Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 9 septembre 2010 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant réforme des retraites (nos 2760, 2770, 2768, 2767).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de treize heures vingt-huit minutes pour le groupe UMP, dont 219 amendements restent en discussion, dix-huit heures sept minutes pour le groupe SRC, dont 148 amendements restent en discussion, quatre heures quarante-deux minutes pour le groupe GDR, dont 131 amendements restent en discussion, cinq heures pour le groupe Nouveau Centre, dont 49 amendements restent en discussion, et trente-cinq minutes pour les députés non-inscrits, dont 7 amendements restent en discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Hier soir, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits à l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Robert Lecou, inscrit sur l'article..

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, mes chers collègues, en entamant ce débat sur l'article 1er, qui traite du comité de pilotage des régimes de retraite et qui brosse la philosophie et l'esprit du projet de loi, l'occasion m'est donnée d'exprimer ma position après une discussion générale qui a traduit un refus du consensus sur un sujet pourtant consensuel.

Souvent, nos compatriotes nous disent : « Au lieu de tant légiférer, faites en sorte que la loi s'applique. » C'est un jugement de bon sens que je partage. Pourtant, aujourd'hui, je dois dire ma satisfaction de légiférer sur les retraites : nous sommes enfin au rendez-vous du sauvetage de la retraite par répartition, condamnée à sombrer si nous choisissons l'immobilisme. Car les chiffres sont là, clairs et sans appel. Ils ont été remis récemment par le comité d'orientation des retraites, comité dont la composition et les sources d'information garantissent la qualité et la justesse des rapports. Ceux-ci sanctionnent sans appel la situation actuelle en rappelant que les conditions de l'équilibre ne sont plus assurées puisque le nombre de cotisants diminue alors que le nombre de retraités augmente. Voilà une évolution démographique, due entre autres à l'allongement de la durée de vie, qui s'impose à nous.

Ne rien faire serait donc suicidaire ou assassin. Deux qualificatifs forts, certes, mais qui apparaissent justes si l'on est attaché au régime par répartition mis en place au lendemain de la deuxième guerre mondiale, dans l'esprit du Conseil national de la Résistance…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Arrêtez ! De tels mots vont vous rester en travers de la gorge et vous allez vous étrangler !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

…et soutenu par la volonté politique du général de Gaulle. La répartition, c'est l'expression forte et juste de notre système de solidarité. Dans un monde tenté par l'égoïsme, par l'individualisme ou par l'abandon soporifique dans les bras d'un État-providence dont les limites et les effets pervers démontrent l'incapacité, dans un monde sans perspective, oui, il est bon de favoriser le principe de solidarité des générations car les actifs assurent ainsi la retraite de ceux qui ont été les actifs autrefois, et qui avaient eux-mêmes payé alors la retraite de leurs aînés.

Une telle affirmation est partagée, mais doit être complétée par une autre : nous devons réformer sans mettre en péril le niveau des pensions,…

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

…en garantissant le niveau de vie des Français retraités, qui ont servi la France et ne doivent pas faire les frais de la réforme.

Mes chers collègues, je sais que, sur l'ensemble des bancs, vous faites vôtres ces deux affirmations. Nous devons donc légiférer sans attendre pour sauver la retraite par répartition tout en garantissant le niveau des retraites. Mais nous devons aussi défendre l'emploi en favorisant la compétitivité de l'économie française, qui s'inscrit dans une Europe et dans un monde concurrentiels. Quel chemin emprunter ? Celui de la fiscalité ? Oui, si c'est la fiscalité sur les stock-options et les retraites chapeaux ; non, si elle porte sur les entreprises, les foyers ou les retraites. Un chemin existe. Il s'inscrit dans la logique de notre système de solidarité. C'est le chemin de l'âge, celui de la réalité démographique, et donc celui de la durée du temps de travail. En effet, l'âge est inéluctablement au coeur de la question des retraites, elles-mêmes au coeur du système de solidarité français. En portant l'âge de départ à la retraite à 62 ans, nous ferons un choix raisonnable. Nous ferons même mieux encore si nous sortons ainsi de cette spirale dans laquelle la gauche nous a entraînés avec sa diabolisation du travail depuis qu'elle véhicule le thème : « Moins on fera d'heures et plus on s'arrêtera tôt de travailler, mieux l'on vivra ». Nos concitoyens ne partagent pas ce point de vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

Certes, ils ont envie de faire un travail intéressant ; certes, il faut que les entreprises cherchent à réaliser de meilleures conditions de travail (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) ; mais les Français aiment travailler pour mieux vivre, pour servir la collectivité et pour mieux se réaliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Les quatre millions de chômeurs aimeraient surtout trouver du travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

Mes chers collègues, un débat de fond s'impose sur le thème du travail. Nous l'aurions déjà tenu que l'on aurait peut-être échappé à cette opposition frontale sur les 62 ans. Mais s'arc-bouter sur le refus de porter à cet âge l'ouverture des droits à la retraite, c'est fuir ses responsabilités. En acceptant la logique démographique et en permettant l'équilibre de nos régimes, nous assurerons, nous, nos responsabilités devant les Français et devant les futures générations ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Monsieur le ministre, l'article 1er, qui traite du comité de pilotage, soulève plusieurs questions. Fallait-il en effet, le COR existant déjà, mettre en plus en place un tel comité ? Je crois que le caractère évolutif du système de retraite et la nécessité d'avoir une évaluation permanente des orientations à adapter justifient la création d'un tel comité. La crise économique et sociale que nous venons de traverser démontre, s'il en était besoin, que des ajustements permanents et continus sont indispensables. Nous essayons de sauver à tout prix le régime par répartition, comme l'a souligné Robert Lecou, parce qu'il constitue un des éléments de solidarité du système social français. À cet égard, l'ajustement des trois paramètres suivants est absolument indispensable car ils constituent les piliers du système de retraite : la durée d'assurance, le montant des cotisations et le niveau des pensions.

Parmi les tâches qui incomberont au comité de pilotage figure le suivi de l'évolution du système car nous avons tous conscience que le régime par répartition à la française est de plus en plus menacé en raison de la diminution régulière des cotisants – aujourd'hui 1,8 pour un retraité, et on prévoit 1,2 demain. Cela veut dire qu'il faut non seulement suivre avec vigilance son évolution mais également réfléchir aux alternatives qui s'avéreraient nécessaires dans les années à venir pour maintenir cette solidarité à laquelle tous les Français sont très attachés.

Autre tâche : en relation avec l'observatoire de la pénibilité du COCT – le conseil d'orientation sur les conditions de travail –, il s'agit pour le comité de pilotage d'offrir une nouvelle perspective de la pénibilité, une perspective plus équitable. Il faudra donc demander aux privilégiés qui ont un métier dont la pénibilité a été réduite un effort particulier. Je rappelle que le problème de la pénibilité relève également du ressort du comité. La pénibilité est un phénomène évolutif – on l'a déjà vu avec certains métiers, considérés comme pénibles en d'autres temps et qui, aujourd'hui, sont considérés différemment. Je sais que le Gouvernement a été très attentif à s'appuyer sur des éléments objectifs d'évaluation de la pénibilité, mais il nous faudra aller au-delà de ces éléments car celle-ci doit être évaluée au travers d'autres paramètres, ce qui permettra de garantir la meilleure équité. Nos compatriotes y sont extrêmement attachés.

Voilà, monsieur le ministre, les éléments que je voulais apporter s'agissant de ce comité de pilotage. Il est nécessaire et me paraît un élément fondamental (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)…

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Il y aura des réunions, mais pas de financement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

…pour que le système de retraite soit pérenne et vraiment géré. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Lesterlin

Monsieur le ministre, qu'ils aient manifesté ou pas, nombre de nos compatriotes ont le sentiment, à juste titre, de se retrouver sur le bas-côté : les carrières longues, les fonctionnaires parents de trois enfants, les victimes de la pénibilité, les seniors, les retraités agricoles. Dans le cortège de 6 000 personnes qui défilait dans ma ville de Montluçon, une ville moyenne de 40 000 habitants, il y avait des travailleurs et des retraités de l'agriculture. C'est inhabituel. Mais eux savent de quoi ils parlent s'agissant de la pénibilité et du niveau de retraite. Je souhaite par cet exemple attirer votre attention sur les retraités agricoles, peut-être les moins privilégiés de nos compatriotes en matière de retraite.

En effet, deux catégories ne bénéficient toujours pas du régime complémentaire de retraite obligatoire prévu par la loi de 2002 : les conjoints – souvent d'ailleurs des conjointes – et les aides familiaux. Ainsi, 1,8 million de retraités agricoles sont mis à l'écart de la solidarité nationale alors même que les mesures mises en place sous le gouvernement de Lionel Jospin avaient bénéficié à plus de 900 000 retraités agricoles, dont la pension avait augmenté de 29 % pour les chefs d'exploitation, de 45 % pour les veuves et de 79 % pour les conjoints et les aides familiaux. Les revalorisations sous les gouvernements suivants se sont avérées insuffisantes et partielles. Beaucoup de retraités sont soit écartés du dispositif, soit victimes des mécanismes de minoration. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 prévoyait l'instauration d'un montant minimum de retraite fixé à 633 euros par mois pour les agriculteurs et à 506 euros pour les conjoints, mais l'instauration du plafond de 750 euros par mois, toutes pensions confondues, est un critère pénalisant. Vous voyez que nous sommes bien loin des bénéficiaires des mesures fiscales de votre gouvernement. La loi portant réforme des retraites de 2003 avait pourtant fixé un montant minimum à 85 % du SMIC, c'est-à-dire 880 euros par mois, soit 130 euros de plus que le plafond de 750 euros. Nous restons donc en dessous du minimum prévu en 2003.

Concrètement, pour les quelque 20 500 retraités agricoles de mon département, voici ce qui va se passer : seuls 10 % auront une amélioration – imperceptible – de leur pension. Je pourrais vous épargner les chiffres tant ces augmentations sont ridicules : 10 euros, 20 euros, 50 euros selon les cas. Il est nécessaire de rétablir en leur faveur un équilibre – que dis-je ? – il est nécessaire de réparer une injustice. Il faut étendre le régime de retraite complémentaire obligatoire prévue par la loi de 2002.

Nous attendions de votre part de la responsabilité, vous nous proposez de la partialité ! En témoignent les amendements gouvernementaux improvisés à la hâte par l'Élysée hier pour laisser croire que vous avez entendu les messages de la rue. Faites en sorte qu'un vrai débat s'engage et que nous puissions confronter nos projets.

Nous reviendrons plus en détail, nous socialistes, lors de l'examen des amendements, sur nos propositions, qui ont été rendues publiques bien avant votre projet de loi (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), et sur notre vision d'une répartition plus équitable des efforts. Nous les transmettrons, s'il est voté, au comité de pilotage que vous instaurez dans cet article 1er, afin qu'il propose les mesures correctrices qui vont s'imposer pour assurer la pérennité financière et l'équité de notre système de retraite par répartition.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Monsieur le rapporteur, j'en profite avant qu'on ne me coupe la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Selon l'article 1er, la toute première mission du comité de pilotage des régimes de retraite, c'est de veiller à la pérennité financière de ces régimes. Telle est la seule préoccupation de la droite en matière de retraite : la comptabilité. Il faut le dire : si l'approche gouvernementale de notre système de retraite est une approche purement comptable et financière, c'est parce que le Gouvernement et sa majorité ont cédé aux injonctions des agences de notation et du FMI. C'est donc un projet ultralibéral qui nous est présenté, cela ne fait aucun doute.

Ainsi, cet été, dans un de ses bulletins, le Fonds monétaire international lui-même appuyait cette réforme faite, selon lui, « à juste titre ». Ce faisant, l'institution de Washington, cheval de Troie du libéralisme à travers le monde, donnait un brevet de bonne conduite au texte de MM. Sarkozy, Fillon et Woerth. Cette réforme ouvre de multiples brèches dans notre système de répartition tout en prétendant le sauvegarder. C'est devenu une ritournelle à droite : on ne réforme pas pour attaquer l'héritage des luttes sociales, mais soi-disant pour les sauver. Quand ce Gouvernement fermait des tribunaux, c'était pour sauver la justice ; quand il ouvre le capital de La Poste, c'est pour sauver ce fleuron du service public ; quand Mme Bachelot dérembourse des médicaments, ferme des hôpitaux et des services d'urgence, c'est pour sauver la sécurité sociale.

Il en va de même pour cette réforme. Bien qu'elle mette à mal le principe du système par répartition, tous les petits soldats de l'UMP ressassent qu'ils sauvent, qu'ils préservent ce système. C'est bien évidemment faux.

Il y avait bien des façons de préserver réellement le système par répartition…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

… en réorganisant l'ensemble des régimes de retraite, par exemple, en les dotant d'un socle commun de droits. C'était tout l'objet de l'une de nos propositions qui est malheureusement passée à la trappe à cause de l'article 40, et nous n'avons toujours pas compris pourquoi,…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

…puisqu'il ne créait pas de dépenses supplémentaires.

Par cet amendement nous proposions une refonte complète de l'organisation et de la gestion des différents régimes de retraite. Pour assurer à l'ensemble des assurés un socle commun de droits comme le propose d'ailleurs la CGT, cet amendement prévoyait la constitution d'un organisme unique de gestion des régimes de retraite, baptisé Maison commune des retraites.

Cet organisme pourrait avoir pour mission de proposer un socle commun de garanties et de droits s'appliquant à l'ensemble des différents régimes : taux de remplacement d'au moins 85 % du revenu d'activité pour une carrière complète ; instauration d'un plancher des pensions égal au SMIC ; maintien de l'âge d'ouverture des droits à 60 ans ; reconnaissance des pénibilités ; indexation des salaires portés au compte sur le salaire moyen ; indexation de l'ensemble des pensions sur le salaire net moyen.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il pourrait également être chargé d'arrêter une définition commune de la notion de carrière complète et de la période de référence adaptée à chaque régime, de définir les règles de la compensation entre les différents régimes et enfin de définir la politique de décaissement du Fonds de réserve des retraites.

Gérée par des représentants élus des salariés, cette Maison commune des retraites serait une institution de sécurité sociale regroupant l'ensemble des régimes de retraite du public et du privé en respectant les prérogatives de chacun d'entre eux.

Dans cet hémicycle, ces propositions intéressantes sont donc censurées.

Vous l'avez compris, les députés communistes républicains, citoyens et du parti de gauche proposent d'aborder la question des retraites sous un angle autrement plus large que celui retenu par la droite. Les droits des assurés et la solidarité qui est nécessairement au coeur d'un système par répartition doivent être les questionnements centraux du débat.

Ce sera l'approche des députés communistes, républicains et du parti de gauche. Cela passe par la suppression de l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Sirugue

L'intérêt de cet article 1er reste à démontrer tant la création d'un énième comité semble finalement assez surprenante. Nous disposons déjà d'organismes, le moindre n'étant pas le COR, permettant de travailler sur la question des retraites.

Néanmoins, au travers des différentes missions qu'il liste, cet article permet de revenir à l'essentiel du message qui a été adressé par les Français : oui, ils veulent une réforme, à condition qu'elle soit juste et pérenne.

Cette notion de pérennité conduit à s'interroger sur l'avenir et donc à s'intéresser aux jeunes générations qui semblent un peu oubliées dans le débat qui nous occupe depuis quelques jours.

Ces jeunes générations, vous risquez qu'elles désespèrent…

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Sirugue

… de la réforme que vous leur suggérez. Tout d'abord, parce que les jeunes savent d'ores et déjà qu'ils seront concernés par vos mesures d'âge au cours de toute leur carrière. Ensuite, parce qu'ils savent que les réformes de MM. Balladur et Fillon – qui entraînent une inévitable baisse des niveaux de pension – se répercuteront sur toute leur carrière. Ce risque d'injustice entre générations mérite d'être regardé de près.

Avec le hold-up que vous opérez sur le Fonds de réserve des retraites, ces mêmes jeunes seront spoliés de ce qui avait été mis de côté pour leur permettre de ne pas avoir à subir trop lourdement le pic démographique de 2020.

En effet, vous oubliez de rappeler qu'en fixant votre objectif à 2018, vous ignorez ce pic démographique de 2020, et qu'il faudra bien trouver des recettes pour financer ces retraites. Les jeunes générations savent très bien qu'elles auront à subir les conséquences de cette décision-là.

Les jeunes générations auront aussi, plus que d'autres, à subir le principe de la décote. Rappelons que les personnes nées en 1950 avaient validé 11,2 annuités à l'âge de 30 ans alors que celles nées en 1974 n'en avaient validé que 7,7, une fois trentenaires. Cela sera encore plus dramatique pour les générations futures.

Enfin, j'en viens à ce qui me semble le plus inquiétant. M. le ministre a affirmé hier qu'il soutenait fortement le système de retraite par répartition, allant même jusqu'à faire adopter un amendement proposé par nos collègues du groupe GDR. Pourtant, je suis désolé de vous le dire, il y a comme un gouffre entre ce discours rassurant et la réalité de vos actes montrant bien, au contraire, que vous faites entrer la capitalisation par la petite porte, comme le prouvent les amendements proposés en commission, adoptés par M. le rapporteur et par la majorité de cette commission, et qui permettront de distiller des formes de capitalisation des retraites.

Une deuxième incertitude pèse sur ce système par répartition. Vous multiplier les rendez-vous – avec M. Balladur, avec M. Fillon – en nous expliquant à chaque fois que la mesure proposée permettra de régler le problème dans le cadre du système par répartition.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Sirugue

En fait, d'un rendez-vous à l'autre, vous développez l'idée que ce système serait finalement peu fiable et qu'il serait sans doute prudent que chacun puisse réfléchir de son côté pour préparer sa propre retraite.

Troisième incertitude : la grande vulnérabilité actuelle des jeunes en raison de la situation de l'emploi et des contrats de travail qui leur sont proposés. Avec les femmes, ils risquent d'être parmi les premières victimes de la réforme que vous suggérez. Comment ne pas dire qu'avec le RSA jeunes – que vous avez soutenu – vous ajoutez à cette précarité.

En conclusion, mes chers collègues, prenons garde de ne pas désespérer les générations futures, de ne pas fragiliser davantage le système de retraite par répartition. Vous essayez de faire naître entre les générations une division qui constitue une grande menace et vous ne répondez pas aux attentes que les Français ont formulées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

L'article 1er institue un comité de pilotage dont Christophe Sirugue vient de dire tout le bien que nous en pensons. L'un de nos amendements propose d'ailleurs de supprimer ce comité dont l'utilité nous apparaît d'autant moins évidente que l'étude d'impact le remet aussi en question, indiquant très clairement que d'autres solutions pouvaient être recherchées.

À la lecture des missions de ce comité de pilotage, mon attention a été notamment attirée par l'alinéa 3. Vous reconnaissez enfin, monsieur le ministre, qu'il peut y avoir des écarts de pension entre les hommes et les femmes, ce que vous avez nié pendant des semaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Chers collègues, j'ai posé une question au Gouvernement à ce sujet et il m'a répondu : ce n'est pas une question de retraite mais de carrière. Les carrières ne suffisent pas ! Actuellement certaines femmes ont de petites pensions, d'autres arrivent à la retraite et elles ne referont pas leur carrière. Il faut donc trouver des solutions.

Cette réduction des inégalités est importante et nous y reviendrons au cours du débat. La pension moyenne des femmes s'élève à 925 euros et 40 % des femmes ont une carrière incomplète. Toutes les réformes que vous avez faites depuis 1993,…

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

… celle de 2003 et celle-ci, favorisent les carrières linéaires et ascendantes, ce qui est rarement le profil de celles des femmes qui ont des carrières incomplètes et des emplois à temps partiel non choisi.

Cette inégalité concerne tout de même la moitié de la société. Puisque l'institution de ce comité de pilotage atteste qu'il existe un réel problème, nous espérons qu'au cours de ce débat vous y apporterez des remèdes allant bien au-delà d'une simple amélioration de carrière.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Messieurs les ministres, nous allons profiter de l'examen de cet article pour dire deux ou trois choses sur la manière dont vous avez engagé ces débats, revenir sur ceux qui se sont déroulés au cours des dernières années, et essayer de démontrer que cet article ne sert pas à grand-chose. D'ailleurs, vous l'avez reconnu vous-mêmes dans vos interventions et dans les réponses aux questions posées en commission des affaires sociales en juillet. Il ne vous a pas échappé que le Conseil d'orientation des retraites regroupe les partenaires sociaux, les parlementaires, les experts. S'agissant du pilotage des régimes, le GIP Info Retraites permet à chacun de disposer d'un outil parfait en matière de visibilité et de lisibilité sur les retraites.

Il nous semble donc que le débat sur la création d'un énième comité Théodule n'a pas beaucoup de sens, ainsi que de nombreux collègues l'ont rappelé.

Revenons sur la méthode choisie. Monsieur le ministre, avec tout le respect que je vous dois, je dirai que ce dossier qui a été piloté au départ par votre ministère semble désormais vous échapper totalement. Chacune des décisions prises tend à montrer que vous n'avez pas les coudées franches, les mains libres.

Les débats d'hier soir nous en ont apporté l'exemple le plus criant. Avant que la discussion générale ne s'engage, Marisol Touraine a souligné, à juste titre, qu'il eût été préférable que la commission des affaires sociales se réunisse pour examiner les amendements que vous présentez. Or vous n'aviez pas ces amendements qui, comme vous le savez très bien, ont été écrits sur un coin de table et non pas rue de Grenelle mais à l'Élysée.

Nous savons aujourd'hui que tous ces amendements remettent en cause le code du travail. J'imagine qu'ils seront revus en deuxième lecture parce qu'ils ne tiennent pas du point de vue juridique, comme nous aurons l'occasion de le démontrer.

Il a aussi été rappelé que le débat a été mal engagé en raison de votre véritable méconnaissance de l'histoire sociale de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

C'est la meilleure, professeur Terrasse ! (Sourires)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

L'histoire sociale de notre pays est marquée par des rapports de force entre ceux qui, comme vous, sont chargés de la gestion d'un dossier et les partenaires sociaux.

Il y a le temps de la concertation et vous l'avez menée à partir du diagnostic établi par le COR et qui est largement partagé, au moins sa première partie. En revanche, vous avez oublié la deuxième partie : la négociation et le débat qui devrait avoir lieu comme dans tous les pays européens.

Vous n'avez à la bouche que des comparaisons européennes, citant la Suède, l'Allemagne. Justement, regardez ce qui se passe autour de nous en matière de débat social, de relations avec les partenaires sociaux. On peut faire des choses, on doit faire bouger les lignes. Je pense que, dans leur sagesse, les organisations syndicales ont désormais acté toute une série de principes quant à la nécessité de bouger sur les retraites.

D'ailleurs, le Parti socialiste considère que votre réforme paramétrique n'est pas la bonne puisque, précisément, elle ne s'appuie que sur un paramètre : vous répondez à un problème démographique par un dispositif démographique. Or les analyses effectuées au sein du Conseil d'orientation des retraites démontrent très précisément que la réponse démographique ne fournira qu'un cinquième des besoins financiers.

Les caisses de retraite se trouvent dans une situation extrêmement grave, accusant un déficit de 30 milliards d'euros, en raison de la crise, dites-vous. Ce n'est pas vrai ! Dès 2008, c'est-à-dire bien avant la crise, il y avait déjà plusieurs dizaines de milliards d'euros de déficit, si l'on tient compte à la fois des régimes de retraite traditionnels et de ceux du secteur public.

Donc, on le sait, il y a à la fois un déficit chronique tendanciel et un déficit lié à la crise.

Penser parvenir à résoudre le problème financier par des créations d'emplois est hypothétique. Vous nous aviez déjà fait le coup en 2003. Or cela n'a pas marché.

Il faut évidemment que l'emploi revienne. Nous savons que l'emploi et la masse salariale sont des éléments très importants.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Mais, dans les paramètres que vous avez choisis, il en est un qui est totalement absent aujourd'hui : le paramètre financier.

La retraite doit à l'évidence être financée par les salariés, c'est ce qui fait le lien intergénérationnel. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le parti socialiste – et il est le seul à le faire – prône la création de cotisations sociales complémentaires : ce qui relève des droits contributifs doit, en effet, être financé par les salariés et par l'entreprise.

Mais il n'est pas admissible que les salariés et le travail financent les droits dits non contributifs. La fiscalité est, de ce point de vue, un élément important.

Comme on le voit, l'ensemble de votre projet ne tient pas. Il est déséquilibré.

On aurait pu imaginer, dans une réforme sereine, le triptyque suivant : une part demandée aux salariés, une part demandée aux entreprises et une part demandée aux capitaux qui ne sont pas soumis à la fiscalité.

J'ai écouté M. de Courson hier avec beaucoup d'attention. Il se trompe. Je reviens brièvement sur son intervention, dont nous aurons l'occasion de reparler dans le débat.

Selon M. de Courson – tout comme M. Woerth d'ailleurs –, les droits de cession n'existent pas. C'est de l'argent virtuel. Ces propos sont contradictoires avec les rapports de la Cour des comptes, qui évaluent les pertes de ressources sur les droits de cession à plusieurs milliards.

Ce calcul est hypothétique, nous dit-on, car, si on n'était pas revenu sur ce dispositif, les cessions se feraient aux Pays-Bas et à Bruxelles. Et on nous fait le même coup aujourd'hui concernant l'impôt de solidarité sur la fortune, en arguant que, si l'on diminuait demain l'ISF, les gens reviendraient dans le pays. C'est une histoire que vous racontez car ceux qui sont revenus sont moins nombreux que ceux qui continuent à partir à l'étranger. C'est un montage idéologique sur lequel vous vous arc-boutez alors qu'il n'a pas de sens.

M. de Courson se trompe également totalement lorsqu'il avance que les deux tiers de la valeur ajoutée sont liés à la masse salariale. Ou bien cela voudrait dire que la réforme que vous avez mise en place pour financer les collectivités territoriales impacte directement les salariés et leurs feuilles de paye, ce qui n'est pas le sentiment donné par votre argumentaire lors de la mise en place de cette réforme. Là encore, l'argument ne tient pas, à moins de méconnaître ce qu'est la valeur ajoutée et son mode de calcul.

Concernant les stocks-options, M. de Courson nous accuse de confondre l'assiette avec la taxe. Je tiens à rappeler que les 2 milliards d'euros proposés par le parti socialiste ne tiennent pas compte que des stocks-options : tous les capitaux non soumis à prélèvements sont pris en compte, y compris l'intéressement et la participation. Nous savons évidemment que l'assiette stocks-options est de quelque 2 milliards d'euros. Mais M. de Courson a une vue très étriquée de nos propositions.

Comme vient de l'indiquer mon collègue, nous avons beaucoup d'inquiétudes sur vos financements.

J'avais déjà mis en garde M. François Fillon et M. Xavier Bertrand en 2003 – je vous invite à vous reporter au Journal officiel – sur le fait que l'absence de financement de leur réforme porterait le déficit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse à 10 milliards d'euros en 2010. Je ne me suis guère trompé.

C'est d'ailleurs ce qui vous conduit, monsieur le ministre, pour que votre projet soit présentable à Bruxelles, à ponctionner le fonds de réserve des retraites. C'est d'ailleurs l'essentiel de votre réforme ; elle a pour but principal de récupérer cet argent placé à la Caisse des dépôts et consignations.

D'où notre question : comment allez-vous financer les retraites à partir de 2012 puisqu'il n'y a pas d'argent ? Quel que soit le gouvernement aux responsabilités en 2012, il devra, au lendemain de l'élection présidentielle, prendre des mesures pour financer les retraites parce que les équilibres financiers ne sont pas assurés aujourd'hui, que l'ensemble des caisses vont continuer à se dégrader de manière structurelle, malgré les évolutions de l'emploi, et que la question des régimes complémentaires ne sera pas réglée faute d'accord avec les partenaires sociaux d'ici à la fin de l'année.

En conclusion, nous sommes aujourd'hui dans une situation de déficit structurel très lourd et il nous faudra, en 2012, réparer la totalité des injustices que vous aurez instaurées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Imbert

Monsieur le ministre, il est des mots dans ce projet de loi qui me heurtent profondément. Il est question, au fil des alinéas, d'équité du système de retraite, de pérennité, d'annulation des écarts de pensions entre les hommes et les femmes, ou encore de retour à un équilibre financier – qui n'est garanti que jusqu'en 2018 ! Je me demande ce que peuvent penser les jeunes générations de tous ces termes.

Mesurez-vous les difficultés qu'ils rencontrent pour s'insérer dans notre société, pour entrer sur le marché du travail, qu'ils soient diplômés ou non ? Le RSA jeunes, mis en place le 1er septembre 2010, ne devrait-il pas permettre d'ouvrir des droits à pension ?

Cette nouvelle réforme devrait être l'occasion de leur donner confiance, de leur redonner un espoir dans l'avenir que leur offre notre société et de les rassurer sur le futur réservé à un régime de retraite fondé sur la solidarité intergénérationnelle et non sur la capitalisation. Elle devrait leur permettre de connaître l'âge auquel ils pourront partir à la retraite et le niveau de pension auquel ils auront droit ; elle ne devrait pas leur montrer cette volonté comptable de faire des économies, d'envoyer, pour reprendre les termes employés par le ministre de l'économie "aux marchés financiers les bons signaux" et de faire toujours et encore payer les seuls salariés.

Dès l'article 1er, vous fixez un nouveau rendez-vous en 2018, pour revoir, avez-vous déclaré, les bornes d'âge. Doit-on entendre et comprendre qu'en 2018 c'est un nouveau recul de l'âge de départ à la retraite qui nous attend – et qui attend donc les jeunes générations –, à un moment où il serait indispensable de rétablir leur confiance en notre système de retraite par répartition ?

Ce faisant, vous nous montrez encore une fois combien la solidarité est mise à mal dans notre pays et combien nos jeunes sont méprisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Imbert

Depuis toujours – et ce pour des raisons historiques – certaines catégories de fonctionnaires sont autorisées à liquider leur retraite avant 60 ans. Cette possibilité de partir plus tôt à la retraite est motivée soit par des conditions d'exercice particulières des métiers, soit par la pénibilité liée à certaines fonctions, et parfois par les deux.

Je citerai deux exemples.

La condition militaire requiert une disponibilité "en tout temps", une mobilité géographique obligatoire, des efforts physiques professionnels constants et exceptionnels et une tension psychologique extrême en situation opérationnelle : le droit à une liquidation précoce des droits à la retraite est donc une conséquence de la pénibilité et non un avantage indu. Que va devenir, avec cette nouvelle réforme, la possibilité offerte aux militaires de se reconvertir dans le secteur civil ?

Pour ce qui est des infirmières, vous considérez que le vote d'un amendement dans le projet de loi relatif au dialogue social dans la fonction publique, a réglé leur situation : l'âge de la retraite serait porté à 57 ans pour celles qui n'auront pas opté pour la réforme licence-master-doctorat – LMD –, et resterait à 60 ans pour les autres, devenues cadres de catégorie A. Pour les infirmières nouvellement recrutées, il serait à 62 ans, comme pour tous les fonctionnaires. Mais, lors de la discussion, en juillet 2010, Mme la ministre de la santé et vous-même avez indiqué que la question de la pénibilité serait réglée lors du débat sur les retraites. S'il y a une profession où la pénibilité ne peut pas être remise en cause, c'est bien celle-là : n'est-il pas temps de rediscuter du dispositif de retraite pour les infirmières, comme de celui d'autres agents de la fonction publique ?

Vous prétendez aligner le régime du public sur celui du privé par souci d'égalité et justifiez ainsi une augmentation de la cotisation retraite des fonctionnaires, de 7,85% aujourd'hui à 10,55% en 2020. Vous faites valoir que l'augmentation de 2,7 points sur dix ans du taux de cotisation des fonctionnaires n'affectera pas leur pouvoir d'achat et qu'elle ne représentera que 6 euros par mois en moyenne. Pourtant, cette augmentation – correspondant à 0,27 point par an – s'effectuera dans une période où il n'y aura pas de préservation du pouvoir d'achat des fonctionnaires : pour 2011, par exemple, il est prévu que l'augmentation du point d'indice soit gelée. N'est-il pas légitime de prévoir la compensation de cette augmentation ?

Par ailleurs, les différences relatives au mode de calcul de l'assiette de cotisation dans le public et dans le privé ne risquent-elles pas d'induire, à taux égal, une surcotisation du secteur public, secteur pour lequel certaines primes ne sont pas prises en compte ?

J'ajoute qu'aucun fonctionnaire qui, ayant une carrière incomplète, partira à la retraite avant d'avoir atteint l'âge du taux plein, ne sera plus éligible au minimum garanti, qui est de 1067 euros dans la fonction publique. Cela signifie que, pour toucher ce minimum, les agents devront non seulement avoir atteint l'âge d'ouverture des droits à pension, mais également avoir tous leurs trimestres, ce qui n'est pas obligatoire aujourd'hui. Cela représente une perte de 150 euros de pension par mois pour les « bénéficiaires », si l'on peut dire, de cette mesure. C'est un véritable recul, qui touchera les agents aux carrières les plus chaotiques et, par conséquent, les plus modestes.

Combien d'agents se trouvent dans cette situation ? Comment se répartissent-ils entre les trois fonctions publiques ? Quelles sont les mesures d'accompagnement qui peuvent être envisagées ?

Parmi les personnes dont la carrière est incomplète, on compte de nombreuses femmes qui ont travaillé à temps partiel et qui n'ont pas pu surcotiser pour valider quatre trimestres par an. Il n'est pas concevable de ne pas faire quelque chose pour elles.

Par ailleurs, certains agents titulaires sont dépourvus de droits à pension, à savoir les fonctionnaires qui ne comptabilisent pas quinze années minimales de services et qui sont donc rétroactivement affiliés au régime général et à l'IRCANTEC. Ne doit-on pas mettre en place un système d'affiliation directe au régime général, prévoir un abaissement de la durée de service exigée, ou supprimer les transferts de cotisations rétroactives ?

Nous affirmons, monsieur le ministre, qu'une autre réforme est possible et qu'elle est nécessaire. La réforme globale, à la fois financière et de société, que nous proposons nous apparaît la seule capable de garantir la pérennité du système de retraite par répartition. Le droit à la retraite est un droit fondamental et notre système de retraite, fondé sur la solidarité entre les générations, est un élément constitutif de notre pacte social. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Il n'est pas innocent que le texte de loi que nous examinons commence par la création d'un comité Théodule, baptisé « comité de pilotage des régimes de retraite ». À la lecture des différents alinéas, nous décelons les intentions cachées dans la création de ce comité, certains mots cachant les maux à venir. Ainsi, il est indiqué, à l'alinéa 6, qu'une de ses missions sera de veiller « à l'équité du système de retraite ». Cette équité est-elle au rendez-vous alors que le passage de 60 à 62 ans touchera ceux qui auraient pu bénéficier d'une retraite à taux plein à 60 ans – et seulement eux –, et donc ceux qui ont commencé à travailler tôt ?

Est-elle au rendez-vous alors que le passage de 65 à 67 ans touchera les personnes – essentiellement des femmes – qui n'arrivent à avoir une retraite à taux plein qu'en atteignant l'âge légal de départ à la retraite ?

L'est-elle encore alors que le financement des 45 milliards de déficit se fera nécessairement, pour partie, par une diminution des prestations servies et que, contre toute vérité, vous annoncez le contraire ?

Ainsi, par exemple, l'alinéa 6 précise que le comité veille « à l'équité du système de retraite ». Mais peut-on parler d'équité lorsque le passage de 60 à 62 ans touchera ceux qui, ayant commencé à travailler tôt, auraient pu bénéficier d'une retraite à taux plein, et seulement eux ? Peut-on parler d'équité lorsque le passage de 65 à 67 ans touchera essentiellement les femmes qui ne peuvent bénéficier d'une retraite à taux plein que si elles partent à l'âge légal ? Peut-on parler d'équité lorsque le financement des 45 milliards de déficit se fera nécessairement pour partie par une diminution des prestations servies, même si, contre toute vérité, vous annoncez le contraire ?

L'alinéa 7 ne mérite pas moins de retenir notre attention. Il prévoit que le comité veille « au maintien d'un niveau de vie satisfaisant des retraités ». Ce que demandent les retraités, c'est le maintien de leur niveau de vie, celui qu'ils ont. Pour compenser l'article indéfini « un », vous apportez une précision avec l'adjectif « satisfaisant ». Mais qui déterminera ce qui est satisfaisant ? Certainement pas ceux qui toucheront les pensions.

Peut-on parler d'équité lorsque les efforts fiscaux nécessaires ne concerneront pas les bénéficiaires du bouclier fiscal ? Pascal Terrasse a raison de souligner qu'on ne peut traiter la question des retraites sans un effort financier de toute la nation. Certes, Pierre Méhaignerie a laissé entendre que demain, peut-être, on toucherait au bouclier fiscal. Demain ! Toujours demain ! Si l'on veut que cette réforme soit acceptée par les Français, il ne faut pas faire l'impasse sur cette dimension de justice morale.

Hier soir, avec une grande verve, notre collègue Paternotte a tenté de défendre les retraites par capitalisation. Je regrette qu'il n'ait pas lu le supplément « Économie » du Monde du 7 septembre 2010, qui montre que, en 2008, les fonds de pension ont baissé de 37,5 % en Irlande, de 26,2 % aux États-Unis, de 21,6 % en Belgique. Les retraites par capitalisation ne doivent fournir qu'un supplément, une part dont on n'a pas besoin pour vivre, car on ne peut pas risquer de perdre, d'une année sur l'autre, 30 % de ses revenus. En tout état de cause, cette réponse n'est pas adaptée, puisqu'elle ne peut concerner le plus grand nombre d'entre nous.

Par ailleurs, l'alinéa 10 prévoit que « le comité suit notamment les conditions » dans lesquelles s'effectue « le retour à l'équilibre des régimes de retraite à l'horizon 2018 ». Permettez-moi de vous interroger à ce propos, monsieur Woerth. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, nous a dit que, dans votre analyse, le retour éventuel à l'équilibre des régimes de retraite en 2018 se ferait en masse, c'est-à-dire en incluant les régimes complémentaires. Vous avez annoncé un rendez-vous en 2014 : devons-nous en conclure que vous n'écartez pas l'hypothèse de faire participer les régimes complémentaires au financement des régimes de base ? Ce serait ajouter la fragilisation des régimes complémentaires à celle des régimes de base. La confiance que nos concitoyens peuvent avoir dans leur régime complémentaire serait compromise. Monsieur le ministre, cette hypothèse sera-t-elle à l'ordre du jour en 2014 ?

Telles sont les réflexions que m'inspire ce comité Théodule, dont l'utilité principale est de tenter de masquer certaines des insuffisances de votre texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, plusieurs de mes collègues socialistes ou de gauche ont rappelé que le candidat Sarkozy s'était engagé à ne pas réformer les retraites. Ces promesses ayant été écrites, publiées, entendues, la majorité, placée devant ces contradictions, n'a eu qu'un argument : « Messieurs de l'opposition, une chose vous échappe : entre-temps, il y a eu la crise. » Messieurs les parlementaires de droite – je dis « messieurs les parlementaires », car les ministres n'écoutent pas… (« Et les dames ? » sur les bancs du groupe UMP.) Ils n'écoutent pas, je le vois bien, je ne suis pas aveugle !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Mille excuses ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

La crise est la conséquence des choix économiques de votre camp. Rappelons-nous les déclarations du candidat Sarkozy qui, vantant certains mécanismes économiques, considérait que la France devait s'aligner sur les États-Unis. Patatras ! Tout s'est effondré. À l'évidence, la crise, c'est vous.

L'article 1er crée donc un comité de pilotage : un de plus ! Il me semble pourtant que nous avons déjà tout ce qu'il faut pour travailler sur ces sujets. On sent bien que ce comité n'est qu'un artifice, de la poudre de perlimpinpin, un comité « soupe aux sous » pour faire avaler les grimaces que vous faites aux retraités.

Il ne sera pas qualifié, en tout cas, pour parler des problèmes majeurs. Rappelons-en quelques-uns, à commencer par la pénibilité, qui n'est nullement traitée dans ce projet de loi : vous le savez, du reste, puisque vous essayez constamment de confondre pénibilité et incapacité. Je connais pourtant vos capacités intellectuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Vous n'ignorez pas qu'il y a, entre les deux notions, une différence essentielle. Mais, quand on est intelligent, qu'on connaît la différence et qu'on dit autre chose, c'est qu'on est un menteur (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), ce qui est beaucoup moins flatteur.

Ce comité n'est pas qualifié pour traiter du recul de deux ans des deux bornes. Permettez-moi d'insister sur le recul de l'une d'elles à 67 ans. Ce que vous souhaitez, c'est faire partir les gens à la retraite – notamment les femmes – dans des états de santé extrêmement précaires. Vous l'avez prouvé hier, à propos des quatre premiers amendements du groupe GDR, qui contenaient une déclaration de principe visant à garantir la retraite par répartition. Le premier, ambitieux mais juste, réclamait que la borne soit fixée à 60 ans, que les revenus soient égaux au SMIC. Avec prudence, le groupe GDR avait prévu des amendements de repli. Monsieur le rapporteur, vous étiez d'accord pour voter le dernier de ces amendements. En refusant que le montant minimum soit égal au SMIC, vous restez dans votre logique, ce que l'on peut comprendre. Quand vous refusez que l'âge de départ à la retraite soit fixé à 60 ans, vous êtes toujours dans cette logique, et on peut encore le comprendre. Mais il vous a peut-être échappé que le troisième amendement – mes collègues du groupe GDR me corrigeront si je me trompe – avait enlevé le SMIC et la borne de 60 ans, mais ajouté le principe selon lequel on partait en bonne santé. Vous avez annoncé que vous voteriez contre cet amendement : vous pouvez faire la grimace, c'est la vérité ! Les chiffres prouvent malheureusement que, lorsqu'ils devront partir à 67 ans, l'immense majorité des gens – notamment les femmes – auront une santé précaire au moment de prendre leur retraite. Hier, en refusant ce troisième amendement, vous l'avez très officiellement avoué.

Enfin, ce comité ne traitera pas, je l'imagine, d'un problème majeur : celui des petites retraites. Je sais bien que vous vivez, les uns et les autres, au contact de millionnaires, de dames âgées certainement charmantes, mais qui n'ont qu'une connaissance très lointaine de cette situation financière dégradée. En réalité, il y a aujourd'hui en France des millions de retraités – et il y en aura encore plus demain – qui, à la fin du mois, n'ont plus d'argent pour manger ou pour se chauffer, qui doivent aller quémander ou qui s'enferment dans leur modeste logis, souvent indécent, en attendant la mensualité suivante. Tout cela, c'est la réalité de la France d'aujourd'hui, que vous ignorez et maltraitez, et pour laquelle vous aurez un jour à rendre des comptes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, pour l'essentiel, la présente réforme se contente de modifier deux paramètres : l'âge minimal de départ à la retraite est repoussé à 62 ans et l'âge de la retraite à taux plein, quelle que soit la durée de cotisation, est reporté à 67 ans. Le but avoué est de faire rapidement quelques milliards d'économie, le report de l'âge légal devant réduire, dès 2011, le nombre de départs à la retraite, et donc le coût des pensions. Mais combinée à l'exigence d'une durée de cotisation de 41 ans, cette réforme va faire du système français l'un des plus durs d'Europe et accentuer les inégalités entre retraités au détriment des plus fragiles. C'est d'ailleurs l'explication de votre article 1er : il faut laisser une soupape de sécurité.

Nicolas Sarkozy avait affirmé qu'il entendait éviter toute diminution des pensions. Ces mesures auront l'effet inverse. Compte tenu du niveau de chômage, une majorité de personnes sont aujourd'hui privées d'emploi quand vient l'heure de liquider leurs droits à la retraite. Le report de l'âge légal les fera dépendre plus longtemps des maigres revenus de remplacement qu'elles touchent actuellement, bien inférieurs à leur future pension.

Au-delà, la majorité des salariés n'a aujourd'hui qu'une envie, partir dès que possible, sans trop réfléchir au montant de leur future pension, et en particulier avant l'entrée en vigueur de votre réforme. Je l'ai constaté moi-même dans ma mairie. Aussi, personne ou presque parmi ceux qui ont une carrière incomplète ne travaillera jusqu'à 67 ans, en admettant qu'un employeur accepte de les garder jusqu'à cet âge. Ainsi, les pensions de ces personnes, qui sont en majorité des femmes, vont subir une importante décote.

Que dire d'un report de l'âge légal qui ne s'accompagne d'aucune véritable mesure en faveur de ceux qui, en raison des contraintes subies au cours de leur vie active, ont une moindre espérance de vie ?

Au final, le Gouvernement a choisi le procédé d'un rafistolage comptable purement démographique, dicté par la nécessité de démontrer aux marchés financiers sa volonté de réduire les déficits. C'est une occasion manquée de mettre en chantier une vraie réforme de fond, qui rende le système français de retraite à la fois plus lisible, plus pérenne et plus juste. Pour y parvenir, il aurait fallu, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, commencer par ne pas fermer la porte, d'emblée, à toute augmentation des ressources des régimes. La hausse des prélèvements doit certes être maniée avec précaution, car nous aurons d'autres besoins collectifs à traiter – l'éducation, la santé, l'environnement –, mais la France pourrait néanmoins consacrer – ce sont les propositions socialistes – un point et demi de PIB de plus pour assurer une vie décente à tous ses retraités.

La seconde exigence est d'agir sérieusement pour que l'allongement des durées de carrière, justifié par l'augmentation de l'espérance de vie moyenne, ne pénalise pas les plus fragiles, en accordant des avantages concrets à tous ceux qui ont subi des conditions de travail pénibles, en agissant résolument pour améliorer ces conditions à l'avenir, en aménageant les fins de carrière afin de rendre plus acceptable pour le plus grand nombre une poursuite d'activité, en mettant en oeuvre, aussi, des mesures incitatives qui respectent la liberté de chacun sans pénalités excessives, conditionnées par une réelle amélioration de la situation de l'emploi. Malheureusement, vous avez choisi de désespérer les jeunes générations, déjà confrontées au chômage, à la précarité, aux rémunérations impitoyablement revues à la baisse sous la double pression de la rémunération du capital et du chantage à la délocalisation.

Oui, il faudra que la réforme des retraites soit remise sur le métier, sur la base de nos propositions, car ce ne sont pas les quelques soupapes de sécurité qui figurent dans l'article 1er – ce « comité Théodule », comme l'appelle M. Rogemont –, ce ne sont pas les quelques avancées qui, hier, à l'Élysée, ont donné lieu à une manifestation de communication qui pourront nous exonérer d'une véritable remise en chantier de la réforme des retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

L'inutilité de la création de ce comité de pilotage me semble avoir été largement démontrée. Ce n'est qu'un leurre, ce n'est qu'un artifice.

On le constate aisément : d'autres organismes, sérieux, compétent, reconnus, sur lesquels le Gouvernement s'appuie lui-même, existent déjà. Il est donc inutile d'en créer un de plus, et d'accroître ainsi les dépenses, surtout que vous recherchez les économies. Le Conseil d'orientation des retraites, le COR, a déjà fait la preuve, je crois, de toute son efficacité.

Il me semble donc que ce point devrait faire l'unanimité.

En outre, les missions annoncées de ce comité de pilotage sont significatives.

Tout d'abord, annonçant la création d'un comité de pilotage, ne reconnaîtriez-vous pas que vous ne pilotez pas le dossier des retraites ? Jusqu'à présent, le Gouvernement et le Président de la République ont fait semblant de maîtriser le sujet et affirmé qu'ils le « pilotaient ».

Votre proposition démontre qu'il n'en était rien et que même vous vous ne pensez pas maîtriser ce sujet. Ensuite, viser « la progression du taux d'emploi des seniors etc. », c'est bien, mais l'une des clés de la réussite de la réforme des retraites, c'est la progression de l'emploi tout court ! Il faut faire progresser l'emploi dans son ensemble, dans le privé comme dans le public, puisque ce sont les cotisations qui fourniront les recettes nécessaires aux régimes de retraite, et c'est précisément ce que les socialistes proposent. On ne peut en revanche pas dire que vous donnez l'impression de créer des emplois dans la fonction publique, et ce n'est pas en supprimant des dizaines de milliers d'emplois chaque année que l'on avancera sur le dossier des retraites.

S'agissant de « l'annulation des écarts de pensions entre les hommes et les femmes », cela a déjà été abondamment débattu, le report de deux ans, de 65 à 67 ans, du départ en retraite des femmes qui n'ont pas fait de carrières complètes est significatif de l'écart qui existe entre votre discours et vos actes. (Protestations sur les bancs du groupe UMP. – « Il a raison ! »sur les bancs du groupe SRC.) Vous ne vous souciez pas de l'écart qui existe entre les pensions des hommes et celles des femmes ; sinon, revenez aux 65 ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

Enfin, vous abordez, par le biais de ce comité, le débat que vous refusez par ailleurs. Ainsi, « un observatoire de la pénibilité est chargé d'apprécier la nature des activités pénibles dans le secteur public et le secteur privé, et en particulier celles ayant une incidence sur l'espérance de vie » ; j'insiste sur le mot « nature ».

Nous sommes là au coeur du débat. Votre texte aborde en effet la question par le biais des taux d'invalidité, par définition individuels, donc par la maladie. Or, on vous l'a expliqué, ce n'est pas la bonne façon d'appréhender le dossier.

En outre, quand vous évoquez l'espérance de vie, il s'agit de moyennes, pour les Françaises, pour les Français, pour certaines catégories de travailleurs. La notion de pénibilité ne s'apprécie donc pas individuellement mais collectivement, par branches et par situations de travail. Peut-être cela vous gêne-t-il, mais c'est ainsi. Expliquez-moi donc comment définir l'espérance de vie des Français ? Est-ce un chiffre moyen ou une donnée appréciée individu par individu ? De même, la pénibilité est-elle appréciée en moyenne ou au cas par cas ?

Les cas d'invalidité que vous évoquez, qui existent, ce sont des situations médicales personnelles, ce qui n'est pas la même chose. Vous faites semblant de confondre deux réalités distinctes, mais les faits sont têtus, et, lorsque vous chargez l'observatoire de la pénibilité d'apprécier la nature des activités pénibles, vous êtes en contradiction avec vos propres pratiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Roland Muzeau, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Consacré, monsieur le président, à l'organisation de nos débats.

Le Gouvernement a déposé au cours de cette discussion treize amendements, qui se veulent une réponse aux millions de manifestants et de grévistes. La commission des affaires sociales a enfin pu se réunir à la suite des demandes insistantes et renouvelées de l'opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Bien vous en a pris de l'accepter, car cela a conduit à un débat de près de deux heures et demie, en présence des ministres.

Je vous demande donc, monsieur le président, l'application de l'article 55, alinéa 6, qui prévoit, en de telles circonstances, d'attribuer un temps supplémentaire à tous les groupes. Je demande par conséquent un temps de deux heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Muzeau, ce que vous avez dit sur cet article est tout à fait exact mais la Conférence des présidents a décidé, au mois de juillet dernier, d'une part, qu'il fallait faire la demande avant la discussion de l'article et, d'autre part, que le temps supplémentaire était de dix minutes par amendement pour chaque groupe.

Je ne peux vous donner satisfaction pour le premier amendement, car vous auriez dû formuler votre demande auparavant. En revanche, c'est tout à fait possible pour les autres amendements.

La parole est à Mme Marisol Touraine.

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

Comme notre collègue du groupe GDR, dont je voudrais relayer la demande, nous parlons des nouveaux amendements. Je ne comprends donc pas la réponse que vous venez de lui donner, monsieur le président.

Nous avons examiné hier soir en commission des amendements qui doivent être discutés en séance au cours des prochains jours, et non pas maintenant. L'amendement que nous allons examiner dans quelques instants ne fait pas partie de ceux présentés hier en commission par le Gouvernement. Vous dites en fait à M. Muzeau qu'il aurait dû présenter sa demande avant l'examen de l'amendement concerné, mais c'est précisément ce qu'il a fait.

Je ne peux que relayer sa demande, et indiquer que le groupe SRC souhaite bénéficier d'un temps de parole supplémentaire compte tenu de la présentation par le Gouvernement de nouveaux amendements en cours de discussion, alors même que l'examen du texte est déjà engagé.

Vous indiquez, monsieur le président, qu'une Conférence des présidents du mois de juillet a précisé que le temps supplémentaire attribué serait de dix minutes par amendement. Cette interprétation des termes du règlement est extrêmement minimaliste. Qu'elle soit au moins appliquée !

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

C'est effectivement une aumône, d'autant que le Gouvernement n'est soumis à aucune contrainte et dépose à la dernière seconde des amendements qui nécessitent que l'on y travaille, que l'on y réfléchisse, et qui justifient de fortes interventions de notre part dans cet hémicycle. Je pense notamment aux dispositions qui concernent la médecine du travail, laquelle ne devrait même pas être évoquée dans le cadre de l'examen de ce texte. Cela ne saurait en tous cas être traité en dix minutes d'intervention par groupe. C'est tout à fait honteux.

Je demande par conséquent tout à fait officiellement, au nom du groupe SRC, que notre temps de parole soit augmenté à la suite du dépôt de nombreux nouveaux amendements par le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

En vertu de ce que j'ai indiqué tout à l'heure, chaque groupe disposera d'un temps de parole supplémentaire d'une heure et demie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 7 et 167 .

La parole est à M. Dominique Tian, pour défendre l'amendement n° 7

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Les explications du Gouvernement nous ayant convaincus, les auteurs de cet amendement ont décidé de le retirer.

(L'amendement n°7 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. François de Rugy, pour défendre l'amendement n° 167 .

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Mon propos se situe dans la continuité de ceux que j'ai tenus en défendant hier notre amendement avant l'article 1er.

Nous pensons qu'une réforme du régime de retraite par répartition et la garantie de son financement ne peuvent être obtenus que par la négociation entre les partenaires sociaux. Le comité de pilotage que vous créez par ce projet de loi n'est, à notre sens, qu'un leurre, compte tenu de votre refus, depuis le début et jusqu'à présent, malgré la très forte mobilisation des salariés mardi dernier, d'ouvrir la moindre négociation.

Rappelons en outre que chaque loi est l'occasion de créer un nouveau comité, une nouvelle commission. Ainsi la loi de 2003 a-t-elle créée la commission de garantie des retraites. Il n'y a donc aucune raison de créer un nouveau « machin » qui ne se réunirait d'ailleurs qu'une fois par an, chose étrange pour une entité supposer mener un travail de fond. Comment pourrait-elle traiter ainsi tous les sujets sérieux énumérés par l'article premier ?

Le plus simple est donc, selon nous, de s'en remettre à la démocratie sociale, d'ouvrir des négociations et de ne pas créer un machin supplémentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

L'article 1er comble un manque de notre système de retraite.

Le comité de pilotage va compléter l'action du COR. Le COR fait des analyses, le comité de pilotage va faire des propositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Le COR se réunit mensuellement, le comité de pilotage se réunira quelques fois dans l'année pour faire des propositions au Gouvernement en fonction des analyses de la situation et, en particulier, des conséquences de la réforme que nous examinons présentement.

La commission émet donc un avis défavorable à l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Le Gouvernement est évidemment opposé à cet amendement.

Le comité de pilotage est absolument nécessaire. Les retraites ont besoin d'un pilotage stratégique, non pas seulement d'un pilotage régime par régime ou dans le cadre de débats parlementaires. On le voit bien, nombre de décisions doivent être prises et il faut que le dialogue sur les retraites progresse pour éviter complications, dramatisation et tabous et pour que les informations soient partagées. Le comité de pilotage, qui associe Parlement, partenaires sociaux, représentants des caisses, personnalités qualifiées et Gouvernement, permet un tel suivi de l'évolution et un tel pilotage du système des retraites.

Le Conseil d'orientation des retraites est, pour sa part, un outil technique dont nous avons besoin pour faire des prévisions. Avec le comité de pilotage, nous aurions un système cohérent.

J'en profite pour préciser que, dans le cadre de ce projet, d'autres comités sont supprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Issindou

M. le ministre nous a donné son avis mais vous aurez compris que ce comité ne nous inspire guère d'enthousiasme. Cela a déjà été dit plusieurs fois mais je vais le répéter une fois de plus.

Le comité de pilotage fera des déclarations de principe, dont le Gouvernement ne tiendra pas compte.

Selon nous, il revient au Parlement et au Gouvernement de piloter la réforme des retraites. Or c'est tout le contraire qui se passe aujourd'hui. Le Gouvernement, le ministre du travail ne pilotent plus rien, et c'est l'Élysée qui fait tout en direct, comme l'a montré l'épisode d'hier. Ainsi que l'a alors fait observer M. Jean-Pierre Brard, ce sont même plus précisément les conseillers du Président de la République qui pilotent la réforme des retraites.

Revenons donc à un peu de sérieux. Que le Gouvernement gouverne et que le Parlement légifère. Ce comité, pour sa part, ne servira à rien.

Par ailleurs, le COR a été créé en 2000. Tout le monde en dit plutôt du bien, car il produit de bonnes analyses. Il décrit les évolutions, apprécie les conditions pour la viabilité financière, mène des réflexions sur le financement des régimes de retraites, formule des avis préalables aux décisions. Que voulez-vous de plus ? Avez-vous besoin de créer encore un truc qui va venir en concurrence ? Il n'est que de lire la rédaction de l'article 1er en ses alinéas 13 et 14 : « Avant le 31 mars 2018, le Conseil d'orientation des retraites remet au Gouvernement et au Parlement un rapport faisant le point sur la situation des régimes de retraite. Sur la base de ce rapport, le Gouvernement consulte le comité de pilotage… »

Le comité consulte le Gouvernement, lequel consulte à nouveau le comité ! Tout cela donne le sentiment que rien n'est piloté, ni au Gouvernement ni au Parlement.

L'article 1er le mentionne, et le ministre l'a dit lui-même le 16 juin dernier en commission, le rendez-vous de 2018 sera nécessaire pour reparler des questions d'âge. Nous avons là matière à nous inquiéter car, aujourd'hui, on nous parle déjà de reporter l'âge de départ de 60 à 62 ans. Nous sommes quant à nous persuadés qu'il ne s'agit que du début de la spirale. On nous expliquera en 2018 que, n'étant pas parvenus à l'équilibre, du fait de l'impact du pic démographique, il faudra reporter l'âge de départ à la retraite à 63, 64, puis 65 ans.

C'est à cela que vous nous préparez ! Nous ne sommes pas dupes, les Français non plus, et ils vous le disent avec force. Mais vous ne les entendez pas et vous passez outre. Comme d'habitude, monsieur le ministre, vous êtes fort de vos certitudes. Gardez-les ! Mais je pense que, dans les prochains jours, vous aurez des surprises…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Issindou

Nous demandons la suppression de l'article 1er, qui est complètement inutile. Commencer la réforme des retraites par la création d'un comité, c'est selon moi prendre les choses à l'envers.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Le comité de pilotage pose d'abord un problème au regard de la qualité de la loi. Créer un tel comité par la loi alors que, manifestement, cela relève du domaine réglementaire, voire de l'initiative politique, pose une vraie difficulté. On prend l'habitude d'utiliser la loi pour des objectifs qui ne sont pas les siens, et je tenais à le faire remarquer.

Ensuite, il s'agit d'un aspect plus politique du problème. Nous devons l'avoir chacun en tête, et notamment tous nos concitoyens qui s'intéressent à ce débat. Si le comité de pilotage est créé pour s'ajouter au comité d'orientation des retraites, c'est que le Gouvernement avoue implicitement que, sur les plans juridique et législatif, l'équilibre du dispositif n'est pas réellement garanti. Il a besoin du rendez-vous de 2018 afin de préparer, pour autant qu'il en ait à cette époque la responsabilité, une nouvelle série de mesures d'âge d'ordre financier qui viendront frapper à nouveau les Français.

Or c'est exactement le contraire de ce qu'il faut faire si nous voulons apporter une réponse satisfaisante à nos concitoyens. Depuis une quinzaine d'années, nous avons procédé à une succession de réformes toutes présentées comme étant définitives. Je ne rappellerai pas ce qu'a dit Marisol Touraine des propos tenus par François Fillon il y a plusieurs années, mais je rappelle qu'à chaque fois on nous dit : « Nous faisons “ la ” réforme des retraites. Admirez le courage dont nous faisons preuve ! » Las, quelques années après, il faut y revenir…

Vous préparez exactement la même chose, et le comité de pilotage sera l'outil de cette improvisation. Or la conséquence économique et sociale est considérable. Ni les entreprises, au regard des cotisations qui leur sont demandées, ni nos concitoyens, au regard du niveau des pensions de retraite qu'ils sont en droit d'attendre, ne sont rassurés. Le message qu'ils reçoivent à travers ce comité de pilotage, c'est que votre réforme est provisoire. Personne ne peut anticiper sur ce que sera la réalité des prélèvements et des montants des pensions dans quelques années. À travers ce montage partiel dans le temps, votre réforme va à l'encontre des intérêts à long terme de notre pays, de notre système de retraites, des ménages et des entreprises – que l'on voudrait pourtant influencer.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Très bien !

(Les amendements identiques nos 7 et 167 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 60 .

La parole est à M. Jacques Domergue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Monsieur le ministre, j'appelle votre attention sur l'importance de cet amendement qui propose de créer un consortium de gestion unique des caisses de retraite dont la composition est décrite dans le texte de l'amendement.

À regarder la complexité des systèmes et la multitude des régimes auxquels sont affiliés nos compatriotes, plus personne n'y comprend rien. Aujourd'hui, la clarté devient absolument indispensable. Je ne parle pas seulement de nos compatriotes, car même nous, dans cet hémicycle, avons souvent des difficultés à suivre la complexité des systèmes.

Nous devons donc parvenir à uniformiser progressivement les régimes, d'une part du privé, d'autre part du public, avec une convergence nécessaire pour assurer à nos compatriotes une meilleure compréhension et une plus grande lisibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Il est apparu à la commission que la solution du comité de pilotage était plus réaliste et surtout plus opérationnelle que celle d'un consortium. Je suis désolé, monsieur Domergue, mais la commission donne un avis extrêmement défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Monsieur le député, vous avez en partie satisfaction. En effet, lors des débats en commission, nous avons inscrit, dans les missions du comité de pilotage des régimes de retraites, que ce dernier veillait aussi au rapprochement des règles et des paramètres entre les différents régimes. Le rapprochement et la coordination des règles et des paramètres font partie de ses objectifs.

Je vous demande donc, monsieur Domergue, de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi, le Gouvernement ne pourra qu'émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Je ne suis que co-auteur de cet amendement proposé par Lionel Luca mais, dans la mesure où le ministre a donné des explications et où le comité de pilotage va assurer cette mission, je retire l'amendement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

À quoi cela a-t-il servi, alors ? Quelle parodie !

(L'amendement n° 60 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous en venons à l'amendement n° 8 .

La parole est à M. Dominique Tian.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Hier, j'ai évoqué le problème de la convergence entre le privé et le public en regrettant qu'elle n'aille pas assez loin, même si j'ai noté les progrès du Gouvernement en la matière.

Notre amendement vise à ce que le comité de pilotage créé par l'article 1er veille à cette convergence et qu'elle figure parmi ses missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Cet amendement semble indiquer la convergence comme étant la seule mission du comité de pilotage, alors qu'il en existe d'autres.

Aussi, dans un souci de clarté, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Défavorable.

(L'amendement n° 8 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 298 .

La parole est à M. Marc Dolez.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Nous considérons que le comité de pilotage ne peut pas être doté de missions qui relèvent avant tout du Parlement et du Gouvernement. Notre amendement vise à ce que le comité ne puisse que proposer au Parlement de se saisir des questions sur lesquelles il est compétent.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Défavorable.

Il est évident que c'est au Parlement que doit se décider la politique de notre pays (Ah ! sur les bancs du groupe SRC), que le comité n'a aucune vocation à se substituer à un texte législatif, et donc au pouvoir législatif.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Cet amendement est tout à fait utile et opportun, car il permet de faire le point sur la nature de nos débats, le rôle du Parlement et de ses acteurs dans l'hémicycle.

Ce qui s'est passé hier et la façon dont nous avons eu connaissance, au cours des semaines précédentes, des informations sur ce texte et de son contenu montrent que nous débattons avec un gouvernement, et notamment avec un ministre, qui ne pèsent rien pour ce qui est de la maîtrise de ce dossier ou des décisions à prendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Cet état de fait est peut-être sans intérêt pour la majorité mais pose un problème à l'opposition.

Chacun le sait, le texte a été élaboré à l'Élysée. Monsieur le ministre, lorsque vous receviez les syndicats et les partis politiques, vous indiquiez qu'en réalité vous n'aviez pas la main sur le dossier et que vous ne saviez pas exactement ce qui allait être décidé. La cruauté – peut-être nous y laisserons-nous aller – consisterait à lire votre discours prononcé lors de la convention nationale de l'UMP quelques semaines avant que le texte ne soit publié. Vos engagements ne sont pas tenus sur nombre de questions. Ce sont même parfois des dispositions contraires que l'on pourra lire dans le texte.

Hier, des amendements ont été déposés dans des conditions rocambolesques. Manifestement, vous n'en disposiez pas, car tout a été décidé à l'Élysée, dans la précipitation. Il en résulte d'ailleurs des incongruités juridiques. Il faudrait faire semblant de continuer à discuter ici et, de surcroît, trouver un amendement visant à ce qu'un comité puisse veiller sur l'évolution de notre système de retraites !

S'agissant de la dignité de l'Assemblée nationale et de son rôle dans la démocratie, quel que soit le degré inouï d'allégeance auquel l'UMP est arrivée aujourd'hui, prête à tout accepter dans cette dérive conduisant à l'abaissement du rôle du Parlement et de l'Assemblée, il y a un moment où l'honneur des parlementaires – qu'ils soient de droite ou de gauche, en tout cas républicains – est de dire « stop !»

Certains pensent déjà que le débat qui se déroule dans cet hémicycle est sans importance. Voulez-vous accréditer l'idée que ce débat à l'Assemblée nationale, lieu dédié par essence à la confrontation des idées politiques dans une démocratie, n'a strictement aucune importance puisque le ministre n'a pas de marge de manoeuvre, tout étant décidé ailleurs, et que le groupe majoritaire, même si on lui proposait un texte créant un comité Théodule, applaudirait, comme le parti godillot qu'il est au service du seul Président de la République ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Cette situation est inacceptable et je vous appelle, mes chers collègues, à un sursaut en votant l'amendement proposé par le groupe GDR. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Reprenez-vous, chers collègues de l'UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Ça suffit les tontonmaniaques !

(L'amendement n° 298 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 299 .

La parole est à M. Roland Muzeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Monsieur le président, nous avons déjà défendu les amendements nos 299 , 300 , 301 , 303 rectifié et 302 dans notre intervention sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Défavorable.

Veiller à l'équité du système de retraite est une mission fondamentale qu'il ne faut pas remettre en cause.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

J'ai écouté avec attention. L'enfer est pavé de bonnes intentions ! Vous nous dites qu'il faut absolument que l'équité soit maintenue…

Premièrement, la création du comité de pilotage consiste simplement à rabaisser le rôle du Parlement. Vous voulez nous faire accepter qu'un comité composé de gens qui n'ont pas la légitimité issue du suffrage universel décide. Contrairement à ce que vous avez affirmé pendant des années, il ne s'agit en rien de renforcer les pouvoirs du Parlement. Votre réforme du règlement ne fait que nous conduire à discuter dans un temps limité, ce qui ne nous permet pas de nous exprimer convenablement.

Deuxièmement, on parle d'équité de la même façon que l'on est favorable à la réforme. Mais les mots ont un sens en français. Généralement, quand on réforme, c'est pour améliorer. Or vous donnez à la réforme son second sens : détruire.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Donc, votre réforme des retraites tend tout simplement à la destruction du système des retraites mis en place par le Conseil national de la Résistance. (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.) Je veux bien que l'on parle d'équité et de ressources égales en raison du volume de cotisations. Mais l'objectif du Conseil national de la Résistance était que les vieux travailleurs et tous ceux qui avaient participé au développement de la nation puissent vivre leur retraite dans la dignité. Le système que vous mettez en place, avec l'allongement de la durée de cotisation, ne permettra pas à un grand nombre de nos concitoyens d'avoir une retraite complète, à moins de pouvoir travailler jusqu'à 70 ans. Nous l'avions dénoncé en 2003 et, déjà, M. Fillon n'avait pas voulu nous écouter. Aujourd'hui, nous en avons la preuve manifeste. Vous êtes en vérité en train de pérenniser le honteux système des retraites agricoles, avec ses décotes et les retraites de misère qui en découlent, système institué par votre ami M. Vasseur. Je vous en prie : faites preuve d'un peu d'humilité et de responsabilité quand vous appelez à l'équité !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Comment pouvez-vous parler d'équité de traitement à des gens qui touchent moins de 500 ou 600 euros de retraite par mois pour vivre, quand on sait que, dans ce pays, 15 % des Français vivent en dessous du seuil de pauvreté de 800 euros, que quinze millions de Français finissent le mois avec moins de 20 euros dans leur poche et que, dans le même temps, on apprend que M. Tapie – votre ami M. Tapie (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP)…

De nombreux députés du groupe UMP. C'est le vôtre !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

…qui peut vous rendre service lors des prochaines élections, lorsqu'il soutiendra M. Sarkozy…

Plusieurs députés du groupe UMP. Tapie, c'était le ministre de Mitterrand !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Si vous considérez que M. Tapie n'est pas votre ami, dites-le nous ! De plus, alors que Mme Bettencourt reçoit 30 millions d'euros, vous demandez à ceux qui ne perçoivent pas 600 euros par mois de faire un effort pour remettre en état le financement des retraites ! Vous ne manquez pas d'air !

Vous avez eu une première réponse avec l'importance de la récente manifestation. On parle de 2,5 millions de manifestants, mais il y en aura plus la prochaine fois, soyez rassurés ! Rappelez-vous le CPE ! Vous risquez effectivement de vous trouver dans la même spirale ! Soyez sûrs que nous serons aux côtés des travailleurs pour que leurs droits soient respectés et que vous soyez contraints de retirer votre projet de recul et de régression sociale sur les retraites, comme cela a été le cas pour le CPE ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Nous ne comprenons pas très bien, monsieur le président, la stratégie de nos collègues socialistes. Ils avaient décidé de ne pas participer à la discussion générale pour pouvoir discuter sur les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Et, là, ils refont une discussion générale avec une palanquée d'intervenants qui ont certainement peur de ne pas voir figurer leur nom au Journal officiel ! Cela nous paraît quelque peu étrange, alors que nous avions décidé de travailler au fond sur les amendements.

Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Nous n'aurions pas créé ce comité de pilotage, on nous aurait expliqué que c'était un scandale. On le crée et c'est aussi un scandale ! Tout est scandale ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) J'aimerais que nous puissions discuter de ce qui intéresse les Français (Protestations sur les bancs du groupe SRC), c'est-à-dire de la pénibilité que notre majorité, ne vous en déplaise, est la première à prendre en compte en Europe, et que nous soyons enfin en mesure de traiter du sauvetage de la retraite par répartition. En effet, nous ne proposons pas, pour notre part, de fiscaliser les retraites, nous maintenons un système de répartition (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) permettant aux travailleurs d'hier d'être financés par les travailleurs d'aujourd'hui ! C'est ce qui nous intéresse, mesdames, messieurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

Du calme, madame Rosso-Debord ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

Nous débattons. (Mêmes mouvements.) Nous échangeons des idées. Nous avançons. Il nous reste si peu de droits dans ce Parlement, avec vous ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Laissez-nous au moins organiser nos débats et nos travaux comme nous le souhaitons, laissez-nous intervenir au moment où nous le désirons. Je voudrais que vous reconnaissiez que parler d'une « palanquée » d'intervenants était pour le moins déplacé !

Plusieurs députés du groupe SRC. Sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

Est-ce que nous parlons des « hordes » de députés de l'UMP ?

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Allez plutôt voir dans le dictionnaire ce que cela veut dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

Je vous le dis : nous sommes offensés ! (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.) Oui, vous nous avez offensés ! (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

En effet, nous ne disons pas, quant à nous, que vous n'êtes qu'une bande de godillots au service de l'Élysée ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pourtant, c'est la vérité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Nous ne disons pas que vous êtes là assis à attendre que vous proviennent de l'autre côté de la Seine les discours à tenir ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

Vous, ce n'est pas de l'autre côté de la Seine, vous allez à Lille !

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

Alors, s'il vous plaît, un peu de respect pour l'opposition et les débats s'en trouveront relevés ! Je ne doute pas, madame Rosso-Debord, que ce soit votre souhait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 299 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de trois amendements, nos 179 , 300 et 301 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l'amendement n° 179 .

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Puisque vous voulez absolument créer un comité de pilotage, fixez-lui au moins des objectifs précis qui donnent une orientation politique, car tel est le but, à moins qu'il ne serve à rien !

Nous ne devons pas nous contenter, à l'alinéa 7, de parler du « maintien du niveau de vie » des retraités, mais d'envisager la progression de leur pension. En effet, nous le disons depuis le début, tout le problème réside dans la notion de justice sociale. Pour nous, cette réforme ne doit pas se limiter à changer les choses, mais doit également corriger les inégalités de notre système. N'oublions pas, en effet, que le système par répartition est une solidarité intergénérationnelle. Or, nous le savons très bien, ceux qui ont peu cotisé pendant leur vie active toucheront une petite pension. Par conséquent, quand on parle du « maintien du niveau de vie », il convient de savoir sur quel niveau de vie l'on se base. Vous le savez comme moi, de nombreuses études montrent que, malheureusement, nombre de nos compatriotes retraités vivent avec une pension qui les place en dessous du seuil de pauvreté. La Fondation Abbé Pierre avait chiffré à 600 000 les personnes âgées de plus de 60 ans qui vivent avec une allocation de solidarité de moins de 620 euros par mois, soit en dessous du seuil de pauvreté, évalué à plus de 700 euros. Si nous voulons corriger ces inégalités, et nous ferons d'ailleurs des propositions en ce sens dans un amendement suivant, nous devons fixer à ce comité des objectifs précis en matière de progression du niveau de vie des retraités.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Peut-on considérer que les amendements nos 300 et 301 ont été défendus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Oui, monsieur le président, M. Muzeau a précisé, lorsqu'il a présenté l'amendement n° 299 , qu'il défendait en même temps les amendements nos 300 , 301 , 302 et 303 rectifié !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

En revanche, l'objectif de la réforme étant de garantir le niveau des pensions et de permettre que le niveau de vie des retraités ne se dégrade pas, la commission est favorable à l'amendement n° 300 .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Le Gouvernement est également favorable à l'amendement n° 300 parce que l'amélioration du niveau de vie des retraités et du niveau des pensions ne peut être qu'un objectif à poursuivre. Je rappelle d'ailleurs que nous avons revalorisé les petites pensions agricoles, les pensions de réversion des retraités les plus modestes…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

…et que nous avons revalorisé le minimum vieillesse.

Le Gouvernement est par contre défavorable aux autres amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Nous sommes satisfaits que le Gouvernement soit favorable à l'amendement n° 300 . Nous aimerions tout de même savoir comment cela va se passer et quelles seront les conséquences.

Le COR n'a pas eu besoin d'un comité de pilotage, monsieur le ministre, pour rendre un rapport en décembre 2008 faisant état des disparités des pensions servies aux femmes. Et les allocataires du minimum vieillesse restent majoritairement des femmes. Comment parler d'une amélioration lorsqu'en 2008 575 000 personnes doivent vivre avec moins de 600 euros par mois de retraite, quand les plus de 65 ans sont les plus touchés, quand 57 % des bénéficiaires du minimum vieillesse sont des femmes et que 87 % des allocataires sont âgés de plus de quatre-vingt-dix ans ? Or ce sont les grands oubliés dans votre projet de loi, alors que la situation est aujourd'hui très dégradée et que les écarts sont importants.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Muzeau, la commission et le Gouvernement ayant émis un avis favorable à l'amendement n° 300 , puis-je considérer que l'amendement n° 301 est retiré ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Je vous rappelle, mais vous le savez, madame la députée, que le minimum vieillesse est augmenté, comme l'allocation aux adultes handicapés, de 25 % sur la durée du quinquennat. Vous nous parlez toujours du minimum vieillesse, mais vous ne le dites jamais !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Comment peut-on vivre avec 500 euros par mois ?

(L'amendement n° 300 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

En conséquence, les amendements n°s 301 , 375 et 107 tombent.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 181 rectifié et 303 rectifié .

La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l'amendement n° 181 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je me félicite que l'amendement n° 300 , très proche du nôtre dans sa rédaction, vienne d'être adopté. Mais je constate que certains sur les bancs de la majorité ont eu un peu de mal à lever la main lorsque vous avez demandé, monsieur le président, qui votait pour ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.) Chassez le naturel, il revient au galop !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Sans doute est-ce votre sectarisme qui vous empêche de voter un amendement de l'opposition auquel vous n'aviez même pas pensé ! Et pour cause, vous n'avez même pas songé à améliorer le niveau de vie des retraités !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Cet amendement est dans la droite ligne du précédent, mais il est plus précis. On dit souvent que l'opposition n'a ni propositions ni projet concernant les retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Notre projet repose sur un principe extrêmement important : chacun de nos compatriotes retraités doit disposer au minimum d'un revenu équivalent à 85 % du SMIC. On aurait pu envisager 100 %, mais je considère qu'il est normal qu'il y ait une différence entre un retraité et un actif, lequel doit supporter davantage de charges. Nous savons parfaitement que les différentes mesures qui ont été prises au fil du temps – les mesures Balladur de 1993 et l'allongement de la durée de cotisation – ne permettront pas à un certain nombre de nos compatriotes de toucher une retraite importante. Il est certes envisagé de repousser à 67 ans l'âge de la retraite sans décote mais, même avec une retraite sans décote, un certain nombre de nos concitoyens percevront de très faibles revenus. Nous considérons pour notre part qu'il y a un minimum. Le minimum vieillesse, aujourd'hui, est loin des 85 % du SMIC. C'est pourquoi nous proposons cet amendement comme objectif de travail pour ce comité de pilotage.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

La commission a repoussé ces amendements qui sont déjà satisfaits par l'article 4 de la loi Fillon que je vous rappelle : « La nation se fixe pour objectif d'assurer à un salarié ayant travaillé à temps complet et disposant de la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier du taux plein un montant total de pension lors de la liquidation au moins égal à 85 % du salaire minimum de croissance net lorsqu'il a cotisé pendant cette durée sur la base du salaire minimum de croissance. »

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

Je rappelle que, jusqu'en 2012, le taux de 85 % sera respecté grâce à la majoration du minimum contributif. Nous ne sommes pas favorables à ce que le comité de pilotage des retraites ait ce type d'objectif.

(Les amendements identiques nos 181 rectifié et 303 rectifié ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n° 302 a été défendu.

(L'amendement n° 302 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements, nos 337 et 490 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Arnaud Robinet, pour défendre l'amendement n° 337 .

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Robinet

Cet amendement vise à confier une mission supplémentaire au comité de pilotage : préparer pour les années futures une réforme systémique reposant sur un régime de retraite notionnel ou à points.

Ce système, qui correspond à une demande de certains syndicats, me paraît beaucoup plus simple, beaucoup plus lisible. Bien sûr, il ne pourrait s'appliquer qu'aux nouveaux entrants et n'aurait pas d'impact sur les retraités actuels et les personnes aujourd'hui en activité.

C'est une demande qui vient également de la jeune génération. Sur les bancs de l'opposition, on nous répète sans cesse que nous ne pensons pas aux jeunes générations. L'objectif de cette réforme ambitieuse, courageuse et nécessaire est bien sûr de leur garantir une retraite tout en sauvegardant le système par répartition.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour défendre l'amendement n° 490 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

La réforme dont nous débattons est indispensable pour sauvegarder notre régime de retraite par répartition, auquel nous sommes tous très attachés.

Au Nouveau Centre, nous regrettons beaucoup que l'on n'ait pas profité de cette réforme pour engager une simplification de nos trente-huit régimes de retraite et aller vers un régime unique et universel permettant l'extinction des régimes spéciaux. Ce serait conforme à l'équité, chaque régime ayant aujourd'hui des taux de cotisation, des durées de cotisation et des niveaux de pension totalement différents.

Nous souhaitons également aller vers un régime à points, très lisible, ou notionnel. Les comptes notionnels prennent en cosidération l'espérance de vie. C'est donc une façon de répondre au problème de la pénibilité, l'un des sujets majeurs de cette réforme.

Nous souhaitons que le régime universel soit géré par les partenaires sociaux pour qu'ils soient responsabilisés, et nous rediscuterons d'une caisse de retraite des fonctionnaires, qui pourrait également être gérée par eux.

Il paraît donc souhaitable que le comité de pilotage ait pour mission d'étudier la mise en oeuvre du passage à un régime universel à points ou à comptes notionnels.

Vous m'avez déjà répondu, monsieur le ministre, que cela ne réglerait pas les problèmes financiers, ce sur quoi je ne suis pas tout à fait d'accord parce qu'un régime à points permettrait d'aboutir à terme à l'équilibre. Vous m'objectez également qu'il faudrait un certain temps pour mettre en oeuvre un tel système. Les Suédois ont effectivement eu besoin d'une douzaine d'années pour mettre en oeuvre un régime à comptes notionnels. Il faut donc une période transitoire assez longue et c'est pourquoi il est urgent de s'y atteler dès maintenant, car attendre, c'est perdre du temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Ils sont en grande partie satisfaits par l'amendement n° 732 du Gouvernement. Je demande donc leur retrait.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Ce sont des amendements importants, dont nous avons souvent discuté. Il faut d'abord procéder à la réforme que nous proposons, c'est-à-dire consolider notre régime tel qu'il est organisé, parce qu'il y a urgence et qu'il doit évoluer.

Que les réflexions se poursuivent ensuite, c'est bien évidemment nécessaire mais, dans ces amendements, d'abord, il y a assez peu de choix. Vous proposez, monsieur Préel, que le comité de pilotage ait pour mission de « veiller à la mise en oeuvre des conditions d'un régime universel à points ou à comptes notionnels » ; vous ne parlez pas d'opportunité ou de possibilité, c'est très directif.

Nous avons tenu compte des propositions puisque nous remettrons en octobre 2011 un rapport sur les polypensionnés, car c'est la vraie question, le fait que certains dépendent de plusieurs régimes, avec des règles différentes. Nous verrons alors si les choses peuvent évoluer.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Sous réserve de ces explications, je demande également le retrait de ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Robinet

Oui. (Rires sur les bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 337 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

J'ai bien entendu votre réponse, monsieur le ministre. Le problème des polypensionnés est un vrai problème, mais ce n'est pas en le traitant que l'on va régler la question de l'évolution vers un régime à points ou à comptes notionnels.

Je souhaite donc que mon amendement soit voté. J'ai bien conscience qu'il ne sera pas accepté, mais je ne le retire pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

J'observe d'abord qu'à plusieurs reprises, le rapporteur et le Gouvernement nous ont tenu des discours légèrement différents. Le rapporteur nous explique que des amendements sont satisfaits par d'autres qui viendront en discussion et que nous ne connaissons pas ; le ministre, lui, demande leur retrait non parce qu'ils seront satisfaits mais tout simplement parce qu'ils vont à l'encontre du projet. Il y a là un petit problème d'harmonisation qui ne nous paraît pas totalement réglé.

Sur le fond, les amendements qui nous sont présentés tendent fondamentalement à une transformation de notre système de retraite. Je ne prétendrai certainement pas que le régime à comptes notionnels soit un régime de retraite par capitalisation : cela n'a absolument rien à voir et le système suédois, qu'on l'approuve ou non, est un régime par répartition, ce qui maintient la solidarité entre les générations.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Non, c'est une solidarité intra-générationnelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

Je crois en revanche qu'il faut faire très nettement la différence entre les systèmes par points et les systèmes par comptes notionnels. C'est un débat technique. Le système par points est, potentiellement, extrêmement défavorable aux salariés,…

Debut de section - PermalienPhoto de Marisol Touraine

…extrêmement opaque. Il suffit de faire varier la valeur du point pour que les pensions baissent du jour au lendemain de 30, 40, 50 ou même 60 %, ce qui n'est pas acceptable si l'on veut garantir un niveau de vie décent.

Cela dit, je suis étonnée que l'intérêt de certains de nos collègues pour le système par comptes notionnels tel qu'il a été mis en oeuvre en Suède et tel qu'il pourrait l'être chez nous, avec d'autres critères et d'autres principes, ne les amène pas à examiner avec plus d'attention et d'intérêt les propositions du Parti socialiste. Le grand avantage des comptes notionnels, en effet, c'est de laisser une marge de liberté, d'ouvrir un choix aux salariés pour la date à laquelle ils partent en retraite. C'est précisément d'offrir la possibilité d'opérer un arbitrage, sur la base d'informations régulièrement données, entre le moment où l'on souhaite partir et le niveau de la pension. Cette idée d'une retraite choisie – nous ne parlons, pas, nous, de retraite à la carte – est au coeur de notre projet. Il nous semble donc un peu incompréhensible, mes chers collègues, que vous souhaitiez aller vers un système par comptes notionnels tout en refusant de discuter des propositions que nous faisons, ce qui permettrait d'avancer dès aujourd'hui, dans le cadre du système actuel, sans attendre les dix ou quinze ans nécessaires pour la transformation totale de nos régimes.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je l'ai déjà expliqué, nous sommes pour la négociation et l'évolution vers un système universel, qui remette de l'égalité entre tous les salariés et les futurs retraités, un système plus transparent. Pour nous, cette voie, qui n'est pas la recette miracle du système par points ou par comptes notionnels, vaut la peine d'être explorée. Nous savons que des partenaires sociaux sont pour, que de grandes organisations syndicales sont prêtes à se mettre autour de la table pour évoluer vers ce genre de système. C'est pourquoi je voterai cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je voudrais dire au nom des députés du Parti de gauche et du Parti communiste que nous sommes peut-être les seuls mais que nous sommes contre !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Le système à points ou à comptes notionnels, en effet, c'est la fin de la solidarité, c'est le chacun pour soi. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je rappelle tout de même, parce que beaucoup l'oublient, que, grâce à vos réformes, un salarié ne peut plus être mis à la retraite d'office avant 70 ans et qu'en plus, il peut continuer à travailler après sa retraite. On vient nous expliquer que les comptes notionnels, c'est la retraite choisie. Or, de fait, aujourd'hui, un salarié peut continuer à travailler autant qu'il le veut.

La retraite par points, cela n'offre aucune garantie. Comme l'a expliqué Marisol Touraine, la valeur du point peut changer à tout moment. Les retraités suédois viennent de connaître la réalité de cette situation puisque leur retraite a chuté.

Nous sommes donc totalement contre l'un et l'autre système, nous sommes pour le maintien d'une retraite par répartition basée sur un système contributif, mais allant vers une maison commune des retraites, pour la convergence de tous les systèmes vers plus d'égalité, une évolution vers le haut et non vers le bas comme vous le faites constamment.

(L'amendement n° 490 rectifié n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 134 .

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Cet amendement vise à étendre la mission du comité de pilotage des régimes de retraite en lui demandant également de veiller « à la qualité des informations donnée par les régimes de retraite aux assurés ».

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Peut-on considérer, monsieur Decool, que vous avez également défendu l'amendement n° 136 et l'amendement n° 331 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Oui, ils visent également à étendre la mission du comité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Il ne revient pas au comité de surveiller les différentes caisses de retraite. Il y a des conseils d'administration pour cela. Je suis donc défavorable à l'amendement n° 134 , ainsi qu'aux suivants.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique, pour donner l'avis du Gouvernement sur ces amendements.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

L'information des salariés est un point important. Dans des enquêtes récentes, les salariés se considèrent comme mal, voire très mal informés sur les retraites en général et sur leurs droits en particulier. Selon un sondage réalisé par Mediaprisme, 55 % des Français se disent plutôt mal informés et 67 % des femmes se disent mal informées sur leurs propres retraites. Nous rencontrons tous dans nos permanences des femmes arrivant à quelques années de leur retraite qui, ayant eu une carrière coupée ou à temps partiel, ignorent totalement ce à quoi elles auront droit. Il y a déjà eu des améliorations mais c'est un point sur lequel nous devons tous faire un très gros effort.

(Les amendements n°s 134 , 136 et 331 , mis aux voix successivement, ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 165 .

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Cet amendement vise à étendre les possibilités de consultation du comité de pilotage.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Le comité de pilotage doit se réunir au minimum une fois par an, il peut se réunir beaucoup plus s'il le souhaite mais il s'organise comme il l'entend. La commission a repoussé cet amendement.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Il faut laisser au comité la liberté de se réunir. Une fois par an est un minimum. Le Gouvernement souhaite le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Défendu.

(L'amendement n° 304 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 220 .

La parole est à M. Jean Mallot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

C'est un amendement très significatif.

L'article 1er fixe des objectifs au comité de pilotage. Ce comité doit se réunir au moins une fois par an pour suivre notamment les conditions dans lesquelles s'effectue le retour à l'équilibre des régimes de retraite en 2018.

Nous proposons de remplacer 2018 par 2025. Et je dois dire que nous nous grattons la tête en lisant et relisant cet alinéa : « Le retour à l'équilibre des régimes de retraite en 2018 »… Une fois n'est pas coutume, deux citations me viennent à l'esprit ; elles sont de François Fillon.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Attendez la suite !

Ce mardi, M. Fillon a déclaré : « Un projet, c'est important, mais la crédibilité de ceux qui le portent, c'est aussi important. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Dans cette enceinte, dans la presse, partout, tout le monde a pensé que ces propos s'adressaient à Éric Woerth. Nous lisons encore dans la presse de ce matin que les leaders syndicaux ne veulent plus débattre publiquement avec lui ! Sa crédibilité est atteinte. Mais à y regarder de plus près, il s'avère que la phrase de François Fillon était en réalité une autocritique.

La seconde citation, du même, date du 10 juin 2003 : « Les facteurs démographiques sont connus – affirmait-il en présentant la loi qui porte son nom – ; nous privilégions l'augmentation du taux d'activité pour combler le déficit de nos régimes par répartition à l'horizon 2020. À cette date, le besoin de financement des régimes de base est évalué par le COR à 43 milliards d'euros. » Quelle crédibilité pouvons-nous accorder à un gouvernement qui avait prétendu, en 2003, résoudre la question des retraites à l'horizon 2020 et qui nous présente aujourd'hui un projet pour les sauver à l'horizon 2018 ?

En réalité, nous le savons, la démographie n'a pas changé depuis 2003. Ce qui a changé, c'est le faible niveau d'emploi, qui résulte de votre politique depuis 2002, et le creusement des déficits publics, là encore sous l'effet de votre politique, le plus bel exemple en étant l'instauration du pacte fiscal par M. Woerth, à l'été 2007.

Il est important que nous débattions de cet article 1er, car vous avez instrumentalisé le Conseil d'orientation des retraites pour dramatiser, frapper les esprits, les préparer non à des réponses cohérentes avec ce que disait le président Méhaignerie, à savoir les conséquences de la crise et de votre creusement délibéré des déficits, mais à des mesures de type démographique, alors que de telles mesures n'ont rien à voir avec le problème posé.

C'est pourquoi nous avons avancé d'autres propositions pour constituer un contre-projet au vôtre, prévoyant notamment des ressources nouvelles pour abonder les régimes de retraite de base, des ressources de long terme spécifiquement dédiées au Fonds de réserve des retraites, afin de garantir notre capacité à franchir le cap démographique de 2020, de rehausser le taux d'emploi des seniors – parce que c'est la condition pour que le niveau des pensions versées ne baisse pas à moyen terme – et d'assurer, au-delà même de 2025, la pérennité de notre régime par répartition.

Notre contre-projet est cohérent, il assure cette perspective. Pour ce qui est du vôtre, la rédaction de cet alinéa démontre que vous avez trahi les engagements pris à l'époque et que vous souhaitez en réalité dilapider à court terme le système de retraite français pour payer vos déficits ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Je porte une grande estime à Jean Mallot mais, en tant que rapporteur et membre du COR, je suis extrêmement surpris par ses propos. Nous aurions « instrumentalisé » le COR ?

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Je ne pense pas que Pascal Terrasse, notre ami Jean-Luc Préel, Maxime Grémetz, tous membres du COR, soient instrumentalisés ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Le COR est un organisme indépendant. Cela a été la seule bonne création, en son temps, de Lionel Jospin.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Rappelez-vous qu'en 2003, le seul article voté à l'unanimité par l'Assemblée portait sur la poursuite des activités du Conseil d'orientation des retraites. Tout le monde se loue du COR. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Je ne partage donc pas votre avis sur ce point, monsieur Mallot.

En ce qui concerne le report de 2018 à 2025, j'avoue là aussi ma surprise. C'est prendre des risques de manière irresponsable que de vouloir retarder de sept ans le retour à l'équilibre. Vous savez fort bien qu'il existe aujourd'hui un problème de financement des retraites. Avec François Fillon, Bernard Accoyer, alors rapporteur pour la commission des affaires sociales, Xavier Bertrand, un certain nombre de rendez-vous avaient été prévus en 2003. Le rendez-vous de 2020 est avancé en raison justement de la crise. Nous n'allons pas reculer ; nous ne voulons pas que la France devienne la Grèce s'agissant des retraités. J'émets donc un avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Évidemment défavorable. Il est un peu curieux de demander de rester en déséquilibre jusqu'en 2025. Un tel amendement ne peut être accepté par le Gouvernement. Il y a urgence. Il faut revenir à l'équilibre de nos régimes de retraite ; c'est la seule façon d'en assurer la pérennité, monsieur Mallot, et vous le savez bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Robinet

Il est toujours très intéressant d'écouter les leçons données par M. Mallot et de l'entendre parler du projet ou des propositions du Parti socialiste. Je souhaite justement soumettre nos collègues socialistes à un petit quiz. Qui a dit : « Les socialistes n'ont pas de propositions, ils parlent de la retraite à 60 ans comme des piafs. »

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Robinet

« Il faut faire face à la réalité. Les sociaux-démocrates des autres pays ont reculé l'âge de départ à la retraite, à 65, voire 67 ans. » Ce n'est pas un député ou un homme politique de la majorité présidentielle qui l'a dit.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Robinet

C'est un socialiste, et même un des plus appréciés par nos compatriotes : M. Georges Frêche. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Robinet

Alors, s'il vous plaît, monsieur Mallot, un peu de décence ! Reconnaissons que le projet du Gouvernement, présenté par Éric Woerth, est un projet responsable, ambitieux, courageux, qui a pour seul objectif de sauver le système par répartition et de garantir une retraite aux générations futures. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Merci à M. Robinet pour l'hommage qu'il vient de me rendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je rappelle, puisqu'on a fait des comparaisons européennes, que l'âge moyen de départ à la retraite en Allemagne est exactement le même qu'en France, c'est-à-dire 61 ans et demi. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Il faut regarder les vrais chiffres, c'est-à-dire l'âge auquel on part !

En ce qui concerne le financement, nous sommes devant un paradoxe. La réforme de 2003 a augmenté la durée de cotisation proportionnellement à l'espérance de vie, c'est-à-dire qu'elle règle, d'une certaine façon, le problème démographique jusqu'en 2020. Toutefois, le creusement des déficits, même avant la crise, n'a pas été un problème démographique. Les 8 milliards de déficit enregistrés en 2008 tiennent au fait que la croissance de la masse salariale n'a pas augmenté au rythme qu'avait prévu le COR, parce que l'emploi n'a pas suivi, en raison d'une politique de l'emploi quasiment inexistante de 2002 à 2008 – et je ne dis rien de la suite : ç'a été une catastrophe.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

La crise n'a rien changé au point de vue démographique. Elle a accentué le chômage, en créant 600 000 chômeurs de plus – je prends toujours des statistiques européennes quand je m'exprime sur le chômage et non celles d'institutions particulières –, ce qui a eu pour effet de creuser le déficit des retraites. Or vous répondez à cette situation par de nouvelles mesures démographiques, d'une totale injustice, en repoussant l'âge légal de départ à la retraite, alors que la question de la démographie était traitée de façon cohérente, car ce qui compte dans un régime par répartition, c'est le nombre d'années passées à la retraite rapporté au nombre d'années de cotisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Ce qui a un sens, c'est la modulation de la durée de cotisation. En modifiant l'âge légal de départ à la retraite, vous remettez complètement en cause la logique de la réforme précédente ! Quand notre collègue du groupe Nouveau Centre s'est exprimé sur les comptes notionnels, cela m'a bien amusé. Rappelez-vous : quand la Suède est passée aux comptes notionnels, pour ouvrir le choix, elle a abaissé l'âge d'ouverture des droits de soixante-cinq à 61 ans. Si nous défendons la retraite à 60 ans, c'est parce que nous voulons laisser à nos concitoyens la possibilité d'une retraite choisie.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

C'est cette liberté que vous remettez en cause !

Revenons au financement. Sur les 30 milliards de déficit en 2011, vous en financez 5 milliards. Le reste, c'est la liquidation du Fonds de réserve des retraites,…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

…c'est-à-dire de la seule épargne constituée dans une période où un gouvernement avait, pour la première fois, réduit les déficits et remis les comptes sociaux en excédent, y compris ceux des retraites, parce que la masse salariale croissait fortement.

M. Méhaignerie nous parle toujours de la croissance, du pouvoir d'achat, des salaires. Je rappelle que, durant les cinq années où deux millions d'emplois ont été créés, de 1997 à 2002, la croissance du pouvoir d'achat et des salaires a été de plus de 3 % par an. Ça compte dans les retraites ! Aujourd'hui, le problème est qu'il n'y a pas de croissance de la masse salariale, pas de ressources. Il ne s'agit pas de conduire une réforme démographique mais de créer des recettes nouvelles et de conduire une politique de l'emploi : les deux choses que vous omettez !

Qu'en est-il à long terme ? En 2018, vous osez afficher une contribution de 15,7 milliards du budget de l'État. Si l'État dégageait à cette date des excédents, il y aurait en effet une ressource, mais l'État est en déficit, monsieur Woerth ! Vous êtes le sapeur Camember : vous bouchez les trous des retraites par des trous dans le budget de l'État ! Ce n'est pas cela, une réforme financée ! Par nos amendements, nous proposons quant à nous une réforme complètement financée, s'appuyant sur deux piliers : le pilier « emploi », essentiel dans la situation présente, et le pilier « ressources nouvelles ».

Enfin, vous annoncez que vous allez ramener en 2013 notre déficit budgétaire à 3 % du PIB, c'est-à-dire que vous allez le réduire de 100 milliards d'euros. Les mesures que vous proposez vont y contribuer pour environ 11 milliards. C'est dérisoire ! Rappelons que votre majorité, selon ses propres projections, va laisser à la France en 2012 une dette de 1 800 milliards d'euros, le double d'il y a dix ans, dont les intérêts se monteront entre 45 milliards et 50 milliards chaque année, si ce n'est plus, soit des montants bien supérieurs à tous les déficits des régimes de retraite. Je crois donc que vous êtes mal placés pour donner des leçons en matière d'équilibre ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Nous avons des différences d'interprétation, monsieur Muet, mais il faut au moins s'en tenir aux faits et aux chiffres. Quand vous affirmez que l'âge effectif de départ à la retraite est le même, c'est totalement contraire à la vérité de tous les chiffres. La différence entre la moyenne des pays européens et la France est de deux ans et deux mois. L'âge moyen européen est de 61 ans et quelques mois ; il est en France de cinquante-neuf ans et quelques mois.

Par ailleurs, s'il est vrai que des emplois ont été créés durant la période Jospin, la progression a été exactement la même que celle de nos voisins européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

La seule différence, c'est qu'ils ont été créés en passant aux 35 heures. C'était très facile, mais cela a extraordinairement aggravé les déficits, et vous en êtes responsables ! (« C'est faux ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Tenons-nous en aux faits ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

En 2018, monsieur Muet, l'équilibre sera atteint de manière claire et précise : le report de l'âge de départ à la retraite, que vous contestez, représentent 18 ou 19 milliards d'euros ; l'apport de l'État est gelé à hauteur de 15,6 milliards ; les mesures de basculement UNEDIC doivent rapporter 1,5 milliard ; les mesures de convergence entre le public et le privé, 4 milliards.

Nous serons donc à l'équilibre en 2018, et nous le resterons en 2019 et 2020. Jusque-là, c'est vrai, nous utiliserons le Fonds de réserve des retraites.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Cela nous oppose totalement. Mais le Fonds de réserve des retraites, c'est quelque 30 milliards.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Pourquoi dites-vous que nous n'avons rien fait, alors ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Vous voyez bien que ce n'est pas tout à fait au niveau des besoins. Nous utilisons le Fonds de réserve des retraites pendant que les mesures que nous prenons montent en puissance. Nous ne tablons pas uniquement sur le fonds. Nous comptons sur la montée en puissance des mesures que nous prenons, les mesures d'âge ou celles concernant les recettes, et nous utilisons le fonds, dans les conditions que vous savez, à travers la CADES. Voilà comment les choses se passeront.

Il est logique d'utiliser le Fonds de réserve des retraites. Je ne comprends pas que, depuis le début, vous contestiez cette proposition.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Ce fonds est une réserve destinée à compenser, justement, des difficultés liées aux retraites ; difficultés que nous avons presque vingt ans plus tôt que prévu, le COR l'a bien montré.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Le Fonds de réserve des retraites n'a pas été créé pour cela, il était conçu pour répondre à un problème démographique !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Si vous aviez créé le Fonds de réserve,…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

…c'était justement pour éviter une réforme des retraites. Nous, nous engageons une réforme des retraites, et donc les besoins à venir sont inférieurs.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

La bosse démographique dont vous parlez est évidemment incluse dans les hypothèses du Conseil d'orientation des retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Retournez à votre dossier, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Quant aux propositions du Parti socialiste sur les recettes fiscales ou tirées des cotisations sociales, nous nous sommes déjà exprimés. M. de Courson a fait hier une intervention tout à fait précise. La plupart des ressources que vous inscrivez dans la colonne recettes de vos propositions sont extraordinairement fragiles ou n'existent pas. Ce n'est pas ainsi que vous pourrez financer le système de retraite.

Ce serait tellement simple d'accumuler milliards d'euros en fiscalisant un maximum de gens, l'ensemble des Français et des entreprises. Mais ce n'est pas ainsi que cela marche, ce n'est pas par la fiscalité qu'on peut résoudre la question des retraites. La fiscalité, nous en avons besoin, nous l'utilisons à hauteur de 4 milliards d'euros, mais nous prenons également des mesures pour retarder, tout simplement en fonction de l'allongement de la durée de la vie, l'âge du départ à la retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Votre intervention, monsieur le ministre, soulève quelques interrogations. Pour critiquer nos propositions d'élargir l'assiette des recettes aux revenus du capital, notamment, vous avez prononcé cette phrase extraordinaire : « C'est trop simple. » Alors, laissez-vous aller à la simplicité, pour une fois. (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Si c'est vraiment parce que c'est trop simple que cela vous paraît inadapté, ne vous retenez pas, faites payer les revenus du capital, supprimez le bouclier fiscal, renoncez à ces chèques au bénéfice des plus riches qui choquent tellement les Français !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Les Français ont une vision simple des choses : face à un problème, ils se demandent comment on va le régler et qui va payer.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

On veut bien recevoir des leçons en matière d'économie, mais cela fait deux fois que vous nous servez la même leçon alors qu'en réalité, le projet que nous examinons aujourd'hui est nécessaire à cause de l'échec de votre réforme de 2003.

Vous prétendez que la réforme que vous présentez est indispensable pour des raisons démographiques, mais vous nous avez déjà dit cela. Vous ne pouvez pas vous exonérer de la réforme de 2003 et de vos discours déjà centrés, à l'époque, sur la démographie.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gest

Nous ne nous exonérons pas de 1981 non plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

D'autant qu'entre-temps vous avez été les seuls au pouvoir.

Il n'y a pas de honte à être dans l'échec.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Ce qui n'est pas acceptable, c'est de justifier votre réforme par l'évolution de la démographie, car vous avez déjà procédé à l'allongement de la durée de cotisation pour y répondre.

Cela vous gêne mais nous le répéterons inlassablement : votre réforme n'est pas crédible. Les Français le savent, il n'y a que vous, dans cet hémicycle, qui êtes coupés de la réalité de la vie et de la nation (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) au point de penser que les gens croient à vos arguments.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Il y a six ans, c'est le Premier ministre actuel qui était chargé du dossier. Est-il besoin de rappeler vos engagements ? Vous pensiez aboutir à un financement intégral de la réforme de 2003 à l'horizon de 2020, mais les 30 milliards de déficit d'aujourd'hui sont le résultat de l'échec de votre politique. Comme vient de l'indiquer Pierre-Alain Muet, ce qui n'a pas marché, c'est que les recettes tirées de l'emploi que vous escomptiez n'ont pas été au rendez-vous. L'échec de la réforme des retraites, c'est d'abord l'échec de votre politique économique, voilà la réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Vous aviez pris des engagements ici, y compris en 2003, de ne jamais toucher à la retraite à 60 ans. Aujourd'hui, face à votre échec, vous aviez deux solutions. Vous pouviez augmenter les recettes parce que, sans faire de prévisions sur l'évolution de l'économie, que personne ne maîtrise, il était possible de taxer d'autres ressources. Vous y avez renoncé et vous avez choisi l'autre solution, le report de l'âge légal.

Je suis assez impressionné, monsieur le ministre, qu'il vous paraisse si simple de faire payer par les pauvres le prix de la réforme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je veux réagir aux propos de M. Woerth et de M. Méhaignerie sur le volet financement du dispositif.

Pierre-Alain Muet a raison de rappeler que le Président de la République actuel a, outre ses deux titres officiels, un troisième titre qui lui revient de droit : il est Président de la République et co-Prince d'Andorre, mais également Roi de l'augmentation de l'endettement public.

Entre 1993 et 1997, période pendant laquelle il était ministre du budget, et depuis 2002, lorsqu'il est revenu au gouvernement, nous constatons un doublement de la dette publique.

Pour vouloir donner des leçons d'équilibre, il faut, comme disait M. Fillon, être crédible.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Or, cette crédibilité, vous ne l'avez ni sur le plan financier ni pour les mesures que vous proposez.

Vous affirmez, vous appuyant sur l'intervention de M. de Courson, que le financement du dispositif proposé par la gauche n'est pas assuré. Qu'en est-il pour le vôtre ?

Comme Pierre-Alain Muet l'a souligné à juste titre, les 15 milliards d'euros, ce n'est pas rien mais ce n'est que de la monnaie de singe puisque c'est la contribution du budget de l'État à l'équilibre des régimes de retraite de la fonction publique et des militaires, M. Cahuzac l'a rappelé. Dans la mesure où le budget de l'État sera toujours en déficit, cela correspond bien à de l'endettement et non à du financement net.

Vous nous parlez aussi de la contribution de l'UNEDIC. C'est la deuxième fois que vous nous faites le coup ! M. Fillon nous avait déjà dit que nous allions pouvoir financer une partie de la réforme des retraites en transférant les cotisations chômage sur les cotisations retraites et que, par conséquent, nous pourrions baisser les charges sur les entreprises. Cela n'a pas fonctionné une première fois. Cela fonctionnera-t-il cette fois-ci ? On peut en douter. Là encore, la crédibilité est bien le mot-clef, M. Fillon a eu raison de le dire.

Quel est l'avis des partenaires sociaux sur le sujet ? Il me semble en effet que, même si les ASSEDIC et le service public de l'emploi ont été fusionnés au sein de Pôle emploi, les partenaires sociaux restent encore les maîtres de l'utilisation des cotisations chômage. Or je n'ai pas le sentiment qu'ils aient été associés de près ou de loin à ce dispositif et qu'ils aient donné leur accord.

Un autre élément jette une lumière crue et inquiétante sur le financement de votre dispositif, c'est évidemment la question de l'emploi des seniors, à laquelle nous reviendrons. Pour que le système rapporte à l'ensemble de la collectivité ce qu'il est censé lui rapporter, il faudrait que le taux d'emploi des seniors augmente au même rythme que le report de la date légale de départ à la retraite. Malheureusement, on peut sérieusement douter que cela se produise. Il a fallu plus de dix ans dans tous les pays pour parvenir à une évolution aussi rapide, de 2, 3, 4, 5 points. Cela veut dire, tous les rapports le mentionnent, que ce que vous allez économiser d'un côté avec le report de l'âge de départ se traduira par une augmentation des dépenses financées par l'assurance chômage ou encore par le RSA, c'est-à-dire par les collectivités locales.

Il est d'ailleurs dommage que ni l'étude d'impact ni aucune étude depuis que nous avons entamé ce débat ne soit capable de nous indiquer, au vu de l'évolution du taux d'emploi des seniors, ce que coûtera ce report à l'UNEDIC et aux collectivités territoriales, donc à l'État, à travers ces dépenses et d'autres encore, comme l'allocation pour adulte handicapé. Ce dispositif ne peut donc pas être présenté comme apportant un gain net à la collectivité nationale. Une dépense est associée à ce gain et nous aimerions savoir comment cette dépense a été évaluée par vos services, toujours pour une question de crédibilité.

Enfin, si l'on veut nous parler d'équilibre des systèmes de retraite, il faut nous parler aussi d'équilibre budgétaire et, plus globalement, d'équilibre de la protection sociale. On nous dit aujourd'hui qu'on veut sauver le régime de retraite, et, plus globalement, le système de protection sociale mis en place à la Libération en 1945. Mais, si je regarde l'état des comptes de l'assurance maladie et les moyens qui seront nécessaires pour financer la dépendance, je constate qu'il ne suffira pas que vous trouviez des recettes, assez douteuses au demeurant, pour les retraites. Il faudrait que vous nous expliquiez comment vous allez faire, monsieur le ministre, en tant que garant de l'équilibre des finances publiques et sociales, pour assurer l'équilibre de l'ensemble de nos comptes car c'est cela qui importe. Mais, de cela, vous ne parlez jamais. C'est la globalité de notre système de financement de la protection sociale et de nos comptes budgétaires qui devra être évoquée. Si l'on veut être crédible, il faut aborder tous les sujets. En plus, vous seriez bien placé pour le faire, puisque vous avez été ministre du budget et que vous êtes aujourd'hui ministre des comptes sociaux. Nous sommes en droit de l'attendre de vous-même et de votre gouvernement.

Si vous ne le faites pas, c'est que vous ne pouvez pas le faire, parce que votre politique ne le garantit pas, que vous n'avez pas une vision claire de l'avenir et que vous connaissez clairement les limites de l'exercice dans lequel vous êtes engagé. Vous avez d'ailleurs fixé un rendez-vous en 2018 ; c'est dire que vous n'avez pas confiance dans la réforme que vous mettez en place. Vous savez parfaitement qu'en 2018, tant sur le plan de l'équilibre des comptes budgétaires que des comptes sociaux, vous ne serez pas parvenu à apporter des réponses satisfaisantes. Vous vous lancez dans un exercice non pas d'équilibre mais d'équilibriste, j'allais dire d'illusionniste ! Il vaudrait mieux dire la vérité aux Français et leur annoncer que ce sera difficile. Pour réussir, il faut que ce soit juste, et donc ne pas soutenir votre réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous prenez des risques : la réplique sera terrible !

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Le régime par répartition est, par définition, un ratio entre actifs et inactifs. Quand ce régime a été créé, ce ratio était de 4. Aujourd'hui, il est de 1,8. Il ne vous a pas échappé, monsieur Muet, que l'espérance de vie s'allonge, ce dont nous nous réjouissons tous, je suppose. C'est une réalité qui nous saute aux yeux depuis 1945.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Cela a déjà été réglé par la réforme Fillon.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Il ne vous a pas échappé non plus que la France est un des rares pays qui gagnent de façon importante des habitants. À partir du moment la natalité est forte, où le nombre d'actifs augmente et où, grâce à vous et aux 35 heures, on travaille moins, il faut bien trouver une autre solution.

En outre, si nous devons légiférer, mes chers collègues, c'est parce que, en 1983, vous avez pris la décision de ramener l'âge de départ à la retraite de 65 à 60 ans. Sans cela, nous ne serions pas ici et nous n'aurions pas à régler ces difficultés. Voilà la vérité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

L'abaissement de l'age de la retraite à 60 ans et les 35 heures nous amènent aujourd'hui à imposer des décisions financières drastiques aux Français. Merci beaucoup ! Sans cela, nous ne serions pas ici.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Dernière chose extrêmement importante : alors que nous étions en période de croissance, M. Jospin n'a pas hésité à siphonner le Fonds de réserve des retraites. Pourquoi ? Pour alimenter les 35 heures ! Le Fonds de réserve des retraites, nous, nous allons l'utiliser pour qui ? Pour les retraités. C'est tout à notre honneur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Madame la députée, il ne m'a pas échappé que l'espérance de vie augmente et j'ai toujours dit, parce que j'écris sur ces sujets depuis longtemps, que le bon critère dans un régime par répartition, c'était la durée de cotisation. Pour une raison simple, c'est que la durée de cotisation, c'est juste. Si vous avez commencé tôt, vous partez plus tôt. Quand on privilégie la durée de cotisation, comme l'a fait la réforme de 2003, la logique veut que l'âge de départ à la retraite soit le plus bas possible. Il pourrait même disparaître mais nous en avons besoin dans un régime par répartition pour ceux qui ont une carrière incomplète.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Mais si la logique, c'est la durée de cotisation, il n'y a aucune raison de reculer l'âge auquel on peut ouvrir les droits à la retraite. La meilleure preuve, c'est que lorsqu'elle a fait sa réforme, la Suède, dont le régime de comptes notionnels est vanté par notre collègue du Nouveau Centre, a abaissé l'âge de départ à la retraite de 65 ans à 61 ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Dans un régime notionnel c'est plus compliqué, mais dans notre régime par répartition c'est la durée de cotisation qui est le bon critère. Et je répète que le règlement de la question démographique était programmé depuis 2003 jusqu'en 2020.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Elle était donc traitée. La question qui se pose aujourd'hui à notre pays, à laquelle je vous demande de réfléchir sérieusement sans faire preuve de démagogie (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et en regardant les choses en face, c'est le déficit de l'emploi. C'est le chômage qui a creusé le déficit. Vous ne répondez pas à cette question. En passant de 60 à 62 ans que faites-vous ? Vous faites cotiser pratiquement pour rien ceux qui ont déjà leurs annuités et qui pourraient partir en retraite. Et payer des cotisations pour rien, j'appelle ça un impôt ! Donc, oui, vous augmentez l'impôt sur les salariés.

Ensuite, vous faites exactement le contraire de ce que disait François Fillon dans ses discours, à savoir que la baisse du chômage financerait les retraites. Vous faites continuer à travailler des salariés qui pourraient prendre leur retraite parce qu'ils ont toutes leurs annuités, qui ont souvent commencé tôt et qui ont eu des métiers pénibles,…

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Le dispositif « carrières longues », c'est nous qui l'avons créé ! Vous ne l'avez même pas voté !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

…et ceux qui sont au chômage, vous les y laissez ! C'est encore la politique du sapeur Camember ! Vous prétendez combler le trou des retraites, mais vous creusez celui du chômage ! De même, vous prétendez combler le trou des retraites de la fonction publique avec les 15,7 milliards, mais vous creusez celui du déficit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Mme Rosso-Debord a dit certaines vérités, monsieur Muet. Admettez-le ! La façon dont vous présentez les choses est stupéfiante. Vous dites qu'il est dramatique de payer des cotisations pour rien, mais je vous ferai remarquer que si l'on attend un juste retour des cotisations dont on s'acquitte, cela s'appelle de la capitalisation. Le principe de la répartition c'est que les actifs paient les retraites de ceux qui ont cessé leur activité et assument l'équilibre du système. Vous ne cessez de mélanger répartition et capitalisation. Selon ce qui vous arrange, vous êtes tantôt dans une logique, tantôt dans l'autre.

Je vous ferai par ailleurs remarquer que le projet du Parti socialiste, …

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

…qui est essentiellement fiscal, prévoit bien d'augmenter l'emploi des seniors, mais que vous ne l'avez jamais fait !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

À l'époque où vous étiez au pouvoir, l'emploi des seniors s'est particulièrement dégradé. Et vous dites que le fait d'augmenter l'emploi des seniors va rapporter 10 milliards d'euros aux régimes de sécurité sociale, dont 6 pour les retraites. Évidemment, les choses iront mieux si on améliore l'emploi ! Évidemment, la politique active du Gouvernement dans le domaine de l'emploi est particulièrement importante ; si l'emploi va mieux, il y aura plus de cotisations et les régimes de retraite, comme l'ensemble des régimes sociaux, iront mieux. Mais, à côté de cela, nous devons mener des réformes structurelles. Nous ne pouvons pas nous en tenir à des recettes virtuelles comme vous le faites. Car les 25 milliards de ressources nouvelles que vous annoncez sont des recettes virtuelles.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Vous ne pouvez pas faire croire que l'on va payer sur du vent les retraites des Français !

Enfin, s'agissant de la durée de cotisation et de l'âge de la retraite, la France marie ces deux notions depuis maintenant de nombreuses années. Si nous avions voulu équilibrer le système de retraite uniquement par l'allongement de la durée de cotisation, il aurait fallu porter celle-ci à 47 ans. Allez expliquer aux Français qu'il leur faudra 47 ans de cotisation ! Les Allemands doivent avoir cotisé 45 ans, pour les Français c'est moins. Nous sommes en train d'augmenter la durée de cotisation selon la programmation de la loi Fillon, mais le critère de l'âge est majeur. Dans un système par répartition, il est en effet normal que ceux qui vont payer votre retraite puissent fixer l'âge à partir duquel vous aurez droit à la solidarité nationale. Aucun pays ne s'exonère de l'âge. Les Suédois sont passés de 60 à 61 ans, vous le savez très bien, et, au passage, ils ont réduit les retraites de 3 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gest

C'est sans doute ce que veulent nos collègues socialistes !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Vous parlez toujours de l'étranger comme si c'était le paradis, mais vous oubliez de dire que la France est le pays au monde qui consacre le plus d'argent aux retraites en pourcentage de son produit intérieur brut ! Le système de retraite français est donc généreux, il doit le rester, et en même temps il doit être équilibré. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Je vous répondrai avec beaucoup de courtoisie, monsieur Muet. Je connais la rigueur dont vous faites généralement preuve dans vos démonstrations et je suis surpris par la façon dont vous êtes revenu sur l'affaire des 15 milliards pour les retraites de la fonction publique. Les choses sont très simples mais supposent un minimum de logique et de cohérence, y compris de votre part.

Le montant des retraites payées aux fonctionnaires de l'État est d'environ 35 milliards d'euros. Les cotisations assises sur un taux de 7,85 % rapportent une somme de l'ordre de 5 milliards d'euros. Par définition, par construction, il y a donc obligation – et c'est parfaitement légitime –, pour payer les retraites des fonctionnaires, que l'État complète les cotisations par une dotation versée sur le compte d'affectation spéciale. Comme il le fait pour les régimes privés, le COR a déterminé l'évolution de cette dotation. Il a fait ce que l'on appelle une convention de calcul qui a arrêté les chiffres en 2000 et qui a fait ses calculs pour 2010 par rapport aux chiffres de 2000. C'est de cet écart de 15 milliards d'euros que vous parlez.

Prenons l'hypothèse où l'on ne s'en occupe pas. Cela veut dire qu'il y aura une dérive naturelle de ce que l'État doit verser. Autrement dit, l'État va considérer que, les cotisations restant fixées à 7,85 %, ce sont tout naturellement les impôts qui financeront le déficit.

Mais si l'on suit votre raisonnement, monsieur Muet, il serait normal que vous votiez l'alignement du taux de cotisation de 7,85 % sur celui de 10,55 %, puisque cela répondrait parfaitement à votre remarque sur la dérive des comptes. La logique des choses, c'est de faire en sorte qu'il n'y ait plus de dérive. La logique des comptes, c'est de faire en sorte qu'on la mesure. C'est donc tout naturellement que je vous le dis : en 2010 il y a une dépense supplémentaire de 15 milliards d'euros par rapport à 2000. Cette dépense est financée par l'État ; elle est inscrite en dépense sur le budget de l'État mais en recette sur le compte d'affectation spéciale. C'est lisible ; c'est clair. Soyez donc cohérent avec vous-même et acceptez d'élever le taux de cotisation des fonctionnaires pour l'aligner sur celui du privé et diminuer ainsi le déficit de l'État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

J'ai retenu une phrase essentielle prononcée par M. Woerth au tout début de la discussion. Il a déclaré qu'il faudrait que cette réforme soit celle du courage et de la raison. Je vais vous dire ce que j'en pense, chers collègues de la majorité.

La raison, ce serait de reconnaître l'échec de la réforme que vous avez menée en 2003, dont vous nous promettiez qu'elle assurerait l'équilibre des régimes de retraite à terme échu, qu'elle garantirait les pensions et qu'elle prendrait en compte l'équilibre démographique de 2020, dont l'appréciation n'a pas changé entre 2003 et 2010. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J'en viens au courage. Puisque vous nous parlez de répartition et prétendez nous apprendre la différence avec la capitalisation, qui était votre dogme il y a encore peu malgré l'échec qu'elle a connu dans d'autres pays, notamment outre-Atlantique, le courage voudrait que vous fassiez aujourd'hui en sorte que tous les revenus cotisent à égale proportion, mais vous vous y refusez pour ne pas déplaire à vos amis. C'est ce courage que nous attendons de vous aujourd'hui pour financer notre système de retraite de manière juste et équilibrée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Mme Rosso-Debord nous a dit que, s'agissant des équilibres financiers, si la situation était grave, c'était parce que les socialistes avaient mis en place la retraite à 60 ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Quant à moi, je préfère voir ici un Henri Emmanuelli qui a permis à des hommes et des femmes qui se levaient tôt, qui travaillaient dur (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), de partir à la retraite à 60 ans, plutôt que des députés d'une majorité qui a voté le bouclier fiscal pour les plus riches. Voilà la différence qu'il y a entre la gauche et la droite ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Être démagogue, c'est plus facile qu'être sérieux ! C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Ensuite, je voudrais dire au président de la commission des affaires sociales qu'il commet une erreur sémantique lorsqu'il parle de l'âge de départ à la retraite. En France, l'âge légal de départ à la retraite est effectivement plus bas que dans d'autres pays européens. Mais s'agissant de l'âge effectif de liquidation des droits à la retraite, un très intéressant article des Échos de ce matin souligne que la France se situe dans la moyenne européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Le problème de fond, que le ministre lui-même a posé, c'est en fait celui de l'emploi de seniors. Mais qui aujourd'hui licencie les personnes de plus de 55 ans ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Qui aujourd'hui demande à l'État des aides pour faire partir des hommes et des femmes de plus de 55 ans ? Ce ne sont tout de même pas les socialistes ! Ce sont d'abord les entreprises. Il ne faut certes pas pousser les gens à aller jusqu'à 62 ans, mais comme Gaëtan Gorce et Alain Vidalies l'ont annoncé, nous vous ferons des propositions très précises pour faire en sorte que les salariés puissent travailler pendant leur période grise, celle qui se situe entre 55 et 60 ans. Ce serait conforme à la justice sociale tout en assurant aux régimes sociaux des ressources évidentes.

Par ailleurs, il est un débat que nous devons éclaircir. M. le ministre dit partout, et il essaie de faire passer le message dans la presse – nous voyons bien à quel petit jeu il se livre –, que les socialistes proposeraient finalement de la capitalisation pour financer les retraites. Et Mme Rosso-Debord nous affirme que le lien doit se faire entre les actifs d'un côté et les retraités de l'autre. Nous ne disons rien d'autre, sauf que dans le financement des retraites il y a ce qui relève des avantages contributifs et ce qui relève des avantages non contributifs. Il faut savoir qu'une grande partie du montant des retraites aujourd'hui n'est pas liée au travail : les avantages familiaux, le FSV, etc. Nous considérons donc que ce qui relève du travail doit être financé par le travail et nous ne disons rien d'autre, à votre différence, lorsque nous annonçons qu'il faudra augmenter les cotisations salariales et patronales si l'on veut avoir un bon niveau de retraite. Mme Karniewicz, présidente de la CNAV, a eu raison ces derniers jours de nous alerter en soulignant que l'on ne parlait pas suffisamment du montant des retraites. Par voie de conséquence, les paramètres que vous retenez pour financer les retraites affaibliront globalement, du point de vue macro-économique, les équilibres financiers, et surtout déboucheront sur des retraites qui seront diminuées.

Mais nous disons aussi que ce n'est pas aux revenus du travail de payer les avantages non contributifs. Nous pensons en effet, comme l'ensemble des organisations syndicales, que toute une série de revenus qui ne sont pas soumis aujourd'hui aux prélèvements sociaux, les stocks-options par exemple, doivent être assujettis à cotisation pour financer les avantages non contributifs.

C'est là que se trouve la véritable différence entre vous et nous. N'essayez pas de vous servir du COR ! N'essayez pas de laisser croire qu'il aurait dit autre chose que ce que je viens de dire. Les personnes ici présentes qui siègent au COR savent que ses rapports, qui sont d'ailleurs en ligne, disent la même chose que moi.

Ainsi, 2003, avec plusieurs milliards de déficit, marque l'échec complet de votre politique. Vous recommencez aujourd'hui : aucune réforme structurelle ou financière n'est mise en place. Il faut dire la vérité aux Français et à la représentation nationale : dès 2012, après les élections présidentielles, il faudra revenir sur cette réforme des retraites, ne serait-ce que pour la financer, parce qu'elle ne le sera pas.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

1993, 2003, 2007 et 2008 sont des réformes majeures et qui ont réglé une partie du problème. Puis est survenue la crise. Vous faites comme si elle n'avait pas existé, mais elle a durablement affecté les recettes des régimes de retraite.

Nous ne pouvons pas regarder filer les déficits et ne pas réagir à une chute aussi brutale des recettes. Elle est due aussi pour une part aux problèmes structurels, bien qu'ils aient été largement réglés par la réforme de 2003, qu'il faut combiner avec celle de 1993. Mais on voit bien que les déficits de nos régimes de retraite, comme ceux de l'assurance-maladie, ont terriblement plongé à partir du moment où la crise a affecté notre pays.

Nous avons à prendre cette situation en compte, c'est un devoir d'État, comme je le disais dans mon discours introductif, et c'est ce qu'a fait le Président de la République.

Il y a entre les structures et la crise une conjonction qui affecte durablement les recettes des régimes sociaux. La meilleure façon de les faire fonctionner est de se poser les problèmes en termes de mesures d'âge.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Le débat évolue, et je veux en remercier M. le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Ce qu'il vient de dire nous permet de poursuivre le débat sur des bases communes. Jamais, jusqu'à présent, dans la communication du Gouvernement ou au cours des jours de débat, il n'avait été dit ce que nous soutenons depuis le début, à savoir qu'il s'agit de répondre aux effets de la crise. Jusqu'à présent, toutes les explications données ici même ou à l'extérieur ne visaient que la question démographique. Quand on se met d'accord, et ce qui vient de se passer est très important, pour dire que la vraie question est maintenant de savoir comment répondre aux effets de la crise, alors, naturellement, la réponse est différente de celle donnée à un problème démographique.

À la question démographique, la réponse peut éventuellement être l'allongement de la durée de cotisation, car c'est là qu'est la logique. Mais quand il s'agit de répondre à la crise, il faut trouver des moyens financiers. La question est bien posée en ces termes : la crise est là.

Or, comment fait-on pour y répondre ? On recule l'âge de départ à la retraite. Répondre à la crise par le recul d'un droit social, c'est présenter la facture de la crise à certains et pas à d'autres : c'est cela votre politique, c'est cela votre réforme, et c'est pour cela que nous la combattons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Alain Vidalies a tout dit. Ce que vient de déclarer le Gouvernement est très intéressant : pour la première fois, monsieur le ministre, vous reconnaissez que la question démographique relevait de la réforme précédente et que la question qui se pose aujourd'hui est de répondre à la fois à un déficit existant déjà avant la crise, la masse salariale n'ayant pas augmenté comme prévu, et au creusement de ce déficit depuis la crise.

Notre réponse est simple : il faut résorber ce déficit non par des mesures démographiques, ces dernières ayant été mises en place jusqu'en 2020 par la réforme précédente, mais par des mesures en faveur de l'emploi, évidemment, car c'est là l'origine du déficit, ainsi que par des ressources nouvelles.

Pour l'emploi, il faut une politique spécifique, et c'est ce que nous proposons dans notre projet. Pour les ressources nouvelles, c'est tout aussi simple : nous avons en France une fiscalité qui a pour caractéristique de faire une différence considérable entre l'impôt sur les salaires et l'impôt sur le capital. Pour tous les impôts, on retrouve cet écart considérable.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Ce n'est pas vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Mettons de la justice sociale, faisons en sorte que le capital contribue autant que le travail, et nous arriverons au financement nécessaire, et même mieux.

Vous, que faites-vous ? Vous répondez par une mesure soi-disant démographique. Et vous avez raison de dire que ce n'est pas par l'allongement de la durée de cotisation que la solution peut être trouvée : jusqu'en 2020, c'est déjà fait ! Comme le déficit est à résorber maintenant, il faut le faire au moyen des deux mesures que j'ai citées. Mais vous y rajoutez une mesure soi-disant démographique qui, en réalité, est un impôt sur les salariés.

Lorsqu'on fait le bilan de votre réforme, on constate qu'en 2020, 25 milliards seront à la charge des salariés, en grande partie par le biais du report de l'âge de liquidation des droits à la retraite. Pour le capital, la charge sera de 2 milliards. On voit là encore que la crise, vous la faites payer aux salariés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 220 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de quatre amendements, nos 305 , 306 , 177 et 174 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Roland Muzeau, pour défendre l'amendement n° 305 .

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Cet amendement propose de prendre en compte le taux d'emploi en CDI, et non le taux d'emploi simple. Un taux d'emploi élevé ne garantit pas que les emplois en question ne soient pas précaires. Il s'agit d'exclure les emplois précaires en temps partiel de l'objectif de progression. En effet, la progression du seul taux d'emploi en lui-même ne prémunit pas contre les phénomènes de paupérisation massive des retraités et des personnes âgées, tels qu'ils ont eu lieu aux États-Unis et en Grande-Bretagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M.Pierre Gosnat, pour soutenir l'amendement n° 306 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Il ne vous aura pas échappé que notre collègue Xavier Bertrand nous a quittés en cours de séance. Il se dit qu'il serait parti au siège de l'UMP, où seraient reçus des invités surprise. On ne sait pas qui, on cite le nom de Bettencourt, mais il semblerait qu'il se passe des choses au siège de l'UMP en ce moment et que notre collègue Xavier Bertrand y soit. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Restez sereins !

J'en viens à l'amendement. La lecture des objectifs assignés au comité de pilotage renseigne sur les priorités du Gouvernement. En 2018, le comité devra avoir assuré le retour à l'équilibre des régimes de retraite. En revanche, c'est seulement à l'horizon 2030 que le taux d'emploi des seniors devra être similaire à celui de nos voisins européens. Cet ordre de priorité est tout bonnement effarant puisque, pour les personnes de plus de 50 ans, le taux de chômage est particulièrement élevé.

Cet amendement souligne l'impasse totale de la réforme actuelle qui repousse l'âge légal du départ à la retraite, alors que les seniors sont bien souvent en retraite forcée dès 50 ans.

Avec cet amendement nous proposons de remplacer la date de 2030 par celle de 2018, étant donné l'urgence de la situation et le caractère modeste et minimal de l'objectif concerné. La progression du taux d'emploi des personnes de plus de 50 ans est impérative. Leur très faible taux d'emploi conjugué au relèvement de l'âge du droit de départ à la retraite aura pour conséquence mécanique l'abaissement du montant des pensions de retraite.

Pour toutes ces raisons, l'objectif de réduction du taux de chômage des personnes de plus de 50 ans doit être avancé à 2018.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur de Rugy, les amendements nos 177 et 174 sont-ils défendus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur ces quatre amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

La question de l'emploi des seniors, c'est-à-dire des personnes de plus de 55 ans selon la norme européenne, est essentielle pour la réussite de cette réforme. On s'est déjà occupé de ce problème auparavant, dans le PLFSS de 2009, et l'article 32 du présent projet de loi y est consacré. Il est donc important que le comité de pilotage veille à la progression de l'emploi des seniors.

Avis défavorable aux amendements nos 305 , 177 et 174 . Mais je retiens l'amendement n° 306 , à la condition que l'on remplace 50 ans par 55 ans car, comme je le disais à l'instant, c'est la norme européenne, et il faut s'y référer.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Avis identique.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Gosnat, êtes-vous d'accord pour rectifier votre amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Il faut être cohérent : à Lisbonne, Lionel Jospin avait bien indiqué qu'il fallait s'occuper de l'emploi des seniors en fixant la limite à 55 ans, ce qui est la norme au niveau européen. Je ne vois pas pourquoi créer une nouvelle exception française ; la cohérence est la base de tout.

Je dépose donc un sous-amendement remplaçant « 50 » par « 55 » à l'amendement n° 306 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis du Gouvernement sur ce sous-amendement, auquel est attribué le numéro 739 ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Avis favorable.

(L'amendement n° 305 n'est pas adopté.)

(Le sous-amendement n° 739 est adopté.)

(L'amendement n° 306 , sous-amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

En conséquence, les amendements nos 177 et 174 tombent, ainsi que les suivants, nos 176, 172 et 221.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 225 .

La parole est à Mme Pascale Crozon.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Aujourd'hui, les retraites des femmes sont inférieures de 40 % à celles des hommes. Les chiffres sont connus, je les rappelle brièvement : la retraite moyenne d'une femme est de 825 euros, celle d'un homme de 1 426 euros, et l'on voit bien que les droits familiaux ne suffisent pas à compenser cet écart. Le COR nous dit que la progression du travail à temps partiel et le chômage annulent les effets bénéfiques de la hausse du taux d'activité féminin. Je ne reprendrai pas ce qui a été dit sur le taux de chômage et les conditions d'emploi des femmes.

Cela étant, monsieur le ministre, je ne vois pas d'où vous tenez les chiffres qui vous permettent d'affirmer que les femmes auraient plus de trimestres que les hommes. Le rapport de la délégation aux droits des femmes constate qu'il y aura un rapprochement, mais qu'il sera loin de suffire. Si nous prenons l'exemple d'une femme née en 1955, qui va subir de plein fouet cette réforme, elle a dès aujourd'hui onze trimestres de retard sur les hommes, même en comptant les droits familiaux.

D'autre part, vous citez souvent – et vous l'avez encore fait abondamment ce matin – l'exemple des autres pays européens pour justifier votre réforme. Mais, monsieur le ministre, dans ces pays, on est conscient du problème que pose l'écart de salaire entre hommes et femmes et on a donc mis en place un certain nombre de mesures pour permettre un rattrapage et, à terme, l'égalité. C'est peut-être cela le paradis pour les femmes dont vous parliez tout à l'heure.

Les femmes sont les grandes oubliées de cette réforme et ses grandes victimes. Le rapport du Secours catholique le dit : elles seront les futurs pauvres de notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Le problème tient moins à l'âge de départ en retraite qu'au niveau des pensions. En commission, nous avons justement amélioré le texte en prévoyant l'annulation des écarts de pensions entre hommes et femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

C'est un objectif, ce n'est pas la réalité actuelle.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

J'ai toujours dit que, heureusement, les écarts entre hommes et femmes pour le nombre de trimestres acquis se réduisaient, et que les femmes nées dans les années 60 vont acquérir plus de trimestres que les hommes. (Dénégations sur les bancs du groupe SRC.) Ce n'est pas le Gouvernement qui l'affirme, c'est dans le rapport du COR. Cela tient à ce que les femmes ont des carrières moins fractionnées, qu'elles accumulent… (Mêmes mouvements.) Mais cela figure dans le rapport du COR ! Vous devriez vous réjouir de cette tendance, plutôt que de vous offusquer. Les femmes nées dans les années 60, lorsqu'elles prendront leur retraite, auront quinze trimestres de plus que les hommes, en moyenne bien sûr. Il y a donc réduction de l'écart du montant de la pension entre les hommes et les femmes, même s'il reste encore trop important – c'est le miroir de la carrière. Il y a aussi réduction progressive de l'écart dans le nombre de trimestres et les femmes en auront bientôt plus que les hommes : elles seront à peu près à égalité pour les trimestres non majorés ; en intégrant les majorations dont, à juste titre, elles bénéficient, elles auront plus de trimestres.

Il en va de même en ce qui concerne la différence entre hommes et femmes pour l'âge moyen de sortie du marché du travail. L'objectif de notre réforme n'est pas de réduire cet âge, mais de relever l'âge de départ en retraite et de cessation d'activité, pour les femmes comme pour les hommes. C'est pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

M. le ministre prévoit un avenir plus rose pour les femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Les femmes que nous rencontrons, qui n'ont pas eu la chance de faire des études et trouvent des boulots comme caissière de Monoprix, subissent le travail à temps partiel. Je ne comprends donc pas comment, dès lors, le COR peut prétendre qu'elles vont faire valider tous les trimestres travaillés. Quelque chose ne va pas dans ce raisonnement. Il ne correspond pas à la réalité. Nous savons bien, et vous-même, monsieur le ministre, l'avez dit en commission, que beaucoup de femmes subissent le temps partiel : elles ne peuvent donc cotiser pour acquérir des trimestres à taux plein. Il faut veiller à ce que le comité de pilotage ne se contente pas de faire des remarques mais travaille à améliorer la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

En commission, monsieur le ministre, je vous ai interrogé sur la proposition de la délégation aux droits des femmes, à propos de celles qui font des temps partiels imposés inférieurs à un mi-temps et qui, de ce fait, ne valident pas quatre trimestres par an. La délégation a demandé au Gouvernement d'étudier un mécanisme de lissage des heures de travail de manière à acquérir ces quatre trimestres par an. Vous avez refusé. Ne venez donc pas dire maintenant qu'il n'y a pas de problème ! Dans votre projet, il n'y a malheureusement rien, aucun progrès pour les femmes, contrairement à ce que vous dites, et ce qui vous dérange, depuis deux jours que nous débattons, c'est que l'opinion commence à s'en rendre compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Monsieur le ministre, permettez-moi une remarque. Vous dites souvent que les femmes auront plus de trimestres validés que les hommes. Actuellement, elles ont en moyenne vingt trimestres de moins. En revanche, je partage votre analyse sur le fait que, si le nombre de trimestres est important, le plus important, c'est le niveau de la pension. Malheureusement, 82 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes.

À propos de leur situation, je voudrais faire valoir également un autre élément : l'an dernier, il y a eu 250 000 mariages et 150 000 PACS. Dans ce dernier cas, les femmes n'auront pas de pension de réversion.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Enfin, les femmes qui ont deux enfants ou plus ont une pension de retraite inférieure de 25 % à la pension de celles qui n'ont pas d'enfant.

Donc, je ne vois pas pourquoi le comité de pilotage ne ferait pas une analyse à la fois sur les différences de retraite entre hommes et femmes et sur l'âge de départ. Les deux sujets ne s'excluent pas, ils se complètent.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Les femmes ont actuellement une pension inférieure à celle des hommes, c'est une réalité incontestable. Mais ce qu'il faut avoir en vue, c'est un certain nombre de propositions que nous faisons, comme de renforcer le nombre de trimestres par la prise en compte des périodes liées à la maternité, et aussi ce que sera la réalité de l'emploi des femmes à l'avenir. On ne peut pas demander aux régimes de retraite de compenser les inégalités liées au travail. Ce n'est pas possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Au moment du passage à la retraite, l'équité existe. C'est avant qu'il y a une inégalité (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) C'est dans le cadre de la vie de travail qu'il faut examiner les dispositifs qui permettront de réguler et même d'annuler – nous venons de voter à ce sujet – ces inégalités. Là est l'important. Toute une série de dispositions dans le texte vont dans ce sens. C'est dans ce domaine que nous devons mener le combat, pas pour rattraper ensuite les inégalités existantes. Compter uniquement sur le régime de retraite pour compenser les inégalités, c'est en quelque sorte entériner leur existence. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le raisonnement est quand même spécieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Pour ma part, je veux supprimer les inégalités dans la vie professionnelle. À ce propos, le Gouvernement a fait une avancée importante en proposant hier soir en commission un amendement qui ramène de 20 % à 10 % le taux d'invalidité qui permet de bénéficier des dispositions relatives à la pénibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

De la sorte, les personnes souffrant de troubles musculosquelettiques pourront partir à la retraite plus tôt. Cela bénéficiera aux caissières, et pour moi, cela compte. C'est vraiment sur les conditions de l'activité professionnelle qu'il faut se battre ; la retraite vient après.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Clergeau

On ne peut adhérer aux propos qui viennent d'être tenus. Comment prétendre que la seule façon d'améliorer la situation des femmes est, comme on le fait dans ce texte, d'inclure les seize semaines de congé de maternité dans les quarante années de cotisation ? Ce n'est pas acceptable. À terme – dans cinquante, soixante ans –, on parviendra peut-être à plus d'équité. Mais aujourd'hui, ce n'est pas le cas. Il faut donc bien prendre des mesures pour atténuer l'inégalité existante, et c'est ce que nous proposerons ensuite.

Reconnaissez, monsieur le ministre, que les femmes et les jeunes sont les oubliés, les délaissés de cette réforme. Vous n'en avez vraiment rien à faire, et c'est un problème de fond. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Madame la députée, je ne peux pas vous laisser dire cela.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Non, ce n'est pas la vérité ! Les femmes ont deux ans de majoration d'assurance pour chaque enfant ; les congés parentaux sont pris en charge au titre de la solidarité dans le cadre de la part variable forfaitaire.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Ce sont les femmes en grande majorité qui prennent le congé parental. Nombre d'entre elles bénéficient ainsi de deux, quatre, dix, quinze années non travaillées mais correspondant à des trimestres acquis.

On vient de dire également qu'il n'y aurait rien dans ce texte. Je rappelle donc deux choses essentielles. D'abord, on prend en compte les indemnités journalières de maternité dans le salaire ouvrant des droits. Ensuite, s'agissant de ce point central qu'est l'égalité de salaire entre hommes et femmes, il est prévu une sanction d'un montant de 1 % de la masse salariale pour les employeurs n'ayant pas signé d'accord à ce sujet.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

C'est capital. Ne dites donc pas que les femmes sont les grandes absentes de la réforme, ni les jeunes. Il y a d'abord la retraite de l'ensemble des Français, en fonction de leur carrière, qu'ils soient hommes ou femmes. Jusqu'à présent, les femmes étaient désavantagées pour ce qui est du nombre de trimestres acquis. L'équilibre est en train de se rétablir et c'est tant mieux. Il en va de même pour ce qui est des écarts de montant de la pension.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Mme Rosso-Debord n'a pas dû s'apercevoir que sa collègue, la rapporteure de l'observatoire de la parité, se tenait la tête entre les mains pendant son intervention, tellement elle était atterrée par ses propos.

Pour ma part, je voudrais citer un document que, députés de la majorité et de l'opposition membres de la délégation aux droits des femmes, nous avons écrit ensemble et que nous avons tous approuvé. Mais il me semble, monsieur le ministre, que vous n'avez pas accepté de venir devant la délégation – peut-être allez-vous me démentir.

Dans le rapport de la délégation sur ce projet, page 11, dans la partie intitulée « Le rapprochement des durées d'assurance est insuffisant à réduire les écarts de pension », on lit : « En conséquence, les écarts de durée d'assurance entre les hommes et les femmes se resserrent effectivement, au fil des générations : la durée d'assurance validée par les femmes s'accroît, tout en restant toutefois inférieure à celle des hommes : entre 40 et 50 ans l'écart de durée moyenne d'assurance passerait de 23 à 14 trimestres. » Il subsistera donc un retard de 14 trimestres pour les femmes. Je ne sais pas où vous-même, ou le COR, êtes allés chercher des chiffres qui disent le contraire, alors que ceux-ci sont corroborés par de très nombreuses études.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Il y a une autre lacune dans ce projet, monsieur le ministre : nous ne disposons d'aucune étude d'impact sur l'évolution comparative pour les hommes et les femmes. Il y a d'ailleurs très peu d'études de ce genre. Je vous en conseille une, très complète, mais qui, malheureusement, s'arrête en 2006. Elle s'intitule Les effets de la réforme de la retraite sur les inégalités de genre en France. On y indique : « Les deux réformes précédentes, celles de 2003 et de 1993, freineraient la réduction de l'écart des retraites de 20 % [...] Le principal dispositif de la retraite de 1993 » – qui est toujours en vigueur – « touche davantage les femmes, en particulier l'allongement de dix à vingt-cinq ans des années prises en compte. Cet allongement conduit à inclure plus souvent de moins bonnes années pour les femmes, qui ont des carrières courtes, hachées… » Et on l'oublie souvent, bon nombre sont au SMIC pendant toute la durée de leur carrière, sans perspective de promotion. Ces deux réformes ne comprennent pas de dispositions spécifiques selon les sexes. Les différences de trajectoire professionnelle des hommes et des femmes conduisent à un impact différencié sur le montant des pensions.

Le manque d'études d'impact est criant. Nous ne savons pas réellement ce que cette réforme aura comme conséquences sur l'écart entre les sexes. Mais les deux précédentes l'ont aggravé. Et on ne voit pas où sont les correctifs.

(L'amendement n° 225 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n°307 .

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Cet amendement propose de compléter l'alinéa 12 de l'article 1er en fixant une date butoir pour l'annulation des écarts de pension entre les hommes et les femmes.

À nos yeux, les déclarations de principe ne suffisent pas. Vous êtes prompts à fixer un calendrier et une date limite, 2018, en ce qui concerne l'objectif d'équilibre financier. Mais pour ce qui est des objectifs concrets ayant un impact direct sur la vie des gens, les conditions d'existence des Français et, singulièrement, la vie des femmes – je pense au taux d'emploi ou aux discriminations salariales –, curieusement, il n'y a plus ni calendrier ni date butoir.

Cela est d'autant plus contestable qu'en revalorisant mécaniquement les cotisations sociales, l'égalité salariale entre les hommes et les femmes constitue l'un des innombrables leviers grâce auxquels un retour à l'équilibre des régimes de retraite est possible.

Cette réforme, unanimement considérée comme catastrophique pour les femmes, au point qu'elle court le risque d'être considérée comme discriminatoire et qu'elle fait l'objet d'une saisine de la HALDE, que nous soutenons, ne prend même pas la peine de fixer une date pour un objectif aussi fondamental que celui de l'annulation des écarts de pensions entre les hommes et les femmes.

Il est absolument impératif de remédier à une situation inadmissible dont on parle depuis des années mais qui ne fait l'objet d'aucune disposition concrète. Pour stimuler vos ardeurs au-delà des paroles, nous vous proposons donc de retenir la date butoir de 2018 pour atteindre l'objectif proposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Nous sommes favorables à cet amendement.

Toutefois, il faut avant tout comprendre, Valérie Rosso-Debord en a parlé, que les inégalités constatées au moment de la retraite ont leurs origines dans l'existence d'inégalités durant la vie professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Pour cette raison, nous avons adopté à l'unanimité, en commission, l'article 31 relatif à l'égalité professionnelle des hommes et des femmes, même si certains souhaitaient que nous fixions des sanctions plus importantes à l'égard des entreprises qui ne joueraient pas le jeu. Dans ce texte, nous nous attaquons donc enfin aux racines du problème.

Alors, nous pouvons compléter l'alinéa 12 en inscrivant dans le projet de loi une date butoir qui servira de borne, mais l'essentiel, pour réduire les inégalités de pensions que nous dénonçons tous, est bien de traiter le problème des inégalités professionnelles, ce que nous faisons à l'article 31.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Il est louable de proposer de parvenir à l'objectif en 2018, même si ce sera difficile. Vous savez très bien que la situation des retraités reflète les carrières passées. Les retraitées de 2018 cotisent déjà depuis longtemps avec des niveaux de salaires donnés.

Cela dit, pourquoi pas ? On peut très bien choisir un objectif ambitieux comme vous le faites. Le Gouvernement ne s'y oppose pas et il émet un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Sirugue

Le combat mené par tous les députés, femmes et hommes, mérite que soient posés des repères, des bornes. En effet, sur ce genre de sujet, on peut d'autant plus facilement s'en tenir aux bonnes intentions que ces dernières sont partagées par le plus grand nombre. La réalité, comme le soulignait Catherine Coutelle et comme tout le monde s'accorde à le reconnaître, c'est bien qu'il existe une situation totalement inégale entre les hommes et les femmes en matière de retraites. La réalité, c'est que les réformes de M. Balladur et de M. Fillon ont accru ces inégalités. Alors, certes, vous proposez quelques mesures dans le projet de loi que nous examinons, mais elles ne permettent pas de corriger ces inégalités dans un délai raisonnable.

Il faudra donc que nous fixions un rendez-vous pour parvenir à atteindre nos objectifs ; de ce point de vue, cet amendement est positif. Cela dit, il faut aussi, monsieur le ministre, que les mesures fortes que vous annoncez en ce qui concerne les entreprises soient bien réelles. Vous devez nous montrer que vous avez sérieusement la volonté d'agir, et il faut que nous puissions traiter le véritable problème : celui de la nature de l'emploi des femmes et de la différence de traitement qui est faite entre hommes et femmes à niveau de qualification identique. Or, sur ces sujets, nous ne trouvons rien dans le projet de loi.

J'estime donc que tous les éléments qui permettent de « mettre la pression » sur le sujet méritent d'être soutenus. Nous voterons cet amendement.

(L'amendement n° 307 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.

Je suis saisi d'un amendement n° 308 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Il est défendu.

(L'amendement n° 308 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n° 336 rectifié est défendu.

(L'amendement n° 336 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n°139 est défendu.

(L'amendement n° 139 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

La commission est favorable à cet amendement : il apporte une précision utile.

(L'amendement n° 283 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

L'amendement qui vient est important ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Croyez-vous qu'il soit judicieux d'aborder à cette heure l'amendement du Gouvernement sur les polypensionnés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Peut-être vaudrait-il mieux aller déjeuner…

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Eh oui ! Le débat risque d'être long : il y a beaucoup à dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Suite de la discussion du projet de loi portant réforme des retraites.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma