Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, une nouvelle foi, le budget de la mission agriculture, pêche, forêt est lourdement amputé, puisqu'en retrait de 1,5 % en crédits de paiement par rapport à 2011 à périmètre constant.
M. le ministre Le Maire s'est félicité en commission d'avoir tenu le cap des coupes budgétaires décidées dans le cadre de la programmation 2011-2014. Derrière cette course à l'échalote de la rigueur budgétaire, ce sont donc 71 millions d'euros de moins pour les agriculteurs, les pêcheurs, les forestiers pour 2012. Eux qui vivent de plus en plus mal, quand ils n'ont pas cessé d'exercer leur activité depuis l'année dernière…
Quel contraste entre les propos gouvernementaux, qui se veulent rassurants sur la continuité des programmes de cette mission, et la réalité de l'agriculture dans notre pays ! Faut-il rappeler que la France vient de perdre 26 % de ses exploitations entre 2000 et 2010, selon le dernier recensement général agricole, et 22 % de ses emplois liés au secteur ? Elle compte désormais moins de 500 000 exploitations.
À ce rythme-là, qui n'a cessé de s'accélérer ces dernières années, le rêve libéral de voir une France avec 100 000 « agrimanagers » spécialisés et aptes à concourir sur les marchés mondiaux est désormais à portée de main. C'est d'ailleurs cet objectif qui est réaffirmé dans la présentation budgétaire : « ce budget doit permettre aux agriculteurs français de se moderniser, d'investir et de gagner en compétitivité. » Mais pas un mot sur les difficultés et la disparition de milliers d'exploitations familiales !
Ainsi, le programme 154 «Économie et développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires » perd 44 millions d'euros par rapport à la loi de finances précédente, avec – comble du comble ! – une diminution de 11 millions d'euros des crédits sur l'action «Gestion des crises et des aléas de la production ».
Joli pied de nez aux centaines de milliers d'agriculteurs de notre pays qui ont dû faire face cette année à une sécheresse dramatique ! Quel symbole pour les producteurs de fruits et légumes menacés de disparition, faute de décisions politiques courageuses en matière de prix…
Chacun le sait ici, ce budget pour 2012, encore plus que les précédents, n'est pas à la hauteur de la situation de notre France agricole.
Sur le principal besoin des agriculteurs, à savoir la question des prix et des revenus, le Gouvernement se refuse toujours à prendre les mesures indispensables à la survie des exploitations. Je pense notamment à l'encadrement des prix et des marges, à travers l'application d'un coefficient multiplicateur. Cette mesure serait pourtant sans incidence budgétaire.
D'autres mesures à la hauteur de la crise de notre agriculture impliquent un engagement budgétaire conséquent. Je pense notamment à l'installation agricole.
Toutes les filières connaissent une crise durable : il y va parfois même de la survie à court terme de producteurs français. Face à cette situation, le ministre s'est livré en commission, une nouvelle fois, à une lamentation sur les difficultés qu'éprouverait la France dans les négociations européennes pour obtenir des engagements plus fermes en faveur du monde agricole. Ce discours n'adoucit en rien l'agonie des paysans, d'autant que le Gouvernement a fait le choix d'accompagner cette politique libérale européenne, notamment lors de l'adoption de la loi de modernisation de l'agriculture, votée l'année dernière. Ses résultats parlent d'eux-mêmes : les producteurs laitiers refusent la contractualisation vendue comme un miracle, mais qui se fait toujours sur le dos des mêmes. Les producteurs de fruits et légumes ne croient pas davantage à la solution divine du renforcement des organisations de producteurs. Quant à la gestion des risques climatiques par l'extension de l'assurance privée, elle prête à sourire puisqu'il a fallu réhabiliter soudainement un fonds de garantie public des calamités en cette année 2011 ! Et la référence récurrente aux avancées « quasi révolutionnaires » du G20 agricole contre la spéculation sur les productions agricoles ne semble pas devoir remplir l'assiette des paysans du monde !
Les députés communistes et du parti de gauche ne se résigneront pas à cette chronique d'une mort annoncée de notre agriculture et de ceux qui la font vivre. Nous avons mis en débat auprès du monde paysan, comme ici à l'Assemblée nationale – et ce sera notamment l'objet d'une niche le 1er décembre – les mesures indispensables pour une autre répartition de la valeur ajoutée, pour des revenus agricoles permettant de vivre dignement de son activité et pour une agriculture durable dans notre pays comme dans le monde ! Avec l'ensemble du groupe GDR, les députés communistes et du parti de gauche voteront résolument contre le budget proposé pour cette mission.
Il me restait quatre secondes, madame la présidente !