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Séance en hémicycle du 29 juin 2009 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • dette
  • inflation
  • initiale
  • norme

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2008 (n°s 1695, 1775.)

Mes chers collègues, je vous informe que le Conseil constitutionnel a rendu sa décision sur la résolution réformant le règlement.

En conséquence, cette discussion se déroulera sous l'empire du nouveau règlement qui vient d'entrer en vigueur. Vous pouvez vous le procurer au guichet de la distribution.

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, j'ai l'honneur de vous présenter le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2008.

J'ai bien conscience que l'examen de ce texte peut apparaître en décalage avec les préoccupations du moment. La crise que nous traversons alimente, bien évidemment, les inquiétudes et mobilise tous nos efforts pour en sortir.

Il peut sembler vain de se pencher sur le passé, fût-il d'ailleurs extrêmement récent, lorsque tout nous porte à tourner le regard vers l'avenir, cet avenir que le Président de la République nous a appelés à préparer, avec une ambition renouvelée, il y a une semaine au Congrès.

Pourtant, ce projet de loi de règlement n'est pas complètement étranger à l'actualité que nous vivons et à la vision que nous en avons. Les résultats qu'il présente portent déjà la marque des chocs qui ont secoué notre économie.

Le déficit budgétaire arrêté dans le projet de loi de règlement est de 56,3 milliards d'euros – c'est une augmentation de 14,6 milliards par rapport à la loi de finances initiale et, fait plus significatif, de 4,8 milliards par rapport à la dernière prévision du collectif voté ici même en décembre dernier. Cette détérioration du déficit n'est que la traduction des chocs que nous avons connus, en deux temps, l'année dernière.

Tout d'abord, le choc de l'inflation sur le premier semestre de l'année 2008 – ce n'est pas si lointain, on peut s'en souvenir – s'est essentiellement répercuté sur la progression des dépenses. Celles-ci ont excédé de 4 milliards l'objectif fixé en loi de finances initiale, sous l'effet, essentiellement, d'une forte augmentation de la charge de la dette et, en particulier, du provisionnement de la charge d'indexation des obligations indexées à hauteur de 3,3 milliards au total. La réserve de précaution constituée en début de gestion ne pouvait suffire à contenir l'explosion de ce coût. Il ne faut pas s'en étonner. La réserve nous permet de faire face aux aléas d'une gestion courante ; elle trouve rapidement ses limites face à des chocs de cette ampleur. Ce dépassement de l'objectif des dépenses – inédit depuis plusieurs années – ne témoigne en rien d'un relâchement des efforts. Il faut le resituer dans le contexte d'une inflation qui a pratiquement doublé par rapport à la prévision sur laquelle a été construite la loi de finances initiale de 2008. Rapportée à une inflation observée de 2,8 % en 2008, l'évolution des dépenses respecte strictement la règle du « zéro volume ». Cette règle est d'autant plus exigeante en 2008 qu'elle s'apprécie désormais sur un périmètre de dépense que nous avons élargi aux prélèvements sur recettes en faveur des collectivités territoriales et de l'Union européenne ainsi qu'aux affectations de recettes, fiscales et non fiscales, au profit de tiers.

J'y ajouterai un deuxième motif de satisfaction. L'année 2008 marque d'incontestables progrès dans l'assainissement des relations financières entre l'État et les régimes de sécurité sociale. Souvenez-vous ! L'exercice 2007 s'était soldé par la reconstitution d'une dette de 1,7 milliard envers les régimes en dépit de l'apurement de plus de 5 milliards de dettes constatées au 31 décembre 2006. Un an plus tard, cette dette ne s'est accrue que 0,4 milliard.

Ce résultat est le fruit des efforts que nous avons réalisés : d'abord dans l'amélioration de la budgétisation des crédits, ensuite dans la poursuite de l'apurement des dettes anciennes puisque nous y avons encore consacré 750 millions d'euros l'année dernière. Je souligne également l'effort de redéploiement effectué en fin d'année pour gager l'ouverture de presque 800 millions d'euros de crédits sur les dotations à la sécurité sociale. J'ai bien une légère déception en vous annonçant que l'objectif de stabilisation de la dette envers la sécurité sociale n'a pas été tout à fait tenu l'an dernier. Nous le devons, notamment, aux effets de la crise, par exemple pour ce qui concerne la forte augmentation du coût des prestations d'aide au logement : 200 millions d'euros en fin d'année.

Le deuxième choc est évidemment celui de la crise économique qui s'est développée à la fin de l'année dernière et dont nous voyons principalement les effets dans l'évolution des recettes fiscales. La crise n'a pas attendu 2009 pour se traduire dans les chiffres : la moins-value de recettes fiscales que nous enregistrons frappe par son ampleur. C'est un manque à gagner de 11,7 milliards d'euros par rapport à la prévision inscrite en loi de finances initiale. Sur ce montant, la crise en explique au moins 8,5 milliards. Sans surprise, les moins-values sont concentrées sur les impôts les plus exposés au retournement de la conjoncture. Les recettes de l'impôt sur les sociétés sont en retrait de 4,6 milliards par rapport aux prévisions initiales, celles de TVA sont en recul de 5,1 milliards d'euros.

Ces chiffres ne sont, en réalité, que les indicateurs avancés d'une crise qui se prolonge, avec l'acuité que vous connaissez, en 2009. La baisse des acomptes de l'impôt sur les sociétés versés en fin d'année dernière préfigure le manque à gagner qu'on observe cette année sur le solde dû au titre de l'exercice 2008 et, plus encore, la forte augmentation que nous avons subie en 2009 des restitutions de l'impôt sur les sociétés.

Il en va de même de la TVA. Au-delà de l'effet lié à l'accélération des délais de remboursement des crédits de TVA aux entreprises, la baisse de la TVA témoigne surtout du mouvement de déstockage des entreprises. Les ajustements ont été très rapides. Il faut espérer un effet favorable en retour, lorsque les entreprises reconstitueront leurs stocks et reprendront leurs investissements. La consommation des ménages, qui porte environ sur 60 % des recettes de TVA, tient plutôt bien pour sa part.

La crise n'a eu, en revanche, qu'une incidence limitée sur les comptes de l'exercice 2008. Je parle des comptes et non du résultat budgétaire. Le résultat comptable ressort en perte de 73,1 milliards en 2008. L'explication de cette dégradation d'un peu plus de 30 milliards par rapport à 2007 relève, en réalité, de facteurs en partie étrangers à la crise. Le résultat comptable est, tout d'abord, affecté par les reprises de dettes pour un montant de 13 milliards sur 30 milliards en 2008, dont 8 milliards au titre du FFIPSA – les régimes agricoles. La lecture du résultat est, ensuite, brouillée par la progression importante des provisions et amortissements à hauteur de 9 milliards. Dans un contexte où l'information comptable se veut toujours plus exhaustive pour répondre à l'exigence du certificateur, il est délicat de tirer des enseignements de cette évolution d'une année sur l'autre. En réalité, on passe de plus en plus de provisions pour amortissement.

L'enrichissement de la comptabilisation des éléments d'actif et de passif de l'État affecte également en partie l'interprétation que l'on peut faire de l'évolution du bilan de l'État. Par rapport à 2007, l'amélioration du recensement et de la valorisation des actifs conduit à réévaluer de 555 milliards en 2007 à 639 milliards l'actif de l'État dans les comptes de l'exercice 2008.

Les travaux ont aussi été poursuivis depuis l'an dernier pour mieux identifier les provisions et les dettes non financières de l'État. Le montant du passif ressort ainsi à 1 325 milliards, incluant un peu plus de 1 000 milliards d'euros de dettes financières.

Cette double évolution, à l'actif et au passif, conduit en définitive à une dégradation limitée de la situation nette de l'État : 30 milliards pour une perte comptable de 70 milliards sur l'exercice.

Pour donner une véritable portée à la comparaison des chiffres, je vous invite à prendre date pour l'année prochaine. Nous allons, en effet, mettre sur le métier l'établissement de comptes pro forma afin de mieux coordonner les résultats des exercices successifs, à méthode et périmètre donnés.

Paradoxalement, les efforts que nous avons réalisés pour améliorer la qualité des comptes ont nui à leur exploitation. Avec le recul de trois années, nous devrions disposer, en 2010, d'un cadre d'analyse plus stabilisé, plus complet, mieux éclairé. C'est le rendez-vous que je vous donne pour concrétiser les fruits d'une réforme comptable dans laquelle beaucoup se sont investis. Je remercie le rapporteur général de l'avoir souligné, mercredi dernier, au cours de l'audition.

La certification des comptes, même assortie de réserves, est une reconnaissance importante des efforts accomplis depuis plusieurs années par l'ensemble de l'administration. Il ne tient qu'à nous de faire davantage des comptes un instrument de gestion publique et un outil de son contrôle. À l'évidence, nous ne partons pas de zéro. Les comptes nous ont déjà obligés à nous pencher, par exemple, sur la gestion des stocks ou de l'immobilier. II faut poursuivre le mouvement : mieux apprécier la réalité des marges de manoeuvre budgétaire par la connaissance des dettes et des charges à payer ; mieux développer la démarche d'analyse et de gestion des risques. À défaut de donner un second souffle à la réforme comptable, nous risquons de la voir s'enfermer dans la recherche, d'ailleurs assez vaine à mes yeux, de la certification pour elle-même.

C'est en des termes à peine différents que je formulerai l'enjeu qui nous est posé sur la démarche de performance initiée par la LOLF. En effet, la mesure de la performance de l'action publique est plus que jamais un impératif. La LOLF a voulu faire de l'examen du projet de loi de règlement un moment beaucoup plus important du débat parlementaire. En dépit des contraintes de calendrier, ce rendez-vous entre le Parlement et le Gouvernement a légèrement gagné en existence. Votre assemblée s'est impliquée dans cet exercice en renouvelant, cette année, l'audition de ministres en commission élargie. Les comportements changent, mais j'ai la conviction qu'il est possible d'aller encore plus loin dans l'évaluation des résultats.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Aujourd'hui, la démarche de performance se trouve trop souvent confondue aux objectifs et aux indicateurs de performance qui figurent dans les documents budgétaires. Nous sommes, d'une certaine façon, prisonniers des choix faits au moment de la mise en oeuvre de la LOLF, encore trop attachés à une architecture complexe d'objectifs et d'indicateurs qui mêlent le contrôle de gestion à la vision politique.

Pour que ces objectifs et ces indicateurs soient utiles – car, admettons-le, ils ne le sont pas toujours – il faut qu'ils soient tout d'abord renseignés. C'est sans doute une évidence, mais c'est une nécessité pour permettre un vrai travail d'évaluation. En 2008, 88 % des indicateurs présentent un résultat chiffré, mais c'est une vision quelque peu quantitative des choses. Ensuite, il faut qu'ils aient une pertinence : qu'ils soient proportionnés aux enjeux financiers, qu'ils soient compréhensibles pour le citoyen, pour les journalistes, pour le contribuable ou l'usager des services publics. Des progrès ont été effectués depuis 2006 ; le nombre d'indicateurs a été réduit de presque 20 % en trois ans, mais il y en avait encore près de 1 300 en 2008. C'est évidemment beaucoup trop.

Nous avons poursuivi, cette année, les travaux avec les ministères pour passer au crible la liste des indicateurs. Le rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques en propose de l'ordre de 1 000, avec un effort fait sur leur harmonisation. Au-delà du nombre d'indicateurs, ce qui ne signifie pas grand-chose, il s'agit de mieux identifier la centaine d'indicateurs, pas plus, par mission ou par ministère, qui revêt une dimension politique propre à impliquer directement le décideur et celui qui le contrôle.

Les objectifs et indicateurs de performance ne résument pas à eux seuls l'évaluation des politiques publiques, ils en sont un support. Les bilans stratégiques ou la justification de l'utilisation des crédits dans les documents annexés au projet de loi de règlement doivent aussi contribuer au questionnement de la performance.

Rarement le Parlement aura disposé d'une information aussi riche pour discuter de l'efficacité de la dépense de l'État.

En mettant le cap sur l'avenir, le Président de la République ne nous a pas seulement appelés à faire plus sur les priorités qui ressortiront de la concertation, il nous a également enjoints de redoubler d'efforts pour réduire le poids de nos dépenses courantes, et je mets les deux objectifs au même niveau.

C'est bien là l'enjeu de l'évaluation des politiques publiques et, par là même, de l'exercice auquel invite la loi de règlement.

Le questionnement au coeur de la révision générale des politiques publiques – est-il possible de rendre un service public de meilleure qualité à un moindre coût ? – n'a rien d'exclusif. L'exercice 2008 nous en livre une réponse déjà positive.

Nous avons pu respecter les objectifs de réduction d'effectifs et aller même au-delà sans rien abandonner de l'ambition de mieux servir nos concitoyens.

Certains ministères ont anticipé sur le calendrier de mise en oeuvre de réformes prévues dans la révision générale des politiques publiques : les effectifs ont ainsi baissé de l'ordre de 28 000 ETP pour un objectif de 23 000 fixé en loi de finances.

Ce résultat conforte la réalisation de l'objectif de ne pas remplacer un départ à la retraite sur deux que nous nous fixons sur la durée, il n'exclut pas que certains ministères aillent plus vite ou plus loin, par exemple pour redéployer les économies dégagées sur la revalorisation des salaires des agents ou sur d'autres postes de dépenses. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de règlement nous donne, de façon générale, un motif de satisfaction,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…et a suivi l'évolution de l'inflation, mais aussi des motifs d'inquiétude qui portent, d'une part, sur les recettes et, d'autre part, évidemment, sur le déficit et la dette.

La dépense a été tenue, même si l'inflation a été très supérieure en 2008 à ce qui était prévu. Sur un périmètre de dépenses élargi, qui intègre pour la première fois, je le rappelle, les prélèvements sur recettes et les transferts de recettes à des organismes extérieurs, l'inflation n'est pas dépassée.

Sur l'exécution, en revanche, monsieur le ministre – les prévisions, c'est bien, mais l'exécution, c'est du solide ! – (M. Michel Bouvard et M. François Goulard applaudissent), les dépenses du budget général ont augmenté de 0,5 point en volume, compte tenu de l'inflation, puisqu'elles ont augmenté de 8,8 milliards d'euros.

Si je mets en exergue cette augmentation de 0,5 point au-delà de l'inflation, c'est parce que la croissance a été de 0,4 point en volume en 2008, ce qui signifie que la dépense d'État, qui est pourtant la dépense la mieux maîtrisée – mieux maîtrisée que la dépense sociale ou que celle des collectivités locales – représente exactement le même pourcentage du PIB à la fin de 2008 qu'à la fin de 2007.

Nous voyons bien les limites des exercices de type RGPP si nous n'arrivons même pas à desserrer l'étau de la dépense publique qui caractérise notre pays pour la dépense d'État, et cela montre à quel point il faudra redoubler d'efforts.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cela étant, il y a vraiment eu en 2008 un gros effort sur les effectifs, 28 000 équivalents temps plein, 40 % des départs en retraite, n'ont pas été remplacés.

Quand on regarde de plus près les différents postes de dépenses, on voit que, malheureusement, un certain nombre d'entre eux dérivent.

La charge de la dette a augmenté de 3,3 milliards d'euros en 2008 par rapport à la prévision. C'est lié presque exclusivement au fait qu'une partie de notre dette à moyen et long terme – 15 % – est indexée sur l'inflation. Ressaut d'inflation, il a fallu provisionner, ce qui représente 3,3 milliards à ajouter aux intérêts de la dette, c'est-à-dire presque deux fois le budget du ministère de la culture. Nous avons ainsi un avant-goût de ce qui pourrait nous arriver dès lors que les taux d'intérêt remonteront, et c'est ce qu'il faut mettre en exergue.

Nous n'avons pas pu procéder à des cessions d'actifs puisque le marché financier ne s'y prêtait pas. Il a fallu évidemment couvrir le besoin de financement de l'État qui, avec l'augmentation du déficit, s'est accru. Et puis, à la fin de 2008, le Gouvernement, l'Agence France Trésor ont provisionné des moyens nécessaires au titre du plan de relance. Ce fut une très bonne décision, mais cela explique la majoration du besoin de financement dans le courant de 2008.

Autre motif d'inquiétude, le nouveau dérapage des dépenses sociales qui sont dans le budget de l'État, 1,1 milliard d'euros de plus que la prévision : plus 600 millions pour le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables », plus 350 millions sur le programme « Handicap et dépendance », plus 240 millions pour les aides au logement.

Autre phénomène auquel nous devons faire attention : la progression des restes à payer. Entre les autorisations d'engagement, non pas ouvertes mais consommées, et les crédits de paiement qu'il faut mettre en face, il y avait 76 milliards d'écart à la fin de 2007 et nous en sommes à 78,1 milliards à la fin de 2008, donc 2,1 milliards de plus.

Vous aviez pris, monsieur le ministre, une décision extrêmement courageuse à la fin de 2007 en apurant la quasi-totalité de la dette de l'État envers la sécurité sociale – 5 milliards. Cette dette s'est reconstituée et a progressé de 600 millions en 2008.

Derrière une maîtrise apparente et réelle, qui représente de nombreux efforts, se reconstituent donc malgré tout, sous des formes diverses et variées, des suppléments de dépenses par rapport à nos prévisions.

Avant d'en venir au principal motif d'inquiétude, à savoir les recettes, je tiens à saluer le remarquable travail réalisé par votre administration dans la mise en place des nouvelles comptabilités : informations sur les engagements, comptabilité patrimoniale, bilan – actifs, passifs, hors bilan –, travail conduisant à la certification des comptes. Certes, il y a encore douze réserves, mais je ne peux que remercier votre administration quand je vois les progrès énormes réalisés depuis quelques années et la qualité de l'information qui nous est donnée – un grand nombre d'interventions seront nourries par des informations que nous n'avions pas auparavant.

Les recettes, je ne vous le cache pas, sont le principal motif d'inquiétude puisqu'elles sont en repli de 12,3 milliards en 2008 par rapport à la prévision initiale. Ce qui m'a frappé, je vous l'ai indiqué la semaine dernière lorsque vous êtes venu devant la commission des finances – c'est une comparaison qui vaut ce qu'elle vaut parce qu'on n'est pas à structure constante –, c'est que le montant des recettes fiscales de 2008 – 260 milliards d'euros – est inférieur de 5 milliards à celui de 2004 – 265 milliards.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Vous m'avez répondu que, par rapport à 1999, l'écart était le même. Cela veut donc dire que, face à une dépense qu'on maîtrise, mais tout doucement, il y a une véritable évaporation de recettes.

Pourquoi nos recettes diminuent-elles ? Il y a bien sûr l'effet de la crise, mais il y a d'autres raisons sur lesquelles je voudrais insister.

Pour l'impôt sur le revenu, nous avons une perte de 2 milliards d'euros par rapport à la prévision, liée d'ailleurs à une erreur qui m'inquiète. En effet, monsieur le ministre, le coût de la prime pour l'emploi a été sous-évalué de presque 1 milliard d'euros. Ne risque-t-on pas d'avoir le même phénomène en 2009 ?

L'impôt sur les sociétés est également inférieur à la prévision de presque 5 milliards. C'est beaucoup plus normal, surtout compte tenu des modalités de versement de l'acompte de décembre.

Le produit de la TIPP est inférieur de 400 millions aux prévisions et la progression de la TVA en volume a été très faible. On a une progression en valeur, mais elle est liée au ressaut d'inflation, ce n'est donc pas significatif.

Pour la Cour des comptes, elle aussi extrêmement inquiète de cette évaporation des recettes, sur presque 12 milliards de pertes de recettes par rapport à la prévision, la crise économique, qui a vraiment frappé à partir de septembre 2008, n'expliquerait que 4 milliards. Je la trouve un peu sévère, car je pense que la crise en explique plutôt la moitié, mais c'est à cette moitié que nous devons être très attentifs.

Il y a deux phénomènes : d'abord, les mesures nouvelles de baisse d'impôt ou de dépense fiscale, qui ne sont pas maîtrisées comme elles devraient l'être en temps de crise ; ensuite, tous les dispositifs de modification de périmètre dans la relation de l'État avec les collectivités locales, d'une part, et la sécurité sociale, d'autre part.

S'agissant des collectivités locales, 2,8 milliards d'euros de recettes d'État ont été transférés en 2008 au titre de la compensation des charges, mais il a fallu par deux fois transférer 400 millions supplémentaires aux départements : 400 millions de TIPP et 400 millions de taxe spéciale sur les conventions d'assurance.

Vers la sécurité sociale, 4,3 milliards de recettes supplémentaires ont été transférés en 2008 à partir du budget de l'État. Les impositions de toutes natures affectées à la sphère sociale représentent aujourd'hui plus de 130 milliards. Il y a évidemment, et c'est historique, l'ensemble CSG-CRDS, mais aussi la TVA brute sur les alcools et la C3S, tout un ensemble d'éléments qui font que la recette d'État s'étiole.

Le déficit a été de 56,3 milliards d'euros en 2008, en hausse de 14 milliards par rapport à la prévision, ce qui est dû, pour plus de la moitié, à des mesures nouvelles de baisse d'impôt et de dépense fiscale et, par ailleurs, à des changements de périmètre.

Cela fait plusieurs années que je pose la question suivante. Chaque année apporte, à fiscalité constante, des plus-values spontanées. Si la croissance est élevée, ces plus-values sont importantes ; si elle l'est moins, elles sont plus limitées. Que fait-on de ces plus-values de recettes d'une année sur l'autre ? Celles-ci vont en premier lieu financer l'augmentation des dépenses, mais elles peuvent financer également des baisses d'impôts ou encore la réduction du déficit.

En 2008, un peu moins de 14 milliards d'euros de plus-values de recettes spontanées étaient attendus. Dans la mesure où la loi de finances initiale pour 2008 prévoyait d'affecter 10 milliards à des hausses de dépenses, sur le périmètre élargi, et 6 milliards à des baisses d'impôt, le déficit se dégradait déjà en loi de finances initiale de près de 3 milliards.

En exécution, du fait que la croissance, au lieu d'être de 2,25 %, comme prévu, a été de 0,4 %, les recettes spontanées s'élèvent à 6,6 milliards d'euros. La hausse des charges globales, compte tenu du surcroît d'inflation et des mesures de relance, est quant à elle de 16,8 milliards ; les baisses d'impôts sont de 7,8 milliards. L'essentiel des augmentations de dépenses ou des baisses d'impôts est donc financé par une dégradation du solde. Alors que cette dégradation devait être de 2,8 milliards, elle est en fin de compte de 18 milliards.

Il faut que nous y soyons très attentifs. Nous ne pouvons préempter des hausses de recettes spontanées au titre d'augmentations de dépenses et de baisses d'impôts, parce que c'est, au final, le déficit, donc la dette, qui finance ces mesures.

En ce qui concerne la dette, le besoin de financement de l'État a été accru de 17 milliards d'euros, et le déficit à financer en gestion a dépassé de près de 15 milliards la prévision initiale. Nous avons fait face à cette très forte augmentation du besoin de financement en recourant en particulier à l'endettement de court terme. Alors qu'à la fin de l'année 2007, 80 milliards de nos presque 1 000 milliards de dette de l'État étaient souscrits en bons du Trésor français à court terme, ce montant sera à la fin de l'année 2009 de près de 200 milliards. Cela nous rend très vulnérables à une hausse des taux d'intérêt comme celle qui risque de se produire avec le retour de la croissance.

L'encours de la dette de l'État – 53,1 % du PIB – est passé de 929 milliards d'euros à la fin de 2007 à 1 036 milliards. Toutes administrations publiques confondues, en incluant les comptes sociaux, les ODAC et les collectivités locales, la dette atteint, à la fin de 2008, 1 327 milliards d'euros, c'est-à-dire 68,1 % du PIB. Par rapport à 2007, la progression est de 4,3 points de PIB ; c'est la plus forte progression en points de PIB que nous ayons enregistrée depuis 1995.

C'est dire qu'une fois la crise surmontée, la dette sera un problème absolument majeur. En 2009 – nous l'évoquerons demain –, le Gouvernement sera conduit à mobiliser 250 milliards d'euros : 150 milliards pour couvrir les déficits de l'État et des comptes sociaux, et 100 milliards pour rembourser le capital de la dette arrivant à échéance. Au moment où nous allons aborder la réforme de la taxe professionnelle, il faut absolument que nous posions en principe la sécurisation des recettes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Et au moment où nous allons étudier la mise en place d'un grand emprunt national, idée intéressante dès lors que l'emprunt est dédié à des dépenses d'investissement,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…il faut, monsieur le ministre, que vous adoptiez la règle selon laquelle il ne saurait être question de dépenses supplémentaires ; ce sont des dépenses d'investissement qui viendront se substituer à des dépenses de fonctionnement, dans le cadre d'un besoin de financement dont nous avons vu qu'il s'élevait aujourd'hui à 250 milliards et ne saurait être encore accru.

Je terminerai par quelques chiffres montrant à quel point cette notion d'emprunt national est intéressante.

Ces dernières années, la dépense d'investissement du budget de l'État, en comptant la fraction de prélèvement sur recettes allant à des investissements, comme, par exemple, le FCTVA, a été de 20 milliards d'euros en moyenne, sur les 350 milliards de dépenses du budget de l'État, c'est-à-dire moins de 6 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

En 2008, alors qu'il a fallu emprunter 56 milliards d'euros pour financer le déficit, la dépense d'investissement justifiant cet emprunt n'a été que de 20 milliards.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

C'est pourquoi, monsieur le ministre, je pense que l'emprunt national est une très bonne idée à partir du moment où il fait progresser l'idée selon laquelle on n'a le droit d'emprunter que pour des dépenses d'investissement, dépenses d'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

C'est une question de respect vis-à-vis des générations futures. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Nous ne nous appelons plus comme cela depuis la réforme du règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Le débat sur le projet de loi de règlement de la loi de finances pour 2008 est l'occasion pour nous d'examiner la réalité de la politique suivie, d'apprécier les décalages éventuels – il y en a – entre le projet de loi de finances et son exécution, et de faire le point sur la situation des comptes publics à la fin d'un exercice budgétaire, juste avant le débat d'orientation budgétaire que nous engagerons demain. C'est d'ailleurs un exercice qui nous est imposé par la LOLF.

Monsieur le ministre, permettez-moi de vous féliciter pour votre reconduction au Gouvernement. Vous avez pour fonction de tenir les comptes ; je vous souhaite pleine réussite dans cette mission (Sourires sur les bancs du groupe SRC), sachant à quel point elle est difficile et délicate.

En vous écoutant, je me faisais la réflexion qu'il est formidable d'être ministre, parce que cela vous oblige à ne voir que le bon côté des choses, à voir la vie en rose, si je puis dire…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Votre exposé était en effet quelque peu « rose » eu égard à la situation de nos comptes publics.

Avant d'y venir, je tiens cependant à saluer la meilleure transparence et la grande qualité des informations que nous recevons de la part de vos services et de la Cour des comptes. Je m'associe aux propos du rapporteur général à cet égard. Il est incontestable que la transparence a progressé dans notre pays ces dernières années et que les documents budgétaires sont beaucoup plus lisibles, même si, ici ou là, il nous faut encore améliorer les procédures. La méthode d'examen par l'Assemblée nationale du projet de loi de finances rectificative peut en particulier être améliorée ; nous avons nous aussi une marge de progression considérable.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Les modalités d'examen par les commissions élargies ne sont sûrement pas les plus appropriées en ce qui concerne les lois de finances rectificatives, même s'il s'agit d'une bonne procédure pour les lois de finances initiales.

La démarche de performance a en outre été initiée. Nous disposons aujourd'hui de rapports annuels de performance. La commission des finances travaille également sur le sujet ; nous avons, avec Gilles Carrez, et en liaison avec les députés de la MILOLF, Michel Bouvard, Charles de Courson, Thierry Carcenac, Jean-Pierre Brard, formulé des propositions que nous souhaitons présenter au président de l'Assemblée nationale et à vous-même, monsieur le ministre.

À l'examen de ce texte, deux constats s'imposent : une situation de nos comptes publics dégradée avant même que la crise produise ses effets…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…et une France en position défavorable en Europe.

Avant de développer ces deux constats, je rappelle que la Cour des comptes observe quelques décalages dans l'appréciation du suivi de nos dépenses. Ces décalages sont souvent la conséquence de quelque sous-évaluation, de quelque report de charges correspondant à des opérations ayant consisté à anticiper des recettes qui n'auraient dû être encaissées qu'en 2009 et à ne pas payer des dépenses qui auraient dû l'être en 2008, ce qui pose, d'après la Cour des comptes, la question de la sincérité du projet de loi de règlement.

Au plan de l'évaluation de la dépense, il existe également une certaine différence avec les méthodes de calcul de la commission des finances. Il faudra y réfléchir, monsieur le ministre, pour qu'il n'y ait pas de contestation possible sur ce qui doit être pris en considération au titre des dépenses.

À partir de ces observations, je souhaite reposer la question de la pertinence de la période complémentaire : quelle est encore sa justification ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Si une période est nécessaire pour que des écritures soient prises en considération, notamment en toute fin d'année, je pense que la période complémentaire se justifie de moins en moins.

De même, une loi de finances rectificative votée en fin d'année, après le vote de la loi de finances, ne me paraît pas non plus de bonne gouvernance. Je crois que cela n'a pas de sens, encore moins avec la pluriannualité, qui, je l'espère, deviendra de plus en plus notre règle ; il faudra en tirer toutes les conséquences, ce que nous n'avons pas encore suffisamment fait. Je souhaite que la commission des finances soit également une force de proposition en la matière.

Comme je le disais, le premier constat qui peut être fait de l'examen de ce texte est celui de comptes publics dégradés avant même que la crise ne produise ses effets : 0,4 % de croissance en 2008 et un déficit de nos comptes publics de 3,4 % du PIB, soit 56,3 milliards, pour le budget de l'État, contre 38,4 milliards en 2007 : une augmentation de 47 %.

Je rappelle d'ailleurs qu'en 2007, la croissance avait été de 2,3 % et que le déficit s'était pourtant aggravé par rapport à 2006, ce qui signifie qu'avec vous, monsieur le ministre, il peut y avoir à la fois de la croissance et une aggravation de la situation de nos comptes publics.

Ce déficit est bien sûr le résultat de l'évolution de nos dépenses et de nos recettes en 2008.

En ce qui concerne la dépense, je renouvelle mes regrets quant à l'exercice de la révision générale des politiques publiques. Je continue de penser que cela peut être un exercice utile. Si l'on croit à l'action publique, il est légitime de remettre à plat, en certaines circonstances, les politiques publiques que nous conduisons, afin d'en apprécier la pertinence. Si nous croyons à l'action publique, nous devons être exigeants sur son efficacité.

Or vous avez fait le choix d'un exercice confiné, alors qu'il était au contraire nécessaire que cet exercice soit ouvert, dans un dialogue avec le Parlement et l'ensemble des acteurs des politiques publiques. Je suis convaincu qu'au-delà des divergences, certains constats peuvent être partagés pour une plus grande efficacité de nos politiques publiques. Nous pouvons avoir des divergences profondes sur le niveau de l'intervention de l'État ou la définition des politiques publiques, mais nous devons pouvoir conduire un exercice sur l'efficacité de nos politiques publiques, à partir d'un certain nombre de critères définis en commun.

Par ailleurs, il ne sert à rien de proclamer la maîtrise de la dépense si, dans le même temps, on organise l'explosion de la dépense fiscale. Le rapport de la commission des finances – que j'ai rédigé avec Gilles Carrez et plusieurs autres députés, dont certains sont ici présents – a démontré qu'en moyenne, chaque année, quatorze mesures supplémentaires de dépenses fiscales ont été créées depuis 2003, contre cinq entre 1980 et 2003 – je pense queJérôme Cahuzac reviendra sur ce point. En 2003, les dépenses fiscales ont atteint 50 milliards ; en 2008, 73 milliards : elles représentent aujourd'hui 21 % des dépenses totales et 27 % des dépenses du budget général. Cela préoccupe le rapporteur général – je le remercie pour sa sincérité – : c'est une préoccupation partagée au sein de la commission des finances, qui s'inquiète du niveau atteint par les dépenses fiscales, et par la baisse des impôts.

Les dépenses fiscales constituent un problème eu égard à leur coût et aux difficultés à les évaluer. La loi de programmation s'est efforcée de formuler des propositions à ce sujet – nous y reviendrons demain. Mais elles constituent aussi un problème parce qu'elles expliquent en grande partie la dégradation de nos comptes publics. En effet, la Cour des comptes a bien montré que les ressources de l'État diminuent, et que cette évolution ne s'explique pas principalement par la crise, mais qu'elle est la conséquence des choix politiques et fiscaux de la majorité depuis 2002, et plus encore depuis 2007. Ainsi, en 2007 et 2008, il y a eu 11 milliards supplémentaires d'augmentation de remboursements et de dégrèvements d'impôts, dont 2,9 milliards au titre de la réforme de la taxe professionnelle décidée en 2006, avec notamment le plafonnement de la valeur ajoutée et le dégrèvement sur les investissements nouveaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Cela fait déjà 3 milliards en direction des entreprises, ce qui grève d'autant le budget 2008.

Gilles Carrez l'a dit : si le niveau des recettes fiscales nettes avait été identique en 2007 et 2008 à celui de 2005, le déficit aurait été réduit de presque 5 milliards en 2007, de plus de 11,5 milliards en 2008, et le solde primaire serait alors en quasi-équilibre. L'effet des mesures nouvelles représente, en 2008, plus de 7,8 milliards par rapport à l'année précédente. La Cour des comptes indique que les mesures nouvelles et de périmètre représentent, sur la période 2006 à 2008, 55 milliards d'euros. Au moins une moitié de cette somme correspond à une perte de recettes et à des réductions d'impôts : entre 25 milliards et 30 milliards. C'est considérable dès lors que cela se renouvelle chaque année. La Cour des comptes relève que sans les mesures d'allégements de ces dernières années, les recettes fiscales auraient progressé de 2,7 %, alors qu'elles ont diminué de 0,5 %.

Au moment où l'on parle beaucoup d'un emprunt, il est bon de rappeler que tous ces allégements ont été financés par l'emprunt. Le solde primaire, c'est-à-dire le solde des comptes de l'État non compris le paiement des intérêts de la dette, est de nouveau négatif, à hauteur de 12,5 milliards en 2008. Que signifie un solde primaire négatif ? Cela veut tout simplement dire que non seulement les intérêts de la dette, mais aussi une partie des autres charges courantes de l'État, n'ont pu être couverts, en 2008, qu'au moyen de nouveaux emprunts. Il faut répéter que nous empruntons chaque jour, et dans des proportions considérables. En écoutant le Président de la République à Versailles, je me demandais si Mme Lagarde et M. Woerth lui disaient tout.

Debut de section - PermalienDidier Migaud président de la commission des finances

La question mérite d'être posée car nous empruntons tous les jours. À cet égard, je tiens à rappeler que la deuxième proposition du rapport Pébereau préconisait de ne pas diminuer le niveau global des prélèvements obligatoires pendant la phase de retour à l'équilibre. Malheureusement, si le rapport Pébereau est très souvent cité, il est en l'occurrence très peu respecté.

L'augmentation des dépenses fiscales, des allégements d'impôts, souligne la nécessité d'une réforme fiscale au caractère juste et efficace. La question d'une telle réforme se pose avec de plus en plus d'acuité. Au passage, je rappelle que le poids des contributions directes dans la totalité des recettes fiscales nettes diminue dans le budget de l'État. En conséquence, la part du produit net de la TVA dans les recettes fiscales est passée de 46,6 % en 2007 à 50 % en 2008. Les contributions indirectes représentent une partie de nos recettes encore plus grande qu'auparavant. Cela soulève la question du caractère juste et efficace de notre fiscalité.

Dernier point que je veux évoquer : la position défavorable de la France en Europe. Plusieurs indicateurs en témoignent : la croissance dans notre pays – plus 0,4 % en 2008 –, a été plus faible que la croissance moyenne de la zone euro – plus 0,8 % – ; le déficit des comptes publics s'élève à 3,4 % du PIB alors que le déficit moyen des pays de la zone euro – hors France – est de 1,5 % et que celui de l'Union européenne atteint 2,1 %. La France est devenue, en 2008, le quatrième État le plus endetté de la zone euro par rapport à son PIB, derrière l'Italie, la Grèce et la Belgique, et le cinquième de l'Union européenne, après la Hongrie. Je rappelle qu'en 2004, nous étions à la huitième place. Nous progressons, mais pas dans le bon sens.

De plus, l'année dernière, parmi les dix États les plus endettés de l'Union, la France a été le seul – avec Malte – à avoir connu un déficit primaire, c'est-à-dire une situation dans laquelle le financement des charges de l'intérêt de la dette publique est entièrement assuré par un endettement supplémentaire. Mais, puisque la Suède va présider l'Union européenne, ce sera peut-être l'occasion de reparler de ce pays. Il est souvent cité en exemple de ce qu'il ne faudrait pas faire au niveau de la dépense publique et des impôts, mais je fais seulement observer qu'il a un solde excédentaire en 2008, et qu'il a ramené sa dette publique, entre 2002 et 2008, de 52,6 % à 38 % du PIB. Comparaison n'est pas toujours raison, mais il y a tout de même des faits qu'il est utile de rappeler.

Plus grave encore, l'écart se creuse avec l'Allemagne. L'année 2008 a marqué une inversion des positions entre nos deux pays en matière d'endettement. Cette année-là, pour la première fois depuis la création de la zone euro, la dette française est devenue plus importante en points de PIB que la dette allemande qui pouvait en grande partie s'expliquer par la réunification. J'entendais récemment Peter Steinbrück dire que la conjoncture ne pouvait pas permettre des allégements d'impôts. Je me suis pris à rêver que le Président de la République ou le ministre de nos comptes publics applique ce raisonnement à la TVA sur la restauration ou à la réforme de la taxe professionnelle en se disant : « Peut-être serait-il pertinent d'autofinancer ces réformes ! ». On peut en effet trouver beaucoup de défauts à la taxe professionnelle, mais encore faudrait-il traiter les défauts au lieu de prendre des mesures générales, susceptibles de perdre de leur pertinence par rapport à tel ou tel secteur économique.

Demain, nous aurons l'occasion de revenir sur certains des sujets que nous évoquons aujourd'hui. L'exécution du budget 2008 révèle non seulement toutes les faiblesses de la situation française au regard des comptes publics, mais aussi et surtout les conséquences d'une politique qui se caractérise par beaucoup d'injustice et d'inefficacité, et toujours moins d'impôts alors que la dépense, comme l'a montré le rapporteur général, n'est pas aussi maîtrisée qu'il est dit.

Voilà, monsieur le ministre, mes chers collègues, les quelques observations que je souhaitais faire. Je sais que nous y reviendrons demain puisque je m'exprimerai à nouveau, lors du débat d'orientation des finances publiques pour 2010, sur la situation de l'endettement de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Monsieur Bouvard, suite à votre remarque, je vous précise que le changement de nom des commissions n'interviendra que mercredi prochain.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

On lui avait bien dit, madame la présidente ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à M. Jérôme Cahuzac, pour une durée ne pouvant excéder trente minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, la loi de règlement nous doit une vérité : la vérité budgétaire de l'année écoulée. Cette vérité, rien ni personne ne devrait pouvoir la rendre plus aboutie que dans le projet de loi de règlement qui nous est présenté. Cette vérité a ses raisons : la loi de règlement est une façon, pour le Gouvernement, de rendre des comptes à nous, parlementaires, qui avons entendu les objectifs de politique générale du Gouvernement lors de la loi de finances initiale et qui, en conséquence, l'avons majoritairement autorisé et à percevoir des deniers publics, et à les dépenser pour mettre en oeuvre les politiques publiques préalablement énoncées.

C'est donc un exercice de transparence et de vérité. Mais il ne rencontre pas le même écho que la loi de finances initiale. C'est bien regrettable car nous savons tous que la loi de règlement recèle une vérité nettement plus incontestable que celle que l'on recherche, parfois en vain, dans les lois de finances initiales, voire dans les lois de finances rectificatives. Il va de soi que, comme pour toutes les lois de finances, certains principes constitutionnels doivent être respectés dans le cadre de la perception et de la dépense des deniers publics. Il ne s'agit pas de s'attacher à quelque formalisme, car le respect de ces principes n'a qu'un but : affirmer et assurer la transparence du Gouvernement en matière de perception et d'utilisation des deniers publics, à l'égard de la représentation nationale dans cette enceinte et des représentants des collectivités locales dans la Haute assemblée.

Or, monsieur le ministre, parmi ces principes, pourtant réaffirmés avec force, il y a quelques années, dans la loi organique relative aux lois de finances et dans la révision constitutionnelle l'année dernière encore, un certain nombre n'ont pas été respectés comme ils auraient dû l'être lors de l'exécution budgétaire en 2008. Ne serait-ce qu'à cause de cet irrespect – qui, dans trop de cas, n'est évidemment pas le fruit du hasard –, je crois inévitable la saisine du Conseil constitutionnel afin que celui-ci énonce sa doctrine, notamment au regard du nouvel article 47-2 de la Constitution. Cet article prévoit que les administrations publiques se doivent de donner « une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière ».

L'aspect constitutionnel de l'exécution du budget 2008 sera donc le premier élément que je vais aborder dans cette motion de rejet préalable. Je le répète : puisque certains principes constitutionnels ont été réaffirmés lors de l'adoption de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances, puis à nouveau lors de la révision constitutionnelle, on est en droit de se demander s'ils ont vraiment été respectés lors de l'exécution budgétaire en 2008. Et poser la question, c'est déjà y répondre, non pas de manière exhaustive, en indiquant tous les exemples qui prouvent que ces principes constitutionnels n'ont trop souvent pas été respectés, mais en citant quelques exemples révélateurs figurant dans ce projet de loi de règlement.

Le premier exemple, c'est celui de l'épargne logement. En 2005, le Parlement a modifié le régime fiscal et social de l'épargne logement. À cet égard, on peut trouver scandaleux sur le plan des principes, mais admissible sur un plan plus pragmatique, qu'en 2006, le Gouvernement et le Parlement aient nettement sous-budgété la ligne relative à l'épargne logement. En cette première année d'application du nouveau régime, la sous-évaluation fut de 500 millions d'euros ; on peut imaginer qu'une période de rodage était nécessaire. Le problème est que l'erreur s'est renouvelée en 2007 pour un montant nettement plus important – 830 millions d'euros –, ce qui était déjà beaucoup moins admissible. La chose est franchement inacceptable en 2008, puisque la sous-budgétisation atteint 950 millions d'euros.

À cette occasion, on constate que certains principes ne sont pas respectés, en premier lieu celui de sincérité budgétaire. Cette dépense largement prévisible n'a pas été inscrite au compte de l'État. Ce dernier a demandé lui-même au Crédit foncier de France de faire l'avance de la somme, contrevenant ainsi clairement à l'article 32 de la loi organique relative aux lois de finances qui impose la sincérité budgétaire lors de l'examen des comptes de l'État.

Cette façon de faire contrevient également à l'article 6 de la même loi organique prévoyant que toutes les dépenses de l'État dans l'année à venir doivent être retracées. Nous constatons qu'il n'en a rien été pendant trois années de suite. Encore une fois, c'était peut-être admissible la première, voire la deuxième année, compte tenu de la nouveauté de l'exercice qui s'imposait ; c'est inacceptable la troisième année.

Le principe de l'annualité budgétaire est également violé. Même si l'on peut estimer qu'il ne s'agit pas d'une règle absolue, le Gouvernement devrait s'attacher à la respecter car il y va de la transparence de sa gestion à l'égard notamment de la représentation nationale. Or, le principe de l'annualité budgétaire n'a pas été respecté : comme prévu et comme nous vous l'avions indiqué, monsieur le ministre, la totalité de la ligne budgétaire était consommée dès le mois de janvier, puisqu'elle a été utilisée pour apurer celle de l'année précédente ; le Crédit foncier de France a assumé non pas l'essentiel, mais la totalité de l'exercice budgétaire pour l'année 2008.

Trois principes budgétaires violés en une seule action, cela fait beaucoup. En la matière, le point de vue du Conseil constitutionnel devrait être intéressant. En tout cas, on peut espérer que cette méthode cesse, au moins pour l'année 2010.

Deuxième exemple : le remboursement de la dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale, que le rapporteur général a mentionné, et auquel vous-même, monsieur le ministre, avez fait référence tant en commission des finances qu'en séance. Tout le monde vous en donne acte : en 2007, l'État a remboursé 5,1 milliards d'euros de dettes à la sécurité sociale. Tout à fait nécessaire, ce remboursement n'a pourtant pas éteint le passif. Fin 2007, le passif de l'État à l'égard de la sécurité sociale était encore de 6 milliards d'euros ; il a atteint 7,4 milliards d'euros à la fin de l'année 2008, c'est-à-dire qu'il s'est aggravé de 1,4 milliard d'euros.

La sécurité sociale était en droit d'exiger 3,6 milliards d'euros de l'État, à la fin de l'année 2008. Ce montant fait l'objet d'un report de charges sur 2009 qui, pour être classique n'en est pas pour autant admissible. Vous semblez douter de la réalité de ces chiffres, mais je me permets d'indiquer qu'ils sont tirés du rapport de la Cour des comptes, dont on peut critiquer certaines méthodes à l'occasion, mais dont on ne peut pas contester le raisonnement sur les dettes exigibles par les organismes sociaux à l'égard de l'État. La Cour des comptes dénonce un report de charges de 3,6 milliards d'euros ; elle estime qu'il devra être réglé sur l'exercice 2009 alors qu'il aurait dû l'être en 2008.

On relève également des « sous-dotations » chroniques. Sous le contrôle de notre collègue Louis Giscard d'Estaing, rapporteur spécial pour la défense, je rappelle qu'à la fin de l'année 2008, 1,95 milliard d'euros était exigible. Ce montant n'a pas été payé comme il se devait ; il s'agit donc « d'impayés », selon l'expression de la Cour des comptes.

On peut rajouter des sommes qui peuvent paraître dérisoires au regard de celles que je viens d'annoncer : 130 millions d'euros pour le logement, 322 millions d'euros pour l'agriculture. Année après année, on constate d'ailleurs que le budget du Fonds national de garantie des calamités agricoles est systématiquement sous-évalué, comme si, à chaque fois, le Gouvernement pensait que les agriculteurs ne seraient touchés par aucune calamité cette année-là. Ce pari est systématiquement perdu. Systématiquement, en loi de finances rectificative ou en report de charges, il faut doter le Fonds national de garantie des calamités agricoles. Peut-être dans un exercice de sincérité, de transparence, de lucidité, pourrait-on en finir avec cette « sous-budgétisation » chronique.

La Cour des comptes a relevé d'autres travers dans l'exécution budgétaire, notamment une erreur d'imputation pour les frais d'assiette et de recouvrement que l'État prélève – 4,1 milliards d'euros tout de même ! – qui fut déjà sanctionnée par le Conseil constitutionnel en 1996. Vous estimez, comme certains, qu'il s'agit d'une redevance pour services rendus, alors qu'il s'agit d'un impôt, ni plus ni moins. Les deux critères permettant de définir une redevance pour services rendus ne s'appliquent pas.

D'abord, le coût de 4,1 milliards d'euros pour frais d'assiette et de recouvrement est sans commune mesure avec la réalité du service rendu, sauf à imaginer, monsieur le ministre – vous qui avez désormais la tutelle sur les fonctions publiques, si j'en crois la presse –, que ce coût est à la fois efficace et efficient pour établir les frais d'assiette et de recouvrement. Ensuite, ce ne sont pas les collectivités qui acquittent ces 4,1 milliards d'euros, mais bien le contribuable. Il s'agit donc bien d'un impôt, et il est regrettable que cette erreur d'imputation se répète année après année.

Enfin, je citerai un quatrième travers – si vous me permettez cette typologie – dénoncé par la Cour des comptes : la contraction de dépenses et de recettes contrevenant au principe d'unité budgétaire. Je pense d'abord à la taxe sur les véhicules de société sur laquelle je reviendrai. Je pense ensuite à l'Agence française de développement dont les dividendes n'ont pas été versés à l'État comme prévu, mais ont servi directement à assurer certaines dépenses – on ignore d'ailleurs lesquelles. Un de nos collègues avec lequel je discutais tout à l'heure s'étonnait de voir ladite Agence française de développement postuler pour le rachat de sociétés immobilières, notamment dans les départements et territoires d'outre-mer.

Ces deux erreurs n'entraînent ni mort d'homme ni péril pour le pays, mais elles violent des principes budgétaires constitutionnels et contreviennent à l'exigence de sincérité et de transparence à laquelle l'exercice budgétaire doit pourtant souscrire.

Au total, les reports de charges représentent 6 à 7 milliards d'euros pour 2009 et, en toute logique, ils doivent majorer le déficit budgétaire officiel établi à 56,4 milliards d'euros. En fait, le déficit se situe entre 62 et 64 milliards d'euros en 2008, un montant nettement supérieur à celui de 2007.

Monsieur le ministre, une question se pose donc : cette aggravation considérable – non pas par rapport à la loi de finances initiale de 2008 mais par rapport au solde budgétaire de 2007 – est-elle, comme vous semblez vouloir l'affirmer, due à la crise, ou à une mauvaise gestion, ou à des politiques erronées, voire aux trois à la fois ?

Effectivement, un déficit budgétaire de 62 ou 63 milliards d'euros, alors que les effets les plus graves de la crise ne se sont pas encore fait sentir dans notre pays a de quoi inquiéter. De ce point de vue, les propos du président de la commission des finances comme ceux du rapporteur général ont été assez éclairants ; ils ont recueilli l'assentiment de tous les présents, peu nombreux mais de qualité.

Quand on se demande si la crise est à l'origine de l'aggravation considérable du déficit budgétaire, il faut regarder ce qui se passe ailleurs, et essayer de comprendre les raisons de cette dérive des comptes qui n'existe pas en Allemagne, par exemple, un pays auquel nous avons l'habitude de nous comparer.

Le président de la commission des finances l'a très bien dit : l'Allemagne est pratiquement à l'équilibre budgétaire en cette fin d'année 2008, à 0,1 point de PIB près. La France enregistre 3,4% de PIB de déficit, et encore s'agit-il d'un déficit structurel, pas ou très peu lié à la crise. Cela suffit à montrer que les commentaires flatteurs de certains membres du Gouvernement comparant la situation de notre pays à celle de l'Allemagne n'avaient pas lieu d'être, même si les déclarations enflammées peuvent emporter la conviction sur certains bancs.

La crise est-elle à l'origine de ce déficit budgétaire supérieur à 60 milliards d'euros ? Regardons les recettes et les dépenses en 2008.

S'agissant des recettes, le rapporteur général et vous-mêmes estimez que les recettes fiscales ont baissé d'un peu moins de 12 milliards d'euros par rapport aux estimations. En réalité la situation est plus inquiétante. En loi de finances initiale, 283 milliards d'euros de recettes globales étaient prévus ; en exécution, elles s'élèvent à 260 milliards d'euros ; nous constatons donc un écart de 23 milliards d'euros qu'il s'agit de comprendre et que la Cour des comptes a tenté d'analyser.

Cet écart de 23 milliards d'euros peut s'expliquer de manière relativement simple. Il y a d'abord 5 milliards d'euros de surestimation manifeste de certaines situations, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu ou de la prime pour l'emploi. Nous pourrons y revenir dans le détail, mais les annexes de la Cour des comptes fournissent des explications éclairantes en la matière.

Ensuite, sur les 12 milliards de perte de recettes fiscales, 7,8 milliards s'expliquent par des mesures proposées par le Gouvernement et acceptées par le Parlement – par votre majorité, monsieur le ministre. Ces 7,8 milliards d'euros de perte fiscale ne doivent rien à la crise et tout aux mesures que vous avez proposées au Parlement et que votre majorité a adoptées.

Puis, il y a des transferts de charges : 1,3 milliard d'euros, à ma connaissance, pour les collectivités locales, et de l'ordre de 4,3 milliards d'euros pour les organismes de sécurité sociale.

Quand on additionne 5, 7,8 et 5,6, on obtient entre 18 et 19 milliards d'euros. L'écart par rapport aux recettes initialement espérées étant de 23 milliards d'euros, cela signifie qu'il manque quelque 4 milliards d'euros. Oui, monsieur le ministre, ces 4 milliards sont probablement imputables à la crise.

Mettre le déficit budgétaire de l'année 2008 – 62 ou 63 milliards d'euros – sur le compte de la crise est une commodité. C'est un argument de séance ou de circonstance qui ne peut convaincre. En tout cas, il n'a pas convaincu – loin s'en faut – les magistrats de la rue Cambon, comme il ne convainc pas davantage les membres de la commission des finances.

Il en ira différemment pour l'année 2009, mais le déficit budgétaire de 60 à 63 milliards d'euros de 2008 doit peu ou très peu à la crise : 4 milliards d'euros selon la Cour des comptes ; 6 milliards selon le rapporteur général ; 11 milliards d'euros selon vous. Je pense que le rapporteur général et probablement d'autres collègues sont dans la vérité en l'estimant à 6 milliards d'euros. Comparez les chiffres : 63 milliards d'euros de déficit dont 6 milliards d'euros dus à la crise. Ils prouvent que le déficit budgétaire de 2008 – 3,4 % de PIB à la fin de l'année – est bien structurel et non pas dû à la crise.

Examinons maintenant les dépenses. À vous entendre, monsieur le ministre – même si vous avez tenu des propos différents en commission et en séance –, vous auriez respecté la norme « zéro volume » et vous en êtes très fier. Au préalable, vous stipulez que l'inflation a été nettement plus élevée que prévu. Il est vrai que si l'on retient le chiffre définitif de l'inflation, les choses sont totalement différentes. Pour autant, la norme de dépenses a-t-elle été tenue ? Je ne le crois pas, et je vais vous donner deux exemples montrant qu'il n'en fut rien.

D'abord, la taxe sur les véhicules de société – une dépense de l'État – a été affectée directement aux collectivités. Elle aurait dû apparaître dans cette comptabilisation, faisant monter la norme de dépense au-delà de 2,8 % : l'objectif « zéro volume » que vous aviez vous-même édicté n'est alors plus respecté.

Deuxième exemple : l'épargne logement et les 950 millions d'euros que vous demandez au Crédit foncier de France d'assurer en lieu et place de l'État. En toute logique, ce montant doit être réintégré dans la dépense budgétaire.

Je vous cite ces deux éléments, mais il y en a d'autres. À cet égard aussi, le rapport de la Cour des comptes est tout à fait édifiant : la norme de dépenses n'a pas été de 2,8 % et n'a pas respecté l'objectif de « zéro volume » ; les magistrats de la rue Cambon – et je pense qu'ils ont raison – l'estiment à 3,4 %. Bref, vous n'avez même pas respecté la norme de dépenses que vous vous étiez fixée.

S'agissant de la dépense fiscale, le président de la commission des finances a anticipé sur mes propos, mais puisqu'il m'y a invité, j'en dirai quelques mots. Entre 2002 et 2008, la dépense fiscale est passée de 50 à 73 milliards d'euros – sans compter les 3 milliards de baisse de TVA dans la restauration. Une augmentation de 23 milliards d'euros de la dépense fiscale entre 2002 et 2008, c'est déjà beaucoup !

En outre, 486 dispositifs ont été créés, au rythme d'une quinzaine par an en moyenne depuis 2003, contre quatre ou cinq pendant vingt-cinq ans. La dépense fiscale, qui a augmenté de 7 % par rapport à 2007, représente plus d'un cinquième de la dépense budgétaire, ce qui est considérable. Aucun discours sur la norme de dépense budgétaire, aussi sévère que soit cette norme, n'aura la moindre once de crédibilité tant que la dépense fiscale sera, pour l'exécutif – comme elle l'est, certes depuis longtemps mais de façon accrue depuis quelques années –, un moyen d'échapper à la norme de dépense budgétaire que vous avez fixée en vous drapant dans les vertus du bon gestionnaire.

Rien, ni dans les recettes ni dans les dépenses, ne permet donc d'affirmer que la crise est à l'origine de la dérive budgétaire, alors même, je le répète, que les effets de cette crise ne se feront sentir, et de manière redoutable, qu'en 2009. Or pour 2009, précisément, rien, dans ce projet de loi de règlement, n'est vraiment encourageant. Que l'on en juge : l'État va devoir emprunter cette année 250 milliards d'euros, dont 100 milliards pour rembourser en capital, 120 à 125 milliards pour équilibrer le budget de l'État, 20 milliards au moins pour couvrir le déficit de la sécurité sociale et 10 milliards pour couvrir celui des collectivités locales. Ces 250 milliards d'euros équivalent à peu près au budget efficace, c'est-à-dire une fois retranchés les prélèvements sur recettes que constituent les dotations aux collectivités locales et le budget alloué à l'Union européenne. Bref, l'État aura emprunté cette année l'équivalent de son budget, ce qui, rapporté à son déficit de 120 à 125 milliards d'euros, signifie que, sur deux euros dépensés, il en empruntera un : l'affaire est donc inquiétante. Jamais, dans notre histoire économique et financière pourtant mouvementée, nous n'avions abordé, même en temps de guerre, une période de récession avec un déficit structurel et un état des finances publiques aussi préoccupants.

L'année 2009 s'annonce donc sous de très mauvais auspices. Sans doute impressionné par l'ampleur du déficit, quelqu'un – j'ignore qui – a décidé qu'il fallait le diviser par trois : un déficit structurel, un déficit de crise et un « déficit d'avenir », expression aussi terrible que révélatrice. S'agit-il d'un lapsus freudien ? Toujours est-il qu'elle me paraît en effet appropriée : il aura fallu attendre jusqu'à la mi-mandat pour que le Gouvernement et sa majorité consentent à parler de dépenses d'avenir, ce qui revient à dire que celles engagées depuis plus de deux ans ne l'étaient pas.

L'imagination semble donc prendre le pouvoir sur les bancs de la majorité. Vous avez dû, mes chers collègues, lire les propos tenus hier par le président du groupe UMP, très attaché à la coproduction législative et à son rôle à la tête du groupe majoritaire. J'ai relevé, dans cette interview, trois points essentiels. En premier lieu, le président du groupe UMP estime nécessaire de faire des économies. Bienvenue au club ! Il propose 1 milliard d'euros, à rapporter à un déficit prévisionnel de 120 milliards : c'est bien, mais évidemment très insuffisant, à moins que le président du groupe UMP et ses collègues de la majorité n'acceptent de juger de l'efficacité de toutes les mesures. À cet égard nous vous suggérons de revenir sur l'une d'entre elles, aussi inefficace que coûteuse : le paquet fiscal décidé en août 2007. Cela nous permettrait d'économiser non pas 1, mais 8 à 10 milliards d'euros. C'est autant que les générations futures n'auraient pas à rembourser puisque, comme vous le savez, mes chers collègues, le paquet fiscal reste intégralement financé par l'emprunt, pas un euro n'ayant été prévu pour ce financement, que ce soit en recettes supplémentaires ou, cela va de soi, en économies.

Or, probablement impressionné par l'économie de 1 milliard d'euros qu'il demande à l'État, M. Copé fait deux propositions, qu'il présente étrangement comme des mesures d'économie, alors qu'elles s'apparentent plutôt, me semble-t-il, à des recettes supplémentaires : fiscaliser les indemnités journalières des accidents du travail – on maintiendrait donc le bouclier fiscal tout en imposant les victimes d'un accident du travail : il fallait y penser ! –, et augmenter les cotisations chômage des fonctionnaires, estimant sans doute qu'il serait équitable de les aligner sur celles des salariés du privé, qui leur sont supérieures : puisque vous êtes aussi en charge de la fonction publique, monsieur le ministre, j'aimerais avoir votre sentiment sur ce second point.

Bref, M. Copé propose, d'une part, une économie dérisoire en oubliant l'essentiel, à savoir les mesures les plus coûteuses et les moins efficaces, et, d'autre part, deux mesures qui sont en réalité des recettes supplémentaires, lesquelles entraîneront une augmentation des prélèvements obligatoires. Or l'une des rares choses que nous ayons apprises lors du Congrès à Versailles, qui a coûté la bagatelle de 500 000 euros à l'État, est que le Président ne souhaitait pas augmenter les impôts et qu'il lancerait un grand emprunt national : 500 000 euros pour ces deux seules nouvelles, c'est quand même un peu cher payé ! Manifestement, la coproduction législative avance à grands pas et c'est avec intérêt que, depuis les bancs de l'opposition, nous jugerons qui, du groupe parlementaire ou de l'Élysée, l'emportera sur les deux suggestions au demeurant intéressantes de M. Copé.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous interroger sur un ton tout aussi amical que le président de la commission des finances : dites-vous vraiment tout au maître de l'Élysée et à ses collaborateurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Lui avez-vous exposé la situation réelle de notre pays, notamment comparée à celle de l'Allemagne ? Lui avez-vous dit que, en l'état actuel de nos finances publiques, un grand emprunt n'était peut-être pas la meilleure solution ? Lui avez-vous fait observer que l'expression « déficit d'avenir » impliquait un jugement très sévère sur son action passée, non seulement en tant que Président de la République, mais aussi comme ministre puisqu'il est aux affaires depuis 2002, exception faite des sept à huit mois au cours desquels il ne s'est consacré qu'à l'UMP, à l'époque où l'on jugeait impossible de cumuler la direction de ce grand parti politique et une charge ministérielle ?

Quoi qu'il en soit, nous en sommes à trois déficits : le déficit structurel – 3,4 % du PIB en 2008, quand l'Allemagne présente des comptes équilibrés – ; le déficit de crise – crise dont on va constater les ravages en 2009 – ; et le déficit d'avenir. En vérité, ces trois déficits exigeront d'avoir recours à l'emprunt. Or cet emprunt, ce n'est pas la génération qui l'aura décidé qui le remboursera, c'est la suivante. Au fond, peut-être est-ce là la clé de la politique économique et financière du Président de la République : ceux qui paieront les déficits sont non pas ceux qui voteront en 2012, mais leurs enfants ; nous formulons donc le souhait que ces électeurs pensent alors davantage à ces derniers qu'à eux-mêmes, sanctionnant un gouvernement et une majorité qui traitent avec autant d'incurie les finances de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Je serai bref, car M. Cahuzac, qui accumulé les chiffres et les idées, m'a fait penser à la réplique du film Amadeus : « Trop de notes » !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Vous êtes gentil de me comparer à Mozart, mais c'est un peu flatteur ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Cet exposé flamboyant comporte néanmoins beaucoup d'approximations, que je n'ai pu noter intégralement : je n'y répondrai donc pas de façon exhaustive.

J'ai d'abord relevé un paradoxe d'ordre général : sans vraiment convaincre, vous tentez, monsieur Cahuzac, de démontrer l'insincérité des comptes ; mais les informations fournies n'ont jamais été aussi transparentes. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le président de la commission des finances et le rapporteur général. Vous pouvez contester notre politique, mais pas les éléments que nous vous donnons pour en juger, puisque ce sont eux qui permettent une évaluation de plus en plus sincère de nos finances publiques.

Vous avez parlé, pour contester cette sincérité, de sous-évaluation chronique des dépenses prévues par la loi de finances initiale. Or beaucoup de progrès ont été faits en ce domaine.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Les budgets sous-évalués au cours des vingt dernières années sont légion : on pourrait écrire l'histoire des sous-évaluations sous la Ve République !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

En effet.

Saluons plutôt, je le répète, les progrès sensibles faits au cours des dernières années : au moins permettent-ils de diminuer la sous-évaluation budgétaire.

Il reste évidemment des points à améliorer. S'agissant des plans d'épargne logement, l'augmentation de la dette est de 300 millions d'euros – et non de 900 millions –, compte tenu de la difficulté de prévoir, depuis les mesures de défiscalisation de 2006, le rythme des fermetures de ces plans d'épargne. Dans le collectif budgétaire, 150 millions d'euros supplémentaires ont été débloqués afin de limiter l'accroissement de cette dette qui, ayant fait l'objet d'une remarque de la Cour des comptes, apparaît d'ailleurs de façon tout à fait transparente dans les comptes.

Quant à la dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale, vous avez noté les efforts fournis : je m'en félicite d'autant plus qu'ils n'auraient peut-être pas pu l'être l'année suivante. L'augmentation de cette dette, qui est évidemment l'une de nos préoccupations, s'élève à 400 millions d'euros : il s'agit donc d'une question purement budgétaire. Du point de vue comptable, en effet, la dette varie de 6 à 7,5 milliards d'euros, compte tenu de différentes charges ou de décalages mensuels. Je crois être tout à fait honnête en observant que l'augmentation de 400 millions d'euros résulte essentiellement de la crise, davantage d'aides au logement ayant été versées, ce qui apparaît tout aussi clairement dans les comptes. Bref, on ne saurait, de quelque façon que ce soit, contester la sincérité budgétaire. Une chose est en effet de parler de la dégradation des comptes – laquelle est incontestable – ; une autre est de prétendre qu'ils ne sont pas sincères.

Pour ce qui concerne la défense, autre domaine traditionnellement « sous-budgétisé », le report de charges sur les crédits d'équipements n'a entraîné, contrairement à ce que avez dit, aucune aggravation. Quant aux OPEX, les opérations extérieures, nous leur avons octroyé 500 à 600 millions d'euros, quand elles étaient budgétairement délaissées en 2002 et au cours des années suivantes.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Il est vrai que, en ce domaine, nous n'avons pas fait tout le chemin. Mais nous avons tout de même fait beaucoup.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Enfin, les « impayés » des principaux postes de dépense identifiés par la Cour des comptes représentent 300 millions d'euros, soit environ 0,1 % des dépenses : ceux afférents aux plans d'épargne logement et à la dette de l'État envers la sécurité sociale ont augmenté ; en revanche, comme la Cour l'a elle-même reconnu dans son rapport sur l'exécution budgétaire – et Dieu sait qu'elle n'est pas indulgente –, les « impayés » relatifs aux crédits de la défense nationale, crédits pourtant traditionnellement sous-évalués, ont diminué.

À quoi le dérapage des pertes fiscales entre la loi de finances initiale et le budget exécuté est-il dû ? L'augmentation du déficit est en effet de 14 à 15 milliards d'euros. Je ne suis pas d'accord avec votre explication, pas plus qu'avec l'approche de la Cour. La crise est en grande partie responsable de cet écart, en tout cas pour 8,5 des quelque 11,7 milliards d'euros de recettes fiscales en moins. Quand on considère les rentrées fiscales de ces dernières années, en particulier celles relevant de l'impôt sur les sociétés ou de la TVA, on constate que le niveau moyen des recettes s'est puissamment dégradé à périmètre constant – en effet, il ne faut pas prendre en compte les baisses de recettes consécutives à nos choix politiques de réduction de la fiscalité. Il est vrai que, entre 8,5 et 11,7, il subsiste un décalage de 3 milliards d'euros : cette baisse de recettes est notamment due au fait que les dispositifs de crédit d'impôt ont fonctionné beaucoup plus ou à des modifications de normes fiscales.

Quant à la différence entre 11,7 et 15 milliards d'euros, soit un peu moins de 4 milliards, il s'agit, à l'évidence, d'augmentations de dépenses dues à la crise. En effet, 80 % de ces dépenses supplémentaires s'expliquent par l'augmentation des charges d'intérêt de la dette due à l'inflation constatée en 2008.

Vous criez au loup à propos de la nature et de la profondeur des déficits, vous considérez qu'il y en a trop, que les comptes ne sont pas sincères : mais la sincérité vaut dans les deux sens, et peut-être y a-t-il moins de déficits que vous ne croyez. Pourtant, le parti socialiste répète volontiers que les plans de relance ne sont pas à la hauteur des besoins du pays, que nous ne faisons pas assez en pourcentage de PIB, que les Américains, par exemple, font bien mieux, que nous n'avons pas mis assez d'argent public dans la relance. Vous ne pouvez pas nous reprocher, d'un côté, de creuser le déficit et, de l'autre, de ne pas dépenser assez. Pardonnez-moi de ne pas savoir faire, comme vous, le grand écart entre les deux positions. Cherchez l'erreur ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Je n'irai pas plus loin sur la question des déficits, car nous quittons là la loi de règlement pour entrer dans le débat d'orientation budgétaire. Dans ma présentation du budget de 2009, j'ai indiqué qu'il y avait, en effet, un déficit structurel et un déficit de crise : ces notions devaient permettre de clarifier les choses, dans un monde de plus en plus compliqué. Nous avons même chiffré ces deux types de déficit, en précisant que les solutions n'étaient pas les mêmes pour l'un et pour l'autre. Notre vision n'a pas changé. Le Président de la République a, d'une part, demandé l'équilibre pour le déficit structurel, ce qui nous permettra d'aller, en la matière, plus vite que nous ne l'estimions possible, et a fixé, d'autre part, une règle autorisant à emprunter pour des dépenses d'investissement particulièrement ciblées. Grâce à ces deux règles, de nature différente mais d'égale importance, l'évolution de la dépense publique dans les années qui viennent sera mieux structurée. Mais nous en parlerons à loisir tant dans le débat d'orientation budgétaire que lors de l'examen du projet de loi de finances. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

J'ai reçu plusieurs demandes d'explications de vote sur la motion de rejet préalable. En vertu du nouveau règlement, ces interventions ne peuvent excéder deux minutes.

La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je voudrais féliciter notre collègue Cahuzac : pour la première fois, il a parlé de la constitutionnalité de la loi de règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Il y a même consacré un peu plus du quart de son intervention.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Il a ensuite abordé un tout autre sujet, la loi de finances de 2009 et, surtout, celle de 2010, dont nous reparlerons demain.

Il m'a semblé, toutefois, que, dans sa première partie, il était un peu excessif. Il y a encore cinq ou six ans, en effet, les documents budgétaires étaient totalement insincères et les comptes de l'État ne tenaient pas debout. Toutes tendances confondues, nous devons rendre hommage aux efforts considérables par lesquels, à la suite de la nouvelle loi organique, on a tenté de mettre en ordre les comptes de l'État. Certes, il reste encore des années de travail, mais, contrairement à ce qu'a dit notre collègue, nous progressons.

M. Cahuzac n'est d'ailleurs pas allé jusqu'au bout de son analyse : il aurait dû se demander pourquoi la Cour des comptes n'avait pas refusé de certifier les comptes. La première année, elle les a certifiés avec vingt-neuf ou trente réserves. Cette année, les réserves diminuent en nombre et en ampleur.

Je suis bien d'accord avec notre collègue, et je le répète depuis des années : les comptes de l'État ne sont pas irréprochables. Mais il faut reconnaître qu'il y a des progrès et que, dans cinq ou six ans, ils commenceront à être assez sincères. Rendons donc hommage à notre ministre qui, avec Jean Arthuis, a été l'un des premiers à essayer de parvenir à ce résultat – mais peut-être était-il en cela déterminé par son lourd passé. (Sourires.) Il y a partiellement réussi. Voilà pourquoi nous ne voterons pas la motion de rejet préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe socialiste votera la motion de rejet préalable qu'a brillamment défendue notre collègue Jérôme Cahuzac. La situation de nos finances publiques en 2008 est en effet inacceptable. Il est irresponsable d'aborder une récession majeure avec un déficit excessif – 3,4 % du PIB –, entièrement structurel, car c'est se condamner à ne pas pouvoir agir efficacement contre la conjoncture.

Monsieur le ministre, nous sommes cohérents en vous disant que votre relance n'est pas suffisante : vous ne vous êtes pas donné les moyens, vous n'avez pas su réduire les déficits dans une période de croissance où tous les pays européens ont réduit les leurs. En 2005, l'Allemagne avait un déficit de 3,5 %, supérieur à celui de la France – qui était de 2,9 %. Elle est revenue à zéro en 2007, est restée à zéro en 2008, et dispose, elle, des moyens d'une relance.

Le déficit est, je l'ai dit, entièrement structurel. Pour 2008, la Commission européenne évalue ce déficit structurel à 4,2 % du PIB, et l'OCDE à 3,5 %. Les 3,4 % de déficit de 2008 sont donc bien un déficit structurel.

Vous courez un double risque. D'une part, vous ne pouvez pas prendre les mesures adéquates face à l'ampleur de la récession, et cela se voit bien en matière d'emploi. L'Allemagne est plus touchée que nous par la crise internationale, parce qu'elle est plus ouverte au commerce international, mais elle a limité la montée du chômage, parce qu'elle a pris de vraies mesures pour l'emploi, mesures que vous ne prenez pas.

D'autre part, vous courez le risque de voir une explosion de la dette. La Cour ces comptes l'a remarquablement expliqué dans son rapport, en montrant que, avec un déficit qui pourrait se monter à 6 % en 2012 et avec une dette qui pourrait atteindre 90 %, il suffirait d'une petite dérive des comptes – la Cour cite le chiffre de 0,1 % par an – pour que la dette explose.

Vous vous êtes mis dans une situation où vous ne pouvez pas prendre de mesures adéquates face à la crise et où, en ne relançant pas suffisamment la croissance, vous risquez de voir, dans quelques années, la dette exploser. Voilà pourquoi le groupe socialiste votera cette motion de rejet préalable : dans la situation dramatique de nos finances publiques, il faut en finir avec cette politique de la poudre aux yeux – qui se traduit par exemple par le débat actuel sur l'emprunt – et tenir enfin aux Français un langage de vérité.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

M. le ministre a été extrêmement clair, précis et concis dans sa réponse à M. Cahuzac, et je me contenterai de dire que le groupe de l'UMP s'opposera à cette motion de rejet préalable.

Je voudrais cependant rappeler deux considérations de Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, qui, devant la commission des finances, a relevé les grands progrès opérés par le Gouvernement. M. Cahuzac a omis de citer ces déclarations et je voudrais corriger son oubli.

D'une part, en 2007, la certification des comptes de l'État avait été assortie par la Cour de treize réserves substantielles. Elles sont passées à neuf, trois réserves ayant été levées.

D'autre part, M. Séguin dit ceci : « Nous pouvons nous féliciter d'autres progrès, dans la réserve sur les produits régaliens par exemple […]. Au total, la Cour a formulé 283 observations et obtenu des corrections et des ajustements significatifs dans les comptes, pour un montant de 9 milliards d'euros au compte de résultat, de 27 milliards au bilan et de 33 milliards en engagements hors bilan. »

Inutile d'épiloguer sur des aspects qui n'ont rien à voir avec cette loi de règlement et qui ont plutôt trait au débat d'orientation budgétaire dont nous parlerons demain. Lorsqu'il s'agit de la loi de règlement, il s'agit aussi de la certification des comptes de l'État, de comptes sincères et véritables. Or, en la matière, il est incontestable que l'on note de très grands progrès qui sont à mettre au crédit, notamment, de M. le ministre des comptes publics, Éric Woerth.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

C'était la seule intervention sensée ! (Sourires.)

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.

La parole est à M. Pierre Moscovici, pour une durée ne pouvant excéder trente minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Moscovici

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a une semaine, à Versailles, nous avons testé une innovation institutionnelle : le discours du Président de la République, son adresse au Congrès. Je souhaite que l'exécutif ne se contente pas de faire appel aux nouvelles procédures qui participent de la rationalisation parlementaire, mais qu'il explore avec la même promptitude, la même diligence, la même ardeur, le même dynamisme, celles qui conduisent à l'affirmation du rôle du Parlement – puisque le Gouvernement les a dites nombreuses –, notamment en matière de contrôle, et en particulier, pour le texte qui nous intéresse aujourd'hui, de contrôle de l'exécution budgétaire. Car ce n'est pas tout d'affirmer, face à la représentation nationale, que son pouvoir s'est accru considérablement à votre initiative, encore faut-il donner chair, contenue, vie à ces principes. Mon groupe souhaite que les largesses procédurales que s'accorde l'exécutif trouvent ainsi un contrepoint dans le respect du temps et du travail parlementaires.

Or nous estimons que les modalités d'examen du projet de loi de règlement des comptes 2008 ne remplissent pas cet objectif, et mon groupe demande en conséquence un renvoi du texte en commission des finances.

Une étude plus approfondie du texte par la commission compétente au fond s'impose à notre sens pour quatre raisons.

La première tient à la situation des finances publiques.

Le projet de loi de règlement des comptes pour 2008 fait état d'une situation financière très dégradée, après des prévisions pourtant très optimistes. Nous pensons qu'il convient de mieux en examiner les motifs en renvoyant le texte en commission ; en effet pour cela, nous avons besoin de temps car ce projet de loi établit le triste constat d'une dégradation brutale et préoccupante de la situation budgétaire. Les chiffres ont déjà été donnés, mais j'y reviens brièvement.

Ainsi que l'a souligné M. Migaud, l'exercice 2008 laisse apparaître un déficit budgétaire de 56,3 milliards d'euros, en augmentation de 47 % – j'insiste : 47 % ! – par rapport au déficit de 2007 qui s'établissait à 38,4 milliards. Quant au premier président de la Cour des comptes il a indiqué, lors de son audition par la commission compétente au fond, le 3 juin dernier, que cette somme représente tout de même un quart des recettes annuelles de l'État. À ce propos je rappelle que la loi de finances initiale prévoyait un déficit inférieur à ce montant, d'environ 15 milliards. Je ne suis pas certain qu'il y ait eu un écart plus grand entre la prévision initiale et le résultat définitif. Ainsi, la dégradation du résultat budgétaire, déjà amorcée en 2007, s'est considérablement amplifiée l'année dernière.

Deuxième indicateur : l'ensemble des recettes fiscales nettes et non fiscales est en baisse. C'est une rupture par rapport à l'exercice précédent : au total, les recettes nettes de l'État reculent de 11,2 milliards par rapport à l'exercice 2007.

Tournons-nous du côté des dépenses : le tableau n'est pas beaucoup plus rose !

Les dépenses brutes totales de l'État enregistrent une hausse de 15,6 milliards. Il faut tout de même une singulière audace pour prétendre qu'elles auraient été maîtrisées d'une quelconque manière. Le besoin de financement de l'État s'est renforcé au cours de l'année 2008, et l'équilibre financier de l'État a dû être révisé non pas à une, mais à deux reprises : au dernier trimestre de 2008, à l'occasion de la loi de finances rectificative pour le financement de l'économie du 16 octobre 2008 et, plus classiquement, de la loi de finances rectificative du 30 décembre dernier.

Dernier indicateur que je souhaite mettre en lumière : la couverture des dépenses par les recettes – nettes des remboursements et dégrèvements – a été inférieure à 80 % en 2008. C'est le taux le plus bas depuis cinq ans. À titre de comparaison, il était encore de près de 86 % en 2007.

Voilà, brossé à grands traits – beaucoup de choses ayant déjà été dites – le tableau de notre situation budgétaire à l'issue de l'exercice 2008, tel qu'il ressort du projet de loi de règlement. Personne ne peut nier avec bonne foi – et nul ne l'a d'ailleurs fait – que ce tableau est particulièrement sombre. Au regard des enjeux et des montants impliqués, mon groupe croit donc justifié de se pencher avec vigilance et sans précipitation sur les motifs de la dégradation de nos finances publiques.

Cela d'autant plus judicieux – et j'en viens par là à ma deuxième raison – que le projet de loi de règlement des comptes pour l'année 2008 établit un lien de causalité discutable, discuté et que je crois en réalité erroné, entre crise économique et dégradation de la situation budgétaire. La Cour des comptes – vous en avez fait, monsieur le ministre, le coeur de votre réponse à M. Cahuzac – propose une tout autre interprétation de la dégradation de nos finances publiques. Le fait même qu'il existe une divergence aussi forte entre le Gouvernement et la Cour devrait, à mon sens, conduire à un examen au fond de la commission.

Le Gouvernement indique, dans l'exposé des motifs du projet de loi de règlement, que la dégradation du déficit budgétaire « est essentiellement imputable aux effets de la crise économique, dont l'incidence pèse sur le montant des recettes fiscales, et à l'impact du choc d'inflation observé au premier semestre 2008 sur la charge de la dette » ; vous l'avez répété, monsieur le ministre, dans votre intervention liminaire puis dans votre réponse à M. Cahuzac. J'observe que cette interprétation de la situation des finances publiques ne recoupe pas – et même pas du tout – celle que propose la Cour des comptes dans son rapport relatif aux résultats et à la gestion budgétaire de l'État pour l'exercice 2008. Le premier président de la Cour des comptes, M. Philippe Séguin, a ainsi souligné, lors de son audition du 3 juin, que « cette année, la véritable difficulté vient du caractère structurel, et pas seulement conjoncturel, de la dégradation du résultat ». Il y a à l'évidence une divergence entre votre lecture et celle de la Cour. Le simple fait que cette divergence existe et ses conséquences justifient à nos yeux un renvoi en commission.

Regardons-y de plus près, et tentons dès à présent de démêler les causes de la précarité de nos finances publiques, et d'évaluer – ce sera sévère – la solidité de l'argumentation que le Gouvernement présente.

En matière de dépenses, tout d'abord, la Cour des comptes a souligné que l'impact de la crise est resté très limité : l'essentiel de la charge du plan de relance doit peser sur l'exercice 2009. Disons-le donc : il n'y a de ce côté-là pratiquement aucun lien de causalité entre la situation budgétaire en berne et la crise économique.

Qu'en est-il pour le versant recettes ?

Pour la première fois depuis 2002, les recettes fiscales nettes diminuent fortement sur l'exercice, alors même que les recettes fiscales brutes progressent durant la même période. En effet elles baissent pour la troisième année consécutive. Or cette diminution s'explique, pour une part majeure, par les allégements d'impôts à hauteur de 7,8 milliards d'euros. Les remboursements et les dégrèvements d'impôts ont en effet connu une progression rapide, passant de 81 milliards en 2007 à plus de 92 milliards en 2008. Sans les mesures d'allégement d'impôts – nous sommes là au coeur de votre politique – qui produisent pour la première fois leurs effets en année pleine pour l'exercice 2008, les recettes fiscales nettes auraient augmenté de 2,7 %.

On observe donc que les recettes fiscales ont diminué, mais que les difficultés économiques constatées à la fin de l'année 2008 ne suffisent pas à expliquer cette évolution. En réalité, la dégradation du solde budgétaire résulte pour beaucoup de la perte de 14 milliards de recettes fiscales, du fait d'allégements d'impôts et de la compensation d'exonérations de cotisations de sécurité sociale, deux évolutions qui découlent très directement des arbitrages budgétaires du Gouvernement et des orientations qu'il a choisies pour la mise en oeuvre de ses politiques publiques. Les évolutions divergentes des recettes fiscales brutes et des recettes fiscales nettes traduisent en fait les choix fiscaux et budgétaires que vous avez faits. Ce n'est donc pas la crise qui est à l'origine du déficit historique que nous connaissons ; ce sont les arbitrages effectués en conscience et, à notre avis, de manière erronée, par l'exécutif, au service d'une politique économique qui demeure injuste et, de surcroît, inefficace. Je pense notamment – on s'en doute – aux différents dispositifs de la loi dite « Travail, emploi et pouvoir d'achat », ou TEPA qui, en 2008, a pesé 6,5 milliards d'euros.

En dernière analyse, la Cour des comptes – et c'est aussi notre sentiment – juge que l'impact en 2008 de la conjoncture économique sur les recettes fiscales aura été limité. Toutes choses étant égales par ailleurs, la Cour estime que la conjoncture n'est responsable de la baisse des recettes fiscales nettes qu'à hauteur de 4 milliards, chiffre déjà cité. Le fléchissement progressif de la conjoncture économique dès le premier semestre de 2008 n'explique donc que pour une très faible part la diminution des recettes de l'État. Pour le dire en termes moins techniques et plus politiques ou directs, j'ai le sentiment que le Gouvernement cherche à nous faire prendre des vessies pour des lanternes, ou plutôt de la mauvaise gestion pour de la malchance. Si ce n'est pas le cas, je suis persuadé qu'aucun de mes collègues de la majorité ne s'opposera à ce que nous nous penchions plus avant sur ce point – considérable – de divergence en commission des finances, afin de trancher définitivement.

La troisième raison qui motive notre demande de renvoi en commission tient au fait que le projet de loi de règlement des comptes pour l'année 2008 présente de nombreuses zones de flou sur lesquelles la commission des finances doit revenir, notamment – pour donner sens à ce qu'évoquait M. Cahuzac – le principe de sincérité budgétaire qui est consacré à l'article 32 de la LOLF. À y regarder de plus près, en effet, on constate que le résultat budgétaire pour l'exercice 2008 tel que présenté dans le projet de loi de règlement ne reflète pas du tout la situation budgétaire de l'État à la fin de l'exercice. Un certain nombre de zones d'ombre, de zones de flou, incitent à procéder à une analyse plus fouillée et plus fine des résultats présentés dans le projet de loi de règlement.

J'en donne quelques exemples rapides.

Tout d'abord, le solde lui-même : il fait l'objet d'approximations, sur lesquelles il serait utile que les commissaires aux finances reviennent. Si l'on se penche de près sur la question, on constate que les recettes comme les dépenses de l'État ont été affectées par des décisions qui conduisent à minorer le déficit. Du côté des recettes, l'État a ainsi anticipé certains encaissements en 2008 – par exemple ceux des acomptes sur les dividendes des trois entreprises publiques EDF, France Télécom et GDF-Suez – alors que ces recettes n'auraient du être encaissées qu'en 2009. De leur côté, les dépenses ont été minorées, notamment par le report en 2009 de dettes exigibles en 2008, alors que l'appréhension de la réalité de la situation budgétaire de l'État doit pourtant conduire à prendre en compte le total des dettes juridiquement exigibles à la fin de l'exercice 2008 pour calculer le solde. Sans ces mesures de minoration du déficit, celui-ci aurait pu atteindre 63,5 milliards d'euros.

Toutefois, les approximations, les zones d'ombres, les effets de perspectives et les jeux d'écriture ne s'arrêtent pas là. Le projet de loi de règlement en est parsemé, justifiant de ce fait une analyse plus poussée des commissaires aux finances. J'en relève encore quelques-uns : la baisse des recettes non fiscales, par exemple, est marquée par le recours à des pratiques plus ou moins créatives. J'évoquais à l'instant la mobilisation accrue de certains dividendes par l'anticipation, par rapport au calendrier antérieur, des versements dus à l'État. Relevons aussi une autre décision qui, sans avoir d'incidence majeure sur le solde, modifie l'affichage des recettes : l'élargissement de la comptabilisation des loyers budgétaires. Tout cela crée un effet de perspective tout à fait trompeur.

Dans la même veine, on observe des opérations qui ont eu pour effet de minorer artificiellement les dépenses de l'État en 2008, telles que le financement croissant des primes d'épargne logement par des avances du Crédit foncier de France, par exemple. Là encore, il s'agit d'un trompe-l'oeil ; la commission des finances pourrait se pencher utilement sur ces mécanismes que l'administration a multipliés dans le projet de loi de règlement.

Derrière l'apparent discours du Gouvernement sur la maîtrise de la dépense, notamment sur les « niches fiscales », la Cour des comptes – M. Cahuzac l'a dit – a souligné que la dépense fiscale et le nombre de niches créées continuent d'augmenter à un rythme soutenu. Là encore, nous constatons un décalage majeur entre le discours et la réalité.

Cependant, c'est certainement la progression des dépenses qui représente le tour de passe-passe le plus audacieux de ce projet de loi de règlement décidément plein de surprises.

Le projet de loi de finances pour 2008 avait retenu une norme de progression des dépenses calée sur l'inflation anticipée. En conséquence, le texte prévoyait un accroissement maximal autorisé limité à 5,5 milliards d'euros, équivalant, à périmètre constant, à une hausse de 1,9 % en valeur et de 0,3 % en volume avec une inflation de 1,6 %. La norme ainsi définie pour l'exercice 2008 n'a été respectée, en volume, que parce que l'inflation constatée de 2,8 % a été très supérieure aux prévisions. En valeur, pourtant, cela n'a pas été le cas puisque les dépenses d'État inclues dans la norme ont augmenté de 7,5 milliards d'euros – soit une hausse de 2,8 % – en crédits de paiement, soit 2 milliards d'euros au-delà de la norme, et de 8,3 milliards – soit un accroissement de 3 % – en autorisations d'engagement.

Chacun peut donc constater que la progression des dépenses s'est en réalité établie au-delà des limites fixées par la norme de progression des dépenses retenue par le Gouvernement. Sur ce point comme sur d'autres, le retour en commission permettrait d'apporter des éclairages similaires.

J'aborde à mon tour la question de la sincérité.

Le nouvel article 47-2 de la Constitution dispose que « les comptes des administrations publiques sont réguliers et sincères », et qu'ils « donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière ». Le premier président de la Cour des comptes a souligné à juste titre, lors de son audition par la commission des finances le 3 juin dernier, que la question se pose – et elle se pose à nous – de savoir si cette nouvelle disposition ne s'applique qu'à la comptabilité patrimoniale, ou aussi aux résultats budgétaires, ce que nous pensons.

Cette question n'a pas été tranchée mais, au vu des différents effets de perspective que je viens d'évoquer, des jeux d'écriture et des trompe-l'oeil qui ponctuent le projet de loi de règlement, il me semble qu'une interprétation extensive de ces nouvelles dispositions pourrait s'avérer pertinente. On nous répond, comme vient de le faire M. de Courson, que les choses progressent. Allons donc jusqu'au bout : prenons le temps d'en débattre en commission des finances.

Là encore, tout cela plaide en faveur d'un retour du texte devant les commissaires pour une étude plus approfondie.

Enfin – c'est la dernière raison qui justifie un renvoi en commission – le projet de loi de règlement des comptes pour l'année 2008 donne des indications sur la situation des finances publiques demain. La commission des finances doit donc disposer du temps nécessaire pour en tirer tous les enseignements. Il est essentiel notamment qu'elle puisse examiner de nouveau ce qui constitue l'un des indicateurs les plus sûrs de la situation budgétaire à venir : la dette. Trois chiffres suffisent à caractériser la situation.

Tout d'abord, en 2008, la dette publique a augmenté de 118 milliards d'euros pour atteindre 68 % du PIB. Ensuite, les charges de la dette constituent près de 45 milliards d'euros en 2008, alors qu'elles représentaient un volume inférieur à 40 milliards d'euros en 2007. Cette évolution, qui correspond à une augmentation de 12,4 %, pénalise considérablement les générations futures, comme cela a été souligné. Enfin, tout cela conduit le solde primaire, positif en 2007 à environ 1,4 milliard d'euros, à redevenir négatif à 12,5 milliards d'euros environ pour l'exercice 2008.

Concrètement, et en termes simples, cela signifie que les intérêts de la dette – mais aussi une partie des autres charges courantes de l'État – n'ont été couverts qu'en recourant à de nouveaux emprunts.

M. Cahuzac n'a pas osé l'évoquer, mais le Président de la République, à Versailles, a présenté sa thèse des « trois déficits » dont le déficit de crise, c'est-à-dire le bon déficit – celui qui prépare l'avenir – et le déficit structurel, soit le mauvais déficit. À l'évidence, c'est celui-ci qui caractérise votre gestion des finances publiques en 2008, et sans doute plus encore en 2009.

Je n'ai pas besoin de préciser à quel point ces développements sont inquiétants. Toutefois d'autres indicateurs nous donnent un aperçu de ce à quoi ressemblera, demain, la situation budgétaire en France. J'en relève deux.

D'abord, le premier président de la Cour des comptes a noté, lors de son audition devant la commission des finances le 3 juin dernier – et il faut le marteler, car c'est la réalité – que « l'État aborde la crise avec un déficit structurel de 3,5 % qui ne lui laisse aucune marge de manoeuvre. » Tellement peu de marge de manoeuvre que vous avez, monsieur le ministre, benoîtement annoncé, la veille du discours du Président à Versailles, que le déficit public de la France atteindrait entre 7 et 7,5 % du produit intérieur brut en 2009 et serait probablement équivalent en 2010, pour atteindre 140 milliards d'euros. C'est tout simplement gigantesque !

Ensuite, l'affaissement, depuis 2006, des recettes fiscales nettes, inégalement réparti entre les impôts, accroît la concentration des recettes. Ainsi, la part du produit net de la TVA dans les recettes fiscales nettes devrait atteindre 53 % en 2009, contre 46,6 % en 2005. Se dessine alors de plus en plus distinctement une dépendance des recettes de l'État à l'égard d'un seul impôt, la TVA donc, et en dernière analyse, de la consommation des ménages. Compte tenu de la contraction de l'activité et de la sensibilité accrue des ménages à la baisse du pouvoir d'achat, cette évolution est de mauvais augure. Notons d'ailleurs que les rapports entre emprunt et pouvoir d'achat peuvent être singulièrement compliqués.

Je terminerai en soulignant que la complaisance dont fait preuve le Gouvernement à l'égard de la situation budgétaire n'est pas de mise, même si c'est de bonne guerre. En réalité, sa gestion a une grande part de responsabilité dans la dégradation dramatique de nos finances publiques.

Pour les quatre raisons que je viens d'exposer, mon groupe demande que le projet de loi de règlement soit renvoyé en commission. Un think tank français – réputé à gauche, sans doute –, Terra Nova, recommandait récemment que le travail parlementaire d'examen budgétaire soit facilité, et indiquait qu'il devrait notamment être permis aux députés de consacrer deux fois plus de temps dans le calendrier parlementaire tant à l'analyse des résultats qu'au vote du budget. Cette recommandation me paraît sage.

Irez-vous dans ce sens, en accordant le renvoi en commission que nous sollicitons ? Si tel n'est pas le cas, ce sera bel et bien le signe, d'une part, que le discours sur la revalorisation du rôle du Parlement, notamment dans le domaine des finances publiques, n'est qu'un paravent – qui cache mal la volonté de l'exécutif de tout contrôler –, d'autre part, que vous cherchez, en fuyant le débat, à escamoter vos responsabilités dans la dégradation dramatique de nos comptes publics. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, la parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Je serai bref, car la précédente explication de vote traitait de nombreux sujets.

Je salue à nouveau l'effort accompli par le groupe SRC pour veiller à ce que les motions soient bien en lien avec leur fonction propre ; en l'occurrence, la motion de renvoi en commission est particulièrement justifiée. Je félicite mes collègues socialistes pour leur travail, lequel a sans doute à voir avec le nouveau règlement qui va entrer très rapidement en application ; Mme la présidente a parlé de mercredi.

Je souligne toutefois deux points importants.

S'agissant d'abord de l'examen en commission, on ne peut pas dire que le travail sur la loi de règlement n'a pas été accompli dans d'excellentes conditions. J'en veux pour preuve l'audition du ministre, mais aussi la très longue audition du Premier président de la Cour des comptes, qui a donné lieu à un débat nourri. Chacun en trouvera la trace dans les rapports mis aujourd'hui à notre disposition pour que nous puissions prendre connaissance de tous les éléments concernant cette loi de règlement.

Ensuite, le travail a été accompli d'une façon qui, j'en suis sûr, intéressera Pierre Moscovici. Il s'agit d'un rapport plus volumineux qui rassemble toutes les observations des rapporteurs spéciaux ; je veux parler des rapports annuels de performances. Voilà comment le travail a été accompli depuis six mois par la commission des finances et les rapporteurs spéciaux.

Ajouter une heure ou une heure et demie de débat en commission à un travail qui a déjà demandé six mois pour être mis en place, ne me semble pas avoir beaucoup de sens. C'est pourquoi le groupe UMP estime qu'il est préférable de rejeter la motion de renvoi en commission et de poursuivre notre débat dans l'hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je défends, bien sûr, cette motion de renvoi en commission, car il y a au moins deux problèmes qui méritent d'être expertisés plus avant.

Le premier concerne le niveau de déficit budgétaire de l'État, fin 2008.

Le ministre affirme qu'il s'élève à 2,8 % et explique que la norme zéro volume a été respectée, alors que – Jérôme Chartier vient d'y faire référence – le premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin, a démontré que le niveau du déficit budgétaire était de 3,4 %. Qu'en est-il ? Vous conviendrez qu'entre 3,4 % et 2,8 %, la différence n'est pas de 0,1 point et qu'elle est suffisamment conséquente pour qu'un travail complémentaire d'expertise soit fait, d'autant que Philippe Séguin indique que ce déficit de 3,4 % est d'ordre structurel et qu'il ne doit rien à la crise.

Je vous renvoie, mes chers collègues, au compte rendu des propos de Philippe Séguin en la matière. Au demeurant, la chose est crédible puisque si les estimations divergent – 4 milliards pour les uns, 6 pour d'autres, 8 pour le ministre –, on voit que ces chiffres n'ont rien à voir avec le montant considérable du déficit qui nourrit la dette.

Le deuxième point légitimant le renvoi en commission porte sur la dette.

La situation devient si grave qu'il ne nous paraît pas inutile que la commission des finances se réunisse afin qu'à notre tour, et rapidement, nous fassions connaître aux pouvoirs publics nos préconisations afin que la dette cesse d'enfler, notamment dans une période où les ministres se réunissent un dimanche pour savoir à quoi vont être utilisés des milliards dont, bien entendu, ils ne disposent pas, s'agissant d'un nouvel emprunt.

Enfin, je souhaite connaître votre sentiment, monsieur le ministre sur plusieurs points. Êtes-vous en accord avec le président du groupe UMP sur la fiscalisation des indemnités journalières pour les accidents du travail ? Êtes-vous d'accord avec la proposition de M. Copé d'augmenter les cotisations chômage pour les fonctionnaires ? J'imagine que Jean-François Copé veut parler des trois fonctions publiques.

Monsieur le ministre, vous êtes – vous l'avez affirmé avec force et, j'ai cru le comprendre, avec un peu d'amusement – en charge de la fonction publique. Nous aimerions que vous nous indiquiez votre position au regard de ces propositions qui ne sont pas, vous l'aurez noté, mes chers collègues, des mesures d'économie ou de recettes supplémentaires, l'état du déficit et de la dette l'explique aisément.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Notre collègue a exposé, en défendant sa motion, que le texte devait être renvoyé en commission pour discuter à nouveau sur les conditions de correcte budgétisation. Or, à travers les rapports de la Cour des comptes et les débats que nous avons eus, tant sur cette loi de règlement que sur les lois de règlement antérieures, tout a été dit. Il est vrai que certains éléments de budgétisation sont incorrects, mais que gagnerons-nous à renvoyer ce texte en commission pour le réexaminer ? Rien, selon moi !

Par conséquent, le groupe Nouveau Centre votera contre cette motion.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Je ne pensais pas intervenir à propos d'une motion de renvoi en commission, ce type de débat concernant essentiellement les parlementaires, d'autant que le Gouvernement a le sentiment d'avoir donné les informations nécessaires dans le cadre de l'organisation de la commission des finances, laquelle, me semble-t-il, a fait un travail sérieux.

Au-delà du déficit de crise, du déficit structurel, peut-être du déficit d'investissement, le parti socialiste souffre d'un déficit d'information. Vous ne m'avez pas habitué à cela, monsieur Cahuzac, mais vous confondez normes de dépenses et déficits publics. Les déficits publics sont bien passés de 2,7 % à 3,4 %, et la Cour des comptes ne conteste pas ce dernier chiffre. S'agissant du dérapage de 0,7 %, il y a une explication : une partie de ce chiffre est due à la crise et il y a sans doute 0,1 % ou 0,2 % qui peuvent être axés sur du structurel.

La Cour a indiqué, et le Gouvernement a répondu sur ce sujet, que la norme de dépense était passée – pour ce que nous considérons être dans le périmètre de l'État et dans le cadre de la norme que nous avons nous-mêmes élargie il y a deux ans – de 2,8 %, ce qui est équivalent à zéro en volume, à 3,4 %. Selon la Cour des comptes, c'est parce que cette norme de dépense évoluerait de 3,4 % que la dépense de l'État progresserait au-delà du zéro en volume. Je conteste cette appréciation et, je le dis en toute amitié à la Cour des comptes, la méthode qu'elle a suivie inclut des doubles comptes, qui comptabilisent deux fois une partie de l'augmentation des charges de pensions et des charges d'intérêt de la dette. Ce sont les deux éléments dynamiques, parce qu'on intègre des comptes spéciaux et des budgets annexes au budget lui-même. La Cour a changé de méthode et modifié le calcul d'évolution de la dépense en changeant la norme sur laquelle le calcul se fonde.

Il s'agit d'un débat technique, mais qui aboutit à une vision politique des choses. Ma vision est la plus juste, car il faut comparer ce qui est comparable et ne pas changer les règles du jeu à chaque instant. Si l'on compare de budget à budget, de norme à norme ou de périmètre à périmètre, il s'agit bien d'une augmentation de 2,8 % des dépenses de l'État, ce qui équivaut au niveau d'inflation de l'an dernier.

J'ai indiqué, en commission, que nous avions prévu une augmentation moindre, mais, comme l'inflation a été plus importante, nous sommes à zéro en volume, en termes de constat, même si nous n'y sommes pas par rapport à ce qui avait été prévu.

Ne confondez pas, monsieur Cahuzac, déficit public et norme d'évolution de la dépense ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Dans la discussion générale, la parole est à M. Michel Bouvard.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de la loi de règlement du budget de 2008, en format LOLF, constitue une étape importante du calendrier budgétaire, parce que c'est la première fois qu'un même gouvernement exécute la totalité d'un budget dans ce cadre et peut donc répondre des objectifs atteints, mais aussi parce que cette loi de finances est la première à être impactée par la plus grave crise économique subie par notre pays depuis presque un siècle, même si cet impact, comme le souligne à juste titre la Cour des comptes, reste limité, s'agissant du résultat de 2008.

Je ne reviens pas sur l'excellente présentation effectuée par le rapporteur général concernant les équilibres de cette loi de règlement. Je veux simplement indiquer que le groupe UMP se félicite de la réactivité du Gouvernement pendant l'exécution de la loi de finances avec, notamment, la loi de finances rectificative, votée le 16 octobre 2008 et permettant d'assurer le sauvetage des établissements financiers et de réinjecter des liquidités dans l'économie.

Je me réjouis que la pratique des commissions élargies se soit poursuivie, permettant de faire de cette loi de règlement un véritable rendez-vous budgétaire et d'approfondir avec les ministres le contenu de l'exécution budgétaire, même si des progrès restent à accomplir.

Par ailleurs, je prends part aux remerciements adressés à votre administration et à vous-même, monsieur le ministre, par le rapporteur général, s'agissant des progrès accomplis qui ont permis d'améliorer la certification des comptes. Je veux également souligner l'apport incontestable que constitue la mise en oeuvre des dispositions s'agissant des garanties de l'État dans la loi organique sur les lois de finances. Nous nous sommes réunis pour approuver les garanties ouvertes pour la SFEF – la Société de financement de l'économie française – et pour la société des participations de l'État. On voit bien, au regard des volumes engagés, comme ceux en faveur de Dexia, combien cette disposition était opportune.

J'aborderai successivement, dans mon intervention, deux sujets : le respect de la norme de dépense au regard notamment du budget principal mais aussi des opérateurs, et celui de la dépense fiscale et de son évaluation.

S'agissant du respect de la norme, il constitue plus que jamais un enjeu décisif compte tenu de l'aggravation des déficits : 56,3 milliards en 2008 en augmentation de 47 % par rapport à 2007. La diminution des recettes rend en effet plus nécessaire que jamais un strict contrôle de la dépense de fonctionnement dans la limite de l'autorisation parlementaire. Nous vous savons attaché, monsieur le ministre, à cette impérieuse nécessité. C'est d'ailleurs ce à quoi le Président de la République nous invitait, il y a une semaine, lors du congrès de Versailles.

Malgré vos efforts, des interrogations existent au niveau de la réelle maîtrise de la norme de dépense, non que l'autorisation parlementaire ne soit pas respectée mais plutôt par rapport au montant de cette dernière qui ne prend pas en compte de nouveaux transferts en direction des opérateurs lesquels, de ce fait, continuent d'apparaître comme des auxiliaires de dépenses supplémentaires. C'est ainsi, comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport, que la mission « Écologie, développement et aménagement durable » a donné lieu à de nouvelles budgétisations pour l'écologie et les transports amplifiant un processus que j'avais, avec plusieurs collègues, notamment Charles de Courson, déjà dénoncé les années précédentes. Ainsi entre 2005 et 2009 pour quatre des principaux opérateurs de la mission, la dépense totale s'est accrue de 42 millions d'euros en raison notamment du transfert de ressources fiscales, la TGAP, par exemple.

Dans le même temps, les subventions de l'État à ces opérateurs ont diminué de 40 %, et c'est heureux, mais pour autant la masse budgétaire de la mission n'a pas reporté cette diminution en volume global : il y a donc bien, dans ce cas, contournement de la norme via les opérateurs et création de prélèvement fiscal supplémentaire.

Je dois par contre me réjouir que nos observations sur l'affectation de droits de mutation au Centre des monuments nationaux, à hauteur de 70 millions en 2007 aient trouvé un terme, la pratique a d'ailleurs démontré la perturbation qui en avait résulté dans la programmation relative aux monuments historiques comme plusieurs responsables l'ont fait valoir aux membres de la mission LOLF lors de nos auditions.

Certains opérateurs échappent au contrôleur budgétaire et comptable du ministère. Il en est ainsi pour la santé dont les opérateurs majeurs – l'AFSSAPS, l'INVS, l'AFSSA, l'ABM et l'AFSSET – ne sont tenus de fournir que leur besoin de financement.

D'une manière générale, et afin d'éviter des dérives de ce type, nous souhaitons, monsieur le ministre, pouvoir progresser encore dans le suivi des opérateurs et dans leur intégration dans la stratégie de performance des missions et programmes, intégration qualifiée d'embryonnaire par la Cour des comptes. Les opérateurs constituent une fragilité dans le respect de la norme de dépense annuelle. Ils peuvent aussi, dans certains cas, constituer une fragilité pour les comptes de l'État dans la durée au travers de la pratique de l'endettement.

De ce point de vue, je souhaite faire part de mon interrogation par rapport aux emprunts mobilisés par les agences de l'eau auprès des fonds d'épargne de la Caisse des dépôts afin de faire face au besoin d'investissement en matière d'assainissement dans le respect du calendrier européen. Si l'objectif est louable, la pratique qui consiste à s'endetter pour distribuer des subventions aux collectivités territoriales n'en est pas moins discutable. Elle l'est d'autant plus que la capacité des agences à rembourser l'emprunt est gagée sur une diminution hypothétique des besoins d'investissement à l'avenir qui permettrait de consacrer le prélèvement de la taxe dont bénéficient les agences au remboursement de l'emprunt. En clair, nous sommes dans une quasi-logique de titrisation de la recette future des agences. Compte tenu des évolutions des normes en matière d'assainissement, ce pari risque malheureusement d'être perdu.

Si l'information du Parlement sur le rôle et la place des opérateurs a progressé depuis quelques années, la question de leur pilotage, de leur capacité à s'endetter comme de leurs effectifs ou de leurs patrimoines immobiliers comporte encore des marges de progrès incontestables.

Ainsi, la Cour des comptes a renouvelé, dans la certification des comptes de l'exercice 2008, ses réserves de 2006 et 2007 en la matière. Le rapport annuel 2008 fait état de « lacunes dans leur recensement, de l'incapacité d'un nombre significatif d'entre eux de transmettre leurs états financiers dans des délais compatibles avec l'établissement de ceux de l'État, de l'insuffisante fiabilité de leurs comptes ».

Par rapport au périmètre des opérateurs recensés en 2008, je maintiens mes interrogations sur l'absence au sein de ce périmètre de l'Agence française de développement dont le rôle est non seulement à l'international, dans la mise en oeuvre de la politique de coopération et de développement en direction des pays du Sud, mais aussi dans les départements d'outre-mer, dans la mise en oeuvre de diverses politiques publiques généralistes qui justifieraient l'intégration de l'AFD à cette liste. Le fait que l'AFD se finance principalement sur les marchés ne me semble pas être une raison suffisante pour l'exclure. Je maintiens donc ma demande, confortée par le souhait exprimé par l'AFD de s'engager davantage dans certaines politiques publiques dans les DOM, à commencer par celle du logement.

J'en viens maintenant à la dépense fiscale dont l'accroissement de 50 milliards représentant 3 % du PIB en 2009, à 73 milliards d'euros représentant 3,8 % du PIB, mérite toute notre attention puisque cette dépense s'établit à 21 % des dépenses totales et à 27 % des dépenses du budget général, l'impact de la dépense fiscale sur les recettes s'établissant également à 27 %.

Monsieur le ministre, le poids comme la dynamique de cette dépense dont l'accroissement est pour plusieurs programmes supérieur à la croissance de la dépense budgétaire justifie une meilleure connaissance de celle-ci, passage obligé vers une évaluation régulière.

C'est à cette condition seulement que nous pourrons faire vivre l'excellente décision que vous avez prise de mettre en place un objectif de dépenses fiscales annuel à l'occasion du vote de la loi de programmation des finances publiques du 9 février 2009 : articles 11 et 12. Il faudra effet procéder a posteriori aux rectifications nécessaires si l'on souhaite que le plafond soit respecté au regard de la dynamique de cette dépense et du besoin de stabilité dans la durée qui doit s'attacher aux politiques fiscales.

Cela suppose clairement la suppression de certaines niches ; nous le savons, les niches sont habitées par des chiens et ceux-ci sont dangereux. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Cela suppose aussi un consensus qui ne peut venir que d'une évaluation partagée. Or, malgré les améliorations apportées par la LOLF et dans les PAP 2009 sur la connaissance de cette dépense, force est de constater que, dans les rapports annuels de performances de 2008, de nombreuses dépenses fiscales ne sont pas chiffrées, pour certaines depuis plusieurs années, malgré l'ancienneté des mesures.

Ainsi 47 dispositifs ne sont pas renseignés : 3 à la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », 3 à la mission « Culture », 8 à la mission « Écologie, développement et aménagement durable », 11 à la mission « Économie », 7 à la mission « Engagements financiers de l'État », 2 à la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », 3 à la mission « Santé », 1 à la mission « Solidarité et insertion », 5 – excusez du peu – à la petite mission « Sport, jeunesse et vie associative » et 4 à la mission « Ville et logement » selon le recensement établi par la commission des finances de l'Assemblée nationale.

Ce suivi de la dépense fiscale nécessite aussi, nous en sommes bien conscients, une amélioration des systèmes d'information car les travaux menés par la MILOLF, dont nous rendrons compte la semaine prochaine à la commission des finances, confortent nos interrogations par rapport aux délais nécessaires pour mieux appréhender cette dépense. En effet, l'Agence informatique financière de l'État a indiqué à la MILOLF que, si les dépenses fiscales étaient bien incluses dans le périmètre de CHORUS, elles faisaient partie du « reste à faire ». Peut-être pourrez-vous, monsieur le ministre nous éclairer sur ce fait et sur le délai dans lequel le « reste à faire » a vocation a être traité ?

Enfin, je veux évoquer les organismes consultatifs auprès des ministres et du Premier ministre en commençant par souligner combien je me réjouis du travail d'assainissement que vous avez engagé pour réduire le nombre de ces organismes, non que la dépense qu'ils engagent soit considérable mais cela relève du symbole et d'une nécessaire rationalisation du fonctionnement de l'État.

Les annexes au projet de loi de finances, les jaunes, montrent qu'en 2007, il y avait 710 instances dont seulement 147, soit 20 %, avaient pris la peine de renseigner complètement le législateur, comme nous l'avions souhaité en adoptant un amendement dans une précédente loi de finances. Sur ces 710 organismes, 346, soit quasiment la moitié, avaient fourni des renseignements sur tous les critères sauf un. C'était déjà un progrès. Pour la loi de finances pour 2008, nous ne comptions plus que 679 instances, avec une légère amélioration sur le renseignement : 30 %. Mais, en 2009, le nombre de ces instances s'est accru à nouveau : nous sommes repassés à 701, et 188 d'entre elles seulement ont pris la peine de renseigner complètement le législateur.

C'est la raison pour laquelle j'ai déposé deux amendements. Le premier, qui est une sorte d'injonction pour le Gouvernement, n'aura pas forcément votre assentiment, monsieur le ministre. Le second prévoit, puisque nous avons décidé qu'il y aura un jaune budgétaire en la matière, que les informations concernant ces instances, dont beaucoup pourraient sans doute être supprimées, soient au minimum apportées à la représentation nationale. Nous pourrons ainsi connaître leur coût de fonctionnement et nous interroger sur leur utilité réelle.

Voilà les quelques observations que je souhaitais formuler sur cette loi de règlement.

Monsieur le ministre, le groupe UMP vous apporte tout son soutien dans la difficile mission qui vous est confiée Nous approuvons la distinction que vous avez souhaité introduire entre les dépenses pérennes, qu'il nous faut savoir réduire, et les dépenses exceptionnelles liées à la crise, essentiellement celles d'investissement, qui ont vocation à être réversibles afin de nous permettre de revenir à l'équilibre dans les meilleurs délais. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Pierre-Alain Muet ne pouvant être présent, je m'exprimerai à sa place. Je poursuivrai ainsi le débat que nous avons eu, monsieur le ministre, au sujet de ces fameux 3,4 %.

D'abord, je vous donne acte du fait que la norme de dépense, si l'on ne tient pas compte des 953 millions des primes d'épargne logement et des 753 millions provenant de la taxe sur les véhicules de société transférés aux organismes de sécurité sociale, est respectée. Néanmoins si l'on en tient compte – et la Cour des comptes estime qu'il eût fallu le faire –, la norme de dépense n'est plus alors de zéro en volume à 2,8 %, mais bien de 3,4 %.

Vous m'avez répondu tout à l'heure sur ce point alors que je vous interrogeais en réalité sur le déficit budgétaire, la confusion venant probablement de l'identité des deux chiffres, qui, naturellement, ne recouvrent pas la même réalité. Si l'on intègre – et je répète que la Cour des comptes déplore que cela n'ait pas été fait – les deux dépenses qui, en fait, ont été acquittées par des moyens extra-budgétaires, le Gouvernement, sous votre autorité puisque vous êtes en charge des comptes publics, n'a pas respecté la norme zéro en volume, l'évolution de la dépense étant de 3,4 % et non pas de 2,8.

Permettez-moi d'insister sur le déficit budgétaire.

À ce propos je cite ici le premier président de la Cour des comptes : « Comme les années précédentes, le résultat affiché dans le projet de loi de règlement ne prend pas certaines dépenses et dettes pourtant exigibles en compte. C'est le cas de 5,9, milliards d'euros qui auraient dû juridiquement être payés en 2008 mais qui ne l'ont pas été, dont 3,6 de dettes à l'égard de la sécurité sociale et 1,95 au titre des programmes d'armement, et aussi de 953 millions de dépenses de primes d'épargne logement payées en dehors du budget de l'État au moyen d'avances rémunérées consenties par le Crédit foncier. Le montant total de ces sommes atteint 7 milliards d'euros ».

Monsieur le ministre, si vous additionnez ces 7 milliards d'euros au solde budgétaire que vous présentez officiellement, ce dernier s'aggrave et le déficit budgétaire structurel, tel que présenté par la Cour des comptes, devient celui que je vous ai indiqué. Comme je l'ai fait observer tout à l'heure, cela méritait au moins une discussion en commission.

Je ne peux rien au fait que, dans les deux cas, nous sommes à 3,4 %, même s'il s'agit d'un côté de la norme réelle d'évolution des dépenses, qui se sont accrues en volume malgré la règle, et de l'autre, du déficit budgétaire structurel, qui n'excède pas 0,1 % en Allemagne.

Je vous ai enfin déjà interrogé à deux reprises, monsieur le ministre, sur l'éventuelle recette supplémentaire que constituerait la fiscalisation des indemnités journalières des accidents du travail. C'est une proposition du président du groupe majoritaire et, plutôt que d'attendre que le Gouvernement s'exprime dans la presse ou à la télévision, l'Assemblée me paraît le lieu propice pour que vous nous donniez votre réponse, l'assiduité sur ces bancs témoignant de l'intérêt manifeste que cette proposition soulève. (Sourires.)

Vous ne m'avez pas habitué à vous dérober aux questions, aussi me permettrais-je de vous interroger également sur ce que vous pensez de la proposition de M. Copé d'augmenter les cotisations chômage des fonctionnaires, ce qui revient à diminuer de fait leur rémunération mensuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Cette loi de règlement – beaucoup l'ont regretté dans leurs interventions – n'intéresse malheureusement pas grand monde. C'est bien triste, car on juge vraiment une politique non pas à la loi de finances mais à la loi de règlement. On a déjà vu en effet des gouvernements proposer des lois de finances totalement irréalistes, mais la loi de règlement, elle, ne ment pas.

Je veux en premier lieu faire remarquer que la lecture des comptes de l'État nous enseigne trois choses essentielles.

La première, c'est que l'État s'endette de plus en plus, pour faire payer aux générations futures ses dépenses de fonctionnement. Je le répète en vain, mais comme il est dit dans la Bible : « Je suis la voix qui crie dans le désert ».

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le groupe Nouveau Centre se bat pour constitutionnaliser, comme l'ont fait les Allemands, la règle d'or à laquelle sont soumises depuis des années, non sans succès, les collectivités territoriales et selon laquelle on n'a pas le droit aux déficits de fonctionnement. Cette règle d'or, selon laquelle les recettes doivent équilibrer les dépenses de fonctionnement, est constamment violée, ce qui signifie que l'on transfère de plus en plus sur les générations futures le coût des services publics.

Quels sont les chiffres pour 2008 ?

D'après l'article 3 du projet de loi de règlement, les charges de fonctionnement s'élèvent à 348 milliards d'euros et les recettes de fonctionnement à 275 milliards, soit un déficit de 73 milliards d'euros. En d'autres termes, pour respecter la règle d'or, il faudrait majorer de 25,5 % l'ensemble des recettes fiscales, c'est-à-dire, pour prendre un exemple concret, porter de 19,6 à 24,5 % le taux normal de TVA, porter de 33 à 41 % le taux de l'IS et de 40 à 50 % le taux de la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu.

Si on élimine les dotations aux provisions et amortissements, le déficit de fonctionnement s'élève encore à 37,5 milliards, d'euros, ce qui exigerait une hausse de 13,6 % de l'ensemble des recettes fiscales pour respecter la règle d'or. Il faudrait donc augmenter de 13,6 % l'ensemble des recettes fiscales, c'est-à-dire faire passer de 19,6 à 22,3 % le taux normal de la TVA, de 33 à 37,5 % celui du taux de l'IS et de 40 à 45,5 % le taux de la tranche supérieure de l'IR. Il est donc clair que non seulement nous ne respectons pas la règle d'or mais que nous nous en éloignons.

Deuxième leçon : comme l'a évoqué le rapporteur général, l'État n'investit pratiquement plus.

D'après les comptes de l'État, l'actif immobilisé a progressé de 58,5 milliards d'euros en 2008 ; il est passé de 435,9 milliards fin 2007 à 494, 4 milliards fin 2008. Cependant, si l'on retire de cette augmentation le montant de l'intégration du spectre hertzien – 4,1 milliards –, les quotas CO2 – 8,2 milliards –, la réévaluation du réseau routier national – 10,2 milliards –, l'élargissement du périmètre des matériels militaires – 9,7 milliards –, et j'en passe, les investissements directs de l'État se limitent à 13,8 milliards d'euros contre 16,7 milliards en 2007. Si l'on tient compte de la valeur comptable des actifs cédés – 1,7 milliard en 2008 et 4,8 milliards en 2007 –, on constate l'extrême faiblesse des investissements nets, qui s'élèvent à 12 milliards à peine, lesquels doivent être rapportés aux 348 milliards de dépenses de fonctionnement.

Notre rapporteur général a, pour sa part, avancé des chiffres que je conteste car ils incluent un certain nombre de subventions d'investissement, comme le FCTVA. Quoi qu'il en soit, nous sommes en deçà des 20 milliards, entre 12 et 19 milliards.

Troisième leçon : à l'aune du droit des sociétés, l'État est en faillite.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Voici des chiffres : l'actif net de l'État ne cesse de se détériorer. Fin 2008, avec une dette de 1 325 milliards d'euros et 639 milliards d'actifs, nous avons un actif net négatif de 686 milliards, soit une dégradation de 30 milliards par rapport à 2007. Quant aux dettes financières, elles se sont accrues de près de 100 milliards, puisque, alors qu'elles étaient de 946 milliards d'euros fin 2007, elles ont atteint 1 044 milliards d'euros fin 2008.

La dette de l'État correspond pour 83 % à un déficit de fonctionnement cumulé, puisque l'ensemble des déficits atteint 870 milliards. Et si l'État était une société commerciale, la Cour des comptes aurait saisi depuis des années le tribunal de commerce. Telle est la situation.

Je vais à présent dire quelques mots des dépenses.

Vous connaissez ma franchise, monsieur le ministre : votre politique budgétaire ne va pas assez loin dans la réduction des dépenses de fonctionnement. Notre groupe ne se borne pas à des incantations sur le sujet ; nous vous avons proposé plusieurs sources d'économies, dont vous avez bien voulu retenir certaines ; nous continuerons cette année.

Selon une norme élargie – et vous avez ici tenu compte de nos demandes d'élargissement de la norme –, on constate que la croissance de la dépense est deux voire trois fois trop rapide. Dans la loi de finances initiale, le Gouvernement s'était fixé pour règle de ne pas dépasser l'inflation, estimée alors à 1,6 %. Or nous en sommes à 2,8 % ! Peut-on dire alors que l'inflation a autorisé le Gouvernement à dépasser de 1,2 % les limites qu'il s'était fixées ? Non, mes chers collègues, le Gouvernement a tenu la dépense hors charge de la dette, laquelle explique le dérapage, avec 3,3 milliards d'euros supplémentaires.

Je vous rappelle les chiffres : de 333,6 milliards en 2007, nous sommes passés à 344,9 milliards en 2008. Je précise que l'on retire les fonds de concours, qui représentent une variation négligeable de quelques centaines de millions d'euros.

Quant à la norme, monsieur le ministre, il conviendrait de l'élargir à quatre éléments supplémentaires, d'abord aux remboursements et dégrèvements sur impôts locaux, qui sont passés de 13 milliards en 2007 à 15,7 milliards en 2008, soit une augmentation de 20 %. Ils sont actuellement hors norme, mais, puisque la comptabilité distingue désormais entre les remboursements et dégrèvements de État et ceux des collectivité locales, il faudrait les intégrer à la norme.

La même remarque vaut pour les collectivités locales. Il faut cesser cette dérive qui consiste à faire semblant de ne pas dépenser en dépensant en réalité via des allégements, des crédits d'impôt et des imputations sur des crédits existants. Les remboursements des dégrèvements sur impôts d'État sont passés de 11,6 milliards en 2007 à 13,3 milliards en 2008, soit une augmentation de 14 %.

En troisième lieu, d'après les chiffres de la Cour des comptes, les recettes fiscales affectées à des organismes tiers sont passés de 49,6 milliards en 2007 à 51,5 milliards en 2008, soit une hausse de 4 % bien supérieure à la norme initiale de 1,6 % et même à la norme révisée de 2,8 %.

Enfin, d'après l'estimation faite par la Cour des comptes, les dépenses fiscales passeraient de 67,7 milliards en 2007 à 73 milliards en 2008, soit une augmentation de 7,1 %.

Si, comme le demande le groupe Nouveau Centre, nous avions une norme élargie totale, c'est-à-dire la norme retenue par le Gouvernement majorée des remboursements et dégrèvements d'impôts de l'État et des collectivités locales, des dépenses fiscales et des taxes affectées à des organismes tiers, nous passerions de 479,3 milliards d'euros en 2007 à 501,6 milliards en 2008, soit 22,3 milliards de hausse qui correspondent à 5,1 %.

Mes chers collègues, je vous le dis donc tout net au nom de mon groupe : nous ne pouvons plus continuer comme cela. Si nous devons tenir la norme pour le budget 2010, avec une inflation qui tournera sans doute autour de 1 %, il faudra la tenir dans ce périmètre total, sans quoi ce n'est que l'illusion de la rigueur que nous offrirons à nos concitoyens.

J'encourage donc le Gouvernement à poursuivre sa politique d'élargissement de la norme. C'est ce qui s'est fait dans la LOLF avec les opérateurs, dont on a intégré les effectifs, ce que vous avez accepté, monsieur le ministre, par souci de cohérence.

Je traiterai enfin rapidement des recettes.

Que l'incidence de la crise sur le budget et les recettes soit de 4 milliards comme le prétend la Cour des comptes, de 6 milliards comme l'évalue notre rapporteur général ou aux alentours de 8 ou 9 milliards comme l'estime le Gouvernement, cela ne change rien au problème de fond : on ne peut continuer à pratiquer des réductions d'impôts et des allégements fiscaux, sauf à réduire les dépenses à due concurrence, comme le défendait le Nouveau Centre dès juillet 2007, lors du vote de loi TEPA. Celle-ci a coûté 6,5 milliards d'euros selon la Cour des comptes, et nous estimons donc qu'il faut réduire d'autant les dépenses. Nous vous avons fait en ce sens des propositions, notamment sur les niches fiscales et sociales.

Nous ne sommes qu'au début du commencement d'une politique vigoureuse ; j'emploie ce mot car le terme « rigoureuse » est, paraît-il, proscrit, mais il ne nous gênait pas du tout. Il faut marquer une pause dans les allégements de charges ou bien les compenser par des économies supplémentaires sur la dépense. C'est la première règle d'or : on doit revenir progressivement à l'équilibre des dépenses et des recettes de fonctionnement.

Monsieur le ministre, le groupe Nouveau Centre va vous adresser plusieurs propositions concernant les niches sociales et les niches fiscales. Rares en effet sont ceux qui proposent de vous aider à cet égard dans cet hémicycle, y compris au sein de votre majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Nous voterons cette loi de règlement car vous faites de louables efforts, et, comme tous les ministres du budget, vous n'avez pas toujours la partie facile. Toutefois nous continuerons à vous encourager à mener une politique plus vigoureuse encore !

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Il est difficile de prendre la parole à ce moment de la discussion : je partage à peu près tous les propos tenus par mes collègues, qu'ils appartiennent d'ailleurs à la majorité ou à l'opposition. Nous voyons, je crois, la situation de façon similaire, même si nous n'arrivons pas nécessairement aux mêmes conclusions. De toute façon nous ne sommes pas obligés de dire l'inverse les uns des autres parce que nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs !

Je vais donc avancer deux ou trois idées qui ont déjà été mentionnées – c'est la règle du genre – en ajoutant toutefois quelques éléments personnels.

Je tiens d'abord, comme d'autres avant moi, à vous féliciter, monsieur le ministre : dans le domaine de la sincérité des comptes, le progrès est, je crois, réel. Cela a été rappelé, notamment par M. le président de la commission des finances.

Le nombre de réserves émises par la Cour des comptes a été grosso modo divisé par deux ; c'est un bon indicateur. Les rapports annuels de performance permettent aujourd'hui de disposer d'indicateurs nombreux pour établir des comparaisons : 80 % peuvent être exploités, contre 50 % en 2006.

Je salue aussi votre action sur un point qui me tient beaucoup à coeur, et que Michel Bouvard a également traité : je pense à l'effort que vous consentez pour reprendre le contrôle de l'ensemble des opérateurs. Cela a été souligné par plusieurs d'entre nous : il est tout de même extravagant que le ministre ait dû menacer les opérateurs de sanctions pour disposer ne serait-ce que d'une évaluation de leurs propriétés immobilières ! Nous sommes dans un système bien particulier, puisque le ministère des finances ne peut pas savoir sans menacer de sanctions qui possède quoi et qui fait quoi.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Je vais plus loin encore que mes collègues, et que Charles de Courson en particulier : si on regarde ce qui s'est passé dans les effectifs de la fonction publique ces dix dernières années, on constate que l'opération qui a consisté à ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite dans les administrations centrales a en réalité été compensée par des augmentations d'effectifs chez les opérateurs.

Pour certains ministères, comme celui de la culture, il y a eu plus d'embauches chez les opérateurs qu'il n'y a eu de diminution en administration centrale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Sinon, Frédéric ne serait jamais venu ! (Sourires)

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Reconnaissons que cela rend difficile de disposer d'une évaluation simple et claire. Je tenais à le souligner.

Je ne m'étendrai guère sur le point suivant, qui a déjà été développé par mes collègues : la question de savoir si le déficit structurel se situe à 3,5 % ou au-delà, et quelles mesures il faut prendre pour le réduire. Une chose me paraît sûre : personne ne peut nier que la crise a un impact sur les recettes fiscales ; personne ne peut nier l'impact de la crise sur l'inflation, donc notamment sur la charge de la dette. La crise est bien présente.

Reste qu'il y a un déficit structurel, dont il faut s'inquiéter. Il peut s'expliquer, pour 2008, par le respect de priorités fixées en loi de finances initiale : je pense notamment au milliard d'euros consacré à l'enseignement et à la recherche. Mais c'est bien là le vrai problème.

Je me permets de vous faire part de deux inquiétudes.

Je relève pour commencer que les comptes pour 2008 font apparaître une diminution des dépenses de personnel du titre II, alors même que le déficit augmente de façon considérable. Il y a plusieurs leçons à en tirer.

D'abord, il faut relativiser – ce que j'ai toujours fait à cette tribune, tant en termes politiques qu'en termes de comptes – la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Alors que, dans le budget de 2007, 43,8 % des dépenses étaient des dépenses de personnel, en 2008, ce chiffre a été de 43 %. On comprend donc que la charge augmente de façon linéaire, ce qui est parfaitement explicable : elle est liée aux retraites. Cela laisse à pense qu'il nous faudra nous en soucier dans les années prochaines, car il est évident que le montant de ces pensions et cotisations sociales, qui sont de 45 milliards d'euros dans le budget 2008, n'ira qu'en croissant. Ce sera une contrainte lourde et forte.

Il me paraît d'autre part indispensable de souligner que nous sommes encore tout à fait insuffisants dans le domaine de l'évaluation. Cela est vrai dans tous les domaines, mais tout particulièrement pour les dépenses fiscales.

Je fais partie de ceux qui considèrent qu'il y a aujourd'hui des décisions à prendre sur les grandes masses. Au-delà du milliard de mon ami Jean-François Copé (Sourires), où devons-nous faire porter nos efforts ?

La Cour et les orateurs qui m'ont précédé l'ont souligné : les dépenses fiscales ont atteint 70 milliards d'euros, en augmentation de 7 % sur un an ; elles ont ainsi représenté 21 % des dépenses du budget général, et, ce qui me semble plus parlant encore, six fois plus que la totalité du budget d'investissement.

Avec ces chiffres en tête, on comprend que nous ne pourrons pas faire l'économie d'une évaluation des niches fiscales ; de toutes les niches, sans aucune exclusive. Je prends ainsi l'exemple de la prime pour l'emploi, dont plusieurs rapports ont souligné qu'il faut aujourd'hui la corriger, car les 4,5 milliards qui lui sont consacrés ne sont sans doute pas bien ciblés. Je cite aussi l'exemple du crédit d'impôt visant à améliorer la performance énergétique des logements : cette niche donne sans doute lieu à des avantages indirects, perçus par les entreprises, qui en profitent pour augmenter leurs prix.

Pour synthétiser tout cela, je dis donc bravo pour la sincérité, monsieur le ministre, mais quelques éléments d'inquiétude demeurent, notamment en ce qui concerne l'évolution des dépenses de personnel. Ce sera là, j'en suis convaincu, un sujet constant de préoccupation. Même en diminuant les effectifs, nous ne pourrons pas voir autre chose qu'une augmentation de cette ligne budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Victorin Lurel, dernier orateur inscrit dans la discussion générale.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Nous sommes bien peu nombreux ! Il est curieux de prononcer un discours devant un hémicycle vide surtout s'agissant d'une question budgétaire, mission première et originelle de tout Parlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

L'année 2008 s'est achevée sur un déficit de l'État de 56,3 milliards d'euros, en augmentation de près de 47 % par rapport à 2007. Comme le faisait remarquer le premier président Séguin en commission, cette somme, qui équivaut à un quart des recettes annuelles de l'État, n'est due que pour une très faible part à la crise mondiale.

C'est ce point qui nous inquiète car cela montre que la dégradation du résultat est bien structurelle. En fait, elle est due à deux tendances lourdes : une diminution des recettes, qui n'est imputable que très partiellement à la crise, et un défaut de maîtrise des dépenses qui – pour citer la Cour des comptes – « ne doit rien aux mesures du plan de relance ».

Il n'y a donc pas de déficit conjoncturel lié à la crise et encore moins de bon déficit. Bien au contraire, la baisse des recettes fiscales est due, selon la Cour, en bonne partie à la loi TEPA dont les seules dispositions fiscales ont coûté 3,2 milliards d'euros et les dispositions d'exonérations de charge 4,3 milliards d'euros. À ce boulet fiscal, que nous dénonçons depuis le début de la mandature, est venue s'ajouter la crise qui ne serait, selon les estimations de la Cour, responsable que de moins de 4 milliards d'euros dans la diminution des recettes. Or le Gouvernement va ajouter à ce boulet fiscal deux autres mesures lourdes qui vont encore faire diminuer ces recettes : la baisse de la TVA dans la restauration et la réforme de la taxe professionnelle soit, selon notre rapporteur général, 10 milliards d'euros d'abandon de recettes pour l'État.

Dans le même temps, les dépenses n'ont pas été contrôlées : elles ont augmenté de 2,8 milliards en valeur par rapport aux prévisions en raison, principalement, d'une inflation plus importante que prévue. Enfin, la Cour souligne à juste titre que la norme d'évolution des dépenses ne concerne pas la dépense fiscale qui, elle, a augmenté de 7 %. Le plafonnement de la dépense fiscale a animé le débat en commission et j'aurai l'occasion d'y revenir.

Là encore, la Cour des comptes souligne que la crise et la réponse qui y a été apportée par le plan de relance ne sont en rien responsables de cette augmentation des dépenses puisque cela ne pèsera que sur l'exercice 2009.

Enfin, deux critiques récurrentes sont mises en exergue par la Cour des comptes : d'une part, le résultat affiché dans la loi de règlement ne prend pas en compte certaines dépenses et dettes pourtant exigibles, dont une dette de 3,6 milliards d'euros à l'égard de la sécurité sociale ; d'autre part, certains « errements » – suivant le mot de la Cour – frisent l'insincérité budgétaire : c'est le cas notamment de la sous-budgétisation tout à fait consciente des dotations en loi de finances initiale, qui obligent à des ouvertures conséquentes en loi de finances rectificative.

Le cas de l'exécution budgétaire en 2008 de la mission « Outre-mer » sur laquelle je me suis penché, me semble offrir une très bonne illustration de ces observations : dette cachée et sous-dotation chronique.

Tout d'abord, le principal défaut de la mission « Outre-mer », persistant depuis plusieurs exercices, est celui des impayés, pour un montant global identifié de 536 millions d'euros au 31 décembre 2008, c'est-à-dire plus du quart de l'ensemble des crédits ouverts pour la mission. Il s'agit pour l'essentiel de dettes exigibles à l'égard des organismes sociaux, au titre du remboursement des exonérations de charges sociales outre-mer.

Ces impayés sont essentiellement dus à des sous-dotations dans les lois de finances initiales successives et ils mettent en lumière, pour citer la Cour, de « graves anomalies au regard des règles budgétaires en vigueur » : obligations de l'État vis-à-vis de tiers non couvertes à due concurrence par la consommation d'autorisations d'engagement ; insuffisance de crédits de paiement au regard des autorisations d'engagement consommées ; report de charges d'un exercice sur le suivant ; annulation, en cours d'exercice, de crédits qui n'étaient pas devenus sans objet, ce qui a encore aggravé les impayés.

Pour l'essentiel, cette situation résulte de ce que les crédits demandés par le ministère de l'outre-mer pour mettre l'État en situation de s'acquitter de ses obligations n'ont pas été ouverts à un niveau suffisant lors de la préparation du budget. Ainsi, suivant le jugement sévère de la Cour, « la sincérité de la prévision budgétaire est singulièrement brouillée par des pratiques récurrentes de sous-budgétisations massives [...] organisées en toute connaissance de cause ».

Au sein de la mission « Outre-mer », quatre dotations sont régulièrement insuffisantes.

Les sous-dotations au titre de l'exonération des charges sociales sont les plus manifestes. L'État compense « à guichet ouvert » – et d'ailleurs strictement sans aucun contrôle sur l'exactitude des sommes facturées par les organismes sociaux – mais à ces dépenses à caractère obligatoire ne sont pas affectés des crédits suffisants. Ainsi, à la fin de l'année 2008, l'État restait redevable de 486 millions d'euros aux organismes sociaux, dont 451 millions au titre des exercices postérieurs à 2004. Face à cette situation, la dotation correspondante en loi de finances pour 2009 a été sérieusement réévaluée – 155 millions d'euros supplémentaires – mais, surtout, c'est l'ensemble du système d'exonérations de charges outre-mer qui a été revu, en loi de finances puis dans la loi pour le développement économique des outre-mer, pour une économie en année pleine de 138 millions d'euros. Curieuse gestion qui consiste, pour pouvoir apurer les dettes, à rogner sur un outil somme toute efficace outre-mer.

Au titre du logement social outre-mer, les dettes s'accumulent aussi en raison d'une insuffisance de crédits de paiement ouverts annuellement au regard des autorisations d'engagement consommées.

Dans le cadre de la politique contractuelle avec les collectivités locales, la dette de l'État envers celles-ci, dont vous connaissez pourtant la grande fragilité financière, est de 63 millions d'euros, dont 35 millions sont exigibles, c'est-à-dire qu'ils correspondent à des travaux réalisés dont les services déconcentrés peuvent attester le service rendu. Là encore, la Cour constate l'insuffisance des crédits de paiement délégués aux préfectures et hauts-commissariats.

Enfin, au titre de la dotation globale de développement économique pour la Polynésie française – la « dette nucléaire » – la sous-dotation en autorisations d'engagement est de 15,77 millions, et de 5,3 millions en crédits de paiement. J'ajoute que, depuis la chute de Gaston Flosse, cette dotation n'est plus considérée comme une dotation non conditionnée, ce dont on peut se féliciter, même si l'on peut s'interroger sur la coïncidence entre ce changement de doctrine fiscale et ce changement politique à la tête du territoire.

J'ajoute que la régulation budgétaire a constitué un facteur aggravant puisque les annulations ont été non seulement peu opportunes, pour reprendre les termes de la Cour, mais également irrégulières puisque portant non sur des crédits sans objet mais, au contraire, sur des crédits destinés à payer des dépenses obligatoires, ce qui n'a fait qu'aggraver la difficulté budgétaire due au défaut de sincérité des dotations initiales. Ainsi, près de 20 % des impayés au titre du programme 123 – conditions de vie outre-mer, dont les CPER – sont dus à des annulations.

En outre, je constate que la régulation se fait carrément brutale dans ce projet de loi de règlement puisque ce sont 118 millions d'euros d'engagements qui sont annulés sur le programme 123 par l'article 4. Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner quelques explications ? J'ai eu droit à une réponse de la part de quatre collègues de la commission des finances, mais elle n'était pas très convaincante : s'agit-il, comme je le crains, d'un ajustement entre les AE et les CP sur le programme 138, pour réduire ce que l'ancien ministre de l'outre-mer, M. Jego, nommait « dette virtuelle » ? Il avait inventé une véritable catégorie budgétaire ?

Enfin, je ne peux pas évoquer la mission outre-mer sans rappeler le paradoxe de ce que j'appelle « la politique de la dette » du ministère de l'outre-mer.

Je le répète, les dettes non payées correspondent à un quart des crédits de cette mission tandis que les deux tiers des crédits de cette mission sont intégralement consacrés à la compensation aux organismes sociaux et ne sont pas des crédits d'intervention. De plus, le montant des dépenses fiscales, près de 3 milliards d'euros, dépasse les dépenses budgétaires de la mission elle-même – un peu moins de 2 milliards d'euros – ce qui nous amène au débat sur la transformation en dépenses fiscales de ce qui pourrait ou devrait, à notre sens, être une dépense budgétaire et à son implication en ce qui concerne l'effort de maîtrise des dépenses.

L'exemple de la défiscalisation des investissements productifs permet d'illustrer mon propos. Ce dont a besoin l'outre-mer, c'est d'investissements. Nous préférerions naturellement qu'il soit public et qu'il résulte donc d'une dépense budgétaire. L'État étant impécunieux, les banques frileuses et les collectivités locales étranglées, il ne nous reste que l'argent des riches, donc la défiscalisation. Il n'est ainsi pas anodin que la Cour l'analyse comme une « subvention publique à l'investissement ». Or, et nous retrouvons là la discussion sur le plafonnement des dépenses fiscales, « l'intégration de ces dépenses dans une norme globale de progression des dépenses de l'État est juridiquement difficile compte tenu de l'automaticité de la dépense fiscale dès lors que les conditions d'octroi sont réunies : fixer une norme indépassable à leur progression au cours d'un exercice soulèverait de sérieuses difficultés au regard de la stabilité de la loi fiscale et de l'égalité des contribuables devant l'impôt ».

Pourtant, nous savons qu'une enveloppe est fixée en loi de finances initiale, à savoir 800 millions d'euros pour 2009, en ce qui concerne la défiscalisation des investissements productifs. C'est donc dans une certaine opacité que des critères d'octroi des agréments sont appliqués par Bercy. Le raisonnement est en pratique très simple : soit une opération pour laquelle un agrément est demandé apparaît économiquement viable, et Bercy aura quelque réticence à la « subventionner » ; soit l'opération apparaît risquée économiquement, et Bercy, là encore, aura du mal à aider à sa réalisation. C'est la quadrature du cercle.

Il y a donc dans ce domaine, vital pour les outre-mer puisque le problème du financement des investissements y est essentiel, une véritable difficulté. Là encore, comme pour le système d'exonération de charges, la solution qui consiste à rogner l'outil, comme nous l'avons fait lors de la dernière loi de finances eu égard à cette difficulté, ne nous semble pas pertinente au regard de l'objectif que nous devrions partager, à savoir le développement des outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner quelques éléments d'appréciation sur le nouveau dispositif six mois après son introduction ?

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Quelques mots seulement car je me suis déjà exprimé sur plusieurs des sujets abordés.

Gilles Carrez a évoqué la norme de dépense. Nous pourrions considérer en effet qu'il y a une augmentation de 0,5 % en volume, mais en réalité, nous ne connaissons pas l'exécution lorsque la LFI est votée. Nous essayons de rester dans le même système de comparaison, sinon nous avons un peu de mal à nous y retrouver.

En ce qui concerne l'impact de la crise, j'observe que nous n'avons pas tout à fait le même chiffrage. C'est pourtant un élément important car il s'agit de savoir si on creuse la dépense courante – en ce cas on ne tient pas les choses – ou si, au contraire, on tient la dépense courante à peu près correctement, étant entendu que la crise fera varier le reste de façon puissante. Nous échangerons nos méthodes et nous verrons s'il y a matière à discussion. Les chiffres oscillent entre 6 % et 8,5 % mais je remarque que Gilles Carrez est au-dessus des 4 % de la Cour des comptes.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

C'est déjà pour nous un élément de satisfaction.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

C'est un souci d'équilibre ; il tranche entre les deux. C'est là toute la finesse de son analyse politique.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

Le rapporteur général est plus fiable que la Cour des comptes.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Un point très important, qui est au coeur du rapport et de l'intervention du rapporteur général, a également été souligné par d'autres parlementaires, notamment Michel Bouvard et Charles-Amédée de Courson : la nécessité de sécuriser les recettes.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Je suis évidemment bien d'accord avec cette observation.

Nous avons fait évoluer la fiscalité sur un certain nombre de points, mais je ne veux pas revenir sur les deux dernières années. Un certain nombre d'ajustements étaient nécessaires. Maintenant, nous devons plutôt consacrer du temps à sécuriser les recettes et à y regarder encore de plus près, parce que c'est un sujet qui a déjà été évoqué à de nombreuses reprises et qui préoccupe les parlementaires ; je veux parler de tout ce qui relève des niches fiscales.

Nous devons essayer de respecter la règle qu'a fixée le Président de la République et qui est passée un peu inaperçue dans la multitude de commentaires autour de l'emprunt. Ce dernier a en effet indiqué que chaque euro encaissé supplémentaire dû à la reprise irait au remboursement de la dette de crise, si l'on en revient à la différence qui est faite entre les différents déficits. Nous intégrons cette idée avec beaucoup de force, au même titre que nous devrons augmenter les dépenses d'investissements. À cet égard des logiques s'enchaînent et se comprennent de façon, me semble-t-il, simultanée.

Didier Migaud, vous avez fait un certain nombre de propositions sur l'amélioration des conditions d'examen du projet de loi de règlement, sur la méthodologie de la mesure de l'évolution des dépenses. Comme toujours, il n'y a de notre part aucune volonté de cacher quoi que ce soit. Je ne crois pas qu'on sorte de l'ambiguïté toujours à son propre détriment, en tout cas ce n'est pas ce que j'essaie de faire. Je pense que, au contraire, il faut essayer de lever les ambiguïtés et aborder les sujets tels qu'ils sont, avec nos différences. S'il y a des ambiguïtés en ce qui concerne la méthodologie de l'évolution des dépenses, allons jusqu'au bout de la méthodologie. D'ailleurs, je souhaite qu'on y aille avec la Cour des comptes, pour éviter ce type de débat.

La RGPP n'est pas abandonnée, vous l'avez reconnu, monsieur Migaud, comme d'autres – en tout cas c'est ce que j'ai compris – ni même confinée. La RGPP a eu un rôle assez majeur, notamment pour pouvoir expliquer comment nous pouvions réduire les effectifs de la fonction publique sur du moyen terme de façon forte sans nuire à la qualité des services publics par une réorganisation, ou une organisation différente, et une vision différente de l'organisation administrative. Il ne s'agissait pas simplement de le dire dans un discours ; il fallait le prouver, administration par administration, direction par direction, mission de la LOLF par mission de la LOLF. C'est ce qui a été fait de façon très rigoureuse.

Maintenant, nous devons aller plus loin. La RGPP n'a pas suffisamment produit d'effets et nous devons mieux utiliser son contenu, qui est d'une richesse assez exceptionnelle, en l'éclairant avec le cadre général politique qu'a fixé le Président de la République à son Gouvernement et à la majorité présidentielle. C'est ce que nous allons faire.

Vous avez également évoqué, monsieur Migaud, comme Charles-Amédée de Courson et Michel Bouvard, les dépenses fiscales. Nous sommes en train de procéder à une analyse socio-économico-financière des niches fiscales. Nous avions pris l'engagement de transmettre cette analyse au Parlement à partir de 2011, étant donné l'ampleur du travail. Évidemment, nous allons essayer d'aller plus vite. Une partie de l'étude sera disponible pour le PLF et je compte bien continuer à exploiter ce travail.

Ce sujet est une source d'ambiguïté entre nous. Pour ma part, je ne suis pas favorable au développement des niches fiscales que nous avons connu ces dernières années. Je suis favorable à une maîtrise des niches fiscales.

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Et à une réduction du nombre de niches.

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D'ailleurs, entre les entrants et les sortants, l'équilibre est encore de mise. Nous devons aller plus loin dans ce domaine et donner vie aux règles que nous avons fixées, notamment dans la loi triannuelle. Nous le ferons à l'occasion du débat d'orientation budgétaire et surtout du PLF. En tout cas, le ministère du budget poussera plus loin la démarche dans le domaine des niches fiscales et des niches sociales.

S'agissant des opérateurs, dont a parlé Michel Bouvard, nous sommes allés plus loin. Un progrès a été effectué en 2008 grâce à l'inclusion, dans la norme de dépense, des affectations de recettes qui se substituaient en réalité à des dépenses budgétaires.

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Cela est très important. Par exemple, le fait qu'une partie du produit de La Française des jeux a dû aller au Centre national pour le développement du sport est bien inclus dans la norme de dépense. En 2007, ce n'était pas le cas pour le Centre national des monuments historiques auquel vous avez fait référence.

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Nous l'avons fait à partir de 2008 et nous le maintiendrons. Ce principe me semble, lui aussi, vertueux.

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Sur la dépense fiscale, je l'ai indiqué, j'irai, je l'espère en tout cas, plus loin. Nous travaillons sur la méthodologie car plusieurs méthodes sont envisageables.

Vous parliez, monsieur Bouvard, des chiens et des niches, image classique, même si l'on est un ami des bêtes ou des animaux.

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Oui, parce que la réalité est là. Nous avons tous vécu ces débats où l'on examinait niche par niche.

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Nous savons bien ce qu'il advient parce que, derrière tout cela, il y a évidemment beaucoup d'intérêts, souvent légitimes d'ailleurs. Il faut donc probablement aborder les choses de manière différente. Nous allons étudier ce que l'on peut faire dans ce domaine-là pour être efficaces.

Sur la rationalisation, je pense qu'il faut mener un travail sur les opérateurs plutôt que sur les commissions. Le Président de la République, qui nous a incités à supprimer les organismes inutiles, à juste titre, visait plus, je pense, les opérateurs, c'est-à-dire les organismes qui ont un coût réel. L'ensemble des commissions ont un coût mais celui-ci est souvent assez faible ; on ne sait d'ailleurs pas très bien comment il est calculé dans le jaune car ce sont un peu des approximations qui sont données par les ministères et, surtout, beaucoup d'informations ne sont pas renseignées.

Vous avez proposé un amendement sur ce sujet, monsieur Bouvard, qui est une injonction, ce qui est un peu compliqué. En revanche je pense que, sur l'amendement concernant les commissions et les informations qui sont fournies, je pourrai prendre l'engagement d'aller beaucoup plus loin, comme pour les opérateurs dans le domaine de la transmission de leurs informations immobilières, si le renseignement du jaune n'est pas complet l'année prochaine.

Jérôme Cahuzac est parti mais je tiens à lui répondre sur les 3,4 % et sur la méthodologie employée.

Il est vrai que les plans d'épargne logement comme la dette État-sécurité sociale pourraient conduire à passer l'évolution de la dépense de 2,8 % à 3,4 % mais cela voudrait dire qu'on prend, sur un seul exercice, toute la dette…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

…ou tout le poids de la dépense…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

…alors qu'elle est accumulée depuis plusieurs années. Il serait assez compliqué de prendre la dette sur une seule année et de considérer qu'elle constitue une augmentation de la dépense pour l'année 2008. Ce n'est pas le cas, tout le monde le sait. On pourrait prendre éventuellement la dérive, mais pas la dépense et pas le stock de dépenses. Je conteste cette analyse.

Sur les états généraux de la dépense publique, idée émise par l'UMP, je ne souhaite pas répondre immédiatement dépense par dépense, monsieur le rapporteur général. Je pense que nous aurons ce débat dans le cadre du PLF.

Quant à la règle d'or que vous avez rappelée, monsieur de Courson, le Président de la République – fait sans précédent – nous a demandé lui-même de la respecter. Pourquoi faire une lecture laxiste de ses propos ? Il a clairement indiqué que tout euro supplémentaire imputable à la reprise irait au remboursement de la dette de crise. Pour les dépenses de fonctionnement, il a souhaité que l'État respecte un équilibre comme les collectivités locales : les dépenses de fonctionnement doivent être maîtrisées,…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

…les excédents éventuels permettant les investissements. Enfin, il entend que l'emprunt, c'est-à-dire l'endettement, soit redéployé vers les dépenses d'investissement. Il nous appartient de donner vie à ce projet et de le rendre opérationnel. Hier après-midi, le Gouvernement a commencé à y travailler. Tel est le contexte dans lequel il faut considérer les propos du Président.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Celui-ci a donc bien mis en avant une règle d'or ou une demi-règle d'or.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

En tant que ministre du budget, j'ai bien l'intention de m'en servir pour inviter les ministères à réduire leurs dépenses structurelles.

Quant aux remboursements et dégrèvements, s'agit-il de dépenses ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

On peut se poser la question. Quoi qu'il en soit, je ne pense pas qu'il faille intégrer dans la norme des éléments aussi peu pilotables.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

La PPE, peut-être, mais pas les remboursements et dégrèvements, s'ils se substituent à la taxe professionnelle.

M. Tron a posé le problème de l'évolution de nos dépenses de personnel et souhaité un meilleur contrôle des effectifs de la fonction publique. Nous nous y attachons. Aujourd'hui, l'évolution des frais de personnel est totalement stable : la seule variation concerne le volume des pensions versées, le titre II étant stabilisé.

Quant à vos propos, monsieur Lurel, j'ai envie de les opposer à ceux de M. Cahuzac. Selon vous, nous « frisons l'insincérité », alors que celui-ci nous a déclarés « insincères » au début de la séance. Je me réjouis qu'un tel progrès soit intervenu au cours du débat, et je vous en remercie. (Sourires.)

Vous nous accusez de renoncer à 10 milliards d'euros de recettes fiscales apportées par la taxe professionnelle et la TVA. C'est faux. La discussion n'est pas close sur ces sujets. J'ai l'intention de gager la disparition de la TP, afin que sa suppression n'ampute pas le budget de l'État. En effet s'il va de soi qu'un impôt absurde doit être supprimé, les recettes qu'il générait doivent être non pas supprimées, mais obtenues autrement. J'apporterai ma contribution à ce dossier complexe que représente le redéploiement de la TP, que nous ouvrirons sous peu.

Enfin, vous nous avez reproché d'avoir oublié l'outre-mer dans l'effort de remise à niveau des crédits. Pourtant, en 2008, nous avons dégelé 41 millions d'euros sur les exonérations de charges sociales. Nous sommes donc allés au bout du dispositif. En plus des 41 millions pris sur la réserve de précaution, nous avons prévu 215 millions dans le collectif budgétaire de fin d'année et 375 millions, soit la moitié des 750 millions d'apurement de dettes, vont au RSI, au titre des exonérations spécifiques à l'outre-mer. Autant de mesures qui constituent une amélioration. De plus, grâce à la LODEOM, si nous recentrons les exonérations de charges sur les bas salaires, nous créons aussi les zones franches globales.

Toutefois, le moment n'est pas venu d'entrer dans le détail de ces sujets. D'ailleurs, dans votre intervention très riche, vous avez cité des chiffres plus précis que ceux dont je dispose aujourd'hui. Par conséquent, je reviendrai vers vous prochainement pour vous répondre de manière plus précise.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Les articles 1 à 9 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je les mets successivement aux voix.

(Les articles 1 à 9, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie de deux amendements portant articles additionnels après l'article 9.

La parole est à M. Michel Bouvard pour défendre l'amendement n° 1 .

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Cet amendement, que j'ai eu l'occasion de présenter au cours de la discussion générale, tend à mieux renseigner le Parlement sur le coût de fonctionnement des commissions et organismes que nous avons évoqués.

(L'amendement n° 1 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Michel Bouvard pour soutenir l'amendement n° 2 .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

L'amendement n° 2 vise à délivrer une sorte d'injonction au Gouvernement, ce qui pose un problème constitutionnel. En outre, les engagements, que j'ai pris devraient vous donner satisfaction, monsieur Bouvard.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Compte tenu des engagements pris par M. le ministre et de la forme de l'amendement, qui soulève un problème de recevabilité constitutionnelle, je retire l'amendement.

(L'amendement n° 2 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion de la proposition de loi sur les violences de groupes.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures vingt-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma