La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'Afghanistan a connu hier l'attentat le plus meurtrier de son histoire. Six députés afghans font partie des nombreuses victimes de cette attaque terroriste.
Je suis sûr d'être l'interprète de la représentation nationale unanime en disant sa très vive émotion.
En hommage à la mémoire de nos collègues afghans et de toutes les victimes, je vous invite à observer quelques instants de silence. (Mmes et MM. les députés, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et observent une minute de silence.)
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Dans son édition datée d'aujourd'hui, un grand journal du soir a consacré un cahier spécial au handicap et notamment à l'insertion professionnelle des personnes handicapées, dont il fait à juste titre un révélateur du degré d'humanité d'une société. Monsieur le secrétaire d'État, vous vous êtes engagé récemment à favoriser l'embauche de ces personnes dans la fonction publique. Quelles sont les initiatives prises par le Gouvernement en ce domaine ?
Je suis sûr de me faire l'interprète de nombreux collègues, sur tous ces bancs, en souhaitant que l'on réserve aux personnes handicapées toute la place qu'ils méritent dans notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Monsieur Hunault, je connais votre attachement à ce dossier et je vous remercie de votre question.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Allô !
Si la loi prescrit aux employeurs, publics comme privés, d'intégrer au moins 6 % de personnes handicapées dans leurs effectifs, ce chiffre n'est encore que de 4,5 %. L'État, premier employeur public de France, doit se montrer exemplaire. C'est pourquoi le Gouvernement, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, a décidé de mettre en oeuvre une véritable politique d'emploi et d'insertion en faveur des personnes handicapées.
Les mesures présentées en conseil des ministres le 17 octobre traduisent cette volonté très forte. Chacun des membres du Gouvernement devra s'engager personnellement en mobilisant les administrations et les établissements publics placés sous son autorité ou sa tutelle, et présenter au Premier ministre, avant la fin de l'année, un plan pluriannuel d'action permettant d'atteindre cet objectif de 6 % dans la fonction publique de l'État. Ces plans comporteront des objectifs chiffrés de recrutement et la progression suivie jusqu'au 31 décembre 2012. Le recrutement devra progresser d'au moins 25 % dès 2008. Les possibilités de recrutement sans concours offertes par la loi devront être pleinement utilisées.
Les administrations sont invitées à conclure des partenariats avec le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP, auquel elles sont tenues de verser une contribution depuis 2006. Nous avons pris l'initiative d'en renouveler la gouvernance : un nouveau directeur a pris ses fonctions, et de nouveaux membres ont été nommés au comité national, qui a choisi ce matin même pour président un représentant de la fonction publique d'État.
Les plans d'action feront l'objet d'un suivi annuel, et leurs résultats discutés dans le cadre des conférences annuelles de gestion prévisionnelles des ressources humaines.
Comme vous pouvez le constater, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement prend toutes ses responsabilités et se donne les moyens d'une politique forte de recrutement et d'insertion des personnes handicapées.
Je vous annonce que, le 28 novembre prochain, des représentants du CNFPT et du FPHFP signeront en ma présence et celle de Valérie Létard une convention dont le contenu concernera l'ensemble de la fonction publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Dans le cas contraire, la dernière des douze questions ne sera pas retransmise à la télévision.
La parole est à M. François Vannson, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, …
…ma question concerne les régimes spéciaux, dont la réforme est indispensable à la pérennité de notre système de retraite. (Murmures sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Depuis le 19 septembre, vous dialoguez avec les partenaires sociaux afin de mener à bien cette réforme soutenue par la majorité et attendue par les Français.
Hier soir, vous avez fait d'ultimes propositions aux organisations syndicales et aux entreprises publiques.
Je souhaiterais tout d'abord, monsieur le ministre, que vous donniez des précisions à la représentation nationale sur le contenu de ces propositions et sur le contexte dans lequel se sont déroulés les différents entretiens. Pouvez-vous nous assurer que les principes fondamentaux de la réforme ne seront pas remis en cause ? Enfin, quel en sera le calendrier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
Hier, après avoir rencontré à plusieurs reprises nombre d'organisations syndicales et écouté leurs propositions, j'ai apporté des réponses complémentaires concernant la réforme des régimes spéciaux. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Comme l'ont souhaité le Président de la République et le Premier ministre, nous avons ainsi voulu prendre en compte les inquiétudes de certains agents, qui craignent de voir leur pouvoir d'achat diminuer.
Inquiétudes légitimes ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous avons ainsi proposé d'aménager les modalités d'application de la décote afin qu'un agent qui ferait deux années et demi de plus ne perde pas un euro. C'est une question de respect, et nous assurons ainsi la garantie du pouvoir d'achat.
Les négociations avec les entreprises publiques concernées doivent aller à leur terme. Leurs dirigeants, que je rencontrerai demain, se verront imposer une obligation de résultat. Mais que les choses soient claires : ces négociations ne pourront conduire à annuler le passage à quarante années de cotisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Là aussi, c'est une question de respect.
En revanche, nous sommes disposés à prendre en compte la spécificité des métiers concernés. La question de la pénibilité, que nous voulons placer au coeur de la réforme de 2008, devra notamment être abordée.
J'ai beaucoup reçu, beaucoup écouté et entendu ce qui m'a été dit. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Les ultimes propositions du Gouvernement vont permettre aux organisations syndicales de reprendre la négociation. Mais chacun doit prendre ses responsabilités et y mettre du sien. Nous sommes déterminés à accomplir cette réforme, à appliquer le passage aux quarante annuités, à faire respecter le principe d'une décote, sans quoi l'allongement de la durée de cotisation n'aurait pas de sens, à indexer les pensions sur les prix, afin d'être au rendez-vous de la justice sociale ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Le message est clair : dans la France de 2007, il y a plus à gagner avec la négociation qu'avec le conflit.
Nombreuses sont les organisations qui l'ont compris. Et les Français attendent des solutions pour réformer le pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à Mme Annick Le Loch, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la pêche, de l'agriculture et de la forêt. J'insiste bien sur l'ordre des mots car on parle trop peu de la mer, du littoral, des activités maritimes et des hommes qui les font vivre. Notre pays n'a pas de politique maritime ambitieuse !
Le Président de la République a fait hier un déplacement très médiatique au Guilvinec et, ce matin, vous avez reçu les pêcheurs. Mais les annonces faites à cette occasion ne suffisent pas à dissiper l'inquiétude et la grogne. Dans les ports bretons domine le sentiment qu'elles ne sont que de la poudre aux yeux et ne répondent pas aux vrais enjeux d'avenir. Il ne faudrait pas que tout cela tourne au jeu de dupes.
En vérité, monsieur le ministre, la filière pêche ne fait l'objet d'aucune vision structurante. Hier, devant la représentation nationale, vous avez présenté trois mesures : exonération des charges patronales et salariales pendant six mois, mécanisme – à imaginer – destiné à répercuter le prix du gazole sur celui du poisson, plan de modernisation de la flottille. Aucune mesure d'avenir !
L'exonération des charges et le plan de modernisation des bateaux sont des idées anciennes et se heurtent aux règles européennes. Le Président de la République a beaucoup promis, mais nous vous avons senti plus réservé.
Quant au mécanisme que le Président de la République vous a chargé d'« imaginer » – en seulement trois mois – afin d'intégrer le coût du gazole dans le prix du poisson, vous avez déclaré ce matin même qu'il ne devrait pas pénaliser le consommateur et être établi en concertation avec la Commission européenne. De quoi s'agira-t-il : vignettes, contributions, TVA sociale ? Le consommateur modeste va-t-il encore régler la facture ?
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
Le poisson va-t-il devenir définitivement un produit de luxe ? Où est la cohérence entre vos propos sur le pouvoir d'achat et votre action ? Allez-vous répondre à chaque profession au coup par coup, sans aucune cohérence globale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Madame Le Loch, vous étiez hier au côté du Président de la République (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)… Je veux dire que vous étiez présente sur place, et que vous avez donc pu assister à un dialogue sincère et direct. C'est pourquoi j'aurais attendu de vous une analyse plus constructive et plus objective. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Ce dialogue, nous l'avons poursuivi ce matin avec l'ensemble des professionnels de la pêche. Nous avons beaucoup travaillé à l'application rapide des mesures annoncées au Guilvinec par le Président de la République. Certaines ont un effet immédiat, comme l'exonération des charges sociales salariales et patronales, destinée à accompagner les entreprises de pêche, à soulager les marins-pêcheurs et à soutenir leur pouvoir d'achat.
C'est une première mesure concrète : prenez-en acte, madame la députée.
Mais nous allons continuer à travailler vite et bien. Dans les trois mois, nous instaurerons un mécanisme de compensation du surcoût du gazole au-delà de trente centimes le litre, en concertation avec les pêcheurs et les ministères concernés, pour que le système soit, cette fois, conforme à la réglementation européenne.
Notre objectif, madame Le Loch, donnez-m'en acte, est d'aider à la viabilité des bateaux sans pénaliser les consommateurs.
Pour répondre à votre question, outre ces deux mesures de court terme, rapides, nous allons travailler sur deux autres chantiers que j'ai ouverts ce matin : celui de la modernisation de la flottille pour consommer moins et mieux et celui, que vous n'avez pas cité, madame Le Loch, des salaires des marins-pêcheurs pour leur garantir un revenu minimum. Après la réunion de travail de ce matin, après la visite du Chef de l'État, dans le cadre du travail, que nous conduisons sous l'autorité du Premier ministre,…
…il me semble franchement, madame Le Loch, que les conditions de la confiance et du travail en commun ont été rétablies. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Pierre Gosnat, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre et j'attends qu'il y réponde personnellement. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il ne dit jamais rien, il est temps qu'il s'exprime ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) D'autant que le sujet que je vais aborder implique les plus hauts responsables de l'État. (Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.)
Nous examinons, depuis quelques semaines, le projet de loi de finances pour 2008. Or un texte contenu dans la première partie du PLF vous a échappé. Pourtant, celui-ci se trouve sur la page de garde. Je vais faire appel à mon ami André Chassaigne. (M. André Chassaigne brandit la page de garde du document et l'éclaire avec une lampe à ultraviolets.) Sur la page de garde de ce document, figure une précision que vous n'avez pas pu voir, chers collègues, car sa lecture nécessite une lampe à ultraviolets ! (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Lorsque vous balayez la page avec cette lampe, vous pouvez y lire « Notre dernier budget ». (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En définitive, les ouvriers de l'Imprimerie nationale n'ont eu d'autre recours que ce stratagème (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour dénoncer la succession de plans sociaux (Protestations sur les mêmes bancs),…
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est de la comédie !
…ainsi que la gestion désastreuse du patrimoine immobilier de l'entreprise ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous décompterez ces interruptions de mon temps de parole, monsieur le président ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La vente du site historique parisien de l'Imprimerie nationale (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)…
…constitue un réel scandale politico-financier ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Attendez, monsieur le président ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ainsi, 30 000 mètres carrés – surface rarissime à Paris – ont été vendus en 2003 (Vives protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)…
…au Fonds d'investissement américain Carlyle, dont Bush « père » est actionnaire, pour la somme de 85 millions d'euros (Protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), puis rachetés en 2007 par l'État pour 376 millions d'euros (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),…
Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Eh oui !
…soit une plus-value de 291 millions d'euros ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce n'est pas, monsieur Fillon – et c'est la raison pour laquelle je m'adresse à vous –, la faillite pour tout le monde ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Posez votre question, monsieur Gosnat ! Je vais être obligé de vous retirer la parole !
Un rapport confidentiel révèle que vous avez, de plus, versé 196 millions à l'Imprimerie nationale ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Comment pouvez-vous justifier ce prêt devant les contribuables (À cet instant, M. Maxime Gremetz quitte son banc et présente le document éclairé par la lampe à ultraviolets à M. le ministre du budget, entraînant de très vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), alors qu'un fonds de pension américain, là où se trouve M. le Président de la République (Très vives protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),…
Posez votre question, monsieur Gosnat. Sinon, je vous coupe la parole !
…a réalisé une plus-value de 200 millions ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Acceptez-vous la constitution d'une commission d'enquête parlementaire ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mes chers collègues, je tiens à vous rappeler que le dernier orateur est membre du groupe socialiste. (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Si vous voulez qu'il puisse s'exprimer, vous devez respecter votre temps de parole !
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le député Pierre Gosnat, il n'y a aucun scandale dans le fait de céder l'usine de Choisy à laquelle vous faites référence. (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Vous savez que cette société, qui dépend de l'Imprimerie nationale, a connu des difficultés et qu'il était donc nécessaire d'adosser son activité à un imprimeur privé. C'était, en réalité, la seule chance de préserver et de développer son activité dans la durée. Ce fut le choix de l'Imprimerie nationale, mais je puis vous assurer que l'État, en tant qu'actionnaire de l'Imprimerie nationale, est très vigilant sur ce dossier. L'ensemble du personnel sera évidemment accompagné dans cette démarche ambitieuse et protectrice des intérêts sociaux, tant de l'entreprise que des salariés et des collectivités locales. Je suis, en effet, attentif, comme les autres membres du Gouvernement, à garantir l'emploi dans tous les territoires. Une procédure d'information a été menée avec l'ensemble des personnels et toutes les consultations ont eu lieu.
Donnons-nous donc rendez-vous, monsieur le député, si vous le voulez, dans quelques mois pour suivre les résultats de cette opération, qui était nécessaire pour sauvegarder les intérêts de cette entreprise. (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Vous avez aussi évoqué la vente du siège de l'Imprimerie nationale de la rue de la Convention. Vous demandez la constitution d'une commission d'enquête.
Ce bâtiment, qui était une usine, a été vendu en 2003 à un prix acté par le conseil d'administration de l'Imprimerie nationale, et non par le gouvernement de l'époque. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Il a, c'est vrai, été racheté quatre ans plus tard en vue de procéder au regroupement de l'immobilier du ministère des affaires étrangères, dont les implantations parisiennes sont passées de neuf à deux. Cette opération est positive pour les finances publiques. (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Je tiens, enfin, à vous dire, puisque vous semblez jeter un voile de suspicion sur ce point…
Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Oui !
…que j'ai mandaté l'Inspection générale des finances sur ce sujet,…
… laquelle a conclu, dans son rapport, à une parfaite transparence de ce dossier. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Je le tiens à votre disposition. Document pour document, mais sans lumière violette (M. le ministre du budget montre la lettre),…
… voici la lettre que j'ai adressée au président de la commission des finances le 5 octobre pour lui préciser que ce rapport était à sa disposition. Il l'est, bien entendu, à celle de l'ensemble de la représentation nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à le M. Bruno Le Maire, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.
Madame la ministre, depuis plusieurs années, la France est confrontée à des crises sanitaires de grande ampleur, qu'il s'agisse du chikungunya à la Réunion, de la fièvre catarrhale ou de la grippe aviaire en métropole. Ces crises sanitaires soulèvent de réelles interrogations parmi la population française et représentent des enjeux économiques et touristiques importants. Depuis plusieurs années, la France a su y faire face, notamment en mettant en place de nouvelles agences sanitaires et en se dotant de moyens d'expertise qui comptent aujourd'hui parmi les meilleurs en Europe et dans le monde. Ainsi, la loi du 5 mars 2007, a créé un nouvel établissement public de réponse aux urgences sanitaires.
Nous devons maintenant progresser dans trois directions. D'abord, il convient de mieux coordonner les différentes agences sanitaires pour assurer une réponse la plus efficace et aussi économe que possible des deniers publics. Ensuite, il est nécessaire de créer de nouveaux instruments à l'échelon déconcentré pour assurer sur tout le territoire et pour tous les Français une sécurité sanitaire la meilleure qui soit – c'est une question de santé de publique et de justice sociale. Enfin, il y a lieu de mieux coordonner l'action au niveau européen, ces menaces se situant par nature à l'échelle internationale.
Quelles mesures comptez-vous prendre, madame la ministre, pour avancer dans cette direction et renforcer la sécurité sanitaire de tous nos concitoyens, à laquelle je vous sais profondément attachée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le député Bruno Le Maire, vous avez raison de dire que la veille sanitaire mérite une gouvernance totale sur le plan national, européen et international. Dans ce cadre, nous avons pris plusieurs dispositions. Nous avons veillé à améliorer l'information en créant le Centre opérationnel de régulation de l'urgence sanitaire et sociale, lequel permet une remontée vers un niveau unifié de gouvernance et empêche ainsi toute fuite de l'information. J'ai installé, au cours de l'été, l'établissement public dédié à l'urgence sanitaire, qui a deux missions : détecter les personnes ressources pour constituer une réserve sanitaire. Nous l'avons d'ailleurs immédiatement utilisée en envoyant un renfort de dix-huit personnes à la Martinique. Enfin, nous avons constitué les stocks de matériels et de médicaments – vaccins, médicaments classiques – pour affronter une éventuelle crise sanitaire. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les crédits de veille sanitaire ont été augmentés dans notre budget de 50 %, pour atteindre cette année 164 millions d'euros.
Vous avez très bien fixé les enjeux internationaux. À la fin de la semaine dernière, je me trouvais à Washington (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) à la réunion « G7 plus Mexique », car cette coopération doit être internationale, en particulier dans le domaine de la recherche. Il doit y avoir aussi une interaction européenne. J'ai donc proposé que la veille sanitaire constitue l'un des axes forts de la présidence française. Enfin, il nous faut vérifier l'effectivité et l'opérationnalité des mesures. À cet effet, je présiderai à Bordeaux un exercice zonal de coordination hospitalière et un exercice national sera organisé mi-décembre. Comme vous le voyez, l'implication du Gouvernement est donc totale concernant la veille sanitaire et dans la prévention des nouvelles pandémies et des risques émergents. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Yves Bur, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
La relation franco-allemande, fondée sur le respect, l'amitié, la compréhension et l'intérêt partagé. est plus que jamais nécessaire. Je le perçois au quotidien, non seulement en tant qu'élu d'Alsace, région qui entretient des liens très étroits avec l'Allemagne, mais également en ma qualité de membre du conseil d'administration de l'Office franco-allemand pour la jeunesse, qui oeuvre activement au rapprochement des jeunes de nos deux pays.
Sous l'impulsion du Président de la République, le récent Conseil européen a mis fin à la crise institutionnelle de l'Union européenne qui a affecté les États membres pendant près de quinze ans. Nous pouvons ainsi former le voeu que l'Union européenne à vingt-sept pourra désormais mieux fonctionner. Dans ce contexte, il est légitime de s'interroger sur le sens que peut encore revêtir la coopération franco-allemande au coeur du projet européen. La France et l'Allemagne peuvent-elle encore prétendre à jouer un rôle moteur dans une Union européenne désormais composée de vingt-sept États membres ? Monsieur le secrétaire d'État, cette coopération ne risque-t-elle pas d'apparaître à certain de nos partenaires comme trop exclusive ? Enfin, quel rôle les structures franco-allemandes jouent-elles encore ? Cette coopération est-elle suffisante pour aplanir les divergences que la France et l'Allemagne peuvent parfois connaître dans certaines négociations européennes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
Monsieur le député Yves Bur, je vous remercie de me donner l'occasion de faire le point sur les relations entre nos deux pays, à cinq jours de la réunion du conseil des ministres franco-allemand.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Allô !
Comme vous l'avez précisé, monsieur Bur, la réconciliation franco-allemande est à l'origine de la construction européenne. Or, dans le cadre d'une Europe à vingt-sept, notre relation doit s'adapter en s'ouvrant et en se mettant au service de tous les États membres. Le meilleur exemple en est la réalisation du nouveau traité, lequel repose sur une initiative du Président de la République et de la Chancelière. Mme Merkel a voulu orienter les travaux de la présidence allemande de l'Union européenne sur un traité réformateur, simplifié et dépourvu d'attributs constitutionnels. Le rôle déterminant joué par la France et l'Allemagne, lors du conseil européen de juin dernier, sous la présidence portugaise, montre bien que nous allons dans ce sens et que la coopération franco-allemande continue de jouer un rôle déterminant dans le cadre de la construction européenne. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Des adaptations sont toutefois nécessaires. Nous devons d'abord moderniser le fonctionnement du conseil des ministres franco-allemand. Nous prévoyons des visites sur le terrain des différents ministres et des thèmes spécifiques de discussion. L'intégration sera ainsi au coeur du prochain conseil franco-allemand. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. N'importe quoi !
Pas du tout ! Nous pourrons échanger des expériences et avoir des initiatives communes. Il y aura une réunion avec les partenaires sociaux, pour trouver de meilleurs moyens de lutter contre les discriminations (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine),…
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Ça rame !
…ou d'améliorer l'intégration des délinquants mineurs, et prendre des initiatives d'insertion active chère à Martin Hirsch. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Nous pourrons les confronter avec nos partenaires allemands. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous devons également revoir les différentes structures franco-allemandes pour les adapter et les moderniser. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Enfin, mesdames, messieurs, je veux vous faire part de trois convictions. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) La première, c'est que la France et l'Allemagne partagent la même ambition industrielle. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La deuxième, c'est que ces pays partagent la même volonté de défendre leurs entreprises et leurs salariés à travers une régulation financière plus efficace. (Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur le secrétaire d'État, je vais être obligé de vous retirer la parole.
La troisième, c'est qu'ils ont la même ambition européenne, la même volonté de réforme. C'est cela aussi servir l'Europe à vingt-sept. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Brouhaha sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à le M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
« La situation du logement en France est catastrophique », avez-vous déclaré, madame la ministre du logement. Vous avez même jugé nécessaire de pousser un cri d'alarme hier matin sur une radio nationale. En fait, elle est pire que vous ne le reconnaissez : c'est un scandale d'État. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
On compte 1,6 million de demandeurs de logements, 3,2 millions de mal logés vivant dans des logements insalubres, des campings, des hôtels, des structures d'hébergement et d'insertion qu'ils voudraient quitter, 6 millions de personnes en situation de fragilité – hébergement chez des tiers, surpeuplement, précarité pour impayés.
Le prix des loyers augmente de façon considérable, 5 % par an en moyenne, et c'est aggravé par l'augmentation des charges locatives due au coût de l'énergie. Le pouvoir d'achat, pourtant priorité du Gouvernement, ce n'est pas pour les locataires, pas plus que l'accession sociale, qui, elle-même, est dénaturée, parce que de moins en moins sociale.
Des crises à répétition font s'aligner, ces dernières années, des rangées de tentes dans les rues. C'est le constat le plus pitoyable de l'échec de l'État (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) que constitue le mal logement, symbole de son inefficacité, qui l'oblige à des solutions improvisées, dans la précipitation, après quelques postures inutiles. (Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Pourquoi opposer les mal logés silencieux et ceux qui osent exprimer leur révolte, y compris dans la rue, et disent que vivre avec des enfants pendant quatre ans dans une chambre d'hôtel louée à un prix exorbitant, sans autonomie, alors qu'on est demandeur de logement social et capable de payer un loyer, c'est un scandale ? (Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Le Gouvernement dont vous êtes membre est comptable de l'aggravation de la situation en moins de six mois. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La brusque accélération des expulsions juste avant la trêve hivernale, est-ce sérieux lorsque l'on sait que les ménages expulsés constituent l'une des catégories prioritaires de la loi sur le droit au logement opposable, qui va s'appliquer dans quelques semaines ? (Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Madame la ministre, à situations de crise, solutions efficaces.
Acceptez-vous d'augmenter la part de logements très sociaux dans le budget pour 2008 ? C'est possible en supprimant l'avantage fiscal Robien (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), dont le financement représente un quart de l'effort public alors qu'il laisse des logements libres non occupés ? (Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Acceptez-vous d'augmenter l'aide au logement pour améliorer immédiatement le pouvoir d'achat des locataires et éviter des remises à la rue pour impayés ? (Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Enfin, pour favoriser le relogement immédiat des personnes hébergées dans des hôtels, acceptez-vous de participer au financement de dispositifs tels que celui de la ville de Paris « Louez solidaire et sans risque » mené, en partenariat avec les associations, en direction des propriétaires du parc privé ? (Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
En quelque sorte, madame la ministre, acceptez-vous de sortir de la stratégie d'affichage pour enfin entrer dans la mise en oeuvre du droit au logement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine – Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le député, je souhaiterais un peu de calme. La crise du logement est réelle dans notre pays, vous avez raison, et elle a naturellement des conséquences sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens. Elle est due à un manque d'offres de logement. Depuis vingt ans, il y a un retard colossal dans la construction de logements.
C'est la raison pour laquelle le Premier ministre et le Président de la République m'ont donné des objectifs clairs : construction de 500 000 logements nouveaux par an, 120 000 logements sociaux, 70 % de propriétaires et vente de 40 000 logements HLM.
En 2007, d'ores et déjà, les constructions atteindront un niveau qui n'a jamais été atteint depuis trente ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Dès mon arrivée au ministère, j'ai rassemblé l'ensemble des acteurs majeurs du logement, le parc privé, le parc public, les propriétaires, les locataires, les financeurs. La décentralisation de mon ministère à Lyon pendant quinze jours a permis de signer un certain nombre de conventions, dont celle que vous avez appelée de vos voeux.
Il ne s'agit pas, mesdames, messieurs, de nous opposer les uns aux autres, mais, au contraire, de travailler tous ensemble pour résoudre cette véritable difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Le budget pour 2008 est un bon budget. Il est à 8 milliards d'euros. Il répond à tous les objectifs de la loi de cohésion sociale, renforcée par la loi DALO. Je vous rappelle que la loi sur le droit au logement opposable appartient au patrimoine politique de la France, car elle a été votée à l'unanimité sur ces bancs. Elle nous engage donc tous.
En ce qui concerne plus particulièrement le pouvoir d'achat, la loi DALO a prévu l'indexation automatique de l'APL sur le nouvel indice des loyers.
La nouvelle garantie pour les propriétaires privés d'avoir des loyers payés permettra de remettre 100 000 logements sur le marché en 2008.
En ce qui concerne l'avantage fiscal Robien, je réfléchis à la poursuite de son application, monsieur Le Bouillonnec.
Nous devons tous travailler ensemble, ne pas nous opposer, car il s'agit d'une véritable cause nationale. Il est inadmissible qu'en France, des hommes, des femmes et des enfants ne puissent pas être logés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à Mme Gabrielle Louis-Carabin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'agriculture, deux ans après la réforme de l'OCM sucre, l'incertitude plane de nouveau sur l'avenir de la filière canne-sucre de la Guadeloupe. Les acquis du protocole sucre sont en effet remis en cause dans les négociations en cours entre la Commission européenne et les pays ACP sur les accords de partenariat économique.
Alors qu'était prévue l'intégration de ce protocole aux accords de partenariat, le commissaire européen au commerce, M. Mandelson, a annoncé le démantèlement dès 2009 du dispositif. Je vous rappelle que ce mécanisme préserve nos marchés locaux de toute concurrence des sucres des pays ACP et des pays moins avancés.
Si le démantèlement annoncé se mettait en place, la filière canne-sucre de la Guadeloupe serait exposée à une concurrence frontale, du seul fait de sa proximité avec certains pays ACP. Nos marchés du sucre leur seraient ouverts. De plus, la disparition du protocole sucre s'accompagnerait d'une baisse trop forte des prix. La répercussion serait immédiate sur les prix des sucres de canne des départements d'outre-mer.
Aujourd'hui, la profession canne-sucre de la Guadeloupe s'inquiète de la volonté de la Commission européenne de conforter les filières de diversification et de mettre en place une période de transition significative de deux fois dix ans.
Monsieur le ministre, la suppression des accords préférentiels menace l'avenir d'un secteur pourvoyeur d'emplois dans une région dont l'équilibre économique et social est déjà bien fragile. Il est par conséquent vital que l'enjeu du développement de la production du sucre de canne des départements d'outre-mer soit encore et toujours au coeur des préoccupations nationales, européennes et internationales.
Aussi, pouvez-vous rassurer la profession canne-sucre en indiquant les mesures que vous comptez mettre en oeuvre afin que les accords de partenariat économique ne se concluent pas au détriment du sucre guadeloupéen ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Comme vous l'avez dit, madame la députée, des négociations sont en cours entre la Commission européenne, dont c'est le rôle, et les six grandes régions qualifiées de l'Afrique, de la Caraïbe et du Pacifique. Elles ont pour objectif de mettre l'ensemble de nos échanges avec ces pays en conformité avec le droit de l'OMC.
Dans le cadre de cette négociation, une majorité d'États membres ont récemment approuvé la proposition de la Commission d'ouvrir le marché européen du sucre aux pays ACP après 2012.
La France a obtenu deux garanties pour sa filière sucrière, pas seulement pour le sucre des départements d'outre-mer, mais aussi pour celui de la métropole.
Première garantie, un prix minimum d'achat du sucre de l'Afrique, de la Caraïbe et du Pacifique jusqu'en 2012 et, après 2015, des mesures de sauvegarde pour protéger le marché communautaire.
Pour les départements d'outre-mer, j'ai obtenu en plus, en concertation avec Mme Alliot-Marie et M. Estrosi, une clause d'exclusion qui empêche pratiquement l'arrivée du sucre de ces pays d'Afrique, de Caraïbe et du Pacifique en franchise de droits pour envahir en quelque sorte le marché local de nos quatre départements d'outre-mer. Cette clause est prévue pour deux fois dix ans. Nous essayons d'obtenir qu'elle dure le plus longtemps possible. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Christian Vanneste, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, ma question porte sur les fraudes.
Le coût officiel des fraudes est de 374 millions d'euros. Le Conseil des prélèvements obligatoires l'évalue beaucoup plus justement dans une fourchette comprise entre 19 et 23 milliards pour les fraudes sociales et jusqu'à 40 milliards si l'on inclut les fraudes fiscales. Pour l'INSEE, elles représentent 3 % du PIB. Pour l'OCDE et le Conseil européen, 12 ou 14 %.
La liste de ces fraudes est un inventaire à la Prévert.
Il y a cette personne qui va déposer 130 déclarations de revenus pour obtenir 130 primes à l'emploi. Il y a ces faux quintuplés déclarés à dix-sept caisses d'allocations familiales différentes. Il y a ce médecin qui distribue en une seule année cent quarante années d'arrêts de travail.
Aujourd'hui, on publie même des livres recensant les moyens de profiter au maximum …
… en abusant de la bonne volonté des personnels des organismes sociaux, qui ne passent évidemment pas leur temps à pourchasser les fraudeurs.
C'est la raison pour laquelle le Président de la République, Nicolas Sarkozy,…
… pour les excès de quelques-uns, individus ou entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
C'est la raison pour laquelle il a demandé au Gouvernement …
… de mettre en place un plan de mesures fortement dissuasives.
Je voudrais savoir, monsieur le ministre, quel bilan vous tirez de la réunion, le 30 octobre, du Comité national de lutte contre la fraude : quelles mesures comptez-vous mettre en place dans le cadre de cette stratégie ?
C'est un combat qui vise, non seulement le rétablissement des comptes, mais aussi et surtout le rétablissement des valeurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.– Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
La lutte contre toutes les fraudes, qu'elles soient fiscales ou sociales, est une priorité du Gouvernement, …
…dont j'imagine qu'elle fait consensus sur l'ensemble des bancs de cette assemblée. C'est une question économique ; c'est aussi une question morale, vous l'avez beaucoup dit.
La fraude est par nature difficile à chiffrer. Nous estimons cependant que le coût de la fraude aux prélèvements est d'environ trente milliards d'euros. Il s'agit donc de sommes considérables. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
L'affaire de l'Imprimerie nationale, ça a coûté combien aux contribuables ?
La prime à l'incompétence de Forgeard, elle a coûté combien aux contribuables ?
Ce coût est surtout celui du travail au noir et de la fraude à la TVA.
Le Premier ministre et le Président de la République m'ayant confié la mission de coordonner la lutte contre la fraude sur le plan fiscal et social, j'ai réuni il y a quelques jours, avec Roselyne Bachelot et Xavier Bertrand, le Comité national de lutte contre les fraudes, dont le rôle est appelé à se développer.
Déjà certaines de ses conclusions se sont traduites en mesures proposées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il s'agit d'utiliser tous les leviers : échanges d'informations, coordination entre les services, aggravation des sanctions.
Nous nous attaquerons aussi à la grande fraude, c'est-à-dire la délinquance financière (« Chiche ! » sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), par l'institution d'un « flagrant délit fiscal ». Celui-ci permettra notamment de sanctionner la création d'entreprises fictives dans le but de tromper l'État, le fisc et donc le contribuable.
Nous réfléchissons également à la possibilité de sanctionner les carrousels de TVA, qui coûtent très cher aujourd'hui à l'État, et de créer un « Eurofisc » sur le modèle d'Europol. La présidence française de l'Union européenne sera l'occasion de reparler d'une telle initiative.
Vous savez que le PLFSS comporte des mesures très fortes, telles que le contrôle de l'aide médicale d'État, …
…la faculté pour les contrôleurs des organismes sociaux de bénéficier des mêmes moyens que les agents du fisc, ou l'introduction d'une peine plancher contre le travail au noir.
Vous voyez, monsieur le député, que le Gouvernement luttera très activement et très fermement contre la fraude. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. Hervé Féron, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à vous, monsieur le Premier ministre, et j'espère que cette fois, puisqu'au fond vous êtes le chef du Gouvernement, …
C'est ça la rupture : le Premier ministre ne répond plus à l'Assemblée !
Je veux tout d'abord déplorer ici la trop faible revalorisation des allocations familiales, puisqu'il est prévu de les augmenter de 1 % en 2008, soit, pour une famille de deux enfants, un euro supplémentaire par mois : une aumône.
Mais ce que les Français doivent surtout savoir, c'est que votre projet de majorer les allocations familiales pour les enfants de quatorze ans vous permet de supprimer de manière subreptice les majorations auxquelles ouvraient droit jusque-là les enfants atteignant l'âge de onze ans et l'âge de seize ans.
Ces atteintes au pouvoir d'achat des familles passent quasiment inaperçues parce que vous réformez à la sauvette. Il faut que les Françaises et les Français le sachent : cette décision aura pour conséquence de faire baisser dès 2008 les allocations familiales de quatre-vingt millions d'euros par an. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Chaque famille perdra ainsi 360 euros sur l'ensemble du parcours de l'enfant. Voilà la réalité de cette nouvelle disposition.
C'est un nouveau coup dur pour le pouvoir d'achat des familles, déjà durement touchées par la hausse des loyers, des prix des produits de première nécessité, du carburant, du fioul domestique, de l'énergie – chauffage et électricité. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Et vous savez qu'elles le seront encore plus par votre nouvel impôt sur la maladie, que vous appelez « franchise médicale ».
Ma question, monsieur le Premier ministre, appelle une réponse claire : comptez-vous maintenir cette revalorisation beaucoup trop faible des allocations familiales pour 2008 ? Comptez-vous surtout revenir sur cette décision scandaleuse de réduire de 80 millions d'euros les allocations familiales dès le 1er janvier prochain ?
La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
Dois-je rappeler, monsieur le député, qu'en tant que rapporteur pour la branche famille du projet de loi de financement de sécurité sociale, vous devez normalement dire la vérité, et toute la vérité, sur ce sujet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Et la vérité, c'est que la majoration unique des allocations familiales ne changera rien pour les familles qui touchent aujourd'hui cette allocation à partir des onze ans de leur enfant. Vous le savez, et le devoir de vérité vous imposait de le dire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Cette majoration unique permettra aux familles de toucher dès les quatorze ans de l'enfant ce qu'elles ne touchaient auparavant qu'une fois qu'il atteignait l'âge de seize ans. C'est une avancée sociale : voilà la vérité que vous auriez pu dire également. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous évoquez aussi la revalorisation des allocations familiales. Je m'interroge sur le degré d'information du parti socialiste quand je vous vois oublier ainsi que nous devons ce système de revalorisation à Ségolène Royal, qui l'a décidé à l'époque où elle était ministre de la famille. (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est minable !
C'est elle en effet qui est à l'origine de l'article L. 551-1, qui indexe cette revalorisation au taux de l'inflation. Vous n'avez pas dit non plus que cette revalorisation a été l'an dernier bien supérieure à l'inflation.
Vous avez oublié aussi de dire que nous mettons en oeuvre dès cette année la modulation de l'allocation de rentrée scolaire demandée par les associations familiales. Vous avez oublié de dire que l'aide à l'emploi d'une assistante maternelle agréée sera augmentée pour les familles modestes, afin qu'elles n'y perdent pas. Tout cela, vous auriez dû le dire.
Quand nous débattions de tous ces sujets lors de l'examen du PLFSS, vous n'en avez rien dit, alors que vous étiez rapporteur de la branche famille : votre réveil est trop tardif pour être sincère. (Très vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. Yves Albarello, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, la loi de février 2004 portant création des communautés aéroportuaires prévoit dans son article 3 que « la communauté aéroportuaire est créée par le représentant de l'État dans la région, sur proposition du conseil régional ». Le même article précise qu'« en l'absence de proposition du conseil régional, le représentant de l'État dans la région peut, à l'expiration d'un délai de six mois après notification au conseil régional, créer la communauté aéroportuaire ».
L'article 6 de la loi avait expressément envisagé la création d'une telle communauté aéoportuaire pour les aéroports de Paris-Charles-de-Gaulle et de Paris-Orly. Or, à ce jour, la communauté aéroportuaire Paris-Charles-de-Gaulle n'a pas encore vu le jour. Cette situation n'est pas sans conséquences pour les communes proches de l'aéroport.
Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'État, je vous demande si vous comptez inviter prochainement M. le préfet de la région d'Île-de-France à créer la communauté aéroportuaire Paris-Charles-de-Gaulle.
Il est en effet dommage, monsieur le député, que ces communautés – une bonne idée du sénateur Le Grand – n'aient pas été créées.
Les dix grandes plates-formes aéroportuaires françaises, qui génèrent naturellement beaucoup d'emplois et de richesses, sont aussi génératrices de nuisances. En compensation, ces communautés devaient, en favorisant le dialogue avec les associations, permettre aux communes situées à proximité des aéroports de tirer partie des retombées positives de ces équipements. Mais, pour toute une série de raisons, ces communautés n'ont pas été mises en place, pas même autour des deux grands aéroports de la région parisienne que sont Orly et Paris-Charles-de- Gaulle.
Le Grenelle de l'environnement et ses suites nous permettront de réfléchir à l'installation de telles communautés sur l'ensemble du territoire, et tout particulièrement à Paris-Charles-de-Gaulle. En effet, le Président de la République a demandé, à l'occasion de l'inauguration de la nouvelle aérogare de Roissy au printemps dernier, que soit mise en oeuvre une charte du développement durable autour des grands aéroports parisiens, et des travaux sont actuellement menés par le président du Conseil économique et social. Je prends l'engagement devant vous que nous allons relancer dans ce cadre l'idée de ces communautés, afin qu'elles trouvent sur le terrain une application concrète.
Un grand aéroport, c'est beaucoup d'emplois, mais c'est aussi quelques nuisances : il est donc normal que les communes qui en souffrent aient aussi leur part des retombées économiques positives, et cela suppose qu'il y ait dialogue. C'est ce dialogue que permettront les communautés aéroportuaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Jean Glavany, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Avant de poser ma question, je voudrais déplorer, monsieur Bertrand, le grand numéro de donneur de leçons censé tenir lieu de réponse à notre collègue Féron. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je vous en prie.
Le récent rapport de l'IGAS, qui fait du dossier médical personnel, que vous avez mis en place, un modèle d'insincérité contraire à toutes les règles du service public, aurait pourtant dû vous inciter à un peu de modestie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le Premier ministre, je voudrais vous interroger moi aussi sur le pouvoir d'achat, puisque c'est la principale préoccupation des Français, frappés par toute une série de hausses : hausse des loyers, des prix des produits alimentaires – je pense en particulier aux pâtes – ou des transports à travers la hausse du prix de l'essence.
Je voudrais m'arrêter sur ce dernier problème. Il semble que vous ayez trouvé une solution pour les pêcheurs, et je m'en réjouis pour eux. Mais quid de tous les autres ? Car c'est le pouvoir d'achat de tous les Français qui est atteint de plein fouet par la hausse du prix du pétrole.
M. Woerth disait hier sur les ondes qu'il n'y avait rien à faire. Nous avons pourtant, nous, députés socialistes, deux propositions concrètes à vous faire. (« Oh non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La première est d'instituer une nouvelle recette pour l'État par la taxation des surprofits des compagnies pétrolières. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Notre deuxième proposition est d'allouer cette ressource supplémentaire à la réalisation du chèque transport.
Je ne passerai pas plus d'une minute sur chacun de ces points.
Vous nous dites qu'il n'est pas possible de surtaxer les surprofits : nous l'avons pourtant fait en 2000, à l'initiative d'Henri Emmanuelli ici présent, et ça a très bien marché. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Ça n'a pas empêché Total de continuer à investir, et cette société a même pu distribuer des dividendes largement supérieurs à la moyenne.
Je conclus. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Total affichant aujourd'hui des profits considérables, vous avez là une possibilité d'agir concrète.
Les moyens ainsi récoltés vous permettraient de mettre en oeuvre le chèque transport, disposition que vous avez votée l'an dernier, mesdames et messieurs de la majorité.
Cette disposition, jusqu'ici complètement inopérante parce que facultative, nous vous proposons de la rendre obligatoire grâce à cette recette, au bénéfice du pouvoir d'achat de tous les Français.
Voilà deux propositions, monsieur le Premier ministre : je vous demande d'y répondre concrètement.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. À quoi sert le Premier ministre ?
Décidément, monsieur le député Glavany, face aux problèmes des Français, vous ne savez que proposer des taxes supplémentaires. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Je vous dis, moi, que ce n'est pas comme cela qu'on va distribuer du pouvoir d'achat aux Français ! (« Et les franchises ? » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) On va rendre du pouvoir d'achat aux Français…
…en exonérant les salariés qui font des heures supplémentaires d'impôt sur le revenu et de charges sociales ( Très vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), ou encore en restaurant la concurrence – cela aussi rend du pouvoir d'achat aux Français (Les députés groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche se lèvent et quittent l'hémicycle) –, ou surtout en allant chercher le point de croissance supplémentaire que vous nous avez fait perdre en nous imposant le carcan des trente-cinq heures. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Pouvoir d'achat
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Rudy Salles.)
Nous abordons l'examen des crédits relatifs au travail et à l'emploi.
La parole est à M. Gaëtan Gorce, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour l'accompagnement des mutations économiques et le développement de l'emploi.
Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, monsieur le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur, mes chers collègues, le budget que nous devons examiner cet après-midi étant articulé autour de deux grands programmes, nous serons deux rapporteurs spéciaux à vous le présenter : moi-même pour le programme relatif à l'accompagnement des mutations économiques et au développement de l'emploi et M. Frédéric Lefebvre pour l'accès et le retour à l'emploi.
Dans la partie du budget qu'il m'incombait d'examiner, les crédits progressent tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, mais on ne peut avoir une vision satisfaisante de ce budget pour l'emploi qu'en considérant globalement les deux programmes. Or, dans leur totalité, ces programmes accusent un repli assez sensible – légèrement supérieur à 3 % – qui ne peut manquer de susciter quelque inquiétude.
Je tiens néanmoins à saluer l'élégance de mes collègues de la commission des finances et du Gouvernement, qui permettent à un représentant de l'opposition de présenter un budget en légère progression et qui laisseront à un député de la majorité le soin de défendre un budget en légère diminution – diminution en fait assez significative pour ce qui est des contrats aidés.
Nous sommes, en ce début de législature, à la croisée des chemins. L'emploi connaît aujourd'hui des évolutions très significatives et le taux de chômage se situe aujourd'hui sur un point de bascule, avec un chiffre de l'ordre de 8,5 %. Cette diminution va-t-elle se poursuivre, et à quel rythme ? Assistera-t-on, au contraire, à une stabilisation et à une secousse ou à un nouveau mouvement de hausse ?
Les mutations économiques qui affectent notamment notre industrie se traduisent par des suppressions d'emplois encore significatives – près de 50 000 sur les douze derniers mois –, mais l'objectif d'une stabilisation de l'emploi industriel peut être un horizon crédible et, surtout, l'évolution du marché du travail sera nécessairement affectée par les mutations démographiques qui sont à l'oeuvre – on peut notamment espérer une stabilisation de la population active au cours des prochaines années. Toutes ces données doivent nous conduire à regarder différemment les politiques de l'emploi. Permettez-moi de relever, chers collègues, que si quelqu'un les regarde aujourd'hui, il s'agit de la gauche, car la droite est singulièrement absente de cet hémicycle. Je ne doute pas, du reste, qu'il y soit rapidement remédié, et point n'est besoin d'insister sur ce point.
Il n'y a pas un seul député de l'UMP ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Si nous sommes aujourd'hui à la croisée des chemins en matière de politiques de l'emploi, il nous faut en tirer les conséquences et savoir opérer – à l'occasion peut-être de cette première discussion budgétaire – une révision de ces différentes politiques, qui ne peuvent se concevoir comme la simple reconduction et l'addition des dispositifs existants, mais qui doivent être, au contraire, constamment recalibrées en fonction de ces priorités.
À cet égard et pour ce qui concerne les crédits que j'étais chargé d'examiner, une politique de l'emploi devrait se fixer des priorités de trois ordres.
La première est l'anticipation. J'indiquais tout à l'heure l'impact qu'allaient avoir sur l'emploi et le marché du travail les mutations économiques, démographiques et technologiques. Ces mutations sont encore insuffisamment étudiées aujourd'hui. Il est surtout manifeste que nous n'en tirons pas encore assez les conséquences.
Le Conseil d'analyse stratégique a montré l'impact que pouvaient avoir ces évolutions sur les métiers et l'emploi au cours des dix à quinze années à venir, rappelant que l'essentiel des créations d'emplois allait se concentrer sur une quinzaine de métiers.
Pourtant, ces données n'inspirent pas de véritables politiques si l'on en juge par la mobilisation relativement modeste des partenaires sociaux dans les branches professionnelles, ou par la faible utilisation des outils prévus pour accompagner ces mouvements. Ainsi les crédits consacrés aux engagements de développement de l'emploi et des compétences ou ceux dédiés à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, représentent des sommes modestes et qui régressent encore dans ce budget.
Cela montre bien la difficulté d'intégrer ces enjeux de l'anticipation dans les politiques de l'emploi. Soulignons que ces dernières ne peuvent être menées ni conçues uniquement au niveau de l'État, mais en y associant les partenaires sociaux, les branches professionnelles et les territoires.
Se pose ensuite la question du pilotage de ces politiques d'anticipation, d'accompagnement des mutations et des restructurations. Certaines instances comme le pôle interministériel de prospective et l'anticipation des mutations économiques, le PIPAME, ont au moins le mérite d'exister. Le but de ce dispositif est d'essayer d'anticiper et d'accompagner les principaux mouvements susceptibles d'affecter certains secteurs économiques.
Pour l'essentiel, ces instances sont pilotées à un niveau administratif – avec les compétences naturellement requises – mais sans véritable vision stratégique et sans intégrer les différents aspects des politiques qui pourraient être conduites tant d'un point de vue industriel que sous l'angle de l'emploi.
L'anticipation des mutations économiques me paraît fondamentale pour l'avenir et j'espère que notre assemblée aura l'occasion d'approfondir ses réflexions sur le sujet, en dehors des débats budgétaires.
Deuxième grande priorité : adapter les outils des politiques de l'emploi à ces préoccupations. Là encore, nous sommes à la croisée des chemins et j'espère que nous saurons franchir quelques étapes.
L'exemple de la formation professionnelle illustre bien cette problématique. Si l'on considère que l'adaptation des salariés – et des demandeurs d'emplois – à l'évolution des métiers est essentielle, la réforme de la formation professionnelle apparaît comme un enjeu déterminant pour l'avenir. Cette réforme doit être conçue dans l'idée de redonner un véritable droit à l'avenir à tous les salariés. Ils doivent pouvoir se projeter dans un futur professionnel qui puisse être synonyme de compétences supplémentaires, d'emploi mieux garanti et aussi de progression de salaire et de pouvoir d'achat.
L'évolution des compétences, des formations et de la productivité doit aller de pair avec à celle des salaires. Au slogan « travailler plus pour gagner plus », je préfère la formule : « se former plus pour gagner plus ».
Cet effort d'adaptation devrait également se retrouver en matière de politique d'emploi des seniors. Je voudrais attirer votre attention sur les difficultés à bien calibrer des décisions qui visent à remettre en question – ce qui n'est pas illégitime d'un point de vue théorique – les dispositifs de départs anticipés en retraite comme l'allocation équivalent retraite, alors que les politiques qui tentent de maintenir en activité les salariés de plus de cinquante ans ne produisent pas encore de résultat.
Il existe un plan pour l'activité des seniors, des accords professionnels et des dispositions législatives récentes. Or, nous n'observons pas – loin s'en faut ! – d'amélioration de la situation. Il me paraît extrêmement dangereux d'accélérer la disparition des dispositifs de départs anticipés en retraite tant que nous n'avons pas réussi à améliorer réellement le taux d'emploi des seniors, par une politique qui doit évidemment associer les partenaires sociaux et tenir compte de l'évolution de la pénibilité des métiers et des conditions de travail.
Après l'anticipation et l'adaptation, je voudrais insister sur un troisième élément : l'évaluation des politiques menées. Avec Frédéric Lefebvre, rapporteur spécial sur les politiques du travail et de l'emploi, nous sommes d'accord pour considérer qu'il est anormal, compte tenu des enjeux évoqués précédemment, de ne pas disposer d'outils susceptibles de mesurer de façon fiable et incontestée l'efficacité des moyens mobilisés au service des politiques de l'emploi. En cumulant tous crédits, y compris les indemnisations chômage, on obtient une somme comprise entre 78 et 80 milliards d'euros. Or, nous ne pouvons pas en évaluer l'efficacité de ces moyens !
C'est pourquoi nous présenterons, mon collègue Frédéric Lefebvre et moi-même, un amendement visant à souligner cette faiblesse mais surtout à attirer l'attention du Gouvernement sur le sujet. Le Parlement, notamment la commission des finances de l'Assemblée nationale, a l'intention de s'en saisir également. La création d'un véritable dispositif d'évaluation des politiques de l'emploi. permettrait à nos débats de s'engager sur des bases plus communes que polémiques, avec un souci d'efficacité plutôt que d'opposition idéologique ou de principe entre nous.
Dernier point qui me tient à coeur et qui retient aussi l'attention du Gouvernement : la revitalisation des bassins d'emploi. Nous avons déposé un amendement qui tend à corriger les principales carences des dispositifs de soutien à la recréation d'activités et d'emplois dans les bassins qui sont frappés par des sinistres économiques.
Aujourd'hui, des dispositifs juridiques et financiers existent pour les bassins touchés par des sinistres économiques relativement importants, mais ils ne sont pas vraiment adaptés aux petits territoires ou aux zones rurales. Je veux attirer l'attention du Gouvernement et de l'Assemblée sur la nécessité de compenser cette carence : ces territoires doivent, eux aussi, retrouver un droit à l'avenir.
En matière d'emploi, il faut que tous nos concitoyens envisagent l'avenir avec optimisme et confiance. Nous pouvons partager cet objectif sur l'ensemble de ces bancs, même si nos points de vue peuvent diverger quant aux moyens d'y parvenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, pour les politiques du travail et de l'emploi.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, le Président de la République a fixé un objectif particulièrement ambitieux à la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi : atteindre le plein emploi – c'est-à-dire un taux de chômage de 5 % – et un taux d'activité de 70 % en cinq ans, grâce à une politique de revalorisation du travail.
Vous avez raison de le souligner : c'est un objectif ambitieux. C'est pourquoi il faut se mettre au travail. Et ce budget est adapté à l'objectif comme je vais le souligner.
Pour atteindre cet objectif, le ministre de l'économie et des finances est, pour la première fois, responsable de la politique de l'emploi. C'était une réforme nécessaire, car ces deux domaines sont indissociables.
Ce changement a pour conséquence de conférer un caractère interministériel à la mission « Travail et emploi », dont les deux programmes les plus importants ont été confiés à Christine Lagarde. Il s'agit des programmes « Accès et retour à l'emploi » – 6,28 milliards d'euros – et « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » – 5,15 milliards.
Le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, Xavier Bertrand, conserve la gestion des programmes « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail » et « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail », dotés respectivement de 128 millions et 733 millions d'euros.
L'effort budgétaire de l'État en faveur de l'emploi va, je tiens à vous le souligner, bien au-delà des crédits de la mission, dont le montant s'élève à 12,3 milliards d'euros. Il inclut en effet les dépenses fiscales – 9,6 milliards d'euros – ainsi que les recettes fiscales compensant les allégements de charges – près de 27 milliards d'euros. Au total, l'effort de l'État en faveur de l'emploi augmente de 13,6 %, pour atteindre 48,9 milliards d'euros. Loin de se désengager, le Gouvernement consent au contraire un effort budgétaire sans précédent en matière d'emploi.
Deux réformes très importantes ont été engagées par le Gouvernement dans le domaine de la politique de l'emploi : d'abord, la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC ; puis, la simplification des contrats aidés. Ces réformes doivent s'accompagner – Gaëtan Gorce vient de le souligner et nous sommes en total accord sur ce sujet – d'un renforcement de l'évaluation des politiques de l'emploi.
La première réforme, la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC, fait partie des engagements présidentiels. Évoquée depuis au moins vingt ans, cette réforme sera soumise au Parlement avant la fin de l'année, lorsque les consultations avec les partenaires sociaux seront terminées. Son but est d'améliorer le service rendu aux demandeurs d'emploi. Pensons toujours à eux !
La convention tripartite entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC, conclue en 2006 à l'initiative de Jean-Louis Borloo, a permis des améliorations sensibles : 90 % des demandeurs ont aujourd'hui un entretien individuel dans les huit jours qui suivent leur inscription aux ASSEDIC. Le rapprochement géographique a progressé, mais beaucoup moins vite : fin août 2007, seulement 299 agences locales pour l'emploi et 248 antennes ASSEDIC étaient sous la configuration d'un guichet unique, dont la définition est très large puisque les locaux peuvent se situer jusqu'à 200 mètres les uns des autres. Voilà une raison supplémentaire de se dire qu'il faut passer à la vitesse supérieure. C'est ce que vous nous proposez ; c'est ce que nous soutenons.
Avec la fusion, chaque demandeur disposera d'un interlocuteur unique, qui assurera à la fois son accueil, son inscription, son indemnisation et son accompagnement dans la recherche d'un nouvel emploi. La fusion permettra de parvenir à un renforcement du suivi et de la personnalisation, notamment grâce à une baisse significative du nombre de demandeurs d'emploi suivis par agent réfèrent.
Nous y reviendrons. Les orientations retenues par le Gouvernement permettront non seulement de préserver, mais – et certaines remarques m'incitent à le souligner – d'augmenter les responsabilités des partenaires sociaux.
L'UNEDIC, gérée par les partenaires sociaux, continuera en effet à administrer, en totale indépendance – j'insiste sur ce point –, le régime d'assurance-chômage et à fixer les modalités d'indemnisation. Le nouvel organisme rassemblera les réseaux des ASSEDIC et celui de l'ANPE.
Doté d'un statut sui generis, il sera chargé de l'accueil, de l'inscription, de l'accompagnement et de l'indemnisation des chômeurs, ainsi que de la tenue des listes. Les partenaires sociaux seront majoritaires au sein du conseil d'administration ; ils auront ainsi le pouvoir d'en nommer le président. Ils feront également partie du Conseil d'orientation des politiques de l'emploi, qui chapeautera le nouvel organisme.
Pour toutes ces raisons, les réticences des partenaires sociaux – connues depuis plus de vingt ans que ce projet est dans toutes les têtes – s'effacent pour laisser place à cette réforme essentielle pour les demandeurs d'emplois.
Les relations de l'organisme issu de la fusion avec les maisons de l'emploi devront être clarifiées. J'insiste sur ce point, monsieur le ministre et monsieur le secrétaire d'État, puisque ce sujet suscite une grande attente sur tous les bancs de l'Assemblée.
Mme Christine Lagarde a chargé notre collègue Jean-Paul Anciaux de procéder à un examen au cas par cas des maisons de l'emploi labellisées en attente de conventionnement, afin de répondre aux préoccupations des élus concernés. Inutile de préciser que nous attendons beaucoup de ce rapport et de sa concrétisation ultérieure par le Gouvernement. D'autre part, une procédure de concertation sera engagée avec les collectivités territoriales concernées au sujet de l'impact immobilier de la fusion.
Vous avez compris, monsieur le ministre, que nous attendons de vrais résultats et de vraies décisions de votre part, dans les semaines et les mois à venir.
J'ai pu constater l'efficacité d'une telle réforme – je parle de la fusion – lors de la visite en septembre, d'un Jobcentre Plus à Londres. (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Eh oui, à Londres ! On peut parfois s'inspirer de pays européens, et même de la Grande-Bretagne où votre ami Tony Blair est resté assez longtemps au pouvoir !
La fusion des anciennes Benefit Agencies, les agences des prestations sociales, et des anciens Job Centres, lancée en 2002, a renforcé la qualité du service rendu aux demandeurs d'emploi. En contrepartie de ce service de qualité, le système est exigeant. Les demandeurs signent un contrat lors de leur premier entretien au centre, et le versement de leurs allocations peut être suspendu s'ils ne respectent pas leurs obligations.
La réforme britannique a ainsi accompagné l'amélioration de la qualité du service rendu aux demandeurs d'emploi…
…par des obligations, assorties de sanctions. Il me semble essentiel de lier ces deux aspects, dans l'intérêt même des demandeurs d'emploi.
En France, le suivi des demandeurs d'emploi et le régime des sanctions ont été réformés en 2005, mais le nombre de contrôles et de sanctions reste particulièrement faible.
En 2006, les sanctions ont concerné 2 % des chômeurs indemnisés, quatre fois moins qu'en Espagne et en Belgique par exemple.
La fusion devra s'accompagner d'une réflexion, avec les partenaires sociaux, sur les sanctions à appliquer lorsqu'un demandeur refuse deux « offres valables d'emploi » – concept qui devra être évidemment précisé lors de ces discussions. Il appartiendra au nouvel organisme de prononcer ces sanctions.
Sur ce point aussi, il serait utile de s'inspirer du système britannique : les sanctions y sont d'autant plus facilement prononcées qu'elles ne remettent jamais en cause l'allocation logement dont bénéficient les demandeurs d'emploi. Elles ne peuvent donc conduire à l'exclusion. Plus de souplesse et plus d'efficacité, c'est ce que je vous propose car tel est le gage de la réussite de cette première grande réforme.
La deuxième est celle de la simplification des contrats aidés.
…– qui a déjà simplifié le dispositif existant en mettant en place le contrat d'accompagnement dans l'emploi pour le secteur non marchand et le contrat initiative emploi dans le secteur marchand –,…
…les contrats aidés feront l'objet d'une évaluation en 2008, à partir de laquelle on décidera des aménagements à leur apporter.
Le Président de la République a annoncé le 2 octobre dernier un Grenelle de l'insertion à l'issue duquel il souhaite que soit créé un contrat unique d'insertion : j'imagine que chacun applaudira cette mesure !
Ce contrat fusionnerait les contrats aidés existants et serait applicable dans les secteurs public et privé. Ce n'est pas Gaëtan Gorce qui me contredira : s'agissant des contrats aidés, personne ne s'y retrouve ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous avons interrogé les uns et les autres : personne, pas même à l'ANPE, n'est en mesure de nous donner le nombre de contrats aidés existants, ni le nombre de dispositifs à destination des chômeurs.
Je terminerai en soulignant à quel point Alain Joyandet, Gaëtan Gorce et moi-même avons été frappés par l'insuffisance de l'évaluation de l'efficacité des politiques de l'emploi dans notre pays. Les sommes engagées par l'État sont considérables : je parlais tout à l'heure de près de 50 milliards d'euros, mais, en réalité, on est à plus de 78 milliards si l'on additionne les crédits de la mission, les dépenses fiscales en relevant la compensation des exonérations de charges sociales et les dépenses d'indemnisation du chômage. Au regard de ces sommes, le montant des crédits consacrés à l'évaluation apparaît dérisoire : 37 millions d'euros, soit 0,07 %. La Cour des comptes et le Conseil d'orientation pour l'emploi partagent ce constat.
C'est pourquoi Gaëtan Gorce, Alain Joyandet et moi-même avons déposé un amendement visant à augmenter de manière symbolique la subvention du centre d'études de l'emploi. Il s'agit avant tout d'adresser un signal au Gouvernement et de manifester la volonté de la commission des finances – qui, je tiens à le préciser, a adopté cet amendement à l'unanimité – qu'un système performant d'évaluation soit mis en place. Le Parlement, dont chacun reconnaît qu'il faut renforcer ses pouvoirs, pourra actionner ce dispositif. Ce n'est qu'à partir d'une évaluation solide et de diagnostics partagés que nous pourrons réformer en profondeur notre politique de l'emploi, pour la rendre à la fois plus efficace et plus juste. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Alain Joyandet, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie général et du plan, pour les politiques du travail et de l'emploi.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens d'abord à dire au rapporteur général combien, alors que j'étais seul rapporteur pour cette mission l'an dernier, il m'a été agréable cette année de partager cette fonction avec M. Frédéric Lefebvre et M. Gaëtan Gorce. (« Oh ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
L'un, député récent, nous a spontanément révélé son talent ;…
…l'autre, même s'il siège sur les bancs de l'opposition, a des qualités que nous connaissons : notre travail sur cette mission a ainsi permis de conjuguer l'ouverture et le rajeunissement.
La présente mission représente un réel effort budgétaire, puisque 12 milliards d'euros en crédits de paiement lui sont alloués. Au total, dans le budget, près de 49 milliards d'euros vont aller en direction de l'emploi et du travail. En tant que co-rapporteur, je me suis plus spécialement intéressé au programme « Accès et retour à l'emploi ». Aussi, je me félicite que cette mission soit orientée vers une efficacité accrue du service public de l'emploi grâce à la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC.
Frédéric Lefebvre est allé en Angleterre ; je me suis pour ma part rendu au Danemark, et je tire exactement les mêmes conclusions au sujet de l'organisation du grand service public pour l'emploi,…
…notamment en ce qui concerne les « job centers » : le système est plus efficace, les salariés officiant au service public de l'emploi ayant chacun en charge beaucoup moins de chômeurs.
De même, je me félicite de la mise en valeur de l'ANPE, dont les missions sont sans cesse enrichies au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin. Les actions ciblées, notamment en faveur des jeunes et des personnes proches de la retraite, sont un véritable succès. La baisse du nombre de chômeurs dans ces catégories depuis un an doit nous encourager à développer davantage les parcours individualisés : ce sera d'autant plus facile que notre service public de l'emploi sera unifié.
Dans cet esprit, l'article 57 me semble aller dans le bon sens. Dans le cadre du plan pour l'emploi des seniors, il est proposé de mettre fin aux multiples dispositifs de cessation précoce d'activité. Notre pays a besoin de toutes les forces et de toutes les compétences.
L'âge ne doit pas être un handicap pour maintenir son emploi, et l'effet d'aubaine créé par les mesures que j'évoquais doit être supprimé.
En outre, le programme « Accès et retour à l'emploi » comporte une action qui me tient particulièrement à coeur : la simplification des contrats aidés.
Frédéric Lefebvre s'étant longuement exprimé sur le sujet, je ne m'y étendrai pas.
L'article 52, qui préconise la fusion du dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise avec le contrat initiative emploi, offre une meilleure solution. En effet, le SEJE et le CIE, dans leur configuration actuelle, font double emploi : ils sont tous deux à destination des jeunes très peu qualifiés, et visent à leur permettre d'accéder à l'entreprise. L'effort de rationalisation est aussi un moyen d'éviter l'effet d'aubaine crée par le SEJE.
Sur ce point précis, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je veux également appeler votre attention sur le problème de l'emploi aidé non marchand. Nous ne maintiendrons pas nos bons résultats actuels sans ces emplois. La situation est très tendue, notamment pour ceux qui vivent avec le RMI et acceptent un contrat d'avenir. Il ne faudrait pas les écoeurer. Pendant la campagne, nous avons dit que nous voulions aider ceux qui veulent s'en sortir. C'est une promesse qui me tient à coeur. En tant que maire, je tiens à développer là où je le peux une réelle politique en matière d'emplois aidés, notamment dans le cadre de la réinsertion par le travail. Actuellement, je ne le peux plus car une mauvaise articulation du dispositif entre les collectivités territoriales conduit à son blocage.
Les conseils généraux empêchent en effet les employeurs publics que nous sommes de reconduire, notamment, les contrats d'avenir : il s'agit d'un vrai sujet pour ceux qui viennent du RMI.
Je souhaite également dire quelques mots au sujet de la nécessaire évaluation des politiques de l'emploi. Avec mes deux collègues rapporteurs, nous avons amendé le texte afin d'augmenter de 200 000 euros le montant de la subvention versée au centre d'études de l'emploi : l'évaluation est en effet un enjeu capital pour l'avenir.
Enfin, cette mission consacre un programme à l'amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail. Je ne peux que me féliciter de l'accent porté sur la santé et sur la promotion du dialogue social.
Mes deux collègues rapporteurs et moi-même, et en particulier Frédéric Lefebvre avec qui j'ai travaillé sur la même mission, ne pouvons être que satisfaits de l'effort global en faveur de l'emploi et de la réinsertion de ceux qui sont en difficulté : nous vous invitons donc à soutenir l'action du Gouvernement en ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Gérard Cherpion, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, bien que les mesures du projet de loi de finances concernant l'emploi soient cette année, comme l'ont indiqué les précédents orateurs, très importantes, je n'y reviendrai pas, sauf pour rappeler l'adoption par la commission des affaires culturelles de deux amendements identiques tendant à la suppression de l'article 53, qui a trait à l'application des contrats de professionnalisation. Je souhaite qu'une solution soit trouvée avec le Gouvernement sur ce problème important sur le plan social.
J'évoquerai un point particulier développé dans mon rapport écrit : le contrat de transition professionnelle. Ce dispositif a certes une incidence budgétaire modeste, avec 8,5 millions d'euros pour 2008, mais en présenter les éléments de bilan disponibles m'est apparu opportun dans le contexte actuel.
Je rappellerai que le contrat de transition professionnelle, établi par une ordonnance du 13 avril 2006, est une disposition expérimentale applicable pour une durée de deux ans dans sept bassins d'emploi : Charleville-Mézières, Montbéliard, Morlaix, Saint-Dié, Toulon, Valenciennes et Vitré. Dans ces bassins, il se substitue à la convention de reclassement personnalisé, mesure nationale prévue depuis 2005 pour favoriser le reclassement des salariés des entreprises de moins de mille salariés menacés par un licenciement économique.
D'autres mesures, comme les congés de reclassement ou de mobilité, existent en effet pour les salariés des entreprises ou groupes de mille salariés et plus, tous ces dispositifs ayant en commun de s'adresser aux salariés qui, sans eux, perdraient leur emploi dans le cadre d'un licenciement économique. Il s'agit de remplacer ce licenciement par de nouvelles modalités de rupture aménagée offrant plus de sécurité, plus d'accompagnement et plus d'indemnisation que le droit commun du licenciement et de l'assurance chômage.
Le développement de ce type de mesures s'inscrit dans la recherche d'une meilleure sécurisation des parcours professionnels, question qui est devenue un sujet de préoccupation très important des pouvoirs publics comme des partenaires sociaux, et qui se trouve désormais au coeur du dialogue social. La convention de reclassement personnalisé est ainsi issue de ce dialogue et la question des parcours professionnels sera nécessairement à nouveau traitée dans la négociation interprofessionnelle engagée cet automne sur la modernisation du marché du travail et la sécurisation des parcours professionnels. La remise à plat de l'assurance chômage et la réforme du service public de l'emploi obligeront de toute façon à revoir la convention de reclassement personnalisé mise en oeuvre dans le cadre de l'UNEDIC.
L'expérimentation du contrat de transition professionnelle doit s'achever en mars 2009, soit exactement un an après l'entrée dans la mesure des derniers bénéficiaires. Il est prévu que le Gouvernement remette un rapport d'évaluation avant le 1er juin 2008. Cependant, au regard des perspectives de réformes rapides que je viens de rappeler, j'ai cru bon d'anticiper cette échéance pour que les leçons que l'on peut d'ores et déjà tirer du contrat de transition professionnelle puissent être valorisées dans le cadre de ces réformes.
Je présente de manière détaillée, dans mon rapport écrit, les différences entre les régimes destinés aux licenciés économiques : régime de droit commun, convention de reclassement personnalisé et contrat de transition professionnelle. Pour aller vite, on peut dire que, du point de vue des salariés, la convention de reclassement personnalisé présente par rapport au droit commun plusieurs avantages : une indemnisation plus généreuse bien que dégressive pendant huit mois ; un statut favorable pour la conservation des droits sociaux, celui de stagiaire de la formation professionnelle ; des mesures d'accompagnement en principe renforcées.
Le contrat de transition professionnelle obéit globalement aux mêmes règles que la convention. Il s'en distingue cependant sur plusieurs points. Tout d'abord, il est ouvert à tous les salariés dont le licenciement économique est envisagé, même ceux qui ne pourraient bénéficier des allocations de l'assurance chômage faute d'une durée d'affiliation préalable suffisante. Par ailleurs, le délai de réflexion pour l'acceptation est plus long : vingt et un jours au lieu de quatorze. La durée maximale d'accompagnement est également plus longue : douze mois au lieu de huit. Dans le cadre de cet accompagnement, il est permis d'insérer des périodes de travail rémunéré dans des entreprises pour s'essayer à de nouveaux postes et de nouveaux emplois. Enfin, l'indemnisation est plus élevée et non dégressive, et comporte une possibilité de « capitalisation » en cas de reprise d'emploi avant le terme du contrat, c'est-à-dire de versement d'une prime à hauteur de 50 % des indemnités dues pour les mois restant à courir, dans une limite de trois mois. En contrepartie de ces avantages, le bénéficiaire d'un contrat de transition professionnelle doit prendre et tenir l'engagement de suivre les actions qui seront proposées et de donner suite à toute offre d'emploi correspondant aux orientations du projet professionnel défini avec lui.
Tel qu'il est appliqué – sinon dans les textes –, le contrat de transition professionnelle offre aussi un accompagnement beaucoup plus intensif, avec notamment un taux d'encadrement d'un référent pour trente bénéficiaires, contre environ un référent pour cent dix bénéficiaires pour la convention de reclassement personnalisé.
Grâce à un excellent suivi quantitatif et qualitatif, nous disposons déjà d'éléments de bilan substantiels du contrat de transition professionnelle. L'Inspection générale des affaires sociales a rendu deux rapports d'évaluation à mi-parcours. Pour ce qui concerne les chiffres, les données au 30 septembre 2007 font apparaître que 2 533 personnes sont entrées dans le système depuis mai 2006. À la même date, les cinq premières cohortes mensuelles de bénéficiaires, entrés jusqu'en septembre 2006, étaient par construction sorties intégralement du dispositif puisqu'il dure au plus un an. Cela représente 573 personnes, soit un échantillon encore restreint, mais suffisant pour dégager certains enseignements.
Dans son second rapport, mis en ligne il y a quelques jours, l'IGAS relève un « fonctionnement global satisfaisant » du dispositif, avec des résultats « du niveau d'une bonne cellule de reclassement, mais avec des incertitudes et des difficultés d'interprétation ». Les auditions que j'ai pu mener et les données qui m'ont été communiquées confirment ce jugement.
En premier lieu, il apparaît que le contrat de transition professionnelle est très attrayant pour ses bénéficiaires potentiels puisque le taux d'adhésion de ceux auquel il est proposé est proche de 80 %, contre 40 % seulement pour d'autres mesures optionnelles telles que la convention de reclassement personnalisé ou l'accompagnement renforcé, effectué par des prestataires privés et offert par l'UNEDIC à certains chômeurs indemnisés.
Quant aux résultats en termes de retour à l'emploi, il est très délicat de comparer l'efficacité de différents régimes d'accompagnement des demandeurs d'emploi, et cela pour plusieurs raisons : d'abord, les notions utilisées pour qualifier le reclassement, le retour à l'emploi, l'emploi durable, l'accès à l'emploi, ne sont pas harmonisées et renvoient à des définitions différentes ; par ailleurs, il est difficile de comparer un dispositif expérimental couvrant quelques milliers de personnes avec des mesures valables au plan national, comme la convention de reclassement personnalisé, qui concerne un peu plus de 100 000 personnes depuis deux ans. Enfin, dans ce type de comparaisons, il faudrait prendre en compte et quantifier des facteurs tels que le taux de chômage des bassins d'emploi en cause, l'âge moyen et la qualification des demandeurs d'emploi, ces données étant déterminantes pour apprécier les chances de retour à l'emploi.
Sous ces réserves, les résultats du contrat de transition professionnelle sont très au-dessus de la moyenne des dispositifs de reclassement. En intégrant toutes les périodes travaillées de plus d'un mois, le taux de retour à l'emploi s'élève à plus de 70 %, au terme des douze mois de contrat de transition professionnelle. En s'en tenant aux sorties vers un emploi durable – soit en contrat à durée indéterminée, contrat à durée déterminée ou mission d'intérim de plus de six mois – le taux est de 60 %.
S'agissant de l'ensemble des chômeurs, une enquête de l'ANPE sur le devenir d'un échantillon de demandeurs d'emploi ayant eu leur premier entretien en mai 2004 montre que, sur ceux qui s'étaient inscrits suite à un licenciement économique, 39 % travaillaient douze mois plus tard et 53 %, au total, travaillaient ou avaient travaillé au cours de ces douze mois.
Pour ce qui concerne la convention de reclassement personnalisé, les données de l'ANPE montrent que 55 % des allocataires, douze mois après leur entrée, ne sont pas inscrits à l'agence, ce qui correspond en général à un reclassement dans l'emploi. Enfin, s'agissant des cellules de reclassement dans le cadre des plans de sauvegarde de l'emploi, une analyse conduite a posteriori sur 230 plans entre 2002 et 2004 fait état de 35 % environ de sorties en emploi durable, un an après leur licenciement, des salariés ayant besoin d'un reclassement externe et dont la situation est connue.
L'analyse des emplois occupés par les anciens bénéficiaires d'un contrat de transition professionnelle est également intéressante : plus de 42 % ont changé de métier – ce qui traduit un mouvement significatif de reconversion –, près d'un tiers ont amélioré leur salaire, et 8 % ont créé une entreprise.
La plupart des personnes que j'ai auditionnées s'accordent à reconnaître quelques points forts au contrat de transition professionnelle, ce qui explique ses résultats encourageants.
Il y a d'abord l'aspect institutionnel, particulièrement intéressant, alors que nous allons prochainement débattre de la nouvelle organisation du service public de l'emploi. Le dispositif est géré par une filiale ad hoc de l'AFPA, qui associe des personnels issus de cet organisme et de l'ANPE. Les cellules, qui ont un fonctionnement entrepreneurial, sont dirigées par des chefs de projet détachés de l'AFPA et très impliqués. L'intérêt du regroupement dans une même structure des compétences des personnels de l'ANPE et de l'AFPA a été souligné par la plupart de mes interlocuteurs. Les uns amènent leur expérience du placement en emploi, les autres leurs compétences dans la construction de parcours de reconversion professionnelle, la prescription de formations adaptées ou la recherche de stages.
Le délai de trois semaines laissé aux salariés pour opter – il est de deux semaines dans la convention de reclassement personnalisé – est lui aussi très positif, tout comme la durée de douze mois du contrat de transition professionnelle. Dans les statistiques de retour à l'emploi durable, le taux passe de 33 % à 60 % entre huit et douze mois d'ancienneté dans le dispositif. Quelques bénéficiaires attendent sans doute la fin du contrat pour reprendre un emploi, mais ce type de comportement ne saurait expliquer une telle différence. Même si une durée fixe n'est pas adaptée à tous les cas, le choix de la durée de douze mois est plutôt bien calibré et mieux adapté pour mener un projet de reconversion professionnelle que les huit mois prévus pour la convention de reclassement personnalisé.
L'accès à la formation constitue une autre réussite du dispositif puisque le taux d'accès atteint presque 67 %, contre 25 % pour la convention de reclassement personnalisé et 10 à 20 % pour l'ensemble des demandeurs d'emploi. Nous devons cependant être conscients que ces résultats sont liés à l'implication d'un organisme paritaire collecteur des fonds de formation, l'AGEFOS-PME, qui a financé 53 % des formations. L'implication des conseils régionaux, compétents pour la formation professionnelle, est en revanche inégale et reste globalement limitée.
Un dernier élément très positif de la démarche de conversion propre au contrat de transition professionnelle doit être signalé : il s'agit des périodes travaillées qui peuvent s'intercaler dans le contrat de transition sans l'interrompre. Ce mécanisme permet de s'essayer à un nouvel emploi, voire à un nouveau métier, sans risque statutaire.
En revanche, d'autres aspects du dispositif font débat, comme la question du coût et du financement. Le financement de l'expérimentation, initiée par les pouvoirs publics, repose sur une contribution importante de l'État, qui serait, selon les prévisions, proche du tiers des dépenses totales, à la différence de ce qui se passe pour la convention de reclassement personnalisé, mécanisme dans lequel cette contribution est marginale. Cela s'explique par le niveau d'indemnisation plus élevé, les mesures d'accompagnement plus importantes, mais aussi et surtout par un engagement moindre de l'assurance chômage, à laquelle le contrat de transition professionnelle a été en quelque sorte imposé et qui a obtenu en conséquence de n'y contribuer que dans de strictes limites.
Si l'on regarde le coût unitaire du contrat de transition professionnelle, il n'est pas certain a posteriori qu'il soit très différent de celui de la convention de reclassement personnalisé, dans la mesure où les surcoûts qu'il induit peuvent être compensés par les économies d'indemnisation réalisées si les personnes retrouvent plus vite un emploi. De plus, pendant les périodes travaillées qui s'intercalent dans le contrat, ces personnes sont rémunérées par leur employeur temporaire, et non par le système. Selon des évaluations de la DGEFP, la différence de coût unitaire final entre les deux mesures pourrait être de seulement 5 %.
Il faut également prendre en compte les marges d'ajustement des coûts. D'une part, il n'est pas certain qu'un taux d'encadrement d'un pour trente soit nécessaire – selon certaines sources, un pour quarante ou cinquante pourrait suffire ; d'autre part, le niveau d'indemnisation des bénéficiaires pourrait être réexaminé, car, à ce niveau, certaines indemnités peuvent excéder l'ancien salaire net. Si l'on y ajoute le système de prime en cas de retour rapide à l'emploi, le contrat de transition professionnelle est tellement attractif qu'il peut sans doute entraîner des effets d'aubaine, dans la mesure où peuvent en bénéficier des salariés qui, compte tenu de leur métier, pourraient retrouver rapidement un emploi sans aide particulière.
Le critère d'entrée dans le dispositif par le licenciement économique est une règle également discutée. Certes, comme on l'a vu, proposer le dispositif à toutes les personnes dont le licenciement pour motif économique est envisagé peut entraîner des effets d'aubaine. En outre, l'IGAS fait observer que cela n'a peut-être guère de sens pour des salariés proches de la retraite, qui ont plus besoin d'une solution d'attente que d'une reconversion, ou des personnes dont les graves problèmes personnels, de santé notamment, exigent d'autres formes d'accompagnement qu'une aide centrée sur le retour à l'emploi.
Parfois trop systématique, la définition des bénéficiaires potentiels du contrat de transition professionnelle par le licenciement économique paraît parfois trop restrictive. Les licenciements économiques enregistrent un recul constant et sont devenus un motif très minoritaire d'entrée en chômage, avec moins de 5 % des inscriptions à l'ANPE. Dès lors, certaines organisations syndicales, que j'ai rencontrées, souhaitent une couverture plus large des ruptures pour des raisons économiques, notamment les salariés temporaires non reconduits des entreprises procédant à des licenciements économiques. Une réflexion en cours porte sur une éventuelle distinction entre les droits à indemnisation et les droits à accompagnement. L'IGAS considère ainsi que, dans le cadre d'un licenciement collectif, il est délicat de justifier de conditions d'indemnisation différentes, alors que des modalités d'accompagnement variables, adaptées à chacun, seraient utiles et pourraient être acceptées.
Une dernière question, souvent posée, porte sur l'articulation du contrat de transition professionnelle avec les autres mesures de reclassement existantes, en particulier les plans de sauvegarde de l'emploi que doivent mettre en oeuvre les entreprises. Certains craignent un appauvrissement du contenu de ces plans dans les bassins d'emploi couverts par le contrat de transition professionnelle. Si l'expérience devait être poursuivie ou élargie, l'hypothèse d'une exclusion des entreprises tenues de proposer un plan de sauvegarde ou d'une contribution obligatoire de ces entreprises au financement du contrat devrait être étudiée.
Cela nous amène à la conclusion : que faire du contrat de transition professionnelle, dont l'expérimentation va s'achever en mars prochain ? De mon point de vue, une généralisation à tout le territoire, qui en ferait le régime de droit commun pour tous les salariés concernés par une restructuration, voire pour tous les demandeurs d'emploi, paraît difficilement envisageable avec les paramètres actuels du dispositif, qu'il s'agisse de la clé de financement ou du niveau d'indemnisation.
Pour autant, il est clair qu'il y a dans ce dispositif des éléments très positifs, qui devraient inspirer la configuration future de tous les dispositifs d'accompagnement des demandeurs d'emploi. Comment valoriser ces éléments ? Dans le contexte actuel de remise à plat de tout le système d'accompagnement et d'indemnisation du chômage, je pense que c'est dans ce cadre de réforme d'ensemble qu'il faut tirer les enseignements du contrat de transition professionnelle, soit pour inspirer un dispositif de prise en charge des licenciés économiques qui prendrait la suite de la convention de reclassement personnalisé, soit pour inspirer un nouveau système global d'indemnisation du chômage.
À cet égard, le contrat de transition professionnelle préfigure assez bien l'assurance chômage de demain telle que l'a souhaitée le Président de la République lors de son intervention du 18 septembre dernier, évoquant une indemnisation « dans certains cas plus généreuse qu'aujourd'hui et qui couvrira une plus grande proportion de chômeurs, mais parfois de plus courte durée et qui devra s'interrompre quand le bénéficiaire refusera des offres valables d'emploi ou de formation ».
Les grandes réformes que nous attendons seront négociées avec les partenaires sociaux. Monsieur le secrétaire d'État, partagez-vous mon analyse des enseignements positifs de l'expérimentation du contrat de transition professionnelle et comptez-vous vous en inspirer, d'une part pour l'écriture du projet de loi relatif au service public de l'emploi, d'autre part pour suggérer certaines orientations aux partenaires conventionnels, dans les domaines qui sont les leurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Nous en arrivons aux orateurs inscrits.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour cinq minutes.
Monsieur le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur, je vous remercie de rester parmi nous, alors que nous ne bénéficions ni de la présence de Mme Lagarde ni de celle de M. Bertrand.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, d'aucuns ont qualifié la mission « Travail et emploi » que nous examinons cet après-midi de budget de transition. Pour ma part, je préfère dire clairement qu'il s'agit d'un budget de déconstruction des politiques et des dispositifs en faveur de l'emploi.
Le Gouvernement prend prétexte de l'amélioration apparente des chiffres de l'emploi, alors qu'ils sont très contestés et qu'ils ne reflètent ni l'atonie de la création d'emplois dans notre pays, ni la précarisation croissante des emplois, comme il prend prétexte d'un hypothétique retour de la croissance, qui, malheureusement, s'éloigne chaque jour davantage,…
…et surtout de la mise en chantier d'une série de réformes tous azimuts, dont aucune n'a abouti – unification du service public de l'emploi, simplification des contrats aidés, remise à plat des règles d'indemnisation du chômage, réforme du contrat de travail –, pour opérer dans le budget du travail et de l'emploi de nombreuses restrictions budgétaires. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Une lecture rapide pourrait laisser croire que c'est un pari optimiste sur l'avenir qui vous conduit à raboter par anticipation un grand nombre de lignes budgétaires. Mais une lecture plus attentive me conduit à penser que votre précipitation répond à votre souci de réaliser des économies mais surtout à votre volonté de calquer notre marché du travail sur le modèle anglo-saxon.
Si le taux de chômage y est statistiquement plus faible que chez nous, un salarié sur quatre connaît le chômage chaque année, la durée moyenne de travail hebdomadaire, si l'on considère l'ensemble des salariés, est inférieure à celle pratiquée en France. Quant au nombre des exclus et des travailleurs pauvres, il est sensiblement supérieur. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
C'est un changement de modèle que vous nous proposez, et cela vous amène à commencer par déconstruire les dispositifs actuels de régulation et de sécurisation de l'emploi.
La preuve, c'est que, au moment où nous convenons tous de la nécessité de mieux évaluer les politiques de l'emploi, vous refusez d'évaluer le plan de cohésion sociale prévu pour cinq ans et lancé par votre collègue Jean-Louis Borloo en 2005 !
Prenons quelques exemples de cette déconstruction. L'arme absolue pour terrasser le chômage est la réforme du service public de l'emploi, à travers le démantèlement de l'ANPE et sa fusion avec l'UNEDIC. Si cette fusion, une fois opérationnelle, simplifiera la vie des demandeurs d'emploi, elle ne pourra en créer elle-même – elle risque même d'en supprimer à l'ANPE –…
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Tout à fait !
…et, contrairement à ce que vous ne cessez de répéter, elle ne pourra pas, mécaniquement, abaisser le taux de chômage à 5 %.
Force est d'admettre qu'une telle fusion aura un coût. Celui-ci est estimé à 300 ou 400 millions d'euros, mais il n'est pas budgété. A l'inverse, il est prévu de réduire de 50 millions la subvention de l'ANPE et le financement des maisons de l'emploi, qui verront leur création gelée. Notre collègue Monique Iborra reviendra sur ce point. Ce gel annonce la fin de l'approche territoriale des problèmes liés à l'emploi, qui était pourtant en train de faire ses preuves.
Bien que masquée par une présentation opaque des chiffres, plus nette encore est la remise en cause des contrats aidés. Dans le secteur marchand, on peut déplorer la disparition du SEJE – soutien à l'emploi des jeunes en entreprise –, la diminution de 33 % de la dotation pour les contrats initiative emploi…
…et les 140 millions de suppression d'exonération sur les contrats de professionnalisation.
Dans le secteur non marchand, vous prévoyez une baisse de 18 % en volume financier des contrats d'accompagnement dans l'emploi et une réduction de 21 % des contrats d'avenir, sans parler du congé de solidarité outre-mer.
Mes collègues y reviendront, mais il s'agit de coupes claires qui génèrent des effets de stop-and-go et qui déstabilisent les processus et les dispositifs d'insertion par l'économique. Si la perspective de créer un contrat unique d'insertion peut paraître intéressante, mieux vaut attendre sa mise en place avant d'affaiblir les autres dispositifs, faute de quoi nous risquons de subir des « trous d'air » qui mettront en danger le travail de terrain des associations.
Je pourrais aussi parler des coupes effectuées dans le budget de la formation professionnelle, la plus scandaleuse étant, malgré vos beaux discours, l'amputation des crédits consacrés à la validation des acquis de l'expérience.
Enfin, la forte mobilisation en faveur des jeunes ne semble plus de mise : vous supprimez le dispositif « Soutien à l'emploi des jeunes en entreprises », vous réduisez de 100 millions d'euros les crédits consacrés au contrat de professionnalisation « jeunes »…
…vous diminuez le financement de l'allocation CIVIS et vous réduisez de 15 millions les crédits du FIPJ ; vous maintenez certes le financement des missions locales, mais cela ne saurait compenser la perte du FSE ; en particulier, rien n'est prévu dans ce budget pour financer les écoles de la deuxième chance, dont le candidat Nicolas Sarkozy avait pourtant promis qu'il y en aurait une dans chaque département.
Nous assistons donc à une véritable entreprise de déconstruction des politiques de l'emploi, sans pour autant que soient mis en place des dispositifs de lutte contre l'emploi précaire et le phénomène croissant des travailleurs pauvres, qui sont la nouvelle réalité du marché de l'emploi. Au contraire, je crains que les choix opérés et les principes qui régissent votre action, à savoir déréguler et fluidifier le marché du travail à tout prix, n'aggravent ces tendances.
C'est pourquoi le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ne votera pas ce budget, qui, malheureusement, détruit plus qu'il ne construit une politique de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
J'ai été très indulgent avec M. Jean-Patrick Gille, qui était le premier orateur inscrit. Mais ma mansuétude a atteint ses limites et je serai très attentif à ce que chacun respecte désormais son temps de parole.
La parole est à M. Pierre Gosnat, pour cinq minutes.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mesdames, messieurs les députés, le Premier ministre a déclaré que notre pays était en faillite. On a peine à le croire quand on mesure les profits qu'empochent les plus fortunés de nos concitoyens ! En revanche, quand on évoque la réalité sociale, on peut dire que nous connaissons une véritable faillite. En France, le chômage oscille entre 8,5 % et 9 %, 50 % des salariés gagnent moins de 1 500 euros par mois, 15 % sont au SMIC et la probabilité qu'un ouvrier décède entre trente-cinq et soixante-cinq ans est de 26 %, ce qui devrait vous conduire à vous interroger sur la question des retraites…
A la lecture de ce PLF, il semble, monsieur le secrétaire d'État, que cette réalité vous soit étrangère. Pourtant, les Français estiment que le travail est la seconde condition essentielle à leur bonheur. C'est dire si les politiques publiques en matière d'emploi et de travail sont d'une importance capitale et doivent constituer une priorité nationale. Le Président de la République avait, me semble-t-il, axé sa campagne électorale sur la défense de l'emploi et sur le renouveau de la « valeur travail ». Or nous constatons que la mission « Travail et emploi », affiche pour 2008 un budget en baisse par rapport à l'an passé. Encore une fois, l'effet d'annonce du Président est bien loin de la politique menée par son gouvernement !
En matière de lutte contre le chômage, le PLF 2008 ne fait qu'accentuer la précarisation du marché de l'emploi et multiplier les cadeaux fiscaux aux entreprises. Cela fait des années que le Gouvernement dirige son action en ce sens, alors que cette politique est sans résultat satisfaisant pour les salariés et pour les demandeurs d'emploi. Le programme 102 « Accès et retour à l'emploi » est en grande partie fondé sur une politique de contrats aidés. Or les statistiques publiées dans le PLF démontrent l'inefficacité de ces dispositions. Les CIE, CAE et autres contrats d'avenir ne permettent nullement un retour durable sur le marché du travail : 80 % des chômeurs de longue durée ne retrouvent pas d'emploi stable après un contrat précaire.
Cette course sans fin au moins-disant social et la recherche permanente d'une baisse du coût du travail ne régleront pas le problème du chômage en France. Seul un partage équitable du temps de travail pourrait y remédier, et c'est pourquoi nous sommes très attachés aux 35 heures. Or la défiscalisation des heures supplémentaires, dont le coût pour notre pays s'élève à 6 milliards, s'inscrit dans une logique diamétralement opposée à ce constat.
C'est vrai !
L'amélioration des conditions de travail de nos concitoyens devrait être l'une de nos principales préoccupations. Alors que les cas dramatiques de suicides sur les lieux de travail se multiplient et que le stress lié aux activités professionnelles est devenu un fléau national, le Gouvernement ne semble pas disposé à prendre des mesures efficaces en la matière. Se pliant au diktat de Bruxelles, il annonce vouloir privilégier les négociations de branches au détriment d'une réglementation générale. Or le quotidien professionnel de nos concitoyens ne sera pas amélioré si l'on ne met pas en oeuvre une politique nationale volontariste en matière de droit du travail, qui permettrait d'inverser les rapports de force intra-entreprises, souvent défavorables aux employés.
Les députés communistes se battent depuis toujours pour une réelle politique de l'emploi en France, fondée sur un système efficace d'emploi et de formation et un service public du travail. Car, comme le logement, le travail est un droit. De ce point de vue, les politiques de l'emploi passent aussi par le renforcement des syndicats, et non, comme c'est le cas aujourd'hui, par la criminalisation de l'action syndicale. La justice prud'homale doit avoir les moyens nécessaires à son fonctionnement, comme l'inspection du travail. Or elles sont, l'une et l'autre, remises en cause. J'approuve pleinement la proposition de loi déposée par Roland Muzeau visant à améliorer la santé au travail des salariés et à prévenir les risques professionnels auxquels ils sont exposés, ainsi que la proposition de résolution de Daniel Paul visant à la création d'une commission d'enquête parlementaire sur les pratiques des entreprises en matière d'accidents du travail.
En tant que communiste, je ne peux me résoudre à laisser les politiques d'emploi aux mains des entreprises et je m'oppose à toutes les formes de précarité qui maintiennent les populations les plus fragilisées dans des situations inacceptables. Je suis donc favorable à une politique d'emploi courageuse, fondée sur des services publics étendus. Mais c'est en tant que membre à part entière de la représentation nationale, conscient de l'inefficacité des mesures contenues dans ce texte, que je voterai contre cette annexe du PLF 2008. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
L'enjeu de la mission « Travail et emploi » est de taille, puisqu'il s'agit d'honorer l'un des engagements fondamentaux du Président de la République, qui est de ramener, en cinq ans, le taux de chômage moyen de notre pays à moins de 5 %. Il nous faut donc, dès maintenant, déployer toute notre énergie et notre inventivité pour définir et mettre en oeuvre les dispositifs qui permettront d'atteindre cet objectif. Évidemment, tout ne dépend pas du budget de cette mission. La vigueur de la croissance économique et sa capacité à créer des emplois sont l'un des piliers d'une politique dynamique en faveur de l'emploi. Nous y serons attentifs.
Globalement, le projet qui nous est présenté semble être un budget de transition, affichant des orientations prioritaires que nous ne pouvons que partager, à savoir l'accompagnement de la baisse du chômage, la professionnalisation des jeunes, un ciblage de la politique de l'emploi en faveur des personnes les plus éloignées du marché du travail, et la réforme du service public de l'emploi.
Budget de transition, il reste marqué par les lignes directrices des engagements du précédent gouvernement, qu'il s'agisse des contrats aidés du plan de cohésion sociale, de l'inscription des maisons de l'emploi dans les territoires ou de l'expérimentation des contrats de transition professionnelle. Nous demeurons attachés à la philosophie et aux mesures emblématiques du plan de cohésion sociale, que nous avons soutenu. Nous souhaitons que les réformes à venir en amplifient la portée, et non qu'elles le remettent en cause. La mobilisation pour le développement de l'emploi requiert en effet de la stabilité, de la cohérence et de la lisibilité, à la fois dans les objectifs affichés et dans les moyens de les atteindre.
Budget de transition, ses orientations préfigurent l'accomplissement des réformes annoncées, qu'il s'agisse de la fusion ANPE-UNEDIC, de l'expérimentation du revenu de solidarité active, de la réforme des minima sociaux ou du Grenelle de l'insertion. Pour ce qui est de la fusion ANPE-UNEDIC, vous disposez du soutien du Nouveau Centre sur le principe (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), dès lors que la réforme ne repose pas sur une logique comptable, mais qu'elle découle de la volonté d'apporter une meilleure qualité de service et un meilleur accompagnement aux demandeurs d'emplois. Nous serons particulièrement attentifs à ce que les modalités de cette réforme soient débattues avec les partenaires sociaux. Nous serons également très vigilants sur le respect par l'État de ses engagements et sur la mobilisation des villes en faveur de l'emploi, notamment par le biais des maisons de l'emploi.
Nous regrettons que l'une des premières conséquences de la fusion ANPE-UNEDIC soit le gel des maisons de l'emploi, qui constituent l'échelon de proximité et le guichet unique d'accueil des demandeurs d'emplois, des entreprises et des porteurs de projets. Loin d'être un échelon supplémentaire de la politique de l'emploi au niveau local, les maisons de l'emploi ont permis de réunir autour d'une table l'ensemble des acteurs, de décloisonner les différents services et structures, de les mobiliser sur des objectifs partagés au plus près du terrain. Cette dimension territoriale et mobilisatrice de la politique de l'emploi est essentielle et doit être maintenue.
En ce qui concerne le programme « Accès et retour à l'emploi », notre attention se porte sur les contrats aidés du secteur non marchand, dont le nombre passe de 260 000 à 230 000. Ces contrats ont largement contribué, en particulier dans les bassins d'emplois industriels en crise, au recul des chiffres du chômage. Dans les bassins d'emplois, comme celui de Roubaix-Tourcoing – dans lequel je suis élu –, après de nombreuses défaillances d'entreprises, le secteur marchand est évidemment moins créateur d'emplois adaptés aux publics touchés par le chômage, qu'ils soient jeunes ou adultes. L'insertion professionnelle est un parcours, et ces contrats aidés sont un sas utile, un tremplin essentiel pour retrouver, à terme, un emploi durable. La réduction de leur nombre ne doit pas obéir à une logique comptable. Alors que les incertitudes sur la vitalité de la croissance et la capacité de notre économie à créer de l'emploi l'année prochaine perdurent, je souhaite que la baisse programmée ne s'applique pas uniformément et que le nombre de contrats accordés aux différentes régions prenne en considération la situation économique et sociale des territoires.
Par ailleurs, toujours sur le même programme, nous exprimons de très vives réserves sur la suppression, par l'article 57 du projet de loi, de l'allocation équivalent retraite. Cette allocation, qui s'apparente à un minimum social, concerne des personnes qui ont commencé à travailler jeunes – qui ont 160 trimestres de cotisations –, qui ont été longtemps employés, malheureusement sans formation, dans la même entreprise, qui sont à présent éloignées de l'emploi et qui peuvent difficilement, à quelques années de la retraite, s'engager dans une démarche de long terme de reconversion professionnelle – qui coûterait d'ailleurs fort cher. Nous ne comprenons pas la suppression de cette allocation, qui n'est assortie d'aucun dispositif d'accompagnement spécifique de ces demandeurs d'emplois âgés, et qui n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact social. Il me paraît même étonnant de procéder à une telle suppression avant que ne soient entamées la réforme globale annoncée des minima sociaux et la généralisation du RSA et avant le lancement du Grenelle de l'insertion. Pour l'heure, la logique de la suppression de l'AER semble pour le moins contestable, raison pour laquelle nous proposerons un amendement de suppression de l'article 57.
L'examen du programme « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » permet à notre groupe de rappeler son attachement aux exonérations de charges ciblées sur les petites et moyennes entreprises, pourvu qu'elles leur permettent de soutenir la création d'emplois. C'est la raison pour laquelle nous avons défendu en commission un amendement, qui a été adopté, visant à maintenir ces exonérations liées aux contrats de professionnalisation. Nous souhaitons, bien sûr, que l'examen du budget en séance publique confirme le maintien de ces exonérations.
Par ailleurs, le rapporteur pour avis a détaillé en commission les premières conclusions disponibles sur l'expérimentation du contrat de transition professionnelle, et en a relevé les points forts, à savoir sa mise en oeuvre dans le cadre d'un guichet unique, un accompagnement renforcé avec un taux d'encadrement supérieur à la normale, une durée suffisamment longue pour permettre une réelle démarche de reconversion et de découverte des métiers, et une approche ancrée dans la réalité des bassins d'emplois, qui permet de développer une réelle mobilité professionnelle. Alors que les partenaires sociaux travaillent actuellement à moderniser le marché du travail et à sécuriser les parcours professionnels, il nous paraît important que ces premiers éléments soient pris en compte. Nous voudrions, sur ce point, connaître l'avis du Gouvernement.
En ce qui concerne la santé et la sécurité au travail, nous sommes attentifs à la montée en charge des effectifs et des moyens de l'AFSSET. Dans la ligne des conclusions de la mission d'information sur les risques et les conséquences de l'exposition à l'amiante, nous souhaitons que le Gouvernement amplifie l'effort sur les moyens humains de l'Agence.
J'en profite pour ouvrir une parenthèse – bien qu'elle n'entre pas directement dans le champ du budget de cette mission – sur la réforme envisagée du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.
Elle opérerait un recentrage du dispositif sur les personnes réellement exposées à l'amiante, orientation qui peut paraître paradoxale alors que l'INSERM et l'Institut de veille sanitaire viennent de mettre en évidence, dans une étude commune, les dangers d'une exposition même passive à ce matériau.
Nous invitons, donc, le Gouvernement à la plus grande prudence avant de prendre toute décision sur ce point. Là encore, nous serons vigilants.
Enfin, nous souhaitons que le Gouvernement se saisisse, en 2008, de ce grand chantier qu'est la modernisation du dialogue social. Les réformes qui doivent être engagées dans le domaine social demandent la mobilisation et la participation de tous les acteurs de notre démocratie sociale, pourvus d'une légitimité incontestable.
Pour que cela soit le cas, il faut établir des règles tant de représentativité que de financement adaptées à notre époque, c'est-à-dire qui soient lisibles, compréhensibles par tous et transparentes.
L'actualité récente nous a d'ailleurs montré que nous étions loin du compte. Il est temps de définir ce que pourrait être une nouvelle architecture des relations sociales dans notre pays. Nous attendons les réflexions et orientations du Gouvernement dans ce domaine.
Pour conclure dans mon temps de parole, monsieur le président – le Nouveau Centre est exemplaire ! –, c'est donc avec la ferme volonté d'être entendu du Gouvernement sur les différents points que je viens d'aborder, notre groupe exprimera un vote favorable sur les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Laurent Hénart, pour dix minutes, au maximum. Il peut d'ailleurs imiter M. Vercamer en nous faisant cadeau de quelques minutes…
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, quelques mots, au nom du groupe UMP, sur la mission « Travail et emploi », qui actionne les trois leviers d'une politique de l'emploi vertueuse, à savoir la recherche d'une croissance plus forte et plus dense en emploi, un marché du travail plus fluide, régulé par un service de l'emploi efficace, et, enfin, une ressource humaine préparée aux besoins des employeurs. C'est la combinaison de ces trois leviers qui est gage d'efficacité, et non pas la recherche d'une solution miracle. L'engagement du Président de la République, alors candidat, d'atteindre un taux d'emploi de 70 % et un taux de chômage de 5 % est tenable : il suffit, finalement, de poursuivre, peu ou prou, sur le rythme de décrue du chômage constaté depuis la mise en oeuvre du plan de cohésion sociale.
Quelques remarques sur le premier levier, la croissance plus forte et plus riche en emploi. Je constate d'abord que l'ensemble du budget concourt à la réalisation de cet objectif. Je rappellerai notamment l'effort massif consenti en matière d'enseignement supérieur et de recherche, qui nous rapproche un peu – il était temps ! – du niveau fixé par la stratégie de Lisbonne, et qui permet d'envisager le positionnement de notre économie sur des secteurs porteurs. Je mentionnerai également les travaux en cours de la commission Attali visant à lever les freins à la croissance. N'en doutons pas, ils donneront lieu à un ambitieux projet de loi sur la modernisation de notre économie. Je soulignerai enfin que des mesures ont été prises sans attendre. Je citerai principalement la détaxation des heures supplémentaires prévue dans la loi TEPA, qui permet à la fois d'améliorer la compétitivité de notre tissu économique et d'injecter immédiatement plus de pouvoir d'achat.
Un des éléments forts du plan de cohésion sociale est préservé par les choix que vous avez faits puisque vous avez ciblé la croissance sur les secteurs économiques porteurs d'emplois protégés de la mondialisation, de la concurrence internationale et des délocalisations d'entreprises ou de sites d'activité. Je pense bien sûr au secteur du bâtiment, à celui de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration, ou encore à celui des services à la personne. Lorsqu'ils sont en période de croissance, tous ces secteurs recourent à de la main-d'oeuvre : plus de 50 000 emplois depuis trois ans, chaque année, dans le bâtiment, plus de 120 000 emplois, en 2006, pour les services à la personne. Ces emplois sont donc nombreux. Mais, surtout, ils sont protégés perturbations internationales de plus en plus fortes. Cela nous permet ainsi de stabiliser notre politique économique, et de rendre la croissance plus dense en emploi. Il y a dix ans, il fallait deux points de croissance pour être en phase stable, et passer le cap des trois points de croissance pour créer plus de 100 000 emplois. Aujourd'hui, avec 1,5 point, on parvient à faire baisser le chômage, et, avec 2 points, le mouvement enclenché est puissant.
Cela montre que la politique menée porte ses premiers fruits. L'ampleur des chiffres en témoigne : en 30 mois, c'est 500 000 chômeurs de moins et 500 000 cotisants de plus recensés à l'ACOSS. Il importe de cultiver ce mouvement dans la durée.
À cet égard, je dirai quelques mots sur les exonérations de charges, qui ont été longuement évoquées au sein du groupe UMP et en commission des finances, sous la houlette compétente de nos rapporteurs, Frédéric Lefebvre et Gaétan Gorce. Il s'agissait de savoir si les 30 milliards d'euros en question – 20 milliards pour la mesure dite Fillon, 6 milliards pour les heures supplémentaires et 4 milliards pour les exonérations ciblées sur des publics ou des secteurs spécifiques – n'étaient pas excessifs. Je rappellerai tout d'abord l'attachement de notre groupe à la défense des emplois non qualifiés, qui souvent concernent les Français les plus fragiles. C'est grâce à une politique régulière et puissante d'exonération de charges que nous avons pu les créer.
Je soulignerai ensuite que, pour les années à venir, il faudra tenir compte de la décrue du chômage et du nécessaire rééquilibrage des comptes publics, pour faire évoluer cette politique d'exonération. Pourquoi ne pas envisager de passer, par exemple, d'une exonération en taux à une exonération en montant et mettre la discussion de ce montant dans la corbeille de négociations salariales annuelles que l'État anime auprès des partenaires sociaux ? Cela permettrait de lier efficacement exonérations et discussion sur le pouvoir d'achat, et de ne pas remettre en cause les exonérations sectorielles, qui souvent sont la clé du dynamisme de certains secteurs économiques spécifiques.
Venons-en au deuxième levier, la fluidité de notre marché du travail et l'efficacité de notre service public de l'emploi. La France a du mal à faire coïncider l'offre et la demande d'emploi, et on y trouve, comme dans les pays connaissant le plein-emploi, des offres non pourvues alors que nous comptons encore près de 2 millions de chômeurs. Même si celles-ci ont reculé en trois ans, elles restent cependant nombreuses – de l'ordre de quelques milliers – et la fluidité du marché du travail reste donc un enjeu prioritaire.
Je n'insisterai pas ici, monsieur le ministre, sur la concertation que vous menez et qui vise à trouver un équilibre subtil…
…– je ne doute pas que vous y parveniez –, entre la sécurité des parcours professionnels et une plus grande simplicité dans la rupture du contrat de travail. C'est assurément cet équilibre qu'il faut garantir. Si l'employeur doit gagner en simplicité dans la conclusion et la rupture du contrat de travail, le changement d'employeur, ou de métier, doit aussi être accompagné. De ce point de vue, les remarques de Gérard Cherpion sur la CRP et le CTP sont marquées au coin du bon sens. Les expérimentations menées sont porteuses d'enseignement pour la sécurité professionnelle.
Enfin, je ne reviendrai pas sur ce qu'a très bien dit Frédéric Lefebvre à propos de la fusion de l'ANPE et de l'ASSEDIC. Comme moi, il a été séduit par les Jobcentres Plus. À cet égard, les maisons de l'emploi sont un acquis à conserver. Les Jobcentres Plus proposent en effet beaucoup d'autres services, comme les maisons de l'emploi, en tout cas les plus ambitieuses d'entre elles, puisque, à côté de l'ANPE et de l'ASSEDIC, on y trouve aussi l'AFPA, les organismes de formation, les missions locales, les PAIO, les organismes spécialisés dans l'emploi des cadres, des jeunes ou des personnes handicapées. Avoir 200 maisons de l'emploi efficaces permettra sûrement d'accélérer le rapprochement des deux administrations de l'ANPE et de l'ASSEDIC.
J'en arrive très logiquement au troisième levier, conséquence du précédent : il faut préparer la ressource humaine aux besoins des employeurs. Dans notre pays, et c'est une particularité, l'offre de formation est parfois en décalage – c'est le moins qu'on puisse dire – avec les besoins des employeurs, publics ou privés. Le constat est vrai, en effet, pour les entreprises comme pour les administrations. Dans certains métiers, il peut être difficile de trouver des collaborateurs compétents, qualifiés et motivés.
À cet égard, de nombreux outils, développés dans le plan de cohésion sociale, portent leurs fruits. Il y a d'abord le plan massif en faveur de l'apprentissage. On a passé le cap des 400 000 apprentis à la fin de 2006. Un tel niveau n'avait pas été atteint depuis longtemps.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Grâce aux régions !
Et ce, mes chers collègues, grâce à un fonds national de modernisation et de développement de l'apprentissage doté de 250 millions d'euros, que les régions sont heureuses d'empocher, et que l'État est heureux de leur donner tant que les résultats sont au rendez-vous.
Il manque peut-être un sas avant l'apprentissage. Il faudrait creuser l'idée déjà évoquée d'un parcours d'initiation des métiers On le sait, le taux de rupture des contrats d'apprentissage est un des facteurs de fragilité de l'alternance par rapport à nos voisins allemands. La découverte des métiers pendant la séquence du collège permettrait de sécuriser l'engagement dans la voie de l'apprentissage.
Au nom des députés UMP, je tiens à féliciter le Gouvernement pour l'ouverture dont il a fait preuve sur les contrats de professionnalisation, en veillant à ce que des exonérations spécifiques puissent être maintenues pour les moins de 25 ans et les plus de 45 ans. On le sait, ce sont les deux publics les plus exposés. C'étaient aussi les deux priorités des partenaires sociaux lorsqu'ils ont mis au point le contrat de formation en alternance tout au long de la vie, qui concerne tous les actifs jusqu'à l'âge de la retraite.
Frédéric Lefebre a également très brillamment évoqué le Grenelle de l'insertion annoncé par le Président de la République, le 2 octobre dernier, avec Martin Hirsch. J'ajouterai que cette initiative est la bienvenue et qu'elle est aujourd'hui possible parce que le plan de cohésion sociale a simplifié les emplois aidés et a permis une régulation plus souple, avec des enveloppes gérées par les préfets dans les régions, au plus près du terrain, avec la possibilité de basculer les crédits du secteur marchand vers le secteur du non marchand, et inversement, selon les particularités locales d'emploi. Cet acquis doit être préservé jusqu'à ce qu'on soit sûr de ce que doit être le contrat unique d'insertion ou le revenu de solidarité active.
Il est toujours difficile, en effet, de passer d'une phase d'expérimentation réussie dans cinq, dix ou vingt départements, à une généralisation sur l'ensemble du territoire. Quand on raisonne en termes d'atelier et de chantier d'insertion, ou d'emploi aidé, on vise des publics très fragiles, éloignés de l'emploi et connaissant de grandes difficultés personnelles. Le changement de politique doit donc être précédé de la certitude de l'amélioration, grâce à la nouvelle politique, des résultats de l'ancienne.
C'est la raison pour laquelle, les députés du groupe UMP sont attachés à ce que le Gouvernement poursuive sa maîtrise des emplois aidés de manière éclairée et concrète. Je rappellerai simplement à nos collègues de l'opposition que si 260 000 emplois aidés dans le secteur non marchand étaient prévus en loi de finances initiale pour 2007, un peu plus de 300 000 entrées en emploi aidé ont été réalisées en 2007. Cela prouve que le Gouvernement a su mobiliser les moyens pour suivre les besoins d'insertion exprimés par le terrain.
Ça, c'est le discours de la majorité à Paris ! Ce n'est pas la réalité !
Je souhaite que le même bon sens l'éclaire en 2008, dans l'exécution du budget et que, surtout, les expérimentations conduites permettent de dégager les voies du changement, une fois l'évaluation faite. Nous formulons le même souhait pour le plan de cohésion sociale, qui va bientôt commencer sa dernière année d'exécution, puisqu'il se termine en 2009. L'évaluation débouchera sur la mise en oeuvre de nouvelles politiques, sur la base d'un chômage qui aura massivement baissé, afin d'atteindre l'objectif de plein-emploi.
Parce que cette politique est équilibrée, ambitieuse et, surtout, cohérente dans l'articulation des trois leviers essentiels, les députés du groupe UMP voteront les crédits de la mission « Travail et emploi ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Année après année, et c'est une constante au sein des gouvernements de droite, on retrouve toujours les mêmes propos, s'agissant notamment des emplois aidés.
C'est un bon début !
Pour 2008, vous récidivez. En effet, concernant les cadeaux fiscaux, vous n'avez pas eu besoin d'un quelconque Grenelle ou d'évaluation puisque 15 milliards ont été votés à ce titre, au mois de juillet dernier, alors que les Français étaient en vacances. En revanche, s'agissant des emplois aidés, vous avez besoin d'évaluer les dispositifs et vous allez créer de nouveaux contrats. Comment peut-on parler d'évaluation alors que ces emplois aidés existent depuis trente ans ? Cela reviendrait à dire que tous les gouvernements, de droite ou de gauche, qui se sont succédé pendant cette période ont été incapables d'évaluer le dispositif ? Nous serions donc tous si mauvais, collectivement ?
Mais trêve d'ironie et revenons à la réalité, en l'occurrence, bien triste. Bien sûr, les emplois aidés sont nécessaires. Les élus locaux de droite le savent bien puisque, en général, ce sont eux qui les appellent de leurs voeux. C'est bien pour cela – Laurent Hénart vient d'y faire allusion – que 50 000 emplois supplémentaires ont été réintroduits dans l'urgence, en pleine période électorale. Les élus, qu'ils soient de droite ou de gauche, étaient débordés.
Alors d'aucuns prétendent que les emplois aidés ne servent à rien. En général, c'est vrai, on les trouve dans les centres sociaux, les associations culturelles, sportives, ou destinées aux services à la personne, ou encore dans tous ce qui relève de l'insertion sociale, de l'aide à la famille. Autant de billevesées, aux yeux de certains.
Pour illustrer mon propos, je vais donc prendre quelques exemples très concrets dans l'aide à la personne, dans l'humanitaire. Certes, l'idéal serait que, s'agissant de l'hébergement des personnes âgées, on ne trouve que des CDI. Mais tel n'est pas le cas, malheureusement, car les établissements concernés ne peuvent pas faire autrement. Les Restos du Coeur utilisent également des emplois aidés pour seconder les bénévoles. Mais si cela ne vous convient pas, prévoyez des CDI pour les Restos. Les collectivités locales ont également recours à des emplois aidés pour assurer, trois fois par jour, la sécurité à la sortie des écoles. Préfèreriez-vous que cette tâche, importante – les élus locaux le savent bien – soit confiée à un fonctionnaire à temps plein, voire à la police municipale ?
À gauche, nous continuons donc à penser que les emplois aidés sont très utiles, et notamment pour les personnes qui en bénéficient. On ne peut pas à la fois vouloir renforcer la valeur travail et diminuer le nombre des emplois aidés, puisque ceux-ci concernent des gens qui, faute de ce dispositif, resteront inactifs chez eux.
Si c'est là votre conception de la valeur du travail, ce n'est pas la nôtre. Quand on peut travailler en CDI, il faut le faire ; quand ce n'est malheureusement pas possible, la société doit pouvoir offrir un travail utile.
Vous dites que certains retrouvent un emploi. Élu dans un département frontalier, je constate pourtant que nombreux sont ceux qui vont travailler au Luxembourg, notamment quand ils possèdent un certain niveau de formation.
Plus le chômage va régresser, plus vont rester sur le bord de la route des gens pour lesquels nous n'aurons pas d'autre solution que les emplois aidés. Que faut-il faire alors ? Les laisser durablement au chômage, pour en faire demain des RMIstes, puis des SDF ou les condamner à des logements insalubres ? Ne vaut-il pas mieux les utiliser en les accompagnant vers l'emploi ?
Vous êtes très négatifs sur les emplois aidés. J'ai travaillé avec des TUC et j'ai aujourd'hui deux secrétaires de mairie qui sont passées par la case CES et CEC ; ayant bénéficié, en marge de ces emplois, d'une formation parallèle, elles sont remarquables et il serait malvenu de les stigmatiser.
Vous récidivez donc, ce qui n'est pas une surprise, car on vous connaît. Ce qui est scandaleux, en revanche, c'est que vous avez incité, par le biais de campagnes, à la création d'emplois aidés, mais que lorsqu'on s'informe auprès des DDTE, il est répondu que les choses sont en suspens à cause du manque de crédits.
M. Borloo, à qui j'avais dit ici même qu'on supprimait des emplois, m'avait répondu que c'était faux. Je lui ai prouvé pourtant, par A plus B, que c'était vrai et que des adultes-relais avaient bien été supprimés.
Au-delà de divergences d'appréciation profondes, il y a une grande hypocrisie dans les discours que vous tenez au niveau national pour dire que ces emplois sont inutiles, alors que l'on sait très bien, sur le terrain, qu'ils sont nécessaires.
Vous vous en tenez à une conception traditionnelle de l'aide sociale ; nous pensons, nous, qu'il faut accompagner les personnes en difficulté, dans le cadre d'une action sociale bien comprise, qui permet à chacun de rester digne. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Je vous rassure, monsieur le président, je n'utiliserai pas les dix minutes, et sans doute aurai-je donc un avoir…
Monsieur le président, messieurs les ministres, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la mission interministérielle « Travail et emploi » est censée regrouper les moyens de l'action du Gouvernement en faveur de l'emploi et des conditions de travail. La barre a été placée très haut, avec un objectif de 5 % de chômage pour 2012.
Malheureusement pour les Français, j'ai le regret de constater que le Gouvernement ne se donne pas les moyens de ses ambitions, ou plutôt de ses promesses électorales.
En effet, la contradiction majeure, c'est que sur un sujet aussi vital pour nos concitoyens, les crédits de cette mission sont en baisse de 2,5 %, soit un net recul par rapport à 2007.
La région du Nord-Pas-de-Calais, dont je suis originaire, est très durement touchée par le chômage, avec pas moins de 250 000 demandeurs d'emploi. C'est donc avec amertume que je relève que l'éradication de ce fléau est le cadet des soucis du Gouvernement.
Car, au-delà des fantasmes et des élucubrations sur le futur taux de croissance de l'économie, la politique de l'emploi en France se résume à une seule chose : moins de moyens !
Moins de moyens pour le service public de l'emploi, moins de moyens pour les acteurs de la formation professionnelle et moins de moyens pour les dispositifs de contrats aidés, même si ceux-ci ne sont pas la panacée.
En effet, les crédits sont en nette diminution en ce qui concerne les programmes d'accès et de retour à l'emploi. Ainsi, près de 800 millions d'euros, dédiés à l'aide à l'emploi des plus fragiles, ont été tout simplement été supprimés par rapport à l'année dernière, avec les conséquences désastreuses que l'on imagine sur les dispositifs en faveur des jeunes sans qualification, des chômeurs de longue durée, des handicapés, des seniors ou encore des bénéficiaires des minima sociaux.
Est-il besoin de rappeler que ce sont justement ces catégories qui souffrent le plus de la concurrence féroce qui sévit sur le marché du travail ? Dans le Douaisis, 7 300 jeunes sont suivis à la mission locale, alors qu'ils étaient 4 700 en 2004. Vous pouvez compter sur moi pour leur dire, chiffres à l'appui, qu'ils ne sont pas la priorité du Gouvernement. Je leur expliquerai qu'ils sont les laissés-pour-compte d'une politique réglée en plein accord avec le MEDEF, c'est-à-dire dans l'intérêt de quelques-uns et au détriment de millions d'autres.
Par ailleurs, je constate que les actions d'anticipation et d'accompagnement de ce qui est qualifié pudiquement de « mutations économiques » pâtiront de coupes budgétaires, alors que dans le même temps se poursuivent les délocalisations et les restructurations d'entreprises.
Les fonctionnaires ne sont pas épargnés non plus, avec la suppression annoncée de 22 921 postes au plan national, dont 11 200 enseignants. Les collectivités territoriales, qui sont un des principaux employeurs du pays, voient, elles aussi, leurs moyens amputés.
De même, si nous savons que l'ANPE a besoin d'importants moyens humains afin d'assurer sa mission, contre toute logique c'est l'inverse qui est proposé, puisque le budget prévoit la suppression de 183 postes. Je regrette également que les personnels de la formation professionnelle de l'AFPA et des missions locales d'insertion soient lourdement pénalisés, alors qu'ils sont des acteurs clés de la lutte contre le chômage.
La marche pour l'emploi, organisée du 24 au 27 septembre à l'initiative des parlementaires communistes du Nord-Pas-de-Calais, qui a conduit une centaine de demandeurs d'emploi de Lille à l'Élysée, où ils ont été reçus par un chargé de mission, a alerté les médias et la population sur la situation dramatique de notre région.
Ils ont aussi été accueillis dans ma circonscription par l'un de mes collaborateurs, à votre demande.
Merci, monsieur le ministre.
L'activité économique ralentit, ce qui signifie que les salariés ne travailleront pas plus, en dépit de la défiscalisation des heures supplémentaires. Je dois maintenant ajouter qu'ils ne travailleront pas mieux, au regard de la baisse des crédits consacrés à la santé et à la sécurité des salariés.
Désormais, les choses sont claires : alors que les Français n'ont jamais autant souffert de la précarité et du chômage, il n'y a pas de réelle politique de l'emploi en France. La politique proposée consiste à faire croire que les salariés travailleront plus, sans souci de ceux qui désirent travailler et qui n'ont pas cette chance.
Le gouvernement UMP ne sait faire qu'une chose : exonérer fiscalement et socialement les entreprises, aggravant les déficits publics, et cela, en dépit de toutes les études démontrant que cette politique est non seulement inefficace sur le front du chômage mais également responsable du tassement de la grille des salaires.
La faiblesse des crédits alloués à la mission budgétaire « Travail et emploi » atteste du manque de combativité du Gouvernement, alors qu'il est pourtant plus que temps d'investir dans la formation professionnelle et l'apprentissage. De même, donner à l'ANPE les capacités juridiques, humaines et financières de jouer réellement son rôle d'accompagnement des chômeurs devrait être une priorité nationale, et ne peut se confondre avec le projet contesté et contestable de fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC.
C'est par ses actes que la majorité indique pour qui elle travaille réellement : le grand patronat, et non, comme elle le prétend, « la France qui se lève tôt ». Pour toutes ces raisons, les députés communistes et républicains voteront contre cette partie du projet de loi de finances. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je vais démontrer comme à mon habitude qu'il existe une riche diversité au sein du groupe UMP. Les rapporteurs et mes collègues de l'UMP ont clairement mis en lumière les aspects positifs de ce budget. Je soulèverai pour ma part quelques questions pratiques qui, je l'espère, vous conduiront, messieurs les ministres, à orienter encore plus positivement vos actions en faveur de l'emploi, notamment lors du Grenelle de l'insertion.
Au nombre des sujets qui me préoccupent se trouve le problème des maisons de l'emploi, déjà abordé par plusieurs de mes collègues. J'ai en effet le sentiment que tout le monde n'a pas perçu l'intérêt de ce projet.
Il a déjà été mis en oeuvre dans plusieurs communes et soutenu par les représentants de l'État dans les départements, qui ont parfois été jusqu'à élargir les bassins d'emploi concernés et ont incité les communes à se réunir pour mettre en place ces dispositifs – car il s'agit bien de dispositifs et non de structures.
Peut-être quelques élus en ont-ils profité pour se construire des « châteaux pour l'emploi », mais ce n'était pas l'objectif. L'objectif était de mettre en réseau les différents acteurs de l'emploi, associations, élus, service public de l'emploi, tous ceux, en somme, qui contribuent à faciliter l'itinéraire vers l'emploi pour ceux qui en sont éloignés.
Mais les maisons de l'emploi doivent aussi permettre d'anticiper sur les restructurations industrielles et les emplois futurs. Elles sont un lieu où les acteurs de l'emploi peuvent élaborer ensemble des partenariats avec les entreprises pour préparer les emplois de demain, mission pour laquelle, jusqu'à présent, le service public de l'emploi ne possédait pas tous les atouts.
Je suis d'accord sur la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC, malgré les problèmes qu'elle posera, car elle permet des synergies intéressantes, notamment pour l'usager, qui verra les délais raccourcis.
Quant au dispositif des maisons de l'emploi, il nous crédibilise vis-à-vis du secteur économique, en permettant de mieux anticiper les restructurations industrielles – fréquentes, à n'en pas douter, dans les années à venir – et en impliquant personnellement les élus dans la lutte pour l'emploi.
Or, sans les élus, proches de la population et de la réalité des territoires, le service public de l'emploi ne peut assumer cette mission. Les temps ont changé depuis que j'ai créé, il y a vingt-cinq ans, les premières missions locales, et qu'on me disait que ce n'était pas le rôle des élus locaux, mais des services de l'emploi. À l'époque, pourtant, le taux de chômage ne s'améliorait pas, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
Quoi qu'il en soit, j'espère que la mission confiée à Jean-Paul Anciaux permettra d'éclairer largement cette première question.
En second lieu, j'évoquerai les contrats aidés. La notion de contrat unique me va, car elle met un terme à l'enchevêtrement de contrats dans lequel tous se perdent. La suppression du CEJ ne me pose pas de problème, car je n'ai jamais été très favorable, à titre personnel, au financement de l'insertion dans l'entreprise, considérant que celle-ci n'est pas un lieu de réinsertion mais un lieu d'insertion et qu'il vaut mieux éviter les effets d'aubaine.
En revanche, les emplois aidés sont des outils utiles mis à la disposition des structures associatives et des collectivités territoriales. Ils contribuent largement à la réinsertion de gens éloignés de l'emploi et remplissent des missions dont on sait très bien aujourd'hui qu'elles ne sont pas toujours facile à financer.
Or le nombre de ces emplois aidés est plutôt en baisse, ce qui soulève quelques interrogations, notamment à propos des quartiers en difficulté. J'attire en effet votre attention, monsieur le ministre, sur quelques chiffres. Si le chômage diminue globalement dans notre pays – ce dont on peut se féliciter – ces quartiers restent les plus touchés : le taux de chômage y est de 22 % pour les 16-59 ans, contre 10 % au niveau national, et de 42 % pour les 16-25 ans, contre 23 % en moyenne.
Or dans le cadre des politiques de la ville, les quartiers ont été incités, depuis plusieurs années, du fait de la réduction du fonds d'intervention pour la ville, à s'orienter vers le FSE pour financer leurs actions en matière d'emploi, de formation et de lutte contre les exclusions.
Que va-t-il se passer désormais, puisqu'en 2006 le FSE n'a versé ni acomptes ni compléments, qu'aucune notification n'a permis, en 2007, de négocier les découverts avec les banques et que, pour 2008, on sait simplement que les crédits sont réduits ?
Monsieur le ministre, ce n'est pas forcément de votre fait. Mais peut-on compter sur vous pour faire le point avec les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle afin d'assurer une bonne gestion du FSE, faute de quoi, de nombreuses structures d'insertion et d'emploi sur le territoire vont se casser la figure ? Le Grenelle de l'insertion nous permettra de répondre en partie à ce problème, mais votre intervention sera sans doute encore plus efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, alors que l'accès à l'emploi, la lutte contre le chômage et la précarité restent la première priorité des Français – même si le pouvoir d'achat devient une préoccupation constante et légitime –, les inégalités se creusent sans que la croissance soit au rendez-vous.
Le plan de cohésion sociale annoncé à grand renfort de publicité avant l'élection présidentielle se trouve incontestablement être revu à la baisse. « État en faillite » oblige ! Les contrats aidés enregistrent une baisse globale qui se situe autour de 25 %, sans que nous puissions à ce jour et avec précision dire quel est le taux de chômage réel dans le pays, quel poids réel représentent les emplois précaires à temps partiel qui viennent gonfler les effectifs des travailleurs pauvres ou augmenter le nombre de RMIstes. Les publics les plus éloignés de l'emploi, et particulièrement les jeunes, restent les parents pauvres de votre politique, plutôt de votre absence de politique, en ce domaine.
La formation, la qualification pourtant insuffisante et nécessaire dans ce pays, je pense notamment aux contrats de professionnalisation, à la validation des acquis de l'expérience, n'entrent plus dans vos priorités, à moins que vous ne comptiez sur les régions pour intervenir non seulement dans le cadre de leurs compétences, mais également en substitution des vôtres. C'est vrai que nous en avons l'habitude !
Désengagement, absence de volontarisme politique concernant notamment les publics en difficulté, telle est la caractéristique de la mission « Travail et emploi » de ce projet de loi de finances pour 2008.
Le désengagement, j'oserais même dire la désinvolture alliée à la méconnaissance du terrain de notre ministre chargé de l'emploi, le non-respect des engagements de l'État, le non-respect des élus locaux sont parfaitement symbolisés par la décision que Mme Lagarde a prise, sans aucune concertation, avec la brutalité qui caractérise ce gouvernement, de ne plus financer et de ne plus conventionner les maisons de l'emploi. Il est vrai que, déjà, des tâtonnements, des reculs avaient présidé à cette politique qui devait être une mesure phare du plan Borloo !
Messieurs les ministres, vous mettez délibérément les élus, les partenaires de ces structures dans des situations extrêmement difficiles car, pour certains d'entre eux, les travaux sont en cours, budgétés, les maisons de l'emploi ayant déjà fait l'objet d'une labellisation de l'État et du ministre en charge du dossier à l'époque, je veux parler de M. Borloo, sur proposition d'une commission de labellisation à laquelle j'appartenais en tant que représentante de l'Association des régions de France, commission présidée par notre collègue Anciaux, bras armé du gouvernement de l'époque et qui, j'en suis sûr, continuera son action volontariste.
Plus grave : vous prétendez aujourd'hui que la fusion ANPE-ASSEDIC a comme premier objectif le service rendu aux demandeurs d'emplois, mais aucun financement n'est prévu pour assurer les investissements immobiliers nécessaires à l'obtention d'un guichet unique sur les bassins d'emploi, à moins qu'ici aussi vous ne sollicitiez les collectivités locales pour assurer ou participer aux investissements nécessaires. Je doute, pour des raisons évidentes, que la réponse soit positive, même parmi les plus convaincus.
Mme la ministre affirme que, grâce à cette fusion, le taux de chômage sera ramené à 5 %. Par quels moyens ? Ne s'agit-il pas d'abord de mettre en oeuvre une politique de coercition à l'encontre des demandeurs d'emploi, une indemnisation réduite, cependant que, déjà, moins d'un chômeur sur deux inscrits à l'ANPE est indemnisé et que le système d'allocation est loin d'assurer un revenu de remplacement à un niveau financier correct ? Si c'est le cas, pourquoi ne pas le dire ?
La fusion n'est-elle pas également, en arrière-plan, la recherche d'économies d'échelle, de moyens, de personnel ? Pour quelle politique économique et sociale ? Pour quelle définition du service public de l'emploi ? Les termes « service public » vous sont étrangers. En vous écoutant, on pourrait le croire, et encore ne savons-nous pas tout de vos projets.
Une fusion institutionnelle, juridique, aussi opportune qu'elle apparaisse, ne sera pas en elle-même créatrice d'emplois. Plus de sanctions, moins de droits pour les demandeurs d'emploi : cette politique ne pourra pas remplacer le volontarisme politique, celui d'une véritable politique économique et sociale dont le premier objectif est celui de la création d'emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Messieurs les ministres, messieurs les rapporteurs, je ne reviendrai pas sur les sujets évoqués par mes collègues de l'UMP. Je suis bien sûr globalement favorable à ce budget pour l'emploi qui présente de nombreux aspects positifs. Simplement, vous me permettrez de concentrer mon propos sur un point : l'article 56 sur lequel je suis en désaccord.
Cet article reconduit le programme d'aide spécifique à la restauration.
Les majorités successives auxquelles la plupart d'entre nous de ce côté-ci de l'hémicycle ont appartenu ont promis à ce secteur la baisse de la TVA à 5,5 %.
En sachant qu'elle n'était pas possible ! Les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent !
Contrairement à vous, monsieur Muzeau, nous avons fait adopter en 2004, à l'initiative du ministre des finances de l'époque, Nicolas Sarkozy, un plan d'aide de 1,5 milliard pour compenser cette non-baisse de la TVA. Nous avons ensemble, avec la profession, tenu le cap.
Ce programme a permis de créer 50 000 emplois, de supprimer le SMIC hôtelier, de modifier la durée de travail – 35 heures plus 4 heures supplémentaires garanties pour tous les salariés à temps complet –, de revaloriser les salaires – avec l'un des SMIC qui a augmenté le plus au cours des dernières années.
Or l'article 56 ne confirme ces aides que dans la limite des 30 premiers salariés de l'établissement. Je le dis solennellement : c'est une grave erreur car cela remet en cause la parole de l'État ; c'est donc un marché de dupes pour les restaurateurs. Celui qui est aujourd'hui Président de la République déclarait : « Cette aide est clairement conçue dans la perspective d'une baisse de taux de TVA au bénéfice de la restauration. Toutefois, si cette baisse devait être reportée, il est évident que le dispositif devrait être prorogé car on ne saurait accepter que les employeurs augmentent les salaires et que, dans le même temps, l'État cesse de leur apporter leur aide. Ce serait alors un marché de dupes qui mettrait en cause la parole de l'État. »
Oui, mes chers collègues, monsieur le ministre, si cet article 56 n'est pas modifié, il y aura un marché de dupes. Le secteur de la restauration a tenu ses engagements ; nous, nous revenons sur les nôtres.
Certains prétextent que l'Europe peut remettre en cause le système d'aide. De grâce, on nous a fait le coup pendant des années ! On n'a pas baissé la TVA parce que l'Europe pouvait nous condamner, nous disait-on. Mais que chacun prenne ses responsabilités aujourd'hui !
Monsieur le ministre, on a mis en place un plan qui, de surcroît, n'est même pas consommé. Je vous rappelle les chiffres. Sont inscrits au budget 2008 555 millions d'euros, au lieu des 700 millions de 2007. Je vous rappelle que ces 555 millions, à conditions équivalentes, suffisent. Pourquoi changer les conditions ? En 2005, ont été consommés 461,1 millions d'euros, en 2006, 493,4 millions d'euros, et en 2007 pour les six premiers mois, de janvier à juin, 251,2 millions d'euros. C'est-à-dire que les 555 millions d'euros qui sont inscrits au budget suffisent. De grâce, ne changeons pas les règles !
Nous avions aujourd'hui regagné la confiance du secteur de la restauration. Ne la perdons pas par une mesure qui ne fera faire aucune économie au budget de l'État !
Certains arguent aussi que seuls les gros sont touchés. Mais la guerre entre les gros et les petits est finie depuis longtemps, que je sache ! Oui, la mesure ne touchera que les établissements qui ont plus de 30 salariés, mais ce seuil est vite dépassé aujourd'hui dans un établissement situé dans un chef-lieu de département où, sept jours sur sept, des équipes servent de dix heures à une heure du matin ! Nous allons récréer un effet de seuil que nous avons dénoncé à de multiples reprises.
Messieurs les ministres, l'enveloppe est suffisante. Pourquoi changer les conditions d'attribution ? Pourquoi remettre en cause nos engagements ? Pourquoi casser la confiance qu'on avait eu tant de mal à rétablir avec le secteur de la restauration ? Je crois que ce secteur a respecté ses engagements. Nous devons respecter les nôtres. Je vous demande donc que l'article 56 prolonge le plan d'aide dans les mêmes conditions.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je remplace au pied levé Mme Marc, mais avec grand plaisir tant le sujet qui nous rassemble aujourd'hui est, vous en conviendrez, très important.
C'est un sujet qui, effectivement, peut nous rassembler. Cela ne tient qu'à vous !
Mais s'il nous rassemble dans l'hémicycle par notre présence, nous avons évidemment quelques divergences majeures sur la question.
Monsieur le ministre, quand depuis maintenant de nombreux mois, vous nous dites avec vos collègues du Gouvernement, comme le disait d'ailleurs le gouvernement précédent, que le chômage baisse, baisse et baisse encore – nous aurions même le meilleur taux depuis vingt ou vingt-cinq ans ! – franchement, j'aimerais vous croire !
Mais la réalité dans le Nord, celle que je vis chaque jour dans la région de Denain, très proche de celle de la région de Douai de mon collègue Candelier, est malheureusement toute différente.
Les gens sur le terrain m'interrogent : « Monsieur Roy, en haut, ils nous disent que le chômage baisse, mais où ils sont les emplois ? » Ils ne les trouvent pas, et moi non plus je ne les trouve pas ces emplois qui seraient arrivés par milliers !
Il y a la vision parisienne, ministérielle, et il y a la réalité, celle que je vis tous les jours et que vivent les collègues parlementaires présents sur les terrains en difficulté.
Vous nous dites, monsieur le ministre, que des pays réussissent, et l'on cite à l'envi le fameux modèle anglo-saxon, qui serait formidable. Or le taux de chômage est une chose, la réalité en est une autre. Car ce que vous oubliez de dire, c'est que si le taux de chômage est inférieur, il y a une quantité incroyable de travailleurs pauvres ! L'essentiel n'est pas de donner quelques heures de boulot aux gens, mais de leur fournir une fiche de paie qui leur permette de vivre ! Bien sûr, on peut faire baisser le chômage, voire le faire disparaître demain sur le papier ! Mais l'important, c'est de pouvoir vivre grâce à un salaire décent !
Votre budget apporte une réponse en diminuant très fortement le nombre des contrats aidés. J'avoue n'avoir pas très bien compris les raisons pour lesquelles vous vouliez les supprimer. D'habitude, vous vous précipitez pour les augmenter à l'approche d'une échéance électorale, mais, de manière constante, vous voulez les diminuer. Serait-ce par idéologie, comme pour les fonctionnaires ? Mon collègue Candelier a cité le chiffre de 11 200 suppressions de postes d'enseignant. Vous tenez à cette baisse, pour satisfaire votre électorat.
Pourtant, monsieur le ministre, les contrats aidés sont souvent le seul rempart contre le RMI. Ce n'est pas en les supprimant que nous trouverons une solution pour ces millions de Français qui souffrent et ne supportent plus d'alterner des périodes de chômage, de RMI et de contrats aidés. Il faut que nous apportions une réponse nouvelle, objective, afin que tous puissent bénéficier d'un contrat aidé d'avenir — sans jeu de mots sur l'une des formules existantes.
J'ai donc une question fort simple à vous poser : le Gouvernement va-t-il enfin prendre en compte la souffrance de ces millions de Français qui alternent RMI et contrats aidés, de ces travailleurs pauvres — car il est inacceptable de dire qu'on va supprimer le chômage en créant des travailleurs pauvres — ou de ces retraités touchant de petites pensions, de tous ces gens qui espèrent et attendent beaucoup ? En tout cas, nous, nous serons à leurs côtés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les contrats aidés, tels ceux du dernier plan de cohésion sociale — contrats d'accompagnement dans l'emploi, CAE et contrats d'avenir —, sont régulièrement attaqués sous différents prétextes. Ils seraient inutiles par suite de l'amélioration de la situation de l'emploi, parce qu'ils déboucheraient rarement sur des CDI ou parce qu'il existerait d'autres dispositifs plus efficaces.
Je voudrais cependant réagir en élu de terrain : il faut que nous disposions d'une boîte à outils dans laquelle nous trouverons ce qui convient à chacun de nos compatriotes sans emploi…
…afin qu'il puisse accéder le plus rapidement possible au rêve de sa vie : un CDI bien payé.
Dans nos quartiers sensibles, la politique volontariste de l'État — par l'intermédiaire, notamment, des équipes emploi-insertion — a permis une prise en main individuelle de tous les chômeurs, quel que soit leur âge. Pour différents motifs, dont la plupart sont sociaux, ils sont tous très éloignées de l'emploi. Or, grâce à des emplois aidés qui s'appuient sur le tutorat et la formation pendant une période, assez longue, de deux ou trois ans, certains d'entre eux, en nombre croissant, ont réussi à décrocher des CDD ou des CDI. Pour eux, les emplois aidés ont été un vecteur, un tremplin. Cela marche, cela demande du temps et de la patience, mais c'est le seul moyen de faire sortir de l'impasse du chômage des personnes qui, pour beaucoup, étaient devenues totalement atones vis-à-vis de l'emploi et n'avaient aucune chance d'être embauchées par voie directe, même dans le cadre d'un CDD de très courte durée.
Bien entendu, l'attribution de ce type d'emploi doit rester ciblée, et il faut cependant éviter d'en changer régulièrement les modalités. Dans nos zones sensibles, un traitement urbain de grande ampleur a été mis en place. Les emplois aidés relèvent d'un traitement humain. La conjugaison de ces deux approches fait que, désormais, les habitants de ces secteurs ne se sentent plus abandonnés. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, ne les décevez pas. Continuons à oeuvrer comme nous le faisons actuellement. Contrairement à ce qui a été affirmé tout à l'heure, je sais que vous êtes tous les deux des élus de terrain et que vous ferez le nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Merci de votre confiance !
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, de 2005 à 2007, le taux de chômage a décru de manière continue. En 2007, la baisse du chômage se confirme : le nombre de demandeurs d'emploi a diminué de 9 % pour s'établir à 1 942 600. L'ensemble des catégories de demandeurs d'emploi bénéficie de cette amélioration : moins 23 % sur un an pour les chômeurs de longue durée, moins 8,7 % pour les jeunes et moins 10 % pour les personnes de plus de cinquante ans.
La bataille pour l'emploi commence donc vraiment à porter ses fruits et le paysage de l'emploi est plus favorable, même si la situation reste toujours difficile, avec un taux de chômage provisoirement estimé à 8 % par l'INSEE pour 2007.
Il y aurait beaucoup à dire, tant le sujet est vaste, tant sont divers et complémentaires les moyens mis en oeuvre pour atteindre l'objectif, fixé par le Président de la République, d'un taux de chômage proche du plein-emploi. Je m'attarderai pour ma part sur la politique d'accompagnement des chômeurs et d'adéquation entre l'offre et la demande, car elle me semble primordiale.
La dynamique est lancée : 160 000 emplois ont été créés en 2005 ; 256 000 en 2006. Pour le premier semestre de 2007, ce sont 126 800 emplois qui ont déjà été créés dans le secteur marchand, et les estimations de l'INSEE tournent autour de 300 000 créations sur l'année, en particulier dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, dans les filières professionnelles, dans l'action sociale et les services à domicile.
Cependant, nombre d'offres d'emploi ne sont pas satisfaites. La mission du service public de l'emploi consiste précisément à travailler à optimiser l'ajustement entre l'offre et la demande. Il s'agit notamment de ramener à moins de trente-six jours en 2010 le délai dans lequel les offres d'emploi sont satisfaites.
On constate par ailleurs une certaine segmentation du marché du travail : près de neuf salariés sur dix sont en CDI tandis que sept embauches sur dix se réalisent avec un contrat court. De plus, les sorties d'entreprise sont en très grande partie des fins de CDD : c'est dire qu'une très grande majorité de salariés possèdent un contrat stable, tandis qu'une minorité subit un turn-over fréquent entre emplois précaires, CDD, intérim et chômage.
C'est auprès de ce public-là que le service public de l'emploi doit être particulièrement présent, en rendant toujours plus cohérent et lisible le parcours des demandeurs d'emploi.
Je me réjouis donc, messieurs les ministres, du projet de fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC qui seront regroupés au sein d'un grand service public de l'emploi. Il s'agira d'un outil majeur de cet accompagnement individuel des chômeurs qui est un corollaire indispensable et nécessaire à la souplesse du marché du travail et qui participe à une meilleure adéquation entre l'offre et la demande.
En la matière, les maisons de l'emploi, créées dans le même état d'esprit d'amélioration du service public de l'emploi, ont fortement contribué, là où elles ont été installées, aux rapprochements entre tous les acteurs, éclairant les besoins des territoires.
Je pense notamment aux problèmes caractéristiques des territoires transfrontaliers. Il a été question tout à l'heure du Luxembourg, mais je pense aussi au Jura, par exemple, proche de la Suisse, ou aux territoires qui sont fortement dépendant de filières spécifiques — chaque bassin d'emploi a ses particularités.
Les logiques de territoire sont intégrées au plus près, dans ces maisons de l'emploi, par l'implication des différents partenaires institutionnels et privés, grâce à la souplesse de leur forme juridique.
J'attire donc votre attention, messieurs les ministres, sur la nécessité d'une coopération élargie autour du nouveau service public de l'emploi : elle doit se faire, certes, entre l'ANPE et l'ASSEDIC, mais aussi, beaucoup plus largement, autour des différents acteurs fédérés par les maisons de l'emploi.
Comment concilier au mieux la valeur ajoutée de chacun ? Une fusion réussie devra créer, autour de l'indispensable guichet unique facilitant le parcours des demandeurs d'emploi, une véritable synergie des acteurs dans des actions territoriales. C'est, à mon sens, le seul moyen d'accompagner au mieux les demandeurs jusqu'au retour à l'emploi. Les attentes en la matière sont très grandes. Je sais, messieurs les ministres, que vous en avez pleinement conscience et que vous mettrez tout en oeuvre pour relever ce défi.
La parole est à M. Jean Ueberschlag, dernier orateur inscrit, pour cinq minutes.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans le cadre de la discussion des crédits de la mission « Travail et emploi », je n'ai guère entendu parler de formation professionnelle.
Vous me permettez donc de ne consacrer les cinq minutes qui me sont accordées qu'à ce sujet.
Il y a bien longtemps déjà, un certain Alvin Toffler écrivait : « Nous connaîtrons sans aucun doute une société où tout le monde risque de passer par le chômage. Tout le monde devra redevenir étudiant sans cesse. Nous allons nous apercevoir que l'on ne peut plus séparer formation et travail. » Je n'ai pas le sentiment que, à ce jour, nous nous en soyons vraiment aperçus : nous n'avons toujours pas véritablement réformé le livre IX du code du travail, nous n'avons toujours pas voulu transformer le contrat de travail en un vrai contrat de travail formation, avec obligation, pour l'employeur, de former et, pour l'employé, de se former. Je n'ai pas non plus le sentiment qu'on ait suffisamment perçu et pris en compte les enjeux de la formation professionnelle.
Ces enjeux sont humains, d'abord, ne serait-ce que du point de vue de la promotion sociale. Ils sont ensuite économiques, puisque, dans un nombre important de métiers, on constate une persistance du déficit croissant de main-d'oeuvre et de qualification : la réponse à cette situation n'est pas le recours à l'immigration, mais la formation. On sait aussi que, depuis longtemps, la formation va plutôt vers ceux qui sont déjà bien formés. Il y a quelques jours, la presse rapportait que seuls 10 % des chômeurs ont bénéficié d'une formation. Manifestement, il y a là quelque chose qui cloche.
Mais les enjeux sont aussi financiers, et c'est là que le bât blesse. La formation professionnelle mobilise des sommes colossales : plus de 26 milliards d'euros en provenance des entreprises, dont la part augmente, de l'État, deuxième financeur, dont la part diminue, et des régions, dont elle augmente. Même si l'on peut déplorer que la part de l'État diminue, il ne faut pas oublier que les moyens globaux de la formation professionnelle sont en augmentation. La récente loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social a dégagé des moyens supplémentaires et, alors que les charges des entreprises ont augmenté, alors que, d'une année à l'autre, les sommes collectées ont augmenté de 28 % au titre de l'alternance, de 9 % au titre du plan de formation, de 40 % au titre du congé individuel de formation en CDI, on constate que les entrées en formation diminuent.
Le nombre de collecteurs a longtemps été pléthorique. Plusieurs lois ont essayé d'y remédier : la loi quinquennale en 1993 et, plus récemment, la loi de modernisation sociale. Cependant, ce nombre reste singulièrement élevé. Pour la taxe d'apprentissage, on compte 150 collecteurs et une centaine pour la formation professionnelle continue, ce qui fait qu'il n'y a aucun contrôle efficace. On le sait, chaque année ne peuvent être contrôlés que 3 % des sommes collectées et 1 % des organismes de collecte.
Ces collecteurs risquent de n'être contrôlés que tous les trente ans, ce qui explique les dérives si souvent dénoncées et jamais corrigées.
Il est de notoriété publique que le paritarisme, cette exception française aujourd'hui totalement obsolète, se finance sur le dos de la formation professionnelle. Des rapports de la Cour des comptes et de l'IGAS l'ont régulièrement souligné. Il y a quelques années, un rapport du service central de prévention de la corruption notait : « Les fonds collectés pour la formation professionnelle autorisent de multiples montages frauduleux et des détournements, d'autant que les excédents de trésorerie des organismes collecteurs sont difficilement contrôlés. »
Quand on se rappelle que, selon les dires du MEDEF lui-même, seule la moitié de l'argent collecté pour la formation professionnelle va à des actions de formation, quand on voit que des magazines comme L'Express ou Le Point ont pu parler à ce propos d'ententes suspectes ou de racket sans que personne ne proteste, cela laisse rêveur.
Messieurs les ministres, il y a le feu dans la maison et l'incendie se répand. Si nous n'intervenons pas, qui le fera ?
Il faut réformer. Je sais que c'est votre intention, que c'est l'intention du Président de la République. Un tout récent article du Monde soulignait que la clef d'une réforme rendant la formation professionnelle continue accessible à tous résidait dans le contrôle des fonds gérés paritairement. Pour contrôler ces fonds, il faut contrôler leur emploi mais surtout leur collecte. Le Gouvernement vient de le faire pour les cotisations d'assurance chômage en les confiant à un collecteur unique, l'URSSAF.
Messieurs les ministres, faites de même avec les fonds de la formation professionnelle : faites table rase de ces collecteurs vertueux beaucoup trop nombreux ; recentrez la collecte ; instaurez un collecteur unique. Pour plus de responsabilité, plus de transparence, plus d'efficacité car la réforme est source d'économies, pour plus de solidarité aussi, car il faut un minimum de mutualisation, donc de péréquation, n'ayez pas peur, réformez ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais tout d'abord remercier tous les orateurs qui se sont exprimés et tout particulièrement évidemment les rapporteurs spéciaux et le rapporteur pour avis de cette mission « Travail et emploi ». Avant que Xavier Bertrand ne réponde à telle ou telle de vos interrogations, je voudrais vous dire combien cette exposition par l'ensemble des orateurs des différentes options est importante. Toutes les interventions étaient, à mes yeux, intéressantes.
En élisant Nicolas Sarkozy Président de la République, les Français souhaitaient une rupture, une dynamique nouvelle qui concerne au premier rang l'emploi. Je peux vous assurer que nous avons la ferme détermination de mettre cette rupture en oeuvre.
Nous avons deux objectifs à atteindre d'ici à la fin du quinquennat : le premier objectif, c'est le plein-emploi, beaucoup d'orateurs l'ont indiqué, notamment ceux de la majorité, c'est-à-dire un taux de chômage de 5 % ; le second objectif, c'est de faire passer notre taux d'emploi de 63 à 70 %.
Aujourd'hui, où en sommes-nous ? Le taux d'emploi global est de 63 %, contre 66 % en moyenne dans l'OCDE, taux que nous devons rejoindre, puis dépasser.
J'en parlerai.
Le chômage des jeunes est nettement en retrait : 26 % en France, contre 43 % dans l'OCDE. Ce pourcentage concerne la tranche d'âge des quinze à vingt-quatre ans. Celui des cinquante-cinq à soixante-quatre ans est de 41 %, contre 52 % en moyenne dans l'OCDE.
Je voudrais remercier Laurent Hénart, l'orateur du groupe UMP, qui a indiqué dans son propos combien il pensait que ces deux objectifs étaient atteignables. Je partage évidemment cette conviction, et, j'en suis convaincu, tous les députés de la majorité avec moi.
Pour atteindre ces deux objectifs, l'État déploie un effort budgétaire global en très forte croissance, comme l'a noté Frédéric Lefebvre. Il évalue cet effort pour 2008 à 14 %, plus précisément à 13,8 %, pour atteindre 49 milliards d'euros en regroupant les dépenses fiscales, pour 10 milliards d'euros, les exonérations de charges compensées à la sécurité sociale, pour 27 milliards d'euros, et les dépenses budgétaires, pour 12 milliards d'euros.
Contrairement à certains propos qui frôlaient la caricature, je pense notamment à ceux de M. Gille…
Mais si, il faut bien le dire.
…cet effort est très important, comme le montrent les chiffres que je viens de vous donner. J'attends calmement les contradictions.
Monsieur Gorce, j'ai apprécié vos propos, notamment lorsque vous vous préoccupez des restructurations industrielles, dont nous aurons l'occasion de reparler au cours du débat, mais les chiffres solidement établis par Frédéric Lefebvre ne sont pas contestables. Il n'y a donc pas, contrairement à ce que vous avez prétendu, un effort budgétaire qui serait ralenti ou diminué.
Bien entendu, le résultat de notre action ne dépend pas uniquement des moyens déployés. Il nous faut aussi une dépense publique plus efficace, plus vertueuse et, pour cela, nous menons quatre grandes réformes structurelles, que vous avez les uns et les autres décrites.
Premièrement, il faut encourager davantage le travail. On ne le dira jamais assez, le meilleur moyen de lutter contre le chômage, c'est quand même de procurer du travail à l'ensemble de nos concitoyens. Il faut donc encourager le travail et non le décourager, comme cela a trop souvent été le cas par le passé.
Deuxièmement, il faut rénover le service public de l'emploi pour le rendre plus efficace et plus adapté aux besoins des demandeurs d'emploi et des entreprises.
Troisièmement, il faut assurer une meilleure formation professionnelle. Vous avez raison, monsieur Ueberschlag, de souligner l'importance de ce point pour l'avenir.
Quatrièmement, il faut mieux cibler notre effort de solidarité dans un contexte de forte création d'emplois dans le secteur marchand.
Première priorité, valoriser le travail. C'est bien cette logique qui a conduit à rassembler au sein d'un même ministère économie et emploi. Valoriser le travail, c'est tout simplement de permettre aux salariés de gagner plus en travaillant plus.
Pour augmenter la rémunération des salariés, la loi que vous avez votée, mesdames et messieurs, sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat défiscalise entièrement les heures supplémentaires pour les salariés. Cette mesure est entrée en vigueur le 1er octobre. Elle n'introduit pas une complexité administrative considérable, en tout cas cette complexité est largement surmontable et surmontée par les experts-comptables. À partir de la trente-sixième heure de travail, le salarié reçoit un triple bonus : 25 % de paie en plus, pas d'impôt, pas de charges.
Au-delà de la question des heures supplémentaires, nous allons faire un effort pour libérer les forces de travail dans notre pays. Je place beaucoup d'espoir dans la simplification. La simplification administrative, la simplification que nous devons aux entreprises de ce pays est certainement la priorité de l'action que je mène, et d'ailleurs je l'ai mise au premier rang du pacte Force 5 que j'ai construit au sein du Gouvernement : premièrement, simplifier, deuxièmement, innover, troisièmement, alléger la fiscalité, quatrièmement, conforter le financement de nos entreprises, cinquièmement, accélérer l'effort de nos exportations.
Nous avons engagé avec Christine Lagarde, dont j'excuse aujourd'hui l'absence – elle aurait aimé répondre elle-même à vos questions mais elle est aujourd'hui en déplacement avec le Président de la République aux États-Unis...
…et avec Xavier Bertrand, le 23 octobre dernier, une conférence tripartite consacrée à la revalorisation de la politique salariale.
Valoriser le travail, c'est aussi favoriser l'émergence de nouveaux métiers, qui fourniront les emplois de demain. Nous avons ainsi décidé de faire le pari de l'innovation. L'innovation est certainement la variable clé aujourd'hui dans l'ajustement économique. Au-delà du travail, au-delà de l'investissement, l'innovation est la réponse principale que nos pays développés peuvent offrir pour le développement économique et la résolution de nos problèmes d'emploi.
L'État va investir directement dans l'innovation. Par exemple, les crédits d'engagement de la recherche industrielle destinés à financer les pôles de compétitivité ou les jeunes entreprises innovantes ont été augmentés cette année de 8 %.
L'État peut aussi inciter les entreprises à innover. C'est dans cette logique que nous avons entamé une réforme fondamentale du crédit impôt recherche. Dans le budget que nous examinons, vous le savez, les crédits d'impôt recherche vont être triplés pour financer les dépenses en matière de recherche et de développement de nos entreprises. Un effort sans précédent de près de 3 milliards d'euros en année pleine !
Mais au-delà de cette puissante impulsion en matière d'innovation, les nouveaux métiers, ce sont les services à la personne qui sont en train de se développer ou de se professionnaliser à grande vitesse. De ce point de vue, l'action qui a été menée par Jean-Louis Borloo, puissamment secondé par Laurent Hénart, mérite d'être soulignée.
L'effort budgétaire en faveur des services à la personne, si l'on additionne toutes les dépenses budgétaires et fiscales consacrées au secteur, passe de 3 milliards d'euros dans le budget de 2007 à 3,4 milliards dans le budget 2008. Nous consacrerons en 2008 des moyens accrus à ce secteur dont nous voulons encourager la croissance.
Sur les exonérations qui sont octroyées et qui ne sont qu'un des dispositifs parmi la dizaine de dispositifs en faveur de ce secteur des services à la personne, nous allons engager un effort de simplification administrative. En trois ans, l'exonération pour les entreprises agréées rejoindra le droit commun. Cette mesure de simplification représentera un surcoût très modéré pour les employeurs et ne touchera pas les publics fragiles.
M. Thierry Mariani, qui est intervenu, comme toujours, avec sa force de conviction, a évoqué le secteur de l'hôtellerie et de la restauration. Je voudrais lui rendre hommage pour la constance qu'il met à défendre ce secteur.
Le secteur de l'hôtellerie et de la restauration est un secteur à très forte composante de main-d'oeuvre, il doit donc continuer à se développer. Pour ce faire, nous pérennisons les aides à la restauration qui n'étaient accordées que pour un an, monsieur Mariani.
En même temps, nous les plafonnons, non pas par souci de pénaliser les entreprises de plus de trente salariés, mais tout simplement parce que si nous n'introduisons pas cette limite, les grandes entreprises devront rembourser un jour le trop-perçu. Rappelez-vous le plan qui avait été diligenté en faveur des industries textiles.
Faute de s'être soumis à la règle de minimis, qui nous permet de ne pas stipuler à Bruxelles les subventions, les entreprises textiles françaises ont été obligées de rembourser les aides indûment perçues au regard de la réglementation européenne. Je ne voudrais pas que nous rééditions cette triste histoire de plan textile de 1995.
Quant aux entreprises de moins de trente salariés, dont je rappelle qu'elles représentent 98 % des entreprises de ce secteur, elles ne seront pas affectées. Elles ont aujourd'hui une bonne visibilité car elles sont assurées de la pérennité du dispositif. Je crois que nous avons réussi à trouver un compromis qui, comme tout compromis, n'est ni entièrement satisfaisant ni totalement mauvais.
Deuxième objectif, la modernisation du service public de l'emploi. C'est un chantier déterminant pour limiter notre taux de chômage à 5 % en fin de législature. L'indemnisation du chômage est intimement liée à la recherche d'emploi. C'est un constat que partagent la plupart de nos partenaires. D'ailleurs, l'ANPE et l'UNEDIC ont, depuis plusieurs années, progressivement appris à travailler ensemble.
Aujourd'hui, nous souhaitons aller plus loin. Il est nécessaire d'instaurer pour les demandeurs d'emploi et les entreprises un interlocuteur unique, apte à assurer l'orientation, le placement, l'indemnisation. En fusionnant l'ANPE et l'UNEDIC, nous voulons substituer la proximité des agents à la complexité des structures et je voudrais remercier Mme Dalloz d'avoir indiqué combien cette fusion semblait opportune.
Nous voulons gagner en efficacité et réduire les formalités.
C'est bien une augmentation de la proportion des agents en contact avec les demandeurs d'emploi et les entreprises qu'a obtenue le Royaume-Uni avec la fusion des réseaux de services à l'emploi dans les JobCentres Plus. De nombreux orateurs y ont fait allusion. Pourquoi n'y arriverions-nous pas également ?
Une plate-forme unique cela signifie, sur le terrain, plus de moyens pour nos agents et plus de services pour les chômeurs. Une fois cette réforme soumise à la négociation avec les partenaires sociaux, le Parlement légifèrera.
Quels sont les grands axes de cette fusion ?
Premièrement, le maintien d'une structure gérée paritairement au niveau national, responsable des règles d'assurance chômage et de la gestion financière des cotisations sociales : l'UNEDIC.
Deuxièmement, l'unification des missions de service aux demandeurs d'emploi pour l'indemnisation, l'accompagnement, le placement, au sein d'une institution nouvelle créée par la loi et financée par le régime d'assurance chômage et par l'État, ce qui permettra la construction d'une nouvelle offre centrée sur la formation et l'accompagnement.
Troisièmement, un pilotage stratégique des politiques de l'emploi au sein d'un conseil d'orientation présidé par la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, Christine Lagarde. En l'occurrence, ce conseil veillerait à la cohérence d'ensemble du système.
Quatrièmement, nous veillerons à des modalités de mise en oeuvre aussi pragmatiques que possible pour tenir compte des préoccupations des agents des deux institutions quant à leur statut.
Les réseaux spécialisés auront évidemment un rôle dans cette nouvelle architecture. Je pense à l'Agence pour l'emploi des cadres, aux missions locales ou aux maisons de l'emploi dont ont parlé de nombreux orateurs. Il ne faut pas caricaturer les choses. Je regrette que Mme Iborra ait parlé d'incompétence du ministre de l'emploi, ce qui était outrancier, ou dénoncé on ne sait quel abandon des maisons de l'emploi !
Notre seul objectif est de rendre le système plus logique. Comment pourrait-on continuer à créer des maisons de l'emploi au moment où nous nous apprêtons à fusionner l'ANPE et l'UNEDIC ?
Je vais donner quelques précisions pour répondre aux interrogations, de bon aloi celles-ci, de MM. Vercamer, Cardo et Jacquat. S'agissant des maisons de l'emploi, nous avons décidé de suspendre le déploiement des nouvelles entités.
Celles qui existent déjà ne sont absolument pas remises en cause. L'État en conventionnera du reste encore une trentaine d'ici à la fin de l'année afin de respecter les engagements pris. Voilà la réalité ! Je vous indique d'ailleurs que votre collègue M. Anciaux a accepté une mission d'examen au cas par cas des projets encore en cours, en liaison avec le pouvoir exécutif.
Cette nouvelle institution, née de la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC, aura un rôle majeur à jouer dans les régions touchées par les restructurations. Comme vous l'avez dit, monsieur Cherpion, l'expérimentation du contrat de transition professionnelle constitue une base intéressante que nous devrons, à l'évidence, intégrer dans le nouveau dispositif. En effet, ce contrat allie prise en charge matérielle, mise en situation d'emploi et actions de formation, dans une panoplie d'outils complémentaires. C'est précisément ce que nous voulons faire et vous avez dressé mieux que je n'aurais su le faire, monsieur Cherpion, un premier bilan de ce contrat de transition professionnelle. Vous avez souligné le travail mené par l'IGAS qui établit un premier bilan permettant de porter un jugement plutôt satisfaisant sur les effets de ce dispositif. Évidemment, il faudra tenir compte du calendrier des négociations engagées par les partenaires sociaux, mais je suis convaincu que ces contrats seront utiles et qu'il faudra envisager de les étendre.
La réforme du service public de l'emploi implique aussi celle de la formation professionnelle. C'est tout à fait exact. M. Hénart et M. Ueberschlag ont eu raison d'insister sur cette donnée essentielle qui consiste à réussir la formation professionnelle dans notre pays. S'agissant de la formation des jeunes, les dispositifs d'alternance seront renforcés avec 285 000 contrats d'apprentissage, soit 10 000 de plus que cette année, et 140 000 contrats de professionnalisation, soit 5 000 de plus que dans le budget pour 2007. Vous avez eu raison de le rappeler, monsieur Hénart, l'élan qui a été donné à ces dispositifs d'alternance depuis quelques années seulement est particulièrement spectaculaire. Je m'en réjouis, car j'étais sur les bancs de l'Assemblée pour les voter au cours de la précédente législature.
Venons-en à l'exonération du contrat de professionnalisation. Celle-ci était auparavant plus généreuse que le droit commun. Elle ne le sera plus. Vous regrettez, comme nous, la multiplication des dispositifs. L'exonération à peine plus favorable que le droit commun coûte plus cher à la collectivité en complexité administrative qu'elle ne rapporte aux employeurs en termes d'économies de charges. A titre d'exemple, pour les entreprises de moins de vingt salariés, l'exonération de charges est identique, au niveau du SMIC, à celle des exonérations de droit commun. Voilà la réalité de cette exonération qui s'attache au contrat de professionnalisation. Pour les autres entreprises, celles de plus de vingt salariés, le surcoût sera en moyenne de l'ordre de vingt euros par mois, ce qui est acceptable au regard de l'objectif de simplicité qui nous guide. Nous projetons donc l'alignement du régime social du contrat de professionnalisation sur le droit commun sans surcoût significatif pour les employeurs. Nous examinerons ainsi tout à l'heure deux amendements visant à aménager les conséquences sur les groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification et les adultes en contrat de professionnalisation rémunérés au-delà du SMIC.
Le besoin de formation professionnelle concerne également les adultes. Nous avons entamé un travail de réflexion sur les moyens d'assurer l'avenir de l'AFPA une fois achevé le processus de décentralisation initié en 2004. Par ailleurs, l'État confirme son engagement à financer l'AFPA pour la partie de la commande publique qui n'est pas décentralisée.
Quant aux personnes les moins qualifiées, elles devront accéder davantage à la formation professionnelle continue. Le projet de budget pour 2008 prévoit par conséquent une augmentation très sensible des moyens alloués à la formation des demandeurs d'emploi en fin de droits, qui passeront de 115 millions d'euros à 200 millions d'euros, soit une progression de 80 %.
Cette combinaison de mobilité et de sécurité devrait bénéficier à tous : ceux qui ont un travail comme ceux qui en cherchent un. Néanmoins, il ne faut pas se voiler la face, certains se trouvent aujourd'hui dans des situations plus difficiles que d'autres, et je ne le nie pas. C'est pourquoi nous devons mettre en oeuvre des actions de solidarité qui soient mieux ciblées. La solidarité concerne à la fois ceux dont le travail est menacé par les évolutions du monde moderne et ceux qui ne parviennent pas à trouver ou à retrouver un emploi.
Quand je parle de ceux dont le travail est menacé par les évolutions du monde moderne, je pense aux salariés touchés par les licenciements économiques. Nous devons les accompagner le mieux possible. Nous maintenons notre effort pour les conventions de reclassement personnalisé. Nous poursuivons l'expérimentation sur les contrats de transition professionnelle dans sept bassins d'emploi.
Pour trouver des solutions à plus long terme, le programme « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » du projet de budget pour 2008 comprend également des mesures destinées à améliorer l'anticipation des mutations industrielles à travers des outils comme la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Les moyens consacrés à ces politiques restent considérables avec plus de 400 millions d'euros de crédits déconcentrés qui permettent aux directeurs régionaux de l'emploi d'accompagner les mutations économiques. Cela dit je suis sensible à ce que vous avez dit, monsieur Gorce, et nous aurons l'occasion d'y revenir.
Quand je parle de ceux qui ne parviennent pas à trouver, ou à retrouver, un travail, je pense bien sûr aux contrats aidés. Beaucoup d'entre vous ont abordé ce sujet, les uns pour s'inquiéter de ce qu'ils considèrent comme un désengagement considérable de l'État (« Ce qui est le cas ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), les autres pour constater combien notre politique accompagne la croissance, d'où la moindre utilité de certains contrats aidés, qui jouaient un rôle important en cas de conjoncture défavorable.
Je ne nie pas que le nombre de contrats aidés prévus dans le projet de budget pour 2008 diminue par rapport aux prévisions du budget de cette année.
Mais non ! Faire un aveu, c'est dire quelque chose que l'on espérait pouvoir dissimuler. Je ne dissimule rien ! Je dis simplement que c'est délibérément que nous prenons cette orientation, parce que nous constatons que les créations naturelles d'emploi dans le secteur marchand ont repris de manière forte. Cela vous fait peut-être de la peine, mais c'est la réalité qui s'impose à tous !
Une diminution des contrats aidés a du reste déjà eu lieu. Cependant, au mois de septembre dernier, en dépit de cette baisse, le nombre de demandeurs d'emploi a diminué de 28 000 unités. Voilà la réalité ! Elle vous fait peut-être de la peine, pas à moi, et pas non plus aux 28 000 chômeurs qui ont retrouvé du travail ! La baisse est particulièrement sensible pour les chômeurs de longue durée et les jeunes. Au premier semestre 2007, 183 500 créations nettes d'emploi sont intervenues dans notre pays, d'après les derniers chiffres de l'INSEE, comme l'ont rappelé les orateurs de la majorité. La vigueur de l'emploi marchand a pris le relais pour offrir des emplois en lieu et place des contrats aidés. Comment ne pas s'en réjouir ?
Cependant, M. Cardo a eu raison de rappeler que les contrats aidés peuvent jouer un rôle important dans certaines poches particulières de chômage, en particulier dans les banlieues. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement prépare, sous l'égide de Mme Boutin et de Mme Amara, un plan Banlieues qui devra aboutir à des créations d'emplois. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Tout le monde ne peut pas profiter immédiatement de l'embellie et nous ne pouvons pas abandonner les contrats aidés pour les personnes les plus éloignées de l'emploi, les plus fragiles, qui doivent continuer à bénéficier de cet indispensable accompagnement. Nous voulons simplement recentrer progressivement l'accès à ces contrats sur les publics les plus en difficulté…
…comme les jeunes, les seniors ou les personnes handicapées.
C'est pour cela que je partage l'avis de M. Joyandet s'agissant de la fusion des contrats jeunes en entreprise avec les contrats initiative emploi, qui facilitera l'accès des jeunes à ce type d'emplois.
Quant aux contrats aidés destinés aux personnes handicapées, ils ne sont absolument pas concernés : en septembre, le nombre de contrats aidés en structure d'insertion a augmenté de 2 000 unités par rapport à janvier 2007 et de 1 000 par rapport à mai 2007.
L'ensemble des contrats aidés mis en place par le plan de cohésion sociale fait actuellement l'objet d'une évaluation de la DARES, et c'est sur cette base que nous déciderons des suites à donner pour les améliorer. Nous attendons beaucoup des premiers enseignements qui pourront être tirés de l'expérimentation du revenu de solidarité active. Tout cela fera l'objet du Grenelle de l'insertion, piloté par Martin Hirsch au premier semestre 2008. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Tels sont les grands enjeux de notre politique de l'emploi : revaloriser le travail, parce que c'est du travail des uns que naît l'emploi des autres ; réformer le service public de l'emploi, parce qu'il faut adapter nos structures d'accompagnement et de formation aux évolutions de la société ; repenser les actions de solidarité, parce que la générosité doit elle aussi répondre à des critères d'efficacité. Si nous savons réunir ces conditions, le retour au plein emploi et à la prospérité qui l'accompagnera sera au rendez-vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je crains de pas pouvoir respecter, dans mon temps de parole, la répartition des crédits au sein de la mission, qui relèvent pour 93 % du secrétariat d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur, et seulement pour 7 % de mon propre ministère.
Deux programmes relèvent directement de ma responsabilité de ministre du travail. Le premier, « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail », marque trois priorités, affirmées récemment au cours de la conférence relative aux conditions de travail et dans le plan « Santé au travail ». Il s'agit d'abord de diversifier les financements consacrés aux risques professionnels, ensuite de soutenir la négociation collective, enfin d'organiser les élections prud'homales, en décembre 2008. Nous y consacrerons un montant total de 89 millions d'euros étalés sur trois ans, dont près de 60 millions d'euros figurent au budget pour 2008.
Le second programme « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » rassemble les moyens de fonctionnement des services dédiés à ces deux politiques ministérielles. Ses crédits progresseront au même rythme que l'inflation. Autant dire qu'il sera nécessaire de dégager des gains de productivité en cours de gestion.
Trois éléments me semblent devoir être rappelés.
La répartition des politiques du travail et de l'emploi entre deux ministères ne nous empêche pas de travailler en réseau, avec un interlocuteur unique au niveau local – les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle –, donc un budget unique, dont j'ai la responsabilité, et qui permet d'entretenir des synergies très fortes au niveau local.
D'autre part, nous voulons mieux garantir l'effectivité du droit du travail, en donnant davantage de moyens à l'inspection du travail. C'est tout l'objet du plan de développement et de modernisation de l'inspection du travail, qui va poursuivre sa montée en puissance en 2008. Nous pourrons ainsi constituer de nouvelles sections de contrôle sur le terrain, grâce au recrutement de 170 agents supplémentaires. Ce renforcement trouvera sa contrepartie dans des suppressions d'effectifs équivalentes, supportées par l'ensemble des services, mais situées plus souvent dans les administrations centrales que dans les services déconcentrés.
Je répondrai brièvement à M. Gorce, à M. Lefebvre et à M. Joyandet, qui ont tous trois abordé le problème de l'évaluation. Celle de l'efficacité des politiques de l'emploi est évidemment nécessaire au regard des sommes investies. Outre l'INSEE, plusieurs services du ministère en sont chargés : la DARES, les directions régionales, le CEREQ et, pour ce qui est des évaluations de fond, le Centre d'études de l'emploi, le CEE.
Les crédits globalement attribués aux services du ministère s'élèvent à 17,7 millions d'euros, montant stable depuis plusieurs années. Leur accroissement allant dans le bon sens, je suis favorable par principe à tout amendement qui a cet objet. Cependant, s'il s'agit de lancer des études lourdes, qui se déroulent sur plusieurs années, il est souhaitable que l'augmentation des crédits ne soit pas brutale, mais progressive, et qu'elle s'inscrive dans la durée. Une hausse brusque et non anticipée risquerait de ne pas être suivie d'effets immédiats et pourrait induire à terme une sous-consommation de crédits, ce que je n'aime guère et ce que vous détestez. Aussi, la proposition d'accroître les crédits de la DARES de 3,4 millions d'euros me semble-t-elle prématurée. En revanche, l'amendement de M. Lefebvre reposant sur les mêmes bases mais proposant de transférer 200 000 euros au CEE répond aux critères que j'ai évoqués et me paraît tout à fait pertinent. Le Gouvernement émettra à son sujet un avis favorable. Je le répète qu'il va dans le bon sens.
Je tiens à rassurer M. Gosnat : nous privilégions la négociation sur la réglementation. À mon sens, celle-ci doit être réservée aux principes essentiels qui définissent l'ordre public social. Le reste relève de la négociation, qu'elle soit de branche ou d'entreprise. S'agissant de l'inspection du travail, l'État a consenti, par le biais du plan de modernisation que je viens d'évoquer, lancé par mon prédécesseur M. Larcher, un effort sans précédent, non seulement quantitatif mais qualitatif. En quatre ans, il prévoit la création de près de 700 emplois de contrôleur et d'inspecteur, dont 170 en 2008. Il n'était que temps, pourrez-vous dire. Je suis de cet avis. L'effort doit être poursuivi dans la durée. Mais cela ne signifie pas pour autant que l'application du droit du travail procède du seul contrôle ou relève de la seule sanction. La négociation, à mon sens, est le principal garant d'un droit du travail adapté. C'est aussi le gage de son application.
M. Vercamer et M. Candelier ont évoqué les moyens de l'AFSSET, l'Agence française de sécurité sanitaire, de l'environnement et du travail. Ceux-ci se sont accrus très vite depuis sa création, ce qui répondait à un souci partagé. La subvention versée par le ministère est passée de 5,7 millions d'euros en 2005, à près de 9,6 en 2008. Cette hausse de 68 % en trois ans a permis d'accroître le rôle de tête de réseau de l'Agence, par l'effet des expertises qu'elle confie à des prestataires. Elle lui a également permis de se doter de moyens d'expertise propres, en recrutant dix scientifiques supplémentaires par an – ce sera le cas en 2008 –, soit un total de cinquante recrutements en cinq ans.
Un contrat d'objectifs et de moyens conclu le 17 avril entre l'Agence et ses ministères de tutelle a formalisé et consolidé ces deux objectifs. Cette montée en puissance permettra de poursuivre dans la direction que vous avez évoquée et de lutter contre les effets de l'amiante. Parmi les travaux menés récemment figure une étude sur l'effet des fibres courtes d'amiante. J'espère que cette information rassurera M. Candelier, qui s'est inquiété de nos efforts en matière de santé au travail. Ceux-ci profiteront de ces moyens et seront en outre relayés par les perspectives intéressantes, qualifiées d'avancées tant par les syndicats que par le patronat, ouvertes par la conférence sur les conditions de travail.
M. Vercamer a souhaité une meilleure prise en compte de la représentativité des partenaires sociaux. J'ai évoqué plusieurs fois le sujet dans votre hémicycle, notamment au cours d'une séance de questions au Gouvernement, en réponse à un député du Nouveau Centre. C'est un des thèmes de la campagne électorale, cher au Président de la République. Le Premier ministre François Fillon s'est exprimé lui aussi sur le sujet à cette même tribune. Les partenaires sociaux l'ont évoqué en juin. Le débat est à présent devant nous, et je souhaite qu'il ne soit pas trop éloigné. En effet, poser la question de la représentativité, c'est soulever toutes les questions : celle de l'audience des syndicats, de la validité des accords conclus dans les entreprises et celle du financement des syndicats. J'en ai déjà posé certaines. Qui doit assurer ce financement ? L'État ? Les entreprises ? Les cotisations des adhérents ? Vous savez ce qu'il en est aujourd'hui : au titre de la loi de modernisation du dialogue social du 31 janvier 2007, c'est aux partenaires sociaux, en premier lieu, d'apporter les réponses. Telle est la règle qui a été posée. Non seulement je suis favorable à des avancées en matière de représentativité, mais je souhaite que nous puissions vous soumettre un texte, non en 2010 ou en 2009, mais dès 2008. Dans ce domaine, le plus tôt sera le mieux.
J'espère avoir répondu aux différentes questions des rapporteurs, sachant que M. Cherpion est surtout intervenu sur l'autre volet.
Laurent Hénart a évoqué, de façon subtile, la négociation sur le contrat de travail. Il y a deux manières de la conduire et je sais que, dans ce domaine, M. Jacquat partage nos préoccupations, qui ne sont pas uniquement régionales. La première méthode est unilatérale. Elle tend à instituer des procédures complexes, qui insécurisent tant les entreprises que les salariés. Ce fut le cas, par exemple, en 2002, avec la loi de modernisation sociale. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La seconde manière de procéder consiste à demander aux partenaires sociaux de négocier, à charge pour eux de trouver de nouveaux équilibres entre la nécessaire mobilité des salariés et leur sécurité – ce qu'on appelle en Europe la flexisécurité. Ce n'est pas un membre du Gouvernement qui a eu l'initiative d'en parler : ceux qui l'ont mentionnée le plus ont été, au sein de la Conférence européenne des syndicats, à Séville, les syndicats eux-mêmes. À la suite de leurs propositions, j'ai moi-même proposé, au nom des ministres du travail européens, la mise en place d'un groupe de haut niveau européen pour que l'on puisse avancer sur le sujet et continuer à faire preuve de pédagogie.
Un équilibre doit également être trouvé au niveau du droit du travail. On ne doit pas repousser à ses marges des salariés en situation précaire, sachant les difficultés que connaissent en France les salariés les plus jeunes et les plus âgés. C'est pourquoi nous travaillons, notamment avec Christine Lagarde, afin de proposer, dans le cadre du rendez-vous que nous avons pris pour les retraites, de nouvelles actions peut-être plus imaginatives en matière d'emploi des seniors.
À mon sens, la flexisécurité, dont j'ai le sentiment qu'elle est à portée de main, ne sera possible que si chacun comprend bien qu'elle ne signifie pas flexibilité pour les uns et sécurité pour les autres. Il faut en effet l'une et l'autre pour chacun des partenaires. La flexibilité est indispensable à l'entreprise comme au salarié, dans un marché du travail, qui – on doit le reconnaître en présence de députés particulièrement au fait de ces questions – ne manquera pas de se retourner dans les années qui viennent. Dans ce cas, la flexibilité pourra aussi être recherchée par les salariés. La sécurité, quant à elle, vaut non seulement pour l'entreprise, qui la recherche évidemment, mais aussi pour le salarié. Si le projet ne la garantissait pas, je me refuserais à le cautionner. Nous voulons vivre dans une société de confiance et de dialogue, comme l'a souligné M. Novelli, et, sur ces sujets, il n'y aura pas d'accord entre les partenaires s'ils ne trouvent pas d'avancées intéressantes pour les uns comme pour les autres.
Pour ma part, je souhaite que l'on aboutisse. Je sens bien – je le répète à cette tribune – que les voies d'un accord, qui, aujourd'hui, relèvent de l'entière responsabilité des partenaires sociaux, peuvent être trouvées. C'est une question d'équilibre et de volonté, à condition qu'on mette sur la table de négociation tout ce qu'il faut pour réussir. Jamais nous n'avons été aussi près du but. Jamais les esprits n'ont autant progressé, au niveau européen comme à l'échelon national. C'est pourquoi le Gouvernement est si attentif aux négociations en cours. Il faut un contenu, une méthode et surtout une ambition, en matière de droit et de marché du travail, afin de redonner confiance à chacun. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous en venons aux questions.
Nous commençons par celles du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Je rappelle que chaque intervenant dispose de deux minutes pour poser sa question.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille.
Ma question porte sur les dispositifs dits de « deuxième chance ». Le budget pour 2008 prévoit de nouveau le versement d'une subvention de 50 millions d'euros à l'EPIDE, l'établissement public d'insertion de la défense, qui conduit le dispositif « deuxième chance » visant à mobiliser les moyens de ce ministère pour l'insertion professionnelle de jeunes sans qualification. Prévu pour 20 000 jeunes, le dispositif est loin d'atteindre ses objectifs, bien que son budget global de 107 millions d'euros soit important. À ma connaissance, il concerne moins de 3 000 jeunes, répartis aujourd'hui sur vingt-deux sites, ce qui représente un coût considérable de 30 000 euros par jeune.
D'autre part, diverses collectivités – régions, agglomérations, communes – ont repris, avec le soutien du FSE, le concept européen d'école de la deuxième chance, qui s'adresse au même public et vise le même objectif, à ceci près qu'il s'appuie sur un partenariat avec les entreprises. Aujourd'hui, trente-cinq sites sont ouverts, pour une capacité d'accueil de 4 000 jeunes, laquelle est encore en augmentation. Mais, après avoir bénéficié d'aides exceptionnelles en 2006, puis en 2007 dans le cadre de la politique de la ville, ce dispositif ne semble plus recevoir de crédits. Pourtant, il est en plein développement. Son coût est de 9 000 euros par jeune, et son taux de sortie positive est de 70 %. De surcroît, quand il était candidat, Nicolas Sarkozy a indiqué qu'il souhaitait une école de la deuxième chance dans chaque département.
Elle est simple. Quand mènera-t-on un audit de l'EPIDE ? Quels moyens le Gouvernement compte-t-il accorder en 2008 aux écoles de la deuxième chance ?
Monsieur le député, vous avez évoqué à juste titre l'établissement public d'insertion de la défense. Vous le savez, l'ordonnance du 2 août 2005 a mis en place un dispositif d'accompagnement à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes en difficulté : le contrat de volontariat pour l'insertion, dont l'organisation et la gestion sont confiées à l'EPIDE. Le PLF pour 2008 prévoit la reconduction de la subvention qui lui est versée à hauteur de 50 millions d'euros, ce qui devrait lui permettre de mener une politique d'approfondissement et de recentrage du dispositif, après deux années de développement soutenu.
Le Gouvernement souhaite que l'EPIDE analyse et réorganise le maillage territorial de ses centres d'accueil, pour se trouver au plus près des publics cibles et des bassins d'emploi en développement. Il doit également améliorer la prise en charge des jeunes, afin de garantir une véritable insertion sociale et surtout une véritable insertion professionnelle dans l'emploi durable.
Au total, l'EPIDE devrait donc diminuer le nombre de ses centres, mais maintenir constants ses effectifs, qui se situent aux alentours de 1 500 jeunes accueillis. Cet objectif est possible à subvention constante. Par ailleurs, l'établissement bénéficie également, comme vous l'avez rappelé, de la contribution du Fonds social européen. Vous le voyez, monsieur le député, l'effort du Gouvernement en faveur de l'EPIDE est substantiel. Il s'élève à 50 millions d'euros. C'est dire qu'il est de nature à assurer une insertion de qualité. Je rappelle que le coût moyen par jeune pris en charge s'élève à 33 000 euros.
Être soucieux d'un usage efficace de l'argent public, c'est bien ; mais n'avoir qu'une vision comptable de la mission « Travail et emploi », ce n'est pas nécessairement efficace, ni toujours pertinent.
On a souvent rappelé ici, et nous étions tous d'accord, qu'avant de modifier une mesure ou un programme, il convenait de l'évaluer sérieusement. Qu'en est-il pour quelques dispositifs relatifs aux jeunes ? En leur temps, vous n'aviez pas aimé les emplois-jeunes ; vous aviez tort, les jeunes eux, les avaient appréciés.
Mais, vos nouveaux services-emplois-jeunes, il semble que vous ne les aimiez pas plus, puisque les crédits qui y sont consacrés chutent de 200 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2007, à 61 millions dans le budget pour 2008 ! Le contrat d'insertion dans la vie sociale, le CIVIS, devait tout changer ; pourtant les crédits de cette allocation baissent de plus de 8 %. Est-ce l'échec de cette mesure ? Et je n'ai pas évoqué les 15 millions d'euros inscrits en 2007, concernant les emplois d'utilité sociale du CIVIS, qui disparaissent purement et simplement, sans explications. Quand au fonds d'insertion professionnel des jeunes, ses crédits sont réduits de 30 %. Je pourrais allonger cette liste, mais nous y reviendrons au cours de notre débat.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, pourquoi, contrairement à ce que vous aviez annoncé, ne pas avoir évalué les politiques, les mesures ou les programmes avant de les modifier arbitrairement ? Pourquoi ne pas admettre que les jeunes ont des parcours personnels et que l'insertion de chacun par la qualification et l'emploi, passe par des mesures adaptées à la diversité de ces publics jeunes et non par des mesures globales ?
Peut-être souhaitez-vous simplement inciter massivement les jeunes à se tourner, sans distinction, vers l'apprentissage ? Cette solution serait d'autant plus intéressante pour vous que l'apprentissage relève de la compétence des régions et est à leur charge. Ai-je eu tort, alors, d'évoquer une vision comptable de votre mission ?
Monsieur le député, vous parlez d'une vision comptable, je ne partage pas votre avis.
Lors de mon intervention à la tribune, j'ai tenté de vous dire combien il était important pour nous de simplifier les dispositifs existants et de les recentrer sur les publics qui en ont le plus besoin afin d'accroître notre efficacité à coûts constants. Notre vision n'est pas comptable, elle est tout simplement efficace.
Vous avez fait le bilan des dispositifs existants en relevant les baisses de crédits qui affecteraient tel ou tel contrat et notamment celles qui concernent les contrats aidés dits CIVIS. Facialement, ces crédits sont bien en baisse, c'est vrai, mais nous nous sommes en réalité contentés de reconduire, pour 2008, les crédits qui seront effectivement consommés lors de l'exécution de l'année 2007. En effet, les crédits initialement prévus ne seront pas intégralement dépensés. Le fonds pour l'insertion professionnelle des jeunes subit, pour les mêmes raisons, une baisse de 30 % de ses crédits pour 2008 qui n'est que la conséquence de la sous-consommation de ses crédits de 2007.
Au-delà des polémiques éventuelles et des oppositions naturelles, nous avons sur tous les bancs de cet hémicycle constaté l'importance de l'insertion professionnelle des jeunes. Comparé au taux moyen des pays de l'OCDE, le taux d'emploi des jeunes en France nous engage à la mobilisation. Vous pouvez compter sur celle du Gouvernement.
Le déploiement de moyens toujours plus importants sans tenir compte de l'efficacité n'est pas le gage de cette mobilisation. Et c'est bien là que la majorité se distingue de l'opposition.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, ma question concerne le contrôle des étrangers à l'ANPE, et par l'ANPE. Depuis le 1er octobre, le titre de séjour de tout salarié étranger venant s'inscrire à l'ANPE ou à l'ASSEDIC pour obtenir l'ouverture de ses droits est transmis à la préfecture. La réponse de celle-ci conditionne l'examen du dossier et donc l'ouverture de l'indemnisation ou du suivi pour la recherche d'emploi. Le Gouvernement a justifié cette mesure, qui modifie substantiellement la mission des agents, en invoquant « la lutte contre la fraude documentaire, le travail clandestin, et les faux demandeurs d'emploi ». Si on comprend bien le Gouvernement, seuls les étrangers seraient des fraudeurs, et tous ceux qui sont en situation irrégulière iraient systématiquement s'inscrire à l'ANPE.
Les agents de l'ANPE et de l'ASSEDIC ont pour mission d'assurer le service public de l'emploi et l'indemnisation des chômeurs ayant acquis des droits et ayant cotisé. Il ne relève en aucun cas de leur mission d'exercer un contrôle sur la nationalité des personnes qu'ils reçoivent et encore moins de pratiquer un « devoir » de délation.
Vous rendez vous compte de ce que vous demandez à ces agents ? Lors d'une récente manifestation contre la fusion de l'ANPE et de l'ASSEDIC, un agent de l'Agence nationale pour l'emploi m'a dit : « On n'est pas en 1942 et je ne travaille pas pour Vichy. » (Murmures sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Votre décret crée non seulement une discrimination supplémentaire pour les étrangers – la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, a d'ailleurs été saisie –, mais il transforme aussi le rôle et le statut des agents qui avaient jusqu'à présent pour mission le reclassement des demandeurs d'emploi dans les plus brefs délais. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais savoir ce que vous pensez de cette transformation par décret du service public de l'emploi en bras armé du ministère de l'immigration.
Voilà une question importante. Le sujet semble nouveau, pourtant ce n'est pas le cas puisque la disposition concernée figure dans la loi sur l'immigration votée en 2006.
Certes, mais comme vous le savez il y a un délai entre la promulgation des lois et la sortie des décrets. C'étaient déjà le cas lorsque vous étiez aux affaires.
Madame la députée, vous vous offusquez de voir les employés de l'ANPE se livrer à une pratique que vous qualifiez de délation. Je vous rappellerai toutefois que l'ANPE est soumise à une obligation spécifique lorsqu'elle présente un demandeur d'emploi à un employeur, puisque la personne en question est réputée être en situation régulière. Les conséquences en termes de responsabilité pénale existent et je comprends que les employés de l'ANPE ne s'exonèrent pas de cette obligation. C'est l'application du principe de responsabilité.
Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2008, no 189.
Travail et emploi :
Rapport spécial, n° 276, annexe 44, de M. Gaëtan Gorce, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan ;
Rapport spécial, n° 276, annexe 45, de MM. Alain Joyandet et Frédéric Lefebvre, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan ;
Avis, n° 277, tome XIII, de M. Gérard Cherpion, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Sécurité sanitaire :
Rapport spécial, n° 276, annexe 41, de M. Bruno Le Maire au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan ;
Avis, n° 277, tome IX, de Mme Martine Billard, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton