La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Monsieur le président, je souhaiterais avoir quelques informations sur l'organisation des débats inscrits à l'ordre du jour de cet après-midi. Nous allons discuter de deux rapports de la MECSS, l'un d'eux ne donnant lieu qu'à un échange de questions et de réponses, tandis que l'autre fera l'objet d'un vrai débat de discussion générale.
Or le premier concerne le médicament, un sujet particulièrement sensible après l'affaire du Mediator. Au nom du Nouveau Centre, j'aurais souhaité pouvoir faire une intervention intéressante et argumentée sur toute la politique du médicament. Se contenter de questions et réponses de deux minutes ne permettra pas d'aller au fond des choses. J'aimerais savoir la raison de cette différence de traitement.
Ce n'est pas à vous mais à moi de le faire, monsieur Mallot.
Monsieur Préel, nous sommes dans le cadre d'une semaine d'initiative parlementaire et la décision d'organiser ainsi les débats a été prise en Conférence des présidents, à la demande du groupe socialiste. S'agissant d'une semaine d'initiative parlementaire, la Conférence des présidents a suivi les initiateurs de cette demande.
Monsieur le président, ce sont deux rappels au règlement qui s'enchaînent. Je viens d'entendre votre réponse à notre collègue Préel, dont le point de vue est tout à fait fondé. La Conférence des présidents n'était pas obligée de suivre le point de vue qui a été formulé par l'un des groupes. Aussi sage et pertinent soit ce groupe habituellement, son opinion n'est pas bien orientée dans le cas particulier.
Sur cette affaire du médicament – et j'y reviendrai dans mon intervention ultérieure – il y a tellement d'anomalies, de non-dits, d'intérêts cachés, de consanguinité entre les milieux politique et économique, qu'il faut passer tout cela aux rayons X. Il faut que la clarté naisse de nos débats.
Monsieur le président, je me joins donc à notre collègue Préel, même si je sens bien que nos deux interventions ont un peu une tonalité de requiem.
Par ce rappel au règlement fondé sur l'article 58-1, je tiens à dire qu'il ne s'agit pas d'organiser un débat général sur le médicament ou sur le Mediator.
Une mission d'information est en cours sur l'affaire du Mediator, et M. Préel le sait parfaitement puisque nous y passons beaucoup de temps l'un et l'autre. Gérard Bapt, ici présent, préside cette mission dont Jean-Pierre Door est le rapporteur. Le moment venu, un document récapitulera nos constats et nos préconisations et il donnera probablement lieu à un débat dans cet hémicycle. Nous verrons.
Aujourd'hui, il s'agit de discuter d'un rapport de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, que je copréside avec mon collègue Pierre Morange, ici présent.
Ce rapport, remis en 2008, comporte quatre-vingt-douze préconisations extrêmement précises, dont tout le monde s'accorde à louer, depuis quelques semaines, la grande pertinence. Elles l'étaient déjà à l'époque, mais personne ne s'en était rendu compte. Si elles avaient été appliquées dès 2008, elles auraient probablement évité bien des désagréments.
Quoi qu'il en soit, nous avons souhaité organiser ce débat pour mettre en valeur ce rapport de la MECSS. Le mode d'examen retenu, question par question, permet de mettre l'accent sur telle ou telle proposition car il s'agit de faire un travail à partir du texte et non en amont de la réflexion de la MECSS.
Vos observations, messieurs Brard et Préel, seront transmises à la Conférence des présidents et au président de l'Assemblée nationale.
Cela étant, comme vient de l'expliquer M. Mallot, l'objectif ce déroulement des débats a été souhaité par le groupe socialiste, et tous les représentants des groupes – y compris le vôtre, monsieur Brard – l'ont accepté. Je ne doute pas qu'à l'issue des travaux en cours, il y ait un débat plus complet. En tout état de cause, les semaines d'initiative parlementaire sont à la liberté des groupes, et c'est ainsi qu'il en a été décidé.
L'ordre du jour appelle le débat sur le rapport de la mission d'information relatif à la prescription, la consommation et la fiscalité des médicaments.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, rapporteure de la mission d'information.
, rapporteure de la mission d'information. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, messieurs les coprésidents de la MECSS, Pierre Morange et Jean Mallot, mesdames et messieurs les députés, nous voici donc réunis pour débattre du rapport Prescrire moins, consommer mieux.
Présenté le 30 avril 2008 par la MECSS, ce rapport avait été adopté à l'unanimité de la commission des affaires sociales et soutenu par des acteurs de la chaîne du médicament désireux de transparence et de sécurité en la matière.
Alors, madame la secrétaire d'État, permettez-moi tout d'abord de pointer un premier dysfonctionnement qui concerne notre système démocratique. Comment un rapport adopté à l'unanimité et salué par les professionnels, excepté peut-être certaines firmes pharmaceutiques, a-t-il pu rester lettre morte pendant si longtemps ? Comment le combat politique peut-il amener une majorité, dans le cadre des PLFSS ou du débat sur la loi HPST, à rejeter des amendements émanant directement de préconisations que ses représentants ont soutenues au sein de la commission des affaires sociales ?
Comment ne pas s'indigner lorsque l'on entend M. le ministre Xavier Bertand – auquel je vous associe, madame la secrétaire d'État – fustiger régulièrement « cette gauche qui ne comprend rien, cette gauche qui ne propose rien » quand celle-ci attend depuis près de trois ans que vous preniez en compte des propositions ayant fait consensus ? Nous attendons des réponses.
Oui, mais c'est la gauche qui a déposé des amendements émanant des préconisations de ce rapport, monsieur Préel !
Si ce rapport refait surface, c'est bien évidemment parce que le contexte l'a imposé comme un élément du débat. Ce contexte a un nom qui résonne comme le titre d'un film d'épouvante : Mediator. Ce scandale sanitaire fait pourtant suite à bien d'autres : Distilbène, Isoméride, Pondéral, Vioxx, Acomplia, Di-Antalvic ou Propofan.
Plusieurs pays européens, dont la Grande-Bretagne, la Suède et la Suisse, ont retiré, depuis plusieurs années, ces deux derniers produits. Il est surprenant d'avancer le fameux « casse-tête » posé par le remplacement de ces deux médicaments auprès des patients. Ce « casse-tête » est beaucoup moins présent chez les médecins étrangers, qui ont été plus prompts à s'adapter. Je ne peux imaginer une seule seconde que le retrait du Di-Antalvic ait été repoussé parce que le marché français représentait 95 % des ventes européennes et que ce médicament était un produit du premier laboratoire Français !
J'ai bien entendu le message de votre ministre de tutelle, madame la secrétaire d'État : vous ne saviez rien et vous exigez maintenant des actions rapides, profondes et efficaces. M. Bertrand a – c'est en tout cas le sens de son intervention lors de la remise du rapport de l'IGAS le 15 janvier dernier – pris conscience « des défaillances graves dans le fonctionnement de notre système du médicament ». Il est convaincu « que c'est la transparence qui crée les conditions de la confiance », que celle-ci doit être « une exigence partagée par l'ensemble des acteurs » et qu'il faudra « rebâtir » un système qui « n'a pas apporté suffisamment de garanties ».
Je prends donc acte de votre volonté. Pour autant, nous serons vigilants, du côté gauche de cet hémicycle, et veillerons à ce qu'il soit fait toute la distinction nécessaire entre volonté politique et affichage politique, afin d'éviter que ne se reproduisent des maladresses du type de celle que vous avez commise en jetant en pâture la liste des 77 médicaments « sous surveillance », sans aucune pédagogie, ce qui a encore renforcé l'inquiétude des Français.
Nous serons également très attentifs à ce que la transparence que vous prônez soit effectivement la règle car les zones d'ombre sont nombreuses, et ce dans de multiples domaines.
Que dire, par exemple, du Tamiflu, antiviral mis en avant par la Direction générale de la santé en décembre 2009, durant la pandémie de grippe H1N1 ? Lors d'une réévaluation effectuée par la Haute autorité de santé deux mois auparavant, son efficacité était loin d'être attestée puisque la balance bénéfice-risque était très limitée en faveur du bénéfice. Que dire encore de la mise en examen le 1er février 2008 des laboratoires Sanofi et GlaxoSmithKline – GSK – pour « tromperie aggravée » sur la balance bénéfice-risque du vaccin contre l'hépatite B ? Pendant que l'on répète à l'envi aux patients qu'il n'y a aucun lien entre le vaccin et les effets secondaires de type sclérose en plaques, le Gouvernement et la majorité adoptent des amendements prévoyant, notamment, l'indemnisation des pompiers touchés par ces mêmes effets secondaires suite à cette vaccination. C'est quand même ahurissant !
Dernier exemple en date, qui nous pousse à nous interroger. Présenté par Sanofi comme un « blockbuster » – produit qui génère plus d'un milliard de dollars par an pour l'industrie concernée –, le Multaq devait rattraper l'échec du médicament anti-obésité Acomplia en 2008. Malgré les avis peu probants des autorités à la fois françaises et américaines, tant sur le plan de l'amélioration du service médical rendu que des effets secondaires au niveau hépatique, le laboratoire va quand même obtenir un remboursement à 65 % et un prix huit fois supérieur au produit équivalent tombé dans le domaine du générique. Vous comprendrez, madame la secrétaire d'État, l'urgence d'agir !
Que dire, enfin, de la transparence sur les conflits d'intérêts ? Alors que votre ministre de tutelle exige une déclaration sur les éventuels conflits d'intérêts « avant, pendant, après » des membres de son cabinet, vous-même, madame la secrétaire d'État, refusez, depuis trois mois, de préciser les missions et rémunérations provenant de divers laboratoires pharmaceutiques, alors que vous avez été attachée, pendant dix ans, au service d'immunologie de l'hôpital Édouard Herriot de Lyon.
Quand bien même vous avanceriez à nouveau comme argument votre déclaration au bulletin officiel, nous sommes très loin, madame la secrétaire d'État, du « Sunshine Act » voulu par M. Bertrand.
Comme pour rattraper le temps perdu, le Gouvernement lance un nombre incroyable d'actions autour du système de pharmacovigilance : un rapport de l'IGAS sur le Mediator – qui rendra un deuxième avis sur ce médicament – ; une mission au Sénat et une à l'Assemblée Nationale sur le même sujet, une mission à l'Assemblée Nationale sur les agences sanitaires, une mission confiée à MM. Debré et Even, dont les contours restent flous – je n'ai toujours pas vu la lettre de mission – et, pour terminer, des « Assises du Médicament ». Clemenceau avait pour habitude de dire : « Pour enterrer un problème, nommez une commission ». Avec six, cela devient particulièrement inquiétant !
Cette transparence tant vantée passe aussi par la démocratie sanitaire. Or, lors de la mise en place des « Assises du médicament », il n'a pas été mis en place les conditions d'une participation pleine et entière des associations ne disposant pas de moyens financiers suffisants pour assumer seules les frais de transport et d'hébergement.
Madame la secrétaire d'État, les thèmes à explorer durant nos échanges sont nombreux : conflits d'intérêts – je viens rapidement de les évoquer –, formation initiale et formation continue des médecins, suivi des prescriptions, éducation thérapeutique, tests comparatifs, dont mes collègues de l'opposition parleront, …
Il faudra donc parler du financement des agences dites « indépendantes ».
Il faudra également évoquer les « pantouflages » – qui doivent normalement passer devant une commission de déontologie –, qui voient, ici, un ancien directeur général de l'INPES devenir Directeur général des Entreprises du médicament ; là, une ancienne secrétaire d'État passer des laboratoires Fournier au LEEM, le syndicat des entreprises du médicament qui représente près de 300 industries de ce secteur en France ; là encore, une ancienne ministre devenir la présidente de la Fondation GlaxoSmithKlin ; là enfin, un président de la Commission de la publicité et de la diffusion des recommandations sur le bon usage du médicament de l'AFSSAPS se retrouver au conseil scientifique du décidément très bien fourni LEEM, pour lequel il va créer le CENGEPS, qui a pour objectif de favoriser les tests cliniques en France pour ces mêmes firmes pharmaceutiques... On n'est jamais aussi bien servi que par soi-même.
Tous ces exemples – non exhaustifs – nous montrent la perméabilité, la fongibilité entre le secteur public et le secteur privé dans notre pays, loin de la vision de la représentation nationale. Triste spécificité de notre pays !
Pour conclure, je souhaite adresser quelques messages à mes collègues avant le début de nos échanges.
Mes chers collègues de la majorité, je vous demande de bien vouloir vous rappeler le cheminement qui vous a amenés, en commission des affaires sociales, à soutenir les conclusions de ce rapport. Nous ne sommes là ni pour diaboliser les firmes pharmaceutiques, ni pour fustiger tel ou tel acteur de la chaîne, mais simplement pour remplir notre devoir, qui est de garantir la sécurité de nos concitoyens et leur redonner confiance en la veille sanitaire du médicament, confiance qui est aujourd'hui bien mise à mal.
Je nous invite, avec gravité, à réaffirmer clairement, au cours de ce débat, la hiérarchie des normes qui doit toujours guider nos prises de position : d'abord, la santé de nos concitoyens ; ensuite, la santé des comptes publics ; enfin, celle des firmes pharmaceutiques.
Ne faisons pas de ce moment un rendez-vous manqué ! D'avance merci ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je rappelle que la Conférence des présidents du 15 février dernier a décidé que ce débat serait organisé sous forme de questions.
La durée des questions et des réponses est de deux minutes. La réponse du Gouvernement sera donnée après chaque question, mais il n'y aura pas de droit de réponse.
Il existe, vous le savez, mes chers collègues, différents types de débats. Une discussion a, d'ailleurs, lieu en ce moment entre les groupes politiques pour essayer de dynamiser un peu ceux-ci, avec la tenue de certains dans la salle du 101 rue de l'Université.
Nous prendrons successivement les trois premières questions du groupe SRC, les deux questions du groupe GDR, les deux questions du groupe Nouveau Centre, les trois questions du groupe UMP et terminerons avec les trois dernières questions du groupe SRC.
Mais, auparavant, la parole est à Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé, qui a demandé à répondre à Mme Lemorton.
Madame la députée Lemorton, je tiens, avant toutes choses, à vous féliciter pour le travail que vous avez fourni et pour le rapport que vous avez remis sur le médicament.
Bien sûr ! Non seulement nous avons pris acte de la qualité de ce travail, mais encore, contrairement à ce qui a été dit, les mesures préconisées ne sont pas restées lettre morte, puisque je peux vous annoncer aujourd'hui que 80 % d'entre elles ont été prises en compte. Il est donc faux de dire qu'entre 2008 et aujourd'hui, le rapport est resté dans un tiroir et qu'aucune mesure n'a été relayée : 46 sont appliquées et 29 sont en cours d'application.
Vous évoquez la question des conflits d'intérêts.
L'affaire du Mediator a, en effet, révélé un certain nombre de dysfonctionnements. Je laisserai les parlementaires de la mission d'information aller jusqu'au bout de leur démarche pour évaluer les responsabilités des laboratoires.
Pour ce qui concerne l'administration, je reconnais qu'il y a eu, effectivement, des dysfonctionnements. Nous en avons pris acte et, au lendemain de la remise de ce rapport, une dynamique s'est enclenchée, car jamais plus, il ne doit y avoir, dans notre pays, d'affaire Mediator. Jamais plus !
Il importe déjà d'engager une dynamique vertueuse, en tout cas qui aille dans le bon sens.
Puisque la question des conflits d'intérêts a été soulevée, une première chose à faire est d'imposer la transparence. Il faut éviter qu'il existe des intérêts croisés entre les différents acteurs, entre les industriels et les autorités de santé. Le système doit être exemplaire pour susciter une confiance totale de la part de nos concitoyens.
Cela passera, bien évidemment, par la déclaration, par les industriels, des liens d'intérêts sur les contrats souscrits avec les acteurs du monde de la santé et, par ces derniers, de l'ensemble des rétributions, des rémunérations et des subventions perçues. Aucune ambiguïté n'est, en effet, permise aujourd'hui.
Les Français, nos compatriotes, doivent recouvrer une entière confiance dans notre système sanitaire. Cela ne passera pas par une politique de l'autruche. C'est pourquoi les Assises du médicament ont été lancées le 17 février dernier. Il est, en effet, nécessaire de refondre notre système du médicament, la police du médicament garantissant la sécurité de nos concitoyens. Nous serons intransigeants sur ce point.
Nous comptons, bien évidemment, sur votre contribution, mesdames, messieurs les parlementaires, car vous êtes des personnes qualifiées pour interagir avec les autres protagonistes des six groupes de travail qui ont été mis en place.
Je m'arrêterai là. J'avais à coeur, avant d'en venir aux questions, de remettre les choses au clair. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Martine Martinel, pour poser la première question du groupe SRC.
Madame la secrétaire d'État, vous avez dû faire un oubli, quelque chose a dû vous échapper car aucun des amendements reprenant des préconisations du rapport n'a été accepté. Le taux de 80 % que vous annoncez nous semble, dès lors, quelque peu hyperbolique !
J'en viens à ma question.
Le financement des organismes de contrôle, AFSSAPS ou HAS, fut posé très tôt, notamment par l'ancien Premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin, qui faisait part de ses interrogations sur les effets du mode de financement de l'agence sur son fonctionnement.
Nous ne pouvons que saluer les engagements de M. le ministre et les vôtres, madame la secrétaire d'État, pour remédier à ce financement, source de toutes les suspicions et de tous les doutes.
Sans organismes indépendants, il ne sera pas possible de combattre efficacement les dérives du système et de juguler des décisions qui sont prises parfois, pour des raisons économiques et financières, en faveur des firmes pharmaceutiques.
Quand, en février 2008, nous avons demandé à M. Woerth, alors ministre du budget, s'il ne trouvait pas anormal que le contrôleur soit financé par le contrôlé, il avait répondu à la MECSS qu'il n'était pas choqué par ce système. Vous engagez-vous, madame la secrétaire d'État, à assurer un financement public des agences de contrôle ?
Madame la députée, vous dites que les amendements reprenant des préconisations du rapport n'ont pas été retenus. Je ne peux que réitérer ce que je viens de dire : 80 % des propositions du rapport ont été prises en compte.
Sur les 75 propositions, 46 ont été appliquées et 29 sont en cours de mise en oeuvre ; 17, c'est vrai, n'ont pas été prises en compte : 10 ont été considérées comme non réalisables au vu de la réglementation alors en vigueur au niveau national ou européen, et 7 comme injustifiées.
Il est vrai que la donne a changé : au lendemain de cette crise sanitaire, un vaste débat est ouvert. Les assises du médicament vont forcément faire bouger les lignes : nous allons refonder le système de santé du médicament et des dispositifs médicaux, et nous allons engager une réflexion globale, à l'échelle nationale comme au niveau européen – puisque notre gouvernance est interconnectée avec les autres pays d'Europe.
Votre question évoquait, pour terminer, le financement de l'AFSSAPS, que nous allons, en effet, modifier. Il est bon de lever toute ambiguïté à cet égard pour que tout soit parfaitement transparent. Même s'il est prévu d'instaurer une taxation sur les industriels, elle rentrera dans un budget d'État et le financement de l'Agence sera public, par le biais d'une dotation secondaire à l'Agence du médicament.
Madame la secrétaire d'État, vous venez de nous dire que vous aviez exécuté 80 % de ce qui avait été préconisé dans le rapport de Mme Lemorton. Pourriez-vous nous donner quelques exemples précis de ce qui a été mis en oeuvre ?
Je voudrais, cependant, vous interroger sur la délicate question des conflits d'intérêts. M. le ministre de la santé, dont nous regrettons l'absence, a souligné à plusieurs reprises sa volonté de rendre publique toute situation de conflit d'intérêts pouvant entraîner des interférences fâcheuses, susceptibles d'insinuer le doute sur les décisions qui sont prises. Il a même affirmé vouloir connaître tout conflit « avant, pendant, après » l'exercice d'une fonction, ce qui nous semble aller dans le bon sens. Dans l'une de ses dernières interventions sur le sujet, le 15 février dernier, lors de son audition par la mission d'information sur le Mediator et la pharmacovigilance, il a notamment indiqué vouloir transposer en France le modèle américain du Sunshine Act, que vient de rappeler Catherine Lemorton, qui impose la déclaration de tout conflit d'intérêts, pour tout intervenant sur un sujet de santé, à partir d'une somme de 1 euro – c'est dire si le plancher est bas.
Nous prenons acte de cette volonté et souhaitons que le ministre puisse indiquer la démarche qu'il va suivre pour l'instaurer.
De même, pourrait-il informer la représentation nationale des situations de conflits d'intérêts dans son propre cabinet, qui ne semble pas, d'ailleurs, être aussi parfaitement en règle qu'il a bien voulu l'indiquer ?
Madame la secrétaire d'État, nos amendements sur le sujet ayant, jusqu'à ce jour, toujours ou presque toujours été rejetés, vous engagez-vous à obliger tout individu – personnel de santé, journaliste, élu ou autre – à déclarer publiquement tout conflit d'intérêts avant toute intervention concernant un sujet de santé, que ce soit à la radio, à la télévision, dans un colloque, dans un forum, dans un débat ?
Vos préoccupations, j'en conviens, sont tout à fait légitimes. Vous vouliez connaître quelques exemples de mise en oeuvre des propositions faites dans le rapport de Mme Lemorton. Je citerai tout simplement l'éducation thérapeutique, qui est parfaitement organisée et renforcée de jour en jour, puisque, pour certaines pathologies, davantage de professionnels sont impliqués, pour mieux encadrer les malades ; la formation continue et la mise en place du DPC ; le raccourcissement du délai entre les autorisations temporaires d'utilisation et l'autorisation de mise sur le marché, qui sera aussi court que possible, comme il avait été souhaité.
Quant à la question des conflits d'intérêts dans le cabinet du ministre de la santé, tout est parfaitement transparent. Vous avez pu entendre, lire, relire des déclarations très claires sur les liens professionnels passés de membres du cabinet avec tels ou tels industriels. Aujourd'hui, plus personne n'a de lien d'intérêt avec quelque industriel que ce soit. Je ne comprends donc guère le sens de votre question.
Pour ma part, je veux le répéter ici, une fois de plus et de manière très solennelle : j'ai travaillé pendant dix ans, en tant qu'employée, dans l'industrie pharmaceutique, et j'ai, de même, été praticien attaché – statut très spécifique – aux hospices civils de Lyon. De ce point de vue, je me suis montrée très proactive : je n'ai pas attendu l'affaire du Mediator, je n'ai pas agi en réaction à cette affaire, mais, bien avant, il y a plus de deux ans, au moment où je me suis engagée en politique, j'ai publié ma biographie et mon parcours professionnel.
Aujourd'hui, je n'ai rien à ajouter : je n'ai pas plus de liens que je n'en avais il y a deux ans, puisque ces relations professionnelles ont cessé et que je me consacre entièrement à ma fonction ministérielle. Ma seule préoccupation, désormais, c'est la santé des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la secrétaire d'État, je vous rappelle que questions et réponses ne doivent pas dépasser deux minutes.
La parole est à Mme Dominique Orliac.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, aujourd'hui, l'industrie pharmaceutique française connaît une décroissance de l'innovation thérapeutique. D'autre part, le processus d'autorisation de mise sur le marché, garantissant la sécurité maximale du produit sur la base d'une balance bénéfices-risques bien pesée, doit également être garant de l'efficacité de ce dernier tout en précisant que, en la matière, le risque zéro n'existe pas.
Pour cela, l'évaluation du service médical rendu – qui légitime la mise sur le marché et le remboursement d'une spécialité, et conditionne son prix et son taux de remboursement – doit être rigoureuse et justifier d'une réelle amélioration, à travers des études comparatives obligatoires avecdes traitements médicamenteux existant pour la même pathologie. Le système d'évaluation du médicament doit être vigilant tout au long de la vie de celui-ci. Il doit, par le biais de la pharmacovigilance, surveiller les effets indésirables secondaires, aléas thérapeutiques et interactions médicamenteuses éventuelles d'un produit et, grâce à des études post-AMM, évaluer l'efficience et le SMR pour décider de la pertinence du maintien d'un médicament sur le marché. Des sanctions pour non-suivi de post-AMM doivent être renforcées, alors même qu'elles ne sont souvent pas appliquées. Cela devrait permettre de décider de suspensions ou de retraits rapides du marché et garantir la sécurité sanitaire.
Avez-vous l'intention de rendre les tests contre comparateurs obligatoires avant la mise sur le marché ? Enfin, où en est la relance du groupement d'intérêt scientifique « évaluation épidémiologique des produits de santé » ?
Je suis bien d'accord, madame la députée : il est nécessaire de suivre au plus près les données concernant les médicaments, afin d'évaluer le bénéfice qu'ils représentent pour les patients et les risques que ceux-ci courent. Cela doit aider les pouvoirs publics à prendre des décisions sur le maintien d'un médicament sur le marché ou son retrait, sur son remboursement ou son déremboursement.
Dans le prolongement de votre question, vous vous interrogez sur le comparateur. Faut-il continuer d'accepter que les comparaisons d'un médicament qui arrive sur le marché se fassent avec un placebo ? Je suis bien d'accord, il faut absolument les comparer avec le médicament de référence, car il faut prouver une amélioration du service médical rendu.
Nous devons de même nous interroger sur l'attitude à adopter face aux médicaments qui ont un service médical insuffisant. Devons-nous les dérembourser ou abaisser leur taux de remboursement ?
Toutes ces questions seront abordées dans le cadre des assises, qui ont l'ambition de pousser la réflexion très loin, afin de déboucher sur des propositions concrètes, pour que les systèmes soient de plus en plus vertueux.
Je vous rejoins donc dans vos préoccupations et j'attends des réponses des assises. J'attends aussi que les missions parlementaires nous apportent leurs réponses, afin que notre système reste exemplaire, à l'échelle de l'Europe et du monde.
Nous en venons aux questions du groupe GDR.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, qui va poser la première de ses deux questions.
Monsieur le président, j'aurais pu aussi bien commencer par la seconde ! (Sourires.)
On entend beaucoup parler de vertu, d'exemplarité. Il serait bon, je crois, qu'on en parle moins et qu'on les pratique davantage. À l'heure où 49 % des Français estiment que le système de santé actuel ne permet pas l'égalité d'accès aux soins et où 23 % de nos concitoyens ont renoncé, l'année dernière, à se faire soigner faute d'argent, selon le Baromètre Cercle Santé réalisé par l'institut CSA en janvier 2011, il apparaît urgent de ressusciter le rapport de Mme Lemorton que certains ont, semble-t-il, voulu enterrer.
En parlant d'enterrement, je pèse mes mots. Il est en effet une coïncidence troublante, qui voit ce rapport de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de l'Assemblée connaître le même sort – c'est-à-dire l'oubli – qu'un précédent rapport de la commission des affaires sociales du Sénat remis en juin 2006, qui traitait, lui aussi, des conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments. Et le rapport de l'IGAS d'août 2007, qui dénonçait les pratiques de l'industrie pharmaceutique et des visiteurs médicaux, n'a pas connu un sort plus enviable. À croire que, sur les bancs de nos hémicycles, la santé des Français est persona non grata.
Alors que nos concitoyens maigrissaient à grand renfort de Mediator et que plus de 1 000 d'entre eux succombaient à ses « effets indésirables », Jacques Servier, le patron des laboratoires du même nom, neuvième fortune professionnelle de France, avec un patrimoine de 2,9 milliards d'euros, continuait, lui, de s'engraisser tranquillement. Voyez l'évolution du chiffre d'affaires du laboratoire Servier. (M. Jean-Pierre Brard brandit un écriteau portant une courbe géométrique.) Je n'ai pas les chiffres des dividendes, mais ils progressent de la même façon. On s'enrichit donc de la mort qu'on diffuse. Je n'ai pas entendu d'acte de contrition ni de M. Servier ni des actionnaires. D'ailleurs, pourquoi feraient-ils contrition ?
Monsieur Brard, vous avez largement dépassé votre temps de parole, qui est de deux minutes. Vous perdez du temps à montrer différents documents, ce qui n'est pas l'usage de cet hémicycle, comme vous le savez fort bien. Je vais donc donner la parole à Mme la secrétaire d'État.
Je termine d'une phrase, si vous le permettez, monsieur le président.
Madame la secrétaire d'État, vous avez fait référence à vos antécédents professionnels : votre humilité vous honore, puisque vous avez dit que vous étiez employée, mais je ne sache pas que vous étiez au standard téléphonique ni à l'accueil. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) C'est une question de déontologie et, pour des raisons d'éthique, vous n'auriez pas dû accepter de représenter le Gouvernement aujourd'hui.
Vous en revenez donc toujours à la question des conflits d'intérêts !
Je ne sais pas quelle réponse il vous faudrait pour vous rassurer.
Vous pouvez la poser autant de fois que vous voulez, mais c'est mettre ma probité en doute. Je veux bien y répondre une fois de plus, car il faut absolument qu'il n'y ait aucune relation d'intérêts croisés entre deux activités concomitantes.
Madame Lemorton, vous êtes pharmacienne : si, demain, il y avait un gouvernement socialiste et qu'on vous propose, au Gouvernement, le poste de ministre de la santé, le refuseriez-vous ? Aurions-nous tort de vous accuser, si vous l'acceptiez, d'être coupable de conflit d'intérêts. Cela devient ridicule.
Bien sûr, il faut bannir toute ambiguïté en la matière. Une entière transparence est nécessaire à tous les niveaux de la chaîne de décision, jusqu'aux membres des cabinets ministériels. Nous l'avons dit, et le ministère de la santé, en première ligne, a démontré qu'il souhaitait porter cette exigence de transparence.
Je crois n'avoir rien à ajouter sur cette question.
Tout cela n'est guère satisfaisant, madame la secrétaire d'État. Vous dites « ridicule » ; moi, je dis « éthique ».
En réalité, nous n'aurions pas parlé de tout cela s'il n'y avait pas systématiquement consanguinité des milieux d'affaires et des milieux politiques. Il faut trancher ce lien pour des raisons d'éthique.
Je n'ai dit à aucun moment, madame la secrétaire d'État, que votre probité personnelle était en cause, mais, par principe – j'y insiste –, il y a des choses qui sont incompatibles.
J'en viens à la question de la fiscalité des activités pharmaceutiques. Les profits réalisés sont extraordinaires. Savez-vous à quel montant s'élèvent chaque année les sommes dépensées pour embobiner les médecins grâce aux visiteurs médicaux ? 25 000 euros par médecin ! Un médecin de ma bonne ville de Montreuil, le docteur B., m'a dit que, si lui et ses confrères se laissaient faire, ils recevraient chaque jour plus de visiteurs médicaux que de patients, des gens évidemment, la plupart du temps, incompétents qui défendent des intérêts et des fortunes fantastiques et qui s'accumulent. Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je ne pourrai pas vous montrer tous mes documents mais regardez l'évolution des dividendes de Sanofi : tandis que les gens n'arrivent plus à se soigner, Sanofi fait du cholestérol, Sanofi fait du gras !
C'est avec tout cela qu'il faut rompre, et les activités pharmaceutiques ne contribuent pas assez, madame la secrétaire d'État, aux ressources de l'État, d'autant plus que ces gens-là, tandis que vous vous abstenez de les imposer, réduisent leurs efforts en faveur de la recherche. Savez-vous combien les laboratoires européens, par exemple Servier, ou Sanofi, sous la houlette de M. Viehbacher, investissent dans la recherche et dans la publicité ? 17 % pour la recherche et 23 % pour la publicité ! Voilà comment ces marchands de soupe traitent la santé des Français grâce à laquelle ils s'enrichissent !
Qu'allez-vous donc faire, madame la secrétaire d'État, pour que cesse la complaisance fiscale dont on continue de faire preuve à l'égard des industries pharmaceutiques ?
Je l'affirme devant l'Assemblée : il n'y a aucune complaisance fiscale vis-à-vis de l'industrie pharmaceutique.
Elle est ainsi assujettie à quatre taxes importantes : la contribution sur les ventes en gros des spécialités pharmaceutiques, acquittée par les grossistes et les laboratoires qui réalisent des ventes directes aux officines, dont le produit attendu est 366 millions d'euros pour 2011 ; la contribution dite « de sauvegarde » due par les laboratoires pharmaceutiques en fonction de leur chiffre d'affaires, qui atteint un montant de 270 millions d'euros ; la contribution assise sur les dépenses de promotion et d'information sur les médicaments remboursables ou agréés à l'usage des collectivités – je rejoins à ce propos l'idée d'une taxation sur la visite médicale –, qui rapportera 155 millions d'euros pour 2011 ; la contribution assise sur le chiffre d'affaires, qui rapportera 245 millions d'euros pour l'année 2011.
Par ailleurs, vous avez évoqué la question de la présence des visiteurs médicaux dans les cabinets des médecins. Cela nous invite à considérer la question de la formation des médecins. Oui, il faudra une formation indépendante des médecins. Cette question, parmi d'autres, sera à l'ordre du jour des assises du médicament. Elle y sera largement débattue, et nous attendons des propositions.
Nous en venons maintenant aux questions du groupe Nouveau Centre.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Le médicament, madame la secrétaire d'État, a pour but de soigner et de guérir. En raison de l'affaire du Mediator, il est devenu un sujet d'actualité.
La mission parlementaire en cours sera amenée à faire des propositions. En effet, cette affaire met en évidence de nombreux dysfonctionnements, alors qu'il en va de la sécurité de nos concitoyens : au niveau des multiples agences, les questions de la mise sur le marché, de la transparence, du prix et de la pharmacovigilance étant traitées séparément ; les conflits d'intérêts des experts ; le problème de la formation initiale et continue des professionnels à la thérapeutique et de leurs liens avec l'industrie ; une trop complexe déclaration des incidents et accidents et une notification qui n'est pas toujours effectuée ; les dysfonctionnements dans la prise en compte des signaux faibles et des signaux forts ; la prescription hors AMM.
Beaucoup de ces problèmes, qui avaient été constatés lors des travaux de la MECSS, auraient pu être résolus.
Quatre-vingt-douze propositions ont été faites, votées à l'unanimité des membres de la MECSS, puis par la commission des affaires sociales. Elles sont, certes, d'un intérêt variable, mais combien, madame la secrétaire d'État, ont été prises en compte et transcrites dans la loi ou le règlement ? Certaines sont pourtant simples et de bon sens.
Beaucoup seront sans doute reprises dans les conclusions de la mission parlementaire. Seront-elles pour autant prises en compte et appliquées ? Je vous ai entendue parler, madame la secrétaire d'État, de 80 % de propositions prises en compte ; je n'avais pas cette notion.
Sans doute faut-il revoir l'organisation des agences ; j'en profite pour saluer l'arrivée de M. le ministre de la santé, qui s'est déjà exprimé à ce sujet. Vous savez que les agences ont été créées à la suite du scandale du sang contaminé pour éloigner le politique de la décision et confier celle-ci à des organismes indépendants faisant appel aux experts.
Quelle doit être la place du politique ? N'est-ce pas à lui de décider ? Ne doit-on pas simplifier et réduire le nombre d'agences ? Une agence unique pour le médicament avec des services séparés pour l'étude du service médical rendu, l'autorisation de mise sur le marché et la pharmacovigilance ne serait-elle pas nécessaire ? L'action de ces services serait bien sûr coordonnée en prenant en compte le principe majeur de l'évaluation du bénéfice au regard des risques.
Oui, je vous le répète, monsieur Préel : 80 % des propositions ont été prises en compte, certaines ont même déjà été mises en oeuvre. Vous avez raison de dire et de rappeler qu'à un moment donné, dans le domaine du médicament, on a séparé le politique de l'expertise.
Les inspecteurs ont mis au jour des failles. C'est pourquoi, avec Xavier Bertrand, nous avons souhaité lancer ce débat sur les autorités sanitaires, la place du médicament et la meilleure manière de refondre le système afin de restaurer pleinement la confiance.
Comment vont se dérouler ces assises du médicament ? Nous attendons tous des propositions concrètes pour améliorer ce système. Six groupes existent, dont les thèmes de travail sont les suivants : améliorer les conditions d'octroi de l'autorisation de mise sur le marché ; renforcer le système de surveillance des médicaments ; encadrer les prescriptions hors AMM ; développer l'information sur les produits de santé ; optimiser la gouvernance et clarifier les missions des organismes intervenant en matière de produits de santé ; renforcer le contrôle et l'évaluation des dispositifs médicaux. Ces six groupes nous permettront de couvrir largement le champ des questions qui pourront être soulevées.
J'attends vivement, avec Xavier Bertrand, les propositions que nous aurons à mettre en oeuvre d'ici à la fin de l'année.
Sans rebondir sur cette réponse, car on aurait évidemment beaucoup à dire sur le médicament en général, j'en viens à ma deuxième question.
Il n'est pas possible de se passer des experts. Lorsqu'il s'agit d'une pathologie particulière, ils ne sont pas nombreux. L'industrie et l'agence ont tendance à faire appel aux mêmes, mais, lorsqu'un expert a participé à la recherche et au développement d'une molécule, comment accepter qu'il puisse participer ensuite à la commission de la transparence ou à l'agence des produits de santé ? Comment séparer l'expertise interne de l'expertise externe ? L'expert doit donc déclarer ses conflits d'intérêt et sortir de la salle, ce qui ne semble pas être toujours le cas. Cela avait pourtant déjà été prévu du temps de Didier Tabuteau.
Les conflits d'intérêt ne sont d'ailleurs pas uniquement financiers. Comme l'a dit un précédent intervenant, l'amour et la haine existent aussi. Comment prendre cela en compte ? Comment éviter qu'ils interfèrent ? C'est un vrai problème.
Par ailleurs, pourquoi les prescriptions hors AMM sont-elles si fréquentes, sans que la mention « NR » soit portée sur l'ordonnance ? Quel est le rôle de la visite médicale et des journaux médicaux financés par l'industrie ? Il est bien sûr souhaitable de mieux prendre en compte l'amélioration du service médical rendu par rapport aux traitements existants. Il devient urgent que la Haute autorité de santé développe les référentiels du bon usage du médicament et que soient développés des logiciels certifiés d'aide à la prescription.
Encore faut-il améliorer la formation initiale et continue des médecins en pharmacologie et en pratique thérapeutique. Il n'est que temps de rendre enfin obligatoire la formation continue – maintenant appelée développement professionnel continu, ou DPC – en l'évaluant et surtout en la finançant sans faire appel à l'industrie.
Oui, vous avez raison, monsieur le député Préel. Un certain nombre d'experts sont parfois amenés à apporter leur expertise dans différentes instances.
Il s'agit de supprimer toute opacité et d'être tout à fait transparent dans les modalités d'exercice. La transparence est effectivement la garante de l'objectivité des expertises. Je l'ai dit tout à l'heure : il faut une publication exhaustive, par les industriels, de l'ensemble des conventions qu'ils ont passées avec les acteurs de la santé et, parallèlement, une déclaration par les acteurs de la santé eux-mêmes de l'ensemble des rétributions et rémunérations perçues.
Aucune ambiguïté n'est permise. Si, dans une réunion, la présence d'un expert sujet à un conflit d'intérêts est établie, l'ensemble des avis rendus et décisions prises seront frappés de nullité. Il s'agit donc d'assurer la transparence à toutes les étapes de la chaîne de décision.
Il est important de savoir si la personne en fonction se trouve en situation de conflit d'intérêts, ce qui pose la question de la transparence. On ne peut reprocher à quelqu'un d'avoir eu des fonctions passées. L'important est que l'expert soit parfaitement imperméable à tout autre intérêt lorsqu'il exerce ses fonctions.
Le sujet des prescriptions hors AMM est particulier. Il sera d'ailleurs abordé par le groupe n° 3 des assises du médicament. Nous avons lancé lundi le plan maladies rares ; on sait très bien que, chez certains patients, on est amené à utiliser des médicaments en dehors de leur indication parce qu'il n'y a pas d'alternative thérapeutique.
Le sujet est délicat. L'idée n'est pas d'interdire ces prescriptions mais il faut absolument les encadrer et les soumettre à un protocole, pour garantir toute la sécurité nécessaire aux patients à qui elles sont faites.
Nous en venons maintenant aux questions du groupe UMP.
La parole est à M. Yves Bur.
Je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, sur les perspectives de l'industrie du médicament et du Conseil stratégique des industrie de santé dans le contexte difficile que traverse l'ensemble de l'industrie du médicament du fait du scandale du Médiator. En effet, malgré le doute et la méfiance généralisée dont l'ensemble des acteurs de la chaîne du médicament, des industriels et des producteurs jusqu'à la sécurité sanitaire des produits de la santé, sont l'objet, le Gouvernement considère-t-il toujours ce grand secteur industriel comme une priorité ?
Malgré une concurrence toujours plus acharnée et dans un contexte généralisé, dans le monde entier, de restrictions budgétaires qui touchent également le secteur de la santé, l'industrie du médicament et des produits de santé constitue toujours un secteur important en termes d'emploi à travers tout le pays, un secteur porteur pour nos exportations et notre balance commerciale par ailleurs structurellement déficitaire. Le CSIS avait permis de fédérer efforts publics et efforts privés pour dynamiser la recherche et l'innovation et pour renforcer encore la production pharmaceutique industrielle sur notre territoire.
Ces objectifs sont-ils toujours d'actualité, alors qu'il est de bon ton de jeter l'opprobre sur l'ensemble de ce secteur pourtant indispensable pour soigner nos malades ?
Par ailleurs, dans le but de renforcer la production en France et dans le droit-fil de ce qui a été arrêté au CSIS, le Gouvernement considère-t-il toujours utile de permettre aux industriels de contrôler les prix de leurs produits quand ils sont exportés par des circuits parallèles vers d'autres pays d'Europe, ce qui risque d'entraîner des ruptures d'approvisionnement des pharmacies en France ? Ces ruptures sont d'ailleurs de plus en plus fréquentes pour de nombreux produits.
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Oui, monsieur le député, on peut concilier les deux. On peut mener les réformes de fond indispensables pour redonner confiance dans le médicament, dans la police du médicament et conserver un caractère stratégique à ces industries.
Je le dis devant Catherine Lemorton qui était présente, la question m'a été posée par l'un des représentants du LEEM – Les Entreprises du Médicament. Je ne changerai rien à notre volonté d'aller au bout des réformes nécessaires. Absolument rien !
Je le répète, je pense que les deux sont compatibles. D'ailleurs, Christian Lajoux, président du LEEM, a dit que la position des industriels n'avait rien à voir avec celle d'un laboratoire – celui concerné par le drame du Mediator…
…pour le citer, Servier – mais que l'industrie avait compris que nous devions aller au bout des réformes et qu'elle devait les accompagner. D'ailleurs, le LEEM fait partie des différents groupes de travail des assises du médicament – tant mieux ! –, à la place qui est la sienne – tant mieux ! Cela ne remet rien en cause. Ce secteur tient une place importante pour l'économie, la recherche et l'emploi. Cela étant, je le souligne, la santé publique n'est pas négociable.
Dans le rapport de l'IGAS, l'affirmation qui m'a le plus marqué – et il y avait le choix en la matière – est que le doute et le principe de précaution, qui doivent normalement bénéficier aux patients, avaient en réalité bénéficié aux laboratoires. Je ne veux plus jamais lire cela ! Ce qui veut dire que l'on doit inverser les choses.
Si nous menons ces réformes, nous ne casserons pas l'attractivité de la France pour l'industrie pharmaceutique. Mais je suis également persuadé qu'il est temps aujourd'hui, même si des progrès importants ont été faits, d'aller jusqu'au bout.
Je sais bien que pour votre part, monsieur Bur, vous avez toujours été très vigilant sur la question du médicament.
Et je tiens à vous rendre hommage. Je constate que l'hommage vient aussi des bancs du groupe SRC, ce qui montre bien que nous sommes dans une logique transpartisane.
Votre humour est légendaire, monsieur Brard, mais sur ce sujet, je m'abstiendrai de vous suivre …
Sincèrement, à ceux qui objecteront qu'en faisant des réformes, nous allons mettre en cause l'industrie pharmaceutique, la réponse est non. Et ce n'est pas négociable.
Sur la question des exportations parallèles, sujet ô combien complexe, je ne peux vous donner une réponse plus précise que celle-ci : nous sommes conscients du problème, car en arrière-plan, il y a la question de la rupture éventuelle d'approvisionnement. Expliquer qu'il y a des ruptures d'approvisionnement parce qu'il y a une logique d'exportation parallèle…
je crois que je ne sais pas faire. Comme c'est une réalité et que je ne sais pas faire, nous allons mettre en place un groupe de travail pour cerner les solutions possibles et les mettre en oeuvre. De quel type de texte aurons-nous besoin ? Nous verrons ! Mais sur ce sujet, nous sommes face à une situation anormale, inexplicable. Il faut donc apporter des réponses.
Le rapport de notre collègue Catherine Lemorton souligne le rôle essentiel joué par les pharmaciens d'officine dans la consommation et le bon usage du médicament. Il rappelle aussi leur rôle très important dans la sécurisation de la dispensation au moment où se développent les contrefaçons de médicaments et la vente sur internet.
Pourtant, les officines de pharmacie rencontrent en ce moment de très grandes difficultés économiques et les médias – presse et télévision – s'en font largement l'écho. Le Président de la République y a été sensibilisé, lui aussi, directement par la pharmacienne d'un quartier niçois.
Le malaise repose sur des éléments très objectifs. Les pharmaciens paient un lourd tribut au redressement des comptes sociaux entrepris depuis 2005. D'ailleurs, 25 % des officines de pharmacie ont aujourd'hui leurs comptes dans le rouge.
Leur malaise repose également sur des éléments plus subjectifs, mais réels et très fortement ressentis par les pharmaciens qui ont le sentiment d'être les laissés-pour-compte de la réforme du système de santé. Les deux décrets d'application de la loi HPST concernant les pharmaciens correspondants et les services pharmaceutiques, le décret sur les PDA – les préparations des doses à administrer –, la convention EHPAD-officine sont en panne depuis plus d'un an. Le rapport Rioli remis en 2009 à Mme Bachelot est resté sans suite.
Les pharmaciens s'interrogent sur tous ces blocages. Aucun des textes les concernant ne sort. En revanche, ils observent que, pour les médecins, les choses avancent très vite, à marche forcée même, et dans le bon sens. À tout cela s'ajoutent les attaques répétées menées par les groupes de grande distribution contre les officines qui luttent contre le monopole. Elles ont le sentiment que la digue qui les protège est assez faible.
Pourtant, le pharmacien d'officine exerce une profession indispensable et incontournable dans le système de santé. Au delà, la pharmacie occupe une place très importante dans la vie de nos villages, de nos villes et de nos quartiers et elle participe à la sauvegarde de l'économie locale.
Pour remédier au malaise qui ronge la profession, il faut affirmer et proclamer haut et fort que le monopole pharmaceutique est et sera préservé pour le bien de tous, que l'officine est reconnue et qu'elle sera toujours reconnue comme étant le portail d'entrée sécurisé des patients dans le parcours de soins, surtout en ce moment où la contrefaçon des médicaments se développe.
Pour cela, il faut mettre en oeuvre très rapidement les nouvelles missions reconnues aux pharmaciens par la loi HPST et publier les décrets relatifs aux pharmaciens de premier recours, aux pharmaciens référents et, surtout, aux pharmaciens correspondants.
Il faut développer un nouveau modèle économique viable basé sur une rémunération mixte moins dépendante des dépenses remboursables intégrant les nouvelles missions de la loi HPST.
Il faut permettre aux pharmaciens d'être membres de sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires. Or aujourd'hui le texte examiné au Sénat les en exclut pour des raisons fiscales.
Enfin, il faut favoriser les regroupements par transfert d'officines pour rationaliser le réseau.
Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, l'année 2011 ne doit pas être une année blanche pour les officines de pharmacie et surtout pas pour les quatre millions de patients qui entrent tous les jours dans une pharmacie. Ils ne peuvent plus attendre, parce que le médicament n'est pas un produit comme un autre et que notre pays dispose d'un réseau de dispensation très performant.
Monsieur le député, nous avons conscience des difficultés dont font état les pharmaciens d'officine, liées à la maîtrise voulue des dépenses de médicaments.
Certes, il y a aujourd'hui une amorce de restructuration du réseau officinal, mais il reste encore du chemin à parcourir. Une optimisation est nécessaire, tout en préservant le maillage territorial qui est adapté aux besoins de la population.
Vous avez évoqué la question du modèle économique. Des discussions sont en cours avec le ministère pour trouver des réponses aux revendications des organisations professionnelles pour voir comment revaloriser les marges et redéfinir les nouveaux modes de rémunération.
Vous l'avez souligné, monsieur le député, la place du pharmacien a été fortement revalorisée grâce à la loi HPST. Vous déplorez le retard pris dans la publication des décrets. Je suis un peu plus optimiste puisque certains décrets sont en cours de signature : je pense au décret relatif aux pharmaciens correspondants et à celui concernant les préparations des doses à administrer.
S'agissant des pharmaciens référents pour les EHPAD, nous avons beaucoup travaillé sur cette question lorsque j'étais secrétaire d'État chargée des aînés. L'expérimentation des médicaments en cours a été prolongée.
Or les décrets ne peuvent être publiés avant la fin de l'expérimentation.
Enfin, vous avez raison d'affirmer l'importance des missions du pharmacien qui est le premier relais dans le parcours de soins des malades. Mais ces nouvelles missions de service public doivent passer par une identification des missions.
C'est l'objet de la mission IGAS en cours. Les missions confiées au pharmacien d'officine lui assureront une rémunération directe ou associée dans le cadre de l'application de l'alinéa 8 de l'article 38.
Madame la secrétaire d'État, monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur la question fondamentale de la formation des médecins et de la visite médicale.
Je prends un exemple d'actualité, sur lequel nous avons interrogé le président du laboratoire Servier hier, lors de son audition. Lors du renouvellement du conseil d'administration de la société française de pharmacologie, le trésorier, un directeur scientifique du laboratoire Servier, avait présenté sa démission ; il est resté à son poste à la demande des administrateurs. Et si ceux-ci le lui avaient demandé, c'est qu'ils pensaient aux bourses de leurs étudiants. Cela veut donc dire que, dès la formation initiale en pharmacologie, on passe par les laboratoires. De la même façon, la formation médicale continue est le plus souvent financée par les laboratoires.
Ma question concerne aussi les réunions régionales périodiques en matière de pharmacologie et de toxicologie. À Toulouse, ces réunions ont lieu le samedi. Il nous est arrivé, avec Mme Lemorton, de nous y retrouver autour du professeur Montastruc. À la fin de la réunion, est offert un pot très frugal.
Dans d'autres régions, on est pris en charge par des laboratoires et l'on passe un week-end entier à la campagne dans une belle résidence !
Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, avez-vous trouvé une solution concernant le financement de la discipline de la pharmacologie et de la formation médicale continue ?
Si vous me le permettez, monsieur le président, je poserai une question subsidiaire.
Madame, monsieur le ministre, avez-vous eu une réponse de la Haute autorité de santé en ce qui concerne les logiciels d'aide à la prescription et la mise en place de véritables bases de médicaments qui assurent au médecin une information accessible, exhaustive et indépendante ?
Monsieur Bapt, vous connaissez la réponse ; si je vous la donne aujourd'hui, vous serez très déçu et vous m'en voudrez !
Non. M. Bapt, que je vois sourire, le sait bien ! S'il est légitime que, dans le cadre de ce débat, vous me posiez la question, il ne serait pas légitime que j'y réponde. En effet, j'ai pris devant vous l'engagement d'attendre les travaux des assises du médicament et les conclusions des deux missions parlementaires pour apporter des réponses.
D'accord. Excusez-moi d'utiliser ce terme ici, ce n'est pas du bon patois picard, mais il faut mettre en place un véritable Sunshine Act. Tout euro versé par les laboratoires pharmaceutiques à quelque structure que ce soit, à quelque personne physique ou morale que ce soit devra être déclaré et publié, et le défaut de publication sanctionné. Cela vise toute association, club, structure, société savante, tout médecin mais aussi toute association de patients, de façon à savoir exactement quelles sont les déclarations d'intérêt. Cela ne veut pas dire qu'il y ait forcément conflit d'intérêts ; nous devrons définir précisément ce qu'est le conflit d'intérêts.
Je veux également que les bénéficiaires fassent la même déclaration pour pouvoir croiser les déclarations et veiller à ce que personne n'oublie rien. Et je le répète, il y aura des sanctions. Car aujourd'hui, certains laboratoires qui doivent déclarer auprès de la HAS quelles associations ils financent, ont oublié de le faire. Or à l'exception d'une admonestation, aucune sanction n'est appliquée. Je ne vois pas pourquoi ils respecteraient cette obligation ! Telle est à ce jour la situation. J'en ai pris connaissance récemment et je dois saisir la HAS pour veiller à ce que ces déclarations soient faites par chacune des parties. Mais je sais que cela n'a pas été fait, concernant notamment une situation très précise. Il faudra donc des sanctions.
Je suis d'accord avec vous, monsieur Bapt, il faut avoir une vision exhaustive. S'agissant de la visite médicale, les visiteurs médicaux sont-ils responsables ? Je ne le pense pas.
Ce sont les laboratoires qui donnent des consignes.
Je tiens à le dire clairement, parce que cette profession est souvent montrée du doigt. Nous rencontrons de plus, aujourd'hui, de difficultés en termes d'emplois qui n'ont rien à voir avec le sujet de la santé publique. Je m'exprime, ici, en tant que ministre de la santé et non en tant que ministre du travail et de l'emploi. Je ne rencontre aucun problème de dédoublement de la personnalité. En 2004, dans le texte que j'ai porté avec Philippe Douste-Blazy, nous avions déjà pris des mesures sur la visite médicale. Une charte a été mise en place. Avant même que vous ne continuiez à hocher la tête, madame Lemorton…
…je tiens à vous dire que je partage votre sentiment. Je pense, en effet, qu'il convient de revoir cette charte. Lors des assises du médicament, nous n'éluderons pas la question de la visite médicale. Certaines personnalités, comme Martin Hirsch, voudraient totalement l'interdire. Je ne sais pas, pour ma part, si on doit forcément opter pour l'interdiction complète. En effet, dans ces conditions, la vraie question est de savoir comment est véhiculée l'information. L'information doit être qualifiée et nous devons veiller à ce qu'elle soit bien respectée.
La visite médicale est, à mon avis, l'un des principaux sujets qui seront abordés lors des assises du médicament. Je tiens à le préciser à nouveau parce que je ne voudrais pas que l'on rencontre de nouveau les situations tragiques que l'on a connues ces derniers jours. J'ai d'ailleurs écrit, je tiens à vous le dire, au président du LEEM pour que l'on veille bien, lorsque les laboratoires devront prendre des décisions en termes d'emplois, à ce qu'il y ait un véritable accompagnement, si besoin est d'ordre psychologique, des personnels concernés. C'est de leur responsabilité. Nous savons, en effet, que le secteur de la visite médicale a beaucoup évolué et continuera d'évoluer. Avant de montrer du doigt les visiteurs médicaux – qu'il s'agisse de pratiques passées et des pratiques de certains – il revient avant tout aux donneurs d'ordres, aux laboratoires, de prendre en compte les changements en cours et à venir.
Vous avez posé une question subsidiaire sur l'aide à prescription. Nous ne devons pas être naïfs. Des logiciels peuvent orienter ou aider à la prescription. Je préfère ce second terme. Certains se demandent pourquoi je suis favorable à la prescription en DCI.
Je considère que ce dispositif offre une véritable garantie.
Je sais que cela changera les habitudes, mais son application sera progressive. Je pense que nous devons aller dans cette direction. Je ne l'ai pas inventé, vous en avez parlé voici déjà quelques années et ce sujet est régulièrement évoqué lors des PLFSS. Il est vrai qu'à une époque certains considéraient qu'il ne fallait pas changer les habitudes. Mais nous devons y réfléchir si nous voulons qu'il y ait un avant et un après Mediator. Aurait-on pu éviter ce problème, s'il y avait eu une prescription en DCI ? Je ne le sais pas, mais cela aurait rendu difficile une stratégie de contournement ou de dissimulation de la part de certains laboratoires.
Et je dis « certains » au pluriel. Nous devons, par conséquent, nous orienter dans cette voie.
Mais à différentes époques !
Avant de poser ma question, je souhaiterais faire deux observations.
Le ministre vient de parler des visiteurs médicaux. Nous avons auditionné, hier, les responsables du laboratoire Servier. Ils nous ont alors indiqué qu'ils avaient donné instruction à leurs visiteurs médicaux de dissuader les généralistes de prescrire le Mediator comme coupe-faim, puisque cela ne figurait pas dans l'AMM. Il fallait oser l'affirmer ! Je ne suis pas sûr que nous les ayons vraiment crus.
En second lieu, j'ai été quelque peu surpris que Mme la secrétaire d'État, dans sa réponse sur les essais comparatifs, n'ait pas fait allusion à la directive européenne 2001-83 et notamment à son article 26. D'une façon générale, l'articulation avec la réglementation européenne est assez absente des réponses du Gouvernement, alors qu'elle a une extrême importance dans la vie du médicament.
Ma question porte sur le suivi des prescriptions et sur l'éducation thérapeutique. Celle-ci est en passe d'être dévoyée. La loi HPST a fait de l'éducation thérapeutique un outil pour les firmes pharmaceutiques qui, d'ailleurs, font le siège des ARS depuis la sortie des décrets d'application.
Je mentionnerai également la place prise par internet dans l'éducation thérapeutique des Français. Les dernières études montrent que douze millions de Français ont recours à l'internet pour s'informer sur la santé. Le docteur Google, dit-on, est devenu le premier médecin du pays ! Les sites proposant des informations à caractère médical ne sont absolument pas encadrés et la toile ressemble à une véritable jungle, tant il est difficile de s'y retrouver. Si nous sommes tous d'accord sur la nécessité de développer en France la culture du bon usage du médicament, comment faire pour que l'éducation thérapeutique ne soit pas qu'une arme permettant aux firmes d'être « au lit du patient », réduite à l'observance des traitements, gérée indirectement par l'industrie elle-même via, notamment, les associations de patients que ces mêmes firmes financent ? La boucle est bouclée !
Pourquoi, également, et ce sera ma dernière question, refuser les hyperliens vers les sites institutionnels sur les sites non certifiés et pourquoi ne pas imposer des pages d'accueil de mise en garde sur des sites du type Doctissimo.fr dont on ne sait pas qui les alimente en informations et qui n'ont pas non plus la certification HON, c'est-à-dire health on net ?
Vous évoquez la question de l'éducation des patients. Ce sujet est crucial parce que le patient est lui-même acteur de sa propre santé. Il est l'expert de son propre parcours, de sa propre vie. Sans son implication directe, il ne peut pas y avoir de succès thérapeutique. Pour garantir un tel succès, il faut faire oeuvre de pédagogie et donner une bonne information sur les bénéfices et les risques. Je considère qu'il n'existe pas de meilleur moyen d'informer le patient que de passer par le médecin traitant qui lui expliquera sa maladie, les conditions de sa prise en charge et les thérapeutiques qui lui seront prescrites. Il est, avec le pharmacien dont le rôle est complémentaire, le premier relais.
Je suis d'accord avec vous : on trouve tout et n'importe quoi sur internet. Comment le malade peut-il se retrouver dans ce panel de sites et d'informations dont les sources ne sont pas toujours évaluées ? Le label HON est une des réponses et permet justement d'identifier des sites qui offrent une information à peu près encadrée, ses émetteurs ayant respecté un cahier des charges. Toutefois, l'information et l'éducation relèvent, selon moi, de la compétence du professionnel de santé, qu'il soit médecin, pharmacien ou personnel paramédical. La responsabilité des pouvoirs publics est de promouvoir cette éducation pour la santé et d'essayer d'orienter au mieux le malade pour qu'il considère avec réserve les informations qu'il peut trouver sur les sites.
J'aimerais apporter à M. Mallot un complément d'information sur l'Europe et l'articulation européenne, s'agissant du dossier du médicament et des suites du Mediator.
J'ai évoqué ce sujet, vendredi dernier, avec le commissaire européen John Dalli, lequel a souhaité rencontrer, dans un premier temps, le ministre. Je lui ai proposé de se rendre à Paris et, dans ces conditions, d'agir en deux temps : le recevoir de nouveau et réunir, pour envisager l'avenir, les présidents et rapporteurs des missions parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat – et je me tourne vers mon ami Jean-Pierre Door – et, je n'y vois aucun inconvénient, les membres desdites missions qui le désirent. Je proposerai, par ailleurs, d'organiser une rencontre avec les parlementaires européens les plus en pointe sur la question. Je pense à Françoise Grossetête, non parce qu'elle est française, mais parce qu'elle a beaucoup travaillé sur les nouveaux textes. Des changements sont, en effet, indispensables à opérer.
J'ai tenu les propos suivants à Bruxelles. La France n'a pas vocation à imposer sa réforme, mais elle a été, avec l'AFSSAPS, en première ligne sur ce dossier. Je n'ai toutefois pas le sentiment que notre pays soit le seul concerné. En effet M. Alexandre et Mme North ont travaillé à l'AFSSAPS, puis à l'Agence européenne du médicament. Si la France est, c'est vrai, directement concernée par le nombre de victimes du Mediator ou le nombre de personnes qui ont pris ce médicament, ce n'est pas, à mon sens, un sujet franco-français. J'ai obtenu du président en exercice, le ministre de la santé hongrois, que cette question soit inscrite à l'ordre du jour du prochain conseil des ministres de la santé qui se tiendra à Budapest au tout début du mois d'avril. Ce n'était pas prévu auparavant. J'ai demandé de pouvoir faire état de la situation que nous avons connue et des réformes indispensables à envisager. Ensuite, il revient, car c'est son droit, à chacun dans chaque pays de savoir ce qu'il entend faire. Mais ceux qui pensent que ce sujet n'est arrivé et n'aurait pu arriver qu'en France se trompent, à mon avis, très lourdement.
J'ai également besoin de souplesse au niveau européen, notamment pour l'AMM. Aujourd'hui, vous le savez, l'autorisation de mise sur le marché pour un médicament est délivrée après comparaison avec un placebo et, par dérogation, avec un comparateur. Je veux, au contraire, que l'AMM soit établie après comparaison avec un comparateur, et seulement ensuite par dérogation.
Non, monsieur Mallot, c'est plus complexe que cela. Tant que je n'aurai pas obtenu cette souplesse, je procéderai de cette façon et, si un laboratoire nous attaque, j'en assumerai la responsabilité. Il doit y avoir un avant et un après Mediator. Aujourd'hui, il suffit qu'un médicament soit « mieux que rien » pour qu'on l'autorise. Nous devons donc opter pour le comparateur, sans, pour autant, casser la possibilité de concurrence. Il ne s'agit pas d'interdire de nouvelles mises sur le marché mais de les permettre en mesurant l'avantage du produit par rapport à ceux qui existent.
J'en viens aux délais. Lors de la conférence de presse faisant suite au rapport de l'IGAS, j'ai précisé que j'étais intimement persuadé que les études complémentaires devaient être encadrées par des délais, leur non-respect par les laboratoires devant entraîner la suspension ou le retrait de l'AMM. Cela évitera les délais à répétition, le temps profitant aux laboratoires.
Enfin, quand le retrait de l'AMM n'est pas motivé par des questions de sécurité sanitaire, il n'y a nulle obligation d'en informer les autorités européennes. Ainsi, lorsque le laboratoire Servier a retiré le Mediator du marché italien et espagnol, il n'a pas été contraint de prévenir les autorités européennes. En revanche, quand la France a décidé de retirer le Mediator du marché en 2009, elle a saisi les autorités européennes qui ont diffusé l'information. Cela a permis au Portugal de retirer, en 2010, le Mediator du marché. Le rapport de l'IGAS l'a souligné : quand un médicament est retiré du marché et qu'il y a des doutes, les autorités italiennes saisissent l'AFSSAPS, mais aucune suite n'est donnée. Dans ces conditions, je souhaite qu'à l'avenir, tout retrait d'un médicament du marché à l'initiative du laboratoire qui le produit soit systématiquement notifié aux autorités européennes, afin qu'elles puissent se pencher sur le cas.
Le commissaire Dalli a indiqué qu'il examinerait le premier point que je lui ai soumis. Je ne me fais pas son porte-parole, mais je pense qu'il compte donner un accord de principe sur les autres sujets, pour progresser sur ces questions et que la Commission nous apportera son soutien.
Je lui ai, enfin, indiqué que la transparence devait se faire à tous les niveaux. Ce que nous allons exiger au niveau de l'AFSSAPS, en cas de conflit d'intérêts, devra s'appliquer partout. Nous avons tout intérêt, quelles que soient les instances, à renforcer l'expertise indépendante et la transparence comme garantie d'indépendance.
Voilà ce que je suis allé dire à Bruxelles. Voilà ce que dont je veux maintenant discuter avec les parlementaires européens et avec mes homologues. Vous avez raison de le souligner, la cohérence d'articulation doit être totale. Je le dis devant Gérard Bapt et Jean-Pierre Door que mes propos n'étonneront pas. Nous avons juste aujourd'hui à les mettre en oeuvre.
Je suis ravie que vous soyez arrivé, monsieur le ministre. Nous allons peut-être pouvoir clarifier certaines choses.
Selon vous, madame Berra, 80 % des préconisations du rapport ont été prises en compte depuis sa sortie en 2088. Soit c'est un mensonge, soit c'est de l'humour. Nous n'avons pas le même. Pourriez-vous dire aux députés de quelles propositions il s'agit ? Franchement, cela m'étonnerait que cela nous ait échappé à tous.
Monsieur le ministre, vous avez parlé du Sunshine Act. Nous en avions parlé lors de votre audition au sujet du Mediator il y a deux semaines. Je crois que Mme Berra ne comprend pas bien ce que vous voulez dire, j'aimerais que vous vous mettiez d'accord. Vous parliez bien d'une déclaration de conflit d'intérêts, il ne s'agit pas simplement d'annoncer que l'on a travaillé dans tel laboratoire, Sanofi, Boehringer Ingelheim, mais de rendre compte de missions, avec les rémunérations à l'euro près, que l'on a exercées pas seulement au moment, mais bien avant de prendre des fonctions ministérielles ou d'entrer dans un cabinet.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de penser à mon avenir ministériel mais je préfère qu'on s'intéresse à votre présent. Vous avez mis en avant le gros rendement fiscal pour l'État de la clause de sauvegarde à la charge de l'industrie pharmaceutique. Cette clause de sauvegarde a un rendement zéro depuis 2007, M. Philippe Séguin en faisait déjà la remarque.
Aux assises du médicament, auxquelles vous m'avez gentiment conviée, monsieur le ministre, on a évoqué la dimension européenne, qui va forcément s'imposer à nous. Nous avons tout de même été un pays plus ou moins suiviste jusqu'à présent par rapport aux directives européennes sur le médicament. Le projet de loi de transposition n° 2789, par exemple, qui concerne notamment les dispositifs médicaux et a fait l'objet d'une CMP il y a deux semaines, impose déjà des obligations à la France.
Il y a tout de même un problème de pharmacovigilance. La directive 201084UE du 31 décembre dernier, qui définit des règles harmonisées concernant l'autorisation, la supervision et la pharmacovigilance applicables aux médicaments humains dans l'Union, va à l'encontre de ce que nous préconisons tous a priori. Selon cette directive, la pharmacovigilance serait assurée par les détenteurs de l'autorisation de mise sur le marché, c'est-à-dire les firmes, qui devront mettre à disposition des autorités compétentes les informations nécessaires à des fins de vérification et planifier des systèmes de gestion des risques soumis avec la demande d'AMM. Ces mêmes firmes seraient également chargées de réaliser des études de sécurité et d'efficacité post-autorisation afin de communiquer toute modification de nature à influer sur l'AMM. Pour faire simple, on demande aux firmes pharmaceutiques d'être juge et partie pour les médicaments qu'elles commercialisent. Pourtant, cette directive devrait être transcrite dans le droit français. Nous nous faisons donc du souci. J'espère que l'on sera extrêmement vigilant et rigoureux.
J'ai déjà posé la question aux assises du médicament mais tout le monde n'y était pas : Que fait-on dans le cas que l'on a connu l'année dernière ? En janvier 2010, l'agence du médicament, faisant son travail, demande le retrait du marché français des gels à base de kétoprophène, pour de bonnes raisons – ils ont causé plus de 300 brûlures graves au soleil. Le laboratoire Menarini fait appel au Conseil d'État…
C'est certainement important, mais cela fait trois minutes trente que vous vous exprimez.
Sans doute, monsieur Brard, mais, pour l'instant, je suis concerné par l'ordonnancement de nos travaux et j'ai été très large pour les temps de parole.
Monsieur le président, vous avez laissé la parole à M. le ministre et à Mme la secrétaire d'État.
C'était à la demande de votre groupe. Si vous voulez que l'on applique le règlement à la lettre, cela fait trois minutes quarante-quatre que vous parlez, le ministre a deux minutes pour vous répondre et l'on passe au débat suivant.
On parle de la santé des Français.
On retire donc les gels à base de kétoprophène. Le laboratoire fait appel devant le Conseil d'État, au motif qu'il faut attendre l'avis de l'Agence européenne du médicament, et que ce produit constitue le deuxième poste dans le chiffre d'affaires du groupe : son retrait le mettrait en difficulté cette année. L'Agence européenne du médicament donne raison au laboratoire et affirme qu'il faut remettre ces gels sur le marché, l'Agence du médicament les met donc sur la fameuse liste.
Quelles sont nos marges de latitude dans ce cas-là, monsieur le ministre ?
Sur le papier, franchement, on ne peut pas faire grand-chose, il faut donc changer les règles.
Ce que j'ai expliqué au commissaire Dalli, c'est que l'on ne pouvait plus avoir un tel système dans lequel, d'une certaine façon, le laboratoire choisit entre le niveau national et, si c'est compliqué, le niveau européen. Pour le Di-Antalvic, c'est l'Europe qui prend les décisions. Comment voulez-vous qu'il y ait une bonne lisibilité pour les patients ? Ils ont du mal à s'y retrouver entre les autorisations accordées au niveau national et celles qui peuvent être sollicitées au niveau européen, entre les interdictions et les demandes de retrait au niveau européen ou au niveau local.
Cela dit, j'assume totalement la décision que nous avons prise pour le Di-Antalvic. Elle a provoqué une grande émotion ; mais s'il y a retrait, ce n'est pas par hasard. C'est vrai que le produit est utile pour traiter la douleur. Mais, à partir du moment où le rapport entre bénéfice et risque n'est plus satisfaisant, il ne faut pas hésiter. Contrairement à ce qu'affirment certains, d'autres médicaments existent. Les quotidiens ne sont pas la revue officielle du ministère. Lorsqu'un patient est habitué à un médicament qui, a priori, ne lui a jamais posé de problème, cela change ses habitudes. Mais, au nom de la santé publique, il ne faut pas hésiter à prendre une telle décision. Il ne faut pas se précipiter. Mais cela faisait bien longtemps que c'était prévu, donc il ne faut pas hésiter.
Les dispositifs médicaux sont totalement concernés par les assises du médicament et par la réflexion en cours et j'ai demandé au commissaire européen de bien veiller à ce que certains laboratoires ne cherchent pas en permanence à intervenir aux deux niveaux de façon à ce qu'on perde en visibilité et en cohérence.
En ce qui concerne l'AFSSAPS, j'ai dit au professeur Maraninchi qu'il ne fallait pas hésiter à prendre des décisions parce que, pendant un moment, l'agence se demandait si la justice administrative n'allait pas la sanctionner. Ce n'est pas parce qu'il y a eu un précédent qu'il faut le transformer en jurisprudence qui freine les réflexions et, surtout, les décisions. Nous devons retrouver de la lisibilité.
Monsieur Mallot, j'ai oublié de vous dire qu'au niveau de l'Agence européenne du médicament, le commissaire Dalli allait mettre en place un « stress test » pour voir si, avec les nouveaux textes, une situation comme celle du Mediator pourrait se reproduire. C'est une initiative intéressante, il faudra voir ce que cela donne exactement.
Sur les conflits d'intérêt, madame Lemorton, il faut bien faire la différence pour les responsables publics entre avant, pendant et après. À la suite du rapport Sauvet, un projet de loi sera bientôt déposé. Tout ce qui s'est passé avant que l'on ait des fonctions publiques, il faut le déclarer. Pendant, on ne peut exercer aucune autre activité, c'est la Constitution qui le précise. Moi-même, en 2004, lorsque je suis entré au gouvernement, je n'avais pas connaissance de ce que prévoyait la Constitution. J'ai été obligé d'arrêter dans le mois qui suit toute activité professionnelle et notamment de céder mon cabinet d'assurances à la compagnie pour laquelle je travaillais. La question qui peut se poser, c'est ce qui se passe après. Mais il ne faut pas non plus créer de situations confuses. L'essentiel, et vous sembliez approuver, c'est de bien faire la différence entre la situation de conflit d'intérêts et la déclaration d'intérêts. Après, chacun a les informations en main et en fait ce qu'il veut. Cela permet d'avoir de la transparence et d'éviter les confusions.
L'ordre du jour appelle le débat sur le rapport de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale sur le fonctionnement de l'hôpital.
La parole est à M. Jean Mallot, coprésident et rapporteur de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale sur le fonctionnement de l'hôpital.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée de la santé, mes chers collègues, nous examinons le rapport sur l'hôpital public élaboré dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale que je copréside avec Pierre Morange dont je suis le rapporteur.
Ce rapport, intitulé Mieux gérer pour mieux soigner, formule quarante-six préconisations sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir dans le débat. Il a été remis et publié en juin 2010 après avoir été approuvé à l'unanimité par la MECSS puis par la commission des affaires sociales. Le Gouvernement, largement hors délai, nous a donné par un courrier du 27 janvier, reçu le 31, son point de vue sur nos préconisations.
Nous avons travaillé selon une méthode un peu différente de ce qui se fait d'ordinaire, en partant d'un cas particulier, celui du centre hospitalier intercommunal de Poissy-Saint-Germain. C'est le plus gros établissement hospitalier de la région Île-de-France après l'AP-HP, avec 1 300 lits. Il est né d'une fusion décidée en 1997 mais réalisée sans véritable projet médical. Son déficit était en 2008 de 35 millions d'euros, soit 17,5 % des recettes, le record de France. Cet établissement collectionne la quasi-totalité des dysfonctionnements que l'on peut constater dans le paysage hospitalier français. Il a dû d'ailleurs à une époque emprunter pour payer les salaires de ses agents, ce qui est tout de même une situation extrême.
Bref, nous avons trouvé des éléments instructifs, et nous avons voulu voir s'ils se retrouvaient dans les autres établissements du pays, de manière à préconiser des solutions adaptées.
Concernant cet établissement, la justice a été saisie par le directeur de la DASS au cours de l'été 2009 pour des irrégularités constatées sur des marchés publics. Si vous aviez des informations à cet égard, j'aimerais, madame la secrétaire d'État, que vous me disiez où en est la procédure. Nous, les auteurs du rapport, sommes un peu surpris de ne pas avoir d'informations sur ce point, notamment sur les suites données à l'enquête préliminaire.
Je souhaiterais ensuite savoir quelles sanctions administratives ont été prises à l'encontre des anciens dirigeants. Soit la gestion était bonne, soit, comme le dit le rapport de l'IGAS de l'époque, elle était critiquable et des mesures ont dû être prises, ;je ne sais pas lesquelles.
Enfin, je voudrais bien comprendre pourquoi le nouveau directeur, qui, certes, n'a pas résolu tous les problèmes, importants, mais a tout de même substantiellement réduit le déficit de l'établissement, est sanctionné comme je l'ai lu dans la presse.
Sur le problème plus général des hôpitaux, nous avons relativisé leurs déficits. Constat et nuances, il y a des hôpitaux excédentaires, d'autres qui sont déficitaires, mais, globalement, le déficit net est de 1 % environ de l'ONDAM hospitalier. Ce n'est pas négligeable mais ce n'est pas non plus la mer à boire. Les déficits sont assez concentrés puisque 70 % d'entre eux concernent les centres hospitaliers régionaux.
L'objectif fixé par le Président de la République est le retour à l'équilibre en 2012. Il ne faut pas pour autant oublier l'objectif fondamental qui est d'exercer le service public hospitalier, même si ce n'est peut-être pas à n'importe pas quel prix. C'est la raison d'être de notre formule : mieux gérer pour mieux soigner.
J'insisterai sur quelques points saillants qui sont ressortis au cours de nos travaux et qui ont débouché sur les préconisations formulées.
Il y a d'abord la difficulté dans ce monde hospitalier à transmettre les bonnes pratiques d'un établissement à l'autre. Je crois que cela saute aux yeux de tous les observateurs, que ce soit en matière d'organisation ou de gestion des urgences. Il y a aussi une disparité dans l'allocation des moyens pour une même activité entre deux établissements. La Cour des comptes l'a souligné, il y a des explications à trouver.
Deuxième point saillant, l'importance des personnels, en raison de leur nombre et de leur poids budgétaire – 70 % des charges –, mais aussi dans la mesure où ils sont la richesse de l'hôpital. De leur motivation dépend le fait que l'établissement fonctionne bien ou pas. Ce n'est pas uniquement une variable d'ajustement et je regrette que certains organismes ne considèrent le personnel que comme un sujet de réduction budgétaire, du cost killing, parfois évoqué, et non comme l'outil que l'on devrait au contraire mettre en évidence pour remonter la pente.
Le dialogue social est souvent défectueux et, en tout cas, rarement organisé au niveau de l'hôpital. Nous pensons que des progrès doivent être accomplis sur ce point. Nous souhaitons également que des mesures soient prises pour réduire la souffrance au travail et la pénibilité. Les personnels, à qui des efforts très importants sont demandés, souvent ne voient pas de contrepartie à ces efforts, ce qui est particulièrement regrettable.
Troisième point saillant : il est nécessaire, lorsque nous faisons évoluer le dispositif hospitalier sur le territoire, d'avoir des projets médicaux. Nous nous y prenons souvent, malheureusement, par le haut, alors qu'il faudrait organiser le service public hospitalier en réponse aux besoins de la population sur le territoire, éventuellement en réseaux, en pensant à l'accès aux soins ou à la correction des inégalités – territoriales, sociales, salariales –, en pensant l'hôpital non pas en soi mais intégré dans l'offre de soins sur le territoire. En bref, il faut restaurer un véritable service public hospitalier.
Le quatrième point saillant concerne le rôle des ARS. Celles-ci sont désormais installées et devraient être bientôt totalement opérationnelles. Leur rôle d'appui des établissements, notamment dans la recherche de l'efficience médico-économique, est très important. Elles doivent, notamment avec la HAS, élaborer, par exemple, des référentiels qualité. Elles doivent surtout clarifier le rôle et le travail de cette nébuleuse d'agences : l'ANAP, l'ATIH, que sais-je encore ? Lorsque nous interrogeons les dirigeants des établissements dans nos belles provinces, ils se demandent à quoi servent toutes ces agences : ils ne savent pas toujours ce qu'elles font et n'ont parfois pas même connaissance de leur existence. Ils ne connaissent en tout cas pas le résultat de leurs travaux.
Le cinquième sujet concerne la tarification, la fameuse TAA. Celle-ci est structurellement inflationniste puisqu'elle pousse à l'activité. Elle est d'ailleurs une fausse tarification dans la mesure où elle consiste à déterminer des clés de répartition d'enveloppe et non à donner un tarif au sens du marché.
Nous avons remarqué que, trop souvent, elle ne correspondait pas à une véritable comptabilité analytique. Des tarifs sont imposés aux établissements sans que les dirigeants puissent comparer les tarifs de telle ou telle activité au coût constaté dans leur hôpital. Ils n'ont pas les outils pour mesurer l'effet dans leur établissement de cette contrainte qu'ils doivent respecter.
Cela pose la question de la convergence intersectorielle, sur laquelle nous avons exprimé de très fortes réserves car les logiques des secteurs public et privé ne sont pas les mêmes. Nous aurons peut-être ce débat tout à l'heure.
S'agissant de la tarification, je ferai trois observations. Tout d'abord, il faut absolument clarifier le rôle de la tarification à l'activité. Est-ce un outil d'orientation vers telle ou telle pathologie ou pratique professionnelle, ou bien sert-elle à établir la vérité des prix, auquel cas des progrès restent à faire ? C'est un peu la situation de l'âne de Buridan : on ne sait pas si cette tarification à l'activité est un outil d'orientation ou de vérité des prix, et les dirigeants, dans l'incertitude, sont incités à une optimisation regrettable : optimisation du codage, recherche des activités mieux rémunérées…
Cela pose la question de la pertinence des séjours et des actes, qui nécessite un examen plus approfondi. Les études sur le sujet nous paraissent en effet insuffisantes.
Enfin, le système de tarification ne prend pas suffisamment en compte, ne valorise pas assez la qualité. Il faut absolument à la fois définir des critères plus précis pour évaluer cette qualité et la rémunérer de manière à inciter les établissements à l'améliorer.
Sixième point : il convient de retisser les liens qui se sont distendus entre la communauté médicale et l'administration hospitalière. La loi HPST a malheureusement accentué l'écart. Peut-être que l'organisation en pôles, qui doit être poursuivie, sera un moyen de progresser. En tout état de cause, il faut déployer des efforts en la matière, et je souhaiterais, madame la secrétaire d'État, vous entendre sur ce sujet.
Septième point saillant : la question de l'information des malades, avant l'hôpital, à l'intérieur de l'hôpital et après l'hôpital. Sur les trois plans, demandez à n'importe quel citoyen de notre pays : il n'est ni facile de se rendre au bon endroit avant une hospitalisation ni de se repérer dans l'hôpital, et, quant aux suites, des mesures sont là aussi nécessaires.
Huitième et dernier point : pour appréhender le sujet de façon plus prospective, à supposer que l'on ait résolu tous les problèmes que j'ai évoqués et sur lesquels nous avons présenté des préconisations, il convient de situer notre démarche dans la perspective de l'hôpital de demain. Il est bon de chercher à améliorer l'hôpital tel qu'il fonctionne aujourd'hui mais il faut aussi essayer d'imaginer ce que l'hôpital sera demain, avec le développement de la chirurgie ambulatoire, de l'hospitalisation à domicile, des thérapies géniques, de la télémédecine, laquelle ouvre des perspectives technologiques extrêmement structurantes pour les modalités du travail.
De même, il faut imaginer la manière d'organiser l'hôpital en réseaux sur le territoire et celle de donner aux personnels, notamment paramédicaux, des attributions valorisantes – ce que l'on appelle parfois les pratiques avancées –, en matière d'éducation thérapeutique ou de traitement des maladies chroniques, pour ne prendre que quelques exemples.
Il y a là des pistes d'évolution qui nous permettent de prévoir ce que pourrait être l'hôpital de demain, et c'est dans ce contexte nouveau qu'il nous faut faire vivre les quarante-six préconisations que j'ai évoquées.
En conclusion, ces préconisations méritent de retenir l'attention du Gouvernement. Nous souhaitons, madame le secrétaire d'État, vous entendre sur l'application que le Gouvernement entend en faire, dans la perspective que j'ai décrite. En attendant, mes collègues ne manqueront pas de compléter mon modeste propos. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Pierre Morange, co-président de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, cette séance de contrôle parlementaire va permettre l'examen attentif de deux rapports produits par la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, structure pour laquelle j'ai une affection toute particulière puisque j'ai été à l'initiative de sa création en 2004. Cette structure paritaire a acquis ses lettres de noblesse en termes de légitimité et de crédibilité dans la mesure où ses préconisations recueillent toujours l'unanimité de ses membres, afin de parvenir de façon consensuelle à l'efficience, qu'elle soit médico-économique ou socio-économique, dans l'intérêt de nos concitoyens.
Je tiens à saluer la qualité des deux rapporteurs qui se sont exprimés cet après-midi, sur les sujets du médicament et de l'hospitalisation. Chacune de leurs préconisations a été votée à l'unanimité ; il est important de le signaler.
S'agissant de cette mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, notre collègue Jean-Pierre Brard a craint que ces préconisations soient vouées à un classement vertical. Je tiens à l'assurer de la ténacité de la MECSS, en en donnant deux exemples.
Le premier concerne les travaux que nous avons menés sur les coûts de gestion, dont Jean-Pierre Door a été le rapporteur et où je m'étais particulièrement investi. Ces travaux ont permis le non-renouvellement d'un départ à la retraite sur deux dans le cadre de la généralisation de la télétransmission – la feuille de maladie étant désormais transmise par voie informatique –, dégageant quelque 150 millions d'euros d'économies au titre des salariés de l'assurance maladie.
Second exemple : j'ai fait voter en décembre 2006, par voie d'amendement, l'interconnexion des 1 750 fichiers des structures sanitaires, sociales et médico-sociales et leur croisement avec ceux du fisc, dans la logique de rationalisation, de vérification de la bonne utilisation de l'argent public et de lutte contre la fraude sociale, thématique sur laquelle travaille actuellement la MECSS, avec notre rapporteur Dominique Tian.
Ce sont deux exemples concrets de l'efficacité de la MECSS, qui n'a pas vocation à accepter le classement vertical à propos duquel notre collègue a formulé quelques craintes.
En ce qui concerne l'hospitalisation, je ne reviendrai pas sur les propos de Jean Mallot, co-président de la MECSS et rapporteur. Celui-ci a rappelé que nous avions souhaité aborder ce sujet majeur – qui concerne quelque 71 milliards d'euros, pour un million d'équivalents temps plein, sur quelque 3 000 établissements de santé publics et privés structurant notre système de soins – dans une démarche de terrain. Nous avons en effet souhaité partir de cas particuliers, significatifs et emblématiques, dont les dysfonctionnements pouvaient nous permettre de tirer des conséquences et de formuler des préconisations dans l'intérêt général.
Ce sont ainsi les débordements constatés dans un établissement choisi pour sa situation financière dégradée, le centre hospitalier de Poissy-Saint-Germain-en-Laye, qui nous ont permis de formuler les quarante-six préconisations qui viennent d'être rappelées.
Les dysfonctionnements en question, absence d'outils de mesure, insuffisance des moyens de comptabilité analytique et de perception de recettes, non-maîtrise du codage des actes, voire – constat fait par les services de l'État – violations du code des marchés publics, ont fait ouvrir des yeux écarquillés aux membres de la représentation nationale. Nous n'avons pu que dresser le constat d'une série d'errements sur les quinze dernières années.
Nous souhaiterions à ce sujet, comme l'a souligné Jean Mallot, connaître les suites en termes de sanctions administratives si les conclusions du directeur départemental de l'action sanitaire et sociale étaient suivies ; nous n'en avons pas été informés. Je rappelais la ténacité de la MECSS : elle s'inscrira toujours dans cette logique de droit de suite, à laquelle nous sommes extrêmement attachés.
Au-delà de la question des hommes qui ont vocation à servir un intérêt supérieur, celui de la santé, il était tout aussi important d'inscrire la réflexion dans un projet sanitaire de territoire. Si je décline le cas particulier d'un établissement, c'est qu'il présente un caractère d'exemplarité dans les dysfonctionnements de l'offre de soins sur notre territoire. Le beau projet, porté par Mme Roselyne Bachelot, de construction d'un hôpital sur un site unique, en remplacement des centres hospitaliers de Poissy et de Saint-Germain-en-Laye, dans l'intérêt de quelque 700 000 habitants – excusez du peu –, a été remis en cause par l'expression opérationnelle du projet, l'Agence régionale de santé. Ce revirement a laissé perplexe la représentation nationale, en raison de la confusion dont il témoigne.
Enfin, les hommes qui avaient reçu mission de revenir à l'équilibre financier, conformément à la directive du Président de la République…
Ne commencez pas à répondre à M. Brard, monsieur Morange, sinon vous allez dépasser votre temps de parole ! (Sourires.)
L'équipe administrative a réussi le tour de force de diviser par quatre le déficit annuel, le faisant passer de 38 millions d'euros à quelque 8 millions d'euros à la fin de l'exercice 2010.
Fort de ces chiffres, on aurait pu imaginer que les uns seraient sanctionnés pour le non-respect du code des marchés publics et les autres récompensés pour ce tour de force financier. Or c'est l'inverse que nous avons constaté, et c'est un peu fort de café ! Les personnes qui devaient être sanctionnées ont été promues tandis que celles qui devaient être récompensées ont été sanctionnées puisque le directeur général a été licencié, par voie médiatique : il s'agit en réalité d'une démission, mais quelque peu forcée, alors que cette personne incarnait la vertu budgétaire.
Il est permis de se demander quelle est la cohérence de ces décisions, comme de s'inquiéter des risques qu'un tel exemple peut faire peser sur la santé de nos concitoyens. Car, ainsi que je l'ai dit lors d'une audition de Mme Roselyne Bachelot, les risques financiers d'aujourd'hui sont les risques sanitaires de demain et les risques judiciaires d'après-demain. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, messieurs les co-présidents, mes chers collègues, la MECSS s'est penchée sur le fonctionnement de l'hôpital public et, après de nombreuses auditions, a présenté un rapport, le 26 mai 2010, avec de nombreuses propositions, quarante-six au total, pour mieux soigner.
L'hôpital, c'est-à-dire les établissements de santé publics, joue un rôle majeur dans notre système de santé. Les missions de service public ont été redéfinies dans la loi HPST – soit quatorze missions –, laquelle permet d'ailleurs qu'elles puissent être exercées par les établissements privés. Cependant, l'hôpital accueille vingt-quatre heures sur vingt-quatre tous les patients, sans aucune sélection, y compris les cas sociaux, les personnes couvertes par l'aide médicale d'urgence et les détenus, prend en charge les soins palliatifs, participe à l'enseignement et à la recherche. C'est donc le pilier majeur de notre système de santé.
Les établissements de santé proposent aujourd'hui 222 000 lits en hospitalisation complète MCO – médecine, chirurgie, obstétrique –, dont 140 000 dans les établissements publics, soit 66 % ; les établissements privés non lucratifs ont 18 900 lits, les établissements privés à but lucratif, 55 800 lits. Les établissements publics totalisent 6 540 000 entrées par an, soit 63 %. Ces derniers assurent donc une grande majorité des séjours de médecine et d'obstétrique, les établissements privés assurant près de 50 % de la chirurgie.
Les établissements ont beaucoup évolué depuis quelques années, ils se sont modernisés grâce à des investissements importants, qui pèsent d'ailleurs sur leur budget. Ils permettent de dispenser des soins de qualité, et disposent de tous les moyens thérapeutiques et de diagnostic, quoique parfois en nombre insuffisant, notamment dans certaines régions. Les pratiques évoluent également avec une diminution importante de la durée moyenne de séjour et le développement des alternatives à l'hospitalisation, parmi lesquelles la chirurgie ambulatoire et l'hospitalisation à domicile – l'HAD.
La loi HPST a modifié la gouvernance. La tarification à l'activité a, elle aussi, un impact important sur le fonctionnement des établissements et sur l'accueil des patients.
Au niveau national, les dépenses de santé remboursables, représentées par l'ONDAM, sont pour 2011 de 167 milliards. Les établissements publics et privés ont un financement prévu de 73 milliards, les établissements MCO publics et privés de 54 milliards, les établissements publics MCO de 39 milliards seulement. Nous sommes donc bien loin du chiffre souvent avancé de 50 % des dépenses de santé, qui se montent, je vous le rappelle, à plus de 200 milliards. Il n'empêche que la loi de financement de la sécurité sociale prévoit un déficit de 10 milliards cette année. Il est donc important d'étudier le fonctionnement de l'hôpital pour veiller à l'efficience, à ce que chaque euro dépensé le soit à bon escient.
Pour obtenir l'efficience, il convient de mobiliser tous les acteurs. Cependant, il faut reconnaître que les établissements de santé sont confrontés à des difficultés, certes financières en raison de déficits – mais ceux-ci sont globalement de l'ordre de 1 %, comme l'a rappelé notre collègue Mallot, ce qui n'est ni dramatique ni insurmontable –, mais aussi à des capacités d'autofinancement dégradées. Récemment, madame la secrétaire d'État, des sanctions financières infligées par la CNAM n'ont rien arrangé ; de plus, elles sont souvent disproportionnées car on ne prend en compte que les mauvais classements et pas les autres. Je souhaite avoir votre opinion sur ces sanctions. Les établissements de santé sont aussi confrontés à une vraie démobilisation des personnels. Le fait que la CME ne vote pas le projet médical, ne se prononce pas sur les décisions importantes concernant l'établissement, contribue beaucoup à cette démobilisation, notamment chez les médecins.
Quant aux conseils d'administration, ils ont été supprimés, ce qui a retiré tout pouvoir aux élus.
M. le ministre de la santé, qui nous a malheureusement quittés, a indiqué, lors de la discussion au Sénat de la proposition de loi Fourcade, qu'un projet de loi concernant l'hôpital pourrait être déposé d'ici le printemps. Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous le confirmer, et ce nouveau texte modifiera-t-il la gouvernance de l'hôpital que l'on vient à peine de voter ? J'aimerais savoir ce que vous en pensez. La proposition de loi Fourcade sera-t-elle l'occasion de toiletter la loi HPST, non seulement s'agissant de l'ambulatoire mais aussi de l'hôpital ? Pour ma part, je m'efforcerai d'y veiller. J'espère bien entendu que les amendements que je déposerai seront pris en compte par le Gouvernement.
Les établissements de santé sont confrontés aux problèmes de démographie médicale, avec des postes non pourvus. Ils doivent donc faire appel à des remplaçants itinérants fort coûteux et à des médecins à diplômes extra-européens.
Si nous voulons améliorer notre système de santé, permettre l'accès de tous à des soins de qualité, sans reporter sur nos enfants nos propres dépenses, nous devons faire des progrès dans l'efficience. Nous devrons à cet effet voter en 2012 une loi de financement de la sécurité sociale en équilibre, notamment s'agissant de la santé. Il y a donc 10 milliards à trouver d'ici là, soit grâce à des économies, soit grâce à des recettes supplémentaires.
Le rapport de la MECSS, après d'autres rapports, dont celui de notre collègue René Couanau, est donc très intéressant. À la suite de ses travaux, quarante-six propositions ont été faites. Seront-elles prises en compte ? Le groupe Nouveau Centre le souhaite. Il espère que, d'ici quelque temps, vous nous annoncerez que 80 % des propositions ont été prises en compte.
Il est notamment nécessaire d'améliorer le pilotage médico-économique des établissements. Ainsi, l'administration centrale devrait se mobiliser sur le thème de l'efficience et définir des priorités nationales. Il sera intéressant de suivre le rôle de l'ANAP – l'Agence nationale de l'appui à la performance –, qui s'est fixé dix axes d'action. Un suivi de ces axes avec un bilan de son action serait à surveiller. Je pense, messieurs les co-présidents, que la MECSS s'intéressera à cette question.
Il est souhaitable de diversifier l'origine des directeurs d'établissement, en théorie aujourd'hui les vrais patrons de l'hôpital, mais en réalité sous la surveillance étroite des ARS,…
…qui les nomment, les évaluent, les limogent, et qui proposent des contrats d'objectifs et de moyens avec les pressions que l'on connaît.
Les auditions ont permis de constater que les systèmes d'information sont insuffisants, souvent non interopérables. Des progrès en ce domaine sont donc, là aussi, indispensables. La comptabilité analytique est parfois embryonnaire alors qu'elle est, elle aussi, indispensable pour analyser et contrôler la gestion. La délégation et la responsabilisation au niveau des pôles peuvent constituer une piste intéressante, mais il faudra voir dans quelle mesure celle-ci sera suivie.
La MECSS souhaite développer le fonctionnement des blocs opératoires, dont l'utilisation est loin d'être optimale comparativement aux établissements privés. En effet, à l'hôpital public, les chirurgiens ne sont pas toujours motivés. Il convient aussi d'améliorer la planification de l'activité avec étude du coût de fonctionnement des salles. Ce cas est particulièrement frappant, mais le problème concerne aussi les équipements de radio : IRM, scanners. Cela montre l'importance de la motivation de tous les acteurs : médicaux, paramédicaux, administratifs. Madame la secrétaire d'État, le statut unique de la fonction publique est-il adapté, puisque l'on peut gravir les échelons sans que soit prise en compte la motivation, y compris celle du médecin ?
La MECSS préconise également le développement de la chirurgie et de la médecine ambulatoires dans l'intérêt des patients et de la qualité des soins. Encore faut-il que la tarification variable ne pénalise pas ces modifications d'activité – on a vu ce qui est arrivé il y a quelques jours… – ; encore faut-il pour le patient que les soins en ambulatoire et le suivi soient assurés, notamment par le développement des hospitalisations à domicile.
Il est souhaitable également de développer les référentiels et les bonnes pratiques pour les examens complémentaires radiologiques et biologiques, selon les stratégies thérapeutiques en fonction de la pathologie.
Il est encore nécessaire de mettre en place des filières de soins, notamment pour la gériatrie, et de veiller aux lits d'aval dont on manque aujourd'hui pour la convalescence et les soins de suite, y compris dans les EHPAD – les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Il n'est pas possible de regretter l'inadaptation de l'occupation des lits, comme je l'entends fréquemment, si l'aval n'est pas assuré ! Les malades arrivent aux urgences, mais il n'y a pas de lits en MCO parce que des malades stagnent dans les services faute de lits en aval. Madame la secrétaire d'État, cela devrait être une vraie priorité, non seulement pour vous mais aussi pour les ARS. Puisque vous aimez leur donner des consignes, voilà une bonne consigne à leur transmettre : développer les lits en aval.
Il serait par ailleurs nécessaire d'améliorer la fonction « achats » en ayant recours aux groupements d'achats, en veillant au respect des règles relatives aux marchés publics – ce qui n'est pas toujours le cas.
II convient de clarifier les règles de tarification, la fixation des tarifs et les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation – les MIGAC.
Par ailleurs, pourquoi ne pas prendre en compte la qualité dans le financement ? La Cour des comptes a clairement indiqué des variations importantes dans les dotations financières selon les régions et les établissements : il conviendrait de les réduire.
L'hôpital joue un rôle majeur dans notre système de soins ; il pèse lourd dans les dépenses. L'efficience est nécessaire. Des pistes ont été tracées. Leur mise en oeuvre est souhaitable, mais pour obtenir un résultat, l'idéal est certainement de responsabiliser chacun des acteurs. Or il n'est pas évident que la loi HPST soit allée dans ce sens et y contribue.
Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour votre écoute, et par avance pour vos réponses. (Applaudissements sur divers bancs.)
Sur le fondement bien entendu de l'article 58-1, monsieur le président. Mon rappel au règlement a en effet trait au déroulement de nos travaux : il est seulement prévu une heure pour débattre du fonctionnement de l'hôpital, c'est-à-dire, en fin de compte, des conséquences sur l'hôpital de la loi HPST. Rappelez-vous, monsieur le président, que sur tous les bancs, nombre de collègues avaient mis en garde le Gouvernement sur son projet de loi. Aujourd'hui, la vie nous donne raison : les dégâts causés par cette loi dans nos hôpitaux sont extrêmement inquiétants.
Je vais citer un exemple que vous connaissez, monsieur le président, en tant qu'élu de Seine-Saint-Denis : la suppression des urgences chirurgicales de nuit et de week-end dans neuf hôpitaux sur dix.
Bien sûr que si, monsieur Bur : c'en sont les conséquences. Je sais que quand on veut tuer son chien – même en Alsace –, on dit qu'il a la rage.
Madame la secrétaire d'État, j'apprends qu'il va y avoir un nouveau texte de loi sur l'hôpital. M. Mallot a évoqué la souffrance des personnels hospitaliers, leur démoralisation. Je constate cette démoralisation à l'hôpital de Montreuil, je l'ai vu récemment à l'hôpital Tenon, à l'hôpital Trousseau où il y a des équipes aussi remarquables que celle du professeur Garabedian, une équipe que vous démantelez, liquidez, malgré le potentiel de recherche qu'elle représente !
Vous réduisez les moyens et, en plus, vous avez donné des pouvoirs exorbitants aux directions d'hôpital, piétinant les communautés médicales…
… et marginalisant les politiques. Quant aux méthodes de direction, M. Préel en a fait le réquisitoire. Son réquisitoire est pire encore que celui de Jean Mallot.
En effet, mon cher collègue. Pourtant, il n'est pas de gauche puisqu'il est élu non seulement Nouveau Centre, mais de Vendée !
Je terminerai par une question : allons-nous avoir une vraie discussion, suffisamment longue, pour évaluer les premières conséquences de cette loi sur l'hôpital ? Cela permettrait déjà de mettre un coup d'arrêt aux méthodes brutales des directions d'hôpital, qui sont là comme un simple prolongement des ARS. Elles embauchent des directeurs du personnel semblables à ceux de France Télécom, qui maltraitent le personnel !
Monsieur Brard, j'ai cru comprendre que vous terminiez votre rappel au règlement, qui en fait se révèle être une question posée à Mme la secrétaire d'État. De surcroît, vous avez déjà dépassé le temps de parole autorisé pour un rappel au règlement.
Monsieur le président, en tant qu'élu de la Seine-Saint-Denis, vous êtes parfaitement au courant de tout ce que je décris. Je souhaite, madame la secrétaire d'État, chers collègues qui ont été membres de la mission, que nous tenions un débat beaucoup plus long pour remettre tout à plat et arrêter les dégâts provoqués délibérément au détriment de la santé publique, et qui lassent les médecins !
Mon cher collègue, un tel débat ayant été demandé par la commission des affaires sociales, je vous indique que son président vous a entendu. Mais nous allons poursuivre, sinon nous n'arriverons même pas au terme de celui-ci.
Monsieur le Président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, dans le contexte d'un ONDAM maîtrisé en 2010 à plus 3 % et dont la croissance pluriannuelle est programmée en diminution – 2,9 % cette année et 2,8 % en 2012 –, l'hôpital est confronté à un effort ambitieux de maîtrise de ses coûts. En effet, pour 2011, la prévision de la hausse d'activité est fixée à 2,4 % alors qu'elle était de 1,7 % en 2010, ce qui aura pour conséquence, afin de respecter l'enveloppe tarifaire, une diminution de 0,20 % des tarifs avant la convergence tarifaire et de 0,70 % en moyenne après l'effort de convergence, chiffré à 150 millions d'euros.
Dans ce contexte financier tendu, il est impératif de veiller à la pertinence des actes tarifés pour éviter un effet volume injustifié, mais aussi pour imputer la dépense uniquement sur des actes médicalement utiles. Une démarche d'évaluation de la pertinence des actes me paraît une nécessité quand on connaît la très grande hétérogénéité des pratiques : il me suffit de rappeler ici des exemples comme la progression des césariennes non médicalement justifiées, les différences de prévalence interrégionales d'actes comme l'appendicectomie ou l'utilité douteuse des radiographies crâniennes, pour lesquelles la Cour des comptes a estimé l'économie potentielle à plus de 30 millions d'euros.
Encore faut-il que la diversité des pratiques médicales au sein des établissements hospitaliers, entre les divers établissements et entre les différents territoires, puisse être mieux objectivée et mieux partagée. C'est la raison pour laquelle il me paraît indispensable et urgent que l'assurance maladie publie un bilan national et comparatif par région – qualitatif et quantitatif – de la prévalence des actes et des interventions chirurgicales.
Objectiver des pratiques divergentes non médicalement justifiables constitue un exercice de transparence indispensable pour inciter l'ensemble des acteurs de l'hospitalisation à une réelle prise de conscience sur la pertinence des actes et des pratiques. Cette information doit être élaborée et partagée dans les meilleurs délais car elle permettra, outre l'intérêt pour la santé du patient – objectif premier –, d'engranger des économies latentes. Il faudra, et c'est essentiel, impliquer la communauté médicale à l'intérieur des établissements. La réflexion sur la pertinence des actes doit faire l'objet d'une action au sein de chaque établissement, dans chaque pôle d'activités médicales et de manière transversale. Il est bon de rappeler que la MECSS a proposé de donner un caractère opposable aux guides de bonnes pratiques. Une telle disposition pourrait « remédicaliser » la tarification d'une manière beaucoup plus légitime que certains contrôles engagés par l'assurance maladie en dehors de tout référentiel professionnel partagé par tous.
Une telle démarche, initiée d'ailleurs par la FHF, qui s'est engagée à la faire partager par l'ensemble des établissements publics, permettrait de limiter l'incitation économique à la multiplication des actes, notamment si elle pouvait être accompagnée par la revalorisation des actes intellectuels dans la CCAM et des GHM complexes dans la T2A.
Pour réussir une telle évolution, indispensable afin d'affecter les moyens de l'ONDAM à des prises en charge médicalement irréfutables, le rôle de la Haute Autorité de Santé me paraît essentiel dans la définition et la diffusion des recommandations de bonnes pratiques qu'il faut rendre opposables. De plus, les établissements peuvent et doivent tirer davantage parti des processus de certification conduits par la HAS. L'autoévaluation des pratiques sera ainsi d'autant plus efficace qu'elle s'appuiera utilement sur les données comparatives publiées par l'assurance maladie. Il s'agit là encore d'une recommandation de la MECSS.
Dans un contexte économique insuffisamment dynamique, compte tenu notamment de l'affaiblissement de la compétitivité de notre tissu industriel, les moyens à consacrer à notre système de santé risquent d'être durablement limités. Il est donc impératif d'optimiser encore et toujours l'utilisation des 162 milliards d'euros consacrés aux soins des Français. L'hôpital doit apporter sa contribution à cet effort de rationalisation de la dépense à travers des efforts de gestion plus rigoureuse. Le mouvement est lancé et de plus en plus d'établissements retrouveront dans des délais proches des situations d'équilibre financier. J'ai la conviction que l'hôpital public est aussi prêt-à-porter, avec sa tutelle et les ARS, cet effort de recentrage des pratiques fondé sur la pertinence médicale des actes.
Je conclurai en disant que, si la pertinence des soins doit être une notion intégrée par le corps médical dès sa formation initiale, il ne faut pas négliger le patient lui-même. Premier intéressé à la pertinence des actes dans un contexte de maîtrise des dépenses synonyme d'efficacité des soins, le patient doit être mieux informé et mieux éduqué sur les actes proposés. Il s'ensuivra un changement dans les pratiques et prescriptions médicales, comme celui qu'on a pu constater à la suite de l'information de masse sur la consommation d'antibiotiques, qui a porté ses fruits – fût-ce partiellement – et qu'il faudrait d'ailleurs utilement relancer. La dynamique positive qui s'était instaurée est en train de s'essouffler, en effet, et l'on note une reprise de la consommation d'antibiotiques.
Voilà, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les observations que je souhaitais formuler dans le cadre de ce débat sur le fonctionnement de l'hôpital. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur divers bancs.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, l'hôpital a connu, peut-être devrais-je dire a subi, de grandes transformations tant dans son fonctionnement que dans sa gouvernance et, bien sûr, dans ses rapports avec l'assurance maladie. Il faut toutefois remarquer que l'accumulation des réformes et la rapidité de leur succession n'ont guère laissé aux personnels le loisir de maîtriser les nouveaux outils.
Je voudrais tout d'abord insister sur le fait que l'hôpital public reste la pierre d'angle la plus importante de notre système de santé, et cette importance est sans doute accrue depuis que la baisse de la démographie médicale fait sentir ses effets. Dans certains territoires, on pourrait même parler d'effondrement démographique, tant en médecins généralistes qu'en médecins spécialistes en particulier au tarif conventionné de la sécurité sociale. Cette situation rend le recours à l'hôpital quasiment obligatoire.
En témoigne notamment l'encombrement des services d'urgence qui ont conduit les personnels médicaux et soignants de ces services à mener de nombreuses actions revendicatives. Je n'y insisterai pas, me bornant à souligner que la dégradation de leurs conditions de travail était et demeure souvent insupportable.
Malgré toutes ces avanies, l'hôpital reste cependant un lieu où les Français vont en confiance même s'ils ont une claire conscience que la disponibilité du personnel, souvent débordé, n'est plus ce qu'elle fut il y a encore quelques années.
On touche là du doigt le paradoxe et les effets souvent désastreux d'une politique de restrictions budgétaires aveugles au moment même où, à cause du vieillissement de la population, du progrès dans la façon de soigner certaines pathologies lourdes, de la panne démographique dans nombre de spécialités médicales, à cause aussi des changements intervenant dans notre société, dans laquelle s'accroissent la solitude et les problèmes de santé mentale, l'hôpital, bien que malmené, est devenu le phare de notre système de santé. C'est d'autant plus vrai que, grâce des équipes soignantes dynamiques, il a pu s'ouvrir davantage sur la santé en ville grâce aux réseaux Ville-Hôpital qu'il faut encourager.
En revanche, en tant que président d'un conseil d'administration – ou plutôt d'un conseil de surveillance – d'un grand hôpital public, je voudrais témoigner de difficultés persistantes, voire nouvelles.
Je commencerai par pointer la difficulté de trouver du personnel infirmier. Elle est particulièrement sensible en région parisienne, eu égard aux conditions de transport et de logement qui entraînent une fuite assez rapide de nos jeunes infirmières et infirmiers et par là même une désorganisation incessante des pôles et des services.
Par ailleurs, une intention particulière doit être portée aux IBODE et aux IADE, qui font vivre et prospérer un bloc opératoire et dont l'absence, compensée souvent à des coûts exorbitants par le recours à l'intérim, entraîne une baisse d'activité des blocs chirurgicaux et donc une perte de recettes, et bien entendu une insatisfaction des patients et des praticiens.
Or j'ai découvert avec effarement qu'au moment même où ces spécialités infirmières deviennent si rares, il se perpétue un enseignement privé, réservé bien sûr aux infirmières déjà diplômées ayant passé un concours pour se spécialiser, et fort onéreux puisqu'il peut coûter jusqu'à 10 000 euros par an. Ne croyez-vous pas, madame la secrétaire d'État, que cette situation est injuste, ridicule et va à l'encontre du but poursuivi ?
Le deuxième point de mécontentement vient du fait qu'aux fonctions soignantes se surajoute une énorme tâche bureaucratique avec de nombreux comités et commissions où s'épuisent médecins et cadres de santé : comité de lutte contre les infections nosocomiales, commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge, commission d'hémo-vigilance, comité d'activité libérale, et j'en passe bien entendu beaucoup… Certes, chacun de ces organismes a son intérêt. Mais leur accumulation donne l'impression qu'à l'hôpital, on passe désormais plus de temps en réunions qu'au chevet du malade. Il faudrait donc clarifier les choses.
Enfin, je voudrais aborder dans une troisième et dernière partie les questions budgétaires, dont, je le précise, je ne suis pas spécialiste. Mais je constate que la T2A doit être largement améliorée. En effet, elle produit des effets pervers, notamment, et sans rentrer dans des détails techniques, pour les hôpitaux ou les services mono- organe. Elle compare des poids moyens de dépenses entre hôpitaux et structures peu comparables et fait régner un climat très désagréable entre les équipes de direction, les médecins et les syndicats de personnels.
J'attire également votre attention sur le fait que le secteur de la psychiatrie est resté très à l'écart de la loi HPST. Cela avait été convenu au moment de sa discussion mais il était prévu – et ce moment est venu – d'examiner la spécificité de l'activité psychiatrique dont on connaît les particularités : diminution du nombre de lits, parfois de façon dramatique, organisation en secteurs depuis les années soixante qui, aujourd'hui, ne concordent pas toujours avec les territoires de santé tels qu'ils ont été définis par la loi de 2009. En outre, les dépenses sont nécessairement différentes et plus élevées tant la multiplicité des structures extra-hospitalières – CMP, appartements d'accueil, foyers thérapeutiques divers… – rend inapplicable la T2A. Je sais qu'une réforme est en cours. Mais, puisque la proposition de loi Fourcade l'a encore repoussée, pouvez-vous nous dire, madame la secrétaire d'État, quand nous pourrons, enfin, envisager une application plus raisonnable des nouvelles dispositions à la psychiatrie ?
En conclusion, je souhaite qu'à l'occasion du rapport de la MECSS un nouveau souffle soit accordé à l'hôpital pour redonner de l'espoir au monde hospitalier aujourd'hui désemparé, comme l'ont exprimé par exemple récemment les présidents de CME dans un entretien qui a été, malgré tout, qualifié de positif. Alors, essayez de positiver, madame la secrétaire d'État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)
Madame la secrétaire d'État, ce débat sur le fonctionnement de l'hôpital me donne l'occasion de vous entretenir d'une ancienne connaissance de M. le ministre de la santé : le centre hospitalier Gabriel-Martin de Saint-Paul dont M. Bertrand a découvert la vétusté lors de la crise du chikungunya qui a frappé la Réunion en 2005. Alors que, selon les déclarations ministérielles de l'époque, le pôle sanitaire de l'Ouest aurait dû être inauguré en 2010, nous en sommes toujours à attendre des décisions concrètes dans le cadre du plan Hôpital 2012.
Ainsi la population du territoire de santé Ouest de la Réunion – 207 000 habitants – doit-elle continuer à se satisfaire d'un centre hospitalier sous-dimensionné, dont les locaux sont vétustes, saturés en permanence et totalement inadaptés aux exigences de qualité et de sécurité des soins.
En dépit de la remarquable implication des équipes médicales et soignantes pour faire face à une demande de soins toujours en augmentation, cette situation n'est plus tenable. Et elle n'est plus acceptable non plus. Les conditions d'accueil des patients autant que les conditions de travail des personnels ont été jugées assez désastreuses pour qu'un Premier ministre et tous les ministres de la santé successifs apportent leur ferme soutien au projet de pôle sanitaire Ouest.
Faut-il rappeler que la construction de ce nouvel hôpital s'inscrit dans une opération qui vise à recomposer l'offre de soins sur le territoire ouest de la Réunion ? L'objectif est de fédérer les acteurs présents de façon à proposer à la population une offre de soins graduée, coordonnée et, bien sûr, modernisée.
Cet ambitieux projet du pôle sanitaire de l'Ouest a été initié il y a près de quinze ans. Mais pour l'empêcher jusqu'ici d'aboutir, trop d'obstacles se sont dressés devant lui. Pendant de longues années, il s'est heurté à l'opposition des autorités de tutelle locales de l'époque, lesquelles avaient conditionné la réalisation du PSO à une opération de partenariat publicprivé avec le principal groupe hospitalier privé commercial de la Réunion. Cette coopération devait notamment porter sur les activités médicales, les activités chirurgicales et sur un ambitieux projet de regroupement d'un pôle mère-enfant.
En dépit des tentatives de la communauté hospitalière publique de l'Ouest pour parvenir à une coopération organisée, raisonnable et équilibrée en vue d'une offre de soins de qualité accessible à toute la population, ce partenariat n'a pas abouti.
L'établissement hospitalier public a récemment actualisé les données médico-économiques nécessaires à la validation du projet par les instances nationales dans le cadre du plan Hôpital 2012. Les questions foncières sont réglées. Le concours d'architecte est lancé. Nous attendons aujourd'hui des décisions pour avancer.
Personne ne comprendrait que le PSO ne soit pas une priorité. Nous aurions du mal à admettre que l'enveloppe financière sollicitée, à savoir 23 millions d'euros de subvention sur un montant total estimé à 156 millions d'euros soit, une fois encore, refusée par l'État.
J'entends ici et là que le soutien de l'État à la construction du pôle sanitaire Est de la Réunion, d'une part, l'annonce d'un effort très important pour la reconstruction du CHU de Pointe-à-Pitre, d'autre part, joueraient contre le PSO. Rassurez-nous, madame la secrétaire d'Etat. Dites-nous que la sécurité sanitaire ne rime pas avec la compétition entre les territoires, surtout quand ils sont séparés par des milliers de kilomètres et quand les besoins sont si importants.
La région Réunion continue à être la lanterne rouge en matière d'offre de soins hospitaliers. Elle souffre des taux d'équipement les plus faibles de France en médecine, en chirurgie, en soins de suite et de réadaptation, en psychiatrie générale.
Notre région a le triste privilège d'être le territoire le plus mal équipé en structures d'accueil médicalisées pour personnes âgées et personnes handicapées.
Au-delà de la nécessaire reconstruction du centre hospitalier Gabriel-Martin, notre ambition pour une démarche exemplaire de coopération reste intacte. Nous sommes en effet convaincus que c'est là la réponse adaptée et juste aux besoins de la population.
Avec l'ensemble des acteurs du territoire Ouest, et avec l'appui de l'agence régionale de santé Océan Indien, nous souhaitons que le pôle public hospitalier soit le pivot d'une offre de soins coordonnés qui propose à la population des parcours de santé lisibles et fluides.
Le projet médical du territoire Ouest prévoit aussi un rapprochement de l'hôpital Gabriel-Martin et de l'établissement de santé mentale de la Réunion, ainsi que de fortes mutualisations public-public en termes de logistique technique et administrative. Des synergies entre soins généraux et santé mentale sont également envisagées.
L'agence de santé Océan Indien soutient cette démarche et vient de renforcer le dispositif de pilotage de l'opération en nommant un directeur de projet. Mais, vous l'avez compris, tout cela reste conditionné au soutien financier de l'État, donc à votre réponse, que nous attendons impatiemment. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les établissements de santé publics et privés constituent le premier poste de dépenses de l'assurance maladie, non seulement en volume, mais également en taux de prise en charge, dans la mesure où l'assurance maladie assume plus de 85 % des dépenses hospitalières, qui s'élèvent à un peu plus de 70 milliards d'euros.
Cette situation mérite évidemment toute notre attention, notamment à travers le débat que nous avons en ce moment même. Cela est d'autant plus nécessaire que la situation financière des établissements de santé est encore aujourd'hui dégradée, même si depuis 2007 les déficits se réduisent.
En 2008, le déficit global des hôpitaux s'est réduit d'un cinquième, mais près de 40 % des établissements demeurent encore en déficit, ce qui est évidemment beaucoup trop. Aussi, il faut rechercher sans cesse une amélioration du pilotage médico-économique des établissements hospitaliers. C'est l'objectif de la MECSS, qui a formulé quarante-six propositions pour améliorer le service rendu par l'hôpital.
Je souhaiterais donc, madame la secrétaire d'État, que vous puissiez nous éclairer et faire le point sur quelques-unes de ces mesures. Par exemple, où en est-on de la mise en place, au niveau des administrations centrales, d'une stratégie nationale de la performance médico-économique des établissements hospitaliers ? Qu'en est-il des nouveaux instruments de pilotage régional de l'efficience médico-économique, confiée aux ARS ?
De la même façon, pouvez-vous faire le point sur la généralisation des bonnes pratiques d'organisation des établissements de santé et sur la généralisation d'instruments de pilotage et de gestion performants tels que la comptabilité analytique ? Qu'en est-il par ailleurs de la mise en place des pôles d'activité ? De quelle manière la communauté médicale y est-elle associée ?
Pouvez-vous faire également le point sur l'engagement des réorganisations favorables à la qualité des soins concernant l'optimisation de la permanence des soins et des urgences, qui sont un point primordial de l'organisation hospitalière ? Où en sont le développement de la chirurgie ambulatoire et la gestion des blocs opératoires ?
En ce qui concerne la clarification du financement des établissements, où en est-on sur la stabilisation de la tarification à l'activité ? Ma question suivante rejoint celle de mon collègue Serge Blisko, car je suis vice-président d'un établissement de santé spécialisé qui participe à la même communauté hospitalière que le sien : où en est, dans le domaine de la psychiatrie, la mise en place de la tarification à l'activité ?
Sur la modernisation et l'amélioration de la gestion du patrimoine immobilier – c'est un sujet lui aussi extrêmement important –,…
…où en est-on, madame la secrétaire d'État ?
Enfin, pouvez-vous faire le point sur l'amélioration de la gestion des ressources humaines ? Comme l'a rappelé tout à l'heure mon collègue M. Morange, cela représente 1,2 million d'équivalents temps plein. Qu'en est-il surtout du renouvellement des personnels hospitaliers, compte tenu de la pyramide des âges ? Sur ce point aussi je rejoins M. Blisko : les établissements de la région parisienne rencontrent des difficultés pour recruter des personnels soignants, mais aussi non soignants.
La France est le pays où les dépenses de santé sont les plus élevées, sans pour autant produire nécessairement un meilleur résultat en termes de santé. Aussi toutes les mesures tendant à améliorer ces résultats doivent-elles être suivies avec beaucoup d'attention, comme nous le faisons à l'instant même. C'est l'objet de mes interrogations et de celles de la MECSS et je vous remercie d'avance, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir leur prêter attention. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, au lendemain de l'annonce de la hausse de 32 % de la franchise hospitalière, la discussion qui s'ouvre au sein de notre assemblée sur le fonctionnement de l'hôpital témoigne de la nécessité pour la représentation nationale de s'emparer du débat concernant l'avenir de notre système de santé, dont l'hôpital est un maillon essentiel.
En effet, il convient de s'interroger sur les raisons de la détérioration des performances – au sens des mesures de l'OMS – du système français de santé. Vous le savez, la France a dégringolé de dix places en Europe entre 2000 et 2010, alors que, pendant les deux précédentes décennies, elle avait occupé la première place.
Nous connaissons tous les causes de la régression de notre système de santé. La loi HPST, votée par le Parlement en 2009, s'est contentée d'en contenir les effets, mais s'est gardée d'appréhender les enjeux du futur.
En définitive, pour l'OCDE, les systèmes de santé performants se caractérisent par une amélioration du suivi des données et des indicateurs sur la qualité des soins, ainsi que par de meilleures politiques pour prévenir les maladies et améliorer l'efficacité des systèmes de santé, mais aussi par la coordination des soins et la mise en place de nouvelles technologies d'information.
Justement, en France, l'une des principales lacunes identifiées est la mesure de la qualité des soins, alors que l'on demande aux hôpitaux d'en faire un corollaire obligé de la tarification en fonction des pathologies.
À cet égard, en ce qui concerne les hôpitaux, plusieurs rapports ont mis en évidence de nombreux dysfonctionnements à l'origine de la dégradation des soins et de certaines défaillances. Mais aucun n'avait été aussi loin que celui-ci dans la formulation de propositions concrètes et applicables immédiatement. Je tiens donc à féliciter nos collègues Jean Mallot et Pierre Morange pour la pertinence de leurs quarante-six propositions visant à améliorer la gestion des hôpitaux et donc leur performance. Tous ces progrès dans la gestion des hôpitaux français paraissent plus que jamais urgents, alors que ceux-ci vont être amenés à davantage se serrer la ceinture.
Comme vous le savez, madame la secrétaire d'État, en Guadeloupe l'insularité et l'éloignement de la métropole obligent le CHU de Pointe-à-Pitre à assurer des services hautement spécialisés, mais qui ne pourront pas être rentabilisés par la T2A du fait d'un bassin de population limité qui ne compte que 402 000 habitants. Il en va ainsi de la chirurgie cardiaque, du service des brûlés, ou encore de certains laboratoires très spécialisés.
Sans vouloir allonger trop les débats, je vous rappelle que les cinquante groupes de pathologies les moins lourdes sont pris en charge à 70 % par les cliniques privées, alors que cinquante groupes parmi les plus lourdes sont pris en charge à 71 % par l'hôpital public. Avec soixante pathologies lourdes on atteint 80 % de l'activité des cliniques privées, tandis qu'il faut cent vingt-quatre pathologies moyennes pour atteindre ce taux. Vous voyez donc tout de suite la différence entre les deux types d'établissements.
Les hôpitaux guadeloupéens ont accumulé au cours des années des créances irrécouvrables auprès des populations en situation précaire et des ressortissants des pays étrangers voisins. Un quart des habitants n'ayant pas accès aux dispositifs de couverture maladie complémentaire, le CHU de Pointe-à-Pitre doit constater chaque année un volume de créances qui sont difficilement recouvrées.
En 2010, la situation de l'hôpital s'est considérablement dégradée en raison d'une évolution défavorable des tarifs et d'une progression des charges supérieure à la moyenne nationale. Le déficit du CHU est proche de 20 millions d'euros en 2010, contre 15 millions en 2009, soit 8 % d'un budget de 157 millions d'euros.
Je souhaiterais, madame la secrétaire d'État, qu'une étude sur l'impact de la T2A pour les hôpitaux de Guadeloupe soit rapidement conduite, non pas pour évaluer les effets pervers de la tarification à l'activité, mais bien pour disposer d'indicateurs fiables permettant d'aboutir à une nécessaire réévaluation du coefficient géographique applicable à la T2A outre-mer.
D'autres facteurs amenuisent la performance des hôpitaux publics de Guadeloupe. Je veux parler de l'instabilité sociale ; de la difficulté d'assurer la continuité de la mission d'intérêt public au regard de la démographie des professionnels médicaux, car le recours aux intérimaires a un coût très important pour la structure ; du fait que le bassin de population est étroit, ce qui ne permet pas d'accroissement de l'activité et donc d'évolution des recettes.
Pour pallier ces handicaps structurels, les professionnels de santé me chargent de vous demander, madame la secrétaire d'État, quand commencera la mise à oeuvre du plan santé outre-mer.
Par ailleurs, nous parlions hier des conséquences de Xynthia. Eh bien, vu la vétusté et la dangerosité du CHU de Pointe-à-Pitre, je n'ose même pas imaginer ce qui se passerait si un événement comme celui de l'an dernier en Haïti avait lieu en Guadeloupe. L'hôpital ne serait pas un abri sûr pour les malades, bien au contraire ! Les professionnels de santé me demandent donc aussi de vous poser la question suivante : est-ce que vous prenez l'engagement de procéder à la reconstruction de cet hôpital, qui est attendue par la Guadeloupe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes collègues, maintenant ce n'est plus un secret : l'hôpital public en Martinique est à la peine.
Depuis quelque temps, et sans exagérer, il patauge dans des difficultés inouïes. Cette situation est devenue préoccupante car elle se dégrade année après année. Les causes en sont multiples, au point que c'est ma cinquième intervention sur ce sujet en deux ans.
Ces interrogations concernent l'état des ressources financières des centres hospitaliers, notamment ceux du Carbet et du CHU de Fort-de-France. S'il est vrai qu'à tous les niveaux des redressements sont à opérer et que tous genres de dérives répréhensibles doivent être éliminés, il serait mal venu pour autant de vouer aux gémonies l'institution elle-même. Il serait profondément injuste de ne pas reconnaître son rôle irremplaçable.
Sans remonter à l'époque où les pandémies décimaient une frange importante de la population, l'hôpital public a accompli courageusement sa mission, grâce aux moyens mobilisés, mais aussi grâce au dévouement et à l'abnégation du personnel et des praticiens.
Maintenant, nous devons passer à une nouvelle étape qui implique réformes, rénovations et réaménagements. C'est le sens de la loi du 21 juillet 2009, qui tend globalement à appréhender les problèmes liés à l'hôpital, aux patients, à la santé et aux territoires.
D'où la nécessité de mettre en branle un véritable remue-ménage et remue-méninges, avec pour finalité d'augmenter la performance des services rendus aux malades. Toutefois, ce projet d'organisation sanitaire ne peut valablement se mettre en place avec les déficits colossaux actuels et sans engagements financiers pérennes.
À vrai dire, on est déjà au bord de l'explosion. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. En 2007, le déficit de cinq établissements sur douze était de 10,264 millions d'euros. En 2008, le déficit avait grimpé à 18,853 millions d'euros pour six établissements sur douze. En 2009, un summum a été atteint avec 52 millions pour huit établissements sur douze !
La conséquence immédiate est que les impayés à l'endroit des seuls fournisseurs bloquants pour le seul CHU de Fort-de-France se sont élevés à 6,5 millions d'euros. Les carences importantes portent sur les produits de première nécessité et le matériel de base. C'est le patient qui en pâtit en dernier ressort. Pour l'anecdote, le manque de films spéciaux indispensables à la radiographie a provoqué, en ce début d'année, la suspension des mammographies à la Maison de la mère et de l'enfant, et les patients ont été orientés temporairement vers le privé.
Dans de telles conditions, la sonnette d'alarme déjà tirée à plusieurs reprises doit retentir une nouvelle fois.
Les causes de ces dégradations sont en effet bien connues. Elles ont pour nom : coût d'exploitation élevé ; surcoûts dus au stockage et à l'éloignement ; opérations lourdes, peu nombreuses mais très coûteuses ; pertes de recettes dues à la T2A ; surcoûts d'improductivité estimés à 17 % après audit ; créances irrécouvrables de 30 millions d'euros, etc.
À cela, il faut ajouter des retards en équipements à combler, de nouveaux défis à relever et la prise en compte des pathologies spécifiques. On pense à la mortalité périnatale, deux fois plus élevée qu'en métropole. On pense à la prévalence du diabète et de l'obésité et des maladies qui en découlent. On pense à la montée inquiétante de l'hypertension artérielle avec la cohorte de ses conséquences : l'infarctus, l'AVC, l'insuffisance rénale. On pense à la drépanocytose, à la polytoxicomanie, à la maladie d'Alzheimer et au vieillissement, déjà constaté, de la population. Il ne s'agit nullement d'assombrir le tableau mais de dresser un état des lieux le plus objectif et le plus exhaustif qui soit.
Je ne peux terminer sans évoquer le secteur de la psychiatrie sur lequel je poserai ultérieurement une question particulière, compte tenu du temps qui m'est imparti aujourd'hui.
Face à une telle situation, particulièrement difficile, Mme Roselyne Bachelot, alors ministre de la santé, présentait, en 2009, un plan spécifique dénommé Plan santé outre-mer. Ce plan préconise une carte sanitaire complètement reconfigurée.
Ce projet risque d'être compromis si certains préalables ne sont pas traités : résorption des déficits dont je viens de parler ; financement des créances irrécouvrables grevant la trésorerie des établissements ; élargissement et financement des missions d'intérêt général et spécifiques pour les activités médicales coûteuses et nécessairement déficitaires compte tenu de la taille de la population ; révision du coefficient géographique de 25 % à 28 %, cette revalorisation étant destinée à compenser les surcoûts réels observés en Martinique après calculs sur place ; concertation fructueuse avec le personnel hospitalier toutes catégories confondues.
En conclusion, l'hôpital public n'est-il pas la clef de voûte du système de santé ? Sa mission n'est-elle pas d'assurer, avant tout, l'égalité d'accès aux soins pour tous ? Sa réorganisation pour rendre cette mission encore plus efficace ne doit-elle pas se faire sans casses inutiles, madame la secrétaire d'État ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, messieurs les co-présidents, je souhaitais intervenir dans ce débat parce que, à la suite de l'adoption d'un amendement parlementaire, ici même, à l'occasion de l'examen de la loi HPST, un comité d'évaluation de cette loi a été créé, qui est présidé par le sénateur Jean-Pierre Fourcade et dont j'ai l'honneur d'être membre.
Ce comité, qui a commencé ses travaux en 2009, doit rendre ses conclusions pour juillet 2011, c'est-à-dire dans quelques mois – ceci pour répondre à notre ami Brard, qui est parti.
Ce comité a auditionné plus d'une centaine de personnalités représentant des administrations, des établissements de santé, des conférences et des syndicats professionnels de santé. Il a aussi été procédé à une enquête auprès des directeurs, des présidents de conseil de surveillance, des présidents de CME, des hôpitaux publics de plusieurs régions, métropolitaines mais également d'outre-mer. Les directeurs généraux des ARS de ces mêmes régions ont également été interrogés. Comme membre de ce comité, je ne peux qu'attester du sérieux de ses travaux.
Quels sont les premiers constats enregistrés ?
En premier lieu, la tonalité des auditions est globalement positive à l'égard de l'esprit de la loi HPST, même si celle-ci n'est pas à l'abri de toute critique.
Les nouvelles institutions de la gouvernance hospitalière se sont mises en place dans les délais prévus et sans qu'on ait eu à constater des blocages ou des situations réellement conflictuelles. Les acteurs de l'hôpital en ont le plus souvent assimilé l'esprit. L'enquête qui a été conduite par ce comité, mais aussi celle conduite par la conférence des présidents de CME des hôpitaux de la région Aquitaine, font apparaître que les hôpitaux sont désormais dirigés par un couple : le directeur et le président de la CME. Les conseils de surveillance ont, de manière générale, élu le maire de la commune comme président.
Par ailleurs, il est apparu clairement au comité que le mouvement de mise en réseau de l'offre de soins est largement engagé, notamment en utilisant les outils qui ont été mis à notre disposition par la loi, par exemple les groupements de coopération sanitaire et les communautés hospitalières de territoire, même si certaines imperfections ou certaines insuffisances ont été constatées, qu'il faudra corriger.
En outre, le comité d'évaluation a convenu qu'il faudrait sans doute aménager la loi ou les textes d'application concernant le champ particulier de la psychiatrie.
En définitive, l'appréciation des différents acteurs ne conduit pas à une remise en cause des fondements de la loi, mais plutôt à des ajustements sur certains points et à un approfondissement sur d'autres points, l'objectif étant d'apporter plus de cohérence et une meilleure efficacité.
Les membres du comité ont cependant regretté que les textes d'application aient pu être l'occasion de limiter la portée des dispositions de la loi. Le comité reste donc, madame la secrétaire d'État, très vigilant sur ce point.
Bien évidemment, les nouveaux équilibres ne vont pas sans générer une certaine nostalgie. Certains se posent ainsi des questions sur l'aptitude des membres du corps des directeurs d'hôpital, par exemple, à assumer ces nouvelles responsabilités, d'autant plus que la loi HPST a permis que soient nommées à la tête des établissements des personnes non membres de ce corps. Ce pourrait être d'ailleurs une opportunité à saisir : on pourrait par exemple nommer, y compris à la tête de CHU, des médecins hospitaliers préalablement formés au management – mais y aura-t-il des candidats ?
Il est certain que la transformation du management hospitalier passera principalement par l'application du principe de subsidiarité dans l'organisation de l'hôpital en pôles d'activité. Quel est ce principe ? Il s'agit tout simplement de transférer au niveau du pôle tout ce qui peut l'être, ne devant alors remonter au niveau de la direction générale que les questions qui ne peuvent pas être traitées au niveau des pôles.
Il s'agit là d'une transformation majeure. Les hôpitaux, on le sait, sont de grosses structures et traiter les problèmes de manière centralisée ne peut que conduire aux blocages et aux dysfonctionnements. Mais transférer les compétences aux pôles, c'est donner au médecin chef de pôle une véritable responsabilité, pas seulement médicale, mais aussi de fonctionnement global. Faire que les chefs de pôle aient la possibilité de choisir et d'affecter leur personnel, tout en ayant à leur disposition les leviers budgétaires pour orienter les activités du pôle, c'est le plus sûr moyen de prodiguer des soins adaptés et de qualité et d'éviter le gaspillage des moyens, monsieur Morange. Toutefois, nous sommes encore loin du compte dans le transfert de responsabilités aux pôles. Il faudra donc être très attractif et accompagner ce transfert.
Le comité va continuer à travailler jusqu'en juillet prochain pour approfondir et valider tous ces constats, il aura sans doute à proposer des ajustements du cadre législatif déterminé par la loi HPST. Il y a aura donc probablement un débat à organiser ou simplement des corrections à apporter, peut-être après le rendu des conclusions du comité d'évaluation présidé par le sénateur Jean-Pierre Fourcade. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, messieurs les co-présidents, mes chers collègues, il me semble un peu ironique voire paradoxal de nommer un rapport « Hôpital public, mieux gérer pour mieux soigner » quand le terme « hôpital » n'existe plus dans la législation depuis la loi de Mme Bachelot. Mais enfin, c'est ainsi…
Le retour à l'équilibre financier en 2012 pour les établissements publics hospitaliers est bien évidemment un élément important dans les raisons qui ont amené la MECSS à se saisir de cette question et à proposer à notre assemblée le débat d'aujourd'hui.
Pour autant, c'est avant tout la capacité donnée aux établissements, au travers de cette démarche, d'améliorer le service médical rendu aux usagers qui a été le moteur de notre engagement dans nos échanges ainsi que le souci d'obtenir un engagement des pouvoirs publics pour que le financement des établissements publics soit assuré et que les évolutions du système, comme la tarification à l'acte, ne soient pas des outils pour les démanteler.
Ce rapport me semble être un plaidoyer explicite pour la défense, par la représentation nationale, d'une vision de notre système d'offre de soins dans lequel le public n'est pas « le parent pauvre » mais, au contraire, un élément dynamique, exemplaire et soutenu.
Je me suis donc plus spécifiquement penchée sur trois aspects du rapport, à savoir la régulation par la qualité, les rapports aux usagers et le financement des établissements publics.
La régulation par la qualité est portée par sept préconisations. La modernisation des outils, des pratiques et de la culture de travail, est, par exemple, prônée en matière de prescription médicamenteuse. Le rapport avance l'utilisation de véritables logiciels d'aide à la prescription hospitalière, qui devront également être compatibles avec ceux de la prescription de ville, tout en informatisant la prescription. Une amélioration du suivi des prescriptions, un contrôle accru, une gestion plus efficace, voilà les avantages que ces préconisations permettront.
Le rapport met également en avant une préconisation importante permettant de bien encadrer les examens biologiques et cliniques. D'une part, en souhaitant la mise en place de référentiels, d'autre part, en développant l'information des nouveaux médecins internes et externes sur ces référentiels, si possible élaborés loin de toute influence de lobbies quels qu'ils soient.
Ces deux préconisations sont également assorties d'une volonté de développer un système d'alerte pour éviter les doublons, qu'il s'agisse de prescriptions de médicaments ou d'examens biologiques ou de radiologie. D'où l'importance du dossier médical personnel, de la clef USB médicalisée ou du dossier pharmaceutique – je ne reviendrai pas sur le débat concernant la confusion et l'opacité des systèmes.
Autre proposition structurelle, la possibilité de recommandations émanant de la Haute autorité de santé dans l'élaboration et la diffusion des prises en charge et des soins offrant la meilleure efficience médico-économique et, pourquoi pas, avec un caractère opposable. Comme dans le rapport sur le médicament, il est évident que la Haute autorité de santé doit prendre en mains un certain nombre de problèmes liés directement à leur qualité médicale et économique pour structurer les habitudes de travail avec de bons référentiels.
Enjeu important dans cette période où la compétition entre les cliniques privées et l'hôpital public est forte, la gestion des lits et des capacités entre établissements de santé, établissements sociaux et médico-sociaux, devrait être assurée par les ARS.
Enfin, l'informatisation des blocs opératoires, de leur gestion, de la planification de leur activité et du suivi de celle-ci serait un élément positif.
Concernant le deuxième aspect, le rapport aux usagers, les améliorations pourraient se développer dans deux directions :
D'abord, l'information des usagers sur le parcours de soins pourrait être renforcée, grâce à la création d'un référent qui serait un coordinateur de séjour ou de parcours de soins pour chaque patient. Les usagers pourraient également être informés sur le coût des traitements.
Ensuite, le rapport souligne que l'organisation de la prise en charge à la sortie de l'hôpital, élément important, pourrait être améliorée. Il est évident que la différence de culture entre médecine de ville et médecine hospitalière, que l'absence de réels outils de coordination, voire d'échanges après la sortie, est à la fois un frein à la qualité des soins proposés à nos compatriotes et une cause de mauvaise gestion des deniers publics.
Le troisième et dernier point, le financement des établissements, est, quant à lui, porté par huit propositions.
Le rapport s'arrête tout d'abord sur le risque que la tarification à l'activité pourrait faire courir à l'accessibilité aux soins à l'hôpital public. Il semble en effet parfaitement logique de s'interroger sur l'éventualité de l'instauration d'une santé à deux vitesses, les actes les plus rentables étant proposés par les cliniques privées quand, de son côté, le secteur public serait contraint de ne proposer que les actes les moins rentables.
Le rapport de Jean Mallot est ici très clair ; il propose que la représentation nationale, au travers de la MECSS, soit le garant d'une santé de qualité accessible à tous.
Concrètement, le rapport propose d'abord la clarification de l'objectif de financement par les tarifs, élément essentiel pour s'assurer que le tarif n'est pas, justement, un instrument de différenciation entre privé et public.
Si l'on ajoute à ces préconisations le codage « au lit du malade » des séjours et actes par les professionnels de santé, le paiement des actes et consultations dès l'entrée dans l'établissement, l'application de ce nouveau mode de calcul aux hôpitaux locaux, aux services de soins de suite et de réadaptation ainsi qu'à la psychiatrie, on s'achemine vers une vision du financement des établissements qui serait à la fois une assurance quant à leur devenir mais aussi un élément central dans la mise en avant d'une gestion moderne et efficace.
Pour conclure, je voudrais rappeler qu'il existe aujourd'hui plusieurs visions de ce que doit être la gestion. Celle-ci peut être une vision purement comptable, désireuse d'en finir avec un service public hospitalier – puisque le nom a déjà disparu –, considéré comme trop onéreux pour certains tenants d'une vision libérale de notre offre de soins.
Mais, mes chers collègues, une bonne gestion peut également être le vecteur le plus efficace de l'amélioration de la qualité des soins, de la limitation des coûts, pour la pérennisation d'une santé publique ouverte à tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Messieurs les coprésidents, mesdames et messieurs les députés, je voudrais, en premier lieu, remercier les coprésidents et l'ensemble des membres de la mission pour la qualité et la portée des travaux menés sur le fonctionnement de l'hôpital.
Je partage avec Xavier Bertrand votre souci d'améliorer la qualité du service médical rendu aux usagers et l'efficience des établissements de santé. C'est également notre ambition. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité apporter des réponses détaillées aux quarante-six propositions formulées.
Avant d'entrer dans les détails, je voudrais apporter une précision à M. Préel qui évoquait la proposition de loi portée par le sénateur Fourcade et parlait d'un texte portant sur l'hôpital. Cette proposition couvre en fait un champ beaucoup plus large que l'hôpital et vise à titre principal à favoriser la coordination des soins dans le secteur ambulatoire. Cela méritait d'être précisé.
S'agissant à présent de la qualité des soins, je rappelle qu'elle est la première attente des usagers et du grand public à l'égard du système de santé : elle doit être notre première exigence. Je veillerai plus particulièrement à conforter la confiance de nos concitoyens dans l'offre de soins. En effet, si notre pays est régulièrement bien classé sur la qualité des soins, des études françaises et internationales récentes montrent que des progrès peuvent encore être réalisés. Ainsi, l'amélioration des organisations et celle de la communication entre les professionnels pourront contribuer à une réduction des événements indésirables graves et évitables à l'hôpital comme en ville.
À cet égard, la loi HPST a renouvelé l'approche de la réglementation et de l'évaluation de la qualité des soins. Une logique de résultat fondée sur le respect d'exigences clairement identifiées est désormais développée. En faisant obligation aux établissements de produire une liste commune d'indicateurs et de les mettre à la disposition du public, la loi a posé les fondements d'une transparence accrue sur la performance des établissements. Le tableau de bord annuel de la lutte contre les infections nosocomiales s'est révélé un excellent levier de mobilisation des professionnels ; en 2011, seront rendus publics les résultats de chaque établissement notamment sur la tenue du dossier « patients », la prévention des troubles nutritionnels, la lutte contre la douleur, et ce sont au total douze indicateurs qui seront publiés. Vous le voyez, monsieur Mallot, l'évaluation de la qualité fait bien partie de nos priorités.
Sera également généralisé en 2011, « année des patients et de leurs droits », un indicateur de satisfaction des usagers hospitalisés en médecine, en chirurgie et en obstétrique. Cet indicateur devra être affiché dans les locaux des établissements de santé, sous peine de sanctions, à partir de 2012.
Une plus grande implication des usagers tout au long du parcours de soins est en effet un facteur d'amélioration de la qualité de l'offre de soins. Si les lois des 4 mars 2002, 9 août 2004 et 21 juillet 2009 ont consacré la reconnaissance des droits des patients ainsi que la place de leurs représentants dans l'élaboration des politiques de santé, l'enjeu des prochaines années sera de les faire vivre !
L'information des patients est un sujet crucial, au centre du programme « 2011, année des patients et de leurs droits », que j'ai lancé le 24 février dernier. Il faut en effet, comme vous le préconisez, madame Lemorton, mieux informer les patients sur l'organisation et sur les coûts des soins. Des propositions m'ont été faites et des rapports m'ont été remis. Tout cela sera débattu dans le cadre d'un colloque qui se tiendra demain. Je compte bien ensuite prendre des décisions, afin que ces propositions ne restent pas lettre morte.
L'amélioration de la qualité des soins suppose également d'éviter la multiplication des actes inutiles. Je partage totalement la vision d'Yves Bur et de Jean Mallot sur ce sujet. Veiller à la pertinence des actes tarifés pour éviter des volumes injustifiés est une nécessité si l'on veut s'assurer de la pertinence de la dépense, mais il y va surtout de la santé des patients. Il n'est pas acceptable en effet que des patients subissent des actes qui peuvent être invasifs sans être pour autant indispensables.
Je sais pouvoir faire confiance à l'engagement de tous les professionnels autour de cet objectif simple qui devrait nous réunir naturellement. Mais ils doivent être aidés dans cette démarche. Il appartient à la Haute Autorité de santé de mettre à leur disposition des référentiels de prise en charge en plus grand nombre et portant sur des natures de séjour plus représentatives qu'aujourd'hui sur un plan statistique. S'agissant du bilan national comparatif par région de la prévalence des actes, sa publication me paraît aller dans le bon sens. Je propose donc d'oeuvrer en ce sens.
Par ailleurs, il est de la responsabilité du ministère de la santé de favoriser la qualité de la prise en charge à travers la fixation de normes et de référentiels adaptés. Une réflexion est d'ailleurs en cours, en vue de refondre la réglementation relative au contrôle. Elle donnera lieu à un nouveau décret et une nouvelle instruction. L'objectif du Gouvernement est à la fois d'obtenir une plus grande proportionnalité entre les indus et les sanctions, ainsi qu'une plus grande harmonisation des pratiques des contrôleurs et des ARS. Je souhaite avancer rapidement sur ce sujet.
Le modèle de financement doit aussi y contribuer. La mission de l'État doit être d'inciter à élever le niveau moyen, en faisant en sorte que chaque établissement s'inscrive dans un processus d'amélioration continue de la qualité. Certaines expériences étrangères montrent qu'il est possible de créer un lien entre financement et qualité.
La prise en compte de cette dimension est aujourd'hui insuffisante, mais je souhaite vous faire part de perspectives prochaines. Une réflexion prospective a été engagée il y a plusieurs mois par mes services, réflexion à laquelle les différentes fédérations hospitalières sont associées. Il y a quelques jours a été arrêtée une méthodologie de travail, au terme de laquelle seront retenus les indicateurs sur lesquels sera assise la prise en compte de la qualité dans le modèle de financement.
Il s'agit à la fois de mécanismes incitatifs pour encourager les pratiques et les initiatives innovantes, mais ce sont aussi des sanctions en cas de non respect des standards de qualité. J'insiste sur ce point : la qualité ne se négocie pas, elle est un devoir pour les établissements de santé, et les tarifs de base des prestations hospitalières sont réputés permettre une prise en charge de haute qualité. Vous le voyez, ce dossier évolue favorablement depuis la remise de votre rapport.
De plus, pour atteindre cet objectif et pour accompagner les professionnels de santé dans leur démarche d'amélioration continue de la qualité, l'informatisation des processus de soins doit être accélérée, notamment dans les établissements de santé. Tout le potentiel des technologies de l'information n'a en effet pas encore été exploité, malgré les investissements importants engagés dans ce domaine. Le ministère de la santé s'est engagé à déterminer les axes prioritaires du développement des systèmes d'information hospitaliers. Ces systèmes devront répondre à deux objectifs essentiels : servir davantage la qualité et la sécurité des soins ; répondre aux enjeux de coordination et de partage d'informations au sein du système de santé.
Dans cette perspective, je souhaite porter avec Xavier Bertrand une stratégie nationale d'amélioration des échanges d'informations entre la ville et l'hôpital, notamment autour du déploiement du dossier médical personnel et de l'équipement des acteurs en systèmes d'information performants et articulés au service, notamment, du déploiement de la télémédecine.
Dans ces conditions, la progression constante des services rendus aux patients et, dans le même temps, l'amélioration des conditions de travail des personnels sont tout à fait conciliables avec une meilleure maîtrise des dépenses.
J'en arrive à présent à la performance des établissements de santé. Améliorer l'efficience des établissements de santé, c'est d'abord promouvoir des organisations rationnelles, tirant le meilleur parti des innovations technologiques et des moyens mis à disposition.
Je compte sur la mise en place d'une gouvernance rénovée et resserrée, et j'en appelle pour ce faire à une responsabilisation accrue de l'ensemble des acteurs : directeurs, présidents de commission médicale d'établissement, membres du directoire ou encore chefs de pôles, car le management est un levier essentiel de la performance.
Je mise également sur le déploiement de plusieurs outils de gestion budgétaires et comptables : la généralisation de la facturation individuelle, appelée de vos voeux de longue date et qui deviendra réalité en 2013 ; la préparation de la certification des comptes ; la refonte de la comptabilité analytique, comme vous le souhaitiez, monsieur Morange ; enfin, la définition d'une gestion patrimoniale rénovée avec un référentiel commun.
Sur le terrain, cet effort d'adaptation et de transformation est soutenu par l'Agence nationale d'appui à la Performance, l'ANAP. Celle-ci est chargée d'accompagner les établissements dans la mobilisation de l'ensemble des leviers du changement, notamment par la voie des « projets performance ». Il s'agit d'identifier les processus de soins – qu'il s'agisse d'urgences, de blocs opératoires ou de biologie – ou de gestion, comme les procédures d'achats ou de facturation, susceptibles d'être optimisés puis de contractualiser les résultats attendus et les modalités d'accompagnement entre l'ARS, l'ANAP et l'établissement.
L'ANAP est désormais positionnée comme le principal organisme d'appui à la performance. Je rappelle que dans un souci d'efficience et de lisibilité, elle a regroupé trois agences qui lui préexistaient : la MAINH, la MEAH et le GMSIH. Son premier programme annuel de travail en 2010 a comporté onze projets dont les « projets performance » dans cinquante établissements de santé.
Ce programme intègre également le déploiement d'organisations performantes en chirurgie, qui répond concrètement à l'une de vos propositions ; l'appui à la mobilité des professionnels et le développement de la gestion des ressources humaines ; le soutien des établissements dans la réussite de leurs projets de systèmes d'information.
Dans ce domaine, l'enjeu est également de renforcer la veille sur la performance des établissements. Il s'agit non seulement de mettre en place un suivi plus serré sur les recettes et les charges des établissements de santé, mais aussi de généraliser des indicateurs synthétiques à l'instar de ceux développés pour HospiDiag. Il s'agit de soixante-quatre indicateurs balayant le radar de la performance sur la productivité, les ressources humaines, la qualité et la sécurité des soins, les fondamentaux budgétaires et financiers. L'objectif est de créer les conditions d'un diagnostic partagé sur les résultats de chaque établissement et de susciter l'émulation grâce à une comparaison assise sur des définitions et des méthodes transparentes.
Conduire ces transformations au sein des établissements et entre les établissements est la seule voie pour atteindre l'objectif fixé par le Président de la République d'un retour à l'équilibre budgétaire en 2012, tout en garantissant le maintien d'un haut niveau de qualité des soins. L'accumulation des déficits constitue en effet un frein à l'investissement et à l'innovation au sein de l'offre de soins. C'est la raison pour laquelle les contrats d'objectifs et de moyens conclus avec chaque directeur général d'agence régionale de santé fixent pour 2011 un objectif de réduction des déficits des établissements publics mais comportent également des objectifs d'organisation des soins.
Le Gouvernement entend précisément favoriser les organisations de nature à améliorer l'efficience de l'offre de soins, tout en garantissant au patient qualité et sécurité. Le recours à l'hôpital doit être justifié, et les modalités de prises en charge doivent être adaptées aux besoins de chaque patient. Vous avez vous-mêmes souligné les progrès qui restent à accomplir pour promouvoir la chirurgie ambulatoire et l'hospitalisation à domicile.
Je souhaite revenir sur ces deux points.
Il est indispensable de mieux réguler l'activité des urgences hospitalières. Cela nécessite, en corollaire, de mieux organiser et de mieux garantir la permanence des soins ambulatoires. À cet effet, leur organisation a été confiée aux agences régionales de santé afin de donner plus de cohérence au dispositif. Je leur demande de parvenir à une meilleure adaptation à la diversité des territoires, et de diversifier, quand c'est possible, les réponses apportées aux demandes des patients, en associant l'ensemble des professionnels de santé.
Grâce à la coordination et à la coopération entre services d'urgences hospitalières et médecins libéraux, grâce aux maisons médicales de garde au sein, ou à l'immédiate proximité, des établissements de santé et, enfin, grâce à la prise en charge des transports vers les points fixes de garde, les ARS devront veiller à mieux répartir la prise en charge des demandes de soins non programmées.
Lorsque le patient requiert une prise en charge hospitalière, nous souhaitons résolument promouvoir les prises en charge ambulatoires
Ce défi est à portée de main dans le champ de la chirurgie ambulatoire. Il se traduira par un bénéfice qualitatif pour le patient, par une amélioration des rythmes de travail pour les médecins et pour tous les soignants, et par des coûts moindres pour la collectivité. Avec M. Xavier Bertrand, nous entendons donc lever tous les freins au développement de ce mode de prise en charge.
Le taux de chirurgie ambulatoire, qui s'élève actuellement à 36 %, doit augmenter significativement en se substituant à la chirurgie en hospitalisation complète, sans toutefois qu'il y ait création d'un effet d'aubaine et multiplication d'actes non médicalement justifiés. Ce développement sera soutenu par une politique d'incitation tarifaire volontariste qui fera l'objet d'une communication explicite auprès des différents acteurs.
Nous souhaitons aussi structurer, en région, une offre de soins de chirurgie ambulatoire efficiente, c'est-à-dire fondée sur une masse critique d'activité et sur une amélioration de l'organisation de l'amont et de l'aval de la chirurgie ambulatoire, en lien avec les soins de ville.
Le développement de la chirurgie ambulatoire a également pour objectif d'améliorer la qualité et la sécurité des soins au bénéfice des patients. En fait, il s'agit même son objectif principal. Nous veillerons donc à développer l'évaluation des pratiques et celle de la satisfaction des patients à partir d'indicateurs spécifiques. Une sensibilisation des patients et un accompagnement des établissements sont prévus, notamment grâce à la formation des professionnels.
En parallèle, il nous faut poursuivre l'essor de l'hospitalisation à domicile avec toute la détermination et l'exigence nécessaires.
Cette nécessité est dictée par les perspectives de vieillissement de la population et l'intérêt de centrer davantage les parcours de soins sur le domicile des patients, en particulier pour les pathologies chroniques.
En votant la loi HPST, vous avez contribué à une juste reconnaissance de l'activité spécifique d'hospitalisation à domicile, notamment en protégeant l'appellation « HAD ». Par ailleurs, plusieurs mesures récentes, comme l'accueil des internes ou la clarification des dispositions relatives à la gestion du médicament, permettent d'améliorer le service rendu par les structures d'HAD. Nous veillerons à l'aboutissement des études en cours sur l'évolution de son mode de financement, sur les groupes homogènes de tarifs, et sur les liens avec les types de prise en charge en chimiothérapie.
Une démarche plus globale reste cependant nécessaire pour une meilleure définition des indications du recours à l'HAD. En liaison avec les autres acteurs sanitaires et sociaux, l'objectif consiste à consolider la prise en charge continue des patients à leur domicile.
J'en viens maintenant à la dimension territoriale.
Les axes majeurs de l'organisation territoriale hospitalière seront déclinés dans les projets régionaux de santé des ARS, et tout particulièrement dans les schémas régionaux d'organisation sanitaire.
Ils nécessitent un diagnostic partagé sur le maillage territorial et, par conséquence, sur la formalisation d'un projet médical de territoire qui doit inclure les coopérations entre établissements de santé au sein de chaque territoire.
Au cours des années écoulées, certaines régions se sont attachées à définir et à faire vivre au sein de leur territoire une offre cible permettant à chaque établissement de mieux asseoir son propre projet médical. Les directeurs généraux d'ARS sont désormais invités à généraliser cette démarche. L'exercice est concret : il s'agit de prendre en compte le recours aux soins hospitaliers de la population domiciliée sur un territoire de santé, de s'assurer de la couverture de ses besoins par les établissements du territoire, ou des territoires voisins, et de veiller à une répartition équilibrée de l'offre de soins en évitant les doublons et la dispersion d'activités requérant des plateaux techniques.
Monsieur Morange, vous avez évoqué la situation du centre hospitalier de Poissy Saint-Germain. Jamais la DASS n'a relevé dans son rapport de fraude concernant les marchés publics. En revanche, elle a bien dénoncé une mauvaise gestion de l'établissement. Il n'y avait ni fraude avérée ni enrichissement personnel. Si tel avait été le cas, le procureur aurait été saisi…
Précisément, il a bien été saisi au titre de l'article 40 du code de procédure pénale.
Par ailleurs, autant que je sache, le directeur de cet établissement, M. Gilbert Chodorge, n'a pas été licencié, d'autant qu'il est fonctionnaire. Il a quitté l'établissement de sa propre initiative. S'il a effectivement amélioré la situation budgétaire du centre hospitalier, un déficit annuel de 10 millions d'euros demeure ainsi qu'une trésorerie négative. La situation est donc loin d'être rétablie.
Le pôle sanitaire de l'Ouest de La Réunion s'adossera au CHU actuellement en cours de constitution. Nous y travaillons avec le ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur. Ce projet, comme l'ensemble des propositions, sera instruit après les revues de projets de la première tranche du plan Hôpital 2012, qui sont en cours avec les ARS.
S'agissant du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre, je confirme que le principe de reconstruction est acquis. Les équipes du CHU et de l'ARS travaillent actuellement au dimensionnement du projet qui sera instruit lors de la seconde tranche du plan Hôpital 2012.
En ce qui concerne le coefficient géographique de la Guadeloupe, rien ne permet de dire aujourd'hui qu'il est insuffisant. Toutefois, le ministère réalisera une étude pour apprécier la justesse du niveau actuel non seulement en Guadeloupe mais, plus globalement, dans l'ensemble des départements d'outre-mer.
Les outils de la coopération sont disponibles, qu'il s'agisse des groupements de coopération sanitaire ou des communautés hospitalières de territoire. Ainsi que vous nous l'avez demandé, nous allons redéfinir et mettre en oeuvre un observatoire des recompositions hospitalières qui nous permettra d'informer chaque année le Parlement sur les avancées objectives en ce domaine.
J'aborde maintenant la question du financement.
Les évolutions organisationnelles doivent être accompagnées et soutenues par un système de financement adapté qui garantisse la performance globale du système hospitalier, entendue comme la conjonction d'un haut degré de qualité et de sécurité des soins et d'une exigence d'efficience médico-économique.
En écho à vos observations et propositions, je rappelle que le système de financement n'est qu'un outil, mais un outil auquel il convient de donner du sens, au service d'une politique.
Messieurs les coprésidents, votre rapport met l'accent sur la nécessité de préserver l'accessibilité aux soins et la qualité de la prise en charge. Le modèle de financement mis progressivement en place à partir de 2004 a atteint un certain degré de maturité et répond à ces deux objectifs.
En matière d'accessibilité aux soins, il y a d'abord l'accessibilité territoriale.
La tarification à l'activité ou T2A a permis une répartition plus harmonieuse des ressources hospitalières entre les différents territoires, en tenant compte de leurs spécificités en fonction des besoins et des profils des patients.
Ensuite, en ce qui concerne l'accessibilité au progrès, la T2A a également permis une meilleure diffusion de l'innovation médicale et pharmaceutique, notamment grâce au mécanisme de la liste en sus des médicaments et dispositifs médicaux.
Enfin, en matière d'accessibilité sociale, depuis 2009, des mécanismes ad hoc ont été mis en place pour permettre une meilleure prise en compte dans le modèle de financement des surcoûts liés à la prise en charge de patients en situation de précarité. En 2010, 150 millions d'euros ont été consacrés à cet objectif, et ce montant sera reconduit pour 2011.
Nous recherchons également une juste allocation des ressources.
Cette ambition constitue le fondement de notre volonté d'élargir progressivement le champ d'application de la T2A aux activités qui en ont été historiquement exclues et qui restent aujourd'hui financées par dotation globale. Je pense aux ex-hôpitaux locaux, aux soins de suite et de réadaptation, et à la psychiatrie.
Le degré d'avancement de ces chantiers est aujourd'hui différent, mais la dynamique est désormais enclenchée comme vous l'avez appelé de vos voeux dans votre rapport, ainsi que M. Malherbe.
En ce qui concerne les hôpitaux locaux, la suppression de cette catégorie juridique a ipso facto entraîné un basculement du financement par dotation de l'activité MCO de ces établissements en T2A. Ce basculement doit intervenir au 1er janvier 2012.
Afin de préparer cette étape importante, de nombreuses études sont actuellement engagées, ou vont l'être prochainement, sur l'évaluation des effets revenus du passage à la T2A, sur l'impact sur l'offre territoriale de soins, sur le recensement des missions d'intérêt général assurées par ces établissements, et sur les modalités d'accompagnement et de formation des personnels. Mes services travaillent, par ailleurs, à la préparation des textes réglementaires d'application de ce nouveau modèle de financement.
Pour les soins de suite et de réadaptation, le modèle cible de la tarification à l'activité doit être mis en oeuvre partiellement en 2012, puis, de manière globale, en 2013. Les contours du dispositif sont désormais bien circonscrits. Cette réforme, fondée sur les données d'activité médico-économiques fines de chaque établissement, suppose également d'importants travaux techniques.
Enfin, concernant la psychiatrie, les perspectives de basculement vers un financement à l'activité sont plus lointaines, mais de nombreuses étapes préparatoires indispensables ont été franchies ces dernières années. Le système d'information en psychiatrie a profondément évolué pour permettre de disposer des données indispensables à la création d'un modèle de financement.
Des travaux complémentaires importants seront néanmoins nécessaires dans les années à venir avant que nous soyons en mesure de mettre en place un modèle de financement opérationnel. Mes services y travaillent d'ores et déjà ; ce chantier ne pourra prendre toute l'ampleur nécessaire qu'après le déploiement prioritaire de la T2A en soins de suite et de réadaptation.
Pour conclure, je veux aborder la question des ressources humaines.
« Il n'est de richesses que d'hommes », c'est pourquoi je souhaiterais terminer mon propos sur votre rapport et mes réponses à vos différentes interventions en insistant sur l'importance du management et la gestion des ressources humaines.
Depuis la publication du rapport de la MECSS, plusieurs autres contributions sont venues nourrir notre réflexion sur le management et sur la gestion prévisionnelle des emplois, des métiers et des compétences – je pense à celui remis à l'issue de la mission confiée au député Laurent Hénart.
Vous avez appelé de vos voeux une stratégie régionale de gestion des métiers et des compétences. Le répertoire 2008 des métiers de la fonction publique hospitalière constitue déjà la deuxième version de ce document. Il nous faut maintenant susciter l'initiative régionale sous la houlette des ARS.
Mais cette démarche ne peut être menée à son terme si nous ne nous donnons pas les moyens d'identifier les compétences attendues et d'adapter les formations correspondantes à chaque métier. C'est le défi que nous nous sommes lancé pour les professions paramédicales engagées dans les démarches LMD. C'est aussi le défi que s'approprient les professions médicales. Il faut s'en féliciter pour les patients.
Nous avons ainsi invité les agences régionales de santé à organiser à l'échelon régional un dialogue social afin d'inciter les établissements, notamment les plus petits, à mutualiser la gestion des ressources humaines. C'est la condition de leur attractivité, car le seul moyen d'offrir à leurs personnels une gestion personnalisée de leurs carrières, l'accès organisé à des formations ainsi que des possibilités de mobilité choisie. Comme vous l'avez noté, il reste encore des progrès à faire pour l'utilisation des nombreux outils mentionnés dans cette réponse.
Vous avez également souligné l'importance de la formation au management et à la conduite du changement des directeurs d'établissement. À notre demande, l'École des hautes études en santé publique porte cette ambition, et ce au travers de l'Institut du management.
Pour autant, notre ambition doit nous porter plus loin. Elle doit concerner les chefs de pôles investis d'importantes responsabilités managériales, tous les membres du directoire appelés à accompagner la dynamique impulsée par le directeur, et, enfin et surtout, tous les cadres relais indispensables auprès des équipes. Dans le prolongement du rapport Mounier-Yahiel, nous entendons bien, avec Xavier Bertrand, donner un nouvel élan aux écoles de cadres soignants, avec la volonté de décloisonner les formations et de reconnaître vraiment le rôle des cadres.
Je voudrais apporter une précision à l'attention de M. Blisko au sujet de la démographie médicale. Vous avez évoqué le numerus clausus. Il est vrai, monsieur le député, qu'il n'a jamais été aussi élevé qu'aujourd'hui, puisqu'il a connu une très forte augmentation ces dernières années. Nous avons mis en place le contrat d'engagement de service public pour les jeunes étudiants et internes qui acceptent de s'installer en zone sous-dotée pour la durée pendant laquelle ils auront perçu l'indemnité, qui est, je le rappelle, de 1 200 euros. Ainsi, 400 contrats d'engagement de service public ont été mis en place pour 2011. À ce jour, 200 ont été signés. Un autre levier est la filiarisation de l'internat.
Vous avez également abordé la question de la formation des IADE, les infirmiers anesthésistes, et des IBODE, les infirmiers de bloc opératoire diplômés d'État. Une réflexion est en cours, en liaison avec les professionnels et le ministère de l'enseignement supérieur, pour reconfigurer la formation et parvenir à une reconnaissance au grade de master.
S'agissant du financement, il repose en principe sur le budget formation des établissements de santé, parce qu'il s'agit d'une formation par voie de promotion professionnelle, où l'ANFH, l'Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier, joue donc le rôle de financeur principal.
Vous me permettrez, en conclusion, de saluer l'engagement de tous les personnels à l'hôpital, qu'ils soient directeurs ou agents de service, médecins ou soignants. Il leur est beaucoup demandé en disponibilité auprès des patients, en capacité d'adaptation à de nouvelles organisations et à de nouvelles techniques. Nous leur devons la reconnaissance et la confiance. C'est la condition de leur motivation. La « bien-traitance » des personnels conditionne celle des patients et de leurs proches.
Je vous remercie d'avoir souligné les innovations organisationnelles réussies. Nous nous attachons, avec Xavier Bertrand et l'ensemble de nos services, non seulement à diffuser mais à généraliser les organisations performantes pour un meilleur service auprès des patients. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Prochaine séance, mardi 8 mars à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Explications de vote communes et votes par scrutin public sur les projets de loi organique et ordinaire relatifs au Défenseur des droits ;
Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques ;
Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à l'immigration, l'intégration et la nationalité.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures trente-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma