La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Monsieur Roy, vous n'êtes pas encore ministre de l'éducation nationale.
Monsieur Chatel, vous avez la parole.
Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, « la lutte contre l'absentéisme scolaire est une priorité absolue ». C'est par ces mots que, le 5 mai dernier, dans son discours sur les violences à l'école et l'absentéisme scolaire, le Président de la République a affirmé la détermination du Gouvernement à mener un combat sans répit contre un fléau en progression constante depuis dix ans. Ce fléau ruine, dès l'adolescence, des milliers de vie en devenir, il sape les bases mêmes de la construction et de l'accomplissement de l'individu, et il détruit les liens du vivre-ensemble.
Madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, vous avez rappelé que 7 % des élèves étaient concernés. Dans les lycées professionnels, l'absentéisme peut toucher jusqu'à 15 % des jeunes scolarisés. Mais au-delà des chiffres, il reste que chaque cas d'absentéisme est spécifique, et nécessite une réponse adaptée.
Cependant, malgré la diversité des situations, on retrouve toujours les mêmes acteurs : l'institution scolaire, les collectivités locales, l'élève et, bien sûr, sa famille. Nous avons donc décidé d'apporter une réponse globale et plurielle à ce problème.
Mesdames, messieurs les députés, l'absentéisme scolaire n'est pas une fatalité sociale. Les parents ont une responsabilité considérable dans l'assiduité de leurs enfants. Aucune école ne peut fonctionner sans l'attention constante et la participation des parents. La famille est donc au centre des dispositifs que nous mettons en place – je salue la présence de Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Aider et responsabiliser les familles, tel est le moteur commun de toutes les actions du Gouvernement pour lutter contre l'absentéisme scolaire. Je vous rappelle que ces actions sont nombreuses.
Nous avons ainsi cherché à renouer le dialogue avec les familles.
Nous avons donc demandé à tous les personnels de l'éducation nationale de se mobiliser dans ce sens. Les premiers concernés sont les chefs d'établissement et les conseillers principaux d'éducation, qui suivent au plus près, heure par heure, les absences des élèves.
Depuis le 1er février 2009, 5 000 postes de médiateurs de réussite scolaire ont été créés dans les établissements les plus sensibles. Leur mission première est de faciliter le dialogue avec les parents les plus éloignés de l'école, et d'établir une compréhension mutuelle entre l'école et les familles.
Le repérage des absences fréquentes qui débouchent sur le décrochage scolaire est capital. Optimiser le retour des informations, gagner en efficacité permet d'engager plus rapidement le dialogue avec les familles. Cela facilite aussi la mise en oeuvre d'une remédiation. C'est pourquoi nous avons mis en place un nouveau logiciel informatique dénommé SDO, ou suivi de l'orientation. Ce logiciel est d'ores et déjà opérationnel ; il équipera tous les établissements à compter de 2011.
Il permettra de faire progrès considérables dans le repérage précoce des élèves susceptibles de décrocher en facilitant le travail de suivi de ces derniers. Grâce à lui, nous gagnerons souvent plusieurs mois dans l'accompagnement des décrocheurs. Autant de temps qui permettra de construire un projet de remédiation adapté avec l'élève, sa famille et les représentants de l'école.
Un autre dispositif a montré son efficacité : la « mallette des parents ». Actuellement expérimentée dans l'académie de Créteil, elle vise à mieux impliquer les familles, parfois très éloignées du monde de l'école, dans la scolarité de leur enfant. Elle doit permettre d'améliorer le dialogue entre les parents d'élèves et l'école, grâce à des rencontres avec le principal, les enseignants et les surveillants, et grâce à des modules de formation.
L'expérience, évaluée par l'École d'économie de Paris, a été jugée très concluante puisqu'une baisse générale de l'absentéisme, et une réduction des exclusions temporaires et des avertissements ont été constatées. Ces résultats ont une explication : les parents ont été impliqués dans le projet éducatif de leur enfant. Cela démontre, s'il le fallait encore, que l'absentéisme ne relève pas de la fatalité sociale et que la responsabilisation des parents a une influence considérable sur l'assiduité des enfants.
Pour amplifier ce succès, j'ai décidé que la « mallette des parents » serait étendue à toutes les académies dès la rentrée prochaine.
Enfin, je tiens à rappeler que notre recherche du dialogue ne s'arrête pas aux portes de l'école. Ma collègue, Nadine Morano, chargée de la famille et de la solidarité, qui s'exprimera dans un instant, a annoncé le 6 mai dernier que son ministère débloquerait 53 millions d'euros, d'ici à 2012, dans le cadre des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents, pour les familles en difficulté face à l'absentéisme de leur enfant. C'est bien la preuve que l'ensemble de notre Gouvernement est mobilisé pour lutter contre le fléau de l'absentéisme scolaire.
Nous avons aussi voulu apporter des réponses pertinentes aux cas des élèves que l'absentéisme a menés sur la voie de la déscolarisation et de la désocialisation. Les jeunes concernés ont déjà bénéficié de toutes les possibilités de prise en charge prévues au sein des collèges, que ce soit l'aide ou le soutien. Pour ces élèves en grande difficulté, nous avons mis en place 443 dispositifs relais lors de l'année scolaire en cours. Pendant une durée qui variait de quelques semaines à plusieurs mois, ces structures ont accueilli plus de 8 000 élèves au sein de classes et d'ateliers à très petits effectifs, qui constituaient le cadre idéal pour un raccrochage aux fondamentaux de la scolarisation.
Nous avons aussi créé le microlycée, structure scolaire expérimentale initiée d'abord dans chacun des départements de l'académie de Créteil. Dès la rentrée prochaine, chaque académie aura un microlycée. Ce dispositif permet de proposer du « sur-mesure », c'est-à-dire un accompagnement personnalisé au plus près des besoins de chaque élève.
Je tiens particulièrement à cette notion de personnalisation. Elle est au coeur des réformes mises en oeuvre depuis 2007 et constitue un outil efficace pour lutter contre la démotivation, qui est souvent le prélude à l'absentéisme.
La réforme de la voie professionnelle, généralisée à la rentrée 2009, a ainsi permis la mise en place de deux heures et demie d'accompagnement personnalisé par semaine pour chaque élève afin d'anticiper les décrochages et de les éviter. Dès la rentrée prochaine, la réforme du lycée général et technologique, effective en classe de seconde, intégrera un accompagnement personnalisé de deux heures pour chaque élève, ce qui permettra de véritablement personnaliser notre système éducatif.
Toutes ces actions visent un objectif : que les élèves puissent s'engager dans un parcours de réussite qui corresponde à leurs goûts, à leurs talents, à leurs projets, et qui leur garantisse, à terme, une insertion professionnelle et sociale. Ainsi remotivés par un but qu'ils se seront choisi, ils s'attacheront à l'enseignement et s'investiront durablement dans leur formation.
Mais, il faut en convenir, parfois, pour certaines familles, le dialogue et l'aide ne suffisent pas. Parfois, il est nécessaire de rappeler qu'à l'obligation éducative qui donne le droit à chaque enfant de bénéficier d'une instruction, correspond un corollaire : l'obligation d'assiduité scolaire, dont les premiers garants sont les parents. Or, c'est un fait : certaines familles refusent d'assumer leur autorité sur leur enfant et laissent libre cours à son absentéisme. À celles-là, il faut rappeler que, si les parents ont assurément des droits, ils ont aussi des devoirs, et que l'un de ces premiers devoirs est l'exercice d'une autorité éclairée et vigilante sur leurs enfants.
Et vous pensez que la suppression des allocations familiales va éclairer les familles ?
Il en va de l'avenir même de leurs enfants.
La proposition faite par M. Ciotti n'est pas nouvelle : le projet de suspendre les allocations familiales en cas d'absentéisme répété et injustifié existe depuis la fin des années cinquante.
Comme vous le savez, cette mesure a été intégrée, depuis 2006, au sein du dispositif appelé « contrat de responsabilité parentale ».
Ce contrat place le président du conseil général au coeur de la démarche, lui conférant ainsi le pouvoir de supprimer tout ou partie des prestations familiales.
Vous avez raison : on a malheureusement bien vite constaté que ce dispositif ne fonctionnait pas en l'état. Trop engageant et trop complexe, il se grippe.
Pour remédier aux failles du système, votre rapporteur Éric Ciotti a proposé une évolution de la législation qui vise à replacer l'école au centre du dispositif par le biais de deux de ses acteurs de proximité, le chef d'établissement et l'inspecteur d'académie.
L'inspecteur d'académie et le chef d'établissement sont au plus près du terrain, et c'est à eux que sont signalés aujourd'hui les cas d'absentéisme. Il est donc totalement légitime que ce soit eux qui pilotent les différentes phases de ce nouveau dispositif que vous souhaitez mettre en oeuvre.
Comprenons-nous bien : avec cette évolution, il ne s'agit en aucun cas de punir pour punir.
Mais on punit toujours les mêmes, et c'est toujours les mêmes qu'on protège !
J'ai entendu certains caricaturer cette proposition de loi. Je souhaite profiter de l'occasion qui nous réunit pour répondre à ces attaques.
Je laisse la responsabilité de leurs propos à ceux qui s'offusquent d'une imaginaire « double peine ». Notre Gouvernement ne conçoit pas, et ne concevra jamais, l'absentéisme scolaire comme une fatalité sociale. Que je sache, être un parent responsable n'a aucun lien avec la condition socioprofessionnelle quelle qu'elle soit.
Monsieur Ciotti, j'ai été très heureux de me rendre à l'école des parents, créée à votre initiative, dans les Alpes-Maritimes.
Vous parvenez à raccrocher des parents de milieux extrêmement divers. Parmi eux certains viennent de milieux dits favorisés, et leurs enfants ont autant de difficultés avec le système scolaire que les autres. Parfois, il y a autant de décrochage dans ces milieux. Contrairement aux caricatures qui se répandent ici où là, sur ce sujet, il n'y a donc pas de discriminations sociales. Le succès même de la « mallette des parents » dans l'académie de Créteil l'atteste, comme la diversité sociale des enfants absentéistes.
D'autres critiquent une logique de la sanction à tous crins. (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Je rappelle qu'Éric Ciotti et les parlementaires de la majorité qui ont signé cette proposition de loi ont veillé à ce que le dispositif respecte le principe du contradictoire et des droits de la défense.
A chaque étape, l'inspecteur d'académie entendra les familles, tiendra compte de l'existence, ou non, d'un « motif légitime ou d'une excuse valable »,…
…les informera des risques encourus et veillera à instaurer un dialogue constructif. J'ajoute qu'aucune mesure de suspension ou de suppression n'interviendra sans que les responsables légaux aient été préalablement invités à présenter leurs observations. Tout a donc été fait pour prendre en compte les situations particulières et pour éviter les ruptures d'égalité de traitement. Je sais, du reste, que les inspecteurs d'académie sauront faire preuve de clairvoyance et de discernement lors de l'examen des motifs d'absence.
Avec ce nouveau dispositif, nous voulons mettre en place un système à la fois équilibré et efficace : efficace parce que le processus sera désormais systématisé…
…et, grâce à la proximité de l'inspecteur d'académie, ramené au plus près des difficultés rencontrées par l'élève et sa famille ; équilibré parce que fondé sur une gradation qui, à chaque étape, laisse la place au dialogue et à la remédiation.
Bien loin de sanctionner à tout va, ce nouveau dispositif vise, dans son esprit, à responsabiliser les parents qui se sont dégagés de leur autorité parentale, à les alerter sur les risques qu'ils font courir à leur enfant, à les ramener à un dialogue constructif avec l'école, pour le plus grand bien et la réussite de leur enfant.
Dans cet esprit, la sanction ne constitue justement que le dernier recours d'un dispositif gradué en trois étapes : l'avertissement, la suspension et, enfin, la suppression.
Cet esprit de responsabilisation, d'un côté, d'accompagnement et de concertation, de l'autre, est présent dès la première étape, c'est-à-dire dès la première série de quatre demi-journées d'absence non justifiées par l'élève. Lors de cette première phase, l'inspecteur d'académie avertit les parents de l'absentéisme de leur enfant et lance la logique d'aide et d'accompagnement des familles, que l'on retrouve tout au long de la procédure. Il rappelle à la famille de l'élève toute la cartographie des aides possibles : contrat de responsabilité parentale, conseil des droits et devoirs des familles, contrat local d'accompagnement à la scolarité, réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents.
La responsabilisation financière des parents n'intervient qu'à la deuxième étape, lorsque l'élève a atteint une deuxième série de quatre demi-journées d'absence non justifiées et que la suspension des allocations familiales afférentes à cet enfant, et à lui seul, est engagée. Mais, là encore, la remédiation est possible. Si les parents interviennent, rappellent à leur enfant l'importance de l'assiduité scolaire et que l'enfant lui-même agit et se montre assidu pendant un mois complet de scolarité, la suspension sera annulée par le versement rétroactif du mois concerné. Nous sommes donc bien loin de la sanction immédiate et aveugle parfois décrite. Bien au contraire, par cette mesure de versement rétroactif qui répond au retour de l'assiduité, nous mettons en exergue l'efficacité de la remédiation, l'importance de la réaction responsable.
En revanche, si, malgré l'avertissement, les aides proposées et la suspension des allocations, l'élève continue à accumuler les absences sans justification, alors la suppression des allocations pour ce troisième mois d'absences est effective.
On atteint là le juste terme de la logique de proportionnalité qui, après avoir épuisé tous les recours, utilise la sanction financière : un mois de suppression de la part des allocations familiales proportionnelles à l'élève, chaque nouveau mois où ce dernier dépasse les quatre demi-journées d'absence sans justification légitime.
Vous le constatez, mesdames, messieurs les députés, ce nouveau dispositif a été construit selon une progressivité des mesures. Il est fondé sur un strict équilibre des droits et des devoirs et est constamment ouvert au dialogue et à la remédiation. Grâce à la systématisation de ses étapes, au rôle moteur de l'inspecteur d'académie, le processus gagne en efficacité. Cette efficacité, nous l'avons conciliée avec un esprit d'humanité et de dialogue.
Face au fléau de l'absentéisme scolaire, il n'existe pas de réponse unique. II nous faut, au contraire, nous adapter, sans tabou ni préjugé, de manière pragmatique, à la diversité des situations. Mesdames, messieurs les députés de la majorité, le nouveau dispositif que vous nous proposez s'inscrit dans une palette de mesures qui, toutes, s'intègrent dans un système équilibré de droits et de devoirs, qui, toutes, ont leur sens et leur efficacité pour ramener les quelque 300 000 élèves absentéistes dans l'école, en accompagnant et en responsabilisant leurs parents. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Mais non, voyons, elle ne peut pas être favorable à un tel dispositif !
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, pourquoi sommes-nous réunis ce soir ? (« On se le demande ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Parce que le Gouvernement et la majorité parlementaire n'acceptent pas que près de 300 000 enfants, soit 7 % des élèves, se retrouvent dans la rue, livrés à eux-mêmes, désoeuvrés et privés de destin,…
…car ils rencontreront, par la suite, des difficultés pour suivre une formation professionnelle et s'intégrer dans la vie.
Le Gouvernement et la majorité se sentent coresponsables du destin de ces enfants. C'est pourquoi nous avons décidé de lutter de manière implacable contre l'absentéisme scolaire.
La proposition de loi qui nous est présentée par Éric Ciotti place au coeur du débat un dispositif qui rappelle que, si notre politique familiale est généreuse, elle repose sur un équilibre des droits et des devoirs. On n'a pas seulement le droit de percevoir des prestations familiales ; on a également le devoir de s'occuper de ses enfants et de prendre la mesure des difficultés qu'ils peuvent rencontrer lorsqu'ils sont livrés à eux-mêmes, désoeuvrés, dans la rue, sans avenir.
Le ministre de l'éducation nationale a détaillé devant vous l'ensemble des mesures qu'il a prises dans son domaine de compétence. Pour ma part, je suis très attachée à ce que la politique menée par le Gouvernement responsabilise les parents et soit équilibrée. À cet égard, le dispositif prévu par la proposition de loi d'Éric Ciotti, cosignée par bon nombre de députés,…
…ressemble un peu à une arme dissuasive : on ne devrait pas avoir à s'en servir. Il s'agit en effet d'un dispositif équilibré. Mis en oeuvre par étapes, il prévoit un accompagnement, une concertation et une écoute des familles, mais il place également les parents face à leurs responsabilités lorsque ceux-ci préfèrent persister dans leur défaillance.
En tant que secrétaire d'État à la famille, je me réjouis que le contrat de responsabilité parentale – qui est pleinement utilisé par le président du conseil général des Alpes-Maritimes, mais dont trop peu de conseils généraux se sont saisis –….
…soit renforcé par le texte, lequel prévoit que, désormais, les parents pourront également saisir le président du conseil général.
Une politique équilibrée nécessite l'utilisation d'outils destinés à l'accompagnement des familles. J'ai ainsi négocié une convention d'objectifs et de gestion…
Surtout, on frappe toujours les mêmes. On leur tape dessus ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
On tape sur les parents lorsqu'on laisse leurs enfants dans un désoeuvrement total, sans leur donner de solution. Non seulement c'est démagogique, mais on ne permet pas aux enfants de revenir dans le droit chemin.
Le Gouvernement, disais-je, a signé une convention d'objectifs et de gestion qui lie l'État et la CNAF pour la période 2009-2012. Cette convention prévoit d'augmenter de 15 % d'ici à 2012 les crédits de la branche famille dédiés à la parentalité. L'accompagnement des familles les plus en difficulté suppose en effet que l'on renforce l'aide à la parentalité. Concrètement, la CNAF y consacrera 53 millions d'euros par an, soit une augmentation de 80 % par rapport à 2008.
Nous avons une politique équilibrée, car nous considérons que le soutien à la parentalité est indispensable pour accompagner les familles les plus fragilisées. Chaque jour, nous sommes à leurs côtés, pour les aider.
L'aide à la parentalité, c'est la médiation familiale – près de 300 services ont été financés l'an dernier sur l'ensemble du territoire –, les Réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents – les REAAP –, qui font un travail formidable et qui ont pris beaucoup d'ampleur dans notre pays. Ainsi, en 2008, la délégation interministérielle à la famille a exploité une enquête menée sur 74 départements, qui a permis d'identifier près de 11 000 actions différentes concernant près de 800 000 parents.
L'aide à la parentalité, ce sont également les Points info famille – qui simplifient les démarches quotidiennes des familles –, l'accompagnement scolaire, assuré par le réseau associatif, auquel je rends hommage – qui prend actuellement en charge 165 000 enfants et jeunes – ou les maisons des adolescents, qui rassemblent les dispositifs sanitaires, sociaux, éducatifs et juridiques dont les jeunes peuvent avoir besoin : à ce jour, 76 projets de maisons ont été financés.
Enfin, le conseil des droits et des devoirs des familles…
Si, monsieur le député. Je vous invite à aller à Dugny vous en rendre compte par vous-même.
Ce dispositif a été créé dans le cadre de la loi sur la prévention de la délinquance. Actuellement, on dénombre 36 conseils des droits et des devoirs des familles, et je vous suggère d'en créer à Tomblaine, monsieur Féron.
Le maire est au coeur de ce dispositif. Qui, en effet, est mieux placé que le maire et son équipe municipale pour repérer les familles les plus en difficulté ? Celles-ci sont alors accompagnées par l'ensemble des services de l'État – éducation nationale, justice –, les bailleurs sociaux et les services de formation professionnelle. Cet outil pertinent, qui a fait ses preuves, peut permettre de venir à bout de l'absentéisme scolaire.
Dans ce cas, pourquoi prévoyez-vous de supprimer les allocations familiales ?
Quand on veut sortir les enfants de la difficulté, monsieur le député, il faut mener une politique équilibrée. (« Précisément ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Il faut responsabiliser les parents, mais aussi les accompagner, en leur offrant un soutien à la parentalité, qu'en tant que maire et parlementaire, vous pouvez mettre en oeuvre. Je vous invite à aller constater par vous-mêmes les résultats obtenus dans les communes où cela fonctionne ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Dans le cadre des états généraux de l'enfance, que j'ai clôturés cet après-midi, nous avons décidé de mettre en place une plateforme d'appel unique, qui permettra d'orienter les parents désemparés face à l'absentéisme ou aux problèmes de drogue de leurs enfants, par exemple. Nous allons également développer le parrainage dans le cadre de la protection de l'enfance.
Ces actions de soutien à la parentalité seront pilotées par la direction générale de la cohésion sociale, dans le but de mieux coordonner nos efforts.
Ainsi, toute une série de mesures vont nous permettre de mieux accompagner les familles et les enfants.
Mesdames et messieurs les députés, nous avons la responsabilité de préparer les générations futures. Cet enjeu crucial constitue un devoir pour nous tous. Nous avons la responsabilité de réussir ensemble en ne lésinant pas sur les outils à mettre en oeuvre. Pour sa part, le Gouvernement s'est engagé dans une politique équilibrée de soutien à la parentalité et de mise en place de dispositifs nécessitant la responsabilisation des parents. C'est à ce prix que nous réussirons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Yves Durand.
L'ambiance de ce début de séance témoigne de la volonté de la majorité de débattre sereinement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous inaugurons ce soir une nouvelle forme de pratique institutionnelle, puisque nous devons débattre d'une proposition d'origine présidentielle. C'est en effet le 20 avril, quelques jours après des élections régionales qui n'ont pas été un succès pour la majorité, que le Président de la République a demandé à M. Ciotti de rédiger une proposition de loi contre l'absentéisme scolaire.
Je suis tenté de vous féliciter, monsieur le rapporteur, pour la force de conviction que vous mettez…
…à proposer un texte qui ne répond en aucun cas au réel problème de l'absentéisme scolaire, en ressortant de vieilles ficelles qui ont montré à la fois leur insuffisance et leur inefficacité.
J'avoue d'ailleurs que je n'ai pas retrouvé la même conviction et la même fougue dans vos propos, madame la présidente de la commission.
Sans doute parce que le Président ne m'a rien demandé ! (Rires et exclamations.)
Votre rapport, monsieur Ciotti, constitue la démonstration que la solution que vous préconisez n'est pas la bonne, tant le décalage est grand entre la réalité du problème et les solutions préconisées.
Quelle est la réalité de l'absentéisme scolaire ? J'ai lu votre rapport avec beaucoup d'attention : l'absentéisme représente 7 % des effectifs tous établissements confondus, ce chiffre recouvrant d'ailleurs une grande diversité.
C'est vrai !
Ainsi, nous notons 6 % d'absentéisme dans les lycées d'enseignement général, 3 % dans les collèges et 15 % dans les lycées d'enseignement professionnel. Mais le plus important est sans doute que plus du tiers des élèves absentéistes est concentré sur 10 % des lycées professionnels.
Votre rapport met aussi en évidence les facteurs d'absentéisme, en un diagnostic que nous partageons. Il s'agit des conditions de vie de l'élève, matérielles ou affectives, et d'une orientation jamais choisie, toujours subie.
Au fond, l'absentéisme scolaire est le prolongement quasi naturel de l'échec scolaire, qui est lui-même le produit très inégalement réparti d'une misère matérielle et sociale. Échec scolaire et absentéisme touchent d'abord les enfants des catégories déjà défavorisées : ce que les parents eux-mêmes ont connu, les enfants en sont victimes à leur tour, dans une inégalité que souligne le rapport de la Cour des comptes sur le système éducatif.
Deux points essentiels ressortent de ce rapport : le creusement des inégalités et la corrélation quasi automatique entre le niveau social et la réussite scolaire. Votre rapport, après bien d'autres, montre le poids de ce qui est vécu comme une véritable fatalité sociale, presque héréditaire, de l'échec scolaire et de son corollaire, l'absentéisme.
Face à ce diagnostic que nous pourrions partager, monsieur le rapporteur, on aurait pu attendre une réponse d'ordre scolaire à ce qui constitue le problème majeur de l'école aujourd'hui. C'est tout le contraire que vous proposez, en infligeant à des familles déjà exclues de la société cette double peine qu'est la suspension du droit aux allocations familiales. (« Et les devoirs ? » sur les bancs du groupe UMP.)
Votre proposition repose sur deux réponses d'un apparent bon sens, mais d'une totale incongruité. La première réponse, c'est votre contrat de responsabilité parentale. Sur ce point, on peut s'étonner de vous voir reprendre une idée qui a fait preuve de son inefficacité tant en France qu'à l'étranger, notamment en Angleterre. Comme vous le dites vous-même, ça n'a pas marché !
Mais vous ne vous demandez même pas pourquoi : vous prétendez simplement que l'échec de ce système est dû à la posture idéologique des présidents des conseils généraux. Quarante de ces présidents étant membres de votre majorité, il faut croire qu'ils sont particulièrement perméables à l'idéologie de la gauche – ce qui m'inquiéterait si j'étais à votre place. En fait, cet argument n'a aucun sens : si le contrat de responsabilité parental a échoué, c'est tout simplement parce qu'il est inepte et humainement inapplicable.
Je vais vous donner quelques exemples tirés de mon expérience de maire d'une commune de la banlieue lilloise.
Cette femme de ménage qui élève seule son fils de quinze ans et qui part à cinq heures du matin pour un travail qu'elle effectue aussi le soir quand les bureaux sont fermés, peut-elle être considérée comme responsable de l'absentéisme de son fils ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
On voit bien que vous ne connaissez pas ces milieux-là ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
C'est peut-être minable, comme vous dites, mais c'est la réalité que je connais en tant que maire ! (Mêmes mouvements.)
Cette femme qui trime pour survivre et pour l'aider, vous l'asphyxiez en lui coupant les allocations familiales, sauf si elle a la « chance » de n'avoir qu'un enfant, puisque dans ce cas elle ne touche pas d'allocations familiales, comme c'est le cas pour 1,2 million de familles, ce qui renforce encore l'inégalité et l'inefficacité de votre système. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Le responsable, c'est le père de l'enfant, celui qui les a abandonnés ! Tout le monde doit prendre sa part de responsabilité !
C'est la réalité qui serait démagogique, mon cher collègue, mais vous la connaissez fort peu.
Mon deuxième exemple est celui d'un adolescent, bon élève et aîné de quatre enfants, dont l'un décroche. Ce jeune est-il responsable de l'absentéisme de son frère ?
Pourtant la famille – donc lui-même – va subir une perte de revenus qui lui interdira peut-être la poursuite d'études auxquelles il aspire légitimement.
Il n'y a jamais de responsable, avec vous ! Il faut tout laisser faire !
Vous répondez, monsieur le rapporteur, que seule la part de l'élève décrocheur, calculée au prorata, est suspendue.
Mais qui croira que la perte de cette seule part n'est pas dramatique pour une famille modeste qui ne perçoit que le SMIC ou les minima sociaux ?
Par cette mesure, vous créez une « responsabilité familiale collective » contraire au principe même du droit social.
Le jeune décrocheur lui-même, orienté, après un ou deux redoublements, dans une filière professionnelle qu'il n'a pas choisie, dont on lui dit quotidiennement qu'elle ne débouche que sur le chômage ou les petits boulots, est-il responsable d'une démotivation qui le pousse à l'absentéisme ? Il y a bien d'autres moyens, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, de lui redonner le désir d'école, que celui consistant à punir ses parents d'un échec qu'ils vivent souvent comme leur propre échec. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je vais vous le dire. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Vous êtes-vous demandé pourquoi on ne rencontre jamais les parents des décrocheurs lors des réunions entre parents et professeurs ? Car c'est un fait, on ne les rencontre jamais, à moins d'aller, comme le font la plupart des enseignants, qui se donnent corps et âme à leur métier…
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. N'en faites pas trop !
Les enseignants apprécieront vos remarques comme il se doit (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), eux qui se rendent dans les familles pour aller chercher les élèves et les convaincre de retourner à l'école ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. N'importe quoi !
Ce n'est certainement pas en supprimant les allocations familiales que vous arriverez à quoi que ce soit.
Vous liez la suppression des allocations familiales à votre contrat de responsabilité parentale. Mais comment faire croire aux familles qu'il peut exister un véritable contrat – ce mot a tout de même un sens ! – alors que vous les menacez de la suppression d'un droit ?
Votre réponse est mauvaise parce qu'elle se place sur le terrain de la régression sociale, là ou le problème est avant tout scolaire. (« Les devoirs ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Je vais le faire, en vous citant le bulletin d'avril 2010 de l'Inspection académique du Nord, consacré justement au décrochage scolaire : « Le décrochage génère des dégâts humains et sociaux considérables. Il interroge l'institution scolaire dans ses missions essentielles (…) L'Éducation nationale, quant à elle, ne peut pas dissocier le traitement du décrochage scolaire de la réussite éducative, dont l'acte pédagogique reste la pièce maîtresse. »
Or, c'est cette institution scolaire que votre politique détruit systématiquement.
Les principes mis en avant par l'Académie de Lille, qui a passé un contrat de partenariat avec la région Nord-Pas-de-Calais pour lutter contre le décrochage et l'absentéisme, sont simples.
Il s'agit d'abord du dépistage précoce des difficultés de langage, notamment à l'école maternelle. Or, à qui allez-vous faire croire que vous n'êtes pas en train de détruire volontairement l'école maternelle. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Cela figure noir sur blanc dans les instructions que M. le ministre a adressées aux recteurs ! Lisez-les ! Vous remettez systématiquement en cause la scolarité précoce et supprimez les postes de psychologues, d'assistances sociales et d'orthophonistes, considérés comme des variables d'ajustement.
Les pays où il y en a le plus n'obtiennent pas de meilleurs résultats !
Est-ce ainsi que vous défendez l'institution scolaire ?
La deuxième préconisation du bulletin de l'Académie de Lille consiste en un suivi individuel des élèves. Quand vous évoquez la « personnalisation », monsieur le ministre, nous sommes d'accord, mais quelle est la réalité de votre politique en matière d'individualisation des parcours ? Vos consignes sont de surcharger les classes, à commencer par celles de l'enseignement primaire, alors que le rapport de la Cour des comptes a montré que c'est dans ces classes que tout se joue et que c'est là, au contraire, qu'il faudrait concentrer les moyens. Tout cela pour éponger la suppression de 16 000 postes dès la rentrée prochaine.
Vous supprimez les RASED alors que l'on sait que c'est ce qui permet le sauvetage de ceux qui vont décrocher.
Quant à l'éducation prioritaire, ce n'est plus qu'un slogan, alors qu'elle devrait être une grande priorité, comme le suggère là encore le rapport de la Cour des comptes.
En ce qui concerne l'aide personnalisée, vous savez très bien, monsieur le ministre, que cela ne marche pas pour ceux qui décrochent. Alors qu'ils ont déjà eu six heures de classe dans la journée, comment allez-vous faire pour qu'ils tiennent encore deux heures supplémentaires ? Je vous vois hocher la tête, mais allez donc voir comment cela se passe dans une classe !
Je ne sais pas sur quel terrain vous allez, monsieur Fourgous !
Troisième préconisation : il faut des enseignants bénéficiant d'une solide formation pédagogique, notamment dans l'enseignement élémentaire. Or, à la rentrée prochaine, de jeunes enseignants, tout droit sortis de l'université, seront plongés dans les classes les plus difficiles, sans aucun stage préalable, sans même savoir ce que sont une classe et un élève. Vous avez sacrifié la formation, notamment des jeunes maîtres de l'enseignement élémentaire.
C'est scandaleux ! C'est de l'irresponsabilité ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La tonalité que vous donnez au débat montre la réalité de l'objectif que vous poursuivez avec cette proposition de loi.
Monsieur le ministre, votre attitude me rappelle cruellement les états généraux sur la violence scolaire, par ailleurs passionnants, que vous avez clôturés par un discours en totale contradiction avec ses prescriptions.
Votre deuxième réponse à l'absentéisme est tout aussi inefficace, elle est même dangereuse puisqu'il s'agit de suspendre et de supprimer les allocations familiales.
Cela va plonger les familles déjà en difficulté dans une détresse plus profonde encore. C'est sans doute ce qui justifie le manque de fougue de Mme la présidente de la commission tout à l'heure.
Contrairement à ce que vous prétendez, cela va creuser davantage encore le fossé entre ces familles et l'école,...
..alors qu'il faut, au contraire, les amener à renouer les liens avec les enseignants et l'institution scolaire en général.
L'école, ce n'est pas un endroit comme un autre. Outre le lieu de transmission des savoirs, c'est aussi celui de l'apprentissage du vivre ensemble, de la démocratie vivante au quotidien, et ce dès le plus jeune âge.
C'est l'espace qui doit rassurer l'élève parce qu'il prend conscience que c'est là que les enseignants, les parents, mais aussi les associations qui, au passage, sont en grande difficulté compte tenu de l'asphyxie que vous provoquez, se retrouvent. L'école, c'est le lieu privilégié où l'élève prend conscience que toute une société se mobilise pour lui. C'est cette véritable coéducation permanente qui fera de lui, non seulement un adulte formé, un citoyen responsable, mais aussi un parent conscient de ses responsabilités.
Vous dites dans votre rapport que, souvent, les décrocheurs ont eu eux-mêmes des parents en échec scolaire. Voilà ce qu'il faut combattre et non punir !
Les réponses à l'absentéisme scolaire sont multiples, et vous l'avez dit. Pour notre part, nous essayons de faire des propositions. ( « Ah ! sur les bancs du groupe UMP.)
Elles doivent considérer l'élève dans la totalité de sa vie, dans la complexité de son histoire, pour le remettre au centre du système éducatif, comme le disait la très bonne loi de 1989 dont l'auteur était Lionel Jospin. ( « Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
D'ailleurs, elle est reprise mot pour mot dans le rapport de la Cour des comptes que vous n'avez certainement pas lu.
Monsieur Durand, poursuivez votre intervention sur le fond. Je m'occupe du reste !
Madame la présidente, les députés UMP passent leur temps à interrompre l'orateur. Ça commence à bien faire !
L'objectif n'est pas tant de ramener les jeunes à l'école en punissant les parents que vous jugez défaillants, mais de tout faire pour qu'ils ne quittent pas cette école.
Monsieur le ministre, je me souviens de cette phrase – peut-être d'ailleurs étiez-vous là au moment où elle a été prononcée – d'un des participants aux états généraux contre la violence scolaire : tout faire pour que les jeunes considèrent l'école comme leur maison. On est loin de la suspension des allocations familiales.
Croyez-vous que c'est en rendant responsables leurs parents que vous allez donner à ces élèves le goût, l'envie de voir dans l'école, le collège, le lycée, leur maison ? Pourtant, les pistes pour lutter contre l'absentéisme scolaire existent. Il s'agit de créer des conditions de vie qui soient acceptables, agréables à l'intérieur des établissements scolaires, avec de véritables équipes éducatives stables, qui aient le temps de travailler. Donnez aux enseignants la liberté et le temps, donnez-leur la formation nécessaire pour ce faire.
Il faut permettre aux associations de mettre en place des projets éducatifs locaux au niveau des communes et des bassins de vie. Nous sommes de nombreux maires à en avoir organisé avec l'école, autour de l'école, en complémentarité avec l'école, en partenariat et je dirai même en connivence avec les familles.
Mais pour qu'il y ait une véritable connivence, encore faut-il qu'il n'y ait pas menace.
Entre 1997 et 2002, il avait été mis en place une politique qui avait donné des résultats. Or tout cela a été systématiquement supprimé depuis.
18 % : voilà ce qu'a obtenu le PS au premier tour de l'élection présidentielle !
On peut vous rappeler le score de Le Pen aux dernières élections régionales !
Vous voulez qu'on vous explique les résultats de Le Pen ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, pour avoir enseigné pendant trente-cinq ans dans les lycées de la banlieue lilloise, j'ai appris à ne pas prendre la parole quand les élèves étaient chahuteurs !
Le contexte était différent : vous n'étiez pas dans l'hémicycle ! Voilà pourquoi je vous demande de poursuivre.
Il faut développer les associations d'éducation populaire qui sont l'un des socles de ces contrats éducatifs locaux, mais qui sont aujourd'hui exsangues car on leur a coupé l'ensemble des subventions.
Enfin, il faut donner du temps aux enseignants et peut-être un peu plus de reconnaissance plutôt que de faire des discours ringards...
..qui pointent systématiquement du doigt les fonctionnaires au motif qu'ils ne servent à rien et que les professeurs ne pensent qu'à leurs vacances.
Soyez un peu reconnaissants à l'égard des enseignants ! C'est peut-être de cette manière que l'on redonnera à ces derniers le goût de l'école.
Comme d'habitude, vous allez accueillir ces réflexions, soit par le chahut, soit avec condescendance,...
..considérant que ce n'est pas le sujet.
Monsieur le rapporteur, s'il est question aujourd'hui d'absentéisme scolaire, ce n'est pas votre sujet. L'objectif de votre proposition de loi n'est pas en effet de lutter efficacement contre l'échec scolaire : il s'agit de donner des gages à l'électorat le plus conservateur (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)...
..et de détourner l'attention des parents légitimement inquiets pour l'avenir de leurs enfants.
Quand le Président de la République vous a donné cet ordre, puisque c'en était un – du reste, quelle revalorisation pour le Parlement ! – le sujet essentiel, c'était plutôt l'échec de votre majorité aux élections régionales et la remontée du Front national.
J'ai lu, comme vous, le dernier rapport de la Cour des comptes sur notre système éducatif. Une conclusion en ressort : le creusement des inégalités sociales par l'école, alors que sa mission est, au contraire, de compenser autant que faire se peut ces inégalités.
Est-ce la faute des enseignants ? Certainement pas. Est-ce la responsabilité des parents dont beaucoup subissent douloureusement l'échec de leur enfant ? Certainement pas.
Nous ne voterons pas cette loi, cette nouvelle gesticulation.
Nous, nous voulons nous attaquer au véritable mal qui ronge la société et l'école...
..celui qui fait que les inégalités s'accroissent. Cela demande certainement un peu plus de courage que quelques coups de menton. Cela demande le courage de s'attaquer à une institution qui aujourd'hui génère des inégalités malgré le travail acharné de ses enseignants.
Je conclurai par une remarque. Monsieur le ministre, la meilleure manière de lutter contre l'absentéisme scolaire ne serait-ce pas de nommer des remplaçants en nombre suffisant, alors que la majorité des heures perdues par les élèves n'est pas due à l'absentéisme des élèves mais au non-remplacement des professeurs du fait de votre politique ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous sommes bien d'accord, monsieur Durand, sur le fait que vous venez de défendre une motion de rejet préalable ? (Murmures sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le ministre.
Monsieur Durand, vos propos ont oscillé entre la provocation (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC) et une lecture sélective de la politique du Gouvernement, du rapport de la Cour des comptes et du programme du parti socialiste.
J'emploie le mot de caricature, monsieur Durand, parce que je ne peux pas vous laisser dire que le Gouvernement a sacrifié la formation des enseignants.
Au moment où nous engageons une réforme en profondeur qui consiste, comme dans tous les grands pays développés, à augmenter d'une année le temps consacré à la formation des enseignants et à les faire bénéficier d'un niveau de rémunération plus élevé de 10 % par rapport à ce qu'il était auparavant,…
…vous ne pouvez pas caricaturer ainsi l'action du Gouvernement.
Je ne peux pas non plus vous laisser dire que nous sacrifions le système éducatif en supprimant les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté.
C'est une contrevérité, monsieur le député ; nous ne supprimons pas tous les RASED.
Contrevérité, également, de soutenir que nous n'accueillerons plus aucun enfant de moins de trois ans à l'école. Assez de caricatures ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez une vision sélective des réformes, monsieur Durand, puisque, si vous vous déclarez favorable à la personnalisation, vous oubliez de préciser que toute la politique du Gouvernement est fondée sur ce système de personnalisation – qu'il s'agisse de la réforme du primaire, de la réforme de l'enseignement professionnel, de la réforme du lycée à la prochaine rentrée.
Contrairement à ce que vous prétendez, il ne s'agit pas d'heures supplémentaires, d'accompagnement ou d'aide personnalisée, puisque ces heures sont intégrées dans le temps scolaire. Le fait qu'une partie du temps scolaire soit précisément consacrée à cette différenciation, sans que l'emploi du temps des élèves s'en trouve alourdi, n'est-il pas une avancée importante ?
Votre lecture est sélective quand vous évoquez le compte rendu des états généraux sur la sécurité à l'école. J'ai cru comprendre que vous y aviez été plutôt assidu.
Reste que certains propos vous ont échappé. Vous recommandez notamment des équipes stables dans les établissements scolaires.
Eh bien, vous oubliez que, dans mon allocution finale, j'avais proposé pour la rentrée prochaine une expérimentation dans une centaine de collèges et de lycées. Nous allons mettre en place un système grâce auquel les établissements scolaires jouiront d'une plus forte autonomie, les chefs d'établissement bénéficiant d'une certaine marge de manoeuvre pour recruter, sur profil, des professeurs motivés, mieux formés, préparés à la réalité à laquelle ils seront confrontés dans ces établissements. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Il s'agit donc d'obtenir, j'y insiste, des équipes plus stables, plus motivées, adaptées à la réalité des établissements.
Vous avez ensuite une lecture sélective des réformes du Gouvernement. Vous vous indignez, monsieur Durand, contre les suppressions de postes et, ai-je cru comprendre, vous louez la politique menée par M. Jospin.
Vous oubliez qu'on compte aujourd'hui 50 000 professeurs de plus dans l'éducation nationale qu'à l'époque où M. Jospin était ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Vous avez encore, monsieur Durand, une vision sélective du rapport de la Cour des comptes : vous oubliez que, selon celui-ci, la réponse aux problèmes que rencontre l'éducation nationale réside dans la personnalisation, la différenciation.
Or réclamer toujours plus de moyens ne peut constituer une politique éducative.
M. Migaud qui, cela n'aura échappé à personne, n'est pas membre de la majorité,…
…M. Migaud, ancien député socialiste, a lui-même précisé que la question des moyens n'était pas une réponse aux problèmes rencontrés par l'éducation nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Migaud tire d'une très juste comparaison internationale la conclusion que, souvent, les pays qui investissent moins que la France dans le système éducatif obtiennent de meilleurs résultats scolaires. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Enfin, monsieur Durand, votre vision du programme de votre propre formation politique est elle aussi sélective. J'ai retrouvé les propos de votre candidate à la dernière élection présidentielle (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), feue Ségolène Royal (Rires sur les bancs du groupe UMP), qui, le 31 mai 2006, avait dévoilé certaines propositions sur le système éducatif.
Premièrement : en cas d'absentéisme, mettre sous tutelle les allocations familiales.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Bravo !
Deuxièmement : mettre en place un système « d'encadrement militaire » pour les élèves difficiles. (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.) Troisièmement : établir un système d'obligation pour les parents d'effectuer des stages au sein des écoles de leurs enfants.
Alors, monsieur le député, de grâce !
Son programme ne se limitait pas à ces trois mesures, votre présentation en est faussée !
L'école a moins besoin de postures,…
…de politique politicienne que de courage, de détermination, de réformes et d'une vision équilibrée entre droits et devoirs. C'est ce que M. Ciotti et les députés de la majorité proposent aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Éric Ciotti, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Je regrette à mon tour que votre argumentation, monsieur Durand, ne permette guère de déceler en quoi votre intervention était une motion de rejet préalable. Vous vous êtes limité à une vision très caricaturale,…
Mais non ! Vous ne connaissez rien à l'école ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Roy, si j'en juge par votre expérience de l'école, il vaut mieux ne pas la partager, c'est certain. (Protestations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Au-delà de votre approche caricaturale, démontrée avec pertinence par M. le ministre, et au-delà de votre diagnostic, qu'on peut partager, je souhaite revenir sur les contrats de responsabilité parentale sur lesquels vous avez porté une appréciation très critique, monsieur Durand.
Laissez-moi vous citer un extrait du magazine du conseil général socialiste du Val-d'Oise, qui est en train de mettre en place les contrats de responsabilité parentale. La directrice des services d'aide à l'enfance s'exprime ainsi : « Une suspension des allocations ne sera envisagée que si elle paraît vraiment utile. On sait simplement que la suspension n'est plus taboue ». Voilà une vision réaliste.
La différence avec votre texte, c'est qu'il prévoit une suspension des allocations immédiate !
Autre contrevérité, contrairement à ce que prétendent ceux qui s'opposent à la mise en place des contrats de responsabilité parentale, le dispositif de suspension des allocations sera placé entre les mains de l'inspecteur d'académie. Si lesdits contrats ont fait la preuve de leur efficacité, comme je l'ai démontré dans mon département, c'est justement parce qu'existait cet outil de la suspension. Dorénavant, il ne leur restera que leur compétence d'accompagnement en matière de protection de l'enfance – et j'ose espérer qu'ils l'utiliseront pleinement. Ainsi notre dispositif est-il équilibré et nos propositions se révèlent d'autant plus efficaces qu'elles sont concrètes, pragmatiques et qu'elles tournent le dos à l'idéologie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il ne le sait même pas ! (Rires.)
Veuillez préciser sur quel article repose votre intervention, monsieur Durand.
Sur l'article 58, alinéa 1, madame la présidente, et mon intervention concerne le déroulement de nos travaux.
Nous pouvons débattre d'une manière vive parce que nous sommes tous, je le pense honnêtement,…
…des hommes et des femmes de conviction et je ne m'offusque pas des attaques que j'ai subies alors que je me trouvais à la tribune.
Notre passion pour l'école explique sans doute notre fougue. Seulement, à aucun moment nous ne devons dépasser la ligne de l'insulte personnelle.
Je vous interromps, monsieur Durand : votre intervention se fonde en fait sur l'article 58, alinéa 4 du règlement et non pas sur l'article 58, alinéa 1. Or, quand un député demande la parole pour un fait personnel, comme vous le faites, elle ne lui est accordée qu'en fin de séance. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Motion de rejet préalable
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures trente-huit, est reprise à vingt-deux heures quarante.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. Richard Dell'Agnola, pour le groupe UMP.
Je regrette la tonalité des propos de notre collègue Yves Durand à la tribune. Ce débat mérite plus de sérieux et mieux que ces accents misérabilistes,…
…mieux que cette caricature d'un autre âge qui exprime surtout un renoncement. C'est fou comme nos collègues socialistes, depuis quelques années, renoncent à voir le monde tel qu'il est, qu'il s'agisse des grands problèmes financiers, des crises mondiales, des questions européennes, des retraites et, aujourd'hui, de l'école.
Ce renoncement est coupable parce qu'en refusant de voir la réalité telle qu'elle est, vous refusez de la traiter.
Je dirai même : dès lors que vous renoncez à la traiter, vous induisez une double peine.
Vous expliquez en effet que les enfants absents sont en état d'échec scolaire. Or s'ils sont en échec scolaire, c'est parce que les parents sont en difficulté. Ne rien faire face à cette situation, si je suis votre logique et à supposer qu'on puisse la suivre, revient à condamner ces enfants à une double peine.
Il y a au contraire urgence à donner à ces enfants une chance, et l'assiduité en est une qui permet ensuite la méritocratie. Quand on observe certains pays en voie de développement, on constate que les enfants n'y ont pas tous cette chance.
Notre pays, lui, donne à ses enfants, par la méritocratie, par l'ascenseur social, la chance de pouvoir suivre des études pour devenir eux-mêmes. Votre renoncement, qui tient à une vision idéologique des choses, revient à refuser d'aider les enfants en difficulté.
Vous devriez soutenir le dispositif proposé par Éric Ciotti et qui s'articule autour des chefs d'établissement, qui se situent au centre du système,…
…de l'inspecteur d'académie, dont le rôle est décisif, enfin des parents qui sont en première ligne. On n'a rien à reprocher à ce triptyque, au contraire.
Vous devriez donc nous aider à mettre en oeuvre cette proposition qui place au centre de l'intérêt de l'enfant ses parents qui ont des droits et des devoirs – ce que vous semblez ignorer, comme toujours –, le chef d'établissement et l'inspecteur d'académie, dont on ne peut pas supposer qu'ils représentent pour vous des ennemis de classe, n'est-ce pas, mes chers collègues ?
Aussi, ne comprenant pas votre démarche, le groupe UMP rejettera cette motion de procédure. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'ai l'habitude d'être bref quand il s'agit de donner des explications de vote sur une motion, mais ce soir, nous venons de vivre un moment d'anthologie, tant sur la forme que sur le fond.
D'abord, il est quand même étonnant que le groupe socialiste fasse référence dans cet hémicycle, et il l'a fait à plusieurs reprises, aux voix du Front national. Cela vaut son pesant d'or. Je trouve que c'est minable. Quand on sait, chers collègues, les positions que vous avez prises, se réjouir aujourd'hui des scores du Front national aux élections régionales, cela montre que vous avez peu d'arguments pour contrer cette proposition de loi. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Mais sur le fond, il y a plus grave. Madame la présidente, je voudrais pouvoir m'exprimer librement.
Soixante-dix triangulaires en 97 ! Vous avez été élus grâce au Front national ! Hypocrites !
Un grand moment, disais-je, monsieur Durand. « Vous voulez rendre les parents responsables », dites-vous. Mais, monsieur Durand, ils sont responsables ! Dans notre société, l'éducation appartient à la famille : au père et à la mère, ou au père ou à la mère. Il y a des sociétés, dont vous êtes peut-être plus proches, où ce n'est pas le cas. Il y a des provinces, en Chine, où c'est l'État qui est responsable de l'éducation.
C'est l'UMP qui est proche de la Chine, ou du moins du Parti communiste chinois !
Ce n'est pas le cas de notre démocratie. Il est normal que nous demandions à ceux qui sont responsables de l'éducation de leurs enfants, de l'assumer. Ce n'est pas à l'école de le faire. On demande beaucoup trop à l'école.
Vous dites : « Nous sommes reconnaissants aux enseignants ». C'est nous qui le sommes. Parce que ce n'est pas à eux de gérer l'absentéisme scolaire. On doit les aider à avoir les élèves en classe, à avoir des familles qui suivent l'éducation de leurs enfants. Par conséquent, nous allons dans le sens des enseignants. C'est du respect que nous avons pour eux.
Ces deux arguments sont donc surprenants de votre part, monsieur Durand. C'est que vous êtes gêné par cette proposition de loi, que nous soutiendrons. Et nous rejetterons votre motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le rapporteur alléguait qu'en 2000-2001, pas moins de 6 400 allocations familiales avaient été supprimées. Il ne nous en d'ailleurs pas indiqué le motif. Et si ce motif ne devait être que l'absentéisme, alors convenons que la suppression des allocations familiales n'est pas la bonne solution.
Le Royaume-Uni avait, sous l'autorité de la Dame de fer, Mme Thatcher, mis en place une solution de ce type. Avec quel résultat ? Une augmentation de l'absentéisme de 40 %. C'est pourquoi cette disposition avait été supprimée, sans que cette suppression ait changé quoi que ce soit à l'absentéisme scolaire.
Les statistiques masquent une réalité : l'absentéisme a différentes causes, et notamment l'orientation des jeunes, comme Yves Durand a eu raison de le souligner. Mais il y a aussi une sociologie territoriale. Car l'absentéisme est territorialisé, dans notre pays.
En tout état de cause, supprimer les allocations familiales est une sanction qui s'écarte de la réalité vécue par ces familles. Souvent, nous avons des femmes seules – trop nombreuses –, paumées, obligées de travailler le dimanche. Une sanction financière aura comme résultat de déstabiliser plus encore leur situation.
Madame la secrétaire d'État, vous dites qu'il faut « accompagner les parents ». Mais alors, pourquoi supprimez-vous l'action sociale collective dans les centres sociaux ?
Suppression des postes d'animateurs, suppression des postes de conseillers d'éducation sociale et familiale. C'est cela, votre politique.
Dans un département que je connais bien, notamment pour y avoir géré des centres sociaux, il y avait une école des parents, qui a été supprimée pour des raisons financières.
Par ailleurs, il est possible de rappeler certains propos sur les allocations familiales. Tenez, par exemple, Christine Boutin : « La politique familiale soutient toutes les familles, parce qu'au nom de la solidarité nationale, l'État reconnaît l'enfant comme un investissement sur l'avenir, mais prend aussi acte que la naissance d'un enfant constitue un appauvrissement immédiat pour la famille ».
On peut encore citer Bernard Accoyer : « Avoir des enfants, c'est un choix courageux pour notre pays. Mais les familles sont généralement endettées. Elles ont un projet, et elles ont un besoin, selon les mots du président de la CNAF devant la commission des affaires sociales, de stabilité. »
Chacun comprend que lorsqu'il s'agit de défendre les allocations familiales pour les familles aisées, la droite est debout. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Et lorsqu'il s'agit d'attaquer les allocations familiales des familles les plus en difficulté, elle les supprime ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Il y a un proverbe africain qui dit : « Pour éduquer un enfant, il faut tout un village ». Que propose le village ? Le village, c'est l'école. Le village, c'est l'environnement de l'école. Le village, c'est le réseau autour des parents.
Notre collègue Durand, homme de terrain, a su montrer la réalité de ce que sont nos quartiers, nos écoles.
Pourquoi ? Parce que j'ai cité un proverbe africain ? C'est pour cela que je devrais avoir honte ? Cela fait partie de la culture.
L'exemple de l'Afrique, ce n'est pas mal, au niveau éducation. C'est un bon exemple.
Notre collègue Durand nous a montré la réalité du terrain et l'efficacité des réseaux, ainsi que les moyens qu'il faut y consacrer. Ceux qui ont à les suivre – les maires sont de ceux-là, et j'en suis un – vont régulièrement voir les familles. Ils leur proposent ce que vous appelez le « contrat ». Surtout, ils leur proposent une main tendue pour les accompagner afin de sortir leur enfant de la situation où il se trouve, et afin de les sortir de la situation où elles se trouvent.
Souvent, elles ont baissé les bras en raison de la violence. Et parce que l'espoir n'est pas au rendez-vous. Rappelez-vous, l'école de la République, que nous proposait-elle ? Le mot a été prononcé tout à l'heure : l'ascenseur social. Allez voir ce qu'il en est de l'ascenseur social dans les hypermarchés : les bac +2 ou bac + 3 aux caisses. Allez voir la réalité !
Et allez voir aussi l'ascenseur social qu'emprunte celui qui est sorti de la rue et qui, parce qu'il est doué pour le football, gagne 240 fois le salaire d'un député. C'est aussi cela, le village. Il lui arrive de montrer cette réalité-là.
Aujourd'hui, la question qui est posée, c'est celle de la motivation pour aller à l'école. Que propose-t-on à ces enfants, quel espoir leur donne-t-on, quel est l'ascenseur social qui les motive pour aller à l'école ?
La réponse, ce n'est donc pas de supprimer les allocations familiales. C'est que le village s'organise, et qu'il ait les moyens de le faire. La motion de rejet préalable nous a montré comment l'école de la République – car c'est bien d'elle et de ses valeurs que nous parlons – a su, au fil des siècles, avec ses instituteurs mais aussi avec les organisations d'éducation populaire, accompagner et entourer un enfant de l'école à la ville.
C'est cette réponse-là qu'il faut donner. Ce sont ces moyens-là qu'il faut donner. Ce n'est pas du tout la réponse que vous proposez.
Pour toutes ces raisons, notre groupe votera la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille.
Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, monsieur le ministre, mes chers collègues, lutter contre l'absentéisme scolaire est une noble cause. Nous la partageons tous !
…le texte qu'il nous est aujourd'hui donné d'examiner n'y parviendra malheureusement pas.
Car, à un problème dont les causes sont multiples, vous opposez une solution unique : la répression !
Vous désignez des coupables : les « mauvais parents », qu'il faut sanctionner en les privant des allocations familiales dont ils profiteraient indûment !
Mais en vous refusant à toute analyse des causes du problème, vous vous condamnez déjà à échouer.
Pour sa part, la gauche, depuis l'instauration de l'instruction obligatoire par Jules Ferry, a toujours lutté pour faire respecter l'obligation scolaire : l'obligation d'inscription, l'obligation d'assiduité.
Le gouvernement du Front populaire, en la portant à quatorze ans, l'a assortie d'aides financières pour inciter de nombreux ouvriers et paysans à envoyer leurs enfants à l'école. Mais il a aussi créé la possibilité de l'amende pour dissuader ceux qui étaient tentés de les retenir pour les travaux des champs ou pour garder leurs frères et soeurs.
Mais aujourd'hui, je ne connais pas de familles qui ne souhaitent pas l'assiduité et la réussite scolaires pour leurs enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Il y a dans notre société un immense consensus, j'en suis persuadé – malgré le spectacle que nous donnons ce soir –, sur cette question au coeur du contrat républicain.
Le point qui fait clivage, c'est précisément celui que vous avez choisi de réactiver : utiliser la suppression des allocations familiales comme sanction.
Tout cela pour quoi? Pour regagner des voix auprès des électeurs sensibles à des discours sécuritaires, voire extrémistes ?
La lutte contre l'absentéisme passe d'abord par une politique de l'éducation efficace.
Chercher à le faire oublier et détourner le débat sur les allocations familiales, ce n'est pas seulement faire preuve de démagogie, c'est esquisser une politique de relégation à l'égard de personnes qui souffrent déjà bien souvent de relégation sociale.
Voilà comment gâcher l'occasion du grand débat que nous devrions mener en commun sur l'échec scolaire, l'absentéisme, le décrochage. C'est un vrai débat sur l'éducation nationale qui est nécessaire.
Sommes-nous aujourd'hui vraiment sûrs que le système scolaire offre les mêmes chances à tous les enfants, qu'il soit encore une machine à intégrer ? N'induit-il pas lui-même cet absentéisme qui aboutit, en fin de parcours, aux décrochages que nous déplorons tous?
Il est clair que cette proposition de loi est d'abord une mesure d'affichage et de diversion voulue par le Gouvernement. Le calendrier de son examen ne relève bien évidemment pas du hasard. Il s'inscrit dans la continuité d'un discours parfaitement rodé et emblématique de l'exécutif sur les questions de sécurité, consistant à pointer du doigt les jeunes absentéistes comme des pré-délinquants.
Absentéiste égale délinquant. Bien sûr ce n'est pas dit aussi clairement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Et pour cause, ce n'est étayé par aucune étude sérieuse. Mais pourquoi remettre sur le devant de la scène cette idée récurrente de suppression des allocations familiales dès qu'il est question de lutte contre la délinquance ?
Une lutte qui, à vos yeux, est indissociable d'un discours anxiogène sur les jeunes, discours qui est d'ailleurs de plus en plus mal supporté par les professionnels de santé, qui, dans le cadre d'un collectif des États généreux de l'enfant, sont venus vous rendre visite aujourd'hui, madame la secrétaire d'État.
Ces jeunes sont de plus en plus vus comme des délinquants potentiels, dont l'absentéisme serait le premier passage à l'acte, alors qu'il est malheureusement, cela a été dit, la conséquence de l'échec scolaire.
Pour illustrer mon propos, il suffit de revenir sur quelques faits et dires récents du Président de la République, qui reprend, comme il sait si bien le faire, le champ lexical de la peur et de la stigmatisation des jeunes.
Le 24 mars, trois jours après la défaite électorale, il assure qu'il n'y aura « plus aucune concession » à l'égard des perturbateurs.
À Bobigny, le 20 avril, il annonce que les allocations familiales pourraient être suspendues en cas d'absentéisme scolaire.
Enfin, le 25 mai dernier, lors d'une visite dans un collège de Beauvais, il assimile violences scolaires et absentéisme.
Ces déclarations successives ont au moins le mérite de nous éclairer sur la vision de Nicolas Sarkozy. Pour lui, l'absentéisme est nécessairement une propédeutique de la délinquance et de la violence. Cet amalgame réducteur et stigmatisant est une manière d'évacuer la question des causes de l'absentéisme en l'expliquant par sa finalité criminogène supposée. Et il oblige, nous oblige, à ne voir le problème que sous un seul angle : celui de l'insécurité.
On peut s'interroger sur la pertinence de cette stratégie de communication, mais force est de constater qu'elle est utilisée à chaque fois qu'il s'agit de faire remonter la cote de popularité du Président de la République.
Au-delà de ces effets d'annonces, dont le premier objectif est de faire la une des journaux télévisés, cette position véhicule des idées dangereuses, car elle oppose les Français et fragilise la cohésion sociale et nationale.
Tout d'abord, elle incite à penser qu'il y aurait, d'un côté, de bons parents, et de l'autre, de mauvais parents, irresponsables, qui profiteraient indûment de l'État providence. Il y aurait des familles méritantes, qu'il faudrait récompenser, et d'autres qui ne sont pas à la hauteur de leurs devoirs éducatifs : cette conception évoque une logique contraire – et c'est là le problème – à la philosophie des allocations familiales, lesquelles, rappelons-le, sont versées pour l'enfant, pour les charges qu'il représente, et sont donc dues, comme telles, à toutes les familles.
Ensuite, ce texte vise, dans l'inconscient collectif, à stigmatiser une certaine partie de la population, soupçonnée de vivre d'allocations. J'en veux pour preuve que votre texte précise dès l'article 4 que la perte des allocations ne doit pas être prise en compte dans le calcul des minima sociaux. Cela révèle bien que vous pensez d'emblée qu'elle touchera prioritairement les bénéficiaires de ces minima !
Le premier objectif de ce texte, et c'est cela qui est dérangeant, n'est pas tant d'avoir des effets sur l'absentéisme que de donner le sentiment d'agir contre l'insécurité à coup de phrases chocs et à grand renfort de communication.
Une communication qui présente cette loi comme volontariste et novatrice. Là encore, erreur ! Cette mesure de suppression des allocations familiales en cas d'absentéisme répété date de 1966. Cette possibilité avait été supprimée par décret en 2004, à la suite des conclusions rendues sur le sujet dans un rapport commandé par Luc Ferry, alors ministre de l'éducation, au motif que la suspension des allocations était « injuste et inefficace » et jugée non conforme aux principes généraux du droit et aux conventions internationales – excusez du peu !
Surviennent alors les émeutes de 2005. Le ministre de l'intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy – quelle coïncidence ! –, se saisit de l'événement pour remettre la suspension au goût du jour. C'est ainsi que la loi de cohésion sociale du 31 mars 2006 crée le contrat de responsabilité parentale et réinstaure comme sanction ultime la possibilité pour le président du conseil général de suspendre les allocations familiales. Problème : la loi n'est pas appliquée. Depuis la rentrée 2006-2007, aucun cas de suspension des allocations n'a été relevé dans le cadre d'un contrat de responsabilité parentale. Les conseils généraux se saisissent peu du dispositif de contractualisation, qui peut être jugé intéressant, mais dont le refus entraînerait la suppression des allocations. Peu de présidents souhaitent s'engager dans cette voie qui leur pose problème.
Comme tel était bel et bien l'objectif du Gouvernement, il en tire la conclusion inverse et considère qu'il faut durcir la loi. L'idée ressurgit aussi lors du débat sur la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, plus communément appelée LOPPSI 2. Lors de son examen en première lecture, en février dernier, il fut question d'un éventuel amendement proposant de donner la possibilité, non plus au président du conseil général mais au préfet, de supprimer ces prestations familiales.
Cette éventualité n'ayant pas eu de suite, quelques semaines plus tard, le Président de la République – encore lui – demande publiquement au secrétaire national de l'UMP, non pas à l'éducation mais à la sécurité,…
…de déposer une proposition de loi sur le sujet. C'est la proposition de notre collègue Ciotti que nous examinons aujourd'hui.
Paradoxalement, M. Ciotti est l'un des seuls présidents de conseil général à avoir signé des contrats d'accompagnement.
Quelle interprétation faut-il avoir, sinon que se trouvant lui-même inefficace, il veut accélérer la sanction en se privant de cette possibilité et en confiant la demande de suppression des allocations directement à l'inspecteur d'académie ?
M. Ciotti ne se satisfait donc pas d'un dispositif de contractualisation avec les parents, qui n'a pas eu le temps d'être évalué, et souhaite passer immédiatement à une pratique de responsabilisation, non plus par le dialogue, que nous pourrions soutenir, mais par la sanction.
Pourtant ce type de mesure n'a jamais fait ses preuves partout où elle a été tentée.
En Grande-Bretagne, les parents peuvent payer de lourdes amendes, voire être emprisonnés. Depuis 2000, une loi permet aux autorités judiciaires de punir de trois mois de prison les parents d'élèves trop souvent absents. Résultat : les études récentes montrent qu'aucune diminution de l'absentéisme n'a été observée. C'est même l'inverse qui s'est produit : ce phénomène a enregistré une hausse de plus de 40 %.
Les politiques de responsabilisation des familles ne marchent pas, car l'intervention de l'État est trop tardive, et les pays qui se sont engagés dans cette voie y renoncent progressivement au profit d'une prévention précoce.
Cette loi répressive, en plus d'être inefficace, risque d'être injuste et va accentuer les inégalités. Sous couvert de responsabiliser davantage les familles, elle va stigmatiser les plus fragiles.
Pour les familles, c'est la double peine. Déjà perdantes du système, cette proposition de loi leur inflige une sanction lourde de conséquences. Alors qu'il appartient à la puissance publique de résorber les inégalités, le Gouvernement préfère sanctionner et enfoncer un peu plus des familles qui se battent au quotidien pour subvenir aux besoins de leurs enfants. Souvent contraints à des horaires atypiques, au travail du dimanche, parfois sans emploi ou isolés, ces parents sont bien souvent désemparés. Pour une famille de trois enfants, déduire 158,78 euros d'allocations d'un faible salaire de mère seule est tout simplement dévastateur.
Par ailleurs, transformer les parents en coupables n'améliorera en rien leur situation et n'aura aucun effet sur l'absentéisme de leurs enfants. Si l'absentéisme n'est pas l'apanage des enfants de familles en difficulté, il est surreprésenté dans les familles dont les parents ne sont pas familiers des institutions scolaires, qu'ils ont peu ou pas fréquentées et avec lesquelles ils entretiennent un rapport de délégation, parfois de crainte ou de défiance. N'ayons pas peur de le dire, certains parents sont eux-mêmes exclus du fonctionnement de l'école. On en fait des coupables idéaux alors qu'ils sont victimes. Victimes de ne pas être ce que l'on attend d'eux, de ce que l'école attend d'eux. Déjà fortement éloignés du système scolaire dont ils ne maîtrisent pas les codes, dont ils se méfient parfois, ce texte ne fera que les marginaliser davantage alors qu'il faudrait, au contraire, les aider à s'impliquer dans le projet éducatif, pour reprendre les termes du ministre.
Votre proposition de loi reste muette sur ces réalités, sur ces galères quotidiennes des familles qui ne rentrent pas dans le moule académique.
Pour les enfants, on ne cherche pas à comprendre les raisons de leur absentéisme. De manière encore plus remarquable, le texte ne s'y attarde pas une seconde, préférant assimiler systématiquement l'absentéisme à une première étape vers la délinquance. N'est-ce pas un peu réducteur et sommaire ?
L'école est un lieu de socialisation. Lorsqu'un enfant va bien, il a soif de socialisation. Et s'il ne va pas à l'école, c'est avant tout lui-même qu'il punit.
L'absentéisme traduit souvent un mal-être de l'enfant lié – et de façon surprenante, on en parle peu alors que cela ressort souvent des études – à la séparation de ses parents, mais aussi à un défaut d'orientation, comme le prouve le taux d'absentéisme dans l'enseignement professionnel. Mais ce n'est pas que cela.
Avez-vous déjà pensé qu'un enfant qui ne va pas à l'école ne le fait pas toujours par choix ? Les causes de l'école buissonnière ne sont pas toutes identiques. Prenez l'exemple d'un enfant qui est victime de racket et de violence au collège mais qui n'ose en parler ni à ses parents ni à l'équipe enseignante par peur de représailles. Cet enfant, pour qui sécher les cours sera le seul moyen d'échapper à ses agresseurs, sera rangé dans la case des absentéistes, au même titre que ceux que vous soupçonnez d'être prédélinquants. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Regardons avec honnêteté le parcours de certains jeunes élèves de collège qui deviendront probablement absentéistes. Ceux que les enseignants font sortir de la classe pour pouvoir continuer à assurer leur cours, faute de suivre l'enseignement car incapables de se couler dans un collectif dont ils se sentent déjà exclus, traînent leur démotivation entre le bureau du CPE, la salle de documentation et la salle de permanence.
Ces élèves, j'ai découvert récemment lors d'une réunion sur la mise en oeuvre des plates-formes de lutte contre le décrochage, que le monde enseignant les désigne sous le terrible vocable d'« encombrants », s'inquiétant de devoir les récupérer dans cette lutte contre le décrochage.
Ces élèves sont déjà devenus des « absentéistes de la connaissance », même s'ils fréquentent encore les locaux – pour combien de temps d'ailleurs ? En grandissant, ils finissent par quitter ces lieux sans issue pour eux. On ne se réveille pas absentéiste un beau matin, on le devient au terme d'un processus long, lorsqu'on n'accepte plus de venir passivement à des cours qu'on a depuis longtemps cessé de suivre ou de comprendre.
L'absentéisme débute au collège et explose au lycée, notamment dans les lycées professionnels où il atteint plus de 30 % dans certains établissements. Les causes en sont bien connues : concentration des élèves en difficulté au collège, orientation par l'échec et non en fonction des aptitudes et des envies des élèves. Les « décrocheurs » se recrutent parmi les publics en échec scolaire et en orientation subie, qui anticipent finalement le faible retour de leur investissement scolaire sur le marché du travail. C'est donc plutôt à la réforme de l'enseignement professionnel qu'il faut s'attaquer.
Ces familles confrontées à une réelle détresse sociale, que nous venons d'évoquer et dont le nombre ne cesse de croître, pensez-vous que c'est en leur supprimant les allocations familiales que vous allez les aider à affirmer leur autorité parentale ? Croyez-vous qu'une mère de famille monoparentale qui rencontre des difficultés pour envoyer son grand adolescent à l'école va se trouver renforcée dans son autorité si elle invoque le risque de perdre une partie des allocations familiales ?
Cela ne donne-t-il pas plutôt à son fils matière à moquer et à affaiblir encore un peu plus son autorité ?
Monsieur le ministre, et vous tous, disciples du Président, pensez probablement, comme lui, que chercher à comprendre, c'est déjà excuser. Je vous réponds que lorsque l'on ne sait pas ce qu'on traite, on maltraite !
À juste titre, Jean-Louis Deroussen, président du conseil d'administration de la CNAF, aime à rappeler que « les caisses sont là pour aider les parents, les allocations ne sont pas des récompenses». Elles ont un caractère universel et sont attribuées sans condition de ressources et de façon automatique à partir du deuxième enfant, représentant près de 124 euros. D'ailleurs, madame la ministre, je me permets à cet instant de vous dire, puisque vous en avez gelé le montant, qu'elles mériteraient d'être augmentées.
D'après des propos récents de M. Woerth, ministre du travail, ces prestations ont joué un rôle non négligeable d'amortisseur de la crise. Je me permets aussi de rappeler que le candidat Nicolas Sarkozy nous avait même promis qu'elles seraient versées dès le premier enfant.
« Je souhaite, disait-il, qu'une allocation familiale soit versée dès le premier enfant parce que le premier enfant représente une charge très lourde pour les jeunes couples qui sont au début de leur carrière professionnelle, qui souvent enchaînent les petits boulots et sont confrontés à la précarité. »
Alors, monsieur le rapporteur, pourquoi une telle obstination à remettre en cause un si bel acquis qui a su garantir à notre pays un fort taux d'activité féminin et le maintien de la fécondité ? D'où vient cette volonté farouche de maltraiter notre modèle familial français fondé sur des allocations universelles, qui ont fait leurs preuves au cours de l'histoire ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pourquoi vouloir à tout prix en exclure une frange de la population, celle peut-être qui en a le plus besoin pour éduquer ses enfants ?
Il faut leur donner plus d'allocations pour qu'ils quittent plus l'école ?
Les opposants à tout dispositif de suppression des allocations familiales sont nombreux, certains même sont issus de votre famille politique. De l'ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, qui affirmait « Je pense qu'il faut aider les familles plutôt que les sanctionner », à Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la République, qui préfère la notion de contrat passé avec les familles plutôt que la sanction telle la suppression des allocations, en passant par Dominique Versini, bientôt ancienne défenseure des enfants (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC), qui s'y disait « défavorable car c'est prendre le problème à l'envers. Plutôt que d'aggraver la situation des parents en leur coupant les allocations, mieux vaudrait les accompagner », tous s'accordent à reconnaître qu'une telle mesure serait inutile, contraire à notre modèle social et stigmatisante.
Le caractère universel des allocations familiales est l'un des piliers de notre contrat social, et les supprimer est un acte qui va bien au-delà de la simple sanction financière.
En un sens, retirer ces droits sociaux familiaux universels, c'est une manière symbolique de condamner les parents à une forme d'indignité parentale, voire nationale. Retirer un droit universel, n'est pas seulement une sanction, c'est aussi un geste, un message d'exclusion.
Vous n'avez pas besoin d'une telle mesure stigmatisante puisqu'il existe déjà, et vous le savez, un arsenal de sanctions à destination des parents qui n'assument pas leurs responsabilités, un enchevêtrement de possibilités dans lesquelles il n'est d'ailleurs pas facile de se retrouver : les stages de parentalité décidés par le maire, le retrait des allocations par le juge des enfants pour en donner la gestion à un tuteur extérieur à la famille, les poursuites engagées par le Procureur de la République pouvant entraîner une condamnation pénale et le contrat de responsabilité parentale, dont nous avons parlé et qui permet la suppression des allocations.
Notre droit permet déjà d'utiliser le pénal, l'emprisonnement et l'amende à l'encontre des parents qui ne rempliraient pas leurs obligations parentales. Votre proposition est donc superfétatoire, mais aussi en grande partie inapplicable.
Inapplicable en premier lieu, car elle ne peut pas concerner les familles, au nombre de 1,2 million, qui n'ont qu'un enfant puisqu'elles ne perçoivent pas d'allocations familiales – je renvoie à la promesse de Nicolas Sarkozy. Cela pose plus sérieusement un problème de droit et d'égalité devant la loi.
Inapplicable aussi parce que, dans les autres cas de figure, il n'est pas facile d'individualiser la part d'allocations due à chaque enfant. Dans le cas d'une famille de deux enfants, vous pénalisez, d'après les chiffres que vous avez donnés, le deuxième enfant, puisque vous supprimez l'intégralité du montant de l'allocation.
Injuste car la sanction n'a pas la même valeur pour une famille très aisée que pour une famille pour laquelle l'allocation est essentielle à son budget. Injuste aussi parce le montant des allocations étant progressif par enfant, selon le nombre d'enfant, on comprend que le système retenu pénalise plus durement les familles nombreuses.
Mais ce qui me frappe le plus dans cette démarche c'est son caractère déplacé. Car si votre véritable souci, monsieur le ministre, était la recherche d'une meilleure assiduité scolaire, vous n'auriez pas commencé par supprimer des milliers de postes dans l'éducation, …
…abandonner progressivement la politique de ZEP.
Reconnaissez, madame Greff, que nous avons pu lire dans la presse les propos de l'inspecteur d'académie selon lesquels il n'y avait plus de crédits pour les ZEP.
Vous devriez plutôt avoir à coeur, monsieur le ministre, de soutenir fortement les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement de parents et de ne pas faire tout financer sur les fonds de la CAF. Vous devriez avoir à coeur de faire en sorte que les médiateurs scolaires – nous pourrions en parler car c'est une bonne idée – ne soient pas sur des emplois précaires et à temps partiel et de développer les écoles de parents.
Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour vous demander de faire respecter l'obligation d'inscription – c'est l'autre partie de l'obligation scolaire – de tous les enfants, et notamment des 6 000 à 7 000 enfants de Roms migrants vivant sur le sol Français et qui ne sont pas scolarisés dans notre pays.
Je le répète, si votre véritable souci était la recherche d'une meilleure assiduité scolaire, vous mèneriez un réel travail sur les causes de l'absentéisme, sans vous réfugier dans ce discours facile et porteur, mais qui n'explique rien, sur la démission des parents. Un discours dangereux même, qui ne peut en définitive qu'affaiblir l'autorité parentale si celle-ci était défaillante.
Venons-en à nos propositions. Il faut davantage impliquer les familles et les aider.
Plutôt qu'une politique de responsabilisation contrainte sous la menace – ce qui est un peu contradictoire pour rétablir l'autorité –, nous pensons qu'il faut une prévention précoce avec un investissement fort dès les jeunes années d'éducation et une forte réactivité dans la démarche envers les parents dès que les premiers signes d'absentéisme se manifestent.
Si vous le permettez, je prendrai l'exemple d'un CFA de la restauration que je préside, où nous avions un taux de rupture supérieur à 40 % des contrats. Pourtant, les apprentis perçoivent une rémunération. Nous avons obtenu une baisse de la moitié de ces échecs en instaurant un système d'alerte immédiat, le jour même à destination des parents, conjugué à quelques vacations d'une psychologue spécialisée sur les adolescents. Cela demande évidemment du personnel, si l'on applique ce système à grande échelle.
Plutôt qu'une politique de sanction des familles, nous préférons développer les politiques d'implication des parents, de soutien à la fonction parentale et de médiation scolaire. C'est d'ailleurs, reconnaissons-le, l'idée défendue par Martin Hirsch avec la mallette des parents. L'évaluation a prouvé que ce dispositif, plutôt léger puisqu'il s'agit de trois réunions annuelles entre les parents et le corps enseignant, et éventuellement de formations, est relativement efficace. Je me félicite d'ailleurs de son extension, dès la rentrée prochaine. Mais je crois qu'il demande des moyens supérieurs, pour accroître le pourcentage de réussite. Il faut lui laisser le temps de faire preuve de son efficacité avant d'engager les mesures répressives que vous proposez.
Je l'ai dit, l'absentéisme débute au collège et explose au lycée. Mais c'est à l'école primaire que se créent des écarts irréversibles. Nous savons qu'à la sortie 25 % des élèves ont des acquis fragiles et 15 % connaissent des difficultés sévères. Il est donc temps de réagir et d'investir dès le plus jeune âge, et même dès la maternelle, madame la secrétaire d'État, alors que nous avons le sentiment, pour ne pas dire plus, que vous êtes en train de la fragiliser, pour faciliter des offres de garde confiées au privé.
Il est temps d'apporter une attention soutenue aux élèves en difficulté, de diviser par deux les effectifs des classes dans les quartiers où cela s'avère nécessaire.
Arrêtons de supprimer les postes de professionnels de l'éducation qui ont à coeur de soutenir nos enfants et donnons-leur du temps pour aller voir les familles.
Pour les collèges, le président Picq de la Cour des comptes nous indiquait ce matin en commission l'urgence qu'il y a à mobiliser les moyens pédagogiques et humains pour ceux qui sont le plus en difficultés.
Enfin l'enseignement professionnel nécessite d'être rapidement réformé. Perçu aujourd'hui comme la voie de garage, il faut en faire un véritable lieu de développement des habiletés, des talents et des compétences plutôt qu'une préparation à des filières dont on ne peut garantir les débouchés.
Il faut également réformer les logiques de sélection et de relégation par l'échec pour répondre au mal-être et à la désespérance des élèves face à leur orientation.
Aujourd'hui, l'éducation nationale fonctionne assez bien pour beaucoup, mais peine à remplir son cahier des charges pour certains. Elle doit être en mesure de développer des pédagogies différenciées et reconnaître un droit à la deuxième chance qui lui échapperait en partie.
1l faut lutter contre le décrochage en permettant, par exemple, aux missions locales d'agir le plus en amont possible pour proposer à chaque jeune un accompagnement renforcé vers l'emploi ou vers d'autres modes de qualification, quitte à reprendre le chemin de l'école un peu plus tard, mais sans avoir été livré à soi-même pendant de très longs mois.
Je pense aussi aux écoles de la deuxième chance que je défends avec ferveur – les résultats sont plus que probants et les taux d'absentéisme faibles – que l'État commence seulement à soutenir.
Enfin, il faut que notre pays parvienne à construire un véritable droit à la formation initiale différée qui fasse que tout notre destin social et professionnel ne soit pas scellé au moment où l'on sort, où l'on est évacué de l'école.
Il faut que chacun ait droit à un compte formation crédité de manière inversement proportionnel à ce que lui a fourni l'école. Savoir qu'on a la possibilité de reprendre un parcours de formation plus tard fera que cette sortie ne sera plus vécue comme un échec indépassable ou une relégation sociale qui engendre frustration et violence.
La lutte contre l'absentéisme et le décrochage passe, non par un processus administratif et répressif, mais par un meilleur accompagnement des élèves, des familles, de leurs parents par des équipes éducatives stabilisées, pluridisciplinaires. Cela nécessite quelques moyens.
Nous sommes d'accord pour lutter contre l'absentéisme, mais, monsieur le rapporteur, votre volonté farouche de l'assortir d'une pénalisation stigmatisant des parents reviendrait, comme l'a parfaitement dit l'ex-ministre de l'éducation Luc Ferry, à « ajouter de la misère à la misère ».
Parce que ce texte ne contribue pas en l'état à résoudre l'absentéisme scolaire, parce qu'il fait l'impasse sur ses causes principales, et n'y apporte pas de remèdes, parce qu'il ne tient pas compte des dispositifs en cours et qui ont fait leur preuve et parce que la menace de suppression des allocations familiales est avant tout une mesure d'affichage, inefficace et profondément inégalitaire, le groupe SRC demande que cette proposition de loi soit renvoyée en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je voudrais rapidement répondre à M. Gille et rappeler quelques vérités.
L'octroi des allocations familiales est historiquement lié à l'exercice de l'autorité parentale – c'est le décret-loi de 1938, qui lie le fait d'entretenir correctement son enfant. Monsieur Gille, qu'y a-t-il de plus important dans le respect de l'autorité parentale que l'assiduité de ses enfants ?
Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !
La suppression des allocations familiales, en cas d'absentéisme, est un principe ancien. C'est une logique de droit et de devoir envers son enfant.
Monsieur Gille, vous avez par ailleurs menti en prétendant que la somme versée au titre des allocations familiales sera supprimée pour toute la famille si un enfant est absentéiste. Non ! C'est la part de l'enfant absentéiste qui sera supprimée. Il ne faut pas faire croire que toutes les allocations seront supprimées.
Vous mettez en cause l'attention que porte le Gouvernement aux familles les plus fragilisées, s'agissant des allocations familiales.
Je voudrais vous rappeler, monsieur le député, que pendant cette période de crise économique et financière, le Gouvernement a pris une mesure importante vis-à-vis des familles, notamment au moment de l'octroi de l'allocation de rentrée scolaire, en versant une prime de 150 euros exceptionnelle pour aider ces familles.
Un budget global de 450 millions d'euros a été consacré à ces familles dont les ressources permettent de bénéficier de l'allocation rentrée scolaire.
À titre d'exemple, une famille qui a un enfant au lycée et un enfant en primaire a perçu 737 euros l'année dernière au mois d'août entre l'allocation de rentrée scolaire et la prime exceptionnelle versée au mois de juin.
Je ne peux pas vous laisser dire non plus, monsieur le député, que j'ai gelé les allocations familiales. Je vous rappelle que les prestations familiales ont été revalorisées de 3 % au 1er janvier 2009, ce qui représente une dépense supplémentaire d'environ 900 millions d'euros.
Si, au 1er janvier 2010, elles n'ont pas été revalorisées, c'est en raison de l'application mécanique de l'article de revalorisation qui prend en compte l'inflation réellement constatée.
Vous pouvez constater que le Gouvernement est totalement mobilisé pour accompagner les familles, notamment à travers l'éducation nationale. Vous avez souligné, monsieur Gille, que nous devions apporter aux familles un accompagnement personnalisé : nous avons décidé d'y mettre les moyens, en augmentant le budget des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents, qui sera porté à 53 millions d'euros d'ici à 2012.
Bref, nous intervenons là où c'est indispensable pour nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Michèle Tabarot, présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
La procédure de motion de renvoi en commission ayant été utilisée, je suis obligée, en qualité de présidente de la commission qui a étudié ce texte, de prendre la parole, ce que je fais avec beaucoup de plaisir.
Nous avons examiné ce texte durant deux heures.
C'est tout simplement parce que vous n'avez pas voulu que cela se prolonge plus longtemps, mon cher collègue.
Seize parlementaires ont souhaité prendre la parole et ils ont pu le faire. Nous avons examiné les 29 amendements qui ont été déposés. Chacun a pu les défendre. Nous avons même accueilli d'autres députés venant d'autres commissions et ils ont eu la possibilité de s'exprimer.
Je crois donc que le travail en commission a été accompli avec sérieux, comme c'est toujours le cas. Chacun peut venir s'exprimer dans le cadre de cette commission. J'estime en effet que c'est la démocratie que de permettre à chaque membre de notre assemblée de s'exprimer.
Le rapporteur a procédé à un certain nombre d'auditions, qui ont été ouvertes à tous nos collègues – certains d'entre vous y ont d'ailleurs assisté.
Je reviendrai sur quelques points évoqués dans le cadre de la commission. Le travail que nous avons effectué a permis de lever un certain nombre d'inquiétudes. Même dans les rangs de la majorité, certains de nos collègues ont avoué n'avoir pas bien compris le dispositif. Ils ont été heureux de pouvoir en débattre et de mieux le comprendre grâce à la présentation et aux explications du rapporteur.
Je trouve intéressant que M. Gille ait évoqué une politique d'ensemble. Dans cet hémicycle, nous sommes tous persuadés que le présent dispositif n'est pas le seul remède à l'absentéisme scolaire. Nous sommes tous persuadés que différentes actions doivent être menées. Nous y avons fait allusion en commission et cela sera rappelé dans le cadre de la discussion générale. Mais nous pensons qu'il faut mettre en oeuvre ce dispositif, car un outil supplémentaire sera ainsi proposé.
Je rappelle que ce dispositif apportera une réponse graduée.
Vous avez, monsieur Gille, évoqué les problèmes de médiation : le chef d'établissement comme l'inspecteur d'académie auront la possibilité de dialoguer avec les parents.
Je vous rappelle aussi que le dispositif comprend trois étapes : avertissement, suspension et suppression. Les parents ont donc la possibilité de se manifester.
En défendant la motion de rejet préalable, M. Durand a évoqué la difficulté pour certains parents de se déplacer, ce qui contraignait les enseignants à se rendre au domicile des parents. Désormais, grâce à ce dispositif, les parents seront obligés de se manifester.
Retourner en commission n'apporterait rien de plus...
Sinon d'avoir le plaisir de vous voir madame la présidente ! (Sourires.)
Merci !
…dans la mesure où vous êtes défavorables à ce dispositif.
Nous avons, grâce à ce texte, l'opportunité de tester un nouvel outil.
Nous vous proposons une nouvelle formule, chers collègues, dans laquelle le chef d'établissement et l'inspecteur d'académie seront impliqués. Mettons-la en oeuvre puis, évaluons-la. La commission a du reste proposé un amendement visant à faire le point dans un an. Nous serons alors en mesure de voir si le dispositif fonctionne et il sera alors toujours temps d'en faire la critique.
Il va de soi, madame la présidente, que je m'oppose au renvoi du texte en commission, car je suis convaincue que rien ne pourrait faire évoluer la position de nos collègues de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, la parole est à M. Yvan Lachaud pour le groupe Nouveau Centre.
Comme vient de le rappeler Mme la présidente de la commission, le texte de la proposition de loi a été largement débattu. Mme la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité a indiqué que les allocations familiales sont versées pour éduquer les enfants ; nous débattons donc bien de l'éducation des enfants.
La suppression des allocations familiales ne sera possible qu'après un certain nombre d'étapes. En outre, des amendements relatifs à la protection de la négociation avec les parents ont été déposés et adoptés par la commission.
Le dispositif proposé est nécessaire et s'adresse à tous les mineurs, absentéistes ou délinquants. Il faut tout de même qu'en dernier ressort, les parents soient responsables des actes de leurs enfants, tout en ayant garanti les étapes intermédiaires.
Nous ne sommes donc pas favorables à la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)
Monsieur Gille, la lutte contre l'absentéisme scolaire est une noble cause, mais le groupe UMP, vous vous en doutez, n'a pas été convaincu par votre analyse, d'autant que vous avez parlé d'une proposition de loi « démagogique ».
Erreur ! Signet non défini.. Personne n'a dit que l'absentéisme était égal à la délinquance.
Les récents états généraux de la sécurité à l'école ont montré que la violence scolaire et l'absentéisme sont souvent liés. Dans la lutte contre l'absentéisme scolaire, on ne peut, même après avoir tout essayé, baisser les bras.
Le dispositif qui réhabilite la responsabilité des parents permet de mieux les accompagner. Nombre de pères et de mères démissionnent, débordés par les comportements inacceptables de l'un de leurs enfants, emporté par le tourbillon d'une adolescence chaotique.
Le dispositif qui met en place un dispositif d'alerte progressif avec in fine une suppression proportionnée des allocations familiales permettra d'apporter de nouvelles réponses qui devront être marquées du sceau de la fermeté. Ce ne sera pas un geste d'exclusion, bien au contraire. Je suis convaincu que ce dispositif aidera davantage les familles car avant la sanction, tout sera mis en oeuvre pour renouer le dialogue entre la famille et l'école.
M. Gille vient de défendre une motion de renvoi en commission. J'ai beau regarder, mais je ne vois aucun amendement émanant du groupe SRC. Seul le groupe GDR en a déposé quelques-uns.
Cela prouve sans doute son trouble et sa difficulté à justifier son opposition à ce texte. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Le renvoi en commission n'est donc pas justifié et le groupe UMP ne le votera pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le week-end dernier, j'ai participé à de nombreuses fêtes d'école qui ont lieu en cette fin d'année scolaire. En ces occasions, j'ai rencontré d'anciens collègues enseignant dans des écoles, des collèges et des lycées. Tous m'ont dit – jalousant quelque peu ma position – qu'ils auraient aimé être à ma place ce soir pour faire part de leur colère au ministre de l'éducation nationale. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Le bilan de cette majorité depuis 2002 est sanglant ! (Mêmes mouvements).
Vous avez la volonté d'assassiner l'école maternelle : l'accueil des enfants de deux ans est très compromis ; les RASED sont en cours d'exécution.
Depuis huit ans, vous avez supprimé 75 000 postes d'enseignant, excusez du peu ! Dès votre arrivée au pouvoir, vous avez fait disparaître les aides éducateurs pour vous étonner ensuite de la montée de la violence. Tout récemment encore, vous avez décidé de sacrifier la formation des enseignants – Yves Durand l'a rappelé à juste titre – ce que déplorent les enseignants qui viennent se plaindre à nous, car nous, nous les écoutons.
La raison principale de l'absence de l'élève à l'heure où il devrait se trouver dans l'établissement n'est pas, monsieur le ministre, qu'il fait l'école buissonnière (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ; c'est en raison de l'absence de professeurs qui ne sont pas remplacés ! (Rires et vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Il semble que cela vous fait réagir, chers collègues : ou bien vous êtes de fieffés menteurs ou vous ne connaissez rien à l'école et vous n'y avez jamais mis les pieds. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Il y a certainement un peu des deux.
Notre collègue Jean-Patrick Gille vous a rappelé pour quelle autre raison les élèves étaient absents. C'est parce que la violence et le racket ont tellement augmenté depuis huit ans, à cause de votre politique…
Non, madame la présidente !
De ce fait, les élèves ont peur et ne vont pas à l'école.
C'est terminé !
(Mme la présidente coupe le micro de M. Roy qui poursuit son intervention.)
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
(M. Roy termine son intervention. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Notre collègue Jean-Patrick Gille nous a expliqué pourquoi cet outil n'a jamais été utilisé alors qu'il existe depuis toujours. Lorsque moi-même j'étais à l'école, j'entendais déjà parler de la suppression des allocations familiales en cas d'absentéisme.
Cela ne vous rappelle rien, mes chers collègues ? Cela ressemble à l'arme de dissuasion, mais, comme toute arme de dissuasion, on ne l'utilise pas.
Durant toutes ces années, tout a été mis en oeuvre, expérimenté précisément pour ne pas devoir y recourir. Alors pourquoi cette proposition de loi aujourd'hui ? Parce que tout ce qui existait pour éviter d'en arriver là, vous l'avez supprimé.
Aujourd'hui, plus rien n'encadre l'école avec efficacité. Il faut dont utiliser des armes de répression pour pouvoir – peut-être – ramener les enfants à l'école. Pour ma part, j'en doute, surtout si j'en crois la démonstration de notre collègue Jean-Patrick Gille. Du reste j'ai remarqué que vous avez écouté, dans le plus grand silence, les exemples très concrets qu'il a cités et qui vous ont, peut-être, rappelé ce que vous vivez dans vos communes.
Nous pensons qu'il faut renvoyer le texte en commission afin de dresser l'inventaire de tout ce qui devrait être mis en oeuvre pour ne pas avoir à utiliser cette arme de dissuasion. C'est la raison pour laquelle notre groupe votera la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
Dans la discussion générale, la parole est à M. Yvan Lachaud, premier orateur inscrit.
« On ne passera pas notre temps à des poursuites, à des procès, à des condamnations ; ce n'est pas le gendarme qui sera le grand ressort de cette loi ; la condamnation judiciaire est nécessaire comme réserve ; mais notre loi, si vous voulez la lire, est toute faite de contraintes morales. » Ainsi s'exprimait Jules Ferry, ici même à l'Assemblée nationale, lors des débats sur la scolarité obligatoire en 1882. Le ministre de l'Instruction publique défendait déjà une position réservée face à une politique qui se réduirait uniquement à la condamnation et à la sanction. Aujourd'hui, plus de cent ans après, nous considérons que, si la morale avait un sens au XIXe siècle, elle en a toujours un au début du XXIe siècle et il serait regrettable de remplacer la contrainte morale par celle de l'argent.
Nous débattons ce soir des moyens à mettre en oeuvre pour dissuader les 300 000 élèves absentéistes de quitter les traverses périlleuses de l'école buissonnière et de retrouver les chemins balisés de l'école et du savoir.
Dès son institution dans les années quatre-vingts, l'école était gratuite, laïque et obligatoire ; ces trois éléments formaient un triptyque indissociable, aussi indissociable que le sont la liberté, l'égalité et la fraternité qui forment notre devise nationale. L'école était gratuite, donc elle pouvait être obligatoire et, à ce titre, elle devait être laïque. Il faut d'ailleurs préciser que c'est l'instruction, et non la scolarisation, qui est obligatoire. Cette école gratuite, obligatoire et laïque a permis une scolarisation quasi complète – donc l'alphabétisation – des enfants français, s'inscrivant ainsi dans le projet des Lumières, d'émancipation du peuple souverain et de démocratisation du pays.
Au Nouveau Centre, nous en sommes convaincus, l'absentéisme scolaire n'est pas le mal, mais le symptôme. Il est souvent un révélateur, parfois le révélateur d'une souffrance. On ne peut pas le réduire à la délinquance.
Un élève ne décroche pas de l'école de manière soudaine, et il est important de mieux prendre en compte tous les signaux d'alerte qui précèdent l'absentéisme proprement dit et qui touchent à la famille de l'élève, à son environnement social. L'absentéisme scolaire délibéré est parfois le fait de jeunes qui le pratiquent à l'insu des parents. Tout l'enjeu est donc là : comment faire prendre conscience aux élèves que c'est à l'école que se joue leur avenir, notamment parce que l'instruction et la formation conditionnent l'insertion professionnelle ? Comment responsabiliser les parents, les faire réagir quand leurs enfants manquent l'école ?
Pour nous, la réponse tient dans un équilibre, certes délicat à trouver, entre l'accompagnement et le soutien des parents d'un côté et la crainte de la sanction dissuasive et pédagogique de l'autre.
Cette proposition de loi instaure un dispositif équilibré et gradué entre accompagnement et sanction qui prévoit à chaque étape de délivrer une information détaillée aux parents sur les dispositifs d'aide existants. Cela va dans le bon sens.
Nous avons également souhaité renforcer les mesures de prévention de l'absentéisme scolaire, en étendant le panel de mécanismes d'accompagnement des parents et des élèves que le président du conseil général peut proposer aux familles, comme le rapporteur l'a rappelé.
Nous sommes aussi favorables à un renforcement du dispositif d'avertissement des parents à la suite de la saisine de l'autorité administrative. En effet, plus on fera appel aux mécanismes de prévention, moins le recours à la sanction sera nécessaire.
Il s'agit pour nous d'un principe intangible : toujours préférer la prévention, le dialogue et l'écoute à la répression. La menace de supprimer les allocations familiales accordées aux parents dont les enfants ont des difficultés ne doit donc pas nous conduire à méconnaître les difficultés des parents eux-mêmes. Une solution plus pertinente consisterait ainsi à comprendre et à aider les enfants et les parents.
Il nous paraît utile de mieux associer les parents à la vie scolaire de leur enfant. Tel est l'objet d'un amendement que nous avons déposé et qui a été adopté en commission. Il propose d'envisager la généralisation du programme de la « mallette des parents », dont l'expérimentation, menée en 2008-2009 dans l'académie de Créteil, a connu un succès tout à fait encourageant.
Grâce à un dispositif léger – des réunions-débats entre parents d'élèves et acteurs du collège, et une formation des parents –, les parents se sont nettement plus impliqués et le comportement des enfants s'est très sensiblement amélioré : moins d'absentéisme, moins d'exclusions. moins d'avertissements en conseil de classe, plus de félicitations et d'encouragements.
Le Nouveau Centre soutient donc cette proposition de loi, tout en insistant sur le volet d'accompagnement des familles d'élèves absentéistes et sur la nécessité d'une approche individualisée des élèves.
Ne l'oublions pas : la réussite d'un parcours scolaire tient à une alchimie certes délicate, mais qui a su opérer pour des millions d'élèves depuis 1882, entre le service public de l'école, l'implication des parents et le soutien qu'ils apportent aux enseignants, une volonté sans faille des acteurs de l'école et, naturellement, l'intérêt des élèves pour le savoir et la connaissance. Les élèves instruits feront des citoyens éclairés et libres. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, l'absentéisme scolaire n'est pas une nouveauté.
Lorsque la France était encore essentiellement rurale, à une époque qui n'est pas si lointaine, aux périodes importantes de la vie paysanne – foins, moissons, vendanges – étaient toujours associés les enfants de la famille qui, à cette occasion, rataient parfois l'école. Cependant l'école, souvent, s'adaptait à ces grands rendez-vous. Certains croyaient pouvoir continuer à faire travailler les enfants, imaginant qu'ils échapperaient ainsi à la scolarisation obligatoire en vigueur dans notre pays.
Les lois Jules Ferry de 1881 et 1882 instituèrent une école publique, gratuite, laïque et obligatoire. L'article 8 de la loi du 28 mars 1882 rendit obligatoire l'inscription préalable de tous les enfants d'âge scolaire sur une liste qui devait être tenue à jour : déjà, on surveillait la fréquentation de l'école.
En France, l'absentéisme existe ainsi depuis plus de cent trente ans : il est apparu en même temps que la scolarité obligatoire. Les moyens d'y remédier sont tout aussi anciens mais, jusqu'à présent, tout aussi inefficaces. La pénalisation par l'édiction d'une infraction pénale y figure du reste, même s'il s'agit – il faut bien relativiser – d'une contravention.
Dès 1896, Léon Bourgeois parlait de contrôle des irrégularités et d'assistance des nécessiteux ; déjà le juge de paix, supprimé en 1959, tentait de convaincre les parents d'envoyer leurs enfants à l'école. Le lien entre obligation scolaire et allocations familiales est établi peu après la loi Landry du 11 mars 1932, notamment dans l'ordonnance du 6 janvier 1959, qui subordonnait à l'assiduité le versement des prestations familiales.
Il n'y a donc rien de nouveau sous le soleil, et je comprends mal que cette question soit source de discorde politique, comme s'il s'agissait d'une découverte et que les moyens de la traiter relevaient d'une sorte de crime de lèse-majesté.
Il faut aujourd'hui comprendre que l'augmentation régulière de l'absentéisme scolaire est particulièrement préoccupante. La société a changé. L'absentéisme s'aggrave et touche des élèves de plus en plus jeunes. En moyenne, 7 % de nos jeunes élèves ne sont pas sur les bancs de l'école, mais livrés à eux-mêmes, et viennent grossir les rangs des quelque 150 000 enfants qui quittent chaque année le système scolaire sans diplôme ni qualification.
De l'école primaire au lycée professionnel, 300 000 jeunes sont absents plus de quatre demi-journées par mois : cela représente la population d'une ville comme Nantes. Les chiffres sont alarmants. Le taux d'absentéisme a augmenté de deux points depuis l'année scolaire 2006-2007.
À une époque où même la possession d'un diplôme ne garantit pas l'entrée dans la vie active, nous imaginons sans peine les difficultés auxquelles ces jeunes seront confrontés lorsqu'il s'agira d'assurer leur avenir. Pire encore, nous connaissons tous les conséquences de leur oisiveté et de leur absence d'encadrement. Sans vouloir les stigmatiser, on peut craindre pour l'avenir d'une partie d'entre eux. Victor Hugo, originaire de Besançon, poète et parlementaire, ardent défenseur de l'école, disait qu'ouvrir une école, c'est fermer une prison ; mais encore faut-il que les intéressés aillent à l'école.
Il est temps de mettre un terme, ou, à tout le moins, un frein à l'absentéisme, en impliquant davantage celles et ceux dont la responsabilité est évidente et directe. Je veux naturellement parler des titulaires de l'autorité parentale.
Le Président de la République aime à rappeler que nous avons des droits, mais également des devoirs. Les parents ont des droits que leur garantit notre nation : par exemple, ils sont assurés de pouvoir scolariser leurs enfants ou de percevoir des aides qui leur permettront d'assumer au mieux leurs obligations. Toutefois, les parents ont également des devoirs. Le premier d'entre eux consiste à veiller à éduquer leurs enfants, à leur permettre de grandir pour s'accomplir et de devenir des hommes équilibrés, cultivés, respectueux d'autrui, mais aussi des citoyens, respectueux de nos valeurs républicaines. Or, parmi ces obligations, figurent celles de scolariser l'enfant et de veiller à sa présence à l'école.
On peut toujours accuser les autres de ses propres turpitudes ou de ses propres insuffisances. On peut toujours vilipender le système. On peut toujours dénigrer l'éducation nationale en général et les enseignants en particulier. On peut toujours décrier le quartier dans lequel on vit, l'immeuble où l'on habite ou le caractère insuffisant des aides sociales dont on bénéficie. Néanmoins il n'y pas à en douter : la responsabilité de l'éducation, sa réussite ou son échec dépendent toujours de ceux qui sont investis de l'autorité parentale.
En effet, ce n'est ni au chef d'établissement, ni aux enseignants, ni à la police municipale, ni à l'assistante sociale de venir réveiller un jeune ou d'aller le chercher pour s'assurer qu'il va à l'école. C'est bien aux parents que la responsabilité en incombe, même si, je l'admets, cette responsabilité est lourde, difficile à assumer quotidiennement ; nous pouvons tous faillir à un moment ou à un autre et elle est exercée plus ou moins facilement selon qu'on l'exerce seul ou à deux, selon que l'on est disponible ou non, selon que l'on rencontre ou non des difficultés culturelles, éducatives ou financières.
Néanmoins, cette responsabilité existe. Il est regrettable de devoir le rappeler, d'autant qu'il s'agit d'obligations élémentaires, inscrites en quelque sorte dans nos gènes, et qui devraient être innées. Toutefois, puisqu'il faut le faire, faisons-le : rappelons à chacun ses obligations et leur portée. En matière d'absentéisme, et lorsque l'enfant est en danger, c'est bien le parent qui est responsable.
Le texte présenté par notre collègue Éric Ciotti vient compléter et renforcer des dispositions existantes, mais manifestement insuffisantes. Il a pour vertu de rappeler aux parents leurs obligations en la matière. Ce texte est équilibré car, contrairement aux raccourcis opérés par ses détracteurs, il vise principalement non à punir, mais à prévenir.
En effet, il ne s'agit pas d'impliquer les parents par des dispositions n'intervenant qu'en aval et par des sanctions ; il s'agit aussi et surtout d'oeuvrer en amont pour identifier les problèmes et pour les résoudre avec les parents, grâce à des actions de diagnostic et de prévention, d'information et d'avertissement.
Ce texte porte une politique globale reposant à la fois sur des dispositifs d'accompagnement des parents et sur leur responsabilisation. Le système se veut résolument équilibré : d'un côté, les dispositifs d'aide aux familles ; de l'autre, la crainte de la suspension des allocations familiales.
Je vous rappelle au passage, mes chers collègues, que ce texte s'inscrit dans un ordre juridique qui favorise les actions de prévention et d'aide aux parents. Vous l'avez dit, monsieur le ministre, mais il est parfois nécessaire de se répéter ; à cet égard je rends hommage à votre politique éducative.
Je veux parler des médiateurs de réussite scolaire installés depuis quinze mois.
Je veux aussi parler des dispositifs relais qui prennent en charge temporairement, avant de les rendre à leur cursus habituel, les élèves de collège dont le comportement perturbe gravement le déroulement du cours, les élèves absentéistes ou en voie de déscolarisation et de désocialisation.
Je veux également parler des micro-lycées. Même s'il en est au stade expérimental, ce dispositif est à l'évidence prometteur : il permettra certainement à des élèves en déshérence de reprendre leurs études.
Je veux en outre parler du dispositif de la « mallette des parents », porté par Éric Maurin, mais soutenu par votre directeur général de l'enseignement scolaire, M. Blanquer, lorsqu'il était recteur de l'académie de Créteil. Il a fait la preuve de ses qualités ; je parle du dispositif autant que du recteur ! La « mallette des parents » a pour but de mieux impliquer dans la scolarité de leurs enfants des familles parfois très éloignées du monde de l'école et d'améliorer le dialogue entre les parents d'élèves et l'école.
Je veux enfin parler de l'initiative de Mme la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, qui a annoncé il y a un mois – avant de le répéter tout à l'heure – que son ministère débloquerait 53 millions d'euros d'ici à 2012 pour les familles en difficulté, dans le cadre des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents.
Je souhaite donc que l'on ne retienne pas de cette loi sa seule dimension répressive, qui n'en constitue qu'une partie, et qu'on ne la réduise pas à un texte mettant en danger les personnes les plus vulnérables. Je crois au contraire que le pan de ce projet qui prévoit des actions préventives de manière précise, détaillée et complète permettra d'éviter la répression.
Pas d'obligation sans sanction : les juristes connaissent la formule. Il n'est donc ni extraordinaire ni choquant de rappeler cette évidence : les prestations constituent une aide apportée aux parents pour exercer les devoirs liés à l'autorité parentale ; dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire bénéficier de la solidarité publique ceux qui se désintéressent de ce devoir moral essentiel. Du reste, l'exemplarité ne doit-elle pas présider à nos décisions ?
Tel est le sens de cette proposition de loi. En effet, la sanction que représentent la suspension puis la suppression des allocations familiales, au demeurant graduée, n'aura pas lieu d'être lorsque les parents auront pris conscience de leurs devoirs et que nous les aurons aidés à assumer cette lourde mais gratifiante responsabilité.
Pour ces raisons, madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, le groupe UMP soutiendra l'excellente proposition de loi d'Éric Ciotti et les nouvelles règles qu'elle édicte, destinées à combattre enfin et durablement l'absentéisme.
Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l'absentéisme scolaire est une plaie qu'il faut absolument guérir. Je pense que nous en sommes tous d'accord. Mais comment y parvenir ? C'est l'analyse des causes et la recherche du traitement qui font apparaître les divergences, au-delà des clichés et des accusations de laxisme.
Certains éléments de l'exposé des motifs auraient pu nous donner quelques motifs d'espérer, monsieur le rapporteur ; mais ce n'était qu'un écran de fumée, destiné à dissimuler l'union entre la logique comptable et la méthode répressive. Nous le regrettons.
On ne punira pas directement les enfants, mais on s'en prendra à leurs parents : impossible de se défaire de cette bonne vieille nostalgie du châtiment qui, expulsée par la porte, revient par la fenêtre, parce qu'il faut toujours des coupables : coupables, les parents dépassés, impuissants, malheureux ; coupables, les mères accablées de charges et de soucis qui élèvent seules leurs enfants ; coupables, les pères au chômage, dévalorisés, qui perdent peu à peu toute autorité.
Comme si cela ne suffisait pas, la loi va ajouter à leur détresse et leur infliger une peine supplémentaire, parce que l'on a choisi de traiter les effets sans se préoccuper des causes. Cependant cette violence faite aux adultes rejaillira sur les enfants, que l'on rendra nécessairement responsable du surcroît de difficultés financières que connaîtra la famille.
Il y a quelque chose d'indécent dans cette proposition qui subordonne l'attribution des allocations familiales à l'assiduité des enfants, comme si l'argent était un moteur plus puissant que le désir d'assurer l'avenir d'un enfant.
L'école n'est pas un privilège ; elle est un droit formidable dont tout enfant doit profiter au maximum pour devenir une femme, un homme, un citoyen. C'est la porte grande ouverte sur le futur, le passeport pour l'avenir.
Cette loi est inutile. Elle ne servirait qu'à mettre en place un outil de plus après la mallette des parents, le médiateur de la réussite scolaire, le contrat de responsabilité parentale et bien d'autres dispositifs qui n'ont pas donné les résultats attendus.
Si les dispositifs existent bel et bien, les moyens véritables font défaut. C'est à l'école que doivent être redonnés les moyens de traiter l'absentéisme scolaire.
Cette loi est injuste car elle contribue à stigmatiser les familles les plus modestes, à précariser les plus fragiles. Il faut chercher les véritables causes et se demander pourquoi il y a, en France, deux millions d'enfants pauvres.
Cette loi est injuste car ses auteurs se donnent bonne conscience en rejetant la responsabilité sur les parents. Elle déplace le problème du collectif vers l'individuel alors que c'est l'ensemble du système éducatif qui est en danger et que c'est son affaiblissement qui génère l'absentéisme.
Pour lutter efficacement contre l'absentéisme, il faut chercher des solutions, pas des sanctions. Cela implique de redonner tout son sens à l'enseignement scolaire et de réveiller l'envie d'école. Cela passe par l'élaboration d'une charte de qualité pour des écoles, des collèges et des lycées accueillants, qui deviendraient les maisons des élèves. Il faut des enseignants en nombre suffisant, motivés, formés, mieux payés et un véritable statut pour les directeurs d'école déchargés d'enseignement afin d'avoir davantage de temps à consacrer aux familles et à la vie dans l'école. Ce sont encore des projets d'établissement susceptibles d'éveiller et de retenir l'attention de tous les élèves en dehors des écoles, des contrats éducatifs locaux dotés de véritables moyens, des travailleurs sociaux en nombre suffisant, des horaires professionnels aménagés pour les parents, un emploi pour chaque parent, un environnement attrayant pour tous les jeunes avec des aires de jeux, des lieux d'expression artistique et culturelle en grand nombre, toutes choses susceptibles de réduire la misère au lieu de l'aggraver.
Oui, nous voulons lutter contre l'absentéisme, mais la lutte contre l'absentéisme scolaire ne peut pas rimer, comme vous l'imaginez, monsieur le rapporteur, avec suppression, répression, sanction et démolition du service public…
Pour notre part, nous choisissons la prévention, l'attention, la « remédiation ». Nous voulons prévenir plutôt que guérir, protéger plutôt que punir. Nous voterons donc contre ce texte à courte vue et inutilement répressif. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, mes chers collègues, cette proposition de loi entend couper les allocations familiales versées aux parents dont un enfant serait en situation d'absentéisme.
Une telle mesure constitue un sujet récurrent de communication politique pour la droite. Dès 1959, le principe d'une contravention susceptible d'entraîner la suspension du versement des prestations familiales était institué. En 2006, la majorité réintégrait ce système par l'entremise de Jean-Louis Borloo. Depuis, le dispositif du contrat de responsabilité parentale n'a quasiment pas été utilisé, sauf dans le département de l'auteur de la présente proposition de loi.
On le voit, la suspension des allocations familiales aux parents d'enfants absentéistes est un marqueur politique qui n'a rien de nouveau. Ce dispositif démagogique, de pur affichage, a fait la démonstration de son inefficacité.
Il est vrai que l'efficacité n'est pas votre priorité et cette proposition de loi est surtout un coup de communication. Devant l'échec total de votre politique économique et sociale, vous tentez de réorienter le débat vers vos sujets de prédilection : la sécurité et le contrôle social. Avec ce genre d'initiative, loin d'apporter des réponses aux problèmes sociaux, vous creusez le lit de l'extrême droite.
Pourtant, en 2003, après maintes vicissitudes, un dispositif similaire était abrogé par la majorité UMP au pouvoir. Voici un extrait de l'exposé des motifs de ce qui est devenu la loi n° 2004-l du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance, votée alors que Nicolas Sarkozy était ministre de l'intérieur : « Le non-respect de l'obligation scolaire est un phénomène complexe. Il est très souvent signe d'un mal-être de l'élève, de souffrances qui peuvent être d'origine scolaire, personnelle ou familiale. Le droit en vigueur en matière d'obligation scolaire se caractérise par un dispositif de suspension et de suppression des prestations familiales, dont l'application s'est révélée inefficace et inéquitable. Parce que l'assiduité scolaire constitue un devoir pour les enfants, une obligation pour les parents et une chance pour les familles, le Gouvernement propose d'abroger le dispositif administratif de suppression ou suspension des prestations familiales. »
L'UMP ne craint pas la contradiction ! À force de moulinets sécuritaires, le chef de l'État oblige ses thuriféraires à chercher dans les cartons pour retrouver des dispositions que la droite elle-même considérait comme injustes et inefficaces. L'omniprésence médiatique de Nicolas Sarkozy et une quantité impressionnante d'annonces, de projets de loi et de discours conduisent à la contradiction et aux répétitions obsessionnelles.
Qu'on en juge : le Président de la République a fait l'annonce qui nous vaut l'examen de ce projet de loi le 25 mai 2010, annonce déjà formulée dans le programme du candidat Sarkozy en 2007, réitérée en septembre 2009 puis en mars 2010. C'est donc la quatrième fois qu'il tente de remobiliser son électorat autour d'un mécanisme qui existe déjà dans les textes. En effet, la loi du 31 mars 2006 instaure un "contrat de responsabilité parentale" à l'initiative du président du conseil général, du maire, du chef d'établissement ou de l'inspecteur d'académie.
Cette proposition de loi repose sur un principe dangereux et contre-productif. Elle agite encore une fois le spectre de la sanction, de la culpabilisation et de la répression. Elle montre l'incapacité radicale de la droite à comprendre les enjeux éducatifs et sociaux.
Des jeunes traînent dans la rue ? L'UMP vote un couvre-feu. Des jeunes s'absentent des cours ? L'UMP vote la suppression des allocations. Des jeunes téléchargent illégalement sur internet ? L'UMP vote la suspension de l'accès à internet. Des femmes portent le voile intégral ? La droite s'apprête à voter son interdiction. Quelle variété dans votre approche des questions de société et quelle subtilité dans vos réponses !
La vérité, c'est que la suppression des allocations familiales ne permettra en rien de responsabiliser les parents. Vous osez parler de cercles vertueux alors qu'elle ne fera que mettre en place des cercles vicieux où les parents en difficulté pourront de moins en moins assurer à leurs enfants des conditions de vie correctes leur permettant d'être intégrés dans la vie scolaire.
Ce texte fait fausse route, et ce sur trois points principaux.
Premièrement, les difficultés des parents à se faire obéir ne sont pas un délit. Instaurer des sanctions pour les parents dépassés par leur enfant est contraire à toute logique.
Deuxièmement, la présence de l'élève en classe ne s'achète pas à coup de primes, d'allocations familiales ou de places de matches de foot. Le mécanisme proposé prévoit pourtant de rétablir le versement des allocations si l'élève revient, ce qui équivaut très concrètement à payer le retour de l'élève en classe.
Troisièmement, l'autorité parentale ne se monnaye pas. Vous prétendez, monsieur le rapporteur, que ce texte « donne une chance aux parents de se remettre en position d'autorité face à leurs enfants », comme si la suspension des allocations puis leur éventuel rétablissement allaient apprendre aux parents l'autorité. Ce n'est pas en punissant l'absence d'autorité des parents que celle-ci se rétablira d'un coup de baguette magique.
Cette mesure populiste, on le voit, repose sur des présupposés qu'on pourrait qualifier de grotesques et ne pourra qu'avoir d'innombrables effets pervers.
L'UMP est habituellement friande de comparaisons internationales, qui lui permettent de justifier la retraite à soixante-sept ans ou le démantèlement des 35 heures. Quelles sont donc les politiques menées à l'étranger en matière d'absentéisme scolaire ? Un dispositif de suspension des allocations et même de contraventions, voire de peines de prison pour les parents d'enfants absentéistes, existe en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Quels en sont les résultats ? En Grande-Bretagne, entre 2002 et 2007, malgré la suspension des allocations, le taux d'absentéisme est passé de 0,7 % à 1 %. Entre 2003 et 2006, pourtant, soixante et onze condamnations à des peines de prison avaient été prononcées à l'encontre des parents concernés. Quelle efficacité pour des mesures de prétendue responsabilisation des parents !
Cette proposition de loi, outre qu'elle constitue un outil de communication politique reposant sur un principe contre-productif, sera, comme les précédentes, totalement inapplicable.
Entrons dans le détail du dispositif proposé.
Le chef d'établissement signale l'élève absentéiste à l'inspecteur d'académie. Celui-ci adresse un avertissement à la famille. Si les absences sont réitérées, il saisit le directeur de la CAF en vue de suspendre le versement des prestations familiales. Entre-temps, le président du conseil général peut proposer la mise en place d'un contrat de responsabilité parentale à la famille.
Les trois acteurs principaux dans le processus de sanction sont donc l'inspecteur d'académie, le directeur de la CAF et le président du conseil général. Or les trois parties en présence ont toutes fait part de leur opposition au dispositif.
Jean Louis Deroussen, président de la Caisse nationale d'allocations familiales, a lui-même montré l'inanité de cette proposition de loi : "S'il y a un désintérêt de l'école, il faut analyser la situation avant la sanction. Et la démarche d'accompagnement est à privilégier : les caisses sont là pour aider les parents, les allocations ne sont pas des récompenses".
Les inspecteurs d'académie, eux, par la voix du syndicat des inspecteurs d'académie, le SIA, mettent en avant le fait que la mesure existe déjà et qu'elle n'a jamais été appliquée. Je cite son nouveau président : "Depuis la rentrée 2006-2007, nous n'avons relevé aucun cas de suspension des. allocations dans le cadre d'un contrat de responsabilité parentale".
Restent les présidents des conseils généraux. Manque de chance, l'Association des départements de France a également fait savoir son opposition au dispositif, affirmant par ailleurs que « les mesures de protection de l'enfance – jusqu'à dix-huit ans – et les politiques d'accompagnement des familles en difficulté ont prouvé toute leur efficacité. »
Dès lors que les trois acteurs principaux du système se déclarent opposés au mécanisme, nous sommes en mesure d'affirmer que ce texte ne s'appliquera jamais, fort heureusement.
Les parents d'élèves ne sont pas en reste. La FCPE a rappelé avec bon sens : « Le Gouvernement ne réglera pas l'absentéisme scolaire en supprimant les allocations familiales ».
Face à ce texte, notre indignation n'a d'égale que notre colère. En effet pour beaucoup de familles, le versement de ces allocations est vital. Faut-il que vous soyez totalement étrangers à la réalité des quartiers populaires, au quotidien de ces familles touchées de plein fouet par la crise, pour penser un tel dispositif ? Prompts à distribuer des milliards aux banquiers fauteurs de crise, vous faites preuve d'une brutale intransigeance quand il s'agit des plus pauvres.
Les députés communistes, républicains et du parti de gauche voteront contre ce texte obtus et inapplicable, qui repose sur des principes répressifs et iniques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la proposition de loi de notre collègue Éric Ciotti, que j'ai cosignée, est un texte attendu et bienvenu. Elle est la traduction législative de l'engagement du Président de la République de faire de la lutte contre les violences et l'absentéisme scolaires une priorité de son action.
L'absentéisme touche en moyenne 7 % des élèves du second degré, avec de fortes disparités selon les établissements : moins de 3 % des élèves dans la moitié des établissements alors qu'il atteint 30 % d'entre eux dans un établissement sur dix. Ce sont les lycées professionnels qui sont le plus touchés : selon les chiffres disponibles, l'absentéisme scolaire concerne 3 % des collégiens, 6 % des lycéens et 15 % des lycéens professionnels. Il faut encore noter une grande disparité dans l'amplitude de l'absentéisme qui peut varier de trois à cinq suivant que les collèges sont situés ou non en ZEP.
Afin de lutter contre ce phénomène, il est nécessaire de rendre plus opérationnel le dispositif prévu par la loi du 31 mars 2006 qui a mis en place un contrat de responsabilité parentale avec une faculté de suspension et de suppression des allocations familiales.
Actuellement, les présidents de conseils généraux peuvent décider si l'élève ne remplit pas les engagements consignés dans ce contrat passé avec la famille. Toutefois, très peu de conseils généraux recourent effectivement à ce dispositif.
Même si des professeurs de lycées professionnels, désabusés et découragés, disent clairement qu'ils préfèrent que certains élèves soient absents – ce qu'il leur permet de mieux travailler avec les autres –, il est de notre responsabilité de repenser notre politique de lutte contre l'absentéisme scolaire pour la rendre plus efficace.
Elle doit s'appuyer sur un équilibre entre accompagnement et soutien des parents, d'un côté, et effectivité de la sanction de l'autre.
La philosophie générale de ce texte étant de réhabiliter l'exercice de l'autorité familiale, les parents devant être vigilants et attentifs à l'éducation de leurs enfants, la réponse aux carences doit être graduée et adaptée au comportement de l'enfant et à la situation de la famille. Les mesures proposées aujourd'hui vont dans le bon sens.
Néanmoins, il est important de souligner que l'absentéisme comme la violence scolaires sont des symptômes significatifs d'une inadaptation profonde de notre système scolaire. Ces phénomènes sont souvent révélateurs d'un malaise et il serait simpliste de les réduire au seul problème des parents démissionnaires.
À la vérité, le malaise est inscrit au coeur de notre système éducatif lui-même. En supprimant les filtres au sein du système scolaire, les héritiers de mai 68 ont instillé le poison de la violence dans notre système.
En laissant passer dans le secondaire des élèves ne maîtrisant pas les bases de la lecture et de l'écriture, en obligeant ces élèves à rester scolarisés jusqu'à seize ans, en transformant les filières techniques en voies de garage, en bradant le baccalauréat pour l'offrir à 80 % d'une classe d'âge, les responsables de l'éducation nationale ont ouvert la porte à la pire des violences : celle qui commence par l'ennui et qui finit par la haine, celle qui par angélisme condamne tant de jeunes à la double peine, puisque sans intégration scolaire ils sont condamnés à la désintégration sociale.
Ainsi, mes chers collègues, insidieusement, au fil du temps et des réformes, tous les obstacles à franchir dans le cadre du parcours scolaire du primaire vers l'université ont été levés. Les résultats de cette politique sont désastreux : 15 % des enfants sortent de l'école primaire sans maîtriser suffisamment les langages pour accéder utilement à d'autres apprentissages ; au sortir du collège, l'orientation vers la seconde d'enseignement général est massive, mais en fin d'année 15 % des élèves sont invités à redoubler ou à se réorienter ; enfin, 150 000 jeunes sortent de l'enseignement scolaire sans aucun diplôme et sans aucune qualification.
La violence et l'absentéisme qui s'expriment aujourd'hui dans nos établissements scolaires sont trop souvent le fait de jeunes mal orientés, qui n'auraient pas dû avoir accès au collège ou au lycée parce qu'ils n'ont pas le niveau requis.
Ils s'y s'ennuient et, pour cette raison, ils s'absentent, perturbent les cours, gênent leurs camarades ou, pire, agressent leurs professeurs.
À juste titre, nos concitoyens veulent que les diplômes soient reconnus, parce que revalorisés, que des formations adaptées débouchent sur l'emploi et que les élèves soient orientés dès le secondaire vers les filières qui correspondent tant à leurs capacités qu'à leurs souhaits.
Pour cela, il nous faut retrouver le chemin du bon sens et du courage politique, afin de mettre en oeuvre des mesures fortes capables de sauver du naufrage notre système éducatif. Ce texte est bienvenu car il apporte une vraie réponse à la progression de l'absentéisme scolaire, mais il ne saurait se substituer à une grande réforme de notre système éducatif, désirée par la grande majorité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, cette proposition de loi s'évertue à désigner comme seuls coupables de l'absentéisme scolaire les parents irresponsables, et propose de les punir en supprimant les allocations familiales.
Ce procédé emblématique de la méthode présidentielle – j'espère, monsieur le rapporteur, que vous en serez rapidement récompensé – fait l'économie d'une réflexion en profondeur, l'absentéisme étant avant tout le baromètre des inégalités du système éducatif français. Infliger à des familles qui sont les perdantes du système une sanction lourde de conséquences n'est évidemment pas la solution. En se refusant une fois de plus à toute analyse des causes, votre politique se condamne à un échec programmé, un échec annoncé, un échec inéluctable.
Vous savez fort bien qu'une orientation précoce, lorsqu'elle n'est pas choisie par l'élève, lorsqu'elle est vécue comme un échec, est le premier facteur d'absentéisme. En effet on ne se réveille pas absentéisme un beau matin ; on le devient au terme d'un processus, le jour où l'on n'accepte plus de venir passivement à des cours que l'on a depuis longtemps cessé de suivre.
On sait que pour remédier à ces inégalités il faudrait agir en amont, dès l'école primaire et tout au long de celle-ci. La très forte prévalence de la scolarisation en maternelle, madame la secrétaire d'État, devrait être un atout pour lutter contre les inégalités. Toucher à la maternelle pour des raisons d'économie est inexcusable, tant elle symbolise l'égalité républicaine, l'émancipation des femmes et le progrès de la psychologie infantile.
Tout enfant doit pouvoir être pris en charge par une école maternelle, car la lutte contre l'échec scolaire commence à la maternelle et continue dans le primaire. Orientation, suppression des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, ou RASED, rôle de la maternelle, manque flagrant de professeurs, de conseillers d'éducation, d'assistantes sociales, ou encore classes surchargées : pour vous, ce ne sont pas là des problèmes. Pour vous, tout cela ne compte pas.
Monsieur le ministre, la lutte contre l'absentéisme relève d'une politique globale d'éducation. Voilà un constat bien banal, mais il faut toute la démagogie du sarkozysme pour tenter de le faire oublier et de détourner le débat sur le seul sujet des allocations familiales.
Tel Diafoirus et les médecins moqués par Molière, vous avez cru trouver la panacée à la maladie de l'absentéisme. Pour vous, un seul remède. Ce n'est pas la saignée, mais ça y ressemble : l'unique remède, c'est la suppression des allocations familiales.
Vous êtes le Diafoirus des temps modernes : un prescripteur de purges qui consistent non pas à chercher la cause de la maladie, mais à appliquer de vieux remèdes inefficaces qui font impression sur l'opinion.
À coup de saignées, Diafoirus et les siens tuaient souvent le malade ; à coup de lois « foireuses », vous allez finir par achever notre système d'éducation. (Rires.)
L'absentéisme est un problème de politique d'éducation, certainement pas un problème d'allocations. Pourtant, le manque de professeurs est l'une des causes de l'absentéisme. Vous répondez : « Mais non, il faut supprimer les allocations ! »
Sur l'orientation subie, et le fait que les jeunes ne se sentent pas à l'aise, qui sont parmi les causes de l'absentéisme dans les lycées professionnelles, votre réponse est : « Mais supprimons les allocations ! »
Un personnel para-éducatif en sous-nombre, avec un manque flagrant d'assistantes sociales, d'infirmiers scolaires, de conseillers d'éducation ? « Mais, que diable, supprimons les allocations ! »
Des maîtres pas assez formés, des classes surchargées, 25 % des élèves qui, à la sortie du primaire, n'assimilent pas la lecture ? « Bon sang, mais c'est bien sûr ! La solution, c'est la suppression des allocations ! »
C'est le propre du charlatan de se présenter comme un thérapeute tout-puissant, tout en étant aveugle et sourd à la souffrance du malade. Le remède miracle et médiatique de Sarkozy – la suppression des allocations – fera malheureusement la preuve de son inefficacité et de sa dangerosité. Je crains que M. Sarkozy, qui a été impuissant face aux bonus exorbitants des traders, confonde allocation et bonus.
Monsieur le ministre, les allocations ne sont ni une récompense ni une prime ; elles constituent une aide aux familles. Comble de l'ubuesque : savez-vous qu'après cent jours d'absentéisme, le même élève qu'on veut ramener en classe, de force, se trouve exclu ! Vous est-il possible ne serait ce que d'imaginer ce qu'un ado en totale perte de vitesse, obligé d'aller au collège pour que sa famille ne soit pas punie, peut apporter ou apprendre dans une classe déjà surchargée ? La zizanie, le chahut, la violence, avec, pour lui, un bénéfice nul.
Décidément, la pilule est amère et l'ordonnance un peu courte. L'éducation malade ne sera pas guérie par ce remède aussi efficace qu'emplâtre posé sur une jambe de bois.
Bien au contraire, d'autres maux vont se développer : stigmatisation des parents en difficulté, familles démunies encore appauvries, adolescents à problèmes développant une haine encore plus grande du système éducatif.
Chez Molière, le malade était imaginaire et les médecins étaient des charlatans. Aujourd'hui, le malade est bien atteint mais vous êtes encore, vous, en train de pratiquer une politique de charlatan !
Simplification, spectacularisation, émotion, confusion, compassion : tout y passe. Réfléchissez, monsieur le ministre, à cette formule d'Einstein…
Einstein disait : « Il faut simplifier, mais pas davantage. » (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
En agissant ainsi, vous allez empêchez les derniers inscrits de parler ce soir, mon cher collègue !
Je n'en crois pas un mot car je sais calculer : nous avons largement le temps. Nous ferons les comptes quand vous voudrez !
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous abordons la discussion ce soir est le résultat d'un travail efficace, puisque son élaboration a été rapide. Il faut pour cela saluer notre rapporteur Éric Ciotti. Nous espérons d'ailleurs que l'application de ce texte que nous allons voter sera tout aussi rapide.
En effet, il y a urgence. L'absentéisme scolaire nuit gravement au principe républicain de l'égalité des chances. Il compromet la réussite scolaire de tous les élèves et, comme l'a décrit l'observatoire européen de la violence scolaire en 2003, il handicape la future vie professionnelle des enfants : les absentéistes occupent plus que les autres des emplois précaires lorsqu'ils arrivent sur le marché du travail.
Décrit comme un fléau, l'absentéisme scolaire est avant tout une réalité inacceptable qui touche près de 300 000 jeunes. Cette situation ne peut perdurer. La tolérer serait démissionner et nous ne saurions souscrire à cette passivité. Le Président de la République, Nicolas Sarkozy, en installant le préfet Lambert dans notre département de Seine-Saint-Denis le 20 avril dernier, a utilisé le terme de « cancer » pour évoquer l'absentéisme scolaire qui ronge notre école. En cela, il avait tout à fait raison.
Bien entendu, la responsabilité des parents existe ; elle est même essentielle et doit être réaffirmée, car rien ne se fera sans eux. Il convient de les accompagner lorsqu'ils sont dépassés et demandeurs. A contrario, les parents qui refusent d'assumer leurs responsabilités doivent comprendre que la société ne peut tolérer une telle démission.
Le contrat de responsabilité parentale, qui a été instauré par la loi relative à l'égalité des chances du 31 mars 2006, est un outil satisfaisant, mais il n'a malheureusement pas été utilisé par beaucoup de présidents de conseils généraux, ce qui est tout à fait regrettable. C'est pourquoi la présente proposition de loi prévoit un dispositif adapté et gradué, le dernier stade étant la suppression des allocations familiales.
Le versement d'allocations familiales est perçu comme un droit ; c'est aussi un devoir pour les parents de faire remplir à leurs enfants le principe de l'obligation scolaire. Or l'absentéisme scolaire s'étend, en particulier dans les quartiers dits difficiles, et elle peut engendrer la violence. L'année scolaire 2007-2008 a connu un pic d'absentéisme et, avec les chiffres récents, l'inquiétude des enseignants et des parents va grandissant.
Le mécanisme proposé instaure une phase d'alerte, avec en premier lieu un avertissement, puis la suspension proprement dite du versement des allocations scolaires et enfin, en dernier lieu, leur suppression, et ce uniquement pour des cas allant au-delà de trois mois d'absence sans réponse des parents.
L'inspecteur d'académie détiendra un rôle central, puisque, d'une part, il saisira le président du conseil général pour la conclusion d'un contrat de responsabilité parentale et, d'autre part, c'est à lui qu'il incombera de demander que les allocations familiales soient de nouveau versées, lorsque le retour de l'enfant en classe aura été constaté.
L'école doit être une maison de verre, transparente et ouverte sur l'extérieur. Elle doit se concentrer sur la réussite de tous les élèves. Ainsi, de nombreuses expériences de resserrement des liens entre l'école et les parents existent parallèlement. La « mallette des parents », expérimentée dans l'académie de Créteil, en est un bon exemple et la volonté de démultiplier l'expérience montre l'intérêt porté aux familles. Les échanges entre les parents et l'école doivent aussi être encouragés et renforcés. Les médiateurs de réussite scolaire jouent d'ailleurs pleinement ce rôle. Les micro-lycées pourraient être généralisés dans chaque académie à la prochaine rentrée scolaire, car ils constituent un dispositif innovant permettant aux jeunes déscolarisés de reprendre des études dans des conditions particulièrement favorables.
En conclusion, entre l'école de la rue et l'école de la République, notre choix est clair : nous voulons une école de la réussite, sanctuarisée et donnant de bons résultats. Le dispositif prévu dans cette proposition de loi est équilibré, puisqu'il tend la main aux parents défaillants sans les stigmatiser, la sanction financière n'intervenant qu'en dernier lieu. Ce sont véritablement des opérations sur mesure qui sont proposées.
Ne rien faire face au fléau de l'absentéisme scolaire reviendrait à se rendre complice de non-assistance à enfants en danger : c'est précisément pourquoi il convient que nous votions ce texte.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues – peu nombreux, mais de valeur…
Et surtout de gauche ! Si on votait maintenant, cette proposition de loi n'irait pas bien loin. (Sourires.)
…comme l'a souligné Frédéric Reiss, personne, c'est une évidence, n'a envie de baisser les bras devant l'absentéisme. Cependant votre proposition de loi, monsieur le rapporteur, veut pointer des coupables : de mauvais parents, qu'il faut punir en leur supprimant les allocations familiales s'ils ne font pas amende honorable.
À titre personnel, et comme l'ensemble des membres du groupe SRC, je voterai contre cette proposition de loi qui, à grand fracas et dans l'urgence, comme l'a indiqué l'un des orateurs précédents, ressuscite un dispositif datant de 1966, abrogé par la loi du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance : il était inefficace et inéquitable, comme l'ont notamment montré les conclusions du rapporteur Machard, alors délégué interministériel à la famille. Ce système ne touche que les allocataires, alors que tous les parents ont des obligations légales.
Il est dommage que M. Lachaud nous ait quittés – je ne pense pas que ce soit définitif (Rires) – car, en 2003, c'est lui qui faisait cette déclaration, que l'on peut lire au Journal officiel : « La suspension des prestations familiales s'est révélée injuste et inefficace. »
Cette proposition de loi très manichéenne – les bons parents d'un côté, les mauvais parents de l'autre – ne peut apporter de solution au problème de l'absentéisme. Sur ce sujet, comme sur beaucoup d'autres, l'échec est prévisible puisque le Gouvernement se refuse à analyser les causes.
Or l'absentéisme, comme M. Picq nous l'a encore expliqué cet après-midi lors de son audition portant sur le rapport de la Cour des comptes, est un puissant révélateur des inégalités du système éducatif français. Il recouvre une multitude de situations : certains ont un problème d'orientation ; certains ont besoin de gagner de l'argent en travaillant ; certains subissent des violences, du racket, etc. Je ne vais pas répéter ce que mes collègues ont très bien dit.
Un élève absentéiste a le plus souvent une longue histoire derrière lui, faite de difficultés de compréhension, de retards accumulés, de démotivation. L'absentéisme débute au collège et explose au lycée, mais c'est dès l'école primaire que se créent des écarts difficilement réversibles. Selon le Haut conseil de l'éducation, ces élèves sont « condamnés à une scolarité difficile au collège et à une poursuite d'études incertaine au-delà ».
Si l'on veut bien examiner les faits, on verra que l'absentéisme concerne surtout l'enseignement professionnel. Or nous savons tous que c'est là que se concentrent les élèves ayant connu de grandes difficultés au collège et ayant été orientés par défaut. Cela montre, encore une fois, que l'absentéisme est un effet et non une cause ; il faut donc le traiter en amont.
Il existe pourtant en France, monsieur le ministre, des mesures de prévention précoce, dès le périscolaire et le primaire, et, plus généralement, des mesures de soutien à la fonction parentale et des mesures de médiation scolaire. Si elles suivent une méthodologie minimale, elles s'avèrent efficaces, simples à mettre en oeuvre et peu coûteuses.
Ainsi, comme cela a déjà été rappelé, trente-sept collèges ont expérimenté au cours de l'année scolaire 2008-2009 la « mallette des parents », projet conçu pour consolider le lien entre le collège et les parents d'élèves volontaires. Ce dispositif peu coûteux s'est avéré assez satisfaisant. Les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents, mis en place depuis 1999, soutiennent et coordonnent les différentes initiatives professionnelles et bénévoles. Depuis 2005, les universités populaires des parents ont fait naître des débats locaux entre parents, élus et professionnels, ainsi que des projets de coopération.
Ces dispositifs semblent donc faire leurs preuves, et mériteraient qu'on leur porte plus d'attention dans le débat actuel : à défaut d'être spectaculaires et médiatiques, ils sont tout simplement efficaces et justes.
Aussi, avant de rétablir un dispositif abrogé il y a quelques années seulement avec l'accord du ministre Luc Ferry, aurait-il fallu se demander pourquoi il n'était plus mis en oeuvre. La suppression des allocations familiales ne permettait pas de réduire l'absentéisme, et elle ne le permettra pas à l'avenir : cette sanction sera sans effets sur certaines familles, et pour d'autres elle ne fera qu'aggraver la situation de parents souvent dépassés, mais en aucun cas démissionnaires. De plus, les allocations familiales ne représentent qu'une infime partie des ressources des familles nanties : cette sanction ne pénalisera donc en réalité que les plus démunis.
Si l'objectif est de permettre un jour le retour aux études de ceux qui s'en sont éloignés, alors il est important de perdre du temps à chercher ce qui se cache derrière la façade de l'absence, afin d'en gagner en adaptant les réponses à chaque élève et à chaque famille.
La problématique de l'absentéisme scolaire ne recoupe que très partiellement – alors qu'on veut faire croire le contraire – celle de la violence scolaire. L'école buissonnière n'est pas l'école du crime.
Je tiens enfin à souligner que le lien que vous semblez établir entre école, assiduité et allocations familiales ne semble pas fait pour susciter le désir d'étudier.
Il n'aidera en rien la réintégration de ces élèves dans le système scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, M. Ciotti est un multirécidiviste chevronné. Il y a un an, nous débattions, en première lecture, d'une loi contre les violences de groupe dont une partie importante était consacrée aux violences scolaires. À l'époque, dans cette proposition de loi dont M. Ciotti était l'auteur, il n'y avait pas un mot, pas un seul, sur les élèves. Pourtant, 95 % des victimes de violences scolaires sont des élèves. Mais vous n'aviez accepté aucun de nos multiples amendements…
…qui proposaient, justement, d'instaurer des moyens efficaces de collaboration entre tous ceux qui doivent concourir à l'éducation d'un enfant et à la prévention des violences, à l'école comme en dehors de l'école.
Quelques mois plus tard, en deuxième lecture, vous avez à nouveau refusé tous nos amendements. Du côté du Gouvernement, aucune avancée n'avait pourtant été réalisée sur la question des violences scolaires, à part la signature, par les ministres de l'intérieur et de l'éducation nationale, d'une circulaire d'instructions aux préfets dans laquelle pas un mot, pas un seul, ne figurait sur la nécessaire coopération entre les différents acteurs : collectivités locales, communautés éducatives, élus, parents.
Aujourd'hui, le multirécidiviste Ciotti sévit à nouveau en déposant une proposition de loi qui se propose de lutter contre l'absentéisme scolaire. J'ai écouté attentivement tous les orateurs, en particulier le rapporteur lui-même. Je n'ai pas entendu un seul élément qui permettrait de démontrer l'efficacité de la suppression des allocations familiales pour lutter contre l'absentéisme scolaire. Je me demande même, monsieur le rapporteur, si vous avez lu votre propre rapport. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mais oui, je me pose la question, car, dès la première page de ce rapport, vous soulignez les raisons diverses qui expliquent l'absentéisme scolaire, qui est massif puisque 300 000 élèves sont concernés.
Dès la première page de ce rapport, vous soulignez aussi que les enfants victimes d'ostracisme ou de harcèlement psychologique par leurs pairs, sont tout particulièrement sujets à l'absentéisme, comme à l'échec scolaire et à des conduites à risque.
Pourtant, vous avez refusé tous les amendements que nous vous avions proposés l'an dernier sur les violences scolaires pour venir en aide à ces enfants. Vous proposez au contraire qu'on les force à revenir dans les établissements scolaires dont ils s'absentent parce qu'ils y sont victimes de harcèlement de la part de leurs pairs.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous n'aviez jugé utile d'assister à aucune des deux lectures de cette proposition de loi sur les violences de groupe. Cependant vous avez organisé les états généraux sur la sécurité à l'école, et vous avez pris en compte les propositions, notamment, de M. Debarbieux.
C'est pourtant tout l'esprit des propositions du groupe socialiste – j'en suis témoin depuis le début de la législature, mais c'était déjà le cas auparavant – que de proposer à l'école et à tous les acteurs dans et hors de l'école de coopérer pour assurer la réussite des élèves, donc la réussite de notre société. Vous décidez de supprimer les allocations familiales, mais vous n'avez toujours pas démontré en quoi cela permettrait de lutter contre l'absentéisme, en quoi, si toutefois cela aiderait à faire revenir les élèves à l'école…
Je vais conclure en constatant que, décidément, on ne change pas une politique qui échoue : alors que vos prédécesseurs ont mis fin au dispositif de suppression des allocations familiales en constatant son inefficacité…
…et alors que vous-même, monsieur le rapporteur, qui êtes président de conseil général, décidez de confier cette responsabilité à un inspecteur d'académie…
Madame Mazetier c'est terminé ! (Mme la présidente coupe le micro à Mme Mazetier qui poursuit son intervention.)
Merci de laisser la place à M. Calméjane : votre temps de parole est épuisé. (Mme Mazetier continue de s'exprimer.)
La parole est à M. Calméjane.
Madame Mazetier, veuillez regagner votre place ? (Mme Mazetier poursuit en restant à la tribune.)
Vous pouvez continuer tant que vous voulez, vos propos ne figureront pas au Journal officiel ! (Mme Mazetier poursuit son intervention.)
Enfin, c'est inconcevable ! Je vous demande de regagner votre place. Votre temps de parole est épuisé, et chaque orateur doit respecter le temps qui lui est imparti. (Mme Mazetier continue à s'exprimer à la tribune.)
Regagnez votre place, ou je devrai demander aux huissiers de vous y raccompagner. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.)
Pas ça !
(Mme Mazetier achève son intervention et quitte la tribune. — Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mes chers collègues, vous avez les uns et les autres un temps de parole de cinq minutes. Le temps de parole est fixé, et nous ne sommes pas dans le cadre du temps programmé. Madame Mazetier, vous êtes allée beaucoup trop loin et j'informerai la conférence des présidents de cet incident de séance : je veux bien vous laisser conclure, mais je pense que chacun doit respecter son temps de parole.
Il me restait deux minutes de temps de parole. Je peux lui en laisser une !
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, Anatole France a-t-il été le modèle de 7 % des élèves en 2007-2008 lorsqu'il écrivait que de toutes les écoles qu'il a fréquentées, c'est l'école buissonnière qui lui a paru la meilleure ? Malheureusement, tous les élèves qui la fréquentent n'auront pas sa destinée.
L'absentéisme scolaire est un fléau qu'il est nécessaire d'endiguer car il constitue le premier maillon d'une chaîne inexorable qui amène un enfant à se marginaliser, puis à sombrer peut-être dans la délinquance.
Aujourd'hui, 65 % des Français sont favorables à la suspension des allocations familiales pour les parents en cas d'absentéisme de leurs enfants scolarisés et 60 % estiment que cette mesure sera efficace. J'y suis moi-même favorable et je me félicite que cette proposition de loi vienne en discussion dans notre assemblée.
L'absentéisme débute dès la rentrée scolaire. C'est la raison pour laquelle je souhaite, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, vous exposer une proposition complémentaire, avec la volonté de mieux responsabiliser les parents.
L'allocation de rentrée scolaire fait l'objet des articles L. 543-1, L. 543-2 et R. 543-1 à R. 543-7 du code de la sécurité sociale. Elle organise, et c'est juste, le versement d'une allocation destinée à permettre aux familles des achats pour la rentrée. Elle est versée si l'enfant est « inscrit en exécution de l'obligation scolaire dans un établissement ou organisme d'enseignement public ou privé. » Cependant l'article R. 543-4 – qui est de votre compétence, madame la secrétaire d'État – dispose que « dans le cas où le versement des prestations familiales a été supprimé, au titre de l'année scolaire précédente, en application des dispositions qui édictent des sanctions aux manquements à l'obligation scolaire », l'allocation de rentrée scolaire peut être suspendue.
Le respect de l'obligation scolaire est bien le sujet qui nous occupe ce soir. C'est pourquoi je vous propose, madame la secrétaire d'État, de scinder en deux parties le versement de l'allocation de rentrée scolaire. La première échéance serait versée dans la dernière semaine d'août, comme c'est le cas aujourd'hui, sans condition préalable supplémentaire ; la seconde, quant à elle, serait tributaire de la présence effective de l'enfant le jour de la rentrée scolaire, sauf bien évidemment motif légitime qu'un décret devrait définir clairement.
Grâce à ce dispositif, l'absentéisme scolaire constaté dès le premier jour de la rentrée pourrait être mieux maîtrisé, voire enrayé.
La rentrée scolaire est une étape fondamentale dans l'année scolaire d'un enfant. Dans le primaire, c'est la période de présentation de la classe, des professeurs, des activités, des inscriptions aux activités parascolaires : cantine, centre de loisirs… Au collège et au lycée, c'est, en fonction des niveaux, la découverte des nouveaux locaux, des emplois du temps et, surtout, de nouveaux camarades. Or, depuis quelques années, les maires et les personnels de l'éducation nationale constatent des rentrées de plus en plus tardives des enfants et des familles, sans motif réel et sérieux.
Les conséquences de ces absences sont parfois graves pour l'ensemble d'un groupe scolaire. L'inspecteur peut être amené à fermer une classe et être dans l'obligation de la rouvrir quelques jours après la rentrée, sous la pression des parents d'élèves et des enseignants, du fait des personnes arrivées tardivement. Les structures des classes sont ainsi modifiées plusieurs fois en quelques semaines, avec des conséquences multiples pour les enfants. Il est donc normal de conditionner le versement intégral de l'allocation de rentrée scolaire à la présence effective de l'enfant dès les premiers jours de la rentrée scolaire.
Je suggère que cette proposition de scinder en deux versements l'allocation de rentrée scolaire soit clairement reprise dans le décret d'application de la loi, le sujet relevant de la matière réglementaire de votre compétence, madame la secrétaire d'État.
Je pense sincèrement que la condition d'allocation tributaire de la présence effective de l'élève le jour de la rentrée est un moyen, outre de pression, de responsabilité et d'autorité, mais aussi d'égalité, de justice et d'efficacité.
C'est également un pari sur l'avenir tant pour l'enfant et la famille que pour la société. Recevoir de l'argent de l'État est peut-être un droit, respecter les règles qui accompagnent ce droit est un devoir. Droits et devoirs sont indissociables dans notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, « absentéisme scolaire », « décrochage », « échec scolaire », « violence scolaire », depuis le début de notre débat, cette question me taraude : ne savez-vous donc parler de l'école qu'en des termes négatifs ?
Cette proposition de loi, qui prévoit d'instaurer un dispositif compliqué, voire impossible à appliquer, ayant en outre fait la preuve de son inefficacité par le passé et étant, à ce titre, très largement critiqué dans la sphère éducative, n'aurait-il pas pour seule visée, une nouvelle fois, de décrédibiliser, d'affaiblir encore l'école, l'école publique s'entend ?
En attaquant les parents au portefeuille en cas d'absences répétées de leur enfant à l'école, pour qu'enfin ils assument leur « responsabilité parentale », vous cherchez, une nouvelle fois, par cet effet d'annonce que d'autres collègues ont déjà relevé, à frapper l'opinion. Ce texte s'inscrit, avec d'autres, notamment celui sur le voile intégral, dans votre stratégie post-élections régionales, de retour aux fondamentaux de la droite, d'apaisement de votre électorat.
En effet, qui peut croire que la suspension des allocations réglera le problème d'absentéisme à l'école ?
L'absentéisme ne peut-être réduit ni à la délinquance ni à la démission parentale. Ceux qui l'affirment donnent dans la mauvaise foi, l'hypocrisie, la démagogie, sauf à n'avoir pas été eux-mêmes parents et à refuser d'entendre les spécialistes.
L'absentéisme a des causes multiples – je n'y reviendrai pas car d'autres collègues l'ont expliqué – et appelle des réponses tout aussi variées. Tous les niveaux sociaux sont touchés. Rejeter la responsabilité sur les seuls parents, c'est quand même refuser de prendre ses responsabilités de la part de l'État, de l'institution.
Que fait aujourd'hui le ministère de l'éducation nationale pour redonner du sens à l'école pour ces enfants, pour aider plutôt que de sanctionner les familles souvent plus désemparées par la situation que « démissionnaires », pour accompagner les équipes éducatives dans la prise en charge du problème, enfin, parce que l'absentéisme est aussi le symptôme d'une certaine inadaptation du système scolaire face aux évolutions de la société et aux besoins de savoir actuels, pour trouver des solutions, des ajustements et repenser le modèle actuel ?
Oui, que fait le Gouvernement ? Aujourd'hui, et par la volonté du Président de la République, il supprime des postes : 1 l 500 en 2008, 13 500 en 2009, l7 000 en 2010. Tous les moyens sont bons. Ce sont des postes d'enseignant qui disparaissent ainsi mais aussi des postes de conseiller d'éducation, d'infirmier, de psychologue scolaire, d'assistant social.
À ce sujet, j'ai une question à vous poser : la présente proposition de loi prévoit une sanction financière pour les parents des élèves « absentéistes », à partir de quatre demi-journées d'absence par mois. Quelle sanction prévoyez-vous pour l'éducation nationale, pour l'État, pour les heures de cours non remplacées, conséquence de votre politique de réduction des effectifs enseignants à des fins exclusivement budgétaires ?
Dans certaines académies, les remplacements ne sont prévus qu'au-delà de trois semaines, voire un mois, d'absence du professeur et non seulement les cours ne sont pas assurés mais les élèves sont renvoyés chez eux ou dans la rue.
Aujourd'hui, et par votre volonté, l'éducation nationale renonce à la formation professionnelle, notamment à la formation pédagogique des futurs enseignants, en supprimant l'année d'enseignant stagiaire à l'IUFM. Les futurs enseignants prendront leur poste après une préparation académique à l'université, un an de plus, vous l'avez rappelé, mais sans formation pédagogique, parfois même sans stage en situation scolaire. Ils feront eux-mêmes les frais de cette réforme irresponsable, eux qui réclament depuis plusieurs années une meilleure préparation à leurs missions, notamment au face-à-face avec les élèves. Les élèves et toute la communauté éducative en feront les frais.
Sanctionner financièrement les parents des élèves qui sèchent l'école, le collège, le lycée, ne résoudra pas le problème de l'absentéisme scolaire. Tout comme la mise en place des fichiers des élèves dits « décrocheurs » ne résoudra pas le problème des sorties du système scolaire sans diplôme, pas plus que les brigades spéciales, les portiques de sécurité, la fouille des élèves ne résoudront le problème de violence en milieu scolaire.
Ce dont les élèves, les familles et les enseignants ont besoin, ce n'est pas d'un arsenal ou d'un GIGN scolaire, c'est d'une école qui a les moyens de travailler au quotidien, avec des enseignants, des surveillants et des personnels d'encadrement formés et suffisamment nombreux.
L'investissement dans l'éducation est la meilleure garantie que peut apporter l'État pour que chaque citoyen maîtrise et réussisse sa vie. L'éducation est une priorité, doit être une priorité et la base de tout projet politique. Vous vous obstinez à prendre le chemin inverse. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Merci d'avoir parfaitement respecté votre temps de parole, monsieur Ménard. Ça change.
La parole est à M. Philippe Goujon.
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je vais essayer de revenir au coeur du sujet car, avec cette proposition de loi, il s'agit tout bonnement de traiter le mal à la racine.
Je salue la démarche excellente de notre collègue Éric Ciotti, qui tire naturellement les conséquences législatives, d'une part, de ce qu'il a pu mettre en application, avec succès, en tant que président d'un conseil général, d'autre part, de l'inertie de trop nombreux départements en la matière.
Comment ne pas déplorer la posture, parce qu'il s'agit d'une posture, de ceux qui restent enfermés dans le déni de réalité ? Force est de constater que, si la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances a instauré un contrat de responsabilité parentale, bien peu de présidents de conseil général se sont saisis de cet outil.
Vous le revendiquez ? Tant pis pour vous.
Il en va de même du conseil des droits et devoirs des familles auquel trop peu ont eu recours.
C'est bien parce que ces mesures n'ont pas été appliquées par les collectivités territoriales que vous dirigez qu'il convient de procéder autrement. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Une réalité s'impose, que vous le vouliez ou non : si tous les élèves absentéistes ne deviennent pas, heureusement, des délinquants, quasiment tous les délinquants mineurs sont ou ont été en situation d'absentéisme. Même s'il faut se garder de tout raccourci car les causes de l'absentéisme scolaire sont multiples, le lien existant entre les deux ne peut être nié.
L'adolescent qui, au lieu d'aller à l'école, traîne dans la rue, risque la marginalisation, peut basculer dans la délinquance, au gré de mauvaises rencontres. L'exemple du Canada a montré qu'absentéisme scolaire et violence étaient souvent liés.
C'est ce danger-là qu'il nous appartient de prévenir en responsabilisant les parents au regard du devoir d'assiduité scolaire de leurs enfants.
Il est urgent d'agir. S'agissant d'ailleurs de la montée spectaculaire de l'absentéisme dans les lycées d'enseignement professionnel, je regrette que les conseils régionaux, qui en ont la charge, ne s'en préoccupent pas davantage.
Une des clefs consiste dans la restauration de l'autorité parentale. Tel est l'objet de ce texte, qui prévoit un dispositif de sanctions gradué et proportionné, avec, seulement en dernier recours, dans les cas les plus extrêmes, la suppression des allocations des « décrocheurs ».
Contrairement à ce que certains avancent, il ne s'agit pas du tout de stigmatiser les familles.
Il s'agit de responsabiliser les parents, puisque, en cas de retour de l'élève à l'école, les allocations seront versées rétroactivement. Nous mettons en place un outil de soutien à la parentalité qui, en contrepartie des droits accordés aux familles, les rappellera à leurs devoirs. Vous oubliez un peu trop la partie devoirs.
De même, la mesure est parfaitement ciblée parce qu'une famille dont un seul des enfants serait concerné ne se verra pas supprimer la totalité de ses allocations familiales, évidemment, mais seulement la part correspondante.
Enfin, je précise à ceux qui n'y verraient qu'une seule mesure répressive, je précise que c'est l'inspecteur d'académie et non le préfet – ce qui devrait vous rassurer – qui est placé au coeur du dispositif pour mieux signifier qu'il s'agit avant tout d'une sanction éducative relevant, par essence, de la communauté scolaire.
Mes chers collègues, il vous faut sortir du temps de la naïveté chère à M. Jospin ! Qui ne voit que nous sommes aujourd'hui confrontés à des parents totalement dépassés et que les pouvoirs publics ont le devoir de les aider à reprendre les choses en mains ?
Eh oui !
C'est une mesure de bon sens que d'ailleurs plus de 60 % des Français approuvent.
J'observe enfin que la suspension des allocations familiales est possible depuis 1959 et qu'elle n'a jamais été remise en cause par les gouvernements de gauche.
En protégeant les jeunes en danger aussi bien que la société, tout en restaurant l'autorité parentale, ce texte, exemple même d'une législation enracinée dans la réalité et faite par des élus de terrain, est le maillon qui manquait à notre dispositif. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, cette proposition de loi apporte la plus mauvaise réponse qui soit à la question de l'absentéisme scolaire.
La société française parvenait déjà assez mal à lutter contre la reproduction des inégalités sociales à l'école ; elle s'apprête aujourd'hui à infliger une double peine aux perdants du système en leur supprimant les allocations familiales.
Face à un grave problème social, il est proposé de stigmatiser, de désigner dans la population, des mauvais parents. Beaucoup d'entre vous sont des élus de proximité ; beaucoup d'entre vous savent que, contrairement à l'expression trop souvent utilisée, il y a peu, très peu de parents qui baissent les bras, qui démissionnent, qui se désintéressent. Connaissez-vous beaucoup de parents qui vous diront ne pas souhaiter que leur enfant aille à l'école ?
Enfin, soyons humbles : il est particulièrement difficile d'être parents. Qui dans cette enceinte peut m'assurer qu'il est complètement à l'abri d'un problème comportemental que lui posera, demain, son fils ou son petit fils ?
Gardons-nous bien de donner des leçons.
Il y a des problèmes sociaux, financiers, culturels, familiaux, qui contribuent à fragiliser l'enfant, à fragiliser la relation parents enfant. Cela s'appelle les accidents de la vie et nul n'est définitivement à l'abri, y compris dans les familles de catégorie socioprofessionnelle aisée. Donner des leçons à ces parents en difficulté, c'est appuyer sur la tête de ceux qui coulent ; en prétextant qu'ils nageraient mal.
Sur le fond, j'espère que chacun aura réfléchi à l'idée que ces allocations familiales servent aussi à nourrir ces enfants, bien qu'ils soient en difficulté.
L'absentéisme est surtout un symptôme, qui exprime, qui démontre des difficultés, comme une école inadaptée ; je vous renvoie aux conclusions du rapport de la Cour des comptes.
Ces parents, plutôt que de les sanctionner et de les enfoncer un peu plus dans ce qui est souvent une douleur, plutôt que de les stigmatiser et de rajouter à leurs difficultés en les culpabilisant un peu plus, pourquoi ne pas les aider, les accompagner ?
Certains m'objecteront qu'on le fait déjà, que cela ne marche pas ou qu'ils ne veulent pas le faire. Je crois que c'est parce qu'on n'est pas bon. Travaillons d'abord à proposer une école plus adaptée, plus attractive, où chacun trouve sa place. Proposons un accompagnement parental. Permettons aux parents de venir confier leurs difficultés quand ils le veulent, quand ils le peuvent, auprès des professionnels, enseignants, éducateurs, assistantes sociales, psychologues, médecins. Encore faut-il que les postes existent.
Si le professionnel reçoit les parents sans les stigmatiser, sans les juger a priori, il sera plus facile d'établir un lien en confiance. Si nous donnons à ces professionnels les moyens d'écouter ces parents et de travailler en réseau avec les autres professionnels, il sera aisé d'orienter ces parents vers la personne qui pourra réellement les aider en mobilisant au bon moment les bonnes compétences professionnelles.
Toutes les belles images d'Épinal que vous avez évoquées, madame la secrétaire d'État, n'existent pas, ou sont insuffisantes. Je préférerais des propositions éducatives, solidaires, préventives. Ceux qui ajouteront « angéliques », ceux qui n'y croient pas et qui se gaussent sont sur un choix de société individualiste, compétitif, sélectif.
L'échec général des politiques de « responsabilisation familiale », constaté en France comme à l'étranger, révèle que la capacité des parents à contrôler les conduites de leurs enfants mineurs ne saurait être surestimée. Les actions de prévention précoce auprès des parents, en amont du phénomène et en présence réelle de facteurs de risque, sont plus efficaces. Simples et peu coûteuses, ces actions, sous leurs diverses formes, ne nous sont pas inconnues, mais, à l'évidence, elles sont moins spectaculaires.
En fait il vous faut faire du spectacle. Le choix du « tout répressif » est donc opéré. On voit le Président de la République, par ses annonces, récupérer un électorat réactionnaire après la défaite des élections régionales au détriment des plus fragiles. Il a lui-même organisé la casse du service public d'éducation, les pertes de personnels d'encadrement dans nos lycées. Et quelle erreur que de lier d'emblée les violences à l'absentéisme scolaire !
Pis encore, alors que ces dispositions existaient déjà, les présidents de conseils généraux, qui ont la légitimité des élus du peuple, ont choisi de ne pas les appliquer tant elles sont médiocres. Et ce gouvernement, alors qu'il décentralise vers les conseils généraux la charge de la misère, sans compensation, recentralise la sanction en proposant que les inspecteurs d'académie puissent suspendre ces allocations.
Vous êtes dans l'erreur. Il a déjà été démontré que ces sanctions n'étaient pas souhaitables. Il sera démontré qu'elles ne seront pas applicables ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, madame la présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, mes chers collègues, je tiens tout d'abord à remercier Éric Ciotti pour l'initiative de cette proposition de loi que j'ai cosignée avec enthousiasme et qui vient consolider l'ensemble des dispositifs que le Gouvernement met en place pour lutter contre l'absentéisme scolaire.
Elle rappelle que l'assiduité à l'école est une obligation parce qu'elle constitue la condition première de la réussite et de l'insertion de nos enfants. Oui, les parents ont une responsabilité considérable sur cette question. Dans notre société, beaucoup l'ont rappelé ce soir, nous avons tous non seulement des droits, mais aussi des devoirs. Il s'agit non pas de stigmatiser des familles, mais simplement de rappeler cette réalité.
On peut se féliciter d'ailleurs que, dans cet esprit, le dispositif proposé soit gradué et que son objectif soit avant tout de renforcer le lien entre la famille et l'école. La sanction de la suspension des allocations familiales, et non de leur suppression, n'arrivera qu'en dernier recours lorsque toutes les possibilités auront été épuisées.
L'enjeu principal, notre responsabilité collective, est bien d'aider et de responsabiliser les familles. Il s'agit de renouer le dialogue, d'accompagner les parents qui sont parfois démunis face à un enfant sur lequel ils ont souvent perdu leur autorité.
La lutte contre l'absentéisme scolaire repose bien ainsi sur la réhabilitation de l'exercice de l'autorité parentale. D'ailleurs, dans son rapport, notre collègue Éric Ciotti fait référence à une enquête de l'INSERM qui met en évidence, comme facteur principal, la qualité de la vie familiale et relationnelle.
La lutte contre l'absentéisme des enfants doit également s'appuyer sur tous les acteurs de l'école. C'est dans cet esprit que, avec mon collègue Jean-Philippe Maurer, j'ai proposé un amendement, adopté par notre commission, permettant une information annuelle dans les conseils d'école et les conseils d'administration sur l'absentéisme au sein de chaque établissement scolaire.
Toute la communauté éducative doit être associée à cette lutte contre l'absentéisme scolaire. Un rapport d'information annuel, par établissement, permettra en toute transparence de présenter les mesures mises en oeuvre au plus près des familles. Il équilibrera ainsi les mesures de prévention et les sanctions prévues dans cette proposition de loi. Il confortera enfin le rôle essentiel que chaque établissement doit remplir pour soutenir les familles dans l'accompagnement éducatif auprès de leurs enfants pour favoriser leur réussite scolaire.
Je veux à mon tour citer M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes, auditionné ce matin par la commission des affaires culturelles et de l'éducation sur le rapport L'éducation nationale face à l'objectif de la réussite de tous les élèves. Il recommandait d'accroître la responsabilité des établissements. Il insistait aussi sur l'exigence de leur évaluation. Contrairement à ce qu'ont dit certains de mes collègues, ces propos vont dans le même sens que les mesures prises par le Gouvernement.
Ainsi que vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, la réforme du lycée, les expérimentations menées pour lutter contre le décrochage accordent une large place à l'autonomie des établissements, à l'individualisation et à la différenciation des pratiques selon les besoins. C'est en effet au plus près du terrain, en plaçant chaque enfant au coeur du dispositif, que nous réduirons la fracture scolaire et que nous progresserons pour la réussite de chaque enfant. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Quelques mots, d'abord, pour rendre hommage aux députés de la majorité qui ont su, tout au long de la discussion générale, expliquer, détailler le pourquoi de la proposition de loi d'Éric Ciotti.
Xavier Bertrand a eu l'occasion, il y a plusieurs mois, de positionner l'Union pour un mouvement populaire sur ce sujet en indiquant, comme vient de le rappeler Philippe Goujon, qu'il s'agissait bien d'un dispositif gradué, proportionné, faisant appel à la responsabilité des familles et qui fait partie d'un plan global de lutte contre l'illettrisme. Il ne s'agit pas, mesdames, messieurs les socialistes et communistes, d'un dispositif isolé de lutte contre l'absentéisme.
Vous êtes un certain nombre à avoir rappelé l'importance du dialogue avec les parents. Or l'objet de cette proposition de loi est bien d'instaurer ce dialogue avec les familles, tout au long de la procédure, avec les CPE, les chefs d'établissement, au sein de l'établissement, entre les familles et l'inspecteur d'académie. Comme l'a très bien dit Richard Dell'Agnola, faisons confiance aux personnels de l'éducation nationale pour mener ce dialogue permanent à toutes les étapes de la procédure prévue par Éric Ciotti.
Vous avez été plusieurs à évoquer la question des élèves perturbateurs. Il est vrai que, si nous voulons réduire les risques d'absentéisme, il nous faut régler cette question non seulement pour ces élèves eux-mêmes qui, parce qu'ils sont dans une situation de détresse et perturbent les classes, peuvent être tentés de décrocher et de quitter l'école, mais aussi parce que leur comportement peut entraîner des difficultés dans les établissements scolaires et générer de l'absentéisme chez d'autres élèves.
Vous le savez, nous avons déjà mis en place certaines mesures dans ce domaine, des mesures éducatives, mesdames, messieurs les socialistes, notamment en envisageant des travaux d'intérêt collectif, la révision du système de sanctions suite aux travaux d'Alain Bauer plutôt qu'un dispositif faisant systématiquement la place à l'exclusion de ces élèves. Nous avons développé les classes relais et, à la rentrée, nous expérimenterons des établissements de réinsertion scolaire pour que des élèves très perturbateurs puissent trouver, pendant au moins une année, une place dans des établissements de petite taille où ils seraient pris en charge en vue d'une réinsertion dans le système scolaire classique.
S'agissant de l'apprentissage des fondamentaux et de la lutte contre l'illettrisme, je partage l'avis de M. Bodin : il est indispensable de maîtriser les fondamentaux pour limiter le risque de décrochage. C'est ce qui a guidé la réforme du primaire avec le retour aux fondamentaux, l'aide personnalisée, et c'est également, monsieur Françaix, ce qui a guidé les mesures que j'ai décidé de prendre en faveur de la lutte contre l'illettrisme. Je ne peux, à cet égard, vous laisser dire que l'on sacrifie l'école maternelle. Au contraire, j'ai fait de l'école maternelle la pierre angulaire de la lutte contre l'illettrisme…
…avec le renforcement de la découverte du vocabulaire, avec la création d'inspecteurs de l'éducation nationale spécialisés sur l'école maternelle. Il y a donc une vraie volonté de notre part de replacer celle-ci au coeur de notre système éducatif.
Enfin, je ne peux pas vous laisser dire que Éric Ciotti, Michèle Tabarot ou moi-même ne parlerions de l'école que de façon négative. Évoquer un nouveau pacte de carrière pour les enseignants, c'est parler de manière positive de l'école. Travailler en profondeur sur les rythmes scolaires, c'est parler de manière positive de l'école. Évoquer la réussite de chaque élève et mettre en place des internats d'excellence pour ceux qui rencontrent des difficultés dans leur environnement familial, c'est parler de manière positive de l'école. Passer d'un système d'orientation subi à un système d'orientation progressif, réversible et choisi, c'est parler de manière positive de l'école. Mettre en place une réforme du lycée qui a pour objectif un accompagnement personnalisé tenant compte de la différenciation et de la diversité des élèves, c'est parler de manière positive de l'école.
Enfin, j'ai entendu trop souvent, au cours de ces débats, l'idée que cette proposition de loi – et je me tourne vers son rapporteur et cosignataire, Éric Ciotti – serait liée à une tentative de récupération de tel ou tel électorat. Or, mesdames, messieurs de l'opposition, pour une fois écoutez un peu plus vos électeurs ! J'observe que 65 % des Français sont favorables à cette proposition de loi…
…et que 53 % des électeurs du parti socialiste y sont favorables. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Arrêtez ! Évidemment que les Français sont contre l'absentéisme scolaire!
Je continue : 53 % des électeurs du parti communiste sont favorables à cette proposition de loi.
Vous sembliez dire qu'il y aurait une différenciation de classe sur la question de l'absentéisme scolaire. Eh bien, j'observe que 67 % des ouvriers sont favorables à cette proposition de loi et que 60 % d'entre eux considèrent qu'elle sera efficace pour lutter contre l'absentéisme scolaire. Vous n'avez pas été convaincus, mais j'observe que vos sympathisants, vos électeurs, eux, le sont ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Yves Durand. Nous verrons dans deux ans !
Je veux répondre brièvement à M. Calméjane qui m'a interpellée sur un dispositif complémentaire concernant les allocations de rentrée scolaire versées au mois d'août à 3,8 millions de familles et concernant 4,8 millions d'enfants. Si j'ai bien compris, monsieur Calméjane, vous proposez que ces allocations soient versées en deux fois : la première partie au mois d'août, la seconde lorsque les enfants seront entrés à l'école.
Ce dispositif, je vous le rappelle, est d'un montant global de 1,4 milliard d'euros et, de prime abord, je vois plusieurs objections à votre proposition qui mérite d'être expertisée sur le fond en termes de coût et de financement.
D'abord, se poserait un problème de lourdeur s'agissant des versements qui seraient séparés en deux. En effet, pour une famille ayant plusieurs enfants nous devrions calculer ceux qui sont véritablement absents à la rentrée et vous imaginez comme il serait compliqué de le faire en deux étapes.
Ensuite, un tel dispositif pénaliserait les familles qui font leurs courses scolaires dès le mois d'août pour être prêtes à la rentrée scolaire.
Enfin, la rentrée s'effectuant outre-mer plus tôt qu'en métropole, cela créerait une complexification supplémentaire.
J'ajoute que, à mon avis, ce dispositif coûterait cher, mais je m'engage à vous en fournir le chiffrage.
Je remercie également les orateurs.
M. Grosperrin a souligné l'importance de l'équilibre de cette proposition de loi portée par Éric Ciotti en rappelant le budget des REAAP ; à cet égard je m'inscris en faux contre les propos de Martine Faure selon lesquels on voudrait rendre les parents « coupables » ; elle a prononcé ce mot plusieurs fois. Ce que nous souhaitons au Gouvernement et avec cette majorité parlementaire, c'est que les parents soient responsables et accompagnés. Tel est l'objet de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 17 juin, à neuf heures trente :
Proposition de loi visant à étendre la modernisation du dialogue social aux propositions de loi ;
Proposition de résolution tendant à réviser le règlement de l'Assemblée nationale ;
Proposition de loi sur l'accès des travailleurs étrangers à l'exercice de certaines professions ;
Proposition de loi tendant à suspendre la commercialisation de biberons à base de Bisphénol A.
La séance est levée.
(La séance est levée, le jeudi 17 juin 2010, à une heure quinze.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma