Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, au lendemain de l'annonce de la hausse de 32 % de la franchise hospitalière, la discussion qui s'ouvre au sein de notre assemblée sur le fonctionnement de l'hôpital témoigne de la nécessité pour la représentation nationale de s'emparer du débat concernant l'avenir de notre système de santé, dont l'hôpital est un maillon essentiel.
En effet, il convient de s'interroger sur les raisons de la détérioration des performances – au sens des mesures de l'OMS – du système français de santé. Vous le savez, la France a dégringolé de dix places en Europe entre 2000 et 2010, alors que, pendant les deux précédentes décennies, elle avait occupé la première place.
Nous connaissons tous les causes de la régression de notre système de santé. La loi HPST, votée par le Parlement en 2009, s'est contentée d'en contenir les effets, mais s'est gardée d'appréhender les enjeux du futur.
En définitive, pour l'OCDE, les systèmes de santé performants se caractérisent par une amélioration du suivi des données et des indicateurs sur la qualité des soins, ainsi que par de meilleures politiques pour prévenir les maladies et améliorer l'efficacité des systèmes de santé, mais aussi par la coordination des soins et la mise en place de nouvelles technologies d'information.
Justement, en France, l'une des principales lacunes identifiées est la mesure de la qualité des soins, alors que l'on demande aux hôpitaux d'en faire un corollaire obligé de la tarification en fonction des pathologies.
À cet égard, en ce qui concerne les hôpitaux, plusieurs rapports ont mis en évidence de nombreux dysfonctionnements à l'origine de la dégradation des soins et de certaines défaillances. Mais aucun n'avait été aussi loin que celui-ci dans la formulation de propositions concrètes et applicables immédiatement. Je tiens donc à féliciter nos collègues Jean Mallot et Pierre Morange pour la pertinence de leurs quarante-six propositions visant à améliorer la gestion des hôpitaux et donc leur performance. Tous ces progrès dans la gestion des hôpitaux français paraissent plus que jamais urgents, alors que ceux-ci vont être amenés à davantage se serrer la ceinture.
Comme vous le savez, madame la secrétaire d'État, en Guadeloupe l'insularité et l'éloignement de la métropole obligent le CHU de Pointe-à-Pitre à assurer des services hautement spécialisés, mais qui ne pourront pas être rentabilisés par la T2A du fait d'un bassin de population limité qui ne compte que 402 000 habitants. Il en va ainsi de la chirurgie cardiaque, du service des brûlés, ou encore de certains laboratoires très spécialisés.
Sans vouloir allonger trop les débats, je vous rappelle que les cinquante groupes de pathologies les moins lourdes sont pris en charge à 70 % par les cliniques privées, alors que cinquante groupes parmi les plus lourdes sont pris en charge à 71 % par l'hôpital public. Avec soixante pathologies lourdes on atteint 80 % de l'activité des cliniques privées, tandis qu'il faut cent vingt-quatre pathologies moyennes pour atteindre ce taux. Vous voyez donc tout de suite la différence entre les deux types d'établissements.
Les hôpitaux guadeloupéens ont accumulé au cours des années des créances irrécouvrables auprès des populations en situation précaire et des ressortissants des pays étrangers voisins. Un quart des habitants n'ayant pas accès aux dispositifs de couverture maladie complémentaire, le CHU de Pointe-à-Pitre doit constater chaque année un volume de créances qui sont difficilement recouvrées.
En 2010, la situation de l'hôpital s'est considérablement dégradée en raison d'une évolution défavorable des tarifs et d'une progression des charges supérieure à la moyenne nationale. Le déficit du CHU est proche de 20 millions d'euros en 2010, contre 15 millions en 2009, soit 8 % d'un budget de 157 millions d'euros.
Je souhaiterais, madame la secrétaire d'État, qu'une étude sur l'impact de la T2A pour les hôpitaux de Guadeloupe soit rapidement conduite, non pas pour évaluer les effets pervers de la tarification à l'activité, mais bien pour disposer d'indicateurs fiables permettant d'aboutir à une nécessaire réévaluation du coefficient géographique applicable à la T2A outre-mer.
D'autres facteurs amenuisent la performance des hôpitaux publics de Guadeloupe. Je veux parler de l'instabilité sociale ; de la difficulté d'assurer la continuité de la mission d'intérêt public au regard de la démographie des professionnels médicaux, car le recours aux intérimaires a un coût très important pour la structure ; du fait que le bassin de population est étroit, ce qui ne permet pas d'accroissement de l'activité et donc d'évolution des recettes.
Pour pallier ces handicaps structurels, les professionnels de santé me chargent de vous demander, madame la secrétaire d'État, quand commencera la mise à oeuvre du plan santé outre-mer.
Par ailleurs, nous parlions hier des conséquences de Xynthia. Eh bien, vu la vétusté et la dangerosité du CHU de Pointe-à-Pitre, je n'ose même pas imaginer ce qui se passerait si un événement comme celui de l'an dernier en Haïti avait lieu en Guadeloupe. L'hôpital ne serait pas un abri sûr pour les malades, bien au contraire ! Les professionnels de santé me demandent donc aussi de vous poser la question suivante : est-ce que vous prenez l'engagement de procéder à la reconstruction de cet hôpital, qui est attendue par la Guadeloupe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)