millions d'euros, en cohérence avec l'annonce du chef de l'État et avec surtout avec les besoins prioritaires du monde agricole.
Monsieur Dionis du Séjour, vous avez dépassé les cinq minutes vous étaient attribuées.
Nous voterons ce budget parce qu'il a préservé ce qu'il fallait et qu'il a fait un effort décisif au niveau de la compétitivité et du coût du travail français. Reste la question de l'eau, mais nous en débattrons à l'occasion de notre amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC. et sur quelques bancs du groupe UMP.)
Madame la ministre, 5,5 milliards d'euros sont retenus dans le PLF pour votre ministère. Votre objectif est double : moderniser l'agriculture et la pêche, garantir la qualité de l'alimentation dans la maîtrise des dépenses publiques.
Pour l'agriculture apparaissent : la maîtrise des coûts de production, la stabilisation des exonérations des charges patronales – 491 millions d'euros –, la modernisation des élevages – 60 millions d'euros –, le respect de l'environnement – 42 millions d'euros –, l'installation des jeunes agriculteurs – 167 millions d'euros –, le soutien aux revenus des exploitations, la dotation aux territoires ultramarins, la confirmation de la politique de la forêt, le soutien à la recherche, à l'enseignement agricole supérieur et technique.
Abordons plus spécifiquement la question de la pêche. L'année 2012 sera difficile.
Si la France comptait 25 500 marins pêcheurs en 2005, en 2010 ils sont 22 639. Parmi eux, 585 ne sont pas originaires de l'Union européenne, car les offres d'emploi ne sont pas pourvues.
De 2008 à 2010 nous avons perdu 9 % des équipages, soit 2 200 marins, mais nous consommons plus de poisson : 28,6 kg par habitant en 1998, contre 34,7 kg en 2009.
La flottille, avec 7 230 navires, dont 4 720 en métropole, est assez stable. Nous en possédions 4 979 en 2009, mais 11 660 en 1984…
La pêche métropolitaine, c'est 1 milliard d'euros de chiffres d'affaires – poissons, crustacés, coquillages, céphalopodes confondus – et 205 000 tonnes de poissons frais.
La conchyliculture représente 17 800 emplois, 7 600 à temps complet et 3 000 entreprises. Son activité représente 520 millions d'euros pour 97 700 tonnes d'huîtres, 83 000 tonnes de moules, 5 500 tonnes de coquillages divers. Elle est touchée par la mortalité des naissains et des juvéniles.
Vous avez, madame la ministre, mis en place un accompagnement : 40 millions d'euros en 2008 et de nouvelles aides pour 2009, 2010 et 2011. Vous soutenez la recherche de naissains d'huîtres triploïdes résistantes, la sélection ou l'importation de souches résistantes et un programme de sélection génétique.
L'aquaculture, c'est une production de 50 000 tonnes en 2009 et un chiffre d'affaires de 167 millions d'euros. Elle comprend la salmoniculture continentale qui, avec 36 000 tonnes et 1 246 emplois, accuse une baisse depuis 2001 du fait des contraintes environnementales et de la concurrence – cela étant, la France reste le deuxième producteur d'Europe. Elle comprend également la pisciculture d'étang, avec une production de 8 000 tonnes, et la pisciculture marine, avec une production de 5 700 tonnes et 530 emplois.
L'algoculture est une espérance, avec une production de 50 tonnes. S'y ajoutent 50 000 tonnes d'algues provenant de la cueillette. C'est un potentiel agroalimentaire, cosmétique, médical – sans parler des utilisations dans les domaines des fertilisants, de l'alimentation animale, des nouveaux matériaux.
Votre budget, s'il montre une légère baisse en autorisations d'engagement, présente des crédits de paiement à la hausse, avec 60 452 000 euros, contre 55 817 000 euros.
Notons des dépenses d'assistance en hausse – 500 000 euros –, les sorties de flotte qui se conçoivent dans l'attente des décisions autorisant le renouvellement de la flottille vieille de vingt-cinq ans assurant sécurité, qualité de vie et conditions de travail aux marins.
Nous attendons les navires du futur, et en particulier la jauge libérée.
Il ne peut y avoir de budget sans une politique nationale. La pêche française soumise aux décisions de Bruxelles doit être une force de proposition. Nous attendons une nouvelle organisation de la filière pour répondre à la crise de la pêche. Nous avons été surpris par les propositions de Bruxelles et nous ne pouvons accepter les mesures que l'Europe préconise.
La finalité d'application du rendement maximum durable n'est pas contestée. Elle réclame un échelonnement : 2015 n'est pas réaliste. Elle doit tenir compte des succès obtenus dans la protection de la ressource, le renouvellement des espèces, et les propositions du comité d'orientation scientifique et technique bénéficiant de l'expérience des scientifiques et des marins.
L'interdiction des rejets en mer ne tient pas compte des efforts faits à travers l'amélioration des engins, des techniques de pêche et de la surveillance des potentiels de capture. Il n'est pas concevable d'imposer à nos navires d'interrompre des marées aggravant les difficultés économiques et la consommation du gasoil.
Le système des quotas transférables viendrait déstabiliser notre pêche artisanale sur laquelle repose l'essentiel de la pêche française, l'économie de nos ports, l'aménagement du littoral, et les emplois de la filière.
Nous savons, madame la ministre, que vous partagez notre point de vue. Nous avons confiance dans votre action et le groupe UMP votera votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Cela ne vous étonnera pas, madame la ministre : le groupe socialiste radical et citoyen votera contre votre projet de budget pour 2012.
Pour commencer, ce budget est déjà obsolète, et totalement insincère du fait du décalage considérable entre les prévisions de croissance qui ont présidé à sa fabrication et la réalité d'aujourd'hui.
Nous savons tous qu'il y aura un projet de loi de finances rectificatif dès la fin de l'année. Ce Gouvernement semble ne plus avoir de projet pour la France, et se contente de subir les vagues en nous expliquant qu'il tente d'éviter le pire. Si gouverner, c'est prévoir, alors cela fait bien longtemps que vous ne gouvernez plus ! À notre sens, votre budget n'est rien d'autre qu'un rideau de fumée. Le meilleur exemple en est la fameuse taxe soda, destinée à financer la baisse du coût de la main-d'oeuvre dans le secteur agricole.
L'objectif de la compétitivité de l'agriculture française est primordial. Après dix années de gouvernement de droite, cette compétitivité s'est effondrée et nous avons rétrogradé de la première à la troisième place en matière d'exportations. Et cela, c'est votre bilan.
Nous savons tous, sur ces bancs, qu'il n'y aura pas de solution durable sans une véritable harmonisation sociale et fiscale en Europe. Malheureusement, les gouvernements libéraux – dont vous faites partie – la refusent.
Vous créez donc une taxe qui n'est rien d'autre qu'une préfiguration sectorielle d'une TVA sociale. De ce point de vue, nous sommes surpris par les reniements brutaux de votre gouvernement, qui fait l'inverse de ce qu'il disait au printemps dernier.
Devant le congrès de la FNSEA, M. François Fillon déclarait s'opposer à toute démarche du type TVA sociale au motif qu'elle « se heurte au niveau déjà très élevé de la fiscalité de la consommation ». De son côté, M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, le 30 mars 2011, devant la Commission des affaires économiques, expliquait : « taxer la grande distribution n'est pas seulement incompatible avec le droit européen : ce n'est tout simplement pas la bonne solution, car c'est le consommateur qui finira par payer, du fait que la grande distribution répercutera la nouvelle taxe sur les prix alimentaires. Or nos concitoyens sont déjà confrontés à une augmentation des prix alimentaires. « N'en rajoutons pas ! », ajoutait-il. Reniement encore, puisque vous avez décidé d'en rajouter !
Mais ce n'est pas le seul problème. Cette disposition, vous le savez, n'est pas compatible avec le droit européen…
…et ouvre le champ à un contentieux que les agriculteurs devront payer plus tard.
Ce n'était pas faux au mois d'avril quand M. le ministre répondait au Nouveau Centre – et c'est peut-être d'ailleurs cela qui motive votre revirement : le temps déresponsabilise ! Que disait le ministre de l'agriculture le 30 mars dernier ? « l'exonération proposée, parce qu'elle porte sur le travail permanent, serait assimilée à une aide d'État, donc à une distorsion de concurrence inacceptable ». Et de rajouter le 14 avril, dans cet hémicycle : « Je ne veux pas non plus que l'un de mes successeurs soit confronté à la difficulté morale qui se pose quand vous devez expliquer à un paysan que l'État français a été suffisamment irresponsable pour lui accorder des aides dont, dix ans plus tard, il lui demande le remboursement… Imaginez sa colère ! »
C'est pourtant le chemin que vous avez pourtant décidé d'emprunter en vous reniant, madame la ministre, puisque, comme votre collègue de l'agriculture en commission élargie, vous n'avez que des « incertitudes » quant à la validité de l'édifice que vous nous proposez. Ces incertitudes avouées cachent mal vos certitudes !
Nous n'avons pour notre part qu'une crainte : celle de voir ce gouvernement décider, pour des raisons qui n'échappent à personne, de faire un cadeau qu'il faudra un jour rembourser.
Au-delà, tout porte à redouter que cet édifice ne fabrique une nouvelle trappe à bas salaires : 1,4 SMIC, voilà le salaire maximum proposé pour bénéficier d'un allégement de charges ! Mes collègues Jean Gaubert et Corinne Erhel l'ont expliqué en commission : en Bretagne, bon nombre d'exploitants ne pourront pas espérer bénéficier de la mesure : ils paient trop leurs salariés agricoles… En fait, vous inventez pour les salariés agricoles ce dont vous ne voulez pas pour les patrons du CAC 40 : le plafonnement des salaires. C'est une condamnation à la stagnation et, pour certains, à une baisse des salaires qui servira de chantage à l'emploi.
Enfin, que dire du fait que vous reprenez d'une main ce que vous accordez de l'autre, puisqu'une partie de l'exonération sera payée par les agriculteurs eux-mêmes – 34 millions d'euros – qu'ils paieront avec une hausse des carburants, mes chers collègues, et vous le savez !
Injustice sociale, taxe nouvelle sur la consommation qui vise d'abord les plus pauvres et les classes moyennes, et insécurité juridique majeure : voilà ce qui frappe quand on examine la mesure phare de votre budget. Vous comprendrez, madame la ministre, que nous ne pouvons pas vous suivre sur ce chemin. Le groupe SRC votera donc contre votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, une nouvelle foi, le budget de la mission agriculture, pêche, forêt est lourdement amputé, puisqu'en retrait de 1,5 % en crédits de paiement par rapport à 2011 à périmètre constant.
M. le ministre Le Maire s'est félicité en commission d'avoir tenu le cap des coupes budgétaires décidées dans le cadre de la programmation 2011-2014. Derrière cette course à l'échalote de la rigueur budgétaire, ce sont donc 71 millions d'euros de moins pour les agriculteurs, les pêcheurs, les forestiers pour 2012. Eux qui vivent de plus en plus mal, quand ils n'ont pas cessé d'exercer leur activité depuis l'année dernière…
Quel contraste entre les propos gouvernementaux, qui se veulent rassurants sur la continuité des programmes de cette mission, et la réalité de l'agriculture dans notre pays ! Faut-il rappeler que la France vient de perdre 26 % de ses exploitations entre 2000 et 2010, selon le dernier recensement général agricole, et 22 % de ses emplois liés au secteur ? Elle compte désormais moins de 500 000 exploitations.
À ce rythme-là, qui n'a cessé de s'accélérer ces dernières années, le rêve libéral de voir une France avec 100 000 « agrimanagers » spécialisés et aptes à concourir sur les marchés mondiaux est désormais à portée de main. C'est d'ailleurs cet objectif qui est réaffirmé dans la présentation budgétaire : « ce budget doit permettre aux agriculteurs français de se moderniser, d'investir et de gagner en compétitivité. » Mais pas un mot sur les difficultés et la disparition de milliers d'exploitations familiales !
Ainsi, le programme 154 «Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires » perd 44 millions d'euros par rapport à la loi de finances précédente, avec – comble du comble ! – une diminution de 11 millions d'euros des crédits sur l'action «Gestion des crises et des aléas de la production ».
Joli pied de nez aux centaines de milliers d'agriculteurs de notre pays qui ont dû faire face cette année à une sécheresse dramatique ! Quel symbole pour les producteurs de fruits et légumes menacés de disparition, faute de décisions politiques courageuses en matière de prix…
Chacun le sait ici, ce budget pour 2012, encore plus que les précédents, n'est pas à la hauteur de la situation de notre France agricole.
Sur le principal besoin des agriculteurs, à savoir la question des prix et des revenus, le Gouvernement se refuse toujours à prendre les mesures indispensables à la survie des exploitations. Je pense notamment à l'encadrement des prix et des marges, à travers l'application d'un coefficient multiplicateur. Cette mesure serait pourtant sans incidence budgétaire.
D'autres mesures à la hauteur de la crise de notre agriculture impliquent un engagement budgétaire conséquent. Je pense notamment à l'installation agricole.
Toutes les filières connaissent une crise durable : il y va parfois même de la survie à court terme de producteurs français. Face à cette situation, le ministre s'est livré en commission, une nouvelle fois, à une lamentation sur les difficultés qu'éprouverait la France dans les négociations européennes pour obtenir des engagements plus fermes en faveur du monde agricole. Ce discours n'adoucit en rien l'agonie des paysans, d'autant que le Gouvernement a fait le choix d'accompagner cette politique libérale européenne, notamment lors de l'adoption de la loi de modernisation de l'agriculture, votée l'année dernière. Ses résultats parlent d'eux-mêmes : les producteurs laitiers refusent la contractualisation vendue comme un miracle, mais qui se fait toujours sur le dos des mêmes. Les producteurs de fruits et légumes ne croient pas davantage à la solution divine du renforcement des organisations de producteurs. Quant à la gestion des risques climatiques par l'extension de l'assurance privée, elle prête à sourire puisqu'il a fallu réhabiliter soudainement un fonds de garantie public des calamités en cette année 2011 ! Et la référence récurrente aux avancées « quasi révolutionnaires » du G20 agricole contre la spéculation sur les productions agricoles ne semble pas devoir remplir l'assiette des paysans du monde !
Les députés communistes et du parti de gauche ne se résigneront pas à cette chronique d'une mort annoncée de notre agriculture et de ceux qui la font vivre. Nous avons mis en débat auprès du monde paysan, comme ici à l'Assemblée nationale – et ce sera notamment l'objet d'une niche le 1er décembre – les mesures indispensables pour une autre répartition de la valeur ajoutée, pour des revenus agricoles permettant de vivre dignement de son activité et pour une agriculture durable dans notre pays comme dans le monde ! Avec l'ensemble du groupe GDR, les députés communistes et du parti de gauche voteront résolument contre le budget proposé pour cette mission.
Il me restait quatre secondes, madame la présidente !
Il ne vous restait qu'une, mais je vous remercie, encore une fois, d'avoir respecté votre temps de parole !
Sur ces crédits, je suis saisie de plusieurs amendements.
La parole est à Mme la ministre, pour présenter l'amendement n° 70 .
Ce premier amendement satisfera de nombreux parlementaires sur ces bancs, y compris sur ceux de l'opposition, puisqu'il a pour but d'augmenter de 210 millions d'euros le plafond de la mission, afin de financer l'extension du champ des exonérations de cotisations sociales des employeurs agricoles.
La parole est à M. Michel Diefenbacher, suppléant M. Nicolas Forissier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
Cet amendement a été longuement examiné en commission élargie. Il a rencontré un consensus très général, puisqu'il répond à un besoin manifeste. Nous avons beaucoup discuté sur le financement de cette mesure avant de trouver un accord – il était essentiel qu'un accord unanime se fasse sur amendement de cette importance.
Le groupe Nouveau Centre votera bien sûr cet amendement.
Je tenais simplement à rappeler aux collègues qui n'ont pas suivi la première partie du projet de loi de finances, que cet amendement a été gagé par la création ou l'augmentation de trois impôts. La taxe dite « sur les boissons sucrées » rapportera 120 millions, celle sur les boissons avec édulcorants, 34 millions ; s'y ajouteront 80 millions grâce à une légère réduction des exonérations de la taxe intérieure de la consommation payée par le secteur de l'agriculture, mais aussi par le BTP : soit un total d'environ 235 millions. Dans un esprit de redressement des comptes publics, nous avons lâché 25 millions pour aider à la réduction du déficit budgétaire. Nous nous sommes beaucoup impliqués dans ce domaine avec, entre autres, nos collègues Reynès et Dionis du Séjour. On ne peut donc pas dire que nous n'avons pas agi en élus responsables.
Cet amendement conclut un long travail dont on a beaucoup parlé.
Je tenais toutefois à réagir au discours du parti socialiste sur l'eurocompatibilité. Vous nous faites sur cette affaire, chers collègues, un mauvais procès, dont les conséquences peuvent être graves, surtout lorsqu'il émane d'un grand groupe, dont la parole compte au sein du Parlement. Une délégation parlementaire, composée de cinq ou six députés, dont Charles de Courson, Bernard Reynès et moi-même, s'est rendue à Bruxelles pour rencontrer la Direction de l'agriculture compétente en matière de concurrence. Cela ne s'était jamais fait. Les gens avec qui nous avons alors discuté ont reconnu que notre solution était construite, positive, limitée au régime de la MSA, et de ce fait pouvait effectivement ne pas être requalifiée en aide d'État. Les techniciens et le Directeur de l'agriculture chargé de la compétence à Bruxelles nous ont réservé un accueil extrêmement positif. Il revient maintenant au ministre d'y travailler ; mais, en attendant, j'en appelle à la responsabilité du parti socialiste : évitons, sur un tel dossier, les paroles imprudentes. Sur le fond, et politiquement, cela fait bien de parler d'eurocompatibilité en matière de budget. Mais ce n'est pas ce qui a été répondu à Bruxelles, ni aux parlementaires ni au ministre. Que le ministre entende rester prudent et méthodique sur cette affaire, c'est tout à son honneur : c'est la signature de Valérie Pécresse et de Bruno Le Maire…
Mais vous ne pouvez nier que nous avons travaillé pour obtenir cette eurocompatibilité ; or, à cet égard, les propos que vous avez tenus propos à la tribune sont très imprudents.
Je tiens, enfin, à poser une question : quelles solutions le parti socialiste propose-t-il en matière de compétitivité du coût du travail ? Le vide est sidéral ! C'est donc l'honneur de ce gouvernement d'avoir réagi et de pouvoir présenter un bilan dans ce domaine. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Je ne veux pas être désagréable avec mon ami et collègue Dionis du Séjour. Mais sur l'affaire de l'eurocompatibilité, ce n'est pas à nous qu'il faut faire un procès !
Mais non ! J'ai, pour ma part, l'impression que les propos que vous avez tenus s'adressaient à Mme la ministre.
Nous ne sommes pas les premiers à avoir parlé de cette affaire : c'est tout de même M. le ministre de l'agriculture qui a passé des heures à vous expliquer, au printemps dernier, que vos propositions n'étaient pas eurocompatibles… Il s'en est largement expliqué.
Je vous ferai remarquer, mon cher collègue, que Mme la ministre du budget elle-même a dit à cette tribune, voici quelques minutes, « si ce n'est pas eurocompatible ».
Il est inutile de vous voiler la face et de faire semblant de croire que vous avez gagné. Ce n'est pas nous qui posons la question, mais vos ministres !
Pour le reste, nous n'avons jamais dit que diminuer d'un euro le coût du travail permanent n'était pas un gain.
Mais ce n'est tout de même pas cela, vous le savez parfaitement, qui redonnera de la compétitivité à notre agriculture face à la concurrence – et j'insiste sur ce point – totalement déloyale de la part de nos partenaires européens. Plus on avance sur ce dossier, plus on découvre que se créent en Allemagne de véritables camps de travail avec des ouvrier roumains et bulgares payés 4 euros : c'est cela qui est scandaleux. Nous avons assez travaillé ces questions agricoles. Nous sommes tous élus de départements producteurs de fruits et nous connaissons la situation. En Dordogne, on comptait 1 250 producteurs de fraises, ils ne sont plus que 200, tout simplement parce que le différentiel avec l'Allemagne est terrifiant.
Je conclus, madame la présidente.
Malheureusement, ce n'est pas en baissant de 13 à 12 euros que le problème sera définitivement réglé. Il doit l'être au niveau européen et vous le savez parfaitement. Or, jusqu'à présent, les gouvernements libéraux s'y sont opposés. C'est cela, la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Peiro, je suis convaincu que, si vous vous trouviez de ce côté de l'hémicycle, vous partageriez notre travail. Nous ne faisons pas de triomphalisme s'agissant de ce qui s'est passé à Bruxelles. Deux points ont été soulignés par le commissaire européen : d'abord, c'était la première fois, j'y insiste, que des parlementaires se rendaient à Bruxelles avant de déposer une proposition de loi. Ensuite, notre proposition n'est pas euro-incompatible par le fait que nous ne sommes pas partis, comme vous l'avez évoqué, monsieur Peiro, sur une distorsion de concurrence, auquel cas nous n'avions aucune chance d'aboutir, mais sur le problème de l'emploi. Quelle écoute avons-nous eue à Bruxelles ? On nous a d'abord indiqué quelques pistes. L'essentiel pour nous était, bien sûr, de revenir sans veto.
Une porte s'est alors ouverte : le dispositif proposé n'était pas eurocompatible parce que, s'appliquant à tous les producteurs, il était assimilable à une aide d'État. Donc la piste de travail a consisté à prendre comme critère l'ensemble des personnes assujetties à la MSA, ce qui limitait le nombre de d'éligibles à vingt personnes par entreprise. Je ne dis pas que nous avons gagné : il revient maintenant au Gouvernement de prendre le relais, ce qu'il fait. Mais notre visite aura eu le mérite de créer les conditions d'un dialogue. Je ne suis ni optimiste ni pessimiste : nous avons simplement fait notre travail de parlementaires.
Je connais votre conviction, monsieur Peiro, lorsqu'il s'agit de défendre l'agriculture. Je serai donc très heureux que vous le fassiez avec nous.
Cela dit, nous n'avons jamais prétendu avec cette seule mesure relancer la compétitivité de l'agriculture. Nous avons au moins tenté de sortir d'un discours purement incantatoire pour proposer des solutions concrètes et, rappelons-le, à caractère d'urgence. Je vous rappelle que je ne nous ai pas exonérés dans mon rapport de la nécessité d'ouvrir le chantier de l'harmonisation par le haut des charges en Europe. Vous constatez donc que, sur ce sujet, nous n'avons d'autre prétention que de répondre à une mesure particulièrement urgente et attendue par le monde agricole : pour une fois, nous allons agir en faveur d'une filière – les fruits et légumes – qui n'a pas été la plus gâtée par la PAC. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Notre collègue Jean Dionis du Séjour demande quelle est la solution du parti socialiste. Je lui rappelle que nous sommes ici un groupe parlementaire et que nous ne représentons pas que le parti…
Cela dit, je pense qu'il existe effectivement une solution. Nous avons passé des mois à discuter nos homologues, les seuls à accepter de dialoguer avec nous en Allemagne : ke SPD. Nous sommes parvenus, cet été, à un accord sur la création d'un SMIC agricole et agroalimentaire. Nous savons, en effet, tous, qu'en agriculture et en agroalimentaire, l'Allemagne nous concurrence terriblement parce qu'il n'existe pas de SMIC, mais de la prestation de service, et tout un chacun y a le droit d'acheter de la prestation de service. Tant et si bien que le plus grand abatteur danois déménage pour s'installer, non en Chine, comme on l'entend toujours, mais en Allemagne ! Cela fait d'ailleurs très peur aux abatteurs du Grand Ouest. Vous êtes, pour ce qui vous concerne, en capacité de discuter et d'obtenir le même accord en rencontrant vos homologues allemands : si vous avez ici une majorité et qu'ils en ont une dans leur pays, vous pourrez parfaitement obtenir un accord similaire. Si l'on n'est pas totalement libéral ou ultralibéral, on doit dire oui à la création d'un SMIC en agriculture et en agroalimentaire en Allemagne ; sinon, l'équilibre européen ne se fera jamais. Vous avez devant vous un boulevard de négociations avec la CDU et avec les centristes et vous pouvez obtenir cet accord, comme nous l'avons fait avec le SPD. Vous savez parfaitement que, lorsqu'il était au pouvoir, le SPD n'avait pas lâché sur ce point. Il l'a fait cette année, considérant que l'équilibre européen dépendait également de l'attitude des Allemands. On ne peut pas tenir un double langage, être ultralibéral dans son pays et mettre en balance l'emploi en Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je témoignerai de la discussion que nous avons eue avec la Direction de l'agriculture à Bruxelles. Il nous a été répondu que, pour que notre proposition ne se transforme pas en aide d'État, il fallait un critère de généralité. Quand on a expliqué que l'ensemble des salariés de la MSA serait concerné et qu'il existait un régime indépendant, ils ont alors fait preuve d'ouverture. C'est donc très positif.
Ensuite, on peut parler d'harmonisation par le haut, mais honnêtement, n'oublions pas qu'en Europe, la France est à 13 euros de l'heure, et la Roumanie à 1 euro !
Pourquoi pas ? C'est une piste de travail mais, pour le moment, le salaire est entre cinq et sept euros. Avant qu'ils acceptent un SMIC,…
À la suite du vote qui vient d'avoir lieu, je souhaite à nouveau saluer l'action des députés de la majorité. J'entends les arguments de l'opposition : il faudrait faire autrement et mieux, signer des accords avec des partis au Gouvernement, etc. Mais pourquoi, madame Lebranchu, le SPD, quand il était au Gouvernement, a-t-il refusé de signer l'accord ?
Mme la ministre est la seule à avoir la parole ! Pas de débat, s'il vous plaît.
C'est sans doute plutôt parce que le SPD était au Gouvernement !
Nous avons aujourd'hui une mesure très concrète qui exigera que nous nous battions tous unis à Bruxelles, et nous espérons bien pouvoir compter sur les députés socialistes européens pour nous aider à la faire passer, en se montrant solidaires d'une décision d'union nationale qui ne devrait être, selon moi, ni de droite ni de gauche, car elle sert l'agriculture française. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
L'amendement n° 4 propose de réduire de 0,6 % les autorisations d'engagement et crédits de paiement de la mission. Rapportée aux 6 % d'augmentation que nous venons de voter, ce rabot de 0,6 %, soit 22 millions d'euros, est d'une portée limitée. Je remercie Francis Saint-Léger et Michel Diefenbacher pour le travail de concertation mené en commun.
Le plan d'économies supplémentaires de 1 milliard d'euros annoncé le 24 août par le Premier ministre aura un impact sur quatre programmes de la mission, avec dans tous les cas des efforts demandés aux opérateurs.
Il s'agit tout d'abord d'une minoration de 15 millions d'euros du programme « Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires », qui se répartit à hauteur de 13,5 millions sur les dispositifs d'intervention, en cohérence totale avec les dernières prévisions des besoins pour 2012, et pour 1,5 million sur les opérateurs rattachés au programme ; il s'agit là aussi de mettre en cohérence les crédits avec les besoins.
Est également prévue une diminution de 3,1 millions d'euros sur le programme « Forêt », soit 2 millions sur les crédits destinés au développement économique et à la gestion durable de la filière forestière, et 1,1 million sur les opérateurs rattachés au programme.
Une minoration de 2,4 millions d'euros est également prévue sur le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », soit une économie de 2 millions sur les crédits de la lutte contre les maladies animales et la protection des animaux, compatible avec la montée en charge du coût des visites sanitaires dans les élevages avicoles et porcins, qui démarrent fin 2011, et une contribution de 400 000 euros de la part des opérateurs.
Enfin, une baisse de 1,5 million d'euros est prévue sur le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture », liée à la poursuite de la rationalisation et de la mutualisation des moyens des services supports du ministère de l'agriculture.
Cet amendement a été adopté par la commission des finances et j'y suis très favorable.
(L'amendement n° 4 est adopté.)
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l'amendement n° 298 .
Dans la discussion générale, j'ai insisté, au nom de mon groupe, sur l'importance de l'eau et des crédits en faveur de l'irrigation, facteur de production absolument décisif. Que ce soit lors de la discussion des lois sur l'eau ou lors du Grenelle, un consensus s'est fait jour dans cette assemblée sur le fait qu'une politique moderne de l'eau se devait tout à la fois d'économiser l'eau et de créer des ressources nouvelles, particulièrement dans la façade ouest et la moitié sud de la France – ce qui inclut beaucoup de monde.
Il faut prendre la mesure des conséquences du réchauffement climatique dans les départements du Midi ainsi que du fait que la pauvreté en eau constitue d'ores et déjà un facteur limitant pour certaines filières d'avenir, comme la noisette dans le département du Lot-et-Garonne, et d'autres encore.
Le Président de la République s'est rendu à plusieurs reprises dans les départements du Midi, dans le Tarn-et-Garonne, chez Brigitte Barèges, dans le Lot-et-Garonne, chez Michel Diefenbacher, où il a pu rencontrer les fraisiculteurs et Philippe Bouin. À chaque fois, il a insisté sur la nécessité de mettre en oeuvre une nouvelle politique de l'eau, axée notamment sur les lacs collinaires et les réserves des rivières moyennes. Il a même, dans son discours du 9 juin, cité le chiffre de 120 millions d'euros. En étudiant le budget, nous n'avons toutefois pas trouvé la mise en oeuvre budgétaire de cette somme.
Nous sommes donc partis du chiffre du Président, que nous avons divisé par cinq pour obtenir une annualité budgétaire, ce qui nous donne les 24 millions de l'amendement, que nous proposons de financer sur le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture ».
La commission des finances n'ayant pas examiné cet amendement, je m'exprimerai à titre personnel. Cet amendement soulève une question majeure et répond à un besoin urgent et incontournable de l'agriculture du Sud de la France, en particulier du Sud-Ouest : il est clair que, sans irrigation, il n'y aurait plus d'agriculture dans la vallée de la Garonne depuis longtemps.
L'amendement n° 298 ne vise pas à développer de manière inconsidérée l'irrigation ; il ne concerne que les retenues collinaires, c'est-à-dire le stockage des surplus en hiver pour une utilisation en été, quand l'eau manque. C'est absolument vital pour l'agriculture. De surcroît, il s'agit d'un bon moyen de protéger l'environnement car cette technique permet de moins prélever dans les rivières et les nappes phréatiques.
Je serais donc a priori favorable à la mesure. Je m'interroge seulement sur le gage proposé : 24 millions d'euros sur les moyens des directions régionales de l'agriculture, c'est une ponction considérable dont je mesure difficilement les conséquences pour ces services. Je me tourne donc vers Mme la ministre, en lui demandant s'il est possible d'obtenir que les crédits dont nous avons besoin soient inscrits en loi de finances sans que, pour autant, soient ponctionnés, du moins à cette hauteur, les moyens des directions régionales de l'agriculture.
Le Gouvernement sera tout à fait attentif aux préoccupations exprimées par Jean Dionis du Séjour et Michel Diefenbacher, car nous partageons totalement leur avis sur l'urgence d'agir, notamment sur les retenues collinaires et les programmes de gestion et de stockage des eaux.
J'ai donc la joie de vous annoncer, monsieur Dionis du Séjour, que votre amendement est totalement satisfait. En effet, ce n'est pas dans le cadre du programme agricole que vous trouverez ces moyens inscrits, mais dans d'autres budgets. Je vous détaille le plan annoncé le 9 juin par le Président de la République et qui sera présenté le 16 novembre par ma collègue Nathalie Kosciusko-Morizet, lors du comité de suivi du Grenelle de l'environnement.
Le Président de la République a annoncé un plan de cinq ans pour la création de collecte d'eau par retenues collinaires, pour lequel un financement total de 120 millions d'euros est prévu. L'Union européenne nous interdisant de financer plus de 75 % du montant d'un tel programme, le reste doit être à la charge des agriculteurs ; la part publique est donc nécessairement limitée à 90 millions d'euros.
Ces 90 millions figurent dans le budget, à hauteur de 75 millions dans les budgets des agences de l'eau et de 15 millions dans celui du Fonds européen agricole pour le développement rural. Nous avons pris toutes les dispositions pour assurer le financement de ce plan, qui s'accompagnera de mesures de simplification administrative afin de faciliter la mise en place des retenues localement, car vous savez que le problème tient aussi au temps de conception et de réalisation de tels projets ; il faut évidemment respecter les particularités environnementales de chaque région.
L'inscription de crédits sur le programme 154 me semble par conséquent sans objet, sinon périlleuse, car elle supposerait de demander aux agriculteurs de mettre davantage au pot, alors qu'il ne serait pas possible de dépenser cet argent. L'amendement n° 298 étant satisfait, j'en demande le retrait ; à défaut, j'y donnerais un avis défavorable.
Je ne ferai pas de remarque sur la technique par laquelle cet amendement serait satisfait, mais j'avais cru comprendre que le budget des agences de l'eau était diminué de 53 millions d'euros.
C'est le cas.
C'est bien ce que j'avais compris.
Sur le fond, le groupe socialiste dans son ensemble voterait cet amendement s'il n'était pas retiré. Il nous paraît en effet indispensable de pratiquer cette technique ancestrale toute simple, qui consiste à stocker de l'eau pendant l'hiver et au printemps pour pouvoir l'utiliser pendant l'été.
Cela appelle toutefois plusieurs remarques. Les réserves collinaires sont extrêmement utiles dans le cas de cultures spécialisées, comme le maraîchage, l'arboriculture, la production de fruits, etc. Pour autant, ne faisons pas croire aux agriculteurs qu'elles satisferont les besoins des grandes cultures.
La profession agricole a parfaitement conscience qu'elle n'échappera pas à une révision de ses pratiques culturales. Il est évident que nous vivons un réchauffement climatique et que la progression du maïs vers le nord a des limites. Autant la culture de cette plante est adaptée au Sud-Ouest, où le régime pluvio-orageux de l'été permettait au maïs, d'origine tropicale, de pousser très vite, en quelques semaines, autant elle ne l'est pas dans des régions plus sèches.
On a remarqué aussi, avec la sécheresse de cette année, que les exploitations agricoles ayant non pas une spécialisation unique mais plusieurs activités ont le mieux résisté, ainsi que celles qui pratiquent des cultures comme la luzerne, longtemps délaissée mais qui apporte de grands bienfaits par sa teneur en protéines et en azote. Reste qu'il faut soutenir et développer les réserves collinaires dans notre pays.
Il est bon qu'au détour d'une discussion budgétaire, nous partagions quelques mots sur la gestion de l'eau. Nous partageons la préoccupation de Jean Dionis du Séjour : l'eau est une ressource dont on ne mesure pas assez la valeur, ni la rareté, avérée déjà dans de nombreux endroits de la planète.
Jean Dionis du Séjour parle de développement de ressources nouvelles. Je suis plutôt réservé sur cette expression car je fais partie de ceux qui pensent qu'il n'y a pas création de ressource, que nous sommes simplement dans la gestion de cette ressource, la question étant, derrière, celle des systèmes agricoles mis en place. Ce n'est donc pas une simple affaire de transfert de crédits.
J'en profite pour évoquer à nouveau un sujet évoqué en première partie de la loi de finances. Il est déplacé d'évoquer, comme le fait Jean Dionis du Séjour, l'effet de levier qui serait exercé par l'État sur les projets des collectivités territoriales alors même que l'État ponctionne le budget de l'ONEMA, lui-même alimenté par des versements imposés aux agences de l'eau, qui ont souvent dû augmenter leurs redevances pour y faire face. L'État, tout à son souci de rétablir ses finances publiques, taxe les redevances des usagers et pénalise l'investissement public local.
Rappelons que ce sont les agences de l'eau qui financent la gestion quantitative de la ressource en eau. Nous sommes donc ici au coeur d'une contradiction qui n'a pas reçu de réponse de la part du Gouvernement ; je suis d'autant plus inquiet à cet égard que si on doit faire encore 6 à 8 milliards d'euros d'économies budgétaires supplémentaires, je me demande qui va être ponctionné.
Je veux d'abord remercier la ministre pour les explications qu'elle nous a donné : l'État va donc consacrer au développement du stockage de l'eau 75 millions à travers les agences de l'eau et 15 millions prélevés sur le FEADER, le reste étant financé par les agriculteurs. Le compte y est. Je retire l'amendement. Mais il m'aurait semblé utile que l'État agisse vraiment pour faire levier. Madame la ministre, ce plan va-t-il démarrer dès 2012 ?
(L'amendement n° 298 est retiré.)
Je mets aux voix les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », modifiés par les amendements adoptés.
(Les crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation et affaires rurales, ainsi modifiés, sont adoptés.)
Madame la présidente, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, en mai 2009, à Urmatt, le Président de la République a fixé les principales orientations pour revaloriser la filière bois, pour laquelle notre pays a de grandes ambitions. Au coeur de cette réforme, deux enjeux relatifs au mode de gestion de nos forêts et à son financement ont émergé ; c'est à l'aune de ce questionnement que s'est déroulée la renégociation du contrat d'objectifs qui lie l'ONF et l'État, marquée par de nombreuses controverses sur le statut de l'ONF.
Présent sur tout le territoire national, l'Office national des forêts gère 25 % de la surface boisée en forêt domaniale et communale, et assure, en lien avec 11 000 communes forestières, la mise en valeur de cette ressource. Il est de ce fait un outil essentiel d'une politique volontariste en faveur de la filière forêt-bois. L'hypothèse d'une réduction du champ de compétences de l'ONF, voire de sa privatisation, a suscité l'inquiétude des communes forestières et de leurs élus. Nous avons été nombreux à vous interroger, madame la ministre, sur ce sujet au travers de questions orales ou écrites. Qui plus est, la signature du contrat ONF-État 2012-2016 a été marquée par de nombreux rebondissements en raison des différents scénarios proposés pour rétablir l'équilibre financier de l'Office. Les propositions visant à remettre en cause le régime forestier en confiant la gestion des forêts des collectivités à des prestataires privées ou encore à augmenter la contribution financière des communes au travers d'une hausse de leur frais de garderie ou d'une taxe à l'hectare d'un montant de 5 à 10 euros les ont alertées. C'est donc dans un contexte difficile que se sont engagés les travaux d'élaboration du contrat Etat-ONF.
Néanmoins, nous sommes nombreux à nous réjouir de la large concertation à laquelle a donné lieu la signature du contrat 2012-2016. La voix des communes forestières a été entendue et l'État a tenu ses engagements ; à travers ce contrat, vous avez montré votre attachement au maintien du régime forestier et à la préservation du service public de l'ONF.
Le projet de loi de finances pour 2012 nous engage à débattre du plan de rééquilibrage des finances de l'ONF, condition nécessaire à la perpétuation de sa mission auprès des collectivités. Je salue à cette occasion la décision prise par le Gouvernement de verser une subvention d'équilibre de 46 millions d'euros par an sur la durée du contrat.
Mais la question qui s'impose est celle de la participation des communes au financement du régime forestier des collectivités. Alors que les frais de garderie des communes ont été maintenus à leurs taux actuels, soit 12 % en plaine et 10 % en montagne, l'article 48 propose de relever la participation des communes par le biais d'une taxe à l'hectare. Cette augmentation de leur participation est somme toute limitée, puisque l'article introduit le principe d'une contribution de 2 euros à l'hectare pour les forêts gérées. Mais pouvez-vous nous assurer, madame la ministre, que la contribution de 2 euros par hectare est bien stabilisée pour la durée du contrat, c'est-à-dire qu'elle se maintiendra sur la période 2012-2016, sachant que l'État devrait ainsi équilibrer le budget de l'ONF sur les cinq ans à venir en lui apportant 5 millions d'euros supplémentaires ?
Mes chers collègues, j'avais invité la commission des finances à repousser cet article. Cela fait dix-neuf ans que j'en suis membre,…
…je suis donc bien placé pour vous expliquer pourquoi.
Pour commencer, rappelons que c'est un impôt. Un impôt innommé, ou mal nommé : en fait, il s'agit d'une rémunération de services rendus, mais personne n'a osé porter l'affaire devant le Conseil constitutionnel pour avoir une discussion là-dessus.
Savez-vous quel était le taux il y a dix-neuf ans ? 7 %. On l'a constamment augmenté. Actuellement, il atteint 12 %. Il y avait même eu une tentative, il y a six ou sept ans, de le porter à 20 %, et nous l'avons fait échouer en commission des finances. Une telle évolution n'est pas raisonnable. Quel est le coût réel, pour une forêt communale bien gérée, du service de garderie ? 5 % à 6 % du produit de la forêt. On en est déjà au double ! On nous explique que les belles forêts de l'Est doivent financer les forêts du Sud ; mais ce n'est pas aux communes de financer cette solidarité, c'est à l'État de l'assurer.
Aujourd'hui, le Gouvernement a renoncé à augmenter encore le taux, mais il a trouvé un autre dispositif : taxer de 2 euros supplémentaires à l'hectare. Ce qui correspond, dans les forêts de l'Est, à une augmentation du taux d'un à deux points : autrement dit, il passe de 12 % à 14 %. Cela n'est pas acceptable parce que ce n'est pas raisonnable. Je voterai donc contre cet article.
Au surplus, le dispositif proposé ne règle pas le fond du problème. On veut toujours faire jouer à l'ONF un rôle de péréquation en prélevant sur les forêts du Nord et de l'Est pour financer celles du Sud. Certes, une partie de celles-ci sont extrêmement peu productives, elles ont un très faible rendement, mais cette question relève d'une autre politique de protection de l'environnement. Il ne faut pas prélever sur les communes du Nord et de l'Est pour financer une politique d'État sur les forêts du Sud.
Voilà pourquoi, je le répète, je ne suis pas d'accord dans cette affaire et que je voterai contre l'article 48.
Je suis saisie d'un amendement n° 7 du Gouvernement.
La parole est à Mme la ministre.
Je tiens à répondre aux objections formulées par le groupe Nouveau Centre et singulièrement par Charles de Courson.
J'ai exprimé mon opposition à cet article à titre personnel, madame la ministre.
Dont acte, monsieur de Courson. L'effort de l'État en faveur de l'ONF est confirmé dans ce budget. C'est un effort exceptionnel, avec l'attribution d'un complément de dotation de 46 millions d'euros pour 2012, parce que la filière bois est une filière stratégique.
Je tiens à vous rassurer, monsieur le député : le relèvement des frais de garderie n'a pas pour objet de permettre un désengagement financier de l'État. C'est tout le contraire : l'État s'engage comme jamais il avec un tel complément de dotation. Certes, il demande à l'ONF de participer comme tous les autres opérateurs de l'État, à l'effort d'économies avec une réduction de ses effectifs de 1,5 %, mais il soutient massivement cette filière stratégique. À cet effet, il a signé avec l'ONF un contrat d'objectifs et de moyens, avec donc 46 millions d'euros supplémentaires à la clef dès 2012.
La création d'une taxe à l'hectare pour couvrir les frais de garderie a pour objet de mieux répartir la charge de financement de l'ONF entre les communes. À ce jour, seules celles qui exploitent du bois sont soumises à la taxe pour les frais de garderie. Or il serait plus logique d'avoir une taxe additionnelle assise sur la superficie boisée, ce qui répartirait mieux cette charge. Le premier amendement, n° 7 , propose d'élargir l'assiette, le second, n° 8, de fixer le taux à 2 euros à l'hectare. C'est un taux raisonnable qui permettra d'étaler la charge de la garderie sur l'ensemble des communes qui en bénéficient.
En effet, mon cher collègue, c'est pourquoi je le souligne. (Sourires.)
Madame la ministre, vous avez soulevé les trois points importants du dispositif.
Premièrement, il s'agit de réaffirmer notre soutien à la filière bois. Louis Cosyns y a fait référence. Il est en effet important de rappeler que cette filière est tout à fait stratégique et qu'il faut essayer de combler notre déficit de compétitivité, notamment dans les régions qui disposent de massifs forestiers importants.
Deuxième sujet : la gestion de l'ONF et la gestion du patrimoine forestier que lui délèguent les communes. Charles de Courson ne l'a pas relevé, mais il y a tout de même un petit différentiel de taxe entre les communes de plaine et les communes de montagne en faveur, et c'est logique, de ces dernières, moins favorisées sur le plan de l'exploitation forestière.
Et puis il faut aussi relever que les missions importantes de l'ONF ont été rappelées dans le contrat d'objectifs, avec le soutien notamment de la Fédération nationale des communes forestières. Il est donc utile de mettre en place une contribution de 2 euros à l'hectare au titre des frais de garderie, elle correspond à une des missions de l'ONF.
Par ailleurs, j'appelle l'attention de mes collègues sur le fait que même si notre commune n'est pas très active sur le plan de la gestion forestière, nous pouvons confier des missions rémunérées à l'ONF.
Ma commune est la première d'Auvergne à l'avoir fait : j'ai demandé aux agents de l'ONF un diagnostic sanitaire sur l'état des arbres et ils ont fait un travail tout à fait remarquable.
Pour toutes les raisons excellemment exposées par notre collègue Giscard d'Estaing, la commission des finances a adopté ces deux amendements. L'avis est très favorable.
Madame la ministre, il ne semble pas que vous ayez répondu à ma question sur la pérennité de la contribution de 2 euros sur la durée du contrat entre l'ONF et l'État.
Madame la ministre, si vous aviez créé une taxe de 2 euros l'hectare tout en baissant de 12 % à 10 % le taux actuel, cela aurait été tout à fait cohérent. Le taux de 10 % se rapprocherait du taux du marché. Mais ce n'est pas du tout ce que vous proposez puisque votre dispositif consiste à additionner deux euros à un taux de 10 % !
Je sais que nous ne sommes qu'une petite minorité à être quelque peu forestiers, aussi, pour mes collègues qui ne le sont pas, j'indique que dans l'Est, une forêt bien gérée rapporte environ 100 euros par hectare et par an. Avec ce prélèvement de 2 euros, on va passer d'un taux de 12 % à un taux de 14 %. Certes, je partage votre avis, madame la ministre, quand vous dites qu'une contribution assise sur la superficie, sur l'hectare, est plus juste parce que cela permet une meilleure répartition, mais il faut baisser le taux. Ce n'est pas aux forêts de l'Est de financer les forêts du Sud.
Cela relève d'une politique nationale qui doit être financée directement par le budget de l'État.
Dernier point : je ne veux pas faire du juridisme, mais je m'interroge sur la constitutionnalité de ce nouvel impôt qui est en réalité une rémunération de services rendus. Je ne voudrais pas déposer une QPC pour faire sauter le dispositif, mais d'autres que moi pourraient y songer. Il faut être raisonnable ; et quand on s'écarte d'un taux de marché de 5 % à 6 %, c'est-à-dire de ce que demandent les opérateurs privés au titre des frais de garderie, ce n'est pas raisonnable.
Il faut rappeler que cette taxe ne concerne que les communes forestières, pas les personnes privées.
Je crois savoir que la Fédération nationale des communes forestières a fini par accepter le dispositif qui nous est proposé.
Monsieur de Courson, je ne peux pas suivre votre raisonnement lorsque vous dites qu'il n'appartient pas aux communes de l'Est de payer pour les communes du Sud. On finirait comme la Ligue du Nord, demandant la sécession d'une partie de la France au motif qu'elle ne voudrait pas payer pour les autres… Cela n'a pas de sens.
Ce qui compte, c'est de sauver le personnel de l'ONF et de préserver le travail qu'il accomplit. Je rappelle que l'ONF a perdu, au cours des dernières années, 643 emplois. Or il faut bien une politique nationale, et celle-ci va être financée par les communes propriétaires de forêts.
Vous dites que dans le Sud, il n'y a pas de forêt, mais je suis l'élu d'un département, la Dordogne, troisième de France par sa superficie et dont le taux de boisement est de 43 % !
Les Landes sont couvertes de forêts, de même que toutes les communes du Massif central et des Pyrénées. Pour ma part, cela ne me choque pas que les communes forestières du Sud-Ouest, comme celles de l'Est, paient la même taxe qui ira dans un pot commun destiné à financer une vraie politique forestière dans ce pays.
En réponse à ce débat qui se noue, je voudrais apporter quelques précisions. D'abord, à Louis Cosyns, en m'excusant de ne pas avoir répondu à sa question : oui, bien sûr, les 2 euros par hectare se comptent sur la durée du contrat d'objectifs et de moyens de l'ONF.
À M. Germinal Peiro, je signale que si 5 millions d'euros de profits sont escomptés de la nouvelle taxe de garderie, 46 millions d'euros viendront d'un effort supplémentaire de l'État et seront inscrits au budget pour 2012. Les communes ne se substituent pas à l'État, je le répète parce que je ne veux pas qu'on le dise.
Non, mais je le reprécise pour que les termes du débat soient bien clairs. C'est sans doute pour cela aussi que la Fédération nationale des communes forestières a donné un avis favorable : les efforts en direction de la filière bois sont très importants et équitablement répartis.
L'argumentation de Charles de Courson me conduit à faire une autre remarque importante : le contrat d'objectifs et de moyens de l'ONF vise évidemment à mobiliser bien davantage la ressource bois des communes forestières, permettant ainsi à ces dernières d'exploiter beaucoup plus leur bois. Il me semble que l'objectif est d'exploiter 20 millions de mètres cubes de bois supplémentaires…
Pardon ? Non, c'est bien 20 millions de mètres cubes supplémentaires d'ici à 2020.
Dans ce cas, cela ne ferait que 2 millions de mètres cubes. Il y a un problème dans vos calculs. La direction du budget est toujours très ambitieuse pour les filières industrielles.
En tout cas, l'objectif est de mobiliser davantage les ressources en bois des communes et donc de leur faire gagner de l'argent in fine.
(L'amendement n° 7 est adopté.)
(L'amendement n° 8 est adopté.)
(L'article 48, amendé, est adopté.)
Je suis saisie d'amendements portant articles additionnels après l'article 48.
Les amendements nos 21 rectifié , 271 et 72 sont identiques.
La parole est à M. Charles de Courson, pour présenter l'amendement n° 21 rectifié .
Mes chers collègues, nous avons voté la recette en première partie. Mme la ministre a ouvert les 210 millions d'euros dans un amendement qu'une majorité d'entre nous a adopté. Nous en arrivons au coeur du dispositif : l'abaissement des charges sociales patronales sur les contrats à durée indéterminée de tous les salariés relevant du régime agricole, dans la limite de vingt salariés par entreprise.
Germinal Peiro a soulevé plusieurs objections. En premier lieu, il a argué que cette mesure était euro-incompatible, en s'appuyant sur des déclarations de notre ex-collègue, le ministre Bruno Le Maire, mais en oubliant de les resituer dans leur cadre : le ministre avait tenu ces propos lors de l'examen de la proposition de loi du Nouveau Centre. Or ce que nous proposons – et notre collègue Reynès pourrait en parler aussi longtemps que moi – a considérablement changé, tant du côté des recettes que du côté des dépenses.
Côté dépenses, cette mesure est désormais générale alors que, dans notre proposition de loi, elle ne concernait que la production, c'est-à-dire les exploitations agricoles. La direction générale de l'agriculture nous avait alors expliqué qu'une telle mesure était euro-incompatible, mais qu'elle ne le serait probablement plus si elle était élargie à la totalité des CDI relevant du régime agricole.
Nous avons alors dit : attention, nous n'allons quand même pas subventionner le Crédit Agricole et Groupama !
Nous avons alors demandé : peut-on plafonner le montant ? Il nous a été répondu par l'affirmative. Nous avions d'ailleurs eu deux idées : soit limiter la mesure aux PME, au sens communautaire, ce que la commission a déclaré tout à fait euro-compatible ; soit la solution du plafond de vingt salariés, celle que nous avons en définitive adoptée.
Par conséquent, l'agence du Crédit Agricole n'en bénéficiera pas. Voilà la réponse que j'apporte à votre première objection.
Deuxième argument soulevé par Germinal Peiro : c'est une mesure anti-sociale, une trappe à bas salaires. Pas du tout ! D'abord, c'est une mesure anti-précarisation de la main-d'oeuvre agricole. Quand nous avons adopté une disposition sur le travail occasionnel, de nombreux employeurs ont substitué du travail occasionnel à du travail permanent.
Cette mesure que nous proposons permettrait de rétablir l'équilibre entre le travail occasionnel et le travail permanent. C'est une mesure anti-précarisation.
Dernier élément sur cette trappe à bas salaires, selon vous. L'exonération sera maximale pour une rémunération annuelle inférieure ou égale à 1,1 SMIC. Si vous voulez améliorer le dispositif pour aller jusqu'à 1,2 SMIC, je suis tout à fait ouvert, de même que mon collègue Reynès, je crois.
C'est une très bonne mesure. Dans la vie, mes chers collègues, rien n'est parfait. Que proposez-vous ? La grande Europe sociale, beaucoup en rêvent, y compris nous, les centristes. Cela étant, nous n'avons aucune illusion sur l'attitude de nos collègues britanniques, y compris les travaillistes, et nous sommes vingt-sept ! En attendant, il faut trouver des solutions. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Francis Saint-Léger, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour défendre l'amendement n° 271 .
Ce dispositif d'exonération de charges sociales a suscité beaucoup de discussions. Comme tout a été dit, je ne vais pas en rajouter. Je soulignerai simplement que cette mesure est extrêmement importante, qu'elle représente une avancée. Comme Germinal Peiro l'a dit tout à l'heure, c'est un gain, une mesure extrêmement concrète pour l'agriculture. La commission des affaires économiques y est donc très favorable.
Pour ne pas relancer la discussion passionnante que nous avons eue, je me focaliserai sur l'emploi, à l'instar de Charles de Courson.
Alors que l'emploi était stable dans l'agriculture jusqu'en 2004, il baisse désormais de 2,4 % par an. L'évolution est également qualitative et c'est le coeur du problème : la part des CDI dans les nouvelles embauches n'y est que de 4 %, contre 20 % dans les autres secteurs. Nous constatons donc bien une précarisation de l'emploi pour une raison évidente : les agriculteurs n'ont plus de trésorerie au point que l'emploi reste la seule variable d'ajustement.
Le dispositif consiste en des exonérations de charges de façon à réduire de 1 euro le coût de l'heure de travail des salariés permanents payés au SMIC ou à 1,1 SMIC. Il devient dégressif entre 1,2 SMIC et 1,4 SMIC.
Certains estiment que c'est insuffisant. Lors de ma mission, j'avais proposé un effet plateau jusqu'à 1,3 SMIC et une dégressivité jusqu'à 1,6 SMIC, mais cela coûtait 370 millions d'euros. Tel qu'il est présenté, le dispositif coûte 210 millions d'euros et il y aura en plus 25 millions d'euros dans les caisses de l'État.
L'exonération porte sur les cotisations légales et conventionnelles patronales. Je souligne que nous avons sorti les accidents du travail et les maladies professionnelles de ce dispositif qui sera géré par la Mutualité sociale agricole pour le compte de l'État.
Je voudrais exprimer ma reconnaissance à Charles de Courson et Jean Dionis du Séjour. J'ai fait une mission, nous avons ensuite travaillé ensemble à partir de votre proposition de loi. Cela a été un vrai travail collégial de tous les députés. Une fois n'est pas coutume, nous avons pu aller jusqu'au bout, pas aussi loin que nous aurions souhaité aller, mais nous répondons à une demande très claire du monde agricole avec cette baisse de 1 euro des charges. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
L'amendement n° 21 rectifié émanant de la commission des finances, je lui donne un avis favorable, tout comme aux deux autres qui sont identiques.
Favorable, bien évidemment.
Je ne vais pas relancer le débat, mais rétablir deux ou trois échelles de valeurs. D'abord, l'écart de salaire en question est plutôt de 10 euros, et la mesure va compenser moins de 1 euro. Ne disons pas aux entreprises agricoles que l'on va régler leur problème avec ça.
Mais si ! Dans des abattoirs allemands, on travaille pour 4 ou 5 euros malheureusement, alors que le coût du salaire chargé se situe aux alentours de 13 ou 14 euros chez nous. Faites le calcul ! Tout le monde le sait.
Il y a, bien entendu, un problème de moyens budgétaires – d'autres orateurs l'on dit, je n'y reviendrai pas –, mais peut-être que, dans l'urgence, vous ne recherchez pas la meilleure solution.
Ensuite, il faut distinguer saisonniers et permanents, et certains collègues, comme Charles de Courson, l'ont fait. Le problème des saisonniers a été réglé ; il reste, dites-vous, celui des permanents. Il y aurait des gens assez tordus – et je veux bien le croire – pour substituer des permanents par des précaires. Faut-il leur donner raison ou faut-il resserrer la réglementation parce que les saisonniers repris en permanence peuvent devenir des permanents ? Il faut savoir comment cela se passe.
Pour autant, un autre problème se pose. Je ne suis pas d'accord avec Charles de Courson quand il conteste l'effet trappe à bas salaires. Monsieur de Courson, nous avons aussi des employeurs agricoles dans notre région. Avec Corinne Erhel, j'ai rencontré les légumiers de la zone de Paimpol, il y a dix jours. Voilà ce qu'ils nous ont dit : « Cette mesure ne va pas nous concerner parce que nous avons des salariés qualifiés depuis longtemps et nous les payons au-dessus de ce niveau. » Il y a donc bien un encouragement à verser des salaires plus bas pour bénéficier de la mesure.
Je vais le faire, madame la présidente.
En réalité, une question se pose : quid de l'Europe sociale ? Quelles relations avez-vous avec vos amis allemands puisque c'est en Allemagne que cela se passe ? Pour notre part, nous en avons discuté avec le SPD. Dans la presse, j'ai lu que Mme Merkel y était favorable. Aidez-la !
Quand vous rencontrez vos collègues CDU là-bas, dites leur que c'est de cette manière que nous réglerons le problème, pas en réduisant l'écart de 10 %.
Monsieur Gaubert, en présentant cette mesure, nous avons eu la modestie de ne pas prétendre relancer la compétitivité de l'agriculture, il me semble. Mais 1 euro de baisse, c'est déjà ça.
Vous faites aussi allusion à la nécessité de relancer le chantier de l'harmonisation sociale. Nous partageons votre point de vue mais les agriculteurs seront morts entre-temps. De même, en ce qui concerne le SMIC allemand, la situation est grave et, cela n'a pas été assez dit au cours de ce débat, il sera applicable dès janvier 2012. La piste que vous proposez est intéressante mais le temps joue contre les agriculteurs.
S'agissant de la notion de trappe à bas salaires, monsieur Gaubert, vous avez sous-estimé un point : il y a très peu d'embauche en CDI dans le monde agricole : 4 %. Si la Bretagne pratique des salaires très intéressants, tant mieux, mais dans le secteur des fruits et légumes en général, les agriculteurs n'embauchent pas. En outre, le secteur ne compte que 4 % de CDI contre 20 % dans les autres secteurs de l'économie.
Répétons-le, cette mesure pragmatique répond à une situation d'urgence. Nous ne prétendons pas qu'elle va, à elle seule, relancer la compétitivité de l'agriculture française. N'y mettez pas ce que nous n'y mettons pas.
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour trente secondes, et nous passons au vote.
L'emploi permanent est déterminant pour la qualification des salariés et la productivité des exploitations agricoles. C'est là qu'est le savoir-faire.
Ensuite, il est déterminant pour la transmission des entreprises agricoles. Certains agriculteurs qui n'ont pas d'enfants pour reprendre l'exploitation la donnent au salarié permanent.
L'enjeu est très important. Vous ne pouvez pas faire fi du basculement d'emplois permanents vers des emplois occasionnels qui se produit si l'exonération de charges ne porte que sur les emplois occasionnels.
Vous ne pouvez pas rester au milieu du gué. Sur le fond, vous renvoyez à un enjeu européen, mais vous savez très bien que la transformation du financement du système de sécurité sociale est d'abord un enjeu national. On n'a pas le droit de faire l'impasse sur ce sujet.
(Les amendements identiques nos 21 rectifié , 271 et 72 sont adoptés.)
Cet amendement vise à fixer à 1,5 % l'augmentation du produit de la taxe additionnelle au foncier non bâti affecté aux chambres de l'agriculture. Cette augmentation, après celle de 1,8 % intervenue en 2011, financera, à hauteur des deux tiers, la réduction des écarts de ressources fiscales entre les différents départements et, à hauteur d'un tiers, le financement lissé sur plusieurs années de l'organisation des élections des chambres d'agriculture.
Remercions le Gouvernement pour son geste en faveur des chambres d'agriculture. Avis favorable, l'amendement ayant été adopté en commission des finances.
(L'amendement n° 6 est adopté.)
Une précision : le ministre de l'agriculture confirme le chiffre de 20 millions de mètres cubes supplémentaires sur dix ans pour l'exploitation forestière.
Je mets aux voix les crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » inscrits à l'état D.
(Les crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » sont adoptés.)
Nous avons terminé l'examen des crédits relatifs à l'agriculture, à la pêche, à l'alimentation, à la forêt et aux affaires rurales.
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à l'immigration, à l'asile et à l'intégration (n° 3805, annexe 27, n° 3808, tome VII, n° 3810, tome III).
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, notre politique en matière d'immigration, d'intégration et d'asile repose sur trois piliers.
Le premier, c'est d'honorer ce principe fondamental qui veut que notre République accueille sur son sol tous ceux qui, dans leur pays d'origine, sont victimes de violences et de persécution .
Le second, c'est de faciliter l'intégration des hommes et des femmes qui entrent légalement sur notre territoire.
Le troisième, c'est de lutter contre l'immigration illégale, qui fait prospérer les réseaux criminels et empêche la France de proportionner les flux migratoires aux capacités d'accueil de notre pays.
Ces trois piliers sont inséparables, parce qu'il n'y a pas d'intégration possible quand l'immigration clandestine laisse penser qu'il vaut mieux s'affranchir des lois et des règles, parce que le droit d'asile lui-même est menacé lorsque des réseaux emploient leur énergie à l'exploiter, parce qu'il n'y a plus de politique d'immigration quand l'immigration échappe aux responsables politiques.
La mission « Immigration, asile et intégration » forme donc un triptyque cohérent, dont les moyens sont globalement renforcés en 2012. Son budget total s'établira à 632 millions d'euros, avec des crédits de paiement en hausse de 70 millions par rapport à 2011, soit une progression de 13 %.
Les moyens de notre politique d'immigration et d'intégration augmentent donc nettement : il s'agit là d'une priorité forte du Gouvernement. Au travers de cette mission régalienne, ce sont, en effet, la cohésion sociale et la force du pacte républicain qui se jouent. Aussi avons-nous choisi d'y consacrer 80 millions d'euros de plus que ne le prévoyait initialement la loi de programmation des finances publiques. Pour cette même raison, la mission a été exclue du champ du milliard d'euros d'économies supplémentaires que nous avons réparti ensemble.
L'augmentation des moyens de la mission doit nous permettre de faire face à la hausse des demandes d'asile. Celles-ci ont augmenté de 14 % sur les neuf premiers mois de l'année. Nous débloquons donc des moyens supplémentaires qui permettront d'accueillir dans des conditions satisfaisantes les hommes et les femmes qui demandent asile : ces crédits financeront ainsi l'hébergement d'urgence et le versement de l'allocation temporaire d'attente des demandeurs d'asile.
Les accueillir dans des conditions satisfaisantes, c'est également se donner les moyens d'instruire rapidement leurs demandes. C'est la moindre des choses et c'est indispensable si nous voulons lutter contre l'instrumentalisation de cette procédure, qui, je le dis clairement, est inacceptable.
L'augmentation des moyens de cette mission permettra donc un recrutement complémentaire de soixante agents pour l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA, et la Cour nationale du droit d'asile, la CNDA. Les emplois correspondants seront inscrits au PLF par voie d'amendement.
Grâce à ces moyens supplémentaires, le délai de traitement des demandes par l'OFPRA et par la CNDA passera ainsi de près de deux ans à moins d'un an dès 2012. Un effort de rationalisation des coûts de gestion des centres d'accueil des demandeurs d'asile sera également fait, grâce à la mise en oeuvre d'un dispositif de contractualisation avec l'État.
En parallèle, nous poursuivrons notre politique résolue de lutte contre l'immigration clandestine. Notre objectif est simple : maîtriser nos flux migratoires pour favoriser l'intégration des hommes et des femmes entrés sur notre territoire en situation légale. Cela veut dire redoubler de fermeté envers les réseaux qui organisent l'immigration clandestine. Et cela veut aussi dire proportionner l'immigration légale à nos capacités d'accueil. La promesse et le devoir républicain d'intégration, nous devons nous y montrer fidèles : cela exige que nous nous en donnions les moyens.
Le souci de sécuriser les différentes procédures est également au coeur de notre politique. Ce budget en témoigne, en poursuivant l'effort d'équipement des consulats pour la délivrance de visas biométriques. Il prévoit également de mettre en place 150 bornes de contrôle de ces visas biométriques sur le territoire français.
Enfin, ce projet de loi de finances verra notre effort de rénovation des centres de rétention administrative arriver à son terme. Nous avons le souci de respecter la dignité des personnes. Cet objectif, nous devons l'atteindre tout en maîtrisant nos dépenses. Aussi allons-nous rationaliser la gestion de ces centres afin d'en réduire les coûts de fonctionnement et économiser sur les dépenses de transports en recourant à la vidéoconférence et en créant des salles d'audience délocalisées.
Troisième pilier de notre politique : une action volontariste au service de l'intégration. Pour la faciliter, nous poursuivrons les efforts que nous avons d'ores et déjà engagés. Les crédits du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » seront reconduits en 2012 à leur niveau de 2011 et s'établiront, par conséquent, à 71,6 millions d'euros. Ils sont complétés, s'agissant de l'accueil des primo arrivants et de la formation linguistique, par les moyens dont bénéficie l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Le budget de l'OFII sera lui-même en hausse de 10 millions d'euros grâce à la réforme des taxes perçues. Cette augmentation permettra de renforcer les moyens consacrés à la formation linguistique des primo arrivants dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration, un contrat qui, vous le savez, réaffirme l'équilibre fondamental des droits et des devoirs qui vaut pour toute personne résidant sur le territoire national.
Je l'évoquais à l'instant, la maîtrise de la langue française est au coeur de notre politique active d'intégration, parce qu'elle est la condition sine qua non de toute participation à la vie sociale. C'est pourquoi nous avons souhaité que les différents niveaux du parcours d'intégration linguistique, auquel l'OFII consacre 60 millions d'euros, soient désormais mieux formalisés. Très concrètement, à compter du 1er janvier 2012, le niveau nécessaire pour l'accès à la nationalité française sera celui de la scolarité obligatoire.
Voilà, mesdames et messieurs les députés, les principaux points sur lesquels je voulais revenir devant vous, sachant que Claude Guéant a déjà eu l'occasion de vous présenter en détail ce budget le mardi 25 octobre.
Nous allons à présent entendre les porte-parole des groupes. Je rappelle que le temps de parole est de cinq minutes pour chacun.
La parole est à M. Jean-Claude Guibal, pour le groupe UMP.
Lors de l'examen du budget de cette mission en commission élargie, M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, a apporté des réponses précises et complètes aux nombreuses questions qui lui ont été posées sur l'adéquation des moyens et des budgets affectés à cette mission au regard des objectifs ambitieux qui lui sont assignés.
Les dotations de cette mission sont en augmentation de 12 % par rapport à 2011 pour atteindre 632 millions d'euros, ce qui atteste de la priorité qui lui est accordée dans un contexte budgétaire contraint.
Ainsi, pour 2012, le Gouvernement propose de prolonger l'effort budgétaire consenti à l'OFPRA de manière à ce qu'il puisse, par des recrutements supplémentaires, réduire les délais de traitement des demandes d'asiles. La forte augmentation – près de 50 % – des demandes d'asile entre 2008 et 2010 a accru le stock de dossiers à traiter et les délais pour le faire, entraînant le maintien des demandes d'asile à un niveau élevé.
Or, comme le faisait remarquer Claude Guéant, les demandeurs d'asile s'adressent de préférence aux pays dont les délais d'instruction sont les plus longs, ce qui leur laisse le temps de s'installer, rendant ainsi plus difficile, en cas de refus, leur reconduite à la frontière.
J'ai également retenu de l'intervention du ministre de l'intérieur en commission élargie que si les efforts engagés pour maîtriser les demandes d'asile ne se révélaient pas suffisamment efficaces, ce serait le droit d'asile lui-même qui pourrait être remis en cause ou qui appellerait, à tout le moins, une harmonisation au niveau européen des règles qui le régissent. Nous sommes trop attachés à la tradition d'accueil dont s'honore la France pour accepter que le droit d'asile, s'il était trop fréquemment détourné, rajoute une modalité d'immigration supplémentaire aux déjà trop nombreux canaux d'immigration.
Notre pays accueille, chaque année, 300 000 à 400 000 nouveaux arrivants, 200 000 environ de manière légale et près de 150 000 de façon illégale. C'est beaucoup et même probablement trop. Pour ce qui est de l'immigration légale, nous sommes sensibles aux efforts consentis pour que les différentes procédures de regroupement familial n'aboutissent pas à une augmentation constante du nombre d'inactifs qui s'installent durablement sur notre territoire. Quant à l'immigration illégale nous apprécions que les crédits budgétaires qui y sont affectés permettent de déployer le visa biométrique, d'atteindre le chiffre jusqu'à présent inégalé de 300 000 reconduites dans leur pays d'origine d'étrangers en situation irrégulière…
…et enfin de lutter avec détermination contre les filières d'immigration clandestine.
Madame la ministre, dans un monde où tout concourt à susciter des mouvements de populations, notre démographie est suffisamment dynamique et notre taux de chômage trop élevé pour que nous ne fassions pas de la maîtrise de l'immigration l'un des objectifs principaux de notre action. Nous sommes reconnaissants au Gouvernement non seulement de le faire, mais aussi de le dire.
Nous le remercions également pour l'attention qu'il porte à la maîtrise de la langue française de la part de ceux qui s'installent dans notre pays et a fortiori de ceux qui envisagent d'en acquérir la nationalité. La maîtrise de notre langue nous semble, en effet, une condition essentielle à une intégration réussie. Les 71,6 millions d'euros du programme « Intégration et accès à la nationalité française » ne sont pas excessifs, même si désormais les nouveaux postulants devront avoir atteint un niveau de français comparable à celui d'un collégien en fin de scolarité.
Par ailleurs, madame la ministre, nous partageons la conviction du Gouvernement, exprimée par votre collègue Claude Guéant, que notre langue doit être apprise dès le plus jeune âge. Il ne s'agit pas seulement d'assumer une intégration, et pourquoi pas une assimilation, réussies. Il s'agit aussi de défendre des valeurs républicaines qui ne sont pas celles du communautarisme, de préserver une identité et de renforcer la cohésion sociale.
À ce sujet, il me revient comme en écho des temps heureux où s'enseignaient les Humanités, une interjection toujours valable : « À Rome, vis comme les Romains ».
Les députés du groupe de UMP voteront en confiance et avec détermination le budget de la mission « Immigration, asile et intégration ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, madame la ministre, à travers la mission « Immigration, asile et intégration », nous n'examinons que moins de 15 % des crédits de la politique transversale en matière migratoire. C'est dommage pour le dernier PLF de la législature, qui aurait dû être l'occasion de faire le bilan de votre politique, mais c'est suffisant pour pointer les incohérences, les impasses, et les échecs de votre politique.
Quels en étaient le fondement, les objectifs et les slogans ?
Le fondement, c'était l'immigration choisie, et les objectifs en étaient clairs et quantifiés. La lettre de mission adressée le 9 juillet 2007 par le Président de la République au ministre de l'immigration précisait ainsi : « Vous viserez l'objectif que l'immigration économique représente 50 % du flux total des entrées à fin d'installation durable en France ».
Nous avons toujours récusé la distinction artificielle établie entre immigration de travail et immigration familiale, comme nous vous avons toujours signalé que cet objectif de 50 % d'immigration de travail était illusoire. Aujourd'hui, les faits sont là : vous n'avez jamais atteint cet objectif. Vous ne l'avez même pas approché, même en intégrant dans les chiffres d'entrées en France les régularisations pour motif professionnel de personnes présentes sur le territoire depuis de nombreuses années.
La lettre de mission indiquait comme autre objectif : « Nous voulons également que la France devienne un pays qui attire les meilleurs étudiants du monde entier ». Quelle est la situation ?
La France avait déjà été rétrogradée dans le classement des pays d'accueil d'étudiants étrangers, passant du troisième rang derrière les États-Unis et le Royaume-Uni au quatrième. La circulaire émise par Claude Guéant, le 31 mai dernier, qui durcit les conditions d'insertion professionnelle d'étudiants formés dans les meilleurs établissements du pays – la nouvelle s'est répandue immédiatement, et elle a même fait l'objet d'un article dans le New York Times –, va accentuer ce déclin. Alors même que, dans le projet de loi de finances pour 2012, 2 milliards sont consacrés à l'accueil et à la formation des étudiants étrangers, cette circulaire rend cet investissement par avance inefficace.
Ainsi, non seulement M. Guéant prive la France d'un retour sur investissement en profitant des compétences et de l'énergie de jeunes diplômés formés par la France, mais il adresse, en outre, aux élites des migrations internationales un signal désastreux. Par votre faute, la France vient encore de perdre des points dans la compétition internationale.
Voilà pour les objectifs initiaux et les résultats qui sont les vôtres. Passons aux slogans. Vous venez, madame la ministre, de les répéter : il s'agit d'être ferme pour être généreux et de lutter contre l'immigration clandestine pour mieux intégrer les migrants légaux.
Généreux, le Gouvernement l'a incontestablement été avec les prestataires qui construisent et gèrent les centres de rétention administrative. Ils sont incontestablement les grands bénéficiaires de votre politique : il y avait 773 places dans ces centres en 2003, il y en aura 2 063 en 2012.
Généreux, il l'a aussi été dans l'utilisation des forces de police et de gendarmerie, toujours moins nombreuses, pour des missions très éloignées de la lutte contre la criminalité.
Généreux, il l'est beaucoup moins avec l'affichage sincère du coût, systématiquement minoré, de cette politique d'enfermement et de quotas d'expulsion. Vous nous présentez un coût moyen de 1 300 euros par éloignement, alors que l'inspection générale de l'administration, qui dépend pourtant du ministre de l'intérieur, l'estime à dix fois plus – voire à quinze fois plus selon la commission des finances du Sénat. Le ministre refuse d'ailleurs de nous communiquer le taux d'exécution des mesures d'éloignement. Alors qu'il était de 62 % en 2002 et qu'il s'était effondré à moins de 20 % voilà quelques années, qu'en est-il aujourd'hui ?
Généreux, vous ne l'êtes pas du tout avec les demandeurs d'asile et les réfugiés.
S'agissant des demandeurs d'asile, l'objectif initial d'hébergement de 90 % d'entre eux en centres d'accueil pour demandeurs d'asile a été révisé à la baisse chaque année pour n'atteindre que 35 % en 2012. Le financement des places a, quant à lui, baissé, ce qui entraînera la suppression de 400 emplois d'accompagnement, soit près de 20 % des effectifs.
Quant aux réfugiés, les crédits aux centres provisoires d'hébergement et aux actions d'aide et de secours sont, eux aussi, en baisse. Voilà pour la générosité.
S'agissant de l'intégration, de deux choses l'une : soit vous considérez que c'est un sujet important qui mérite des moyens, et il faudra alors que vous nous expliquiez pourquoi, en quatre ans, la moitié des crédits de paiement du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » a disparu ;...
..soit vous estimez que tout fonctionne très bien et que le modèle d'intégration français est une réussite. Mais alors il faut cesser d'en dénoncer l'échec tous les quatre matins avec des déclarations qui blessent tout le monde – sauf Mme Le Pen qui a décerné à M. Guéant un titre de membre d'honneur du FN !
En tout état de cause, mes chers collègues, aucun véritable contrôle de la représentation nationale ne peut s'effectuer sur l'OFII, comme l'a souligné pudiquement Mme Pavy dans son rapport : « Les indicateurs présentés dans les documents budgétaires pour définir les objectifs impartis à l'OFII et retracer les résultats de son activité sont extrêmement limités ».
Pour toutes ces raisons et pour bien d'autres, le groupe SRC votera contre ce budget. À cet égard, qu'il me soit permis de m'adresser solennellement aux députés de la majorité.
Parce que les résultats ne sont pas là, que les engagements sont restés lettre morte, que l'opacité règne et que les droits reculent de jour en jour, de lois en décrets et en circulaires, la France s'abîme. Chers collègues, vous non plus, ne votez pas ce budget ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en commission élargie, le budget de la mission « Immigration, asile et intégration » pour 2012 a été présenté comme celui détenant le taux de progression le plus élevé de toutes les missions. Aussi, de nombreux collègues se sont-ils réjouis de cette augmentation de 12 % alors que le contexte budgétaire est très tendu. À y regarder de plus près, il n'y a pas de quoi se réjouir de cette prétendue augmentation.
En effet, si l'action 2 du programme 303 – point sur lequel je centrerai mon propos – se voit attribuer une augmentation de 27 %, force est de constater qu'il ne s'agit que d'un effet d'annonce qui ne va nullement permettre de traiter correctement les problèmes spécifiques à l'asile.
Au vu des 285,6 millions d'euros votés en 2010 et des 410 millions d'euros de crédits consommés, les 80 millions d'euros en plus pour 2012 sont largement insuffisants. Ils ne concernent que les prévisions budgétaires et non les crédits qui devraient être consacrés à l'accueil des demandeurs d'asile. Faites le calcul : en 2010, il a manqué 124,6 millions d'euros !
Ce résultat a pour conséquence – les associations ne cessent d'alerter les pouvoirs publics – que les demandeurs d'asile, à cause d'un budget sous-doté de manière chronique, se retrouvent de plus en plus à la rue, où ils vont rejoindre les trop nombreuses personnes qui y vivent.
En réalité, le ministre de l'intérieur se contente de procéder à une réduction des délais et des coûts, ce qui pénalise les demandeurs d'asile qui ne peuvent bénéficier des conditions d'accueil auxquelles ils ont droit.
La politique d'accueil des demandeurs d'asile est en crise depuis plusieurs années. En 2010 comme en 2009, moins d'un demandeur d'asile sur trois a pu bénéficier d'une prise en charge en centre d'accueil pour demandeurs d'asile. Pourquoi le ministère, qui admet que le CADA est le dispositif le plus adapté aux personnes en quête de protection, entérine-t-il une baisse réelle du budget – de près de 5 millions d'euros – consacré aux CADA ?
Le secteur de l'emploi est également touché. En effet, avec le nouveau taux d'encadrement, ce sont 500 à 700 équivalents temps plein qui seront supprimés, soit près de 20 % des effectifs. Dans un contexte de hausse continue de la demande d'asile, et comparés aux 410 millions d'euros qui ont été nécessaires en 2010, les 376 millions d'euros prévus pour 2012 apparaissent bien insuffisants.
Une fois encore, la part consacrée à l'asile dans le budget pour 2012 obéit à un choix politique clair : celui de privilégier les mesures d'urgence, pourtant plus onéreuses et moins protectrices, au détriment de dispositifs pérennes et d'une bonne gestion des deniers publics. Voilà comment le Gouvernement agit pour « tenir compte du niveau élevé des besoins d'hébergement des demandeurs d'asile » !
À ces restrictions budgétaires, il faut aussi noter que, pour diminuer le nombre des demandes d'asile, la tentation est grande de dissuader les étrangers d'en déposer une. Ainsi, le parcours est-il de plus en plus difficile et compliqué. En amont de l'OFPRA et de la CNDA, les préfets jouent maintenant un rôle essentiel : ce n'est qu'après que les demandeurs se seront obligatoirement rendus auprès des préfectures pour faire enregistrer leur demande qu'ils pourront accéder à l'OFPRA et bénéficier d'un accueil en CADA et de l'allocation temporaire d'attente.
À cela s'ajoute parfois l'utilisation de procédures d'asile dérogatoires telles que la procédure dite de Dublin, ainsi que l'utilisation de la liste des pays d'origine sûrs, auxquels ont été ajoutés l'Albanie et le Kosovo. On peut d'ailleurs se demander pourquoi ces deux pays sont devenus « sûrs ». Il ne se passe pas une semaine sans que l'on soit saisi d'une demande d'intervention pour des familles qui ont fui le Kosovo parce qu'elles étaient victimes de discriminations et de violences en raison de leur religion ! Fuyant l'horreur, elles pensaient ici trouver un peu de paix et élever leurs enfants sereinement. C'était sans tenir compte des politiques du chiffre chères à ce gouvernement, qui est même prêt à expulser une famille en oubliant deux jeunes enfants absents au moment où leurs parents ont été arrêtés avec leur plus jeune frère !
Ce budget a pour conséquence de laisser de plus en plus de demandeurs d'asile sans accès effectif à des conditions d'accueil décentes et à une procédure équitable. Quand le Gouvernement changera-t-il de politique et acceptera-t-il la procédure unique d'asile, garantissant le droit au séjour, à un recours effectif et à des conditions d'accueil décentes de façon que le système d'asile dans notre pays soit conforme aux engagements internationaux de la France ?
Si le budget témoigne d'un effort de transparence, cela ne signifie pas pour autant une hausse réelle des crédits consacrés à l'asile et ne peut cacher une réalité préoccupante pour les demandeurs d'asile et pour les associations qui travaillent à leurs côtés.
Pour l'ensemble des points évoqués, le groupe GDR ne peut voter pour un tel budget, qui n'est pas la hauteur des besoins des demandeurs d'asile.
Merci, monsieur Candelier : vous êtes un exemple en matière de respect du temps de parole !
La parole est à M. Michel Hunault.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » est pour le groupe Nouveau Centre, dont je suis le porte-parole ce matin, l'occasion de rappeler les exigences qui accompagnent, depuis le début de cette législature, son soutien à la politique gouvernementale en matière d'immigration, d'asile et d'intégration.
Au premier rang de ces exigences, figurent l'accueil et l'intégration des étrangers en situation régulière au sein de la communauté nationale : il est indispensable, en effet, que la France demeure, en accord avec ses traditions et son histoire, une terre d'accueil.
Ceux d'entre vous, mes chers collègues, qui ont participé dans les préfectures à des cérémonies d'accueil dans la citoyenneté française ont pu mesurer le chemin parcouru par ces milliers d'hommes et de femmes d'origine étrangère qui, à la suite de longues procédures administratives, ont finalement obtenu la citoyenneté française. Leur volonté d'intégration n'a d'égal que l'esprit d'ouverture et d'accueil qui a toujours prévalu au sein de la République française.
Concrètement, la France reste, avec plus de 55 000 demandes en 2010, le second pays d'accueil des demandeurs d'asile dans le monde, derrière les États-Unis – il n'est pas, je crois, inutile de le rappeler. Elle est ainsi, en dépit des caricatures que d'aucuns véhiculent à l'envi, l'une des nations les plus ouvertes en matière d'accueil des réfugiés.
La politique d'immigration demeure l'une des priorités du Gouvernement puisqu'en dépit du contexte budgétaire difficile dans lequel la mission s'inscrit, les montants demandés pour 2012 connaissent une revalorisation substantielle : plus de 12 % par rapport à 2011.
Néanmoins, ainsi que j'ai eu l'occasion de le souligner en commission à M. le ministre de l'intérieur – qui me paraissait plus intéressé par mes propos que vous ne semblez l'être ce matin, madame la ministre –,...
..cette politique d'immigration ne sera réellement efficace que si elle est accompagnée d'une application rigoureuse des objectifs de lutte contre l'immigration clandestine et de maîtrise des flux migratoires, tout en veillant à assurer, en toutes circonstances, la dignité humaine, notamment pour les étrangers en situation d'attente dans des centres de rétention.
Il convient donc de lutter avec fermeté contre le travail clandestin et les filières d'immigration clandestine, qui constituent de véritables réseaux criminels. Comme je l'ai également souligné en commission, il est urgent de renforcer la lutte contre ces filières, sur le plan non seulement national, mais également européen, À ce titre, le Nouveau Centre estime qu'avec le développement des groupes d'intervention régionaux, les GIR, l'action de la police et de la gendarmerie pourrait se concentrer sur la surveillance des flux financiers qui alimentent les trafics.
Enfin, je ne voudrais pas conclure cette intervention sans rappeler la dimension nécessairement européenne de notre politique d'immigration. À ce titre, je souhaite que l'évolution en faveur de la coopération européenne en matière d'immigration, amorcée par l'adoption en 2008 du Pacte européen sur l'immigration et l'asile, se poursuive. En effet, c'est en élevant la politique migratoire au niveau communautaire que nous pourrons renforcer la protection des frontières extérieures et lutter efficacement contre l'immigration clandestine.
Le budget de cette mission s'inscrit dans une volonté de rendre tout à la fois plus lisible et plus rationnelle la politique de la France en matière d'immigration. C'est pourquoi mes collègues du groupe du Nouveau Centre et moi-même apportons notre soutien au Gouvernement.
Pour conclure, je veux rebondir sur les propos de Mme Mazetier concernant les étudiants étrangers. Cette question pose un véritable problème. Pour notre part, nous avons déjà formulé dans l'hémicycle des propositions à ce sujet, auxquelles M. le ministre de l'intérieur s'est montré très attentif. Nous plaidons pour la création d'une sorte d'Erasmus euro-méditerranéen destiné en particulier à favoriser l'insertion dans les universités européennes des étudiants du Maghreb, qui pourront, une fois formés, retourner dans leur pays.
Madame Pécresse, je pense qu'il s'agit, pour vous qui avez été ministre de l'enseignement supérieur et qui avez beaucoup oeuvré pour l'Erasmus européen, d'une piste qui mérite d'être explorée. Cette solution permettrait de donner un titre de séjour momentané à des étudiants étrangers qui, une fois formés, pourraient retourner dans leur pays en leur apportant leur valeur ajoutée.
Voilà, madame la ministre, les grandes lignes du soutien du Nouveau Centre à la politique gouvernementale. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
Je mets aux voix les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » inscrits à l'état B.
(Les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » sont adoptés.)
Nous avons terminé l'examen des crédits relatifs à l'immigration, l'asile et l'intégration.
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à la sécurité (nos 3805, annexe 40, 3809, tome VIII, 3810, tome VIII).
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la présidente, monsieur le rapporteur spécial de la commission des finances, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis de la commission de la défense, mesdames et messieurs les députés, protéger les Français, cette exigence est, pour nous, une priorité absolue. Et dans ce domaine plus que dans tout autre, ce qui compte, derrière les chiffres, ce sont les résultats.
C'est pourquoi notre stratégie est claire : nous rénovons en profondeur l'organisation de nos forces de sécurité, pour que nos policiers et nos gendarmes soient toujours là où les Français en ont besoin quand ils en ont besoin.
Contrairement à l'opposition, nous ne croyons pas à la magie du nombre. Chacun se souvient ici de l'époque de la prétendue police de proximité, qui s'appuyait sur des agents mal équipés, mal préparés, enfermés dans leurs commissariats et submergés de formalités administratives.
Aussi, pour garantir la sécurité des Français, ce qui compte, ce n'est pas de prétendre créer des postes par milliers, mais c'est de porter les réformes qui permettent à nos forces d'être là où se conduit le combat quotidien contre la délinquance : sur le terrain. Ce qui compte, c'est d'investir pour donner les moyens à ces forces d'intervenir rapidement et efficacement. Je le dis très clairement : ce Gouvernement préfère investir dans le matériel et dans l'amélioration des conditions de travail des forces de police et de gendarmerie plutôt que de recruter des agents par brassées sans leur donner les moyens d'agir.
Le budget de la mission « Sécurité » traduit parfaitement cette stratégie tournée vers les résultats, que Claude Guéant a d'ores et déjà eu l'occasion de vous exposer en détail. Permettez-moi de le souligner, elle est exemplaire de la démarche globale du Gouvernement. Ainsi, si cette année, le budget de l'État baisse pour la première fois de son histoire, c'est grâce aux réformes que nous avons conduites et qui nous permettent de faire mieux en dépensant moins.
En 2012, la mission « Sécurité » bénéficiera de 17,1 milliards d'euros, dont 9,2 milliards pour la police et 7,9 milliards pour la gendarmerie. Ce budget, vous le savez, est à 87 % consacré aux dépenses de personnels de la force publique, qui rassemble près de 240 000 agents.
Si ces crédits sont en légère diminution de 28 millions d'euros par rapport à 2011, ils sont, en revanche, nettement supérieurs aux plafonds prévus par la loi de programmation des finances publiques. Le Gouvernement a, en effet, choisi de renforcer encore sa politique d'équipement et d'investissement en y consacrant 90 millions d'euros supplémentaires. Dans le contexte budgétaire actuel, il s'agit d'un nouveau signe de la priorité que nous accordons à la sécurité.
Pour cette même raison, la mission a été exclue du champ du milliard d'euros d'économies supplémentaires que nous avons réparti ensemble, avec les rapporteurs. Ce choix me paraît d'autant plus légitime que le ministère de l'intérieur est, depuis près de cinq ans, l'un des acteurs les plus décidés de la réforme de l'État. Sa contribution à l'effort de maîtrise des dépenses publiques et à la modernisation de nos politiques est même tout simplement exemplaire.
J'en veux pour preuve la suppression de 3 148 emplois équivalents temps plein en 2012, qui s'accompagne d'un nouvel effort de revalorisation des carrières auquel 103 millions d'euros seront consacrés en 2012, dans la droite ligne des accords et protocoles signés dans la police nationale et adaptés dans la gendarmerie.
Cet effort traduit avant toute chose notre volonté de reconnaître à sa juste valeur le rôle essentiel des forces de l'ordre, police et gendarmerie, et de rendre plus attractifs les métiers et les carrières. Il s'inscrit également dans la ligne du principe fixée par le Président de la République : les gains de productivité dégagés par les réformes doivent bénéficier aux agents de l'État parce qu'ils en sont les premiers acteurs. C'est, en effet, leur engagement qui nous permet de réduire de 1,3 % cette année les effectifs de la mission.
En 2012, nous concentrerons nos efforts sur les fonctions de soutien, afin de préserver les capacités d'action des forces de sécurité. Quant à la réorganisation des forces, elle permettra d'augmenter encore la présence effective sur le terrain.
Nous poursuivrons donc nos réformes qui permettent de recentrer les moyens sur leur mission prioritaire : le maintien de l'ordre.
La reprise par le ministère de la justice de la charge des extractions et transfèrements judiciaires sera ainsi étendue à de nouvelles régions. Elles seront désormais quatre à être concernées par cette expérimentation, à laquelle, vous le savez, les forces de police sont extrêmement attachées.
Par ailleurs, la réforme de la garde à vue suppose que les 600 à 700 sites les plus sollicités soient adaptés : cela sera fait de manière prioritaire.
Enfin, nous poursuivrons notre effort de réorganisation des forces de sécurité avec, en particulier, la mise en place des patrouilleurs. Pour gagner encore en efficacité, les patrouilles seront désormais composées de deux et non plus de trois agents, ce qui permettra d'augmenter la présence des forces de l'ordre dans les lieux et aux heures les plus sensibles. J'ajoute que les policiers affectés à des tâches administratives participeront, eux aussi, aux patrouilles.
De plus, grâce à un dispositif d'optimisation opérationnelle, nous aurons les moyens de mobiliser les effectifs de manière ciblée en fonction des besoins et de l'activité réelle. J'ajoute que le recours aux réservistes, désormais plus important, permet de compléter les effectifs des unités opérationnelles chaque fois que nécessaire.
Cette nouvelle vague de réformes, engagées dès cette année, a déjà permis de redéployer l'équivalent de 3 000 emplois et de réaliser 25 000 patrouilles supplémentaires. La présence policière ne cesse ainsi de s'accroître et je rappelle que la Cour des comptes a elle-même constaté qu'entre 2005 et 2009, la part des policiers présents sur le terrain, dans la rue, avait déjà augmenté de 10 %.
Notre stratégie de sécurité continuera ainsi à gagner en souplesse et en réactivité, car s'il est un domaine où les rigidités administratives ne doivent pas entraver le bon fonctionnement de l'État, c'est bien celui-là. Pour protéger efficacement les Français et faire reculer la délinquance, nos forces de sécurité doivent non seulement pouvoir se concentrer sur le travail de terrain, mais également intervenir avec les moyens nécessaires dès que les circonstances l'exigent.
C'est pourquoi nous renforçons encore notre politique d'investissement pour permettre aux forces d'agir plus efficacement encore grâce aux deux plans exceptionnels qui n'étaient, ni l'un ni l'autre, prévus par le budget triennal.
Le premier permettra de consacrer 100 millions d'euros en 2011 et en 2012 à l'achat de 4 400 véhicules neufs pour la police et la gendarmerie. Le niveau d'équipement de nos forces va donc continuer à s'améliorer. Ce plan s'ajoute aux autres engagements pris dans la LOPPSI 2, qui seront respectés. Je pense à la livraison de 330 lecteurs automatisés de plaques d'immatriculations, de 15 000 tenues de maintien de l'ordre, de 500 caméras embarquées, de 1 500 véhicules radio localisés ou encore de 300 cinémomètres lasers.
Le second plan concerne l'immobilier. Notre objectif est d'en finir avec les principaux points noirs : avec 126 millions d'euros, nous mettrons aux normes, étendrons et construirons près de vingt commissariats supplémentaires et nous allons lancer la rénovation d'une centaine de casernes de gendarmerie. L'année 2012 verra également l'achèvement d'un chantier immobilier majeur, celui du nouveau siège de la gendarmerie nationale à Issy-les-Moulineaux, et le lancement d'un autre, celui de la police judiciaire de Paris aux Batignolles.
À l'issue de ce plan, l'immense majorité de nos agents travaillera dans des conditions satisfaisantes ; c'est une excellente nouvelle. Des forces de l'ordre respectées, ce sont aussi des forces qui peuvent travailler dans des conditions satisfaisantes. Une fois encore, nous ne nous payons pas de mots : la réorganisation de notre politique de sécurité se traduit par des résultats pour les Français comme pour les personnels.
Voilà, mesdames et messieurs les députés, les principaux points sur lesquels je voulais revenir devant vous, sachant que Claude Guéant a déjà eu l'occasion de vous présenter en détail ce budget le mardi 25 octobre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous en venons aux interventions des porte-parole des groupes.
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Madame la présidente, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le groupe SRC n'apportera évidemment pas son soutien à ce budget. Nous avons à cela toutes les raisons du monde mais je vais tenter de les résumer à travers trois domaines.
Une première raison tient à la question des effectifs.
Nous examinons le dernier budget de la législature : c'est l'occasion de jeter un oeil sur les cinq années durant lesquelles vous avez supprimé, année après année, des dizaines de milliers de policiers. Pour 2012 encore, vous supprimez 3 148 policiers et gendarmes. Ainsi, au cours de la législature de 2007, auront disparu de nos rues 12 500 fonctionnaires de police et de gendarmerie, sacrifiés par votre rabot comptable.
Au sein de la police, les gardiens de la paix ont été les plus touchés alors qu'ils sont ceux dont nous avons le plus besoin : 3 117 postes ont disparu.
Madame la ministre, puisque vous répétez régulièrement, à l'instar de M. Guéant, qu'il y a, en dépit de ces coupes drastiques, plus de policiers en 2012 qu'en 2002, je me suis appuyé, pour tirer un bilan de cette période, sur le travail remarquable effectué par le rapporteur Guy Geoffroy, qui publie, chaque année – sauf pour celle-ci, je le note –, un état des effectifs par circonscription de sécurité publique pour la police et pour la gendarmerie. J'ai compilé l'ensemble des informations ainsi fournies.
En 2002, le rapporteur UMP de l'époque, qui n'était pas encore Guy Geoffroy, avait isolé, pour la police, 115 683 personnels administratifs, techniques et policiers, auxquels s'ajoutaient 20 000 adjoints de sécurité plus des personnels de soutien, ce qui faisait un effectif total de 150 832 personnes. En 2012, on comptera 113 047 personnels actifs, 18 874 personnels administratifs et techniques et 11 793 adjoints de sécurité, soit un effectif total de 143 714 personnes. En dix ans, la police nationale a donc perdu 7 118 personnels.
Je peux faire exactement la même démonstration pour la gendarmerie. En 2002, tous corps confondus, il y avait 98 085 personnels. J'englobe toutes les catégories, officiers, sous officiers, personnels civils titulaires et non titulaires. En 2012, ils ne seront plus que 95 883, soit une baisse de 2 202 gendarmes en dix ans.
Au total, les programmes 152 et 176 compteront en 2012, 9 320 personnels de moins qu'en 2002.
Je vous mets au défi de contester ces chiffres, qui figurent dans les rapports budgétaires présentés au nom de la commission des finances et des autres commissions de cette assemblée.
Une deuxième raison nous amène évidemment à voter contre le budget de la mission « Sécurité », comme nous l'avons fait avec constance depuis 2007 : celle des investissements.
Une fois encore, quelle que soit la base de référence, nous constatons un effondrement généralisé. Sur la période 2007-2012, la part d'investissement a chuté de 40 % pour la police et de 75 % pour la gendarmerie.
Madame la ministre, puisque vous venez d'évoquer l'entretien des casernes de gendarmerie qui en ont bien besoin, prenons cet exemple. M. Guéant dit, à qui veut bien l'entendre, qu'il aurait besoin de 250 millions d'euros par an à ce titre. Or, en 2012, vous budgétez moins de 50 millions d'euros.
Un autre exemple illustre cette impéritie : celui des systèmes d'information et de communication. En 2007, police et gendarmerie bénéficiaient d'une enveloppe de 267 millions d'euros pour investir dans ces systèmes indispensables. En 2012, le montant prévu n'est de 33 millions d'euros, ce qui traduit une baisse de 88 % en cinq ans.
Cette dégradation n'est évidemment pas que comptable. Elle aura des conséquences graves et durables sur la performance des services, et c'est bien le plus inquiétant.
Des agents démunis de moyens ne peuvent pas s'engager dans une culture de performance et, surtout, ils finiront par perdre toute implication dans leur travail. Tous ceux qui siègent ce matin dans l'hémicycle fréquentent régulièrement les policiers et les gendarmes : ils savent la hauteur de leur découragement aujourd'hui.
Je veux enfin aborder une troisième question : celle de la police technique et scientifique
Vous en attendez beaucoup, et vous ne cessez de multiplier ses missions. Malheureusement, les crédits de fonctionnement que vous lui affectez sont notoirement insuffisants. Vous réussissez même, cette année, à baisser la subvention de l'Institut national de police scientifique, qui passe de 10,5 millions d'euros en 2009 à 7 millions pour 2012.
Vous n'anticipez aucunement l'avenir, puisque vous sabrez dans les investissements.
Vous savez sans doute que la décision cadre du Conseil de l'Union européenne du 30 novembre 2009 aura des conséquences sur les services de police technique et scientifique. Des processus d'accréditation fort onéreux vont être indispensables pour les laboratoires. Or on ne trouve aucune ligne de crédit visant à mettre en conformité les locaux de police technique et scientifique.
Quant aux effectifs, la décision de créer 83 postes de scientifiques frôle l'indécence. Elle ne compense en aucune façon la suppression de 1 682 ETPT, dont une part était composée de policiers dit « polyvalents » pouvant réaliser des prélèvements.
Bref, par tous ses aspects, votre budget ne dupera que ceux qui veulent bien l'être. Ce n'est pas le cas du groupe SRC. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, nous examinons le dernier budget de la législature consacré à la sécurité. C'est l'occasion de faire le bilan de la politique menée par la droite depuis dix ans.
Les résultats parlent d'eux-mêmes : les « atteintes volontaires à l'intégrité physique » ont augmenté de près de 18 % depuis 2002 et les « violences physiques non crapuleuses » de 28 % depuis 2007. Les cambriolages sur habitations principales ont augmenté de 17,5 % entre octobre 2010 et septembre 2011 par rapport à la période correspondante 2009-2010, selon le dernier bilan de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales.
Le ministre de l'intérieur a annoncé l'affectation de « 4 000 policiers et gendarmes de plus sur le terrain ». Cela ne suffira pas face à la recrudescence des cambriolages depuis 2009, liée à la crise et à l'échec de la politique économique et sociale actuelle.
Le nombre des violences contre les personnes continue d'augmenter, avec une hausse de 1,6 %, selon le dernier bilan mensuel de l'Observatoire. Cette hausse est « composée à 70 % de violences physiques crapuleuses, c'est-à-dire de vols avec violences et d'infractions connexes ». Les viols sur majeurs ont augmenté de 6,9 % sur les douze derniers mois. Toujours selon ce bilan, les escroqueries et les infractions économiques et financières ont augmenté de 6,1 %.
L'État est impuissant à protéger les Français, notamment les plus fragiles.
Les forces de l'ordre accomplissent des missions souvent périlleuses. Constamment mis sous pression, policiers et gendarmes doivent en plus supporter des conditions de travail dégradées. Depuis 2007, la majorité a détruit 10 792 emplois parmi les forces de sécurité. Elle a programmé la disparition de 6 700 postes d'ici à 2013, dont 3 148 pour 2012. D'après les représentants des forces de l'ordre, la RGPP empêche de quadriller convenablement le terrain. Nous devrions stopper la baisse de ces effectifs et recruter.
Par ailleurs, il faudrait revoir de manière drastique la répartition des forces de sécurité sur le territoire : les communes populaires sont aujourd'hui les premières à souffrir de la « rationalisation » des effectifs à l'échelle des départements. Un effort conséquent devrait être opéré pour répondre à leurs besoins.
Autre phénomène particulièrement inquiétant, les forces de l'ordre deviennent des cibles privilégiées. Dans ce climat de défiance, les forces de sécurité doivent conduire leur action dans le cadre d'une déontologie renforcée, fondée sur le respect des personnes. J'ai parfois l'impression que l'on court à la catastrophe quand on les autorise par décret à utiliser des fusils de calibre 7,62 à répétition pour le maintien de l'ordre !
Prévention, dissuasion, sanction : la lutte pour la sécurité ne saurait être efficace sans reposer sur ces trois piliers.
La politique de dissuasion ramenait certainement moins de chiffres, mais établissait un climat de confiance. Il faut donc redonner toute sa place à la police de proximité, gage d'une amélioration du contact avec la population.
L'aide de l'État aux actions de prévention et d'action sociale des collectivités territoriales et des associations devrait doubler, qu'il s'agisse des possibilités de subventions ou du réinvestissement direct de l'État dans les territoires, via les services publics les plus touchés.
L'éducation nationale et la politique de la ville doivent être des priorités.
Quant à la sanction, la France se classe derrière l'Azerbaïdjan en termes de moyens consacrés à la justice ! Nous avons encore du chemin à parcourir !
Sans aucun angélisme, les députés communistes, républicains, citoyens et du Parti de gauche proposent également de coupler lutte contre la délinquance et lutte contre la précarité et la pauvreté.
S'attaquer à 1'insécurité sociale c'est s'attaquer en profondeur à l'insécurité, comme le montrent les études. S'attaquer à l'insécurité, c'est aussi ne pas jeter de l'huile sur le feu, ne pas attiser la suspicion et arrêter de dresser les populations les unes contre les autres.
M. le ministre de l'intérieur, non content d'être le ministre de l'insécurité, est également le ministre de la stigmatisation des Comoriens, des jeunes, des Roumains ou encore des immigrés ! Pourquoi cette attitude peu glorieuse, si ce n'est pour masquer ses résultats désastreux ?
Comment le Gouvernement ose-t-il se gargariser de ses chiffres en trompe-l'oeil alors que les atteintes aux personnes ne cessent de progresser ? Comment ne pas voir dans cette tendance la conséquence des clivages qu'il creuse et l'écho populaire de la violence économique qu'une poignée de nantis inflige au peuple français ?
Les Français ont droit à une autre politique en matière de sécurité. Nous voterons contre ce budget.
Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, mes deux collègues du groupe socialiste et du groupe GDR ont dit que ce dernier budget de la législature était l'occasion de faire un bilan sur la sécurité. Eh bien, ce bilan, faisons-le !
Madame la ministre, le groupe Nouveau Centre a, pendant cinq ans, voté les budgets de la sécurité. Pourquoi ? Le groupe socialiste vient, une nouvelle fois, de nous donner une leçon. Mais, monsieur Urvoas, j'ai sous les yeux un résumé des propositions de la fondation Terra Nova pour « changer la politique de sécurité ». Et l'on dit que ce rapport est issu de vos travaux.
Je note avec étonnement les propositions du parti socialiste en matière de sécurité.
La première, qui va sûrement améliorer la sécurité, consiste à revenir sur la réforme du statut de la gendarmerie et de la police. Comme si c'était une priorité !
Je note également, tenez-vous bien – mais je voudrais aussi que les Français, au-delà de notre hémicycle, nous écoutent – la proposition de « supprimer les peines de prison pour les mineurs, sauf en cas d'atteinte grave aux personnes. » Vous tous qui n'avez pas encore dix-huit ans, vous pouvez commettre des délits, vous ne risquez rien, il n'y aura pas de prison !
Le groupe socialiste n'a voté aucun budget en cinq ans. Plus grave, il s'est opposé à toutes les initiatives que nous avons prises pour améliorer l'efficacité et conforter le rôle de nos policiers et de nos gendarmes – je le dis devant Mme Alliot-Marie, qui s'est beaucoup investie dans ce ministère au début de cette législature. Quelle différence avec ceux qui veulent agir, qui votent les crédits, qui veulent adapter les outils des gendarmes et des policiers pour non seulement les conforter dans leurs missions extrêmement difficiles, mais pour faire en sorte qu'elles restent une priorité de la nation ! C'est pourquoi, madame la ministre, nous vous apporterons notre soutien.
Le ministre Claude Guéant, qui, je crois, est retenu au Sénat, a rappelé devant la commission élargie les priorités du Gouvernement, que le groupe Nouveau Centre partage.
Je voudrais profiter de cette occasion pour rendre hommage aux forces de police et de gendarmerie. Je note avec satisfaction que le ministre a conforté les patrouilleurs. Je crois qu'il est important de rapprocher la police de la population. La police a besoin d'être confortée. Nous avons voté un certain nombre de textes qui renforcent les libertés individuelles, notamment à travers des mesures portant sur la garde à vue. Il faut expliquer aux membres des forces de l'ordre que ces réformes ne sont pas faites contre eux, mais que l'on a besoin d'eux pour assurer la sécurité tout en préservant un certain nombre de libertés.
Madame la ministre, plutôt que de formuler des critiques systématiques, je voudrais vous présenter, au nom du groupe Nouveau Centre, quelques suggestions. Vous êtes chargée du budget. Je voudrais m'inspirer de ce qu'a fait le ministre de la justice pour rénover et accroître les prisons. Il y a un fort besoin d'amélioration des locaux de gendarmerie et des commissariats. Pourquoi ne pas essayer d'évaluer, à titre expérimental, à travers un partenariat public-privé, un certain nombre d'investissements ?
Il serait bon, aussi, qu'un certain nombre de collectivités locales qui sont présidées par nos élus de l'opposition – ceux qui nous donnent des leçons à longueur de journée – et qui perçoivent des loyers, améliorent, elles aussi, les conditions dans lesquelles sont logés les policiers et les gendarmes.
Je voudrais également que l'on puisse accroître la vidéosurveillance. Je l'ai dit au ministre de l'intérieur, je ne comprends pas comment la CNIL, sous prétexte de préserver les libertés individuelles, s'est opposée à la généralisation de la vidéosurveillance autour des établissements scolaires. On sait que ce sont des lieux où il y a des trafics, notamment des trafics de drogue qui touchent les jeunes Français. Il faut adapter les moyens modernes à une criminalité qui évolue.
Enfin, nous avons à améliorer la lutte contre la criminalité organisée. C'est un défi qui se pose au-delà des frontières de notre pays. C'est au niveau européen que nous pourrons mieux agir, pour lutter avec plus d'efficacité contre toutes les filières de drogue, d'immigration et de travail clandestins.
Pour toutes ces raisons, madame la ministre, nous vous apportons notre soutien. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Madame la présidente, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le budget de la mission « Sécurité », élaboré dans un contexte financier difficile, n'en traduit pas moins la volonté forte du Gouvernement en faveur de la sécurité des Français : les crédits sont, en effet, en augmentation de 1,53 % par rapport à ceux de l'an dernier.
Aux approximations, aux contrevérités, aux mensonges et à la démagogie de l'opposition, il convient d'opposer trois réalités indiscutables.
Premièrement, je souhaite rappeler les grandes évolutions qui ont marqué les dernières années en matière de sécurité.
Après avoir enregistré une augmentation de 17,8 % entre 1997 et 2002, la délinquance générale a reculé de 17,5 % dans la période 2002-2010. L'année 2010 a été la huitième année consécutive de baisse de la délinquance, ce qui signifie, très concrètement, qu'en 2010, il y a eu dans notre pays, 500 000 victimes de moins qu'en 2002.
Deuxièmement, en ce qui concerne la question des effectifs, et en dépit de ce que l'on entend de façon récurrente, je tiens à souligner qu'ils ont augmenté de 1 700 depuis 2002.
Enfin, face à l'évolution de la délinquance, le Gouvernement et le ministre de l'intérieur ont su, dans un souci d'efficacité, apporter de nouvelles réponses. Le recours aux moyens de la police technique et scientifique – recherche systématique d'indices sur les lieux où les infractions ont été commises, formation des agents à ces nouvelles techniques, constitution de nouveaux fichiers –, ainsi que le développement de la vidéosurveillance, ont accru l'efficacité des moyens d'investigation.
Force est de constater que cette politique a porté ses fruits : le taux d'élucidation des affaires délictuelles et criminelles est passé de 26 % en 2002 à 37 % en 2010, ce qui est une avancée tout à fait considérable.
Malgré les contrevérités assenées en permanence par la gauche, la politique gouvernementale en matière de sécurité a bel et bien permis une baisse généralisée de la délinquance depuis 2002.
J'en arrive au budget proprement dit.
Dans le contexte difficile dans lequel nous nous trouvons, je tiens à souligner qu'un important effort financier est consenti en faveur de la mission « Sécurité », qui sera dotée de 17,1 milliards d'euros de crédits de paiement en 2012, soit une augmentation de 1,5 % par rapport à 2011.
Limiter la dépense publique est une nécessité qui s'impose à tous. Ce budget, comme les autres, contribue à l'effort national sans pour autant porter atteinte au potentiel opérationnel des forces de police et de gendarmerie, du fait de leur recentrage sur leur coeur de métier.
Un des fils conducteurs de la LOPPSI 2 a été la modernisation des moyens d'action des forces de police et de gendarmerie. Aujourd'hui, le budget que vous présentez, et qui respecte scrupuleusement les engagements pris, montre bien que l'effort de modernisation de la sécurité entrepris par le Gouvernement se poursuit : 264 millions d'euros sont prévus pour la modernisation des services opérationnels.
Mais vous avez souhaité aller plus loin en mettant en place deux programmes d'équipement exceptionnels. Grâce au premier, 4 400 véhicules neufs seront livrés aux forces de sécurité en 2012, pour un montant de 100 millions d'euros. Le second plan permettra de poursuivre l'effort immobilier en faveur des commissariats de police et des casernes de gendarmerie, à hauteur, respectivement, de 73 millions d'euros et de 53 millions d'euros.
Pour toutes ces raisons, madame la ministre, et bien d'autres que nous avons eu l'occasion d'évoquer en commission élargie, le groupe UMP soutiendra, avec détermination et vigueur, le budget de la mission « Sécurité ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je mets aux voix les crédits de la mission « Sécurité », inscrits à l'état B.
(Les crédits de la mission « Sécurité » sont adoptés.)
Nous abordons maintenant l'examen des crédits relatifs aux relations avec les collectivités territoriales (n° 3805, annexe 37, n° 3810, tome VII).
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la présidente, monsieur le ministre chargé des collectivités territoriales, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, comme vous le savez, la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne reflète que partiellement l'effort financier de l'État en faveur des collectivités territoriales. Son montant n'est, en effet, que de 2,5 milliards d'euros, alors qu'au total, les concours de l'État hors fiscalité atteignent près de 60 milliards d'euros. De même, cette mission ne traduit que très partiellement les principales réformes engagées en matière de finances locales.
Vous me permettrez donc, j'en suis certaine, de sortir du cadre strict de cette mission budgétaire pour aborder globalement la question des relations financières entre les collectivités et l'État. Aux yeux du Gouvernement, celles-ci doivent, plus que jamais, être placées sous le signe de la coresponsabilité : à l'heure où le rétablissement de nos finances publiques exige des efforts supplémentaires de la part de chaque Français, aucun acteur public ne peut s'exempter de l'exigence d'économie sur les dépenses.
C'est pourquoi le projet du Gouvernement prévoyait la reconduction en 2012 du gel des concours financiers, déjà mis en oeuvre en 2011, avec une enveloppe globale dont le montant s'établira à 50,6 milliards d'euros, soit 20 % du budget de l'État. Vous le savez, nous avons, depuis, travaillé avec M. le rapporteur général et M. le rapporteur spécial pour répartir l'effort d'économies supplémentaires annoncé par le Premier ministre le 24 août. Il nous a paru logique et naturel que les collectivités prennent également leur part de cet effort à hauteur de 20 %, ce qui représente 200 millions d'euros. Les amendements concernant ces économies ont été votés lors de l'examen de la première partie de ce projet de loi de finances.
Avec votre rapporteur général, ainsi qu'avec Claude Guéant et Philippe Richert, nous avons, je vous le rappelle, retenu les modalités suivantes, afin de limiter au maximum l'impact sur les collectivités. D'une part, nous avons sanctuarisé à leur niveau global de 2011 chacune des trois dotations qui n'étaient pas encore concernées par le gel – je pense à la dotation globale de fonctionnement des départements et des régions, à la dotation des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle et aux amendes de police. Cela permet de réaliser 148 millions d'euros d'économies, tout en renforçant la lisibilité des concours financiers : toutes les dotations sont aujourd'hui stabilisées à leur niveau de 2011, y compris celles que retrace la mission que nous allons examiner.
D'autre part, nous avons mis à zéro trois dotations secondaires, pour un montant de 52 millions d'euros. Il s'agit de la dotation du fonds « catastrophes naturelles », qu'il n'était pas utile d'abonder du fait des excédents des années précédentes ; de la dotation « TGAP granulats » qui, du fait de difficultés diverses, n'a pas pu être mise en oeuvre ; enfin, de la dotation sur les jeux automatiques, dite « dotation flipper », dont le montant moyen versé par collectivité était très faible. Nous avons ainsi trouvé un bon équilibre entre la nécessaire coresponsabilité et le besoin de lisibilité et de prévisibilité qu'éprouve toute collectivité quand il s'agit de ses ressources.
Je veux néanmoins préciser que cet effort d'économies ne ralentira en aucun cas notre action au service de la solidarité et de la cohésion territoriale. Nous renforcerons, en effet, la péréquation à deux niveaux. Sur un premier niveau, via les concours de l'État, la péréquation verticale continue de progresser au sein de la dotation globale de fonctionnement. Les dotations de péréquation communale devraient dépasser 3 milliards d'euros l'an prochain, avec une progression de 4,6 % de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale.
Nous agissons également à un deuxième niveau, celui de la fiscalité locale, avec un renforcement des mécanismes de péréquation horizontale entre communes. Après la mise en oeuvre, en 2011, du fonds de péréquation pour les départements, ce sera le tour, en 2012, du nouveau fonds de péréquation communal. Le montant de ce fonds passera progressivement de 250 millions d'euros la première année à plus de 1 milliard d'euros en 2015. Il a fait l'objet d'un travail de concertation approfondie avec vous, le Comité des finances locales et les associations d'élus.
S'agissant plus particulièrement des départements, le projet de loi de finances pour 2012 comporte aussi deux mesures de solidarité, que nous avons eu l'occasion d'étudier lors de l'examen de la première partie. Il s'agit tout d'abord de la reconduction, pour la sixième année consécutive, du Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion – le FMDI –, qui apporte, vous le savez, un complément de ressources de 500 millions d'euros pour permettre aux conseils généraux de financer leur politique d'insertion professionnelle ; il s'agit, en second lieu, de l'étalement sur un à cinq ans des corrections concernant la compensation définitive au titre du revenu de solidarité active. Cela concerne une vingtaine de départements pour lesquels il a été constaté, par le passé, un trop-versé de 82 millions d'euros.
Je veux également insister sur le fait que les relations financières entre l'État et les collectivités sont marquées par une révision à la hausse de la compensation de garantie prévue dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle. Le montant de cette compensation était estimé à 2,5 milliards d'euros et nous l'avons revu à la hausse à 2,9 milliards, même si tous les calculs ne sont pas encore finalisés. Grâce à cette compensation, le niveau de ressources de chaque collectivité sera maintenu.
Je souhaitais également vous indiquer que nous serons en mesure, d'ici peu, d'effectuer un nouveau bilan complet de cette réforme. Les montants de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, des deux compensations garantissant le niveau de ressources – la DCRTP et la garantie individuelle de ressources – et d'un éventuel complément de compensation relais au titre de 2010 sont en cours de transmission depuis la semaine dernière aux collectivités.
S'agissant, enfin, des crédits proprement dits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », ils sont stabilisés à leur niveau de 2011, soit un total de 2,5 milliards d'euros pour l'ensemble des dotations.
Vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, la coresponsabilité est bien la règle : les collectivités territoriales prennent leur part de l'effort de réduction des déficits ; l'État, lui, honore strictement ses engagements en renforçant la solidarité et en veillant à compenser strictement l'effet de la réforme de la taxe professionnelle, qui n'aura fait aucun perdant.
Sauf les caisses de l'État ! Cette réforme aura coûté très cher à l'État !
Dans ces engagements réciproques, je vois le socle du contrat de confiance qui unit l'ensemble des acteurs publics – des acteurs qui, plus que jamais, doivent réunir leurs forces pour redresser nos finances publiques.
Voilà, mesdames et messieurs les députés, les principaux points sur lesquels je voulais revenir devant vous, sachant que Philippe Richert a déjà eu l'occasion de vous présenter en détail ce budget en commission élargie le mercredi 26 octobre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous en venons aux interventions des porte-parole des groupes.
La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour le groupe GDR.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, cette mission budgétaire « Relations avec les collectivités territoriales » s'inscrit dans la continuité de la politique de restriction des recettes locales menée depuis 2007.
Ce projet témoigne, une fois encore, du peu de considération accordé à l'autonomie des collectivités territoriales. Le constat est alarmant. Réforme après réforme – suppression de la taxe professionnelle, réforme des collectivités territoriales, transferts de charges non compensés, gel des dotations –, la politique gouvernementale n'a de cesse de contraindre la dépense publique locale et de nier le principe de libre administration des collectivités, inscrit dans la Constitution. Nous assistons à une recentralisation rampante, le pouvoir central tentant de faire endosser aux collectivités les conséquences de sa politique fiscale et de les enrôler dans le démantèlement du service public.
Le pouvoir fiscal des collectivités territoriales est désormais symbolique. Les collectivités, qui dépendent très fortement des subventions et dotations de l'État, se trouvent ainsi placées sous sa tutelle. Le gel des dotations décidé au printemps 2010 se poursuivra en 2012. L'enveloppe des concours de l'État aux collectivités, soit 50,6 milliards d'euros, sera donc du même montant qu'en 2011. Ce gel en valeur produit des effets sensibles sur l'investissement public local, alors même que ce dernier constitue l'un des derniers leviers dont disposent les élus locaux pour relancer la croissance. En outre, cette mesure se traduit, pour certaines collectivités, par des réductions de dotation très fortes en termes réels.
Au-delà du gel des dotations, voilà maintenant que l'on demande aux collectivités de participer à un « effort supplémentaire » de rigueur. Une série de mesures a été adoptée à l'occasion de l'examen des recettes du PLF 2012. L'idée est simple : faire contribuer, à hauteur de 200 millions d'euros, les collectivités au milliard d'économies supplémentaire. Concrètement, une nouvelle diminution des finances territoriales est actée.
La part des recettes du bloc communal concernée par ce « coup de rabot » est de 123,1 millions d'euros, soit 62 % de l'ensemble de l'effort, les départements et les régions prenant les 77 millions restants. Le montant global de la DGF, qui devait croître de 0,2 %, sera maintenu à son niveau de répartition de 2011. Les communes sont mises à contribution par différentes mesures. Le Gouvernement propose la suppression de la compensation aux communes du produit historique 2006 de la taxe sur les jeux automatiques et la suppression du prélèvement sur recettes spécifiques concernant la taxe générale sur les activités polluantes des matériaux d'extraction, dite « TGAP granulats ».
Il a aussi décidé de geler à son niveau de 2011 la dotation de l'État aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle destinée aux communes, et de ne pas doter, en 2012, le fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles. Enfin, le Gouvernement propose de réaffecter au budget de l'État une fraction supplémentaire de 33 millions d'euros du produit des amendes de police de circulation initialement affecté aux collectivités. Le montant qui leur resterait serait de 662 millions d'euros, soit quasiment la même somme que l'an dernier.
Cette politique est dramatique. Alors que le maintien, en euros courants, des dotations de l'État est déjà une très forte contrainte, l'effort supplémentaire imposé aux collectivités territoriales va les asphyxier et donner un coup de frein aux investissements publics locaux, qui représentent 73 % de l'investissement public global. Cette politique de rigueur crée un décalage profond entre les dépenses et les recettes de fonctionnement, qui tend à augmenter le niveau d'emprunt local.
Tandis que leurs rentrées fiscales diminuent, les collectivités se heurtent à une réduction significative du volume des crédits accordé par les banques et à la remontée des taux d'intérêt. Les prêts toxiques consentis par Dexia ont mis en danger les finances de 5 500 collectivités et établissements publics. La crise financière offrait une opportunité en or pour créer, autour de la Caisse des dépôts et de la Banque postale et avec la nationalisation des banques, un pôle bancaire public susceptible de mobiliser l'épargne au profit du tissu économique et de proposer des prêts à taux réduits pour les collectivités. Au lieu de cela, le Gouvernement a choisi de sauver les actionnaires des banques et d'imposer la pire politique de rigueur jamais vue.
Enfin, s'agissant du dispositif de péréquation territoriale, nous considérons qu'il ne permet pas de réduire les écarts de richesse entre les régions, entre les conseils généraux et surtout entre les communes. J'avance une piste intéressante : la taxation des actifs financiers des entreprises. Un taux de prélèvement de 0,5 % engendrerait une recette de 30 milliards d'euros au bénéfice des collectivités et de leurs groupements ! Il y a donc de l'argent pour une politique ambitieuse en matière de finances locales, mais la majorité n'en veut pas, coincée qu'elle est dans ses dogmes libéraux.
Nous refusons que l'État reporte ainsi ses difficultés de gestion sur les collectivités, obérant le service public et la démocratie locale. Le groupe GDR rejettera donc ce budget.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est au moins un point sur lequel tout le monde est d'accord : le rôle essentiel de nos collectivités territoriales, accompagnées par l'État, dans la cohésion sociale et territoriale. Le débat sur la politique des territoires que nous avons eu avant cette discussion budgétaire n'a pas été inutile : il a permis de mettre en évidence l'efficacité d'un certain nombre de mécanismes permettant de favoriser à la fois la contractualisation entre l'État et les collectivités territoriales et l'efficacité d'un certain nombre de fonds dédiés aux collectivités territoriales, notamment les dotations de solidarité urbaine et rurale.
Au fil des ans, un certain nombre de moyens ont conforté cette mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Il est vrai que nous n'avons pas la même lecture du budget selon que nous sommes dans l'opposition ou dans la majorité. Est-il vraiment inutile que les collectivités territoriales subissent cet effort budgétaire auquel la nation est contrainte dans le contexte de crise que nous traversons ?
Je voudrais orienter mon intervention sur un point que j'ai évoqué devant vous en commission élargie, en présence du ministre de l'intérieur : l'accès au crédit des collectivités territoriales. Mon collègue Candelier vient d'en parler et vous savez quelle est la situation : un certain nombre de collectivités territoriales sont confrontées aux emprunts dits toxiques, et il faut le dire, des élus ont été trompés. Quid des responsabilités et des conséquences ? Est-il normal que ce soit le contribuable local qui ait à supporter aujourd'hui le poids de la facture ? Je vous pose la question, monsieur le ministre. Cette préoccupation est partagée au-delà des clivages politiques.
Il y a également le problème de Dexia. L'État a décidé, ces derniers temps, de réagir, mais les ressources attribuées, qui sont – je parle sous votre contrôle, monsieur le ministre – de l'ordre de 3 milliards d'euros, permettront de faire face aux situations les plus urgentes, cela dans un délai limité. Or il faudrait doubler cette somme pour que la banque dédiée aux collectivités territoriales, qui ne sera opérationnelle qu'au mois de juin prochain, permette à celles-ci de trouver des financements. N'oublions pas qu'elles jouent un rôle majeur en matière d'investissement.
C'est dans ce contexte difficile pour les finances des collectivités territoriales, dont une grande part des ressources dépend des dotations d'État, que moi-même et mes collègues députés du Nouveau Centre vous apportons notre soutien, mais un soutien toujours exigeant. Nous notons avec satisfaction que le Gouvernement a apporté des garanties sur la péréquation, comme vient de le rappeler Mme la ministre du budget.
Je note également que le renforcement des mécanismes de péréquation, à travers les concours de l'État, la DGF et la dotation communale, augmentera de 4,6 %. La ministre a également évoqué l'augmentation de la dotation de solidarité rurale et de la dotation de solidarité urbaine.
Je note aussi que vous avez garanti aux conseils généraux le niveau du Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion et l'étalement des compensations au titre du revenu de solidarité active. Pour ces compétences confiées aux départements, là encore, l'État apporte sa contribution lorsque ceux-ci ne peuvent pas faire face à leurs obligations.
Retenez surtout, monsieur le ministre, cette attente des collectivités, qui souhaitent avoir les moyens, à travers une banque qui leur soit dédiée, de continuer à jouer leur rôle essentiel en matière d'investissement. C'est l'un des aspects les plus importants des défis qui se présenteront à nous au cours des prochaines semaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le projet de budget qui nous est présenté est avant tout marqué par la stabilité.
En effet, les quatre programmes consacrés respectivement aux communes et communautés de communes, aux départements, aux régions et enfin aux concours spécifiques mobilisent plus de 2,5 milliards d'euros, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement. Cette stabilité par rapport au budget précédent doit être saluée, car elle intervient, chacun le sait, dans un contexte budgétaire qui nous contraint tous à une maîtrise des finances publiques.
Cette stabilité est surtout le signe et le gage de la volonté du Gouvernement de soutenir l'action des collectivités locales.
L'effort financier de l'État envers les collectivités territoriales poursuit trois objectifs principaux.
Premier objectif, la compensation des charges transférées dans le cadre de la décentralisation et celle des pertes de produit fiscal générées par les réformes des impôts locaux.
Deuxième objectif, accompagner l'investissement des collectivités locales qui, rappelons-le, représente 75 % de l'investissement public et constitue donc un levier économique particulièrement important.
Troisième objectif, renforcer la péréquation verticale et horizontale – Mme la ministre l'a expliqué tout à l'heure.
En matière de péréquation verticale, il convient de noter une progression de la dotation de solidarité urbaine et de la dotation de solidarité rurale de 4,6 %. Les mécanismes de péréquation horizontale sont également renforcés ; ils constituent une priorité du Gouvernement. Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit ainsi la mise en place du Fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales, dans le but de favoriser l'équité entre les territoires. Ce fonds redistribuera ainsi 250 millions d'euros dès 2012 et plus de 1 milliard d'euros à l'horizon 2015.
D'une manière générale, madame la ministre, monsieur le ministre, le projet de budget pour 2012 coïncide avec la réforme des collectivités territoriales issue de la loi du 16 décembre 2010. Depuis de nombreuses années, tous les observateurs de l'administration régionale, départementale et municipale s'accordent à reconnaître la dispersion des structures et les conséquences qui en résultent : la superposition des compétences, la complexité des procédures et, enfin, une utilisation trop peu rationnelle, voire, dans certains cas, un gaspillage des deniers publics.
Ce sont ces constats qui ont fondé la réforme des collectivités territoriales, dont la mise en oeuvre se fera progressivement entre la fin de cette année, avec le regroupement des communautés de communes, et 2014, avec le rapprochement du département et de la région à travers la création du conseiller territorial.
Notre environnement économique et social est en constante évolution. Tous les organismes privés, qu'ils soient de nature industrielle, commerciale, coopérative ou associative, se transforment et se réorganisent. On ne voit pas par quel miracle les collectivités territoriales pourraient échapper à cette évolution générale. Le projet de budget qui nous est aujourd'hui présenté est ainsi, et aussi, un budget d'accompagnement de la réforme des collectivités locales. Il est, à cet égard, parfaitement cohérent avec la place et le rôle qui sont assignés dans notre pays aux collectivités territoriales.
C'est donc à la fois pour des raisons de court terme, qui portent sur la structure du budget qui nous est présenté, et pour des raisons de moyen et long termes, qui portent sur l'avenir de l'administration territoriale de la République, que le groupe UMP votera, madame la ministre, monsieur le ministre, le projet de budget que vous nous proposez aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de budget est le dernier de la législature. Les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » représentent 2,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 2,1 milliards d'euros en crédits de paiement. Leur augmentation entre 2011 et 2012 est de zéro pour cent. Après tout, ce n'est pas un problème en soi, mais cette évolution faciale ne reflétera évidemment pas la réalité à la fin de 2012.
Quand on y regarde de près, l'inflation sur douze mois sera vraisemblablement de 2,1 % fin 2011, soit 0,5 % de plus que prévu fin 2010 ; elle sera vraisemblablement de 1,7 % fin 2012. Ce sont plus de 50 millions d'euros qu'il aurait fallu mettre d'emblée pour conserver la valeur faciale des crédits à leur niveau de 2011. Le gel des dotations de l'État vaut donc diminution des concours de l'État.
Je me permettrai de rappeler ici que le terme de « dotations » est inadéquat, dans la mesure où il s'agit de compensations d'impôts locaux que l'État a modifiés ou supprimés, créant ainsi de son propre chef une dépendance croissante des collectivités vis-à-vis du niveau central.
Parallèlement, le fonds de FCTVA va diminuer de 500 millions et le Gouvernement demande un nouvel effort de 200 millions d'euros aux collectivités territoriales. De la sorte, le Gouvernement entend faire payer aux collectivités territoriales une part de l'endettement public et de sa politique de cadeaux fiscaux inefficace et injuste, alors même que la dette des collectivités est aujourd'hui globalement maîtrisée, puisqu'elle est passée de 33 % de la dette de l'ensemble des administrations publiques en 1980 à 10, 5 % en 2010.
Les collectivités territoriales ont besoin de stabilité pour investir et réaliser les services de proximité qu'ils doivent à nos concitoyens. Malheureusement, ce projet, outre qu'il acte une diminution des dotations, recèle de nombreuses incertitudes et creuse les inégalités entre collectivités.
Je m'appuierai sur deux constats. Le premier concerne la réduction du champ de la richesse fiscale économique. La suppression de la taxe professionnelle et son remplacement par la contribution économique territoriale ont conduit à une réduction de la base de la richesse économique sur laquelle les collectivités territoriales pouvaient s'appuyer pour ajuster leurs ressources à leurs charges.
Cette substitution hier, la mise en place d'une péréquation horizontale insatisfaisante aujourd'hui, mais aussi la modification du rapport que les entreprises entretiennent avec leurs territoires, bouleversent le champ fiscal des collectivités. Pour ne prendre que cet exemple, la CTE ne représente plus que 9,6 milliards d'euros pour les communes et leurs groupements, alors que la taxe professionnelle représentait 17,5 milliards d'euros de ressources.
Par ailleurs, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, composante de la CTE, bénéficie à quelques territoires urbains, là où se concentrent les sièges sociaux et certains équipements, alors que les anciens territoires industriels n'ont, le plus souvent, que la contribution foncière des entreprises. Aucun nouveau rééquilibrage significatif pour les collectivités n'a été proposé par le Gouvernement. Le groupe socialiste l'a rappelé lors de l'examen de la première partie du projet de loi, portant sur les recettes. L'examen de la seconde partie du projet conforte cette absence d'initiative en leur faveur.
Le second constat porte sur l'augmentation de l'effort de péréquation et ses effets aux niveaux communal et intercommunal. Le projet de loi instaure un fonds de péréquation au niveau communal et intercommunal. D'un montant de 250 millions d'euros, il devrait monter en puissance jusqu'en 2015. Il représentera alors 1 milliard. On ne peut que s'opposer à l'absence, dans les critères de sa répartition, de toute référence à l'effort fiscal.
De façon générale, plus la taille de la collectivité est importante, plus la pression fiscale est élevée. Ne pas prendre en considération ce fait conduit à un transfert significatif de ressources de grandes villes, quelles qu'elles soient, vers des communes dont la situation économique et sociale ne le justifie pas forcément.
Les simulations montrent que 58 % des bénéficiaires du fonds affichent un effort fiscal inférieur à l'effort fiscal moyen national. Par ailleurs, le fait de ne pas prendre en compte l'effort fiscal fait courir le risque de verser des dotations à des territoires affichant un niveau de ressources modeste mais non exposés à de fortes charges. De plus, les modalités de répartition du fonds ont pour effet que la dotation sera répartie dans un même territoire au prorata des ressources des communes et de l'EPCI, ce qui pourra équivaloir à faire financer par des communes pauvres des communes riches.
Le groupe socialiste a déposé et soutenu plusieurs amendements visant à mieux prendre en compte la situation réelle des territoires et communes dans le cadre de la péréquation horizontale : exclusion des communes bénéficiaires de la DSU ; mise en oeuvre d'un indice synthétique de ressources et des charges, incluant notamment le revenu des habitants ; prise en compte de l'effort fiscal demandé aux contribuables de la commune ou de l'EPCI ; référence au nombre de logements sociaux comme critère de calcul. Tous nos amendements ont été rejetés. Ce refus de rendre plus juste a priori la répartition justifie à lui seul notre refus de voter les crédits de la mission.
Pour terminer, il convient de relever que l'institution d'une telle péréquation sans précaution s'inscrit dans un contexte défavorable aux collectivités créé par le Gouvernement. Jusqu'à il y a peu, la plupart des dotations, notamment les dotations de compensation, étaient indexées sur l'inflation et sur la moitié de la croissance. Cette indexation tenait précisément au fait que ces dotations remplaçaient des ressources qui croissaient comme l'inflation et comme la croissance. Depuis deux ans, les dotations ne sont plus indexées, alors qu'elles ont remplacé des ressources dynamiques. Il est impératif que cette substitution sans fin des recettes fiscales par des dotations non garanties prenne fin,…
…sauf à ce que l'autonomie des collectivités territoriales ne devienne un principe vidé de son contenu.
Pour ces raisons, et sous réserve de l'adoption de nos amendements, le groupe socialiste votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2012 :
Suite de l'examen des crédits relatifs aux relations avec les collectivités locales ;
Examen des crédits relatifs aux anciens combattants, à la mémoire et aux liens avec la nation.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron