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Intervention de Sandrine Mazetier

Réunion du 3 novembre 2011 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2012 — Immigration asile et intégration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Mazetier :

Madame la présidente, madame la ministre, à travers la mission « Immigration, asile et intégration », nous n'examinons que moins de 15 % des crédits de la politique transversale en matière migratoire. C'est dommage pour le dernier PLF de la législature, qui aurait dû être l'occasion de faire le bilan de votre politique, mais c'est suffisant pour pointer les incohérences, les impasses, et les échecs de votre politique.

Quels en étaient le fondement, les objectifs et les slogans ?

Le fondement, c'était l'immigration choisie, et les objectifs en étaient clairs et quantifiés. La lettre de mission adressée le 9 juillet 2007 par le Président de la République au ministre de l'immigration précisait ainsi : « Vous viserez l'objectif que l'immigration économique représente 50 % du flux total des entrées à fin d'installation durable en France ».

Nous avons toujours récusé la distinction artificielle établie entre immigration de travail et immigration familiale, comme nous vous avons toujours signalé que cet objectif de 50 % d'immigration de travail était illusoire. Aujourd'hui, les faits sont là : vous n'avez jamais atteint cet objectif. Vous ne l'avez même pas approché, même en intégrant dans les chiffres d'entrées en France les régularisations pour motif professionnel de personnes présentes sur le territoire depuis de nombreuses années.

La lettre de mission indiquait comme autre objectif : « Nous voulons également que la France devienne un pays qui attire les meilleurs étudiants du monde entier ». Quelle est la situation ?

La France avait déjà été rétrogradée dans le classement des pays d'accueil d'étudiants étrangers, passant du troisième rang derrière les États-Unis et le Royaume-Uni au quatrième. La circulaire émise par Claude Guéant, le 31 mai dernier, qui durcit les conditions d'insertion professionnelle d'étudiants formés dans les meilleurs établissements du pays – la nouvelle s'est répandue immédiatement, et elle a même fait l'objet d'un article dans le New York Times –, va accentuer ce déclin. Alors même que, dans le projet de loi de finances pour 2012, 2 milliards sont consacrés à l'accueil et à la formation des étudiants étrangers, cette circulaire rend cet investissement par avance inefficace.

Ainsi, non seulement M. Guéant prive la France d'un retour sur investissement en profitant des compétences et de l'énergie de jeunes diplômés formés par la France, mais il adresse, en outre, aux élites des migrations internationales un signal désastreux. Par votre faute, la France vient encore de perdre des points dans la compétition internationale.

Voilà pour les objectifs initiaux et les résultats qui sont les vôtres. Passons aux slogans. Vous venez, madame la ministre, de les répéter : il s'agit d'être ferme pour être généreux et de lutter contre l'immigration clandestine pour mieux intégrer les migrants légaux.

Généreux, le Gouvernement l'a incontestablement été avec les prestataires qui construisent et gèrent les centres de rétention administrative. Ils sont incontestablement les grands bénéficiaires de votre politique : il y avait 773 places dans ces centres en 2003, il y en aura 2 063 en 2012.

Généreux, il l'a aussi été dans l'utilisation des forces de police et de gendarmerie, toujours moins nombreuses, pour des missions très éloignées de la lutte contre la criminalité.

Généreux, il l'est beaucoup moins avec l'affichage sincère du coût, systématiquement minoré, de cette politique d'enfermement et de quotas d'expulsion. Vous nous présentez un coût moyen de 1 300 euros par éloignement, alors que l'inspection générale de l'administration, qui dépend pourtant du ministre de l'intérieur, l'estime à dix fois plus – voire à quinze fois plus selon la commission des finances du Sénat. Le ministre refuse d'ailleurs de nous communiquer le taux d'exécution des mesures d'éloignement. Alors qu'il était de 62 % en 2002 et qu'il s'était effondré à moins de 20 % voilà quelques années, qu'en est-il aujourd'hui ?

Généreux, vous ne l'êtes pas du tout avec les demandeurs d'asile et les réfugiés.

S'agissant des demandeurs d'asile, l'objectif initial d'hébergement de 90 % d'entre eux en centres d'accueil pour demandeurs d'asile a été révisé à la baisse chaque année pour n'atteindre que 35 % en 2012. Le financement des places a, quant à lui, baissé, ce qui entraînera la suppression de 400 emplois d'accompagnement, soit près de 20 % des effectifs.

Quant aux réfugiés, les crédits aux centres provisoires d'hébergement et aux actions d'aide et de secours sont, eux aussi, en baisse. Voilà pour la générosité.

S'agissant de l'intégration, de deux choses l'une : soit vous considérez que c'est un sujet important qui mérite des moyens, et il faudra alors que vous nous expliquiez pourquoi, en quatre ans, la moitié des crédits de paiement du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » a disparu ;...

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