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Séance en hémicycle du 1er mars 2012 à 9h30

Résumé de la séance

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La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

L'ordre du jour appelle la discussion, selon la procédure d'examen simplifiée, en application de l'article 103 du règlement, de quatre projets de loi autorisant l'approbation de conventions et accords internationaux (nos 3660, 4417 ; 4080, 4419 ; 3666, 4418 ; 3711, 4357).

Ces textes n'ayant fait l'objet d'aucun amendement, je mets directement aux voix l'article unique de chacun d'entre eux, en application de l'article 106 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Le groupe GDR vote contre.

(L'article unique du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (4365).

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur de la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Madame la présidente, monsieur le ministre de la fonction publique, mes chers collègues, nous examinons le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

Je ne rappellerai pas, à ce stade, les enjeux multiples que recouvre le présent texte et que nous avons tous à l'esprit. Avant de revenir brièvement sur les principaux apports des lectures au Sénat et à l'Assemblée, tout en détaillant ceux de la réunion de la commission mixte paritaire du jeudi 16 février dernier, je tiens à souligner combien, sur le sujet essentiel de la transposition dans la loi du protocole d'accord du 31 mars 2011, comme sur de nombreux autres sujets, le Sénat et l'Assemblée ont oeuvré de concert, travaillant dans un même état d'esprit, afin que puisse être appliqué aussi rapidement que possible ce texte important pour l'avenir de nos fonctions publiques.

En première lecture, le Sénat avait, dans une large mesure, conforté l'économie générale du projet de loi, ajustant, sur quelques points ciblés, les modalités d'application. Il l'avait également assez substantiellement enrichi en ajoutant 40 nouveaux articles, portant ainsi leur nombre total à 103. L'Assemblée a prolongé ces travaux en les confirmant très souvent : à l'issue de la lecture à l'Assemblée, le texte comportait 137 articles. Pour la réunion de la commission mixte paritaire, 71 restaient en discussion.

En ce qui concerne le dispositif d'accès à l'emploi titulaire, le Sénat avait procédé à plusieurs ajustements et ajouts dont nous ne pouvons que nous féliciter et que la commission mixte paritaire a confirmés.

Le second titre, dédié à l'encadrement des cas de recours aux agents contractuels, avait également, pour l'essentiel, été approuvé par le Sénat – qui avait même assoupli encore les modalités d'accès au contrat à durée indéterminée – puis par l'Assemblée.

La commission mixte paritaire a également approuvé ces dispositions sauf sur un point : l'insertion, à l'Assemblée, d'un article additionnel 32 bis A, consacré au statut des chercheurs contractuels. La commission mixte paritaire a préféré supprimer cet article, jugeant que la réflexion devait être poursuivie.

Le Sénat avait, contre la lettre du protocole d'accord du 31 mars 2011, doublé la durée maximale de renouvellement des contrats conclus pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans la fonction publique territoriale, en la portant à quatre ans. L'Assemblée avait rétabli, sur ce point, le texte du projet de loi initial, et la commission mixte paritaire a expressément validé cette durée qui reste dès lors fixée à deux ans.

Le Sénat s'était par ailleurs prononcé en faveur de l'institution de commissions consultatives paritaires pour les contractuels des collectivités territoriales – mesure approuvée par l'Assemblée –, ainsi que d'un document équivalent au registre unique du personnel des entreprises pour la fonction publique. Cette dernière initiative avait été supprimée par l'Assemblée, non pour des raisons de fond, mais pour prendre en compte les discussions menées avec les partenaires sociaux. Ces choix ont également été confirmés par la commission mixte paritaire.

Pour ce qui est des dispositions relatives au recrutement et à la mobilité, le Sénat avait notamment clarifié le statut des agents de la direction générale de la sécurité extérieure et relevé de trois à quatre ans la durée de validité des listes d'aptitude dans la fonction publique territoriale. L'Assemblée avait préféré, sur ce dernier point, retenir la rédaction initiale du projet, choix que n'a pas remis en cause la commission mixte paritaire.

S'agissant de l'évolution du statut des membres du Conseil d'État et du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, le Sénat avait procédé à plusieurs ajouts. Je citerai notamment l'institution de la qualité de maître des requêtes en service extraordinaire, la création d'emplois de premier vice-président dans les tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ou encore l'ouverture de la possibilité d'un renforcement ponctuel et immédiat des effectifs d'un tribunal administratif.

L'Assemblée, tout en conservant très largement ces apports, avait effectué deux ajustements : d'une part en rendant facultative, conformément au projet de loi initial, une deuxième nomination annuelle au grade de maître des requêtes d'un membre de tribunal administratif ou de cour administrative d'appel ; d'autre part en revenant sur la possibilité d'une intégration annuelle au Conseil d'État d'un maître des requêtes en service extraordinaire.

La commission mixte paritaire a retenu l'un de ces deux ajustements, à savoir le caractère facultatif de la deuxième nomination annuelle. En revanche, elle s'est prononcée en faveur de la possibilité d'une intégration annuelle au Conseil d'État d'un maître des requêtes en service extraordinaire.

Pour ce qui concerne l'évolution du statut des membres de la Cour des comptes et du corps des chambres régionales des comptes, le Sénat avait complété ces dispositions par plusieurs articles additionnels visant, d'une part, à proroger le dispositif de recrutement des chambres régionales des comptes et, d'autre part, à introduire dans le texte certaines dispositions similaires à celles que notre commission des lois avait adoptées dans le cadre du projet de loi portant réforme des juridictions financières.

Là aussi, l'Assemblée avait validé l'essentiel des mesures adoptées – à l'exception de la modification du régime des nominations des conseillers référendaires au tour extérieur, qu'elle n'avait pas jugé nécessaire –, tout en procédant à quelques ajouts, en particulier pour favoriser la création d'emplois de vice-présidents des plus grandes chambres régionales des comptes.

L'Assemblée était aussi revenue sur deux précisions apportées par le Sénat au statut des experts auprès de la Cour des comptes, à savoir les deux mentions selon lesquelles ces experts sont dotés des mêmes prérogatives et soumis aux mêmes obligations que les membres de la Cour des comptes, d'une part, et bénéficient du titre de conseillers experts, d'autre part.

La commission mixte paritaire a validé la suppression par l'Assemblée de la modification des modalités de nomination des conseillers référendaires, tout en rétablissant les deux mentions précitées pour les conseillers experts. La commission mixte paritaire a en outre précisé les modalités d'affectation des magistrats des chambres régionales des comptes.

Le chapitre consacré au dialogue social avait été complété au Sénat par plusieurs mesures mettant en oeuvre les engagements pris par le Gouvernement à l'issue de la concertation avec les organisations syndicales de fonctionnaires ayant conduit à l'adoption du relevé de conclusions du 29 septembre 2011 relatif à la modernisation des droits et moyens syndicaux. La commission mixte paritaire a approuvé ces différents ajouts.

Le Sénat avait enfin assez substantiellement enrichi le volet de ce texte consacré à des dispositions diverses, en particulier en adoptant plusieurs articles destinés à assurer la mise en oeuvre de la réforme de l'encadrement supérieur ou encore à amorcer l'évolution des centres de gestion, dans la fonction publique territoriale.

L'Assemblée avait ensuite elle-même complété ce volet du texte en adoptant plusieurs mesures additionnelles, notamment de nombreuses dispositions sur l'égalité entre les femmes et les hommes, à l'initiative de Françoise Guégot et Marie-Jo Zimmermann ainsi que du Gouvernement, à commencer par un dispositif qui fera date, tendant à instituer des minima pour la nomination de femmes aux emplois de direction dans la fonction publique à des taux qui atteindront 40 % en 2018. Je salue, en la matière, l'implication personnelle du ministre.

L'Assemblée a également voté des dispositions essentielles pour l'avenir des centres de gestion de la fonction publique territoriale avec un dispositif qui, je crois, correspond à un véritable consensus dans chacune de nos deux assemblées : l'établissement d'un socle commun de compétences des centres de gestion à l'égard des collectivités non affiliées.

En outre, un amendement établissait un cadre juridique pour la mise en oeuvre du télétravail dans la fonction publique. Ce sujet m'est cher car essentiel pour l'évolution des relations de travail.

Enfin, plusieurs précisions avaient été apportées concernant les modalités du recrutement des agents contractuels de la fonction publique hospitalière.

La commission mixte paritaire a confirmé l'ensemble de ces ajouts, en assortissant d'une précision ce dernier volet du texte, de manière à mieux encadrer les nominations en surnombre, effectuées par le Centre national de gestion, des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et des directeurs de soins.

En conclusion, la commission mixte paritaire a donc permis, sur la plupart des points encore en débat entre les deux chambres, de trouver des réponses, ce dont on ne peut que se féliciter. Aussi, je vous invite bien sûr à adopter, comme l'a fait le Sénat la semaine dernière, le texte issu des délibérations de la commission mixte paritaire. Je salue le travail réalisé avec le cabinet du ministre et avec les administrateurs de la commission des lois. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, ainsi que j'ai eu l'occasion de le faire voilà quelques jours devant le Sénat, je tiens à saluer le travail réalisé par le Parlement à chacune des étapes de la procédure législative d'un projet de loi qui concernera très directement dans leur vie de tous les jours plusieurs dizaines de milliers d'agents de la fonction publique et qui marque une étape importante dans l'évolution de la place faite aux femmes dans la fonction publique.

Alors que ce texte ne comptait, dans sa version initiale, que 63 articles, celui qui vous est soumis en compte plus du double, avec, sur certains points, des dispositions nouvelles ambitieuses. Cette évolution du texte, importante, est le fruit d'un débat que je qualifie d'exemplaire entre les assemblées et le Gouvernement, un débat marqué par la volonté d'avancer ensemble sur de nombreux sujets concrets tout en recherchant les voies, sinon d'un consensus, du moins d'une convergence.

Je souhaite insister sur ce point car la qualité du texte doit également beaucoup au climat d'écoute et de dialogue qui a marqué nos débats. Je salue par conséquent le travail de votre commission des lois, en particulier celui de son président et le vôtre, monsieur le rapporteur, ainsi que celui de l'ensemble des porte-parole des groupes et des parlementaires qui se sont impliqués.

Avec ce texte, il s'agit d'abord de lutter contre la précarité dans la fonction publique, une précarité souvent méconnue de nos concitoyens mais qui frappe pourtant plusieurs dizaines de milliers d'agents contractuels engagés au quotidien au service du public, que ce soit dans nos administrations d'État, dans nos collectivités locales ou dans nos hôpitaux.

Nous adressons aujourd'hui à tous ces agents contractuels et, plus largement, à tous ceux qui concourent au service public, un signal fort de responsabilité, de justice et d'équité.

Conformément aux engagements pris en janvier 2010 par le Président de la République, nous apportons une réponse nouvelle à un phénomène ancien et récurrent, celui du recours à des agents contractuels employés sur la base de simples CDD reconduits d'année en année. À la différence des grands plans de titularisation passés – on en compte seize –, ce projet de loi répond à la précarité d'aujourd'hui tout en posant des règles pour empêcher qu'elle ne fasse demain son retour dans nos services publics.

Ce texte, fruit d'un dialogue social, est la traduction d'un protocole d'accord conclu le 31 mars dernier avec six des huit organisations syndicales représentatives de la fonction publique.

Il permettra aux agents publics en CDD d'accéder à un CDI dès lors qu'ils auront exercé pendant une durée minimale de six ans sur les huit dernières années.

Par ailleurs, nous allons ouvrir aux agents contractuels des voies d'accès spécifiques à l'emploi titulaire pendant une durée de quatre ans à compter de la publication de la loi, ce qui permettra de valoriser les acquis de l'expérience professionnelle. Ces deux mesures permettront ainsi de régler la situation des agents aujourd'hui en situation de précarité.

La grande nouveauté de ce dispositif tient au caractère automatique, à l'avenir, du mécanisme du passage de CDD en CDI : quelle que soit la catégorie dont il relève, tout agent en CDD occupant depuis plus de six ans un emploi répondant à un besoin permanent de son service se verra dorénavant proposer un CDI. C'est un changement profond en ce qui concerne la manière dont nous entendons lutter contre la précarité dans la fonction publique, c'est aussi un changement profond pour les agents directement concernés.

J'évoquerai également quelques sujets à propos desquels le texte établi par la commission mixte paritaire prolonge les débats qui ont eu lieu ici même en première lecture.

L'égalité professionnelle entre femmes et hommes, d'abord. Après qu'une négociation a été ouverte sur ce point avec les partenaires sociaux, l'examen du projet de loi a été, pour l'Assemblée nationale, l'occasion de prendre plusieurs séries de mesures extrêmement fortes et jusque-là inédites. À cet égard, je veux saluer l'engagement de la présidente de la délégation aux droits des femmes de votre assemblée, Marie-Jo Zimmermann, ainsi que celui de Mme Françoise Guégot, dans le sillage du rapport sur l'égalité professionnelle dans la fonction publique qu'elle avait remis au Président de la République voilà un an.

Le constat, chacun le connaît : alors que les femmes représentent 60 % des effectifs de la fonction publique, elles restent extrêmement minoritaires – parfois moins de 10 % – aux postes de direction. Afin de briser ce véritable plafond de verre, la commission mixte paritaire a suivi la position de l'Assemblée nationale en approuvant le principe de pourcentages de nominations, c'est-à-dire de quotas de femmes dans les nominations aux plus hautes responsabilités dans les trois versants de notre fonction publique. À l'image de la logique retenue par le législateur avec la loi dite Copé-Zimmermann, ces quotas évolueront dans le temps et progresseront au fil des années jusqu'à atteindre 40 % de nominations de femmes en 2018.

J'ai bien conscience, mesdames et messieurs les députés, du caractère contraignant de ces dispositions, que je n'hésite pas à qualifier de révolution dans la haute fonction publique. Si, une nouvelle fois, les pourcentages de nomination ne constituent pas la panacée, ils demeurent, à ce jour, le seul moyen à notre disposition pour avancer vraiment sur le terrain de l'égalité professionnelle femmes-hommes. Là où les circulaires ont échoué à faire changer les mentalités, il nous appartient désormais de prendre des mesures fortes et ambitieuses. C'est tout le sens du mécanisme qu'il vous est proposé d'inscrire à présent dans la loi de la République.

Les mesures figurant désormais dans le projet de loi permettront également une meilleure représentation de chacun des deux sexes dans les jurys de recrutement, dans les instances paritaires ou encore dans les conseils d'administration des établissements publics administratifs. La mise en oeuvre de ces mesures fera l'objet d'un suivi annuel.

Au final, le chapitre consacré à 1'égalité professionnelle est particulièrement riche et, encore une fois, ambitieux. C'est ainsi qu'y est inscrite l'obligation d'un rapport annuel public qui sera débattu devant le Conseil commun de la fonction publique, que j'ai installé le 31 janvier dernier. Ce rapport, qui fera l'état de l'évolution de la situation de l'égalité femmes-hommes, sera ensuite transmis au Parlement pour y faire également l'objet d'un débat.

En ce qui concerne le télétravail, je veux saluer votre action personnelle, monsieur le rapporteur. J'avais eu l'occasion de vous présenter un travail effectué par le conseil général de l'industrie sur ce sujet pour fixer des règles sur la mise en oeuvre du télétravail : caractère réversible, base de volontariat, limitation dans le temps pour éviter la désocialisation. C'est grâce à l'un de vos amendements que nous avons fixé le cadre législatif au sein duquel cette pratique pourra désormais se développer dans la fonction publique. Les expérimentations sont à cet égard prometteuses. Elles donnent satisfaction à ceux qui choisissent le télétravail pour faire mieux coïncider vie professionnelle et vie personnelle. C'est aussi une avancée pour l'ensemble des usagers du service public, qui ont tout à gagner d'une administration plus moderne, mieux organisée et donc plus en phase avec leurs attentes.

Nous avons également beaucoup avancé en ce qui concerne les centres de gestion de la fonction publique territoriale. Là aussi, la commission mixte paritaire a confirmé les termes du compromis qui avait été acté avec vous, et le président du centre national de gestion m'a fait part de sa satisfaction de voir évoluer le cadre législatif.

Une fois encore, je veux saluer l'esprit de consensus et de convergence qui a guidé nos travaux, qu'il s'agisse des mesures tendant à renforcer la mobilité des fonctionnaires, de la réforme, très attendue, de l'encadrement supérieur de la fonction publique territoriale, du statut des collaborateurs des groupes d'élus au sein des collectivités territoriales – sujet qui tenait à coeur à beaucoup de parlementaires, notamment au président de la commission des lois –, ou encore des dispositions relatives aux juridictions administratives et financières. Sur ce dernier sujet, malgré la très forte inflation qui a marqué le chapitre du projet de loi qui lui est consacré, je veux souligner que chacun a su faire évoluer ses positions de départ dans le sens d'un débat utile et constructif. Cela a été à l'honneur du Parlement et du Gouvernement.

Fruit d'un débat responsable et à bien des égards exemplaire, le texte établi par la commission mixte paritaire se caractérise par son équilibre, ce qui démontre que, sur des sujets concrets, la recherche de la convergence n'est en rien un frein à l'ambition. Le Gouvernement n'a souhaité revenir sur aucune des dispositions arrêtées, et c'est ainsi que je vous invite, mesdames et messieurs les députés, à adopter le projet de loi dans sa version issue des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, le ton patelin que vous affectez à la tribune doit toujours nous inciter à la prudence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous connaissons bien François Sauvadet : il vous ferait prendre des vessies pour des lanternes. (Sourires.)

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Quelle injustice !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pour juger, attendez le réquisitoire, monsieur le ministre.

Le sujet dont nous discutons est d'une importance capitale. Sur les 5,3 millions d'agents qu'emploient l'État, les collectivités territoriales et les hôpitaux, plus de 890 000 ne sont pas fonctionnaires. Ces non-titulaires représentent environ 20 % des effectifs de la fonction publique territoriale, 15 % de la fonction publique d'État et 16 % de la fonction publique hospitalière. Leur proportion n'a cessé d'augmenter, passant de 14,6 % en 1998 à 16,8 % en 2009. Il faut mettre à part les contrats aidés qui concernent plus de 112 500 salariés précaires sous contrats d'accompagnement dans l'emploi ou sous contrats dits d'avenir, pour lesquels l'obligation de formation n'est toujours pas respectée, en particulier par l'État.

Certes, l'emploi d'agents contractuels n'est pas en soi une anomalie. Cependant, les abus sont légion. Une étude récente de la direction générale de l'administration et de la fonction publique a montré que 45 % des non-titulaires employés dans la fonction publique d'État en 2003 y travaillaient encore en 2007, quatre ans après ; seulement un quart d'entre eux a changé de statut, essentiellement pour devenir titulaire. Une autre enquête a révélé qu'entre 6 % et 8 % des ingénieurs, techniciens, bibliothécaires et administratifs non titulaires ont une ancienneté supérieure à dix ans dans l'emploi précaire, qu'ils soient employés dans le cadre de CDD ou de vacations rémunérées à l'heure, au sein de l'enseignement supérieur et de la recherche publique.

Le texte est présenté comme consensuel, puisque négocié en amont. Cependant, nous déplorons que le Gouvernement ait profité de ce créneau pour le compléter par des mesures prises au débotté, sans consultation des partenaires sociaux. De sorte que nous votons aujourd'hui sur un texte qui ressemble davantage à une loi fourre-tout, sorte de voiture-balai de fin de mandat, comme le qualifiait La Gazette des communes, une référence s'il en est. Ainsi, au lieu de se concentrer sur la résorption de la précarité parmi les agents contractuels de la fonction publique, le texte contient désormais des dispositions afférentes aux juridictions administratives et financières, à l'encadrement supérieur territorial, aux droits et moyens syndicaux, à l'égalité hommes-femmes.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

C'est très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je vois, monsieur le ministre, que vous persévérez dans l'autosatisfaction, vous accordant des félicitations à vous-même à défaut de recevoir les miennes...

Avec toutes ces différentes dispositions, le texte perd ainsi en clarté et en cohérence, tant ces sujets auraient mérité des débats plus approfondis.

Je ne reviens pas sur le détail des dispositions du texte qui permettra à quelques dizaines de milliers de contractuels de se voir titularisés, et à près de 100 000 autres de voir leur CDD transformé en CDI.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je n'ai pas dit que ce n'était rien. Vous fonctionnez selon les principes du Moyen Âge : ou bien, ou bien. Moi, je suis dialecticien :…

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

À nous le Moyen Âge, à vous la préhistoire ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…je regarde la réalité dans sa globalité. Nous pesons, comme les balances de la justice. Vous n'êtes pas tout noir, monsieur Sauvadet,...

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Je vous remercie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…mais vous êtes loin d'être tout blanc.

Je me permettrai une remarque sur la possibilité de titularisation portée par ce texte : celle-ci est assortie de conditions si drastiques que ce projet laissera à leur précarité les plus précaires des précaires. En l'état, le dispositif proposé écarte les agents recrutés à titre temporaire et les contractuels à temps incomplet, majoritairement des femmes.

Vous vantiez, monsieur le ministre, les progrès que ce texte représente pour les femmes. Il laisse surtout beaucoup de femmes sur le carreau, premières victimes des procédures de recrutement abusives et de la précarité qui sévit dans la fonction publique.

Votre projet de loi laissera plus des deux tiers des agents précaires sur le bord de la route, sans réponse et sans solution. Et je ne parle même pas des enseignants vacataires, rémunérés à l'heure, souvent avec plusieurs mois de retard, sur la base d'un taux horaire inchangé depuis 1989, comme le rappelait le Médiateur de la République en 2010. Rendez-vous compte, le même taux horaire depuis plus de vingt ans ! On ne peut pas en dire autant des rémunérations de vos amis actionnaires et des grands patrons.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

Il y avait longtemps qu'on avait entendu parler du CAC 40 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur Mallié, dès qu'on dénonce vos amis et vos copains, vous levez les bras au ciel. Heureusement qu'il y a quelqu'un dans cet hémicycle pour dire la vérité, quand bien même elle vous gêne !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

J'en reviens aux oubliés, comme les auxiliaires de vie scolaire dont les contrats, comme tant d'autres, ne sont pas renouvelés, au mépris de leur expérience et de leur investissement dans leur métier.

En vérité, ce texte porte davantage un plan de reconversion de l'emploi public en emploi contractuel qu'un plan de titularisation de la fonction publique, pour paraphraser le SNESUP. En banalisant le recours aux contrats à durée indéterminée, quand bien même ce projet serait un moindre mal, et même une avancée pour ceux des agents qui pourront prétendre être titularisés ou passer en CDI, c'est le statut…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Tout n'est pas reculade. Vous ne pouvez pas être seulement mauvais, même si c'est la dominante chez vous. C'est, disais-je, le statut de la fonction publique que vous mettez à mal. Il n'y a là rien d'étonnant : ce texte vient compléter l'entreprise de casse de la fonction publique que vous poursuivez depuis près de dix ans.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Allez donc voir ce qui se passe en Espagne, en Italie ou en Angleterre ! Vous verrez la différence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Limiter, comme vous l'avez fait, le champ des services publics constitue une véritable négation de la construction historico-sociale de notre pays et démontre le peu de cas que vous faites des demandes croissantes de nos concitoyens, des besoins nouveaux qui se font jour, de l'isolement et du sentiment d'abandon des territoires progressivement privés de leurs services publics.

À l'inverse, les députés du Front de gauche considèrent que les services publics sont aujourd'hui plus que jamais pertinents et utiles. Ils sont un véritable bouclier social.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Bien sûr que c'est idéologique. Défendre une idéologie prouve au moins une chose : que l'on a des idées,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…ce que tout le monde ne peut pas dire dans cet hémicycle.

Votre majorité n'a eu de cesse de fragiliser ce patrimoine social en organisant méticuleusement le transfert des missions de service public au privé. Cela passe notamment par l'importation dans la fonction publique de la culture d'entreprise et du management, comme vous le dites en français : on voudrait calquer sur le public les standards de performance et de rentabilité qui font prétendument leurs preuves dans le secteur privé. Autrefois, on recrutait des fonctionnaires ou assimilés, car les contractuels ont toujours existé, pour accomplir une mission de service public. Aujourd'hui, on embauche des contractuels précaires dans le simple but de flexibiliser les ressources humaines disponibles au sein des services.

Le résultat est désastreux, notamment dans la fonction publique territoriale, victime d'un double mouvement de décentralisation et de réduction des ressources des collectivités ; mais également dans la fonction publique hospitalière qui subit de plein fouet les effets combinés de la loi sur l'hôpital, de la RGPP,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…des coups de butoir du secteur hospitalier privé qui tente d'imposer la convergence tarifaire à son avantage, et des dispositions des lois de financement de la sécurité sociale, notamment des ONDAM particulièrement bas, sans parler de la situation catastrophique de l'éducation nationale. En dix ans, c'est cette majorité qui a sciemment organisé le démantèlement des services publics, et, partant, la précarisation d'un nombre croissant d'agents ou de contractuels.

Cette logique malmène dangereusement le principe d'indépendance du fonctionnaire qui vise à protéger l'agent public et le service d'intérêt général de l'arbitraire administratif, et qui est au fondement de la construction du service public en France.

En réalité, ce texte n'a que peu de chances de permettre de résorber l'emploi public précaire. Nous doutons d'ailleurs que ce soit là l'une de vos ambitions puisque pour avoir la moindre chance d'y parvenir, il nous faudrait sortir de la logique de la RGPP, de la volonté de réduction du nombre de fonctionnaires et de l'obsession pathologique...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

..du Gouvernement de baisse des dépenses publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous, monsieur Mallié, nous sommes obsédés par la défense du service public,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…et par l'obligation de rétablir la justice sociale que vous avez tellement violentée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cela imposera de passer à l'essoreuse les privilégiés et leurs coffres forts pour remettre dans le budget de l'État les ressources que vous en avez soustrait en faisant des cadeaux de plus en plus importants aux privilégiés dont la tartine est déjà largement beurrée,...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Et en remboursant ces cadeaux avec la TVA sociale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Heureusement, vos électeurs ne vous voient pas ; ou plutôt, vous avez tort de penser qu'ils ne vous voient pas, parce qu'ils se préparent à vous donner un coup de pied aux fesses lors des échéances à venir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il est sûr que comparé à M. Mallié, c'est un homme très sérieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi sur les contractuels de la fonction publique a considérablement évolué depuis le début de nos débats. Son objet s'est élargi, son volume a augmenté. Le projet du Gouvernement comptait soixante-trois articles. Le Sénat en a ajouté quarante, l'Assemblée nationale trente-quatre. Quant à la CMP, elle s'est prononcée sur les soixante et onze articles qui restaient en navette.

Ces ajouts successifs n'ont en rien dénaturé le coeur du texte consacré à la résorption de la précarité. Il aurait été mal venu que le Parlement s'engage dans cette voie, puisque la rédaction qui nous était soumise reprenait les termes d'un accord conclu entre le Gouvernement et la quasi-totalité des organisations syndicales. Lorsque le dialogue social progresse, il n'appartient pas au Parlement d'en remettre en cause les conclusions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

C'est pourtant ce que vous faites dans le transport aérien et pour les comités d'entreprise !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Les amendements adoptés par l'Assemblée nationale et le Sénat ont en fait porté, pour l'essentiel, sur des sujets qui n'avaient pas été initialement prévus dans le texte. Il en va ainsi, et c'est l'innovation principale, de la parité dans les emplois supérieurs des trois fonctions publiques.

Je tiens à féliciter une fois encore le Gouvernement pour son initiative. Il était en effet profondément anormal voire choquant de constater que si les femmes représentent 60 % des emplois de la fonction publique, elles n'occupent que 10 % des postes de responsabilité.

Il ne suffit pas de déplorer cette situation. Il faut la corriger. Les bonnes intentions, les recommandations n'y suffisent pas. Les hommes étant ce qu'ils sont, il faut des règles, et il faut que ces règles soient contraignantes. S'engager dans cette voie, c'était accepter de se livrer au débat traditionnel sur les quotas et sur leur compatibilité avec l'égalité républicaine. Ce débat, nous l'avons eu et nous en avons conclu que si les quotas ne constituent pas, dans l'idéal, la meilleure réponse, ils sont, dans les faits, la seule solution.

Désormais les choses sont claires : en 2018, aucun des deux sexes ne pourra s'arroger plus de 60 % des postes de responsabilité dans chacun des corps des trois fonctions publiques. C'est une avancée majeure. Si cette petite révolution, voire cette révolution tout court comme l'a qualifiée le ministre tout à l'heure, suscite aujourd'hui encore, ici et là, quelques interrogations, j'ai la conviction que demain plus personne n'en contestera ni la légitimité, ni l'efficacité. C'est un grand pas en avant, notre majorité peut être fière de l'avoir accompli.

Sans entrer dans le détail du travail parlementaire, je tiens à saluer le travail conduit par les deux co-rapporteurs de la commission mixte paritaire, Mme Catherine Tasca pour le Sénat et notre collègue Pierre Morel-A-L'Huissier pour l'Assemblée nationale. Ils se sont attachés à proposer des solutions communes sur les points qui restaient en discussion, ce qui devrait nous permettre aujourd'hui d'arriver à un large consensus.

J'ai toutefois un regret, c'est que la commission mixte paritaire ait écarté les mesures prévues à l'initiative du Gouvernement pour les conventions de recherche. L'idée était pourtant logique et séduisante : il s'agissait d'adapter la durée du contrat de recherche à la durée du projet, sans excéder la durée de neuf ans, et d'ouvrir ensuite une possibilité de passage sur un contrat à durée indéterminée. Si cette disposition avait été acceptée, tout le monde y aurait été gagnant : la recherche, qui aurait bénéficié d'un personnel plus stable, et les chercheurs, puisqu'ils auraient pu être recrutés pour une période plus longue que les trois ans qui constituent aujourd'hui la règle. Avec le vote de la CMP, c'est l'ensemble de ce dispositif qui est tombé. Personne n'a rien à y gagner. Comment ne pas le regretter ?

Pour le reste, ce texte est aussi pour la majorité présidentielle l'occasion de faire passer un message fort à tous les agents publics. Depuis cinq ans, nous leur avons imposé beaucoup de contraintes et demandé beaucoup d'efforts.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous le reconnaissez enfin ! Tout cela en plus sans beaucoup d'argent en échange !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Non seulement nous le reconnaissons, mais nous l'assumons.

Baisse des effectifs, blocage du point d'indice, maîtrise des budgets, modification des structures, regroupement des corps, modernisation des méthodes, généralisation de la gestion par objectif, évaluation régulière des politiques et des agents : pourquoi tant de changements ? Pourquoi tant de contraintes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Pas du tout !

Parce que, monsieur Brard, les collectivités publiques ne sont pas propriétaires de l'argent public ; parce que nos concitoyens attendent des résultats ; parce que la compétitivité de la maison France dans un monde ouvert exige que la puissance publique fasse elle-même autant d'efforts que le monde d'aujourd'hui en impose aux autres ; parce que ce qui nous paraît si nouveau en France se fait, parfois depuis longtemps, chez nos principaux voisins.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Tout cela, les agents publics l'ont compris, accepté et assumé. Il faut leur en donner acte. Comment ne pas relever le changement de ton des rapports annuels de la Cour des comptes ? Nous nous souvenons tous des exemples croustillants de gestion aberrante qui en amusaient quelques-uns, mais scandalisaient le plus grand nombre. Ces exemples sont aujourd'hui de plus en plus rares, et l'image de la fonction publique en sort incontestablement grandie. Là est peut-être l'apport le plus concret de l'action conduite dans ce domaine par notre majorité.

Le fait que le Gouvernement se soit attaqué aux iniquités qui marquaient la situation des contractuels les plus précaires montre que l'efficacité n'est pas sa seule préoccupation, que l'équité est également au coeur de son action. C'est pour toutes ces raisons, que le groupe UMP votera ce texte sans réserve. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme d'un débat législatif que je pourrais qualifier d'ordinaire si ce n'était l'importance du sujet traité, puisqu'il concerne plusieurs millions de personnes : l'ensemble des agents des services publics de l'État, des collectivités territoriales et du secteur hospitalier. Dans un instant, le texte que vous nous présentez et que vous soutenez, monsieur le ministre, au nom du Gouvernement, sera voté.

Ainsi que j'ai eu l'occasion de le faire à plusieurs reprises au cours de nos débats, je souhaite d'abord relativiser la référence à l'accord syndical sur lequel vous vous appuyez en permanence, semblant dire ainsi que puisqu'il y accord syndical, la loi est forcément bonne. Non : il y a accord syndical, mais sur un protocole signé entre les six organisations et le Gouvernement. Vous le savez bien en effet, lorsque votre prédécesseur l'a traduit en texte législatif, les organisations syndicales ont exprimé des réserves, voire des oppositions.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Mais non !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Mais si, monsieur le ministre, les faits sont là. Et ce n'est pas parce que vous répéterez à l'envi qu'il y a un accord et donc que la loi est bonne que cela deviendra une vérité. Bien entendu, cela ne retire rien à l'importance qu'il faut donner à cet accord syndical, et au fait que le dialogue social a bien fonctionné dans ce domaine. C'est si rare depuis cinq ans que lorsque cela arrive, il convient de le souligner.

Je voudrais aussi répéter mes regrets, mais la répétition fixe la notion,...

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

..que le Gouvernement ait retenu la procédure accélérée parce qu'il fallait passer ce texte avant la fin de la législature et la suspension des travaux du Parlement pour cause d'élections présidentielles puis législatives. On aurait pu s'y prendre plus tôt. Vous l'avez rappelé, l'accord salarial datait de mars 2011. Nous aurions donc pu aller plus vite. Mais vous avez enclenché la procédure accélérée, empêchant un débat parlementaire approfondi qui aurait permis de réelles avancées. C'est pour moi un regret de parlementaire, confronté à cette procédure qui est à la discrétion du Gouvernement. Une fois de plus, les travers de la Constitution de la Ve République de 1958 montrent leurs inconvénients pour la qualité du travail parlementaire.

Je voudrais aussi exprimer des regrets au regard des amendements que nous avions proposés lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, après que le Sénat eut travaillé sur ce texte. Je regrette ainsi que nos collègues de la majorité n'aient pas retenu tous ces amendements, même si le Gouvernement a eu le bon réflexe d'en reprendre un à son compte, qui tombait sous le coup de l'article 40 de la Constitution. Je veux vous en remercier, monsieur le ministre car cet amendement allait dans le bons sens.

Les contractuels ont leur place dans la fonction publique. La preuve en est que la loi de 1984 a prévu qu'il pourrait être fait appel à des agents qui disposeraient d'un contrat. Pour autant, cela ne signifie pas, et c'était la volonté du législateur en 1984, qu'il faille renoncer au statut de la fonction publique.

Je ne suis pas de ceux qui s'arc-boutent sur le statut et qui le considèrent comme quelque chose d'immuable. Il doit évoluer, il doit s'adapter, et il l'a fait à plusieurs reprises depuis sa création à la Libération.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

J'observe cependant que le Gouvernement ainsi que ses prédécesseurs depuis dix ans n'ont eu de cesse de s'en prendre à la fonction publique et de remettre en question telle ou telle disposition de ce statut, toujours dans le mauvais sens. Dernier élément en date : le jour de carence pour les fonctionnaires malades qui revient à leur faire payer une partie du déficit du régime général de la sécurité sociale et, surtout, du budget de l'État puisque les fonctionnaires y émargent.

Néanmoins, je veux souligner la qualité du travail accompli par la commission mixte paritaire, incontestablement due à celle de sa présidence, assurée par mon ami Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois du Sénat, mais aussi à l'ouverture d'esprit des deux rapporteurs, PierreMorel-A-L'Huissier, ici présent, et Catherine Tasca au Sénat.

Parmi les points d'accord qui ont pu être ainsi trouvés, on notera l'avancée que représentent les quotas – appelons-les par leur nom – et qui permettra à des personnes de sexe féminin – ou masculin, car les hommes peuvent également être concernés – d'être représentées. Vous n'ignorez cependant pas, monsieur le ministre, les problèmes qui surgiront dans les administrations et les corps où la féminisation des emplois dans certains et leur masculinisation dans d'autres peuvent être tels que la mise en oeuvre de la mécanique que vous proposez sera difficile. Il conviendra donc de travailler encore cette notion d'égalité entre les sexes dans les recrutements de la fonction publique.

Même si j'ai salué le travail de la commission mixte paritaire, j'ai émis des réserves sur ce qui avait été voté. Ce n'est donc pas un blanc-seing que je donne à la majorité et au rapporteur en particulier. Les insuffisances sont encore nombreuses. Jean-Pierre Brard a rappelé que le nombre de personnes qui pourront bénéficier de ces mesures sera faible, rapporté au nombre de personnes concernées par le statut d'agent contractuel.

En dépit de l'accord syndical, qui aurait pu conduire le Gouvernement à donner des instructions, j'observe que des préfets ont continué, jusqu'à ces derniers jours, à déférer devant les tribunaux administratifs des contrats renouvelés, alors même que ce renouvellement pouvait permettre à l'agent concerné d'entrer dans la période considérée par la loi.

J'observe aussi que les tribunaux administratifs – ils sont indépendants, il faut s'en réjouir – continuent de décider que des contrats ne peuvent être renouvelés car contraires à la loi – la loi ancienne s'entend. Il aurait été souhaitable que préfets et magistrats administratifs temporisent, jusqu'à ce que les nouvelles dispositions deviennent effectives. De nombreux agents ne pourront donc bénéficier de cette législation. Je trouve cela fort dommageable, et je souhaiterais que certains cas puissent faire l'objet d'une attention particulière dans les semaines et les mois qui viennent.

L'issue de cette commission mixte paritaire ne vous exonère pas pour autant, monsieur le ministre, mes chers collègues de la majorité, de tous les mauvais coups que vous avez portés à la fonction publique et aux services publics ces dix dernières années. Il suffit de considérer les conséquences désastreuses du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Le candidat sortant, d'ailleurs, ne reconnaissait-il pas ce matin dans une émission de radio qu'il fallait mettre fin à ce mécanisme…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

…dont les effets peuvent être négatifs ?

Les gouvernements successifs se sont attachés ces dernières années à souligner le coût de la fonction publique. La mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances à laquelle j'ai eu l'honneur d'appartenir, avec deux de mes collègues UMP, a pourtant conclu qu'il était difficile d'aller plus loin dans la limitation de cette masse salariale, sauf à remettre en cause la qualité du fonctionnement de nos services publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

Il faudrait commencer par le haut, pour élaguer !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

C'est dire, mes chers collègues, que la question est loin d'être réglée. La majorité qui sortira des urnes – qu'elle soit de droite ou de gauche, je ne veux pas vendre la peau de l'ours tant qu'il n'est pas dans le collimateur des électeurs – devra ouvrir ce grand chantier qu'est celui de la fonction publique et des services publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Pour ce qui nous concerne, nous sommes prêts à assumer la modernisation des services publics, avec, pour conséquence, celle du fonctionnement de notre fonction publique.

L'avancée d'aujourd'hui n'est qu'une petite étape dans une course qui est loin d'être terminée. Mais de la même façon que nous avions voté en faveur du texte en première lecture, nous voterons pour celui de la commission paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La discussion générale est close.

La parole est à M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Je souhaite répondre à quelques-unes des observations que les orateurs ont été amenés à faire au terme de ce débat.

Ce texte, certes, a fait l'objet d'une procédure accélérée. Mais nous étions placés devant un choix simple. Pour que ce texte ait une chance d'être adopté et puisse ainsi apporter une réponse aux dizaines de milliers de personnes qui l'attendaient, il nous fallait employer cette procédure.

Vous l'avez vous-même noté, je n'ai ménagé aucun effort pour rapprocher les points de vue entre le Sénat et l'Assemblée nationale. Je renouvelle d'ailleurs mes remerciements à Catherine Tasca et à PierreMorel-A-L'Huissier, qui ont pleinement joué ce rôle de concertation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

La médaille du 1er mai pour ces honnêtes travailleurs !

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Le Gouvernement ne peut que se réjouir de cette méthode consensuelle, j'ose le mot…

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

… qui nous permettra de voter avec une très large majorité ce projet de loi. Je remercie aussi les parlementaires qui ont beaucoup oeuvré pour son adoption.

Ce texte est la traduction fidèle d'un accord, signé par six des huit organisations syndicales. D'aucuns ont pu noter l'inflation du texte, d'autres ont souligné son côté « patchwork », mais l'enrichissement dont il a fait l'objet était souhaité par tous.

Les chambres y ont d'ailleurs largement contribué puisque, comme le rappelait M. Diefenbacher, une quarantaine d'articles d'initiative parlementaire ont été ajoutés au Sénat et plus d'une trentaine à l'Assemblée nationale.

On ne peut reprocher à la fois au Gouvernement de ne pas entendre le Parlement et d'avoir été trop à son écoute ! Nous avons souhaité le dialogue, et s'il s'est révélé vigoureux, il était tendu vers un seul objectif, apporter des réponses à la fonction publique – en allant même au-delà s'agissant, par exemple, des juridictions financières. Qui se plaindra de l'avancée relative aux centres de gestion, souhaitée sur tous les bancs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Mais certaines de nos propositions n'ont pas été retenues !

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

On ne peut regretter en parlant d'inflation ce que nous avons tous ensemble contribué à bâtir. Cela correspond en tout cas à ma conception de l'action gouvernementale, un gouvernement à l'écoute du Parlement.

Monsieur Brard, je vous ai trouvé très en forme ! J'ai envie de vous dire : « n'ayez pas peur ! ».

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Ne redoutez pas l'avenir, la réforme, le changement, surtout lorsque c'est pour aller vers un mieux.

Vous avez critiqué les termes d'un accord signé par six des huit organisations syndicales, dont la CGT, qui, elle, n'a pas craint de s'engager,...

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

..avec toute la vigilance, d'ailleurs, qu'on lui connaît.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

On peut se satisfaire, monsieur Brard, d'un discours de procureur. Pour ma part, je préfère faire avancer la justice sociale et adresser un signal à tous ceux qui attendaient ce texte pour voir leur situation évoluer au quotidien.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Je pense à ces 100 000 agents qui sortiront de l'enchaînement précaire des CDD et se verront offrir un CDI, ainsi qu'à ces 50 000 personnes qui bénéficieront de la valorisation des acquis de l'expérience, tout cela en visant l'objectif de maîtrise de la dépense publique, c'est-à-dire en évitant tout alourdissement financier dans un contexte dont personne ne peut s'exonérer.

Monsieur Brard, je me demande dans quel monde vous vivez.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Je comprends bien que votre regard, tourné vers le passé, soit une forme de nostalgie permanente, mais je vous invite à contempler l'avenir.

Lorsque vous avez parlé de « grande casse », j'ai eu le sentiment de revenir dans les années 1920 – le centralisme démocratique, la lutte des classes… Tout cela n'est pas sérieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

La lutte des classes, c'était au XIXe siècle !

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Laissez-moi, monsieur Brard, vous inviter à un exercice. Dans la situation de crise budgétaire que nous connaissons, nous avons la responsabilité…

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

…d'apporter des réponses pour ne pas laisser filer la dépense publique – sauf à en faire supporter les conséquences à nos enfants.

Je vous invite, monsieur Brard, à regarder ce qui s'est passé autour de nous : tous les pays ont réduit la dépense publique. En Italie, en Espagne, en Grèce, au Portugal, en Angleterre, on assiste à des baisses de traitements, à des baisses de pensions, à des licenciements secs dans la fonction publique !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

Nous avons intérêt à le faire, sinon, le pays va plonger.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Nous, nous avons adopté une méthode – pas celle de M. Bur –...

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

..qui vise à garantir la cohésion territoriale et sociale. À cet effet, nous avons besoin d'une fonction publique active, présente, au service du public. Il y a une forte aspiration à continuer d'assumer les missions régaliennes, c'est-à-dire qui relèvent de la responsabilité de l'État. Nous avons besoin de cette fonction publique confiante, dynamique et portée vers l'avenir.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Ne dites pas que nous nous livrons à une casse sociale. Franchement, nous avons joué gagnant-gagnant. Effectivement, nous avons demandé des efforts à la fonction publique, et nous continuerons de lui en demander, qu'il s'agisse de la recherche de l'efficience, de la culture de l'évaluation, de la fusion des corps, de l'ouverture de passerelles ou encore de la réduction de son périmètre. Cela était nécessaire, compte tenu de la très lourde charge financière qu'elle représente pour le pays, et parce qu'il faut sans cesse adapter le service public aux réalités.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

Nous sommes sur-administrés, en comparaison d'autres pays !

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Vous qui êtes un parlementaire chevronné, monsieur Brard, je vous invite à relire le rapport de la Cour des comptes. Le retour sur les économies réalisées n'a jamais été aussi important pour les agents eux-mêmes, pour leur permettre des évolutions de carrière.

Eh bien, je me réjouis de voir qu'un gouvernement a permis de mieux payer ses enseignants, que des perspectives de carrière ont été ouvertes, que des possibilités de mobilité sont offertes, que des parcours professionnels sont désormais garantis – y compris par des passages par le privé. Tel est l'enrichissement...

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

..que nous avons apporté à la fonction publique.

Celle-ci doit vivre pleinement avec son temps et répondre aux attentes du public car, n'oubliez jamais cela, monsieur Brard, la fonction publique n'agit pas pour elle-même, mais au service du public et des objectifs que l'État et les collectivités, pour son versant hospitalier, lui ont fixés. Beaucoup d'efforts ont été exigés, nous en demanderons encore.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Mais je veux que les fonctionnaires sachent que nous ne leur mentirons pas.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Quand j'entends un candidat déclarer qu'il va créer 65 000 postes à périmètre constant sans augmenter la charge, c'est un mensonge !

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

On ne dit pas la vérité aux fonctionnaires, on ne dit pas la vérité au pays. Aucun gouvernement ne s'apprête à augmenter le périmètre de la fonction publique.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Nous assumons en tout cas nos responsabilités.

Je veux dire à M. Diefenbacher que j'ai beaucoup apprécié les enrichissements qu'il a apportés au texte. Il a eu raison de noter qu'il faudrait revenir sur le passage du CDD au CDI dans le secteur de la recherche, question pour laquelle nous n'avons pas réussi à trouver une convergence. Il conviendra de faire coïncider justice et possibilité de conduire des contrats de recherche.

Monsieur Derosier, j'ai écouté avec attention vos observations. Vous avez dit que l'accord n'avait pas trouvé son prolongement dans le projet de loi. Je vous rappelle que le Gouvernement a pris ses responsabilités en étendant, à la satisfaction des syndicats, l'accord aux contrats « 10-12 »,...

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

..ces contrats aux termes desquels des enseignants étaient recrutés dix mois avant d'être licenciés, puis recrutés et licenciés à nouveau dans les mêmes conditions, cela pendant des années.

Pour le reste, je me réjouis que vous souteniez ce texte qui, effectivement, contient des avancées. Lorsque tel est le cas, il est à l'honneur d'un Parlement de se rassembler et d'adresser ensemble un même signal.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Nous sommes pour le rassemblement ! (Sourires)

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Mais ne renonçons pas, monsieur Derosier, aux efforts de maîtrise budgétaire. Cela est incontournable. Les gouvernements de demain, quels qu'ils soient, auront l'obligation de réduire la dépense publique car son niveau est devenu insupportable.

La réforme ne se fera pas contre, mais avec les agents publics. Jamais autant qu'aujourd'hui nous leur avons offert de telles perspectives d'évolution de carrière. Rien ne serait plus désespérant que de leur dire de dormir tranquille car tout va s'arranger avec le retour de la croissance. Ce serait une faute que de le leur laisser croire et ce ne serait pas un service à rendre à la fonction publique que d'avoir en son sein des agents qui se reposeraient uniquement sur leur ancienneté pour assurer leur carrière. Nous avons voulu leur offrir d'autres perspectives,…

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

… des parcours professionnels, une mobilité.

Les réformes que nous avons engagées sont utiles à la France. Si les agents publics, qui exercent un métier particulier, doivent se sentir soutenus, ils ne peuvent s'exonérer des efforts qui sont demandés à l'ensemble de la population française. C'est ce langage de vérité, de justice et d'équité que nous avons tenu avec ce texte. Je remercie tous ceux qui le soutiendront. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour une explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, je vous remercie, d'avoir fait référence à mon intervention. Cela prouve qu'elle était bonne. (Sourires.) Cependant, avant de préciser quel sera notre vote, puisque je ne l'ai pas fait à la fin de mon intervention, permettez que je vous réponde.

Il n'y a plus d'argent dans les caisses, avez-vous dit. Évidemment, vous les avez vidées ! Le problème, ce n'est pas de continuer à les siphonner comme vous le faites, mais à les remplir en restituant à la ressource publique les prélèvements que vous avez opérés au bénéfice …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…des actionnaires, des plus riches et des grandes sociétés. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Franchement, il n'a pas tort ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est de leur part l'hommage du vice à la vertu.

Vous ne pouvez pas, monsieur le ministre, vous prévaloir des turpitudes de M. Monti, de Sainte Angèle de Germanie et de quelques autres pour justifier les vôtres ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Nous, nous faisons des choix : ce ne sont pas les vôtres.

Votre aplomb, monsieur le ministre, me fait penser à celui d'un sacristain (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP) …

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Vous êtes un spécialiste !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…qui, plein de componction avant de prononcer l'extrême-onction, parle d'enrichissement de la fonction publique après avoir appauvri les fonctionnaires ! Quelle est en effet la situation de nos écoles, de nos hôpitaux ?

L'avenir, ce n'est pas la réduction du nombre de fonctionnaires. Il faut des enseignants dans nos écoles, mais on ne peut pas en augmenter le nombre à effectif total constant, car cela signifierait réduire, par exemple, le nombre d'infirmières dans nos hôpitaux.

Debut de section - PermalienFrançois Sauvadet, ministre de la fonction publique

Il faut en parler à Hollande !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous venez de décider d'augmenter de 24 000 places le nombre de places dans les prisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Comment ferez-vous pour garder les prisonniers si vous ne créez pas de postes ?

La ligne de rupture ne passe pas entre les peuples, pas plus qu'elle ne passe entre les fonctionnaires et les salariés du privé. Elle passe entre ceux d'en haut et ceux d'en bas. Nous, nous sommes avec ceux d'en haut pour faire rendre gorge (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP)...ou plutôt, pour retourner mon propos,...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

..nous sommes pour accompagner ceux d'en haut jusqu'aux bureaux de la perception pour qu'ils rendent gorge, et que nous ayons les moyens de financer les politiques publiques que vous ne cessez de passer à l'essoreuse (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…au risque de remettre en cause le contrat social issu du Conseil national de la Résistance. Je sais que pour vous, ce sont des gros mots (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour nous, c'est l'héritage de la nation auquel nous sommes tant attachés,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… ce vieux contrat qui a été conclu dans les rangs de la Résistance sur la base du patriotisme et qui unissait, à l'époque, gaullistes et communistes, ces gaullistes que vous reniez aujourd'hui et que nous sommes fiers de défendre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Même si nous ne partageons pas toutes leurs idées, nous leur reconnaissons, à eux, la foi dans la nation, cette foi que vous avez abandonnée et trahie aujourd'hui. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Le groupe GDR s'abstient. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi tendant à faciliter l'organisation des manifestations sportives et culturelles (4403).

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La parole est à M. Éric Berdoati, rapporteur de la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Madame la présidente, monsieur le ministre des sports, mes chers collègues, trop peu de sujets, hélas, recueillent le consensus au sein de cet hémicycle. Le sport en fait heureusement partie. Le texte que j'ai l'honneur de rapporter aujourd'hui en offre l'illustration, puisque la commission mixte paritaire qui s'est réunie le 22 février dernier a, à l'unanimité, voté les compromis que moi-même et mon homologue du Sénat avions su trouver sur les articles restant en discussion.

Déposée le 24 janvier 2012 sur le Bureau de notre Assemblée, cette proposition de loi avait pour objet initial de remédier aux conséquences juridiques et matérielles, pour les forces vives du monde sportif, d'un revirement de jurisprudence de la Cour de cassation au sujet de la responsabilité civile du fait des choses, appliquée aux pratiquants d'activités sportives.

En vertu de la théorie des risques acceptés, reposant sur le présupposé que les sportifs sont au fait des risques normaux et prévisibles qu'ils encourent lorsqu'ils s'adonnent à leur discipline, les juridictions judiciaires privilégiaient jusqu'alors la responsabilité pour faute sur le droit commun pour la réparation des dommages causés par une chose placée sous la garde d'un pratiquant. Or en soumettant, le 4 novembre 2010, le droit applicable aux dispositions du premier alinéa de l'article 1384 du code civil, la Cour de cassation a ouvert la voie à de sérieux inconvénients.

Tout d'abord, à une exposition plus forte des organisateurs d'événements sportifs et de compétitions, ainsi que des fédérations sportives, au contentieux de la responsabilité civile délictuelle ;

Corrélativement, à un renchérissement du coût des primes d'assurance pour les organisateurs d'événements sportifs et de compétitions à risques, ainsi que pour les fédérations de sports faisant intervenir des choses potentiellement dangereuses ;

Enfin, à des incertitudes juridiques quant à la pérennité de spécificités importantes du droit du sport, s'agissant notamment de la théorie de la garde en commun ou de l'exigence d'une faute caractérisée pour l'appréciation de la responsabilité des sportifs.

Grâce à l'article 1er de ce texte, les pratiquants sportifs se verront désormais exonérés de la responsabilité de plein droit, lorsque la chose dont ils ont la garde a provoqué, dans un lieu réservé à la pratique sportive, un dommage matériel à l'encontre d'un autre pratiquant.

Le Sénat n'a pas contesté le bien-fondé de notre démarche, même s'il a souhaité en restreindre quelque peu la portée aux manifestations sportives et aux entraînements. Un compromis s'est finalement dégagé sur ce point.

Au cours de la première lecture, notre Assemblée avait également souhaité compléter le texte par un second volet présentant un lien certes connexe, mais pas inexistant, avec l'objet initial de la proposition de loi. La promulgation de la loi n° 2012-158 du 1er février 2012 visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs ayant créé une inégalité de traitement juridique entre la sanction de la revente illicite des titres d'accès à des manifestations sportives et l'inexistence de sanction pour la revente illicite de billets de manifestations culturelles et commerciales ou de spectacles vivants, il avait été décidé d'unifier le droit applicable en la matière au sein du code pénal.

Les sénateurs nous ont rejoints dans cette volonté, en adoptant conforme l'article 2 qui punira de 15 000 euros d'amende – peine portée à 30 000 euros en cas de récidive – le fait de vendre, de fournir les moyens en vue de la vente ou d'exposer à la vente des titres d'accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant, de manière habituelle et sans l'autorisation du producteur, de l'organisateur ou du propriétaire des droits d'exploitation de cette manifestation ou de ce spectacle.

Au cours de ses travaux, le Sénat ne s'est pas contenté de préserver les grands équilibres du texte voté par notre Assemblée. Il a légitimement souhaité apporter des compléments sur plusieurs points qui, à l'exclusion d'un seul, ont été validés en commission mixte paritaire.

En premier lieu, le Sénat avait prévu que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er juillet 2013, un rapport élaboré en concertation avec le comité national olympique et sportif français, relatif aux enjeux et aux perspectives d'évolution du régime de responsabilité civile en matière sportive.

Si la multiplication des rapports de l'exécutif au Parlement n'entre pas dans les orientations privilégiées au cours de cette XIIIe législature, il n'en demeure pas moins que, sur quelques sujets précis, l'information du législateur par le Gouvernement revêt un intérêt réel, notamment pour apprécier, dans la durée, les effets d'une réforme législative aux implications importantes. C'est le cas de la démarche retenue ici, qui présente l'avantage de retenir une échéance suffisamment éloignée pour que les éléments d'information transmis au Parlement soient étayés et pertinents et qui s'appuie sur une concertation avec le monde sportif, ce qui garantit davantage d'objectivité dans les conclusions qui seront présentées.

La commission mixte paritaire s'est donc logiquement rangée aux arguments du Sénat, mais elle a considéré que la concertation devait intervenir au préalable et ne pas se résumer au seul Comité national olympique et sportif français, les assureurs, les fédérations sportives et les pratiquants devant aussi avoir leur mot à dire.

En deuxième lieu, le Sénat a souhaité poser les bases juridiques du passeport biologique, afin de renforcer l'efficacité du suivi antidopage des sportifs. J'y suis moi-même fondamentalement favorable. Je m'étais retenu de prendre une telle initiative en première lecture en raison de certaines réticences manifestées par le monde sportif, notamment les petites fédérations, faute d'une véritable étude d'impact de la mesure, sur le plan financier notamment.

Une fois encore, la commission mixte paritaire s'est rangée à cette initiative, notamment en raison du choix raisonnable d'une entrée en vigueur différée au 1er juillet 2013, de manière à apaiser les craintes. Dans l'intervalle, un comité de préfiguration définira les modalités de mise en place du profil biologique des sportifs, et il remettra un rapport au Gouvernement et au Parlement, ce qui ne peut que convenir à notre Assemblée.

Le dernier ajout du Sénat était assurément le plus problématique. En effet, la majorité sénatoriale avait souhaité saisir l'opportunité de ce texte pour revenir sur la possibilité ouverte par la loi n° 2010-626 du 9 juin 2010 encadrant la profession d'agent sportif, au cocontractant d'un sportif ou d'un entraîneur – autrement dit, à chaque club de rémunérer l'agent sportif qui l'a mis en relation avec ce sportif ou cet entraîneur. L'on peut s'interroger sur les effets de cette réforme de 2010 à laquelle je n'ai pas pris part, puisque je n'étais pas encore député à l'époque.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est un état précaire, que celui de député ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

J'observe néanmoins que le sujet nécessite une réflexion d'ensemble et que certains aspects – notamment l'existence des agents de clubs, la situation particulière des avocats-agents, pour ne prendre que quelques exemples – n'avaient pas été pleinement pris en compte à l'occasion de l'adoption de cette disposition. C'était là, le seul véritable point d'achoppement entre notre assemblée et le Sénat sur ce texte et, il faut le reconnaître, la majorité sénatoriale ainsi que les députés SRC membres de la commission mixte paritaire ont, en responsabilité, accepté que cette disposition ne soit pas maintenue pour garantir l'aboutissement des autres dispositions très pertinentes inscrites dans la proposition de loi.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, les débats de la commission mixte paritaire ont été très constructifs et assez consensuels, ce qui me semble suffisamment rare pour être souligné. Le résultat auquel nous sommes parvenus, certes sur un ensemble de mesures ponctuelles mais symboliquement importantes, est à l'honneur du Parlement.

Je ne saurai donc que trop vous inviter à voter les conclusions de la commission mixte paritaire, en formant le voeu que le vote de notre Assemblée soit aussi consensuel que celui des membres de ladite commission.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir permis l'adoption de la proposition de loi tendant à faciliter l'organisation des manifestations sportives et culturelles, qui portait initialement sur la responsabilité des sportifs.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Je voudrais remercier en particulier l'auteur et rapporteur du texte, Éric Berdoati, qui a mené un important travail de concertation en commission mixte paritaire. Je me réjouis qu'un consensus ait pu être trouvé sur des questions aussi importantes pour le sport français.

La loi tendant à faciliter l'organisation des manifestations sportives et culturelles va permettre de régler une grande partie des problèmes d'assurance liés à l'arrêt de la Cour de cassation du 4 novembre 2010. Il faut rappeler que c'était le but premier de cette proposition de loi qui répondait à une difficulté réelle pour le mouvement sportif. En première lecture, l'orateur du groupe UMP, Jean-Pierre Door, avait notamment souligné les répercussions de cet arrêt sur les sports mécaniques. De nombreux sports comme le cyclisme, la voile ou les sports mécaniques étaient menacés du fait de l'explosion des primes d'assurance. Grâce à cette loi, leur avenir est assuré, avec tous leurs emplois associés.

La proposition de loi a été enrichie au Sénat d'une disposition relative à l'instauration du passeport biologique.

Le Gouvernement y a été favorable. J'ai toujours été très clair sur ma volonté de mener une lutte acharnée contre le dopage. J'avais d'ailleurs déjà demandé au député Éric Berdoati de mener un travail de concertation sur la mise en place du passeport biologique, en lien avec tous les acteurs concernés.

Il était important que la loi ne donne pas qu'une valeur juridique au passeport, mais permette de déboucher sur des sanctions. Je suis donc satisfait que la commission mixte paritaire ait permis d'aboutir à une rédaction précise sur la possibilité d'ouvrir une procédure disciplinaire.

Par ailleurs, le Gouvernement a tenu à compléter cette disposition en proposant la rédaction d'un rapport définissant les modalités de contrôle en lien avec le mouvement sportif. Sur un sujet aussi important, on ne peut pas avancer sans concertation avec l'ensemble du monde sportif.

C'est une position que j'ai défendue devant le Sénat lors de l'examen du texte. Je suis très satisfait que cet amendement ait également été retenu en commission mixte paritaire.

Enfin, cette proposition de loi permettra d'interdire la revente illégale de billets. Cette disposition a, dès le début, fait l'unanimité aussi bien à l'Assemblée nationale qu'au Sénat. Je tiens à remercier tous les députés qui, comme Muriel Marland-Militello, l'ont défendue.

Je peux vous dire qu'avec le ministre de la culture, Frédéric Mitterrand, nous avons reçu de nombreux témoignages de satisfaction de la part du monde du sport et aussi du monde de la culture.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Mesdames et messieurs les députés, je me réjouis que, depuis mon arrivée au ministère des sports, deux propositions de loi sur le sport aient pu être adoptées. Toutes deux constituent des avancées majeures, rendues possibles grâce à votre soutien et à votre engagement.

Je tiens à vous en remercier très chaleureusement et très sincèrement. J'espère qu'ensemble, nous aurons encore d'autres occasions de défendre le sport français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Dans la discussion générale, la parole est à M. Pascal Deguilhem.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, ce n'est pas parce que nous avons donné notre accord lors de l'examen du texte en commission mixte paritaire que cela nous dispense d'une explication de texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Nous avons dit à plusieurs reprises, en commission et dans l'hémicycle, combien les conditions d'examen de ce texte en première lecture avaient été désagréables. Vous n'y êtes pour rien, monsieur le rapporteur. Mais cette précipitation, sans réelle justification, nous a donné le sentiment de ne pas pouvoir bien faire notre travail de parlementaire.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Il y avait urgence !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Je ne sais pas s'il y avait véritablement urgence, monsieur le ministre.

Rappelons qu'initialement, cette proposition avait un intitulé différent : « Proposition de loi visant à modifier le régime de responsabilité civile du fait des choses des pratiquants sportifs sur les lieux réservés à la pratique sportive ». À cet égard, nous avions exprimé nos réserves : ce texte nous semblait davantage correspondre à un besoin d'affichage, en cette toute fin de législature, qu'à une approche aboutie permettant de résoudre le problème posé par les accidents occasionnés par la pratique sportive.

Rappelons également que l'origine de cette proposition de loi était de satisfaire une demande émanant des responsables du sport automobile, consécutivement à l'arrêt du 4 novembre 2010 de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation. Ce sont les seuls qui ont interpellé les législateurs à ce sujet.

Au cours de la première lecture dans cet hémicycle, a été ajouté un cavalier législatif permettant d'étendre les sanctions pénales, édictées à l'encontre des revendeurs de billets d'accès aux manifestations sportives, aux revendeurs de billets d'accès aux manifestations culturelles, commerciales et du spectacle vivant, ce qui est bien légitime. Bien qu'en total décalage avec l'objet du texte initial, cette disposition utile pour faire respecter un minimum de règles et de principes ne nous a pas paru poser problème.

S'agissant de la responsabilité civile, monsieur le ministre, vous n'avez pas voulu accepter notre amendement portant sur la reconnaissance de la responsabilité pour faute ou violations des règles du jeu, ce qui nous a conduits à ne pas voter le texte.

Si j'en crois un courrier du 9 février adressé au président de la fédération française de motocyclisme par son assureur-conseil, il semble bien que notre position était la plus raisonnable et la plus susceptible de répondre aux inquiétudes des fédérations concernées. Dans ce courrier, l'assureur, après avoir indiqué qu'il avait à maintes reprises évoqué les conséquences de ce revirement de jurisprudence, écrit : « Nous avions espoir qu'une nouvelle décision de la Cour de cassation, notamment de son assemblée plénière, puisse à nouveau infléchir la jurisprudence en la matière. Malheureusement, nous venons de découvrir que l'Assemblée nationale vient de prendre une disposition législative qui, si elle était confirmée par le Sénat, consacrera définitivement l'abandon de la théorie de l'acceptation des risques sur le plan des dommages corporels lorsqu'un licencié s'adonne délibérément, et en parfaite connaissance de causes, à un sport réputé dangereux ». Et le même assureur de souligner que son obligation de conseil le conduit à faire part des répercussions que cette évolution législative – que nous allons adopter aujourd'hui – ne manquera pas d'avoir sur les contrats d'assurance, s'agissant tout particulièrement de la garantie de responsabilité civile des licenciés. Il évoque ainsi tous les problèmes que nous avions nous-mêmes soulevés lors de la première lecture.

Le 21 février, nos collègues sénateurs ont à leur tour examiné ce texte, transformant son intitulé, de façon assez logique, en « proposition de loi tendant à faciliter l'organisation des manifestations sportives et culturelles ».

S'agissant de la question de la responsabilité, qui est au coeur même de ce texte, on ne peut pas dire que les deux modifications introduites par le Sénat régleront tous les problèmes liés à l'application de la responsabilité civile de droit commun en matière sportive. La modification de l'article 1er n'apporte qu'une précision en substituant les mots « dommages matériels » aux mots « dommages autres que corporels ». Il est peu probable que cela permette d'y voir plus clair, même si l'on peut comprendre que ce changement a été dicté par la recherche d'un nouvel équilibre permettant de maintenir les garanties pour les victimes tout en en évitant une explosion des primes d'assurance des fédérations ou des organisateurs, grâce à l'exclusion de l'indemnisation des dommages matériels.

Si j'en juge par les discussions que nous avons eues en sortant de la commission mixte paritaire, mes chers collègues, je crois que notre avis a été confirmé par une partie du mouvement sportif. Il nous semble – nous le vérifierons peut-être – que nous restons là dans une incertitude et une insécurité juridiques évidentes.

Certes, le Sénat a introduit un article 1er bis visant à ce que le Gouvernement demande un rapport au Parlement, élaboré en concertation avec le mouvement sportif et le Comité national olympique et sportif français, relatif aux enjeux et aux perspectives d'évolution du régime de responsabilité civile en matière sportive.

Je suis au regret de rappeler que si le Gouvernement avait lui-même déposé un texte, nous aurions pu disposer d'une étude d'impact.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Il est vrai que vous avez alors eu beau jeu, monsieur le rapporteur, d'expliquer votre retenue initiale en matière de passeport biologique par l'absence d'étude d'impact souhaitée notamment par les petites fédérations sportives ! Sachant que c'était un préalable nécessaire à un bon examen du texte, cela paraît inconcevable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

L'article 3, introduit au Sénat par notre collègue socialiste Jean-Jacques Lozach, a été adopté en CMP, ce dont nous nous en félicitons, bien entendu. Mais là encore, cela mérite une petite explication de texte.

Voilà quelques semaines, monsieur le ministre, lors de l'examen du texte sur l'éthique sportive, vous avez refusé la proposition des députés socialistes de mettre en place le profilage biologique, souhaitable pour avancer dans la lutte contre le dopage. Votre revirement est donc majeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il va nous expliquer que c'est lui qui a demandé sa mise en place !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Dois-je rappeler que vous expliquiez alors que la mise en place du passeport biologique risquait d'ouvrir trop tôt un champ pouvant être utilisé par les tricheurs, le dispositif n'étant pas tout à fait finalisé d'un point de vue scientifique et technique ? Il faut croire qu'en l'espace d'un mois, il y a eu des avancées scientifiques significatives pour que votre position évolue à ce point !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Vous avez souligné dans votre intervention que M. le rapporteur avait fait à ce sujet un important travail de concertation en commission mixte paritaire. Mais ce n'est pas là, monsieur le ministre, que doit se faire le travail de concertation, c'est au préalable, grâce à des auditions et à des rencontres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est un néophyte : il manque d'expérience et de connaissances !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Et il ne dispose en outre que de peu de temps pour se perfectionner !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Mais puisqu'il nous faut préserver la santé de nos sportifs, il faut dire que, bien sûr, le passeport biologique est une évolution indispensable qui replace notre pays à la pointe de la lutte contre le dopage, treize ans après la loi de Marie-George Buffet.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Avec cet outil, l'Agence française de lutte contre le dopage sera en mesure d'examiner l'évolution des paramètres suivis et de mettre en évidence, le cas échéant, des irrégularités. Ce sont bien les effets sur le sportif qui seront recherchés en premier lieu dans ce suivi, pas le produit dopant lui-même. Ce dispositif, qui concernera les sportifs de haut niveau, les espoirs, les professionnels, nous paraît satisfaisant.

Si une anomalie devait être détectée, un examen scientifique serait effectué par un comité comprenant trois experts. Le sportif sera en mesure de se défendre et une sanction ne pourra intervenir qu'en cas d'unanimité des experts présents.

Le délai de mise en place de ce passeport aurait pu être raccourci, mais on peut comprendre qu'il soit indispensable que le mouvement sportif participe pleinement à la phase préalable de concertation, et qu'un comité de préfiguration valide un protocole offrant toutes les garanties indispensables.

Reste que la lutte contre le dopage ne sera vraiment efficace que si elle dépasse les frontières nationales. Idéalement, il est indispensable que tous les grands pays européens, et pas seulement eux, adoptent les mêmes dispositions. Les compétitions sont internationales : les règles se doivent de l'être aussi.

Nous exprimerons donc notre accord en votant pour le texte de la commission mixte paritaire. Néanmoins, je veux répéter ici ce que j'ai dit lors de l'examen en CMP : si nous votons ce texte, ce n'est pas par adhésion à la rédaction de l'article 1er. Je souhaite me tromper sur ce point, mais je n'en suis pas certain ; en tout cas, les discussions que j'ai pu avoir avec certains dirigeants élus des fédérations et du monde sportif me laissent penser que nous pouvons ne pas nous tromper. En attendant, la rédaction de cet article me semble poser problème.

Si nous votons ce texte, c'est donc bien grâce à l'avancée qui s'est faite grâce à l'adoption d'un amendement proposé par les sénateurs socialistes, et qui a été confirmée ici même.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Bravo ! Heureusement qu'il y a les sénateurs socialistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Les sénateurs socialistes, par la voix de Jean-Jacques Lozach, ont ainsi réussi à faire adopter ce passeport biologique : ce que vous nous avez refusé il y a moins d'un mois, avec des arguments qui ne tenaient pas, vous l'acceptez aujourd'hui pour faire passer ce texte à la toute fin de la législature. Merci, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Deguilhem

Ce n'est pas une gymnastique ! Nous faisons aujourd'hui adopter un moyen important de lutter contre le dopage. Il était nécessaire, il était attendu par le monde sportif.

Nous pouvons nous féliciter d'avoir fait avancer, au sein d'une procédure législative un peu difficile, la lutte contre le dopage. C'est un progrès vers un sport plus sain et plus honnête, et pour cette raison, nous donnerons notre accord au texte de la CMP. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi visant à faciliter l'organisation des manifestations culturelles et sportives est un texte court, mais dont les enjeux méritent que l'on s'y attarde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Je me réjouis à cet égard de la convergence de vue de l'Assemblée et du Sénat lors de la commission mixte paritaire. Cela nous permet d'examiner aujourd'hui un texte consensuel, enrichi de manière substantielle lors de son passage dans chaque chambre et qui permettra de répondre avec pertinence à plusieurs problèmes clairement identifiés.

En ce qui concerne la responsabilité civile des pratiquants sportifs, objet initial de la proposition de loi, nous sommes arrivés à un compromis satisfaisant.

Alors que la jurisprudence avait initialement consacré la théorie de l'acceptation des risques en matière de responsabilité civile des sportifs, un arrêt de la Cour de Cassation du 4 novembre 2010 a opéré un revirement décisif en estimant que le régime de responsabilité pour faute qui en découlait n'était pas assez protecteur.

Rappelons que le juge considérait avant 2010 que les sportifs étaient conscients des risques qu'ils encourent en compétition et qu'ils devaient par conséquent les assumer. L'auteur du dommage était donc exonéré de la responsabilité de plein droit du fait des choses, posé au premier alinéa de l'article 1384 du code civil, et aucune indemnisation n'était prévue en cas de dommage. Pour être indemnisé, la victime devait prouver la faute du gardien de la chose.

En passant d'un régime de responsabilité pour faute à un régime de responsabilité sans faute, l'arrêt de la Cour de cassation a pris le parti des victimes de dommages corporels afin d'améliorer leur prise en charge, ce qui est un objectif à la fois légitime et juste. Mais ce faisant, la Cour a étendu l'obligation d'indemnisation aux dommages matériels, avec le risque, pour les fédérations des sports mécaniques, de subir une hausse massive de leurs primes d'assurance, voire de ne plus pouvoir s'assurer du tout.

L'article 1er de la proposition de loi a donc pour effet d'exonérer de la responsabilité sans faute les dommages matériels causés à un pratiquant à l'occasion d'une pratique sportive par une chose dont un autre pratiquant a la garde. La commission mixte paritaire a décidé d'y ajouter une condition supplémentaire défendue par le Sénat : ce régime d'exonération ne sera valable que dans le cadre d'une manifestation sportive ou d'un entraînement en vue de cette manifestation sportive, ce qui correspond d'ailleurs à l'esprit de la jurisprudence antérieure.

Ce nouvel équilibre permet d'alléger la contrainte assurantielle des fédérations et des organisateurs d'événements sportifs sans remettre en cause les avancées apportées par le juge en faveur des victimes de dommages corporels.

Pour anticiper les questions qui ne manqueront pas de se poser à l'avenir pour les accidents liés à un contact physique ou à un animal, la commission mixte paritaire a retenu la proposition du Sénat imposant au gouvernement de rendre, après concertation avec le Comité olympique et les parties concernées, un rapport sur les perspectives d'évolution en matière de responsabilité civile dans le domaine sportif.

Pour l'heure, nous pouvons donc respirer, les 24 Heures du Mans et le Tour de France ne seront pas touchés par l'arrêt de la Cour de Cassation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Par ailleurs, je l'ai dit, le texte s'est considérablement étoffé au cours de son examen.

À l'initiative de notre collègue Muriel Marland-Militello, de notre excellent rapporteur Éric Berdoati et de la présidente de la commission des affaires culturelles ; Michèle Tabarot,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

…l'Assemblée a étendu le délit pénal de revente des billets de manifestations sportives à la revente de billets de manifestations culturelles et commerciales.

Le vote conforme de cette disposition par nos collègues sénateurs montre bien qu'il existe un consensus pour lutter contre le second marché de la billetterie. La spéculation se fait au détriment de tous : les organisateurs doivent faire face à des doublons de place et gérer la présence aléatoire des spectateurs sans place définie ; quant aux spectateurs, ils sont les premières victimes de l'envolée des prix et de la difficulté d'accéder aux manifestations culturelles et sportives.

Deuxième ajout substantiel, le Sénat a souhaité introduire dans le texte la création du passeport biologique.

Le dispositif voté permettra à l'Agence française de lutte contre le dopage de mettre en place, à compter du 1er janvier 2013, le profilage biologique de certains sportifs de haut niveau à des fins de prévention et de contrôle. En cas d'évolution anormale des paramètres urinaires et sanguins, une procédure de contrôle à la fois ciblée et scientifiquement fiable pourra s'engager afin de détecter un éventuel recours à des produits dopants.

À votre demande, Monsieur le Ministre, puisque vous tenez avec raison à ce que la mise en place d'un passeport biologique soit irréprochable, un rapport sur ses modalités d'application devra être rendu au gouvernement et au Parlement dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la loi, au terme du processus d'information et de consultation des parties prenantes. Ce rapport, placé sous la responsabilité de l'AFLD, sera réalisé par un comité chargé de préfigurer le passeport biologique et bien sûr composé par vous, monsieur le ministre des sports.

La commission mixte paritaire a redéfini le volet « sanction » du passeport biologique, dans un souci d'équilibre et de précaution. En cas de mise en évidence du recours d'un sportif à une substance dopante, l'AFLD pourra saisir un comité d'experts composé de trois membres. C'est seulement si l'utilisation de produits dopants se voit confirmée à l'unanimité par ce comité que le sportif risquera des sanctions disciplinaires.

Je salue l'avancée que représente la création juridique du passeport biologique pour le monde du sport – pour la santé de nos sportifs, mais aussi pour le respect des valeurs du sport auxquelles nous sommes tous attachés.

Déjà pratiqué en Allemagne et en Suisse, le passeport biologique permet à la France d'entrer dans le peloton de tête des pays qui développent des outils volontaristes de lutte contre le dopage.

Enfin, la commission mixte paritaire a rejeté l'ajout par le Sénat d'une disposition relative aux agents sportifs. Les Sénateurs souhaitaient aller plus loin que les dispositions votées dans le texte relatif à l'éthique du sport, au motif que la mission de conseil de l'agent et des rémunérations qu'elle pouvait occasionner de la part des clubs avaient été laissées de côté. Les termes de l'article 6 ont été jugés inacceptables et insuffisants par la CMP ; il existe néanmoins un consensus pour rouvrir ce dossier dans le cadre d'une véritable concertation.

Mes chers collègues, je crois que nous avons réussi, en bonne intelligence – et je vous en remercie vivement, monsieur le ministre –, à transformer ce texte qui portait initialement sur la seule responsabilité civile des pratiquants sportifs en un véhicule législatif pertinent pour adopter des dispositions supplémentaires à la fois consensuelles et urgentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

En quelque sorte, vous avez réussi à transformer un véhicule automobile en véhicule législatif !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Ce texte porte de grandes avancées pour le monde du sport d'aujourd'hui et de demain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, le texte que vous nous soumettez est assez emblématique de la politique menée par le Gouvernement : c'est un texte sans ambition, juxtaposant une série de dispositions disparates. Il n'est pas au niveau de vos performances sportives ! (Sourires.)

Le texte portait à l'origine sur la responsabilité des fédérations pour la réparation des dommages matériels du fait des choses. Notre groupe avait souligné les graves limites de ce texte incomplet. Mais au lieu de palier ces limites en repensant le régime de responsabilité des sportifs dans son ensemble, il a été complété par des dispositions instaurant un passeport biologique en matière de lutte contre le dopage.

Chers collègues, cela est symptomatique d'une méthode politique qui consiste à ne faire des lois que pour satisfaire les groupes de pression. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous vous avons vus, et le fait que l'on vous voie agir, même derrière des rideaux de fumée, vous indispose !

Depuis une décennie, nous n'avons pas une seule fois eu l'occasion de nous prononcer sur une loi-cadre porteuse d'ambition pour le sport, d'une véritable vision d'ensemble capable de répondre aux besoins actuels et aux défis à venir.

C'est la marchandisation du sport qui a été le fil directeur des lois de circonstance et autres cavaliers qui se sont succédé : en dix ans, cette majorité aura réussi à faire de quelques grands clubs sportifs des machines à profit ; elle a encouragé le financement du sport par les jeux et paris en ligne ; elle a renforcé le pouvoir des clubs sur les joueurs ; elle a oeuvré au développement de la propriété privée des infrastructures, et l'a même encouragée en permettant à cette fin une contribution publique accrue.

Le texte que nous examinons pose une vraie question, une question de fond : celle de la responsabilité des sportifs, qui est l'une des composantes de l'accès à la pratique sportive dans de bonnes conditions, donc du droit au sport. Un tel texte méritait un débat approfondi et une grande concertation avec le mouvement sportif, pour déterminer tant les objectifs à se donner que les moyens nécessaires à une mise en oeuvre acceptable par tous les acteurs et actrices du sport.

Mais la procédure d'urgence a été engagée. Et quelle urgence, chers collègues ! Il s'agissait de répondre à une jurisprudence de 2010 qui jusque-là n'avait chagriné personne ; et c'est pour cela que les débats ont été abrégés et qu'aucune audition n'a été menée. Je passe sur les délais mêmes dans lesquels ce texte a dû être examiné par notre assemblée en première lecture, qui témoignent du mépris de cette majorité pour l'institution parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

La proposition de loi n'était même pas distribuée qu'elle était déjà discutée en séance !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

La méthode employée révèle, hélas, trop bien le contenu de ce texte, un texte qui ne vise pas à accroître les droits des sportifs, ni même à renforcer les missions de service public des fédérations, mais à départager les fédérations de Formule 1 et les écuries quant au paiement des primes d'assurance en cas de collision de véhicules. Notre collègue évoquait pudiquement les « sports mécaniques » mais il ne s'agit en fait que de la Formule 1.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Il n'y a plus de Formule 1 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On connaît, monsieur le ministre, les rapports sulfureux de la Formule 1 avec les journalistes, avec des séminaires d'études aux Seychelles par exemple. Ils pourraient justifier une commission d'enquête.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je suis informé en effet, et vous aussi ! Mais moi je le dis à la tribune quand vous le taisez, c'est la différence entre nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

C'est pire qu'au comité d'entreprise d'EDF !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est sans doute pour cela que cette majorité a tenu à inscrire ce texte dans la série des mesures régressives qu'elle tente par tous les moyens de faire adopter avant son départ prochain, en juin.

J'ai pris connaissance dans la presse, il y a quelques semaines, de votre rencontre, monsieur le ministre, avec la fédération internationale de Formule 1.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Il n'existe pas de fédération internationale de Formule 1.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous me corrigerez autant que vous le voudrez mais, avant, j'aimerais que vous écoutiez ce que je vais dire.

Il semble que vous ayez en fait négocié le retour d'un Grand prix dans notre pays…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…puisque ce texte dédouane de ses responsabilités financières cette richissime fédération. Avec les députés du Front de gauche, je soutiens bien évidemment le retour d'un Grand prix dans notre pays, mais pas à n'importe quel prix. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

L'un des arguments développés pour faire adopter ce texte consiste à dire que les fédérations n'auront pas les moyens de répondre aux nouvelles exigences posées par l'arrêt de 2010 de la Cour de cassation. En réalité, cette jurisprudence n'affecte qu'un petit nombre de fédérations et, dans le fond, elle ne consiste qu'en un transfert de charges. Les primes d'assurances payées par les pratiquants sont depuis lors mutualisées au niveau des fédérations. Une telle mutualisation est donc de nature à faire baisser le montant consolidé des primes d'assurances, et donc à réduire le coût global de la pratique sportive.

Votre argument ne tient donc pas, car l'augmentation éventuelle du coût de la licence provoquée par un surcroît du coût de l'assurance des fédérations sera inférieure au prix payé individuellement par les pratiquants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Et si la question du coût des licences se pose, ce n'est de toute manière pas en ces termes. Parler du coût des licences, c'est penser la mutualisation des richesses entrant dans certains sports pour garantir à chacune et à chacun son droit à la pratique sportive. C'est donc parler d'une augmentation de la taxe sur les droits audiovisuels créée par votre prédécesseur, monsieur le ministre, Marie-George Buffet, lorsqu'elle était ministre des sports.

Mais les droits des pratiquants ne sont pas l'objet de ce texte. D'ailleurs, les intérêts des pratiquants victimes des dommages en sont absents. En revenant à la théorie du risque accepté, on signifie au pratiquant qu'il est responsable des dommages qu'on lui cause. S'il ne peut en assumer le coût, il doit abandonner sa pratique. À cet égard, ce texte, fait sur mesure pour la Formule 1, pourrait avoir des conséquences désastreuses pour les pratiquants d'autres sports. Je pense par exemple au cas de lunettes brisées par un ballon de football. Si la somme nécessaire à l'indemnisation est faible pour une fédération, elle est importante pour une famille. Cela peut aboutir, pour une famille qui a peu de moyens, à la privation de la victime de ses droits à la fois au sport et à la santé.

De manière générale, il semble logique que les fédérations prennent en charge l'indemnisation des dommages intrinsèquement liés à la pratique sportive. Ces dommages sont, par nature, susceptibles d'intervenir de manière aléatoire. On ne peut donc en imputer la responsabilité ni à leur auteur, ni à la victime. Le seul régime possible est donc un régime de responsabilité sans faute, qui ne peut échoir qu'aux fédérations au titre de leur mission de service public, laquelle consiste à garantir l'accès à la pratique sportive et la sécurité des pratiquants.

Cela pose de manière claire la question des moyens des fédérations. La plupart d'entre elles, en raison de la trop faible mutualisation des richesses dans le sport et du désengagement de l'État…

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Ce n'est pas vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous expliquerez cela tout à l'heure pour que cela figure au Journal officiel, monsieur le ministre.

La plupart des fédérations n'ont pas les moyens d'assumer leurs missions de service public dans de bonnes conditions, elles manquent même cruellement de moyens.

Le débat sur le régime de responsabilité des sportifs doit nécessairement s'inscrire dans un débat sur le droit au sport de manière générale. Cette proposition de loi concède un rapport sur le régime de responsabilité. On sait bien ce que valent ces promesses de rapports dont on ne sait même pas s'ils verront le jour.

Ce vers quoi il faut se diriger, c'est vers une véritable concertation nationale, avec le mouvement sportif, les élus locaux, les parlementaires, le ministère des sports, sur l'avenir de notre modèle sportif, sur les conditions d'un nouveau partenariat entre l'État et les fédérations.

Ce grand débat devrait également aborder la question de l'éthique sportive et notamment de la lutte contre le dopage, second sujet de ce texte. La mise en oeuvre d'un profil biologique avait déjà été portée par le groupe SRC lors de l'examen de la proposition de loi sur l'éthique sportive qui vient d'être votée et qui comportait un chapitre complet dédié à la question. Mais la majorité a jugé qu'il n'était pas opportun de l'inscrire dans un tel texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Elle trouve plus judicieux de l'inscrire dans celui-ci, qui est sans rapport avec le sujet. Cela est regrettable.

La question du dopage est une question centrale et mon groupe se félicite en conséquence, malgré ces circonstances, de la mise en place de ce passeport biologique. L'affaire Contador, sur laquelle s'est récemment prononcé le tribunal arbitral du sport, montre la nécessité d'une véritable volonté politique pour venir à bout de cette pratique. La France, qui a été en pointe sur le sujet du temps de Marie-George Buffet…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…doit porter avec toujours plus de force l'exigence du renforcement de la lutte contre le dopage en Europe. Mais elle doit aussi se donner, sur notre territoire, les moyens de ses ambitions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Madame la présidente, je voudrais aller vers le terme de mon propos.

Les moyens alloués à la lutte contre le dopage diminuent alors qu'ils étaient déjà faibles. Monsieur le ministre, vous parlez du dopage comme de la fraude, comme des paradis fiscaux. Plus vous en parlez et moins vous faites.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

C'est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je vais vous donner les chiffres.

Le budget des commissions régionales de lutte contre le dopage a chuté de 2,6 millions d'euros à 240 000 euros entre 2010 et 2011. Aujourd'hui, il n'est plus que de 220 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Le budget de la recherche sur le dopage a été divisé par deux depuis 2010, passant de 470 000 à 230 000 euros. Le budget dédié au numéro vert d'écoute sur le dopage a, lui aussi, diminué.

Monsieur le ministre, on ne juge pas les hommes et les femmes politiques à ce qu'ils disent, mais à ce qu'ils font.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce que vous faites se traduit dans les chiffres que je viens de citer. Et vous ne pouvez pas me contredire…

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Je pense que c'est déjà fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…puisque ce sont vos chiffres. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Vous annoncez des chiffres, je vais, moi aussi, vous en donner, monsieur Brard.

Vous dites qu'il y a moins de moyens pour le sport français ? Je vais vous expliquer très concrètement ce qu'une mesure totalement démagogique d'un candidat socialiste à l'élection présidentielle va provoquer en termes de moyens pour le sport français : je veux parler de la taxation à hauteur de 75 % pour les revenus supérieurs à 1 million d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Mathis

Ce n'est pas 75 %, c'est 115 %, avec l'ISF et le reste.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Très clairement, cela va toucher entre 120 et 150 joueurs de football de la Ligue 1.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Le monde du football, la Ligue 1, et donc la Ligue 2 puisque tout cela est lié via les droits télé, va donc se casser la figure. M. Thiriez l'a dit : « Ce projet d'hypertaxation, ce sera la mort du foot français. »

Cela signifie que les 600 millions d'euros qui proviennent de la fiscalité du modèle économique du foot français disparaîtront, de même que les 5 % de la taxe Buffet dont vous parlez si souvent, puisqu'il n'y aura plus de droits télé.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Et n'oublions pas la perte représentée par le départ de nos concitoyens qui sont concernés par cette mesure et qui quitteront la France, instantanément, car ils en ont les moyens : c'est-à-dire que les 200 à 300 millions d'euros que cette mesure devrait rapporter n'existeront pas. Si l'on ajoute à cela les 600 millions d'euros liés à la fiscalité du foot français, nous arrivons déjà quasiment à un milliard d'euros.

Sans compter les conséquences sur les stades – c'est là où l'on voit le double langage de nos amis socialistes. Le stade de Lille, 300 millions d'euros, ou le stade Jean Boin à Paris, 200 millions d'euros, tout cela financé par de l'argent public, ne serviront plus à rien. Comment va faire le LOSC pour payer les 9 millions d'euros de loyer mensuel pour le stade de Lille ? J'aimerais bien le savoir.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Cette mesure électorale, totalement démagogique, tuera le sport français. Tous les prélèvements, toute la fiscalité inhérente à cette économie, et les millions de personnes qui aiment le foot en France, tout cela disparaîtra.

Alors, je veux bien écouter, je veux bien essayer de comprendre, mais qu'on ne me donne pas de leçon de chiffres.

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

Parce que là, pour le coup, les conséquences seraient irrémédiables et j'engage votre candidat de gauche à revoir à nouveau cette mesure…

Debut de section - PermalienDavid Douillet, ministre des sports

…comme il l'a fait pour les 60 000 postes dans l'éducation nationale, comme il l'a fait pour le nucléaire, comme il l'a fait pour les emplois aidés. À chaque fois, il dit quelque chose et il recule ensuite. Ce serait bien qu'il le fasse là aussi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

En complément de ce que vient de dire le ministre, je voudrais dire que je trouve quand même une utilité à cette proposition de François Hollande. En 2007, je ne sais pas si vous vous en souvenez, Yannick Noah avait annoncé qu'il quitterait le territoire national si Nicolas Sarkozy était élu Président de la République. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Eh bien, là, compte tenu des revenus qu'il perçoit, il aura une bonne raison de quitter le territoire national, si jamais, par malheur, la mesure de François Hollande était appliquée, parce qu'il serait directement impacté par cette mesure.

J'en reviens à la proposition de loi. J'ai écouté avec beaucoup d'attention l'intervention de notre collègue Deguilhem, d'abord parce que c'est un député de notre commission sérieux, travailleur et honnête.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Ce qu'il a dit est fondé, notamment sur le passeport biologique. Il a simplement omis de dire, et cette précision est importante, qu'à aucun moment, notre majorité n'a refusé la mise en place du passeport biologique.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Quand nous avons étudié la proposition de loi sur l'éthique du sport, et je remercie la présidente Tabarot de m'avoir chargé d'en être le rapporteur,…

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

…ce texte, qui nous venait du Sénat, présentait tellement d'avancées majeures pour le monde sportif qu'il nous fallait l'adopter conforme pour qu'il puisse devenir opérationnel. Ce fut d'ailleurs le cas puisqu'il a été publié au Journal officiel le 2 février. Introduire le dispositif, souhaitable, du passeport biologique – j'avais même envisagé d'être l'auteur d'un amendement à ce propos – aurait entraîné le texte dans une navette incertaine qui ne lui aurait pas permis de voir le jour. C'est donc pour cette raison, non pas parce que, sur le fond, nous étions opposés au passeport biologique, mais parce que nous avions besoin des avancées de la PPL sur l'éthique du sport et que nous souhaitions que ce texte soit adopté conforme, que nous avons rejeté l'amendement de Mme Fourneyron sur le passeport biologique.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Ce n'est pas du tout parce que nous étions opposés ni idéologiquement ni sportivement à cette mesure, mais parce que nous avions besoin de l'adoption conforme de ce texte pour qu'il soit publié au Journal officiel, ce qui a été fait, je vous renvoie au Journal officiel du 2 février.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Le lendemain, cela aurait été pareil ! Il suffisait d'un aller et retour de plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Et ce texte présentait suffisamment d'avancées, qui ont été soulignées par le président du CNOSF mais aussi par d'autres personnalités du monde sportif. Aujourd'hui, il nous permet d'être opérants et de trouver des contributions supplémentaires.

À propos de l'article 1er, je voudrais revenir sur l'argument qui nous est opposé. Ce que nous proposons, c'est de revenir à la situation antérieure à l'arrêt de la Cour de cassation du 10 novembre 2010. Elle n'était pas si catastrophique que cela pour le monde sportif, les assureurs et les licenciés. Les conséquences de cet arrêt sur l'élévation des responsabilités et des polices d'assurance ont été soulignées non pas par l'UMP, ni par le ministre ou par moi-même : c'est le conseil d'administration du groupement de réassurance pour les sports mécaniques qui a décidé le 15 juin 2011 de réviser l'ensemble de ses dossiers de sinistre ouverts à ce jour et de doubler l'encaissement annuel des primes dans un délai de cinq ans, compte tenu des conséquences de l'arrêt. Nous proposons donc de revenir à la situation antérieure afin de rétablir sur ce sujet une certaine sécurité, et cela profite au monde sportif.

Enfin, en accord avec les sénateurs, nous avons volontairement rejeté le dispositif prévu pour les agents sportifs. C'est en effet un vrai sujet en soi, nous l'avions déjà souligné au moment de la proposition de loi visant à renforcer l'éthique du sport. Nous devrons légiférer sur le statut des agents, tout le monde est d'accord sur les bancs de cette assemblée, mais on ne peut pas le faire au détour d'un amendement. La situation des agents est complexe, multiple, les acteurs sont multiples puisqu'il y a même des avocats qui interviennent. Il faudra mener une vraie réflexion, procéder à des auditions, rencontrer l'ensemble du monde sportif, les avocats, les agents, et probablement aller jusqu'à la création d'un statut. Aujourd'hui, le droit n'est pas très clair.

Je remercie mes collègues socialistes et du groupe GDR qui ont souscrit aux avancées de ce texte. Ensemble, nous apportons au monde sportif des éléments constructifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean Mallot, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Contrairement à M. le ministre des sports, je ne vais pas profiter de cette tribune pour me lancer dans un débat qui relève de la campagne présidentielle. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je regrette simplement qu'il ait, à tort, saisi cette occasion pour stigmatiser une proposition du candidat François Hollande, auquel il faudra bien qu'il s'habitue, comme à ses propositions d'ailleurs,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

…en faisant une analyse déformée et en annonçant des conséquences prétendument catastrophiques de ce qu'il a proposé pour les très hauts revenus, pour le monde du sport en particulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

François Hollande a effectivement l'intention, lorsqu'il sera élu, d'imposer au taux marginal de 75 % les revenus supérieurs à un million d'euros par an. Retournez dans vos circonscriptions : les gens se rendent compte de ce que cela représente. Je rappelle notamment que, dans notre pays où le pouvoir d'achat stagne, voire régresse, où le SMIC stagne depuis un certain nombre d'années, les patrons du CAC 40 n'ont rien trouvé de mieux l'an dernier que de s'augmenter de 34 %. C'est dans ce contexte que se situe cette proposition et tout le monde l'a bien compris.

J'en viens à la proposition de loi dont nous discutons ce matin, après l'aboutissement de la commission mixte paritaire. Je regrette qu'elle ait été discutée dans des conditions précipitées et très difficiles. Le jour où nous en avons débattu dans l'hémicycle, je présidais la séance, la proposition de loi n'était même pas en distribution, ce qui nous ramène à d'autres considérations récentes sur d'autres propositions de loi dont l'examen dans cette assemblée, Mme la présidente s'en souvient, a été refusé en conférence des présidents mardi dernier.

Cela dit, comme l'a annoncé implicitement Pascal Deguilhem tout à l'heure, et après avoir pris acte du fait que la majorité s'est ralliée notamment à nos propositions sur du passeport biologique, je confirme le vote positif du groupe que je représente.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Au temps où vous régniez sur les tatamis, monsieur le ministre, on ne vous a jamais vu arriver avec un ballon de foot ou un sabre comme celui Jean-François Lamour. Or la réponse que vous m'avez faite était hors sujet. Je vous interroge sur le fait que vous avez divisé par treize les crédits des commissions régionales de lutte contre le dopage et par deux ceux de recherche, et vous me parlez de la dernière tranche du barème de l'impôt à 75 %. Vous auriez pu me répondre sur la question que je vous avais posée, vous auriez été plus convaincant.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Nous faisons comme Georges Marchais. Vous avez les questions, nous avons les réponses. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Que vous veniez à la rescousse de ceux qui trahissent la France et qui, après s'être enrichis sur notre sol, être allés dans nos écoles, avoir été soignés dans nos hôpitaux,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…crachent dans la soupe et vont avec leur magot sur les rives du lac Léman, et que vous leur donniez raison en plus, je trouve ça immoral. Où est la fibre patriotique dans votre propos ? On ne vient pas à la rescousse de ceux qui volent le Trésor français.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous avez évoqué quelqu'un qui a menacé la France de partir s'il payait trop d'impôts, Yannick Noah.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Que ceux qui traitent ainsi leur pays partent, comme ceux qui, après 1789, se sont réfugiés à Coblence pour combattre la Révolution française. On a les amis que l'on peut, monsieur le ministre.

Vous avez parlé de nos amis socialistes mais moi, je suis au Front de Gauche, cela vous a peut-être échappé. Les fiches que vous préparent vos collaborateurs ne sont peut-être pas à jour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Avant de vous dire quel sera mon vote, je vous propose pour terminer, puisque vous allez toujours chercher vos exemples à l'étranger (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… au-delà du Rhin ou au-delà de l'Atlantique, de faire comme les États-Unis. Un citoyen américain doit payer son impôt aux États-Unis. Sinon, quand il rentre au pays, on lui offre une paire de bracelets et pas forcément du 18 carats. C'est une façon d'obliger ceux qui oublieraient leurs devoirs à souscrire à celui que leur impose l'attachement à leur sol national.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pour les digressions, le ministre nous a tout de même ouvert la voie !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, vous ne voulez pas mettre à contribution les riches, vous voulez plumer les pauvres (Protestations sur les bancs du groupe UMP) parce qu'ils sont plus nombreux. C'est ce que vous faites depuis dix ans et ces cris d'orfraie ne sont que la confirmation de vos comportements condamnables.

Votre texte a deux parties, comme Janus. Il y a le soutien à ce que vous appelez délicatement les sports mécaniques, c'est-à-dire la Formule 1, et le reste, plus acceptable, qui représente une petite avancée sur le dopage – laquelle n'efface pas la réduction des crédits.

Confronté à ce dilemme, comme il est écrit dans les textes sacrés ; « dans le doute, abstiens-toi ».

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de Mme Michèle Tabarot sur l'enfance délaissée et l'adoption (n°s 3739 rectifié, 4330).

La parole est à Mme Michèle Tabarot, rapporteure de la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi sur l'enfance délaissée et l'adoption.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle Tabarot

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État chargée de la famille, mes chers collègues, je suis très heureuse que ce texte, cosigné par soixante députés, puisse être examiné aujourd'hui par notre Assemblée. Je remercie Christian Jacob, président du groupe UMP, qui a oeuvré pour qu'il puisse être inscrit à l'ordre du jour. Je sais qu'ancien ministre en charge de la famille, il reste fondamentalement attaché à ce sujet.

L'adoption se trouve à l'intersection des compétences de trois commissions permanentes : les affaires sociales, les lois et les affaires étrangères. En accord avec nos collègues Pierre Méhaignerie, Axel Poniatowski et Jean-Luc Warsmann, une commission spéciale a été créée par le président de l'Assemblée nationale. Les travaux réalisés dans cette commission spéciale ont permis de renforcer la cohérence de cette proposition de loi, qui concerne tout autant l'adoption que la protection de l'enfance.

Sur ces sujets, nous devons faire preuve de prudence et de responsabilité. Il s'agit de l'avenir d'enfants en France et à l'étranger.

Nous voulons réaffirmer le rôle majeur de l'adoption en matière de protection de l'enfance face à des constats malheureusement préoccupants.

Chaque année, en France, 120 000 enfants sont séparés de leurs parents par décision de justice. Seulement 150 à 200 d'entre eux feront l'objet d'une déclaration judiciaire d'abandon qui leur ouvrira la possibilité d'être adoptés. Ce chiffre est trop faible, les déclarations d'abandon sont trop rares, trop tardives. Quand enfin elles interviennent, l'enfant a déjà passé près de six ans en placement. Ses chances d'avoir un nouveau départ dans la vie seront compromises.

Nous ne pouvons nous en satisfaire. Nous devons rendre le dispositif plus efficace. Trop d'enfants sont condamnés à grandir dans des foyers d'accueil. La loi doit faire changer les mentalités, poser de nouveaux critères. L'enfant délaissé a droit à un projet de vie. Chaque fois que l'on a la certitude qu'il ne retournera plus dans sa famille, il doit pouvoir être adopté.

Comme vous le savez, cette proposition de loi est le fruit d'une longue réflexion. Elle s'appuie sur de nombreux rapports, celui de M. Jean-Marie Colombani en 2008, puis ceux de l'Inspection générale des affaires sociales en 2009 et de l'Académie nationale de médecine en 2011. Elle se fonde également sur les travaux importants menés par le Conseil supérieur de l'adoption et par notre groupe d'études sur la famille et l'adoption, dont je salue la coprésidente, Patricia Adam.

Le premier objectif de ce texte est de réformer la déclaration judiciaire d'abandon. Elle est aujourd'hui appréciée au regard d'un critère de désintérêt manifeste, bien trop flou, qui ne permet pas de prendre en compte la diversité des situations. Nous proposons un nouveau critère de délaissement parental qui permettra de centrer le dispositif sur l'intérêt de l'enfant.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle Tabarot

Chaque année, les équipes qui suivent un mineur placé devront s'interroger sur sa situation au regard de ce délaissement parental. Un rapport intermédiaire sera prévu pour les enfants âgés de moins de deux ans au bout de six mois de placement.

À la lumière des auditions, nous avons réécrit l'article 1er en commission. Le délaissement parental pourra être prononcé lorsque les parents n'auront effectué aucun acte concret pour leur enfant durant toute une année.

Nous souhaitons également déplacer l'article 350 du code civil du titre relatif à l'adoption vers le titre relatif à l'autorité parentale. Il ne faut pas donner le sentiment que l'adoption est la seule solution face au délaissement parental. Grâce à cette proposition de loi, un projet de vie sera élaboré pour chaque enfant et devra figurer dans les rapports annuels.

Comme vous le voyez, ce texte propose des avancées importantes en faveur de l'enfance, mais nous n'omettons pas les difficultés de plus en plus grandes auxquelles sont confrontés les candidats à l'adoption. Une expérimentation sur la formation préalable à l'agrément sera lancée pour qu'ils soient mieux préparés et mieux informés. Les candidats suivront des modules obligatoires, qu'ils valideront avant l'obtention du document. Plusieurs départements se sont déjà portés volontaires ; c'est très encourageant.

Pour faire face à l'allongement de la durée des procédures, en France comme à l'étranger, nous proposons plusieurs modifications. D'abord, le délai de neuf mois pour la délivrance de l'agrément démarrera à compter de la demande initiale au président du conseil général et non plus de la confirmation de cette dernière. De plus, lorsqu'une proposition d'enfant existe alors que la validité de l'agrément est proche d'expirer, l'agrément pourra être prorogé afin de permettre à l'adoption d'être menée à son terme. Enfin, nous avons souhaité clarifier les conditions de caducité et de retrait de l'agrément.

La proposition de loi prévoit également de renforcer la stabilité de l'adoption simple durant la minorité de l'adopté, en ne la rendant révocable que sur demande du ministère public. Je sais que le Gouvernement est opposé à cette disposition. Je veux redire ici qu'elle fait suite à des demandes répétées d'associations, d'experts, de parlementaires et surtout de parents.

Nous partageons la conviction qu'il faut lever les freins juridiques au développement de l'adoption simple. L'adoption simple est une réponse adaptée, notamment pour les adoptions tardives. Sa révocabilité fait peser une incertitude permanente qui nuit à la bonne intégration de l'enfant dans son nouveau foyer. Nous voulons faire en sorte qu'elle soit plus difficilement révocable durant la minorité de l'enfant. Le procureur de la République veillera au bien-être de ce dernier. La justice reste le meilleur garant de l'intérêt de l'enfant adopté.

Le dernier volet de la proposition de loi concerne l'adoption internationale. Le développement de l'Agence française de l'adoption, dont je salue l'ancien président Yves Nicolin, sera accompagné, et nous renforcerons le contrôle des conditions d'adoption dans les pays d'origine.

Dans cette commission spéciale, nous avons poursuivi notre réflexion sur certaines difficultés dont les enfants sont les premières victimes. Je présenterai des amendements concernant deux sujets.

Je souhaite tout d'abord évoquer la situation des enfants dits à besoins spécifiques. Ces enfants sont adoptables mais ne trouvent pas de famille, pour des raisons diverses liées à leur situation. Eux aussi sont condamnés à grandir dans des foyers. Le dispositif du Système d'information pour l'adoption des pupilles de l'État, le SIAPE, est censé permettre la mise en relation des enfants à besoins spécifiques avec des adoptants prêts à les accueillir. Ce système est méconnu, il est sous-exploité. Il faut désormais que les conseils généraux et les services de l'État soient pleinement mobilisés autour de cette belle cause, qui est de permettre à un enfant en souffrance d'être adopté par des personnes capables de l'accompagner sur le chemin de la vie.

Nous avons également longuement débattu de la situation particulière des enfants recueillis par l'intermédiaire d'une kafala. En 2001, la France a décidé que l'adoption serait interdite dans les pays qui ne reconnaissent pas cette institution. Nous voyons depuis lors les difficultés des familles qui recueillent un enfant dans les pays de droit coranique. La France ne peut se satisfaire d'avoir dans son pays des enfants insuffisamment protégés. C'est contraire à nos engagements internationaux. Nous devons leur offrir la possibilité d'accéder à un statut protecteur,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle Tabarot

…sous différentes conditions et dans le respect de la souveraineté des États. Je proposerai donc un amendement pour que l'adoption dans un pays qui ne reconnaît pas cette institution soit permise à condition qu'une convention bilatérale le prévoie.

En conclusion, nous pouvons nous féliciter de la très bonne tenue des débats en commission spéciale, sous la présidence de Jean-Marc Roubaud, que je remercie et dont je salue l'investissement personnel en faveur de ce texte. Des amendements déposés par les différents groupes politiques, qui ont démontré une grande connaissance des enjeux importants de l'adoption, ont permis d'enrichir sensiblement la proposition de loi. Cela confirme l'attachement profond de la représentation nationale à la protection de l'enfance et à l'adoption. Je rappelle que ce texte a été adopté à l'unanimité en commission. C'est un symbole particulièrement fort et encourageant.

Madame le ministre, vous l'avez rappelé en commission, cette réforme est très attendue. Vous l'avez constaté sur le terrain et je vous remercie du soutien que vous lui avez apporté.

Nous avons l'opportunité d'agir concrètement face à la détresse de ces enfants abandonnés, de leur offrir la chance d'un nouveau départ dans la vie, de leur ouvrir un autre horizon que celui des foyers et des familles d'accueil. Je suis sincèrement très heureuse de voir qu'aujourd'hui, dans cet hémicycle, c'est une considération parmi les plus nobles qui va primer : celle de l'intérêt supérieur de l'enfant. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La parole est à Mme Claude Greff, secrétaire d'État chargée de la famille.

Debut de section - PermalienClaude Greff, secrétaire d'état chargée de la famille

Madame la présidente, monsieur le président de la commission spéciale Jean-Marc Roubaud, madame la rapporteure Michèle Tabarot, mesdames et messieurs les députés, nous procédons aujourd'hui à l'examen de la proposition de loi de Mme la rapporteure, qui affirme la place fondamentale réservée à l'intérêt de l'enfant dans la filiation adoptive. Il nous appartient de toujours garder à l'esprit ce principe fondateur de l'intérêt de l'enfant car, après tout, ce que nous recherchons, c'est bien la protection de l'enfance et la sécurité d'un foyer stable.

L'adoption est un thème majeur de notre politique familiale. Le statut de l'adoption a fait l'objet depuis 1966 d'aménagements successifs, jusqu'à la réforme de 2005 qui a profondément rénové ce dispositif.

Les Français sont particulièrement attachés à tout ce qui touche à la famille et à la solidarité, comme vous l'avez rappelé, chère Michèle Tabarot. C'est quelque chose que je constate au quotidien lors de mes nombreux déplacements sur le terrain. Adopter un enfant est un acte important qui porte en lui l'engagement fort de fonder une nouvelle famille ou d'agrandir sa famille en y intégrant un enfant.

Or l'adoption a, comme vous le savez, considérablement évolué depuis la réforme de 2005. Tout d'abord, le déséquilibre se creuse entre le nombre de candidats à l'adoption et le nombre d'enfants proposés à l'adoption chaque année. Ensuite, le ratio entre adoption nationale et adoption internationale s'est inversé. Enfin, le profil et l'âge des enfants ont considérablement évolué ; comme vous l'avez indiqué, le nombre d'enfants à besoins spécifiques en attente d'adoption est aujourd'hui bien plus important.

En 2010, un peu moins de 25 000 candidats bénéficiaient d'un agrément en cours de validité, alors qu'environ 750 pupilles de l'État ont été placés en vue d'adoption et environ 3 500 enfants ont été adoptés dans le cadre d'une adoption internationale.

Depuis quelques années déjà, vous le savez bien, on assiste à la contraction du nombre d'enfants adoptables dans le monde et à l'évolution du profil de ces enfants. La proportion d'enfants à besoins spécifiques en raison de leur âge, de leur santé ou de l'existence d'une fratrie est en augmentation constante, au point que certains pays ne proposent plus à l'adoption internationale que de tels enfants.

Plusieurs facteurs, dont on ne peut que se réjouir, sont à l'origine de cette évolution. Nombre de pays d'origine rejoignent la convention de La Haye du 29 mai 1993 – quatre-vingt-cinq États en sont membres aujourd'hui –, ce qui montre la prise de conscience de la nécessité de protéger les enfants des dérives possibles de l'adoption. Et l'application des principes de cette convention, en particulier la subsidiarité de l'adoption internationale, se traduit systématiquement par une baisse significative du nombre d'enfants proposés à l'adoption internationale. En outre, l'amélioration de la situation politique, sociale et économique de nombreux pays d'origine favorise le développement des systèmes de protection de l'enfance et l'essor de l'adoption interne, comme ce fut le cas au Brésil ou plus récemment en Chine.

Le profil des enfants proposés dans le cadre de l'adoption internationale tend donc à se rapprocher de celui des pupilles de l'État, dès lors que sont écartés les enfants nés sous le secret, très rapidement adoptés.

Face à ces nouveaux défis, la parentalité adoptive mérite une attention particulière de la part de tous les acteurs : des acteurs de terrain, au premier rang desquels les professionnels des conseils généraux, qui instruisent et délivrent l'agrément, mais aussi des pouvoirs publics et de l'État, car l'adoption est avant tout une mesure de protection des enfants privés de famille, dont la finalité doit toujours être de répondre au mieux à l'intérêt de l'enfant. Je n'oublie pas non plus l'action des associations.

Cet intérêt de l'enfant est aujourd'hui une priorité politique pour le Gouvernement. Au plan national, le secrétariat d'État en charge de la famille a un rôle essentiel dans le pilotage et l'animation de la politique publique en matière d'adoption, qu'il s'agisse des réformes touchant aux dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à l'agrément ou au statut des pupilles de l'État, ou de l'animation du Conseil supérieur de l'adoption, créé en juillet 1975, et dont il assure le secrétariat et l'animation des différents groupes de travail.

C'est d'ailleurs dans ce cadre qu'ont été élaborés, en lien avec les professionnels des conseils généraux, les acteurs associatifs et les différents ministères concernés, des référentiels nationaux concernant l'information et l'agrément en vue de l'adoption. Ces référentiels, diffusés auprès des départements au printemps 2011, donneront lieu à une évaluation d'ici à la fin de l'année 2012 sur la manière dont ils sont appliqués, les questions qu'ils soulèvent et les améliorations susceptibles d'y être apportées. J'observe qu'avec ces référentiels, l'objet de l'article 4 bis de votre proposition de loi, madame la rapporteure, est d'ores et déjà rempli.

S'agissant de l'accompagnement de l'adoption des pupilles à besoins spécifiques, la direction générale de la cohésion sociale anime un réseau d'échanges entre l'État et les conseils généraux, dont elle est l'interlocutrice privilégiée.

Une journée technique sur l'adoption des pupilles à besoins spécifiques, organisée le 5 décembre dernier, a rassemblé de nombreux professionnels des conseils généraux et des directions départementales de la cohésion sociale.

De plus, afin d'améliorer la gestion du processus de l'adoption, nous avons lancé une étude de faisabilité concernant la création d'une base nationale de données sur l'agrément, qui, outre des finalités de gestion et de statistiques, pourrait permettre également d'améliorer les modalités d'apparentement des pupilles de l'État, notamment en facilitant la recherche des candidats répondant au profil des enfants à besoins spécifiques.

Un guide de l'adoptant, destiné à aider les personnes dans leurs démarches administratives et juridiques en vue d'adopter, et la mise en ligne d'un espace professionnel du portail adoption.gouv.fr dédié aux acteurs de l'adoption, tels que les services départementaux, les services déconcentrés de l'État, les organismes autorisés pour l'adoption, l'AFA…, vont prochainement compléter utilement le dispositif actuel.

S'agissant de l'adoption internationale, la convention constitutive de l'Agence française de l'adoption – dont je salue la présidente ici présente –, renouvelée en décembre dernier, comporte des innovations importantes, comme l'instauration du dossier unique ou la possibilité d'écarter les dossiers ne répondant pas aux exigences du pays choisi ou tout simplement au profil des enfants, qui permettront une meilleure adéquation entre les demandes des pays partenaires et les dossiers de candidature envoyés dans ces pays.

Plus largement, nous devons aussi améliorer nos procédures et les moderniser pour mieux répondre à cette nouvelle réalité de l'adoption. Votre proposition de loi, madame la rapporteure, répond à ces préoccupations et présente des avancées certaines.

Elle s'inscrit dans la continuité des travaux conduits depuis 2008 sur le sujet, notamment le rapport sur l'adoption de M. Colombani, celui de l'IGAS sur le délaissement parental ou encore celui de l'Académie de médecine. Elle reprend également certaines des dispositions du projet de loi sur l'adoption que le Gouvernement avait déposé en avril 2009 au Sénat et qui n'a pu prospérer. Enfin, elle intègre certaines propositions du Conseil supérieur de l'adoption, que vous connaissez bien, madame la rapporteure, pour en être la présidente.

Ainsi, l'article 1er récrit en profondeur la déclaration judiciaire d'abandon, dans la continuité des réflexions conduites depuis plusieurs années, notamment par l'inspection générale des affaires sociales. Vous proposez fort opportunément de clarifier tant l'objectif poursuivi par celle-ci que sa définition et ses modalités de mise en oeuvre.

Tout d'abord, vous avez souhaité substituer à la notion actuelle de désintérêt manifeste celle de délaissement parental, à laquelle, vous le savez, je suis particulièrement attachée. Un certain nombre d'enfants pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance pourraient, parce qu'ils sont délaissés par leurs parents, accéder au statut protecteur de pupille de l'État dans le cadre de cette procédure de déclaration judiciaire d'abandon. Votre démarche, permettant de centrer l'appréciation à partir de la situation de l'enfant et non plus de celle des parents, est tout à fait nouvelle et fondatrice.

La définition que vous donnez du délaissement parental, caractérisée par des critères objectifs résultant de la carence des parents, qui devront n'avoir contribué par aucun acte à l'éducation ou au développement de l'enfant pendant un an, doit être bien sûr approuvée. Il n'est bien évidemment pas question de stigmatiser ni de sanctionner des parents qui se retrouveraient malgré eux dans une situation les empêchant d'exercer leur autorité parentale : je pense notamment aux cas d'hospitalisation ou à ceux qui sont dans l'incapacité temporaire de remplir leur rôle. L'abstention des parents doit être volontaire et continue, et depuis au moins un an. Les enfants admis en qualité de pupille de l'État à la suite de cette procédure pourront ensuite, si tel est leur intérêt et si cela s'inscrit dans leur projet de vie, faire évidemment l'objet d'une adoption.

La dissociation de ces deux temps m'apparaît fondamentale, madame la rapporteure, et vous y répondez parfaitement en séparant symboliquement l'adoption de la déclaration judiciaire d'abandon, et en plaçant dorénavant celle-ci dans le titre du code civil relatif à l'autorité parentale, ce qui contribue à l'intérêt de l'enfant. Ainsi, vous inscrivez pleinement cette mesure comme une mesure de protection de l'enfant, notion qui doit revenir en permanence dans ce débat.

Vous prévoyez également que le tribunal de grande instance pourra être saisi par le parquet d'une demande de déclaration judiciaire d'abandon, et non plus seulement par le service social ou le particulier qui a recueilli en son temps l'enfant. Cette évolution est tout à fait bienvenue car le ministère public peut être amené, notamment par le biais de ses relations avec le juge des enfants, à connaître d'une situation de délaissement. Il était dès lors peu compréhensible de ne pas lui permettre de saisir directement le juge. Ce sera donc, grâce à vous, chose faite. Certains freins existent pour engager cette procédure, le rapport de l'IGAS l'a montré : c'est pourquoi je suis favorable à ce que le rapport annuel de situation, qui doit être élaboré par le service de l'aide sociale à l'enfance pour tous les enfants qu'il prend en charge, soit l'occasion pour les responsables départementaux de se poser des questions, en l'occurrence sur l'état de l'enfant, sa santé, sa scolarité et ses relations familiales, et, s'il s'avère que les parents se sont abstenus d'effectuer les actes contribuant à l'éducation et au développement de l'enfant, d'en tirer les conséquences. Tel est l'objet de l'article 2.

En effet, la loi en vigueur dispose que le rapport du service d'aide sociale à l'enfance est élaboré « au moins une fois par an », ce qui permet par essence la rédaction de plus d'un rapport par an. Un guide de bonnes pratiques largement diffusé peut répondre à cet objectif, sans que cela crée une charge obligatoire pour les départements.

L'article 3 comporte des dispositions intéressantes sur l'agrément qui vont dans le bon sens. La définition que vous donnez de l'agrément, dont la finalité doit être de répondre à l'intérêt de l'enfant – nous y revenons toujours – et à la prise en compte de ses besoins m'apparaît essentielle. Elle permettra aux candidats à l'adoption de mieux comprendre les enjeux de cette étape, et peut être de ne plus concevoir l'agrément comme une sorte de permis d'adopter mais comme une mesure tournée vers la satisfaction de l'intérêt de l'enfant qui pourra ensuite leur être confié.

Avec les départements, je suis particulièrement soucieuse de l'information et de la préparation des candidats à l'adoption, qui sontt au coeur des préoccupations des pouvoirs publics : la réussite de l'adoption passe par une préparation de qualité, s'agissant à la fois des dimensions que revêt la parentalité adoptive et de l'adéquation du projet lui-même au profil des enfants adoptables. Mais je ne souhaite pas générer de charges nouvelles pour les départements. Les associations sur le terrain assurent au quotidien un travail remarquable d'information et de préparation, et je veux ici les saluer. Prévoir que le défaut de confirmation annuelle de l'agrément entraîne la caducité de celui-ci m'apparaît tout à fait bienvenu, tout comme la possibilité de proroger l'agrément en cas de proposition d'enfant adoptable. Cela s'appelle du bon sens, et le Parlement en a beaucoup.

Je me suis déjà exprimée sur l'article 4 bis, dont l'objectif, je tiens à vous le rappeler, est déjà rempli puisque les référentiels proposés ont été rédigés et diffusés auprès de l'ensemble des professionnels des conseils généraux l'année dernière.

J'en viens à l'article 5, et c'est un moment important parce qu'il propose de limiter les possibilités de révocation de l'adoption simple durant la minorité de l'enfant. Il s'agit là d'un sujet complexe. Si je comprends et partage avec vous le souci de développer l'adoption simple – nous entendons vous comme moi cette demande sur le terrain – parce que c'est une réponse qui paraît adaptée dans certaines situations, il me semble inopportun de modifier l'équilibre qui existe aujourd'hui entre l'adoption simple et l'adoption plénière, même s'il est difficilement compréhensible pour les parents. On risquerait de les amener à confondre ces deux notions. La possibilité de révocation qui existe aujourd'hui est une spécificité de l'adoption simple. Le droit de la famille biologique de saisir directement le juge, notamment lorsqu'elle constate des maltraitances, est la contrepartie naturelle et légitime des devoirs du parent biologique. Celui-ci est bien dans son rôle puisque, à la différence de la relation, le fameux lien de filiation subsiste et que la famille biologique est même tenue à une obligation alimentaire à l'égard de l'enfant. Avec l'article 5, on créerait donc, je le crains vraiment, un déséquilibre majeur entre les droits et les devoirs des parents biologiques.

La possibilité de révocation est très encadrée aujourd'hui par la loi puisqu'elle ne peut être prononcée par le tribunal de grande instance, statuant en formation collégiale composée de trois juges, que si « des motifs graves » existent, et par un jugement motivé. Elle n'a donné lieu à aucun abus. Puis-je rappeler qu'il n'y a eu en 2010 que dix-sept révocations pour une cinquantaine de demandes ? Il n'est donc pas démontré que des familles d'accueil renoncent à l'adoption simple en raison des règles de révocation. J'ajoute que le rapport Colombani n'a jamais évoqué ce problème ni suggéré une telle évolution. C'est pourquoi je tiens à vous alerter : la mesure proposée risque même d'être contreproductive. Beaucoup de familles pourraient décider de renoncer à l'adoption simple, sachant qu'elles ne pourront plus saisir directement le juge d'une demande de révocation pour protéger leur enfant. Nous risquons d'assister de ce fait à une baisse du nombre des adoptions simples, ce qui irait totalement à rebours de l'objectif tout à fait louable que vous poursuivez. Enfin, dans la très grande majorité des cas, l'adoption simple est le fait du nouveau conjoint de la mère ou du père. Car la situation évolue : les familles recomposées sont de plus en plus nombreuses, et lorsqu'un couple s'est séparé, il faut pouvoir remettre en cause l'adoption simple par l'ancien conjoint, le lien de filiation ainsi créé n'ayant plus aucun sens du fait de la rupture. Toute mon argumentation est évidemment tournée vers l'intérêt de l'enfant.

Debut de section - PermalienClaude Greff, secrétaire d'état chargée de la famille

L'article 6, consacré à l'Agence française de l'adoption, comprend des mesures de nature à faciliter et à simplifier l'exercice des missions de l'Agence, telles que l'habilitation générale dans tous les États non parties à la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, et même la possibilité de mener des actions de coopération en faveur de la protection de l'enfance. J'y suis donc tout à fait favorable.

Enfin, l'article 6 bis propose de modifier la composition du CNAOP – le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles – en reprenant en partie une proposition formulée par le Conseil lui-même, qui suggérait d'intégrer un représentant des OAA – les organismes autorisés pour l'adoption, qui font un travail remarquable – et de doubler le nombre de représentants des départements afin d'assurer la présence d'un élu et d'un professionnel. La proposition de faire siéger un membre d'un OAA peut paraître intéressante, et j'ai bien entendu tous les arguments qui vont en ce sens, car ces organismes détiennent des dossiers de personnes nées sous le secret ; mais j'alerte la Grande Assemblée…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ici, c'est l'Assemblée nationale ! La Grande Assemblée, c'est en Mongolie, madame la secrétaire d'État ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienClaude Greff, secrétaire d'état chargée de la famille

… – en tout cas elle est très belle, je le sais pour y avoir siégé, monsieur Brard – sur le risque de bouleverser l'équilibre de la composition de ce conseil voulue par le législateur en 2002. De ce fait, une telle mesure doit être envisagée avec prudence.

Durant la discussion des articles, j'aurai l'occasion de m'exprimer sur les amendements.

Je souhaite rappeler dans cette enceinte que notre réflexion doit toujours être guidée par l'intérêt de l'enfant en attente d'une adoption, et non par la satisfaction du désir de parentalité des adultes.

Debut de section - PermalienClaude Greff, secrétaire d'état chargée de la famille

Notre politique de l'adoption doit être, plus encore qu'auparavant, fondée sur la qualité des projets d'adoption en termes d'éthique, de préparation et de transparence, gages de l'épanouissement des familles adoptives et surtout, mesdames, messieurs les députés, des enfants adoptés.

Cette proposition de loi, madame la rapporteure, est une belle proposition de loi. Je suis ravie d'avoir travaillé avec vous comme je le suis d'être présente aujourd'hui parce que je sais que chacune de nos réflexions sera toujours tournée vers l'intérêt de l'enfant. C'est la raison pour laquelle votre proposition de loi contribue à répondre à toutes les exigences de l'enfance délaissée et de l'adoption. Je vous remercie très sincèrement. Je remercie également le président de la commission spéciale et tous les députés pour leurs travaux au sein de cette commission, et vous tous ici présents pour travailler sur cette belle proposition de loi qui est toujours tournée vers l'intérêt supérieur de l'enfant. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Très bien ! On sent que vous alimentez déjà vos mémoires, madame la secrétaire d'État ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La parole est à M. Jean-Marc Roubaud, président de la commission spéciale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, mes chers collègues, ce jour est un moment important dans la vie de certaines familles françaises. L'adoption, vous le savez, est un sujet sensible car porteur d'espoir pour des parents en attente d'adoption, sensible également pour les enfants, eux aussi en attente. Mais ce peut être aussi un sujet douloureux parce qu'après le parcours de l'agrément, certaines familles sont confrontées à de nombreuses difficultés, qui peuvent être juridiques, administratives, voire internationales.

Ce texte permet des avancées en faveur de l'adoption et de l'enfance délaissée. J'ai été très heureux, madame la rapporteure, de présider cette commission pour plusieurs raisons : tout d'abord, je tiens à mon tour à le dire, parce que c'est un texte important, mais aussi en raison de la qualité des travaux qui ont été menés – votre audition, madame la secrétaire d'État, a été un moment important –, de l'assiduité de mes collègues et de la prise en compte des travaux du groupe d'études coprésidé parMichèle Tabarot et Patricia Adam.

Madame la secrétaire d'État, vous avez apporté des explications techniques sur ce texte. Je souhaite, pour ceux qui n'ont pas participé aux travaux de la commission, apporter quelques éléments relativement simples qui leur permettront de comprendre d'où l'on vient et où l'on va.

Quelle est la situation aujourd'hui en France ? Ce sont 10 000 demandes d'adoption par an pour seulement 4 000 adoptions effectuées, dont 80 % à l'étranger, ce qui doit nous interpeller. En 2008, on dénombrait 2 231 pupilles de l'État, et malheureusement 36,5 % seulement d'entre eux trouvaient une famille d'accueil. Il fallait donc clairement que nous soyons capables d'opérer un certain nombre d'avancées. Parallèlement, cela a été évoqué mais il est important de le rappeler, on constate dans le monde une diminution du nombre d'enfants adoptables.

En 2007, le Président de la République a donc décidé de confier une mission sur ce sujet à Jean-Marie Colombani ; celui-ci a rédigé un rapport dont certaines propositions ont déjà été mises en oeuvre, par exemple l'Ambassadeur de l'adoption.

Cette proposition de loi apporte un certain nombre de réponses. Les trois principales sont les suivantes : une meilleure prise en compte des enfants délaissés ; une réforme de l'agrément qui le recentre sur l'intérêt de l'enfant, que nous ne devons jamais perdre de vue ; et le développement de l'adoption internationale. La commission a aussi permis une avancée, que certains trouveront insuffisante, s'agissant de la kafala. De nombreuses associations nous ont saisis et sensibilisés au sujet et certains collègues de la commission ont insisté sur l'importance d'une réponse des maires. Michel Herbillon, celui de Maisons-Alfort, nous a ainsi rapporté de manière tout à fait explicite les nombreux cas existant dans sa commune, ce qui a permis de dégager un consensus.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Roubaud

Mon cher Yves, Michel Herbillon vous fera part tout à l'heure des cas qu'il a vécus et qui sont douloureux.

Mes chers collègues, je sais que certains trouveront ce texte insuffisant, mais l'avancée est incontestable, aussi je vous invite à l'adopter pour nos enfants et pour nos familles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Patricia Adam.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Adam

Madame la présidente, monsieur le président, chère Michèle Tabarot, encore une fois nous examinons un texte sur l'enfance en fin de législature.

Lors de la précédente législature, il s'agissait d'un texte sur la protection de l'enfance, un sujet d'autant plus important qu'il concerne les plus fragiles, les enfants, et les plus fragilisés d'entre eux, ceux qui ont malheureusement fait l'objet de défaut d'éducation, voire de sévices.

Dans ce domaine, la France a souvent été montrée du doigt par les différentes instances internationales pour l'insuffisance de ses politiques de prévention, particulièrement en matière de délinquance juvénile, pour sa façon d'aborder l'immigration des enfants étrangers ou pour la question de Mayotte que nous avons évoquée lors de cette commission spéciale. La Convention internationale des droits de l'enfant, règle d'or en la matière, n'est pas encore suffisamment appliquée sur le territoire français.

Le sujet qui nous intéresse aujourd'hui est celui de l'enfance délaissée et de l'adoption en France, et je m'y tiendrai. Tout d'abord, je salue la qualité des travaux accomplis durant ces trois mois par notre commission spéciale dont je remercie le président et la rapporteure, Michèle Tabarot. J'ai coprésidé avec elle ce groupe sur l'adoption depuis cinq ans, et nous avons été particulièrement sollicitées au moment du séisme en Haïti.

Cette proposition de loi, nous aurions pu la cosigner si deux points importants n'étaient pas restés en suspens : la kafala judiciaire ; l'accès à l'agrément pour les couples pacsés ou en concubinage, sachant qu'il est possible pour les célibataires.

Je remercie le président et la rapporteure d'avoir accepté un débat sur la kafala qui n'était pas prévu et d'avoir auditionné tous les acteurs concernés par cette question. Comme vous l'avez rappelé, madame la secrétaire d'État, ce qui nous rapproche c'est l'intérêt supérieur de l'enfant, y compris celui de l'enfant adopté dans le cadre d'une kafala judiciaire.

Pour ce qui concerne l'article 350 du code civil, il est proposé de substituer la notion de délaissement parental à celle de désintérêt manifeste qui fait souvent l'objet de difficultés d'interprétation, comme l'ont montré les auditions l'ont montré. C'est une bonne proposition qui répond aux recommandations formulées dans de nombreux rapports tels que ceux de l'IGAS, de l'Académie de médecine, de l'Observatoire national de l'enfance en danger, du Conseil supérieur de l'adoption et beaucoup d'autres.

Ces instances dressent les mêmes constats. En 2011, 250 enfants sont devenus pupilles de la nation par l'application de l'article 350 du code civil, et ce chiffre est en constante diminution depuis vingt ans. En revanche, le nombre d'enfants placés ne diminue malheureusement pas, voire augmente dans certains départements, et ces enfants font l'objet de mesures de délégation d'autorité parentale ou de mise sous tutelle. Or le statut de pupille est de loin le plus protecteur car il garantit sécurité et stabilité.

Reconnaître la notion de délaissement parental est en cohérence avec la ligne directrice qui a prévalu à l'écriture et au vote de la loi de 2007 sur la protection de l'enfance, plaçant l'intérêt supérieur de l'enfant au centre des décisions le concernant. Il est important de rappeler que cette même loi a apporté des garanties aux familles, en faisant de la prévention et de l'accompagnement une priorité absolue avant toute décision de placement d'un enfant mais également à la suite de son placement.

En déplaçant l'article 350 vers le titre du code civil relatif à l'autorité parentale, nous permettrons, espérons-le, aux professionnels de mieux protéger l'enfant, sans que le statut de pupille soit automatiquement lié à la notion d'adoptabilité. Nous améliorons ainsi la loi de 2007 et nous la complétons en lui ajoutant un volet consacré à l'adoption.

Pour autant, et il est important de l'exprimer, le nombre d'enfants adoptables n'augmentera pas de manière considérable, comme certains experts auditionnés l'ont indiqué. Actuellement, 800 enfants sont placés chaque année dans les services de l'aide sociale à l'enfance. Ce chiffre n'augmentera pas de manière considérable, mais le texte proposé permettra l'adoption d'enfants dans des conditions beaucoup plus favorables en terme de durée des procédures et de préparation au projet de vie que constitue l'adoption.

Le temps de l'enfant n'est pas celui des adultes et encore moins celui de nos administrations. Nous devons le prendre en considération, d'où l'obligation d'un rapport annuel voire biannuel pour les enfants de moins de deux ans, comme préconisé par de nombreux spécialistes.

Mais nous le savons, en dépit des améliorations consensuelles que nous allons examiner, la loi ne suffira pas. Le travail social dans les conseils généraux et dans les associations qu'ils financent dans ce domaine a été largement sollicité au cours des dernières années et perturbé par de nombreux dispositifs tels que l'allocation personnalisée d'autonomie, le revenu minimum d'insertion puis le revenu de solidarité active, l'allocation pour adulte handicapé. La territorialisation a souvent désorganisé ou au moins déstabilisé les services dans un premier temps.

Les services de protection de l'enfance, les premiers à être décentralisés dans les années 1980, jouissaient d'une relative stabilité au sein des conseils généraux. Ils ont été particulièrement bousculés par ces transferts de compétences. Si nous adoptons la loi, il faudra en discuter avec ces professionnels. Comme préconisé, il faudra réunir une conférence de consensus autour des principaux décideurs que sont les parlementaires, les conseillers généraux et le Gouvernement et surtout avec les professionnels et les associations et institutions concernées.

Comme vous l'avez dit, madame la secrétaire d'État, des référentiels existent, mais il en faudra d'autres puisque nous modifions la loi, et il faut qu'ils soient partagés par l'ensemble des acteurs, en particulier les conseils généraux. C'est la condition du succès de la réforme aujourd'hui proposée.

Outre la question fondamentale de l'article 350 et celle de la kafala sur laquelle nous reviendrons au cours des débats, je voudrais parler de l'agrément. Tout ce qui est proposé à ce sujet va dans le bon sens : les expérimentations réalisées dans certains départements qui prouvent que les évolutions que nous souhaitons sont à généraliser ; les mesures concernant l'Agence française de l'adoption sont également positives.

Je voudrais surtout parler de l'irrévocabilité de l'adoption simple qui est proposée par Michèle Tabarot. Contrairement à vous, madame la secrétaire d'État, je suis tout à fait favorable à cette proposition. Michèle Tabarot et moi-même travaillons sur cette question depuis très longtemps avec ceux qui nous accompagnent dans ce groupe. Nous connaissons bien les situations concernées.

L'irrévocabilité qu'elle propose n'est ni plus ni moins qu'une sécurité apportée à l'enfant. Or c'est bien de l'intérêt supérieur de l'enfant que nous parlons.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Adam

Il n'y a rien de pire pour un enfant placé dans une famille sous le régime de l'adoption simple que d'avoir cette épée de Damoclès au-dessus de la tête : la possible remise en cause à tout moment de son projet de vie, de sa famille, de son appartenance à cette famille. On ne peut pas laisser ces enfants dans cette situation.

La proposition qui est faite est équilibrée parce que, bien sûr, en cas de problème, il y aura toujours la possibilité d'une révocation. Nous favoriserons le plus grand nombre et pour les cas d'exception – les chiffres que vous nous avez énoncés prouvent bien qu'il s'agit d'exceptions – il sera toujours possible de revenir sur l'irrévocabilité de l'adoption simple.

Comme l'ensemble de mon groupe, je soutiendrai donc fortement l'irrévocabilité de l'adoption simple, une question qui est aussi très importante eu égard à la notion d'intérêt supérieur de l'enfant qui nous rassemble.

Pour conclure, je vous parlerai des enfants de Mayotte. La France est sans doute le premier pays au monde de par l'importance de ses territoires marins. Or il se passe des choses absolument dramatiques à Mayotte, où il n'y a pas de services de protection de l'enfance. Si c'est là une responsabilité du département, en raison de la décentralisation, l'accompagnement de l'État est indispensable pour que dans ce pays ultramarin la question de la protection de l'enfance soit aussi totalement prise en compte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

« Tout le monde ne peut pas être orphelin ! » a si bien fait dire Jules Renard au héros éponyme de son roman Poil de carotte.

En effet, n'en déplaise aux quelque soixante députés UMP signataires de cette proposition de loi sur l'enfance délaissée et l'adoption, les limites et lacunes du cadre juridique actuel ne pourront être résolues en décidant purement et simplement d'augmenter le nombre de déclarations judiciaires d'abandon au sujet des enfants nés en France de parents quelque peu imparfaits.

Les professionnels des secteurs judiciaire et associatif vous l'ont fort heureusement rappelé et nous pouvons, pour une fois, nous féliciter des conditions dans lesquelles notre Assemblée a pu étudier ce texte, c'est-à-dire avec le temps nécessaire pour mener les auditions qui convenaient.

C'est la démonstration que dans le groupe UMP tout le monde n'est pas imparfait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce n'est pas seulement à vous que je pensais, mais d'abord à Mme Tabarot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais vous pouvez vous associer spontanément à l'hommage que je lui rendais.

Après les trois mois de travail de la commission qui s'est spécialement constituée pour l'examiner, les députés du Front de gauche ont ainsi le plaisir de vous annoncer qu'ils souscrivent globalement à la proposition de loi qui est présentée aujourd'hui dans notre hémicycle.

Depuis la loi sur l'adoption de 2005 et les rapports Colombani en 2008, de l'IGAS en 2009 et du Conseil supérieur de l'adoption l'année dernière, le constat était partagé sur les dysfonctionnements qui entourent encore les procédures d'adoption et sur la nécessité de les améliorer.

Cette proposition de loi permettra probablement de lever certaines des lourdeurs procédurales – peut-être faut-il dire parfois arbitraires – qui rendent si difficile l'adoption en France, ainsi qu'elles ont été décrites dans le rapport remis par l'Inspection générale des affaires sociales en novembre 2009. Notre rapporteure a rappelé qu'elles tiennent notamment à l'intervention d'un grand nombre d'acteurs administratifs et judiciaires, à la complexité de certains circuits de décision, au cloisonnement des filières et des services et à la lenteur générale du processus.

Je veux tout de même revenir quelques instants sur l'article 1er. Nous en avions proposé la suppression par voie d'amendement avant qu'il ne soit modifié en commission. Avec cet article, la majorité proposait que la déclaration d'abandon d'un enfant puisse être prononcée au bout d'un an, non plus si les parents n'entretiennent plus avec lui « les relations nécessaires au maintien de liens affectifs », ainsi que le prévoit actuellement l'article 350 du code civil, mais en cas de « délaissement de l'enfant », le délaissement étant caractérisé par « les carences des parents dans l'exercice de leurs responsabilités parentales compromettant le développement psychologique, social ou éducatif de leur enfant » ! Même le projet de loi sur l'adoption déposé en avril 2009 par le Gouvernement au Sénat, sans avoir été inscrit à l'ordre du jour, n'allait pas aussi loin.

Cette façon de pointer du doigt les familles qui rencontrent des difficultés, dont vous savez qu'elles peuvent être d'origine très diverse, n'est pas nouvelle. Vous l'avez fait avec la très populiste, répressive et démagogique loi sur la suspension des allocations familiales en cas d'absentéisme scolaire,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…qui avait montré toute la considération de la majorité pour ce qui constitue bien souvent le symptôme de souffrances dont les origines peuvent être diverses, scolaires, personnelles, familiales…

Si la nouvelle rédaction adoptée par la commission pour définir le délaissement parental – « l'absence d'acte des parents contribuant à l'éducation ou au développement de l'enfant » – est moins contestable, elle devra à notre sens être encore améliorée pour ne pas courir le risque d'interprétations aléatoires par les juges, et, vous l'avez tous souligné, ce sont toujours les enfants qui doivent être notre préoccupation première.

D'autre part, nous avons quelques doutes sur la nécessité de ramener à six mois – c'est l'objet de l'article 2 – le délai à l'issue duquel peut être rendue une déclaration judiciaire d'abandon pour les enfants âgés de moins de deux ans au motif, allégué par notre rapporteure, que la période de la petite enfance est particulièrement structurante pour l'enfant et qu'il est donc nécessaire de prendre plus rapidement une décision assurant une plus grande stabilité des soins et une plus grande stabilité affective. C'est vrai, mais ce sont six mois qui engagent une vie entière, et l'on ne peut agir de manière trop précipitée. Cette disposition ne serait-elle pas plutôt motivée par le fait que ce sont souvent de très jeunes enfants qui sont souhaités par les candidats à l'adoption ? Le traitement plus particulier réservé à ces nourrissons, fragments d'espèce humaine, ainsi que Charles Dickens qualifia Oliver Twist en introduction de son roman, ne saurait devenir le moyen d'alimenter une sorte de vivier de bébés susceptibles d'être adoptés sur le dos des familles en détresse.

Nous approuvons l'article 3. Comment, en effet, ne pas souscrire à la nécessité de réformer le régime de l'agrément en le recentrant sur l'intérêt de l'enfant et d'améliorer l'information des candidats à l'adoption en amont de la procédure ? Mais il nous interroge plus généralement sur les moyens qui seront alloués pour permettre ces améliorations, sachant que l'essentiel du processus repose sur les départements.

À cet égard, l'article 4, qui introduit l'expérimentation d'un dispositif de formation des candidats à l'adoption en préalable à la délivrance de l'agrément, risque de créer des inégalités entre les départements. En effet, seuls les conseils généraux disposant d'un petit matelas financier pourront se permettre de se porter volontaires. Autant dire que les candidats à l'adoption de Paris ou des Hauts-de-Seine auront sans doute plus de chances de se voir délivrer l'agrément que ceux du Finistère, du Pas-de-Calais ou de la Seine-Saint-Denis !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'introduction en commission, par nos collègues du groupe SRC, d'un article 4 bis destiné à inscrire dans la loi le principe de référentiels nationaux permettant de guider l'évaluation des candidats à l'agrément nous semble, en revanche, porteur d'égalité, dans la lignée de l'initiative prise par la direction générale de la cohésion sociale de diffuser, depuis 2010, des supports méthodologiques identiques, quel que soit leur département, aux travailleurs sociaux, psychiatres ou psychologues.

Nous saluons les dispositions de l'article 6 qui ont pour objet d'améliorer le pilotage de l'adoption internationale et d'implanter l'Agence française de l'adoption dans tous les pays d'origine, qu'ils soient ou non signataires de la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. Nous savons en effet à quelles dérives a pu aboutir son absence d'implantation en Haïti, en Éthiopie ou en Russie, les trois premiers pays d'origine des enfants adoptés par les familles françaises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Quelle tristesse en revanche, à la lecture des amendements déposés pour la séance, de constater la tendance, qu'il faut bien qualifier de réactionnaire,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…de certains députés de la majorité chaque fois qu'ils ont l'occasion de toucher au droit de la famille !

Certains amendements proposent ainsi de revenir sur l'accouchement sous X.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Avec tous les progressistes, nous continuerons de défendre ce droit octroyé aux femmes depuis qu'en 1793, la Convention nationale décida qu'« il sera pourvu par la Nation aux frais de gésine de la mère et à tous ses besoins pendant le temps de son séjour qui durera jusqu'à ce qu'elle soit parfaitement rétablie de ses couches. Le secret le plus inviolable sera conservé sur tout ce qui la concerne. » Je vois, madame Greff, combien vous admirez le législateur de la Convention nationale, qui, il est vrai, était au moins aussi talentueux que le législateur actuel.

Debut de section - PermalienClaude Greff, secrétaire d'état chargée de la famille

C'est vous que j'admire, monsieur Brard ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous avez raison, madame la secrétaire d'État. (Nouveaux sourires.)

Le CNRS a établi que, de nos jours, ce sont toujours, généralement, des femmes très jeunes, célibataires et sans revenus qui accouchent anonymement. L'obstination du Gouvernement à refuser la gratuité de la contraception, notamment pour les mineures, ne nous encourage pas plus à supprimer cette spécificité française, même si nous ne nions pas le traumatisme que peuvent constituer l'abandon d'un enfant ou la méconnaissance de ses origines. Mais les Moïse, les Œdipe, les Auguste ont montré la diversité des parcours !

D'autres amendements proposent de ne plus octroyer d'agrément aux célibataires et de réserver le droit d'adopter aux couples mariés. Sachant que notre engagement est de faire adopter une loi sur l'égalité qui reconnaîtra par exemple le droit d'adopter aux couples de même sexe, vous imaginez bien quelle sera la position des députés du Front de gauche, qui, eux, sont progressistes, et non pas réactionnaires, sur ces amendements.

Pour conclure, disons que des raisons de circonstances auraient pu nous conduire à ne pas voter ce texte, notamment le triste bilan du président de la République et du Gouvernement en matière d'aide sociale à l'enfance ou en matière de coopération et d'aide humanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais nous savons à quel point certaines de ses dispositions sont attendues par celles et ceux qui voient en l'adoption le projet d'une vie. C'est pourquoi les députés du Front de gauche prendront leurs responsabilités et voteront ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission spéciale, madame la rapporteure, j'ai souvent été amené, dans ma courte expérience parlementaire, à prendre des positions en fonction de mes convictions, de mes valeurs personnelles ou des valeurs collectives que je partage avec d'autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Souvent ? Pas toujours ? Est-ce une autocritique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Je ne suis pas un spécialiste du sujet dont nous débattons aujourd'hui, mais je sais qu'il touche à l'intime conviction de chacun d'entre nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

La problématique de la vie de l'enfant, de la filiation, de la possibilité de partager une vie transcende complètement l'ensemble des clivages et des schémas traditionnels de réflexion, de pensée, l'ensemble des problématiques auxquelles nous sommes confrontés au quotidien dans l'exercice de nos mandats.

J'avais préparé une intervention structurée, argumentée, sur les plans juridique et technique. Après avoir écouté les précédents orateurs, qui ont décrit l'objet, les implications et les objectifs de cette proposition de loi, avec clarté et bien mieux que je ne le ferais,…

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

…je préfère vous livrer quelques réflexions que m'inspire ce texte.

S'il est un sujet qu'il faut considérer non en tant qu'adulte mais d'abord, comme l'a indiqué tout à l'heure Mme la rapporteure, en partant de l'intérêt de l'enfant, c'est celui-ci. Nous avons eu, dans cet hémicycle, des débats sur la problématique du mariage homosexuel et de l'adoption par des couples homosexuels qui transcendaient les clivages politiques.

Contrairement à ce que prétend notre collègue Brard avec ce talent pour la provocation qu'on lui connaît, il n'y a pas de querelle des modernes et des anciens à ce sujet, il n'y a pas de querelle entre progressistes et rétrogrades. Il y a probablement ceux qui envisagent la question en considérant l'avenir et l'intérêt de l'enfant et ceux qui voudraient afficher dans notre société des comportements qui devraient rester liés à leur intimité.

Je suis personnellement très choqué, non par l'évolution de notre société, mais par le fait qu'une pratique individuelle puisse un jour devenir un signe de revendication ou de reconnaissance dans notre société. Ce n'est pas ainsi que notre société peut et doit se construire. Lorsqu'on traite de la problématique de l'avenir d'un enfant, je pense que c'est de lui qu'on doit partir. C'est à lui qu'on doit penser lorsqu'on est amené à légiférer sur un sujet qui, nous le voyons bien, ne se prête pas de façon mécanique, mathématique, aux clivages habituels.

Nous avons débattu ce matin d'un certain nombre de textes qui avaient pour objet des problématiques juridiques, des problématiques comportementales, des problématiques liées à l'évolution de nos sociétés, à propos desquelles diverses options étaient possibles. S'agissant de l'adoption, c'est beaucoup plus subtil, beaucoup plus complexe. La question renvoie chacun à ses convictions intimes.

Je veux partager avec vous trois réflexions.

Tout d'abord, si je souscris tout à fait à l'article 1er du texte de la commission, je m'interroge encore un peu sur la notion de délaissement et la manière dont elle est formulée, et je vous invite à la vigilance : « Un enfant est considéré comme délaissé lorsque ses parents n'ont contribué par aucun acte à son éducation ou à son développement pendant une durée d'un an. » Cela paraît assez clair, mais qu'en est-il juridiquement ? Que veut-on dire par « aucun acte lié à l'éducation ou au développement de l'enfant pendant une durée d'un an » ? La durée d'un an, c'est clair, c'est douze mois, mais soyez attentifs à la subtilité de l'énoncé et aux interprétations qui pourront en être faites. Mon propos n'est pas du tout de dénoncer cette formulation, je veux simplement vous alerter. Nous devons être vigilants quant à la manière dont cette disposition pourra, concrètement, devenir opposable.

L'article 5 sera tout à l'heure l'objet d'une discussion. J'ai écouté attentivement ce qu'en ont dit Mme la rapporteure et notre collègue Patricia Adam. Si j'ai bien compris le débat, nous réserverions au seul ministère public la possibilité de demander la révocation de l'adoption si l'intérêt de l'enfant l'exige. Je ne suis pas sûr qu'il y ait là une réelle avancée dans l'intérêt de l'enfant, à moins que la Chancellerie ne fasse un travail auprès des procureurs de la République pour les conduire à considérer ce domaine comme une de leurs priorités quotidiennes, ce qui n'est pas forcément le cas aujourd'hui. En disant cela, je ne blâme aucunement l'activité des procureurs de la République, mais nous avons déjà eu plusieurs fois ce débat sur les moyens de la justice et nous savons tous qu'ils ont à traiter chaque jour un grand nombre de dossiers. Sans doute aurons-nous à revenir sur ce sujet lorsque nous aborderons l'article 5.

Enfin, je suis favorable à l'élargissement des compétences de l'Agence française de l'adoption – c'est l'article 6 de la proposition de loi – qui nous permettra de gagner en crédibilité et d'oeuvrer dans l'intérêt des enfants.

Je l'ai dit, je n'avais pas du tout prévu d'intervenir en ces termes. Aussi, veuillez m'excuser si j'ai été un peu confus. J'ai souhaité, en tout cas, vous parler avec sincérité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pourquoi ? Ce n'est pas toujours le cas ? (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Berdoati

Mon cher collègue, ne croyez-vous pas qu'il soit parfois préférable de donner libre cours à ses convictions plutôt que de lire un papier préparé par un collaborateur, qui peut vous conduire à prendre des positions bien éloignées de la hauteur à laquelle nous devrions situer nos débats ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Parlez pour vous ! Ne voyez pas les autres à votre image !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Oh, j'ai l'habitude de manier le sabre, comme vous, monsieur Lamour, mais avec la langue !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Vous n'êtes pas encore champion olympique ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Blisko

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous débattons d'un sujet, l'adoption, d'autant plus sensible que s'y est ajoutée la question du délaissement de l'enfant. Trop nombreux sont en effet les enfants qui sont placés à si long terme qu'ils deviennent très difficilement adoptables, comme en témoignent le rapport de l'IGAS et celui de l'Académie de médecine. En raison du faible nombre d'enfants à adopter, en raison de l'importante demande des familles, il était temps, comme l'a dit M. Roubaud, de se pencher sur le sujet. Je vous en remercie, madame la rapporteure. Le climat dans lequel nous avons travaillé prouve que nous étions tous très préoccupés par la question.

Notre culture accorde la primauté à la famille dite naturelle et à la filiation la plus normale possible. Je ne reviens pas sur les amendements ou sur les propositions de loi que nous avons déposés et qui concernaient l'élargissement de ce que l'on appelle « le mode de faire famille » et la nécessité de privilégier en ce domaine une neutralité absolue – tous ont été refusés par la majorité – et j'entends rester dans le cadre strict de la présente proposition de loi.

Indépendamment de tous ces aspects, et comme j'ai pu l'observer dans nombre de conseils généraux et de services départementaux d'aide sociale, l'adoption n'est pas tout à fait située sur le même plan que la protection de l'enfance. Dans bien des services départementaux de protection de l'enfance, l'adoption sanctionne d'une certaine manière l'échec des procédures. Sans doute, c'est rarement affirmé de cette manière, mais on le sent. Il suffit parfois de voir l'organisation des locaux dans l'hôtel du département ; le bureau de l'adoption se trouve au fond du couloir, c'est celui qui n'est pas fréquenté, c'est celui que les équipes regardent avec un petit soupir en se disant : c'est là qu'aboutiront les enfants dont nous nous occupons si nous travaillons mal… Je serais heureux que, à l'occasion de ce débat et au-delà, nous puissions faire évoluer les mentalités. Certes, il est important de voter des lois et de publier des règlements, mais l'état d'esprit dans lequel les appliquent ceux qui opèrent sur le terrain est peut-être plus important encore.

Nous pourrions, en tout cas, profiter de ce débat pour établir que l'adoption est une modalité de protection de l'enfance et que le délaissement de l'enfant est une maltraitance grave, qui entraîne des ruptures psychologiques et des répercussions psychiques importantes sur sa scolarité, sur sa formation, sur son devenir et sur son avenir. Nombre de rapports montrent que ces traumatismes de la petite enfance déterminent souvent ce qui se passe après dix-huit ans.

Trop d'enfants sont placés à long terme, et certains très précocement. Les services départementaux de l'aide à l'enfance doivent être plus ouverts à un projet d'adoption, en constatant plus rapidement l'état effectif d'abandon de ces enfants délaissés – c'est tout le sens du rapport de Mme Tabarot. Aucune définition ne sera jamais parfaite, mais je crois que nous allons dans le bon sens et je suis heureux que l'unanimité se soit quasiment faite sur cette notion d'urgence. L'intérêt de l'enfant, c'est qu'on ne le laisse pas trop longtemps dans une situation ambiguë.

Après les compliments, vous me permettrez de formuler quelques critiques. En France, il existe d'autres enfants dont la situation juridique confuse a des répercussions psychologiques tout aussi importantes. Il s'agit des enfants vivant sous régime de la kafala judiciaire – à distinguer de la kafala traditionnelle que nous n'acceptons pas et qui n'a pas à passer dans notre droit –, à propos desquels un juge de la famille ou un juge des enfants d'un pays étranger a pris une décision judiciaire. Le groupe socialiste a déposé des amendements visant à autoriser dans ces cas le prononcé de l'adoption et à faire cesser le régime de prohibition que la France est seule à observer parmi les pays européens, lesquels ont introduit, fût-ce prudemment, la kafala judiciaire dans leur droit positif.

Le groupe socialiste demande également la suppression du délai de cinq ans imposé avant l'obtention de la nationalité française. L'épreuve paraît en effet un peu lourde pour des bébés qui sont placés dans une situation bizarre, puisqu'ils sont étrangers et que leur famille est française. Ne souhaite-t-on pas que tous les enfants accueillis en France, quel que soit leur mode d'arrivée, national ou international, se sentent le mieux possible ? Il est certain que, de ce point de vue, ces enfants-là ne sont pas les plus favorisés.

Chaque année en France, 300 à 400 couples accueillent un enfant sous ce régime, que le droit français méconnaît. À cela s'ajoute l'attitude inadmissible du ministère de l'intérieur qui soupçonne d'abord un détournement des lois, notamment celles régissant le regroupement familial, voire un trafic d'enfants, ce qui est, vous en conviendrez, mes chers collègues, particulièrement blessant et inacceptable pour toutes ces familles françaises adoptantes.

Il est temps que notre pays se conforme à la Convention internationale des droits de l'enfant de New York, ratifiée par l'Algérie et le Maroc, respectivement en avril et en juin 1993, et à la Convention de La Haye de 1993, en reconnaissant aux enfants recueillis sous le régime de la kafala judiciaire des droits identiques à ceux des enfants adoptés sous le régime de l'adoption simple, comme l'ont d'ailleurs préconisé le Médiateur de la République puis le Défenseur des Droits.

Je souhaite dire aussi quelques mots au sujet de la nécessaire évolution de l'AFA dans le suivi des dossiers d'adoption à l'international. L'adoption, c'est une évidence, ne se fait qu'au regard des critères et des exigences des pays d'origine, en mettant toujours en avant l'intérêt de l'enfant et en faisant en sorte que les enfants soient accueillis le mieux possible dans les familles qui ont reçu un agrément. On le sait – le rapport Colombani l'a mis en évidence –, les pays d'origine ont vu leur niveau de vie augmenter et beaucoup ont pris conscience de la nécessité d'une politique locale de protection de l'enfance. La conséquence de cette meilleure prise en charge de leurs orphelins ou de leurs enfants délaissés est la priorité donnée à l'adoption à l'intérieur de leurs frontières. C'est une évolution lourde, inéluctable. Ces pays en développement ont heureusement des classes moyennes qui peuvent prendre en charge un certain nombre d'enfants abandonnés. C'est le cas depuis longtemps de la Corée du Sud, de la Bulgarie, plus récemment de l'Inde, du Brésil, du Viêtnam. Ces pays accordent aujourd'hui la priorité à l'adoption nationale à l'intérieur de leurs frontières, plutôt que l'adoption internationale, ce qui n'est pas sans nous poser d'énormes problèmes : d'où vont venir les enfants qui arrivent chez nous de l'international ? Songeons au cas d'Haïti : il faut remercier tous ceux qui, dans cet hémicycle et au-delà, ont joué la carte de l'éthique, mais les dérives non éthiques n'ont pas manqué dans d'autres pays européens, au moment du séisme et de la catastrophe psychologique, matérielle, administrative qu'a connue ce malheureux pays. Cette question mérite d'être posée : la présente proposition de loi essaye d'y répondre.

L'évolution de ces pays a forcément des répercussions sur les profils des enfants confiés à l'adoption : peu ou pas d'enfants en bas âge ; davantage de fratries et de grands enfants, dont certains ont une histoire violente, difficile ; et, bien évidemment, des enfants dits « à particularité » – sans qu'il soit besoin d'entrer dans le détail, l'expression recouvre des réalités bien connues des spécialistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Blisko

Pour que l'AFA soit plus efficace, le groupe socialiste a déposé un amendement qui a été voté à l'unanimité en commission. L'AFA aura désormais pour mission d'orienter, et non seulement de conseiller, comme le suggère la présente proposition de loi, toutes les personnes désireuses d'adopter à l'international selon les critères des pays choisis. Il est très important – sans décourager personne – d'éclairer vraiment les familles sur les critères des pays choisis. Le projet parental doit être obligatoirement en adéquation avec les réalités du pays d'origine. C'est une notion qu'il n'est pas aisé de faire comprendre. L'AFA est une institution jeune et, au début, s'est beaucoup heurtée à ces difficultés.

Le travail réalisé avec la Colombie et les familles adoptantes est un excellent exemple. Il a abouti en 2010 à une augmentation de l'adoption de 50 % – soit 86 adoptions – d'enfants grands ou de fratries.

Pour finir, je souhaiterais dire quelques mots sur les consultations d'orientation et de conseils en adoption, les COCA – pardonnez l'aspect assez cocasse de l'acronyme. Ceux-ci permettent aux parents adoptants de consulter sur les problématiques de l'adoption : en amont avec des entretiens préparant les parents à cette nouvelle parentalité, pendant le processus d'apparentement qui peut être long et délicat, et, en aval, pour la phase post-adoption. Chacun sait qu'il n'est pas simple de s'occuper d'enfants : avec l'adoption, on ajoute un peu de difficulté.

Ces COCA existent mais dépendent de la bonne volonté de quelques personnes – ici un service de pédopsychiatrie, là un service de médecine ou de pédiatrie – et fonctionnent parfois sans aucune aide financière, à moyens constants, grâce au travail hospitalier classique. Leur contribution est essentielle, car l'adoption est une démarche complexe qui réclame parfois une prise en charge professionnelle. L'attente et la venue d'un enfant dans le cadre de l'adoption forment un parcours jonché parfois de moments heureux mais aussi de beaucoup de difficultés. Pour tenir bon, les parents idéalisent souvent l'enfant qui ne se comportera pas toujours comme ils l'espèrent. Car, loin d'être une page blanche, l'enfant, même un nourrisson, a déjà une histoire. C'est pour cela que les COCA doivent être mis en place dans toute la France – au moins un par grande région – avec un financement adéquat.

Un groupe de travail avait été mis en place pour commencer à structurer le déploiement de ces consultations. J'aimerais qu'on puisse nous dire quelques mots sur les résultats qu'il a obtenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Blisko

C'est moi qui vous remercie, madame la présidente, car je cherchais, sans la trouver, une conclusion que vous venez de me fournir. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Bourragué

Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, vous le savez, le nombre de personnes qui font une demande d'adoption ne cesse d'augmenter chaque année. Plus de 10 000 demandes ont été reçues en 2011 pour 4 000 enfants adoptés. De plus, l'adoption internationale représente encore aujourd'hui plus de 80 % de l'adoption en France. Nous sommes le troisième État d'accueil d'enfants adoptés à l'étranger, après les États-Unis et l'Italie.

En France, si plus de 2 000 enfants ont le statut de pupille de l'État, seulement près du tiers de ces pupilles sont placés dans une famille en vue de leur adoption et 74 % de ces enfants ont moins d'un an.

Que deviennent les deux tiers restants ? Avec le rapport sur l'adoption remis au Président de la République par Jean-Marie Colombani en mars 2008, des propositions concrètes ont été faites. Ses principales propositions ont été mises en oeuvre. C'est le cas de la création d'un ambassadeur pour l'adoption internationale. Son investissement et son action après le tremblement de terre en Haïti ont été vraiment utiles et protecteurs pour les enfants et leurs famille, dans une situation si difficile pour les adoptants.

De même, le développement des correspondants « adoption » dans les ambassades ou dans les consulats a permis un meilleur accueil et accompagnement des familles candidates à l'adoption dans les pays concernés.

Cependant, des améliorations restent possibles et nous sommes nombreux à être mobilisés sur cette question sur tous les bancs de notre assemblée.

Je veux ici remercier et féliciter Mme Michèle Tabarot pour son projet de loi et son excellent rapport, ainsi que M. Jean-Marc Roubaud, président de la commission spéciale.

Ce projet de loi porte en premier lieu sur l'amélioration de la rédaction de l'article 350 du code civil relatif à la déclaration judiciaire d'abandon, qui permet à l'enfant de bénéficier du statut protecteur de pupille de l'État.

Pour mieux prendre en compte la situation des enfants délaissés et leur droit à vivre dans une famille, cette proposition de loi propose de remplacer le désintérêt manifeste par la notion de « délaissement parental ».

Cette notion fait référence aux carences dans les responsabilités parentales, carences qui compromettent le développement de l'enfant. Cette nouvelle définition plus objective doit permettre de mieux protéger l'enfant délaissé.

Car, encore aujourd'hui, nombre d'enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance peuvent rester sans relations familiales et sans le statut protecteur de pupille de l'État pendant plusieurs années. Ainsi, trop souvent, les enfants confiés à l'aide sociale à l'enfance atteignent l'âge de dix, voire quinze ans, sans vrai projet familial.

Pour mieux prendre en compte l'intérêt supérieur de l'enfant, l'article 1er de la présente proposition introduit la notion de « délaissement parental », notion de référence dans la plupart des pays européens.

Pour l'enfance délaissée, je veux aussi attirer votre attention sur la situation des enfants pour lesquels une délégation d'autorité parentale a été prise par la justice. À l'article 377 du code civil, la délégation d'autorité parentale est présentée comme une alternative à la déclaration judiciaire d'abandon.

« En cas de désintérêt manifeste ou si les parents sont dans l'impossibilité d'exercer tout ou partie de l'autorité parentale, le particulier, l'établissement ou le service départemental de l'aide sociale à l'enfance qui a recueilli l'enfant peut saisir le juge, aux fins de se faire déléguer totalement ou partiellement l'exercice de l'autorité parentale ».

Cette délégation n'a aucun effet sur le statut de l'enfant. L'IGAS, dans son rapport de 2008, note que la situation juridique de ces enfants « n'est pas nécessairement meilleure que depuis qu'ils ont été séparés de leurs parents ».

Vous avez bien précisé, madame la secrétaire d'État, que les enfants ainsi protégés par une décision de justice bénéficieront d'un examen régulier de leur situation au même titre que les autres enfants, tous confiés à l'aide sociale à l'enfance. Ils pourront ainsi bénéficier du statut plus protecteur de pupille de l'État s'ils font l'objet d'un délaissement parental.

De plus, pour éviter que les enfants demeurent sans vrai projet parental, l'article 2 précise qu'un rapport doit être établi pour chaque enfant accueilli ou faisant l'objet d'une mesure éducative six mois après sa prise en charge, puis au bout de la première année. Comme l'ont dit mes collègues, le temps de l'enfant n'est pas celui de l'adulte et cette protection dès les premiers mois est essentielle.

En parallèle – c'est l'objet d'un autre article –, il nous faut mieux informer les candidats à l'adoption française ou internationale en précisant l'âge, la santé, les conditions de vie des enfants adoptables dans leur pays. C'est l'objet de l'article qui accompagne l'information des familles candidates lors de l'agrément.

Aujourd'hui, les enfants adoptables ont changé. Ils sont très souvent plus âgés et peuvent parfois souffrir de déficiences. Dans les consulats que j'ai rencontrés en Russie ou en Afrique, cet accompagnement pour une meilleure information des candidats à l'adoption est très attendu ; c'est le rôle aussi bien de l'AFA que des conseils généraux.

Le troisième point que je souhaite aborder concerne la kafala. Nous avons longuement discuté. Vous nous proposez, madame la rapporteure, un amendement qui est un progrès.

Cependant nous le savons, aujourd'hui en France, la kafala n'empêche pas l'adoption, car selon le code civil, après cinq années de résidence en France au sein d'une famille française, l'enfant peut réclamer la nationalité française et pourra ainsi bénéficier d'une adoption simple.

Cependant, pour améliorer la situation de ces enfants, le délai pour obtenir la nationalité française pourrait être réduit à un an pour les enfants n'ayant plus leurs parents dans leur pays de naissance et exclusivement pour les kafalas judiciaires. Cette mesure simplifierait la vie de nombreuses familles françaises résidant en France ou à l'étranger. Madame la secrétaire d'État, je compte sur votre attention et votre écoute concernant ce point réglementaire.

Bien sûr, je voterai ce projet de loi qui est un nouveau progrès pour la protection de l'enfance délaissée et l'adoption. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la proposition de loi sur l'enfance délaissée et l'adoption ;

Proposition de loi tendant à renforcer l'effectivité de la peine complémentaire d'interdiction du territoire français et visant à réprimer les délinquants réitérants.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Nicolas Véron