La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Hier soir, l'Assemblée a commencé l'examen des articles non rattachés, s'arrêtant à l'amendement n° 726 portant article additionnel après l'article 41.
Je suis saisi d'un amendement n° 726 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Monsieur le président, madame la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, monsieur le rapporteur général, vous observerez que cet amendement est parfaitement équilibré financièrement. Il se traduit même par un gain pour le budget de l'État, ce qui, par les temps qui courent, n'est pas négligeable.
Il propose deux dispositions. La première tend à supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires et la deuxième à majorer la prime pour l'emploi, qui est un encouragement à l'activité.
À l'heure où le chômage explose – les chiffres le montrent, le mois dernier le chômage a encore augmenté de façon considérable –, nous proposons de supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires, mesure que la France est la seule à appliquer. Vous avez inventé une véritable machine à détruire des emplois.
En outre, vous mettez régulièrement en avant le fait que la défiscalisation des heures supplémentaires se traduit par un gain pour les salariés. Mais celui-ci est assez modeste quand on le ramène au mois plutôt qu'à l'année.
Enfin, la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires pourrait nous donner les moyens de financer une augmentation de la prime pour l'emploi, laquelle n'a pas été revalorisée depuis plusieurs années.
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 726 .
Avis défavorable à cet amendement que nous connaissons très bien, monsieur Eckert.
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.
Même avis.
(L'amendement n° 726 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 699 .
La parole est à Mme Aurélie Filippetti.
Il s'agit de l'imposition des gains liés au poker, pour les joueurs professionnels uniquement.
Les gains liés aux jeux de hasard sont actuellement non imposables en France. Or certains joueurs professionnels de poker tirent l'essentiel, si ce n'est l'intégralité de leurs revenus, qui sont très importants, de l'exercice de leur talent à ce jeu.
Ces revenus étant optimisés sur une année, l'aléa lié au jeu de hasard disparaît, ou est, du moins, fortement réduit. Il semble donc indispensable que l'administration fiscale puisse considérer que ces gains sont dès lors imposables.
D'ailleurs, madame la ministre, le rapport relatif aux jeux d'argent et de hasard en ligne remis par le Gouvernement en octobre dernier comportait un certain nombre de préconisations, notamment celle-ci : « Il paraît nécessaire que l'État traite de manière spécifique les situations dans lesquelles il est constaté que des joueurs ne déclarent pas comme revenus des gains qui, de par leur fréquence, leur importance et leur prééminence sur les autres sources de revenus professionnels du joueur, s'y apparentent pourtant. Les joueurs professionnels qui se soustraient frauduleusement à l'impôt sur le revenu sont redevables des impôts éludés assortis de lourdes sanctions. Ils sont également passibles du délit de fraude fiscale. »
Voilà pourquoi, pour les finances publiques, pour l'égalité de nos concitoyens devant l'impôt, mais aussi pour la sécurité juridique et fiscale des joueurs de poker eux-mêmes, cet amendement propose d'imposer les gains des joueurs de poker professionnels.
En commission, nous étions parvenus, me semble-t-il, à un consensus sur l'objectif d'une imposition juste. Mais nous n'avions pas trouvé d'accord sur la rédaction qu'il convenait de retenir. C'est pourquoi je suis revenue à la rédaction de l'amendement que j'avais initialement déposé. Toute autre rédaction me semblait insatisfaisante.
L'amendement reprend en effet la formulation très précise de la jurisprudence établie par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand dans son jugement du 21 octobre 2010. Elle permet de tenir compte de l'absence de statut de joueur professionnel.
La notion de « participation habituelle » reprend la notion dégagée par la jurisprudence et permet d'apprécier le caractère professionnel de l'activité du joueur en ayant recours à un faisceau d'indices, méthode qui est nettement préférable à l'instauration, par exemple, d'un montant plancher à partir duquel l'impôt serait applicable.
Ce faisceau d'indices permet également une appréciation différenciée par types de jeux. Ainsi, c'est bien le poker qui est visé, et non la loterie, dans laquelle le gain est réellement aléatoire.
En commission, M. Charles de Courson avait demandé si la disposition proposée s'inscrivait dans le cadre d'un régime d'auto-déclaration. Oui : les joueurs doivent déclarer leurs revenus lorsque ceux-ci proviennent essentiellement, voire exclusivement, du poker, quelque forme que doive prendre cette déclaration.
Soumettre ces revenus à un régime déclaratif permettra d'appliquer les mesures qui visent à sanctionner la sous-déclaration.
Comme l'a dit Mme Filippetti, la commission a examiné cet amendement avec une grande sympathie. Mais notre collègue n'ayant pas une habitude régulière du poker, nous lui avons fait observer que son amendement était un peu littéraire. Dans le domaine de la fiscalité, certains mots méritent d'être précisés. Je pense par exemple aux gains « réguliers », ou encore à la participation « habituelle ».
Or, entre-temps, nous avons découvert qu'il existait un statut des joueurs de bridge. Notre collègue Louis Giscard d'Estaing a fait une observation très judicieuse en suggérant de créer une sorte de statut au sein du régime applicable aux bénéfices non commerciaux.
C'est dans cette direction qu'il faudrait poursuivre la réflexion. Nous avons le temps de trouver une solution d'ici au collectif, madame Filippetti. Dans sa rédaction actuelle, l'amendement est trop imprécis.
Monsieur le rapporteur général, ce ne sont ni mes penchants littéraires ni mon goût pour le poker qui m'amènent à proposer cette formulation : je me contente de reprendre la jurisprudence du tribunal administratif de Clermont-Ferrand. La méthode du faisceau d'indices – la fréquence des gains liés au poker, leur prééminence sur les autres sources de revenus – est bien le seul moyen de faire la différence entre les joueurs professionnels et les joueurs du dimanche ; elle est d'ailleurs reprise dans le rapport qu'a remis le Gouvernement.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement qui, en réalité, est satisfait, et il demande son retrait. Madame Filippetti, vous l'avez dit vous-même : dans sa rédaction actuelle, l'article 92 du code général des impôts permet d'imposer dans la catégorie des bénéfices non commerciaux les gains réalisés par les joueurs professionnels dans des conditions permettant de supprimer ou d'atténuer fortement l'aléa normalement inhérent aux jeux de hasard. Et comme l'a confirmé la jurisprudence que vous citez vous-même, les dispositions de l'article 92 du CGI sont pleinement applicables à la pratique habituelle du jeu de poker, notamment du jeu de poker en ligne. Elles s'appliquent même à tous les jeux qui reposent sur une combinaison d'habileté et d'intelligence. Leur pratique habituelle leur fait perdre le caractère de jeu de hasard. La disposition existe, la jurisprudence existe, l'amendement est donc satisfait.
Cet amendement vise à gager le doublement des plafonds ouvrant droit au dispositif Madelin dans le cadre de souscriptions réalisées au capital de petites entreprises en phase d'amorçage, puisque c'est là que réside l'une des faiblesses de nos dispositifs d'accompagnement des entreprises. Nous avons déjà eu ce débat l'an dernier, et cette année encore en commission. Je sais que l'idée inspire quelques réserves au rapporteur général. Sans doute faudra-t-il la retravailler pour le collectif : un authentique besoin s'est exprimé en la matière et nous ne pouvons pas nous en tenir au statu quo.
Cela fait plusieurs années que nous avons en commission ce débat qui concerne le dispositif Madelin destiné à encourager l'investissement dans les petites et moyennes entreprises. Certains considèrent en effet que le dispositif n'est pas bien ciblé, qu'il faut augmenter les plafonds et concentrer cette incitation fiscale sur les PME en plein développement. Le rapporteur général a donné un avis favorable à cette idée, à condition que la mesure soit redéployée au sein des niches fiscales concernant l'encouragement à l'investissement dans les entreprises. Il s'agirait donc de diviser le Madelin par deux : l'économie ainsi réalisée permettrait d'augmenter les plafonds pour les entreprises intermédiaires. En réduisant le plafond d'investissement, qui passerait de 20 000 à 10 000 euros pour un célibataire et de 40 000 à 20 000 euros pour un couple, on pourrait doubler les plafonds pour les entreprises intermédiaires.
Quant à l'amendement n° 740 , je me propose de le retirer. En effet, le rapporteur général était d'accord avec notre idée pourvu qu'elle s'accompagne d'un redéploiement par réduction du Madelin. Or l'amendement n° 740 envisage de doubler les plafonds, mais ne finance pas le dispositif de la même façon. À moins que le rapporteur général n'ait une conception différente, il me semble que l'amendement n° 644 est préférable au n° 740.
(L'amendement n° 740 est retiré.)
Ces amendements s'inscrivent dans le prolongement d'une réflexion déjà ancienne de la commission des finances, à l'initiative, notamment, de notre collègue Nicolas Forissier. Le dispositif Madelin, qui permet de bénéficier d'une incitation fiscale dès lors qu'on investit dans les fonds propres de PME, existe depuis vingt ans et fonctionne de façon assez satisfaisante. Cela représente, bon an mal an, 200 à 250 millions d'euros de dépenses fiscales. Il s'applique aux PME au sens européen, c'est-à-dire aux entreprises de moins de 250 salariés réalisant moins de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires. Nicolas Forissier a proposé de le centrer davantage sur ce que l'on appelle les entreprises en phase d'amorçage, c'est-à-dire celles qui ont moins de cinq ans, qui comptent moins de cinquante salariés et qui font moins de 10 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Nous sommes sensibles à cette réflexion. Le premier des deux amendements gage totalement le recentrage sur les entreprises en phase d'amorçage en supprimant toute application du Madelin pour les autres entreprises. Le second gage de façon plus limitée, en maintenant le Madelin mais en le divisant par deux pour les entreprises qui ne sont pas en phase d'amorçage. S'il est vrai que nous ne disposons pas d'études d'impact précises, tout un ensemble d'études économiques, dont certaines au niveau européen, mettent l'accent sur la nécessité de mieux concentrer les dispositifs d'incitation fiscale sur les entreprises naissantes.
Nous avions fixé une condition à la présentation de ces amendements : ils devaient être véritablement gagés, non pas par une augmentation des droits sur le tabac, mais par un redéploiement du dispositif Madelin lui-même. Le premier amendement gage davantage que le second, mais le second a l'avantage de maintenir quelque peu le dispositif.
Le Gouvernement est bien conscient que la phase d'amorçage est la plus délicate, celle où, comme l'a très bien dit le rapporteur général, une entreprise doit avoir le maximum de levées de fonds. Cependant, nous ne disposons d'aucune étude d'impact sur les conséquences que ce recentrage sur l'amorçage pourrait avoir pour les PME plus anciennes, qu'il exclurait du dispositif. Il n'est pas dit que ce serait indolore pour elles, nous ne sommes pas sûrs qu'elles n'aient pas, elles aussi, besoin de ce dispositif et qu'elles ne pâtiraient pas de ce recentrage.
Il est un autre argument, plus dirimant. En recentrant ce dispositif, on le concentre sur quelques ménages beaucoup plus fortunés, qui vont encore bénéficier d'une niche à l'impôt sur le revenu. Il me semble que le Nouveau Centre, comme le Gouvernement et la commission, souhaite au contraire éviter ces effets d'aubaine extrêmement puissants pour des très hauts revenus. Le Gouvernement est donc défavorable aux deux amendements.
Je comprends la position de principe du Gouvernement : elle est très cohérente par rapport à la problématique des niches et de la défiscalisation. Mais, en l'occurrence, nous travaillons dans le cadre d'un dispositif existant, avec la volonté de traiter un véritable problème. Tout le monde sait que les apports en capital pour les entreprises se sont réduits, que les levées de fonds des fonds d'investissement se sont ralenties. La meilleure preuve en est que la part des groupes publics dans ces levées de fonds est de plus en plus importante. On sait que des contraintes existent par ailleurs vis-à-vis des assurances, avec Solvency, ou vis-à-vis des banques, et que la situation ne va sans doute pas s'améliorer du jour au lendemain.
La question est de savoir s'il est souhaitable de détourner une partie des ressources privées vers les politiques d'amorçage, ou s'il faut s'en tenir au principe de fond et ne pas toucher aux dispositifs de défiscalisation existants, en ayant pour seul objectif de les réduire en volume sans en créer de nouveaux.
Je voudrais dire au Gouvernement que deux dispositifs concernent actuellement ceux qui souhaitent investir dans les PME : le Madelin, pour l'impôt sur le revenu, et le mécanisme qui permet de se libérer de tout ou partie du montant de l'ISF en investissant dans les PME. Les deux sont exclusifs l'un de l'autre et ne sont donc pas cumulables. C'est pourquoi j'ai considéré que, des deux amendements que nous avions déposés, nos 644 et 740, le premier est le plus équilibré, en ceci qu'il maintient un dispositif, mais sous un format réduit afin de faire des économies sur le Madelin, qu'il redéploie pour essayer de favoriser le développement économique. Dans une situation d'extrême pénurie budgétaire, on doit veiller à ne pas faire que des économies. Nous devons aussi pouvoir redéployer des dépenses existantes dans le sens du développement économique.
Madame la ministre, si le second amendement était adopté, le dispositif Madelin serait supprimé et il resterait celui visant l'ISF. Mais ce ne sont pas toujours les mêmes catégories qui en bénéficient. Le premier amendement, lui, maintient un Madelin réduit.
En ce qui concerne l'étude d'impact, nous n'en aurons jamais de très précise, car les calculs sont extrêmement compliqués. Lorsque le Madelin a été créé en 1986, j'étais directeur adjoint du cabinet du ministre. On nous disait que nous allions ruiner la République ! Mais tous les gouvernements ont maintenu le Madelin, parce qu'il encourageait une épargne de proximité. Il a donc bien réussi, et personne, aucune sensibilité politique, ne veut le supprimer. Je pense donc, madame la ministre, que vous développez un argument de circonstance : depuis des années, nous avons fait en commission des finances un effort de réflexion pour proposer quelque chose d'équilibré.
Le Gouvernement ne change malheureusement pas d'avis. Il reste défavorable à ces amendements, et ce pour deux raisons.
D'une part, dans cette période de contraction des recettes budgétaires, il ne nous paraît pas souhaitable d'étendre des niches à l'impôt sur le revenu. Les contribuables doivent payer leur impôt sur le revenu. Le Gouvernement privilégie le fonds stratégique d'investissement et OSEO : c'est l'État qui paye, et pour cela, il a besoin de recettes. Nous avons une stratégie, et il faut que ce soit l'État qui la mette en oeuvre.
D'autre part, nous allons voter, à l'initiative très judicieuse du rapporteur général Gilles Carrez, un dispositif extrêmement puissant de réinvestissement des plus-values mobilières dans les PME, qui ne sont donc pas à plaindre. Il est donc important de ne pas voter ces amendements.
(Les amendements nos 642 et 644 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 737 .
La parole est à M. Charles de Courson.
Il s'agit d'un amendement un peu technique.
Les versements ouvrant droit à la réduction d'impôt sur le revenu ou à la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune au titre des souscriptions au capital des petites et moyennes entreprises ne peuvent, en application des lignes directrices communautaires du capital-investissement, dépasser un plafond commun de versements de 2,5 millions d'euros, apprécié par période glissante de douze mois.
Ce plafond de versements s'avère trop faible au regard des besoins de financement des entreprises solidaires qui exercent leur activité dans le secteur du logement social à destination des personnes les plus défavorisées, la défaillance du marché étant particulièrement caractérisée dans le secteur d'intervention de ces entreprises en raison de la faible rentabilité de l'investissement.
Le présent amendement, déjà déposé en 2011, voté par notre assemblée, puis rejeté en commission mixte paritaire – ce fut un arbitrage regrettable –, propose que ce plafond de versements ne s'applique pas aux souscriptions au capital des entreprises solidaires du secteur immobilier répondant à certaines conditions : agrément des pouvoirs publics, exercice de l'activité sur l'ensemble du territoire national, absence de distribution des dividendes, loyers en pratique inférieurs au prix du marché. Ces conditions sont autant de contreparties justifiant le relèvement du plafond.
En effet, il peut être considéré que, dans ce cas très spécifique, les échanges intracommunautaires ne sont pas de nature à être affectés, ce qui exclut la qualification d'aide d'État. Quoi qu'il en soit, les avantages fiscaux consentis aux souscripteurs profitent en réalité directement aux personnes défavorisées qui bénéficient des logements, ce qui confère à la mesure un caractère exclusivement social et la rend donc, de toute façon, compatible de plein droit avec le marché intérieur, en application de l'article 107 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
Je demande simplement à nos collègues de voter comme nous l'avions fait il y a un an et j'espère qu'en commission mixte paritaire – mais cela m'étonnerait qu'elle aboutisse –, on respectera la volonté de l'Assemblée nationale.
Favorable à cet amendement que nous avons adopté l'an dernier, mais qui n'a malheureusement pas survécu à son examen en commission mixte paritaire. Cette fois, il nous faut vraiment l'adopter définitivement.
Comme un ministre du budget a aussi un coeur (Sourires), il sera favorable à cet amendement sur l'immobilier solidaire.
Je suis saisi de deux amendements, nos 569 et 686 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Chantal Brunel, pour soutenir l'amendement n° 569 .
Cet amendement concerne les emplois à domicile, qui ont leurs vertus. Ils permettent de lutter contre le travail au noir. Ils permettent aussi de mieux concilier vie professionnelle et vie familiale, notamment pour les femmes.
Chacun le sait ici, les emplois à domicile font l'objet d'une déduction fiscale. Toutefois, il semble que cette disposition ait été détournée de son objectif, car on constate aujourd'hui que des activités de loisir et de détente font l'objet d'une déduction fiscale : je pense, par exemple, aux cours de coaching ou d'informatique.
C'est le Gouvernement qui définit par décret la liste des activités bénéficiant de la déduction fiscale pour les emplois à domicile. Mon amendement a pour but de limiter le champ de cette disposition et d'en exclure tout ce qui est activité de loisir et de détente.
Il diffère de l'amendement de M. Eckert sur un point : je maintiens le soutien scolaire dans les emplois à domicile donnant lieu à une déduction fiscale. Le soutien scolaire représente énormément d'emplois et, par ailleurs, les études montrent que ce ne sont pas forcément les ménages les plus aisés qui font appel à ce genre d'activité.
C'est un amendement utile, dont l'esprit est de réserver les déductions fiscales aux services particulièrement utiles, comme ceux concernant les personnes handicapées ou dépendantes, ou permettant de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 686 rectifié .
Mon amendement va dans le même sens que celui de Mme Brunel, à une nuance près, en effet : il exclut le soutien scolaire du champ de la disposition.
Il y a un an ou deux, la Cour des comptes avait souligné, dans l'un de ses rapports, le dévoiement de la mesure. Je me souviens avoir entendu parler de cours de claquettes ou de coaching à domicile, qui étaient utilisés pour réduire ses impôts ! Cela choque non seulement nos concitoyens, mais aussi, je crois, l'ensemble des députés dans cet hémicycle.
En outre – nous aurons l'occasion d'en reparler lors de l'examen d'un autre amendement –, cette mesure profite beaucoup aux contribuables les plus fortunés. En effet, 10 % de nos concitoyens bénéficient de plus des deux tiers des déductions fiscales. Cela montre qu'au-delà de ce qui apparaît nécessaire, comme la garde d'enfants à domicile, les soins ou les services aux personnes âgées, il y a bien eu un dévoiement de la mesure par rapport à son esprit initial. Cela mérite d'être corrigé.
S'agissant, enfin, du soutien scolaire et des cours à domicile, l'Assemblée avait voté, l'an dernier, leur exclusion du dispositif. Mais cette disposition n'avait pas résisté à la seconde délibération demandée par le Gouvernement. Nous avions tous été choqués par certaines publicités : Acadomia, par exemple, s'engageait à rembourser les parents si leur enfant n'avait pas son baccalauréat. Mais dans ce cas, la déduction fiscale, elle, n'était pas remboursée !
Cela fait deux ou trois ans que nous rapportons ensemble, avec Mme Brunel, les crédits de la mission « Travail et emploi », et notre attention a souvent été appelée sur ce point. Nous discuterons, dans un amendement ultérieur, des plafonds de déduction. En attendant, notre proposition pourrait faire consensus dans notre assemblée.
La réflexion de nos deux collègues est très intéressante.
Permettez-moi de faire un rapide rappel historique.
Le dispositif consistant à créer une incitation fiscale aux emplois à domicile a commencé à fonctionner en 1992.
Pendant une période assez longue, il était vraiment centré sur la garde d'enfants et l'aide aux personnes âgées.
Au milieu des années 2000, le souci de l'emploi a pris le relais, car ce dispositif s'était avéré très créateur d'emplois. L'assiette implicite, qui portait plutôt sur la garde d'enfants et l'aide aux personnes âgées, s'est élargie, parfois de façon démesurée.
Nos collègues nous proposent de restreindre le périmètre de cette disposition. Toutefois, les deux amendements, tels qu'ils sont rédigés, posent problème.
Il faudrait peut-être les revoir, et je propose que nous le fassions ensemble dans le cadre du collectif. Il y a, d'une part, le problème des cours, qui est un vrai sujet – et je partage la position de Mme Brunel sur ce point. Je pense que nous pouvons trouver une rédaction qui satisfasse chacun.
Mais, comme nous avons basculé dans une politique générale de l'emploi, c'est un exercice assez difficile. Car quelle est la priorité ? L'emploi ou la nature des services à domicile ?
Le Gouvernement n'est pas favorable à ces deux amendements.
L'objectif de la déduction fiscale sur les emplois à domicile est très simple : éviter le travail clandestin non déclaré, qui ne rapporte pas un euro au budget de l'État.
Je comprends que vous vouliez faire de la dentelle sur le périmètre des services éligibles, mais vous allez toujours exclure des services utiles. Que se passerait-il si vous adoptiez cet amendement ? Tous ces services repartiraient vers le travail au noir. Or dans le travail clandestin, il n'y a pas de charges sociales, pas de couverture sociale pour le salarié, pas d'impôt sur le revenu.
Vous ne voulez pas que les cours à domicile soient inclus dans le champ de la mesure parce qu'ils ne sont pas utiles, selon vous. Mais ils sont très utiles pour les familles et pour les enfants. Préférez-vous que les enseignants fassent des cours au noir, non déclarés, avec des heures supplémentaires non déclarées ?
Nous avons moralisé le secteur du service à domicile et solvabilisé la demande ; nous offrons à beaucoup de familles, d'enfants et de personnes âgées des services dont ils ont besoin et que, de toute façon, ils se procureraient. Je le répète, il faut moraliser le secteur, arrêter le travail clandestin, faire payer des cotisations et de l'impôt sur le revenu, et donc maintenir la défiscalisation qui, de fait, dans le travail clandestin, serait la norme !
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Quand on défiscalise, on n'en paie pas non plus !
Si vous ne défiscalisez pas, il y aura du travail clandestin. Et qui paiera quoi ?
J'approuve la position de Mme la ministre.
Pour la énième fois, nous avons un débat sur ce sujet, mais on voit bien que, culturellement, notre pays n'avance pas si vite que cela sur la légitimité des services à la personne et de la politique fiscale qui va avec.
Je suis de ceux qui pensent que les services à la personne sont légitimes et que, dans l'esprit de ce que vient de dire la ministre, une bonne réponse fiscale est intelligente.
J'appelle l'attention sur la rédaction de l'amendement de Mme Brunel qui, par l'emploi du féminin pour le mot « liées », a exclu de fait les cours à domicile du dispositif fiscal des services à la personne. Car « liées à l'assistance informatique » étant au féminin, cela s'applique aux activités de services à domicile. Cela veut dire que l'amendement de Mme Brunel exclut les activités de services à domicile liées à l'assistance informatique, mais aussi les cours à domicile, arrivant en réalité au même dispositif que celui proposé par l'amendement de nos collègues socialistes.
…que ce ne soit pas une mauvaise évaluation politique.
S'agissant de la légitimité de l'enseignement et des cours à domicile, j'estime qu'il est tout à fait cohérent de les prendre en compte dans un dispositif d'encouragement de services à la personne. Car les familles ayant une grande liberté d'organisation et d'accompagnement de l'enseignement pour leurs enfants, elles peuvent faire le choix d'ajouter ou de compléter ce qui leur est proposé par ailleurs avec des cours à domicile.
Ensuite, pourquoi exclure l'aide à l'informatique ? Je n'arrive pas à comprendre pourquoi, aujourd'hui, en 2011, l'aide au repassage serait en soi plus légitime que l'aide à l'informatique ! Je demande que l'on m'explique. À partir du moment où l'on approuve les catégories d'exclusion que proposent nos collègues, les services fiscaux, auxquels on ne pourra pas reprocher d'appliquer la loi – éventuellement avec les accords grammaticaux qui sont ceux de la loi –, pourront faire preuve d'une rigueur qui mettra nos concitoyens dans des situations surréalistes.
Ce débat est assez drôle, parce que nous sommes parfois à fronts renversés avec le Gouvernement. En l'occurrence, le Gouvernement est laxiste !
Chantal Brunel, dans ses rapports successifs, nous a démontré qu'il y avait des dérapages et des abus. Non pas que le coaching ne soit pas respectable. Mais la question est de savoir s'il doit être partiellement financé par l'État.
Quand elle a été instaurée, cette mesure avait plusieurs objectifs : elle visait à favoriser l'emploi ; elle visait à la résorption du travail au noir ; elle s'inscrivait aussi dans le cadre de la politique familiale. Il faut donc trouver un équilibre entre ces différents objectifs. À cet égard, la proposition de Chantal Brunel de resserrer le dispositif paraît tout à fait raisonnable.
Je ne suis pas du tout d'accord avec nos collègues socialistes quand ils veulent exclure du bénéfice de cet avantage les cours à domicile. Tout le monde peut avoir un cancre à la maison ! Qui n'a pas eu un enfant cancre ? Ce sont des choses qui arrivent !
Au nom de quoi voulez-vous décourager les familles qui essaient de s'investir dans l'éducation de leurs enfants ?
Monsieur Emmanuelli, cette mesure ne s'applique pas au détriment de la bonne éducation des enfants des familles qui n'ont pas les moyens de payer des cours à domicile ! C'est l'intérêt de notre pays que d'avoir des enfants le mieux éduqués possible, et ce quelles que soient leurs origines.
Il est vrai que l'on peut encore perfectionner le dispositif. Il conviendrait, par conséquent, de discuter d'un amendement bien peaufiné avec les services de la commission dans le cadre du collectif budgétaire. Il pourra alors, je le pense, être voté à une très large majorité. Je trouve dommage que le Gouvernement ne soit pas plus ouvert, car il existe tout de même un certain nombre de dérapages, ce qui doit nous amener à recentrer quelque peu ce dispositif.
Je suis tout de même assez surprise, madame la ministre, que vous soyez hostile à mon amendement, qui maintient le soutien scolaire dans les emplois à domicile. Il y a tout de même un vrai débat en France. Je ne suis pas favorable à l'abaissement du plafond fiscal pour les emplois à domicile,…
…mais vous ne pouvez pas faire bénéficier de la déduction fiscale les cours de gymnastique, le coaching, les soins esthétiques à domicile, entre autres ! Il y a là un véritable détournement. Je pense, pour ma part, qu'il serait bon de voter ici cet amendement, qui sera examiné au Sénat avant de revenir devant notre assemblée.
Apporter une telle réponse, madame la ministre, ce n'est pas donner un signe positif. Nous sommes dans une période où l'on demande aux Français de consentir beaucoup d'efforts en matière de retraite et de dépenses de santé. Il convient donc de supprimer les abus. L'État n'a pas à consentir des déductions fiscales pour tout ce qui est activités de loisirs et de détente.
Même si Hervé Mariton considère qu'il faut mettre le mot « liées » au masculin, je considère qu'il faut maintenir les cours à domicile dans le champ de la déduction.
Malheureusement si !
Vous dites que ces emplois retourneront dans le secteur du « black ». Mais si vous défiscalisez, je ne vois pas où est le gain.
Si : impôt sur le revenu et cotisations sociales !
Je vous rappelle que la mesure coûte 4 milliards.
Plus grave, vous semblez dire que nous sommes opposés aux emplois de services à domicile. Ce n'est pas vrai, car nous y avons largement contribué. Vous avez, pour votre part, fait exploser les plafonds, ce qui est autre chose – nous en reparlerons tout à l'heure.
Le problème, c'est que, l'année dernière, madame la ministre, le Gouvernement n'a eu aucun scrupule à prendre deux mesures qui pénalisent aujourd'hui fortement les services à domicile. Vous avez, premièrement, supprimé l'abattement de quinze points pour ceux qui déclaraient au réel et non au forfait. Cette mesure contre-productive a, justement, renvoyé vers le travail non déclaré ceux qui étaient, auparavant, déclarés. Deuxièmement, et c'est pire, vous avez supprimé l'exonération de charges sociales pour les entreprises et les associations qui pilotent ce genre de services. Il n'y a qu'à voir, aujourd'hui, dans quelle situation se trouvent ces entreprises, qui sont très lourdement pénalisées, parce que vous les avez renvoyées aux allégements Fillon alors qu'elles étaient auparavant totalement exonérées ! Je ne parle pas seulement des salariés qui travaillent à domicile, mais je vise ici également le personnel de ces associations. Je connais le problème aussi bien que vous, puisque, encore une fois, je rapporte, avec Chantal Brunel, les crédits de la mission « Travail et emploi » depuis plusieurs années. J'ajoute que, dans un premier temps, l'Assemblée n'avait pas voté cette suppression. C'est une deuxième délibération qui a conduit à supprimer ce que nous avions construit ensemble. C'est ce que vous osez encore appeler la coproduction législative ! M. Baroin et M. le rapporteur général s'en souviennent !
Madame la ministre, vos arguments ne tiennent pas. Comment allez-vous expliquer que l'on puisse se payer du coaching à domicile, du stretching à domicile, des soins esthétiques à domicile en défiscalisant, alors que vous avez pénalisé, par la décision que vous avez prise l'année dernière, les associations têtes de réseaux, qui, aujourd'hui, ont des coûts considérables…
…et sont contraintes de majorer les prix, notamment pour les personnes âgées !
Nous pouvons, bien sûr, discuter sur le soutien scolaire à domicile. En tout cas, nous voterons l'amendement de notre collègue Chantal Brunel, ce qui, franchement, contribuerait déjà à l'assainissement moral de ce secteur.
J'apporterai deux précisions, s'agissant de la rédaction de l'amendement de notre collègue Chantal Brunel.
Cet amendement exclut totalement les cours à domicile. En revanche, il préserve le soutien scolaire. Une famille faisant appel à une association pour des cours de soutien scolaire continuera donc à bénéficier d'une aide fiscale.
Tous les services à domicile liés à l'assistance informatique seraient également exclus. Je ne partage donc pas la critique de M. Mariton.
À partir du moment où nous sommes tous d'accord pour apporter une définition un peu plus stricte d'un périmètre déjà très large, je vous propose de reprendre cette rédaction, de la valider complètement, la semaine prochaine, en commission des finances.
Je remercie M. Eckert de se rallier à l'idée de conserver le soutien scolaire. C'est indispensable. Je pense, madame la ministre, que l'on pourra vous proposer, dans quinze jours, un amendement qui fera l'unanimité.
J'attendrai avec beaucoup d'impatience…
Je vous remercie, monsieur Piron, de me prêter de la sagesse !
J'accueillerai avec bienveillance la rédaction de la commission des finances. Je vous mets toutefois en garde. Je pense qu'il sera très difficile de faire de la dentelle. Prenons le soutien scolaire, par exemple. Quand s'arrête l'école ? L'enseignement supérieur est-il ou non concerné ? Veillez à ce que les frontières soient nettes.
J'entends bien que la défiscalisation des soins esthétiques et du stretching à domicile n'est peut-être pas nécessaire pour un couple de quadragénaires biactif – si l'on estime que la sauvegarde de l'emploi concerné n'est pas une nécessité publique. Mais prenez une personne âgée dépendante, qui ne peut pas se déplacer, qui est grabataire. Lui permettre d'avoir accès à un coiffeur ou à des soins esthétiques pour rester autonome, n'est-ce pas un bien-être que l'on peut lui offrir ? Cela ne fait-il pas vivre des services à domicile extrêmement précieux pour la dynamique de nos territoires ruraux ? Nous devons faire très attention. De la même façon, la remise en forme faisant appel à un kinésithérapeute peut également être nécessaire pour une personne âgée.
Nous devons vraiment disposer d'une étude d'impact sur cette mesure.
Je pense que la solvabilisation des services à domicile auxquels peuvent recourir des personnes âgées qui ne sont plus en mesure de se déplacer fait vivre l'économie d'un certain nombre de territoires ruraux.
Soyons très prudents dans la définition.
Je rappelle que le chiffre d'affaires de ce secteur s'élève à 16,7 milliards d'euros et que sa valeur ajoutée est de 1 % de la valeur ajoutée totale de l'économie française. La progression a été de 5 % en 2010 et de 10 % entre 2005 et 2008. Cela a permis de créer des emplois : il y a 390 000 emplois dans le domaine des services à domicile. Et ce chiffre croît de 4 % par an. Jean-Louis Borloo avait donné comme objectif d'atteindre 500 000 emplois à domicile.
Oui, mais combien de recettes fiscales, grâce au fait que ces emplois de service sont déclarés ? Là encore, je voudrais que l'on mette les deux chiffres en regard.
Monsieur Eckert, nous avons rétabli l'exonération pour les services à domicile en faveur des familles fragiles, voici quelques jours dans cet hémicycle.
J'ai l'impression de me retrouver il y a quarante ans à l'École normale ! J'aimerais bien que l'on m'explique, ici, la différence entre le soutien scolaire et la leçon particulière, parce que c'est de cela qu'il s'agit !
Et la formation continue !
Quelle nuance y a-t-il entre le fait de recourir à quelqu'un pour du soutien scolaire ou pour une leçon particulière ? Ne croyez-vous pas que les deux se recoupent ? On peut établir une différence administrative, mais la différence pédagogique n'est pas très claire. Soit, on accepte tout simplement le travail d'un pédagogue scolaire auprès d'un enfant, soit, on ne l'accepte pas. Mais faire ainsi dans la nuance, c'est se rapprocher de Kafka et personne ne reconnaîtra plus ses petits !
Cet amendement a pour but d'appeler l'attention du Gouvernement. En effet, c'est un décret qui dresse la liste des activités donnant droit à une déduction fiscale. Si cet amendement est voté ici et au Sénat, c'est de toute de façon le Gouvernement qui devra rédiger le nouveau décret.
C'est à lui, qu'il appartiendra de le rédiger de manière extrêmement fine.
Le Gouvernement doit tout de même respecter la loi !
J'appuierai les propos de notre collègue, puisque j'avais demandé la parole pour dire exactement la même chose. Nous avons examiné ce décret avec Mme Brunel. Je pense néanmoins que le législateur peut exprimer sa volonté et ne pas forcément déléguer au Gouvernement le soin de rédiger le décret.
S'agissant des exonérations de charges, madame la ministre, vous vérifierez peut-être ce point avec vos collaborateurs. Auparavant, les associations et entreprises de services à la personne bénéficiaient, pour l'ensemble de leurs personnels, y compris les secrétaires et le directeur, de l'exonération de charges sociales. Vous avez supprimé, l'année dernière, l'exonération de charges sociales, non pas, je le répète, pour ceux qui vont travailler chez les personnes, mais pour ceux qui sont dans les têtes de réseaux – ADMR, par exemple. Les associations sont donc aujourd'hui dans des situations financières extrêmement difficiles. Et quel est le résultat ? C'est qu'elles se retournent vers les conseils généraux pour qu'ils bouchent les trous que vous avez creusés !
Madame la ministre, vous avez évoqué à juste titre les zones rurales. C'est effectivement essentiel. Mais de qui parlez-vous ? Dans les territoires très ruraux, une personne sur deux ne paie pas d'impôt sur le revenu et une personne sur deux vit avec 700 euros par mois. Et vous parlez, ici, de stretching ! Nous ne devons pas rencontrer les mêmes gens !
Le stretching est à la mode !
Je ne sais pas si c'est la mode, mais en tout cas les personnes que je connais font appel, comme le disait mon collègue Christian Eckert, aux associations de services de soins à domicile, qu'il faut aider, car jamais ces personnes ne recourront individuellement à un tel service dans l'espoir de voir réduit un impôt qu'elles ne paient pas ! Nous devons revenir à des choses précises, comme cela a été dit.
Je suis prêt à voter, moi aussi, l'amendement de Mme Brunel. N'attendons pas, essayons d'avancer aujourd'hui, quitte à apporter une rectification dans quinze jours. Donnons un signal dès maintenant !
Je pense que nous devons nous en remettre à la sagesse de la commission des finances pour essayer de trouver une rédaction.
Le Gouvernement rédige certes des décrets, madame Brunel, mais il est lié par le texte de la loi. Si celle-ci est mal rédigée, le Gouvernement ne pourra pas s'en abstraire. Nous devons, par conséquent, y travailler très soigneusement. Je comprends que l'amendement de Mme Brunel est avant tout un amendement d'appel, qui vise à pointer du doigt un certain nombre d'abus. Regardons si abus il y a.
Je réponds à nouveau à M. Eckert que j'ai bien compris de quoi il parlait, à savoir des exonérations pour les associations et les entreprises de services à domicile. Je lui répète qu'à l'initiative de Mme Bérengère Poletti, voici quelques jours dans cet hémicycle, nous avons rétabli l'ensemble des exonérations de charges – qui avaient été supprimées, en effet, l'année dernière – pour les associations de travail à domicile qui s'occupent plus particulièrement des familles fragiles.
C'est un effort qui coûte 25 millions d'euros au budget de l'État, mais le ministre du budget a un coeur et les associations sont dans une situation extrêmement difficile.
Votre amendement est presque parfait, madame Brunel, mais il nécessite encore un peu d'expertise. Je prends l'engagement que la question sera évoquée dans les tout prochains jours. Le collectif, qui sera examiné demain en conseil des ministres, sera en effet dès la semaine prochaine sur le bureau de la commission des finances, hélas, allais-je dire. Les délais sont très courts. Vous pourrez proposer un nouvel amendement, madame Brunel, et il sera adopté par la commission.
Je ne suis pas habituée à retirer un amendement, monsieur le rapporteur général. Mais mes amis m'y poussent et je vais le faire, pour le Gouvernement et pour vous. Cela dit, je souhaite vraiment que l'on revienne sur cette question, parce qu'il y a là un vrai sujet et un signal à donner aux Français. Je compte bien que vous donnerez alors un avis favorable sur l'amendement que je présenterai.
Nous reprenons l'amendement, même si je mesure à quel point l'espoir de le voir aboutir est mince, car cela fait plus d'un an, monsieur le rapporteur général, qu'avec Mme Brunel, nous évoquons ce problème.
C'est la première fois que nous avons un amendement, et il n'est pas passé par la commission des finances.
C'est pour des raisons techniques qu'il n'a été examiné que lorsque la commission s'est réunie en application de l'article 88. On nous avait dit de le présenter dans les articles non rattachés. Nous l'avions préparé ensemble, à la nuance qui a été soulignée tout à l'heure.
Pour le principe, nous reprenons l'amendement de Mme Brunel et nous le voterons. Nous verrons ensuite si les choses progressent. Je crois en tout cas que le Gouvernement aura senti la volonté assez générale, même si elle n'est pas unanime, monsieur Mariton, d'avancer sur ce dossier.
(L'amendement n° 569 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 686 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 760 .
La parole est à M. Christian Eckert.
C'est un amendement que vous connaissez. M. le rapporteur général a refait tout à l'heure l'historique de la mesure. Il est repris dans l'exposé sommaire, dont je vous épargnerai la lecture.
Je rappelle néanmoins que 10 % de nos concitoyens bénéficient de plus des deux tiers de la réduction fiscale et que c'est une niche qui représente plus de 3 milliards d'euros en 2011. Vous nous avez fait connaître l'évolution positive du nombre d'emplois, madame la ministre, mais vous vous êtes arrêtée à l'année 2010. Je serais curieux de savoir ce qu'il en est pour 2011. Compte tenu des décisions incohérentes que vous avez prises l'année dernière avec la réduction de quinze points dont je parlais tout à l'heure, je vous fiche mon billet que le nombre d'heures a probablement diminué.
Nous proposons de faire passer les plafonds mentionnés au 3. de l'article 199 sexdecies du code général des impôts de 12 000 à 7 000 euros et de 15 000 à 10 000 euros. Cela permet déjà – car je sais ce que vous allez certainement nous objecter – de couvrir les gardes d'enfant à domicile ou les soins aux personnes âgées à domicile. Ce sont déjà des montants substantiels. Et au-delà, cela concerne vraiment des gens qui peuvent payer le surcoût, compte tenu de leurs revenus.
(L'amendement n° 760 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à mettre un peu d'ordre dans le financement de la vie politique.
Aujourd'hui, nos concitoyens peuvent faire des dons à des partis politiques, jusqu'à 7 500 euros par parti, mais cette somme est démultipliable à l'infini. Ils peuvent notamment financer des micropartis destinés à animer des campagnes locales de personnalités appartenant par ailleurs à un grand parti politique. Ainsi, un même concitoyen peut donner 7 500 euros à un grand parti et 7 500 euros à différents leaders de ce même parti.
Une telle situation n'est pas satisfaisante. Nous devons, notamment dans la perspective des échéances de 2012, mettre un terme à un certain nombre de dérives, d'autant plus que ce système constitue une niche fiscale puisqu'il existe un avoir fiscal de 66 % des dons dans la limite de 20 % des revenus.
Cet amendement propose donc très simplement de limiter à 7 500 euros par personne les dons aux partis politiques. Cela ne limite en rien la liberté de nos concitoyens, qui peuvent par exemple diviser ces 7 500 euros pour faire plusieurs dons. Ce sera à eux de choisir.
Une telle mesure me paraît être d'intérêt général. Il me semble d'ailleurs que nous étions parvenus à dégager un accord, lors de la discussion en commission, sur la nécessité de moraliser le financement de la vie politique. Nous allons plus loin, nous précisons les termes de la loi de 1988 qui, il faut en avoir conscience, est totalement dévoyée par la multiplication de ces micropartis qui suscitent interrogations et scepticisme chez l'ensemble de nos concitoyens.
Défavorable, pour les raisons exposées il y a trois semaines sur le même amendement présenté en première partie.
Autant le Gouvernement était favorable à l'amendement Le Fur, qui permettait la liberté des dons mais plafonnait l'avantage fiscal, autant cet amendement limite la liberté qu'ont les Français de donner, et risque de nuire à la vitalité des petits partis ou des courants au sein des partis.
Hier soir, lorsque nous avons examiné l'amendement du Gouvernement visant à réduire les dépenses relatives aux élections présidentielles, on nous a expliqué que la classe politique devait être exemplaire.
Il y a quelques jours, lorsque nous avons adopté le dispositif tendant à faire baisser le niveau de remboursement des dépenses des candidats aux élections législatives, on nous a expliqué que nous devions être exemplaires et donner un signe de notre participation aux efforts qu'exigerait la crise économique.
Dans les deux cas, il s'agissait de donner l'exemple.
L'amendement que nous présentons a pour objet d'empêcher que le dispositif soit utilisé de façon contraire au sens de la loi. Nous proposons de limiter le versement déductible à 7 500 euros par personne. Il existe en effet une pratique qui consiste à multiplier les versements au profit d'organismes politiques, dans la seule finalité de contourner la loi.
Bref, quand il s'agit de l'exemplarité de la classe politique, vous nous demandez d'approuver les mesures que je rappelais à l'instant, mais quand il s'agit de rappeler aux acteurs politiques, et pas aux plus modestes – ils sont présents y compris dans cet hémicycle –, que l'on doit avoir une attitude loyale et ne pas multiplier les versements dans des conditions suspectes, nous savons tous de quoi il est question, et manifestement contraires à la loi, vous ne voulez pas. Il y a bien deux poids et deux mesures.
Selon nous, un citoyen ne peut pas verser plus de 7 500 euros à un parti politique, et on ne peut accepter un dispositif permettant de contourner un plafond qui avait été considéré par tous comme acceptable.
Je ne voudrais pas laisser dire certaines choses sur les partis politiques qui bénéficient de mesures de défiscalisation, qu'ils soient grands ou petits.
J'ai été ministre chargé des outre-mer. J'ai pu mesurer combien des partis locaux pouvaient être extrêmement importants pour la vitalité de la vie politique dans les outre-mer. Ils passent d'ailleurs, à l'occasion, des accords politiques avec de plus grands partis. Ils sont tous déclarés, leurs financements sont transparents et ils sont soumis au contrôle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Je ne peux pas entendre parler de « détournement de la loi » et de « moralisation » ! On a le sentiment que ces petits partis échapperaient totalement au contrôle et à la transparence. Ce sont des partis transparents, les petits comme les grands.
Ils publient leurs comptes, qui sont approuvés par la Commission nationale des comptes de campagne. Attention à ne pas ouvrir un débat sur la taille des partis.
Qu'est-ce qu'un parti acceptable au titre de ce que vous appelez la transparence ? À partir de quelle taille, de combien de députés ? Un parti ayant quatre députés dans cet hémicycle, est-ce un petit ou un grand parti ?
Il faut ramener les choses à leurs justes proportions. Il existe une loi sur la transparence de la vie politique, dont nous partageons tous l'objectif puisque des gouvernements de gauche comme de droite en ont été à l'origine.
Il existe un organisme qui vérifie les comptes de l'ensemble des partis. Je ne suis pas opposé à ce que nous ayons une réflexion commune sur une évolution possible, mais ne laissons pas dire qu'un parti, parce qu'il n'est pas un grand parti national, n'aurait pas le droit d'exister ou ne serait pas transparent.
Plusieurs députés du groupe SRC. Ce n'est pas la question !
La transparence existe dans tous les partis politiques déclarés, et tous ceux qui bénéficient de mesures de défiscalisation ont le même devoir de transparence, de vérité et de vérification, il n'y a aucun doute sur ce point.
Le fond de la question, ce n'est pas de savoir s'il y a des petits ou des grands partis, c'est de savoir si la somme de 7 500 euros est un bon plafond ou non. Je pense que la possibilité de multiplier le nombre de dons détourne l'esprit de la loi qui a été votée, et c'est la Commission nationale des comptes de campagne qui le dit.
La seconde question qui est posée, c'est celle du rapport fiscal. Tout le monde a conscience du fait que nos finances sont dans une situation compliquée. La possibilité de déduire 66 % du montant des dons dans la limite de 20 % du revenu est largement suffisante et peut-être même déjà excessive. Un coup de rabot supplémentaire serait bien utile.
Ce qui choque tout le monde, c'est que l'on puisse donner 7 500 euros multipliés par un nombre illimité de partis.
Plusieurs députés du groupe SRC. Exactement !
Nous nous étions donc mis d'accord – je regrette que notre collègue Marc Le Fur ne soit pas présent – sur un plafond global de 15 000 euros, avec la possibilité de donner, dans cette limite, à autant de partis que l'on veut.
Il y a, par ailleurs, le débat fiscal. Il se trouve que le plafond de l'avantage fiscal a été calé sur le plafond des dons. Mais nous pourrions parfaitement prévoir un plafond fiscal plus bas. Il serait tout à fait possible, par exemple, d'accorder une déduction fiscale dans la limite de 7 500 euros tout en permettant des dons jusqu'à 15 000 euros, et à autant de partis que vous voulez. Pour l'instant, les deux plafonds coïncident, ce qui n'est pas forcément évident.
Nous avions convenu que Mme Filippetti se rapprocherait de M. Le Fur pour qu'ils présentent ensemble un amendement dans le cadre du collectif budgétaire.
Puisque nous en étions tous d'accord, il serait bon de s'en tenir à cette approche, tout en réfléchissant à la possibilité que je viens d'évoquer d'un plafond fiscal plus bas que le plafond des dons.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Et en séance !
…et elle a été unanime à reconnaître que, si la lettre de la loi n'était pas violée par certaines pratiques, celles-ci en faisaient toutefois une utilisation que l'on pourrait qualifier d'astucieuse. Nous avons donc souhaité encadrer cette astuce légale. C'est pourquoi, après en avoir débattu entre nous de manière extrêmement sereine et responsable, nous étions parvenus à la proposition que vient de rappeler Charles de Courson : un plafonnement de 15 000 euros par foyer.
Le groupe socialiste avait donc mandaté l'un des siens pour qu'il se rapproche de Marc Le Fur et qu'un amendement commun soit présenté, qui pourrait être voté par tous. Cela n'a pas été le cas, pour des raisons que j'ignore, mais après tout, nous pouvons très bien le faire dans le cadre du collectif. Cela s'appliquera ainsi dès 2012, et je pense que chacun s'y retrouvera, ceux qui souhaitent que l'astuce, aussi légale soit-elle, soit encadrée, et ceux qui entendent que tous les partis soient respectés, ce que nous voulons tous dès lors qu'il s'agit bien de partis politiques et non d'associations dont le but est de promouvoir l'image ou l'action de telle ou telle personne. Il ne s'agit nullement de contraindre l'action de partis régulièrement déclarés, petits, moyens ou grands : ils ont tous leur utilité et, que nous adhérions ou non à leurs propositions, nous les respectons.
C'est cet accord auquel nous étions en parvenus en commission qu'il faut traduire par un amendement. Il pourrait être cosigné par les deux membres de la commission des finances qui ont travaillé sur le sujet, Aurélie Filippetti et Marc Le Fur. Cet amendement pourrait être adopté, avec, si j'ai bien compris, l'accord du Gouvernement, dans le cadre du collectif. Si, monsieur le rapporteur général, madame la ministre, vous confirmiez être d'accord avec ce schéma, je suggérerais à Mme Filippetti de retirer son amendement.
Nous avons eu ce débat en séance il y a quelques semaines. Le pluralisme politique ne se résume pas à des règles fiscales. Nous devons le préserver et le faire grandir.
Le groupe socialiste met le doigt sur des abus dans l'utilisation des dispositifs de défiscalisation. Ces dispositifs, limitons-les. Par contre, je ne pense pas qu'il faille limiter la possibilité pour un Français de donner à des partis politiques, car il s'agit tout simplement de sa liberté. De surcroît, si nous contraignions trop drastiquement ces comportements, nous risquerions d'assister, comme je l'ai indiqué dans l'hémicycle – et je constate que certains députés le redoutent comme moi –, à la mainmise de quelques très grands partis sur l'ensemble des dons.
Vos partis, mesdames et messieurs les socialistes, mesdames et messieurs les Verts, ont organisé des primaires. Celles-ci ont été financées par des associations de financement politique qui sont des partis politiques liés à une seule personne, un candidat à la primaire. Les dons à ces associations ont été défiscalisés.
Il faut faire attention à ce qu'il n'y ait pas, au sein des partis politiques, de candidats « officiels », qui soient les candidats de leurs partis. Il faut qu'il puisse y avoir des primaires, avec la possibilité pour de petits candidats de financer leur activité politique dans le cadre de ces associations. Si le Gouvernement a donné, il y a quelques jours, un avis favorable à l'amendement de M. Le Fur sur la baisse de la fiscalité, il défend également le pluralisme de notre vie politique, qui ne doit pas s'assécher.
Je me suis en effet rapprochée de M. Le Fur pour que nous parvenions à une rédaction commune, mais notre collègue propose de réunir le groupe de travail à l'occasion du projet de loi de finances rectificative. Or j'estime qu'il y a une certaine urgence à adopter ces modifications, pour qu'elles puissent s'appliquer dans le cadre des campagnes de 2012.
En outre, nous divergeons sur un point. M. Le Fur considère qu'il faut seulement limiter l'avoir fiscal, alors que c'est, selon nous, le montant total des dons aux partis politiques qui doit être limité. Il ne s'agit nullement de restreindre la liberté qu'ont nos concitoyens de donner, s'ils le souhaitent, à plusieurs partis. Il s'agit seulement de plafonner le montant total des sommes que chacun pourra donner.
Notre présent amendement prévoit un plafond de 7 500 euros. En commission, nous étions effectivement prêts à le porter à 15 000 euros.
Cela ne me pose aucun problème, mais l'enveloppe totale doit être limitée. Au sein de cette enveloppe, chacun pourra choisir le ou les partis qu'il souhaite aider. Cela ne nuit nullement au développement de la vie démocratique, cela ne contraint pas la liberté de nos concitoyens, mais cela évite certains risques de dérive dont nous avons tous conscience.
La Commission nationale des comptes de campagne, monsieur Jégo, fait en effet son travail, et même très bien. C'est d'ailleurs elle qui, en 1995, avait pointé les risques de dévoiement de la loi de 1988 sur le financement des partis politiques. Aujourd'hui, c'est pour répondre à ses préoccupations que nous présentons cet amendement, lequel, je le répète, ne force pas les Français à aider un seul parti mais vise à limiter le montant total des dons, ce qui limitera d'ailleurs l'avoir fiscal par la même occasion. Il me semble que cet amendement est plus exhaustif et répond mieux à notre souci commun que la proposition de notre collègue Marc Le Fur.
Je ne serais pas intervenu si Mme la ministre n'avait pas évoqué la primaire socialiste.
Puisque vous vous intéressez au financement de la primaire, madame la ministre, vous auriez dû écouter la communication du trésorier, qui a expliqué que non seulement elle n'a pas coûté d'argent au parti socialiste mais qu'elle lui en a même rapporté. Quelque trois millions et demi de personnes y ont participé et, alors que le parti demandait un euro, beaucoup ont donné cinq ou dix euros.
Sur le fond, la proposition du président de la commission des finances me paraît raisonnable, et je ne comprends pas la raison de ce faux débat sur une loi dont nous connaissons tous l'origine et qui fait l'objet de détournements, régulièrement dénoncés sur la place publique, qui ne sont pas à l'honneur de la vie politique dans notre pays. On pourrait quand même mettre un coup d'arrêt aux abus !
Je vous ai écouté, monsieur Jégo, mais le sujet n'est pas du tout celui que vous avez évoqué. Nous savons tous qu'il existe des micro-partis, émanant d'un ou deux parlementaires, où l'argent est récupéré pour leur promotion personnelle, et cela n'a rien à voir avec la vie politique et démocratique. C'est de cela que nous parlons et pas d'autre chose.
Afin de conclure, je l'espère, ce débat que nous avons déjà eu à plusieurs reprises, je souhaiterais que Mme Filippetti retire son amendement, comme l'a proposé le président de la commission. Nous nous engageons tous les deux, conjointement, à ce qu'un amendement soit présenté dans huit jours, à l'occasion du collectif budgétaire, à partir d'un travail commun entre M. Le Fur et elle.
Nous en venons à l'examen de l'article 42.
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
Nous avons souhaité nous arrêter un instant sur cet article, qui aborde un problème que nous n'avons cessé de placer au coeur des débats dans cet hémicycle, celui du caractère exagéré des loyers. L'article 42 propose de taxer annuellement le loyer, dans les zones tendues et pour les tout petits logements, lorsque son montant dépasse une certaine valeur qui sera fixée par décret, avec une amplitude que la loi établit entre 30 et 45 euros par mètre carré. L'expression « zones tendues », nous comprenons bien qu'elle vise la région parisienne et les grandes villes de province.
Je souhaite insister sur trois points. Tout d'abord, depuis quelques semaines sont abordées des questions que notre groupe a lui-même traitées dans les différentes propositions de loi et dans les différents amendements qu'il a déposés tout au long de ces dernières années. Hier, le Scellier a été rasé – maladroitement, selon nous – ; aujourd'hui, le prêt à taux zéro est sur le point d'être remis en cause, dans des conditions que nous connaîtrons prochainement ; et, avec le dispositif de l'article 42, le Gouvernement reconnaît enfin que le niveau des loyers pose un réel problème.
Mais il le fait en adoptant une approche purement fiscale, car il ne veut pas recourir aux techniques pourtant simples et efficaces du blocage.
Si le débat sur le blocage gagnerait à être ouvert, nous considérons toutefois que cette prise en considération – tardive ! – par le Gouvernement du caractère inacceptable de la hausse des loyers est en soi un acte qu'il pose.
Deuxième observation, ce dispositif n'est applicable que pour les petites surfaces, inférieures ou égales à 13 mètres carrés.
Ma troisième observation porte sur le niveau des loyers considéré. Car enfin, 40 euros par mètre carré, cela fait un loyer supérieur à 500 euros pour une surface de 13 mètres carrés : c'est proprement scandaleux ! Il y a donc un problème de fond dans la démarche du Gouvernement. Le ministère du logement a découvert, tout d'un coup, que le montant des loyers pose problème, mais il l'aborde dans des conditions inacceptables, en admettant que l'on peut louer 13 mètres carrés à plus de 500 euros par mois. Si l'on considère que c'est une bonne chose, ce n'est même pas la peine de créer cette taxe ! Tant que nous n'entrerons pas dans des logiques de loyer de référence, nous ne parviendrons pas à régler le problème.
Comme vient de le rappeler Jean-Yves Le Bouillonnec, nous avons, à de multiples reprises, à l'occasion de l'examen de plusieurs textes, défendu l'idée d'un encadrement, d'un plafonnement, voire du blocage des loyers, en particulier en zone tendue.
En Île-de-France comme dans toutes les grandes agglomérations, la flambée des loyers est très impressionnante, et l'appauvrissement des locataires, comme l'a souligné il y a quelques semaines encore une nouvelle étude, est constant.
Vous refusez pourtant systématiquement toute mesure d'encadrement ou de plafonnement des loyers, alors qu'un simple décret suffirait. On n'aurait alors pas besoin d'inventer une taxe dont le rendement est estimé à moins d'un million d'euros et qui ne sera absolument pas dissuasive. Si vous aviez accepté les amendements que nous avons déposés, à l'occasion de différents textes, dans le but d'agir enfin contre la spéculation immobilière et contre des pratiques absolument insupportables, à peine évoquées par cet article, on aurait commencé à résoudre le problème.
Aujourd'hui, à Paris, pour louer un appartement de cinquante mètres carrés, il faut avoir un revenu d'au moins 4 000 euros. Je ne vais rappeler à l'ensemble de mes collègues le montant du salaire médian en France. Chacun sait dans quelles conditions vivent la plupart de nos concitoyens, salariés du privé, à Paris et dans toutes les grandes métropoles en zone tendue.
Quand se décidera-t-on à agir ? Nous vous avons proposé à plusieurs reprises de le faire, madame la ministre. Cette taxe est inadaptée à la situation. Elle ne corrigera rien, pour les raisons queJean-Yves Le Bouillonnec vient d'expliquer. Le dispositif n'est applicable qu'à partir de 500 euros pour treize mètres carrés, sans parler des loyers exigés pour des surfaces de neuf mètres carrés, des surfaces indignes et indécentes.
Cette taxe, je le répète, ne résoudra pas le problème, parce qu'elle est déphasée par rapport à ce qui se pratique. En plus, s'agissant de son application et donc de sa rentabilité, on ne voit pas bien comment la vérification par les services fiscaux sera effective. Nous avons proposé des amendements à cette micro-taxe, mais il aurait été plus habile et plus efficace d'accepter l'encadrement et le blocage des loyers en zone tendue, que nous avons proposés à plusieurs reprises.
Monsieur le président, plusieurs groupes de notre assemblée ont l'habitude, à cette heure-ci, de tenir une réunion. Je demande donc une suspension de séance d'un quart d'heure pour permettre à certains d'entre nous de participer au moins au début de ces réunions.
Article 42
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures vingt-cinq.)
Je profite de l'occasion pour dire à la représentation nationale la satisfaction du Gouvernement de voir que ses hypothèses de croissance pour 2011 se réalisent.
La justesse de nos prévisions – due à la réactivité du Gouvernement qui, le 24 août dernier, a décidé de les réviser à la baisse – nous permet de sécuriser notre trajectoire de réduction des déficits à 5,7 % de la richesse nationale en décembre 2011.
Le Gouvernement a été réaliste, pragmatique. Le Gouvernement est responsable et crédible, dans ses hypothèses de croissance pour 2011 comme dans ses prévisions de réduction des déficits. Il faut le dire et le redire dans cet hémicycle : avec 0,4 % de croissance au troisième trimestre, bon nombre Cassandre voient leurs prédictions déjouées.
L'article 42 poursuit l'objectif louable d'éviter les loyers abusifs, mais je ne voterai pas en faveur de son adoption, parce qu'il sera contourné de diverses manières.
Premier mécanisme de contournement : la disposition ne s'appliquant qu'à des contrats de plus de neuf mois, il suffira d'établir les contrats sur une durée légèrement plus courte et à un tarif plus élevé, dans le cadre de location à des étudiants par exemple.
Une année universitaire fait dix mois de loyer…
Il suffira de majorer le loyer d'un tiers et de l'établir sur neuf mois !
Deuxième contournement très simple : une partie, dans la limite du plafond fixé, va être versée régulièrement et une autre va l'être au noir. Autrement dit, vous allez favoriser le « black ».
Troisième mécanisme : les propriétaires vont majorer le loyer à due concurrence de la taxe progressive de 10 % à 40 % instaurée par le Gouvernement. La taxe sera intégrée dans les loyers et vous obtiendrez l'inverse de l'effet recherché, c'est-à-dire une majoration de loyers déjà excessifs.
Ce n'est pas la bonne approche. Vous avouerez, madame la ministre, que cet impôt progressif sur les loyers n'a pas de cohérence intellectuelle. Le vrai problème, c'est celui de l'offre. Nul besoin d'avoir fait des études poussées d'économie pour savoir qu'il faut augmenter l'offre pour faire baisser le prix ; et cela ne se fait pas sur un claquement de doigts mais en menant une politique constante dans le temps.
Au reste, qu'on l'adopte ou non, cet article n'a pas beaucoup d'importance, puisqu'il n'atteindra en rien l'objectif prévu. On s'attendrait d'ailleurs à ce qu'une telle idée vienne de la gauche de l'hémicycle plutôt que de gens comme nous, partisans d'un libéralisme organisé. Même eux n'osent plus défendre une solution de ce genre, et préfèrent reprendre la thèse du plafonnement des loyers. Malheureusement, toutes les expériences en France ou à l'étranger l'ont montré, le plafonnement des loyers n'a jamais abouti qu'à l'aggravation de la pénurie.
La loi de 1948 offre à cet égard un exemple extraordinaire de ce qu'il ne faut pas faire ; tout le monde le reconnaît aujourd'hui.
Je pense donc, madame la ministre, que cette disposition est vraiment une erreur. Sans parler de son rendement : elle ne rapporterait qu'un million d'euros, mais ce ne sera même pas le cas.
Cette manière d'aborder le problème n'est pas la bonne.
C'est avec un certain effroi que j'ai entendu nos collègues socialistes…
…ou son encadrement, peu importe le terme.
Notre pays a vécu longtemps sous l'empire de la loi de 1948. Nous en connaissons les effets, totalement contre-productifs. La loi de 1948 a offert des rentes à ceux qui, installés dans les lieux, se contentaient de payer des loyers devenus dérisoires,…
…et ce sans que la justice ou l'équité sociales y aient la moindre part.
Charles de Courson l'a dit à l'instant : les difficultés liées au niveau des loyers ne sont que la traduction d'une insuffisance de l'offre. Or, depuis cinquante ans, notre pays adopte, année après année, gouvernement après gouvernement, majorité après majorité, des textes qui restreignent le droit de construire. Nous ne cessons de limiter les possibilités de construire, et nous nous étonnons qu'il y ait un déficit de logements, une inadéquation de l'offre à la demande, particulièrement criante dans les grandes villes !
La situation est particulièrement scandaleuse à Paris. Mais le vrai scandale, c'est qu'à Paris, on ne construise pas. Le scandale, madame la ministre, vous qui avez été ministre de l'enseignement supérieur, c'est qu'il n'y ait pas de chambres pour étudiants, que le CROUS n'ait pratiquement aucune résidence dans la première ville universitaire de France. Le scandale, il est là !
C'est à cause de cela que nous sommes dans la situation que nous connaissons. Vous vous trompez radicalement, dans votre analyse, sur les moyens à mettre en oeuvre. Permettez-moi d'ajouter que l'on n'a jamais vu, depuis que l'on sait analyser économiquement les choses, la taxation d'un bien ou d'un service provoquer la baisse de son prix. Si le Gouvernement réussit cette prouesse de faire baisser ainsi le loyer des petits logements, je propose qu'on lui décerne le prix Nobel 2012 d'économie !
Il s'agit d'une disposition importante : elle montre un vrai changement de notre philosophie fiscale.
C'est une taxe comportementale, c'est-à-dire une taxe comportementale. L'objectif visé est éminemment vertueux : plus on abuse, plus on est taxé.
Ce genre de disposition me paraît mériter toute l'attention de cette assemblée.
Cette disposition est un premier pas, un premier pas nécessaire. Elle signe l'aveu, par le Gouvernement, du fait que les loyers et la fixation de leur montant sont un des éléments de la crise du logement. Nous en prenons acte, mais la gauche défendra plusiuers amendements pour que cette analyse se traduise vraiment dans les faits.
J'insiste sur un point important : le fait générateur de l'augmentation des loyers, c'est la relocation. C'est là une réalité que confirment toutes les études de l'OCDE, de l'INSEE, et du Centre d'analyse stratégique du Gouvernement, et jusqu'au rapport présenté très récemment par le préfet de la région Île-de-France lors de la réunion du comité régional du logement. Le fait générateur, c'est la relocation. C'est au moment de la relocation, lorsqu'il y a un changement de locataire, que l'augmentation est la plus lourde. C'est cela qui provoque la hausse générale des loyers.
Or ce phénomène touche avant tout les petites surfaces. Pourquoi donc ? Tout simplement parce que l'on recherche ces petits logements lorsqu'on se trouve dans une situation incertaine et temporaire : par exemple, avant de trouver un logement social, pour un jeune couple, ou quand on travaille pour un temps seulement dans un territoire donné, ou encore lorsqu'on connaît la galère de la rupture familiale. C'est toujours dans ces situations que l'on recherche le petit logement à occuper quelques mois avant de repartir. Ainsi ce phénomène est-il, dans les agglomérations les plus peuplées, à l'origine de la progression des loyers.
Le vrai moyen d'agir contre cela, au-delà de la fiscalisation, au-delà de la fiscalisation, c'est l'encadrement à la relocation : lorsque le bail est terminé, on ne peut relouer qu'au montant de l'ancien loyer, ou en le révisant dans la limite de la progression de l'indice de référence. C'est seulement alors que l'on commencera à freiner le processus d'inflation des loyers.
Voilà le problème de fond ; mais sur ce point, le Gouvernement ne nous répond pas. Je dois en revanche reconnaître que le signal de la taxation est important, il fallait le donner. Le Gouvernement a raison de le faire.
Monsieur le président, ainsi que le président Cahuzac l'a dit tout à l'heure, nous avons des réunions de groupe ce matin. Pour que chacun puisse assister au moins au début de ces réunions, et notamment pour que les députés UMP puissent écouter le Premier ministre, je vous demande une suspension d'un quart d'heure.
Article 42
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise à douze heures cinq.)
La séance est reprise.
Nous en venons aux amendements à l'article 42.
La parole est à M. le rapporteur général pour soutenir l'amendement n° 619 .
Amendement de recodification.
(L'amendement n° 619 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
L'article 42 vise en priorité ce que l'on appelle communément « les chambres de bonne », parfois louées à des prix prohibitifs, pouvant atteindre 700 euros à 800 euros à Paris. Mais le problème se retrouve dans nombre d'autres villes.
Notre amendement no 604 vise à faire entrer dans le champ de la taxe les logements dont la surface habitable est inférieure ou égale à vingt mètres carrés au lieu des treize mètres carrés prévus dans l'article 43. Nous avons prévu un amendement de repli, n° 606, qui propose un seuil de quinze mètres carrés.
On ne vit pas décemment, c'est le moins que l'on puisse dire, dans un logement de treize mètres carrés. Les personnes louant ces petites surfaces ne sont rien d'autre que des marchands de sommeil. Cette taxe ne doit donc pas concerner que les micro-logements, mais viser toutes les petites surfaces touchées de plein fouet par la spéculation foncière et qui donnent lieu à des loyers démentiels.
La lutte contre la spéculation foncière doit être une des priorités des politiques publiques. Il n'est pas acceptable que les plus précaires et les classes moyennes soient dans l'incapacité de se loger dans les grandes villes. Il n'est pas non plus acceptable que des propriétaires s'enrichissent sur le dos de familles qui, faute de logements sociaux disponibles, se trouvent dans l'obligation de payer des loyers indécents au détriment de tous leurs autres besoins vitaux.
Nous vous appelons à adopter cet amendement, ou à tout le moins notre amendement de repli, n° 606, qui ressemble comme un frère, si je puis dire, à celui de la commission.
J'en conclus que vous avez également défendu votre amendement n° 606 , monsieur Sandrier.
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec pour soutenir l'amendement n° 684 .
Le dispositif proposé à l'article 42 s'attache à régler le problème des petits logements, principale cause, je l'ai expliqué, de la hausse des loyers. Mais l'origine, précisons-le, remonte au jour où l'on a décidé, voilà quelques années, à l'initiative de la majorité, de considérer qu'un logement était habitable au-dessus de neuf mètres carrés – ce qui n'était pas le cas auparavant : le seuil réglementaire était, me semble-t-il, de quatorze ou quinze mètres carrés.
C'est cela, le scandale premier, car cela a généré la reprise de possession de chambres de bonne, qui jusque-là ne pouvaient être louées, pour les rendre accessibles à la location. Mes chers collègues, fermons les yeux quelques instants ou essayons de délimiter au pied de la tribune une surface de neuf mètres carrés : voilà ce que notre République, en 2012, autorise à louer à des gens ! Il faudra bien un jour, madame la ministre, revisiter les conditions d'habitabilité, et comprendre pourquoi un logement en dessous de quinze mètres carrés ne doit pas être considéré comme habitable. Sans même parler du montant du loyer, mais ce n'est pas de cela qu'il est question pour l'instant.
La surface minimale de quinze mètres carrés – qui était la règle il y a quelques années – nous semble être le bon critère en termes habitabilité. C'est ce critère que nous devons reprendre pour appliquer la taxe proposée à l'article 42.
L'amendement n° 515 de la commission des finances, comme l'a très bien dit M. Sandrier, reprend son amendement de repli et répond aussi, me semble-t-il, à la position de M. Le Bouillonnec.
Si la commission des finances a adopté cet amendement qui porte de treize à quatorze mètres carrés la surface minimale, c'est pour des raisons également juridiques, afin de ne pas multiplier les définitions et les seuils. Or le seuil de quatorze mètres carrés existe déjà dans le code la construction pour la constitution des lots de propriété : il est interdit de créer un lot de copropriété à usage d'habitation dès lors que la surface est inférieure à quatorze mètres carrés. Nous sommes exactement dans la même logique. C'est la raison pour laquelle la commission s'est ralliée à ce seuil de quatorze mètres carrés.
Je précise que la commission des finances s'est prononcée à l'unanimité sur cet amendement. Je n'imagine donc pas que l'unanimité qui s'est manifestée en commission ne se retrouve pas en séance.
Le Gouvernement est favorable au seuil des quatorze mètres carrés, qui correspond à celui prévu par le code de la construction. Il se situe dans la fourchette des treize à dix-sept mètres carrés, où les loyers restent abusifs.
Autrement dit, madame la ministre, votre préférence va à l'amendement n° 515 de la commission des finances.
La parole est à M. Christian Eckert.
Par souci de cohérence avec le travail réalisé en commission des finances, notre groupe ne votera que l'amendement de la commission.
Je retire donc mon amendement n° 684 , conformément à la position que vient d'exprimer le responsable de notre groupe.
L'enjeu de l'habitabilité reste toutefois posé. Il faudra que revoir les conditions dans lesquelles on considère qu'une surface correspond au minimum pour vivre, indépendamment des arguments techniques. Cela me paraît indispensable.
Le jour où l'on a ramené la surface à neuf mètres carrés, on a pris les risques les plus dommageables. Savez-vous qu'actuellement, il se vend dans Paris des surfaces de quatre à cinq mètres carrés pour reconstituer des surfaces de neuf mètres carrés à louer ? Il faudra un jour faire cesser ce véritable scandale.
(L'amendement n° 684 est retiré.)
Nous ne retirons pas nos amendements. L'amendement n° 604 propose un seuil de vingt mètres carrés, qui nous paraît une surface décente. Nous allons jusqu'à la ramener, dans notre amendement de repli n° 606, à quinze mètres carrés. Il me paraît difficile d'aller plus loin.
Nous souhaitons que ces deux amendements soient soumis au vote de l'Assemblée. Pour ce qui est de l'amendement de la commission, vous verrez bien, monsieur le président, quelle sera notre position.
(Les amendements nos 604 et 606 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L'amendement n° 515 est adopté.)
Cet amendement poursuit la même logique que le précédent : il vise à améliorer l'efficacité de cette taxe en la faisant s'appliquer sitôt que le loyer mensuel, charges non comprises, excède le loyer moyen au mètre carré à Paris, à savoir 20 euros le mètre carré et non, comme il nous est proposé, un montant, fixé par décret, compris entre 30 et 45 euros par mètre carré de surface habitable. Ce faisant, le Gouvernement manifeste une réticence que nous ne comprenons pas et n'acceptons pas. L'exposé des motifs de l'article 42 indique pourtant clairement que le but est d'interdire les loyers excessifs pour les micro-logements et les petites surfaces. Les personnes qui habitent ces petits locaux ne roulent pas sur l'or ; elles ont besoin d'être aidées. Rien ne justifie que le prix au mètre carré pour ces très petites surfaces, à la limite du vivable, excède le loyer moyen au mètre carré à Paris.
La spéculation foncière doit être jugulée et les dérives doivent cesser. Il faut envoyer, madame la ministre, un message fort au marché de l'immobilier en plafonnant les loyers. Seules des mesures politiques fortes permettront de mettre en oeuvre une politique du logement digne de ce nom.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l'amendement n° 685 .
Cet amendement vise à modifier, non pas le critère de surface – même si nous jugeons la surface retenue insuffisante – mais celui du prix au mètre carré, qui nous paraît trop élevé. Nous proposons que la taxe soit appliquée à partir d'un loyer du mètre carré compris, non plus entre 30 et 45 euros, mais entre 25 et 30 euros. Encore une fois, nous ne nous faisons guère d'illusions sur l'effet de cette taxe. Mais si le seuil à partir duquel elle s'applique est inadapté, non seulement elle ne créera pas de recettes pour les finances publiques, mais surtout, elle ne modifiera pas les comportements des propriétaires.
Ainsi que vient de le rappeler Jean-Yves Le Bouillonnec, on en vient à louer à Paris des caves et des placards à balais. Il va donc falloir agir pour lutter contre ce phénomène proprement scandaleux, qui fait l'objet de reportages très fréquents. Certes, cette taxe n'est qu'un alibi destiné à masquer l'inertie du secrétaire d'État au logement en la matière. Mais, quitte à l'appliquer, autant qu'elle le soit à partir de seuils de loyer adaptés.
Défavorable. Je rappelle à Mme Mazetier que la fourchette prévue est comprise entre 30 et 45 euros afin que son montant puisse être modulé selon que le logement est meublé ou non et selon sa localisation…
La modulation étant fixée par décret, mieux vaut prévoir une fourchette assez large.
Défavorable.
La taxe que vous créez produira, selon moi, un effet pervers, car, lorsque le décret sera publié, on considérera que le loyer de référence se situe entre 30 et 45 euros le mètre carré, alors qu'à Paris, le loyer moyen est actuellement d'un peu plus 20 euros le mètre carré. On voit donc bien le piège du dispositif.
Mais, puisque vous avez décidé de l'appliquer, essayez au moins d'éviter cet effet pervers ! En outre, ce sont ces petites surfaces qui sont à l'origine de la hausse des loyers : il est démontré que plus le logement est grand, moins le loyer au mètre carré est cher.
Le décret, qui, ainsi que vient de nous l'expliquer notre rapporteur général, modulera le montant de la taxe en fonction du type de logement, de sa localisation et de son caractère meublé ou non, créera immédiatement un barème. Or, s'il se situe à 45 euros le mètre carré, cela signifie qu'un logement de dix mètres carrés sera loué 450 euros par mois ! Ce n'est pas acceptable, mes chers collègues. En envoyant un tel message, en laissant à penser qu'un loyer inférieur à 45 euros le mètre carré est convenable, vous allez provoquer un séisme.
Au reste, la méthode qui consiste à retenir un seuil pour l'application d'une taxe est un piège. La bonne méthode consisterait en réalité à déterminer le loyer de référence au mètre carré, à plus ou moins 5 euros près, et à empêcher les propriétaires de relouer à un prix supérieur à ce loyer de référence. Je ne vous prête pas l'intention de créer un loyer de référence, mais, de fait, c'est cela que vous allez inscrire dans la loi. Or c'est insupportable. Il n'est tout de même pas normal qu'on loue un logement de 10 mètres carrés à 45 euros le mètre carré !
Je suis saisi d'un amendement n° 618 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Amendement de coordination.
(L'amendement n° 618 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 42, amendé, est adopté.)
Nous en venons à une série d'amendements portant articles additionnels après l'article 42.
Je suis saisi d'un amendement n° 757 rectifié .
La parole est à M. Charles de Courson.
Cet amendement tend à résoudre un vieux problème soulevé par tous les rapports consacrés à l'assurance-vie. En effet, si nous voulons assurer le bon fonctionnement et le développement du marché de l'assurance-vie, il nous faut reprendre la préconisation du rapport Suguenot notamment, qui propose de maintenir les avantages fiscaux en cas de transfert des contrats d'assurance-vie – comme nous avons d'ailleurs commencé à le faire avec les PEP.
Cette mesure présenterait de nombreux avantages, puisqu'elle permettrait d'assurer une meilleure transparence du marché, d'améliorer la rentabilité, de récompenser ceux qui gèrent bien et de sanctionner ceux qui gèrent mal. Pour l'heure, la non-transférabilité des avantages fiscaux en cas de transfert des contrats d'assurance-vie a un grave inconvénient : il crée des rentes de situation au profit des gestionnaires de ces contrats.
Monsieur de Courson, peut-on considérer que vous avez également défendu les amendements nos 721 rectifié et 720 rectifié ?
Quel est l'avis de la commission sur les trois amendements en discussion ?
La commission n'a pas accepté ces amendements, dans la mesure où leur périmètre nous a paru trop étendu.
Toutefois, il y a de cela cinq ans, nous avons adopté l'amendement Fourgous, qui consistait à permettre la transformation d'un contrat en euros en un contrat multisupports sans qu'il y ait de « frottement » fiscal, et cette mesure a remporté un réel succès. Peut-être faudrait-il aller dans la même direction et faciliter éventuellement le changement d'assureur dans une logique qui encourage les contrats en actions. Encore une fois, monsieur de Courson, votre proposition est excessivement large ; c'est la raison pour laquelle nous n'avons pas retenu ces trois amendements.
Même avis que la commission.
Charles de Courson soulève un véritable problème. Je souhaiterais donc que des engagements soient pris sur la proposition de Gilles Carrez. Peut-être faut-il en effet retenir une mesure un peu moins large, mais qui permette d'aboutir à une solution, tant il est vrai que la situation actuelle est, sinon scandaleuse, du moins injuste.
Je souhaiterais prolonger les propos de M. Censi, qui connaît bien le sujet. Le Gouvernement serait-il d'accord pour recentrer l'amendement – nous pourrions le faire dans le cadre du collectif – sur les contrats majoritairement en actions, par exemple ? Il est vrai que le champ d'application de mon amendement est étendu, mais je n'ai fait que reprendre les préconisations du rapport Suguenot.
Le Gouvernement est très réticent face à cet amendement, pour des raisons qui tiennent, non pas au fond, mais au timing. Actuellement, l'assurance-vie est presque en situation de décollecte et je crains que la mesure proposée ne se traduise par une modification des placements réalisés par l'assurance-vie, qui seraient beaucoup plus courts et plus liquides afin de faire face au risque de transfert vers un autre compte. Néanmoins, il faut pouvoir sanctionner les mauvais gestionnaires.
À ce stade, je ne peux m'engager au nom du Gouvernement, mais je propose que nous y travaillions afin de remédier à la situation que vous dénoncez. Cherchons à améliorer le fonctionnement de l'assurance-vie, mais prenons garde à ne pas déstabiliser l'outil de placement préféré des Français, qui, de surcroît, investit énormément dans l'économie française, voire dans l'achat de dette souveraine.
Je vais les retirer, mais je suis davantage sensible aux arguments de M. le rapporteur général qu'à ceux de Mme la ministre, dont la réponse fut – je vais être gentil, comme je le suis souvent…
C'est une réponse d'attente !
Disons une réponse prudente !
Mes collègues et moi-même ne sommes pas irresponsables. Nous allons donc tenter de rédiger un nouvel amendement, qui reprenne au moins une partie de ma proposition. Il faut bien voir qu'en la matière, le conservatisme favorise les mauvais gestionnaires. Sur certains produits d'assurance-vie, des frais de gestion extrêmement élevés sont prélevés. Or, si l'on est mécontent du gestionnaire de son contrat, il faut attendre huit ans pour le quitter, si l'on ne veut pas perdre tous ses avantages fiscaux. Il y a là un véritable problème. Tous nos collègues, qu'il s'agisse de M. Suguenot ou d'autres, ont plaidé en faveur d'une mesure de ce type. Il faut agir avec mesure, certes, mais il faut agir. Soyez protectrice, madame la ministre, mais ne soyez pas conservatrice !
(Les amendements nos 757 rectifié , 721 rectifié et 720 rectifié sont retirés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 645 rectifié .
La parole est à M. Christian Eckert.
Cet excellent amendement – un de plus (Sourires) – vise à appliquer le barème de l'impôt sur le revenu aux revenus du capital. Il s'agit, par cette mesure de simplification et de bon sens, de supprimer ce que l'on appelle de façon assez curieuse, du reste, le prélèvement « libératoire » – comme si l'on pouvait se libérer. En outre, je rappelle que moins d'un contribuable sur dix paie un impôt sur le revenu dont le taux moyen dépasse 10 % : du coup, paradoxalement, bon nombre de nos concitoyens souscrivent, peut-être par inattention, à l'option du prélèvement libératoire, alors qu'elle leur est défavorable.
En tout état de cause, nous estimons, nous, que les revenus du capital et les revenus du travail doivent être assujettis au même impôt sur le revenu, qui aura au moins la vertu d'être progressif et donc d'introduire davantage de justice fiscale. J'ai cru comprendre, dans les déclarations du Premier ministre, que quelques avancées en la matière étaient en cours de maturation, mais j'ignore si elles nous seront soumises dans le cadre du projet de loi de finances initiale ou lors du collectif – dont j'observe qu'il nous occupera sans doute quelques nuits, à voir le nombre de sujets qui y sont renvoyés.
Si vous me le permettez, monsieur le président, je vais présenter conjointement notre amendement de repli n° 647 rectifié…
…qui propose, à défaut de supprimer la possibilité d'opter pour le prélèvement forfaitaire libératoire, de ramener le taux de ce prélèvement de 19 % à 35 %. Nous corrigerions ainsi une injustice fiscale flagrante qui bénéficie uniquement à ceux qui perçoivent des revenus du capital.
J'ajoute, en ce qui concerne l'amendement n° 645 rectifié , qu'en plus de la suppression de la possibilité d'option pour le prélèvement libératoire, nous proposons de soumettre à un taux retenu à la source de 25 % les dividendes distribués à des personnes non résidentes fiscalement, contre 19 % actuellement.
La commission a émis un avis défavorable à ces deux amendements.
Nous aurons à nouveau une discussion sur ce point lors du prochain collectif, puisque M. le Premier ministre a annoncé que le prélèvement forfaitaire libératoire allait être porté à 24 % dès l'année prochaine – ce qui équivaut à un alignement sur les revenus du travail. Mais je tiens dès maintenant à exprimer mon inquiétude au sujet de la recette escomptée.
Dès que le taux du PFL va être porté à 24 %, le barème va devenir beaucoup plus avantageux dans tous les cas. Un contribuable assujetti à un taux de 41 %, par exemple, bénéficiera de l'abattement de 40 % sur les dividendes qu'il perçoit, ce qui ramènera son taux d'imposition à 24 %. Par ailleurs, une partie de la CSG étant déductible, son taux réel ne sera que de 22 %.
Cette mesure va donc avoir pour effet d'envoyer aux contribuables un message selon lequel il vaut mieux, dans tous les cas, rester au barème. Or, l'application du barème a la particularité de décaler le paiement d'un an ! Je crains, par conséquent, que l'on ne diminue la recette de 2012 au lieu de l'accroître.
Le risque évoqué par M. le rapporteur général serait encore plus encore plus grand si nous adoptions l'amendement de M. Eckert…
…puisque la suppression du PFL se traduirait, elle aussi, par un décalage de trésorerie. Nous connaissons bien ce phénomène, déjà constaté lors de la réforme de l'ISF. En l'occurrence, ce ne sont pas 2 milliards d'euros, mais 4,4 milliards d'euros de décalage de trésorerie que nous subirions – au profit des plus riches, ce qui n'est sans doute pas ce que souhaite M. Eckert.
En revanche, augmenter le PFL me paraît une bonne mesure. Le taux de 35 % que vous retenez est toutefois trop élevé : pour sa part, le Gouvernement va proposer de porter le taux du PFL de 19 % à 24 %. En y ajoutant 13,5 % de prélèvements sociaux, on arrive déjà à 37,5 %. Avec les 3 ou 4 % de contribution sur les plus hauts revenus, on atteint un taux très substantiel qui harmonise, de fait, l'imposition des revenus du capital et celle des revenus du travail. Nous ne souhaitons pas aller au-delà : le taux de 48,5 % que vous nous proposez – et auquel s'ajouteraient les 3 ou 4 % de contribution de solidarité – aboutirait à fiscaliser plus de la moitié des revenus, ce qui ne correspond pas à notre philosophie.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.
(Les amendements nos 645 rectifié et° 647 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 516 , troisième rectification.
La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.
L'amendement n° 516 , troisième rectification, est un amendement important sur lequel notre commission travaille depuis bientôt deux ans. Vous vous souvenez peut-être que, dans le cadre de la loi de finances pour 2006, nous avons adopté le principe d'une exonération fiscale des plus-values mobilières, dès lors que les titres concernés étaient détenus pendant une durée supérieure à huit ans – plus exactement, l'abattement se faisait par tiers à partir de la sixième année. Considérant, en 2006, que l'incitation créée par cette mesure allait être très coûteuse – un milliard d'euros en régime de croisière –, nous avons jugé opportun d'en différer l'application en 2012, date à laquelle nous pensions que la situation des finances publiques se serait améliorée. Hélas, ce pari n'a pas été couronné de succès.
Nous proposons par conséquent de modifier le dispositif en recentrant l'exonération sur les petites et moyennes entreprises. Si un chef d'entreprise réalise une plus-value en revendant sa société, il pourra bénéficier d'une exonération, à deux conditions : premièrement, détenir au moins 10 % des titres de cette société depuis au moins huit ans ; deuxièmement, réinvestir 80 % de la plus-value nette de prélèvements sociaux dans une autre société – de préférence une PME – et conserver ces titres durant au moins cinq ans.
En 2006, nous étions partis du constat selon lequel les créateurs d'entreprise ayant connu la réussite – à l'époque, le secteur des nouvelles technologies nous avait donné de nombreux exemples de succès rapide – avaient envie de réinvestir leurs gains dans la création d'autres entreprises. Cependant, plusieurs cas avaient défrayé la chronique, de chefs d'entreprises obligés de s'expatrier pour la Belgique pour y céder leur société en bénéficiant d'une exonération sur les plus-values ; malheureusement, ces personnes étaient restées outre-Quiévrain pour y créer de nouvelles entreprises, ce qui se traduisait par un appauvrissement pour notre pays.
Le dispositif que nous avions conçu initialement était beaucoup trop large, et pouvait aboutir à exonérer d'imposition sur les plus-values le détenteur d'actions Total les ayant conservées plus de huit ans, ce qui n'était pas l'objectif poursuivi ! C'est pourquoi nous proposons de modifier ce dispositif, en créant une incitation vertueuse à apporter des fonds propres à des petites et moyennes entreprises. Plutôt que de raisonner en termes de seuils, avec tous les problèmes que cela comporte, nous avons préféré nous baser sur un pourcentage de détention : il faut donc avoir détenu au moins 10 % de l'entreprise que l'on vend, et réinvestir en s'assurant de détenir au moins 5 %, ce qui permet de mettre en place un mécanisme fluide.
Notre collègue François Goulard nous a fait remarquer, à juste titre, que le délai de réinvestissement de deux ans que nous avions prévu était trop court, compte tenu de la difficulté qu'il peut y avoir à trouver un nouveau projet pour investir. Nous avons donc porté ce délai à trois ans. Le dispositif ainsi obtenu me paraît très intéressant et, comme celui résultant des amendements Forissier, évoqué tout à l'heure par Mme la ministre, est de nature à constituer un vecteur assez puissant de financement de la création ou du développement d'entreprises.
Favorable.
Nous avons eu un long débat relatif au financement en fonds propres des petites et moyennes entreprises. Je rappelle que le réinvestissement permettant de maintenir l'exonération de 80 % n'est pas conditionné à un type d'entreprise : en réalité, tous les types de société donnent droit à exonération, monsieur le rapporteur général.
Certes, mais une personne peut très bien détenir 10 % d'une grande entreprise. Votre proposition est donc plus large que celle présentée par notre collègue Forissier, et sans doute les deux dispositifs sont-ils complémentaires. En tout état de cause, nous redéposerons notre proposition dans le cadre du collectif budgétaire, quitte à la recentrer pour tenir compte des observations qui ont été faites à ce sujet tout à l'heure. Il faut absolument que, durant la période difficile que nous traversons, nous conservions, voire amplifiions certains dispositifs permettant aux entreprises de se développer – car l'avenir du pays est là : on ne peut se contenter d'une politique se résumant à rogner aveuglément de tous côtés !
Vous savez, madame la ministre, que nous traversons une crise de l'engagement. Dernièrement, les responsables de la Caisse des dépôts nous disaient regorger de liquidités, du fait de l'absence d'entrepreneurs disposés à s'engager à moyen ou long terme. Or, les petites et moyennes entreprises ont un besoin vital d'investissements.
L'amendement présenté par Gilles Carrez constitue, à mes yeux, l'exemple même d'une mesure fiscale intelligente. Le dispositif fiscal en place jusqu'alors incitait les personnes s'apprêtant à céder leur entreprise à partir à l'étranger – ce qui, vous en conviendrez, est assez dommage. Par ailleurs, une défiscalisation totale des plus-values mobilières est une perte de ressources fiscales injustifiée.
En introduisant la condition de réinvestissement des fonds dans une autre entreprise, on corrige ce que la mesure d'exonération totale pouvait avoir d'excessif, tout en permettant le réinvestissement en France. Je tenais à souligner à quel point cette mesure est exemplaire.
Je suis saisi d'un amendement n° 646 rectifié .
La parole est à M. Christian Eckert.
L'amendement n° 646 rectifié vise à s'assurer que les plus-values de cessions immobilières et immobilières sont soumises au barème de l'impôt sur le revenu, et non plus à une imposition proportionnelle à 19 %. Il s'agit là d'un amendement bien connu, et je sais que M. le rapporteur général va me répondre que des modifications importantes ont déjà été apportées à l'imposition des plus-values.
Pour notre part, nous persistons à penser qu'un impôt avec une assiette large et un taux progressif serait préférable aux systèmes cloisonnés et complexes actuels qui, non seulement nuisent à la lisibilité de l'impôt sur le revenu, mais privilégient les astucieux, les malins, pour ne pas dire les pervers.
Je crois que c'est exactement le contraire, monsieur Eckert ! Si nous faisions basculer les plus-values de cessions vers le barème de l'impôt sur le revenu, nous serions justement obligés de procéder à des ajustements en fonction de l'année où le taux marginal est le moins élevé. À l'inverse, je vois dans le taux forfaitaire un facteur de simplification.
J'observe, par ailleurs, que l'imposition proportionnelle est passée, en deux ans, de 16 % à 19 % ; ce n'est pas rien. Sans oublier les prélèvements sociaux qui, pour leur part, sont passés de 10 % à 13,5 % en cinq ans. Au total, on parvient à un taux de 32,5 %, qui me paraît loin d'être négligeable.
Même avis.
(L'amendement n° 646 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 648 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Cet amendement devrait vous faire plaisir, monsieur le rapporteur général, et je ne doute pas de votre soutien. Comme vous l'avez dit tout à l'heure, il est actuellement pratiqué un abattement de 40 % sur les dividendes perçus, historiquement présenté comme un moyen d'éviter une « double imposition » des dividendes versés. Or, chacun sait bien qu'en dépit d'un taux affiché de 33,3 %, en réalité, le taux d'imposition des sociétés avoisine les 12 % pour les grands groupes.
Si vous voulez éviter ce fameux creux de trésorerie que madame la ministre et vous-même avez évoqué tout à l'heure au sujet du prélèvement libératoire, il vous suffit de ramener, comme le propose notre amendement, le taux d'abattement de 40 % à 20 %. Cette mesure présente deux avantages : premièrement, elle tient compte du niveau réel d'imposition des grands groupes – un taux de 12 %, ne justifiant aucunement un abattement de 40 % ; deuxièmement, elle permet de pallier, dans l'hypothèse d'une modification du prélèvement forfaitaire libératoire, le décalage de trésorerie dont vous vous inquiétiez tout à l'heure.
D'autant plus défavorable que nous avons adopté en première partie du PLF l'excellent amendement du président de la commission des finances qui visait très logiquement à considérer que, pour les sociétés d'investissement immobilier cotées fiscalement transparentes, c'est-à-dire ne payant pas l'IS, il n'y avait aucune raison de pratiquer l'abattement de 40 % sur les dividendes. C'est tout à fait logique dans la mesure où cet abattement vise à éviter la double imposition. Quand il n'y a pas de double imposition, on prend le dividende à 100 %, ce que nous avons fait avec l'amendement Cahuzac.
Mais cela ne concerne que les SIC !
(L'amendement n° 648 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 715 .
Cet amendement concerne une niche que tout le monde connaît maintenant et qui a creusé les déficits de façon considérable. Votée en pleine nuit au Sénat, estimée à un milliard d'euros à l'époque, elle a coûté près de quinze fois plus sur trois ans : je veux bien sûr parler de la niche Copé.
Nous avons là l'occasion de corriger une erreur monumentale qui a occasionné des pertes fiscales considérables : elle a coûté 12 milliards d'euros en 2008 et 8 milliards en 2009. Certes, on nous explique qu'elle coûte de moins en moins parce que l'assiette disparaît, et nanani nananère…(Sourires.)
En tout cas, notre amendement n° 715 me semble de bonne morale. Il permettrait de faire contribuer à juste hauteur les cessions d'entreprises, qui ont malheureusement et grassement – je n'hésite pas à le dire – profité de cette niche Copé.
Défavorable, dans la mesure où M. Eckert a eu en partie satisfaction dans le collectif de septembre. Mais, comme on fait en ce moment un collectif tous les deux mois,…
…il est vrai que l'on en vient à oublier ce que l'on a voté ! (Sourires.)
La quote-part sur les plus-values sur les titres de participation a été portée de 5 % à 10 % avec effet, je le rappelle, dès l'exercice 2011.
Avis défavorable. Si l'on augmente trop la taxe, il y aura évasion fiscale – dix-sept pays défiscalisent autour de nous – et donc diminution de l'assiette.
Il faut faire très attention dans cette affaire car c'est là un amendement anti-PME. Pourquoi ? Parce que pour les grandes boîtes, comme vous le savez, cela ne pose aucun problème : si vous augmentez la taxe, elles transfèrent la participation à la valeur nette comptable dans leur filiale aux Pays-Bas ou en Belgique.
Et le Gouvernement, qu'a-t-il fait ? Il siège pourtant au conseil d'administration !
Faites donc bien attention : comme vient de le rappeler Mme la ministre, il y a dix-sept pays qui exonèrent.
Qui allez-vous prendre dans vos filets, mes chers collègues, avec un tel amendement ? Les petits, comme d'habitude ! Vous n'aurez donc absolument pas la recette fiscale supplémentaire que vous espérez.
Je me tue à le dire : il ne faut être excessif ni dans un sens ni dans l'autre ; il faut être équilibré. Si vous ne comprenez pas ce que je dis, je vous donnerai des cours de rattrapage ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Rires sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Et gratis, en plus !
Je vais vous expliquer comment on gère des groupes internationaux.
Je remercie M. de Courson de me proposer des cours à domicile. Pour rebondir sur la discussion de tout à l'heure, je pourrais bénéficier, si je le paye, d'une déduction fiscale… Mais je n'ai pas de leçon à recevoir de sa part, même si personne ici ne peut prétendre détenir à lui seul la vérité et le savoir en matière de fiscalité.
Je vous renvoie, monsieur de Courson, à toutes les analyses qui ont été faites sur le dispositif. Cela se trouve dans tous les journaux et même sur internet. Amusez-vous à taper : « niche Copé » dans Google. Si vous n'y arrivez pas, prenez des cours d'informatique à domicile. (Sourires.) Vous trouvez sur internet de magnifiques tableaux qui montrent quelles sont les entreprises qui ont bénéficié de cette exonération fiscale.
Tout ce qu'on trouve sur internet n'est pas vrai !
On en trouve même qui sont connues pour être des entreprises parapubliques liées, si ma mémoire est bonne, à la Caisse des dépôts et consignations.
Ce n'est pas un reproche, mais un simple constat : s'il s'agit d'entreprises dépendant de la Caisse des dépôts, cela me gêne moins. Nous sommes bien d'accord sur ce point.
Vous trouverez, disais-je, les bénéficiaires et vous verrez que ce sont, non pas les petits dont vous parliez,…
…mais ceux qui savent utiliser cette niche Copé.
(L'amendement n° 715 n'est pas adopté.)
Dans ces temps de difficultés financières, cet amendement tend à réaliser une économie de 119 millions d'euros sur le budget de l'État. Nous vous proposons de supprimer une disposition qui, à notre sens, n'a aucune justification ; il s'agit d'abroger, à compter du 1er janvier 2013, l'article 885 I quater du code général des impôts.
Cet article permet à un contribuable de bénéficier d'un abattement des trois quarts de la valeur réelle de ses placements dans une ou plusieurs entreprises, à la condition qu'il y exerce ou y ait exercé des fonctions de salarié ou mandataire social. Cette disposition exonère ainsi à due concurrence d'impôt de solidarité sur la fortune.
Cette disposition, qui n'a pas de justification, permet à des contribuables aisés de réduire fortement leur imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune. Elle fait partie de cet arsenal de transferts fiscaux que la majorité a organisé et ne profite qu'à une petite fraction – 2 % – de contribuables. Dans le contexte financier difficile que nous connaissons, cette économie de 119 millions d'euros serait appréciable.
On connaît bien cet amendement, dont je demande le rejet. Mais je voudrais prendre un instant, monsieur Launay, pour essayer de vous convaincre.
Le dispositif s'inscrit complètement dans la ligne de l'exonération des biens professionnels, qui avait été décidée dès la création de l'impôt sur les grandes fortunes. De quoi s'agit-il ? Cela concerne des dirigeants ou cadres supérieurs qui acceptent de garder leurs actions en vue de conserver un noyau dur assurant la stabilité des fonds propres de l'entreprise.
On leur demande, en contrepartie de l'exonération de 75 %, de garder ces actions pendant au moins six ans. Mais, bien entendu, le jour où ils les vendent, pour acheter une résidence secondaire, par exemple, cela entre dans le calcul de l'ISF. Il s'agit donc vraiment d'un dispositif qui stabilise les fonds propres des entreprises.
Même avis : défavorable.
J'aimerais, mes chers collègues, que vous alliez jusqu'au bout de votre analyse : faites sauter l'exonération de l'outil de travail, c'est-à-dire l'amendement Bettencourt, comme on l'appelle, que vous avez voté à la demande de Pierre Bérégovoy et de François Mitterrand !
Mais vous savez bien que cela exploserait ; alors vous vous attaquez seulement un effet secondaire au lieu de traiter le problème principal. Cela pose l'éternelle question de savoir s'il faut maintenir un tel impôt en France. Vous n'allez pas jusqu'au bout de vos analyses et vous n'assumez pas votre passé !
(L'amendement n° 664 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 651 .
Même si vous faites un collectif tous les quinze jours, comme cela commence à être l'habitude, vous aurez droit à chaque fois à cet amendement.
Vous avez fait un cadeau sur l'ISF de 2 milliards d'euros environ…
Et vous, vous vous apprêtiez à en faire un de 4 milliards !
Et comme si cela ne suffisait pas, vous avez rajouté cette déduction de 300 euros par enfant à charge pour les contribuables assujettis à l'ISF. C'est proprement scandaleux.
J'ai même cru entendre, en commission, quelques regrets de notre rapporteur général, qui a laissé entendre, avec des trémolos dans la voix, que ce n'était pas l'acte politique dont il était le plus fier ces dernières semaines. (Sourires.)
Nous vous donnons encore une fois, et nous y reviendrons si nécessaire, l'occasion de racheter ce péché,…
…c'est-à-dire de récupérer 40 millions d'euros pour le budget de l'État, ce qui n'est pas rien, en annulant cette disposition. Ce n'est pas de la politique nataliste, contrairement à ce qui avait été dit à l'époque, mais tout simplement un cadeau supplémentaire.
C'est un péché véniel, et pour la famille : c'est vite pardonné ! Je reste donc sur un avis défavorable.
Vous brûlerez en enfer ! (Sourires.)
(L'amendement n° 651 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Michel Vergnier, pour soutenir l'amendement n° 748 , deuxième rectification.
C'est, une fois encore, une question de cohérence : nous vous proposons, comme y invite le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires sur les niches fiscales et sociales, de ramener le taux de l'incitation à l'investissement en fonds propres dans les PME de 50 % à 25 % au titre de l'ISF. Il est en effet difficile de comprendre que le taux d'incitation soit deux fois plus élevé pour l'ISF, impôt dû par 2 % des contribuables les plus aisés, que pour l'impôt sur le revenu.
Regardons le coût de ce dispositif : 661 millions d'euros en 2009, 768 millions d'euros en 2010 et 733 millions en 2011, contre 380 millions d'euros annoncés lors du vote de la loi en 2007. Qui plus est, il ne bénéficie qu'à 81 300 ménages. Il serait donc prudent d'adopter le présent amendement.
(L'amendement n° 748 , deuxième rectification, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour présenter l'amendement n° 749 .
Je vois d'ici les larmes de crocodile surgir lorsque nous allons vous proposer de durcir un peu les conditions de transmission en défiscalisation totale de l'assurance vie.
Oui, madame la ministre, il y a des interrogations sur l'assurance vie et sur son taux de collecte. Nous estimons, et nous assumons cette position, que l'abattement de 152 500 euros, au-delà duquel s'applique la taxation de 20 % à chacun des bénéficiaires, permet, surtout s'il y a plusieurs ayants droit, une défiscalisation proprement énorme. Nous estimons que c'est trop et vous proposons donc, modestement, de ramener la limite à 100 000 euros – ce qui ne l'empêchera pas de se cumuler bien sûr avec les autres dispositifs dérogatoires en matière de droits de mutation à titre onéreux.
J'ai bien entendu tout à l'heure, madame la ministre, votre complainte sur l'assurance vie, notamment sur l'incitation qu'il faudrait mettre en place pour que ces contrats contiennent plus de dette nationale. Il faudrait effectivement travailler sur cette idée. À titre personnel, je ne serais pas opposé à une de ce type, qui permettrait de moins dépendre des sacro-saints marchés.
Vous aviez d'ailleurs évoqué le sujet en commission, monsieur Chartier. J'avais déjà souscrit à cette belle déclaration d'intention. S'il reste encore un peu de place dans le prochain collectif,…
…je serais tout à fait prêt à soutenir une disposition de cette nature.
Quoi qu'il en soit, vous aurez compris que l'objet de l'amendement n° 749 est de ramener à 100 000 euros le plafond au-delà duquel s'applique la taxation de 20 %.
Je voudrais rappeler, même si M. Eckert n'était pas député à l'époque, que le seuil de 1 million de francs a été introduit en loi de finances pour 1998. Depuis, il n'a jamais été réévalué. On s'est borné à le convertir en euros, ce qui a donné le chiffre de 152 000.
Eh oui ! Justement !
(L'amendement n° 749 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l'amendement n° 650 .
Cet amendement vise à revenir sur la réforme que vous avez fait voter en juillet et qui impliquait une quasi-suppression de l'ISF. Dans la situation dans laquelle se trouvent nos finances publiques, s'il est une mesure qui ne s'imposait pas, c'est bien celle-là. Certes, vous n'aviez pas idée à cette époque de la situation que vous avez trouvée à la rentrée, mais convenez aujourd'hui qu'il est nécessaire de revenir sur ce cadeau fiscal de 1,8 milliard d'euros.
Avec cet amendement n° 650 , nous proposons donc de revenir sur la suppression de la première tanche de l'ISF. Un second amendement, qui viendra un peu plus loin, visera quant à lui à réviser l'ISF et à revenir aux taux originaux, même si nous maintenons que la bonne réforme de l'ISF aurait été de s'en tenir aux montants d'ISF, c'est-à-dire aux 4,8 milliards ou 4,5 milliards que représentait l'ISF, quitte à s'appuyer sur une base plus large : il serait intéressant, par exemple, de s'interroger sur la notion d'outil de travail, beaucoup trop large aujourd'hui, en ajustant les taux. Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons nous permettre de faire un cadeau fiscal de 1,8 milliard d'euros aux contribuables les plus aisés dans la situation que connaît notre pays.
(L'amendement n° 650 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2012 :
Suite de la discussion des articles non rattachés.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron