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Séance en hémicycle du 18 février 2010 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

L'ordre du jour appelle la suite du débat sur les collectivités territoriales.

Nous continuons d'entendre les orateurs inscrits.

La parole est à M. Michel Piron.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, mes chers collègues, à l'occasion de ce débat et en préambule à la réforme des collectivités territoriales, nous pouvons peut-être nous poser trois questions : pourquoi la réforme, comment et jusqu'où réformer ?

Pour répondre à la question « pourquoi la réforme », je partirai d'un constat qui mérite peut-être d'être rappelé. Les démocraties qui nous entourent en Europe ont toutes, sans exception, accompli de très profondes réformes de leur système de gouvernance. En dehors de l'Allemagne – qui est devenu un État fédéral après la guerre, ce qui n'est certes pas rien –, je pense essentiellement à l'Italie avec les réformes Bassanini relatives notamment à l'État, à l'Espagne dont la réforme régionale a été tellement considérable que ce pays est aujourd'hui peut-être même allé en matière de décentralisation au-delà de certains États fédéraux, je pense enfin à la loi de dévolution anglaise ; je pourrais également évoquer la Suède. Alors que tous les pays qui nous entourent ont clairement choisi la décentralisation assumée, il me semble que notre pays ne s'est toujours pas prononcé entre une décentralisation inachevée – ne parle-t-on pas, d'ailleurs, d'acte II en attendant l'acte III ? – et une centralisation perpétuée, avec, notamment, l'extension du champ réglementaire et normatif.

S'interroger sur « pourquoi la réforme » permet certainement de s'acheminer vers une réponse.

Comment réformer ? Le dernier rapport peut-être le plus célèbre parmi beaucoup d'autres commis depuis plusieurs années – celui de M. Balladur et de son comité – a soulevé de très bonnes questions, notamment sur l'ensemble de notre gouvernance territoriale, dont il a rappelé la complexité. Ce rapport mentionne très utilement que nous sommes les seuls en Europe à compter, outre l'État, quatre niveaux qui exercent, de fait – et j'insiste sur ce mot – des responsabilités de collectivités territoriales et qui lèvent l'impôt. Pourquoi dis-je « de fait » ? Il y a, certes, les régions, les départements et les communes, mais qui pourrait nier qu'aujourd'hui les communautés, dans leurs diverses formes – communautés d'agglomération, communautés urbaines, communautés de communes –, exercent, de fait, de véritables responsabilités de collectivités territoriales ? Nous sommes, je le répète, les seuls à avoir cette configuration. Ainsi, les textes que nous propose le Gouvernement – et dont nous débattrons plus tard dans le détail – reposent, me semble-t-il, très utilement et fort justement sur deux couples, appellation que je préfère à celle de « blocs », car elle est plus tendre et sans doute plus conforme à l'ouverture que vous savez marquer dans ce débat. Le premier couple est celui de l'intercommunalité et de la commune et le second celui des régions et des départements.

Le texte relatif à la relation intercommunalité-communes, en permettant une intégration certainement beaucoup plus forte, mais surtout une coordination nettement meilleure grâce à l'intercommunalité, donc en facilitant la mutualisation des ressources, ouvre des perspectives fort intéressantes. Parmi les signes forts de l'intercommunalisation des politiques communales, je citerai notamment la future élection au suffrage universel direct fléché des conseillers communautaires dans les communes de plus de 500 habitants. Ce n'est pas un signe mince. Il est évident qu'en positionnant d'emblée, dans le débat communal et dans l'élection communale, l'élection parallèle et concomitante des délégués intercommunaux, le débat communal devra s'ouvrir, au sens moral du terme, aux questions intercommunales. De ce point de vue, que des élections communales donnent l'occasion de s'interroger également sur la dimension intercommunale des problèmes me semble être une excellente initiative.

S'agissant du chapitre sur le couple intercommunalité-communes, j'indiquerai également que la question des métropoles, envisagée notamment par le Sénat, me semble avoir été quelque peu édulcorée. La façon dont les métropoles ont été traitées à l'aune de cette première lecture me laisse, je l'avoue, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans une grande et profonde perplexité. Quel intérêt y aurait-il, en effet, à créer une nouvelle catégorie – qui ne serait finalement qu'une communauté urbaine légèrement améliorée ou, pis, édulcorée –, donc à ajouter une collectivité territoriale à un paysage dont tout le monde s'accorde à dire qu'il est déjà aujourd'hui beaucoup trop complexe ? Le sens de ces métropoles, leur portée et leur contenu me semblent devoir faire l'objet de futures réflexions et d'un débat certainement très ouvert.

L'achèvement de la carte intercommunale n'est pas non plus une mince question. On peut certainement aussi très utilement s'interroger de nouveau sur la date de 2014. Il est probable que, plus on repoussera la date de l'achèvement de cette carte, plus on retardera le début de la réflexion sur les élus. En tout état de cause, nous pourrions également en discuter. En revanche, et comme l'a recommandé le rapport Balladur, il me semble sage, compte tenu du paysage national dans lequel nous nous trouvons, que l'Ile-de-France fasse bien l'objet d'un traitement spécial. Je ne ferai aucun commentaire sur le Grand Paris, mais je rappelle que l'Ile-de-France, avec ses spécificités, est très complexe. De toute évidence, il convient de traiter le problème en tenant compte de sa particularité. Ce ne doit pas être, en tout état de cause, le parent pauvre du traitement national.

Concernant le couple région-départements, je m'interroge toujours sur le « comment ». La création du conseiller territorial est incontestablement une bonne idée. Je ne parle pas de l'illusion juridico-lyrique des compétences exclusives, mais du fonctionnement concret de nos deux assemblées, région et département. Le fait que des élus siègent dans deux assemblées peut nous laisser un espoir. Ainsi – et je le souhaite –, quant un conseiller territorial aura instruit un dossier dans une assemblée, il n'aura pas forcément envie, s'il veut éviter d'être redondant, de le présenter de nouveau dans la seconde assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Que ce qui a été traité au niveau départemental ne le soit pas au niveau régional, et inversement, est probablement la meilleure garantie de parvenir à supprimer la double instruction, laquelle engendre elle-même une double administration, des délais et des coûts supplémentaires dont nous pourrions utilement nous passer. Bien sûr, tout reste à débattre. Toutefois, s'agissant du conseiller territorial, je ne ferai pas l'impasse sur la question difficile, importante et je dirai même grave, du mode de scrutin qui sera retenu. En tout état de cause – et j'ai bien entendu le message du Gouvernement qui a fait preuve d'une grande ouverture sur ce point –, je suis de ceux qui pensent que, si le scrutin de liste à un tour avec une représentation proportionnelle peut se justifier dans des cadres territoriaux à définir, le scrutin uninominal aurait tout à gagner à être à deux tours, et ce pour une raison très simple : le premier tour est l'expression de la diversité et le choix de ceux dont on est le plus proche et le second tour est l'expression de la nécessité de gouverner et du choix de ceux dont nous sommes les moins éloignés. Si cette constatation est très ancienne – Condorcet a, en effet, parfaitement médité sur ce point – nous ne sommes peut-être pas obligés de prendre 250 ans de retard en termes de réflexion ! (Applaudissements ironiques sur les bancs du groupe SRC.) Nous aurons ce débat, lequel n'est ni neutre ni négligeable.

Enfin, je tiens en conclusion à indiquer que, dans cette affaire qui n'est pas mince, c'est purement et simplement la recherche d'une meilleure gouvernance de notre pays qui est en jeu. C'est la question de la gouvernance dans le rapport des collectivités entre elles, dans le rapport communes-intercommunalité, dans le rapport région-départements, mais c'est aussi celle d'une meilleure gouvernance dans le rapport de ces collectivités avec l'État et dans celui de l'État avec ces collectivités. Je suis parfois étonné de constater qu'on a très souvent tendance à déconnecter la réforme de l'État de celle des collectivités territoriales et à considérer la réforme territoriale indépendamment de celle de l'État. Il est évident que ce qui nous interpelle aujourd'hui, c'est que soit mis en place un meilleur service public, que soit mieux assuré l'intérêt général, qui exige une excellente efficience des instances responsables.

À la question « qui fait quoi ? », on ne peut pas répondre simplement par des réponses sectorielles. Nous devons avoir une vision d'ensemble pour savoir, là où l'État n'a plus à être, qui prend sa place ; pour savoir, là où l'État n'est pas, qui assume, et pour savoir, là où les collectivités n'assument pas, comment l'État jouera son rôle. Nous devons donc nous interroger sur une meilleure articulation de l'ensemble de la gouvernance.

À la question « qui fait quoi ? », je me permettrai de répondre en suggérant une méthode. Si nous commençons par le « qui ? », nous n'aurons que des querelles de pouvoir et peut-être de vanité, chacun s'estimant apte à répondre à la question « Je peux faire quoi ? ». Or, si nous commençons par la question « quoi ? », « pour quoi faire ? » – transport ferroviaire, terrains d'aviation, universités, santé, CHU, services sociaux –, je suis persuadé que nous saurons, alors, trouver la réponse à « qui peut le mieux répondre à quoi ? ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, à l'occasion de ce débat initié par le groupe socialiste, radical et citoyen, je souhaite aborder la question de l'article 35 du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, censé clarifier les compétences, qui prévoit la suppression de la clause de compétence générale pour les régions et les départements.

Si le texte devait être adopté en l'état, les conséquences seraient extrêmement négatives pour nos territoires, les collectivités départementales et régionales n'ayant plus la possibilité de financer un certain nombre de compétences facultatives comme la culture, le tourisme, la vie associative ou le sport.

Si je prends la parole dans cette discussion, c'est en tant que rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour le budget « Sports, jeunesse et vie associative », mais aussi en tant qu'élu local, comme un grand nombre d'entre nous cet après-midi, et conseiller général de la Loire.

L'article 35 du projet de loi qui a été voté par le Sénat le 4 février dernier dispose que la région et le département exercent, en principe exclusivement, les compétences qui leur sont attribuées par la loi. Dès lors que la loi a attribué une compétence à l'une de ces collectivités, cette compétence ne peut être exercée par une autre collectivité.

Un certain flou, vous en conviendrez, entoure la rédaction de cet article, qui renvoie à une future loi devant être adoptée dans les douze mois la répartition des compétences des régions et des départements.

Le Président de la République a été très clair dans son discours sur l'avenir des territoires ruraux le 9 février dans le Loir-et-Cher. La commune, on n'y touche pas, a-t-il déclaré à cette occasion. L'idée, c'est d'arrêter avec la clause de compétence générale pour le département et la région.

En clair, cela signifie qu'il a bien confirmé la suppression de la clause de compétence générale pour ces deux collectivités, qui n'auront plus la faculté de financer, en plus de leurs compétences obligatoires, des actions facultatives pourtant indispensables en matière d'aménagement du territoire et de solidarité entre les populations.

Une telle décision aurait des répercussions considérables au niveau local pour le monde associatif et le mouvement sportif, qui se verraient privés des financements ou subventions indispensables à leur pérennité. Il faut savoir que les départements et les régions contribuent au budget des associations loi de 1901 à hauteur de 15 % environ sur un budget total annuel de 60 milliards d'euros.

Pour le sport, domaine que je connais le mieux, les collectivités territoriales assurent 75 % des financements publics, soit près de 10 milliards d'euros. L'État assure un peu plus de 3 milliards d'euros si l'on intègre le sport scolaire. Sur les dix milliards des collectivités, 90 % des dépenses sont faites par les communes, essentiellement pour des équipements sportifs, mais les régions et les départements interviennent à hauteur de 1,2 milliard d'euros. À titre de comparaison, le budget du sport s'élève en 2010 à 1 678 millions d'euros.

Le financement public du sport par les régions et les départements est donc le double du budget du ministère des sports. L'enjeu est considérable, et le mouvement sportif, par le biais du comité national olympique et sportif français et de son président, Denis Masseglia, l'a bien compris en se mobilisant très tôt sur cette question, car c'est bien l'avenir du modèle sportif français ancré dans les territoires qui est en jeu.

Je veux prendre pour exemple le territoire où je suis élu.

En Rhône-Alpes, le budget du sport de la région représente 12 millions d'euros. Certes, cette somme ne représente que 0,7 % du budget total de la région, mais ce budget, sous l'impulsion de Thierry Philip, vice-président du conseil régional, permet d'intervenir pour accompagner le mouvement sportif régional à travers les ligues, de développer l'emploi associatif avec les emplois tremplins, de baisser le prix des licences sportives pour les lycéens, de favoriser la pratique sportive pour les publics qui en sont le plus éloignés pour des raisons sociales, géographiques ou physiques, de soutenir les centres de formation, en particulier les trente-cinq pôles espoir en Rhône-Alpes, de financer un centre de ressources pour les bénévoles et de construire ou rénover les équipements sportifs scolaires aux côtés des autres collectivités à hauteur de 7 millions d'euros chaque année.

Dans le département de la Loire, le budget du sport du conseil général représente 8 millions d'euros : 3 millions pour le sport pour tous, 2 millions pour le sport de haut niveau, et 2,5 millions pour les équipements de proximité. Huit millions d'euros, c'est à peine 1 % du budget du département, mais ces financements sont vitaux et indispensables pour la vie des 300 clubs sportifs ligériens amateurs et professionnels concernés par les subventions du département, pour les cinquante-sept comités départementaux, la rémunération des cadres techniques étant prise en charge par le département, pour les centres de formation des clubs, mais aussi pour le handisport, le sport scolaire ou universitaire, qui sont également aidés.

Monsieur le secrétaire d'État, qui prendra le relais de ces financements départementaux et régionaux si la clause de compétence générale est supprimée pour ces deux collectivités ?

L'État ? C'est exclu, au moment où celui-ci se désengage comme jamais sur le plan financier et fait subir avec la revue générale des politiques publiques une cure d'austérité sans précédent aux personnels des services déconcentrés de la jeunesse et des sports qu'on éloigne du terrain.

Les communes et leurs regroupements, qui, en vertu de la loi, conserveraient seuls le libre choix de leurs politiques au nom de l'intérêt local ? On peut en douter fortement dans le contexte actuel, difficile, alors que les finances communales sont fragilisées par la suppression de la taxe professionnelle.

Les équipements sportifs et le soutien à la vie associative resteront-ils des priorités pour les exécutifs communaux ou intercommunaux aujourd'hui asphyxiés financièrement par les réformes du Gouvernement ?

De plus, les politiques communales ou intercommunales sont par définition très locales, avec de fortes disparités de richesses entre territoires. Est-ce le bon niveau pour penser une politique du sport, en particulier pour la construction des équipements ou des infrastructures ? L'échelon départemental ou régional me paraît plus pertinent.

Certes, tel qu'il a été voté par le Sénat, l'article 35 autorise la pratique des financements croisés entre collectivités territoriales, « encadrée afin de répartir l'intervention publique en fonction de l'envergure des projets ou de la capacité du maître d'ouvrage à y participer ». Les collectivités pourraient donc participer aux investissements pour les équipements sportifs, me direz-vous.

Je vous rappelle tout d'abord que les investissements des régions et des départements pour les équipements sportifs ne représentent que la moitié de la somme de 1,2 milliard d'euros consacrée au sport. Le problème demeure donc pour les 600 millions d'euros de subventions aux associations.

Au-delà du caractère flou de cette disposition, on voit bien que la notion de capacité du maître d'ouvrage à participer aux financements croisés va exclure de fait de nombreuses communes, en particulier en milieu rural, qui n'ont pas les moyens financiers de se lancer dans de tels chantiers et pour qui ce sera mission impossible.

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous restons convaincus que la clause de compétence générale constitue la marge d'adaptation des collectivités aux spécificités du territoire. L'abandon de cette clause serait une régression historique pour le développement local.

C'est pourquoi nous nous battrons lors des débats à venir à l'Assemblée nationale pour obtenir non seulement une exception culturelle, mais aussi une exception « sport, jeunesse et vie associative », afin que les collectivités territoriales puissent continuer à s'engager et à s'impliquer auprès des acteurs associatifs de terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Duron

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis quelque mois, de rapport Lambert en Livre noir des régions, de déclarations ministérielles en articles complaisants et parfois désinformateurs, nous assistons à une offensive de grande ampleur contre les collectivités territoriales, offensive destinée à préparer une succession de textes qui visent d'abord à revenir sur la décentralisation, cette forme moderne de la gestion des territoires et des politiques publiques, et, ensuite, à reprendre par des modifications législatives le terrain perdu par la majorité dans les urnes. Cette curiosité, pour ne pas dire cet ectoplasme, qu'est le conseiller territorial n'a pas d'autre objectif.

On reproche aux collectivités territoriales de laisser filer leurs dépenses de personnel. Je peux témoigner que l'augmentation des effectifs des régions résulte d'abord des réformes engagées par votre majorité, monsieur le secrétaire d'État.

Lorsque je suis devenu président de la région Basse-Normandie en 2004, elle comptait 237 agents. Elle en compte aujourd'hui 1 880. Excellente démonstration de la gabegie régionale, me direz-vous. Eh bien non puisque l'on compte 1 390 TOS transférés par la loi de 2004 à la région, auxquels il a bien fallu ajouter une cinquantaine d'agents parce que l'État n'avait pas remplacé les retraités depuis plusieurs mois, quarante salariés transférés dans le cadre de la décentralisation des ports nationaux, et une dizaine de fonctionnaires de l'inventaire transférés du ministère de la culture à la région.

Parlons de la gestion. Les collectivités territoriales équilibrent leur budget, c'est la loi. Elles ne s'endettent que pour investir, ce qui n'est pas le cas de l'État. Quant à la qualité de la gestion des régions de gauche, elle est reconnue par les agences de notation. Fitch Ratings, dans un récent rapport, vient d'attribuer une note AA + à la région Basse-Normandie, mais indique que les réformes engagées par le Gouvernement pourraient cependant dégrader cette bonne notation. On ne peut mieux dire, mais mon intervention portera sur un autre aspect de votre projet de loi, l'article 25, qui supprime l'article 22 de la LOADDT de 1999.

Depuis quelques mois, nous pressentions que les pays serviraient de victime expiatoire à la simplification du millefeuille territorial. Dans l'impossibilité constitutionnelle et politique où vous êtes de supprimer un niveau de collectivité, notamment le conseil général, l'annonce de la fin du pays vous permet en quelque sorte de donner le change.

Le débat au Sénat a mis en évidence la grande ignorance ou la mauvaise foi des pourfendeurs du pays. Permettez à l'ancien rapporteur auprès de notre assemblée de la loi Voynet du 25 juin 1999 et au président du pays de Caen de rappeler quelques évidences et quelques vérités.

Le pays n'est en rien une collectivité territoriale, il n'entre donc pas dans ce millefeuille dont on se régale tant. Son émergence, dans l'Ouest de la France notamment, préexiste à sa reconnaissance législative par la LOADT de 1995, la loi Pasqua-Hoeffel, et à sa définition plus précise et plus volontaire avec la loi Voynet. La rédaction de l'article sur le pays avait fait consensus à l'époque lors de l'examen du texte par la commission de la production et des échanges de notre assemblée.

Avec cette dernière loi, il s'inscrivait dans une trilogie territoriale cohérente voulue par le gouvernement Jospin, après la loi pour le renforcement et la simplification de l'intercommunalité, la loi Chevènement, et la loi de solidarité et de renouvellement urbain, la loi Gayssot. Avec Gérard Gouzes et Patrick Rimbert, les rapporteurs de ces deux lois, nous avions veillé à la cohérence des trois lois. Supprimer aujourd'hui les pays, c'est remettre en cause une architecture territoriale cohérente.

Le pays est avant tout une maille d'aménagement du territoire définie à une échelle pertinente, la cible était de 100 000 habitants. C'est ainsi que certains pays s'affranchissent des limites régionales ou départementales. Le pays d'Alençon s'étend tout à la fois sur la Basse-Normandie et les Pays de la Loire. Quant au pays de Redon, il enjambe la limite entre les Pays de la Loire et la Bretagne. En revanche, ils respectent les intercommunalités, c'est-à-dire ces territoires plus récents et plus modernes. Émile Blessig, qui a présidé la délégation à l'aménagement du territoire, le sait bien.

Certains, comme Jean-Pierre Balligand, spécialiste reconnu de l'aménagement du territoire, les ont même présentés comme des fédérations d'intercommunalités. Il y a d'ailleurs un paradoxe à vouloir supprimer le pays, fédérateur des territoires ruraux, alors que le Gouvernement encourage la création de syndicats mixtes pour fédérer des villes dans les pôles métropolitains. Je ne critique pas cette dernière mesure, je l'approuve même, mais il y a là une contradiction.

On reproche au pays de créer des structures inutiles. Reconnaissez qu'elles sont le plus souvent très légères, composées de jeunes et talentueux chargés de mission qui apportent une ingénierie territoriale à des territoires ruraux qui en sont trop souvent dépourvus. Comment, en effet, concevoir des projets à la bonne échelle sans les ressources humaines nécessaires ?

Territoire de projet, le pays constitue également une maille adaptée à une contractualisation efficace. Dans ma région, la Basse-Normandie, le volet territorial du contrat de projets État-région a ainsi pu amener plus de 36 millions d'euros aux onze pays et trois agglomérations qui maillent la totalité de la région : 28,4 millions en investissements et 7,6 millions en ingénierie territoriale.

La suppression de l'article 22 ne permettra plus une telle contractualisation après 2013. Je ne suis pas sûr que toutes les communautés de communes soient en capacité de contractualiser demain avec l'État, les régions, les départements, dont on sait bien qu'ils feront preuve de plus de sélectivité et d'exigence pour répartir des crédits moins nombreux. C'est autant de moyens en moins pour les territoires, notamment pour les territoires ruraux, qui ont pourtant de nombreux défenseurs au Sénat.

Les 350 pays créés en dix ans couvrent aujourd'hui 84 % du territoire national. Ils ont souvent permis de simplifier, de donner davantage de transversalité aux politiques publiques. Ils ont facilité la mise en cohérence des zonages. C'est vrai pour les programmes européens leaders. C'est vrai pour les pays touristiques. Ils ont servi de cadre à de nombreux appels à projets, notamment ceux lancés par l'ADEME.

Les pays constituent également souvent l'échelle de mise en oeuvre des SCOT. Il en va ainsi du syndicat mixte de Caen-Métropole qui regroupe, autour de la communauté d'agglomération de Caen-la-Mer, neuf communautés de communes, soit 113 communes. Ce syndicat porte le SCOT et le pays, et constitue une véritable instance de concertation entre les intercommunalités, entre la ville, la périurbanité et le rural.

Ainsi, les pays bien constitués préfigurent et préparent les intercommunalités ambitieuses dont notre pays a besoin et que le Gouvernement semble vouloir accompagner.

Enfin, les conseils de développement, qui sont en quelque sorte des conseils économiques et sociaux locaux, ont permis d'associer les acteurs locaux à l'élaboration des projets territoriaux. Cela, c'est aussi un acquis précieux pour une meilleure appropriation des politiques publiques par les usagers. Renvoyer chez eux, après dix ans de dialogue, chefs d'entreprises, acteurs associatifs, syndicalistes, c'est se priver d'une réelle expérience territoriale. C'est aussi faire preuve de beaucoup de mépris pour les plus impliqués de nos concitoyens.

Vous l'avez compris, mes chers collègues, dix ans après la loi Voynet, je reste un fervent défenseur du pays et j'aimerais vous convaincre de leur pertinence en faveur de l'aménagement du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Émile Blessig

Je voudrais, si vous me le permettez, inscrire cette discussion sur la réforme des collectivités territoriales dans un cadre un peu plus large.

Actuellement, deux tiers de nos concitoyens vivent en milieu urbain. Comment organiser la réponse aux besoins des urbains, majoritaires en nombre, et des ruraux, qui couvrent 80 % du territoire de notre pays ?

La discussion autour de la réforme a dans un premier temps accordé une large place aux notions de structures. Il se trouve que les récentes assises des territoires ruraux, dont le Président de la République a tiré les conclusions dans son discours de Morée le 9 février, illustrent qu'en termes de mode de vie, d'attractivité, de développement des territoires, les attentes des milieux urbain et rural sont très voisines. Les assises nous ont appris que les problématiques étaient l'accès à la société numérique, l'accès aux mobilités, l'accès aux services à la population, notamment aux soins, et la nécessité de prendre en considération la dimension durable de l'ensemble de ces sujets.

À mon sens, la réforme des collectivités locales doit apporter les outils démocratiques nécessaires pour donner les meilleures réponses à ces attentes : simplification des structures, clarification des compétences, rénovation de l'exercice de la démocratie. Ce sont les trois priorités que je souhaite mettre en avant dans cette intervention.

De ce point de vue, il me semble que l'accord est large. Or, dans un contexte de complexité, de profusion de l'information, l'avenir, en milieu rural comme en milieu urbain, appartient aux territoires qui sauront construire un projet de territoire, mettre en place des méthodes de coordination et de coopération.

Si, en milieu urbain, la taille critique de ces territoires est relativement facile à trouver, en milieu rural, les choses sont plus difficiles, et les notions de nombre d'habitants, de services à la population, de maillage économique ne vont pas de soi.

Paradoxalement, cette démarche de coordination est très bien organisée en milieu urbain. Nous avons au moins quatre structures : la métropole, le pôle métropolitain, et on ne supprime ni la communauté urbaine ni la communauté d'agglomération. Soit dit en passant, la communauté d'agglomération met en place les outils de prospective et de concertation qui sont ceux du pays.

Qu'en est-il en milieu rural ? On maintient les communes, on cherche à développer l'intercommunalité et on veut se passer de la structure pays. Cela vient d'être dit, il y a 350 pays en France, couvrant 80 % du territoire. Je ne suis pas de ceux qui se battent obstinément pour une structure. Mais si, à la suite des assises des territoires ruraux, la conclusion apparaissait que la démarche de concertation, de coordination, de projet est nécessaire en milieu urbain mais que nous ne nous donnons pas en milieu rural les outils pour la mettre en place, ce serait à n'y rien comprendre.

En milieu rural, ces pays étaient des territoires pertinents, validés par l'autorité préfectorale. C'était un exemple de démocratie, avec l'intervention du conseil de développement, comme cela vient d'être rappelé. Surtout, c'était une structure de réflexion stratégique au service de maîtres d'ouvrage différents du territoire, sans que cette structure ait à se transformer en structure de gestion. Ce qui nous manque, précisément, c'est cette réflexion stratégique. Puisque cette démarche semble reconnue et nécessaire en milieu urbain, pourquoi la refuser en milieu rural ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Je pense qu'il est parfaitement possible, dans le cadre de la réforme, de sauvegarder cette démarche. Nous pouvons en effet rapprocher dans la loi des démarches complémentaires, notamment la planification spatiale. Il est tout de même paradoxal que le SCOT, structure qui autrefois prenait fin avec l'élaboration du schéma de cohérence territoriale, vienne d'être pérennisé par la loi Grenelle, puisque les syndicats mixtes qui portent les SCOT sont désormais chargés aussi du suivi et de l'évaluation de ces derniers.

On ne peut pas sérieusement poser le principe d'une planification territoriale de qualité en se désintéressant des problèmes d'aménagement du territoire et de territoires de projet.

Debut de section - PermalienPhoto de Émile Blessig

Par conséquent, l'outil existant, qui est ce syndicat mixte, doit pouvoir permettre d'assurer la coordination entre, d'une part, la démarche prospective de réflexion sur l'aménagement du territoire et, d'autre part, la démarche de planification spatiale qui est absolument indispensable. Ne l'oublions pas, pour notre pays, la qualité et l'étendue de ses territoires ruraux sont une chance pour demain.

En conclusion, nous n'avons pas besoin de nous arc-bouter sur la défense artificielle de structures. Il est vrai que les pays ont été conçus sur la base du volontariat et que leur forme juridique est variable : associations, GIP, syndicats mixtes. Il me semble que la réforme des collectivités territoriales, dans son volet rural, devra absolument valider cette démarche de projet, de coordination des acteurs au niveau local. Sinon, nous passerions à côté d'un rendez-vous incontournable.

En outre, ce renforcement et la coordination des intercommunalités doit également répondre au défi de l'ingénierie humaine. Le vrai problème des territoires ruraux, c'est la qualité des cadres en mesure d'apporter l'information technique nécessaire aux élus pour construire le projet. Il serait également dommageable de se priver, à côté de ces cadres techniques, de l'apport de la société civile.

Je pense très sincèrement qu'en se rapprochant de la démarche de syndicat mixte, notamment de celle du syndicat mixte à la carte, nous pouvons, sans multiplier les structures, sans créer de nouveaux pôles ruraux à la place des pôles métropolitains, assurer aux territoires ruraux la sauvegarde de cette démarche indispensable qui est la démarche de pays, pour répondre aux défis qui se posent à la ruralité.

Cette démarche, sur laquelle nous avons entendu les critiques les plus injustes dans le débat au Sénat, a tout de même été validée par deux majorités différentes. La loi Pasqua-Hoeffel de 1995 a été reprise et complétée par la loi Voynet. Il y a donc, par delà les alternances, un consensus au service d'un véritable aménagement de nos territoires ruraux, qui doivent bénéficier des mêmes outils que le milieu urbain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La parole est à M. William Dumas, dernier orateur inscrit.

Debut de section - PermalienPhoto de William Dumas

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, beaucoup de choses ont été dites à cette tribune. Je voudrais simplement apporter le témoignage de ce que représente pour mon département, le Gard, le désengagement de l'État.

À ce jour, 409 millions d'euros : c'est le montant cumulé des dettes entre 2004 et 2009 que l'État doit au conseil général du Gard. Depuis plus de dix ans, l'État nous a transféré des dépenses correspondant à des droits individuels. Ce transfert devait être compensé à l'euro près, nous avait dit à l'époque M. Copé. Pour l'année 2009, il nous manque 85 millions d'euros, dont 65 millions de dotations de l'État au titre du RSA, de l'APA et de l'aide aux handicapés.

Tout ce que nous avons construit depuis 1982, date de la mise en oeuvre des premières lois de décentralisation, est en train d'être anéanti.

L'aide aux personnes âgées, financée, lors de son instauration, pour 50 % par l'État et 50 % par le département, l'est aujourd'hui à 70 % par le conseil général.

Il nous a également fallu suppléer l'État dans le cadre du recrutement des agents de la direction départementale de l'équipement. Deux ou trois ans avant que les transferts se fassent, tous les postes étaient gelés et il manquait du personnel dans toutes les subdivisions. Nous avons dû, alors que c'était encore le rôle de l'État, procéder à deux vagues d'embauche : la première fois pour recruter huit agents et la seconde pour en recruter une quinzaine.

À ce triste constat, vous ajoutez les effets de la crise immobilière qui, pour nous comme pour de nombreux départements, sont catastrophiques. Chez nous, il manque 22 millions d'euros issus des droits de mutation pour l'année 2008-2009. Les départements meurent a petit feu.

Je viens de lire un article de journal indiquant qu'une vingtaine ne savent pas comment ils pourront boucler leur budget. Une mort lente et douloureuse. Dans le département du Gard, dont je suis le premier vice-président, nous avons dû réaliser 21 millions d'euros d'économies. Si les associations sportives, culturelles et sociales ont toutes vu leurs subventions diminuer, sachez qu'aucun secteur n'est épargné, que ce soient le secteur économique ou l'agriculture – qui souffre énormément en ce moment –, que ce soient les secteurs relevant de la compétence générale ou de nos compétences facultatives.

Malgré cette volonté d'asphyxier les départements, et grâce à une maîtrise des dépenses de fonctionnement et au maintien du taux élevé de nos investissements, nous conservons notre objectif de rendre le meilleur service public aux Gardoises et aux Gardois ; nous maintenons nos actions d'accompagnement, de la naissance à la fin de vie, et nous soutenons l'économie de notre département – de 160 millions à 180 millions d'euros d'investissements annuels. Nous nous sommes efforcés de bâtir un budget équilibré et sain alors que les contraintes que vous nous imposez devraient nous inciter à renoncer.

Fort heureusement, dans le Gard, notre dette et inférieure à la moyenne nationale et, surtout, ne comporte aucun emprunt toxique – on n'évoque pas assez ces emprunts alors qu'ils vont poser des problèmes importants à nombre de collectivités –, ce qui nous a permis de maintenir le statu quo fiscal. Mais, monsieur le secrétaire d'État, pour combien de temps ? Et qu'en est-il des départements qui se sont laissé berner par les banques qui les ont fait souscrire à des emprunts toxiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La parole est à M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Mesdames, messieurs les députés, je salue la présence dans les tribunes des maires du Loir-et-Cher, département que vous présidez, monsieur le vice-président de l'Assemblée nationale. Ce débat sur la réforme des collectivités territoriales est le sixième organisé par le Parlement en un an : trois l'ont été depuis mars 2009 au Sénat, et, outre notre débat d'aujourd'hui, votre assemblée a débattu en mai 2009 des transferts de compétences et en janvier 2010, c'est-à-dire il y a à peine un mois, de la décentralisation et de la recentralisation. Je n'aurai garde d'oublier les dizaines d'heures de débats que nous avons consacrées ces derniers mois à la réforme des collectivités territoriales, tant en commission qu'en séance publique. Je me réjouis donc de cet intérêt très marqué pour l'avenir des collectivités territoriales.

Il est vrai que ce chantier, initié par le Gouvernement sous l'impulsion du Président de la République, est un chantier lourd et majeur pour l'avenir de notre pays et de nos institutions. On ne compte plus en effet les rapports qui ont invité ces dernières années, de façon très insistante, les pouvoirs publics, quels qu'ils soient, à engager la réforme : rapport Mauroy, rapport Pébereau, rapport Richard,…

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

… rapports Fouquet, Valletoux, Lambert, Attali, Warsmann – le président de votre commission des lois –, Balladur, Belot ou encore le rapport Saint-Étienne ; sans compter les très nombreux rapports de la Cour des comptes sur ce sujet. Tous convergent sur le diagnostic qu'ils portent sur notre organisation territoriale. Ce diagnostic est partagé par l'opinion publique puisque 83 % des Français considèrent que notre organisation administrative est trop complexe ; 73 % jugent la répartition des responsabilités entre les différents niveaux d'administration confuse, et le même pourcentage estime une réforme nécessaire.

Notre réforme vise donc à proposer un schéma cohérent pour notre organisation territoriale. Il s'agit, comme l'a dit Dominique Perben, d'adapter nos structures aux compétences, ce qui n'a pas été fait depuis les premiers textes décentralisateurs de 1982. Elle est l'acte III de la décentralisation, je vais le démontrer, et l'acte I de la simplification !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Ce n'est pas une décentralisation, mais une recentralisation !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Je voudrais rebondir sur les propos du président Leroy : oui, cette réforme est audacieuse, courageuse, réaliste,…

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

…mais elle aussi complexe, et c'est pourquoi depuis plus d'un an nous l'avons entourée de la plus grande concertation. Je cite le rapport Balladur : « Il est temps de décider ». Il est vraiment temps. C'est en tout cas le chemin emprunté par le Gouvernement car gouverner, c'est prévoir, et surtout préparer l'avenir.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Dominique Perben rappelait à juste titre que la contrainte pour l'avenir de la recette publique nous oblige à mieux utiliser cette ressource financière, rare par essence. Tel est le sens de cette réforme : il faut rendre un meilleur service à nos concitoyens en optimisant la gestion des deniers publics.

Au plan de la méthode, je répondrai à Mme Lebranchu que cette réforme est cohérente. Elle repose en effet sur quatre textes déposés simultanément sur le bureau des assemblées. Ces textes permettent de traiter à la fois du volet institutionnel de la réforme et de son volet électoral. Ces quatre projets de loi devraient être rapidement complétés par un cinquième texte portant sur la clarification des compétences. Dois-je rappeler que la loi Deferre du 2 mars 1982, qui posait un certain nombre de principes généraux, a été déclinée par une vingtaine de lois postérieures ?

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

C'était autre chose : une vraie oeuvre législative !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Monsieur le président Leroy, vous avez débuté votre propos en évoquant le renforcement du rôle des régions et des départements. Comme vous, je suis convaincu que le niveau régional souffre aujourd'hui vis-à-vis de nos concitoyens d'un manque de visibilité et de légitimité. On connaît son maire, on connaît son conseiller général, en tout cas en milieu rural (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), mais rarement son conseiller régional et même – un sondage récent vient de le montrer – son président de conseil régional. Et ce n'est faire insulte à personne que de le dire. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Marsac

Et quels sont les Français qui connaissent le secrétaire d'État aux collectivités locales ?

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Dans ma région, 63 % des sondés ne connaissent pas le nom du président de région. Et ce n'est pas le pire chiffre, la proportion est encore plus importante dans la région Centre – et je pourrais citer la Basse-Normandie. Je le répète : ce n'est faire injure à personne de le dire, c'est un fait avéré.

Le projet du Gouvernement vise à renforcer le rôle des départements et des régions en les rapprochant et en leur donnant les moyens d'une meilleure coordination de leurs politiques, ce qui évitera les effets de concurrence. Nous voulons créer les conditions de leur complémentarité. À cet effet, avec l'instauration du conseiller territorial, l'élu départemental sera désormais le même que l'élu régional.

La création du conseiller territorial permettra aux départements ruraux de disposer d'une réelle représentation dans les conseils régionaux, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. (« Si ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Prenons l'exemple d'un petit département, celui des Hautes-Alpes – où je me suis rendu il y a quelque temps pour participer au congrès de l'ANEM – : à Marseille, il a trois représentants dans une assemblée régionale qui compte 123 conseillers régionaux. Le département ne peut pas exister dans cette instance. C'est une caricature de représentation. Quant à la Lozère, elle a deux élus sur soixante-huit à Montpellier. Là aussi, c'est une caricature.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Une région est une entité, elle ne se résume pas à ses représentants !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Le conseiller territorial aura une légitimité renforcée et une efficacité majorée ; il sera porteur et facteur de simplification : attaché à un territoire bien identifié, il aura une vision globale de son département comme de sa région, et son positionnement renforcera l'articulation et la cohérence des politiques menées par ces deux collectivités. Je rappelle que l'incohérence actuelle des politiques coûte 20 milliards d'euros chaque année au contribuable. La Cour des comptes l'a signalé à plusieurs reprises (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), mais je ne l'ai pas entendu évoquer ce matin. Il est donc bon de le rappeler. (Mêmes mouvements.) Si vous vous mettez à contester aussi la Cour des comptes, mesdames, messieurs les députés du groupe SRC, je dois vous rappeler qu'il s'agit d'une des institutions fondamentales de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Si le Gouvernement appliquait tout ce que la Cour des comptes recommande, ce serait bien !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Avec la création du conseiller territorial, nous faisons le pari que des élus locaux, certes moins nombreux mais plus puissants et au mandat considérablement enrichi, sauront redonner du souffle à la décentralisation.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

En outre, ce rapprochement région-département est totalement cohérent avec la réorganisation des services de l'État entre les niveaux départemental et régional. L'État ne supprime ni le préfet de région, ni celui de département, ni les sous-préfectures, il ne supprime pas non plus ses services déconcentrés au niveau départemental ou régional : il renforce tout simplement la coordination et la cohérence de leur action en tirant les conséquences des derniers transferts de compétences intervenus en 2004 sur l'organisation de ses services.

Plusieurs intervenants, notamment Dominique Perben, mais aussi Michel Piron et Marc Dolez, m'ont interpellé sur le mode de scrutin du conseiller territorial. La promulgation, cette semaine, après validation du Conseil constitutionnel, de la loi sur la concomitance du renouvellement des conseillers généraux et des conseillers régionaux permet la mise en place en 2014 du conseiller territorial. Le projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale vise à préciser le mode de scrutin qui sera retenu. Le Sénat a adopté un amendement selon lequel le mode d'élection assure la représentation des territoires par un scrutin uninominal,…

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

…l'expression du pluralisme politique et la représentation démographique par un scrutin proportionnel, ainsi que la parité.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Vous savez bien qu'en matière de parité, le compte n'y est pas !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Le Gouvernement a pris acte de l'adoption de cet amendement. Comme il l'a précisé au cours des débats, il est ouvert à la discussion pour améliorer le mode de scrutin proposé dans le projet de loi. Je ne doute pas que les travaux parlementaires à venir conduiront à un consensus équilibré nous permettant d'assurer tant la représentation des territoires que la traduction de la représentation démographique, dans le respect du pluralisme politique et aussi, bien entendu mesdames, de la parité.

Je signale à M. Dolez que le mode de scrutin à un tour a déjà été appliqué récemment en France : aux élections législatives de 1986,…

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

…aux élections régionales de 1986, 1992, de 1998, ainsi que lors des élections européennes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Duron

Ce texte nous concocte un pot-pourri à l'anglaise !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Par ailleurs, je ne vois pas en quoi un mode de scrutin largement pratiqué par de grandes démocraties occidentales – États-Unis, Grande-Bretagne – serait contraire à notre Constitution et aux principes démocratiques.

Enfin, l'introduction d'une dose de proportionnelle vise précisément à favoriser la représentation au niveau local des petits partis (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), ainsi que l'a bien expliqué M. Maurice Leroy dans son intervention. Mais le Gouvernement est bien entendu ouvert à la discussion. Au passage, je rappelle que ce texte s'inspire d'une proposition de Léon Blum, reprise par Weil-Raynal,…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Il s'agissait d'une forme de proportionnelle !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

…au programme du parti socialiste jusque dans les années soixante-dix, et qu'elle figurait dans un livre disponible rue de Solferino !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Voyez, pour une fois que nous avons de bonnes sources d'inspiration selon vos critères, vous ne devriez pas nous le reprocher. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Vous m'avez aussi interrogé, monsieur le président Leroy, sur le nécessaire chantier de la clarification des compétences. Nous souhaitons nous appuyer sur les préconisations formulées par la mission sénatoriale pluraliste qu'a présidée le sénateur Belot, en particulier celle privilégiant « la voie de la spécialisation de l'action des collectivités territoriales, fondée sur la prise en compte du principe de subsidiarité, tout en garantissant le respect des initiatives locales ». Parmi les principes énoncés dans l'article 35 de notre projet de loi voté par le Sénat il y a moins de deux semaines, il est ainsi prévu que le département et la région conservent une capacité d'initiative qui ne peut s'appliquer qu'à des situations non prévues par la législation et qui doit être justifiée par un intérêt local avéré.

Plusieurs intervenants ont évoqué la partie financière de la réforme, notamment la suppression de la taxe professionnelle.

Je rappelle tout d'abord que l'effort financier de l'État en faveur des collectivités locales est majeur : 97,5 milliards d'euros sont versés cette année aux collectivités au titre de la loi de finances que votre assemblée a votée, en intégrant dans le calcul la fiscalité transférée,…

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

…alors qu'en 2009 l'État a subi une baisse de 20 % de ses recettes fiscales. 97,5 milliards d'euros, c'est l'équivalent du budget de la Belgique ! On ne peut pas dire que les collectivités territoriales ne sont pas aidées en France. C'est une somme considérable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Duron

Nous verrons dans la durée, monsieur le secrétaire d'État !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

S'agissant de la réforme de la taxe professionnelle, je rappelle que le Gouvernement s'est engagé dans la loi de finances à garantir le respect du principe constitutionnel d'autonomie financière, et à ce que chaque collectivité perçoive de manière pérenne le niveau de ressources fiscales qu'elle percevait jusqu'à présent. C'est la fameuse « année blanche » que nous avons souvent évoquée au cours de nos débats. J'observe que la question de l'autonomie financière et fiscale des collectivités locales a été très largement débattue dans le cadre de la réforme de la TP.

À cet égard, le Conseil constitutionnel s'est prononcé clairement, précisant que la notion d'autonomie fiscale ne figurait pas dans la Constitution, ce qui ne remet pas en cause le principe de libre administration.

Enfin, dans le cadre de la clause de revoyure prévue par la loi de finances, il sera toujours possible de corriger les difficultés qui pourraient surgir et qui auraient été mises en évidence par les simulations effectuées.

Brice Hortefeux, Christine Lagarde, Éric Woerth et moi-même, nous avons diligenté une mission commune de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale de l'administration qui a été confiée à Bruno Durieux et au préfet Patrick Subrémon.

M. Carcenac a aussi mentionné l'exigence constitutionnelle de péréquation. Comme lui, je constate que nous n'en faisons pas encore assez sur ce plan. Le Président de la République partage ce constat et il m'a demandé de travailler, conjointement avec Brice Hortefeux et Michel Mercier, sur l'équité de la répartition des dotations de l'État. C'est un chantier que nous devons mener cette année, simultanément avec l'application de réforme de la taxe professionnelle.

Cela étant, je dois aussi reprendre M. Carcenac sur un point : ce matin, il a constaté la concentration de la future cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises dans certains départements franciliens, mais c'est avant la mise en oeuvre du fonds national de garantie individuelle des ressources.

De plus, je rappelle que cette future cotisation fera l'objet d'une double péréquation : d'abord sa répartition sera en partie effectuée sur des critères de charge des départements ; ensuite une part de la croissance de la cotisation sur la valeur ajoutée des départements dont le potentiel financier est supérieur à la moyenne sera prélevée en faveur des départements les plus pauvres.

Si M. Carcenac appelle de ses voeux une concertation sur ces questions financières, nous aussi. Dans ce cas, pourquoi avoir snobé la conférence sur les déficits publics récemment présidée par le chef de l'État ?

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Quant à la compensation de l'APA, elle n'a jamais été de 50 % mais de 30 % pour la part État. Permettez-moi de vous le signaler gentiment, mais de vous le signaler quand même.

Certains orateurs ont évoqué la compensation des transferts de compétences. Là encore, j'entends beaucoup d'approximations dans les raisonnements. J'affirme que l'État compense intégralement, c'est-à-dire à l'euro près, les transferts de compétence effectués dans le cadre de la décentralisation. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Monsieur Le Bouillonnec, ne lancez pas le débat suivant où vous allez intervenir. Ménagez-vous pour la suite !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Vous critiquez votre collègue Thierry Carcenac. Quand cette compensation est imparfaite, la commission consultative d'évaluation des charges qu'il préside est là pour le rappeler et faire corriger les montants des compensations. Il ne se prive pas de le faire régulièrement, et c'est son rôle.

Ainsi, cette année, le Gouvernement a ajusté à la hausse le montant des compensations en matière de formation professionnelle, de formation sanitaire et de transport ferroviaire pour les régions, et il a pris en compte un calcul plus favorable de 45 millions d'euros pour le RSA.

Pour être moi-même conseiller général, je connais les difficultés financières des départements qui doivent faire face à la montée en puissance des dépenses sociales. C'est un fait.

Je ne puis que déplorer l'insuffisante clé de couverture des coûts de l'APA, décidée sous le gouvernement Jospin, et qui constitue à ce jour la principale source de difficulté dans nos départements.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Alerté par Brice Hortefeux et moi-même, le Premier ministre a récemment confié à M. Pierre Jamet, directeur général des services du département du Rhône, une mission sur les dépenses sociales des départements, afin de formuler toutes pistes de travail en matière de péréquation financière, de pilotage des interventions, de mutualisation, de bonnes pratiques, etc.

Mme Lebranchu a cité le transfert des TOS de l'éducation nationale, en déplorant que les charges de gestion pour les départements et les régions n'aient pas été prises en compte.

Permettez-moi de lui indiquer qu'elle est mal informée : n'ont pas seulement été transférés les TOS mais aussi les personnels des rectorats qui assuraient leur gestion (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Plus largement, dans le cadre des travaux menés suite à la conférence sur les déficits publics, un groupe de travail, confié à votre collègue Gilles Carrez, sera chargé d'établir un diagnostic partagé sur l'évolution de la dépense publique locale, et d'évaluer l'impact des normes sur l'évolution de ces dépenses.

Sachez que l'objectif du Gouvernement n'est, en aucun cas, de maltraiter ou de stigmatiser les collectivités territoriales, mais de leur donner les moyens d'assurer pleinement leurs compétences.

Mme Lebranchu a aussi cité le FCTVA. À l'entendre, il ne fallait rien faire et laisser le pays s'enfoncer dans la crise.

Cette mesure phare du plan de relance a pourtant eu un réel succès : pas moins de 19 500 conventions ont été signées, portant sur 54,5 milliards d'euros d'investissements prévisionnels, ce qui représente une augmentation moyenne des dépenses d'investissements de 54,16 %. Quelque 17 141 communes, 90 départements et 23 régions ont signé une convention.

Monsieur le député Émile Blessig, vous avez évoqué un sujet qui vous tient à coeur et dont vous êtes un expert reconnu : l'avenir des pays et l'équilibre entre les territoires ruraux et urbains.

L'objectif du Gouvernement, traduit dans l'article 25 de la loi, est d'interdire la création de pays supplémentaires à l'avenir, tout en proposant une abrogation de l'article 22 de la loi du 4 février 1995. Nous poursuivons ainsi une approche pragmatique car l'abrogation de cet article 22 doit se lire à la lumière d'autres dispositions du texte : l'application du principe de « non tutelle » d'une collectivité sur une autre et les mesures visant à rationaliser la carte de l'intercommunalité. Il conviendra, à cet égard, de procéder à une appréciation locale, au cas par cas.

Nous avons tous à l'esprit des pays qui sont des coquilles vides quoique coûteuses…

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

…alors que d'autres sont très utiles pour conduire des projets à une échelle plus vaste que celle des communautés de communes, lorsque celles-ci sont de taille réduite, par exemple du fait des contraintes géographiques.

Nous en avons souvent parlé ensemble. Pour avoir longtemps présidé l'un de ces pays, je reconnais l'importance de certains d'entre eux.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Il ne s'agit pas de supprimer automatiquement les structures porteuses des pays existants, mais de les intégrer dans le cadre de la réflexion à mener entre le préfet, les élus et la CDCI sur le futur schéma départemental de coopération intercommunale.

En fonction de ce que le schéma retiendra, les missions des pays seront reprises par les EPCI ou par des fédérations d'EPCI. De même, devra être recherchée la cohérence avec les syndicats mixtes portant les SCOT.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

En ce qui concerne les contrats de pays signés, dont l'exécution est en cours, ils ne sont naturellement pas remis en cause. Ces contrats engagent leurs signataires ou, à défaut, les structures qui leur succéderaient.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Enfin, l'abrogation de l'article 22 n'a pas pour effet de supprimer automatiquement les conseils de développement ni les structures analogues associant la société civile au sein des EPCI à fiscalité propre.

Pour autant, il ne faut pas que cela se traduise par des recrutements, des dépenses ou des indemnités supplémentaires. Les collectivités seront libres et l'association de la société civile au sein de ces conseils de développement ne nécessite pas de dispositif législatif spécifique.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

En revanche, une réflexion complémentaire sur les besoins des communes et EPCI du monde rural pourra être menée dans le cadre des conclusions définitives des assises des territoires ruraux qui se sont closes le 9 février dernier. Michel Mercier, mon collègue ministre de l'espace rural, apportera prochainement des précisions et prendra des mesures dans ce domaine.

La question des métropoles a été évoquée par plusieurs intervenants, plus particulièrement par le rapporteur et par M. Piron.

Le Sénat a modifié le partage des compétences entre la métropole et les communes qui la composent, dans un sens plus favorable à ces dernières, en introduisant un intérêt métropolitain pour les équipements de proximité et en maintenant la délivrance des actes et autorisations relatifs à l'occupation des sols au profit des communes membres. Il a aussi revu le régime financier de la métropole.

Le Sénat s'est ainsi voulu pragmatique – pour employer un mot gentil – car soucieux de voir émerger un jour des métropoles, ce qui suppose, selon lui, une adhésion forte des communes membres.

À cet égard, je rappelle à M. Dolez que les métropoles se créeront uniquement de façon volontaire, et qu'aucune création autoritaire ne se fera par loi. C'est d'ailleurs la même chose pour les communes nouvelles, monsieur le député.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

C'est tout de même une structure de plus alors que je croyais qu'il fallait en finir avec le millefeuille !

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Arrêtons de nous faire peur ! Les débats vont se poursuivre dans votre assemblée sur ce sujet. Ils permettront, je l'espère, de trouver un scénario intermédiaire entre le texte initial du Gouvernement et celui issu de la première lecture au Sénat. Il s'agit de permettre aux métropoles de répondre aux enjeux de la compétition européenne sans nier l'importance vitale de nos communes.

Beaucoup d'interventions se sont centrées sur le bloc communes-intercommunalités.

L'intercommunalité a été un succès grâce à la loi Chevènement de 1999, mais il faut franchir une nouvelle étape en achevant la couverture du pays, en renforçant sa gouvernance et en démocratisant son fonctionnement tout en préservant la légitimité du maire.

Cependant, pas plus aujourd'hui qu'hier, il ne faut opposer communes et intercommunalités. La commune, structure de base de notre démocratie, est ainsi confortée par notre réforme. Cette structure de base a besoin de s'appuyer sur une intercommunalité forte pour être plus efficace, pour mutualiser ce qui peut et doit l'être.

Par ailleurs, n'est-ce pas un réel progrès démocratique que de proposer d'instituer une élection au suffrage universel direct des délégués des communes siégeant au sein des conseils communautaires ? Comme d'autres parlementaires, vous l'avez souligné, monsieur le député Piron.

Cette solution était d'ailleurs préconisée par la proposition n° 7 du rapport Mauroy, voici déjà dix ans. C'est à l'unanimité que les structures intercommunales, présidées par le maire de Rennes, Daniel Delaveau, ont adopté les résolutions préconisant cette forme d'élection au suffrage direct, lors de leur dernier congrès qui s'est tenu à Chambéry à l'automne. J'y participais comme au congrès précédent qui s'était déroulé à Montpellier.

Cette réforme répond à un enjeu majeur : l'exigence démocratique, compte tenu des compétences exercées par les structures intercommunales qui touchent très directement à la vie quotidienne des habitants, et de l'importance des budgets qu'elles gèrent. Ainsi, en 2008, les dépenses des groupements à fiscalité propre se sont élevées à près de 25 milliards d'euros, soit quasiment le même montant que celui des régions.

Avec cette élection, les citoyens vont s'approprier les débats communautaires. L'intercommunalité ne sera plus une structure éloignée, presque désincarnée, pour l'électeur.

Le deuxième enjeu de l'intercommunalité, c'est l'achèvement de la couverture intercommunale intégrale du pays.

Moins de 10 % du territoire national reste encore à l'écart : sur plus de 36 000 communes, seulement environ 2 500 demeurent isolées. Ce sont souvent les cas les plus compliqués, des abcès que nous connaissons tous dans nos départements, et qui renvoient très souvent à des postures de principe.

L'objectif de couverture intégrale doit aller de pair avec la rationalisation des périmètres et des structures. Ce chantier sera mené en concertation, au plus près du terrain, dans le respect des communes, en fixant un calendrier et des objectifs raisonnables. C'est pourquoi le Gouvernement propose comme horizon la fin de l'année 2013.

Enfin, il est nécessaire de toiletter la carte des syndicats intercommunaux…

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

…dont beaucoup sont devenus des coquilles vides, comme nous le savons tous. (Approbations sur les bancs du groupe SRC.) N'en reste-t-il pas plus 15 600, disposant d'un budget de 16 milliards d'euros dont la moitié – excusez du peu ! – est encore consacré à des dépenses de fonctionnement ? Sur ce point, nous pourrions quand même trouver un consensus.

Debut de section - PermalienAlain Marleix, secrétaire d'état à l'intérieur et aux collectivités territoriales

Monsieur Juanico, vous avez soulevé un problème important à propos duquel je veux vous rassurer. Les départements et les régions pourront intervenir dans les financements croisés, y compris dans les compétences qui ne seront plus les leurs.

Nous avons aussi toujours dit que le sport et la culture feraient l'objet d'exceptions et seraient des compétences partagées. Je vous le répète solennellement.

Monsieur Duron, les créations de postes dans la fonction publique territoriale ont varié entre 2001 et 2007 : entre 27 000 et 49 000 par an, hors transferts de compétences, selon les derniers chiffres officiels de l'INSEE.

Monsieur le président, j'en ai terminé.

Je vous remercie de votre attention durant ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

L'ordre du jour appelle le débat sur l'application du droit au logement opposable.

L'organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, la parole est au premier orateur de ce groupe, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour dix minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme, mes chers collègues, bientôt trois ans après l'adoption de la loi instaurant le droit au logement opposable, le 5 mars 2007 – quelques-uns d'entre nous étaient là –, le groupe socialiste a souhaité l'organisation d'un débat pour faire le bilan de cette mesure prétendument symbolique et mettre le Gouvernement face à ses responsabilités.

Dans deux ans, le recours aux commissions de médiation, jusqu'à présent réservé aux catégories prioritaires, sera étendu à l'ensemble des demandeurs de logement social qui n'ont pas reçu d'offre dans un délai acceptable. En d'autres termes, dans deux ans, le recours aux commissions de médiation sera étendu à l'immense majorité de nos concitoyens demandeurs d'un logement.

Alors que cette extension du dispositif risque de provoquer un afflux de dossiers dans des commissions DALO déjà saturées, plusieurs questions se posent et s'imposent à la représentation nationale : où en est-on aujourd'hui ? Pourquoi l'État est-il incapable de respecter son obligation légale d'être le garant du droit au logement ?

L'objectif de ce débat est, outre de dresser un bilan, de démontrer en quoi les politiques du Gouvernement en matière de logement sont en totale contradiction avec cette loi que nous considérons toujours, compte tenu de son impréparation et de son inefficacité chronique, comme une loi d'affichage.

En instaurant un recours juridique pour les personnes qui ne trouvent pas de logement, la loi a transformé ce qui était jusqu'alors une obligation de moyen en une obligation de résultat. L'État doit désormais proposer un logement ou un hébergement adapté à chaque personne reconnue prioritaire par les commissions de médiation, sous peine d'être condamné par la justice. Lors de la campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy s'était engagé à respecter cette loi en affirmant que, s'il était élu, « plus personne ne [serait] obligé de dormir sur les trottoirs ». Silence : mémoire !

Or si, depuis l'entrée en vigueur de la loi, les ministres et les dispositifs d'urgence se sont succédé, la situation est restée la même. L'engagement de l'État en faveur du logement s'est même détérioré, son budget n'ayant cessé de diminuer alors que le DALO, qui devait impulser un nouveau souffle, aurait dû s'accompagner de moyens conséquents pour relancer la construction de logements sociaux et de centres d'hébergement accessibles aux personnes reconnues prioritaires.

L'inquiétude des Français face aux difficultés du logement, qui représente leur premier poste de dépenses, s'est ainsi amplifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Facteur d'insécurité, la crise économique a confirmé cette inquiétude en aggravant leur quotidien et leurs incertitudes pour l'avenir. Bref, cette grave crise du logement, les Français la vivent au quotidien.

Les chiffres du dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre sont alarmants : 6,6 millions de personnes sont en situation de fragilité, 3,5 millions sont très mal logées, 100 000 sont sans domicile fixe, soit 15 000 de plus qu'il y a sept ans. Quant aux demandeurs de logement social, il sont aujourd'hui plus de 1,2 million.

Le 27 novembre dernier, la deuxième Nuit solidaire pour le logement a été organisée à Paris et dans sept villes de province par les trente et une associations membres du collectif des associations unies, qui demandent une nouvelle politique du logement ; preuve que, trois ans après le campement du canal Saint-Martin organisé par les Enfants de Don Quichotte – événement qui contribua à l'instauration du DALO –, la situation n'a guère changé. La société civile reste donc mobilisée.

La crise économique et sociale a renforcé les difficultés rencontrées par les Français pour se loger. L'État doit donc faire face à ses obligations en matière de solidarité et de cohésion sociale. Les parlementaires de gauche, qui en ont pleinement conscience, sont des forces de propositions, comme le montrent la proposition de loi des sénateurs socialistes relative à la lutte contre le logement vacant et à la solidarité nationale pour le logement, rejetée par la majorité présidentielle le 17 novembre dernier, ainsi que la proposition de loi du groupe communiste visant à prendre des mesures urgentes pour le logement, que nous avons soutenue en décembre dernier et qui fut rejetée de la même manière.

Dès avril 2008, les députés socialistes avaient incité le Gouvernement à adopter des mesures simples, de bon sens et d'application immédiate, en lui soumettant une proposition de loi visant à donner un logement adapté à chacun et abordable à tous. Tout en reconnaissant le bien-fondé de nos propositions, le Gouvernement et sa majorité sont restés sourds à nos appels. Dès 2004, les parlementaires socialistes ont relayé la réflexion d'un droit au logement opposable qui émanait du milieu associatif en défendant, à l'Assemblée et au Sénat, des amendements visant à consacrer l'opposabilité du droit au logement.

Après avoir soutenu le principe de la loi DALO en mars 2007, le groupe socialiste s'est abstenu lors du vote sur l'ensemble, considérant que le texte relevait de l'affichage et n'était accompagné d'aucune mesure pour être concrétisé sur le terrain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

En mars 2009, la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, dite loi MOLLE, loin d'apporter des réponses concrètes à la crise du logement, a rendu plus difficile encore l'application du DALO. En diminuant les plafonds de ressources pour accéder au parc HLM et en augmentant les surloyers, le Gouvernement a mis en difficulté des milliers de ménages qui ne peuvent accéder ni au parc privé, ni au parc social.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Arrêtez !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

En plus d'être injuste, cette politique est contre-productive puisque les ménages exclus se retrouvent de facto prioritaires au sens de la loi DALO, laquelle oblige l'État à les reloger.

En 2009, Le Conseil d'État, dans son rapport intitulé Droit au logement, droit du logement, a pointé les carences de la mise en oeuvre du DALO. Je laisse le soin à notre collègue Jean-Michel Villaumé d'évoquer les éléments de ce rapport. Il n'empêche : le Conseil d'État n'a pas été tendre.

Une estimation réalisée par l'INSEE montre que 520 000 à 530 000 ménages pourraient répondre aux critères du DALO en métropole, et le dernier rapport du comité de suivi de la mise en oeuvre du droit au logement opposable montre clairement que l'État ne respecte pas ses obligations de relogement.

En octobre 2009, 122 560 recours ont été déposés devant les commissions de médiation, lesquelles en ont traité près de 70 %. Sur les 38 125 ménages reconnus prioritaires par ces commissions, seuls 17 589 ont été relogés ou hébergés. Si le DALO n'est pas respecté aujourd'hui, comment l'État pourra-t-il faire face à ses obligations lorsque les besoins, dans deux ans, seront plus grands encore ?

Ces relogements s'effectuent en totalité dans le parc social. Toutefois, seulement 40 % des ménages reconnus prioritaires ont été effectivement relogés. La mobilisation des plans départementaux et du Fonds de solidarité pour le logement dans l'accompagnement des relogements est elle-même insuffisante.

Pour avoir une approche pertinente de la mise en oeuvre du DALO, il convient de privilégier une approche territorialisée. En effet, la situation est contrastée : alors que dix départements enregistrent cinquante recours par mois, cinquante-huit n'en enregistrent que dix. L'Île-de-France concentre les deux tiers des recours, et Paris, 20 % à lui seul ; Daniel Goldberg en parlera.

Tous les territoires ne jouent pas le jeu. Dans les Hauts-de-Seine, par exemple, 87 % des décisions des commissions n'ont pas été suivies de mesures concrètes près de deux mois après avoir été rendues.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Et à Paris, qu'en est-il ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

La mixité sociale doit être renforcée.

Force est de constater que de grandes disparités demeurent entre les territoires, ce qui s'explique notamment par un décalage entre l'offre disponible dans le contingent préfectoral et les accords collectifs ou les recours DALO.

Enfin, des contradictions entre les objectifs du plan de rénovation urbaine et la mise en oeuvre du DALO apparaissent. Le risque est donc grand de voir s'accentuer les ghettos ou de les reconstituer. En ce sens la loi DALO peut s'avérer contre-productive,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

…l'effort pesant souvent sur les mêmes territoires alors qu'ils sont déjà fragilisés. (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)

Si le DALO a permis d'établir une liste précise des personnes prioritaires et de modifier l'ordre dans la liste d'attente, il n'a pas été réellement suivi d'effets car l'État n'a pas construit suffisamment de logements pour reloger les intéressés, contrevenant ainsi à son rôle de garant du droit au logement opposable.

Le budget de la mission « Ville et logement » pour 2010 confirme le désengagement financier de l'État, déjà patent ces dernières années, alors que seul un effort massif de sa part en faveur de la construction de logements adaptés pourra modifier la donne. Or l'engagement financier de la collectivité publique se situe à son niveau le plus bas depuis trente ans, l'essentiel de ce recul étant imputable à la diminution de la contribution de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Depuis 2001, l'État prélève plus sur le logement qu'il ne redistribue, comme en témoignent les chiffres révélés par l'expert Michel Mouillart. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Les chiffres de la construction, après une forte progression depuis 2004, redeviennent alarmants. Selon la Fondation Abbé Pierre, il faudrait construire 500 000 logements, dont 120 000 très sociaux.

Tel est le débat que nous voulons ouvrir. Certains de mes collègues évoqueront plusieurs aspects du DALO. En tout cas la situation actuelle nous impose non seulement d'en examiner la mise en oeuvre, mais aussi d'engager une vraie et forte politique du logement. C'est pour cette raison que nous avons voulu ouvrir ce débat avec vous et avec la majorité, monsieur le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Il est en effet temps de prendre de vraies initiatives face à la grave crise du logement que nos concitoyens subissent. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Il faudrait un droit opposable à la présence obligatoire des députés de l'UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, lors de l'examen du texte instituant un droit au logement opposable, il y eut, m'a-t-on dit, de belles envolées lyriques. M. Borloo est même allé jusqu'à dire que ce texte justifiait à lui seul tous les aléas de la vie politique – et il en connaît un rayon. (Sourires.)

Quant à la majorité, l'un de ses représentants déclarait que ce texte conférait à la France le statut de pionnière en matière de logement.

Certes, l'idée de faire de l'État le garant du droit de chacun à un logement décent est défendue depuis longtemps par la gauche, mais aussi par le mouvement associatif. Le DALO était donc, dans son principe, une avancée indéniable, mais sa concrétisation législative par la droite, de même que sa mise en oeuvre, n'ont pas été à la hauteur de l'enjeu.

Rappelez-vous le contexte dans lequel le texte fut voté. La douzième législature s'achevait et l'hiver, très rigoureux, avait été marqué par la mobilisation très médiatique des Enfants de Don Quichotte. Les tentes installées sur les berges du canal Saint-Martin avaient suscité émotion et indignation, au point de contraindre l'exécutif à agir ou, à tout le moins, à faire de grandes déclarations. C'est dans ces conditions que fut conçu le projet de loi instituant un droit au logement opposable ; élaboré dans l'urgence, il était imparfait et incomplet.

Or l'action des Enfants de Don Quichotte, qui aurait dû ou pu aboutir à une réflexion globale sur les politiques du logement en France et à une réforme structurelle de l'action publique, n'a en réalité donné lieu qu'à une série de mesures médiatiques, tel ce « Village de l'espoir » implanté à Ivry-sur-Seine, ville dont je suis maire, sans aucune concertation avec les élus ; j'ai d'ailleurs récemment appris dans la presse que cette opération, qui devait initialement durer un an, serait prolongée pendant au moins cinq ans. Il s'agit en l'occurrence de mobil- homes installés sur un terrain inconstructible.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

À la demande des intéressés !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

À la demande de rien du tout !

Autrement dit, le Gouvernement s'est empressé de mettre en oeuvre des mesures qui tenaient davantage à des considérations médiatiques qu'à des impératifs humains. À cet égard le grand défaut du projet de loi DALO est d'avoir été conçu, débattu et voté en complète autarcie, et sans qu'y soient associés les moyens budgétaires suffisants. C'est ce que les députés communistes déploraient déjà en s'abstenant lors du vote.

Ce sont ces incohérences qui contribuent aujourd'hui à la totale dénaturation du droit au logement opposable. Le premier constat est sans appel : bien loin de s'être atténuée, la crise du logement en France n'a jamais été aussi criante. Le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre est en effet accablant. Je ne rappelle que quelques chiffres, qui témoignent de l'ampleur du problème : 3,5 millions de personnes sont mal logées, dont 100 000 SDF et 500 000 personnes privées de domicile personnel ; en outre, 6,6 millions de personnes sont en situation de fragilité à court et moyen terme : ce sont tous ces gens qui, à un moment ou à un autre, se tourneront vers le DALO.

Au-delà de ces chiffres, c'est l'analyse de la crise actuelle du logement qui est préoccupante. Si la crise économique aggrave celle du logement, c'est parce que, comme l'indique la Fondation Abbé Pierre, elle atteint un corps déjà malade, une société confrontée depuis de nombreuses années à ce que cette association appelle une « crise du logement sans précédent ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Actuellement, 80 % des Français estiment qu'il est difficile de trouver un logement et 56 % ont peur de devenir un jour sans domicile : pour ces gens-là, la menace est bien réelle.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Ce n'est pas une menace !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Le logement est le premier poste de dépense des ménages. Il n'est pas rare de voir des familles qui dépensent 30, 40, voire 50 % de leurs revenus pour se loger, alors que, dans l'ensemble, la hausse des loyers ne s'est pas accompagnée d'une amélioration significative de l'habitat.

Enfin, 1,2 million de personnes sont en attente d'un logement social. Si le parc HLM compte 4 millions d'unités, l'offre de logements sociaux stagne autour de 450 000, alors que l'offre dans le privé a diminué de plus de 500 000. Telle est la réalité, monsieur le secrétaire d'État, même si vous n'avez de cesse de tenter de la contredire.

Dans ce contexte, quel est le bilan du DALO, trois ans après son adoption ?

À l'époque, Jean-Louis Borloo prédisait que le dispositif serait pleinement efficace au début de 2012. Le dernier rapport du comité de suivi de la mise en oeuvre du DALO ne laisse pourtant guère de doute : inutile de lire entre les lignes pour saisir le message. La première phrase du rapport est claire : « Le comité de suivi a souhaité délivrer un message d'alerte fort : la crédibilité du DALO se joue, dans les mois à venir, sur la bataille de l'offre. » Tout est dit. C'est donc à juste titre que nos collègues du groupe SRC ont pris l'initiative d'alerter la représentation nationale à ce sujet.

Le constat s'impose : 100 000 dossiers ont été déposés au plan national ; l'Île-de-France représente les deux tiers des demandes, et Paris, à lui seul, compte 20 % des recours nationaux. En province, la situation est contrastée. Dix départements enregistrent plus de cinquante recours par mois, alors que cinquante-huit autres départements en comptent moins de dix. Au total, seuls 11 000 ménages ont été relogés. Maigre bilan, comparé aux 3,5 millions de mal-logés.

Autre chiffre important et intéressant : 7 250 ménages prioritaires n'ont toujours pas reçu d'offre, dont 6 500 en Île-de-France, 5 500 pour la seule capitale. Pourtant, monsieur le secrétaire d'État, vous ne cessez de répéter que le DALO fonctionne dans 90 % des départements. La belle affaire ! N'a-t-il pas été conçu, précisément, pour les secteurs où se manifeste une pénurie considérable de l'offre, c'est-à-dire ceux-là même où il ne fonctionne pas ? Pour toute explication, vous martelez que cet échec serait dû, en grande partie, au dysfonctionnement des réservations dans le contingent préfectoral, sous-entendant que les maires ont la volonté de faire barrage au droit de réservation de l'État. Il faut mettre un terme à cette critique ou en démontrer la justesse.

La question à se poser est simple : qui ne respecte pas la réservation préfectorale ? Je vous ai entendu dire, monsieur le secrétaire d'État, que cela ne marchait pas, que tout était bloqué parce que les réservations préfectorales n'étaient pas affectées au DALO.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Quels organismes ne respectent pas les engagements de réservation, et sur combien de logements cela porte-t-il ?

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Les chiffres ont été donnés depuis longtemps. Je les redonnerai tout à l'heure, si vous le souhaitez.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

On ne peut pas se contenter de jugements à l'emporte-pièce, notamment en Île-de-France.

À cela s'ajoute une remarque de fond, liée à votre critique. Le DALO devait-il reposer essentiellement sur l'utilisation du contingent préfectoral, auquel cas il n'apportait rien de nouveau que l'application stricte de la loi, ou devait-il impérativement se traduire par une augmentation très importante de l'offre ?

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est le cas !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Or que dit le rapport du comité de suivi ? « La notion de droit opposable invite l'État à devenir davantage attentif à l'écart qui sépare souvent la proclamation de droits nouveaux de leur mise en oeuvre effective, laquelle suppose des moyens de financement suffisants, une organisation administrative adaptée et un système productif apte à répondre à la demande. À l'heure actuelle et compte tenu des circonstances qui ont présidé à sa reconnaissance, le DALO ne répond pas à cette exigence. » (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Il faut construire, monsieur le secrétaire d'État. Cela exige des moyens et de la volonté politique. Je vous rappelle que, en juin 2008 – mais vous n'étiez pas né, en tout cas pas en tant que secrétaire d'État (Rires sur les bancs du groupe SRC)…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Je croyais que vous ne suiviez pas, monsieur Bignon.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Ce que je dis était peut-être un peu téléphoné, mais cela reste assez sympathique pour le secrétaire d'État.

En juin 2008, donc, le Conseil de l'Europe a condamné la France pour non-respect de sa charte sociale, pointant du doigt l'insuffisance de l'offre de logements abordables et les manques de la politique de lutte contre les expulsions et l'habitat indigne. Vous ne cessez de répéter que la France n'a jamais autant construit de logements sociaux.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est la vérité !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

En fait vous jouez avec les chiffres, amalgamant PLAI, PLUS et, surtout, PLS, mais ce n'est pas du logement social.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Ah bon ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Pour l'Île-de-France, vos chiffres ne tiennent pas compte du fait que plus de 53 % des logements sociaux nouveaux à Paris sont des acquisitions qui, le plus souvent, sont occupées.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Là, nous sommes bien d'accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Vous aurez le temps de répondre, monsieur le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Je me contentais de vous signaler que, sur ce point, je suis d'accord avec vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Monsieur le président, faites respecter les orateurs ! (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

M. Apparu est un spécialiste des interruptions ! Il fait ça à tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Monsieur le secrétaire d'État, je vous renvoie à un autre rapport, qu'a évoqué Jean-Yves Le Bouillonnec : celui du Conseil d'État qui évalue à 13 % le volume de logement social dans les nouvelles constructions. Il rappelle que, « depuis plusieurs années, le parc HLM ne croît plus à un rythme compatible avec les besoins ». Ce n'est pas le groupe communiste qui le dit, mais le Conseil d'État !

Ainsi, sans effort budgétaire de l'État, le DALO restera une coquille vide. Là encore, l'État manque à ses devoirs. Certes, le budget 2010 est en hausse de 480 millions par rapport à celui de 2009, mais cela s'explique notamment par l'augmentation des aides personnelles liées à l'aggravation de la crise. En outre, cette hausse est fictive, car elle ne prend pas en compte la baisse vertigineuse qu'a subie ce même budget en 2009.

Au final, hors plan de relance, le budget Ville et logement enregistre toujours un déficit de 236 millions d'euros par rapport à 2007. Encore cela ne tient-il pas compte du fait que vous avez racketté le 1 % logement ! (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)

Le Conseil d'État, le comité de suivi du DALO, les associations, les parlementaires de gauche et les demandeurs de logement somment le Gouvernement de construire. Or, dans le budget de 2010, les aides à la pierre sont en baisse de 70 millions. Les projections du ministère fixent à 110 000 le volume de construction de logements sociaux pour 2010, soit 10 000 de moins que l'an passé. Cet objectif est d'ailleurs quelque peu surestimé et vos services, monsieur le secrétaire d'État, ont revu à la baisse les prévisions en matière de développement du parc locatif social, notamment en zone tendue. Celles-ci stagnent autour de 24 %, pour des prévisions initiales de 27 %.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Mais non !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Autre manquement flagrant, le non-respect par certaines villes de l'obligation de 20 % de logements sociaux, qu'il conviendrait, à mon avis, de passer à 30 % pour combler le déficit. Lors de nos débats du 3 décembre, vous avez affirmé que les objectifs de la SRU étaient atteints en Île-de-France à 153 %...

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

À 154 % !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

…oubliant les grandes disparités territoriales. Par exemple, quatorze des trente-six communes des Hauts-de-Seine ne l'appliquent pas : toutes ont des municipalités de droite. Or le DALO impose que les villes qui n'appliquent pas la loi construisent ; sans cela, la pénurie s'éternisera et les populations concernées par le DALO continueront à être orientées vers les communes qui assument leurs responsabilités sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Ce n'est pas gentil pour la ville de Paris !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Si vous le souhaitez, monsieur le secrétaire d'État, plutôt que dans le 13e arrondissement, nous pouvons aller dans le 15e et dans le 16e !

En définitive, en l'état actuel des choses et sans évolution, le DALO continuera à conjuguer ségrégation sociale avec ségrégation territoriale. À l'heure du bilan, on constate que la France n'est pas devenue la pionnière qu'on avait un peu trop vite fait d'elle. Il est temps que s'engage une véritable politique du logement, fondée notamment sur la création d'un grand service public structuré autour d'un pôle public financier, d'une agence nationale foncière et d'une entreprise publique de la construction. C'est, entre autres, ce qu'ont demandé des centaines de personnes, dont mon collègue et ami Jean-Yves Le Bouillonnec, lors des états généraux du logement, qui se sont tenus à Ivry, le 6 février dernier. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, m'exprimant au nom du groupe UMP…

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Vous voulez dire que vous êtes le groupe UMP à vous tout seul !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

…je m'honore d'avoir, en tant que membre du haut comité pour le logement des personnes défavorisées de 1995 à 2008, participé à l'émergence, puis à la préconisation, du droit au logement opposable. En effet, c'est en 2006, dans notre rapport au Président de la République, que nous avions préconisé une expérimentation du droit au logement opposable, préconisation qui fut reprise, quelques années plus tard, dans le texte voté dans cet hémicycle. J'avais d'ailleurs été rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques du projet de loi instituant le droit au logement opposable et j'ai participé aux toutes premières réunions du comité de suivi institué par la loi.

C'est dire que ce sujet m'intéresse et que, sans vouloir faire un cours d'histoire, je me dois de rappeler la conviction qui animait les membres du haut comité lors de l'élaboration du concept du droit au logement opposable : pour qu'il soit effectif, la production de logement était une priorité. Bien qu'il fût hétérogène – puisqu'il rassemblait des élus, de droite et de gauche, et des représentants d'associations –, ce groupe était toujours unanime. Nous avions conscience que l'obligation de résultat que nous contribuions à mettre en place engendrerait nécessairement des contentieux et était de nature à créer de grosses difficultés aux gouvernements, quels qu'ils soient, et à rendre plus polémique un dossier qui, à bien des égards, est souvent très douloureux pour ceux qui le vivent et très difficile à résoudre.

Il serait bon de saluer le courage de ceux qui, dans les gouvernements successifs, notamment depuis 2002, ont redoublé d'efforts pour mettre la production de logements au coeur de leur action.

Bien avant l'instauration du DALO, plusieurs lois ont été adoptées depuis 2002 : celles instituant un programme de rénovation urbaine afin de réhabiliter le bâti dans les quartiers sensibles, un plan de cohésion sociale pour permettre de relancer la construction de logements locatifs sociaux, la loi portant engagement national pour le logement permettant la mobilisation du foncier et relançant l'accession à la propriété, luttant contre la vacance des logements et renforçant le conventionnement dans le parc locatif privé.

Ainsi, après une période où la production de logements avait été très insuffisante – pardonnez ce rappel, toujours très douloureux à entendre, chers collègues de l'opposition –, des efforts considérables ont été accomplis, et ils ne sont pas terminés.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Très juste !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Sont-ils pour autant suffisants pour répondre aux problèmes. Assurément non, et le secrétaire d'État le dira tout à l'heure, comme il l'a déjà fait à l'occasion de différents colloques ou prises de parole. Pouvait-on néanmoins soutenir de bonne foi que, en instituant la DALO, on résoudrait, comme par un coup de baguette magique, ce problème lancinant, qu'aucun gouvernement, et surtout pas ceux de gauche, n'a su résoudre ? Assurément non, et nous le savions.

Comme toujours, pour traiter une situation complexe, il faut réunir au minimum deux conditions : un éventail de solutions et du temps. Il n'y a pas, en effet, de solution unique. Ce n'est pas l'offre seule qui résoudra le problème. Indépendamment des questions de financement, et ne serait-ce que pour des problèmes de foncier, il faut du temps pour construire, et on savait bien, en créant le DALO dans une situation d'offre très largement insuffisante, que deux années ne suffiraient pas à tout régler.

Wangari Maathai, cette Kenyane prix Nobel de la paix en 2004, rappelle souvent que, quelle que soit la nature du problème que l'on souhaite résoudre, il faut être engagé, persévérant et patient. La politique suivie par le Gouvernement de François Fillon, avec Jean-Louis Borloo et Benoist Apparu, mérite-t-elle ces qualificatifs ? Assurément. Beaucoup avait été entrepris dès avant l'adoption du DALO, à la fois sur le plan législatif et sur le plan budgétaire. Où en sommes-nous ?

Si, globalement, le droit est entré dans notre paysage social, le bilan laisse apparaître l'existence de territoires très différents : dans 90 % des départements, les recours devant les commissions de médiation jouent leur rôle de filet de sécurité. Quand quelque chose ne marche pas dans le dispositif, la commission de médiation appuie pour trouver une solution. Certes, dans 10 % des départements, le DALO met l'accent sur le déséquilibre entre la demande et l'offre. Malheureusement, et malgré tous les efforts qui sont accomplis, il faudra du temps pour le régler.

Deuxième point, certaines catégories de nos concitoyens rencontrent des difficultés inadmissibles. Il est effectivement intolérable, inacceptable, dans une démocratie comme la nôtre, dans un pays riche comme le nôtre, que des familles ne puissent être relogées dans un délai de sept ans. Des efforts particuliers doivent être faits à ce propos.

Le problème est également qualitatif. Nous dénonçons souvent une insuffisance quantitative mais l'offre est fréquemment inadaptée sur certains territoires.

Enfin, les personnes dites « à la rue » doivent probablement être prises en charge différemment. Il importe de réformer la politique menée en cette matière.

Comment remédier à ces véritables difficultés ? Si nous pouvions éviter de faire d'un véritable sujet une affaire politicienne clivée, nous progresserions. Il est curieux de voir à quel point nous avons du mal à discuter entre nous de façon détendue de certains sujets, dans cet hémicycle ou hors de cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Dhuicq

Ce n'est pas une raison pour ne pas nous comporter de manière intelligente !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

J'allais précisément dire, monsieur Goua, que le sujet est grave. Ce n'est cependant pas parce qu'il est grave que nous sommes obligés de nous rentrer dedans…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

.. en considérant que vous êtes les bons, les généreux,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

…et que nous sommes les méchants.C'est pourtant votre façon d'aborder la question. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je vous en prie. Monsieur Bignon, poursuivez votre propos.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Cet échange est intéressant, monsieur le président, et mon temps de parole n'est pas encore épuisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Ce n'est pas un problème de temps de parole, monsieur Bignon. Veuillez poursuivre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Ce scénario, extrêmement confortable pour ceux qui l'écrivent, est un peu ridicule et, me semble-t-il, ne convainc plus personne.

Au sein du haut comité, nos débats étaient empreints de respect. Je me souviens ainsi d'échanges avec Jack Ralite, dont je ne partage pas les engagements politiques mais qui est un homme extrêmement respectable ; il ne ricanait pas lorsque j'exprimais mon point de vue, comme si celui-ci était forcément imbécile au motif que je suis de droite. Nous arrivions à trouver des solutions, et c'est ainsi que nous avons préconisé la mise en place du droit au logement opposable.

Je pense donc que, si, droite et gauche, politiques et monde associatif, nos positions respectives étaient plus proches, nous avancerions plus vite.

L'engagement du Gouvernement n'est pas discutable. Il doit s'inscrire dans la durée, sans jamais, jamais, jamais renoncer, comme le disait Churchill.

Le Gouvernement a donc dressé un bilan sans complaisance du dispositif, qui ressort des constats mêmes du comité de suivi. Soutenu sans modération par le groupe UMP, le Gouvernement avance délibérément dans cinq directions.

Il s'agit, premièrement, d'améliorer encore et toujours la production de logements sociaux, en faisant des efforts particuliers pour l'accès des personnes modestes au logement et dans les territoires où le déficit de logements reste important. Ainsi 125 000 logements ont été produits en 2009, contre 40 000 en l'an 2000. En 2010, ce nombre s'élèvera à 140 000, dont 27 500 PLAI, l'accent étant mis sur la réorientation des efforts vers les zones les plus tendues. Vous avez appelé cela de vos voeux ; le Gouvernement vous a entendu.

Il s'agit, deuxièmement, d'améliorer l'accompagnement social pour gérer la demande et l'attribution des logements sociaux. M. le secrétaire d'État nous en dira certainement davantage à ce propos tout à l'heure.

Il s'agit, troisièmement, de lutter contre l'habitat indigne. Il est effectivement scandaleux que des gens vivent dans les conditions d'indignité qui caractérisent certains logements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Il faut absolument contraindre les propriétaires à effectuer les travaux nécessaires avec les crédits ANHA mis à leur disposition. Je n'hésite pas à le dire : les soumettre à des astreintes financières ne me choquerait absolument pas, car il n'est pas tolérable qu'ils fassent vivre des gens dans de telles conditions.

Quatrièmement, il faut également travailler à l'amélioration de la prévention des expulsions, notamment grâce à la garantie des risques locatifs. Le travail mené par le Gouvernement à ce propos devrait aboutir dans le courant de l'année 2010.

Cinquièmement, la mise en place d'un service public de l'hébergement et de l'accès au logement des personnes sans abri peut également constituer une piste de nature à répondre aux aspirations formulées par le comité de suivi du DALO à propos des personnes dites « à la rue ».

C'est dire que le chantier qui nous attend est complexe, long, coûteux et difficile, car il fait appel à des problématiques extrêmement complexes, qu'elles soient urbanistiques, financières, politiques ou, parfois, politiciennes. Pour autant, je ne vois pas pourquoi, s'agissant du problème du logement, nous n'essaierions pas, les uns et les autres, dans un souci de débloquer des dossiers peu glorieux pour notre République, de trouver des moyens d'avancer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

J'espère que certains de mes collègues, avec qui, sur d'autres sujets, comme le Grenelle, qui requérait de changer de culture et d'approche en matière de transports et de consommation d'énergie, nous y sommes parvenus, partagent cette conviction.

J'en forme en tout cas le voeu au nom du groupe UMP, en espérant qu'une évaluation des politiques menées dans le cadre du DALO montre l'an prochain que nous aurons progressé.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Voilà qui n'est pas très gentil pour les précédents orateurs, monsieur Rogemont !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, c'est un élu en colère qui intervient aujourd'hui devant vous, en colère car notre pays est un des plus riches de la planète, l'un de ceux dans lequel des fortunes importantes s'amassent, parfois avec la complicité des pouvoirs publics, comme c'est le cas, par exemple, avec le bouclier fiscal,…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Cela faisait longtemps !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

…mais qu'il est pourtant incapable, sous votre conduite, de trouver une issue à une crise du logement qui s'amplifie et qui touche maintenant indistinctement les plus défavorisés comme les classes moyennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

C'est un pays dans lequel des choix politiques, les vôtres, ont transformé le logement en un produit financier au lieu d'en faire l'outil d'une politique publique au service de l'ensemble de nos concitoyens. Chacun peut d'ailleurs en faire le constat, en supprimant chaque jour de sa boite mail les offres de défiscalisation que nous recevons, destinées à nous vendre, hier, du Robien ou du Borloo, maintenant, du Scellier, et promettant au futur apprenti promoteur des revenus importants.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Du Besson, aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Vous le savez, parmi les multiples difficultés sociales que l'on rencontre dans notre pays, la question du logement est l'une de celles qui crée le plus d'inégalités : 50 % des revenus des familles les plus modestes sont consacrés au logement, alors que la part de ce poste de dépenses est moitié moindre pour l'ensemble des foyers, et encore plus réduite pour les plus fortunés.

Je citerais volontiers Alain Dinin, le président-directeur général de Nexity, pour vous montrer que ce constat est très largement partagé : « Le logement est devenu la quatrième préoccupation des Français, au même niveau que la santé et l'assurance maladie. Les Français sont de plus en plus nombreux à pointer la pénurie de logements accessibles. Ils savent que l'immobilier est probablement le domaine où l'intervention publique est la plus efficace. L'opinion a appris de la crise que les solutions à court terme ne peuvent répondre qu'à l'urgence et qu'il faut aller plus loin pour l'immobilier. »

Cette crise du logement est violente pour tous ceux qui en sont victimes. Elle maintient des millions de personnes en manque d'un logement décent : dix millions de personnes – cela a été rappelé – selon le constat dressé il y a peu par la Fondation Abbé Pierre.

Je crois que vous étiez présent, monsieur le secrétaire d'État, ce matin, à l'ouverture de l'année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Je ne peux que souhaiter que, au-delà des grandes déclarations, les actes et les faits concrétisent à la fin de cette année les paroles échangées ce matin et que ces actes se traduiront, pour toutes les familles qui en ont besoin, par l'espoir d'une offre de logement accessible au plus grand nombre, équitablement répartie sur le territoire national. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Chacun sait en effet que toute décision dans le domaine du logement, en-dehors du logement d'urgence, se concrétise sur plusieurs années. C'est d'ailleurs le sens de la loi DALO, qui vise à passer d'une logique de besoins à une logique de résultats. Vous devez aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'État, prendre l'engagement que vos décisions d'aujourd'hui permettront de résorber à moyen terme cette crise du logement que nous dénonçons, et vous devez nous le démontrer chiffres et prévisions à l'appui.

Si nous pouvons et voulons débattre aujourd'hui du DALO, de son mécanisme et de son efficacité, une question principale demeure : celle de la production d'un nombre suffisant de logements correspondants aux besoins des demandeurs et non pas au bon vouloir du marché.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Il est intéressant, de ce point de vue, d'examiner le projet de loi intitulé « Grand Paris », qui traduit assez bien la politique menée par votre gouvernement et la manière dont celle-ci est soutenue par votre majorité et tant vantée par Valérie Pécresse, candidate aux élections régionales. Pourquoi donc ? C'est que les choix induits par ce projet vont à l'encontre du but que, si j'en crois les échanges que je viens d'entendre dans cet hémicycle, nous cherchons à atteindre.

Votre collègue Christian Blanc, monsieur le secrétaire d'État, a conçu un projet de développement de la région Île-de-France entièrement tourné vers le développement économique de quelques zones de cette région. Il n'est pas question ici de discuter de son opportunité économique, ou des choix en matière de transports, ni même de son financement hasardeux, encore qu'il y aurait grandement matière à le faire. Je veux simplement vous démontrer que, par ce choix, qui est donc aussi le vôtre, promouvant un étalement urbain, aggravant le déséquilibre territorial entre l'ouest et l'est de la région, ne répondant pas aux questions essentielles des déplacements entre le domicile et le travail, créant de toutes pièces des zones où la valorisation foncière…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

…l'emportera sur tout objectif de construction de logements sociaux, non seulement vous ne répondez en rien à la crise du logement dans notre région, mais vous risquez même de l'aggraver. (Applaudissements sur divers bancs du groupe SRC.)

Au lieu, une fois de plus, de partir des besoins de la population, de mettre en place des dispositifs d'encadrement du marché ; au lieu d'engager un développement territorial en fixant des objectifs de construction de logements par zones ainsi que de typologie de logements à l'intérieur de celles-ci ; au lieu de contraindre les élus qui refusent d'accueillir sur leur territoire des pauvres – osons encore, dans cette enceinte, employer le mot ! – et même des familles issues des classes moyennes ; au lieu d'encourager les maires bâtisseurs, de gauche comme de droite, qui sont, eux, sensibles à la cohésion républicaine de notre pays, par ce projet de loi, vous tournez le dos aux objectifs de résultats énoncés par la loi instituant le droit au logement opposable, votée il y a deux ans maintenant.

Une fois ce constat fait, je ne vais pas mettre en difficulté les fonctionnaires de l'État qui, dans chaque département, font de leur mieux, avec les moyens dont ils disposent, au niveau des commission de recours. Laissez-moi cependant vous rappeler quelques chiffres du bilan du droit au logement opposable et de son application en Île-de-France.

À la fin du mois d'octobre 2009, 77 851 recours avaient été déposés dans cette région, ce qui représente, en gros, les deux tiers des recours déposés en France. 23 000 d'entre eux ont donné lieu à des décisions favorables, dont 5 837 – soit seulement 25 % - ont permis des relogements, soit 25 %.

Prenons maintenant le cas particulier de mon département, la Seine-Saint-Denis, qui compte 550 000 logements, dont 36 % de logements sociaux et 60 000 logements dépendant du contingent préfectoral et où, par ailleurs, le revenu moyen par habitant est inférieur de 20 % au revenu moyen dans la seule Île-de-France où 8 000 recours ont été déposés en 2009, soit 38 % de plus qu'en 2008. Environ 1 800, soit 22 % d'entre eux, ont été acceptés comme prioritaires et urgents par la commission préfectorale. Parmi eux, 729 ont donné lieu à des relogements, soit 9 % des dossiers déposés et 40 % ont été jugés comme prioritaires et urgents par la commission préfectorale.

Alors doit-on encore parler de DALO, droit au logement opposable, ou doit-on parler maintenant de DALU, droit au logement – ou au relogement – dans l'urgence, ou de DALP, droit au logement prioritaire ? Là est, aujourd'hui, la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Trois types de besoin ressortent de l'ensemble des dossiers déposés.

Il s'agit tout d'abord d'un besoin de logements de grande taille. Les ménages de plus de trois enfants représentent environ 13% des ménages éligibles. Cette proportion est deux fois plus élevée que la part de ces ménages dans l'ensemble de l'Île-de-France.

Cela nous amène aussi à nous interroger sur les opérations de démolition-reconstruction pratiquées sous les bons auspices de l'Agence nationale de rénovation urbaine, plus précisément sur la typologie des logements reconstruits par rapport aux logements démolis.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est juste !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Un deuxième besoin est évidemment le besoin de logements à faibles loyers. Parmi les ménages éligibles, 71 % perçoivent des allocations et plus de 19 % sont bénéficiaires du RMI. Nous en revenons donc à la nécessité de logements accessibles au plus grand nombre. Or les prêts locatifs sociaux – nous en avons discuté par le passé et nous en rediscuterons sûrement – et même certains niveaux de loyer des logements de type PLUS, prêt locatif à usage social, ne répondent pas aux besoins.

Le troisième type de besoin est le besoin de logements accessibles aux ménages comportant une personne handicapée, ce qui concerne plus de 18 % des ménages éligibles.

Que préconisons-nous ?

Nous préconisons, en premier lieu, un accompagnement des ménages. Qui parmi nous, parlementaires, n'a pas été mis en difficulté, lors de permanences, par des ménages qui ne pouvaient pas remplir par eux-mêmes le dossier nécessaire pour bénéficier du DALO ? Il faut donc mettre en place des relais locaux pour la délivrance des dossiers, qui aident à la rédaction du dossier.

C'est ce que propose la ville d'Aubervilliers, qui se trouve dans ma circonscription et qui finance la tenue de permanences juridiques, alors que cette charge pourrait incomber à l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Ce sont toujours les collectivités locales qui paient !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Cela aurait pu être évoqué au cours du débat sur les collectivités territoriales qui a précédé celui-ci. Pourquoi ne vous engageriez-vous pas, monsieur le secrétaire d'État, à ce que ce soit votre ministère qui finance, de ce point de vue, les permanences de l'ADIL – l'agence départementale d'information sur le logement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Les décisions de la commission sont parfois – pas forcément en Seine-Saint-Denis – orientées en fonction du nombre de logements potentiellement disponibles sur le contingent préfectoral, plutôt qu'en fonction des besoins.

Je ne reviendrai pas sur la nécessité de réorienter la construction de logements sociaux, que j'ai déjà longuement évoquée. Cela étant, il faut mobiliser toutes les opérations importantes de construction de logements privés pour qu'elles comportent une part de logements sociaux.

Il convient également de recourir davantage aux mécanismes de médiation locative, d'agir sur la vacance et d'engager des réquisitions de locaux, parfois même de bureaux lorsqu'ils appartiennent à des propriétaires institutionnels, afin de créer du logement social.

Il faut, enfin, solliciter le parc privé pour qu'il participe activement au relogement des familles DALO.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est ce que nous faisons !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Voilà le constat que nous dressons aujourd'hui et une partie des propositions que nous mettons en avant. Elles sont largement soutenues par l'ensemble des acteurs du logement social et, je n'en doute pas, monsieur le secrétaire d'État, elles le seront tout autant par nos concitoyens lors des prochaines échéances électorales, les 14 et 21 mars prochain ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en votant, il y a presque trois ans, la loi sur le droit au logement opposable, nous nous sommes lancé un véritable défi. Un défi ambitieux, celui de permettre à chacun de nos concitoyens de vivre dans un logement décent et adapté à ses besoins, pour que le mot « fraternité » inscrit sur tous les frontons de la République ne soit pas un vain mot.

Mais dès le départ – nous sommes contraints de le reconnaître, même ceux qui ont voté ce texte, dans la majorité comme dans l'opposition – nous n'avions malheureusement pas l'offre de logements indispensable à l'application de cette loi. Nous n'avions pas les moyens de notre ambition ni de notre enthousiasme. Nous avons concocté rapidement cette loi, presque entre nous, Gouvernement et Parlement ensemble. Nous avons fait de ce droit une responsabilité de l'État, sans y impliquer suffisamment nos concitoyens, les associations, les bailleurs sociaux et, bien entendu, les élus locaux, pourtant premiers maîtres d'oeuvre en matière de construction de logements.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Beaucoup a été fait depuis trois ans pour que l'on puisse appliquer cette loi, et donc proposer un logement à ceux à qui ce droit est reconnu. Pourtant, nous sommes submergés par une déferlante : celle des demandeurs à qui le droit au logement a été reconnu par les commissions départementales de médiation mais à qui, malheureusement, nous ne pouvons pas proposer de logement. Il nous faut donc aller plus loin dans nos efforts, être plus pragmatiques, plus efficaces, plus créatifs, impliquer les élus concernés, surtout dans les zones tendues, et réveiller les consciences de nos concitoyens.

J'évoquerai plusieurs pistes de réflexion et d'action.

Première piste : la construction de logements très sociaux. Je salue votre volonté, monsieur le secrétaire d'État, de vouloir recentrer les aides et les efforts en matière de construction de logements sociaux et d'avantages fiscaux sur les zones tendues. C'est évidemment dans cette direction qu'il faut travailler. Nous manquons surtout de PLAI, c'est-à-dire de logements très sociaux. Je sais que la construction de logements très sociaux a progressé, mais nous sommes loin, très loin du compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Nous devons mettre la priorité sur ce type de logement. Il nous manque aussi des logements passerelles, des logements adaptés, notamment pour les personnes souffrant de troubles psychiatriques.

Deuxième piste de réflexion et d'action : l'intermédiation locative, qui ne se développe pas assez vite. Il faut mieux communiquer sur ce système auprès de nos concitoyens et lancer une vraie campagne d'information – je l'avais déjà demandé à votre prédécesseur– à l'instar de celle qui a été lancée ces jours-ci pour promouvoir la garantie des risques locatifs. La radio et la télévision adressent des messages à nos concitoyens, notamment en direction des bailleurs privés, pour les inciter à louer en les rassurant au sujet des garanties de location qu'ils peuvent désormais obtenir.

Troisième piste : la mobilisation des logements vacants. Face à l'urgence, ne pourrions-nous pas être un peu plus pragmatiques, un peu plus réactifs ? Il existe, dans notre pays, des dizaines de milliers de bâtiments publics et privés qui sont vides, parfois depuis des années.

Chez nos voisins britanniques, belges, néerlandais, allemands, de tels bâtiments font l'objet d'une occupation temporaire par le biais d'un contrat entre le propriétaire et une entreprise spécialisée. Ainsi, des étudiants, des jeunes professionnels, des personnes en formation trouvent à se loger pour des périodes certes limitées dans le temps, mais qui correspondent à leurs besoins. Il s'agit d'une véritable alternative à la réquisition - qui heurte notre attachement à la sacro-sainte propriété privée - et bien sûr au squat.

Mais, je le répète, tant que nous n'arriverons pas à offrir des logements décents à ceux qui, malheureusement, n'en ont point aujourd'hui, je ne serai pas hostile à la réquisition. Dans mon esprit, la réquisition est une arme de dissuasion, que j'ai utilisée dans ma commune à l'époque où j'en étais le maire. Dans les trois mois qui ont suivi, les problèmes étaient réglés. Autrement dit, les immeubles vacants depuis de longues années ont été réoccupés, intelligemment réutilisés, soit dans le cadre d'une activité économique, soit sous la forme de logements. Si le propriétaire n'en voulait plus, il vendait et je préemptais.

Lors de l'examen de la loi MOLLE, au printemps dernier, nous avons adopté un amendement que je vous avais proposé, permettant l'expérimentation d'un système d'occupation temporaire alternatif à la réquisition. Or le projet de décret d'application de l'article 101 de la loi, monsieur le secrétaire d'État, multiplie les obstacles, les contraintes administratives en tout genre,…

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

…comme si notre État, toujours indécrottablement tatillon, s'ingéniait à torpiller le projet.

La Fondation Abbé Pierre a, dans son dernier rapport – plusieurs d'entre nous ont assisté à sa présentation –, fait de nombreuses et intelligentes propositions. Imposer, par exemple, la construction de 30 % de logements sociaux dans tous les nouveaux programmes immobiliers, au moins dans les zones tendues, me semble raisonnable. Établir un nouveau plan de cohésion sociale avec, pour objectif la construction de 150 000 logements vraiment sociaux par an, dont 30 000 PLAI familiaux, permettrait de rattraper les retards accumulés. Élargir la taxe de la vacance à toutes les communes de plus de 50 000 habitants est une autre proposition très intéressante. Je ne les égrènerai pas toutes, bien qu'elles le méritent.

Je souhaite aussi signaler l'initiative intelligente d'Habitat et Humanisme, qui a lancé, il y a quelques semaines, un appel à nos concitoyens : « Un toit pour mille familles ». En quelques jours, 150 personnes y ont déjà répondu. Il s'agit d'une forme d'intermédiation locative, grâce à une association dont la crédibilité est aujourd'hui reconnue, non seulement par les pouvoirs publics, mais aussi par nombre de grandes associations, de collectivités locales et de personnes qui adhèrent à ce système. Encore faut-il leur expliquer et leur montrer l'intérêt de l'intermédiation.

Je conclurai en rappelant que le logement et l'hébergement sont des questions qui n'interpellent pas seulement l'État, mais aussi les collectivités locales, les bailleurs sociaux les associations, et en réalité chaque Français. Nous sommes tous, collectivement et individuellement, concernés par ce problème : chacun de nos concitoyens doit bénéficier d'un toit, facteur d'équilibre et d'harmonie de notre société.

Une fois de plus, comme nous le rappelait Albert Camus, réveillons les consciences ! (Applaudissements sur tous les bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Je tiens d'abord à remercier Etienne Pinte pour les propos qu'il a tenus, car ils sont sans doute, pour l'essentiel, partagés sur tous nos bancs.

Mon intervention sera construite autour de trois réflexions, non sur la loi DALO en tant que telle, mais à son propos.

Premièrement, l'hypocrisie de la loi DALO est de croire qu'avec une loi, l'insuffisance de l'offre de logements sera résolue.

Deuxièmement, la réalité de la loi DALO est de croire que la France, c'est Paris.

Troisièmement, le défaut de la loi DALO est de gommer la réalité des difficultés rencontrées par les acteurs du logement social – je pense notamment aux organismes d'HLM.

S'agissant d'abord de l'hypocrisie de la loi DALO, il faut dire, monsieur le secrétaire d'État, que vous faites fort en matière de désinformation lorsque vous évoquez l'effort de l'État : dans le plan de relance de 2001, l'aide directe au PLUS était de 8 100 euros, elle est annoncée pour 2010 à hauteur de 1 000 euros.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Pourquoi ne parlez-vous pas des aides fiscales ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

J'en parlerai tout à l'heure !

Pas étonnant, alors, que vous n'ayez à la bouche que l'argument de la vente des logements HLM pour financer la construction de nouvelles HLM, alors que c'est en construisant d'abord de nouveaux logements qu'on résoudra la question posée par la loi DALO.

Je ne connais aucun organisme d'HLM qui soit contre la vente, dès lors qu'il s'agit pour lui de gérer son patrimoine en fonction des réalités qu'il connaît, non de réalités qui lui seraient exogènes.

Mais, lorsque vous parlez de vendre des logements HLM, il ne s'agit que de remplacer l'aide directe à la construction. Ainsi, la vente permettrait essentiellement de fournir des fonds propres, je n'en disconviens pas, même si vous présentez cette politique comme un moyen d'accès à la propriété pour le plus grand nombre. La noblesse de ce dernier objectif ne doit pas cacher la réalité de vos intentions.

Venons-en à quelques réflexions sur la vente d'HLM.

Vous souhaitez le regroupement des sociétés anonymes d'HLM en deux ou trois groupes…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

…afin de faciliter la remontée des fonds propres rendus disponibles par la vente d'HLM. Il s'agit donc de vendre particulièrement en secteur détendu pour permettre la construction dans les secteurs tendus : A, B1 et B2.

À cet égard il conviendrait de redéfinir les secteurs, et notamment le secteur C, car il est loin d'être uniforme. Ainsi, ne pas construire dans la première couronne de l'agglomération de Rennes – secteur C – revient à accroître les besoins sur Rennes : secteur B1.

Par ailleurs, je vois mal les collectivités locales qui financent la construction d'HLM ne rien dire lorsqu'elles verront les logements construits avec leurs subventions être vendus pour financer des logements à construire à Paris. Pour un office public territorialisé, la question ne se pose pas de la même manière que pour l'État ; je vois mal l'office du département d'Ille-et-Vilaine, que je préside, se mettre à construire des HLM à Paris.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Nous sommes d'accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Qui plus est, les élus locaux que je pratique m'ont assuré qu'au premier logement vendu par un organisme d'HLM sans leur approbation, cet organisme serait immédiatement exclu de toute aide de leurs collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

À cet égard, je rappelle que, pour un logement de 129 000 euros construit dans l'agglomération de Rennes par l'organisme que je préside, les aides de l'État en 2009 ont été les suivantes : 2 700 euros pour la subvention de l'État, 3 400 euros au titre de l'action logement, 9 900 euros pour la TFPB – la taxe foncière sur les propriétés bâties – et 11 700 euros pour les bonifications de prêts, soit un total de 27 700 euros.

Puis vient la TVA. Vous parlez d'une aide d'un montant de 17 200 euros avec la baisse du taux, lorsque personnellement, je constate que l'État, grâce à la TVA, récupère toujours 6 750 euros.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Oh !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Mais passons !

Face à cela, Rennes métropole consacre 26 200 euros à la construction de ces logements et le conseil général ajoute 1 400 euros, soit un total de 27 600 euros.

Vous conviendrez, dans ces conditions, qu'une telle décision de vente ne peut ressortir à la seule décision de l'État et doit pour le moins être partagée.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Nous n'avons jamais dit le contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Si, à partir du moment où vous envisagez des obligations de vente dans le cadre des conventions d'utilité sociale, cela veut dire que vous ne sollicitez pas l'avis des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Relisez le décret !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Autre proposition à étudier : pourquoi ne pas acheter des logements dans le secteur privé, donc dans des copropriétés, pour en faire des PLAI ? Je veux à cet égard rappeler l'expérience lancée à Rennes il y a plus de quinze ans. Au terme de ces quinze années, qu'en est-il de cette initiative ? Si l'objectif est louable, convenons que la pratique pose un certain nombre de questions.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

D'une part, la vie en copropriété n'est pas facile pour un organisme d'HLM ; d'autre part, convenons que les copropriétaires restés dans leur logement rencontrent parfois des difficultés à la revente de leur bien. Il s'agit donc d'une bonne idée, mais à manier avec précaution. Il faudrait sans doute non pas faire du mitage de PLAI, mais mener une politique plus concertée avec les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Je suis d'accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Dans le même temps, vous suggérez la vente aux offices d'HLM de logements appartenant aux sociétés anonymes d'HLM. En vendant des logements situés en secteur C, ces dernières se procureraient les fonds propres qui leur sont nécessaires pour construire en secteur tendu.

Mais il ne faudrait pas que les offices deviennent, du fait d'une spécialisation renforcée de leur public, le réceptacle des cas sociaux, d'une part, et, d'autre part, des logements difficilement louables du secteur C. Il y aurait là une spécialisation de mauvais aloi lorsque chacun s'accorde à dire que la mixité sociale est une priorité.

Je veux aussi évoquer la question de l'égalité des locataires devant la possibilité d'acheter son logement. Vous conviendrez qu'il est plus aisé, pour un organisme HLM, de vendre une maison individuelle qu'un appartement dans un immeuble. Déjà, les ménages qui acceptent de prendre un appartement dans une tour voient de leur fenêtre les locataires avantagés qui habitent une maison individuelle. Et, en plus, ils constatent que ces ménages, déjà avantagés par la maison individuelle, pourront l'acheter – eux-mêmes, leur ascendant ou descendant. De surcroît, cette maison devra leur être vendue à un prix limité du fait de sa vocation sociale. Comment parvenir à la nécessaire égalité de chaque locataire d'un organisme devant l'achat d'un logement HLM ?

Deuxième point : la réalité de la loi DALO est de croire que la France, c'est Paris. L'application de cette loi dans mon département d'Ille-et-Vilaine aura permis l'affectation de quatre logements en 2008 et de sept logements en 2009. Plus édifiant encore : la première fois que la commission DALO a affecté un logement c'était à un ménage qui n'était même pas demandeur d'un HLM ! Cela s'explique par l'implication extrêmement forte des collectivités territoriales, qui leur permet, avec l'aide de l'État, de répondre aux demandes de logements sociaux. Compte tenu de cette situation, monsieur le secrétaire d'État, je vous interroge sur la possibilité de donner aux préfets de région un réel pouvoir d'adaptation des politiques nationales du logement en fonction des réalités vécues sur le terrain. Il est important de renforcer ce pouvoir des préfets.

J'en viens au troisième point, qui sera aussi ma conclusion. Le défaut de la loi DALO est de gommer la réalité des difficultés rencontrées par les organismes d'HLM. Ceux-ci n'ont pas pour fonction, me semble-t-il, d'être les financeurs des banques dans le cadre des plans de surendettement.

Dans le cadre du projet de loi portant réforme du crédit à la consommation, il est proposé que les commissions de surendettement puissent recommander l'effacement des dettes sans avis contradictoire du bailleur, le juge décidant alors sur le seul avis de la commission. Vouloir aller vite n'est pas une fin en soi : d'une part, cela empêchera la mise en place de protocoles de cohésion sociale permettant de prévenir les expulsions ; d'autre part, il deviendra alors impossible pour le bailleur de récupérer a minima le montant des APL suspendues.

Au bout du compte, cette mesure renforcera plus encore le financement des pertes de loyers par les autres locataires. Et ce d'autant plus qu'un article de la loi de finances permet désormais la fongibilité des recours sur les indus des caisses d'allocations familiales ; donc l'APL, qui était sanctuarisée, est désormais appelée à participer au financement de ces indus. Ce n'est pas normal.

Vous ne pouvez pas, d'un côté, solliciter les organismes d'HLM pour un suivi social des ménages en difficulté et, de l'autre, leur ôter les moyens d'agir et les pénaliser en lieu et place des fauteurs de troubles en matière de surendettement que sont essentiellement les banques avec leurs prêts à la consommation.

C'est pourquoi je souhaite que les dettes de loyers soient traitées spécifiquement, que les APL puissent être débloquées lors des plans d'apurement au seul profit des organismes d'HLM ou des bailleurs sociaux, et enfin que les APL soient sanctuarisées.

Voilà, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les quelques éléments que je soumets à votre réflexion à propos de l'application de la loi DALO. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la politique de la ville demanderait une analyse fine et la mise en place d'actions fortes alors qu'il est plutôt question aujourd'hui de revoir à la baisse les dispositifs existants. Cela nous inquiète beaucoup. En effet, qu'en sera-t-il des opérations de rénovation urbaine dont l'objectif était de revenir à une mixité que les quartiers ont peu à peu perdue ?

Les opérations de démolition-reconstruction, notamment, ont longtemps été considérées comme une réponse à la ghettoïsation. Pour ce faire, l'État a dégagé 12 milliards d'euros de crédits jusqu'en 2013. Il faut ajouter l'abondement de 350 millions d'euros au programme national de rénovation urbaine, qui constitue une mesure conjoncturelle de soutien au secteur du logement social. Mais je rappellerai que l'ANRU est financée grâce au hold-up sur le 1 %, qui finance intégralement l'ANRU et l'ANAH,…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Vous exagérez !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

…l'État s'étant exonéré de financement propre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Nous savons cependant que cela ne durera probablement pas car, d'une part, les syndicats et le patronat commencent à vouloir remettre le financement en cause et, d'autre part, en 2012, il n'y aura plus d'argent pour financer le reste de l'activité du 1 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Que fera alors l'État dans une situation financière qui risque de ne pas être meilleure et qui sera même sans doute pire qu'aujourd'hui ?

Je rappellerai également que 346 conventions ont été signées pour un montant de 39 millions d'euros et que les subventions ANRU ne représentent qu'un peu moins du quart du financement.

Si je donne ces chiffres, c'est pour rappeler les efforts importants que font les bailleurs sociaux, et surtout les collectivités locales et territoriales, ces collectivités que, par ailleurs, vous vilipendez et accusez de participer largement au déficit que vous creusez chaque jour davantage.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Comme le souligne Thierry Repentin, président de l'Union sociale pour l'habitat, ces bailleurs contribuent significativement, par la construction de logements sociaux, à la relance de l'économie et au maintien de l'emploi. À titre d'exemple, permettez-moi d'évoquer mon département : Grand Lyon Habitat a un programme de renouvellement urbain concernant 5 400 démolitions-reconstructions sur douze sites pour la période 2004-2012.

J'ouvre ici une parenthèse pour vous poser une question, monsieur le secrétaire d'État : allez-vous suivre le rapport Hamel et André qui préconise de réaliser les opérations engagées en matière de rénovation urbaine et de moduler les aides de l'État selon les besoins des territoires ? Sur le terrain, nous sommes très inquiets.

Force est de constater, lorsqu'on analyse les résultats de ces opérations de démolition-reconstruction, que le relogement des familles se fait le plus souvent à proximité des immeubles détruits, qu'il n'y a pas vraiment d'apport de populations venant d'ailleurs et que, par conséquent, au lieu de mixité, on continue d'assister à une segmentation des quartiers. C'est surtout vrai en Île-de-France, un peu moins pour les autres territoires, où les structures intercommunales sont mieux à même de répondre a ce problème.

La réponse serait de construire massivement des logements sociaux PLUS et PLAI là où il y en a peu afin de proposer une offre intéressante.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est d'ailleurs ce que nous faisons !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

C'est une solution que vous ne mettez pas en oeuvre aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'État !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Si, beaucoup plus que vous ne l'aviez fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Pas suffisamment en tout cas !

Mais encore faudrait-il que l'État s'engage davantage financièrement au lieu de préférer les soutiens à la promotion privée, comme le dispositif Scellier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Et encore faudrait-il qu'il fasse appliquer la loi SRU partout sur le territoire.

Enfin, je voudrais vous rappeler, monsieur le secrétaire d'État, que lorsque vous annoncez le chiffre de 22 000 ou 23 000 PLAI correspondant à la demande, vous omettez de dire que, globalement, un tiers des PLAI concerne des réhabilitations de foyers, quelquefois même de résidences d'étudiants, et que l'offre nouvelle ne dépasse pas en réalité 15 000 logements !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

En conclusion, il apparaît nécessaire, devant les difficultés, de réorienter la politique de la ville, et donc celle du logement, car personne ne peut se satisfaire de ces mesures à l'heure où un nombre grandissant de ménages ne parviennent plus à se loger dans un appartement décent à un prix abordable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le troisième rapport annuel du comité de suivi du DALO tire un bilan critique de l'application de la loi votée en 2007.

Incitant les pouvoirs publics à mener « la bataille de l'offre », le comité de suivi a même appelé le Gouvernement, le 18 novembre 2009, à lancer des réquisitions de logements vacants, car le droit au logement opposable est aujourd'hui un droit inapplicable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

En effet, deux ans et demi après le vote de la loi qui impose à l'État de trouver un logement aux personnes qui en font la demande et qui sont reconnues comme prioritaires, ce droit n'est toujours pas respecté !

« Une loi ambitieuse aux effets encore limités et incertains », bref une loi en manque de crédibilité, c'est en ces termes que l'on pourrait caractériser cette intention législative pourtant louable, je vous l'accorde !

Dans son troisième rapport annuel, rendu public le 27 octobre, le comité pointe de « graves insuffisances », au premier rang desquelles se situe l'écart qui se creuse entre les demandes dites prioritaires et l'offre mobilisée pour y répondre.

Ainsi, 7 250 ménages prioritaires n'ont pas reçu une offre de logement dans le délai légal. C'est particulièrement vrai des Franciliens, la région Île-de-France concentrant à elle seule près des deux tiers des recours.

En matière d'hébergement, le même constat de carence s'impose : 1 200 personnes n'ont pas reçu d'offre dans un délai légal.

« Ce décalage fait craindre le renoncement », s'inquiète le rapport, qui préconise de s'engager dans « la bataille de l'offre » pour éviter que le DALO perde toute crédibilité.

Autre insuffisance soulignée par le comité : « le déficit persistant d'information et d'assistance des demandeurs ». Si près de 100 000 ménages ont engagé une procédure DALO depuis un an et demi, toutes les personnes mal-logées entrant dans les critères de la loi sont loin d'avoir pu faire prendre en compte leur demande de logement ou d'hébergement. Quant à l'instruction des recours, elle reste très inégale selon les régions. L'Île-de-France et les Bouches-du-Rhône, particulièrement chargées, peinent en effet à respecter les délais réglementaires de décision.

Dans son rapport annuel, le Conseil d'État a dressé en juin 2009 un premier bilan de cette loi. Son verdict est sans appel : le droit opposable « suppose des moyens suffisants, une organisation administrative adaptée et un système productif apte à répondre à la demande ». Or, selon le Conseil d'État : « le DALO ne répond pas à cette exigence ». Enfin, il considère que « la séparation entre la construction et l'attribution des logements est une impasse sur la répartition des responsabilités entre les différents acteurs du logement si bien que le “contingent préfectoral”, de trop faible dimension au regard du nombre des personnes reconnues prioritaires, et sa mauvaise répartition géographique ne permettront pas d'honorer la totalité des demandes. Ces insuffisances pourraient même se traduire par un renforcement de la ségrégation sociale dans les zones urbaines sensibles des grandes agglomérations où sont concentrés les logements sociaux. »

Deux ans après le vote de la loi, le Conseil d'État découvre ce que les associations expliquent depuis des années et ce que nous vous disions au moment de l'adoption de la loi : le droit au logement opposable, c'est bien, mais des logements disponibles, c'est encore mieux.

Aujourd'hui, on sait combien les logements sociaux manquent, combien leur nombre est insuffisant pour répondre à la demande.

Il incombe donc au Gouvernement d'éviter qu'une vacance spéculative n'entretienne la situation du mal-logement en France.

Alors que les communes, les agglomérations, les départements, les régions menées par les équipes socialistes et de gauche soutiennent massivement la construction de logements sociaux sur leurs territoires,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

…le Gouvernement doit remplir son obligation de moyens et de résultat en matière de droit au logement opposable. L'État doit donc engager immédiatement des crédits permettant la construction de logements très sociaux, et ainsi éviter de dépenser un million d'euros chaque jour pour l'hébergement en hôtels, tout en mettant fin au scandale des logements vacants.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Cela a été signé avec M. Delebarre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

L'objectif de vendre 1 % du parc HLM fixé aux bailleurs sociaux n'a de sens qu'à condition de construire davantage. Or, le rythme de construction actuellement prévu ne répond pas à cette condition. Depuis plusieurs années, le parc HLM ne croît plus à un rythme compatible avec les besoins.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Son augmentation nette est à peine supérieure à la croissance du nombre de ménages. En effet, si 50 000 à 60 000 logements sociaux PLUS et PLAI ont été construits ces dernières années, 10 000 à 13 000 ont été démolis et 3 000 à 5 000 vendus chaque année. Puisque les démolitions vont rester nombreuses dans les années à venir du fait du programme de rénovation urbaine, accroître les ventes jusqu'à 40 000 par an risque de se traduire par une diminution du parc en valeur absolue.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Et également par un éloignement des locataires !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

La mise en oeuvre de la loi DALO concentre en effet sur le parc social, et particulièrement sur le contingent préfectoral, toutes les demandes de logement non satisfaites. Il est donc primordial de conserver des logements et un parc social en expansion pour honorer la mise en oeuvre du DALO. Des ventes plus nombreuses ne seraient cohérentes que si elles s'accompagnaient d'un réel effort de construction qui assure au final une croissance du parc permettant de répondre à la demande.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est exactement ce que nous proposons.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Mais le rythme actuel des constructions ne le permettra pas, car les budgets alloués au logement social sont insuffisants.

Pourtant, le trésor public aura rarement été aussi généreux ! La construction de 51 000 logements Scellier en 2009 va coûter 2,8 milliards d'euros d'ici à 2025, soit environ 60 000 euros par logement. Ces chiffres inquiètent la Fondation Abbé Pierre, qui nous explique que si cette niche fiscale disparaissait, l'État pourrait en moyenne construire deux logements sociaux de type PLUS pour chaque Scellier construit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Il n'est pas acceptable qu'un tiers du budget consacré par l'État au logement, soit 11 milliards d'euros, repose sur des dispositifs de défiscalisation qui sont inéquitables et, pour l'essentiel, sans contrepartie sociale. D'ailleurs, s'agissant de la fiscalité du logement, le rapport du Conseil d'État souligne qu'elle n'a jamais fait l'objet d'une évaluation et que l'État ne dispose dans ce domaine d'aucun outil d'aide à la décision.

Je déplore que le plan de relance et le grand emprunt aient largement ignoré le logement. Il est d'ailleurs regrettable que la poursuite de la politique du tout libéral en matière de logement…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Il fallait oser le dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

…ait confirmé la baisse du budget consacré au logement social. Le logement est un droit fondamental essentiel à la dignité des personnes, parce qu'il est la condition de toute vie personnelle, sociale et professionnelle. Avant toute mise en oeuvre d'un droit au logement opposable, une politique volontariste, tant en matière de construction de logements sociaux que de régulation des prix du parc privé existant est plus qu'indispensable.

Monsieur le secrétaire d'État, il est temps d'agir pour que la loi créant le droit au logement opposable ne soit pas une loi en manque de crédibilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Pour votre part, mon cher collègue, vous n'aurez pas été en manque de temps de parole puisque vous l'avez presque doublé.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les interventions précédentes l'ont démontré : tirer le bilan du droit au logement opposable, c'est faire la chronique de l'échec annoncé d'une bonne idée.

Au mois de février 2007, dans ce même hémicycle, lorsque nous avions étudié ce texte dans la précipitation, sous la pression des tentes du canal Saint-Martin et de l'élection présidentielle toute proche, nous avions affirmé deux choses : oui, le droit au logement est légitime, c'est une belle idée que nous défendons depuis plusieurs années ; non, votre loi ne réglera en rien la situation, car tout le reste de votre politique ne fait qu'aggraver la crise. Presque trois ans plus tard, on ne peut que constater la validité de nos analyses.

Le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre montre que la crise du logement continue de s'étendre, et les chiffres sont malheureusement sans appel. On estime à 100 000 le nombre de sans-domicile-fixe, soit 15 000 de plus qu'en 2002. Quant aux demandes de logement social, leur nombre dépasse aujourd'hui 1,3 million. Les 122 560 recours déposés saturent déjà les commissions de médiation, mais ils ne représentent pourtant que la face visible du DALO, puisque l'INSEE estime que 525 000 ménages pourraient y prétendre. Parmi tous ces chiffres, celui qui illustre le plus l'échec du Gouvernement et les limites actuelles du DALO, c'est le nombre de ménages reconnus prioritaires effectivement relogés ou hébergés : seulement 17 589, à peine 40 %.

En tant que députée de Paris, où se concentrent 20 % des recours, je reçois régulièrement dans ma permanence des personnes en grande difficulté éligibles au DALO. Bien souvent, elles font partie de cette France qui travaille et se lève tôt, mais ce sont des salariés précaires, à temps partiel et mal payés. Beaucoup doivent élever des enfants.

Bien que ce ne soit pas son objectif initial, le DALO met finalement en lumière les deux grands axes de la politique du logement menée depuis plusieurs années et amplifiée par le Gouvernement Fillon : désengagement de l'État et ghettoïsation.

L'espoir qu'avait fait naître la mise en place du DALO était de voir enfin le Gouvernement prendre ses responsabilités.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est ce qu'il a fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

La possibilité d'introduire un recours contentieux contre l'État devant le tribunal administratif si aucune solution n'est apportée à un demandeur DALO reconnu prioritaire, aurait dû pousser le Gouvernement à lancer une politique de construction massive de logements abordables pour le plus grand nombre. En effet, pour gagner cette « bataille de l'offre », comme la qualifie le comité de suivi de la mise en oeuvre du DALO, il n'y a pas d'autres solutions que de faire sortir de terre des logements. C'est pourtant là que le bât blesse.

Il est facile d'invoquer la volonté politique dans les discours, mais c'est lors du passage aux actes, et notamment du vote des lois de finances, qu'apparaissent les vraies priorités. Les budgets de ces dernières années ont clairement montré que, malgré les chiffres désastreux que nous avons tous évoqués aujourd'hui, l'État se désengage fortement. Ainsi, entre 2008 et vos propositions pour le PLF 2011, le budget du logement subira une baisse drastique de 18 %. La diminution la plus emblématique concerne l'aide à la construction de logements sociaux qui est passée de 800 millions d'euros en 2008 à seulement 480 millions d'euros en 2010.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Nous n'avons pas dû lire le même budget !

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

Comment voulez vous régler la crise si vous n'y mettez pas les moyens nécessaires ? Les crédits d'impôt sur les intérêts d'emprunt pour l'acquisition d'une résidence principale coûtent trois fois plus cher, alors qu'ils s'adressent à des personnes qui ont déjà les moyens de devenir propriétaires. C'est loin d'être le cas pour le public du DALO. Quand on pense que, dans le même temps, vous préférez dépenser plus de 500 millions d'euros par an pour un bouclier fiscal qui ne bénéficie qu'aux 15 000 contribuables les plus riches, on voit que vos priorités sont tout simplement scandaleuses.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Ca faisait longtemps !

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

En dix ans, la subvention de l'État dans un plan de financement d'une opération de construction sociale a été divisée par deux. Vous me permettrez de rappeler que, pour pallier les défaillances du Gouvernement, celle des collectivités locales a été multipliée par quatre ! Ce désengagement financier est d'autant plus choquant que, depuis 2002, l'État prélève plus sur le logement qu'il ne redistribue, par le biais de la TVA et de la fiscalité sur les revenus fonciers.

Au problème quantitatif vient s'ajouter un problème qualitatif. Globalement, on ne construit pas assez pour ceux qui en ont le plus besoin. Je ne reviendrai pas sur les ravages du dispositif Robien ou du Scellier qui l'a remplacé : tous ces logements construits là où ce n'était pas nécessaire et dont beaucoup sont restés vides. Des logements financés sur les deniers publics, finalement loués à des prix plus près du niveau du marché que des loyers du logement social.

Je parlerai surtout de cette propension de la droite à résumer le logement social au prêt locatif social. À Paris, les élus UMP tentent systématiquement de diminuer la part de logement social et essaient d'imposer dans les quartiers de l'ouest parisien des PLS en échange des programmes PLUS ou PLAI. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

J'y reviendrai dans quelques instants.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

On retrouve le même phénomène au niveau du Gouvernement puisque, de 2001 à 2008, la part des PLS dans le nombre de logements sociaux financés a plus que doublé. Pourtant, vous ne mettrez jamais un ménage prioritaire au DALO dans un PLS ! Si l'on veut que l'offre soit adaptée à la demande, ce sont des logements de type PLAI et PLUS, accessibles à près de 70 % de la population, qu'il faut construire. Sur ce point comme sur beaucoup d'autres, la politique que vous menez aggrave la crise au lieu d'y remédier.

Le second axe de votre politique consiste à ne réserver le logement social qu'aux ménages les plus pauvres. Cela correspond bien à votre vision libérale d'une société où le logement n'est finalement qu'un marché parmi d'autres. L'État ne se charge alors que des plus démunis, ceux qui sont totalement exclus du marché, dans une démarche plus proche de la charité que de la solidarité.

Nous avions déjà dénoncé cette logique lorsque Mme Boutin, dans la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, avait abaissé les seuils d'accès au logement social, tout en augmentant fortement les surloyers.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

Ces mesures ont eu deux conséquences directes : d'une part, les classes moyennes sont obligées de migrer vers le parc privé, ce qui, étant donné les loyers pratiqués, augmente considérablement leur taux d'effort ;…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Tiens, je croyais qu'il ne fallait plus de PLS !

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

…d'autre part, le phénomène de ghetto est accentué pour ceux qui restent.

L'application de la loi que nous évaluons aujourd'hui participe malheureusement de cette même logique : dans les zones tendues, les préfets affectent bien souvent l'intégralité de leur contingent aux ménages reconnus prioritaires par les commissions. À Paris, par exemple, ce fut le cas pour les 1 300 logements attribués par la préfecture en 2009.

Finalement, si le principe de la loi DALO, à savoir offrir de nouveaux droits à nos concitoyens, constitue bien un progrès social, sa mise en oeuvre dans un contexte de grave pénurie de logements, qui perdure et même s'accentue, aboutit à ce que les pauvres paient pour les plus pauvres. (« Exactement ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Selon nous, plusieurs mesures permettraient d'améliorer grandement l'application du DALO.

Tout d'abord, cette aberration que constitue l'expulsion des locataires de bonne foi doit cesser. Il n'est pas logique d'utiliser la force publique pour mettre à la rue des familles que l'État aura l'obligation de reloger par la suite.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

Le Conseil d'État et le rapport de notre collègue Étienne Pinte relèvent également cette contradiction.

La hausse continue des loyers dans le parc privé participe aussi à l'aggravation de la crise et au blocage de la chaîne du logement. Il est nécessaire d'y mettre un frein en gelant les loyers à la relocation, leur relèvement à cette occasion constituant la première cause d'augmentation.

Les aides au logement doivent également être réévaluées pour rattraper le décalage par rapport à l'augmentation des loyers.

L'application de l'article 55 de la loi SRU devrait être renforcée. Le laxisme qui permet aux communes récalcitrantes de ne rien faire pour se mettre aux normes doit cesser, et les pénalités doivent être revues à la hausse si l'on veut vraiment qu'elles soient utiles.

Il est aussi nécessaire de combler le déficit d'information et d'accompagnement autour du droit au logement opposable. Le gouffre entre le nombre de recours déposés et le nombre de recours potentiels estimé par l'INSEE montre que les personnes concernées n'ont pas toutes connaissance de leurs droits.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Ou que les estimations manquaient de précision !

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

Et puis, monsieur le secrétaire d'État, le public du DALO a bien souvent d'autres problèmes que le logement, et il a besoin d'un vrai suivi social. Paris montre l'exemple dans ce domaine puisque 1 200 accords collectifs, associant, entre autres partenaires, la CAF, la DASS ou encore la ville, permettent d'assurer un réel suivi des familles relogées par les acteurs sociaux.

Enfin, et surtout, le Gouvernement doit faire l'effort financier nécessaire pour affronter cette crise. Vous nous dites, monsieur le secrétaire d'État, que c'est aujourd'hui le cas. Eh bien, il n'est jamais trop tard pour bien faire et, compte tenu du retard pris, il faut encore intensifier cet effort.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Je vous rappellerai les chiffres !

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Lepetit

Les aides à la pierre doivent revenir à un niveau plus décent et, globalement, le budget consacré au logement doit dépasser les 2 % du PIB.

Les nombreux, et coûteux, dispositifs fiscaux qui aident les plus privilégiés à se constituer un patrimoine grâce aux deniers publics doivent être remis en cause.

On le voit, on ne peut séparer le DALO du reste de la politique du logement. Mais celle-ci doit profondément changer pour que ce beau principe devienne enfin une réalité tangible. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La parole est à M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Surtout d'entendre ma réponse, monsieur Rogemont !

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, voulue par notre majorité et votée à l'unanimité des parlementaires, toutes tendances confondues, la loi du 5 mars 2007 instaurant le droit au logement opposable a placé la France à la pointe des nations soucieuses des droits des personnes les plus fragiles. Près de deux ans après son entrée en vigueur, le 1er janvier 2008, ce nouveau droit fait désormais partie de notre paysage politique et social ; plus de 140 000 personnes s'en sont saisies.

Je traiterai dans un instant des conséquences de la loi et je répondrai, évidemment, aux questions que m'ont posées les parlementaires mais je voudrais auparavant mettre en évidence quatre éléments de constat.

Premièrement, il se confirme qu'il y a bien en France deux types de territoires.

Dans la grande majorité des départements, le DALO se traduit par un nombre limité de recours devant les commissions de médiation. Il joue alors un rôle de filet de sécurité qui permet de prendre en compte des situations qui n'avaient pas été identifiées par les services sociaux ou qui n'avaient pas été réglées dans le cadre des dispositifs d'accès prioritaire au logement.

Dans une douzaine de départements, en revanche, le DALO est d'abord le révélateur du déséquilibre persistant entre l'offre et la demande de logement. Ce sont 43 % des personnes reconnues prioritaires qui ont été effectivement relogées ou hébergées depuis la mise en place du DALO. Si ce taux est de 68 % en moyenne hors Île-de-France, il est en revanche de 25 % dans cette région. Il ne me semble d'ailleurs pas inutile de donner quelques détails sur les écarts importants concernant ce territoire. MM. Goldberg, Le Bouillonnec et Gosnat ont dénoncé la faiblesse de ce taux de relogement dans les Hauts-de-Seine ; il s'y élève pourtant à 55 % alors qu'il est de 40 % dans le reste de la région. Mais je suis surpris qu'ils n'aient pas mentionné les 6,5 % du département et de la ville de Paris, qui dispose pourtant, je le rappelle, de la délégation des aides à la pierre.

Un deuxième constat vaut, cette fois, pour tous les territoires : le DALO met en lumière des blocages importants pour l'accès au logement de certains de nos concitoyens.

Ainsi se présentent devant les commissions de médiation des familles reconnues prioritaires au titre du plan départemental pour le logement des plus défavorisés et qui, malgré cela, sont en attente de logement social depuis six ou sept ans. Ce n'est pas acceptable, quelle que soit la situation du marché du logement.

Troisièmement, on constate grâce au DALO l'émergence d'une demande sociale insuffisamment prise en compte par les politiques locales de l'habitat. Le DALO met en lumière non seulement un déficit quantitatif de l'offre sur certains territoires mais aussi une inadaptation qualitative.

Enfin, dernier constat, le DALO, qui est aussi un droit à l'hébergement, met également en lumière la nécessité de réformer notre politique de prise en charge des personnes à la rue.

Une fois ces constatations faites, comment améliorer la mise en oeuvre effective du droit au logement opposable, notamment là où les besoins sont les plus importants ?

Le premier levier est bien évidemment la production de nouveaux logements. Depuis 2004, avec notamment la mise en place du plan de cohésion sociale, les efforts de la majorité ont été très importants. La production de logements sociaux a augmenté de façon constante,…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

…pour atteindre – c'est la vérité des chiffres, monsieur Le Bouillonnec – 120 000 logements financés en 2009, alors que, lorsque l'opposition était au gouvernement, on atteignait seulement 40 000 logements financés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Vous prétendez que l'accès de la population à l'automobile a progressé parce qu'on a produit plus de Ferrari !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Vous aviez bien raison, madame Lepetit, nous sommes passés aux actes : c'est 120 000 contre 40 000 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Qu'en est-il des logements très sociaux, me direz-vous ? À juste titre, l'opposition signale que seuls les PLAI sont aujourd'hui vraiment accessibles aux bénéficiaires du DALO. Eh bien, c'est justement pour ces logements que l'effort a été le plus significatif.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

21 600 PLAI ont été financés en 2009, soit cinq fois plus qu'en 2000 puisqu'à l'époque vous en financiez 4 000 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Vous parlez de 20 000 logements, mais pour combien de demandeurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bignon

C'est l'opposition qui est responsable des retards pris dans le passé !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Mme Lepetit affirme d'un côté que les PLS ne sont pas des logements sociaux et qu'il ne faut pas en faire ;…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

…de l'autre elle nous signale une carence de logements pour les classes moyennes à Paris. J'avoue que la cohérence de son propos m'échappe. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Concernant ces logements accessibles aux plus modestes, vous ne raisonnez que sur le flux de nouveaux logements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Nous raisonnons à partir du nombre de demandeurs qui ne trouvent pas satisfaction ! Des centaines de milliers !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Or, en Île-de-France, par exemple, 90 % des attributions concernent le stock existant, et non le flux. À Paris, 50 % des logements sociaux sont loués à moins de 3,30 euros le mètre carré, soit deux fois moins que les plafonds actuels du PLAI. Cessez donc de raisonner sur le seul flux de nouveaux logements, et intégrez donc le stock, c'est-à-dire 90 % des relogements !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Et pendant ce temps, le nombre de demandeurs augmente !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Il est réellement utile de construire, mais il nous faut une offre nouvelle qui réponde aux besoins sociaux repérés notamment par les commissions de médiation. Je partage à ce sujet l'analyse de Daniel Goldberg, selon laquelle nous devons construire des logements soit plus petits, soit beaucoup plus grands que ceux que nous construisons aujourd'hui, car l'offre actuelle ne correspond pas à la demande.

Quelle est, par ailleurs, l'utilité de financer du logement social là où le marché est saturé ? Nous avons malheureusement pu constater les difficultés de location de certains programmes. Il n'y a plus, contrairement à ce qui est évoqué par l'opposition, une crise générale du logement, mais bien des crises du logement, ciblées sur certains territoires.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Vous avez raison, monsieur Bignon, il nous faut réorienter les subventions et les objectifs de l'État pour le logement social vers les zones les plus tendues.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

La réorientation de la production vers ces zones constitue la priorité du Gouvernement et la mienne. Dès cette année, les objectifs de construction seront donc très clairement en baisse dans certains territoires pour permettre d'intensifier les efforts là où les besoins sont les plus aigus. À l'inverse, là où il y a crise du logement, l'offre nouvelle sera ma priorité absolue.

À Paris,...

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…qui bénéficie, j'y insiste, de la délégation de l'aide à la pierre, on finance 6 000 logements sociaux, comprenant 3 000 logements en acquisition-réhabiliation dont 80 % sont déjà occupés : il ne s'agit pas d'offres nouvelles. Ce n'est pas en finançant 6 000 logements sociaux dont plus de 2 000 sont déjà occupés que l'on répond aux attentes des Parisiens ! Il faut donc construire des logements sociaux, mais il faut aussi que les opérations d'acquisition-réhabilitation concernent des logements vides, contrairement à ce qui se passe aujourd'hui à Paris.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

C'est sans doute pour cela que le patrimoine d'ICADE a été vendu !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Le Gouvernement y reviendra évidemment quand il faudra renégocier la convention de délégation des aides à la pierre dans la capitale.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Certains d'entre vous me diront qu'il y a une offre nouvelle disponible, celle des logements vacants, pour peu que nous ayons le courage politique de les réquisitionner, comme nous le demande M. Villaumé.

Ce n'est pas une question de courage, mais de principe et d'efficacité. J'ai la conviction que la réquisition est non seulement inefficace face à la crise du logement – lorsqu'on a essayé d'y recourir, il n'y a eu aucun résultat – mais qu'elle est surtout un message négatif adressé à l'ensemble des propriétaires. De mon point de vue, elle est donc contre-productive.

Cela étant, comme vous, je trouve anormal qu'il y ait autant de logements vacants dans des villes où sévit la crise du logement. C'est la raison pour laquelle, je me suis engagé devant les sénateurs à mettre à l'étude l'extension du champ de la taxe sur les logements vacants, réservée aujourd'hui à huit agglomérations. J'ai aussi annoncé la mise en oeuvre en Île-de-France d'un programme de rachat de 3 000 logements vacants. Je préfère que l'argent de l'État, des contribuables et des collectivités locales serve à acheter des logements vacants plutôt que des logements occupés.

M. Étienne Pinte a évoqué le dispositif d'occupation temporaire prévu par la loi du 25 mars 2009 pour les bâtiments vides. Je suis prêt à voir avec vous, monsieur le député, comment nous pouvons l'expérimenter dans les plus brefs délais.

Construire davantage, c'est créer une offre nouvelle sur tous les segments de l'offre. Nous avons besoin, en Île-de-France et dans les régions très tendues, de logements très sociaux comme de logements intermédiaires, d'un parc social suffisant mais aussi de logements locatifs privés ou d'opportunités d'accession à la propriété. Tous les demandeurs de logement ont à gagner à un tel rééquilibrage.

On ne peut donc opposer les PLAI aux PLS…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

… ou aux « Scellier », dispositif qui a permis un recentrage de l'investissement locatif sur les zones tendues.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Il correspond donc à un véritable besoin dans nos territoires, notamment en Île-de-France.

Le parc privé peut offrir des opportunités de logement, y compris pour des populations très modestes. Le programme d'intermédiation locative, lancé fin 2008, s'inscrit dans cette logique.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Il nous a déjà permis de reloger en Île-de-France 1 200 personnes, dont la grande majorité étaient hébergées à l'hôtel. Notre objectif est d'atteindre, au plan national, 5 000 logements d'ici à la fin 2010. Vous avez raison, monsieur Pinte : ce programme doit être une priorité.

Je souhaiterais m'arrêter un instant sur la question du financement du logement social. Le budget des aides à la pierre diminue, dites-vous, et vous avez raison : il diminue en 2010. Mais vous avez tort de prétendre que cette baisse traduit le désengagement de l'État. Cessez de juger l'effort consenti en faveur du logement social à travers le prisme des seules aides à la pierre : les aides fiscales et les prêts représentent plus de 90 % de son financement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Ils ne justifient pas la baisse des aides à la pierre !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Savez-vous que les aides non budgétaires accordées par l'État à la construction d'un logement social de type PLUS représentaient en moyenne 38 000 euros en 2008, contre 18 500 euros en 2004, soit près du double ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

La vérité, c'est que la construction rapporte de l'argent à l'État. Voilà l'explication !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Au reste, je m'étonne que ceux d'entre vous qui critiquent, par exemple, la TVA à 5,5 % dans la restauration, en dénonçant un cadeau scandaleux aux restaurateurs,…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

…ne se scandalisent pas que le même taux s'applique au logement social. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Permettez-moi de vous dire que je ne comprends pas ce traitement différencié.

De même, j'avoue mon étonnement lorsque certains d'entre vous jugent scandaleuses les dépenses fiscales liées au « Scellier », en oubliant celles qui sont destinées au logement social. Si vous étiez cohérents, vous prendriez en compte l'ensemble des financements consacrés par l'État au logement social. Or, 95 % des crédits de l'État en faveur du logement social sont en très forte augmentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Une partie du « Scellier » pourrait financer du logement public !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Par ailleurs, il nous faut être réaliste. Dans le contexte national et international que nous connaissons, il est évident que la dépense budgétaire publique, que ce soit celle de l'État ou celle des collectivités locales, en faveur du logement, notamment du logement social, ne pourra pas connaître une croissance significative dans les années à venir.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Nous aurons néanmoins besoin de moyens nouveaux pour produire davantage de logements, notamment dans les zones les plus tendues. Il nous faut donc trouver absolument des leviers financiers complémentaires.

La vente de HLM en est un.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Non seulement elle répond à l'aspiration à devenir propriétaires de nombreux locataires du parc social,…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

…mais, surtout, elle permet de construire plus : pour un logement vendu, deux à quatre sont construits, selon les territoires.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est pourquoi je tiens absolument à ce que les organismes HLM respectent l'objectif de 40 000 logements vendus par an, sur lequel ils se sont engagés. D'ailleurs, si mes souvenirs sont bons, cet engagement porte également la signature de M. Delebarre, ancien ministre socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Il s'agit de conventions de mise en vente, et non de ventes !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Monsieur Le Bouillonnec, relisez l'accord !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

À l'époque, je m'intéressais déjà à ces questions et vous n'étiez pas encore député !

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Je prends un pari avec vous, monsieur Le Bouillonnec : relisons cet accord ensemble ! Je l'ai fait il y a deux jours avec les cinq familles HLM et elles ont reconnu qu'il portait sur 40 000 ventes par an et non pas sur un objectif de mise en vente. Je vous envoie cet accord dès demain matin…

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Pour améliorer la mise en oeuvre du droit opposable au logement, nous disposons d'un second levier : la gestion de la demande et des attributions. En effet, ainsi que je l'ai déjà souligné, le DALO met en lumière la difficulté de personnes, pourtant prioritaires, à accéder au logement social, indépendamment du stock de logements existants. Les dispositifs mis en place pour rendre effective cette priorité – accord collectif ou contingent préfectoral – ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Je souhaite donc que l'État, qui est garant de ce nouveau droit, assume pleinement ses responsabilités. Avec le contingent préfectoral, nous avons un outil à notre main pour apporter des réponses immédiates aux personnes en attente de relogement. Et puisque l'on m'a demandé de citer les chiffres tout à l'heure, je précise que, pour la seule Île-de-France, la récupération du contingent préfectoral nous permet d'offrir 5 000 nouvelles réponses par an aux publics DALO.

Comme le permettent les textes, j'ai l'intention de gérer ce contingent sur les flux de logements libérés plutôt que sur le stock de logements existants. Grâce à la loi MOLLE et à la récupération de 25 % du contingent du 1 % logement, près de 5 000 logements supplémentaires pourraient être ainsi dégagés pour le DALO en Île-de-France.

Pour améliorer la mise en oeuvre effective du DALO, j'évoquerai trois autres leviers qui sont pour moi essentiels.

Le premier, c'est la lutte contre l'habitat indigne. Les présidents de commission DALO me l'ont tous dit : malgré la mise en place d'outils juridiques et opérationnels qui ont renforcé considérablement les moyens d'action de l'État et des communes en matière d'habitat insalubre et dangereux, les commissions ont à connaître des situations identifiées mais qui ne sont pas réglées depuis parfois plusieurs années. C'est, vous en serez tous d'accord, inacceptable. J'ai donc souhaité que la lutte contre l'habitat indigne soit érigée au rang de première priorité de l'ANAH : 257 millions d'euros, soit près de la moitié du budget d'intervention de l'agence, seront consacrés à cet objectif.

Mais il nous faut trouver les moyens d'agir plus vite. C'est pourquoi je suis favorable à la proposition de loi déposée hier par Sébastien Huyghe et plus de soixante-dix de ses collègues du groupe UMP, qui permettra de mettre en place des astreintes financières afin d'obliger les propriétaires de logements insalubres à réaliser des travaux.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Je vous invite à voter cette proposition de loi avec eux.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

En tout état de cause, une telle mesure complétera utilement la procédure de travaux d'office, qui n'est pas suffisamment efficace.

Le second levier, c'est la prévention des expulsions locatives. Je ne suis pas, vous le savez, favorable à un moratoire des expulsions. En effet, je ne souhaite pas opposer propriétaires et locataires, mais rétablir la confiance entre eux. C'est l'objectif de la nouvelle garantie des risques locatifs, qui entrera en vigueur dans les semaines à venir, une première convention ayant été signée avec un assureur.

En revanche, je suis convaincu que nous devons revenir à l'esprit de la loi de 1998 visant à lutter contre les exclusions et mettre en oeuvre tous les moyens pour repérer les premiers impayés et les traiter en amont du recours contentieux. J'ai demandé à Bernard Vorms, président de l'ANIL, de conduire une expertise sur ce sujet. J'en profite, du reste, pour préciser à M. Goldberg que les ADIL sont bien financées par l'État, qui leur a consacré 8 millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Et les collectivités locales, combien leur consacrent-elles ?

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Je souhaite enfin évoquer l'évolution indispensable de notre dispositif de prise en charge des personnes sans abri. C'est un enjeu essentiel pour la mise en oeuvre du DALO et le chantier national prioritaire du Premier ministre pour l'hébergement et l'accès au logement.

Le DALO, qui est également un droit à l'hébergement, révèle les limites de notre dispositif d'accueil et d'accompagnement des personnes à la rue : personnes sans abri non prises en charge, personnes non accompagnées et mal orientées, absence de transparence des admissions, insuffisance des sorties vers le logement, comme l'a noté le rapport Pinte.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Madame Lepetit, vous n'êtes pas obligée de prendre le relais de M. le Bouillonnec. Faites donc une pause ! (Sourires.)

Poursuivez, monsieur le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

C'est la raison pour laquelle nous travaillons, avec les associations qui interviennent dans ce secteur, à une refonte du système. Les bailleurs sociaux, à travers l'USH, ont évidemment été associés à ces travaux.

La réforme que j'ai présentée le 10 novembre dernier repose sur deux principes. Le premier, c'est la mise en place d'un service public de l'hébergement et de l'accès au logement des personnes sans abri.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Il s'appuiera sur un système d'accueil et d'orientation unique dans chaque département, la désignation d'un référent pour chaque personne, une véritable planification de l'offre, une harmonisation des prestations et de leurs coûts et un nouveau cadre de partenariat avec les opérateurs.

Le second principe, c'est celui du « logement d'abord ». L'accès au logement, qu'il soit accompagné ou autonome, doit être notre priorité absolue. C'est la condition d'une meilleure insertion.

Deux ans après la mise en place du droit au logement opposable, nous pouvons tous nous réjouir qu'il ait permis à 20 000 de nos concitoyens de retrouver un logement.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Certes, ces résultats demeurent insuffisants, mais, avec la programmation de 140 000 logements sociaux en 2010, nous apportons une première réponse. J'ajoute que j'entends mettre en oeuvre, dans les régions les plus tendues – je pense notamment à l'Île-de-France –, un nouveau plan de cohésion sociale territorialisé, afin de répondre à l'attente des demandeurs du DALO.

Ce nouveau droit a placé la question de l'accès au logement au rang des priorités de la politique du logement, et nous devons nous en féliciter. Je peux d'ailleurs confirmer devant la représentation nationale que cette priorité est bien celle du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

J'étais certain que vous le regretteriez, monsieur Le Bouillonnec.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Nous ne pouvons pas répondre à M. le secrétaire d'État ?

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Vous l'avez fait tout au long de son intervention. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Prochaine séance, mardi 23 février à neuf heures trente :

Questions orales sans débat.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures dix.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma