La séance est ouverte à 17 heures 15.
Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président.
La Commission examine, sur le rapport de Monsieur Christian Estrosi, la proposition de loi de M. Christian Estrosi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d'une mission de service public (n° 1641).
La délinquance est en constante mutation. Il nous faut donc en permanence adapter notre législation à ses nouvelles formes.
A l'instar d'autres pays occidentaux, et malgré les bons résultats obtenus en matière de lutte contre la délinquance depuis sept ans, notre pays est confronté à l'augmentation des affrontements entre bandes, des actes de haine contre les représentants de l'autorité républicaine, des intrusions au sein d'établissements scolaires avec des armes, des guet-apens tendus aux forces de l'ordre, des violences commises contre les agents du service public.
En avril, le Président de la République a souhaité confier à la représentation nationale l'élaboration d'une proposition de loi visant à lutter contre les violences de groupe et à sanctuariser les établissements scolaires. C'est tout à l'honneur de notre assemblée d'avoir élaboré le texte que nous examinons aujourd'hui, dont l'objectif est d'être ferme avec les délinquants et les voyous et juste pour les victimes et les honnêtes citoyens.
Le premier chapitre est consacré à la lutte contre les violences de groupe.
Il ressort des nombreuses auditions auxquelles j'ai procédé que si nous avons accompli de grands progrès en matière de lutte contre la délinquance – instauration des peines planchers, développement de la vidéoprotection, création des groupements d'intervention régionaux –, notre arsenal législatif reste largement insuffisant pour lutter contre les phénomènes de bande. En effet, l'infraction d'association de malfaiteurs ne vise que la préparation de délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement. Or les violences volontaires, même commises en réunion, ne sont punies que de trois ans d'emprisonnement lorsqu'elles n'ont pas causé une interruption temporaire de travail supérieure à huit jours, ce qui peut être le cas de violences commises par des bandes. De plus, la qualification pénale des faits est souvent complexe : en application du principe de la responsabilité pénale individuelle, il faut établir pour un même délit la responsabilité de chacun.
C'est pourquoi l'article 1er a pour objet de créer une infraction nouvelle réprimant spécifiquement la participation, en connaissance de cause, à une bande ayant l'intention de commettre des violences ou des atteintes aux biens. Cette disposition n'est pas une réécriture de l'incrimination prévue dans la loi anticasseurs, abrogée en 1981, qui présenterait de gros risques constitutionnels. L'incrimination proposée constituera, de l'avis même du directeur général de la police nationale et du chef du service d'investigation transversale à la direction de la police urbaine de proximité de la Préfecture de police de Paris, un instrument efficace pour engager des poursuites contre les auteurs, sans pour autant avoir à distinguer l'auteur du coauteur, ou bien le coauteur du complice.
Par ailleurs, la visée de cet article est avant tout préventive : la disposition s'appliquera en amont de la commission des faits de violences ou de dégradations.
L'article 3 instaure une circonstance aggravante lorsque l'auteur de violences sur des personnes ou de dégradations de biens dissimule volontairement tout ou partie de son visage afin de ne pas être identifié. Cette dissimulation complique en effet fortement le travail des enquêteurs. En outre, elle contribue à impressionner les victimes et peut aggraver leur traumatisme. Les personnalités auditionnées ont majoritairement salué notre position de faire de la cagoule ou de tout autre moyen de dissimuler son visage une circonstance aggravante et non une infraction autonome, difficilement applicable. Le juge aura la charge de qualifier la dissimulation du visage.
L'article 4 prévoit que les enregistrements audiovisuels ou sonores effectués par la police nationale ou la gendarmerie seront versés au dossier. Les syndicats de policiers ont souligné la nécessité de développer ces moyens, qui permettent d'apaiser les interventions et réduisent les contestations a posteriori. Cependant, afin de répondre aux observations des syndicats de police et du directeur général de la police nationale, je vous proposerai un amendement visant à rendre possible, mais non plus automatique, le versement de l'enregistrement au dossier. Cela répondra aux problèmes posés pour le stockage des données ainsi qu'aux difficultés qui pourraient être soulevées en l'absence de tout enregistrement.
Pour compléter ces dispositions, je vous proposerai également par amendement de réprimer un nouveau comportement consistant, le plus souvent en groupe, à recourir à l'intimidation en vue de réaliser une vente à la sauvette.
Par ailleurs, afin de doter notre pays de nouveaux moyens facilitant l'identification des auteurs d'infraction, je vous proposerai de permettre le raccordement des forces de police et de gendarmerie nationales, ainsi que, le cas échéant, des agents de police municipale sur les systèmes de vidéoprotection mis en place par les bailleurs dans les parties communes des immeubles. Une fois alertées par les propriétaires ou leurs représentants, notamment les agents privés de sécurité, lorsque les circonstances l'exigent, les forces de l'ordre pourraient recevoir en temps réel les images fournies par ces systèmes privés de vidéosurveillance, afin de mieux préparer leur intervention éventuelle sur les lieux.
Le chapitre II vise à renforcer la protection des personnes travaillant dans les établissements d'enseignement scolaire.
Il ne fait aucun doute que l'école doit être un sanctuaire de la République. Aussi, l'article 5 procède-t-il à la réécriture des dispositions prévoyant l'aggravation, en raison de la qualité de la victime, des peines encourues par les auteurs des faits, afin de viser expressément les enseignants et les personnels travaillant dans les établissements d'enseignement scolaire, de la même façon que les agents des entreprises de transport public. La protection sera par ailleurs étendue à leurs proches.
En outre, il vous est proposé d'aggraver l'incrimination des vols et extorsions commis dans les écoles ou à leur proximité immédiate, comme c'est déjà le cas pour les violences volontaires.
Nous proposons également de correctionnaliser l'intrusion dans les établissements scolaires. Si vous adoptez ce texte, le fait d'entrer dans une école sans y être autorisé sera un délit passible d'une peine d'un an d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. Le délit sera aggravé s'il est commis en bande ou par une personne porteuse d'une arme. Cette correctionnalisation permettra en outre le placement en garde à vue.
Pour compléter ces dispositions et afin de lutter contre la prolifération des armes dans les établissements scolaires, je proposerai un amendement instaurant un article additionnel. En effet, si l'article 7 permet de punir toute intrusion dans un établissement d'une personne non autorisée, il ne règle pas le problème des élèves inscrits régulièrement dans l'établissement qui y introduisent une arme ; je vous propose donc de créer une infraction spécifique.
Ces mesures sont assurément complémentaires de la politique de prévention de la délinquance, définie en particulier par la loi du 5 mars 2007, malheureusement insuffisamment appliquée sur le terrain. A ce jour, dans nos 36 000 communes, seulement vingt conseils des droits et des devoirs des familles ont été créés, et neuf vont être mis en place prochainement. De même, le contrat de responsabilité parentale n'est quasiment jamais mis en oeuvre, souvent parce que les services de l'État ne transmettent pas certaines données relatives aux mineurs. Il y a aussi trop peu de contrats locaux de sécurité et de prévention de la délinquance ; seulement 22 ont été signés, alors que l'efficacité de la politique de prévention passe par la mutualisation des moyens de tous les acteurs. Je regrette aussi que les services de l'éducation nationale transmettent si peu aux maires les informations relatives à l'absentéisme scolaire. Le plan de prévention de la délinquance annoncé par le Président de la République pour septembre prochain participera de l'action globale que nous devons mener.
Les crimes ou les délits ne sont pas plus excusables lorsqu'ils sont commis en bandes. On ne saurait accepter que la mort d'un jeune résulte de guerres imbéciles entre des voyous qui s'approprient des territoires imaginaires. Il n'y a qu'un territoire, celui de la République. C'est le message que traduit cette proposition de loi, que nous examinerons en séance publique le 23 juin prochain.
On ne peut que partager le souci de protéger les personnes chargées d'une mission de service public, et tout particulièrement, dans les établissements scolaires, les professeurs et le personnel d'encadrement. La République s'honore à marquer sa solidarité à leur égard et sa détermination.
Ce texte a pour but de compléter les dispositions que nous avons votées au cours de ces dernières années. L'exigence de fermeté qu'il traduit n'empêche pas la recherche de l'équilibre entre prévention et sanction. Il faut à cet égard relier ce texte au plan de prévention de la délinquance annoncé par le Président de la République. Il reste à réfléchir ensemble aux moyens humains et financiers qu'appelle cette politique.
Le phénomène des bandes n'est pas une nouvelle forme de délinquance : cela fait des années que les élus locaux et les professionnels de la sécurité tirent la sonnette d'alarme. En revanche, il est vrai que de nouveaux paliers semblent avoir été franchis, avec des tirs sur les policiers, des rixes extrêmement violentes et parfois le passage d'une délinquance de rue au banditisme. Cette réalité, qui ne peut pas être séparée de la montée générale des faits de violence dans la société, est mal connue, si ce n'est à travers une monographie – dont nous ne disposons pas et que, monsieur le Président, vous avez bien voulu demander au ministère de l'Intérieur de nous communiquer – qui ferait état de l'existence de 222 bandes.
Le groupe SRC a procédé à vingt-sept auditions complémentaires de celles organisées par le rapporteur. Tous les acteurs de terrain ont souligné le caractère protéiforme du phénomène ; il convient de distinguer les bandes liées à la délinquance mafieuse, tirant leurs revenus de l'économie souterraine, des groupes beaucoup moins structurés, plus spontanés, dont les affrontements sont parfois fortuits mais extrêmement violents. Quoi qu'il en soit, on constate un durcissement de la situation, des faits concentrés géographiquement, avec pour terreau de graves carences dans la socialisation des adolescents, marquée par l'échec scolaire, le racisme, la pauvreté, qui les conduit à la tentation d'installer une contre-société, dans un contexte de ghettoïsation. Faire partie d'un groupe de substitution procure un sentiment d'appartenance sociale.
Pour le moment, le phénomène n'est pas comparable à celui des gangs qui se sont développés aux États-Unis ou au Canada. Mais on a vu se développer dans la période récente, particulièrement en Ile-de-France, des bandes plus structurées, se dotant d'un nom et de signes distinctifs. Pour les professionnels, c'est une bombe à retardement, qui pourrait exploser dans dix ans.
Comment en est-on arrivé là ? Force est de constater que ce qui a été fait depuis 2002 ne fonctionne pas, et contribue même au durcissement de la situation. L'attention s'est focalisée sur les statistiques, au point que sur ces phénomènes, du terrain a été cédé.
Le premier problème majeur auquel nous sommes confrontés est celui de l'économie souterraine qui structure ces bandes. Or on ne peut que constater l'absence totale d'investigations judiciaires. Comme nous l'a rapporté un commissaire, les enquêtes de police judiciaire n'intéressent personne, le combat contre les petits trafics n'est pas mené. Les GIR sont trop éloignés du terrain. Le travail de renseignement est insuffisant. Surtout, les moyens de terrain font cruellement défaut. Alors que la présence de la police devrait être quotidienne et pérenne, on privilégie les interventions de la police « militarisée », des incursions dans le cadre d'opérations superficielles de maintien de l'ordre. Celles-ci n'ont d'autre effet que de dégrader encore davantage les rapports entre la jeunesse et la police, sujet qui devrait grandement nous préoccuper. Les dispositifs correctifs tels que les unités territoriales de quartier ne suffisent pas à répondre à la situation.
Le deuxième problème majeur, c'est l'impunité. On connaît de nombreux cas où la police est intervenue, les auteurs ont été interpellés, puis déférés à la justice, mais soit aucune sanction n'a été prononcée, soit la peine n'a pas été exécutée. La seule réponse qui a été apportée à ce problème est l'inflation législative et le durcissement des peines. Or celui-ci n'est ni dissuasif ni efficace. Il est même contre-productif car il fabrique la récidive ; et dans le passage de la délinquance de rue au banditisme, la prison joue un rôle majeur.
A ces deux problèmes s'ajoutent ceux de l'échec scolaire et de la ghettoïsation, qu'on omet de traiter. Je n'aurai pas la cruauté de rappeler toutes les promesses et les annonces faites aux acteurs de terrain après les émeutes urbaines de novembre 2005.
En préambule de nos débats, posons-nous cette question : devant cette situation, faut-il une loi de plus – la quinzième – ou des réponses nouvelles ? En ce qui nous concerne, il nous paraît clair qu'on ne pourra venir à bout de ces phénomènes que par une action en profondeur, déterminée et continue, et non par une énième loi.
C'est pourquoi nous proposons d'organiser la politique de sécurité autour de quatre axes : contre les zones de non-droit, la police de quartier ; contre l'impunité, la sanction précoce ; contre les violences juvéniles, la prévention précoce ; contre la loi du silence, la protection des victimes. Dans ce cadre, nous mettons en débat à travers des amendements une dizaine de propositions : création d'une police de quartier dotée de moyens d'investigations judiciaires ; clarification des dispositifs utilisables par les policiers lorsqu'ils sont confrontés aux bandes ; utilisation de la notion de co-auteur pour les actions violentes commises en groupe ; précocité des sanctions pour les primo-délinquants ; organisation territoriale des politiques de sécurité, notamment dans le cadre des CLSPD ; création, sur le modèle canadien, d'un centre national de prévention précoce des violences juvéniles ; création d'un nouveau corps de surveillants des établissements scolaires ; droit des victimes à un avocat dès le dépôt de plainte. Je regrette que trois de nos amendements n'aient pu venir en discussion car déclarés contraires à l'article 40 de la Constitution.
Sur le texte de la proposition de loi, un premier constat s'impose. A l'issue des auditions que vous avez organisées, monsieur le rapporteur, et des vingt-sept auxquelles nous avons nous-mêmes procédé, on ne peut être que frappé par le scepticisme, voire la défiance, de beaucoup de policiers et de la totalité des magistrats à propos des mesures proposées. Je regrette que l'on n'en tire pas les conséquences.
Ce texte apporte-t-il quelque chose ? Si l'on excepte quelques mesures de portée symbolique concernant la protection des enseignants, on peut en douter. Il est permis d'imaginer qu'il en ira du délit de participation à une bande violente comme du délit d'entrave à la libre circulation dans les halls d'immeuble, incrimination totalement inapplicable, ou encore du délit d'embuscade.
Y a-t-il un vide juridique empêchant de lutter contre les bandes violentes ? La réponse est non. S'il s'agit d'une bande structurée par l'économie souterraine, elle tombe sous le coup des dispositions relatives aux bandes organisées. S'il y a violences de groupe contre les forces de l'ordre, on se trouve dans la situation visée par les dispositions relatives au guet-apens et à l'embuscade. Enfin, s'il s'agit de violences telles qu'il s'en est produit à Paris à la gare de Lyon et à la gare du Nord, les dispositions réprimant la violence en réunion peuvent s'appliquer, de même que, préventivement, les dispositions relatives aux attroupements.
L'article premier, pierre angulaire du texte, donne à penser qu'en instaurant un mécanisme de responsabilité collective, on n'aurait plus à prouver l'implication individuelle. C'est une illusion car, à défaut d'avoir à prouver que tel individu a commis tel acte, il faudra prouver qu'il a, en connaissance de cause, adhéré à une bande qui avait elle-même le but de commettre des violences ou des dégradations. On comprend que policiers et magistrats se soient montrés si réservés, et on peut penser qu'après une ou deux tentatives d'application, ces dispositions tomberont en désuétude. Il est catastrophique de pratiquer ainsi une politique d'affichage qui affaiblit l'autorité de la loi républicaine.
Quant aux dispositions sur les cagoules, il semble qu'elles soient apparues pour faire oublier les défaillances de la chaîne de commandement dans la gestion des manifestations lors du sommet de l'OTAN à Strasbourg.
Ma collègue Sandrine Mazetier évoquera les mesures relatives aux établissements scolaires. Enfin, nous reviendrons dans la discussion des articles sur les dispositions relatives à l'enregistrement audiovisuel des interventions de la police et de la gendarmerie, dont la généralisation nous paraît souhaitable.
Je ne conclurai pas sans dire notre inquiétude que les dispositions prévues aux articles 2 et 7 puissent être utilisées à une tout autre fin que la lutte contre les bandes violentes – la répression de la contestation sociale. Des policiers ne nous ont-ils pas dit que la seule occasion où cette loi serait applicable serait les manifestations ? Nous proposerons donc des amendements de clarification.
Bref, il ne nous paraît pas sérieux de prétendre apporter une solution à des phénomènes aussi graves par des dispositions aussi rudimentaires.
Il y a deux manières de mépriser les victimes : le déni et l'instrumentalisation par la gesticulation. S'agissant des violences commises dans les établissements scolaires, c'est la deuxième posture qui prévaut. Nous ne sommes pas hostiles à certaines des dispositions contenues dans le texte qui nous est soumis, mais elles ne répondent pas à l'ampleur du problème. Vous avez parlé de « sanctuariser » les établissements scolaires, en faisant référence à certains drames, mais votre texte occulte les violences quotidiennes qui s'y produisent. Ce n'est pas en installant des portiques que l'on en finira avec le harcèlement, les insultes, les menaces, les bousculades et les jeux dangereux. Ces violences « ordinaires », répétitives, touchent, globalement, 11 % des élèves. Ce pourcentage déjà considérable cache de plus une profonde inégalité sociale dans l'exposition à ces violences, que subissent 16 % des élèves scolarisés dans les établissements situés en ZEP. Certes il ne s'agit pas d'agressions à l'arme blanche, mais cette violence répétitive a des conséquences désastreuses pour les individus qu'elle touche et pour la collectivité. J'approuve donc la sévérité des conclusions de ma collègue Delphine Batho.
Quand on prétend « sanctuariser » les établissements, on commence par y maintenir les surveillants. Or, depuis 2002, 20 000 adultes ont disparu des établissements scolaires, soit 4 à 5 par établissement, ces adultes dont la présence est la base de la prévention des violences. Ne devriez-vous pas vous interrogez sur la pertinence de vos dogmes, et en particulier sur celui de la suppression des postes à l'Éducation nationale ? Commencez par rétablir la présence de surveillants et les choses se passeront mieux ! Nous avons déposé des amendements en ce sens. Pour finir, il n'était pas des plus habiles d'aller proclamant que les chefs d'établissement n'ont aujourd'hui pas le droit de fouiller les cartables…
Mme Batho, vous m'aviez prié de demander à Mme la ministre de l'intérieur un exemplaire de la monographie intitulée « Phénomène de bandes, état des lieux » établie par la sous-direction de l'information générale de la direction centrale de la sécurité publique. Nous venons à l'instant de le recevoir et je vous le transmets aussitôt.
Mme Delphine Batho. Je vous remercie.
Je regrette que l'entrée en vigueur du nouvel alinéa 5 de l'article 39 de la Constitution ait été différée car s'il est une proposition de loi sur laquelle l'avis du Conseil d'État nous aurait été d'une grande utilité, c'est celle-ci. Dois-je rappeler les dispositions des articles 132-71, 222-15, 431-1 et suivants, 433-6, 433-10 et 450-1 du code pénal, sans même parler des circonstances aggravantes ? Autrement dit, des dispositions existent déjà, et en nombre. Le rapporteur nous dit que, sur ce plan, notre législation est lacunaire et que nous devons combler cette lacune. Si cela est démontré, notre groupe examinera les propositions avec intérêt. En effet, que demandons-nous à la loi, sinon d'être efficace et de sanctionner quand besoin est ? Mais, à multiplier les textes sans jamais les évaluer, nous contribuons à décrédibiliser la loi. Or, le groupe SRC a procédé à de multiples auditions de magistrats ; pas un seul ne nous a dit que le texte, tel qu'il est rédigé, aura une quelconque efficacité.
La loi doit être précise, comme le montre la censure, à peine intervenue, de la loi HADOPI par le Conseil constitutionnel. Puis-je, par ailleurs, rappeler que dans sa décision du 20 janvier 1981, le Conseil constitutionnel déclarait contraires à la Constitution les dispositions de quatre articles de la loi « Sécurité et liberté » en rappelant « la nécessité pour le législateur de définir les infractions en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire » ?
Il n'a pas été possible de mener des études d'impact de cette proposition ; je le regrette. Selon le ministère de l'Intérieur, il y aurait 222 bandes connues en France. C'est du moins ce dont faisait état Le Figaro dans son édition du 27 mars dernier, évoquant un « bilan édifiant » résultant d'une synthèse « d'informations puisées sur le terrain, département par département, quartier par quartier ». Cet « instantané saisissant » nous apprenait que ces bandes compteraient 2 453 individus – pas un de moins, pas un de plus… Nous sommes heureux que ce rapport nous soit transmis aujourd'hui, directement.
Sur le fond, je suis très frappé de constater que les citoyens, les policiers et les magistrats ne semblent plus croire en la loi pénale. J'en tire le constat navrant que la loi ne fait pas plus peur qu'elle ne protège.
Sur un sujet aussi grave, ne faudrait-il pas essayer de faire avancer les choses plutôt que de formuler des propositions contradictoires ? Or, nous avons entendu successivement que la proposition de M. Estrosi est inutile car il existe déjà des dispositions suffisantes ; que le texte qui nous est soumis apporte bien quelque chose, que l'on a cherché à l'enrichir mais que les amendements n'ont pas été retenus ; que la proposition est bonne mais que l'on n'en fait pas assez et que l'on instrumentalise les victimes ; enfin, qu'il faudrait attendre que la loi prouve son efficacité pour qu'on commence à en discuter !
Pourtant, les spécialistes et les hommes de terrain que sont les maires disent tous qu'une des causes principales de la délinquance, c'est « l'effet de bande ». Un certain ministre de l'Intérieur a voulu et fait promulguer la première loi sur la prévention de la délinquance, fondée sur les conclusions de la commission de la prévention au sein du groupe d'étude parlementaire sur la sécurité intérieure. Le GESI insistait sur la nécessité de coordonner tous les intervenants. Or, comme l'a souligné le rapporteur, seules 22 communes sur 36 000 ont réalisé la mutualisation entre les acteurs, dont deux communes de gauche seulement – et vous parlez de dogmatisme ! Pourtant, depuis qu'un CLSPD existe dans ma commune, la délinquance a chuté de 27,5 % !
Cette loi va peut-être se superposer à d'autres…
Mme Delphine Batho. Ah !
…mais elle contribuera à régler des problèmes qui existent dans toutes les cités sensibles et, une fois pour toutes, celui des incursions dans les établissements scolaires. Il va sans dire que les surveillants, qui ne sont pas des professionnels de la sécurité, ne suffisent pas à la tâche.
Essayons de ne pas nous opposer. Chacun, de par son expérience locale, peut faire preuve de réalisme. Beaucoup d'entre nous sont confrontés à un phénomène grave, celui des bandes – bandes au demeurant de tailles différentes –, que nous pouvons tous décrire. Le constat est donc fait, la question est de savoir comment agir avec efficacité pour ne voir se reproduire ni les affrontements d'une très grande violence que nous avons connus, ni ce qui a suivi : récemment à la suite d'actes de violences entre bandes, après que trente individus ont été interpellés et quatre déférés, ces quatre-là sont sortis libres du tribunal, alors que tout démontre qu'ils ont été plusieurs dizaines à porter des coups avec des armes pouvant tuer. Là est la difficulté. Nous ferons donc des propositions tendant à ce que la loi soit la plus efficace possible, puisque, comme l'a rappelé notre collègue Jean-Jacques Urvoas, la Commission doit s'interroger sur l'efficacité des lois.
Si 22 communes seulement ont estimé utile d'avoir un CLSPD, peut-on pointer les seules villes socialistes ? Peut-être cette abstention s'explique-t-elle par le fait que d'autres dispositifs existaient déjà, tels ceux définis par Gilbert Bonnemaison, ou que, de manière plus générale, les maires accueillent déjà les familles en difficulté. La volonté de mieux prévenir et de mieux punir les violences est une volonté commune. Ma seule préoccupation, c'est que les sanctions prévues soient appliquées. Si nous y parvenons, nous aurons fait oeuvre utile ; sinon, ce texte demeurera de l'ordre de la proclamation.
Élus locaux, nous connaissons tous le phénomène des bandes. Il ne concernait autrefois que les quartiers périphériques, avant de se généraliser. Je n'ose pas penser que c'est la raison pour laquelle on s'y intéresse désormais. Depuis toutes ces années, combien de morts sont à déplorer ? Je serais curieux de connaître les statistiques.
A Sarcelles, cela fait vingt ans que nous avons mis en place des dispositifs de convocation des parents, de sanction précoce des délinquants. Nous n'avons pas, en la matière, de leçons à recevoir. Je remarque simplement que lorsque le travail est coordonné, il est possible de parvenir à des résultats probants.
La seule question qui m'intéresse, c'est de savoir si cette loi nous permettra d'être plus efficaces ou si elle n'est qu'un effet d'annonce, qui laissera croire aux citoyens que l'on a pris des décisions, lesquelles se révéleront ensuite inapplicables.
Les bandes sévissent quotidiennement, se nourrissant de l'économie souterraine. En mettant en place des services de police dédiés, il est possible de remonter les trafics de drogue, le recyclage de l'argent, de traquer les actes de délinquance et les vols. Un travail de police judiciaire sérieux le permet. Mais combien de fois n'avons-nous pas été confrontés à un manque de moyens ? La brigade des stupéfiants intervient quand elle le peut, les policiers sont en nombre insuffisant pour mener les investigations.
Ces bandes entrent en conflit sur des territoires extérieurs. L'idée de l'article 1er est d'en interpeller les membres avant qu'elles ne se déplacent. Ce n'est pas nouveau, la police ne s'est pas privée de le faire en 2005 lors des émeutes. Une municipalité bien organisée est informée en temps réel des mouvements de bandes et peut contacter la police suffisamment en amont.
Une rixe entre deux bandes rivales rassemble au moins 40 individus. Que voulez-vous que le commissaire de Sarcelles fasse avec 5 policiers en poste, le soir et le week-end ?
Je vous parle de mon expérience. Vous pouvez la nier, mais c'est ce que nous vivons au quotidien, et c'est ce que les citoyens subissent tous les jours. Le temps que les autres forces de police appelées à la rescousse arrivent, les voyous ont largement le temps de commettre leurs exactions. Et même si l'on procède aux interpellations, comment placer en garde à vue les membres des bandes rivales dans les deux cellules que compte le commissariat ?
Le premier article donnera lieu à de belles déclarations, mais il ne sera pas applicable. Une nouvelle fois, les citoyens auront cru qu'il était possible de régler le problème. Après la désillusion viendra le ressentiment. Il n'y aura que les voyous pour se réjouir de cet échec : lorsqu'ils se sont aperçu que la police ne pouvait pas appliquer les dispositions relatives aux cages d'escalier, ils ont redoublé leurs exactions, avec un sentiment d'impunité.
Ce texte est doublement dangereux : il est supposé pouvoir régler à lui seul un problème dramatique et, de surcroît, il est inefficace. Nous faisons des propositions ; j'espère qu'elles seront entendues. Pourquoi ce sujet me passionne-t-il autant ? Il y a quatorze ans, nouvel élu à Sarcelles, j'ai dû, à quelques mois d'intervalle, ramasser dans la rue les corps de deux jeunes, tués par balle et par arme blanche, et annoncer leur mort à leur mère. Je ne veux plus jamais revivre cela.
Cette loi n'est pas vraiment utile, puisque l'on dispose de l'arsenal juridique nécessaire. Mais ce n'est pas un argument pour ne pas la voter : en créant un effet d'annonce, elle pourrait remonter le moral de la police et de la magistrature. En outre, elle pourrait être l'une des pièces d'un plan d'ensemble, qui aille d'une certaine forme de contrôle social jusqu'à la réinsertion, en passant par le jugement et le traitement post-pénal. Mais ce plan d'ensemble n'existe pas. Je crains que ce texte ne soit qu'une annonce, suivie de rien d'autre.
Les socialistes ne se sont certes pas illustrés dans ce combat difficile entre 1997 et 2002. Mais force est de constater que cela n'a pas progressé depuis ; les émeutes urbaines de 2005 ont même atteint une intensité inconnue jusque-là. Dans ce domaine, personne ne peut se prévaloir d'une quelconque réussite.
La lutte contre l'économie souterraine est ardue : n'oublions pas qu'il y a dans notre pays 4 millions de consommateurs de haschich et que la MILDT estime à 150 000 le nombre de personnes qui tirent un revenu quelconque du trafic de stupéfiants. Nous sommes confrontés à un marché noir difficile à résorber, semblable sous certains aspects à celui qui prévalait à la Libération.
Nous devons résolument nous attaquer à ces phénomènes sociaux très complexes. C'est la raison pour laquelle le groupe SRC propose de créer un plan d'ensemble. Pourtant, même amendé, le texte ne pourra pas être très opérationnel. C'est une proposition de loi qui a été préparée dans la précipitation, le support de la réflexion étant un rapport de trente pages dont nous venons seulement d'avoir communication.
Prenons garde à ne pas créer des attentes et des espoirs qui seront déçus. Cela fait plusieurs années que, toutes tendances politiques confondues, nous décevons. Mais ne nous déchirons pas davantage, car ce serait désespérer une partie de la population française qui n'est un électorat privilégié ni pour un camp ni pour l'autre.
Il faut être modeste. Mais certains peuvent l'être moins que d'autres. Les politiques que nous avons conduites sont différentes, les plus récentes ont mieux réussi, comme les chiffres en témoignent.
Ce n'est pas parce qu'un certain nombre de lois ont été votées, et qu'elles ont parfois prouvé leur efficacité, que le travail est achevé. La sécurité est une oeuvre constante, qu'il faut en permanence adapter. De plus, la justice a pu appliquer certaines dispositions d'une manière qui n'a pas toujours permis d'aboutir à des sanctions efficaces.
Quels que soient les quartiers, la violence en bande frappe. Dans le 15e arrondissement de Paris, à quelques mètres de la Tour Eiffel, un jeune est mort d'un coup de couteau le 18 décembre dernier. Alors que l'on constate une diminution de la délinquance d'appropriation, les violences non crapuleuses augmentent.
Il est donc nécessaire de prendre des dispositions propres à renforcer l'efficacité de la sanction ; c'est à quoi répond cette proposition de loi.
Il en va de même pour la violence en milieu scolaire. Bien entendu, cette loi ne permettra pas à elle seule que les bandes se dissolvent, mais le Gouvernement prend un ensemble de mesures qui forment un tout cohérent, visant à renforcer notre appareil répressif. Je suis d'accord avec notre collègue Jacques Alain Bénisti pour dire que les surveillants, même s'ils sont utiles, ne peuvent faire face à une violence croissante.
Tous les élus sont concernés par la progression de la violence et par les problèmes de sécurité. Il est donc inacceptable de prétendre que nous serions indifférents aux doléances de nos concitoyens habitant les quartiers populaires. Nous cherchons tous des solutions efficaces pour venir à bout de ces difficultés, et c'est précisément pourquoi il faut s'assurer que la proposition changera quelque chose. Dans le 20e arrondissement de Paris, chacun sait quelle bande traîne à tel carrefour, le commissaire de police le premier. Cela dit, que fait-on ? Quand une voiture de police fait une ronde, la bande qui empoisonne les braves gens s'égaie, mais aussitôt la voiture disparue, la bande se reconstitue. Si le malheureux commissaire n'a à sa disposition qu'une ou deux voitures pour tout l'arrondissement, que peut-il faire de plus ?
De même, on distingue deux populations dans une bande : les trafiquants de stupéfiants, qu'il faut sanctionner et, lorsqu'ils ont purgé leur peine, reprendre en main. Seulement, nous n'avons pas assez de personnel de probation, ni d'éducateurs. Il en résulte que, sortis de prison, les jeunes gens retrouvent la même place, au même carrefour. Mais il y a aussi « les petits », de très jeunes adolescents en difficulté qu'il faudrait isoler des grands pour éviter qu'ils ne basculent dans la délinquance. Là encore, les structures manquent, comme manque le personnel à la protection judiciaire de la jeunesse.
En résumé, les bandes sont parfaitement identifiées, mais ce n'est pas en adoptant cette proposition que l'on réglera le problème.
Quoi qu'on en dise, cette proposition est importante. Il est exact que, comme l'a indiqué notre collègue Jean-Jacques Urvoas, l'avis du Conseil d'État aurait été utile, notamment parce que la distinction entre « association de malfaiteurs » et « groupement » pose un problème juridique. Le débat sera intéressant car les interprétations sont, depuis longtemps, divergentes, et l'examen de cette loi permettra peut-être une harmonisation.
La question de la cagoule n'est pas anecdotique. Dissimuler son visage est une tactique délibérée qui vise à faire obstacle à la vidéosurveillance. Cela doit donc être réprimé et, effectivement, constituer une circonstance aggravante. Le problème est réel, et il n'est pas lié aux manifestations récentes. Je comprends les arguments de nos collègues de l'opposition car il est vrai que la situation n'est pas facile, mais le texte est intéressant.
Il suffit d'assister aux audiences de flagrants délits du TGI de Paris pour se rendre compte que les bandes constituent le premier problème juridique pour les magistrats. Je souscris donc à l'esprit du texte, et à la proposition elle-même. Je demanderai seulement au rapporteur de bien vouloir préciser qui est visé à l'alinéa 5 de l'article 4 par une peine d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
Notre collègue Philippe Goujon a appelé, avec raison, à la modestie. Nous devons en effet en faire preuve sur ces problèmes qui mobilisent certains d'entre nous depuis fort longtemps et sur lesquels nous avons essayé d'être constructifs. Ainsi, avais-je approuvé M. Daniel Vaillant lorsqu'il avait proposé, au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, que l'on puisse à titre préventif fouiller les coffres de voiture. La protection de nos concitoyens est en effet un devoir qui exige de dépasser les clivages idéologiques.
Certains d'entre vous me reprochent de proposer une « loi de plus », mais on ne pourra jamais cesser d'adapter notre législation à l'évolution de la société. Pourrait-on éviter de passer de la LOPSI 1 à la LOPPSI 2, comme si la cybercriminalité n'avait pas adopté des formes nouvelles depuis 2002 ? Il en va de même dans le domaine social.
Michel Hunault a salué les mesures relatives aux personnels des établissements scolaires et la recherche de nouveaux moyens de prévention de la délinquance ; je l'en remercie. Sur ce sujet la polémique est inutile, puisque nous sommes tous d'accord sur le fond. Quand les mesures de prévention auront atteint toute leur efficacité, nous serons peut-être amenés à réduire la palette des sanctions mais en attendant, il faut se doter des moyens d'une réponse graduée.
L'analyse par laquelle vous avez engagé votre propos, madame Batho, était bonne. Vous avez rappelé, en particulier, qu'en matière de bandes de nouveaux paliers ont été franchis. C'est bien pourquoi nous estimons qu'il est de notre devoir de mettre à jour notre arsenal juridique. Mais, après avoir dressé ce constat juste, vous vous êtes livrée à un réquisitoire parfaitement injuste. Je me rappelle nombre de débats sur la sécurité, au cours desquels chacun essayait, de manière constructive, d'apporter sa contribution au texte qui était proposé. Pourquoi aujourd'hui prendre une position inverse, alors que ces textes ont porté leurs fruits ? La délinquance générale est en baisse, c'est incontestable puisque l'état 4001, qui est l'outil de mesure, n'a jamais été modifié. Quant au taux d'élucidation des affaires, il a augmenté de manière spectaculaire depuis 2002 grâce aux moyens que nous avons donnés à la police, en particulier à la police scientifique, ainsi qu'aux magistrats.
Les délinquants ont désormais bien compris qu'en agissant en bande, ils diluent les responsabilités et rendent plus difficile l'identification d'un coupable. Puisqu'un nouveau palier a ainsi été atteint, il nous faut adopter des dispositions nouvelles. Vous vous souvenez certainement, madame Batho, de ce que M. Serge Guillen, sous-directeur de l'information générale à la direction centrale de la sécurité publique, que nous avons auditionné à votre demande, nous a expliqué sur la façon de procéder de ces bandes. Cette proposition de loi vise à combler un vide juridique que certains policiers et certains magistrats ont bien identifié.
S'agissant de la présence policière, on vient de créer les unités territoriales de quartier, qui commencent à s'implanter et à démontrer leur efficacité.
Vous vous plaignez d'une certaine impunité : l'objet de ce texte est bien d'y remédier dans des domaines précis, même si je conviens qu'une loi ne peut pas tout régler. S'agissant de la loi du silence, je vous rappelle qu'un texte sur la protection des victimes a été voté récemment. Sur le sujet du droit à l'avocat pour la victime, j'ai moi-même été, à l'occasion de l'examen d'un texte récent, victime de l'article 40, mais le Gouvernement m'a indiqué son intention de prendre l'initiative.
Enfin, vous avez participé comme moi à la table ronde avec l'ensemble des syndicats de policiers : j'ai constaté, moi, leur unanimité pour reconnaître l'utilité des dispositions proposées.
Madame Mazetier, on ne peut parler de gesticulation quand nous cherchons à faire en sorte que ceux qui fréquentent les établissements scolaires n'y aillent pas chaque jour avec angoisse. Le ministre de l'éducation nationale a fait par ailleurs d'autres propositions.
Monsieur Urvoas, merci d'avoir envisagé d'approuver des dispositions qui viendraient combler un vide. Il vous appartiendra de juger au fil de la discussion.
Monsieur Bénisti, merci pour votre soutien.
Monsieur Valls, merci pour votre sens de l'équilibre. Pour répondre aux problèmes que vous avez évoqués, nous avons besoin d'outils plus efficaces.
Monsieur Pupponi, il est un fait que tant les maires que les représentants de l'État ne s'emparent pas tous des outils qui sont à leur disposition. Le volontarisme de chacun est essentiel. En tout cas, votre intervention me convainc encore davantage de l'utilité de l'article 1er de ce texte. Cette loi doit avoir une fonction de prévention encore plus que de répression. Au demeurant, je vous rappelle que le week-end, dans le Val d'Oise, 80 policiers peuvent être dépêchés dans les vingt minutes à l'appel d'un commissaire.
Pour l'instant, ils sont toutes les nuits à Villiers-le-Bel – et ne peuvent donc pas être à Sarcelles.
Une autre réponse va être apportée par la mise en place des compagnies de sécurisation qui renforceront les effectifs présents sur le terrain.
Madame Batho, je souhaite vous rappeler quelques chiffres : les conseillers principaux d'éducation étaient 10 800 lorsque M. Lang était ministre ; ils sont 12 000 aujourd'hui, soit en moyenne un adulte pour 8 à 9 élèves. Les surveillants sont 53 000 aujourd'hui, contre un peu plus de 50 000 en 2002.
Monsieur Raimbourg, ce texte vient compléter l'arsenal existant notamment pour rendre plus efficace l'action des GIR. Vous avez raison, nous ne devons pas décevoir.
Monsieur Goujon, notre devoir est en effet d'apporter une réponse à chacun des phénomènes nouveaux auxquels nous sommes confrontés. Aujourd'hui, les moyens ne sont pas suffisants.
Madame Pau-Langevin, je me considère moi aussi comme un élu de quartiers populaires, dont les habitants sont les premiers à demander plus de fermeté. Aucun d'entre nous ne peut être indifférent. Il faut mettre fin à l'angélisme.
Monsieur Goasguen, la définition de l'association de malfaiteurs la distingue très clairement des bandes que nous caractérisons à l'article 1er. La vidéosurveillance et la législation anticagoules se complètent pour donner plus d'efficacité à la réponse policière.
Monsieur Blanc, ce texte me paraît répondre au problème que vous avez soulevé.
Bref, ce texte s'inscrit dans ce que j'appellerais la « sécurité durable », qui nous conduit depuis 2002 à nous adapter en permanence aux nouvelles formes de délinquance.
Dispositions renforçant la lutte contre les bandes violentes
Avant l'article 1er
La Commission examine l'amendement CL 5 de Mme Delphine Batho.
Cela fait bien longtemps qu'il existe des dispositifs partenariaux, mais cet amendement a pour but de combler un manque en créant au sein de chaque CLSPD un groupe de travail opérationnel, permettant à tous les partenaires d'échanger des informations. Cette pratique existe déjà dans certaines communes, mais il conviendrait de la généraliser.
Avis défavorable car la proposition de loi ne concerne pas directement la prévention de la délinquance, sur laquelle le Gouvernement présentera son programme en septembre. Au demeurant, cet amendement est satisfait par l'article L. 2211-5 du code général des collectivités territoriales.
Ce n'est pas en adoptant des dispositions de ce type que nous améliorerons l'efficacité de la loi. D'ores et déjà, un maire peut réunir une partie seulement du CLSPD.
Ce texte a aussi un objectif de prévention, vous l'avez dit vous-même, monsieur le rapporteur. Or l'expérience montre que lorsque ces structures existent, elles sont efficaces. C'est la raison pour laquelle il me semble nécessaire de les rendre obligatoires : si l'on veut vraiment lutter contre les bandes, il faut obliger les acteurs locaux de la sécurité à se parler très régulièrement.
L'article L. 2211-5 dispose que « le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance peut constituer en son sein un ou plusieurs groupes de travail et d'échange d'informations à vocation territoriale ou thématique ». Restons-en à cette faculté : il faut laisser le maire libre de décider en fonction de la situation de sa commune.
La Commission rejette l'amendement CL 5.
Elle rejette également l'amendement CL 6 de Mme Delphine Batho, relatif aux conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance.
Elle examine ensuite l'amendement CL 2 de Mme Delphine Batho.
Selon nous, plutôt que de durcir toujours davantage le système répressif, ce qui n'est pas efficace, il faut poser le principe d'un jugement rapide pour les primodélinquants. C'est particulièrement important pour les mineurs ou les jeunes majeurs.
Sur le fond, cet amendement est bon, à la nuance près que le problème ne concerne pas tant le délai qui s'écoule entre l'audience et le prononcé du jugement que le temps qui sépare le moment où les faits ont été commis et l'audience. Mais je ne peux pas y être favorable car c'est un cavalier législatif.
Peut-être faudrait-il modifier la rédaction de cet amendement, mais il reste qu'il est nécessaire de sanctionner rapidement les faits qui ont été commis. A ce propos, on m'a dit que les mineurs qui avaient fait l'objet d'une arrestation et d'une procédure après les émeutes de 2005 en Seine-Saint-Denis n'étaient pas encore jugés à la fin de l'année 2008.
Je suis personnellement favorable à cet amendement, qui va dans le sens de ce que nous avons pu dire à l'occasion de diverses discussions législatives. Bien évidemment, pour les délinquants mineurs, le temps a beaucoup d'importance : trois mois, pour un adolescent, c'est très long ; et plus la décision judiciaire intervient rapidement, plus elle a d'impact sur lui.
La Commission rejette l'amendement CL 2.
Elle examine l'amendement CL 3 de Mme Delphine Batho.
Dans le même esprit, nous proposons que, dès la sanction prononcée, un éducateur soit nommé pour suivre son exécution.
Les services de la PJJ remplissent déjà cette mission. Par ailleurs, cela ne relève pas du niveau législatif. Avis défavorable donc.
Ce que nous proposons, c'est que l'on nomme un « tuteur référent », afin que le mineur ait toujours affaire à la même personne, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui.
La Commission rejette l'amendement CL 3.
Elle examine l'amendement CL 4 de Mme Delphine Batho.
Une sanction éducative doit constituer une réponse rapide à l'infraction commise. C'est pourquoi nous proposons que son prononcé intervienne dans un délai ne pouvant excéder trois mois – ce qui serait un énorme progrès par rapport à ce qui se passe actuellement.
Je partage votre souhait que la sanction intervienne le plus rapidement possible car c'est particulièrement important pour les mineurs ; mais comme précédemment, il s'agit là d'un cavalier.
La Commission rejette l'amendement CL 4.
Elle examine l'amendement CL 9 de Mme Delphine Batho.
Nous maintenons qu'il n'y a pas de vide juridique en matière de lutte contre les bandes organisées et les attroupements. En revanche, les policiers reconnaissent manquer d'un guide pratique récapitulant le droit existant. L'établissement de ce guide de l'action publique, à l'instar de celui qui a été établi en matière de violences conjugales, est une suggestion de la secrétaire générale du syndicat des commissaires de police. Tel est l'objet de notre amendement.
C'est un sujet qui relève de l'organisation des services, non de la loi. En outre, le Président de la République a annoncé que l'expérimentation qui a été menée à la préfecture de police de Paris pour assurer cet accompagnement allait être généralisé.
Ce qui a été mis en place à la préfecture de police de Paris, c'est un service d'investigation transversal. Ce n'est pas du tout ce que nous proposons. Nous demandons que chaque agent ou officier de police judiciaire dispose d'un guide pratique.
Encore une fois, ce n'est pas du domaine législatif. Et un service qui répond, c'est encore mieux qu'un guide !
La Commission rejette l'amendement CL 9.
Elle examine l'amendement CL 13 de Mme Delphine Batho.
Nous doutons du sens juridique de la notion de « bandes violentes », qui ne figure ni dans le code pénal ni dans le code de procédure pénale. C'est pourquoi nous proposons de modifier l'intitulé du chapitre pour viser « les bandes organisées violentes et les attroupements violents ».
L'article 1er vise les groupements violents, l'article 2 les attroupements armés. Nous avons consulté les policiers et les magistrats et c'est à dessein que nous avons fait la distinction avec les bandes organisées, notion qui figure déjà à l'article 132-71 du code pénal.
La Commission rejette l'amendement CL 13.
Article 1er (art. 222-14-2 [nouveau] du code pénal) : Délit de participation à un groupement violent :
La Commission examine l'amendement CL 10 de Mme Delphine Batho.
Nous proposons de remplacer les dispositions inapplicables proposées à cet article par une disposition très simple, reprise d'une jurisprudence très ancienne sur la notion de co-auteur : plutôt que de créer une sorte de responsabilité collective et d'incriminer non pas les faits commis mais l'intention de les commettre, nous proposons que toute personne qui a pris part à l'action collective en « faisant masse » soit considérée comme co-auteur du délit.
Avis défavorable, bien sûr, à cette suppression du dispositif proposé à cet article. Celui-ci, je le souligne, instaure une responsabilité individuelle et non collective. Cet amendement remet en cause la notion de complicité, traditionnelle en droit pénal.
On nous dit que cette proposition de loi est destinée à combler un vide juridique, mais il reste à le démontrer. Si l'on vise les bandes délinquantes, en quoi la notion de bande organisée, qui existe déjà, n'est-elle pas adaptée ? Si l'on vise des groupes spontanés, en quoi celle d'attroupement, qui existe également dans le code, ne l'est-elle pas non plus ?
Par ailleurs, comme les magistrats nous l'ont dit lorsque nous les avons revus après l'audition à laquelle a procédé le rapporteur, la manière dont cet article 1er est rédigé va susciter des débats de jurisprudence. Les mots « en connaissance de cause », le mot « but » et la caractérisation de celui-ci par « un ou plusieurs faits matériels » posent en effet des problèmes d'interprétation. La difficulté vient de ce que l'article ne vise pas à réprimer des faits, mais une intention ; or il est fort délicat d'apporter la preuve d'une intention délictueuse.
L'expression « en connaissance de cause » peut être lue de deux manières. S'applique-t-elle au fait de participer à un groupe dont on sait qu'il poursuit un but violent ? Ou s'applique-t-elle au fait de participer à un groupe qui, même si on l'ignore, poursuit un but violent ? Autrement dit, l'expression porte-t-elle sur la participation au groupe ou sur le caractère violent du groupe ? Les avocats vont s'engouffrer dans cette incertitude juridique.
Il en va de même pour le « but ». Comment prouver qu'un groupement « poursuit le but » de commettre des violences ? La conséquence de tant d'incertitudes sera qu'on ne pourra pas poursuivre sur la base des infractions que vous créez. C'est déjà le cas pour les dispositions relatives aux halls d'immeuble : en 2008 et jusqu'à maintenant, pas un seul des nombreux magistrats du TGI de Paris que j'ai rencontrés n'a engagé de poursuites sur cette base.
Il me paraît très utile de faire référence à la notion de co-action. Cependant, monsieur le rapporteur, je conviens qu'il faudrait éviter d'utiliser dans notre amendement le verbe « assister » puisqu'il renvoie à la notion de complicité. J'observe que l'amendement CL 43 de M. Vanneste répond à la même problématique.
Encore une fois, nous proposons un dispositif beaucoup plus simple et beaucoup plus efficace que celui qui nous est soumis, s'agissant d'exercer des poursuites à l'encontre de ceux qui commettent en groupe des violences ou des dégradations. L'article 1er s'inspire des dispositions relatives à l'association de malfaiteurs alors qu'il s'agit beaucoup plus ici de bandes organisées. D'ailleurs, dans la note de la sous-direction de l'information générale (SDIG) dont je viens d'avoir connaissance, figure en annexe l'article 706-73 du code de procédure pénale, qui énonce tous les cas dans lesquels on peut considérer qu'une infraction est aggravée par la commission des faits en bande organisée. La notion de co-auteur que nous retenons est beaucoup plus forte que celle de complicité.
Je suis élu de La Courneuve, où il y a quatre ans, le ministre de l'intérieur de l'époque avait dit qu'il allait nettoyer la ville avec un instrument dont je tairai le nom. Constatant que la situation ne s'est pas améliorée, j'aimerais bien comprendre ce que propose le rapporteur. Quel type de violences vise-t-on, dès lors que le délit d'association de malfaiteurs existe déjà pour les violences ayant entraîné une interruption temporaire de travail (ITT) de plus de huit jours ? Une gifle ou l'arrachage d'une affiche sur un panneau électoral sont-ils visés ?
Nous visons d'une part les dégradations de biens, d'autre part les violences contre les personnes entraînant, en effet, moins de huit jours d'ITT, ce qui correspond à plus de 90 % des cas – lesquels ne sont donc pas, aujourd'hui, couverts par la législation sur l'association de malfaiteurs.
Madame Batho, l'article 121-6 du code pénal dispose que « sera puni comme auteur le complice de l'infraction, au sens de l'article 121-7 ». Autrement dit, le complice est puni de la même façon que l'auteur.
Monsieur Urvoas, les policiers décèlent facilement l'intention lorsque, par exemple, ils se trouvent en face de personnes équipées de barres de fer. Le sous-directeur de l'information générale, M. Guillen, a d'ailleurs exposé devant nous tous les cas de figure auxquels la police nationale est confrontée. Cela peut être la publication sur Internet, dans un blog, d'une déclaration annonçant des violences. Je peux vous citer aussi, dans ma ville, le cas de ces groupes de casseurs qui ont profité des manifestations en faveur de la Palestine pour commettre des actes délictueux, et qui se donnaient rendez-vous par SMS.
Quant à l'expression « en connaissance de cause », elle est déjà utilisée dans notre droit dans le domaine du recel, à l'article 321-1 du code pénal.
Ma question ne portait pas sur l'expression elle-même, mais sur le membre de phrase auquel il faut l'appliquer : encore une fois, s'agit-il de la participation au groupe, ou bien du but de ce groupe ?
Monsieur le rapporteur, si tout est facile, pourquoi cette proposition de loi ? Par ailleurs, je renouvelle la question posée par Daniel Goldberg sur le type de groupement visé. Quant à l'expression « en connaissance de cause », nombreux sont les policiers et magistrats qui nous ont dit qu'elle allait poser un problème. En tout cas, la place des virgules dans la phrase rend possibles trois lectures différentes.
La notion de coaction est préférable à celle de complicité car la circonstance aggravante s'applique automatiquement au co-auteur. Quant à celle de « connaissance de cause », elle est discutable aussi en matière de recel…
La Commission rejette l'amendement CL 10.
Elle examine les amendements CL 43 et CL 44 de M. Christian Vanneste.
Cette proposition de loi répond à un type de délinquance spécifique, caractérisée par le fait qu'elle émane d'un groupe qui n'est ni une association de malfaiteurs, dont il n'a pas la constance et l'organisation, ni une bande organisée, ni un attroupement. Ce groupe aux contours souvent mal définis se caractérise par des actes violents, lesquels peuvent d'ailleurs naître, de façon inattendue, d'une situation extérieure au groupe, par exemple à l'occasion d'une manifestation étudiante.
Nous tentons donc de répondre à une délinquance dont le véritable sujet est le groupe lui-même, la présence du groupe étant en fait la cause de l'acte violent. L'auteur des violences est le groupe, les membres du groupe sont donc considérés comme violents, même si certains d'entre eux ne se sont pas comportés de façon violente. Le texte prévoit donc une incrimination à caractère collectif, ce qui pose problème.
Par ailleurs, l'article 1er s'appuie sur des éléments subjectifs. La participation « en connaissance de cause » n'a pas la même signification dans le cas d'une association de malfaiteurs ou dans celui d'un groupe dont l'objectif est imprécis. En outre, le caractère intentionnel est évoqué non seulement au niveau de l'individu, mais aussi au niveau du groupe lui-même ; or on ne peut pas prouver l'intention violente du groupe, lequel peut avoir réagi de manière violente à une situation donnée.
Mon amendement CL 44 aurait dû à mon avis être appelé en premier car c'est celui dont la rédaction est la plus éloignée du texte qui nous est soumis. Il supprime toute subjectivité : serait incriminée la personne qui se trouve présente de manière régulière dans un groupe qui commet des violences. On se base ainsi sur des constats objectifs, et notamment sur le fait que le groupe a déjà commis des actes violents auparavant. J'ai en effet pensé, à la lecture de cette proposition de loi, au film de Claude Sautet Max et les ferrailleurs : après avoir rencontré un groupe qui semble ne pas avoir de bonnes intentions, un ancien juge d'instruction devenu inspecteur de police fait en sorte de le pousser à commettre un braquage de banque, afin de le prendre en flagrant délit… Pour ma part, il me paraît très difficile de retenir la notion d'intention. Par ailleurs, le fait de mentionner, comme je le propose, le caractère régulier de la présence dans le groupe permet d'exclure les cas où un jeune se trouve mêlé par hasard à une situation de ce type.
Dans mon amendement CL 43, je me rapproche davantage de la proposition de loi puisque je retiens la notion d'intention concernant le groupe, si ce n'est l'individu, en évoquant une « entente établie en vue de commettre des violences ».
Ces deux amendements me paraissent répondre à la fois aux préoccupations de l'auteur de la proposition de loi et à celles qu'ont pu exprimer les membres de l'opposition.
L'amendement CL 43 restreint la portée de l'article en en exigeant la présence régulière au sein du groupement violent. Quant à l'amendement CL 44, il restreint la définition du groupement en le caractérisant par la « participation à des attroupements » ; mêler ainsi ces deux notions rend le dispositif peu lisible et difficilement applicable. Avis défavorable à l'un et à l'autre, donc, car c'est une fragilisation du texte. Dans notre dispositif, l'élément intentionnel est essentiel.
Un fait se constate plus facilement qu'une intention. Vous faites un rapprochement avec les textes qui visent la délinquance en association de malfaiteurs ou en bande organisée, mais précisément il n'y a ici ni association, ni organisation.
Pour qu'une infraction soit constituée en droit, il faut qu'il y ait un élément intentionnel.
Certes, pour qu'il y ait délit, il faut une intention délictuelle, mais ce n'est pas celle que vous visez dans cet article, monsieur le rapporteur, et c'est bien ce qui pose gravement problème. Je salue l'effort de M. Vanneste pour revenir à des éléments plus objectifs. Cependant ses amendements CL 43 et CL 44 visent à incriminer « le fait d'être présent de manière régulière au sein d'un groupement », ce qui nous renvoie à la loi anti-casseurs de 1970.
À propos de la notion de co-auteur, je voudrais souligner que selon la jurisprudence, il faut distinguer ceux qui, extrinsèquement à l'acte, tendent à en préparer, faciliter, réaliser la consommation de ceux qui, par la simultanéité d'action et l'assistance réciproque, en constituent la perpétration même. Ces notions de simultanéité d'action et d'assistance réciproque me paraissent être celles que nous devons retenir.
La Commission rejette successivement les amendements CL 43 et CL 44.
Elle est saisie de l'amendement CL 11 de Mme Delphine Batho.
C'est un amendement de clarification sémantique. Nous proposons de supprimer les mots « même formé de façon temporaire » puisque, selon la jurisprudence, un groupement dispose nécessairement d'une structure minimum et donc d'une certaine durée. Sinon, il s'agit d'un attroupement.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 11.
Elle est saisie de l'amendement CL 45 de M. Christian Vanneste.
Faute de moyens, les travaux d'intérêt général, peine de substitution, sont insuffisamment ordonnés par les juges. Il conviendrait pourtant d'en faire une peine principale autonome, comme c'est le cas en Suisse. Alors que nos prisons sont pleines à craquer, promulguer une loi qui prévoit de nouvelles peines d'emprisonnement paraît irréaliste. De plus, les individus qui se livrent à des violences en bande sont généralement peu argentés ; leur infliger une amende de 45 000 euros sera de peu de portée. Mieux vaudrait mettre l'accent sur une peine dont l'aspect rééducatif et réparateur est indéniable et leur donner la possibilité de se racheter par le travail.
Avis défavorable car la formulation proposée est contraire aux principes du droit pénal : une peine maximale encourue correspond à une incrimination donnée. Cet amendement revient à porter la peine maximale encourue à cinq ans. Quant aux 720 heures de travaux d'intérêt général, ce n'est pas une peine réaliste, alors que le projet de loi pénitentiaire prévoit un maximum de 210 heures.
La Commission rejette l'amendement CL 45.
Elle examine l'amendement CL 12 de M. Jean-Jacques Urvoas.
Afin d'évaluer la pertinence des dispositions de cet article, nous proposons qu'elles soient applicables jusqu'au 31 décembre 2010 et qu'avant cette échéance, le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur leur application.
Conformément à la réforme constitutionnelle, il m'appartiendra de procéder à cette évaluation. Pourquoi renvoyer au Gouvernement ce qui relève du Parlement ? De plus, vous créez une infraction à durée déterminée ; c'est une démarche originale. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement CL 12.
Puis la Commission adopte l'article 1er sans modification.
Après l'article 1er
La Commission est saisie de l'amendement CL 46 de M. Christian Vanneste.
Beaucoup de bandes cherchent d'abord à s'approprier un territoire. Plutôt que d'attendre de punir leurs expéditions, je propose de pénaliser les réunions qui leur donnent, sur leur territoire de prédilection, le sentiment de la toute-puissance. Dans une circonscription comme la mienne, on se rend compte que chaque parking, chaque pré, chaque entrée de garage collectif donne à un groupe la possibilité de se réunir. Parfois, un deal s'organise, lequel peut entraîner des menaces, injures et violences à l'égard des riverains. En nous inspirant de ce qu'avait fait M. Giuliani à New York, nous devons punir ce « harcèlement social », notion que je propose d'introduire dans le code pénal.
Avis défavorable car cette notion est beaucoup trop floue pour constituer une incrimination pénale.
Cet amendement ne fait pourtant que transposer à des lieux à ciel ouvert des dispositions que nous avons adoptées pour les halls d'immeuble ! Il est vrai que la loi sur le délit d'occupation abusive des halls d'immeuble n'a guère été utilisée par les magistrats.
Sous réserve d'un examen plus approfondi, nous sommes assez favorables à cet amendement car il caractérise une infraction qui était précédemment poursuivie sous l'incrimination de « coups et blessures volontaires », faute de définition plus claire.
La Commission rejette l'amendement CL 46.
Incidemment, j'indique que cet amendement était issu d'une proposition de loi qui avait été soutenue par une soixantaine de députés du groupe UMP.
La liberté de vote de chacun est entière.
Article 2 (art. 431-5 du code pénal) : Extension du délit de participation à un attroupement armé aux personnes qui y participent aux côtés de personnes portant des armes apparentes :
La Commission est saisie de l'amendement de suppression CL 14 de Mme Delphine Batho.
Cet article est le plus dangereux. Il prévoit de sanctionner de la même manière la personne qui porte une arme et celle qui n'en porte pas, ce qui pose un problème de constitutionnalité. Par ailleurs, le port d'armes « de manière apparente » est une mention sujette à interprétation. Enfin, les dispositions en vigueur permettent déjà de sanctionner le fait de participer à un attroupement violent sans être soi-même porteur d'une arme.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 14.
Elle examine l'amendement CL 15 de Mme Delphine Batho.
Il paraît nécessaire de préciser que la personne « sait » que des participants à l'attroupement portent des armes.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 15.
Elle examine l'amendement CL 16 de Mme Delphine Batho.
Cet amendement très important vise à éviter que les dispositions de l'article 2 ne soient appliquées à des personnes qui exercent normalement leur droit de manifester et qui se retrouvent à côté de casseurs, lesquels peuvent utiliser manches de banderoles ou parapluies comme armes par destination.
Vous faites une confusion entre la manifestation et l'attroupement. La précision que vous voulez apporter est donc tout à fait inutile. Ayez confiance dans le discernement des magistrats.
L'attroupement commençant au moment où les organisateurs de la manifestation en proclament la dissolution, des personnes risquent de se retrouver malgré elles victimes de vos dispositions.
L'adoption de cet amendement nous dispenserait d'un débat avec les défenseurs des droits de l'homme sur le fait que ce texte, du fait de son caractère très flou, va permettre la répression des mouvements sociaux.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 16.
Puis la Commission adopte l'article 2 sans modification.
Article 3 (art. 222-12, 222-13, 311-4, 312-2, 322-3, 431-4 et 431-5 du code pénal ; art. 398-1 du code de procédure pénale) : Instauration d'une circonstance aggravante pour dissimulation volontaire de tout ou partie du visage afin d'échapper à toute identification :
La Commission examine l'amendement de suppression CL 17 de Mme Delphine Batho.
Il s'agit de l'article sur les « cagoules », problème dont je maintiens qu'il ne résulte pas du développement de la vidéosurveillance. En réalité, la présence de casseurs cagoulés dans une manifestation n'est pas récente. Au demeurant, il faudrait parler aussi des capuches, qu'on met et qu'on enlève très rapidement.
Vous nous proposez de créer une circonstance aggravante, faute de pouvoir, comme cela avait été annoncé dans les médias, interdire la cagoule dans les manifestations. Là encore, votre formulation – « une personne dissimulant en tout ou partie son visage » – va devoir être interprétée par le juge. Par ailleurs, la notion même de circonstance aggravante pose problème : jusqu'à présent, son utilisation était liée à la vulnérabilité de la victime ou à la qualité de l'auteur, mais ce n'est pas le cas ici. La dégradation, la violence ou le vol serait-il moins grave s'il est commis le visage découvert que s'il est commis le visage en partie dissimulé ? Et que je sache, on n'a pas fait une circonstance aggravante du port de gants lors d'un cambriolage.
Cet article risque d'avoir un puissant effet pervers, le développement du port de cagoule en signe de défi.
Nous avons utilisé une formulation générique, sans faire référence aux cagoules. Le sujet a fait l'unanimité des syndicats de police que nous avons rencontrés. Le choix d'instaurer cette circonstance aggravante est motivé par trois raisons. D'abord, la dissimulation volontaire du visage par une personne qui commet une infraction indique clairement son intention délictueuse. Ensuite, elle complique fortement le travail des enquêteurs et de la justice. Enfin, elle contribue à impressionner les victimes et peut aggraver leur traumatisme. Avis défavorable donc, bien entendu, à cet amendement.
Pardon de vous contredire, mais dans leurs contributions écrites, les organisations syndicales de policiers indiquent clairement qu'à leurs yeux, non seulement cet article n'est pas utile, mais qu'il est pernicieux : actuellement, la cagoule est un signe distinctif qui les aide, à l'issue d'une manifestation qui a dégénéré, à repérer les casseurs.
L'Union syndicale des magistrats, pour sa part, a émis des réserves lorsque vous l'avez auditionnée sur la formulation retenue. Qu'est-ce que « dissimuler » ? Et que dire du mot « volontairement » ? Mettre ses cheveux devant son visage, est-ce le dissimuler volontairement ? Par ailleurs vous indiquez dans votre exposé des motifs, monsieur le rapporteur, qu'il « appartiendra au juge de qualifier » la dissimulation, alors que c'est la loi qui devrait le faire.
Enfin, il existe en Allemagne une loi qui interdit à des individus de « prendre part à une manifestation dans un accoutrement ou avec des ustensiles à même d'empêcher que soit constatée leur identité ». Ce dispositif analogue à celui que vous nous proposez n'est pas appliqué, parce qu'il n'est pas applicable.
Comment comprendre qu'il soit plus grave de casser une vitrine si on porte une cagoule ? Serait-ce une circonstance atténuante de commettre un délit le visage découvert ?
Dans le même ordre d'idées, pourquoi considérer que le port d'une cagoule est une circonstance aggravante pour nombre de délits, mais qu'il ne l'est pas pour un viol ?
Monsieur Urvoas, vous faites référence à la loi fédérale du 18 juillet 1985, laquelle crée une infraction spécifique, alors que nous proposons pour notre part d'instaurer une circonstance aggravante. Je ne peux pas vous laisser dire que ce dispositif est inefficace alors qu'il a largement contribué au déroulement pacifique des manifestations en Allemagne. J'ai fait mon travail de rapporteur et me suis renseigné sur l'application de la loi allemande. Très récemment, le 1er mai dernier lors du « défilé révolutionnaire » organisé à Berlin dans le quartier de Brenzberg, la manifestation a rapidement dégénéré en émeute, un « black block » de 1 500 personnes s'étant rapidement formé en tête de manifestation. Sur le fondement de la loi de 1985 notamment ce sont quelque 289 personnes qui ont été interpellées ! Cette loi est appliquée et elle fonctionne.
J'aimerais, monsieur le rapporteur, que d'ici à la séance publique, vous vous procuriez des informations sur le nombre de condamnations prononcées à ce titre en Allemagne. Vous verrez que ce que j'ai dit était fondé.
La Commission rejette l'amendement CL 17.
Elle adopte l'amendement de cohérence CL 47 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 3 ainsi modifié.
Après l'article 3
La Commission examine l'amendement CL 41 de M. Dominique Tian.
Merci de m'accueillir dans votre commission.
Mon amendement vise à rendre applicables à l'escroquerie organisée l'ensemble des procédures et moyens d'investigation applicables à la criminalité et la délinquance organisées. La loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance avait, par un amendement voté à l'unanimité des groupes politiques avec avis favorable du Gouvernement, fait entrer l'escroquerie commise en bande organisée dans le champ de la délinquance organisée. Assez étrangement, la loi du 13 novembre 2007 relative à la lutte contre la corruption a abrogé cette disposition et créé dans le code de procédure pénale un article qui fait figurer le délit d'escroquerie en bande organisée parmi ceux qui justifient des procédures particulières mais restreint les moyens d'investigation. Après consultation des magistrats et des policiers, je propose de revenir au dispositif efficace institué en mars 2007.
Je suis au regret d'exprimer un avis défavorable. Cet amendement vise, en revenant sur un vote récent, à rendre les procédures d'enquête spécifiques à la criminalité organisée applicables à une infraction de nature essentiellement financière, l'escroquerie en bande organisée. Or pour ce genre de délit, en vertu du principe de proportionnalité, la garde à vue de quatre jours et les perquisitions de nuit ne sont pas justifiées. Les autres procédures propres à la criminalité organisée s'appliquent en revanche, en vertu de l'article 706-1-3 du code de procédure pénale.
La Commission rejette l'amendement CL 41.
Elle examine ensuite l'amendement CL 39 de M. Dominique Tian.
Il s'agit ici de la mise sous tutelle des prestations familiales. Je propose de donner au procureur, lorsqu'un mineur a fait l'objet de deux condamnations définitives pour des infractions pénales, la faculté d'ordonner que les prestations familiales soient versées à une personne qualifiée pour les gérer.
Avis défavorable, d'autant que les dispositifs de prévention de la délinquance prévoient déjà la possibilité de suspendre les allocations familiales, notamment dans le cadre du contrat de responsabilité parentale – même si je vous concède que celui-ci est fort peu mis en oeuvre. Ce que vous proposez serait difficile à mettre en application, au regard des moyens dont la justice dispose pour le suivi de l'exécution des décisions de justice.
Cet amendement est d'autant plus scandaleux qu'il vise « l'ensemble des prestations familiales perçues par le foyer », et non pas seulement celles qui concernent le mineur en question.
On part de l'idée que la famille est toujours complice du mineur, ce qui est loin d'être toujours vrai. Ce faisant, on risque de provoquer un effet pervers, en provoquant effectivement une réaction de solidarité. Par ailleurs, les tutelles de prestations familiales existent déjà.
Pour ma part, je n'ai pas de réserve sur le fond, mais j'en ai au sujet de la procédure : le mineur aura souvent eu le temps de devenir majeur avant que le dispositif soit applicable…
La mise sous tutelle des prestations familiales existe déjà. Elle est mise en oeuvre directement par le juge pour enfants et permet à un tiers de se substituer aux parents.
Je souligne qu'il ne s'agit pas de priver la famille des prestations, mais de confier à une autre autorité le soin de les gérer. L'objectif est éducatif.
Tout le monde est d'accord pour responsabiliser les parents, mais je ne suis pas sûre de l'efficacité de telles mesures. Il faudrait surtout se pencher sur divers problèmes de société – travail précaire, travail du dimanche, femmes élevant seules leurs enfants. Par ailleurs, s'il est vrai que certains parents n'assument pas leurs responsabilités, il faut se préoccuper aussi des parents qui sont victimes du comportement violent de leurs enfants : il y en a de plus en plus ; on ne saurait les sanctionner alors qu'ils sont victimes.
Sur le fond, j'ai toujours défendu la position de Dominique Tian, mais je lui propose de retirer son amendement afin que nous fassions ensemble une évaluation de ce qui existe déjà, avant, le cas échéant, qu'il en dépose un avant la séance publique pour compléter le dispositif actuel.
Je ne comprends pas très bien ce qui rattache cet amendement à un texte visant à renforcer la lutte contre les violences de groupe.
M. Dominique Tian retire son amendement CL 39.
Article 4 (art. 15-4 [nouveau] du code de procédure pénale) : Enregistrement audiovisuel des interventions de la police et de la gendarmerie :
La Commission examine l'amendement CL 19 de Mme Delphine Batho.
Il me paraît important que les enregistrements audiovisuels effectués par les services de police et de gendarmerie soient versés à la procédure systématiquement, et non pas sous certaines conditions.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 19.
Elle est saisie de l'amendement CL 48 du rapporteur, rendant facultatif le versement de l'enregistrement à la procédure.
La Commission adopte l'amendement CL 48.
La révision constitutionnelle doit conduire au développement d'un véritable travail de fond en commission.
La Commission est saisie de l'amendement CL 20 de Mme Delphine Batho.
Je reviens toutefois sur l'amendement CL 48. Il inverse la logique de la proposition de loi en transformant une obligation en possibilité, ce qui aurait pu justifier un débat. S'agissant de l'amendement CL 20, nous proposons de supprimer le troisième alinéa de cet article, qui est un « copier-coller » des dispositions sur l'enregistrement audiovisuel de la garde à vue alors que les situations ne sont pas comparables.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 20.
Elle adopte successivement l'amendement CL 49 du rapporteur, qui corrige une erreur matérielle, et l'amendement CL 50 du rapporteur, qui apporte une précision.
Elle examine l'amendement CL 21 de Mme Delphine Batho.
Nous proposons que les enregistrements non suivis d'une procédure judiciaire soient conservés non pas un mois, mais trois mois, afin de pouvoir être éventuellement utilisés dans une autre procédure.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 21.
Elle examine l'amendement CL 22 de Mme Delphine Batho.
Nous proposons de supprimer le cinquième alinéa de l'article, qui est également copié sur la disposition concernant l'enregistrement audiovisuel de gardes à vue. Vise-t-on ici, par exemple, la personne qui aurait filmé l'intervention de la police avec son téléphone portable ?
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 22.
Elle examine l'amendement CL 23 de Mme Delphine Batho.
Nous proposons que le procureur de la République puisse autoriser la diffusion d'un enregistrement afin d'éviter la propagation de rumeurs et la contagion de violences urbaines.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 23.
Elle examine l'amendement CL 24 de Mme Delphine Batho.
Il faut éviter de favoriser une utilisation à géométrie variable des enregistrements. C'est le sens de cet amendement, qui vise à corriger la rédaction du sixième alinéa.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 24.
Elle examine l'amendement CL 25 de Mme Delphine Batho.
Nous proposons, s'agissant d'un domaine qui touche aux libertés publiques, de renvoyer à un décret en Conseil d'État les modalités d'application de l'article.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 25.
Puis elle adopte l'article 4 ainsi modifié.
Après l'article 4
La Commission examine l'amendement CL 18 de Mme Delphine Batho.
Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les résultats des expérimentations en cours sur les caméras embarquées dans les véhicules et les caméras individuelles portatives dont peuvent être équipés les policiers, ainsi que sur le coût prévisionnel de la généralisation envisagée.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 18.
Article additionnel après l'article 4 (art. L. 126-1-1 du code de la construction et de l'habitation) : Raccordement des forces de l'ordre aux systèmes de vidéosurveillance des bailleurs :
La Commission est saisie de l'amendement CL 52 du rapporteur.
Je me suis expliqué dans mon intervention liminaire. Cet amendement vise à permettre le raccordement des forces de police et de gendarmerie nationales ainsi que, le cas échéant, des agents de police municipale sur les systèmes de vidéoprotection mis en place par les bailleurs. Il ne s'agit pas de permettre aux forces de l'ordre d'exercer une quelconque surveillance des parties communes mais, une fois qu'elles ont été alertées par les propriétaires ou leurs représentants, lorsque les circonstances l'exigent, de leur donner accès en temps réel aux images fournies par ces systèmes privés afin de mieux préparer leur intervention éventuelle sur les lieux.
La commission adopte l'amendement CL 52.
Article additionnel après l'article 4 (art. L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation) : Délit d'occupation abusive des halls d'immeubles :
La Commission examine ensuite l'amendement CL 37 de M. Philippe Goujon.
Je propose, au premier alinéa de l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation, de remplacer le mot « entravant » par le mot « empêchant » : une meilleure définition du délit d'attroupement dans les halls d'immeuble permettrait sans doute que cette disposition soit mieux appliquée par les tribunaux.
Avis très favorable. Cela devrait en effet conduire les magistrats à davantage appliquer le dispositif relatif aux halls d'immeuble.
L'entrave étant définie, en droit, comme le fait d'empêcher, je ne comprends pas ce qu'apporte cet amendement.
L'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation, issu de la loi pour la sécurité intérieure de 2003, vise l'entrave apportée de manière délibérée à l'accès et à la libre circulation des personnes ou au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté. Le rapport du Conseil national des villes sur la non-application de cette infraction explique que le problème ne vient pas de la notion d'entrave, mais de celle d'acte délibéré. Il n'est donc pas réglé par cet amendement.
La Commission adopte l'amendement CL 37.
Article additionnel après l'article 4 (art. L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation) : Instauration d'une peine complémentaire de TIG pour occupation abusive de halls d'immeuble :
La Commission est saisie de l'amendement CL 51 du rapporteur.
Il me paraît nécessaire que le juge puisse imposer aux auteurs de délits d'occupation abusive de halls d'immeubles d'effectuer un travail d'intérêt général.
Ces amendements reviennent sur les dispositions inapplicables qui ont été adoptées il y a quelques années, mais loin de régler les problèmes, ils ne font que semer de nouvelles illusions.
La Commission adopte l'amendement CL 51.
Après l'article 4
Puis elle examine l'amendement CL 40 de M. Dominique Tian.
Parfois, les dealers créent, pour le besoin de leur trafic, des sanctuaires où il est impossible de pénétrer. Il faut donc faire en sorte que les enquêteurs puissent travailler efficacement.
Cet amendement est satisfait par la combinaison de l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation et de l'article L. 222-14-2 du code pénal.
La Commission rejette l'amendement CL 40.
Elle examine l'amendement CL 38 de M. Philippe Goujon.
Un certain nombre de bailleurs sociaux ont constitué des groupements d'intérêt économique qui recrutent des agents de sécurité. Ceux-ci, confrontés à des bandes violentes, peuvent avoir besoin d'être dotés d'armes défensives. Je propose qu'ils puissent être autorisés à en porter une par l'autorité préfectorale, à l'issue d'une formation et lorsqu'il existe des risques particuliers d'agression.
C'est un sujet délicat. Si vous acceptiez de retirer votre amendement, nous pourrions l'approfondir d'ici au débat en séance publique.
M. Philippe Goujon retire l'amendement CL 38.
Article additionnel après l'article 4 (art. 312-12-2 [nouveau] du code pénal) : Délit de vente forcée dans les lieux publics :
La Commission est saisie de l'amendement CL 53 du rapporteur visant à réprimer la vente forcée dans les lieux publics.
Cet amendement n'a pas davantage de lien avec la proposition de loi que ceux de nos amendements qui ont été qualifiés de « cavaliers » ! Quel est le rapport entre la vente à la sauvette et les bandes violentes ?
La Commission adopte l'amendement CL 53.
Chapitre II
Dispositions renforçant la protection des personnes travaillant dans les établissements d'enseignement scolaire
Avant l'article 5
La Commission est saisie de l'amendement CL 26 de Mme Sandrine Mazetier.
Mme Sandrine Mazetier. Si l'on entend véritablement « sanctuariser » les établissements scolaires, le mieux est d'associer la communauté éducative à l'élaboration des mesures tendant à prévenir les violences. C'est ce que nous proposons dans cet amendement, inspiré de la loi sur le dialogue social et la continuité du service public du 21 août 2007.
Le énième plan de lutte contre les violences scolaires qu'on nous annonce n'a fait l'objet d'aucune concertation. Il ne s'agit pas d'un problème formel car l'efficacité de la lutte contre les violences scolaires dépend de l'implication de la communauté éducative. Cet amendement n'est donc pas du tout hors sujet.
La Commission rejette l'amendement CL 26.
Article 5 (art. 221-4, 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 du code pénal) : Circonstance aggravante pour violences commises, en raison de leur fonction, sur les personnels des établissements d'enseignement scolaire ou sur leurs proches :
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL 54 du rapporteur.
Elle est saisie de l'amendement CL 27 de Mme Delphine Batho.
On a aggravé les peines encourues pour les atteintes physiques portées aux proches, mais dans la pratique on nous parle surtout des atteintes aux biens, pour lesquelles il est donc logique de faire de même.
C'est un très bon amendement, à la condition qu'il ne vise que les personnes visées au 3° de l'article.
La Commission adopte à l'unanimité l'amendement CL 27 ainsi rectifié.
Puis elle adopte l'amendement de cohérence CL 55 présenté par le rapporteur.
Elle adopte enfin l'article 5 ainsi modifié.
Après l'article 5
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement de coordination CL 29 de Mme Delphine Batho.
Puis elle est saisie de l'amendement CL 30 de Mme Sandrine Mazetier.
Les proviseurs de lycées et les principaux de collèges témoignent que les violences se produisent surtout aux abords immédiats des établissements. Or les services de police font état de l'insuffisance de leurs effectifs pour assurer les rondes qui seraient nécessaires aux heures de sortie. Nous avons besoin de savoir si c'est exact. C'est pourquoi nous demandons qu'un rapport sur les dispositions prises pour assurer la sécurité des élèves et des personnels des établissements aux abords de ceux-ci soit transmis au Parlement avant le 31 décembre 2009.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 30.
Elle est saisie de l'amendement CL 31 de Mme Delphine Batho.
Non, M. le Président, il n'est pas possible de travailler ainsi. Je souhaite que la discussion conserve la sérénité nécessaire et je souhaite défendre l'amendement CL 31. 24 300 postes de surveillants ayant été supprimés depuis la rentrée 2003 dans les établissements d'enseignement, nous demandons au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport pour dresser un état des lieux de l'encadrement des élèves et de la spécialisation des personnels en vue de la création d'un nouveau corps de surveillants.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 31.
Article 6 (art. 311-4, 312-2, 222-12 et 222-13 du code pénal) : Instauration d'une circonstance aggravante pour vols et extorsions commis dans les établissements d'enseignement scolaire ou à leur proximité immédiate - Extension de la circonstance aggravante pour violences aux personnes commises dans ces mêmes lieux :
La Commission adopte l'amendement de coordination CL 56 présenté par le rapporteur.
Puis elle est saisie de l'amendement CL 32 de Mme Delphine Batho.
En visant les « établissements d'enseignement scolaire », vous excluez d'autres types d'établissement. Je vous propose de retenir la formule « établissements d'enseignement ou d'éducation ».
Vous soulevez un problème réel. Je vous invite à retirer cet amendement afin que nous puissions en reparler avant la séance publique.
Mme Delphine Batho retire l'amendement CL 32.
La Commission adopte l'amendement de coordination CL 57 présenté par le rapporteur.
Elle adopte ensuite l'article 6 ainsi modifié.
Après l'article 6
La Commission est saisie de l'amendement CL 28 de Mme Sandrine Mazetier.
Nous proposons d'insérer dans le code de l'éducation un article rappelant que l'État doit assurer la sécurité des élèves et du personnel des établissements d'enseignement primaire et secondaire aux abords de ces établissements.
En l'état, j'émets un avis défavorable à cet amendement, mais je vous invite à le retirer afin de le retravailler.
Mme Sandrine Mazetier retire l'amendement CL 28.
Article 7 (art. 431-22 à 431-27 [nouveaux] du code pénal) : Correctionnalisation de l'intrusion injustifiée dans un établissement d'enseignement scolaire :
La Commission est saisie de l'amendement de suppression CL 33 présenté par Mme Delphine Batho.
Lorsque l'intrusion dans l'établissement ne s'accompagne d'aucune atteinte aux personnes ou aux biens, il est souhaitable d'en rester à la contravention prévue à l'article R. 645-12 du code pénal. L'idée d'en faire un délit suscite une très grande inquiétude, notamment parmi les parents car ils craignent d'être poursuivis. On peut se demander aussi si cette disposition ne risque pas de s'appliquer à l'occasion de certains mouvements sociaux, telle l'occupation de leur établissement par des lycéens en grève.
C'est au règlement intérieur de chaque établissement, et non à la loi, de fixer les conditions d'accès à l'établissement. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement CL 33.
Elle est saisie de l'amendement CL 34 de Mme Delphine Batho.
L'intrusion est constituée par le fait de pénétrer dans l'enceinte de l'établissement scolaire. Il est donc nécessaire de supprimer les mots : « ou de se maintenir », dont on notera qu'ils ont été introduits très récemment dans l'article R. 645-12 du code pénal – plus précisément, en décembre 2008, à la suite de la mobilisation lycéenne. Introduire cette mention dans la loi, c'est viser délibérément les lycéens qui, lors de mobilisations, occupent leur établissement.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 34.
Elle est saisie de l'amendement CL 35 de Mme Delphine Batho.
Nous proposons de remplacer l'expression « les autorités compétentes », qui n'est pas explicite, par les mots « les directeurs d'école ou d'établissement ».
Il est bien préférable d'utiliser un terme générique car il permet de viser l'autorité qui convient selon les circonstances.
La Commission rejette l'amendement CL 35.
Elle est saisie de l'amendement CL 36 de Mme Delphine Batho.
Il vise à supprimer la double peine, qui refait son apparition aux treizième et quatorzième alinéas de cet article.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 36.
Elle est saisie de l'amendement CL 58 du rapporteur.
Il ne serait pas compréhensible de sanctionner l'intrusion dans un établissement scolaire mais de ne pas sanctionner le fait, pour un élève, d'introduire une arme dans l'établissement. L'amendement comble donc cette lacune du texte.
Le port d'armes de première et quatrième catégories est d'ores et déjà puni d'une peine de cinq ans d'emprisonnement, et le port d'armes de sixième catégorie, d'une peine de trois ans d'emprisonnement. Est-il nécessaire d'aller plus loin ?
Je m'étonne par ailleurs que cet amendement aboutisse à distinguer le fait d'entrer dans l'établissement avec un couteau et celui d'utiliser un couteau de la cantine pour agresser quelqu'un.
Il est assez révélateur que vous ne parliez des élèves qu'à propos des armes qu'ils pourraient introduire dans un établissement. J'observe d'ailleurs que, notamment dans les lycées professionnels, beaucoup d'objets peuvent devenir des armes. Enfin, j'insiste comme Delphine Batho sur les plus de 20 000 postes de surveillants qui ont disparu.
Nous visons dans cet amendement les armes au sens du code pénal, y compris les armes par destination, sans référence à la classification du code de la défense. La mention importante est le port d'une arme « sans motif légitime ».
Dans la pratique, votre texte ne peut pas viser les armes par destination. Le tournevis que l'élève a dans sa poche ne devient une arme que s'il l'utilise comme telle.
La Commission adopte l'amendement CL 58.
Puis elle adopte l'article 7 ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 7 (art. 398-1 et 837 du code de procédure pénale) : Coordination :
La Commission adopte l'amendement de coordination CL 59 présenté par le rapporteur.
Article 8 : Application de la loi outre-mer :
La Commission adopte cet article sans modification.
En quatre heures et demie de discussion, nous avons réussi à faire accepter un amendement. Sur beaucoup de points, nous n'avons pas obtenu de réponse, ce qui est la preuve d'un certain amateurisme sur le plan juridique. En l'état, ce texte ne nous paraît pas efficace, et nous voterons donc contre. Qu'il soit cependant noté que nous avons approuvé l'article 5 protégeant les enseignants. Nous aurions pu approuver l'article 4 sur l'enregistrement audiovisuel si nos observations avaient été entendues et si, paradoxalement, l'esprit initial du texte du rapporteur avait été respecté. Nous regrettons que nos propositions n'aient pas été retenues à l'article 1er. Enfin, les articles 2 et 3 nous inspirent de fortes craintes, notamment quant à leur possible utilisation contre des mouvements de contestation sociale.
La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.
La séance est levée à 21 heures 50.