La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Les articles 1er à 8 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je les mets aux voix.
(Les articles 1er, 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Sur l'article 9, je suis saisi d'un amendement n° 3 .
La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour le soutenir.
L'amendement n° 3 tend à insérer à la première phrase de l'alinéa 5, après la première occurrence du mot « avocats », la précision suivante : « , les avocats déjà en exercice ». Le but est de garantir aux salariés d'avoués trouvant un emploi auprès d'un avocat en exercice qu'ils conserveront les avantages individuels acquis en application de leur ancienne convention collective nationale, autrement dit qu'ils seront assurés du maintien d'une situation sociale identique avant et après la réforme.
La parole est à M. Gilles Bourdouleix, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur cet amendement.
Avis défavorable. Ce disant, je vais tout à fait dans le sens de ce que dénonçait M. Valax tout à l'heure : le risque serait que l'on embauche de jeunes diplômés, sans ancienneté, plutôt que les anciens salariés d'avoués. Même si votre amendement part a priori d'une bonne intention, cette mesure risquerait de se retourner contre ces salariés.
La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
Même avis : mon raisonnement est le même. J'ajoute que les partenaires sociaux sont invités à conclure, avant le 31 décembre 2011, une nouvelle convention collective : mieux vaut laisser cette négociation se dérouler, plutôt que de prendre une mesure législative qui risquerait d'avoir le contre-effet souligné par votre rapporteur.
Il serait raisonnable de retirer cet amendement, sachant qu'il y aura une convention collective, et que le sujet sera donc débattu.
Les avoués près les cours d'appel voient leur profession supprimée par ce texte : ils n'ont pas à supporter les coûts d'une décision unilatérale qui les oblige à une reconversion forcée. Nous souhaitons donc qu'un rapport prévoyant les modalités d'une indemnisation complète des avoués pour l'ensemble des préjudices subis du fait de cette réforme soit remis au Parlement six mois avant la mise en oeuvre définitive du présent projet de loi. Autrement dit, nous souhaitons qu'une commission, ou un groupe de surveillance, s'assure que le Gouvernement respecte ses engagements pris pour l'indemnisation des avoués, tant en ce qui concerne son montant et son délai que son paiement effectif.
Avis défavorable : votre amendement sera satisfait par l'application de l'article 145-7 de notre règlement, qui prévoit que le rapporteur peut rédiger, avec un co-rapporteur issu de l'opposition, un rapport sur l'application de la loi.
La parole est à M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis. Ajoutons que vos amendements auraient pour effet d'obliger à présenter sept nouveaux rapports… Ce n'est ni nécessaire, comme l'a dit M. le rapporteur, ni raisonnable.
Il est maintenu, monsieur le président.
(L'amendement n° 5 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 71 du Gouvernement.
La parole est à Mme la garde des sceaux.
Cet amendement vise à mettre en oeuvre ce que je vous ai annoncé dans mon discours d'introduction, c'est-à-dire l'indemnisation des avoués à 100 % de la valeur de leur office.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
Je crois que l'Assemblée sera unanime pour adopter cet amendement.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais, à titre personnel, j'émets – nul ne s'en étonnera – un avis favorable.
Nous sommes tous d'accord, désormais, sur cette indemnisation : je rappelle que nous sommes passés de 66 % à 92 %, puis 100 %.
Reste toutefois posée une question d'importance : quelle méthode d'évaluation de l'office avez-vous retenue ? On constate en effet un écart substantiel entre les approches du texte lui-même, les estimations de l'étude d'impact ou tout simplement les évaluations diligentées par les professionnels eux-mêmes. Quels éléments déterminants seront pris en compte dans le calcul de la valeur de l'office ?
Je vous réponds – même si ce n'est pas l'habitude : il y a effectivement plusieurs modes de calculs. L'un d'entre eux consiste à utiliser le produit dit « demi-net »; c'est en particulier le choix des avoués eux-mêmes. Or cette référence est, pour plusieurs raisons, dépourvue de pertinence : le critère du produit demi-net a été abandonné depuis 1974, car on lui reprochait notamment de dépendre par trop des choix de gestion de l'officier ministériel et des décisions qu'il prend pour externaliser ou non les prestations que requiert le fonctionnement de son office.
Le critère retenu par la loi de 1971 n'a donc pas été retenu à nouveau pour le calcul de l'indemnisation du droit de présentation des commissaires-priseurs en l'an 2000, et il n'est pas plus question de le reprendre aujourd'hui : le calcul se fera sur la base de l'activité des cinq dernières années de l'office.
(L'amendement n° 71 est adopté.)
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je suis saisi d'un amendement n° 7 .
Mais peut-être pouvons considérer qu'il n'a plus de raison d'être…
J'ai évoqué tout à l'heure nos inquiétudes quant à la « juste indemnisation » des salariés – à supposer que le terme soit approprié : j'ai toujours l'impression qu'ils ont été abandonnés sur le bord de la route !
Sans polémiquer ni invoquer la lutte des classes, force est de constater que nous sommes passés, pour l'indemnisation de l'ensemble des études d'avoués, de 66 % à 92 % puis à 100 % ; pour ce qui est des salariés en revanche, la lecture de l'amendement n° 72 que va présenter le Gouvernement est décevante. Je prends acte du fait qu'il s'agisse d'un licenciement économique. Mais vous n'acceptez qu'une progression très faible des indemnités. L'ensemble des salariés sollicitaient, je vous le rappelle, une indemnisation à hauteur de trente mois de salaire dans l'hypothèse d'un tel licenciement économique ; le Gouvernement avait proposé au départ une indemnisation à hauteur de quatorze mois de salaire dans l'hypothèse la plus favorable. Vous avez certes amélioré votre projet initial, mais dans des proportions minimes : il faut avoir vingt-cinq ans d'ancienneté pour que l'indemnisation puisse passer de quatorze à seize mois. C'est bien ce que je disais tout à l'heure…
J'ai rencontré, à l'issue de notre dernière séance, un certain nombre de salariés – que j'aperçois d'ailleurs dans les tribunes ce soir. Ils m'ont dit qu'avec quinze, vingt ans d'ancienneté, ils allaient se retrouver, pardonnez-moi l'expression, à la rue.
C'est pour bon nombre d'entre eux un véritable désastre. Je connais les préoccupations de Mme la ministre d'État, et je sais que 380 postes seront réservés à des personnes susceptibles d'être intégrées à la fonction publique. Mais ce n'est pas suffisant, eu égard au nombre, à l'ancienneté et à la spécialisation professionnelle de ces salariés : la profession de clerc d'avoué est tout à fait spécifique…
Il sera difficile à ces personnels, en majorité féminins, de retrouver une activité professionnelle. J'aurais aimé que le Gouvernement soit aussi généreux avec eux qu'il l'a été avec les employeurs, et qu'il fasse un effort pour que l'indemnisation des salariés passe de quatorze à trente mois.
Je suis saisi d'un amendement n° 72 du Gouvernement.
La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux.
Disons-le clairement : l'analyse que je viens d'entendre ne correspond pas à la réalité.
Que voulons-nous ? D'abord permettre aux gens qui le peuvent de retrouver une activité – d'où l'effort fait, vous l'avez reconnu, au sein des tribunaux.
Nous voulons aussi aider les personnes qui ont le plus d'ancienneté, et qui seront sans doute celles qui auront les difficultés les plus grandes pour retrouver un emploi. Or l'effort du Gouvernement est ici au moins aussi important que celui fait pour les avoués : nous faisons – certes au bénéfice des plus âgés – plus que doubler le point de départ : les trente mois – revendiqués au départ comme un maximum par les intéressés – seront dépassés à partir de trente-huit ans d'ancienneté.
Certes. Ainsi, l'amendement n° 72 que je vous présente permet d'obtenir avec une ancienneté de vingt ans non plus 10,7 mois de salaire mais 11,33 mois. Avec une ancienneté de vingt-cinq ans, on passe de 14 à 16 mois ; avec une ancienneté de trente ans, on passe de 14 à 21,33 mois ; avec une ancienneté de trente-cinq ans, à 27,33 mois ; avec une ancienneté de quarante ans, à 34 mois d'indemnités. Il n'y a donc plus de plafonnement. C'est un élément très important : à partir de trente-six années d'ancienneté, ce mécanisme est plus avantageux que celui qui a été proposé pour les salariés des commissaires-priseurs en l'an 2000. Nous allons donc au-delà.
Ajoutons que ces indemnités sont considérées comme des indemnités légales : autrement dit, elles ne seront pas soumises à l'impôt sur le revenu et n'entraîneront pas de différé dans le paiement des indemnités de chômage.
Si cela n'est un progrès important, je ne sais pas comment il faut l'appeler !
L'amendement n° 72 n'a pas été examiné par la commission. Mais, à titre personnel, j'émets un avis favorable.
Je ferai juste une remarque : je trouve malsain que l'on persiste, intervention après intervention, à comparer la situation faite aux avoués avec celle qui est faite aux salariés. Cela n'a rien à voir.
Dans un cas, il s'agit de l'indemnisation d'un droit de présentation, dans l'autre, d'indemnités liées aux licenciements. Il faut clairement distinguer les deux situations et surtout ne pas chercher à monter les uns contre les autres. Je trouve cela très désagréable.
Il ne s'agit pas d'opposer deux catégories de personnes, employeurs et employés. Si les conséquences de ce texte sur leur avenir sont différentes, il reste que les uns comme les autres seront confrontées aux mêmes problèmes. Il faut arrêter ce débat.
Ce que nous souhaitons, c'est que les problématiques propres aux salariés soient effectivement prises en compte.
Selon les chiffres de l'étude d'impact dont nous disposons, l'ancienneté moyenne dans la profession est de 16,4 années. Ainsi que je l'ai dit en présentant la motion de rejet préalable, si nous avions pris le temps d'examiner, au-delà de ce chiffre, les situations individuelles – la chose n'aurait pas été difficile, avec seulement 1 850 intéressés –, nous aurions pu très précisément mesurer l'impact, par catégorie d'âge, par ancienneté, des mesures que vous proposez et apprécier ainsi leur véritable portée. Voilà ce que nous dénonçons, ni plus ni moins.
L'inquiétude des salariés est réelle et justifiée. L'indemnité que vous proposez ne concernera pas la majorité des personnes concernées par ces licenciements économiques. Ceux qui resteront sur la touche seront les plus jeunes dans la profession : or ce seront eux qui seront les moins indemnisées et qui seront les plus vulnérables. Voilà ce que nous dénonçons à travers cette lecture qui est faite de l'indemnisation.
(L'amendement n° 72 est adopté.)
Sur l'article 16, je suis saisi d'un amendement n° 73 du Gouvernement.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Cet amendement est destiné à atteindre l'objectif recherché par les amendements nos 13 et 48 qui sont déposés sur cet article et qui posent un problème de rédaction. L'objectif est de ramener de six à trois mois le délai de remboursement aux avoués des indemnités de licenciement qu'ils auront versées à leurs salariés, sachant que le président de la commission peut statuer seul, ce qui permet de gagner du temps.
L'amendement n'a pas été examiné en commission. À titre personnel, j'y suis favorable.
(L'amendement n° 73 est adopté.)
Dans un but d'harmonisation avec la formule retenue à l'article L.311-4 du code de justice administrative, nous proposons de substituer aux mots « plein contentieux » les mots « pleine juridiction ».
(L'amendement n° 62 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 16, amendé, est adopté.)
Sur l'article 19, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Philippe Duron.
Nous touchons ici à une des limites de ce projet de loi. Théoriquement, cette loi est faite pour simplifier la justice, la rendre plus accessible…
…et moins chère pour un certain nombre d'ayants droit. Or que constaterons-nous demain ? Que les coûts de la justice vont augmenter.
Pour un litige de 5 000 euros, le tarif des émoluments d'un avoué s'établit aujourd'hui à 248,59 euros.
Demain, il y aura un renchérissement du coût de la procédure d'environ 300 euros du fait de la taxe – pour autant qu'on puisse en mesurer le coût. Qui plus est, le Conseil national des barreaux a proposé ces derniers jours de fixer la part répétible des honoraires à 800 euros TTC, auxquels il faut ajouter un timbre électronique d'un montant de 60 euros ; soit un total qui s'élèvera à 1 160 euros pour une affaire assez simple, s'il n'y a pas d'incident de procédure. Autrement dit, on va vraisemblablement tripler le coût de la justice… Est-ce ainsi que l'on facilitera l'accès à la justice, les recours en appel des justiciables ? Cette affaire montre, une fois de plus, toute l'inanité de ce projet de loi.
La question de l'assiette de la taxe n'est pas clairement tranchée. L'appelant n'est pas toujours celui qui a provoqué le conflit judiciaire. La mettre sur le dos du seul appelant m'apparaît parfaitement pénalisant – d'autant qu'on ne sait pas toujours qui est l'appelant.
Si taxe il doit y avoir – puisque manifestement c'est le seul moyen qui a été retenu pour alimenter le fonds d'indemnisation –, je crois qu'il serait sage, en termes de justice fiscale, de justice sociale, de reconsidérer son assiette. Pourquoi l'appelant devrait-il être le seul visé par le recouvrement de cette taxe pour abonder le fonds ? Quelles justifications précises pouvez-vous apporter ?
Je suis saisi d'un amendement n° 16 .
La parole est à M. Jean-Michel Clément.
Avis défavorable, d'autant que la notion de « délais les plus brefs » reste tout de même un peu floue.
Même avis, d'autant que la création de la taxe figurera dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009 dont l'Assemblée sera saisie prochainement. Ce rapport n'est pas inutile mais, de fait, votre demande est satisfaite.
M. Duron a tout à l'heure parlé d'un triplement du coût pour le justiciable. Cela n'a pas de sens dans la mesure où, à côté de la tarification, il y a les honoraires libres. Il faut garder raison. Mme la garde des sceaux a rappelé tout à l'heure les montants : le coût moyen se situe aujourd'hui autour de 900 euros par affaire. La taxe envisagée sera de 350 euros.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 20.
La parole est à M. Jacques Valax, pour soutenir les amendements nos 17 et 9 rectifié .
Ils sont défendus.
(Les amendements nos 17 et 9 rectifié , repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 10 rectifié .
La parole est à Mme George Pau-Langevin.
Nous avons à plusieurs reprise demandé des rapports sur l'indemnisation des salariés ; l'amendement n° 10 traite du cas du versement d'indemnités pour départ prématuré. Il semble que l'on n'ait pas retenu la possibilité de qualifier les licenciements auxquels procèderont les avoués de licenciements économiques au-delà de la première année. Or nous savons que les procédures durent deux à trois ans. Il serait souhaitable, tant pour les avoués, pour la continuité des procédures que pour les personnels, que ceux-ci puissent bénéficier d'indemnités de licenciement au-delà de la première année, faute de quoi les études d'avoués perdront immédiatement leurs personnels qualifiés. Il serait bon que le processus se déroule non pas en une seule année mais sur deux ou trois ans afin que les choses se fassent en douceur.
L'amendement n° 72 du Gouvernement, qui a rétabli l'article 14, répond à cette préoccupation puisqu'il fixe la date limite au 31 décembre 2012. Cela laisse la marge souhaitée par les auteurs de l'amendement.
Même avis que le rapporteur : les indemnités pour licenciement économique pourront être versées jusqu'à fin 2012.
(L'amendement n ° 10 rectifié n'est pas adopté.)
Monsieur le président, ce bref rappel s'appuie sur l'article 58, alinéa 1, de notre règlement.
Nous sommes en train de débattre de sujets sur lesquels nous manquons cruellement d'informations. J'aurais souhaité avoir, pour le bon déroulement de la séance et avant d'aller plus loin sur les différents dispositifs qui nous restent à aborder, des précisions sur les points qui nous ont été annoncés par Mme le ministre et par M. le rapporteur relatifs à la taxe et à l'indemnisation des salariés.
On nous promet un certain nombre d'avancées au bénéfice des salariés ; mais à ce jour, nous n'avons aucun élément précis sur le décret. Il serait utile que l'on informe la représentation nationale sur les éléments qui permettraient d'apprécier de manière objective les dispositions sur lesquelles nous allons délibérer. Pour le moment, nous légiférons dans le flou le plus total.
Nous sommes dans le registre des incantations. On nous dit : nous allons indemniser les salariés, nous allons avoir des taxes assises sur certaines sommes, qui varient, etc. J'aimerais avoir des éléments plus précis pour le bon déroulement de la séance.
Je suis saisi d'un amendement n° 11 rectifié portant article additionnel après l'article 20.
C'est moi qui préside, pas vous, monsieur Valax !
La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour soutenir l'amendement n° 11 rectifié .
Il est défendu.
(L'amendement n° 11 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Sur l'article 21, je suis saisi d'un amendement n° 18 rectifié .
La parole est à M. Jean-Michel Clément.
L'amendement n° 18 rectifié vise à supprimer le délai fixé à cinq ans pendant lequel l'intégration dans les professions voisines sera possible. Si l'on considère que les avoués et leurs collaborateurs ayant réussi l'examen d'aptitude à la profession d'avoué sont aptes à intégrer les professions par exemple de notaires ou de commissaires priseurs au moment de la réforme, pourquoi en serait-il autrement six ans après ? Il nous semble nécessaire de faciliter au maximum la reconversion des personnes privées d'emploi du fait de cette réforme. Il existe des possibilités de réintégrer au bout d'un certain délai des professions par acquis de l'expérience. L'expérience acquise n'a pas à faire l'objet d'une barrière temporelle.
Avis défavorable. Le délai de cinq ans a paru tout à fait raisonnable à la commission, sachant que le passage à la profession d'avocat est possible de façon permanente.
Même avis défavorable, d'autant plus que, par le passé, ces délais ont toujours bien fonctionné et se sont avérés largement suffisants.
(L'amendement n° 18 rectifié n'est pas adopté.)
(L'article 21 est adopté.)
À l'article 22, je suis saisi d'un amendement n° 70 .
La parole est à Mme Christine Marin.
Cet amendement vise à supprimer, aux alinéas 1 et 2, les mots : « du chapitre Ier », afin que les collaborateurs diplômés justifiant d'une expérience professionnelle aient la possibilité de s'inscrire au barreau de leur choix dès l'entrée en vigueur de la loi.
Défavorable. Cette mesure peut, de prime abord, paraître intéressante pour les salariés, mais en réalité il n'en est rien, car elle bloquerait le passage à la profession d'avocat pour ceux qui ne rempliraient pas les conditions au 1er janvier 2011. Mieux vaut donc maintenir le texte tel qu'il est.
(L'amendement n° 70 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 39 .
La parole est à Mme Valérie Rosso-Debord.
L'article 22 du projet de loi dispense de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les collaborateurs d'avoué justifiant, au plus tard à la date d'entrée en vigueur du chapitre Ier de la loi, de la réussite à l'examen d'aptitude à la profession d'avoué, de même que ceux justifiant d'un nombre d'années de pratique professionnelle fixé par décret en Conseil d'État en fonction du niveau de diplôme obtenu.
Nous proposons de faire également bénéficier de cette mesure avantageuse les juristes salariés d'avocat, afin qu'il n'y ait pas de discriminations entre les deux parties qui vont constituer la nouvelle grande profession du droit.
Défavorable, car la problématique n'est pas la même que pour les salariés d'avoué. Il est plus intéressant de rester dans le domaine qui est celui de la loi aujourd'hui.
Nous n'avons pas intérêt à nous disperser. C'est un problème qui peut être posé ailleurs, mais pas ici. Je souhaite donc le retrait de cet amendement.
(L'amendement n° 39 est retiré.)
(L'article 22 est adopté.)
Je reviendrai sur le rappel au règlement qui a été fait tout à l'heure, car il me semble que les choses vont très vite, trop vite même, à telle enseigne que l'on se demande de quoi l'on parle et pourquoi l'on va si vite.
Nous pourrions demander une suspension de séance pour pouvoir respirer et parler posément de choses qui nous intéressent. Il est à peine vingt-deux heures et nous avons évacué vingt-deux articles en moins d'une demi-heure. Cela va trop vite !
Quant à l'amendement n° 19 , vous me répondrez peut-être que c'est une question secondaire, mais de nombreux stagiaires, par manque d'information, ne sont pas inscrits immédiatement sur le registre du stage tenu par la Chambre nationale des avoués. Il convient, par conséquent, que le délai d'un an requis coure à compter de l'embauche dans une étude. Par ailleurs, il est important de faciliter les passerelles pour les collaborateurs juristes afin d'assurer leur reconversion. Tel est l'objet de cet amendement très simple.
Cela dit, peut-être pourrions-nous, sous réserve de votre décision, monsieur le président, envisager une suspension de séance pour prendre le temps de revoir les dispositions restant à examiner.
Défavorable, car les salariés d'avoué seront dispensés du concours d'entrée au barreau s'ils sont inscrits sur le registre du stage depuis plus d'un an au 1er janvier 2011. Il s'agit pour eux d'une mesure favorable, puisqu'il est encore temps, pour ceux qui ne l'auraient pas fait, de s'inscrire au stage avant le 1er janvier 2010 de façon à bénéficier de l'année supplémentaire prévue par le texte.
Identique à celui de la commission. Le projet est équilibré sur ce point également. Il faut donner des perspectives aux jeunes professionnels qui s'inscrivent dans le cursus pour devenir avoués. Il est donc logique de prévoir une condition d'inscription sur le registre du stage.
(L'amendement n° 19 n'est pas adopté.)
(L'article 23 est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements portant articles additionnels après l'article 23.
La parole est à Mme Pascale Crozon, pour soutenir l'amendement n° 21 .
Par cet amendement, nous proposons qu'un rapport sur les reconversions possibles des salariés des études d'avoué soit remis au Parlement. Cela nous paraît extrêmement important. Est ici repris le dispositif prévu à l'article 51 de la loi du 31 juillet 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques. Les passerelles mentionnées étaient prévues pour les clercs et employés d'avoué, d'agréé et d'avocat.
Une partie des 1 850 salariés d'avoué perdront leur emploi du fait du présent projet de loi. Il est donc important que des passerelles soient mises en place afin de faciliter leur reconversion. Ce qui était possible en 1971 doit l'être aujourd'hui. Nous souhaitons qu'un rapport permette de faire le point sur ce problème.
Défavorable, toujours dans le même esprit : il y aura un rapport d'application, avec un rapporteur et un co-rapporteur.
(L'amendement n° 21 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 31 .
La parole est à M. Gérard Charasse.
Cet amendement vise à combler une lacune du texte, qui n'offre aucune disposition d'accompagnement professionnel spécifique aux salariés des études d'avoué en dehors des avoués eux-mêmes et de leurs collaborateurs justifiant de la réussite à un examen d'aptitude.
L'adoption de cet amendement assurerait aux autres salariés une meilleure transition vers le retour à l'emploi et éviterait à ces personnels, qui exercent souvent des fonctions non juridiques, de se sentir laissés pour compte.
Défavorable. L'idée peut paraître bonne, mais l'automaticité de la validation des acquis fait problème.
Nous partageons le souci de M. Charasse mais, comme l'a dit M. le rapporteur, la procédure de validation des acquis de l'expérience, qui se déroule au cas par cas, n'aurait pas la même valeur s'il y avait automaticité.
Cet argument ne me convainc pas. Nous avons affaire à des êtres humains, et à faire preuve de trop de rigueur nous n'irons pas jusqu'au bout. Il est anormal de laisser sur le bord du chemin un grand nombre de personnes travaillant dans les études d'avoué. Je ne vois pas en quoi la validation automatique des acquis de l'expérience dans l'ensemble de leur champ de compétences pose problème. Cela se pratique pour d'autres professions. J'en ai moi-même fait l'expérience.
(L'amendement n° 31 n'est pas adopté.)
Cet article a trait à la période transitoire durant laquelle l'avoué va cesser progressivement son activité et devenir avocat. L'avoué, qui travaillait avec une clientèle captive lui adressant directement des dossiers, se retrouvera dans un système concurrentiel bien plus large. Comme pour toutes les professions libérales, une période transitoire d'un an est sans doute trop courte pour se constituer une clientèle : dans le domaine médical, par exemple, il faut quatre à cinq ans. Il serait donc légitime de porter la durée de cette période à trois ans.
Je suis saisi d'un amendement n° 22 .
La parole est à M. Jean-Michel Clément.
L'article 24 précise que les avoués près les cours d'appel, lors de la période transitoire, « ne peuvent simultanément postuler et plaider dans les affaires introduites devant la cour d'appel avant le 1er janvier 2010 pour lesquelles la partie est déjà assistée d'un avocat, à moins que ce dernier renonce à cette assistance ».
Notre amendement vise à préciser qu'il reviendra à la partie au procès de décider, lors d'une affaire en instance, de se séparer de son avocat initial, tandis que la rédaction initiale donne au seul avocat la possibilité de se dessaisir.
La commission a émis un avis défavorable à cet amendement et souhaite maintenir le système tel qu'il est pendant l'année de transition.
(L'amendement n° 22 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 24 est adopté.)
À l'article 26, je suis saisi d'un amendement n° 23 .
La parole est à Mme Françoise Imbert.
Cet amendement vise à compléter l'alinéa 1 par la phrase suivante : « Toutefois, nonobstant cette renonciation, l'avoué conserve la possibilité, à tout moment, dans un délai de dix ans à compter de la date prévue à l'article 34, de s'inscrire au barreau de son choix. »
Le projet de loi dispose en effet que les avoués souhaitant ne pas exercer la profession d'avocat sont dans l'obligation de se manifester au plus tard trois mois avant la promulgation du chapitre Ier de la loi. Le délai de réflexion laissé aux avoués est donc très court. Notre amendement ouvre un délai de dix ans pendant lequel un ancien avoué pourra revenir sur sa décision et faire partie de la profession d'avocat.
Défavorable. En effet, l'inscription au barreau pourra se faire sans limite de temps, dans la mesure où le Gouvernement a prévu de modifier l'article 97 du décret du 27 novembre 1991.
Ainsi que Mme la garde des sceaux s'y est engagée, les projets de décret vous seront transmis, et celui-ci sera rédigé de telle manière que l'on pourra s'inscrire au-delà de dix ans.
Attention, il est restrictif par rapport au dispositif du Gouvernement !
(L'amendement n° 23 n'est pas adopté.)
(L'article 26 est adopté.)
À l'article 29, je suis saisi d'un amendement n° 25 .
La parole est à M. Jean-Michel Clément.
Je voudrais insister sur le rôle clé de la Chambre nationale des avoués, qui va prendre en charge un pan important de cette réforme. Avec la disparition des avoués, la Chambre va perdre leurs cotisations, et donc son financement.
Nous souhaitons donc avoir la certitude qu'un rapport très précis sur le financement, à compter du 1er janvier 2010, de la Chambre nationale des avoués, et notamment de ses frais de fonctionnement et de liquidation par le fonds d'indemnisation prévu à l'article 19, sera remis au Parlement avant le 30 juin 2010. En effet, si le texte est voté en l'état, certaines dispositions seront rapidement mises en oeuvre et il serait bon de disposer, dès le 30 juin 2010, d'une information suffisamment précise pour s'assurer de la bonne exécution des dispositions que nous allons voter, s'agissant de l'indemnisation des professionnels comme de leurs salariés. Il est important que la Chambre nationale des avoués soit rassurée et sache comment elle fonctionnera demain.
Défavorable. Je répète qu'un rapport général sera rédigé dans les six prochains mois sur l'application de la loi et les problèmes qu'elle pourrait poser. Ce travail sera mené en collaboration avec un rapporteur de l'opposition. La possibilité d'un second rapport est en outre prévue.
Nous ne sommes pas défavorables à cette proposition, et le Gouvernement était d'ailleurs prêt à s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée. Mais, puisque la commission s'est engagée à ce qu'un rapport global soit rédigé, cette solution me semble évidemment préférable. C'est pourquoi je vous suggère, monsieur Clément, de retirer votre amendement.
Chacun l'a compris, il est important que les décisions que nous allons prendre soient bien exécutées. La rédaction d'un rapport me semble de nature à sécuriser l'application du texte, et la date du 30 juin 2010, proposée pour son dépôt, ne paraît pas trop rapprochée, compte tenu de la rapidité avec laquelle les décisions seront prises une fois le texte voté. Cependant, puisque le rapporteur s'est engagé à ce qu'un rapport soit rédigé par la commission, je retire l'amendement.
(L'amendement n° 25 est retiré.)
(L'article 29 est adopté.)
À l'article 30, je suis saisi d'un amendement, n° 74 , du Gouvernement.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
La commission a voté l'amendement du Gouvernement proposant que seuls les avoués devenant avocats soient transférés à la Caisse nationale du barreau français pour leur année d'exercice professionnel en tant qu'avocats. Par conséquent, les modalités de représentation des avoués au sein de ladite Caisse doivent être modifiées pour être adaptées à cette situation nouvelle, qui ne justifie plus une représentation aménagée des avoués après le renouvellement des administrateurs et des membres de l'assemblée générale de la Caisse. C'est ce à quoi tend l'amendement n° 74 , par coordination avec la modification votée par la commission à l'article 8.
Elle n'a pas pu examiner l'amendement, mais j'y suis favorable à titre personnel.
(L'amendement n° 74 est adopté.)
À l'article 32, je suis saisi de trois amendements, nos 66 rectifié , 67 et 68 , de M. le rapporteur.
Les amendements nos 66 rectifié et 67 sont rédactionnels, l'amendement n° 68 est de coordination.
(Les amendements nos 66 rectifié , 67 et 68 , acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)
(L'article 32, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de huit amendements, nos 56 , 45 , 49 , 57 , 36 , 58 , 35 et 59 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 45 , 49 et 57 sont identiques entre eux, de même que les amendements nos 36 et 58 et que les amendements nos 35 et 59 .
La parole est à M. Michel Hunault, pour défendre les amendements nos 56 , 57 , 58 et 59 .
Contrairement à M. Valax, qui regrette que le rythme de notre débat soit trop rapide, je tiens à remercier Mme la garde des sceaux qu'il en soit ainsi. Elle a fait preuve d'une grande capacité d'écoute, qui a permis d'améliorer considérablement le projet de loi. Il y a quinze jours, en effet, sur les vingt-huit intervenants qui se sont exprimés en commission, tous refusaient de voter le projet en l'état.
Mme la garde des sceaux s'est déplacée à deux reprises pour assister à nos travaux. Elle a écouté les professionnels autant que la représentation nationale, et pris acte des préoccupations légitimes qui se sont exprimées, tant sur l'avenir des avoués et de leur personnel que sur l'intérêt général de la justice, auquel les avoués ont largement contribué. Plusieurs orateurs l'ont rappelé.
Le Gouvernement a fait des propositions qui ont permis de faire évoluer le taux d'indemnisation de 66 % à 92 %, puis à 100 % de la valeur des études.
Il s'est engagé à mettre en oeuvre un plan de soutien aux professionnels, permettant le versement d'indemnisations considérables, ce qui représente une avancée importante.
Enfin, Mme la garde des sceaux s'est engagée – avant même que le budget de la justice ne vienne en discussion – à prévoir des passerelles afin d'intégrer les personnels dans le fonctionnement de la justice.
Reste que la réforme est considérable. Depuis qu'elle assume ses fonctions, Mme la garde des sceaux est venue chaque semaine présenter des textes dans notre hémicycle, après que son prédécesseur a engagé la réforme de la carte judiciaire, tandis que celle de la procédure civile sera bientôt débattue. Ainsi, il faut replacer la suppression des avoués dans un vaste mouvement de réforme de la procédure.
C'est pourquoi, au nom de mon groupe et dans un souci de cohérence avec les projets gouvernementaux, j'interroge le Gouvernement sur la date d'application de la réforme. C'est sur ce point que portent les quatre amendements que je soutiens, et qui tendent respectivement à repousser cette date de 2011 à 2015, 2014, 2013 et 2012. Au-delà du sort des avoués et de leur personnel, cette proposition vise au bon fonctionnement de la justice, dont nous sommes tous responsables.
Dans le rapport que j'ai rédigé avec Jean-Pierre Marcon à la demande de M. Copé, nous avons préconisé que soit ménagée une période transitoire de trois à cinq ans, afin que les avoués puissent boucler les affaires en cours et disposent d'un temps suffisant pour se constituer une clientèle.
Cette période permettrait aux avocats souhaitant effectuer les anciennes prestations des avoués de s'y préparer en se dotant du système de communication nécessaire avec les cours d'appel. La période d'un an prévue par le texte nous semble trop courte à cet égard.
La parole est à M. Sauveur Gandolfi-Scheit, pour soutenir l'amendement n° 49 .
Cet amendement vise à permettre aux avoués d'exercer la profession d'avocat tout en conservant leur monopole devant la cour d'appel pendant une période de quatre ans.
Cette phase transitionnelle paraît justifiée à plus d'un titre. Elle laissera aux avoués le temps de se reclasser pour exercer au mieux la profession d'avocat. Elle atténuera de manière notable le préjudice professionnel subi par les avoués. Enfin, elle réduira les perturbations qui résulteront de la suppression de la profession, en laissant le temps aux avoués de boucler leurs dossiers et aux avocats souhaitant effectuer les anciennes prestations des avoués de s'y préparer et de se doter du système de communication électronique nécessaire avec les cours d'appel.
La commission a émis un avis défavorable. Voilà longtemps, en effet, que la profession s'interroge sur son avenir. Il faudra certes aller vite, nous en sommes conscients. Mais nous sommes également convaincus que, pour les avoués comme pour leurs salariés, un délai transitoire d'un an sera suffisant. Il ne serait bon pour personne de repousser indéfiniment l'application du texte.
Les orateurs qui se sont exprimés ont bien voulu souligner que le Gouvernement a été à l'écoute des parlementaires et de la profession, qu'il a le souci de l'aider. Même s'il existe aujourd'hui des dispositifs à cette fin, je souhaite que les cas soient traités individuellement, et nous nous y employons. C'est pourquoi j'ai souhaité connaître dans le détail la situation de chacun. D'importantes avancées ont déjà été réalisées.
Pour autant, je ne peux pas donner raison aux auteurs de ces amendements. En effet, une période de transition est toujours un temps d'incertitude, pendant laquelle on n'est plus dans la situation ancienne et pas encore dans la nouvelle, ce qui, psychologiquement, est toujours difficile à assumer.
Bien sûr, des difficultés techniques peuvent se poser, mais nous avons essayé d'en tenir compte. D'ailleurs, nous ne découvrons pas ce soir la nécessité d'évoluer. Nous en sommes conscients depuis plus d'un an, et nous sommes prêts à accompagner la profession.
Pour avoir procédé, au cours des dernières années, à des rapprochements entre des personnes de statuts et de milieux divers, j'ai pu constater que faire cohabiter des personnes de situation différente est extrêmement difficile. Plus vite chacun s'adaptera au nouveau statut, mieux cela vaudra.
J'ajoute que, dès 2010, je vais créer 380 postes, qui sont d'ores et déjà prévus dans le projet de loi de finances. Reporter la réforme reviendrait à différer cet important investissement de l'État, c'est-à-dire à laisser passer certaines chances.
Mieux vaut – et je suis prête à le faire – prendre tous les moyens sur le plan technique et juridique, ainsi que par un investissement personnel pour régler le problème humain, dont je comprends tout à fait la réalité, plutôt que d'entrer dans une période transitoire qui s'éterniserait. C'est pourquoi je vous demande de retirer ces amendements.
Sur cet article 34, nous menons un dernier combat. Vous nous avez dit, madame la garde des sceaux, savoir d'expérience que, lorsque les situations sont difficiles, il faut trancher dans le vif et aller très vite pour ne pas laisser les gens s'installer dans l'incertitude. Ces gens, les avoués, leur personnel, je les ai écoutés : tous disent qu'ils ont besoin de cette période de transition de quelques années. La mener jusqu'en 2 014 permettrait à chacun de se stabiliser professionnellement, après le coup à la fois matériel et psychologique qu'ils viennent de recevoir, et d'aborder l'avenir avec sérénité.
J'ai regardé avec grande attention les amendements. Dans l'exposé sommaire de son amendement n° 46 , non défendu, M. Perben écrit que « ce délai d'un an est totalement insuffisant pour permettre aux avoués de se reconvertir dans des conditions satisfaisantes » et qu'« un délai plus long serait, au surplus, de nature à permettre la reconversion des salariés des études d'avoués ».Quant à Mme Barèges, dans l'exposé sommaire de son amendement n° 2 , également non défendu, elle affirme que la suppression des avoués « va désorganiser le système judiciaire, où cette profession jouait un rôle irremplaçable ».
M. Perben fait encore valoir que « le délai qu'il convient d'adopter doit être cohérent avec celui de l'entrée en vigueur de la nouvelle carte judiciaire annoncée définissant le futur paysage des cours d'appel. Celui-ci, en effet, aura des conséquences très fortes sur les possibilités de reconversion effective des avoués et de leurs salariés. »
Enfin, vous venez d'indiquer que 380 postes seraient créés en 2010 dans les greffes et l'administration judiciaire.
Créez-en autant en 2011, en 2012 et en 2 013, et ainsi les 1 850 salariés des avoués seront intégrés progressivement. Cette bonne décision permettrait à ces salariés, aujourd'hui plongés dans le dénuement et la tristesse, de retrouver une activité. C'est ce que je leur souhaite. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la garde des sceaux, je vous ai écoutée avec beaucoup d'attention, et je vais retirer nos amendements car je choisis de vous faire confiance. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous venez de vous engager solennellement en annonçant la création de 380 postes. Vous pouvez sourire, mais entre la commission et la séance publique, Mme la garde des sceaux a tenu parole. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Je lui en sais gré au nom de mon groupe, des avoués et de leur personnel.
Madame la garde des sceaux, vous dites que les choses doivent aller vite car prolonger la situation créerait du désarroi. Mais cela implique – et je vous fais confiance – d'associer la représentation nationale au suivi de la mise en place de cette réforme, avec les représentants des avoués et de leur personnel. On ne supprime pas ainsi une profession qui a rendu tant de services et joué un rôle irremplaçable dans le bon fonctionnement de la justice,…
…car au-delà des chiffres il y a des hommes.
Je retire donc nos amendements, mais je pense qu'il faut que vous pesiez de toute votre autorité pour mettre en place des cellules de suivi, en liaison avec le rapporteur et des membres de la représentation nationale, afin de vous assurer que les mesures que vous annoncez seront effectives et que la réforme sera vécue le moins mal possible.
Je vais, moi aussi, retirer nos amendements. En effet, quand nous les avons déposés, nous n'étions pas encore informés des avancées qui ont eu lieu sur ce texte. Tel qu'il était alors, il semblait très difficilement acceptable par les avoués. Les améliorations apportées sont plus que substantielles, et croyez bien que je le dis après avoir reçu également les membres de la profession – mais nous ne sommes pas comme vous, mesdames et messieurs de la gauche, à sauter sur tout ce qui bouge. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est vraiment très désagréable que d'entendre une telle démagogie de votre part (Protestations sur les bancs du groupe SRC) à seule fin d'amuser la galerie – au sens propre du terme ! C'est vraiment dommage, et j'estime avoir bien plus de respect pour toutes ces personnes qui nous écoutent aujourd'hui.
Si la loi doit entrer en vigueur, il faut que ce soit rapidement, car les conditions que vous offrez aujourd'hui, madame la garde des sceaux, sont bien supérieures à ce qu'elles étaient auparavant, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je suis saisi d'un amendement n° 32 rectifié .
La parole est à M. Gérard Charasse.
On a annoncé, dans le cadre de l'examen du texte, un projet de suppression par voie réglementaire de la possibilité de dépôt physique des documents liés à une instance devant les cours d'appel. Notre amendement vise d'une part à assurer l'information et l'implication du Parlement dans ce choix qui touche directement aux conditions de garantie des droits et libertés fondamentales, et d'autre part à réaffirmer la nécessité de conserver, même de façon subsidiaire, la possibilité de dépôt physique des documents auprès des tribunaux.
Avis défavorable, avec l'argument habituel en ce qui concerne les rapports. Néanmoins, tous les points que vous avez évoqués et pour lesquels vous demandez un rapport seront examinés, je m'y engage, dans le cadre du rapport d'application.
Je tiens à rassurer M. Charasse. Le Gouvernement n'envisage pas de modifier les textes en ce qui concerne la première instance. Le dispositif prévu en 2005 est entré en vigueur le 1er janvier dernier et la dématérialisation des pièces est une simple faculté donnée aux parties. En appel, nous envisageons effectivement de rendre progressivement la dématérialisation obligatoire à partir du 1er janvier 2011, mais uniquement pour les procédures exigeant le recours à un avocat. Le justiciable, dans les procédures sans avocat, pourra toujours utiliser le support papier. Cela devrait vous rassurer complètement.
(L'amendement n° 32 rectifié n'est pas adopté.)
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, j'indique à l'Assemblée que la commission en a ainsi rédigé le titre : « projet de loi portant réforme de la représentation devant les cours d'appel ».
Dans les explications de vote, la parole est à M. Philippe Gosselin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Les débats se terminent dans l'apaisement. Il y a quelques jours encore, soufflait un petit vent, mais la tempête ne s'est pas levée.
Au départ, nous ne voyions qu'un squelette. On nous propose désormais la substantifique moelle. De grandes avancées ont été faites ces dernières heures. Sans doute tout n'est-il pas parfait, mais nous avons réussi, sur des points essentiels, à rassurer les avoués, leurs salariés et leurs familles, grâce à un texte équilibré.
Les passerelles prévues pour les avoués sont solides. Je fais confiance à la profession pour s'adapter. Il sera possible d'entrer dans d'autres professions juridiques et judiciaires ; des décrets en préciseront les modalités. J'apprécie, madame la ministre, qu'ils soient tenus à notre disposition, car trop souvent les décrets sont en décalage avec le texte voté. S'agissant de l'indemnisation, on est passé à 100 %, même s'il reste des aspects réglementaires à régler : on est loin des 66 % de départ qui constituaient une spoliation.
Pour les salariés, les créations de postes dès le printemps 2010, qui seront inscrites dans la prochaine loi de finances, montrent que le Gouvernement a la volonté de trouver rapidement une solution, et je ne doute pas que personne ne sera laissé au bord du chemin.
Cette réforme participe de la bonne administration de la justice. Je comprends la nostalgie, l'inquiétude. Mais il en allait de même lors de la réforme de 1971, et aujourd'hui personne ne voudrait revenir en arrière. C'est une nouvelle étape de la modernisation de la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Notre groupe ne votera pas ce texte, pour plusieurs raisons.
D'abord, depuis plusieurs semaines, nous légiférons à l'aveugle, avec des informations partiales, partielles, parcimonieuses. Et force est de constater ce soir que c'est un véritable licenciement économique qui va frapper 1 850 salariés, dès lors que l'on a décidé qu'il n'y aurait pas de période transitoire, suite au retrait des amendements à l'article 34.
Les salariés qui nous écoutent vont quitter l'hémicycle ce soir en sachant que c'est le licenciement qui les attend. Nous ne pouvons nous associer à ce scandale social.
Notre deuxième argument concerne le fonctionnement de l'institution judiciaire. En effet, cette réforme va entraîner une augmentation du nombre de procédures en appel alors que les greffes ne sont pas prêts à faire face à un afflux de dossiers. Il en résultera un engorgement de la justice et un ralentissement des procédures, au détriment des intérêts du justiciable.
Le coût de la réforme constitue un troisième argument. En la matière, le Gouvernement n'est pas prêt.
J'en veux pour preuve l'absence dans le projet de loi de finances pour 2010 des mesures d'accompagnement de cette réforme. Elles ne seront prises que dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Enfin, il n'y a pas eu de réflexion d'ensemble sur la réforme de la procédure civile. Or je répète que la place des avoués aurait dû être appréciée en prenant le temps de la réflexion – d'autant qu'il est question d'une future réforme des cours d'appels. Nous avons perdu l'occasion de réfléchir globalement à l'adaptation de la carte judiciaire et aux pôles de l'instruction en tenant compte du rôle des avoués.
Finalement, ce soir, je ne pense pas que les salariés soient rassurés. On nous annonce des créations de postes, mais de quoi parlons-nous ? Essentiellement de postes de catégorie C puisque nous savons que moins de vingt postes de catégorie A seront ouverts. Des promesses ont été faites, mais nous n'avons reçu aucune assurance et nous ne savons pas qui elles concernent vraiment.
Quant à la taxe prévue, nous ne savons pas comment elle sera fixée.
Pour toutes les raisons que je viens de développer, nous ne pouvons pas voter un texte mal préparé, mal écrit, mal fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Michel Vaxès, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Lors de la discussion générale, je constatais déjà le pouvoir exorbitant de l'exécutif en comparaison de l'impuissance de la représentation nationale à participer à l'élaboration de la loi.
Je confirme mes propos. Le spectacle auquel nous venons d'assister en est une illustration affligeante. Il ne s'agissait pas d'un débat apaisé, comme certains le prétendent, mais plutôt d'un non-débat. En moins d'une heure, notre assemblée a « exécuté » les trente-quatre articles du projet de loi.
En fait, cela n'est pas étonnant : les seuls amendements importants à un texte de cette nature ont forcement une incidence financière. Or nous ne pouvons pas en discuter. Nous pouvons certes les déposer, mais c'est pour nous entendre immédiatement répondre qu'ils sont écartés en raison de leur incidence financière. Sur un projet comme celui-ci, l'Assemblée nationale ne peut donc pas élaborer la loi.
Même les amendements déposés par la majorité ne sont pas arrivés en séance. En fait, l'affaire était entendue : avec la complicité de certains d'entre vous – certains, pas tous –, l'exécutif avait déjà tout réglé ; il ne fallait plus rien toucher.
Je suis aussi déçu que le sont les personnels des études d'avoué.
Je pense plus particulièrement à ceux qui ont quinze ans d'ancienneté. Quinze ans, ce n'est pas rien : c'est le tiers d'une carrière. Pourtant ceux-là n'auront rien !
Entre quinze et vingt-cinq ans d'ancienneté, les salariés n'auront pas grand-chose. Au-delà de vingt-cinq ans, ce sera un peu mieux que ce que prévoyait le projet de loi initial.
Ce projet de loi initial était d'ailleurs catastrophique. Si je dois faire une remarque positive, madame la garde des sceaux, ce sera pour constater qu'entre le projet de loi initial et celui sur lequel nous votons ce soir, vous avez tout de même pas mal travaillé. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe UMP.)
Cela montre bien l'utilité des échanges avec la représentation nationale !
Cependant cette évolution – que nous devons à Mme la garde des sceaux, monsieur Gosselin, et non pas à vous – demeure très insuffisante au regard du sort qui sera réservé à la majorité des salariés qui se retrouveront demain au chômage en raison de la suppression de leur emploi par le Gouvernement.
Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne votera pas ce projet de loi. Nous espérons qu'il reviendra du Sénat enrichi de quelques améliorations inspirées des observations que nous avons présentées. Nous comptons aussi sur l'action des personnels lésés par le texte à la suite de cette première lecture à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la garde des sceaux, au nom du groupe Nouveau Centre, je choisis de vous faire confiance.
Vous avez montré l'attention que vous portiez à cette profession d'avoué qui va disparaître. De véritables questions se posaient pour les avoués et leurs personnels ; vous leur avez apporté des réponses très concrètes.
Je m'adresse à mon collègue Philippe Gosselin. J'ai entendu ses explications de vote au nom du groupe majoritaire. Je soutiens le Gouvernement dans ses réformes, mais prenons garde de ne pas employer de mots qui blessent. Vous dites que cette réforme est faite « dans l'intérêt de la justice » ; pour ma part, j'insiste sur le fait que les avoués ont joué au cours de la dernière décennie un rôle essentiel et irremplaçable dans le bon fonctionnement de la justice.
La suppression des avoués n'est donc pas sans poser des questions légitimes sur le bon fonctionnement de la justice.
Madame la garde des sceaux, le soutien que je vous apporte est donc vigilant vis-à-vis des engagements que vous avez pris, que ce soit en matière d'indemnisation, ou envers les personnels.
Pour ce qui concerne l'essentiel, c'est-à-dire le bon fonctionnement de la justice, la suppression des avoués pose d'importantes questions. Nous nous retrouverons prochainement pour voter d'autres réformes, notamment celle de la procédure civile, et, à cette occasion, la suppression des avoués devra s'accompagner d'engagements précis.
Madame la garde des sceaux, durant ces quelques mois que vous venez de passer à la Chancellerie, nous avons pu constater votre capacité à prendre le dossier de la justice à bras-le-corps en apportant des réponses concrètes. Au nom de mes collègues du groupe Nouveau Centre, je vous apporte donc mon soutien pour cette réforme.
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Je veux remercier le président de la commission des lois et le rapporteur, ainsi que tous ceux qui sont intervenus dans les débats et, au-delà, tous ceux qui ont permis de rechercher ensemble des solutions pour améliorer ce projet de loi.
Je ne peux que regretter que la gauche ait refusé cette reforme…
…comme elle refuse toutes les réformes. Je pense qu'il s'agit là d'un véritable problème, car la réforme est nécessaire pour faire face aux enjeux de l'avenir. Les Français ne peuvent d'ailleurs que regretter cette attitude de l'opposition ; ils ont tendance à le lui montrer.
Je déplore aussi que l'opposition affiche un certain refus du débat parlementaire, qui permet pourtant d'améliorer les textes. (Approbation sur les bancs du groupe UMP.) Je n'accepte pas que l'on nous reproche de faire des propositions à la dernière minute, comme s'il fallait tout remettre à plat dès que le Gouvernement souhaite apporter une amélioration aux textes durant la séance. Jusque dans l'hémicycle, nous pouvons et nous devons apporter des réponses qui améliorent les textes en discussion : c'est tout l'intérêt du dialogue parlementaire. C'est ainsi que je le conçois, et vous avez constaté que, sur un certain nombre de textes, j'avais accepté des amendements, y compris ceux venant de l'opposition quand elle daigne en déposer (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), dès lors qu'ils étaient susceptibles d'améliorer un projet de loi.
Je me réjouis du travail que nous avons mené depuis plusieurs semaines avec la majorité pour apporter des réponses concrètes et humaines à des hommes et des femmes confrontés à un bouleversement de leur vie future. Je ne les oublierai pas.
Je propose que nous poursuivions ensemble ce que nous avons commencé en commun en organisant un petit groupe de travail. Je demanderai au rapporteur d'y participer, ainsi qu'à des représentants de la profession qui rejoindront des parlementaires afin de suivre, trimestre après trimestre, la mise en oeuvre de la loi. Il s'agit là d'une garantie supplémentaire. Monsieur le président de la commission des lois, cette initiative ne concurrence en rien les rapports qui pourraient être rédigés à l'initiative de votre commission ; il s'agit d'une façon de bien travailler ensemble.
Pour y parvenir, j'ai également voulu vous présenter les projets de décrets car je n'ai rien à cacher.
Nous avons commencé à travailler ensemble, je souhaite que nous continuions en pensant toujours à ces hommes et à ces femmes, auxquels nous proposons d'être associés à la construction de la justice de demain. Cette justice devra être en mesure de répondre aux attentes des Français, aux besoins des entreprises françaises soumises à la concurrence internationale et, tout simplement, aux exigences de rayonnement de la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Prochaine séance, mercredi 7 octobre à quinze heures :
Débat sur les suites du sommet du G20 ;
Projet de loi relatif à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma