Si une période est nécessaire pour que des écritures soient prises en considération, notamment en toute fin d'année, je pense que la période complémentaire se justifie de moins en moins.
De même, une loi de finances rectificative votée en fin d'année, après le vote de la loi de finances, ne me paraît pas non plus de bonne gouvernance. Je crois que cela n'a pas de sens, encore moins avec la pluriannualité, qui, je l'espère, deviendra de plus en plus notre règle ; il faudra en tirer toutes les conséquences, ce que nous n'avons pas encore suffisamment fait. Je souhaite que la commission des finances soit également une force de proposition en la matière.
Comme je le disais, le premier constat qui peut être fait de l'examen de ce texte est celui de comptes publics dégradés avant même que la crise ne produise ses effets : 0,4 % de croissance en 2008 et un déficit de nos comptes publics de 3,4 % du PIB, soit 56,3 milliards, pour le budget de l'État, contre 38,4 milliards en 2007 : une augmentation de 47 %.
Je rappelle d'ailleurs qu'en 2007, la croissance avait été de 2,3 % et que le déficit s'était pourtant aggravé par rapport à 2006, ce qui signifie qu'avec vous, monsieur le ministre, il peut y avoir à la fois de la croissance et une aggravation de la situation de nos comptes publics.
Ce déficit est bien sûr le résultat de l'évolution de nos dépenses et de nos recettes en 2008.
En ce qui concerne la dépense, je renouvelle mes regrets quant à l'exercice de la révision générale des politiques publiques. Je continue de penser que cela peut être un exercice utile. Si l'on croit à l'action publique, il est légitime de remettre à plat, en certaines circonstances, les politiques publiques que nous conduisons, afin d'en apprécier la pertinence. Si nous croyons à l'action publique, nous devons être exigeants sur son efficacité.
Or vous avez fait le choix d'un exercice confiné, alors qu'il était au contraire nécessaire que cet exercice soit ouvert, dans un dialogue avec le Parlement et l'ensemble des acteurs des politiques publiques. Je suis convaincu qu'au-delà des divergences, certains constats peuvent être partagés pour une plus grande efficacité de nos politiques publiques. Nous pouvons avoir des divergences profondes sur le niveau de l'intervention de l'État ou la définition des politiques publiques, mais nous devons pouvoir conduire un exercice sur l'efficacité de nos politiques publiques, à partir d'un certain nombre de critères définis en commun.
Par ailleurs, il ne sert à rien de proclamer la maîtrise de la dépense si, dans le même temps, on organise l'explosion de la dépense fiscale. Le rapport de la commission des finances – que j'ai rédigé avec Gilles Carrez et plusieurs autres députés, dont certains sont ici présents – a démontré qu'en moyenne, chaque année, quatorze mesures supplémentaires de dépenses fiscales ont été créées depuis 2003, contre cinq entre 1980 et 2003 – je pense queJérôme Cahuzac reviendra sur ce point. En 2003, les dépenses fiscales ont atteint 50 milliards ; en 2008, 73 milliards : elles représentent aujourd'hui 21 % des dépenses totales et 27 % des dépenses du budget général. Cela préoccupe le rapporteur général – je le remercie pour sa sincérité – : c'est une préoccupation partagée au sein de la commission des finances, qui s'inquiète du niveau atteint par les dépenses fiscales, et par la baisse des impôts.
Les dépenses fiscales constituent un problème eu égard à leur coût et aux difficultés à les évaluer. La loi de programmation s'est efforcée de formuler des propositions à ce sujet – nous y reviendrons demain. Mais elles constituent aussi un problème parce qu'elles expliquent en grande partie la dégradation de nos comptes publics. En effet, la Cour des comptes a bien montré que les ressources de l'État diminuent, et que cette évolution ne s'explique pas principalement par la crise, mais qu'elle est la conséquence des choix politiques et fiscaux de la majorité depuis 2002, et plus encore depuis 2007. Ainsi, en 2007 et 2008, il y a eu 11 milliards supplémentaires d'augmentation de remboursements et de dégrèvements d'impôts, dont 2,9 milliards au titre de la réforme de la taxe professionnelle décidée en 2006, avec notamment le plafonnement de la valeur ajoutée et le dégrèvement sur les investissements nouveaux.