La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt-deux heures vingt.)
L'ordre du jour appelle le débat sur le rapport d'information de la commission des finances sur les services départementaux d'incendie et de secours (n° 1829).
La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Madame la présidente, monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, monsieur lesecrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, mes chers collègues, avant de dire quelques mots, en guise d'introduction à notre débat, je veux regretter que ce point de l'ordre du jour soit appelé à une heure aussi tardive. Je pense que nous devons nous interroger sur les conditions d'organisation de nos séances et, en particulier, sur celles de la semaine de contrôle.
Je trouve assez curieux de commencer un débat à vingt-deux heures vingt, sachant qu'un autre débat débutera à minuit !
Pourquoi ce débat ? À la suite de plusieurs observations très critiques du rapporteur spécial de la commission des finances, Georges Ginesta, sur les SDIS, les services départementaux d'incendies et de secours, la commission a souhaité que cette question fasse l'objet d'un rapport de la MEC, la mission d'évaluation et de contrôle qui travaille en son sein.
Ce travail a été confié à Georges Ginesta, avec le souhait que, dans la tradition de la MEC, il puisse s'effectuer en liaison étroite avec la commission concernée de notre assemblée – ainsi Thierry Mariani, rapporteur pour avis de la commission des lois sur la mission « Sécurité civile » du projet de loi de finances, fut l'un des rapporteurs de la mission d'information –, et dans une configuration pluraliste, ce qui explique la participation de Bernard Derosier, président du conseil général du Nord et du SDIS du Nord, qui se trouve être l'un des plus importants de France, si ce n'est le premier.
Les propositions formulées dans ce rapport d'information ont suscité quelques réactions.
Je veux réaffirmer toute la sensibilité qui est celle de la commission des finances à l'égard des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. Je salue, une fois de plus, leur dévouement, leur disponibilité, leur compétence et leur esprit professionnel. Je me félicite que nous ayons la chance de bénéficier d'une organisation qui permette de disposer à la fois de personnels professionnels et de volontaires. Mais tout cela n'exclut pas que la représentation nationale s'interroge sur les dysfonctionnements qu'elle a pu constater en ce qui concerne la gouvernance des SDIS, leur financement et les relations nécessaires qu'ils établissent avec le SAMU et les ambulanciers privés.
Sur l'ensemble de ces points, nous savons qu'il peut y avoir une marge de progression. Cela est également vrai pour la formation des sapeurs-pompiers, alors que l'on sait combien ces derniers souhaitent bénéficier de la meilleure formation afin d'être le plus efficaces possible.
La MEC avait pour objectifs de clarifier les compétences et de rendre la gestion des SDIS plus transparente encore.
Monsieur Hortefeux, la question de la clarification des compétences vous concerne directement. Je salue également monsieur Marleix. Le secrétaire d'État insiste habituellement beaucoup pour que la répartition des compétences entre l'État et les collectivités territoriales soit clarifiée ; il se trouve précisément qu'en ce qui concerne les SDIS, il peut être utile de clarifier le rôle de chacun.
L'amélioration de la transparence de la gestion des SDIS vise à ce que le service public rendu, le soit le plus efficacement possible et au meilleur coût. La sécurité représente toujours un coût, mais il est indispensable que ce dernier soit contrôlé pour assurer une efficacité maximale du service rendu.
La MEC a fait trente-huit propositions à partir desquelles nous avons souhaité que le Gouvernement puisse réagir. Nous avons voulu en débattre dans l'hémicycle, pendant cette semaine de contrôle. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, malgré l'heure tardive – je répète qu'il faudra que nous réfléchissions à l'organisation de nos débats –, je me réjouis que nous puissions avoir ce dialogue direct avec vous, afin que nous puissions travailler ensemble et faire en sorte que les missions assurées par le service public des SDIS continuent à l'être avec le maximum d'efficacité, dans l'intérêt général.
J'espère aussi que les propositions formulées par la commission des finances trouveront un certain écho auprès de vous, et qu'elles se traduiront ensuite sur le plan législatif et réglementaire.
La parole est à M. Georges Ginesta, rapporteur de la mission d'information sur les services départementaux d'incendie et de secours.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la pause que nous constations, en 2007, dans l'augmentation des dépenses des SDIS n'a pas duré puisque ces dépenses ont augmenté de 6 % en 2008. La dérive financière, que nous regrettions dans le rapport de la MEC, continue donc.
En 2008, on recense 39 227 sapeurs-pompiers professionnels, soit 507 de plus qu'en 2007. En dix ans, leur nombre sera ainsi passé de moins de 30 000 – ils étaient environ 28 000 –, à bientôt plus de 40 000. La sécurité civile n'est donc pas pilotée dans notre pays, et l'État ne peut s'en désintéresser.
Lors de la discussion budgétaire, j'ai souligné les avancées du Gouvernement sur certaines des trente-huit propositions du rapport de la MEC : le renforcement des pouvoirs du président du conseil général sur le directeur départemental, le guide des bonnes pratiques des SDIS, la rationalisation de la formation des sapeurs-pompiers, l'information du contribuable…
Je me félicite également de l'ouverture du Gouvernement sur la possibilité de mentionner le coût des SDIS par habitant sur les feuilles d'impôts locaux. Ce coût, qui s'établit en moyenne à 80 euros par Français, peut être, pour une famille de quatre personnes, plus élevé que la taxe d'habitation. Une telle mention permettra l'information du contribuable et constituera ainsi un mécanisme d'alerte des responsables nationaux et locaux. Puisque la modification en cours de la fiscalité locale entraînera une refonte des avis d'imposition, pouvez-vous vous engager, monsieur le ministre, à ce que la mention du coût des SDIS y figure en 2010 ?
Par ailleurs, je constate un désaccord avec le Gouvernement sur plusieurs propositions centrales de la MEC ; j'en mentionnerai trois.
Premièrement, le rapport de la mission a mis en évidence les difficultés de fonctionnement de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, la CNSIS. En effet, le référentiel de secours à personne a été négocié en 2008 par les représentants des ministères, des SAMU et des sapeurs-pompiers, sans qu'y soient associés les élus ; ce n'est qu'après sa signature que le texte a été soumis à la CNSIS, sans possibilité de modification. Par ailleurs, le paquet de mesures relatives aux sapeurs-pompiers volontaires, qui vient d'être adopté, a été évalué par la direction de la sécurité civile à 30 millions d'euros par an, alors que d'autres sources l'estiment à 40 millions d'euros. Pourquoi le Gouvernement a-t-il précipité l'adoption de ces mesures avant que la commission « Ambition volontariat », présidée par M. Luc Ferry, ait rendu son rapport ? Pourquoi la CNSIS n'a-t-elle pas eu à examiner à nouveau ces mesures après les modifications intervenues au cours de l'été ? J'y vois, monsieur le ministre, la justification de la proposition de la MEC visant à ce que la commission de la CNSIS chargée des finances soit exclusivement composée de représentants de l'État, qui décide, et des élus, qui paient.
Deuxièmement, le référentiel commun SDIS-SAMU de secours à personne généralise de fait les départs réflexes des sapeurs-pompiers afin de pallier les défauts de la permanence des soins en matière d'aide médicale d'urgence. La MEC a estimé qu'il s'agit d'un sujet majeur, qui doit faire l'objet d'un débat de nature législative. J'ajoute que, pour le transport sanitaire, ce référentiel commun n'a pas inclus les ambulanciers, qui ont fait l'objet d'un accord distinct avec les seuls hôpitaux. Or, les SDIS et les ambulanciers font souvent double emploi et le contribuable paie deux fois un même service public.
Troisièmement, les centres de secours sont encore principalement organisés sur la base de gardes de vingt-quatre heures, alors qu'il y a peu d'interventions entre vingt-trois heures et six heures du matin. Les sapeurs-pompiers professionnels effectuant en moyenne quatre-vingt-dix gardes de vingt-quatre heures par an, ils sont absents de leur lieu de travail 270 jours par an. Un métier que l'on exerce peu est un métier que l'on exerce mal. Or, les sapeurs-pompiers professionnels doivent maintenir un haut niveau de compétence. Chacun d'entre eux effectue en moyenne 143 interventions par an. Il a été calculé que, pour les sapeurs-pompiers de Reims, la durée moyenne d'intervention est de deux heures dix-sept par garde de vingt-quatre heures. Une spirale infernale s'enclenche alors : moins de travail entraîne plus de formation, afin de maintenir un haut niveau de compétence. Cette situation a abouti à la création de quatre-vingts écoles de sapeurs-pompiers en France et a généré une augmentation importante des coûts de gestion.
Les discussions européennes sur la directive relative au temps de travail pourraient remettre en cause le principe d'équivalence et considérer que chaque heure de garde est une heure travaillée, ce qui réduirait encore la présence des sapeurs-pompiers professionnels dans les centres de secours. Il faut donc réviser le décret du 31 décembre 2001 pour établir un système correspondant à huit heures de travail par jour. Avec un tel dispositif, le temps de travail annuel étant de 1 600 heures, les sapeurs-pompiers professionnels seraient présents deux cents jours par an dans les centres de secours et exerceraient ainsi davantage leur métier. En outre, ce système supprimerait la nécessité de disposer de dortoirs et de chambres à coucher dans les centres de secours ; d'où une économie d'investissement. Enfin, cette nouvelle organisation serait moins coûteuse, car elle permettrait de moduler les effectifs en fonction de l'activité opérationnelle tout au long de la journée.
En conclusion, nous avons tous le devoir de réduire la dépense publique. L'État demande aux collectivités locales d'y participer : voilà une piste qui me paraît intéressante. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour l'attention que vous voudrez bien porter à ces propositions.
La parole est à M. Bernard Derosier, rapporteur de la mission d'information sur les services départementaux d'incendie et de secours.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, lorsque nous abordons dans cette enceinte les questions relatives à la sécurité civile, il est d'usage de rendre hommage aux sapeurs-pompiers, qui font un métier difficile et dont certains paient de leur vie leur sens du devoir. Je leur rends donc hommage, d'autant plus que le rapport de la mission d'évaluation et de contrôle a suscité une certaine émotion chez les sapeurs-pompiers, qui n'ont pas forcément toujours apprécié nos observations. On peut, du reste, les comprendre ; mais, après tout, c'est le débat démocratique et il est normal que nous mettions en évidence les difficultés liées au fonctionnement des services d'incendie et de secours.
Après mes collègues Didier Migaud et Georges Ginesta, je veux à mon tour souligner que les dépenses de ces services ont augmenté de façon suffisamment significative pour que l'on soit attentif à cette hausse et que l'on tente, après en avoir analysé les raisons, de trouver des solutions afin d'éviter qu'elle ne perdure. En tout état de cause, cet accroissement est sans corrélation apparente avec l'activité opérationnelle.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous ne manquerez pas de nous dire combien le Gouvernement est satisfait de la façon dont les services départementaux d'incendie et de secours sont organisés par la loi de 1996, modifiée en 2002 et 2004. Et pour cause : l'État a le beau rôle. Il lui suffit en effet de fixer des normes, de recevoir de temps à autre les organisations de sapeurs-pompiers, de satisfaire leurs revendications par voie réglementaire, puis de renvoyer la question aux départements, qui assurent le financement de ces services.
Nous avons analysé les causes de l'augmentation des dépenses des SDIS. Certes, celle-ci est en partie imputable aux rattrapages intervenus depuis la départementalisation, en 1996, et qui ont concerné tant les matériels, notamment les matériels roulants, qui, pour certains d'entre eux, étaient obsolètes – je pense à des GMC datant de 1945 – que les bâtiments, car les communes n'avaient pas toujours consenti les efforts nécessaires pour offrir aux sapeurs-pompiers des conditions de travail dignes de ce nom. Mais la mission d'évaluation et de contrôle nous a permis d'identifier d'autres causes de cette augmentation.
Comme vous le savez, les SDIS ont un mode de financement atypique et complexe, puisqu'ils bénéficient de trois sources de financement. La première provient de l'État, par l'intermédiaire du Fonds d'aide à l'investissement.
De 60 millions d'euros en 2003, ce financement est passé à 22 millions en 2010.
La deuxième source de financement est représentée par les contributions des communes, dont l'évolution est indexée sur l'inflation.
Comme celle-ci a été égale à zéro – ou presque – en 2009, la participation des communes n'évoluera pas en 2010.
La troisième source de financement, qui est aussi la seule variable d'ajustement, c'est la contribution des départements. Il appartient ainsi à ces seules collectivités de financer non seulement l'investissement et les évolutions prévues des dépenses de personnels, mais aussi les nouvelles mesures décidées par l'État. Je pense notamment au décret du 13 octobre 2009, qui prévoit une augmentation du prix de l'heure de vacation, ce qui représente un coût global de 30 millions d'euros pour les départements, dont 4 millions pour le seul département du Nord. Vous comprendrez que cela commence à bien faire !
J'ajoute que, parmi l'ensemble des financeurs, seuls les départements contribuent concrètement à l'effort de modernisation des SDIS – puisque leur contribution n'est pas limitée –, sans disposer pour autant d'une compétence opérationnelle. Se pose donc le problème de la gouvernance, puisque la règle basique selon laquelle « Qui paie commande » – chère à notre collègue Ginesta, qui l'a souvent évoquée devant moi dans le cadre de nos travaux – n'est pas respectée. Au reste, si nous parlons aujourd'hui de départementalisation des services d'incendie et de secours, et non de leur régionalisation ou de leur métropolisation, c'est bien parce que le département a été reconnu comme le territoire le plus adapté, l'échelon le plus pertinent pour l'organisation et la gestion des secours en France. Il est donc indispensable de définir clairement le rôle de chacun des acteurs dans l'organisation des SDIS. Nous avons ainsi proposé que les départements se voient confier leur gestion administrative et leur organisation opérationnelle. Un président de conseil d'administration est-il moins compétent qu'un préfet pour assurer la bonne réalisation opérationnelle des interventions des sapeurs-pompiers ? Pour ma part, je ne le crois pas.
La clarification des compétences doit, en outre, nous permettre de trouver de réelles sources de maîtrise des dépenses. Tout d'abord, il est impératif qu'une étude de l'impact financier de la mise en oeuvre des textes réglementaires et législatifs concernant ce secteur soit établie et qu'elle fasse l'objet d'une mise en perspective avec les mesures passées. Une autre solution consiste dans la fiscalisation des SDIS, et j'insiste sur ce point. Cette mesure permettrait en effet de responsabiliser davantage les élus territoriaux et d'informer les citoyens en toute transparence. Enfin, il est évident, après quelques années de départementalisation, que la mutualisation entre les services du département et le SDIS ainsi qu'entre les SDIS eux-mêmes doit être améliorée. À cet égard, je suis certain, monsieur le ministre, que les élus qui ont la responsabilité des services départementaux seraient attentifs à des textes qui seraient plus contraignants en matière de mutualisation.
Telles sont, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, les idées que j'ai voulu défendre, modestement, en tant que rapporteur de la mission d'information. J'attends aujourd'hui que le Gouvernement s'inspire, comme vous y ont invités le président de la commission des finances, Didier Migaud et Georges Ginesta, du rapport de la MEC sur le financement des SDIS, afin que celui-ci soit mieux maîtrisé par ceux qui en ont la responsabilité, c'est-à-dire les élus locaux. Cela doit bien entendu se faire en liaison avec l'État, car je ne souhaite pas que celui-ci soit totalement absent de l'organisation de la sécurité civile, mais il me semble que le partenariat peut être amélioré en ce domaine, et je vous remercie par avance d'y contribuer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Thierry Mariani, rapporteur de la mission d'information sur les services départementaux d'incendie et de secours.
, rapporteur. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'organisation de cette discussion, à l'initiative de la commission des finances, va nous permettre, je l'espère, de dépassionner un débat qui s'est envenimé au fil des semaines et d'aborder sereinement un sujet fondamental pour la sécurité quotidienne de nos concitoyens.
Si des divergences existent sur les chiffres exacts – il faut en particulier tenir compte du changement de périmètre des SDIS et du fait que leur budget intègre la participation des communes –, personne ne conteste, en revanche, la réalité d'une hausse des dépenses des SDIS depuis une dizaine d'années. Faire ce constat, ce n'est pas considérer que ces dépenses étaient injustifiées, ni désigner à la vindicte populaire les élus locaux qui gèrent les SDIS ou les sapeurs-pompiers, auxquels nous avons toujours témoigné notre plus profonde considération, qu'ils soient volontaires ou professionnels.
Beaucoup de ces dépenses, liées à la départementalisation, étaient contraintes, je ne l'ignore pas. Il a fallu remettre à niveau des locaux vétustes et des équipements obsolètes,…
…satisfaire à des normes de plus en plus exigeantes, parfois à l'excès, et faire face à une augmentation des demandes d'intervention de la population, dans un contexte d'effritement des effectifs de sapeurs-pompiers volontaires. Comment ne pas souligner, à cet égard, que la mise en place des 35 heures, dont le moins que l'on puisse dire est que la majorité actuelle ne l'a pas encouragée, a été extrêmement coûteuse pour les SDIS ?
Ce constat étant fait, il est de notre responsabilité de rechercher, aujourd'hui et demain, la manière dont nous pouvons optimiser les moyens que nos concitoyens consacrent, à travers leurs impôts, aux services d'incendie et de secours, avec le souci permanent de maintenir, voire d'améliorer, la qualité du service rendu.
Je voudrais tout d'abord réaffirmer mon attachement à l'équilibre trouvé lors de la loi de modernisation de la sécurité civile de 2004, dont j'étais le rapporteur. Cet équilibre se caractérise par l'autonomie de l'établissement public SDIS, dans le cadre de la compétence partagée entre l'État et les collectivités territoriales. Lorsque la mission d'évaluation et de contrôle a rendu son rapport, le projet de réforme des collectivités territoriales n'était pas encore connu. Il constitue un élément nouveau, qui devra nous amener, à mon sens, à réfléchir aux moyens de renforcer cette autonomie, dans un contexte où l'échelon régional est appelé à prendre plus d'importance.
En ce qui concerne la maîtrise des coûts, l'élément le plus fondamental me paraît être une politique ambitieuse en faveur du volontariat, clé de voûte de notre système de protection civile. Sauf à renoncer à remplir certaines missions, la poursuite de la baisse du nombre de sapeurs-pompiers volontaires se traduira en effet inéluctablement par des embauches de sapeurs-pompiers professionnels, donc par des dépenses supplémentaires pour chacun des SDIS.
Comme je l'ai déjà fait dans mon avis budgétaire, je voudrais souligner le grand intérêt des propositions de la commission « Ambition volontariat » présidée par M. Luc Ferry et vous inciter, messieurs les ministres, à les mettre en oeuvre le plus rapidement possible. Pour les raisons que je viens d'expliquer, il me semble que même des propositions qui paraissent coûteuses au premier abord peuvent se révéler sources d'économies à plus long terme.
Après trois années d'expérience, il nous faudra peut-être également réfléchir à des évolutions de la prestation de fidélisation et de reconnaissance en faveur des sapeurs-pompiers volontaires, que nous avons mise en place avec la loi de 2004. Une ancienneté minimale de 35 ans est nécessaire pour bénéficier de la rente maximale ; il faudrait déterminer, avec l'ensemble des partenaires concernés, si cette limite n'est pas un peu trop haute compte tenu de la durée d'activité.
Pour conclure, j'évoquerai rapidement d'autres pistes d'économies. Des progrès me semblent pouvoir être réalisés dans le domaine de la formation ou des achats par une incitation plus forte à la mutualisation, le recours à la validation des acquis de l'expérience ou des efforts de simplification. L'abrogation des notes d'information techniques relatives aux matériels et équipements va dans le bon sens, mais la démarche pourrait être poussée plus loin, pour s'assurer que les textes réglementaires et les normes concernant la sécurité civile ne font pas peser des contraintes excessives sur les SDIS au regard des bénéfices attendus. Des simplifications pourraient non seulement se traduire par des économies, mais aussi simplifier la vie des SDIS.
Enfin, je voudrais revenir sur une proposition de clarification que nous avançons depuis plusieurs années, et qui, je le sais, ne soulève pas un grand enthousiasme du côté de Bercy, à savoir la « fiscalisation » des dépenses des SDIS. Si je comprends bien que la réforme en cours de la taxe professionnelle rend cette réforme difficile à réaliser à court terme, il me semble néanmoins que l'objectif d'une plus grande lisibilité et d'une responsabilisation de nos concitoyens doit être poursuivi. Une conscience plus claire des coûts induits pourrait peut-être les inciter à ne faire appel aux sapeurs-pompiers que lorsque cela est absolument nécessaire et pour des missions relevant véritablement de leurs compétences.
La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, messieurs les rapporteurs de la mission d'évaluation et de contrôle, mesdames et messieurs les députés, avant d'intervenir sur les conclusions de la mission d'évaluation et de contrôle, je voudrais à mon tour – pas seulement pour défaire le monopole de M. Derosier – rendre hommage aux femmes et aux hommes, sapeurs-pompiers volontaires, professionnels et militaires ainsi qu'aux personnels civils et militaires des moyens nationaux de la sécurité civile,…
…qui, au péril de leur vie, assurent, chaque jour, la protection des populations sur le territoire français, mais également hors de nos frontières.
Je vous rappelle que je rends un hommage. Même si vous souhaitez vous y associer, vous n'êtes pas obligé de parler plus fort que l'orateur !
Je veux également rappeler la mobilisation remarquable de tous les acteurs de la sécurité civile tout au long de l'année 2009, qui a été marquée par des événements d'une particulière gravité. Je pense notamment à la tempête Klaus du 24 janvier dernier ; aux inondations de la Martinique en mai, et à celles du Var et du Sud-Ouest en septembre et octobre ; enfin, à la pandémie grippale que connaît actuellement notre pays. Les sapeurs-pompiers sont également intervenus hors de notre territoire : au Sri Lanka, à Sumatra, à Gaza, en Moldavie, en Italie et au Bénin ainsi que sur les grands incendies de forêt en Grèce, au Portugal et en Italie. Je veux, enfin, rendre un hommage solennel – auquel vous serez, je n'en doute pas, nombreux à vous associer – aux treize sapeurs-pompiers et aux deux pilotes d'hélicoptères qui ont disparu dans l'exercice de leurs fonctions au cours des douze derniers mois.
Chacun connaît les enjeux de sécurité civile : un Français sur trois est amené chaque année à composer le 18 ou le 112 pour faire appel aux sapeurs-pompiers, qui réalisent chaque année plus de 4 millions d'interventions, soit une toutes les 8 secondes. Je souhaite tout d'abord dire très clairement que le volontariat est considéré par le Gouvernement comme la « grande cause » de la sécurité civile et qu'il constituera le coeur de notre action. La mission d'évaluation et de contrôle a constaté combien l'engagement citoyen était lié à la sécurité civile et sur ce point, le Gouvernement entend pleinement retenir les préconisations qui lui sont ou seront faites par la représentation nationale. Il s'agit d'inciter de nouveaux volontaires à rejoindre les rangs, mais également et peut-être, surtout, de pérenniser l'engagement de ceux qui l'ont déjà fait.
Le rapport remis par Luc Ferry, que plusieurs d'entre vous ont évoqué, constituera une excellente base de réflexion. Souplesse et reconnaissance en sont les deux orientations majeures. Ces deux principes guideront donc les actions qui seront engagées dès 2010, notamment dans le domaine de l'individualisation de la formation des sapeurs-pompiers volontaires – j'aurai l'occasion d'y revenir.
Le rapport de la MEC formule 38 propositions s'articulant autour de quatre axes principaux : la nécessité d'une clarification des compétences ; la coordination entre les SDIS, les SAMU et les ambulanciers privés ; la maîtrise des dépenses des SDIS et la condition d'un financement soutenable ; enfin, la gestion et la formation des sapeurs-pompiers. La moitié des préconisations de la MEC a, d'ores et déjà, reçu un premier commencement d'exécution ou a été mise en oeuvre.
L'interrogation de la MEC sur les compétences respectives de l'État et des collectivités locales en matière de sécurité civile est, à l'évidence, une interrogation légitime et qui a trouvé un juste équilibre avec la loi de 2004. Le travail de mise à niveau réalisé par les départements pendant cette période est remarquable, tant pour la structuration des services que pour les investissements en matière de bâtiments, de matériels et équipements. Dans le même temps, l'État s'est organisé avec pour ambition, comme le souhaite la MEC, de « définir le cadre institutionnel en assurant le principe d'égalité des citoyens devant le service public ».
Pour autant, je le dis clairement, la loi de 2004 reste et doit rester notre référence commune. À ceux qui voudraient opposer la compétence étatique à la libre administration locale, je rappelle que la loi de 2004 a fixé un principe simple : celui de la subsidiarité. D'une part, le niveau local est l'échelon le plus pertinent pour organiser, mettre en oeuvre et adapter le secours à la personne à la diversité de nos territoires. D'autre part, l'État, sous l'autorité des préfets, est le mieux à même d'agréger les forces locales pour faire pleinement émerger la solidarité nationale lorsqu'une catastrophe d'ampleur frappe nos concitoyens et nécessite la mise en oeuvre de moyens qu'aucun département – a fortiori s'il ne s'agit pas de l'un des plus grands – ne pourrait, à lui seul, déployer.
La loi de 2004 est un socle solide, édifié à partir des amendements très pertinents de Thierry Mariani, qui en était le rapporteur. Elle a été adoptée sans vote négatif, ce qui traduit le consensus – à mes yeux tout à fait justifié – de la représentation nationale.
Dans ce cadre, la Conférence nationale des services d'incendie et de secours est une institution nécessaire. Se réunissant en moyenne quatre fois par an, elle a permis l'examen de plus de quarante textes, aussi bien dans le champ statutaire que dans celui de la formation ou des équipements. La CNSIS est, par essence, l'organe de concertation qui manquait.
Même si des progrès qualitatifs peuvent encore être faits, notamment dans l'information des élus – et ils le seront, je m'y engage –, tous les dossiers présentés depuis l'origine l'ont été avec une fiche d'impact et une fiche financière, transmise dans les délais, c'est-à-dire quinze jours avant la réunion de la conférence. J'ajoute que les avis de la CNSIS ont tous, sans exception, été suivis par le Gouvernement.
Pour ce qui est des statuts des sapeurs-pompiers, les textes rédigés par la direction de la sécurité civile sont, à de rares exceptions près, des textes d'application, des textes de transposition aux sapeurs-pompiers de dispositions européennes – reconnaissance des qualifications notamment – ou nationales – revalorisations indiciaires.
Par ailleurs, de nombreux textes prévoient, comme vous l'avez constaté, une évaluation. C'est le cas notamment du projet de fin de carrière ; du décret de 2001 sur le temps de travail ; ou encore du référentiel sur le secours à personne, dont un bilan sera présenté en 2012, après deux années d'application.
La mission propose de réserver le fonds d'aide à l'investissement aux établissements publics interdépartementaux d'incendie et de secours, ou à toute autre forme de mutualisation possible entre les SDIS. Ce fonds a, d'ores et déjà, été réorienté dans la direction souhaitée par la MEC, tout en respectant à chaque étape le principe de libre administration, qui, seul, préside à la création d'un EPIDIS. Le Gouvernement partage toutefois pleinement les conclusions de la MEC quant à la nécessité d'utiliser la mutualisation entre SDIS, mais également entre le conseil général et le SDIS, comme un bon vecteur de rationalisation.
En ce qui concerne, enfin, la définition d'un nouveau classement des SDIS, il s'agit d'un dossier connexe de la réforme des emplois supérieurs de direction. Un nouveau classement, plus lisible, devra y être intégré, conformément aux souhaits de la MEC. La conférence nationale sera associée dès le début à ces travaux, qui seront lancés en 2010.
Je voudrais revenir un instant sur les modalités d'intervention entre les SDIS, les SAMU et les ambulanciers privés. Les missions des services publics qui délivrent des secours d'urgence à la population sont claires. Le référentiel commun sur le secours à personne qui a été élaboré s'inscrit dans ce cadre légal. Il s'agit d'un guide de bonnes pratiques, partagé par les deux services publics, visant à décliner les situations d'urgence auxquelles les acteurs de terrain se trouvent confrontés.
Le référentiel sur le secours à personnes clarifie les éventuelles ambiguïtés pouvant se rencontrer sur le terrain. Il en précise les conditions d'intervention respectives des SDIS et des SAMU, qui font l'objet d'une convention arrêtée au plan local entre les parties. Le référentiel fera l'objet, comme je l'ai indiqué, d'un bilan d'étape à l'issue de ses deux premières années de mise en oeuvre. La circulaire que j'ai signée le 14 octobre dernier avec ma collègue ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a permis de mettre fin aux interrogations relatives à l'articulation entre le référentiel SDIS-SAMU et celui concernant les SAMU et les ambulanciers.
En ce qui concerne les missions accomplies par les SDIS en cas d'indisponibilité des ambulanciers, la loi « hôpital, patients, santé et territoires » a utilement précisé que leur remboursement était une dépense obligatoire des établissements de santé.
En outre, le montant de 105 euros fixé par intervention du SDIS en cas de carence des ambulanciers privés a été maintenu en 2007 et 2008. Son montant sera examiné par le comité de suivi et d'évaluation mis en place, conformément aux prescriptions du référentiel sur le secours à personne. Là encore, les préconisations de la MEC ont été clairement entendues.
Pour ce qui est des infirmiers, les services de santé et de secours médical comptent 4 800 infirmiers diplômés d'état, dont 200 professionnels et contractuels. Les 4 600 volontaires – c'est un élément très important dans le fonctionnement du dispositif – sont pour 70 % d'origine hospitalière ce qui limite ipso facto leur disponibilité en cas de crise. Leurs missions sont multiples et ne se limitent pas aux interventions d'urgence, mais comprennent aussi la mission interne aux SDIS – médecine professionnelle, formation, et autres.
J'ajoute qu'actuellement, le service de santé et de secours médical joue un rôle très important dans la lutte contre la pandémie grippale. En 2008, ces infirmiers ont réalisé 96 000 interventions.
Après la gouvernance, je voudrais maintenant vous dire quelques mots sur le financement.
La maîtrise des dépenses des SDIS, comme toute dépense publique, est une préoccupation majeure du Gouvernement, qui se doit aussi de respecter le principe de libre administration des collectivités locales.
Dans le cadre de sa mission de mise en cohérence, il a mis en place, depuis 2006, plusieurs outils à destination des élus locaux. Il en est ainsi de l'édition annuelle d'une plaquette « statistiques » contenant des informations relatives notamment au coût des matériels, permettant de ce fait d'initier une réflexion sur les choix à envisager voire à engager des mutualisations en matière d'acquisition.
De même, une plaquette « financière » annuelle, élaborée en collaboration avec le ministère des finances, permet depuis deux ans de mettre à disposition des élus des données et analyses financières unifiées.
De plus, la direction de la sécurité civile a mis en place des indicateurs nationaux des services d'incendie et de secours publiés pour la première fois en juin 2008.
S'agissant de la proposition de la mission consistant à alimenter les bases de données européennes et internationales en matière de sécurité civile, je pense que c'est une bonne idée. On peut certainement aller plus loin. Cela doit faire l'objet d'une étude plus approfondie, conformément aux souhaits de la MEC.
La direction de la sécurité civile a d'ores et déjà réalisé un certain nombre d'actions en vue d'éclairer la dépense locale et d'aider les SDIS à parvenir à une meilleure maîtrise de leurs dépenses. Il en est ainsi des outils mis à disposition des élus tels que les indicateurs de performance et les plaquettes « statistiques » et « financière ». La réflexion se poursuit dans deux domaines d'action majeurs.
Le premier porte sur la réduction des coûts de formation par le développement, notamment, de la validation des acquis de l'expérience…
…et la reconnaissance des titres et diplômes, et de l'enseignement à distance.
Le second a trait à la définition des modalités de la généralisation de l'infrastructure ANTARES.
C'est une des mesures que j'ai annoncées au congrès de la FNSP à Saint-Étienne en octobre dernier.
Monsieur Derosier, s'agissant de la proposition qui vise à instaurer une fiscalisation des dépenses des SDIS par la création d'une taxe additionnelle aux impôts locaux, elle pourrait être en contradiction avec le principe de l'universalité budgétaire et les objectifs de limitation de la pression fiscale. La proposition visant à individualiser le coût des SDIS dans les avis d'imposition, comme l'a souhaité la MEC, est actuellement examinée par les services du ministère des finances. Pour ma part, et Alain Marleix partage cette opinion, je n'y suis pas opposé.
Vos encouragements sont suffisamment rares, monsieur Derosier, pour que je m'arrête pour vous en remercier et vous féliciter pour cette clairvoyance. (Sourires.)
Je voudrais, avant de conclure, aborder le sujet du temps de travail des sapeurs-pompiers et de la formation. Le décret du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels permet aux SDIS d'adapter le régime de travail à la sollicitation opérationnelle.
En effet, le régime de travail est fixé par le conseil d'administration du SDIS après avis du comité technique paritaire, dans le cadre réglementaire fixé par le décret. Le décret comporte suffisamment de souplesse pour permettre à chaque SDIS d'adapter son régime de travail à ses exigences opérationnelles, fixées dans le schéma départemental d'analyse et de couverture des risques – le SDACR – et le règlement opérationnel – le RO.
J'ai d'ores et déjà indiqué à l'ensemble des organisations syndicales – que beaucoup d'entre vous côtoient – que le temps de travail ne saurait être un sujet mis à l'agenda.
En ce qui concerne la proposition consistant à faire entrer autant que possible la filière sapeurs-pompiers dans le droit commun de la fonction publique territoriale, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale – le CSFPT – a décidé, dans le cadre de la procédure d'auto-saisine, de confier à sa formation spécialisée numéro 3, l'élaboration d'un rapport sur la filière sapeurs-pompiers. Après plusieurs mois de travaux, le rapport, dit « rapport FS3 », a été approuvé par le CSFPT, le 4 février 2009.
Les propositions statutaires qui y sont présentées marquent une volonté d'inscrire la filière sapeurs-pompiers dans le droit commun de la fonction publique territoriale. Je partage cette orientation.
Vous avez décidément beaucoup changé, monsieur Derosier. (Sourires.) Je crains cependant que le naturel ne revienne…
Les réflexions en cours sur la réforme de la filière sapeurs-pompiers s'inscrivent dans ce cadre notamment en ce qui concerne les travaux de la catégorie B.
Enfin, l'individualisation des parcours de formation des sapeurs-pompiers par les Écoles départementales d'incendie et de secours pour les non-officiers, et l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers, pour les officiers, est un des enjeux forts par une maîtrise des coûts de formation, le maintien de la capacité opérationnelle des SDIS et le développement du volontariat. J'ai donc demandé au préfet Perret, directeur de la sécurité civile, d'en faire une priorité pour 2010.
En conclusion, nombre des 38 propositions préconisées par le rapport de la mission ont d'ores et déjà été mises en chantier. Il en est ainsi de la refonte des règles statutaires de nomination des officiers supérieurs assurant la direction des SDIS, des indicateurs de performance mis à disposition des décideurs locaux ou de la refonte du dispositif de formation.
La France, et je pense que chacun partagera ce sentiment, dispose de services d'incendie et de secours parmi les plus performants au monde. Nous devons collectivement en être fiers et saluer l'action de celles et de ceux qui oeuvrent au quotidien à la sécurité et au secours de nos concitoyens. Merci pour ce débat qui permet de le souligner tout en envisageant des améliorations. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Nous en arrivons aux questions des groupes.
Je rappelle que la durée de chaque question est limitée à deux minutes.
J'appellerai successivement trois questions du même groupe auxquelles le ministre répondra globalement. Puis j'appellerai les questions du groupe suivant.
Je demande à chacun de respecter le temps qui lui est imparti.
Nous commençons par les questions du groupe UMP.
La parole est à M. Rémi Delatte.
Ce rapport d'information sur le contrôle et l'évaluation des SDIS est intéressant dans la mesure où il confirme notre volonté partagée d'utiliser au mieux nos finances publiques pour assurer un service auquel les Français sont très attachés.
Si le rapport met en évidence une dérive importante des dépenses des services départementaux d'incendie et de secours, il ne faut pas perdre de vue pour autant qu'en matière de départementalisation, nous partions de situations très diverses. Ainsi, certains départements ont dû intégrer des unités pour lesquelles les moyens étaient plus que limités, les locaux et équipements obsolètes, sans parler du manque de qualification des personnels, dont les formations n'étaient pas à jour.
Aussi, pour réussir la départementalisation, fondée sur la mixité entre professionnels et volontaires, les SDIS ont adapté leurs structures, ce qui a induit des coûts supplémentaires. Je pourrais parler aussi de l'évolution normative qui impacte lourdement les budgets.
Actuellement, l'organisation des services arrive à maturité. Cela doit nous conduire à une maîtrise des dépenses sachant toutefois que le poste principal de fonctionnement concerne les ressources humaines et que les ratios de technicité et de vieillissement relativiseront inévitablement l'objectif de limitation des coûts.
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger, d'une part, sur votre volonté de préserver le soutien de l'État au SDIS et, d'autre part, sur l'opportunité de mettre en place une pondération des financements au travers du fonds d'aide à l'investissement. Il s'agit de prendre en compte les situations diverses de chaque département quant à son historique en termes de moyens immobiliers et d'équipements.
La protection civile de la population ne saurait en effet être complètement déléguée et financée à l'échelon territorial. Il est essentiel que l'État assure la coordination et l'équité des moyens.
J'ai souhaité m'inscrire dans ce débat car je suis profondément attachée au maintien et à la consolidation de cette mission de service public, si bien assurée par nos pompiers. Je veux à mon tour leur rendre hommage et saluer leur professionnalisme, leur dévouement et leur sens exemplaire du devoir.
Nous nous devons donc de les accompagner le mieux possible. Certes, beaucoup a déjà été fait. Mais il existe encore des améliorations à apporter quant à la gouvernance, au financement, à la formation des personnels ou encore à la coordination entre les SAMU et les ambulanciers s'agissant des secours à la personne et du transport sanitaire.
Je souhaite ainsi, monsieur le ministre, évoquer plus en détail la question du référentiel SAMUSDIS opérationnel depuis cette année. Celui-ci était indispensable afin que chacun puisse s'entendre sur un juste partage des rôles.
Ce document primordial, demandé par le Président de la République, vise à clarifier les missions des services publics en charge des secours en mettant la victime au coeur du dispositif. Il permet ainsi de garantir des secours de qualité sur tout le territoire, tout en favorisant une répartition efficiente des moyens.
Sur le terrain, cependant, il s'avère que l'application de ce référentiel commun fait l'objet d'interprétations diverses, menant parfois à la multiplication des départs réflexes des sapeurs-pompiers quand ils sont appelés pour de simples transports de malades. Est-il prévu de clarifier les termes de ce référentiel et de mieux former ses utilisateurs ?
Par ailleurs, et ainsi que le signalent nos rapporteurs, ce référentiel commun peut-il fonctionner dans de bonnes conditions alors qu'il n'existe pas de convention SAMUSDIS dans un quart des départements et que seulement 15 départements ont opté pour une plateforme d'appel commune 1518 ?
Enfin, le suivi régulier de la mise en place du référentiel étant assuré à travers la création d'un comité quadripartite national, pouvez-vous, monsieur le ministre, faire un point précis sur les difficultés rencontrées et les moyens mis en oeuvre pour remédier à celles-ci ?
Monsieur le ministre, vous avez évoqué la question de la répartition des compétences entre les départements et l'État, permettez-moi d'y revenir d'un mot.
En matière financière, la règle qu'on applique habituellement est bien connue de tous : qui paie commande et qui commande paie. Or, en matière de sécurité civile, cette règle n'est pas appliquée. D'où un certain nombre de difficultés et, pour partie au moins, la dérive budgétaire à laquelle nous assistons depuis quelques années.
Cette question, soulevée régulièrement depuis dix ans environ, a appelé au fil du temps des réponses différentes. Le rapport Mauroy avait proposé que les services départementaux d'incendie et de secours soient rattachés à l'État. La MEC avance la solution inverse. D'un côté comme de l'autre, on estime en tout cas que cette dichotomie n'est pas saine.
Monsieur le ministre, la porte est-elle fermée à la réflexion en ce domaine ou peut-on essayer de trouver une solution ? Dans mon esprit, s'il y avait reprise en compte des services départementaux d'incendie et de secours par l'État, ce serait en quelque sorte un transfert de compétences – cela fait partie des choses que l'on sait faire depuis la mise en oeuvre de la décentralisation – en sens inverse. Le transfert devrait s'accompagner d'un transfert financier avec prélèvement des ressources correspondantes sur les budgets des départements.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
Votre analyse de la départementalisation, monsieur Delatte, démontre une connaissance fine de la réalité des services départementaux d'incendie et de secours. Il est exact que les départements, en fonction de leur histoire mais également des pratiques locales, ont appréhendé la départementalisation de manière différenciée.
Le fonds d'aide à l'investissement, le FAI, est utilisé selon deux modalités : la première tient compte de la population de chaque département ; la seconde, qui représente un montant de 4 millions d'euros, est utilisée pour soutenir les départements le plus souvent de taille modeste, dans leurs projets d'investissement. Votre département a d'ailleurs bénéficié cette année, de ce soutien de l'État à hauteur de 200 000 euros.
Par ailleurs, 13 millions d'euros sont consacrés entre 2008 et 2010 à la réalisation de l'infrastructure ANTARES. Les départements ruraux, initialement peu couverts par le réseau ACROPOL, bénéficient donc structurellement de ce soutien de l'État.
Dans le cadre du recentrage de la gestion du fonds sur les projets les plus structurants, l'État partage votre point de vue et souhaite mobiliser prioritairement le FAI au profit des investissements qui entrent dans le périmètre que vous évoquiez à juste titre.
Madame Isabelle Vasseur, vous soulignez à juste titre l'avancée remarquable que constitue le référentiel commun SDIS-SAMU sur le secours à personne. Nous avons tous en mémoire ces 2,5 millions de situations de détresse qui ne pouvaient plus nourrir la chronique d'un conflit inacceptable entre les « rouges » et les « blancs ». Les sapeurs-pompiers, leurs médecins et les infirmiers du service de santé, de même que les médecins et infirmiers des SAMU et des SMUR, appartiennent tous à la même famille des services publics en charge des secours d'urgence.
La procédure dite de « départ réflexe », que vous évoquez, en est d'ailleurs une très bonne illustration, puisqu'elle vise à garantir une réponse immédiate aux situations les plus graves et les plus sensibles, qui sont clairement listées par le référentiel commun, sans pour autant priver la victime des plus-values d'une régulation médicale.
Je l'ai dit, j'ai signé le 14 octobre, avec la ministre de la santé, une circulaire qui a décliné ce référentiel dans le champ conventionnel. Un premier bilan de mise en oeuvre du référentiel, mais également des conventions entre les SDIS et les SAMU, sera établi à partir des comptes rendus que les préfets ont d'ailleurs reçu pour instruction d'adresser au Gouvernement.
Parallèlement, un comité de suivi est susceptible d'aider les acteurs locaux face aux difficultés d'interprétation qui pourraient survenir et un bilan global sera établi dans deux ans, conformément aux voeux des élus de la conférence nationale des services d'incendie et de secours.
S'agissant des plateformes communes entre les services du 15 et ceux du 18, je vous confirme qu'il s'agit seulement d'une des modalités partenariales susceptibles d'être retenues à l'échelon local. Leur mise en place, ou au contraire leur absence, n'est – je tenais à vous le préciser – ni une condition, ni un obstacle à la mise en oeuvre du référentiel.
Enfin, monsieur Diefenbacher, vous qui êtes un ancien préfet…
…vous savez que la loi de 2004 doit rester, comme je l'ai dit tout à l'heure, la référence commune. À ceux qui opposent la compétence étatique à la libre administration des collectivités locales, je rappelle encore une fois que cette loi a fixé un principe simple : celui de la subsidiarité.
Cela signifie, d'une part, que le niveau local est l'échelon le plus pertinent pour organiser, mettre en oeuvre le secours aux personnes et l'adapter à la diversité de nos territoires, et, d'autre part – nous y reviendrons peut-être tout à l'heure – que l'État, sous l'autorité des préfets, est clairement le mieux à même d'agréger les forces locales pour faire émerger et consolider la solidarité nationale lorsqu'une catastrophe de grande ampleur intervient et nécessite des moyens que très peu de départements – je le dis sans vouloir choquer M. Derosier – seraient susceptibles de déployer à eux seuls.
Parallèlement, l'État a entendu les demandes des élus locaux, qui souhaitent être mieux associés aux décisions réglementaires ayant des conséquences sur l'organisation opérationnelle. Outre le fait que, sur le plan local, le schéma départemental d'analyse et de couverture des risques, le SDACR, ne peut-être arrêté par le préfet sans un vote conforme du conseil d'administration du SDIS, il convient de rappeler que, depuis 2005, les élus de la conférence nationale des services d'incendie et de secours ont émis un avis sur tous les actes réglementaires. Or, il n'est pas arrivé une seule fois que l'avis des élus des départements et communes ne soit pas suivi par le Gouvernement.
J'ajoute que l'État a également entendu les demandes des élus locaux tendant à leur permettre de disposer de davantage d'outils de pilotage. La mise en oeuvre d'indicateurs d'efficience a été ainsi été engagée depuis trois ans.
À l'évidence, beaucoup reste à faire. Cela nécessitera un effort, et il sera accompli. Pour autant, l'accompagnement indispensable d'une réforme institutionnelle encore très récente ne doit pas conduire à remettre en cause les fondements de cette réforme. Il faut donc, sans doute, laisser un peu de temps au temps.
Nous en venons à la première série de questions du groupe SRC.
La parole est à M. Bernard Derosier.
Monsieur le ministre, au début de ma question, j'ai envie de vous adresser une supplique.
Pourriez-vous cesser d'utiliser ce discours surréaliste par lequel vous avez, à plusieurs reprises, souligné la libre administration des collectivités territoriales, alors que votre politique fait tout le contraire, en les étranglant ?
Essayez, de temps en temps, de mettre en cohérence votre pratique et vos discours.
Ma question concerne tout d'abord le fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP, tel que l'a créé la loi du 11 février 2005. Il s'agit d'une très bonne chose. Vous le voyez, je suis capable de dire que, parfois, le Gouvernement et sa majorité font de bonnes choses !
Encore faut-il, mes chers collègues, que cette législation soit cohérente avec la réalité de la gestion de services – en l'occurrence, les services départementaux d'incendie et de secours –, puisque cette loi oblige à avoir recours, dans les effectifs, à 6 % au moins de personnes relevant d'un handicap reconnu. Or, cette disposition s'applique aux sapeurs-pompiers professionnels, ce qui signifie que, dans un service départemental qui pourra compter cent personnes – et jusqu'à deux mille dans mon département –, il doit y avoir 6 % de sapeurs-pompiers handicapés, faute de quoi on doit payer la taxe. La solution consiste à reporter ces handicapés sur les personnels administratifs et techniques…
…et c'est effectivement la réponse que l'on est tenté de proposer.
Mais, si je fais un calcul rapide, 6 % de deux mille, cela représente cent vingt personnes. Or, j'ai quatre cent cinquante employés relevant de la catégorie des PATS, les personnels administratifs techniques et spécialisés. Il faudrait donc qu'il y ait au moins cent vingt personnes handicapées parmi ces quatre cent cinquante PATS, ce qui représenterait 30 % ! Nous serions ainsi, effectivement, au-dessus du quota fixé par la loi.
Dans le secteur privé – puisque cette disposition s'y applique également – on a reconnu que certains emplois nécessitaient une aptitude physique particulière et, de ce fait, il existe un principe de minoration de la contribution au fonds.
Monsieur le ministre, je vous avais déjà posé cette question lors de l'examen du budget de la sécurité civile, mais sans recevoir de réponse ; je vous réitère donc ma demande aujourd'hui, les yeux dans les yeux : quand allez-vous considérer qu'un sapeur-pompier professionnel ne peut pas être une personne handicapée – sinon il n'accomplirait pas sa mission – et quand allez-vous faire appliquer le principe de minoration aux services départementaux d'incendie et de secours ?
Je voudrais débuter mon propos en disant le plaisir que j'ai eu à travailler avec les trois rapporteurs et à coprésider, avec Georges Tron, cette mission d'évaluation et de contrôle. Nous avons oeuvré, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, avec le souci d'aboutir à des modifications substantielles.
Le 9 juin dernier, monsieur le ministre, nous avons auditionné votre prédécesseur, Mme Michèle Alliot-Marie. Nous sommes, elle et moi, issus du même département, même si elle est originaire de la partie ouest, celle où il ne faut jamais rien changer. (Sourires.)
Son intervention m'a d'ailleurs rappelé qu'il existe, y compris chez elle, une sorte de tropisme basque. En effet, à toutes les questions qui lui étaient soumises, même par des députés issus de la majorité – en l'occurrence, MM. Ginesta et Mariani –, elle répondait qu'il ne fallait surtout rien changer !
Ce soir, monsieur le ministre, vous adoptez un autre ton. Vous nous dites que, sur les trente-huit propositions, il y en a la moitié que vous êtes prêt à mettre en oeuvre ou que vous avez déjà engagées. Toutefois, lorsque MM. Diefenbacher et Derosier vous interrogent sur la gouvernance, vous nous dites qu'il y a les tables de la loi – celle de 2004 –, que l'on ne change rien et que l'on ne bouge surtout pas !
Il ne faut donc rien changer à ce qui pourtant apparaît à tous les élus, de droite et de gauche, comme une incohérence majeure : le fait que, pour le SDACR, ce soit le préfet qui décide de tout, c'est-à-dire aussi des dépenses et des décisions qui vont engager le service départemental d'incendie et de secours. De même la nomination du directeur départemental et du directeur adjoint est une décision qui est conjointe au président du SDIS et au préfet. Nous avons unanimement demandé, sous l'autorité de Didier Migaud, lorsque le rapport a été examiné en commission des finances, que notre législation évolue en la matière.
Je souhaite donc vous interroger, monsieur le ministre, sur votre volonté de mettre un terme à ces aberrations que nous constatons tous. Il ne s'agit pas de minorer le rôle de l'État et, pour reprendre la situation que vous évoquiez, si des circonstances exorbitantes du droit commun l'imposaient, je suis persuadé, pour ma part, que l'on trouverait dans l'arsenal juridique les moyens pour que l'État puisse saisir des capacités d'intervention qui seraient placées sous l'autorité du président du SDIS.
Je terminerai mon propos en évoquant le Béarn, après le pays basque. Il s'agit d'une situation particulière que tout le monde nous envie : une brigade des sapeurs-pompiers de Paris est installée chez nous. (Sourires.)
Cette situation remonte à une décision du général de Gaulle et je ne voudrais pas que vous soyez celui qui remettra en cause cette décision originelle. Or, je viens d'apprendre, par un courrier adressé au préfet de mon département, que le préfet de police a décidé de ramener ces troupes à Paris le 1er septembre 2011 pour surveiller Orly, comme si les sapeurs-pompiers de Lacq étaient, à eux seuls, capables de régler tous les problèmes des différents aéronefs et aéroports de Paris ! Vous le savez, nous avons demandé à ce que ce départ coïncide avec l'extinction de l'exploitation du gisement de Lacq.
Pour résumer, je souhaite donc que vous nous donniez satisfaction sur la nomination du directeur et le SDACR. J'espère aussi que vous répondrez au souhait de voir le corps des sapeurs-pompiers de Lacq partir du Béarn seulement à compter du 1er septembre 2012.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que le temps de parole est de deux minutes par question. Je vous remercie de bien vouloir le respecter !
Dans un premier temps, je souhaite relayer la préoccupation, que nous sommes nombreux à partager sur ces bancs, quant au financement des services incendie. Au niveau de la France tout entière, la situation paraît difficilement tenable : d'un côté, les SDIS ne maîtrisent pas leurs recettes et doivent répondre à un cahier des charges opérationnel défini en partie par les préfets ; de l'autre, les départements sont confrontés à une demande croissante de subventions dont ils ne peuvent pas piloter l'emploi.
À Saint-Pierre et Miquelon, la situation est encore plus complexe, puisque le financement des services incendie a été intégralement transféré aux communes au détour d'un amendement à la loi organique statutaire du début 2007 déposé par mon prédécesseur. Cette situation non plus n'est pas tenable ; elle devra être revue dans le cadre d'une réforme globale du financement des services d'incendie et de secours.
Dans un second temps – particulièrement important – je souhaite attirer votre attention sur les conditions de travail des sapeurs-pompiers volontaires. En effet, à Saint-Pierre et Miquelon, ceux-ci, quand ils exercent dans le privé, ne peuvent pas être assurés par les communes, puisque le code des assurances impose le recours à un assureur domicilié sur le territoire, lequel n'existe tout simplement pas chez nous !
En mai 2009, avec Mme la maire de Saint-Pierre, nous avions saisi le ministère de l'intérieur, celui de l'économie et celui des outre-mer de ce problème essentiellement réglementaire. Nous n'avons, à ce jour, monsieur le ministre de l'intérieur, obtenu aucune réponse. Au nom de tous ces pompiers bénévoles, je vous demande de nous donner une réponse aujourd'hui.
La parole est à M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.
En ce qui concerne la question de M. Derosier, la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, place l'emploi au coeur des enjeux de la solidarité nationale. Les employeurs publics se doivent bien entendu, à cet égard, d'être parfaitement exemplaires.
Il est toutefois vrai qu'une difficulté est apparue concernant les SDIS. Ceux-ci ne recrutent, en effet, en dehors des personnels administratifs et techniques, que des sapeurs-pompiers qui ont été sélectionnés sur les critères d'aptitude que l'on sait.
En outre, ne pouvaient être intégrés aux effectifs déclarés au fonds pour l'insertion des personnels handicapés dans la fonction publique que les sapeurs-pompiers reclassés sur un poste non opérationnel au sens strict de l'article 72 de la loi de modernisation de la sécurité civile, créant le « projet de fin de carrière ». Or la majorité des reclassements des sapeurs-pompiers inaptes se fait sur des postes adaptés mais conservant une fonction opérationnelle, par exemple les opérateurs des centres de traitement de l'alerte et des centres opérationnels départementaux d'incendie et de secours, les CTA-CODIS.
À la demande de Brice Hortefeux, le ministre de la fonction publique et des comptes publics vient d'accepter un assouplissement qui, par une circulaire toute récente, en date du 26 octobre 2009, a été porté à la connaissance des SDIS.
Ceux-ci pourront désormais comptabiliser au titre de leurs obligations d'emploi de travailleurs handicapés l'ensemble des sapeurs-pompiers professionnels bénéficiant d'une affectation non opérationnelle et plus seulement ceux intégrant les « projets de fin de carrière ».
Monsieur Habib, je voudrais vous rappeler que le schéma départemental d'analyse et de couverture du risque est adopté après avis conforme du conseil d'administration.
Sur la décision conjointe que vous évoquez, il y a effectivement un double aspect administratif et opérationnel : il y a donc un double processus de nomination ; le préfet et le président du conseil d'administration du SDIS sont tous deux compétents : il y a là un principe d'équilibre essentiel.
Quant au détachement des sapeurs-pompiers de Paris sur le site de Lacq, ce renfort a été mis en place en 1959, compte tenu de la nature tout à fait particulière de ce site.
La situation actuelle est, vous en conviendrez, fondamentalement différente, dans la mesure où la départementalisation a permis de créer un SDIS en mesure de répondre aux risques ; c'est notamment le cas à Lacq. L'exploitant a par ailleurs développé un service interne de pompiers d'entreprise en mesure de réagir efficacement.
La fin de l'exploitation industrielle prévue au début de l'année 2013 ne justifie donc plus la présence d'un détachement des sapeurs-pompiers de Paris, qui par ailleurs doit faire face à de nouvelles missions.
Compte tenu de cette situation, il a été décidé, en plein accord avec les autorités locales…
…de rapatrier ce détachement sur Paris au mois de septembre 2011. Cette mesure, qui a été soigneusement planifiée et préparée, sous l'autorité du préfet du département, avec le SDIS 64, assure donc une transition qui garantit la sécurité de la population comme celle de l'exploitation.
Madame Girardin, vous nous interrogez sur la situation à Saint-Pierre et Miquelon. Deux missions d'inspection de la sécurité civile ont été menées en 2006 et 2008 afin d'analyser la mise en conformité du dispositif de sécurité civile à Saint-Pierre et Miquelon.
Ces missions ont permis de définir précisément les travaux à mener pour remettre à niveau l'organisation en place. Un certain nombre de recommandations ont été faites, portant notamment sur les textes réglementaires, la formation des personnels, la prévention et le contrôle des établissements recevant du public. Un officier sapeur-pompier professionnel a été recruté, sur le budget de l'État, en septembre 2009, afin de préparer en concertation ces mesures urgentes.
Parallèlement, des actions sont en cours pour développer un partenariat avec l'hôpital et l'aéroport, ainsi que pour améliorer la couverture sociale des sapeurs-pompiers volontaires, mais aussi les moyens et la formation de ces personnels. Enfin, je vous confirme que la préfecture sera dotée en 2010 de moyens de transmissions modernes afin de pouvoir remplir efficacement ses missions.
Nous en arrivons à trois questions du groupe GDR.
La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.
Je voudrais tout d'abord saluer la qualité du rapport de nos collègues sur le sujet complexe de l'organisation des Services d'incendie et de secours, auxquels les Français sont, à juste titre, très attachés.
Le sujet est technique, mais aussi politique. On ne peut comprendre la réalité des choses sans se pencher sur le problème majeur du financement de ces services. Avec le transfert de compétence vers le département, on note un désengagement massif de l'État du financement des sapeurs-pompiers et de leurs équipements, financement qui revient donc en grande majorité aux départements et aux communes. Ce n'est pas le président Derosier, je pense, qui me contredira !
Il est un peu trop facile de laisser aux élus locaux le soin de gérer les conflits sociaux qui peuvent apparaître consécutivement à ces difficultés de financement. Le vrai problème, c'est bien le désengagement de l'État.
Contrairement à ce qui est proposé dans le rapport, j'estime que la solution ne passe pas par la fiscalisation des services d'incendie et de secours. Nous pouvons parfaitement financer le service public sans faire payer encore et toujours les citoyens, en trouvant de nouveaux types de financement : les profits des entreprises créatrices de risques, des sociétés autoroutières, des sociétés d'assurance, pourraient être mis à contribution, comme c'est le cas au Portugal, par exemple.
Un fonds de péréquation pourrait être abondé par ces taxes, pour harmoniser les moyens des différents SDIS et assurer une égalité des citoyens sur tout le territoire.
Monsieur le ministre, je voudrais avoir votre sentiment sur, d'une part, le désengagement de l'État du financement des SDIS et, d'autre part, la possibilité de création d'un fonds de péréquation abondé par les taxes que j'ai évoquées.
Les SDIS font l'objet de toutes les critiques, l'évolution de leur budget de fonctionnement étant systématiquement désignée comme la source de toutes les dérives budgétaires.
Mais peuvent-ils faire autrement, depuis la loi de 1996 sur la départementalisation des services d'incendie et de secours, depuis la loi du 13 août 2004 modernisant la sécurité civile, et sous l'effet de l'augmentation continue du nombre d'interventions ?
Les statistiques visibles sur le site du ministère de l'intérieur indiquent une hausse de 2 % des interventions pour l'année 2008 par rapport à l'année précédente. En tout état de cause, le nombre des interventions ne cesse d'augmenter depuis 2004.
La participation de l'État au financement de la sécurité civile, en revanche, décroît : d'après ces mêmes statistiques, elle est passée, de 131 millions d'euros en 2006 à 85 millions en 2008.
Moins de budget, moins d'effectifs, plus d'interventions : le désengagement de l'État risque de se traduire par une réduction de la capacité d'intervention des services de sécurité.
Sachant que le nombre de volontaires baisse lentement mais sûrement depuis 2004, ma question est simple : quelle sera la capacité de réaction de la sécurité civile si le volontariat ne pallie pas la baisse des effectifs ?
L'inflation des coûts constatés des services d'incendie et de secours pose la question de leur gouvernance.
Je suis d'accord pour dire qu'il faut parvenir à une prise en charge complète des SDIS par les conseils généraux, en allant au bout de la démarche de départementalisation – et en assurant les financements, faute de quoi il faudrait se poser la question de la reprise en main par l'État de cette compétence.
L'échelon départemental peut être un échelon pertinent d'organisation, et il convient d'appliquer le principe « qui paie commande », en respectant le principe d'autonomie des collectivités. En disant cela, je ne prétends d'ailleurs nullement nier le rôle de l'État, qui doit agir à travers le pouvoir réglementaire. Mais il est parfaitement possible de rendre les conseils généraux responsables des schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques, dans le cadre de règles nationales assurant une égalité des citoyens devant le service public.
Monsieur le ministre, j'ai beaucoup de respect pour l'initiative parlementaire, mais je connais aussi les moyens dont peut disposer le Gouvernement.
Je voudrais savoir si, dans le maquis actuel des compétences et des normes réglementaires ou législatives, le Gouvernement envisage de clarifier la compétence sur les SDIS, en la confiant aux conseils généraux. Il s'agit de confier aux présidents des conseils généraux une responsabilité pleine et entière sur leur SDIS, tant pour la gestion qu'en matière opérationnelle.
Le rapport d'information fait un certain nombre de propositions en ce sens. Quelles sont celles qui retiennent votre intérêt ?
Monsieur Vaxès, monsieur Candelier, vos questions sont liées.
S'agissant du financement, il est vrai que la départementalisation des SDIS a transféré une compétence qui appartenait jusque-là, historiquement, aux communes. Il paraît donc difficile d'évoquer le désengagement de l'État – même si j'ai vu que le président Derosier approuvait vos propos, ce qui prouve qu'il s'est ressaisi par rapport aux encouragements qu'il m'avait réservés il y a quelques minutes… – car cette compétence s'est toujours exercée dans un cadre de large subsidiarité.
Des progrès, j'en suis bien convaincu, peuvent être réalisés. Mais reconnaissez qu'avec la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, que j'évoquais tout à l'heure, avec la Commission consultative d'évaluation des normes, l'État a tout de même rompu avec ses pratiques passées.
Des propositions ont été formulées, consistant à mieux associer ceux qui sont à l'origine des risques, ou qui bénéficient directement des investissements publics, au financement de la couverture de ces risques. Vous avez cité des modèles économiques utilisés dans d'autres États de l'Union européenne ; certains ont déjà été introduits en France depuis 2002, notamment par la loi relative à la démocratie de proximité. Je pense ainsi aux interventions en cas de carence des ambulanciers privés, que j'évoquais tout à l'heure, ou aux interventions sur autoroute.
Je vous le dis donc très simplement : le Gouvernement ne voit pas d'objection de principe à la voie que vous envisagez, qui pourra être approfondie par exemple au sein de la Conférence nationale, afin de déterminer si elle est techniquement capable de susciter un consensus.
Monsieur Vaxès, vous avez évoqué le volontariat. Commençons par préciser que la participation de l'État au financement de la sécurité civile ne se limite pas au financement des seuls SDIS ; il faut aller plus loin. Pour s'en tenir au volontariat, il convient de rappeler les 32 millions d'euros que l'État dépense chaque année pour abonder la dotation globale de fonctionnement des départements au titre de la prestation de fidélisation et de reconnaissance allouée aux vétérans, ainsi que les 20 millions d'euros que représente la non imposition des vacations. Ce sont des mesures de justice auxquelles l'État prend toute sa part ; elles ont, c'est vrai, un caractère indirect et sont de ce fait moins visibles, mais elles n'en sont pas moins réelles.
Vous évoquez le volontariat et son rôle indispensable. Ce sujet a été très largement évoqué au congrès de Saint-Étienne. Le volontariat, heureusement, n'est pas en danger : depuis dix ans, les 200 000 volontaires constituent un effectif relativement stable.
Ce n'est pas tout à fait vrai : regardons les durées d'engagement, par exemple.
Il faut, naturellement, demeurer très vigilant : c'est une sorte de miracle, un peu fragile, mais c'est une réalité, alors que nous voyons tous que l'individualisme, l'égoïsme, l'égocentrisme font que les causes collectives sont aujourd'hui moins mobilisatrices.
Pourtant, 30 000 cadets intègrent les associations de jeunes sapeurs-pompiers : c'est le signal d'une relève tonique.
Nous sommes partisans, je l'ai dit tout à l'heure, de faire du volontariat la grande cause de la sécurité civile. Il ne faut naturellement pas opposer volontaires et professionnels – d'autant que la moitié des professionnels sont aussi des volontaires. Comme vous le savez, 80 % des effectifs des SDIS sont des volontaires : c'est une réalité durable de notre système de sécurité civile. La commission « Ambition volontariat » a proposé deux axes d'action : souplesse et reconnaissance. Ce sont ces orientations, mises en avant par le rapport Ferry, que le Gouvernement entend retenir pour 2010.
S'agissant du pilotage des SDIS, j'ai rappelé tout à l'heure que le principe de subsidiarité instauré entre les collectivités locales et l'État devait rester notre référence commune. Ne cédons pas au manichéisme ; ce serait trop facile en ce domaine. Vous évoquez les schémas départementaux d'analyse et de couverture du risque : je crois utile et important de répéter qu'ils ne sont arrêtés par les préfets qu'après un vote conforme du conseil d'administration du SDIS. Les élus disposent donc, dans le cadre juridique actuel, des moyens de construire les politiques de proximité qu'ils entendent mettre en oeuvre au service de la population.
Pour autant, les outils de planification doivent évidemment être modernisés. Plusieurs chantiers ont commencé : classement des SDIS ; cadre réglementaire fixant le classement et la conformation opérationnelle des centres d'incendie et de secours ; indicateurs nationaux, zonaux et régionaux d'efficacité, qui permettent une autoévaluation des politiques départementales.
Ces orientations, dont certaines ont été fortement préconisées par la mission d'évaluation et de contrôle, ont donc été pleinement entendues par le Gouvernement.
Nous en arrivons aux questions du groupe Nouveau Centre.
La parole est à M. Charles de Courson.
Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, la MEC s'est longuement penchée sur la question toute simple de la gouvernance : a-t-on une bonne gouvernance des SDIS ? À l'unanimité, la réponse a été non.
Nous sommes le seul État dans lequel les services d'incendie sont partagés entre une compétence opérationnelle, qui relève de l'État et des maires – en réalité de l'État, car la responsabilité des maires a pratiquement disparu – et les SDIS. En effet, contrairement à ce que j'entends, on n'a pas départementalisé, on a « sdisisé », c'est-à-dire qu'on a transféré des compétences des communes ou des intercommunalités à un établissement public appelé SDIS.
Cela pose un vrai problème, d'autant que si le budget de l'État a prévu 427 millions sur la mission « Sécurité civile », le budget des SDIS atteint 4 milliards. Grosso modo, l'État finance 10 % de la fonction. Est-il normal de maintenir une telle organisation ? À cette question, nous avons répondu non, à l'unanimité.
Il faudrait faire simplement comme dans toutes les grandes démocraties : les autorités locales, à travers le SDIS ou le département – on peut discuter là-dessus –, sont responsables de l'ensemble ; l'État garde une fonction de coordination nationale ; et en cas de grand péril, plan rouge, plan Orsec, il reprend le manche, si je puis dire, pour coordonner et faire appel éventuellement à plusieurs SDIS. Cette position que préconise la mission nous paraît pleine de sagesse et surtout conforme aux idées décentralisatrices du groupe Nouveau Centre.
Dans votre discours, vous avez affirmé, monsieur le ministre, que des progrès avaient eu lieu, notamment grâce à la CNSIS. En réalité, le dispositif a dérivé. Je faisais partie de la délégation qui a obtenu du ministre de l'intérieur de l'époque, un certain Nicolas Sarkozy, la création d'une conférence. Mais initialement, notre demande portait sur la réunion d'une dizaine seulement d'élus des cent présidents de SDIS, avec les représentants du ministère de l'intérieur, pour traiter de nos affaires. Puis la chose a dérivé et on a ajouté les partenaires sociaux : la CNSIS est ainsi devenue une sorte de commission administrative paritaire, ce qui n'était pas du tout l'idée initiale.
Au fil des textes successifs, nous avons adopté des mesures qui allaient dans le sens d'une décentralisation, mais ces avancées sont insuffisantes, et nous ne sommes pas allés au bout de la réforme.
Il faut revoir le mode actuel de gouvernance des SDIS en confiant aux présidents des conseils généraux la responsabilité de la gestion opérationnelle de ces services, en laissant à l'État le soin de coordonner les moyens au niveau national en cas de catastrophe majeure. Êtes-vous prêt à pousser cette réforme progressivement ?
Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur les conséquences de la réforme des collectivités locales sur le financement des SDIS.
Le volet fiscal de la réforme des collectivités locales, adopté par le Parlement à l'occasion du projet de loi de finances, a permis une remise à plat de la fiscalité locale en ne laissant plus aux conseils généraux que la taxe sur le foncier bâti.
Avec le gel des contributions du bloc communal au budget des services départementaux d'incendie et de secours, décidé par le Parlement et consacré par l'article 116 de la loi de finances rectificative pour 2008, se pose la question du financement de l'essentiel de l'augmentation, hors inflation, des budgets des SDIS, qui est de l'ordre de 6 % par an en moyenne.
Dès lors que le département ne dispose plus que d'un seul impôt pour répercuter cette hausse, la question est en réalité celle de la capacité de l'impôt sur le foncier bâti à absorber chaque année cette hausse. En réalité, la hausse continue des budgets des SDIS laisse augurer d'une pression importante sur les taux de cet impôt.
Deux solutions peuvent alors être envisagées. La première réside dans une augmentation de la part de la contribution complémentaire versée aux départements. La seconde pourrait être la mise en place d'une taxe additionnelle aux impôts locaux affectée aux SDIS, sur le modèle de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
Le Gouvernement entend-il soit prendre des mesures d'accompagnement en direction des conseils généraux, du fait des répercussions sur le mode de financement des SDIS de la réforme de la taxe professionnelle, soit fiscaliser les SDIS ?
Le décret du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail des sapeurs pompiers professionnels encadre le temps de travail annuel des sapeurs pompiers professionnels en disposant que celui-ci ne peut, depuis le 1er janvier 2005, être inférieur à 2 160 heures ni supérieur à 2 400 heures.
Cette durée annuelle du temps de travail est cependant fonction d'un régime d'équivalence entre temps de garde et temps d'intervention. En moyenne nationale, l'application de la règle des équivalences aboutit à ce que le temps de travail d'un sapeur-pompier professionnel corresponde à quatre-vingt-dix jours travaillés par an, pour ceux bien sûr qui travaillent par périodes de vingt-quatre heures, selon les chiffres avancés par la direction de la sécurité civile.
Pour autant, ce régime d'équivalence est sujet à de très fortes variations d'un département à l'autre dans la mesure où il est fixé par délibération du conseil d'administration, sans que l'encadrement des taux d'équivalence soit très strict.
Dès lors, deux questions se posent.
D'une part, alors que le régime des équivalences a fait, sous la précédente mandature, l'objet d'âpres discussions entre le Conseil et le Parlement européens, n'y a-t-il pas lieu de revoir ce système des équivalences pour mieux l'encadrer au niveau national ?
D'autre part, certains contestent le système des gardes de vingt-quatre heures – c'est le cas du rapporteur qui l'a longuement évoqué tout à l'heure – en raison du faible nombre d'interventions la nuit et de la faiblesse du temps opérationnel journalier. Ils proposent ainsi des gardes ramenées à douze heures. En tant que président de SDIS depuis vingt-deux ans – sans doute suis-je le dernier député à avoir une telle longévité…
…puisque notre collègue Derosier a repris la présidence de son SDIS mais il n'y a pas très longtemps – je voudrais connaître la position du Gouvernement sur ce problème : est-il favorable au maintien du système vingt-quatrequarante-huit heures ou à l'instauration du système dit des douze heures, voire des huit heures ?
Monsieur de Courson, votre première question portait sur la gouvernance. Je rappelle que la départementalisation actée par la loi de 1996,…
…et confortée par la loi de modernisation de la sécurité civile en 2004, n'a pas remis en cause le caractère historiquement local de notre dispositif de sécurité civile. L'engagement citoyen qui fonde le volontariat et le rôle du maire en tant que directeur des opérations de secours de droit commun sont toujours au coeur de notre organisation.
Le rôle du maire n'est en rien effacé. Les maires siègent au sein des conseils d'administration et certains en assurent même la présidence. C'est précisément ce conseil d'administration qui vote le budget de l'établissement public et qui émet un avis conforme sans lequel le représentant de l'État ne peut arrêter le SDACR.
Sans doute, des progrès doivent-ils encore être faits pour que l'État donne aux élus locaux les outils de pleine gouvernance qu'ils souhaitent. Beaucoup a déjà été fait ; notamment dans le cadre de la conférence nationale des services d'incendie et de secours. Beaucoup, j'en conviens, reste à faire et sera fait.
Les SDIS viennent de fêter leur dixième anniversaire, c'est encore un âge très tendre. Les accompagner avec détermination et constance vers la maturité apparaît préférable à un nouveau bouleversement institutionnel, lequel, à lui seul, ne garantirait d'ailleurs pas la réalisation de l'objectif de bonne gouvernance qui rassemble le législateur et le Gouvernement.
J'en viens à la question de M. Vigier.
Les budgets des SDIS font bien sûr l'objet de toute l'attention du Gouvernement, qui d'ailleurs en rend compte annuellement à la représentation nationale dans le cadre de la loi de finances.
Des éléments de régulation au service des élus locaux ont été mis en oeuvre. Aucun acte réglementaire touchant à l'organisation des SDIS n'échappe à l'avis préalable de la conférence nationale des services d'incendie et de secours ainsi que de la commission consultative d'évaluation des normes. En 2004, lors du vote de la loi de modernisation de la sécurité civile, le Gouvernement s'était politiquement engagé à ne jamais déroger aux avis des élus locaux représentant les départements et les communes au sein de la CNSIS. Cet engagement a été tenu, sans aucune exception. En outre, les indicateurs mis en place par l'État s'affinent d'année en année, vous en conviendrez. Les premiers budgets pour 2010 votés dans les départements confirment que ces régulations sont à l'oeuvre à peu près partout.
Le Gouvernement entend continuer à accompagner les élus locaux dans la tâche difficile qui est la leur en matière budgétaire, notamment en conduisant les réformes qui se révèleront nécessaires afin de rationaliser l'organisation opérationnelle, et d'alléger les charges qui, sans toucher à la sécurité, peuvent être encore assouplies. Il n'entend pas remettre en cause, au travers de la réforme des collectivités locales, l'architecture encore toute récente des SDIS.
S'agissant de la seconde question de M. de Courson, la commission d'évaluation prévue par le décret de 2001 sur le temps de travail des sapeurs-pompiers a rendu son rapport l'an dernier. Les élus ont unanimement considéré que le régime souple instauré par le décret, et qui permet localement d'adapter les cycles de travail aux besoins de la couverture opérationnelle, devait être maintenu.
Il convient d'observer dans ce cadre que les départements qui utilisent exclusivement le cycle de gardes de vingt-quatre heures sont aujourd'hui devenus très minoritaires. A contrario, les régimes pluriels, qui combinent les modalités que rend toutes possibles le décret de 2001, deviennent très majoritaires dans l'ensemble du territoire.
S'agissant de l'aspect communautaire, le Gouvernement suit avec une grande attention les débats européens, tout en constatant qu'à ce jour le consensus pour réformer la directive ne s'est pas dégagé. Quelle que soit l'évolution future des positions communautaires, le Gouvernement entend, s'agissant des sapeurs-pompiers, n'acter aucune évolution qui ne serait d'abord étroitement concertée avec tous les acteurs locaux concernés par ce problème.
Nous en revenons à une question du groupe UMP.
La parole est à M. Jean-François Mancel.
Monsieur le ministre, ce doit être la troisième législature où je dépose la même proposition de loi tendant à étatiser les services départementaux d'incendie et de secours.
Les raisons sont multiples, comme le prouve d'ailleurs ce débat ainsi que l'excellent rapport de la mission d'évaluation et de contrôle.
D'abord, parce que nous sommes dans une situation de confusion généralisée, qui découle naturellement du commandement des opérations, assuré par l'État, et du financement, assuré par les collectivités territoriales. C'est une situation d'enchevêtrement, de financements croisés excessivement néfaste, qui, à mon avis, ne permettra jamais de solution positive.
Ensuite, parce que la départementalisation n'a pas été jusqu'à son terme, ce qui amène, aujourd'hui, à des situations assez baroques. Je préside une communauté de communes, je verse chaque année une certaine somme pour le financement des sapeurs-pompiers – 1,2 million d'euros cette année – et je n'ai aucun droit à dire quelque chose. Nous ne sommes même plus invités aux voeux des sapeurs-pompiers des centres de secours qui nous concernent. (Murmures sur de nombreux bancs.)
Cela fait cher le verre de champagne que nous n'avons pas…
Cette situation pose un réel problème. D'autant que la sécurité civile, avec la complexité, la gravité, l'importance qu'elle a aujourd'hui, n'est pas – je le dis à certains de mes collègues qui viennent de s'exprimer sur ce sujet – une compétence de collectivité territoriale. C'est une véritable compétence d'État, une compétence pleinement régalienne.
S'agissant du financement, j'ai bien conscience qu'un transfert de 4,5 milliards à l'État poserait problème. Mais nous pourrions trouver des solutions de sortie.
Que ce soit sur une longue durée ou sur un échange de compétences, nous pourrions envisager une remontée de la compétence sécurité civile vers l'État et une descente de compétences plus concrètes, au quotidien, vers nos concitoyens, à travers les collectivités territoriales.
Ma question est la suivante : nous allons, en 2010, débattre de la réforme des collectivités territoriales, nous allons débattre sans doute avec beaucoup de passion de la compétence générale et de la compétence spéciale pour certaines collectivités, et, si j'ai bien compris, l'année suivante, nous reverrons la répartition des compétences. Êtes-vous prêt à rouvrir le débat, l'année suivante, sur la répartition des compétences en matière de services départementaux d'incendie et de secours ?
Votre question, monsieur Mancel, a au moins le mérite de rappeler à l'Assemblée votre grande ténacité puisque c'est une conviction que vous réaffirmez sans cesse ! (Sourires.)
La départementalisation a été actée par la loi de 1996 et confirmée par celle de 2004. Aucun de ces textes n'a remis en cause le caractère historiquement local de notre dispositif de sécurité civile. La loi de 2004 reste donc notre référence commune. Certains opposent la compétence étatique à la libre administration locale. La subsidiarité est un élément de réponse.
Parallèlement, l'État a entendu les demandes des élus locaux qui souhaitent être mieux associés aux décisions réglementaires qui ont des conséquences sur l'organisation opérationnelle. Au plan local, le SDACR ne peut être arrêté par le préfet sans un vote conforme du conseil d'administration des SDIS. Depuis 2005, les élus de la conférence nationale ont émis un avis sur tous les actes réglementaires et il n'est aucun avis des élus des départements et des communes qui n'ait été suivi par le Gouvernement.
L'État a également entendu les demandes des élus qui souhaitent disposer de plus d'outils de pilotage. La mise en oeuvre d'indicateurs d'efficience a ainsi été réalisée depuis trois ans.
Je puis en outre vous apporter deux éléments de réponse, monsieur Mancel. Premièrement, le Gouvernement n'entend pas modifier les grands équilibres issus des lois de 1996 et 2004. Deuxièmement, la compétence étatique que vous évoquez n'a en réalité jamais été exercée, puisque c'était toujours une compétence locale. Il me paraît donc malheureusement difficile, quelque envie que j'en aurais, de vous suivre sur ces propositions.
C'est vrai !
Mais, depuis que vous ne vous occupez plus directement de la fonction publique territoriale, vous avez pris de mauvaises habitudes…
Pour revenir à notre sujet, vous avez justifié votre opposition à notre souhait que les élus assument complètement leurs responsabilités en arguant qu'en cas de catastrophes, seul le préfet peut coordonner l'ensemble des services qui interviennent. Eh bien, monsieur le ministre, vous avez raison ! C'est d'ailleurs notre proposition numéro 3 : nous voulons recentrer les pouvoirs du préfet en matière de sécurité civile, réserver son action à la coordination des secours en cas de crise et à la coordination de l'action des SDIS avec les autres services publics.
Mais, et vous l'avez évoqué, il y a des domaines où les présidents de SDIS pourraient avoir la responsabilité pleine et entière. Prenons le cas du schéma départemental d'analyse et de couverture des risques, dont nous considérons qu'il est à l'origine de l'inflation en matière de budget des SDIS. Pourquoi ne laissez-vous pas les SDACR, ainsi que les schémas opérationnels qui en découlent, sous la seule et entière responsabilité des présidents des SDIS ? Pour l'instant, les SDIS se contentent de donner un avis et le préfet, en votre nom, fait ce que bon lui semble en matière de rédaction du SDACR.
Je prendrai un autre exemple dans nos propositions, qui va aussi dans le sens de la responsabilité pleine et entière des élus : il s'agit de la proposition numéro 12, qui vise à faire du directeur et de son adjoint des emplois fonctionnels. Ce serait le moyen parfait – c'est en tout cas le souhait de la mission – d'assurer la responsabilité directe et réelle des élus sur le fonctionnement des SDIS.
Voilà, monsieur le ministre, deux propositions que vous pourriez retenir et mettre en oeuvre par tous les moyens à votre convenance.
J'en viens au dernier volet de ma question. Les sapeurs-pompiers utilisent, pour leurs interventions, des moyens de communication. La loi d'août 2004 a posé le principe de l'interopérabilité des réseaux de communication des services publics qui concourent aux opérations de sécurité civile, prémices du réseau ANTARES. Depuis lors, les SDIS ont dû se doter des équipements nécessaires au raccordement à ce nouveau réseau, dans le cadre des dispositions fixées par un décret de février 2006.
Monsieur le ministre, les acteurs étant plusieurs à utiliser ANTARES – la police nationale, le SAMU, la gendarmerie, les SDIS – ma question est simple : qui va financer le fonctionnement et l'entretien des infrastructures du réseau ANTARES, et selon quelles modalités de calcul ? J'attends votre réponse avec une certaine impatience…
Votre interrogation, monsieur le député, comporte plusieurs éléments.
Il est exact que le maire ou le préfet, en cas de catastrophe – vous avez souligné le rôle possible du préfet, et je partage votre sentiment – sont, de par la loi, directeurs des opérations de secours. À cet effet, ils dirigent l'ensemble des services intervenants, soit les pompiers, la police, la gendarmerie, le SAMU. Ceci explique cette organisation fonctionnelle et permet selon moi de conclure que le commandement n'est pas divisible. Or je crains que votre proposition n'entraîne précisément une telle division.
Ensuite, les règles sur les schémas que vous évoquiez vont, sous couvert du directeur de la sécurité civile, du préfet Perret, être revues…
Non, dans les semaines qui viennent, ces règles seront revues pour être adaptées au mieux aux besoins de la population. Naturellement, il faudra que ce délai, indiqué devant l'Assemblée nationale, soit respecté – mais je sais que vous y serez très attentif.
Enfin, la réalisation des infrastructures ANTARES est engagée à plus de 70 % et conforme au plan prévisionnel qui a été fixé. L'adhésion des SDIS témoigne de la pertinence de l'engagement volontariste de l'État pour accroître la qualité des moyens de secours et apporter les performances du numérique sur l'ensemble du territoire, ce qui constitue – le président Terrasse ne me contredira sans doute pas – une attente des départements les plus ruraux.
À titre d'exemple, les interventions de secours aux personnes, qu'elles soient urbaines ou rurales, bénéficient de la télétransmission numérique des informations vers les structures d'accueil, et des expérimentations sont d'ores et déjà engagées.
Voilà les réponses que je peux vous apporter, monsieur Derosier, même s'il reste une marge de progression.
La discussion sur le budget de la mission « Sécurité civile », dans le cadre du projet de loi de finances, ne s'est pas faite l'écho du malaise des sapeurs-pompiers, qu'ils soient volontaires ou professionnels. Ce malaise est dû à la dégradation des conditions d'exercice, à de sérieuses difficultés dans l'organisation du travail, à la trop faible reconnaissance de la pénibilité de leur tâche, encore accrue par l'allongement des carrières. Autant de thèmes qu'il est important d'évoquer, tant notre système de sécurité repose sur l'engagement volontaire de ces femmes et de ces hommes, qui méritent une meilleure reconnaissance.
Or la départementalisation a paradoxalement pour effet de faire progressivement perdre aux sapeurs-pompiers les acquis du statut d'agents de la fonction publique, alors même que la loi de 1996 devait leur permettre d'avoir une évolution de carrière attrayante. Soulignons, par exemple, le manque d'attractivité du dispositif de fin de carrière : seuls 3,5 % des agents éligibles en ont bénéficié.
Concernant le temps de travail, les SDIS demandent la modification du troisième alinéa du décret de 2001 qui fixe à 2 400 heures le maximum annuel des heures de travail des sapeurs-pompiers. Ils revendiquent que soit institué un maximum de quarante-huit heures par semaine, conformément aux textes européens. Qu'envisagez-vous à ce sujet ?
Enfin, comptez-vous, comme le préconise le rapport, suivre les avis de la conférence nationale des services d'incendie et de secours – dans laquelle les organisations syndicales de sapeurs-pompiers doivent être correctement représentées, ce qui, semble-t-il, n'a pas toujours été le cas –, sur les projets législatifs ou réglementaires préparés par la direction de la sécurité civile ?
L'étude de la pénibilité fait partie des chantiers ouverts par la direction de la sécurité civile. Une étude scientifique, d'une ampleur sans précédent, y compris au plan européen, a été engagée l'an dernier, en partenariat avec le monde universitaire et la Caisse des dépôts et consignations. Elle vise à objectiver ce dossier sur lequel chacun a une opinion, mais aussi sur lequel bien peu disposent de données objectives.
S'agissant du temps de travail, les élus locaux de la conférence nationale des services d'incendie et de secours ont adopté le rapport d'application que prévoyait l'article 6 du décret de 2001, sur lequel le Gouvernement n'entend par revenir. Le ministre de l'intérieur ne souhaite donc pas mettre ce dossier à l'agenda, contre l'avis des décideurs locaux. Il l'a indiqué à chacune des grandes organisations professionnelles représentatives, à qui il a accordé audience à plusieurs reprises depuis sa prise de fonction.
Enfin, ces audiences, individuellement accordées à chacune des six organisations professionnelles représentatives des sapeurs-pompiers professionnels, ainsi qu'aux structures associatives représentant les volontaires et à l'encadrement supérieur du corps, suffisent, me semble-t-il, à démontrer l'attention particulière que le Gouvernement, et notamment le ministère de l'intérieur, ont souhaité accorder au dialogue permanent avec les sapeurs-pompiers.
Les services départementaux d'incendie et de secours n'ont pas simplement une compétence en matière de prévention, de protection et de lutte contre les incendies ; ils ont aussi vocation à assurer, avec d'autres services et d'autres professionnels concernés, la protection et la lutte contre les autres accidents, sinistres ou catastrophes.
De fait, le répertoire des interventions des sapeurs-pompiers s'est considérablement élargi ces dernières années, expliquant ainsi, au moins pour partie, l'augmentation des coûts des SDIS. Aux activités traditionnelles de lutte contre les incendies, se sont jointes des activités de premier secours aux personnes, partagées avec les SAMU, les SMUR, les hôpitaux, parfois même la gendarmerie. Dès lors, la maîtrise du coût de fonctionnement des SDIS passe par la recherche de meilleures mutualisations entre l'ensemble des acteurs concourant à une même mission. Cet effort de mutualisation passe, comme l'ont déjà expérimenté quinze départements, par la création de plates-formes d'appel communes au 15 et au 18, dans un vrai souci de rationalisation des moyens.
Plus largement, on peut imaginer à l'avenir que ces plates-formes téléphoniques associent non seulement des pompiers et des urgentistes, mais aussi des gendarmes, des policiers et des membres des services directement gérés au niveau national par la direction de la sécurité civile, tels les démineurs. Comme vous pouvez le constater, monsieur le ministre, c'est une sorte de RGPP que l'on pourrait mettre en place.
Le Gouvernement entend-il encourager la généralisation de telles plates-formes communes, génératrices d'économies de coûts de fonctionnement et d'efficacité au quotidien ?
La création de plates-formes communes de réception et de traitement des appels d'urgence – pour le 15, le 18 et le 112 – est à l'évidence l'une des modalités de rationalisation et, j'en suis convaincu, d'amélioration du service rendu à la population par les services publics en charge de la distribution de secours d'urgence. Il existe d'ailleurs à ce jour vingt et une plateformes. Nous étions ensemble, avec le docteur Bacquet, à l'inauguration de celle de Clermont-Ferrand, voici environ deux mois. Le nombre de ces plateformes, parce qu'elles sont utiles et efficaces, sera certainement amené à augmenter.
Leur mise en place réussie doit relever d'un projet local partagé par l'ensemble des acteurs. Lorsque cette condition est réalisée, l'État apporte son soutien, comme il l'a toujours fait et continuera de le faire, notamment grâce au concours du Fonds d'aide à l'investissement dont j'ai tout à l'heure évoqué le rôle.
Je partage donc tout à fait votre analyse et votre sentiment.
Le débat est clos.
Mes chers collègues, compte tenu de l'heure tardive, il n'a pas semblé convenable au Gouvernement de commencer, maintenant, le débat suivant.
M. le président de l'Assemblée a été informé de cette situation. Il lui appartiendra de convoquer éventuellement la conférence des présidents pour voir quelle suite il donnera au débat que nous devions tenir ce soir.
Prochaine séance, mercredi 9 décembre 2009 à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Déclaration du Gouvernement préalable au Conseil européen et débat sur cette déclaration ;
Projet de loi de finances rectificative pour 2009.
La séance est levée.
(La séance est levée, le mercredi 9 décembre 2009, à zéro heure vingt.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma