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Intervention de Serge Blisko

Réunion du 3 mars 2011 à 15h00
Débat sur le fonctionnement de l'hôpital — Reprise de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Blisko :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, l'hôpital a connu, peut-être devrais-je dire a subi, de grandes transformations tant dans son fonctionnement que dans sa gouvernance et, bien sûr, dans ses rapports avec l'assurance maladie. Il faut toutefois remarquer que l'accumulation des réformes et la rapidité de leur succession n'ont guère laissé aux personnels le loisir de maîtriser les nouveaux outils.

Je voudrais tout d'abord insister sur le fait que l'hôpital public reste la pierre d'angle la plus importante de notre système de santé, et cette importance est sans doute accrue depuis que la baisse de la démographie médicale fait sentir ses effets. Dans certains territoires, on pourrait même parler d'effondrement démographique, tant en médecins généralistes qu'en médecins spécialistes en particulier au tarif conventionné de la sécurité sociale. Cette situation rend le recours à l'hôpital quasiment obligatoire.

En témoigne notamment l'encombrement des services d'urgence qui ont conduit les personnels médicaux et soignants de ces services à mener de nombreuses actions revendicatives. Je n'y insisterai pas, me bornant à souligner que la dégradation de leurs conditions de travail était et demeure souvent insupportable.

Malgré toutes ces avanies, l'hôpital reste cependant un lieu où les Français vont en confiance même s'ils ont une claire conscience que la disponibilité du personnel, souvent débordé, n'est plus ce qu'elle fut il y a encore quelques années.

On touche là du doigt le paradoxe et les effets souvent désastreux d'une politique de restrictions budgétaires aveugles au moment même où, à cause du vieillissement de la population, du progrès dans la façon de soigner certaines pathologies lourdes, de la panne démographique dans nombre de spécialités médicales, à cause aussi des changements intervenant dans notre société, dans laquelle s'accroissent la solitude et les problèmes de santé mentale, l'hôpital, bien que malmené, est devenu le phare de notre système de santé. C'est d'autant plus vrai que, grâce des équipes soignantes dynamiques, il a pu s'ouvrir davantage sur la santé en ville grâce aux réseaux Ville-Hôpital qu'il faut encourager.

En revanche, en tant que président d'un conseil d'administration – ou plutôt d'un conseil de surveillance – d'un grand hôpital public, je voudrais témoigner de difficultés persistantes, voire nouvelles.

Je commencerai par pointer la difficulté de trouver du personnel infirmier. Elle est particulièrement sensible en région parisienne, eu égard aux conditions de transport et de logement qui entraînent une fuite assez rapide de nos jeunes infirmières et infirmiers et par là même une désorganisation incessante des pôles et des services.

Par ailleurs, une intention particulière doit être portée aux IBODE et aux IADE, qui font vivre et prospérer un bloc opératoire et dont l'absence, compensée souvent à des coûts exorbitants par le recours à l'intérim, entraîne une baisse d'activité des blocs chirurgicaux et donc une perte de recettes, et bien entendu une insatisfaction des patients et des praticiens.

Or j'ai découvert avec effarement qu'au moment même où ces spécialités infirmières deviennent si rares, il se perpétue un enseignement privé, réservé bien sûr aux infirmières déjà diplômées ayant passé un concours pour se spécialiser, et fort onéreux puisqu'il peut coûter jusqu'à 10 000 euros par an. Ne croyez-vous pas, madame la secrétaire d'État, que cette situation est injuste, ridicule et va à l'encontre du but poursuivi ?

Le deuxième point de mécontentement vient du fait qu'aux fonctions soignantes se surajoute une énorme tâche bureaucratique avec de nombreux comités et commissions où s'épuisent médecins et cadres de santé : comité de lutte contre les infections nosocomiales, commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge, commission d'hémo-vigilance, comité d'activité libérale, et j'en passe bien entendu beaucoup… Certes, chacun de ces organismes a son intérêt. Mais leur accumulation donne l'impression qu'à l'hôpital, on passe désormais plus de temps en réunions qu'au chevet du malade. Il faudrait donc clarifier les choses.

Enfin, je voudrais aborder dans une troisième et dernière partie les questions budgétaires, dont, je le précise, je ne suis pas spécialiste. Mais je constate que la T2A doit être largement améliorée. En effet, elle produit des effets pervers, notamment, et sans rentrer dans des détails techniques, pour les hôpitaux ou les services mono- organe. Elle compare des poids moyens de dépenses entre hôpitaux et structures peu comparables et fait régner un climat très désagréable entre les équipes de direction, les médecins et les syndicats de personnels.

J'attire également votre attention sur le fait que le secteur de la psychiatrie est resté très à l'écart de la loi HPST. Cela avait été convenu au moment de sa discussion mais il était prévu – et ce moment est venu – d'examiner la spécificité de l'activité psychiatrique dont on connaît les particularités : diminution du nombre de lits, parfois de façon dramatique, organisation en secteurs depuis les années soixante qui, aujourd'hui, ne concordent pas toujours avec les territoires de santé tels qu'ils ont été définis par la loi de 2009. En outre, les dépenses sont nécessairement différentes et plus élevées tant la multiplicité des structures extra-hospitalières – CMP, appartements d'accueil, foyers thérapeutiques divers… – rend inapplicable la T2A. Je sais qu'une réforme est en cours. Mais, puisque la proposition de loi Fourcade l'a encore repoussée, pouvez-vous nous dire, madame la secrétaire d'État, quand nous pourrons, enfin, envisager une application plus raisonnable des nouvelles dispositions à la psychiatrie ?

En conclusion, je souhaite qu'à l'occasion du rapport de la MECSS un nouveau souffle soit accordé à l'hôpital pour redonner de l'espoir au monde hospitalier aujourd'hui désemparé, comme l'ont exprimé par exemple récemment les présidents de CME dans un entretien qui a été, malgré tout, qualifié de positif. Alors, essayez de positiver, madame la secrétaire d'État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)

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