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Séance en hémicycle du 1er avril 2008 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • logement
  • loyer
  • ménage

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel communication d'une décision déclarant, en application de l'article LO 136-1 du code électoral, M. Georges Fenech inéligible pendant un an à compter du 27 mars 2008 et, en conséquence, démissionnaire d'office.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Jean-Yves Le Bouillonnec et plusieurs de ses collègues visant à donner un logement adapté à chacun et abordable à tous (nos 737, 741).

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Monsieur le président, madame la ministre du logement et de la ville, monsieur le président de la commission des affaires économiques, chers collègues, la proposition de loi dont j'ai l'honneur de vous présenter le rapport a été initiée par le groupe des députés socialistes républicains et citoyens. Elle s'inscrit dans le prolongement de l'important travail que les groupes socialistes au Sénat et à l'Assemblée ont assumé à l'occasion de la précédente législature, et dans la réflexion que les socialistes ont conduite à l'occasion de l'élection présidentielle, des législatives et surtout des municipales.

Son objet, c'est la crise du logement, d'une gravité aujourd'hui comparable à celle du début des années cinquante.

La progression des dépenses liées au logement dans le budget de tous les ménages, l'augmentation insupportable des loyers et des charges et les expulsions qui en découlent ; l'inadaptation des logements construits aux besoins des familles ; la construction insuffisante de logements très sociaux – voire, tout simplement, de logements vraiment sociaux – ; l'augmentation du nombre de logements insalubres ; le mal-logement des jeunes travailleurs, des jeunes couples, des personnes à mobilité réduite, des familles à ressources modestes, des étudiants ou des personnes âgées ; la persistance d'un habitat insalubre ; la multiplication des marchands de sommeil ; l'augmentation du nombre des sans-logis ; le blocage des dispositifs d'hébergement : c'est tout cela, la crise du logement, une crise qui pèse sur la vie d'un nombre de plus en plus important de nos concitoyens, des plus pauvres aux classes moyennes, et qui constitue une réelle rupture du pacte républicain.

Les nombreux textes votés par la majorité depuis six ans n'ont pas réussi à enrayer cette crise, ni même à en éviter l'aggravation, et encore moins à répondre à l'objectif fondamental que se fixe la présente proposition de loi : donner un logement adapté à chacun et abordable à tous.

Ce qui est critiquable, dans les dispositifs votés par la majorité, quelle que soit l'intention de leurs auteurs – loi pour l'habitat, loi de programmation et d'orientation pour la ville et la rénovation urbaine, plan de cohésion sociale, loi portant engagement national pour le logement, loi « DALO » instituant le logement opposable –, c'est leur inspiration fondamentalement libérale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

C'est cette politique-là qui doit cesser.

En appréhendant le logement comme une marchandise ordinaire, en feignant de croire que les lois du marché viendraient réguler l'offre et la demande, en favorisant l'investissement spéculatif faute d'avoir lié les avantages fiscaux à des contreparties sociales, en proclamant l'accession à la propriété comme objectif intangible sans mettre en place une vraie stratégie d'accession sociale, les gouvernements et la majorité ont manqué à l'obligation qui incombe à l'État d'être, par sa politique, son budget et son autorité tutélaire, le garant d'un droit au logement et au parcours résidentiel sur tout le territoire national.

La flambée des prix de l'immobilier, des loyers, du foncier, des charges, les investissements prédateurs que sont les ventes à la découpe, l'exclusion des centres-villes, les rénovations urbaines clientélistes entraînent les prémices d'une ségrégation urbaine, d'une « ghettoïsation » mettant directement en cause la cohésion, non pas seulement sociale, mais aussi sociétale.

Le logement est aussi un enjeu majeur, si ce n'est l'enjeu principal, pour le pouvoir d'achat de nos concitoyens. Or, dans un contexte de pénurie de l'offre, les écarts n'ont cessé de se creuser entre les ménages les plus riches et les plus modestes, le pouvoir d'achat de ces derniers étant anéanti par le poids du loyer et des charges locatives. Ainsi, en 2006, les 20 % de ménages ayant le niveau de vie le plus faible consacraient près de 25 % de leurs dépenses de consommation au logement, contre 10,8 % pour les 20 % des ménages les plus aisés.

De fait, la France a connu depuis dix ans une évolution sans précédent des loyers tandis que les prix de l'immobilier ont quasiment doublé sur la même période. Dans le même temps, les aides au logement n'ont pas été revalorisées de manière régulière ni en cohérence avec les évolutions du marché.

Celui-ci a d'ailleurs subi les effets pervers d'un certain nombre de dispositifs tels que l'amortissement de Robien, lequel a davantage constitué un produit d'investissement qu'un véritable outil de relance de la construction de logements à loyer abordable. La politique menée par le Gouvernement en faveur de l'accession à la propriété n'a pas été ciblée sur les ménages les plus modestes : même le prêt à taux zéro a été considérablement étendu en loi de finances pour 2005, tandis que le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt a été ouvert à tous les ménages au lieu d'être réservé aux seuls primo-accédants.

Le groupe socialiste propose donc un véritable changement de cap dans la politique menée par les pouvoirs publics, afin d'offrir un logement adapté et abordable à tous, et non seulement aux ménages les plus aisés.

La proposition de loi qui vous est soumise comprend trois volets : la relance du pouvoir d'achat des ménages modestes grâce à la baisse des dépenses de logement et à la protection des locataires, la réforme des dispositifs fiscaux en faveur du logement et le soutien à la construction de logements sociaux, notamment grâce au renforcement de l'article 55 de la loi SRU.

Le logement constitue le premier poste de dépenses des ménages les plus modestes, une situation qui n'est pas acceptable. Il vous est donc proposé de limiter les hausses de loyer à la relocation et d'améliorer les conditions de versement des aides au logement en les revalorisant – afin de tenir compte de l'inflation enregistrée depuis 2002 – et en supprimant le mois de carence et le seuil de 15 euros en deçà duquel les aides ne sont pas versées. En effet, comme n'ont cessé de le répéter les députés socialistes – et pas seulement eux – l'existence de ce seuil ne trouve aucune autre justification que le souci du Gouvernement de faire des économies budgétaires au détriment des ménages modestes.

Il vous est également proposé de revenir à une gestion du fonds de solidarité logement à parité entre l'État et le département.

Le présent texte comporte, en outre, des dispositions visant à sécuriser les rapports locatifs, avec la création d'un fonds de garantie des impayés véritablement universel et mutualiste. Nous vous proposons en conséquence, et par souci de cohérence, la suppression du cautionnement solidaire, qui perd son sens dès lors que le fonds de garantie est universel. Le dispositif améliore également les conditions dans lesquelles le dépôt de garantie est restitué au locataire par le propriétaire : ce dernier devra notamment justifier les retenues effectuées.

La proposition de loi n'envisage pas uniquement le poids du logement du point de vue du loyer, mais également du point de vue des charges locatives, et des charges supportées par les propriétaires bailleurs qui investissent dans des travaux d'amélioration profitant au locataire occupant.

Enfin, le texte vise également à sécuriser les accédants à la propriété victimes d'accidents de la vie.

Le deuxième volet de cette proposition de loi concerne le financement de la construction de logements sociaux, et non plus la solvabilité des ménages. Il vise notamment à renforcer le livret A en augmentant le plafond des dépôts. Le livret A est, en effet, un instrument majeur de financement du logement social.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Par ailleurs, nous vous proposons une réforme d'ampleur de la fiscalité du logement. Les analyses économiques illustrent à quel point le dispositif de l'amortissement de Robien est mal calibré : il a sans doute constitué un produit de défiscalisation appétissant pour les investisseurs, mais pas un réel outil de relance de la construction destiné à proposer un logement abordable à tous. Nous proposons de supprimer ce dispositif inefficace et extrêmement coûteux.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Absolument ! Mieux vaut consacrer cet argent à la construction de logements !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

De même, si nous attachons tous une particulière attention à l'accession sociale, il nous semble nécessaire et légitime que les politiques publiques favorisant l'accession soient ciblées sur les ménages les plus modestes, ce qui permettrait du même coup d'accroître l'aide apportée par l'État à ces ménages.

En outre, dans le contexte de la mise en oeuvre du droit au logement opposable, il est indispensable que tous les maillons de la chaîne du logement participent à l'effort de logement des populations en difficulté. La mise en oeuvre de ce droit ne peut reposer sur le seul parc social ; le parc privé aussi doit être mobilisé. Il est donc proposé d'exonérer fiscalement les revenus locatifs des propriétaires bailleurs souhaitant accueillir des ménages bénéficiant du droit au logement opposable, pour inciter les propriétaires à louer un logement à un loyer de niveau social et permettre une relance de l'offre locative à loyer maîtrisé.

Enfin, l'examen des modalités d'application de la loi portant engagement national pour le logement fait apparaître l'insuffisance de l'information des propriétaires quant à l'existence de dispositifs de conventionnement, tels que le conventionnement sans travaux que propose l'ANAH. Il est donc prévu d'améliorer l'information des investisseurs souhaitant effectuer un placement locatif en acceptant des loyers maîtrisés.

Enfin, le troisième et dernier volet tend à relancer la construction de logements sociaux en agissant sur plusieurs leviers. Il s'agit ici de promouvoir une offre adaptée aux besoins.

Les dispositifs existants, en particulier l'article 55 de la loi SRU, doivent être précisés afin d'éviter les inacceptables dérives que l'on a pu constater depuis l'entrée en vigueur de cette loi : certaines communes préfèrent payer une pénalité plutôt que de participer à l'effort national de construction de logements sociaux ; d'autres n'utilisent pas toute la palette de logements sociaux qu'il leur est possible de construire, se contentant de logements de type PLS, dont le niveau de plafond est beaucoup trop élevé pour les ménages modestes. J'ai évoqué délibérément le terme de clientélisme pour stigmatiser de tels agissements. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Le texte renforce donc le système de pénalités – elles sont multipliées par cinq – et vise à rééquilibrer l'offre de logements sociaux – PLA-I, PLUS ou PLS – construits par les communes. De telles mesures nous paraissent indispensables si nous voulons répondre aux objectifs de la loi DALO.

L'État pourra en outre disposer d'un droit de préemption dans les communes ne respectant pas leurs obligations légales au titre de l'article 55 de la loi SRU. Il veillera également à répartir au mieux l'effort des différentes collectivités dans la mise en oeuvre de la loi DALO. Il n'est pas équitable, en effet, que les communes bénéficiant d'un nombre important de logements sociaux soient les seules à faire un effort en faveur du droit au logement opposable. C'est une question de solidarité nationale.

Outre les modifications de l'article 55 de la SRU, il vous est proposé d'apporter des modifications au droit de l'urbanisme afin, notamment, de lutter contre la rétention foncière et de permettre aux communes de récupérer une partie de la plus-value engendrée par le classement d'un terrain en zone urbaine. Il vous est également proposé de soutenir l'effort financier des collectivités locales pour la construction de logements sociaux en renforçant les dotations qui leur sont accordées.

Par ailleurs, dans un souci de meilleure gouvernance de la politique du logement, il paraît indispensable que le contingent préfectoral ne puisse être délégué qu'aux présidents de structures intercommunales, puisque ce sont les intercommunalités qui établissent les programmes locaux de l'habitat.

Enfin, il est nécessaire que l'État contribue par tous les biais possibles à l'effort financier en faveur de la création de logements. C'est pourquoi nous vous proposons de prévoir qu'il doit vendre ses terrains et immeubles à des prix inférieurs à leur valeur vénale dès lors qu'ils sont consacrés à la construction de logements, notamment sociaux. Ce qui, dans un premier temps, peut sembler une dépense pour l'État constitue en fait un investissement, voire une économie.

Voici l'ensemble des mesures que nous vous proposons d'examiner et d'adopter. Toutes concourent au changement de cap auquel nous avons fait référence et ont pour but de proposer à chacun un logement adapté à ses besoins et à un prix abordable. Notre pacte républicain l'exige. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, nous voici rassemblés à l'occasion du dépôt par la gauche d'une proposition de loi sur le logement.

S'il m'est agréable que cette discussion arrive dans l'hémicycle, tant les problèmes de logement sont réels en France, je souhaite répondre aux propositions par des commentaires fondés sur la réalité, non sur l'anathème. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) La question du logement est une question sérieuse, qui touche l'ensemble de nos concitoyens. Il faut en parler avec gravité et responsabilité.

Aujourd'hui, c'est toute la chaîne du logement qui est bloquée.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Dans certaines zones, les prix sont exorbitants, l'offre ne correspond plus aux attentes des personnes en termes de taille ou de localisation. Les Français, il faut le dire, sont de plus en plus inégaux devant le logement. Quant aux plus pauvres, ils ne s'en sortent plus. Beaucoup d'hommes, de femmes et d'enfants vivent dans des conditions indignes d'un pays comme la France, même si les difficultés sont d'intensité très variable d'un territoire à un autre.

Sur ce front, les élus sont en première ligne. Leurs permanences sont assaillies par les ménages qui cherchent un logement parce qu'ils sont mal logés ou parce qu'ils souhaitent évoluer dans leur parcours d'habitation. Les élus savent aussi mieux que personne combien les territoires pâtissent de cette crise, qui diminue leur attractivité.

Les origines de cette situation sont simples : pendant vingt ans, notre pays a construit deux fois moins de logements qu'il n'en fallait. Et il me faut une certaine dose de mansuétude pour ne pas montrer du doigt ceux qui en portent la grande responsabilité. Je me contenterai d'indiquer qu'il n'a pas été suffisamment tenu compte du dynamisme démographique de la France, du vieillissement de notre parc de logements, de la multiplication des foyers sous le triple effet du développement du célibat et de la décohabitation, du vieillissement de la population, ainsi que de la recherche d'un meilleur confort de notre habitat.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

À la sous-estimation par l'INSEE des besoins en logements s'ajoutent les besoins en rattrapage des années antérieures que l'on peut estimer à environ 600 000. Au total, ainsi que l'annonçait le Premier ministre, dans sa déclaration de politique générale du 3 juillet dernier, les besoins réels sont actuellement de 500 000 logements neufs par an.

Depuis six ans, nous avons pris le problème à bras-le-corps comme nul avant nous ne l'avait fait. Les chiffres sont clairs, mesdames, messieurs les parlementaires : en 2007, 435 000 logements ont été commencés contre 310 000 en 2000. En 2007, 108 000 logements sociaux ont été financés contre 42 000 en 2000 (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) dont 14 000 PLAI contre 5 000 en 2000.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Cela ne veut rien dire ! Ce sont vos statistiques !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Quant aux loyers maîtrisés dans le parc privé, par le biais de l'ANAH, les chiffres sont de 33 000 contre seulement 10 000 en 2000. Toutes les courbes sont reparties à la hausse. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Ce n'est pas compliqué à comprendre…

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Voyez ce document qui compare les chiffres de 2002 et de 2007 ! Il atteste de ce qui se passait avant et de ce que nous avons accompli depuis que nous en sommes en charge de ce dossier !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

C'est le dispositif de Robien ! Des logements destinés aux familles pleines de fric ! Ce ne sont pas des logements sociaux !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Je préfère sourire quand je lis dans l'exposé des motifs de la proposition de loi qui vous est soumise, mesdames, messieurs, que le bilan de la droite en matière de logement est « sans appel » ! Il faut tout de même avoir un certain toupet, monsieur le rapporteur ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Que fait votre majorité depuis sept ans ? Je vais vous donner les chiffres !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Notre bilan est effectivement sans appel ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) J'aurais souhaité un peu plus de sérieux dans les critiques, car, au-delà d'une bataille de chiffres, mesdames, messieurs, il s'agit du sort d'hommes, de femmes et d'enfants.

La bataille du logement ne se gagnera certes pas en un an, ni même en deux. Elle se gagnera en maintenant un haut degré de mobilisation.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

C'est la raison pour laquelle le Président de la République, après s'être longuement exprimé sur cette question durant sa campagne, a tenu à réaffirmer ses objectifs lors de son discours de Vandoeuvre-lès-Nancy, le 11 décembre dernier. Ces objectifs, je vous les rappelle : viser le chiffre de 500 000 logements neufs chaque année, dont 120 000 logements sociaux ; bâtir une France de propriétaires parce que la propriété constitue une sécurité face aux aléas de la vie en même temps qu'un capital que l'on transmet à ses enfants et aussi parce qu'il n'y a aucune raison qu'elle soit un luxe réservé aux plus riches.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Ce sont des paroles verbales ! Qu'est-ce que cela veut dire ?

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Enfin, troisième objectif : mettre pleinement en oeuvre le droit au logement opposable dont j'ai eu l'honneur d'être rapporteure dans cette enceinte. Nous devons faire en sorte que tous les habitants de ce pays bénéficient d'un toit.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Ce sont des paroles ! Il y a toujours des gens à la rue !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Tel est le vrai sens de la loi sur le droit au logement opposable – rappelons qu'elle a fait au Parlement l'objet d'un vote unanime des présents – qui n'est en aucune manière un droit partisan, mais le bien commun de la société politique française tout entière.

Pour ce qui est de la construction, le préalable était bien sûr de restaurer la confiance entre tous les acteurs du logement afin que les progrès voulus se fassent dans des délais courts. C'est ce que j'ai fait en septembre dernier en décentralisant mon ministère à Lyon pour une opération marathon (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) réunissant toutes les parties prenantes pour engager le Chantier national pour le logement. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Arrêtez de rire, mesdames et messieurs ! L'enjeu est beaucoup plus important ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) En quinze jours, à Lyon, nous avons fait avancer les choses comme jamais nous n'aurions pu le faire en dix-huit mois sans cette opération.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

La relance de la construction a été possible en redonnant confiance aux professionnels, aux promoteurs et constructeurs de maisons, mais aussi aux accédants à la propriété et aux investisseurs.

Le développement du logement social s'est consolidé parallèlement sur la lancée de la loi programmation du plan de cohésion sociale. C'est la majorité actuelle qui, la première, s'est engagée aussi fortement et dans la durée.

S'agissant de l'accès à la propriété, nous avons adopté l'été dernier la déduction des intérêts d'emprunt pour l'habitation principale.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

C'est Juppé qui l'avait supprimée parce qu'elle ne servait à rien !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Au mois de décembre, conformément aux objectifs du Président de la République, j'ai signé avec l'Union sociale pour l'habitat un accord permettant de vendre chaque année 40 000 logements HLM à leurs occupants. J'ai même dépassé cet objectif en signant un accord analogue avec les sociétés d'économie mixe concernant la vente annuelle de 3 000 autres logements.

Avec le projet de primo-accession de la « maison pour 15 euros par jour », nous allons démontrer qu'une famille comprenant un couple avec deux enfants ou plus, qui gagne de 1 500 à 2 000 euros par mois, peut construire la maison de ses rêves et se constituer un patrimoine à transmettre à ses enfants. Le rêve de propriété doit être accessible à tous, c'est notre volonté et c'est le chemin que nous empruntons avec cette nouvelle offre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

C'est Walt Disney ! C'est la maison de Blanche-Neige !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

En ce qui concerne le droit au logement opposable, je tiens à vous informer que la phase d'installation des commissions de médiation DALO est derrière nous. Pourtant, les Cassandre ne manquaient pas, en particulier de ce côté de l'hémicycle, à douter que cela fût possible.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Cette mise en place s'est déroulée sans difficulté. Il ressort de leurs premières semaines d'exercice que 75 % des demandes sont franciliennes et que, parmi elles, une bonne moitié émane de la seule ville de Paris. Ma volonté, je tiens à le préciser, est de rassurer les élus qui ont un fort pourcentage de logements sociaux…

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

…et qui craignent que ces populations prioritaires ne se concentrent sur leur territoire, que les mesures vont être prises pour qu'il n'en soit pas ainsi.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Naturellement, je travaille activement à la prise en charge le plus en amont possible des personnes et à la prévention des demandes, notamment grâce à une lutte renforcée contre l'habitat indigne. J'ai demandé à tous les préfets, par voie de circulaire, le 14 novembre dernier, la mise en oeuvre d'un plan d'urgence contre les marchands de sommeil, axé sur les travaux d'office.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Il est dommage que vous n'ayez rien vu, madame, parce que l'on en mesure déjà les résultats !

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Où ?

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

La lutte contre l'habitat indigne n'a jamais autant progressé grâce à deux ordonnances majeures du 15 décembre 2005 et du 11 janvier 2007. La circulaire que j'ai envoyée et celle du Premier ministre du 22 février 2008 ont permis de mobiliser l'ensemble des acteurs publics. Nous commençons à voir les effets de notre action avec la multiplication des condamnations des marchands de sommeil. Je pense que, comme tout bon parlementaire, vous lisez la presse…

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

…et que vous avez pu le constater ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

En ce qui concerne l'amélioration du parc privé, l'ANAH est passée d'une logique de guichet à une logique de projet. Désormais, elle est devenue un véritable partenaire local.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Avec 560 millions d'euros, son budget est engagé sur tout le territoire national avec un effort renforcé dans 560 opérations programmées couvrant 22 500 communes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

C'est une bonne chose par rapport au gaspillage !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

En 2007, l'ANAH est intervenue pour le traitement de plus de 7 000 logements indignes.

Un point sur l'hébergement : pour prolonger la mise en oeuvre du PARSA – le plan d'action renforcé en direction des personnes sans-abri –, le Gouvernement a missionné le député Étienne Pinte, dont le rapport…

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

…constitue le document de référence pour notre action. Je vous rappelle un seul chiffre : 250 millions d'euros supplémentaires ont été mobilisés.

Le DALO sera bientôt regardé pour ce qu'il est, à savoir un formidable levier pour relancer avec combativité l'amélioration de l'habitat et l'augmentation de la construction dans notre pays sur toue la chaîne du logement.

Je veux aussi évoquer le programme national de rénovation urbaine qui se prolonge jusqu'en 2013. Gérard Hamel, avec l'ANRU, conduit un travail exemplaire pour nos concitoyens. À cette date, 530 quartiers répartis en France entière seront rénovés, améliorant le cadre de vie de près de quatre millions d'habitants. Cela représente 12 milliards d'euros d'aide de l'État et du 1 %.

En ce qui concerne, enfin, le pouvoir d'achat, qui est au coeur du programme présidentiel, nous avons apporté des réponses fortes et lisibles. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Les aides personnelles au logement ont été indexées sur l'indice de révision des loyers. Cette mesure a été adoptée, vous vous en souvenez, avec la loi DALO en mars 2007. Elle a permis une revalorisation des barèmes des aides au logement de 2,76 % au 1er janvier 2008. Vous le savez tous, c'est une hausse importante. Par ailleurs, avec la loi sur le pouvoir d'achat, nous avons fait adopter une mesure de modération des loyers en liant l'IRL à l'indice des prix à la consommation.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Nous avons consacré, à la même occasion, une autre mesure dont les locataires nous savent gré : je veux parler de la réduction à un mois de loyer maximum du montant du dépôt de garantie. Nous sommes d'ailleurs allés plus loin en signant avec le 1 % la généralisation à tout public de l'avance LOCA-PASS®. Je tiens à saluer le travail de Frédéric Lefebvre et du groupe de la majorité sur tous ces sujets.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Dans les faits, si elle le souhaite, une personne n'a plus à débourser de dépôt de garantie au moment de l'entrée dans les lieux.

Toutes ces mesures ont permis une avancée unique de la politique du logement dans notre pays. Nous nous mobilisons sans relâche sur tous les fronts, car nous gardons à l'esprit que le logement est un tout. On ne peut se limiter à une catégorie précise, si digne d'intérêt soit-elle, car ce qui est fait pour l'une ou l'autre a des conséquences directes sur l'une ou l'autre. C'est l'ensemble de la chaîne du logement qu'il faut redynamiser.

Mais une chose est sûre : nous ne relèverons pas le défi du logement par je ne sais trop quel miracle institutionnel qui nous éloignerait de l'effort que nous avons tous à produire. L'action du Gouvernement et celle du Président de la République sont là pour donner l'impulsion, mais elles sont là aussi pour rappeler chacun à ses devoirs et à ses responsabilités. Les élus locaux, les maires et les présidents d'EPCI ont un rôle éminent à jouer. Construire 500 000 logements est à la portée d'un pays comme la France à la seule condition que nous nous y mettions tous ensemble ! Que tous les maires, tous les Français, tout le monde du logement se mobilisent et que chacun ait le vif sentiment qu'il va devoir agir pour l'intérêt général.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Nous sommes là, à mon sens, dans le registre de l'obligation morale. Construire, construire et encore construire, tel est notre leitmotiv,…

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

…tel est aussi le message que j'aimerais faire passer ce matin.

Je veux à présent faire quelques commentaires, monsieur le rapporteur, sur le corps de votre proposition de loi…

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

…et les nombreuses mesures qu'elle contient.

Ainsi que je viens de vous le préciser, certaines de vos propositions arrivent un peu tard dans la mesure où le Gouvernement a déjà agi et il n'est pas faux de constater que beaucoup d'autres de vos propositions sont peu novatrices, irréalistes, voire coûteuses et dangereuses. Certaines, en revanche, sont intéressantes. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Mais en ce qui concerne la demande de logements, je vous le dis très clairement, mesdames et messieurs les parlementaires de l'opposition, la copie est totalement à revoir. Je veux vous le démontrer à partir de quelques exemples.

L'article 1er donne le ton de votre proposition de loi. Vous proposez ici de limiter les hausses des loyers.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Oui !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

C'est naturellement une vieille antienne des nostalgiques de l'économie administrée.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Vous venez à l'instant de nous dire que vous l'avez fait ! Vous avez mis en place un nouvel indice pour limiter la hausse des loyers !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

C'est une mesure peu novatrice et dangereuse qui aurait des effets pervers et inverses à ceux que vous recherchez. S'il est souhaitable d'assurer une protection des locataires une fois qu'ils sont installés, nous devons en tout état de cause laisser une liberté contractuelle au moment de la relocation.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Sinon, les propriétaires soustrairont leurs biens du marché et l'offre sera encore plus tendue qu'elle ne l'est actuellement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Les propriétaires ont besoin de locataires, les locataires ont besoin de propriétaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Ce n'est pas faux ! La Palice aurait été d'accord !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Vous proposez la revalorisation des aides au logement.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

J'ai déjà dit tout ce que nous avons fait dans ce domaine.

Concernant le FSL, je ne crois pas qu'il faille revenir en arrière pour remettre en cause sa décentralisation. Avec le transfert, les départements ont développé des dynamiques partenariales locales. Je ne souhaite pas les casser.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

À l'article 20, la suppression des dispositifs de Robien et Borloo (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), comme le demandent certains bien-pensants, casserait l'élan de la construction. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Écoutez ce que je vous dis, au lieu de crier !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Non ! Sans doute faudrait-il faire évoluer le dispositif, mais il ne faut pas y mettre fin, car il permet de développer l'offre à hauteur de 60 000 nouveaux logements par an.

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Qui restent vides parce que trop chers !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

On entretiendrait la crise du logement et la pénurie responsable de la flambée des prix et des loyers. Cette mesure est dangereuse. Je vous répète qu'il est possible de mesurer son évolution.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Pourquoi consacrez-vous plus d'argent au dispositif Robien qu'aux PLUS ?

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Cela revient moins cher à l'État ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Les articles 23 à 27 traitent de la loi SRU et en particulier du seuil de 20 % de logements sociaux. Je tiens à rappeler que j'applique dans toute sa rigueur l'article 55 de cette loi. J'ai envoyé en janvier une instruction aux préfets pour qu'ils dressent le constat de carence pour toutes les communes déficitaires qui ne suivent pas le rythme de construction prévu. Ces mesures doivent inciter les maires à construire.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. À Neuilly ?

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Neuilly aussi a fait un effort. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Regardez les chiffres !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Je crois davantage à l'incitation qu'à la punition en la matière. C'est la philosophie du comité interministériel pour le développement de l'offre de logements qui s'est tenu le 28 mars dernier. Une nouvelle politique se dessine. Elle prendra la forme de contrats de mixité sociale, qui identifieront les moyens permettant d'atteindre les objectifs de rattrapage en s'appuyant, là où il y en a, sur les terrains publics disponibles. Nous aurons l'occasion d'en discuter lors de l'examen de la loi de mobilisation sur le logement que je vous présenterai prochainement.

La réforme du livret A a été annoncée par le Président de la République. Elle fait partie du projet de loi de modernisation de l'économie présentée par ma collègue Christine Lagarde. Les parlementaires souhaitent qu'il continue à financer le logement social. C'est également ma volonté, j'ai eu l'occasion de l'exprimer devant la commission des finances. Nous voulons utiliser le livret A et le livret de développement durable comme ressources avec un taux de centralisation à 70 % et une garantie de couverture des besoins de financement du logement social. C'est l'enjeu qui nous attend. Votre proposition d'augmenter le plafond du livret A, à l'article 17, est donc à mon sens inadaptée.

Cela dit, certaines des mesures que vous présentez, monsieur le rapporteur, sont intéressantes et méritent d'être approfondies. (« Ah ! Quand même ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Pour construire, nous devons mobiliser du foncier.

En ce qui concerne l'exercice du droit de préemption urbain par le représentant de l'État, les réflexions en cours pourront être enrichies par le rapport du Conseil d'État qui fera l'objet d'une discussion publique en mai.

Vous proposez d'aller plus loin que les dispositions de la loi portant engagement national pour le logement dans la taxation des terrains et le partage de la plus-value foncière, aux articles 30 et 33. Je crois en effet utile d'aborder cette question.

En ce qui concerne la décote dans la vente des terrains de l'État pour la construction de logements sociaux, à l'article 39, l'État s'est engagé comme jamais, lors du CIDOL, pour favoriser la construction de logements. Il a approuvé un programme ambitieux et concret de mobilisation des terrains publics en faveur de la construction de plus de 70 000 logements, dont 40 % de logements sociaux, sur la période 2008-2012.

Ce sont 42 000 logements qui seront construits en Île-de-France. C'est l'une des premières retombées des états généraux du logement que j'ai mis en place sous l'égide du préfet de région Pierre Mutz, et qui ont provoqué chez vous quelques sourires tout à l'heure. Par ailleurs, on valorisera de façon plus juste le prix des terrains destinés à accueillir des logements sociaux, en complément du mécanisme de décote de 25 % ou 35 % introduit par la loi portant engagement national pour le logement.

Je partage votre volonté d'encourager l'investissement privé en faveur du logement des personnes défavorisées, à l'article 21. C'est d'ailleurs une demande du Président de la République. Je pense néanmoins que les modalités que vous proposez doivent être retravaillées. Je m'étonne du reste que vous n'ayez pas eu plus d'audace, quitte à nous suggérer de permettre aux personnes assujetties à l'ISF de bénéficier d'un allégement en cas d'investissement dans le logement social. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Encore ?

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Pour finir, sachez que j'ai porté une grande attention à votre proposition de TVA à 5,5 %, sous plafond de ressources. Le Président de la République a fixé l'objectif de 70 % de propriétaires. Nous devons promouvoir l'accession populaire. Une TVA plus favorable permettrait sans aucun doute à de nombreux ménages d'accéder à la propriété alors qu'ils en sont aujourd'hui exclus.

En dépit de ces quelques aspects positifs, le Gouvernement, vous l'aurez compris, n'est pas favorable à cette proposition de loi. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Il l'est d'autant moins que, comme vous le savez, un projet de loi de mobilisation pour le logement pour répondre aux attentes de nos concitoyens est en préparation.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Je souhaite pouvoir le présenter et en débattre avec vous dans les meilleurs délais. Il faudra alors que chacun assume sa responsabilité.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Je souhaite d'ores et déjà saluer les travaux du conseil national de l'habitat présidé par Michel Piron. À n'en point douter, ils serviront à l'élaboration de cette loi.

Pour nous, le logement est un impératif qui participe à la croissance, à l'emploi, à la novation mais, au-delà, c'est un impératif pour chaque Français, jeune ou vieux, riche ou pauvre. Le logement ne doit pas être un enjeu idéologique, il s'impose à tous comme une chaîne de solidarité humaine.

Votre texte, qui ressemble davantage à un patchwork qu'à un projet cohérent, n'est en aucune manière à la hauteur des enjeux. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement n'est pas favorable à l'examen des articles de votre proposition sur le logement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Je reconnais la sincérité de l'engagement de M. Le Bouillonnec en faveur du logement mais, dans sa passion, notre rapporteur a oublié l'essentiel : il a omis de dire que la commission des affaires économiques avait rejeté cette proposition de loi en refusant de passer à la discussion des articles. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Vous n'en faites pas partie, monsieur Rogemont, vous n'étiez pas là !

Je vais donc en quelques minutes vous expliquer pourquoi nous avons rejeté le passage aux articles.

Vous êtes, monsieur Le Bouillonnec, l'un des membres les plus assidus de la commission et je reconnais votre compétence pour parler du logement, mais si l'on peut être d'accord sur le constat, on ne peut partager les arguments que vous venez de développer à l'appui de votre proposition de loi. Mme Boutin l'a expliqué avec beaucoup de talent, je serai donc bref.

Cela dit, plutôt que de répondre par le sourire et la plaisanterie, je vous appellerai à faire preuve d'humilité parce que, si nous en sommes là aujourd'hui, ce n'est pas en raison de la politique menée aujourd'hui, c'est à cause du retard accumulé pendant vingt ans, et notamment au cours de la gestion 1997-2002, celle de M. Jospin et la vôtre, mesdames, messieurs du groupe socialiste, qui étiez alors au pouvoir, et qui, à l'époque, aviez l'ambition de construire 200 000 logements par an et seulement 40 000 logements sociaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Faites donc preuve d'un peu d'humilité face à une majorité qui s'est engagée résolument depuis la loi Borloo sur un objectif de 400 000 logements par an, dont 100 000 logements sociaux ! Mme Boutin, avec beaucoup de courage, vient de lancer une série de programmes visant un objectif de 500 000 logements par an dont 120 000 logements sociaux. Je vous demande donc de soutenir notre position. Les carences qui ont été les vôtres lorsque vous étiez au pouvoir devraient vous inciter à être un peu moins incisifs dans les accusations que vous portez.

Au demeurant, monsieur Le Bouillonnec, même si nous partageons le constat, votre proposition de loi ne répond largement pas aux attentes. Suivant la vieille antienne du groupe socialiste comme du groupe communiste, la seule solution que vous sachiez proposer pour régler les problèmes, c'est d'alourdir les charges et d'augmenter les dépenses ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Cette proposition de loi induit des charges supplémentaires considérables, les orateurs du groupe UMP et notamment M. Piron vous le démontreront dans les détails.

Qui plus est, les mesures que vous préconisez sont, hélas ! dissuasives pour les propriétaires. Il faut en effet un équilibre, afin d'augmenter l'offre, bien entendu, mais en faisant en sorte d'éviter la vacance des logements. Or les mesures que vous suggérez risquent précisément de l'encourager. Par ailleurs, j'aurais aimé que vous développiez un peu plus la question de l'accession sociale à la propriété. Lorsque j'ai proposé à l'époque quelques amendements sur ce sujet qui ont été votés par la majorité, vous les avez refusés. Alors que nous faisons en sorte de permettre à davantage de Français de devenir propriétaires et que nous avons pris des dispositions énergiques en ce sens, il est difficilement supportable de vous entendre nous donner des leçons !

Quant au dispositif Robien, nous l'avons corrigé dans le projet de loi portant engagement national du logement. Il a eu un mérite, c'est d'avoir été l'un des éléments de la relance de la construction de logements (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), et nous n'avons pas à en rougir.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

Madame la ministre, nous appelons de nos voeux un prochain texte sur le logement, qui doit être inscrit à l'ordre du jour. M. Le Bouillonnec a fait un constat que nous partageons et il est nécessaire de mettre en place des dispositifs complémentaires. Vous avez l'intention de le faire et nous allons vous soutenir.

Certaines de ces propositions peuvent entrer dans le dispositif mais, de grâce, mesdames, messieurs de l'opposition, si vous voulez que nous travaillons de manière partenariale, évitez ces réactions un peu scolaires aux propos du ministre (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), et discutez sur le fond plutôt que de répondre par la plaisanterie !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Ollier

C'est vous que j'appelle à faire preuve d'humilité !

Je souhaite que la majorité rejette le passage aux articles, car nous attendons, avec confiance, le prochain texte sur le logement de Mme Boutin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Mon rappel au règlement a trait à l'organisation des travaux de l'Assemblée nationale, monsieur le président, et ce sont les propos de M. le président de la commission des affaires économiques qui me conduisent à le faire.

Ce matin, nous examinons une proposition de loi déposée par le groupe socialiste, radical et citoyen. Pourquoi ce ton et ces invectives, monsieur le président de la commission ? Acceptez-vous que l'Assemblée nationale donne à l'opposition un minimum de droits ? Après avoir entendu de tels propos, j'ai du mal à croire à votre sincérité et à votre bonne foi quand vous annoncez que vous voulez réformer la Constitution et donner plus de pouvoirs au Parlement. Il existe déjà des possibilités pour le Parlement d'exercer ses droits et pour l'opposition de défendre des propositions de loi, et vous balayez par le propos virulent que vous venez de tenir les droits élémentaires de l'opposition.

Nous ne vous demandons pas d'ironiser et de diaboliser ce que nous faisons, nous vous demandons d'examiner sincèrement les propositions qui sont contenues dans les articles après avoir écouté l'exposé de notre rapporteur, M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C'est un travail que nous avons réalisé, nous le soumettons à l'Assemblée nationale et nous avons compris que vous vouliez arrêter la discussion après la discussion générale et ne pas amender notre texte.

Si vous étiez vraiment sincère, vous diriez que vous n'êtes pas d'accord sur tel et tel article, que vous souhaitez l'amender, le supprimer ou proposer autre chose. Ça, ce serait un vrai débat parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Croyez-vous que, demain, nous allons nous coucher devant vos injonctions et voter une réforme de la Constitution qui nous donnerait de nouveaux droits alors que vous faites fi de ceux que nous avons déjà ? Je voulais faire ce rappel pour que les choses soient claires et que la majorité arrête de mépriser l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Vous parlez d'humilité, mais l'humiliation n'est pas la bonne réponse dans un débat démocratique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Vous répétez sans cesse que les socialistes ne proposent jamais rien. Ce matin, nous faisons des propositions et vous nous critiquez. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Quand allez-vous commencer à respecter l'opposition, c'est-à-dire une part de la légitimité démocratique du peuple français ?

Voilà, monsieur le président, ce que je tenais à dire ici au nom du groupe socialiste avant que la discussion générale ne s'engage, en mettant en garde sur cette attitude particulièrement brutale de la majorité et du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Il sera très court, monsieur le président : je veux simplement dire au président Ayrault que s'il avait été là pour écouter la ministre (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), il saurait que celle-ci venait à l'instant d'exaucer les voeux qu'il vient de formuler !

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

En réponse à l'intervention de M. Le Bouillonnec, Mme Boutin a repris les propositions du texte une à une, pour rappeler ce qui avait déjà été mis en place par le Gouvernement, relever ce qui lui paraissait critiquable et ce à quoi elle était tout à fait favorable.

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. M. Ayrault parlait du président de la commission !

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Si vous aviez été là, monsieur Ayrault (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)…vous auriez vu que nous, députés de la majorité, nous avons écouté avec attention les propositions du rapporteur, dont nous partageons certains des avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Vous nous auriez de même, monsieur Ayrault, entendus exprimer notre accord avec l'invitation lancée par le président Ollier à nous montrer ouverts, lors de l'examen du projet de loi gouvernemental, à certaines de vos propositions. Cessez donc avec vos grandes leçons sur l'organisation de nos travaux, ou sur la prétendue absence d'écoute de la majorité, alors que nous avons donné exactement la preuve du contraire pendant que vous étiez absent de l'hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je pourrais aussi, monsieur le président, demander une suspension de séance pour réunir mon groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

En effet, mais il faudrait quand même en venir à la discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

C'est pourquoi je ne le ferai pas, monsieur le président. Mais je veux quand même apporter une précision.

Monsieur Lefebvre, j'ai parfaitement entendu ce qu'a dit Mme Boutin, et me faire donner la leçon par vous me laisse parfaitement indifférent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Tout le monde a compris que vous teniez votre rôle habituel de voltigeur de pointe de la majorité. Il est vrai qu'elle a du souci à se faire face au mécontentement des Français et qu'elle cherche les mots propres à dissimuler une réalité qui éclate aux yeux de tous : celle de l'austérité.

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Quel rapport ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Il faut choisir, monsieur Lefebvre : voulez-vous que le débat s'arrête après la discussion générale, ou acceptez-vous qu'on passe à l'examen des articles et des amendements ? Si je vous ai bien compris, vous êtes disposés à discuter, voire à amender. Que la majorité demande donc, elle, une suspension de séance pour décider de l'attitude qu'elle tiendra !

Ceci étant dit, je ne me fais pas beaucoup d'illusion…

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et vous avez raison !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Vous persistez dans une posture de sectarisme dont vous allez malheureusement encore faire la démonstration ce matin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Dans la discussion générale, la parole est à M. Daniel Goldberg.

Je demande à tous les orateurs de respecter leur temps de parole afin d'assurer le bon déroulement de nos débats.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. M. Lefebvre s'en va !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Quel dommage ! Mais passons au fond.

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, par cette proposition de loi, les élus socialistes, républicains et citoyens vous proposent de changer profondément le cap de la politique du logement conduite par les pouvoirs publics. En effet, le constat est simple : le libre jeu du marché a échoué à réguler la demande de logements. Il n'y a pas assez de logements abordables, et cette situation est insupportable pour toutes les familles qui n'ont pas les moyens de se loger dignement.

Répondre au manque de logements adaptés aux revenus des familles et agir pour leur répartition équitable sur tout le territoire national doivent être une priorité de l'action publique. C'est particulièrement vrai en Île-de-France, dont la situation est sûrement la plus difficile, avec près de 400 000 foyers en attente d'un logement social et une répartition particulièrement inéquitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Cela suppose que les responsabilités des uns et des autres soient clairement identifiées, et que ceux qui se refusent à appliquer la loi, notamment l'article 55 de la loi SRU, soient durement sanctionnés.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Je sais que cette préoccupation peut être partagée sur divers bancs de l'Assemblée nationale, qu'elle n'est pas réservée aux seuls députés de gauche. Mais je sais aussi que, trop souvent, les égoïsmes locaux, les calculs à court terme de certains élus préférant se refermer dans l'entre soi plutôt que de s'ouvrir à la diversité sociale de notre pays, que ces petits arrangements trop longtemps occultés nuisent à l'ensemble de notre pays.

Car enfin, comment ne pas voir que nos déséquilibres sociaux et spatiaux pèsent aujourd'hui sur le dynamisme des aires urbaines : La Défense ne se développera pas sans que Clichy-sous-bois ou La Courneuve y trouvent leur compte ! Inversement, dans le cadre d'une compétition mondiale, et même européenne, entre les territoires, les faiblesses structurelles de nos quartiers populaires pèsent sur le dynamisme de l'ensemble des agglomérations, y compris de leurs zones les plus prospères.

Il ne s'agit pas seulement de justice sociale, ce qui justifierait déjà pleinement notre proposition de loi. Il s'agit aussi d'efficacité de l'action et donc de la dépense publiques, pour un développement partagé et harmonieux de nos territoires.

Voilà pourquoi nous proposons aujourd'hui des mécanismes de dissuasion plus appropriés et réellement efficaces pour contraindre ceux qui refusent de jouer la carte de la solidarité nationale prévue par la loi : réserver la dotation de solidarité urbaine aux communes qui en ont besoin ; multiplier par cinq les sanctions applicables aux villes qui font le choix de ne pas aller vers les 20 % de logements sociaux prévus par la loi SRU ; doubler les pénalités l'année où le constat de carence est prononcé par le préfet ; interdire aux communes le versement, même partiel, de ces pénalités aux intercommunalités dont elles sont membres ; identifier effectivement le type de logements sociaux construits – s'ils sont financés en prêt locatif à usage social, PLUS, en prêt locatif aidé d'intégration, PLAI, en prêt locatif social, PLS, ou qu'il s'agisse de résidences sociales et étudiantes – afin d'éviter qu'on ne construise que des PLS, auxquels les familles à revenus modestes n'ont pas accès ; obliger les communes déficitaires à consacrer 30 % de la surface de tout programme immobilier au logement social ; et pour celles qui ont fait l'objet d'un constat de carence, ne pas permettre de construction de PLS et créer un droit de préemption urbain prioritaire en faveur de l'État, afin que celui-ci puisse se substituer effectivement aux maires délibérément réfractaires.

De plus, afin d'assurer une mise en oeuvre effective du droit au logement opposable et une meilleure répartition des logements sociaux sur le territoire, nous souhaitons que les relogements décidés par les préfets au titre de la loi instituant le droit au logement opposable, dite loi DALO, ne puissent s'effectuer dans les communes qui comptent déjà plus de 50 % de logements sociaux.

Nous voulons enfin récompenser et surtout encourager les maires bâtisseurs. En effet, s'il est nécessaire que tous atteignent le seuil de 20 % de logements sociaux, ce n'est pas suffisant pour répondre aux besoins. C'est pourquoi celles et ceux qui veulent construire des logements sociaux dans leur ville doivent être soutenus par l'État et les intercommunalités pour être sûrs de pouvoir accueillir correctement, en termes de services aux personnes et d'équipements publics tels que des écoles, des stades ou des bibliothèques, les nouvelles familles qui participeront à leur développement. C'est le sens de nos propositions de création d'une part supplémentaire au sein de la dotation forfaitaire destinée aux communes, de pondération des dotations de base des établissements publics de coopération intercommunale afin de tenir compte de leurs efforts en ce sens – ils exercent de plus en plus la compétence en matière de logement – et d'une nécessaire dépendance à ce critère des dotations des EPCI aux communes.

Il m'arrive encore parfois, chers collègues, d'entendre reprocher aux députés de gauche de n'avoir aucune proposition à formuler. J'espère, qu'après cette matinée, le simple respect de l'objectivité tarira la source de cette mauvaise rengaine.

Madame la ministre, vous avez dit à plusieurs reprises, et encore à l'instant même, vouloir appliquer strictement la loi SRU. Acceptez donc au moins de discuter aujourd'hui de notre dispositif, sereinement et sincèrement : vous la rendrez ainsi plus fluide. Il ne s'agit pas d'agir par la contrainte, mais de dissuader les mauvais élèves de refuser de l'appliquer, en mettant encore une fois au grand jour les responsabilités des uns et des autres, afin d'éviter que les ghettos urbains ne se constituent, non par le bas comme il est trop souvent dit, mais par le haut des revenus.

Des bruits laissent entendre depuis quelques jours que vous réfléchissez à une loi qui, pour résoudre les problèmes d'accès au logement social, ferait en quelque sorte disparaître les demandeurs ! Plus sérieusement, vous songez, d'après la presse, à abaisser fortement le plafond d'accès au logement social. Cette vision n'est pas la nôtre : le logement social ne doit pas être réservé aux plus modestes. C'est pourquoi nous proposons que l'effort de construction soit partagé par tous au profit du plus grand nombre, afin de permettre à tous de se loger dignement et de lutter contre la tentation du repli et du chacun pour soi recherché par certains. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Monsieur le rapporteur, madame la ministre, chers collègues, les députés de la majorité se sont étonnés lors de réunion de la commission des affaires économiques qu'un tel projet de loi vienne en discussion à l'Assemblée nationale en cette période. Vous avez d'ailleurs tout fait pour bloquer le débat, et vous continuez ce matin. Cette attitude est pour le moins surprenante quand on connaît la situation dramatique qui est celle de notre pays, précisément rappelée par le rapporteur et dans la proposition de loi que le groupe de la Gauche démocrate et républicaine soutiendra. Oui, il y a urgence à traiter de cette question, sans attendre le parachutage de décisions gouvernementales en cours de préparation dans le plus grand secret et dont nous avons tout à craindre.

Pour ma part, je prends mes sources au plus près des réalités : dans le Val-de-Marne, où se trouve ma circonscription, comme celle de Jean-Yves Le Bouillonnec, qui compte près de 9 000 demandeurs de logements ; dans ma propre ville, Ivry, où, sans concertation avec les élus locaux, vous avez cru bon d'installer un centre d'accueil pour SDF, constitué de caravanes, prévu initialement pour un an et dont j'ai appris récemment qu'il serait pérennisé pour cinq ans sans plus de concertation.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Il ne s'agit pas de caravanes !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

N'est-ce pas reconnaître qu'il s'agit d'une véritable tragédie ? Sur le sujet, M. Martin Hirsch était bien plus bavard avant de devenir ministre…

Mes sources, je les trouve également auprès de ceux qui sont directement engagés dans la réflexion et l'action pour le droit au logement.

Ainsi la Fondation de l'Abbé Pierre dresse, dans son rapport annuel, un bilan accablant de la situation du logement dans notre pays : il y aurait en France 3,2 millions de mal logés, dont 100 000 SDF, 150 000 personnes vivant chez un tiers, sans compter les jeunes qui ne peuvent pas quitter le foyer familial. Selon la fondation, le logement est devenu une source d'appauvrissement, et six millions de personnes seraient en situation de réelle fragilité.

Or si en 1979, avant la mise en oeuvre effective de la réforme Barre, la part du budget des foyers consacrée au logement avoisinait les 12 à 15 %, elle se situe aujourd'hui autour de 25 à 30 %, pour atteindre parfois 50 %, comme l'indique la proposition de loi : c'est le cas notamment pour les catégories les plus démunies de la population, mais aussi, et de plus en plus, pour les classes moyennes ou intermédiaires. Je crains fort que ce que vous nous préparez, madame la ministre, en matière de plafonds de ressources et de surloyer en HLM ne vise qu'à extraire ces catégories de la population du logement social, au mépris de la notion même de mixité.

Dans les faits, le coût du logement a littéralement explosé au cours de ces dernières décennies, tant en ce qui concerne les loyers et les charges – les disparités de loyers entre le secteur privé et le logement HLM, malgré la dégradation de la vocation sociale de ce dernier, peuvent atteindre jusqu'à 150 % en région parisienne.

Mais n'est-ce pas en définitive le but assigné aux réformes gouvernementales que de faire du logement une marchandise comme une autre, en contradiction avec la notion de droit au logement inscrit dans la Constitution ? Cela s'est traduit par un désengagement massif de l'État, dont la part dans le financement du logement social ne cesse de décliner : elle n'excède pas aujourd'hui les 8 %.

Et si le 1 % payé par les salariés, appelé parfois improprement « 1 % patronal », si les collectivités territoriales, ainsi que les fonds propres des organismes ne compensaient pas cette défaillance, il ne se construirait quasiment plus de logements sociaux dans notre pays, et il serait fort improbable qu'on puisse engager des opérations de réhabilitations du parc social, voire du parc privé.

Une réalité s'impose donc : la part consacrée au logement par l'État, exprimée en pourcentage du PIB, est la plus faible depuis trente ans, alors que ce secteur économique l'enrichit, même sans tenir compte du racket systématique opéré aux dépens des caisses du 1 % logement et des réserves du livret A.

À ce propos, comment ne pas affirmer notre total désaccord avec la mesure annoncée hier par Mme la ministre Lagarde : au nom de la concurrence libre et non faussée, réaffirmée par le traité de Lisbonne, le Gouvernement, sous l'injonction de Bruxelles, ordonne d'ouvrir la gestion des livrets A aux banques privées ? Cette mesure traduit un total mépris de l'épargne populaire. Elle offre une manne considérable aux spéculateurs et met radicalement en cause le système de collecte centralisé par la Caisse des dépôts et consignation, garant du financement du logement social.

En définitive, votre politique pourrait se résumer à prendre plus pour donner moins… C'est pourquoi le groupe de la Gauche démocrate et républicaine s'y oppose et approuve l'essentiel de la proposition de loi qui nous est soumise. Tout en affirmant que le plus sûr chemin pour augmenter le pouvoir d'achat passe nécessairement par la revalorisation des salaires et des retraites, nous considérons néanmoins que l'atténuation substantielle de la charge du logement serait en effet un facteur essentiel de la progression du pouvoir d'achat.

Je note à cet égard dans le rapport l'impérieuse nécessité de faire appliquer la loi SRU sur tout le territoire. Nous avons raison de rappeler que, dans la ville de M. Sarkozy, la loi SRU n'est pas du tout appliquée. J'émets toutefois une réserve sur l'article 31 de la proposition de loi, qui porte à 50 % la proportion de logements sociaux en application de la loi DALO. Cette disposition risque en effet de pénaliser des villes déjà engagées dans une politique sociale et dédouaner les délinquants de la loi SRU.

Pour leur part, les élus communistes et républicains défendent des propositions dont un grand nombre sont contenues dans cette proposition de loi et ont été au coeur de la campagne des élections municipales. Vous devriez, madame Boutin, vous en inspirer, car les résultats ont été une véritable condamnation à votre égard. Le premier objectif de votre ministère devrait être de viser la construction de 500 000 logements par an, dont plus de la moitié réservée aux loyers réglementés et sociaux.

À cet égard, vous voudrez bien me pardonner de citer encore quelques chiffres : jusqu'à l'an 2000, 65 % à 70 % des logements construits étaient destinés aux deux tiers les plus modestes des ménages. Cette part est tombée à 40 % en 2005 et 75 % des logements construits en 2006 revenaient à 30 % de ménages les plus aisés. Ces chiffres sont révélateurs d'une politique délibérée en faveur du logement marchandise, à laquelle nous nous opposons. Nous exigeons la création de ce qu'on pourrait appeler un grand service public du logement, au même titre que l'éducation et la santé.

Pour revenir à la proposition de loi, l'article 2 prévoit une augmentation des aides au logement. Cette revalorisation est indispensable, car ces aides ont été bloquées pendant 43 mois par le gouvernement Raffarin et n'ont jamais été revalorisées au-delà de l'augmentation générale des prix. Toutes les organisations de locataires en revendiquent la revalorisation et je souscris à la revendication formulée par la Confédération nationale du logement d'une augmentation immédiate de 20 %. Voilà où nous pourrions trouver du pouvoir d'achat, puisque telles sont les intentions que vous indiquez.

Concrètement, cependant, cette revalorisation ne saurait être efficace que si elle s'accompagne d'un gel général des loyers pour une durée de trois à cinq ans. Par ailleurs, ces mesures indispensables en cette période de crise doivent s'accompagner d'un arrêt des expulsions locatives – ce dont vous ne dites mot !

J'ajoute, et c'est là une suggestion pour mes amis socialistes, qu'il faudrait avoir une intention particulière en faveur du logement des jeunes. La réhabilitation et la construction des cités universitaires sont insuffisantes. Le logement des étudiants est devenu un champ ouvert à la spéculation immobilière. Quant aux jeunes travailleurs, il faut répondre à leur attente par la construction de logements sociaux, de résidences spécifiques et par les aides au logement.

Pour conclure, nous voterons ce texte en y exprimant notre volonté d'agir pour une autre politique, donnant à chacun un logement adapté et abordable à tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi démontre bien le consensus qui existe aujourd'hui sur les bancs de cette assemblée et qui fait du logement accessible pour tous une priorité de l'action que la représentation nationale doit mener aux côtés du Gouvernement. Les bonnes volontés affichées doivent donc nous inciter à débattre de manière constructive sur un sujet à la fois central et particulièrement délicat.

Dès son titre Ier, la démarche de nos collègues socialistes a de quoi nous réjouir, car il s'agit de la reconnaissance des causes réelles qui entravent le pouvoir d'achat des Français, à savoir les dépenses contraintes, au premier rang desquelles figure le logement.

L'INSEE a ainsi créé pour ses mesures du pouvoir d'achat en 2007 un nouvel indice : celui des dépenses préengagées et de leur part dans le budget total des ménages. En moyenne, le logement compte ainsi pour 21,3 % de ces dépenses préengagées. C'est déjà trop, mais que dire lorsque cette proportion atteint jusqu'à 75 % du budget de 20 % des ménages aux revenus les plus modestes ?

Après déduction des aides au logement, pour une personne seule gagnant le SMIC, ce taux atteint 49,7 % en 2007 dans le parc privé, contre 28,5 % dans le parc social. L'action en faveur du développement du parc social doit donc être une priorité en matière de politique de logement. Un autre exemple : dans le département du Tarn, dont je suis élu, 70 % de la population est éligible et entre dans les critères d'attribution du logement social. Cette réalité que connaissent bien les parlementaires attentifs à ce sujet doit nous mobiliser encore plus pour que changent la perception du logement social et aussi, bien sûr, ses moyens.

Que proposent nos collègues socialistes ? Cette proposition de loi prétend réaliser un « changement de cap » de notre politique du logement. Si certaines mesures proposées sont intéressantes, le groupe Nouveau Centre croit davantage dans la nécessité d'un approfondissement de la politique de réforme de fond engagée depuis six ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Cette initiative de nos collègues socialistes, pour louable qu'elle soit dans ses intentions, prend des allures d'inventaire à la Prévert : les bons éléments de fond que l'on peut y trouver voient leur impact dilué au milieu d'une quarantaine d'articles, qui sont autant de propositions juxtaposées. Les jeunes et les étudiants demeurent néanmoins les grands oubliés de ce riche patchwork.

On comprend dès lors qu'il soit difficile d'en assurer la cohérence. Comment, par exemple, agir efficacement sur les dynamiques de l'offre et de la demande de logement si on ne les rend pas cohérentes et si on ne retrouve pas les équilibres de la loi de juillet 1989 ?

Par ailleurs, et j'y suis particulièrement attaché, le rôle du 1 % logement dans le cadre d'un schéma de solidarité professionnelle doit mieux être pris en compte pour renforcer le paritarisme et le dialogue entre partenaires sociaux.

Un effort d'organisation a toutefois été fait par nos collègues autour des trois principales thématiques du secteur du logement : le pouvoir d'achat des ménages les plus modestes et la protection des locataires, la construction de logements sociaux et son financement. Certains grands axes de réflexions, auxquels nous adhérons souvent, ont été réintroduits, comme l'amélioration de l'accompagnement des élus bâtisseurs ou la remobilisation du parc privé.

Nous pensons par ailleurs que la réhabilitation des logements existants est un potentiel à ne pas négliger dans les communes les plus densément peuplées, lorsque celles-ci ne satisfont pas aux critères de l'article 55 de la loi SRU.

Mes chers collègues, si la situation du logement en France impose sur de nombreuses questions une action rapide, le souci de réussite nous dicte néanmoins d'ordonner nos interventions avec cohérence. Le logement pour tous et son financement sont en effet des enjeux aux équilibres fragiles. Faut-il rappeler l'origine de la crise qui secoue aujourd'hui toutes les économies – les « subprimes » ?

Rappelons tout d'abord la grande diversité des situations du logement dans notre pays. Qu'y a-t-il de commun, en effet, entre la région parisienne, les métropoles d'équilibre, les zones de montagne ou de littoral à forte attractivité touristique, les villes moyennes, les zones périurbaines et les zones de revitalisation rurale ? Rien ! Les réalités de la situation du logement sont aussi nombreuses que nos territoires sont divers.

Or les attentes de nos concitoyens en matière d'accession sont fortes : 74 % des Français souhaitent être propriétaires d'une maison individuelle. Elles sont aussi légitimes, car la France se situe en queue du peloton d'après l'Observatoire de l'épargne européenne : en 2006, 57,5 % de nos compatriotes sont ainsi propriétaires, contre 84 % des Espagnols, par exemple. Seuls la Finlande, les Pays-Bas et l'Allemagne comptent moins de propriétaires que la France.

Nous sommes sur la bonne voie, puisqu'à chacun de ses recensements, l'INSEE constate une progression régulière de 0,4 %, mais il nous faut stimuler davantage encore cette progression, car les freins structurels demeurent.

La pénurie de logements continue à se nourrir d'elle-même, jouant en faveur de la hausse des prix. Dans ce contexte, le prêt à taux zéro est satisfaisant, mais loin d'être suffisant : si 247 000 de ces prêts ont été attribués en 2007, gage de leur pertinence, cela ne révolutionne pas pour autant l'évolution de l'offre de logement.

Faut-il dès lors majorer le PTZ, comme le propose la présente proposition de loi ? Quand des outils montrent leurs limites, il faut savoir les compléter par d'autres dispositifs. C'est la raison pour laquelle nous défendons l'effort de construction et d'incitation à l'accroissement de l'offre de logement, qui a donné lieu à 435 000 mises en chantiers en 2007, contre 310 000 en 2000.

Nous sommes également très attachés à la garantie du risque locatif, sur lequel nous attendons le rapport prochain du Gouvernement.

D'autres initiatives ont été prises, dont nous attendons les effets positifs, notamment la loi du 8 février dernier sur le pouvoir d'achat, qui améliore la situation des locataires en indexant l'évolution des loyers des contrats signés après le 10 février 2008 sur l'indice des prix et en ramenant le montant du dépôt de garantie à l'équivalent d'un mois de loyer hors charges. Mais surtout, le Gouvernement a annoncé que sera déposé dans les semaines qui viennent un projet de loi de « mobilisation pour le logement ».

Quelle pourrait être notre feuille de route ?

Tout d'abord, nous sommes particulièrement attachés au respect de la règle des 20 % de logements sociaux. Si la réflexion à mener sur les sanctions en cas de carence dans les communes doit être précisée, la prime aux maires bâtisseurs reste le moyen le plus sûr de voir se développer ce parc immobilier social.

Deuxièmement, nous devons maintenir toute notre vigilance à l'égard de l'exemplarité de l'État en matière de cession du foncier pour la construction de logements sociaux, en vue de permettre la construction de 70 000 nouveaux logements d'ici à 2012, dont 40 % de logements sociaux.

Troisièmement, il nous faut faire appel à de nouveaux outils ou modes d'intervention pour favoriser l'accession à la propriété. Comme vous le savez, madame la ministre, je suis un fervent partisan du dispositif de location-attribution, qui a fait ses preuves par le passé pour l'accession sociale à la propriété.

Quatrièmement, nous devrons un jour ouvrir dans notre pays le chantier du grand rééquilibrage entre la budgétivore aide à la personne et l'aide à la pierre, qui a été délaissée au cours des dernières décennies. (Approbation sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Des chantiers ambitieux et nombreux ont été ouverts et vont encore s'ouvrir très prochainement : enrichissons nos débats du partage de nos diagnostics et agissons tous dans la même direction, dans l'intérêt des Français et de leur pouvoir d'achat.

En conclusion, le groupe Nouveau Centre salue le travail de synthèse proposé ici et se félicite qu'enfin le débat sur le pouvoir d'achat ne soit plus faussé. Nous jugeons cependant le caractère inflationniste global des mesures proposées plus prompt à favoriser la fuite en avant dans l'accroissement du coût du foncier qu'à lever les blocages structurels qu'accuse l'offre de logement dans notre pays.

Le groupe Nouveau Centre ne votera donc pas cette proposition qui, si elle vient utilement enrichir le débat déjà engagé sur le logement, n'apporte pas une réponse économiquement opportune.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pourquoi proposition de loi, ici et maintenant, dans le cadre d'une niche parlementaire (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), alors que des textes sont en préparation – je pense notamment au Grenelle de l'environnement ou à l'instauration d'une garantie des risques locatifs, dont nous reparlerons ?

S'il est bien normal que certains d'entre nous se soient livrés d'abord à un diagnostic, celui-ci mérite toutefois d'être quelque peu mis en perspective. On l'a déjà rappelé : si crise du logement il y a, elle vient de loin. Rappelons en effet – et je le redirai – que toute politique du logement s'inscrit d'abord dans la durée. Alors que, dans les années 2000, les mises en chantier étaient au nombre de 308 000, elles ont atteint l'an dernier le chiffre de 435 000.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Vous ne pouvez pas dire ça ! Je conviens volontiers, avec la plupart des experts, que le déficit de logements peut être évalué autour de 800 000 logements, mais il n'est pas vrai de dire que la crise s'accroît alors que, je le répète, la construction a augmenté de quelque 135 000 logements.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Depuis six ans, on n'a jamais autant fait pour relancer la construction. Le bon diagnostic conduit à voir que le problème primordial, c'est d'abord de construire, car ce dont notre pays souffre d'abord et avant tout, c'est d'un déficit d'offre de logements. Il était indispensable de prendre des mesures qui relancent très rapidement la construction, comme l'a fait, même de manière imparfaite, la loi de Robien. Celle-ci fait l'objet de nombreuses accusations. Certes, il y a des endroits où elle a créé une offre probablement surabondante, mais le nombre de cas ne dépasse pas 5 à 10 % du total des constructions. Ne jetons donc pas le bébé avec l'eau du bain ! Je préfère pour ma part saluer plus de 90 % des logements de Robien, qui, en améliorant l'offre, ont commencé à peser sur les marchés,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

…et, dans un certain nombre de zones, ont contribué à faire baisser le prix des loyers. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Je le maintiens ! Beaucoup a été fait depuis six ans : les chiffres sont là pour l'attester. Et les mesures prises n'ont pas concerné toutes les catégories de logements sauf les logements sociaux, contrairement à ce que certains prétendent. Faut-il rappeler que nous étions descendus en dessous de 40 000 logements sociaux financés ? Nous en sommes aujourd'hui à plus du double !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Je pourrais citer le chiffre des PLAI – le plus cher à certains – : 5 000 en 2000, 14 000 en 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

S'il vous plaît, rétablissons quelques vérités : il y a des chiffres qui ne font malheureusement peut-être pas plaisir à tout le monde, mais qu'il faut savoir tout de même rappeler !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Une fois posée la question de l'insuffisance de l'offre, il s'agit de savoir comment faire pour que cette offre puisse durablement augmenter, et où elle est particulièrement insuffisante.

L'offre insuffisante ne caractérise en effet pas la totalité de l'hexagone. Rappelons-nous que la politique du logement, c'est, d'abord et avant tout, une politique territorialisée. Et nous avons, sur l'ensemble de la France, une situation très hétérogène. C'est d'ailleurs à cause de cela que l'on a parfois accusé certaines constructions en surnombre de gâcher les deniers publics. Mais n'oublions tout de même pas que là où il y a surnombre, il n'y a pas de tension, ou en tout cas que celle-ci diminue. Trois régions concentrent l'essentiel des difficultés. Tout le monde les connaît : la région parisienne, qui concentre entre 45 % et 50 % des problèmes, la région Rhône-Alpes, notamment le Genevois, et enfin une partie de la région PACA.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Il ne faut pas oublier le Maine-et-Loire, monsieur le député !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Monsieur Goua, j'essaye de ne pas faire dans le localisme exacerbé. (Sourires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Je voudrais m'efforcer de continuer à poser les problèmes à l'échelle où on les pose dans cet hémicycle, c'est-à-dire à l'échelle nationale. On ne peut tout de même pas dire que rien n'a été fait. C'est exactement le contraire. J'ai évoqué la loi de Robien. Elle a été reciblée, à juste titre, puisque les zones ont été depuis redéfinies. Il y a aussi le « Borloo populaire », dans un cadre de zonage lui aussi redéfini, et donc la loi dite ENL. Grâce à ces textes, nous avons aujourd'hui des résultats.

Mais je tiens à souligner que ce n'est pas seulement avec de bons textes que nous résoudrons le problème du logement. Tout le monde le sait.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

M. Le Bouillonnec en conviendra sans doute avec moi – nous avons eu l'occasion d'en discuter, y compris en commission : la question des capacités de production n'est pas souvent soulevée. Pourtant, il a fallu, je le rappelle, remettre en route la filière de la construction. Et cela ne se fait pas en un an ni même en deux. C'est pourquoi se pose la question : avec qui peut-on redresser la situation ? Sans doute avec les collectivités territoriales, notamment dans le cadre de la délégation de l'aide à la pierre – c'est tout le thème d'une politique partagée parce que territorialisée –, mais également avec les professionnels.

Si cette politique doit être territorialisée et partagée, le diagnostic révèle qu'elle ne peut s'inscrire que dans la durée. Les résultats actuels – 435 000 constructions en 2007, 98 000 logements sociaux financés – ne sont pas ceux d'une politique décidée hier ou avant-hier, mais au minimum il y a trois ans, voire cinq ans. Toute politique du logement ne peut s'inscrire que dans la durée. C'est pourquoi il est très important de s'interroger dès aujourd'hui sur les décisions à prendre, lesquelles, on le sait bien, n'auront en tout état de cause d'impact qu'au mieux dans trois ou quatre ans, sinon dans quatre ou cinq ans.

La stabilité des règles est donc une question non négligeable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Nous sommes loin d'avoir tiré le bilan des mesures prises au cours des années passées. Il nous faut encore du temps pour y voir claire, notamment pour réévaluer les conséquences d'un certain nombre de mesures. Il y a eu de très grandes réussites : je pense aux PTZ, dont le volume a été multiplié par plus de trois. Une mesure qui marche à ce point est forcément une bonne mesure. En revanche, je dois le reconnaître, on a beaucoup plus de difficultés à évaluer aujourd'hui les effets du Pass foncier. Les travaux d'évaluation nous le confirmeront plus tard, mais il semblerait que cette mesure soit plus difficile à mettre en oeuvre.

Les quarante articles de cette proposition de loi, qu'un orateur a qualifié de patchwork, contiennent des mesures incontestablement nouvelles et d'autres parfaitement justes. Mais, ainsi que je l'ai dit en commission, je crains que vos mesures nouvelles ne soient pas forcément justes, et je ne suis pas certain que vos mesures justes soient pour autant nouvelles…

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Ne votez alors que celles qui vous paraissent justes !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Parmi les mesures nouvelles qui ne me semblent pas justes, il y a l'article 5. Cet article ne risque-t-il pas dès demain d'effrayer encore un plus les banques qui sont aujourd'hui – pour des raisons notamment internationales – dans des positions déjà très frileuses ? Ne risque-t-il pas de geler ou pour le moins de freiner les crédits dont nos constructeurs ont besoin ? Quant à l'article premier, il contraint davantage le propriétaire. Or est-ce bien le moment de contribuer à décourager un peu plus les investisseurs alors que des signes avant-coureurs concernant les permis de construire me laissent penser qu'il faut plutôt inciter et encourager que contraindre ? L'article 6 relatif au FSL me semble pour le moins en contradiction avec l'esprit de la décentralisation. Que dire par ailleurs des articles concernant le PTZ ? D'un côté, l'article 16 propose de le lier à des éléments environnementaux – ainsi la haute performance énergétique – alors que le processus du Grenelle de l'environnement est en cours ; de l'autre, l'article 19 propose au contraire de cibler le PTZ sur des revenus moindres, autrement dit sur des critères sociaux. Il y a un moment où il faut choisir. Voilà des mesures certes nouvelles, mais qui ne me semblent guère justes.

S'agissant des mesures justes qui ne sont pas nouvelles, je mentionnerai notamment celles qui concernent l'environnement – articles 14 et 15. Je pense également aux mesures qui concernent la plus-value sur les terrains, dont je partage d'ailleurs totalement l'idée puisque c'est lors du débat sur la loi ENL que nous avions introduit le principe de la plus-value partagée : voilà une idée certes juste, mais qui n'est pas nouvelle.

Pour toutes ces raisons, l'ensemble de ces quarante articles me semble surtout prendre le risque d'ajouter encore à la complexification des dispositifs, d'imposer des contraintes supplémentaires là où il faudrait des mesures incitatives, et de créer surtout des charges nouvelles très lourdes avec la suppression du droit de carence, du seuil de quinze euros, l'extension de la TVA à 5,5 % sur les réseaux de chaleur, la majoration de PTZ, et j'en passe. Là où il faudrait plutôt simplifier que réglementer, inciter avec la fiscalité et encourager plutôt que contraindre, on nous propose une somme de mesures qui ne répond pas aux défis qui sont les nôtres.

C'est pourquoi, dans l'attente des textes que vous préparez, madame la ministre, et de la remise du rapport sur la garantie des risques locatifs, il ne me semble pas nécessaire de passer à l'examen des articles de cette proposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cacheux

Depuis près d'un an que vous êtes en responsabilité, madame la ministre, on continue de s'interroger sur votre politique du logement…

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

C'est vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cacheux

…et sur les moyens mis en oeuvre pour résorber la grave crise ressentie par un nombre chaque jour plus élevé de nos concitoyens qui cherchent à se loger.

J'avais accueilli avec intérêt vos premières déclarations sur la nécessité de construire d'abord avant de démolir, qui laissaient présager un effort accru pour développer l'offre de logements locatifs sociaux, tout comme vos interrogations sur le maintien du dispositif d'amortissement fiscal Robien, qui conduit à produire une offre de logements largement inadaptée aux moyens financiers de la grande majorité des Français. En effet, ce dispositif conduit à une surenchère financière entre promoteurs privés et bailleurs sociaux pour maîtriser le foncier, tout comme il incite les entreprises du bâtiment à privilégier la construction privée, rendant ainsi infructueux la plupart des appels d'offres, quand bien même ces entreprises y répondraient.

Mais à ces premières intentions aucune suite n'a été donnée, hormis quelques mesures ponctuelles et limitées. Certaines mesures négatives prises depuis sont venues éclairer votre politique : la déduction des intérêts d'emprunt contractés pour l'accession à la propriété a tout juste permis de contrebalancer la remontée des taux d'intérêt alors qu'il aurait fallu concentrer les moyens sur la véritable accession sociale ; le forcing effectué à l'automne sur la vente HLM pour contraindre les bailleurs à vendre une part significative de leur parc ne peut conduire qu'à réduire l'offre de logements locatifs sociaux alors qu'il faudrait, dans la période actuelle, l'accroître fortement. Aujourd'hui, les mesures envisagées par votre ministère, dont la presse s'est fait l'écho, inquiètent plus encore. En effet, la volonté d'abaisser très significativement les plafonds de ressources pour accéder aux logements HLM, tout comme votre souhait de relever très fortement le montant des surloyers, risque d'alourdir considérablement la charge sociale du parc HLM en rendant impossible l'accès non pas des salariés des classes moyennes – sauf à considérer comme salarié moyen celui qui gagne 1 250 euros par mois –, mais des salariés modestes, et en incitant au départ ceux qui contribuent encore à un minimum de diversité sociale.

La paupérisation progressive de l'occupation du parc HLM est une réalité qui se vérifie depuis plus de vingt ans, et qui s'accentue chaque année – on le voit à la nature des demandes adressées aux organismes – sans qu'il soit besoin de toucher au plafond de ressources. D'instrument de promotion sociale qu'il a été pendant des décennies, le logement social est devenu, dans de très nombreuses résidences, un lieu de relégation, ce que vous allez encore accentuer. Allez-vous reprendre la conception d'un de vos prédécesseurs qui conduisait le parc HLM à loger les pauvres, les démunis et les exclus, à charge pour le secteur privé de régler tout le reste ?

Si l'on veut faire reculer la crise du logement, il faut relancer plus fortement la production de logements locatifs sociaux. Or les hausses de production de logement sociaux de ces dernières années, dont vous vous félicitez, sont largement un effet d'optique car elles reposent pour l'essentiel sur la production de PLS, lesquels sont plutôt des logements intermédiaires.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cacheux

La production de PLUS, elle, n'a progressé que faiblement, et celle des logements très sociaux PLAI a fortement reculé.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Ce n'est pas vrai !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

C'est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cacheux

Pour relancer la production, il faut modifier radicalement le dispositif Robien dont j'ai décrit les effets sur le marché du logement et dont l'utilité sociale reste à démontrer. Il faut maintenir le dispositif de financement du logement social avec le livret A et la centralisation de la collecte par la Caisse des dépôts. Pourquoi, sur ce point, ne pas s'en tenir strictement à ce que demandent les autorités de Bruxelles, au lieu d'aller au-delà ? Il convient également de relancer l'aide à la pierre sur crédits d'État pour faciliter l'équilibre financier des opérations, et donc leur réalisation. Cette aide est devenue aujourd'hui anecdotique, de l'ordre de 3 000 euros par logement PLUS, au point d'être inférieure aux montants de la TVA à taux réduit qu'il faut acquitter pour construire ces logements.

Je ne compte évidemment pas le taux réduit de TVA dans l'aide de l'État : si le logement est un bien de première nécessité, il faut lui appliquer la TVA des biens de première nécessité.

Ne pas relancer l'aide à la pierre dans le financement des opérations dont l'équilibre est de plus en plus difficile à obtenir, c'est renvoyer aux collectivités locales la charge de financements dits complémentaires, mais désormais devenus principaux pour boucler ces montages.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cacheux

Madame la ministre, nous sommes en attente d'une véritable politique du logement qui réponde aux souhaits de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Cacheux

C'est bien l'objectif des propositions que vous font, ce matin, les socialistes, en souhaitant qu'elles soient discutées au fond. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Andrieux

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi présentée par Jean-Yves Le Bouillonnec est pertinente et, surtout, attendue par des millions de Français.

Car notre constat est commun : la situation est grave. Ces difficultés liées au logement ne touchent plus seulement les ménages les plus modestes ; elles affectent aussi un très grand nombre de femmes et d'hommes aux revenus moyens.

Comment en est-on arrivé là, votre bilan à l'appui ? Depuis six ans, le résultat de la politique libérale menée par les différents gouvernements de droite est parlant : hausse insupportable des prix des loyers pour les Français les plus modestes, et cadeaux fiscaux pour quelques nantis !

En France, aujourd'hui, il manque 800 000 logements. Plus grave : le principe même du financement de l'habitat social est remis en cause par de lourdes menaces qui planent sur le livret A, même si vous avez voulu, madame la ministre, nous rassurer sur ce point ce matin.

En six ans, les loyers ont augmenté de 28,8 %, alors que, dans le même temps, les aides au logement baissaient de 10 %. Chez moi, à Marseille, les prix de l'immobilier ont augmenté de près de 70 % en seulement quatre ans, et le pouvoir d'achat des Marseillais ne leur permet plus de se loger à de telles conditions. Plus de 30 000 demandes de logements sociaux ne sont pas satisfaites. Le plan local d'habitat 2006-2011 fixe un objectif de construction de 5 000 logements – dont 1 000 logements sociaux – par an ; en réalité, seulement 3 000 logements sortent de terre chaque année. Et, après avoir bradé le patrimoine de la ville au profit de la spéculation, la municipalité découvre la problématique du logement, alors que plus de 80 % des Marseillais sont éligibles aux logements sociaux !

Désormais, le logement est donc la cause première de la perte de pouvoir d'achat de nos compatriotes. Le fameux paquet fiscal de 15 milliards d'euros aurait pu permettre, d'une part, de doubler les aides au logement perçues par les allocataires et, d'autre part, d'intensifier la construction de logements à loyer abordable. Les dispositifs de Robien et Borloo, ne vous en déplaise, sont malheureusement les preuves flagrantes de votre échec. Véritables aubaines fiscales pour les plus riches, ils permettent seulement aux investisseurs de payer moins d'impôts, sans aucun effet sur la pénurie de logement à loyers maîtrisés. Et ce, malgré vos démonstrations.

Nous pourrions égrener encore longtemps les conséquences néfastes de six ans de politiques libérales en matière de logement. Nous préférons consacrer le temps qui nous est imparti à faire de réelles propositions aux Français. Il est temps de réconcilier pouvoir d'achat et logement. Bâtir des logements à prix abordables, réhabiliter l'habitat dégradé, augmenter les aides aux logements des familles les plus modestes, apporter un soutien pour payer la caution : voilà ce que font les élus socialistes lorsqu'ils sont aux commandes de collectivités locales.

Alors qu'il doit être le garant du droit au logement, l'État, lui, se désengage et conduit une politique incohérente et inefficace. Pour protéger nos concitoyens, des plus petits villages jusqu'à Paris…

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Andrieux

…les élus socialistes ont refusé de se résigner, et ils ont engagé la bataille du logement, chacun à leur échelle. Ils savent qu'il faut agir à tous les étages de l'édifice : de l'hébergement d'urgence à la location privée, en passant par les HLM, l'accession à la propriété ou les résidences pour personnes âgées.

Oui, le logement est trop cher. Aussi, avançons-nous plusieurs propositions : l'instauration d'un « bouclier logement » pour que les locataires à revenus modestes ou qui rencontrent des difficultés financières, professionnelles ou familiales, ne soient pas amenés à dépenser plus de 20 % de leur revenu pour leur logement ; le gel des loyers pendant un an ; l'indexation des loyers sur les prix pendant la durée du bail, mais aussi pour les nouveaux locataires, sauf en cas de gros travaux.

Il faut rendre possible l'accession à la propriété. La bataille du logement sera gagnée à condition d'agir sur toutes les offres de logement. Du fait des prix de l'immobilier neuf, les candidats à l'accession qui ne disposent pas d'apport ne peuvent plus se permettre d'acquérir un logement. Les difficultés rencontrées pour acheter ne concernent pas seulement les plus modestes, mais touchent une part de plus en plus grande de la population.

Les élus socialistes locaux ont mis en place des politiques volontaristes comme à Nantes, où un prêt à taux zéro est distribué par sept banques et facilite l'accès à la propriété en réduisant le coût de l'emprunt. Cette initiative est complétée par un dispositif entre les communes de Nantes Métropole et les promoteurs qui vise à prévenir les flambées spéculatives, et à garantir le maintien de logements neufs à des prix abordables.

Le prix des logements doit être maîtrisé. Pour faire face à l'accroissement de la population, tel qu'il ressort des analyses de l'INSEE publiées depuis 2003, la construction de 120 000 logements sociaux par an est nécessaire. En dépit des obstacles financiers provoqués par le désengagement de l'État, tous les élus locaux socialistes continuent d'initier et de soutenir des programmes de construction de logements HLM.

Afin de faciliter la tâche des bailleurs sociaux, certaines collectivités complètent leur engagement par une aide financière aux organismes HLM intervenant sur leur territoire. En cas de pénurie de terrains disponibles, certaines collectivités territoriales ont même été amenées à acheter des logements existants du parc privé afin de les réhabiliter et de les louer à des prix maîtrisés.

Je pourrais aussi citer l'exemple du bel outil de gestion et de maîtrise foncière qu'est l'Établissement public foncier régional en Provence-Alpes-Côte-d'Azur. Vous le voyez donc, madame la ministre, il existe bien des solutions pour construire et proposer un logement abordable à toutes et tous. Il suffit d'en avoir la volonté politique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Discussion générale

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures dix.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La séance est reprise.

La parole est à M. Jean-François Lamour.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je dispose de cinq minutes pour démontrer à monsieur le rapporteur qu'il fait fausse route – je le pense sincèrement.

Dans cette proposition de loi, vous nous présentez un train de mesures et de dispositifs importants, lourds, très complexes. Je ne dis pas que vous découvrez la problématique du logement en France (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), ce serait vous faire injure. (Mêmes mouvements.) Vous avez décidé de faire de propositions…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Laissez-moi terminer ma phrase. Vous avez décidé de faire des propositions pour que les Français se logent mieux, plus facilement, qu'ils accèdent plus facilement à la propriété – j'y reviendrai tout à l'heure – et retrouvent un système sécurisé de location.

À vous entendre monsieur Le Bouillonnec, et si j'ai bien compris les explications du président Ayrault tout à l'heure, nous ferions preuve de sectarisme. Si c'est bien ce que vous avez dit…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Monsieur Le Bouillonnec vous nous reprochez de n'avoir rien fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Non, ce n'est pas cela ! Nous avons dit que vous avez mal fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

M. Le Bouillonnec l'a dit tout à l'heure : nous n'avons rien fait ! Alors que, vous l'avez compris, nous ne vous avons pas attendu pour prendre ce dossier à bras-le-corps, depuis longtemps. Quoi qu'en dise M. Ayrault, ce n'est pas du sectarisme, c'est de l'action et sur le long terme, que cela vous plaise ou non !

Car cette action, vous nous la reprochez ! Vous nous reprochez donc d'être passés de 310 000 à 435 000 mises en chantier par an, en sept ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Vous nous reprochez d'avoir financé, en 2007, plus de 108 000 logements sociaux, alors que vous n'en aviez financé que 42 000 en 2000 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Vous nous reprochez d'avoir créé l'Agence nationale de rénovation urbaine qui, d'ici 2013, aura permis la rénovation de 530 quartiers difficiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Vous nous reprochez d'avoir plus que triplé le nombre de logements à loyer maîtrisé, grâce à l'Agence nationale de l'habitat. Enfin, vous reprochez au Gouvernement d'avoir lancé, voilà quelques jours, un grand programme de mobilisation des terrains publics en faveur de la construction de plus de 70 000 logements, dont 40 % de logements sociaux.

Voilà, monsieur Le Bouillonnec, quelle est votre stratégie d'opposition ! L'État, comme d'habitude, est responsable de tous les maux quand ça vous arrange, et vous oubliez bien vite l'action du Gouvernement quand elle est bonne !

Vous nous parlez d'ailleurs, avec force, des zones urbaines denses où la question du logement est très tendue. Parlons justement donc de l'une d'entre elles, l'une des plus sensibles : Paris et ses 110 000 demandeurs de logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Vous souhaitez, dans votre proposition, renforcer le contrôle et les sanctions des communes qui ne respectent pas le seuil de logements sociaux. Allez donc demander à vos collègues élus de Paris, qui sont aux affaires depuis sept ans, pourquoi ils ont attendu aussi longtemps avant de se sentir réellement concernés par ce sujet ! Ils ne nous parlent que de financement de logements, sans jamais évoquer les constructions de logements. Or c'est malheureusement bien là que le bât blesse ! Et pourtant, dans ce domaine-là aussi, l'État joue – et jouera – un rôle de partenaire. Mais cela aussi, vous semblez l'oublier !

Vous nous parlez, monsieur le rapporteur, des logements intermédiaires. Allez donc demander à vos amis élus parisiens pourquoi de plus en plus de familles dites, justement, de « classe intermédiaire » quittent la capitale pour des communes limitrophes. Elles ne peuvent plus se loger ! Il aura fallu attendre le début de la seconde mandature du maire de Paris, M. Delanoë, pour l'entendre annoncer qu'un tiers des logements prévus le seraient en faveur des logements intermédiaires ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Vous nous parlez aussi, monsieur le rapporteur, d'améliorer les conditions dans lesquelles le parc privé peut être mobilisé pour les demandeurs prioritaires au sens de la loi DALO. Mais cette disposition existe déjà puisque, je le rappelle, Philippe Goujon et moi-même avons fait voter un amendement qui ouvre cette possibilité aux propriétaires de logements intermédiaires !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Vous nous proposez enfin, monsieur le rapporteur, de renforcer et de protéger l'accession à la propriété des ménages. Mettez-vous donc d'accord entre vous : M. Caresche n'a-t-il pas déclaré que, dans les villes comme Paris, les habitants avaient vocation à être et à rester locataires ? Il y a donc, comme d'habitude, une incohérence entre vos propos et l'action que vous souhaitez mener sur le terrain.

Gardons-nous, mes chers collègues, de présenter une fois encore un catalogue de propositions ou une boîte à idées : construisons plutôt des logements et mettons en oeuvre un plan sur le long terme. Il faut renforcer et pérenniser ce qui existe déjà avant d'empiler, comme dans cette proposition de loi, de nouveaux dispositifs sans avoir évalué ce qui marche. C'est ce que la majorité et le Gouvernement, madame la ministre, s'emploient à faire sans relâche depuis des mois. Soyez donc assurée que nous vous soutenons avec force, et continuerons à le faire parce que cette action va dans le bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il va de soi que l'objectif d'un logement abordable pour tous et adapté à chacun ne peut laisser personne indifférent. Certains ont voulu caricaturer la proposition de loi du groupe socialiste en n'y voyant qu'un inventaire ou un catalogue,…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

…mais c'est faire preuve du plus mauvais esprit sur une sujet qui mérite une réflexion sérieuse.

Je m'étonne, chers collègues de la majorité, de constater que sur un sujet aussi important, votre principale préoccupation est d'éviter le débat et, comme vous l'avez déjà annoncé, la discussion des articles. Certes, Mme la ministre est venue nous faire part de son sentiment, mais ce n'est pas suffisant : vous n'avez tout de même pas l'outrecuidance de croire, madame Boutin, que vous incarnez le débat à vous seule ! Le débat, c'est à la représentation nationale de le mener ! Sur un sujet d'une telle urgence sociale, il aurait donc été opportun de passer à la discussion des articles et j'espère, chers collègues de la majorité, que vous allez vous ressaisir et nous permettre de le faire.

Je crois pour ma part que deux articles méritent plus particulièrement réflexion. Le premier est celui qui a trait au fonds de solidarité pour le logement. Celui-ci est déterminant pour l'accès au logement des personnes en difficulté. Or vous n'êtes pas sans savoir, madame la ministre, que le FSL tel qu'il fonctionne aujourd'hui ne remplit pas sa mission. C'est pourquoi nous vous proposons, dans l'article 6 du présent texte, de le réformer. Comme nos collègues de la majorité ont pu le constater, nous ne préconisons pas de faire financer le dispositif par l'État, mais d'instaurer un partenariat entre celui-ci et les départements, de sorte que le FSL s'applique sur tout le territoire, comme l'APA, l'allocation personnalisée d'autonomie. Nous voulons que les départements, riches ou pauvres, offrent à nos concitoyens les mêmes conditions d'accès au logement, tout en restant bien entendu vigilants sur le fait que l'État ne se désengage pas comme cela a été le cas pour l'APA. Lorsque le Gouvernement de Lionel Jospin a fait voter celle-ci, il était en effet prévu un financement à parts égales entre les départements et l'État ; or aujourd'hui, ce dernier en est à moins de 27 % ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Vos propos sont honteux ! Vous n'avez pas financé l'APA !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Quel exemple mal choisi, en effet, venant des bancs de l'opposition ! Il fallait oser !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Nous voulons donc un FSL financé à « 50-50 », et universel sur tout le territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Ça, c'est la meilleure ! C'est l'hôpital qui se moque de la charité !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Ce ne sont pas vos cris d'orfraie qui nous feront reculer, chers collègues de la majorité, soyez-en sûrs ! Prenez plutôt la peine de nous écouter.

L'article 8 est lui aussi essentiel. Lors de la loi DALO, j'avais soutenu un amendement visant à créer un fonds national de garantie des loyers. Vous nous aviez alors dit, madame la ministre, que l'idée était intéressante. Mais nous ne l'avons malheureusement pas vue progresser ! Vous nous répondez toujours en invoquant la GRL, la garantie des risques locatifs. Mais pour le moment, et bien qu'il y ait urgence, nous n'avons rien vu venir !

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Attendez, nous y travaillons.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

L'article 8 propose donc la création d'un fonds de garantie universel et mutualiste contre les risques locatifs.

Construire des logements, c'est bien, et plus en on construira, mieux ce sera. Mais encore faut-il savoir ce que l'on construit, pour qui et où. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) La mesure relative à la création du fonds de garantie peut être jugée trop ambitieuse ou trop rapide quant à sa mise en oeuvre, mais alors discutons-en ! Vous savez bien que l'on ne peut pas attendre.

En outre, nous ne nous intéressons pas qu'aux problèmes des locataires, mais aussi à ceux des propriétaires. En effet, monsieur le président Ollier, il n'y a pas de locataire sans propriétaire, et réciproquement. C'est bien pour cela qu'avec la création du fonds de garantie, nous proposons de remettre immédiatement sur le marché de nombreux logements vacants. Ils le sont essentiellement parce que les propriétaires craignent de ne pas percevoir leur loyer de la part de locataires qui peuvent parfois être victimes d'accidents de la vie. Il faut donc prendre ces derniers en compte, tout en garantissant au propriétaire que le logement sera remis en état à la fin de la location. Il est possible, je le répète, de mettre des logements vacants à la disposition de ceux qui sont mal ou pas logés.

Ne repoussons donc pas le débat aux calendes grecques, madame la ministre : discutons tout de suite afin que vous nous apportiez des réponses précises sur tous ces points ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Dans ma seule circonscription, d'après l'inventaire que j'ai fait, 300 logements vacants pourraient être remis sur le marché, autrement dit 300 familles relogées dans des conditions de vie décentes, notamment pour l'éducation de leurs enfants. Ne reculons pas, passons à la discussion des articles et prenons des mesures !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Il y va en effet de la dignité des personnes, des familles, des enfants, à laquelle nous sommes tous attachés. Passons à la discussion et prenons des mesures. Assez de paroles, il faut des actes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Giraud

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous venons de vivre des échéances électorales qui ont permis à nos concitoyens d'exprimer leur impatience face à la politique du Gouvernement.

Au cours de nos réunions publiques et de nos rencontres avec eux, nous avons tous entendu des témoignages bouleversants, qui nous montrent que le logement est au coeur de leurs préoccupations. Ici, c'est un jeune ménage qui ne parvient pas à se loger ; là, une personne âgée qui n'arrive pas à payer le plein de sa cuve de fioul ; ailleurs, c'est le maire d'une petite commune qui voit partir des jeunes ménages parce que ceux-ci ne peuvent se loger sur place.

Je ne pense pas que les élus de gauche soient les seuls à avoir entendu ces dizaines de témoignages. Nos collègues de la majorité les ont sans doute entendus aussi, mais peut-être ne les ont-ils pas écoutés, tant leur écoute, face au désarroi de nos concitoyens, peut s'avérer sélective. Or il suffit d'écouter les Français pour savoir que le logement est leur première préoccupation budgétaire.

Face à une telle situation, notre proposition de loi est ambitieuse, généreuse et réaliste. Ambitieuse, car elle appréhende la globalité du problème du logement ; généreuse, car elle augmente l'aide apportée aux ménages les plus modestes en redonnant des clés financières pour le pouvoir d'achet ; réaliste enfin, car elle prévoit de garantir les moyens attribués au logement social, notamment par le biais du livret A. Pour revenir aux facultés auditives de la majorité actuelle, il est manifeste que celle-ci est plus sensible aux chuchotements des bénéficiaires des cadeaux fiscaux de l'été 2007 qu'aux protestations véhémentes des ménages qui peinent à payer leur loyer. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

La flambée de l'immobilier, madame la ministre, dure depuis près de dix ans. Elle touche toutes les catégories de population et tous les territoires. En ce qui concerne les territoires de montagne – j'en suis un élu –, nous sommes nombreux ici à nous inquiéter du problème de la maîtrise du foncier depuis de longues années,…

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Giraud

…que ce soit au sein de l'Association nationale des élus de la montagne, ou du Conseil national de la montagne que votre gouvernement a mis en sommeil, réduisant à néant l'expression et la réflexion des forces vives de la montagne.

À la montagne se conjuguent aux effets de la stagnation du pouvoir d'achat ceux d'une spéculation exacerbée par l'internationalisation du tourisme, de la rareté de l'espace et des enjeux environnementaux. Dans mon département des Hautes-Alpes – pardonnez-moi ce localisme, mais le problème du logement ne se résume pas à Paris, Lyon et Marseille –, le revenu moyen par ménage et par an était en 2004 de 2 000 euros inférieur à la moyenne française. Pour autant, le prix moyen du mètre carré y était supérieur de 200 euros. Bref, les revenus sont plus faibles alors que les loyers sont plus élevés. Depuis, l'écart s'est encore accentué, et les derniers programmes immobiliers dans une ville comme Briançon, que le président de la commission des affaires économiques connaît bien, sont proposés par des investisseurs britanniques, dont j'ai bien noté qu'il ne fallait pas les décourager, à 6 500 euros le mètre carré de plancher – excusez du peu !

Outre les résidents permanents, nous subissons la double peine du foncier rare et cher, et les élus de la montagne connaissent bien le problème du logement des travailleurs du tourisme. Cet effet de ciseau entre spéculation immobilière et faible pouvoir d'achat nous place face à trois enjeux majeurs, qui nécessitent un engagement fort de l'État. Le premier enjeu est social car, comme dans les grandes villes, le manque de logements conduit à l'exclusion. Au mieux, les saisonniers sont logés dans des logements exigus, des habitations insalubres et subissent la cohabitation forcée. Les meilleurs emplacements, souvent situés en adret, c'est-à-dire au soleil, sont réservés à des résidences secondaires dont le prix d'acquisition, élevé, permet aux promoteurs de prospérer. Or ces logements ne sont occupés que deux à trois semaines par an.

De l'autre côté, à l'ubac – c'est-à-dire à l'ombre –, où les logements se vendent moins bien, les travailleurs saisonniers sont placés dans des recoins aveugles pudiquement appelés « studios moniteurs ». On connaît aussi l'habitat en camion usagé, voire en camion frigo dont le chauffage a été inversé ! Au pire, ce sont donc des nuits passées dans un véhicule, avec les conditions que l'on sait en station d'altitude.

Il n'est pas digne de notre pays de laisser perdurer une telle situation, et la proposition de loi comporte des éléments qui permettraient d'y répondre directement. Il en va ainsi de l'article 3. Dans la législation actuelle, le versement de l'aide au logement comporte un mois de carence. Le saisonnier appelé à changer de logement se voit donc injustement pénalisé. La loi actuelle a institué une sanction étrange et typiquement française : la sanction pécuniaire pour mobilité professionnelle ! En proposant de supprimer ce mois de carence, l'article 3 du texte rétablit une certaine justice, et j'invite nos collègues élus des zones touristiques, et notamment de montagne, à le voter unanimement.

En montagne, le chauffage représente lui aussi un poste budgétaire important. Il est souvent nécessaire de chauffer le logement pendant six à dix mois, aussi le montant des charges est-il souvent égal, voire supérieur, à celui du loyer. Or ces dépenses ne bénéficient d'aucune aide au logement, puisque ces aides sont calculées sur le montant des loyers. Il est donc important de supprimer les seuils, comme le prévoit l'article 4.

Les articles 8, 9 et 10, qui intéressent les mécanismes de caution, faciliteraient également l'accès des saisonniers à un logement.

L'enjeu, madame la ministre, est aussi économique, car le fait d'avoir un logement décent fidélise les saisonniers dans les entreprises. Il est également territorial et intéresse directement l'État. Comme les travailleurs ne peuvent vivre sur place, l'espace se segmente et les équilibres territoriaux sont menacés. Les collectivités locales les plus éloignées et les moins aisées sont forcées d'accompagner des investissements structurants sans trouver auprès de l'État les aides auxquelles elles devraient avoir droit. En effet, madame la ministre et chers collègues, l'État ne subventionne plus le logement des saisonniers, laissant ce soin aux seuls départements, régions et communes. Face à cet enjeu territorial, il faut rompre avec le laisser-faire. Depuis 2002, la spéculation foncière rapporte davantage à l'État qu'elle ne lui coûte, mais rien n'a été redistribué, ni aux ménages, ni aux territoires.

La maîtrise du foncier est un enjeu majeur pour la France, et plus encore pour ses zones de montagne. La proposition de loi apporte des solutions concrètes en la matière. C'est pourquoi je demande à tous mes collègues des zones touristiques et de montagne, bien au-delà du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, de la soutenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de nos collègues socialistes vient à point nommé pour alimenter et enrichir notre réflexion sur le logement social. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) En effet, depuis la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain de 2000 et son application à partir de 2002, la majorité actuelle a beaucoup légiféré en matière de logement pour rattraper une trentaine d'années de retard.

Certes, la loi d'orientation pour la ville, présentée en 1990 par Louis Besson, alors secrétaire d'État au logement, faisait pour la première fois apparaître la notion de 20 % de logements sociaux, mais en donnant de ceux-ci une définition si souple que beaucoup de communes, dont la mienne, atteignaient ces fameux 20 % de logements sociaux.

En 1996, sous le gouvernement d'Alain Juppé, la majorité de l'époque, considérant que la loi précédente n'était pas assez incitative, a modifié la définition du logement social, allant plus loin que celle que proposait la loi Besson. Cela a eu pour effet d'accroître le nombre de communes n'atteignant pas le seuil de 20 % de logements sociaux. Mais la nouvelle loi était encore insuffisante puisqu'elle ne prévoyait aucune pénalité en cas de carence. C'est la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain qui, une fois de plus, a modifié la définition du logement social, tout en prévoyant des pénalités pour les communes réticentes à réaliser des logements sociaux.

La succession de ces lois et de toutes celles qui ont suivi démontre que nous n'avons pas su répondre aux besoins exprimés par les Français. Nous avons tous – je dis bien tous – été imprévoyants. Nous avons de surcroît perturbé la production de logements sociaux car on ne change pas la règle du jeu à chaque changement de majorité, sachant qu'une politique de construction de logements se projette sur le long terme.

Il a fallu les cris de l'Abbé Pierre et les tentes des Enfants de Don Quichotte pour nous rappeler qu'un toit pour chaque Français est la condition d'une vie harmonieuse, d'une formation sereine pour les enfants, d'une sécurité pour le lendemain et d'un avenir professionnel stable pour les adultes. Ces piqûres de rappel sont salutaires. Elles doivent être notre vade-mecum quotidien, notre feuille de route permanente.

La proposition de loi que vous nous présentez, mes chers collègues, est une contribution à notre travail à tous. Elle participe d'une nouvelle étape de notre action en matière de logement. Le Premier ministre m'a confié la mission d'approfondir notre réflexion sur l'hébergement d'urgence, l'accès au logement social et l'application de la loi sur le droit au logement opposable, dite loi DALO. Je lui ai remis en urgence, en janvier, mes premières propositions, et il les a faites siennes, ainsi que Mme la ministre du logement et de la ville et M. le Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Je leur ai proposé trois grandes orientations : la première est de ne plus alimenter la rue en « sans domicile fixe », la deuxième de reconquérir la rue pour ceux qui y ont élu domicile, la troisième de se donner les moyens d'augmenter le nombre de logements sociaux pour pouvoir faire face à la mise en oeuvre de la loi DALO d'ici à la fin de l'année. Le Premier ministre a débloqué pour ce faire 250 millions d'euros supplémentaires. À ceux qui estiment que ce n'est pas suffisant, je réponds : dépensons d'abord les 950 millions d'euros votés par le Parlement dans le cadre de la loi de finances pour 2008, auxquels s'ajoutent les 250 millions annoncés par le Premier ministre, soit 1,2 milliard d'euros, avant de demander plus – d'autant que le Premier ministre s'est engagé à abonder les crédits si ceux-ci se révélaient insuffisants d'ici à la fin de l'année.

Cela dit, des lois et des règlements ne suffisent pas à construire des logements. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

C'est l'affaire de tous : des collectivités locales, des bailleurs sociaux, des promoteurs, des associations, en définitive de chaque citoyen. Une volonté politique est indispensable à tous les niveaux. Nous devons absolument convaincre ceux de nos concitoyens qui y sont hostiles qu'il est impératif d'augmenter la production de logements sociaux, et surtout très sociaux (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) et ce dans tous les quartiers. (« Très bien ! » sur les mêmes bancs.) Il n'est pas normal que 30 % des personnes actuellement hébergées dans les centres d'hébergement et de réinsertion sociale soient des travailleurs pauvres qui ne gagnent pas assez pour trouver un logement très social.

Il faut également accroître l'offre d'hébergement et de logements de transition pour tous ceux qui sont aujourd'hui dans la précarité ou dans la rue, et développer les maisons-relais, sorte de pensions de famille qui sont des lieux de vie remarquables pour accueillir les personnes fragiles qui ne peuvent vivre seules et doivent être accompagnées sur le plan social.

Les élus locaux ont une responsabilité primordiale en matière de logement social et chacun d'entre eux doit se sentir concerné. Pour les plus récalcitrants, il faudra probablement aller plus loin, en durcissant les pénalités et en rendant obligatoire la création de 20 % de logements sociaux dans toute nouvelle opération immobilière.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Trop de communes se défaussent sur les voisines au sein de l'intercommunalité ou s'abritent derrière l'opposition de certaines de leurs populations ; trop de bailleurs sociaux privilégient les logements sociaux intermédiaires au prétexte qu'ils sont destinés à des locataires plus solvables ; trop peu de promoteurs prévoient dans tout programme d'au moins dix logements de réaliser au moins deux logements sociaux.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

En effet !

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Enfin, trop de nos concitoyens engagent des recours devant les tribunaux pour s'opposer à de l'habitat social, alors qu'ils en auront besoin un jour ou l'autre pour leur famille, pour les auxiliaires de vie qui prendront soin d'eux ou les personnes qui garderont leurs enfants.

Telles sont les orientations du rapport que je remettrai au Premier ministre et à Mme la ministre du logement d'ici à la fin du mois de juin. Il devrait contribuer à l'élaboration d'un projet de loi que Mme la ministre du logement et de la ville prépare à la demande du Premier ministre.

Le droit pour chacun d'avoir un toit, comme la formation, l'emploi et la santé, doit être un chantier national prioritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur de nombreux bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Bravo !

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Très bonne intervention, même s'il manque une conclusion !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord évoquer deux informations dont j'ai pris connaissance ce matin même. Il s'agit tout d'abord de la comparaison entre le nombre de logements sociaux construits en 2000 et ceux construits en 2007. Je pense que certains font une confusion, même si elle n'est pas volontaire, entre les logements construits en 2000 et les logements financés en 2007, qui ne sont pas encore construits. (« Tout à fait ! » sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Si mes informations sont exactes, nous serons plus près de 50 000 que de 100 000 logements construits en 2007. Il y a donc un abus de langage.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Pas du tout : ils sont financés !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Ils ne sont pas financés, madame la ministre ! Qui plus est, les préfets ont financé des programmes hors sol, alors même que les terrains ne sont pas encore prévus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Par ailleurs, je ne suis pas parisien, mais je crois savoir qu'avant 2001, la capitale avait perdu 150 000 habitants. Il semble qu'elle en ait regagné depuis entre 22 000 et 40 000 et que 35 000 logements sociaux aient été construits depuis 2001. Si l'on compare avec ce qui se faisait auparavant, le bilan serait donc plutôt positif !

Nos concitoyens connaissent de graves difficultés, et celles-ci s'aggravent de jour en jour : pouvoir d'achat érodé, hausses intempestives des produits de première nécessité, dont témoigne une inflation évaluée ce mois-ci à 3,5 % par rapport au mois de mars dernier, hausse de l'énergie, revalorisation insuffisante des salaires, des pensions et des retraites, etc.

À cela s'ajoute un point que mes collègues ont stigmatisé ce matin : la hausse des loyers et des charges consécutive notamment à un doublement en dix ans du coût de la construction. Car la crise du logement s'est aggravée au cours des dernières années. Elle ne touche plus uniquement les plus modestes, ni les grandes métropoles, comme je l'ai entendu tout à l'heure. Dans l'agglomération dont je suis vice-président, on enregistre 12 000 demandes de logements sociaux non satisfaites. Et cela se passe en Anjou, et non dans la région PACA, monsieur Piron !

Le constat est alarmant, tout le monde le reconnaît, et la politique menée depuis 2002, loin d'être à la hauteur des enjeux, a contribué à aggraver la situation. Et ce n'est pas votre arrivée aux responsabilités en 2007, madame la ministre, qui a permis de renverser la tendance, en dépit de l'annonce d'un projet de loi – qui ne sera d'ailleurs pas présenté au Parlement en avril puisque je viens d'apprendre qu'un rapport vous serait remis en juin… Quand ce projet de loi sera-t-il présenté au Parlement ?

Au-delà de l'illusoire et hypothétique droit au logement opposable instauré en 2007, dont vous ne cessez de vous féliciter alors qu'il est actuellement vide de sens, nous examinons aujourd'hui des mesures concrètes à destination des locataires, qui nous permettraient d'aller vers un droit au logement effectif. Il faut sortir de l'impasse dans laquelle vous nous conduisez en réduisant votre politique du logement à la seule accession à la propriété. Vous vous bornez à appeler de vos voeux une France de propriétaires, négligeant la situation des locataires.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

C'est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Des mesures concrètes s'imposent pour soulager ceux qui peinent à faire face à des dépenses de plus en plus lourdes.

Le logement est le premier poste de dépense des ménages, et donc la première raison de l'érosion de leur pouvoir d'achat. Dans ce contexte très difficile, les locataires doivent faire face à une augmentation sans précédent des loyers – plus 28,8 % en six ans – mais aussi à l'explosion des charges, qui ont augmenté de 44 % entre 1995 et 2005 – 40 % pour l'énergie et l'eau sur la même période. Il n'est pas rare désormais que la part du loyer atteigne 40 %, 50 %, voire dans certains cas 70 % des revenus d'un ménage !

Depuis 2002, votre majorité a refusé toute réévaluation substantielle des aides personnalisées au logement, n'acceptant finalement, sous la pression des socialistes, que l'inscription dans la loi de leur revalorisation annuelle et leur indexation sur l'indice de référence des loyers. Or, ces aides jouent un rôle essentiel en matière de prévention des exclusions et de « solvabilisation » des locataires puisqu'elles bénéficient à plus de six millions d'allocataires – dont les trois quarts sont des ménages aux revenus égaux ou inférieurs au SMIC.

Le Gouvernement aurait dû compenser la hausse débridée des loyers en revalorisant substantiellement les aides au logement. A cet égard, la stagnation des crédits dédiés dans la dernière loi de finances est incompréhensible : ils devraient en effet augmenter puisqu'on estime que sur les 300 000 nouveaux ménages qui arrivent chaque année sur le marché du logement, la moitié peuvent prétendre à des aides au logement...

Alors que de plus en plus de ménages sont en difficulté, vous refusez d'élargir les critères d'attribution des aides – vous en avez même durci les conditions d'accès. N'est-ce pas paradoxal ? La Confédération nationale du logement estime que les aides personnalisées au logement devraient être augmentées de 20 % compte tenu du retard accumulé depuis plusieurs années. Puisque nous partageons tous ce constat, comme j'ai cru le comprendre ce matin, je ne comprends pas que nous n'arrivions pas à la même conclusion.

La proposition que nous avions faite à l'époque de mettre en place un bouclier logement afin de solvabiliser nos concitoyens les plus fragiles prend dans ce contexte une acuité particulière.

Il faut prendre acte de cette réalité économique : c'est pourquoi nous vous demandons, en attendant cette grande réforme que nous appelons tous de nos voeux, d'augmenter le montant des aides personnalisées au logement. Dans ce texte, nous proposons de revaloriser les APL en proportion de la diminution du pouvoir d'achat subie par les allocataires entre 2002 et 2007. Nous proposons aussi, afin de rétablir le pouvoir « solvabilisateur » de ces aides, de supprimer le plancher de 15 euros en deçà duquel l'APL n'est pas versée, ainsi que le délai d'un mois de carence.

Vous nous avez objecté que cela coûterait très cher en logistique. Nous vous proposons de verser ces aides une fois par trimestre. Cette APL « revisitée » aurait un effet immédiat et direct sur le budget de nos concitoyens et permettrait d'éviter ce que nous constatons depuis le 20 mars dernier, une accélération – telle que je n'en avais jamais connue – des expulsions.

« Les caisses sont vides », a déclaré le Président de la République… Ce qu'il n'a pas précisé, c'est que c'est lui qui les a vidées, en déversant sur les plus nantis 15 milliards (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui auraient pu servir à augmenter le montant de l'APL. Le groupe SRC prend donc l'initiative d'une démarche volontariste, avec cette proposition de loi qui vise à redonner du pouvoir d'achat aux ménages les plus modestes et à mieux protéger les locataires, tout en soutenant la construction de logements sociaux afin de lutter contre le mal logement. L'adoption de notre proposition de loi constituerait une véritable avancée face à la situation indigne que nous connaissons aujourd'hui, à savoir le nombre croissant de personnes mal logées – y compris des personnes travaillant en CDI – et d'expulsions.

Chers collègues, puisque nous sommes d'accord sur le constat, mettons en place, ensemble, les mesures d'urgence qu'attendent nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Carré

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le logement est aujourd'hui au coeur des préoccupations de nos concitoyens. Le logement est cher. Se loger pèse sur le budget des ménages, déjà malmené par la hausse du coût de l'essence, du chauffage et de l'alimentation. Les Français le disent, et nous les entendons : le logement est en crise. Mais il y a comme une habileté à présenter dans l'urgence un certain nombre de mesures, en laissant penser que rien n'a été fait ces dernières années.

Depuis le vote de la loi SRU, en décembre 2000, l'ensemble de la politique du logement a connu trois étapes majeures : la création de l'ANRU en 2003, la délégation des aides à la pierre, la loi ENL et le plan de cohésion sociale, puis, plus récemment, la loi DALO. En quelques années, les financements les plus nécessaires, ceux du renouvellement urbain, ont été sanctuarisés à une hauteur inégalée depuis quarante ans et abondés par l'ensemble des partenaires du logement. La politique de l'habitat a été déléguée au plus près du terrain, et le droit opposable au logement, de nature constitutionnelle, consacré par la loi et mis en oeuvre dès le 1er janvier de cette année.

Mis en perspective, ces textes se traduisent par une véritable révolution qui n'est sans doute pas pour rien dans les chiffres rappelés tout à l'heure : une hausse de 40 % des mises en chantier de 2000 à 2007 et, surtout, un quasi-doublement des permis de construire attribués aux bailleurs sociaux au cours de ces cinq dernières années avec – je le sais pour avoir été régulièrement sur le terrain –, une réalité de la construction à travers les financements, qui n'a pas toujours été de mise dans les années 1990 ou 2000. Ce sont près de 1 million de logements qui ont été construits ou livrés depuis 2006 – situation que nous n'avions pas connue depuis près de trente ans ! L'arrivée de cette masse de nouveaux logements se traduit déjà, sur l'ensemble du territoire, par une baisse des prix, qu'il s'agisse des loyers ou des prix à l'achat. C'est donc une excellente nouvelle pour les ménages. Cette politique, bien que très décriée tout à l'heure, est en train de porter ses fruits.

Mais, venue des États-Unis, la crise immobilière, qui a déjà touché l'Espagne, la Grande-Bretagne et l'Allemagne, frappera bientôt la France où elle risque d'aggraver la crise du logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Carré

Même si l'on a beaucoup critiqué l'aspect spéculatif de certains programmes, le ralentissement de l'immobilier veut dire moins de mises en chantier et moins de libération du foncier. À terme, l'offre nouvelle s'asséchera, comme dans les années quatre-vingt-dix, début de la dernière crise que nous avons connue en France – et que les dirigeants de l'époque n'avait pas su anticiper – avec pour conséquence une forte baisse de la construction entre 1997 et 2002. Ces cycles immobiliers sont dangereux en termes de politique de l'habitat où maîtriser le temps, c'est-à-dire le rythme de la construction, est au moins aussi important que la maîtrise de l'espace.

Dans ce contexte, l'effort de construction de logements sociaux pourrait être compromis. Nous devons donc anticiper cette situation, et nous pouvons le faire. À la différence des années quatre-vingt-dix, nous avons aujourd'hui un véritable réseau d'acteurs territoriaux, intercommunalités et départements, qui sont les artisans de leur propre politique de l'habitat. Ils l'ont contractualisée avec l'État, en accord avec les orientations arrêtées dans les différentes lois déjà citées. Nous devons nous appuyer sur ces collectivités pour qu'elles pilotent au plus près du terrain les conséquences d'une crise de l'immobilier. Il faut éviter toute remise en cause du redressement de la construction qui est en cours. Nous devons tout faire pour que la crise de l'immobilier qui se profile ne se traduise pas par une future crise du logement dans cinq ou six ans. Parce que nous connaissons ces mécanismes, aujourd'hui, nous avons les moyens d'éviter le pire. Pour cela, nous devons étudier sereinement, mais rapidement, deux mesures qui parachèveront le processus législatif mis en oeuvre par nos prédécesseurs et qui me semblent aujourd'hui plus urgentes que la quarantaine de dispositions proposées dans cette proposition de loi.

Tout d'abord, nous devons trancher entre le retour des aides à la pierre dans le giron de l'État et le transfert, rapide, de cette compétence aux collectivités territoriales. Notre système actuel de décision, à mi-chemin entre ces deux positions, ne résistera pas à la crise immobilière qui se profile et qui affectera le développement de la construction et du logement sur l'ensemble du territoire, quelle que soit la bonne volonté des acteurs. La connaissance, l'expertise du territoire, le contact avec les habitants – dont il a été rappelé qu'il est fondamental pour l'émergence de nouveaux programmes –, tous ces éléments militent pour que la compétence soit transférée aux collectivités. En quelques années, des villes comme Nantes, Bordeaux, Marseille, ou encore Rennes, ont montré leur totale efficacité dans le domaine de la mise en oeuvre de politiques locales de l'habitat.

Si l'on ne veut pas que la future crise de l'immobilier dégénère en une nouvelle crise du logement, nous devons donner le pouvoir d'agir à ceux qui seront responsables de cette politique et qui doivent donc être en mesure de la mettre en oeuvre totalement. Puisqu'elles le sont dans les faits, donnons aux collectivités le statut de véritables autorités organisatrices de l'habitat, dotées de pouvoirs et de moyens ad hoc, notamment financiers.

Le second volet vise à donner des moyens aux bailleurs sociaux pour être beaucoup plus réactifs dans la gestion et le développement de leur patrimoine. Par exemple, en contractualisant plus facilement et plus rapidement qu'aujourd'hui des logements construits par des opérateurs privés. La vente en état futur d'achèvement et les partenariats public-privé sont des pistes que les bailleurs sociaux devraient plus facilement emprunter. Actuellement, il faut entre quatre et cinq ans entre la décision de construction et l'installation des premiers locataires. La VEFA ou les PPP permettent de diviser par deux cette durée. Leur efficacité voudrait que nous les utilisions beaucoup plus facilement. Ces programmes, généralement intégrés à des opérations plus importantes de logement en accession, participent à la mixité sociale, que nous appelons tous de nos voeux dans la construction des villes. Nous devons aider les organismes à accroître leur réactivité. Il faut qu'ils soient prêts à saisir des opportunités sur le marché de l'immobilier quand celui-ci sera redevenu accessible pour le plus grand bénéfice de leurs futurs locataires.

Ces deux axes – confortement des collectivités comme responsables de la mise en oeuvre de la politique de l'habitat et libération de la réglementation des organismes sociaux – peuvent sembler anecdotiques, voire technocratiques face à la question du logement. Mais la question du logement, ce n'est pas qu'une urgence : il faut aussi savoir pourquoi, depuis longtemps, nous sommes l'un des grands pays développés qui a à la fois le plus de logements sociaux et le plus fort taux de mal logés. Pourquoi est-il si difficile, dans notre pays, et plus qu'ailleurs en Europe, d'avoir un parcours résidentiel digne de ce nom ? Nous ne pourrons pas répondre aujourd'hui à cette question, que ce soit par les deux mesures que je viens d'évoquer ou par les quarante qui figurent dans votre projet, monsieur le rapporteur. Simplement, la politique du logement a besoin de temps et de stabilité juridique. Ces dernières années, des décisions importantes ont été prises, qui portent déjà leurs fruits, comme je l'ai démontré tout à l'heure.

Si l'État sait avoir confiance en eux, tous les acteurs du logement se mobiliseront d'eux-mêmes. Des pilotes de terrain, forts et confirmés, et des acteurs du logement, notamment les bailleurs sociaux, réactifs et aguerris, sont les meilleurs garants pour passer des temps difficiles. Ceux-ci se profilent à travers une crise immobilière qui semble inéluctable. Sachons transformer ces menaces en autant de chances pour loger nos concitoyens. Nous en avons les moyens : sachons les mettre en oeuvre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La discussion générale est close.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Au terme de cette discussion et au moment où l'Assemblée va décider si nous passons à l'examen des articles, je souhaite revenir sur les propos tenus par Mme la ministre et certains de nos collègues.

Madame la ministre, vous m'avez accusé de lancer des anathèmes. Vous n'êtes pas, depuis sept ans, la première ministre du logement à me faire ce reproche ! C'est injuste, car peu après, vous avez, ainsi que la grande majorité de nos collègues, évoqué la même réalité que moi : nous avons tous fait le même constat et nous pensons tous qu'il était nécessaire de le faire. Partager un constat, ce n'est pas lancer un anathème…

On ne permettra également de corriger les propos de notre collègue Jean-François Lamour : je n'ai jamais dit que rien n'avait été fait. Je n'en ai pas eu le temps, mais j'aurais aussi pu évoquer certain ministre au masculin, monsieur Daubresse ! Le vrai problème, je l'ai souligné depuis le début de notre discussion, c'est que les trois derniers gouvernements ont eu une stratégie libérale. En disant cela, je ne porte pas de jugement de valeur. Je parle des instruments que le Gouvernement se donne pour agir. Le problème de fond est là : c'est parce qu'il y a une stratégie éminemment libérale qu'elle se traduit in fine par un échec.

Pourquoi avons-nous présenté cette proposition de loi ? Depuis sept ans, dans cet hémicycle, nous participons très sérieusement à tous les débats sur le logement, nous y avons apporté nombre d'arguments et déposé des amendements raisonnables (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) dont quelques-uns ont d'ailleurs été retenus, ce dont je me réjouis. Ensuite, faut-il oublier que les élus de la nation sont aussi les élus du peuple, c'est-à-dire (« Au vote ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Madame la ministre, vous avez dit à plusieurs reprises en commission que vous ne déposeriez pas de projet de loi. C'est pourquoi nous avons présenté cette proposition, qui n'est ni improvisée ni tactique, mais qui reprend l'ensemble des mesures que nous souhaiterions voir appliquer si nous étions au Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, avant de répondre à chacun des orateurs, permettez-moi de tous vous remercier pour la qualité du débat de ce matin à l'occasion du dépôt de cette proposition de loi. Ce débat était nécessaire et a été mené de façon responsable. Je constate que nous sommes tous parvenus à la même conclusion : il existe une crise du logement dans notre pays (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) et il convient d'y répondre.

Monsieur Goldberg, vous avez rappelé les différentes propositions concernant la DSU, la connaissance de la typologie des logements, le droit de préemption urbain et la récompense aux maires bâtisseurs, mais aussi l'application de l'article 55. Comme vous le savez, monsieur le député, ces différents points ont déjà fait l'objet d'une réponse dans mon discours et sont actuellement examinés.

En ce qui concerne les mesures sur le pacte social, un nouveau pacte est proposé, fondé sur une convention d'utilité sociale : en abaissant le plancher, on reviendrait à la situation antérieure aux 35 heures et à la revalorisation mécanique du SMIC, dont nul n'ignore les conséquences désastreuses.

Monsieur Gosnat, vous avez critiqué le village de l'espoir. Or c'est tout à fait regrettable. En effet, ce concept doit être développé puisqu'il permet aux personnes complètement désocialisées, et qui ne peuvent pas rentrer dans un logement dit ordinaire, de bénéficier d'une espèce de sas de resocialisation. Les villages de l'espoir ne sont pas des dépotoirs, ce sont des lieux où l'on s'adapte à la réalité des personnes les plus désocialisées.

Vous avez également émis des craintes sur le livret A et le 1 %. Je veille à ce que les intérêts du logement soient préservés. S'agissant de la revalorisation des aides au logement de 20 % et le gel des loyers, cette proposition, qui peut se comprendre émanant d'un membre de l'opposition, est tout à fait irréaliste. Dans le cadre de la discussion sur le projet de loi relatif au logement que je vais prochainement déposer, nous trouverons, j'en suis convaincue, des points de convergence. Mais sachez d'ores et déjà que je ne pourrai pas reprendre votre proposition, par trop irréaliste.

Quant au logement des étudiants, je n'y ai pas fait allusion dans mon intervention car la présente proposition de loi ne comportait pas de mesures à cet égard. Il est évident que ce sujet fait l'objet de nos réflexions. Je tiens à saluer le travail du député Anciaux qui se traduira par des propositions concrètes de Mme Pécresse et de moi-même.

Monsieur Folliot, vous avez développé deux idées fortes. La première, évoquée par nombre d'orateurs, porte sur la différence entre les territoires à prendre en compte. En effet, la situation n'est pas la même sur l'ensemble du pays. La seconde concerne la garantie du risque locatif qu'il faudrait renforcer et généraliser. C'est une demande forte du Président de la République. Pour ma part, je suis convaincue de l'efficacité d'une telle disposition. Sa généralisation en France diminuera, voire asséchera le phénomène des expulsions – l'expulsion reste un échec pour tout le monde. Le projet de loi à venir prendra en compte vos préoccupations, celle notamment du soutien aux maires bâtisseurs. C'est la volonté du Gouvernement avec la convention de mixité sociale arrêtée lors du dernier CIDOL.

S'agissant de la cession de terrains, j'aurais apprécié, mesdames et messieurs, que vous saluiez l'action du Gouvernement en la matière : il a fait ce qu'on attendait depuis des années.

Monsieur Piron, vous avez une connaissance très fine des enjeux. Elle s'appuie sur le travail que vous accomplissez depuis longtemps avec les élus, les associations et les professionnels de l'immobilier. Vous avez fort bien analysé les différences entre les territoires, avec les tensions particulières que l'on connaît en Île-de-France, en PACA, en Rhône-Alpes et dans le Nord-Pas-de-Calais. Pour répondre à cette situation, il faut un partenariat local avec les collectivités par des délégations pour des politiques territorialisées.

J'ai entendu vos interrogations sur le « Pass foncier ». Je ne désespère pas de vous convaincre de son efficacité et de sa nécessité.

Monsieur Cacheux, vous aviez rédigé un excellent rapport qui montrait bien qu'on construisait trop peu de logements sociaux lorsque M. Jospin était au pouvoir. Ce document avait été particulièrement remarqué. Eh bien, c'est l'actuelle majorité qui a su passer du constat aux actes en développant fortement le logement social sur la base de la première loi de programmation dans le secteur du logement.

Mesdames et messieurs les députés, le problème du logement, sur lequel nous avons un constat partagé, nécessite du temps entre le moment du constat et celui de la réalisation : l'actuelle majorité a relevé le défi.

Madame Andrieux, vous avez souligné l'importance des politiques locales en vous appuyant sur un large partenariat. Vous avez rejoint en cela l'analyse de M. Piron. Le renforcement des politiques locales, c'est le fruit de la politique de la majorité, avec notamment les délégations d'aide à la pierre, qui couvrent aujourd'hui plus de 50 % du territoire.

Monsieur Lamour, je vous remercie du rappel précis de ce que le Gouvernement a fait. Je salue votre connaissance du dossier et le soutien que vous avez apporté au Gouvernement avec l'amendement que vous avez cosigné avec M. Goujon. Grâce à cette mesure, nous pouvons apporter des solutions adaptées permettant aux plus désocialisés d'être logés.

Monsieur Néri, vous avez évoqué le fonds de solidarité pour le logement s'agissant de la garantie des risques locatifs. Ce sujet est essentiel, j'en suis convaincue. Vous avez souligné l'importance des relations entre locataires et propriétaires. À cet égard, il faut cesser d'opposer les locataires aux propriétaires, le public au privé. La chaîne du logement est une chaîne de solidarité. J'ai coutume de comparer la compétence du logement à un Meccano dans lequel, dès que l'on touche une molette, c'est l'ensemble du système qui peut s'écrouler. Nous sommes tous solidaires dans cette affaire. Je vous remercie d'avoir souligné le lien qui unit les propriétaires et les locataires.

La GRL a été mise en place en 2007. Il faut améliorer son fonctionnement et l'étendre.

Monsieur Giraud, je vous sais gré d'avoir évoqué le logement en zone de montagne, qui n'était pas explicitement abordé dans la proposition de loi. Le sujet est grave et difficile à gérer. Il faut que nous trouvions ensemble des solutions. Je m'attacherai dans le projet de loi que je présenterai à prévoir des mesures particulières pour la montagne qui connaît de réelles difficultés en la matière.

Monsieur Pinte, vous avez, comme à votre habitude, insisté sur la pertinence des mesures visant les plus fragiles. Vous avez mis en évidence les actions engagées par le Gouvernement pour prendre en charge les plus fragilisés de nos compatriotes, à partir de l'excellent travail que vous menez à la demande du Premier ministre et de moi-même, et de l'application stricte de l'article 55 de la loi SRU. Par votre engagement politique, vous souhaitez combattre les égoïsmes.

Je profite de l'occasion pour souligner que le problème du logement touche l'ensemble des acteurs mais également chaque citoyen. Je dénonce avec force les abus de recours formés par certaines associations. Trop souvent, en effet, dès qu'un élu présente un projet immobilier, des associations de défense se constituent pour en empêcher la réalisation.

Monsieur Goua, j'ai cru que vous vouliez honorer la tradition bien française du poisson d'avril, tant votre intervention était décalée par rapport à la réalité ! Je vous confirme que les chiffres que j'ai cités sont comparables puisqu'il s'agissait dans les deux cas, pour 2000 et aujourd'hui, des mises en chantier. Je reste à votre disposition pour en parler plus avant.

Monsieur Carré, vous avez excellemment dépeint la crise immobilière, avec exigence et sans particulière gentillesse. Je tiens à vous en remercier.

Cette discussion globale était nécessaire, monsieur Le Bouillonnec. Je remercie la gauche d'avoir permis ce débat. Je reste cependant convaincue qu'il faut proposer un texte de loi cohérent, qui montrera une véritable mobilisation pour le logement. C'est la raison pour laquelle je confirme que je ne souhaite pas que nous passions à l'examen des articles de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Sur le vote sur le passage à la discussion des articles, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Michel Piron.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, que le sujet du logement soit important, et même primordial, tous ici en conviennent. Qu'il mérite discussion, nous n'en doutons pas et nous ne cessons d'en débattre, semaine après semaine, dans les instances nationales et locales. Cela étant, qu'importe-t-il de faire aujourd'hui ? D'improviser de nouveaux textes, après ceux, nombreux, qui ont déjà été votés, ENL, cohésion sociale, DALO, ANRU ? Ou de construire ? Car c'est bien de construction qu'il s'agit...

Certes, il y aura lieu d'améliorer, ici ou là, quelques règles et notamment celles concernant l'offre foncière, la garantie des risques locatifs, les économies d'énergie. Mais ces améliorations font actuellement l'objet d'études et d'évaluation, y compris dans le cadre du Grenelle de l'environnement. Pour l'heure, parce que nous n'entendons pas créer des charges nouvelles et non chiffrées pour notre pays, qui n'en a vraiment pas besoin, parce qu'une politique du logement doit s'inscrire – peut-être plus que d'autres – dans le temps, il nous semble que ce n'est ni le lieu ni le temps d'examiner la proposition de loi qui nous est soumise aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes ici pour débattre d'une question importante pour les personnes et les familles françaises à la recherche d'un logement décent et abordable. Il y a urgence, et cette urgence, au moins dans les discours, est reconnue par tous, même par vous, madame la ministre. Urgence pour répondre aux sans-logis, à ceux qui sont mal logés. Urgence devant le coût de l'immobilier qui repousse les couches populaire et moyenne sans cesse plus loin des villes, les obligeant à des déplacements coûteux. Urgence car le coût du logement pèse de plus en plus lourdement sur les budgets des ménages.

Face à cette urgence, il y a les socialistes qui, dans le droit fil des lois Quillot, Mermaz, Besson et SRU, proposent des mesures claires et efficaces pour répondre aux nouveaux enjeux du logement marqués par l'enchérissement diabolique de l'immobilier tant à l'achat qu'à la location. Désormais, en effet, nombre de ménages consacrent jusqu'à 50 % de leurs ressources au logement. Est-ce tolérable ? Nous répondons non !

Face à cette urgence, nous avons fait des propositions pour limiter la hausse des loyers à la relocation, pour revaloriser les aides au logement et ainsi préserver le pouvoir d'achat des ménages, pour aider les accédants à la propriété, pour reformer le FSL, pour couvrir le risque locatif, pour majorer le prêt à taux zéro, pour consolider le financement du logement social en relevant le plafond du livret A, pour soutenir la construction du logement social en pénalisant les communes qui ne respectent pas la loi des 20 % de logements sociaux, en permettant une action publique de substitution pour forcer la construction des logements dans ces communes. en partageant la plus- value foncière liée au caractère constructible ou pas d'un terrain.

Bref, d'un côté, il y a les socialistes qui sont prêts au débat, prêts à voter et à agir ; de l'autre, il n'y a que palabres. Oui, il y a urgence mais, pour vous, c'est l'urgence d'attendre.

Pourtant, qui décide de l'ordre du jour du Parlement, si ce n'est vous ? Qui bénéficie de tous les services compétents de l'administration, si ce n'est vous ? Qui a donc tous les moyens de traduire depuis des mois l'urgence en priorité ? Vous ! Malgré tout cela, ce sont les socialistes qui font des propositions concrètes. Vous avez tous les moyens d'agir et vous décidez d'attendre. Pis, pour occuper le temps qui passe, vous ne cessez de faire état de statistiques incomplètes pour accuser les autres de votre propre inaction.

En 2000, madame la ministre, 300 000 logements ont effectivement été construits – 35 802 logements sociaux. En 2006, nous en étions à 400 000 logements avec 37 945 logements sociaux, soit 2 143 de plus, et il vous a fallu sept ans pour les construire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Pis que cela, notre collègue Étienne Pinte a, à juste raison, souligné que les collectivités territoriales participaient au financement du logement social. Permettez-moi de vous rappeler que l'agglomération de Rennes consacre plus de 40 millions d'euros à l'accession à la propriété et au logement et 10 millions d'euros au foncier, tandis que le Conseil général d'Ille-et-Vilaine consacre plus de 11 millions d'euros au logement social. Dans le même temps, l'État ne consacre dans ce département que 5 millions d'euros à la construction de logements sociaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Pour gagner du temps, vous lancez des informations lapidaires laissant croire que ce sont les familles aisées qui occupent les logements HLM qui seraient la cause des listes d'attente. Ce discours, nous l'avons déjà entendu à propos du chômage, comme si les chômeurs qui abusaient du système et refusaient un travail étaient les responsables du chômage ; nous l'avons également entendu à propos des allocataires du RMI qui frauderaient et seraient responsables de l'accroissement du nombre de RMIstes. Aujourd'hui donc, ce seraient des familles qui occuperaient indûment les logements HLM qui seraient responsables de la pénurie de logements abordables. Ces accusations sont intolérables !

Madame la ministre, il y a urgence – une urgence que les accusations que vous portez ne gomment pas ! Mes chers collègues, respectons le Parlement ; respectons l'opposition ; respectons le travail des députés qui consiste à proposer, à discuter et à débattre. Je vous invite tous à voter le passage à l'examen des articles de la proposition de loi que notre collègue Jean-Yves Le Bouillonnec nous a excellemment présentée. Je le remercie pour le travail de cohérence qu'il a effectué au sein de notre groupe. Mesdames et messieurs les députés, faites simplement votre travail : votez, amendez, approuvez ou rejetez avec humilité, ferveur et disponibilité ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Votez la poursuite de l'examen de cette excellente proposition de loi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

La question du logement touche au quotidien de nos concitoyens. La présence en nombre des députés ce matin témoigne de l'importance que nous y attachons, sur quelque banc que nous siégions. Madame la ministre, vous avez répondu aux orateurs et apporté des précisions utiles pour comprendre le problème et dessiner les perspectives qui s'ouvrent.

Nous devons être cohérents. Depuis une vingtaine d'années, nous votons tous les ans un nouveau texte sur le logement. C'est utile, parfois indispensable, mais cela peut aussi créer un empilement de textes législatifs – pas toujours préparés comme ils devraient l'être –, qui aboutit à des contradictions dommageables pour la lisibilité de la politique du logement.

Nos collègues socialistes parlent d'urgence. Certes, mais l'urgence commande…

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. De ne rien faire !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

…de retravailler cette proposition de loi, véritable patchwork de propositions – dont certaines sont intéressantes et constructives mais d'autres plus contestables – pour mieux les préparer et les rendre compatibles avec les orientations que souhaite privilégier le Gouvernement.

Ce dont nous avons besoin avant tout, c'est d'un approfondissement de la politique du logement menée depuis plusieurs années pour la rendre plus efficace, plus lisible et plus cohérente. Dans ces conditions, le groupe Nouveau Centre ne peut s'associer à cette proposition de loi, et nous ne jugeons guère utile pour le moment de passer à l'examen de ses articles. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Madame la ministre, les députés Verts soutiennent le texte de nos collègues socialistes, brillamment présenté par M. Le Bouillonnec. Sur la forme, c'est la moindre des choses que l'Assemblée nationale débatte et vote des décisions sur le logement. Il s'agit d'une question à laquelle nous sommes confrontés en permanence sur le terrain – ce fut notamment le cas au cours de la récente campagne électorale. Les Français de tous bords nous attendent sur ce sujet, surtout depuis le désaveu que la droite a subi aux élections municipales et cantonales. La politique du Gouvernement a été globalement condamnée, mais particulièrement sur cette question du logement où les résultats sont nuls.

Mesdames et messieurs les députés de la majorité, tirez donc les leçons de cette campagne électorale et de l'échec qui s'en est suivi : n'abdiquez plus votre capacité à faire passer les bonnes mesures que nous vous proposons et sur lesquelles majorité et opposition pourraient travailler ensemble. Ne vous faites plus hara-kiri, voyez où cela vous mène dans les urnes ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Le logement est une question qui relève de l'urgence, comme l'ont dit avant moi d'autres collègues. Or, l'absence de volonté du Gouvernement à agir en faveur du logement social se fait douloureusement sentir sur le terrain. Nous recevons tous, chaque semaine dans nos permanences, des personnes à la recherche d'un logement et qui n'en peuvent plus d'attendre – les Français nous l'on encore répété pendant la campagne des municipales. L'absence de mesures d'ampleur, concrètes, sérieuses et durables en faveur du logement abordable pour les classes moyennes empêchent celles-ci d'accéder à la propriété.

Par ailleurs, débat après débat, qu'il s'agisse du débat budgétaire ou de celui sur le TEPA, nos propositions en faveur de l'amélioration qualitative des logements ont chaque fois été refusées – je pense notamment à la performance énergétique des logements neufs ou existants. Cela nous fait perdre un temps précieux, non seulement dans la bataille que nous devrions tous mener contre l'effet de serre, mais aussi, plus concrètement, dans la conquête de nouvelles marges de manoeuvre pour accroître le pouvoir d'achat des Français. Car ce qui obère aujourd'hui le pouvoir d'achat de nos concitoyens,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…c'est bien la facture logement et la facture chauffage.

Pour toutes ces raisons, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera pour l'examen des articles de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La commission n'ayant pas présenté de conclusions, l'Assemblée, conformément à l'article 94, alinéa 3, du règlement, est appelée à statuer sur le passage à la discussion des articles du texte initial de la proposition de loi.

Conformément aux dispositions du même article du Règlement, si l'Assemblée vote contre le passage à la discussion des articles, la proposition de loi ne sera pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé.

Je mets aux voix le passage à la discussion des articles de la proposition de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 432

Nombre de suffrages exprimés 432

Majorité absolue 217

Pour 187

Contre 245

L'Assemblée ayant décidé de ne pas passer à la discussion des articles, la proposition de loi n'est pas adoptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Déclaration du Gouvernement sur la situation en Afghanistan et débat sur cette déclaration ;

Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, relatif aux organismes génétiquement modifiés.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures vingt-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma