La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à M. Michel Liebgott, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Le nombre des demandeurs d'emploi a encore progressé ces deux derniers mois. Toutes catégories confondues, ce sont 28 300 chômeurs de plus qui ont été recensés en septembre.
Au total, notre pays compte 4 millions de chômeurs. Contrairement à ce que vous prétendez, nous sommes moins que jamais sortis de la crise. La comparaison avec notre principal partenaire, l'Allemagne, est édifiante. Tandis que le chômage dépasse en France 10 % de la population active, il baisse en Allemagne, pour se rapprocher de 6,5 %.
Derrière ces chiffres, se cache une autre réalité, encore plus préoccupante : c'est dans la catégorie des seniors que l'augmentation est la plus forte, puisqu'elle atteint 16,6 % en un an, alors que, par la réforme des retraites que vous venez d'imposer au pays, vous repoussez à soixante-sept ans l'âge auquel nombre d'entre eux pourront prétendre à une retraite à taux plein.
Or, monsieur le ministre, vous le savez, d'ores et déjà, 40 % des personnes qui liquident leur retraite ne sont plus en activité. Ce sera donc encore pire demain. D'autant que vous vous apprêtez à supprimer, au 1er janvier 2011, donc très bientôt, l'allocation équivalent retraite…
Plusieurs députés du groupe SRC. C'est scandaleux !
…qui permettait aux bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique de faire valoir maintenant leurs droits à la retraite avant soixante-deux ans.
Alors que nous battons déjà des records de taux de chômage pour les moins de vingt-cinq ans en Europe – nous n'en sommes pas fiers –, vous aggravez, par ces deux mesures, la situation de ceux qui sont à l'autre bout de la vie active. Ajoutez à cela la suppression du plan de relance dans le budget 2011, et vous avez tous les ingrédients du maintien d'un taux de chômage élevé.
Monsieur le ministre, ne croyez-vous pas qu'il est temps de changer de politique, pas seulement de gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Monsieur le député, cela fait maintenant trente ans que notre pays, année après année, a fait le choix de sacrifier l'emploi des seniors ; nous avons tous une part de responsabilité dans les choix qui ont été faits.
Depuis trois ans, avec Christine Lagarde et Éric Woerth, nous avons tenté d'inverser la tendance et de remettre l'emploi des seniors au coeur des préoccupations, en développant d'abord des dispositifs permettant d'aménager les fins de carrière, en essayant de mettre fin aux préretraites qui ont aussi été catastrophiques pour l'emploi des seniors,…
…en essayant de faciliter le développement des outils qui permettent de transmettre le savoir-faire aux jeunes – je pense notamment au tutorat.
Dans le projet de loi sur les retraites, Éric Woerth a d'ailleurs veillé à ce qu'il y ait de nouveaux outils permettant de faciliter l'embauche des seniors : je pense notamment au dispositif zéro charge qui devrait s'avérer très précieux pour l'embauche de personnes de plus de cinquante-cinq ans.
Les résultats commencent à arriver en matière d'emploi des seniors. Je vais les rappeler afin que tout le monde en prenne conscience. Contrairement à ce que vous avez dit, le taux de chômage des seniors, c'est-à-dire des plus de cinquante ans, en France, est de 6,1 %. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Il a commencé à baisser, puisque, le trimestre dernier, il s'élevait à 6,6 %.
J'ajoute que notre pays était la lanterne rouge en termes de taux d'emploi des seniors en Europe il y a cinq ans. Nous sommes revenus dans la moyenne européenne et nous pouvons espérer continuer à améliorer les choses. Mais pour y arriver, il faut sortir des raisonnements funestes…
… qui ont consisté à opposer l'emploi des jeunes et l'emploi des seniors. Ce sont des raisonnements malthusiens, comme ceux des 35 heures, qui consistent à croire que, pour qu'il y ait du travail dans notre pays, il faut chasser les plus de cinquante-cinq ans du marché de l'emploi. Nous sommes résolument contre cette démarche malthusienne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Alain Suguenot, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Après le sabotage d'oléoducs au Yémen, des charges explosives viennent d'être retrouvées auprès d'installations pétrolières dans le sud-est du pays.
Plus près de nous, les services de renseignements occidentaux ont mis au jour des projets d'attentats liés à Al-Qaïda dans des grandes villes européennes sur le modèle tristement célèbre des attaques de Bombay qui avaient fait 166 morts en 2008. On ne compte plus également, y compris aujourd'hui même, le nombre d'annonces relatives à des colis piégés envoyés à des ambassades ainsi qu'aux plus hautes instances des États.
En France, les services de renseignement assuraient, lundi, qu'ils ne disposaient pas d'éléments nouveaux quant à des menaces d'attentats depuis le mois de septembre, indiquant cependant que la menace restait, bien évidemment, très élevée. Nous nous souvenons des propos de M. Ben Laden.
Il y a donc lieu de faire preuve d'une extrême vigilance tout en évitant la psychose, car, ne nous y trompons pas, ces terroristes n'ont qu'un but : déstabiliser nos démocraties et orchestrer la peur.
Le Gouvernement et le Chef de l'État ont pris la mesure du risque de tels attentats sur le sol européen, et singulièrement sur le sol national. Une réunion s'est d'ailleurs tenue, ce matin même à l'Élysée, avec l'ensemble des services de sécurité et de renseignements. Le but est, bien sûr, d'ajuster un dispositif renforcé de sécurité pour nos concitoyens.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur les résultats déjà obtenus et les moyens mis en oeuvre dans la lutte sans merci que nous devons mener contre tous les terrorismes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Monsieur Suguenot, depuis quelques jours effectivement, un faisceau d'informations concordantes nous incite à renforcer notre vigilance. Nous avons décidé de le faire en toute transparence, en le précisant à nos compatriotes, sans surestimer ni sous-estimer la réalité de cette menace. La menace, vous la connaissez : c'est le message d'Oussama Ben Laden ciblant pour la première fois exclusivement notre pays, ce sont les colis piégés adressés depuis le Yémen aux États-Unis ou encore le colis piégé provenant d'un mouvement de l'ultra-gauche grecque et destiné au Président de la République.
Face à cette menace, nous sommes naturellement actifs. Nous travaillons ainsi très étroitement avec nos partenaires des services étrangers, qu'ils soient occidentaux ou qu'ils soient situés au coeur de la zone d'influence d'Al-Quaïda. Nous prenons également des initiatives. Par exemple, la Direction générale de l'aviation civile a pris, samedi, à juste titre, la décision d'interrompre le fret en provenance du Yémen. Nous avons eu, ce matin, une réunion avec le Président de la République sur ces sujets. Il a été notamment décidé de renforcer, en partenariat avec un certain nombre d'États concernés, le criblage des passagers à destination de notre pays. Enfin, le plan Vigipirate est maintenu à un niveau élevé : le niveau rouge renforcé. Concrètement, 3 400 policiers et 980 gendarmes sont mobilisés quotidiennement.
Comme vous le constatez, monsieur Suguenot, face à cette menace réelle, nous menons une action coordonnée avec nos partenaires et notre vigilance est totale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, ma question s'adressait au Premier ministre en activité.
Cet après-midi, en commission mixte paritaire, nous allons avoir une ultime discussion sur le projet de loi de réforme des collectivités territoriales. Sa gravité aura été masquée par le débat sur les retraites.
Dans ces deux projets de loi, vous vous êtes livré à un passage en force, refusant d'entendre la voix du pays…
..que ce soit celle de l'immense majorité de la population en ce qui concerne les retraites ou celle de l'immense majorité des élus locaux s'agissant de la réforme territoriale. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Dans ces deux projets de loi, vous avez trompé les Françaises et les Français ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Pour les retraites, vous avez menti en affirmant que la question centrale était l'allongement de la durée de vie ! Pour la réforme territoriale, vous avez menti en affirmant que vous vouliez vous attaquer au millefeuille territorial, alors que vous ajoutez les communes nouvelles, les pôles métropolitains et les métropoles !
Dans ces deux projets de loi, vous avez caché votre intention réelle d'ouvrir des marchés nouveaux. Vous affaiblissez la retraite par répartition et vous ouvrez la voix à la capitalisation, d'une part, et vous transférez, d'autre part, au privé les services publics locaux en asphyxiant les finances des communes, départements et régions, par la suppression de la taxe professionnelle et le gel des dotations d'État ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Dans ces deux projets de loi, mesdames et messieurs du Gouvernement, les femmes voient leurs droits réduits (Protestations sur les bancs du groupe UMP), qu'il s'agisse de la durée d'activité, de leur niveau de retraite ou de la grave remise en cause de leur présence dans les assemblées élues. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) La parité était garantie dans les élections régionales ; elle disparaît ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Dans les deux cas, votre gouvernement détruit un héritage commun, des édifices précieux ! Dans les deux cas, vous confondez construction partagée et destruction !
Allez-vous retirer ce projet de loi sur la réforme territoriale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Monsieur André Chassaigne, je suis quelque peu surpris par vos propos sur un « passage en force ».
Plusieurs députés du groupe SRC. C'est le cas !
Vous avez été un des députés particulièrement assidus, créatifs et imaginatifs (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) lors du débat sur les collectivités locales et vous êtes donc mieux placé que d'autres pour savoir qu'il y a eu deux lectures dans chacune des deux Assemblées et plus de 200 heures de débat. Honnêtement, s'il y a « passage en force », c'est un passage en force tranquille !
Notre ambition est simple. Nous voulons, par ce texte, alléger, simplifier et améliorer l'efficacité de nos institutions locales et maîtriser la dépense locale.
Avec ce texte, et vous ne pouvez le nier, monsieur Chassaigne, les communes sont confortées. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) La clause de compétence générale leur est préservée. Leur autonomie est maintenue.
Et, au contraire, monsieur Glavany, les communes seront renforcées grâce à l'achèvement de l'intercommunalité ! (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Il est vrai que, lorsque le conseiller territorial sera créé, les régions et les départements seront amenés à travailler ensemble. Vous aurez beaucoup de mal à expliquer qu'avoir un même élu qui siège au conseil régional et au conseil général complique les choses, alors que, au contraire, cela les simplifie, les fluidifie (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP) et améliore l'efficacité et la rapidité des décisions ! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Enfin, la solidarité entre les territoires sera renforcée grâce à la mise en place de nouveaux mécanismes de péréquation. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Ne soyez pas frileux, monsieur Chassaigne ! Saisissez, au contraire, cette opportunité pour redonner un visage et du souffle à la décentralisation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.
Ma question s'adresse au ministre des affaires étrangères.
Hier, notre collègue Étienne Pinte a évoqué avec dignité et émotion l'attentat tragique qui a coûté la vie à plus de cinquante personnes dimanche dans la cathédrale de Bagdad et interrogé le Gouvernement sur sa volonté de porter ce drame devant le conseil de sécurité de l'ONU. Si Pierre Lellouche a tenu des propos empreints de solidarité envers les chrétiens d'Orient, il n'a pas apporté de réponse précise à cette question.
Face à une telle situation, la France a des responsabilités. Elle en a d'abord parce qu'elle a, entre autres, des racines chrétiennes, tout en étant un grand pays laïque. Elle en a aussi parce qu'elle bénéficie au Moyen-Orient d'une grande crédibilité, due à une politique étrangère équilibrée dans cette région du monde, politique impulsée par le général de Gaulle. Elle en a, enfin, parce qu'elle est directement responsable depuis plusieurs siècles de la protection de certains lieux saints chrétiens, notamment à Jérusalem.
Ce drame ne va pas s'évanouir. Ce matin, même, Al-Qaïda en Irak désignait les chrétiens du Moyen-Orient comme des cibles légitimes. La proposition du Gouvernement français de les accueillir en France est louable, mais ce n'est pas une réponse suffisante. Nous ne pouvons laisser comme seul choix aux chrétiens d'Irak la mort ou l'exil.
Face à un tel drame, la France osera-t-elle conditionner une partie de l'aide qu'elle apporte aux pays du Moyen-Orient au renforcement de la protection de toutes les minorités religieuses ? Quelles sont précisément, monsieur le ministre, les initiatives diplomatiques fortes que la France compte prendre seule ou dans le cadre international – Union européenne, G20, Conseil de sécurité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
Dimanche dernier, monsieur le député, cinquante chrétiens au moins ont péri dans une église syriaque de Bagdad.
L'indignation ne suffit pas, vous avez raison. Oui, nous avons des responsabilités, pas seulement vis-à-vis des chrétiens d'Irak mais aussi vis-à-vis d'eux.
Que pouvons-nous faire ?
Dès 2008, avec Brice Hortefeux, nous avons offert des visas d'asile à des gens ayant déjà quitté l'Irak et se trouvant en Jordanie et à d'autres qui étaient encore dans le nord du pays. Ce n'est pas suffisant.
Ces violences ont été revendiquées, je vous le rappelle, par une prétendue organisation nommée État islamique d'Irak, au nom d'Al-Qaïda. Une telle revendication ne nous laisse pas le choix. Il faut conditionner notre aide, vous avez raison, mais l'aide de la France est destinée à former la police et les juges. Nous ne pouvons cesser d'entraîner la police.
Il faudrait effectivement agir au niveau européen et peut-être porter la question devant le Conseil de sécurité, mais, très honnêtement, nous devrions faire de même pour d'autres attentats. Il y a eu bien d'autres attentats qui ne ciblaient pas les chrétiens et il faut les condamner dans leur ensemble.
Nous menons une action déterminée en faveur des chrétiens et nous allons continuer à leur donner des visas, mais, pour l'église chaldéenne elle-même, la solution n'est pas de quitter le pays. Elle ne veut pas de visas, elle ne demande que quelques aides d'urgence.
Le reste est une question politique et nous agirons. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Monique Boulestin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, au moment où le malaise social s'installe et où l'on s'interroge sur l'avenir des jeunes, le logement est devenu le principal sujet d'inquiétude des Français.
Parmi les publications récentes, la Caisse nationale d'allocations familiales vient de communiquer une étude faisant apparaître que les jeunes, qui gagnent pourtant beaucoup moins que leurs aînés, paient, en valeur absolue, des loyers quatre fois plus chers.
Entre le loyer, la caution à verser et les garanties demandées, les jeunes ont du mal à se loger décemment et en sont réduits à recourir à ce que l'on appelle communément le système D.
On en arrive ainsi à une situation aussi absurde que paradoxale : le choix du logement conditionne de plus en plus celui de l'emploi.
Les jeunes sont aujourd'hui soumis aux exigences contradictoires d'un marché du travail qui demande mobilité et flexibilité et d'un marché du logement qui reste rigide et exigeant. On en vient même à demander une caution parentale à des salariés trentenaires en CDI.
Pourtant, premier poste de dépenses, le logement est l'une des conditions de stabilité de l'être humain. Source de sécurité, il lui permet également de se projeter dans l'avenir, c'est-à-dire de construire non seulement une vie professionnelle, mais également une vie de couple, une vie de famille.
En 2008 et 2009, les pouvoirs publics ont à nouveau inscrit sur leur agenda politique la question de l'autonomie des jeunes adultes : livre vert du Haut commissariat à la jeunesse rendu public en 2009, discours du Président de la République en octobre de la même année.
Pourtant, dans les faits, toujours rien.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes toujours les premiers à discourir sur les sujets d'importance, mais vos déclarations ne sont jamais suivies d'effets. Au moment où se discute le budget du logement des jeunes, nous attendons de voir si vos décisions seront enfin en accord avec vos annonces. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de la jeunesse et des solidarités actives.
Madame la députée, vous avez à juste titre parlé de l'autonomie des jeunes. C'est en septembre 2009 que le Président de la République avait annoncé dans un discours le plan « Agir pour la jeunesse », qui consistait à concentrer l'action sur les leviers essentiels permettant aux jeunes d'accéder à l'autonomie, l'orientation et la formation, bien sûr, mais aussi le logement et l'emploi. C'était d'ailleurs la même philosophie que celle qui nous avait permis d'obtenir des résultats significatifs dans le cadre du plan de cohésion sociale reconnu par la plupart des acteurs objectifs.
Nous continuons dans cette voie avec Laurent Wauquiez. Nous avons mis en place un plan pour l'emploi des jeunes de plus de 1,2 milliard d'euros, 50 000 apprentis ont été embauchés grâce au dispositif zéro charges destiné aux entreprises embauchant un apprenti, et 88 000 grâce à la prime supplémentaire par apprenti supplémentaire, 97 700 jeunes ont été embauchés grâce à l'aide à l'embauche des jeunes de moins de vingt-six ans. Il y a eu 200 000 contrats CIVIS supplémentaires et nous avons ouvert 11 000 places d'école de la deuxième chance pour les jeunes ayant connu un premier échec à qui l'on redonne une deuxième chance.
Pour le logement étudiant, nous avons réussi avec Valérie Pécresse à atteindre 13 000 places supplémentaires, ce qui porte à 44 000 depuis 2007 le nombre de logements supplémentaires mis à la disposition des CROUS. Nous avons organisé la colocation dans le parc public et réduit de deux à un mois le dépôt de garantie. Nous avons mis en place un dispositif pour le logement des apprentis, 250 millions dans le grand emprunt, et réalisé 18 000 places d'hébergement pour l'alternance, et nous allons expérimenter la garantie des risques locatifs pour les jeunes.
Vous le voyez, nous sommes déterminés à favoriser l'autonomie des jeunes.
La parole est à M. Michel Herbillon, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre des affaires étrangères et européennes, le Président chinois, M. Hu Jintao, arrivera demain en France pour une visite d'État de trois jours. Cette visite fait suite à celle du Président de la République Nicolas Sarkozy à Pékin au printemps dernier.
La venue du Président chinois en France est naturellement un événement important. Elle s'inscrit dans le cadre du partenariat stratégique noué de longue date entre la France et la Chine.
Cette visite est l'occasion de donner à ce partenariat un nouvel élan, en renforçant la coopération traditionnelle dans les secteurs de l'aéronautique et de l'électronucléaire, mais aussi en établissant de nouveaux partenariats dans les secteurs de l'environnement, de l'énergie et des nouvelles technologies. La Chine et la France souhaitent également accroître leurs liens scientifiques, culturels et universitaires.
Mais la visite du Président chinois en France dépasse naturellement la stricte dimension des relations bilatérales. Elle revêt une importance internationale évidente au moment où la France s'apprête à prendre dans quelques jours la présidence du G20 puis du G8.
La France, par la voix du Président de la République, entend à cette occasion tirer les leçons de la crise et promouvoir un nouvel ordre économique et financier mondial. La réforme du système monétaire international, la mise en oeuvre d'une nouvelle gouvernance mondiale, la question du prix des matières premières et l'aide au développement seront au coeur de cette présidence française du G20.
Face à tous ces défis planétaires, l'analyse d'une puissance comme la Chine est bien sûr déterminante. Une concertation et une coordination entre la France et la Chine, acteur majeur du G20, seront évidemment décisives.
Dès lors, monsieur le ministre, à quelques heures de la venue du Président chinois, pourriez-vous indiquer à la représentation nationale quels sont les enjeux de cette visite…
…et quels les résultats vous en attendez, tant sur le plan bilatéral qu'international ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le député, il y a quarante-six ans, le général de Gaulle nouait des relations diplomatiques avec la Chine et affirmait que ce choix était celui de l'évidence et de la raison. Je crois que, quarante-six ans plus tard, c'est toujours vrai.
Cette visite du Président Hu Jintao est attendue pour les raisons que vous avez indiquées, raisons économiques, bien sûr, mais pas seulement.
S'agissant des raisons économiques, la Chine est notre quatrième fournisseur, notre neuvième client. Il faut améliorer ces performances, mais c'est déjà beaucoup.
Vous avez indiqué quelques-uns des secteurs de cette coopération. Dans le domaine aéronautique, nous avons une usine Airbus qui fournit beaucoup d'avions en Chine même. Dans le domaine de l'électronucléaire, des projets très importants pour notre pays sont en cours. En outre, de nombreuses PME françaises sont aujourd'hui en contact avec la Chine, où elles vendent leurs produits.
Sur le plan politique, la Chine est un partenaire essentiel. Comme vous l'avez rappelé, nous allons présider le G20, et des communications et des réflexions sur le système économique international nous ont déjà permis de constater que les Chinois n'étaient pas loin de notre position.
Sur d'autres enjeux aussi, comme l'environnement ou les enjeux régionaux, il est nécessaire de se tourner vers la Chine, comme un partenaire stratégique, certes, mais un partenaire quotidien. Je crois que la visite du président Hu Jintao, les trois jours qu'il va passer en France, la façon dont il a organisé avec nous cette visite, seront un exemple de cette coopération grandissante et qui n'est pas près de s'arrêter. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP.)
Plusieurs députés du groupe SRC. Et les droits de l'homme ?
La parole est à Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale. Elle porte sur les sanctions encourues par un professeur qui a proféré des injures racistes et sexistes.
Vous connaissez les faits. En juin dernier, alors qu'il comparaissait devant le tribunal correctionnel de Saint-Denis de La Réunion pour agression sexuelle sur une jeune fille, cet enseignant a prétendu justifier son comportement par cette ahurissante déclaration : « Je suis Blanc et, de toute façon, ici, c'est tous des nègres et toutes des putes » (Exclamations sur divers bancs), propos qu'il avait déjà tenus durant sa garde à vue.
Ce professeur a été condamné, pour agression sexuelle, à cinq mois de prison avec sursis avec mise à l'épreuve et obligation de soins, ainsi qu'à une amende de mille euros.
Comme vous le devinez, ces propos ont profondément choqué. Le 8 juillet, M. Chatel a demandé à juste titre au rectorat de La Réunion d'engager à l'encontre de cet enseignant une procédure disciplinaire, procédure susceptible d'aboutir à sa révocation.
La commission administrative paritaire académique s'est réunie il y a un mois en l'étonnante absence du recteur. Elle n'a pu se mettre d'accord sur aucune décision, choisissant simplement de s'en remettre au jugement du ministre.
Il est clair désormais que cet enseignant, qui a déjà été suspendu et muté pour d'autres affaires, ne peut plus jouer son rôle auprès des jeunes. Dans quels délais le ministère de l'éducation nationale compte-t-il prendre les sanctions qui s'imposent ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer.
Madame la députée, je tiens tout d'abord à excuser mon collègue Luc Chatel, qui ne peut être là cet après-midi.
Vous l'interrogez sur la situation d'un professeur affecté à La Réunion ayant tenu des propos racistes lors de sa garde à vue, à la suite de son interpellation pour agression sexuelle. Je souhaite rappeler au préalable que l'intéressé, placé en longue maladie, était d'ores et déjà soustrait à la présence d'élèves depuis le 1er novembre 2009, à la suite d'une expertise psychiatrique et médicale demandée par l'académie.
Pendant la période où ce professeur n'exerçait pas, il a été condamné par le tribunal correctionnel pour avoir agressé deux adolescentes, et il aurait également tenu des propos racistes lors de sa garde à vue. Il a été condamné, comme vous l'avez souligné, à cinq mois de prison avec sursis, avec obligation de soins, et mille euros d'amende.
Lors de son déplacement à La Réunion, à l'occasion de la rentrée scolaire, Luc Chatel a pu exprimer publiquement son indignation sur les propos inacceptables qu'aurait tenus ce professeur. Conscient de l'émotion bien compréhensible suscitée chez les Réunionnais, il a souhaité que l'académie engage une action disciplinaire dès réception de la copie du jugement rendu, dans le respect des procédures réglementaires.
En conséquence, un conseil de discipline a été convoqué le 5 octobre dernier. Toutefois, pour des raisons de procédure liées aux délais, le recteur a été obligé de convoquer un second conseil de discipline, qui se tiendra début décembre.
Ce type de comportement n'est pas acceptable et n'a pas sa place au sein de l'éducation nationale. C'est pourquoi, madame la députée, l'administration défendra dans ce dossier la position la plus ferme. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Terrot, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Madame la ministre, les mesures de la loi sur le surendettement que vous avez portée sont entrées en vigueur depuis lundi. En France, 14 millions de ménages remboursent au moins un crédit, et l'encours du crédit à la consommation représente 142 milliards d'euros. Dans le même temps, 800 000 ménages environ, ce qui est considérable, sont en situation de surendettement. De tels chiffres montrent les enjeux sociaux et économiques de cette situation.
Si le texte prend en compte l'encadrement des pratiques commerciales en matière de crédit à la consommation, il vise surtout à aider les consommateurs à sortir de cette spirale infernale…
…qui consiste à contracter un autre crédit pour payer les précédents. Parmi les mesures phares de cette nouvelle loi, la réduction de la durée d'inscription sur le fichier des incidents de paiement, qui sera désormais limitée à cinq ans au lieu de dix ou huit précédemment.
La donne doit vraiment changer : le crédit doit devenir plus responsable, les publicités doivent informer mieux et être moins invasives.
La loi fournit des instruments, mais il faudra que les pratiques, les pratiques concrètes, changent rapidement. Il faut créer une nouvelle donne, disais-je, pour redonner confiance aux ménages qui rencontrent des difficultés financières, et pour soutenir les réseaux d'accompagnants qui font un travail indispensable sur le terrain.
Madame la ministre, pouvez-vous nous rappeler les grandes mesures de cette loi sur le surendettement attendue par les consommateurs ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Mesdames, messieurs les députés, vous les rencontrez dans vos permanences, dans vos mairies, de plus en plus nombreux, car on constate l'augmentation de leur nombre, les ménages surendettés. La loi que vous avez votée le 1er juillet 2010 tente de trouver des solutions.
Monsieur Terrot, permettez-moi de vous rappeler quelques-unes des améliorations qui sont intervenues.
Tout d'abord, il y a une accélération des procédures : la Banque de France devra dorénavant traiter les dossiers de surendettement en trois mois au lieu de six mois.
La deuxième mesure, encore plus importante de mon point de vue, c'est la suspension des poursuites. À partir du moment où un ménage est accepté en commission de surendettement, les créanciers n'ont plus le droit de le poursuivre.
Troisième mesure : la continuité du service bancaire. Une banque ne pourra plus procéder à une fermeture sauvage, comme c'était parfois le cas dès lors que le ménage était surendetté.
Quatrième mesure : dorénavant, les commissions de surendettement ne pourront plus refuser l'accès à un ménage surendetté si celui-ci est propriétaire de son logement.
De plus, vous l'avez dit, il y a de nombreuses mesures relatives aux délais. En effet, quand un ménage est en commission de surendettement, qu'il s'agisse d'un plan de rétablissement personnel ou d'un plan de surendettement, il est inscrit au fichier des incidents de paiement. Cette mesure d'inscription vaut en réalité, à bien des égards, exclusion. Mais grâce à vous, grâce à la majorité qui a voté ce texte, nous avons raccourci les délais, qui sont passés de huit et dix ans à cinq années ; depuis lundi, 120 000 ménages sont désormais sortis du fichier de surendettement, sortis du fichier des incidents de paiement, et peuvent à nouveau avoir accès au crédit. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Claude Fruteau, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre (« Il n'est pas là ! » sur les bancs du groupe SRC), depuis des mois, nous appelons votre attention sur la situation dégradée du logement social ; depuis des mois, au lieu d'apporter des réponses concrètes, vous vous contentez de polémiquer, allant jusqu'à imputer à Lionel Jospin la stérilité de votre politique.
Si la situation en matière de logement social est préoccupante en France hexagonale, elle est désastreuse dans les départements d'outre-mer. À La Réunion par exemple, plus de 100 000 personnes vivent dans des bidonvilles et désespèrent d'obtenir un logement social ! Le secteur du BTP, en conséquence, s'enfonce chaque jour un peu plus, plongeant des milliers de familles dans le désarroi, avec comme seule perspective le chômage, qui dépasse désormais les 30 %.
Une telle situation engage pleinement votre responsabilité car l'instabilité législative que vous cultivez depuis des années a ruiné la confiance des acteurs économiques et sociaux.
À cela s'ajoute le double langage : témoin cette circulaire de la ministre de l'outre-mer, qui donne aux services de l'État des instructions diamétralement opposées à la lettre et à l'esprit de la LODEOM votée l'an dernier.
Cette politique de gribouille (Protestations sur les bancs du groupe UMP) conduit à la paralysie du système ! Les chiffres sont là ! Ils sont têtus ! Ils vous accablent ! En 2010, on ne construira guère plus de 1 000 logements sociaux, à comparer aux 2 500 produits pendant les années Jospin. (Mêmes mouvements.)
Monsieur le Premier ministre, j'ai deux questions très simples : quand allez-vous prendre réellement à bras-le-corps la question du logement social dans les DOM ? Quand vous déciderez-vous, au-delà des belles déclarations, à mettre en oeuvre une politique de développement qui montre aux peuples des outre-mer un autre visage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer.
Monsieur le député, je tiens tout d'abord à vous dire que c'est ce gouvernement qui a considéré que le logement social était une des priorités de son action pour l'outre-mer. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) J'en veux pour preuve le débat sur la LODEOM,…
Vous avez alors été à l'origine de l'amendement qui a permis que le socle du financement du logement social, c'est-à-dire la LBU, soit sanctuarisé : l'enveloppe de la ligne budgétaire unique s'élève aujourd'hui à 274 millions et restera à ce niveau pendant trois ans. Je ne partage pas votre analyse car avec la LBU, nous sommes passés de 4 700 logements en 2007 à 5 500 logements en 2009.
Il est certain qu'il y a encore beaucoup à faire. Vous connaissez mon engagement (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC) pour que nos compatriotes puissent vivre dans des conditions dignes et que l'on règle le problème de l'insalubrité. Nous avons renforcé le dispositif en mettant en place une défiscalisation. Le Premier ministre, conscient de l'impact social du rabot de 10 %, a décidé que la mesure ne s'appliquera pas au logement social !
En plus, je veux vous rappeler, monsieur le député, que d'autres mesures ont été mises en oeuvre, notamment pour aider les collectivités à prendre en compte la surcharge foncière. À ce titre, nous avons mis en place les conventions d'action foncière avec les collectivités, et le fonds régional d'aménagement foncier et urbain – le FRAFU – pour aider à la réalisation de ces logements sociaux.
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Où est l'argent ?
Mais il ne faut pas ignorer les difficultés des bailleurs. Il n'est pas question de faire du logement de telle sorte que la combinaison LBU plus défiscalisation revienne à faire des logements plus coûteux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Hier, la France et la Grande-Bretagne ont fait un pas supplémentaire dans le rapprochement de leurs deux armées.
En ce 2 novembre 2010, Nicolas Sarkozy et David Cameron ont conclu un accord historique unissant deux pays qui représentent 50 % des dépenses consacrées à la défense et deux tiers des budgets militaires de recherche et au développement, en Europe.
Ces deux pays sont membres du Conseil de sécurité de l'ONU et ils détiennent l'arme nucléaire.
S'il symbolise le début d'un engagement à long terme en faveur d'une plus grande coopération en matière de défense, cet accord établit aussi une coopération renforcée qui est nécessaire pour réaliser des économies et traduire les paroles en actes.
Le 19 octobre dernier, David Cameron avait annoncé une réduction de 8 % en quatre ans du budget de la défense britannique. De son côté, la France s'est également engagée dans un important programme d'économies.
Interdépendance, mutualisation des matériels et des hommes, économies d'échelle, voilà les nouveaux mots qui s'échangent désormais entre Londres et Paris.
Mes chers collègues, c'est la première fois dans l'histoire que les Britanniques se tournent vers notre pays pour engager une coopération en matière nucléaire, étant donné les liens très étroits qu'ils entretiennent avec les États-Unis.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous exposer les grandes lignes de ce traité qui s'inscrira dans l'histoire comme l'une des grandes étapes de la coopération militaire franco-britannique et de l'édification d'un véritable pilier de la défense européenne. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le député, cet accord binational est beaucoup opérationnel que celui de Saint-Malo qui l'a précédé. Ce dernier était tourné vers l'Europe ; le présent accord a un caractère bilatéral, ce qui ne nous empêche pas, nous Français, de le trouver représentatif de ce qui pourrait se passer en Europe.
Durant quelque 650 ans, l'Angleterre et la France se sont fait la guerre. C'est donc un accord assez important, comme vous l'avez dit, mais il est opérationnel.
Évidemment, il y a eu des périodes de paix depuis la bataille d'Hastings, mais aussi une grosse tranche de conflits. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Étant deux puissances nucléaires, les deux pays ont décidé de coopérer de deux façons dans ce domaine : l'expérimentation en laboratoire en France ; la technologie en Angleterre.
Nous nous sommes aussi engagés à créer une force expéditionnaire qui regroupera les forces anglaises et françaises, en toute souveraineté, sur décision de ces deux pays, et qui pourrait se projeter dans les opérations de l'ONU, de l'Europe, etc.
Nous avons également décidé que nos deux porte-avions – l'anglais qui serait doté de catapultes et le nôtre – pouvaient être intégrés à cet accord. (Rires et exclamations continuelles sur les bancs du groupe SRC.)
Sur le plan général, l'accord conclut à la nécessaire complémentarité entre les deux pays en termes économiques, de politique militaire et étrangère.
La parole est à M. Gérard Bapt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre de l'industrie, ma question concerne le sort des salariés du site industriel ex-Molex de Villemur-sur-Tarn.
En avril, je vous avais déjà interrogé à propos du licenciement des salariés protégés, représentants du personnel, du site Molex liquidé par le groupe américain.
Votre collègue M. Woerth, nouveau ministre du travail, venait d'autoriser, contre l'avis de l'inspection du travail, le licenciement des représentants salariés de l'entreprise,…
… victimes de patrons voyous reconnus comme tels par la justice, puisque deux dirigeants du site ont été condamnés pour entrave par le tribunal de grande instance de Toulouse.
Depuis, la situation à Villemur-sur-Tarn s'est encore considérablement dégradée puisque la société Molex France a déposé son bilan, afin de se soustraire aux obligations de prise en charge des salaires, au coût de la cellule de reclassement ainsi qu'aux indemnités de licenciement.
C'est en quelque sorte la triple peine pour les salariés qui perdent successivement leur emploi, leur cellule de reclassement et les indemnités légales de licenciement.
En visite récente à Toulouse, monsieur le ministre, tout en critiquant l'attitude de la direction de Molex, vous n'avez en fait annoncé que l'activation de l'AGS, destinée à prendre en charge les salaires de septembre à décembre.
Les salariés de Molex, et en particulier les dix-neuf salariés protégés, attendaient beaucoup plus de cette visite. Ils vivent d'autant plus douloureusement cette situation que Molex vient d'annoncer des bénéfices record et l'augmentation des dividendes versés aux actionnaires, confirmant qu'il s'agissait bien de licenciements boursiers.
La prise en charge du plan social par l'État permettrait le respect du protocole signé par Mme Lagarde, mais Molex ne devrait-elle pas rembourser ces quelque cinq millions d'euros, puisque c'est le contribuable français qui va en subir la charge ?
Confirmez-vous, monsieur le ministre, votre engagement à prendre en charge globalement le plan social d'entreprise de l'ex-Molex de Villemur-sur-Tarn ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député Gérard Bapt, vous-même et les représentants des collectivités, que j'ai toujours conviés à mon comité de pilotage sur Molex, vous savez à quel point nous nous sommes battus ensemble pour défendre à la fois les droits des salariés et le maintien d'une activité industrielle à Villemur-sur-Tarn.
Il y a un an, au moment où plus personne n'y croyait, j'ai résisté. C'est pour cela que j'ai obtenu de la part de Molex France….
Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Rien !
une petite part de la cession du fonds de commerce de Molex, et par conséquent le maintien de cinquante emplois salariés et d'une industrie à Villemur-sur-Tarn.
Entre-temps, que s'est-il passé ? Certains salariés ont déposé un recours devant les prud'hommes. Pour les punir, Molex États-Unis a décidé de ne plus verser les moyens nécessaires à Molex France, afin de mettre cette dernière en cessation de paiement et de ne pas respecter le contrat signé avec les salariés pour le versement de leurs indemnités.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est une honte !
C'est inacceptable, je le dis très clairement. C'est la raison pour laquelle j'ai tenu à venir moi-même à Toulouse.
À cette occasion, j'ai rappelé que 264 des 283 salariés avaient reçu leur indemnité. Pour eux, le problème a donc été réglé.
Reste les dix-neuf salariés protégés. Premièrement, j'ai veillé à ce que les AGS prennent en charge leur congé de reclassement. Deuxièmement, l'État financera la totalité de la cellule de reclassement. Troisièmement, j'ai demandé aux groupes PSA et Renault de ne plus passer de commandes, que ce soit pour eux-mêmes ou leurs équipementiers, à Molex États-Unis, afin de nous aider à faire pression sur cette entreprise.
Enfin, demain, un liquidateur sera nommé par le tribunal. Je vous le dis : l'État lancera, aux côtés du liquidateur, un recours en responsabilité pour insuffisance d'actifs. Quand une entreprise étrangère ne respecte pas les droits des salariés, elle doit l'assumer devant la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC.)
La parole est à Mme Gabrielle Louis-Carabin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre chargée de l'outre-mer.
Madame la ministre, je ne peux pas laisser dire que le logement social n'était pas une priorité des gouvernements précédents. Avant le vote de la loi organique pour le développement économique de l'outre-mer, le financement du logement social dans les DOM était assuré par la ligne budgétaire unique. Les demandes étaient instruites par les DDE. À ce fonds, la LODEOM votée en avril 2009 et réellement appliquée en décembre, a ajouté la défiscalisation comme source complémentaire de financement. Un agrément du ministre du budget doit dorénavant être sollicité auprès des directions régionales des finances publiques. Un même dossier est examiné et instruit par deux instances dont les missions sont différentes, ce qui ralentit la prise de décision.
De plus, alors que la LBU a été réaffirmée comme le socle fondamental du financement du logement social dans les DOM, il s'avère que la défiscalisation ne la complète pas, mais voudrait la remplacer.
En effet, une circulaire du 1er juin 2010 indique clairement que « le recours à la défiscalisation doit conduire à une modération de la subvention, voire à une absence totale de subvention ». Autrement dit, de manière arbitraire la défiscalisation se substitue à la LBU, socle fondamental du logement social.
Les opérateurs confirment leur inquiétude face au détournement de l'esprit de la loi, et face à la lourdeur administrative du traitement de dossiers pourtant jugés prioritaires, dans un contexte singulièrement difficile pour le secteur du bâtiment et des travaux publics. Vous avez d'ailleurs reçu leur motion.
Je vous rappelle que le secrétaire d'État à l'outre-mer de l'époque affirmait que l'on pourrait continuer à monter des projets en ligne budgétaire unique.
Aussi, madame la ministre, quelles décisions entendez-vous prendre… (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer.
Merci d'avoir posé cette question, madame Louis-Carabin, car elle m'offre l'occasion d'apporter quelques éclaircissements.
Oui, la ligne budgétaire unique, qui a été sanctuarisée, reste le socle du financement du logement social. Je vous renvoie au débat sur la loi organique pour le développement économique de l'outre-mer. Qu'a dit mon prédécesseur ? Quel est l'esprit de la loi ? Elle doit permettre de financer le logement social par la LBU – ce que nous avons fait, puisque aujourd'hui nous avons plus de 144 millions d'euros de crédits engagés, au lieu de 71 millions à pareille époque.
Deuxièmement, nous pouvons financer des opérations au titre de la défiscalisation. Le Premier ministre a veillé à ne pas appliquer à cette mesure le coup de rabot de 10 %.
Troisièmement, nous avons une autre source de financement, qui consiste à additionner la ligne budgétaire unique et la défiscalisation, mais cela doit avoir un caractère exceptionnel et ne pas être le droit commun.
Il est vrai, madame la députée, que, dans la conjoncture actuelle, nous avons beaucoup d'opérations en VEFA et qu'il n'est pas possible de considérer que nous allons réaliser des logements sociaux à 2 300 euros le mètre carré alors que, pendant de nombreuses années, nous l'avons fait entre 1 600 et 1 700 euros le mètre carré. La défiscalisation doit avoir un effet démultiplicateur et nous permettre de passer de 4 700 à 5 500 logements – voire à 10 000 logements, car nous connaissons les besoins de nos compatriotes dans ce secteur. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Luc Pérat, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé et des sports.
Hier, ma collègue Catherine Génisson vous a interpellée sur l'inégalité des Français face à l'accès à la santé. Aujourd'hui, madame la ministre, je reviens à la charge, pour vous alerter et vous interroger sur la désertification médicale. Nous en mesurons chaque jour les terribles effets, notamment dans les territoires ruraux, mais également dans certaines zones périurbaines abandonnées à leur sort.
Sur une bonne partie du territoire français, on peut faire le constat flagrant, angoissant, de l'absence d'offre médicale et de permanence des soins. Les faits sont implacables, connus de tous : les médecins vieillissent et ne trouvent pas de successeur. Les projections à très court terme sont alarmantes et claires : de nombreuses communes, de nombreux territoires n'auront bientôt plus de médecins. Par ailleurs, la permanence des soins n'est plus assurée, les hôpitaux sont débordés, notamment les urgences ; les délais pour accéder aux soins mettent en danger les patients.
Madame la ministre, quelles sont vos réponses ? L'augmentation du numerus clausus ? Certes, vous avez mis en place des mesures incitatives, mais pour quels résultats ? Êtes-vous prête, aujourd'hui, à prendre des mesures qui amènent les nouveaux médecins à s'installer dans les territoires en difficulté pour répondre aux besoins des populations ? Il y a urgence. Limiter le nombre d'hôpitaux ou favoriser la concentration des médecins, c'est faire de mauvais calculs. Cela relève de votre responsabilité, madame la ministre.
Devant ces manquements de l'État en matière de santé, les élus des territoires ruraux se mobilisent et prennent des initiatives en investissant dans des maisons pluridisciplinaires de santé pour essayer de maintenir des services de santé de proximité. Mais de quels moyens disposent-ils ? Êtes-vous prête à accorder des aides spécifiques et inégalitaires à ces territoires délaissés ? Rien ne remplacera jamais l'exercice actuel de la médecine. Madame la ministre, quelles mesures concrètes et immédiates comptez-vous prendre pour être entendue et comprise, et mettre fin à cette situation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
Monsieur Pérat, vous représentez une région et un département qui souffrent de très graves problèmes de démographie médicale. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a mis à la disposition de ces zones particulièrement défavorisées divers moyens qui concernent aussi bien la formation des médecins que le renforcement de la filière de médecine générale. Alors que, il y a trois ans, 37 % des étudiants choisissaient la médecine générale, ils sont dorénavant 49 % à le faire. Nous avons décidé – vous l'avez d'ailleurs signalé – de renforcer le numerus clausus dans ces régions défavorisées, et tout particulièrement dans la faculté de médecine de Lille. Nous avons également créé des contrats d'engagement qui, en échange d'une bourse, fixent les médecins dans des régions particulièrement défavorisées.
Il faut aussi agir au moment de l'installation des médecins. C'est la raison pour laquelle le directeur général de l'ARS du Nord-Pas-de-Calais, Daniel Lenoir, met en place les outils logistiques pour aider à l'installation de ces médecins.
Michel Mercier, Brice Hortefeux et moi-même, avons mis des moyens financiers à la disposition d'une plateforme logistique pour qualifier le territoire, car les problèmes de Lille ne sont pas ceux d'Avesnes-sur-Helpe dans votre circonscription.
Enfin, des moyens financiers importants ont été dégagés pour les maisons médicales et la télémédecine. Il faut absolument que, dans ces régions – et tout particulièrement dans votre département –, nous rattrapions le retard. Nous nous y engageons et les résultats sont là.
La parole est à M. Franck Riester, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le ministre, le Président de la République, le Gouvernement et la majorité sont clairement engagés en faveur de la défense de la création et de la préservation de notre exception culturelle.
Un député SRC. C'est raté !
À cet égard, le financement de la création à l'ère numérique est un enjeu majeur qui guide notre action depuis 2007. Pour cela, notre action s'articule autour de deux axes complémentaires.
Le premier axe est la lutte contre le téléchargement illégal. C'est l'objet de l'action préventive et pédagogique qui est aujourd'hui conduite par la HADOPI. À ce titre, je me réjouis de l'envoi, le mois dernier, des premiers mails d'avertissement.
Le deuxième axe est le développement d'offres légales en ligne à la fois attractives pour le consommateur et rémunératrices pour les créateurs.
Dans ce domaine, de nombreuses avancées ont déjà été apportées par le législateur avec la loi HADOPI. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Je pense notamment au raccourcissement de la chronologie des médias, qui permet de voir un film en DVD ou en VOD – vidéo à la demande – quatre mois après sa sortie en salle, contre six mois auparavant. Je pense aussi à la suppression des mesures anti-copie, qui facilite l'achat en ligne.
J'ajoute, mes chers collègues, que le débat parlementaire autour de cette loi a déjà porté ses fruits : les comportements changent. Pour preuve, le marché de la musique légale en ligne a progressé de 50 % en 2009 et croît au même rythme en 2010, et l'envoi des mails d'avertissement va accélérer cette tendance.
Mais nous devons aller encore plus loin en répondant aux attentes et aux besoins des plus jeunes. C'est l'objectif de la Carte musique pour les 12-25 ans. Pourriez-vous vous donc, monsieur le ministre, présenter ce dispositif à la représentation nationale et nous préciser ce que vous en attendez ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. (« Bonsoir ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Dans sa chanson Vesoul, monsieur le député, Jacques Brel chantait : « J'ai voulu voir ta soeur Et on a vu ta mère Comme toujours ». On n'obtient pas souvent ce dont on rêve et, à vouloir écouter sans principes et sans règles, on risquait bien de ne plus voir personne.
Vous avez rappelé, monsieur Franck Riester, les effets dévastateurs du piratage et l'ampleur de l'effondrement de l'industrie musicale – elle a perdu, depuis 2003, plus de 60 % de sa valeur et près de 50 % de ses emplois –, ainsi que l'atteinte portée à la diversité culturelle, au renouvellement de la création musicale et des talents, avec une baisse de 50 % des engagements dans ce domaine.
L'État ne pouvait pas rester passif devant cette situation. La Carte musique a donc été lancée avec succès en fin de semaine dernière.
Subventionnée à 50 % par l'État, cette carte virtuelle permet aux internautes âgés de 12 à 25 ans d'accéder aux offres de musique en ligne sur les plateformes légales de leur choix pour un montant pouvant aller jusqu'à 50 euros. 10 000 cartes ont déjà été achetées. À terme, c'est un million de jeunes qui devrait en bénéficier.
La Carte musique vise à inciter les jeunes internautes à écouter leur musique sur des sites légaux. Conformément à l'engagement du Gouvernement, elle prolonge l'approche pédagogique et préventive mise en oeuvre par la HADOPI, dont la réponse graduée connaît également un démarrage réussi. Alors que les deux tiers des internautes qui téléchargent illégalement se disent prêts à utiliser les services légaux s'ils deviennent moins chers, la Carte musique incitera le plus grand nombre à découvrir l'offre des éditeurs de musique en ligne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
La France agricole est en colère. 34 % de revenus en moins en 2009, 50 % dans certaines filières : aucune autre profession ne pourrait résister et survivre à de tels chiffres. Aujourd'hui, un grand nombre de nos agriculteurs, de nos jeunes agriculteurs, sont dans une situation d'extrême urgence, toutes productions confondues. Des producteurs de tabac, qui manifestent aujourd'hui, et des producteurs de lait aux viticulteurs, des éleveurs aux producteurs de fruits et légumes, pourtant de très grande qualité, comme le melon du Quercy ou, dans mon département, le chasselas, pratiquement aucune filière n'échappe à la crise !
Sans réponse rapide et efficace, le modèle de l'agriculture française, longtemps montré en exemple, est menacé de disparition. Une véritable crise de compétitivité s'est installée. Faut-il rappeler, par exemple, que le coût du travail agricole dans notre pays est presque le double de celui du travail agricole en Allemagne, pays voisin, membre de l'Union européenne comme nous ? Comment expliquer de tels écarts ? Comment accepter que la politique agricole commune cautionne des distorsions de concurrence aussi importantes entre les membres de l'Union européenne ? Je pense notamment à la situation de la filière porcine dans le Lot.
La loi de modernisation agricole votée au début de l'été tarde à produire les effets annoncés et, pendant ce temps, les difficultés continuent. Nos exportations ont chuté de 20 % l'année dernière et les chiffres pour 2010 sont inquiétants. Les agriculteurs ont l'impression que tout s'acharne contre eux : la nature, les marchés, la réglementation européenne, parfois notre administration.
Un député SRC. Et le Gouvernement !
L'effondrement des revenus agricoles a des conséquences désastreuses sur les territoires ruraux et leur économie. Quand l'agriculture est en crise, c'est toute la ruralité qui souffre.
Monsieur le ministre, quelles mesures immédiates comptez-vous donc prendre pour les agriculteurs les plus en difficulté ? De quelle façon la France entend-elle convaincre ses partenaires de mettre un terme aux distorsions intracommunautaires ? Enfin, avez-vous les moyens de redonner confiance aux agriculteurs de ce pays et de leur permettre de vivre à nouveau de leur travail ?
La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Permettez-moi juste de vous dire, madame Orliac, que ce gouvernement n'a pas attendu votre question pour se mobiliser au service des agriculteurs et de leurs revenus. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez raison de souligner le problème de compétitivité des agriculteurs. S'agissant du coût du travail, nous avons adopté, ici, sur les bancs de cette assemblée, une exonération totale de charges sociales et patronales pour le travail occasionnel en agriculture. Cette mesure, qui coûte, chaque année, un demi-milliard d'euros au budget de l'État, permet de ramener le coût du travail occasionnel de 11,29 euros par heure à 9,29 euros. C'est l'exemple concret de l'effort fourni par le Gouvernement pour tous les agriculteurs français, pour qu'ils soient aussi compétitifs que leurs voisins allemands et européens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Au-delà de ces mesures concrètes, nous avons adopté, avec le Premier ministre et le Président de la République, un plan d'urgence d'un montant de 1,8 milliard d'euros. Nous avons adopté, en discutant sur tous les bancs de cette assemblée, une réforme de l'agriculture qui vise à améliorer la compétitivité grâce à la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, avec des instruments, comme les contrats, qui nous permettront d'être aussi compétitifs que nos voisins européens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Nous sommes parvenus, pour la première fois depuis que la politique agricole commune existe, à une position franco-allemande commune qui préserve le budget de la PAC après l'année 2013. C'est cela la meilleure garantie du revenu des agriculteurs après 2013.
Nous sommes totalement mobilisés, à tous les niveaux de l'État, pour garantir et améliorer le revenu des agriculteurs français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Crise agricole
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à dix-huit heures.)
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à l'outre-mer (n° 2857, annexe 30, nos 2860, 2863).
La parole est à M. Claude Bartolone, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, rapporteur.
Monsieur le président, madame la ministre chargée de l'outre-mer, mes chers collègues, je suis très honoré de rapporter devant vous, pour la première fois, les crédits de la mission « Outre-mer ». Cette mission représente à mes yeux davantage que le support de financement d'une politique publique : elle est la manifestation de la spécificité des outre-mer et, plus encore, de la prise en compte de cette spécificité par la République.
Il faut tout de suite rappeler que les crédits de cette mission représentent seulement 16 % de l'effort budgétaire de l'État en faveur des collectivités ultramarines. En effet, le document de politique transversale annexé au projet de loi de finances recense pas moins de 27 missions, qui concourront, en 2011, au financement de la politique de l'État outre-mer.
La mission « Outre-mer » se caractérise également par l'importance des dépenses fiscales. En 2011, elles s'élèveront à plus de 3,2 milliards d'euros, soit 1,6 fois le montant des crédits budgétaires.
Deux articles du projet de loi de finances proposent d'apporter des modifications substantielles au dispositif de défiscalisation des investissements productifs réalisés outre-mer.
L'article 13 propose de supprimer des secteurs éligibles à cette défiscalisation les investissements réalisés dans la production d'énergie photovoltaïque. Cette suppression se justifierait par le constat d'un surinvestissement dans ce secteur. Or, c'est précisément pour lutter contre cette « surchauffe » que la loi pour le développement économique des outre-mer a prévu, à la demande du Gouvernement, un plafonnement spécifique à ces investissements. Les modalités de ce plafonnement devaient être définies par arrêté interministériel ; mais cet arrêté n'a jamais été pris, ainsi que notre collègue Gaël Yanno – que je salue – et moi-même avons eu l'occasion de le souligner dans notre rapport d'application de la LODEOM.
Quelle que soit la position que l'on adopte sur le fond du dossier, il serait regrettable – et ne croyez pas, madame la ministre, que je vous fais un procès d'intention – que le Gouvernement ait volontairement retardé la publication de l'arrêté, sachant que le dispositif de défiscalisation serait lui-même supprimé en loi de finances pour 2011. Une solution de compromis a pu être trouvée lors de l'examen de cet article en séance, un amendement prévoyant une sorte de clause de rendez-vous. Dont acte.
L'article 58 du PLF prévoit, quant à lui, de soumettre un certain nombre de dépenses fiscales à un « coup de rabot ». Pour l'outre-mer, cela se traduirait par un abaissement de 50 à 45 % du taux de la réduction d'impôt sur le revenu ouverte au titre des investissements productifs, la défiscalisation des investissements réalisés dans le secteur du logement social – sur laquelle j'aurai l'occasion de revenir plus loin – étant, elle, épargnée par ce coup de rabot.
Je ne suis pas, par principe, favorable à la défiscalisation. Je le suis d'autant moins que, pour un coût identique, une subvention budgétaire permettrait d'apporter à l'outre-mer un soutien plus important. La commission des finances, dans son rapport de 2008 sur les niches, a bien montré l'existence d'un phénomène d' « évaporation fiscale » inhérent à la défiscalisation.
J'ai donc déposé – et je suis heureux que le président de la commission et le rapporteur général l'aient cosigné – un amendement demandant au Gouvernement la remise d'un rapport étudiant la possibilité de substituer des crédits budgétaires aux dépenses fiscales rattachées à la mission « Outre-mer ». Je ne doute pas, madame la ministre, de l'accueil favorable que vous réserverez tout à l'heure à cet amendement, adopté à l'unanimité par la commission des finances.
Cela étant dit, il ne faudrait pas que les économies fiscales souhaitées par le Gouvernement aboutissent à une réduction du soutien de l'État à l'outre-mer. Cela serait d'autant plus dommageable que la fragilité des collectivités ultramarines a été accrue par la crise sociale de l'hiver 2008-2009, mais également par la crise économique. Comme à son habitude, l'outre-mer est entré plus tard que la métropole dans cette crise, et il en sortira plus tard également, sans nul doute.
Avant d'en venir au budget proprement dit, je souhaite appeler l'attention de l'Assemblée sur la question de l'indemnisation par l'État des compagnies pétrolières lésées par la réduction administrative des prix des carburants dans les départements d'outre-mer. Un temps financé par la mission « Outre-mer », désormais financé par la mission « Économie », ce remboursement a fait l'objet d'une gestion que la Cour des comptes a qualifié d' « erratique ».
Les trois vagues de remboursement ont déjà coûté 175 millions d'euros au budget de l'État, soit, pour mémoire, un montant comparable à celui de l'aide à la cuve versée aux ménages modestes. Pourriez-vous nous indiquer, madame la ministre, quand se termineront ces remboursements, et quelles sont les mesures prises pour régler enfin la question du prix des carburants dans les DOM ?
J'en viens maintenant au projet de budget. Les crédits de la mission « Outre-mer » s'élèveront en 2011 à 2,16 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 1,98 milliard d'euros en crédits de paiement. Ils seraient légèrement en baisse par rapport à 2010 : en baisse de 0,6 % pour les autorisations d'engagement et de 2,3 % pour les crédits de paiement. Le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour les années 2011 à 2014 prévoit cependant une nouvelle hausse des crédits en 2012 et 2013.
S'agissant du programme « Emploi outre-mer », je souhaite insister sur trois points. Il faut tout d'abord remarquer que la dette de l'État à l'égard des organismes sociaux risque de se reconstituer partiellement. Je vous rappelle en effet que les départements d'outre-mer et Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficient d'un régime spécifique d'exonérations des cotisations patronales de sécurité sociale, exonérations compensées par l'État sur la mission « Outre-mer ». L'insuffisance chronique de crédits de paiement a abouti à la constitution d'une dette, que la Cour des comptes chiffrait à 486 millions d'euros fin 2008.
Il faut saluer néanmoins l'effort de réduction très important qui a été entrepris en 2009, ramenant la dette à 76,7 millions d'euros début 2010. Compte tenu de ce stock et de l'écart entre la dotation et les besoins prévisionnels pour 2011, la dette atteindrait, selon mes calculs, 145,5 millions d'euros fin 2011. Je crois savoir, madame la ministre, que vous faites un calcul différent. J'espère que vous pourrez l'exposer à l'Assemblée lors de votre intervention.
Je m'arrêterai en second lieu sur l'aide au fret. Pour la troisième année consécutive, le PLF prévoit une ligne consacrée à cette mesure, à hauteur de 25 millions d'euros. Or cette aide, créée par la LODEOM pour abaisser le prix des intrants et des extrants, n'est toujours pas versée faute de décret d'application. Le décret serait en cours de publication : madame la ministre nous en dira sans doute plus.
Un mot, enfin, du service militaire adapté, programme d'insertion des jeunes en difficulté. Le Président de la République avait annoncé le doublement en trois ans du nombre de volontaires ; les objectifs ont été révisés à la baisse, puisque c'est seulement en 2014, et non plus en 2012, que le cap des 6 000 volontaires devrait être franchi.
J'en viens maintenant au programme « Conditions de vie outre-mer », qui rassemble en son sein de nombreux dispositifs. L'action « Logement » finance notamment, au moyen de la ligne budgétaire unique, la construction de logements sociaux. Par rapport à 2010, le niveau des autorisations d'engagement est stable, mais celui des crédits de paiement recule de plus de 30 %. Pourriez-vous, madame la ministre, nous éclairer précisément sur les motifs de cette baisse ?
Comme je l'évoquais précédemment, le logement social est également financé, depuis la LODEOM, par un nouveau dispositif de défiscalisation, que mon collègue Gaël Yanno a largement détaillé. Cette dépense fiscale est typique de celles qui pourraient utilement être transformées en subvention budgétaire. C'est d'ailleurs ainsi que le logement social était financé jusqu'à l'entrée en vigueur de la LODEOM, qui, à mon sens, a donc introduit une complexité supplémentaire pour les bailleurs sociaux.
Par ailleurs, nous avons montré, avec Gaël Yanno, que l'application de la loi sur ce point précis n'est pas totalement conforme à l'intention du législateur. La défiscalisation a vocation à compléter la LBU, et non à s'y substituer.
Or, madame la ministre, vous avez donné aux préfets, par voie de circulaire, des instructions qui soit vont en sens contraire, soit ont été mal comprises par leurs destinataires. Vous avez aujourd'hui l'occasion de préciser votre interprétation de la loi.
L'action « Aménagement du territoire » finance pour 90 % les dispositifs contractuels entre l'État et les collectivités ultramarines. En 2011, elle financera également le fort accroissement des crédits du fonds mahorais de développement, préparatoire à la départementalisation, ainsi que les travaux de trois commissaires au développement endogènes, postes nouvellement créés. Je dois avouer, madame la ministre, que je suis un peu sceptique sur le rôle de ces commissaires,…
….sachant que la LODEOM avait précisément pour objet de renforcer le développement endogène de l'outre-mer...
L'action « Continuité territoriale » doit financer le nouveau fonds de continuité territoriale mis en place par la LODEOM. Les actes d'application, qui se font attendre depuis dix-huit mois, devraient enfin être publiés et, là encore, madame la ministre, vous ne manquerez pas de nous indiquer où nous en sommes.
Le fonds exceptionnel d'investissement, après avoir été massivement abondé en 2009 dans le cadre du plan de relance de l'économie, ferait en 2011 les frais de l'objectif de réduction des crédits d'intervention du budget de l'État.
Enfin, je souhaite dire quelques mots de la réforme de la dotation globale de développement économique de la Polynésie française, qui concentre l'essentiel des crédits de l'action « Collectivités territoriales ».
L'article 77 du projet de loi de finances, rattaché à la mission « Outre-mer », prévoit de substituer trois nouvelles dotations à la DGDE : une dotation globale d'autonomie pour la Polynésie française, qui serait une dotation de fonctionnement représentant 60 % du montant de l'actuelle DGDE ; une dotation territoriale pour l'investissement des communes de la Polynésie française, équivalant à 6 % de la DGDE ; un concours de l'État aux investissements prioritaires de la Polynésie française enfin, versé sur la base d'une convention et dont le montant correspondrait à 34 % de la DGDE.
Je vous rappelle que, en 2003, la DGDE a pris la suite du Fonds pour la reconversion de l'économie de la Polynésie française, mis en place en 1996 afin de compenser les effets induits par l'arrêt des essais nucléaires. Il était prévu que 80 % de cette dotation d'un montant annuel de 150 millions d'euros financent des dépenses d'investissement ; en fait, jusqu'à 50 % de son montant a pu être consacré à des dépenses de fonctionnement.
En outre, le contrôle de l'État sur l'emploi des fonds s'est révélé défaillant, notamment parce que la DGDE a longtemps été versée en une seule fois, sans condition préalable ni contrôle postérieur. La Cour des comptes et le Parlement ont d'ailleurs sévèrement critiqué les modalités de versement de la DGDE, sans remettre en cause son principe.
L'intention du Gouvernement est donc louable. Cependant, je me demande si elle sera vraiment suivie d'effet car, s'agissant de la partie contractualisée, l'article 77 ne prévoit pas davantage d'encadrement que la convention ayant institué la DGDE.
La commission des finances a adopté les crédits de la mission « Outre-mer » ainsi que l'article 77 rattaché. Pour ma part, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée qui saura faire faire le bon choix du sort à réserver à ces crédits.
La parole est à M. Alfred Almont, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de budget de la mission « Outre-mer » pour 2011, sur lequel j'ai l'avantage d'exprimer un avis au nom de la commission des affaires économiques, marque indéniablement une pause dans la progression qu'il enregistrait depuis trois ans.
Toutefois, selon les termes du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, la tendance à la hausse devrait reprendre pendant la suite de la période concernée. De même, si ce projet de budget rompt avec la logique qui avait prévalu pendant ces trois dernières années, force est de noter que le taux de diminution qui est enregistré pour 2011 se situe en deçà de celui qui frappe les autres missions du budget général.
Faut-il souligner que, globalement, si l'on se réfère aux deux programmes de la mission, « Emploi outre-mer » et « Conditions de vie outre-mer », le budget concerné diminue de 0,55 % en autorisations d'engagement et de 2,28 % en crédits de paiement ?
Monsieur le rapporteur spécial de la commission des finances nous a très clairement présenté la structure et les grandes tendances de ce projet de budget. Je ne reviendrai donc pas sur ce qui a été dit, mais je présenterai les observations que notre commission n'a pas manqué de faire sur les deux programmes qui composent la mission.
Tout d'abord, s'agissant du programme « Emploi outre-mer », si les crédits de paiement affectés à l'aide à l'insertion et à la qualification professionnelle enregistrent une hausse particulièrement importante et encourageante – il s'agit en somme de renforcer le capital emploi –, ceux destinés au soutien aux entreprises diminuent de près de 1,7 %. La difficulté est que cette baisse affecte un secteur déterminant pour le développement des économies concernées.
Ensuite, concernant le programme « Conditions de vie outre-mer », les autorisations d'engagement sanctuarisées pour environ 275 millions, tendent à faire du logement, notamment du logement social, une des priorités pour les années à venir. En revanche, les crédits de paiement destinés au logement se caractérisent par une forte diminution puisqu'ils sont en recul de 9,8 %. La commission entend simplement rappeler que l'amélioration de l'offre de logements figure au nombre des axes majeurs de la loi d'orientation pour le développement économique de l'outre-mer du 27 mai 2009.
Madame la ministre, au vu de ces observations, il serait opportun que vous affichiez ce qui, au fond, justifie ces diminutions, car leur cohérence avec les objectifs de développement économique et social des territoires ultramarins n'apparaît pas clairement aux yeux tant des populations qui expriment des besoins que des professionnels, ceux du BTP en particulier.
Bien entendu, il peut paraître légitime que le ministère de l'outre-mer participe aux mesures de redressement des finances publiques, demandées par le Gouvernement à l'ensemble des départements ministériels ; cela étant, il faut reconnaître que l'outre-mer à déjà consenti des efforts notables à l'occasion de l'adoption de la LODEOM en ce qui concerne, par exemple, le logement, les investissements productifs ou les exonérations de charges sociales.
Or cette loi, véritable cadre de développement économique de l'outre-mer, est un élément majeur de l'architecture d'ensemble mise en oeuvre par le Conseil interministériel de l'outre-mer du 6 novembre 2009 qui a pris pas moins de 137 mesures concrètes pour préparer l'avenir.
Dans un tel contexte, le développement économique des outre-mer, qui ne saurait être conçu sans une concertation approfondie, demande que soit mis en place des moyens et des dispositifs adaptés en faveur d'un développement endogène des territoires concernés.
Madame la ministre, nous relevons tout de même que vous avez pris à coeur cette mission puisque, à ce jour, nombre des dispositions de la LODEOM sont entrées en vigueur. Il importe désormais que les décrets d'application encore en attente interviennent au plus tôt, en particulier celui concernant l'aide au fret. Nous savons tous que les industriels locaux attendent d'autant plus impatiemment cette mesure qu'elle est intervenue pour compenser partiellement la suppression de la TVA non perçue récupérable dont le produit constituait une contribution financière appréciable pour les secteurs d'activité concernés.
Nous avons relevé avec intérêt que les crédits exceptionnels du plan de relance sont maintenus, et qu'un Fonds de garantie pour l'agriculture et la pêche, doté de vingt millions d'euros en autorisations d'engagement et de six millions d'euros en crédits de paiement, est institué. Madame la ministre, nous avons noté vos engagements à faire en sorte que, dans des conditions qu'il nous plairait de connaître, l'aide à la rénovation hôtelière soit enfin opérationnelle pour contribuer à promouvoir le secteur du tourisme, déterminant en termes de développement.
Tout bien considéré, notre commission à estimé que la mission « Outre-mer », à proprement parler, s'attelle à répondre pour 2011 aux engagements des deux programmes qui la constituent à partir de crédits qui, il est vrai, sont assurés en plus grande partie en autorisations d'engagement – sans doute pour aider à mieux engager l'avenir.
Mais la commission n'a pas manqué de relever à l'occasion de l'examen du PLF pour 2011 que les outre-mer se trouvent également concernés par d'autres dispositifs budgétaires qui, pour certains d'entre eux, sont de nature à faire obstacle à leur expansion.
S'agissant précisément du développement économique et social, nous ne pouvons que regretter que des mesures figurant dans le projet de loi de finances pour 2011 affectent directement l'outre-mer pourtant confronté à des handicaps structurels bien connus, à la fois spécifiques et invariables, qui motivent de justes dérogations. L'annonce de tels dispositifs a fait naître de véritables inquiétudes, tant il est vrai qu'ils s'appliquent pratiquement de manière uniforme aux régions d'outre-mer comme à celles de l'Hexagone.
J'aborde, à mon tour, les dispositions de l'article 13 du projet de loi de finances qui concerne l'aménagement des avantages fiscaux à l'investissement dans la production photovoltaïque. Deux dispositions de cet article concernent très directement les outre-mer que l'on peut considérer aujourd'hui comme de véritables laboratoires de développement technologique dans ce secteur des énergies renouvelables. Le coup d'arrêt qu'elles porteraient à la diversification énergétique paraît peu compatible tant avec les objectifs du Grenelle de l'environnement, qui ont révélé pour nos territoires des atouts concurrentiels, qu'avec la volonté réaffirmée par la LODEOM d'aller vers une plus grande autonomie énergétique de l'outre-mer dans le cadre d'un développement endogène.
L'adoption, en l'état, de ces mesures présenterait de réels inconvénients en ce qui concerne, non seulement, la diversification énergétique, mais aussi le plan de charge des entreprises locales et, par voie de conséquence, l'activité et l'emploi, car aujourd'hui ce secteur représente près de 1 700 emplois directs.
À cet égard, il importe de rappeler que les outre-mer sont largement dépendants des importations pétrolières, avec les difficultés qui en résultent. C'est l'une des raisons qui, parmi d'autres, nous ont conduits à proposer l'adoption d'un moratoire, de façon à permettre de vérifier le fondement des amendements proposés, d'en mesurer l'impact réel sur les économies ultramarines, voire de les réaménager en en déplaçant chronologiquement l'application, afin de ne pas affecter la réalisation des projets déjà engagés.
Il serait à notre avis regrettable que la volonté de réguler les niches fiscales, en s'appuyant sur un rapport de l'inspection des finances qui ne traite du photovoltaïque que sous son angle hexagonal, sans se pencher sur la situation des territoires ultramarins avec leur particularisme climatique, soit un peu trop brutale et dès lors préjudiciable au développement de ces territoires.
Je note néanmoins avec satisfaction qu'au cours de la discussion de l'article 13 devant notre assemblée, le Gouvernement n'est pas resté sourd à nos arguments. Le ministre du budget, en réponse aux propositions formulées par les députés sur la base d'amendements argumentés, a décidé de créer une commission composée d'élus et de représentants de l'administration. La mission confiée a cette commission répond au triple objectif que nous appelions de nos voeux pour faire en sorte de préserver le développement du photovoltaïque dans des conditions que l'autorité régionale s'applique d'ailleurs à encadrer.
Au terme de ces réflexions, le ministre du budget, n'a pas exclu de faire figurer dans le prochain projet de loi de finances rectificative, présenté en juin 2011, celles des dispositions traduisant les préconisations de cette commission qui seraient reconnues comme appropriées.
J'en viens aux dispositions de l'article 58 du projet de loi de finances pour 2011. Il concerne la réduction homothétique de l'avantage en impôt procuré par certains avantages fiscaux,…
…que nous aurons à examiner très prochainement.
Cet article prévoit notamment de modifier le dispositif de défiscalisation des investissements immobiliers au profit des DOM, figurant à l'article 199 undecies B du code général des impôts, alors que la LODEOM en a déjà réduit la portée.
Il est aujourd'hui à craindre que l'instabilité des dispositifs successifs, aggravée par les restrictions qui sont annoncées, n'offre pas aux investisseurs potentiels les conditions de visibilité et de confiance suffisantes pour susciter leur engagement outre-mer et qu'elle les détourne vers des investissements plus attractifs, à un moment où les économies, davantage encore affectées par la crise mondiale, cherchent à rebondir.
Nous constatons bien sûr avec satisfaction que le logement social échappe aux restrictions.
L'objectif affiché consiste pour l'État à contribuer clairement à la relance de la production de logements sociaux, et nous savons que le nombre de dossiers en cours d'instruction avoisine les 5 000.
Des interrogations demeurent cependant quant à la réforme intervenue dans les territoires ultramarins en faveur du logement social, qui associe la ligne budgétaire unique et le dispositif de défiscalisation, dans des conditions qui ne permettent pas toujours une lecture limpide. Madame la ministre, il serait opportun d'apporter un éclairage significatif qui rende plus lisible l'action de l'État sur une ligne budgétaire dont les crédits sont désormais sacralisés en autorisations d'engagement pour soutenir un secteur encore en grande difficulté.
Quoi qu'il en soit, nous prenons acte qu'un premier pas semble avoir été franchi dans le sens de l'assouplissement des dispositifs projetés pour 2011. Nous en attendons d'autres dans la mesure où le développement des territoires ultramarins suppose, à n'en point douter, l'intervention de dispositifs adaptés à d'irréductibles particularismes.
Responsable, et soucieux du développement économique et social auquel aspirent nos territoires, je reprendrai ces mots d'Aimé Césaire qui traduisent la vigilance qui doit plus que jamais nous animer : « Je suis du côté de l'espérance, mais une espérance conquise, lucide, hors de toute naïveté ».
Conformément à l'avis favorable émis par la commission sur la base des explications et des informations qu'elle a reçues, je vous invite, mes chers collègues, à adopter le budget de la mission « Outre-mer » pour 2011.
La parole est à M. Didier Quentin, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'important effort de redressement de nos finances publiques, en cours, a naturellement un impact sur le budget alloué à la mission « Outre-mer » pour l'exercice 2011.
Mais je souhaite nuancer ce constat : Si les crédits de paiement sont réduits de 2,3 %, les autorisations d'engagement ne diminuent que de 0,6 %. Il faut aussi noter que cette diminution fait suite à deux années pendant lesquelles ces crédits ont fortement augmenté, de 9 % puis de 6 %. Enfin, la loi de programmation des finances publiques prévoit une hausse de 2 % des autorisations d'engagement et de plus de 6 % des crédits de paiement sur trois ans.
Je rappelle, en outre, que ce budget ne représente qu'environ un dixième de l'effort global de l'État au profit des collectivités ultramarines. Celui-ci s'élève, pour 2011, à plus de 16,2 milliards d'euros, dont 3,2 milliards de dépenses fiscales.
La réduction des crédits de la mission en 2011 est, en grande partie, compensée par une meilleure allocation des ressources Je pense notamment à la réforme de la continuité territoriale prévue par la LODEOM de 2009. Le niveau des crédits de la mission permet ainsi de financer les priorités du budget, notamment le logement social avec la sanctuarisation de la ligne budgétaire unique.
Les mouvements sociaux qui ont secoué les Antilles et La Réunion à la fin de l'année 2008 et au début de 2009 nous ont, en effet, rappelé que le principal défi que doit aujourd'hui relever l'outre-mer français est de nature économique et sociale.
N'oublions jamais que le développement des territoires demeure fragile, que le niveau de vie y est globalement inférieur à celui de la métropole et que le chômage est en outre-mer près de trois fois plus élevé que la moyenne nationale.
Ce budget est aussi marqué par l'application aux niches fiscales concernant l'outre-mer du fameux « coup de rabot » de 10 %. Cependant, ce coup de rabot est sélectif ; tant mieux ! C'est ainsi qu'il ne sera pas appliqué à l'investissement dans le logement social outre-mer. Madame la ministre, je vous félicite pour cette décision prise par le Gouvernement. La défiscalisation prévue par la LODEOM de mai 2009 constitue, en effet, un outil déterminant pour favoriser la finalisation des plans de financement proposés par les bailleurs sociaux.
S'agissant des thèmes qui relèvent plus spécialement de la compétence de la commission des lois, j'évoquerai principalement l'actualité institutionnelle des outre-mer, en commençant par la départementalisation de Mayotte.
Après le oui, franc et massif, à la transformation de la collectivité de Mayotte en département d'outre-mer, la loi organique du 3 août 2009 a prévu que cette transformation aurait lieu en mars 2011, à l'occasion du renouvellement du conseil général. Une intervention du législateur est nécessaire avant cette date, afin de définir les modalités de fonctionnement des nouvelles institutions et de préciser l'applicabilité de certains textes à la nouvelle collectivité. Tel est l'objet de deux projets de loi, dont l'un est organique, qui ont été adoptés en première lecture par le Sénat à l'unanimité le 22 octobre dernier et qui seront soumis à notre assemblée le 23 novembre prochain. Sur le plan institutionnel, une collectivité unique, le département de Mayotte, sera créée, qui se substituera au département et à la région d'outre-mer.
S'agissant de l'extension du droit commun, le projet de loi rend applicables à Mayotte, dès mars 2011, un certain nombre de textes dans de nombreux domaines : copropriété, éducation nationale, protection du patrimoine culturel notamment. Il habilite le Gouvernement à procéder par voie d'ordonnance à d'autres extensions dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi. Des ordonnances seront ainsi prises, notamment en matière de protection sociale, de droit du travail, d'urbanisme ou d'environnement.
Le processus sera nécessairement progressif, compte tenu des contraintes particulières qui pèsent sur l'archipel. La pleine accession de Mayotte au droit commun des DOM suppose que des progrès continuent d'être réalisés. Je n'évoquerai, par manque de temps, que deux sujets : l'état civil et l'immigration clandestine.
La pression migratoire qui s'exerce sur Mayotte demeure très forte. Les moyens de surveillance ont été développés : désormais, quatre radars fixes assurent la surveillance maritime aux quatre coins de l'archipel. La lutte contre l'immigration illégale se double d'une politique de développement solidaire avec les Comores, la France finançant des programmes de co-développement en matière d'adduction d'eau potable, d'énergie et d'infrastructures.
La seconde question, celle de l'établissement d'un état civil fiable, devrait être résolue en 2011. Depuis juillet dernier, il n'est plus possible de saisir la commission de révision de l'état civil, la fameuse CREC, ce qui doit permettre à cette commission d'achever le traitement des milliers de dossiers en souffrance d'ici au terme de son mandat, en avril 2011. Je rappelle qu'un état civil fiable est une condition indispensable notamment à l'application d'un régime fiscal ou au versement de prestations sociales. Nous reviendrons, à coup sûr ces sujets lors de l'examen des deux projets de loi.
Pour terminer, je voudrais dire quelques mots des évolutions institutionnelles à venir des autres collectivités ultramarines.
En Nouvelle-Calédonie, le calendrier des transferts de compétences, arrêté par la loi organique du 3 août 2009, est respecté. Cela se vérifie notamment en matière d'enseignement du second degré, d'enseignement primaire privé et de circulation aérienne et maritime intérieure. Le Congrès ayant adopté en décembre 2009, à la majorité des trois cinquièmes, trois lois du pays qui en précisent l'échéancier et les modalités.
La seconde étape sera marquée par le vote, avant le 31 décembre 2011 et selon la même procédure, du transfert des compétences en matière d'état civil, de droit civil et commercial et de sécurité civile. Madame la ministre, nous prenons acte que, lors de votre audition devant nos commissions des affaires économiques et des lois, vous nous avez confirmé que cette date serait respectée.
Dans les départements d'outre-mer, les états généraux qui se sont tenus, l'an dernier, aux Antilles et en Guyane ont mis en évidence une attente importante en matière d'évolution institutionnelle, dans le sens d'une plus grande autonomie statutaire. Conformément à l'engagement pris par le Président de la République en juin 2009, selon lequel les DOM-ROM pourront choisir leurs évolutions institutionnelles à leur rythme, des référendums ont été organisés en janvier 2010 en Martinique et en Guyane. Ils ont abouti à l'approbation du régime de l'article 73 de la Constitution conduisant à une collectivité unique regroupant les compétences des actuels conseils généraux et régionaux.
Un projet de loi devrait donc être prochainement élaboré par le Gouvernement en concertation avec les élus locaux, afin de tirer les enseignements de ces scrutins et de fixer les règles de fonctionnement de la collectivité unique pour ces deux territoires.
Il faudra en effet notamment préciser les modalités de fonctionnement de l'assemblée délibérante, définir le régime électoral de leurs membres et déterminer la date d'entrée en vigueur des nouvelles institutions.
L'instabilité politique chronique de la Polynésie française,…
…, d'où vous revenez, madame la ministre, conduit le Gouvernement à réfléchir à une modification de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française. Il s'agirait tout à la fois de réformer le mode de scrutin des représentants de l'Assemblée de Polynésie française et d'améliorer le fonctionnement institutionnel de la collectivité, pour garantir plus de stabilité aux majorités élues. Une mission confiée à M. Barthélémy, conseiller d'État, a été chargée de procéder à une concertation avec les élus. Un projet de loi organique s'inspirant des conclusions de cette mission devrait être prochainement déposé au Parlement. Lors de votre audition, madame la ministre, vous nous avez indiqué que ce texte pourrait être présenté avant la fin de l'année 2011 ; nous le souhaitons ardemment.
Mes chers collègues, je vous invite, au nom de la commission des lois, à adopter les crédits de la mission outre-mer pour 2011. Puisque Alfred Almont a évoqué Aimé Césaire et l'espérance,…
…vous me permettrez de citer une formule d'un autre grand écrivain français, Bernanos : « L'espérance est un risque à prendre ». Ce risque, nous le prenons pour notre outre-mer.
Nous en venons aux orateurs inscrits dans la discussion.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Outre-mer » est, chaque année, l'occasion pour la représentation nationale de se pencher sur l'effort budgétaire consenti par l'État en faveur non seulement de nos départements et collectivités d'outre-mer, mais aussi, et plus largement, de nos concitoyens ultramarins eux-mêmes.
Toutefois, ce débat prend, aujourd'hui, une tonalité toute particulière puisqu'au terme de deux exercices budgétaires marqués par une hausse soutenue des crédits, les sommes allouées à cette mission apparaissent, cette année, en léger recul. Celui-ci est net pour ce qui est des crédits de paiement – moins 2,3 % –, alors que les autorisations d'engagement se maintiennent à un niveau sensiblement équivalent à celui de la loi de finances pour 2010 en ne diminuant que de 0,6 %.
Dans un contexte budgétaire qui, nul ne l'ignore ici, est sans doute plus contraint que jamais dans notre histoire récente et alors qu'il s'agit, pour la France comme pour la plupart de ses partenaires européens, de maîtriser le volume de la dépense publique pour juguler enfin l'étendue de ses déficits, cette évolution se justifie. Néanmoins, reconnaissons qu'en 2011, cette mission, essentiellement composée de dépenses d'intervention, prend plus que d'autres sa part dans l'effort global de redressement de nos comptes publics.
Comme souvent, une telle situation ne laisse d'autre choix que de recentrer l'action publique autour de ses axes présumés les plus stratégiques. De fait, les crédits affectés à chacun des deux programmes, « Emploi outre-mer » et « Conditions de vie outre-mer », qui structurent cette mission connaissent des évolutions diamétralement opposées : le premier bénéficie d'une hausse sensible de ses crédits ; le second semble concentrer l'ensemble des économies.
Cependant, au-delà des querelles de pourcentages, je veux saluer le fait que sont préservées les dépenses liées à certaines politiques tout à fait centrales pour le développement de nos départements et collectivités d'outre-mer. Il en va ainsi de la ligne budgétaire unique en faveur du logement, c'est-à-dire, plus largement, des crédits consacrés à la lutte contre l'habitat insalubre par le soutien à la production de logements sociaux, ligne budgétaire qui se trouve sanctuarisée pour les trois années à venir à son niveau de 2010, c'est-à-dire à un niveau intégrant les crédits déployés en 2009 au titre du plan de relance. Chacun le sait, dans beaucoup de nos territoires, tels que la Guyane, les besoins restent aujourd'hui encore immenses, puisque, dans ce département, par exemple, près de 15 % de nos concitoyens habitent un logement qualifié d'insalubre.
Il en va ainsi également des dispositifs consacrés à l'insertion professionnelle et à la mobilité des jeunes ultramarins. Je pense non seulement à la montée en puissance du service militaire adapté, mais aussi aux mécanismes introduits par la LODEOM afin d'assurer une continuité territoriale effective entre l'Hexagone et nos collectivités d'outre-mer. En effet, mes chers collègues, s'il est un enseignement à tirer de la violente crise sociale qui a ébranlé, voilà quelques mois, les départements français d'Amérique et La Réunion, c'est que l'existence de ces départements et collectivités, leur appartenance à la République, n'ont de sens véritable que si les notions traditionnelles de solidarité nationale, d'équité et de continuité territoriale y prennent, plus qu'ailleurs, tout leur sens.
À ce propos, madame la ministre, je regrette le retard pris dans la lutte contre les monopoles, qui furent sans doute la cause réelle de cette crise. Je sais que c'est difficile, mais les abus de position dominante, présents de manière endémique dans nos territoires d'outre-mer, renchérissent la vie de nos concitoyens ultramarins et ne leur donnent pas le sentiment d'appartenir réellement à la communauté nationale. Je veux également souligner, comme le feront sans doute un certain nombre de mes collègues, le retard pris dans l'élaboration de certains décrets d'application de la LODEOM, qu'il s'agisse de l'aide au fret ou des textes relatifs à la réforme du dispositif de continuité territoriale. Si nous n'ignorons pas l'ampleur des défis auxquels votre ministère a eu à faire face ces derniers mois, il demeure que ces retards sont regrettables, peu compréhensibles localement et qu'ils nuisent finalement à la crédibilité de l'action publique.
Par ailleurs, la notion de continuité territoriale est essentielle pour nos compatriotes établis outre-mer, mais aussi pour tous ceux qui, originaires de ces départements ou de ces collectivités, vivent en métropole et ont droit à une vie familiale normale, qu'il s'agisse de se déplacer, de téléphoner ou simplement d'envoyer du courrier. Alors que l'équité de traitement entre nos concitoyens ultramarins et nos concitoyens corses est encore loin d'être acquise, il importe que les dispositifs couverts par cette action soient mobilisés de la manière la plus efficace possible et étendus à nos concitoyens métropolitains originaires d'outre-mer.
Monsieur le président, vous avez fait des efforts, car j'ai le souvenir qu'il y a quelques années, nous discutions des crédits de l'outre-mer exclusivement la nuit.
C'est exact, cher collègue. Toutefois, nous devrions être plus nombreux à nous intéresser à ces questions, ne serait-ce que pour représenter ceux de nos concitoyens ultramarins qui vivent dans les circonscriptions métropolitaines.
Au-delà des priorités de la mission « Outre-mer » pour l'exercice budgétaire à venir, il convient sans doute de relativiser quelque peu la baisse de ses crédits et, partant, les discours sur le désengagement de l'État vis-à-vis de nos concitoyens d'outre-mer. Sur la durée d'abord, car, compte tenu des montants retenus dans la loi de programmation pluriannuelle de nos finances publiques, l'enveloppe affectée à la mission « Outre-mer » augmentant de manière globale sur la période 2011-2013, cette baisse est appelée à n'être que ponctuelle. Sur le fond ensuite, dans la mesure où les crédits de cette mission ne représentent au final qu'une faible part – 16 % – de l'effort budgétaire global consenti par l'État en faveur de l'outre-mer.
En effet, bien loin de se limiter aux quelque deux milliards d'euros de crédits de paiement inscrits dans cette seule mission, cet effort atteindra en réalité près de treize milliards d'euros en 2011, ceux-ci se répartissant entre 89 programmes budgétaires différents. Néanmoins, la pratique veut parfois – trop souvent – que certains ministères considèrent en gestion leur enveloppe pour l'outre-mer comme une variable d'ajustement de leurs propres politiques. Mes chers collègues, vous serez d'accord pour dire clairement avec moi que ces pratiques, incompatibles avec le principe de sincérité budgétaire et celui de l'égalité des citoyens devant la politique de l'État, doivent cesser. J'espère que l'institutionnalisation croissante d'organes tels que le conseil interministériel de l'outre-mer permettra de tourner définitivement le dos à ce type de pratiques bien peu courageuses de certains de vos collègues, madame la ministre.
J'en viens enfin aux dépenses fiscales, qui constituent l'ultime composante de l'intervention financière de l'État outre-mer. Réduites de près de 400 millions d'euros au titre du désormais fameux « coup de rabot », elles se chiffreront tout de même à près de 3,2 milliards d'euros en 2011.
Concernant les exonérations fiscales spécifiques à l'outre-mer, je voudrais revenir un instant sur l'esprit dans lequel les députés du Nouveau Centre ont proposé, dans le cadre de cette loi de finances, le plafonnement ou la remise en cause de certaines niches fiscales. Il ne s'agit pas pour nous, en prônant le plafonnement, de remettre en cause des outils fiscaux dont ces territoires ont besoin pour compenser les handicaps structurels découlant tant de leur éloignement que de l'étroitesse de leur marché intérieur ou encore de la concurrence immédiate de bassins d'emplois à faible coût de main-d'oeuvre. Il s'agit au contraire, à l'heure où nous devons oeuvrer au redressement de nos comptes publics et où nos concitoyens n'ont de cesse de réclamer plus de justice fiscale, de permettre à ces niches de mieux stimuler l'investissement et la croissance outre-mer, tout en empêchant qu'elles ne deviennent, pour nos compatriotes les plus fortunés et les mieux informés sur notre législation fiscale, un moyen de se soustraire à l'impôt – en faisant au passage la fortune des cabinets de défiscalisation.
C'est pourquoi je veux me réjouir de l'attention particulière dont a bénéficié l'outre-mer dans le cadre de la préparation de cette loi de finances. Si les exonérations relatives au secteur photovoltaïque sont opportunément supprimées, ce secteur frôlant en réalité la surchauffe dans certains départements, les mécanismes destinés à stimuler l'investissement dans le logement social ont, quant à eux, été pérennisés, ce qui constitue pour le Nouveau Centre, qui le demande depuis de nombreuses années, une réelle satisfaction.
De création récente et pour des motifs évidents de cohérence, les mécanismes fiscaux introduits par la LODEOM n'ont, pour leur part, pas été remis en cause à ce stade. Il importe néanmoins que nous nous montrions, là aussi, des plus vigilants quant à l'efficacité réelle de ces dispositifs, la dépense fiscale ne pouvant plus constituer l'alpha et l'oméga de l'action publique. Plus largement, il importera, lors des prochains mois, de se pencher sur les effets concrets de cette loi. En effet, il semble bien souvent que les résultats – je pense notamment à la question des monopoles – ne soient pas encore à la hauteur de nos espérances. Sur bien des aspects, des progrès restent à faire, mais la ligne est tracée.
Madame la ministre, mes chers collègues, dans un contexte budgétaire contraint, cette mission prend toute sa part à l'effort général de redressement de nos finances publiques. Pour autant, elle le fait de manière juste et équilibrée, et c'est à ce titre que les députés du Nouveau Centre voteront les crédits de la mission outre-mer que vous nous présentez.
Monsieur le président, il me semble qu'il est de tradition dans cet hémicycle que le ministre prenne la parole après les rapporteurs afin de faire connaître sa position. Or, nous avons commencé à entendre les orateurs de manière assez abrupte – un peu blip, comme on dit chez nous –, sans que Mme la ministre nous ait exposé son point de vue. Nous prenons acte du fait qu'elle n'a pas souhaité s'exprimer, mais je tiens à souligner que cette manière de procéder me paraît quelque peu étonnante, et sans doute ne suis-je pas le seul à avoir cette impression.
Mon cher collègue, je vous précise qu'en matière budgétaire, il est de tradition constante que le ministre ne s'exprime que lorsque tous les orateurs sont intervenus. Il n'y a donc rien d'anormal dans la façon dont se déroule cette séance.
Madame la ministre, je voulais avant toute chose vous remercier de l'attention dont vous avez fait preuve à l'égard des Polynésiens, non seulement en vous rendant par deux fois en Polynésie française cette année, mais aussi en veillant à la bonne organisation des deux missions qui s'y sont déroulées : la première, conduite par Mme Anne Bolliet, inspectrice générale des finances, qui a, dans son rapport rendu en septembre, fait un bilan exhaustif et sans concession de la situation financière et économique de notre collectivité ; la seconde, menée par M. Jacques Barthélemy, conseiller d'État, qui a permis de définir les contours d'une réforme du mode de scrutin et du fonctionnement de nos institutions, aussi urgente qu'indispensable.
Madame la ministre, si j'insiste sur cette double démarche que vous avez soutenue et appuyée, c'est parce qu'en examinant le budget de votre ministère, j'y retrouve les mêmes préoccupations : celles de voir les affaires publiques, les affaires de la France et de l'outre-mer en particulier, conduites dans un esprit de plus grande responsabilité et avec une véritable implication des acteurs locaux dans la gestion de leur collectivité.
Aujourd'hui, il faut le dire clairement, ce n'est pas ici à Paris, au sein de cet hémicycle, que se joue l'avenir de la Polynésie française. Non, les clés de l'avenir de la Polynésie sont bien entre les mains des Polynésiens, et cet avenir repose sur la réalisation rapide de deux conditions majeures.
Le retour à la stabilité politique est le préalable indispensable à toute chose. Permettre à la Polynésie française de se construire autour d'un nouveau modèle de développement ne pourra se faire sans que l'on s'assure qu'émerge une majorité suffisamment forte pour garantir la mise en oeuvre, dans la durée, de mesures qui nécessitent conviction, détermination et persévérance dans l'effort.
Les grandes lignes de la réforme que vous avez exposées devant les Polynésiens lors de votre dernier séjour vont dans ce sens. En faudrait-il une meilleure preuve que l'opposition qu'elle suscite de la part de tous ceux qui, successivement au pouvoir tout au long de ces dernières années, ont tour à tour contribué et profité de cette instabilité, conduisant la Polynésie française dans le gouffre où elle se trouve aujourd'hui ?
Il faut – et vous l'avez bien compris, madame la ministre – faire place à la réforme, à une nouvelle génération qui rompe avec les pratiques et les comportements d'hommes politiques du passé, d'hommes politiques dépassés. Peut-être ce projet de budget est-il le signe avant-coureur de ce retour à la raison et à l'intérêt général que nous attendons tous. Il sera en effet, pour la Polynésie française, le budget de la réforme de la dotation globale de développement économique, qui fera que dorénavant, la Polynésie française, comme les autres collectivités de la République, verra les concours financiers que l'État lui apporte sanctuarisés dans la loi.
Je tiens à saluer particulièrement la cohérence des instruments financiers mis en place ces dernières années, qui permettent aujourd'hui à l'État, sur des secteurs primordiaux, d'accompagner la Polynésie française dans la réalisation de ses investissements publics : le logement social, la santé et l'environnement au titre du contrat de projets 2008-2013 ; les constructions de l'enseignement secondaire, au titre de la dotation globale d'investissement du ministère de l'éducation nationale ; enfin, les missions de base de l'équipement au titre du nouveau dispositif venu remplacer l'actuelle DGDE, qui entrera en vigueur dès le début de l'année prochaine.
Cela étant, au-delà de la panoplie, la capacité réelle de ces dispositifs à répondre aux besoins avérés de notre collectivité pourrait être fortement obérée si un certain nombre d'interrogations n'étaient pas levées quant à leur ampleur et quant à leurs procédures de mise en oeuvre. Tout d'abord, la dotation globale d'investissement versée par le ministère de l'éducation nationale, dispositif contractuel transitoire mis en place en 2007 dans l'attente de l'instauration d'une dotation globale de compensation, n'a cessé de décroître depuis sa création, passant de 10 millions d'euros en 2007 à 5 millions d'euros en 2008, 3,5 millions d'euros en 2009 et 2010, et seulement 1,25 million d'euros prévu en autorisations d'engagement pour l'année prochaine. Je suis perplexe : comment un dispositif transitoire peut-il se révéler dégressif dans les faits ?
Par ailleurs, j'avais noté l'année dernière, lors de la discussion du projet de loi du budget de l'outre-mer pour 2010, que s'agissant de l'ancienne DGDE, le montant des crédits de paiement inscrits ne couvrait pas celui des autorisations d'engagement. Vous m'aviez alors assuré que, si l'exécution budgétaire des opérations d'investissement bénéficiant au sein du budget de la Polynésie du concours financier de la DGDE nécessitait d'abonder ces crédits, ils le seraient.
J'en déduis – et je souhaiterais, madame la ministre, que vous puissiez me le confirmer – que la couverture des autorisations d'engagement en crédits de paiement se fera bien, in fine, en tenant compte du niveau d'exécution des opérations d'investissement dans les secteurs concernés par le volet du nouveau dispositif contractuel.
Le secteur privé doit retrouver toute sa place dans le fonctionnement de notre économie locale en même temps que nous desserrons l'emprise que les pouvoirs publics exercent sur bien trop de secteurs relevant d'une activité concurrentielle. À cet égard, je vous demande de tout faire pour que se poursuivent les mesures de défiscalisation pour le secteur des énergies renouvelables. Ne coupons pas les ailes prématurément à un secteur qui peut, par son développement, répondre à la fois à des préoccupations conjoncturelles liées à la crise que nous connaissons, et à la volonté également affirmée de favoriser l'exploitation des ressources locales.
Je profite également de l'occasion dont je dispose pour saluer l'engagement de l'État, aux côtés de la Polynésie française, dans le financement des études de faisabilité de ce qui doit devenir la première centrale « d'énergie thermique des mers » au monde, et l'opportunité pour la France de prendre le leadership international dans un domaine d'avenir hautement stratégique.
Avant de conclure, madame la ministre, je voudrais aussi revenir sur la situation sociale en Polynésie française. Vous avez pu mesurer le retard considérable qui existe en matière de logement social et les difficultés à progresser aussi rapidement qu'il serait souhaitable en ce domaine. Vous avez pu prendre connaissance des chiffres en matière de pauvreté, qui sont édifiants. Vous savez les difficultés, mais aussi les efforts faits pour préserver le système de protection sociale en Polynésie française. En ces domaines où se pose la question essentielle de la solidarité envers les plus démunis, nous devons réfléchir ensemble, afin que l'État y prenne ou y reprenne toute sa place.
Pour conclure, madame la ministre, je voudrais vous dire combien les Polynésiens ont apprécié votre franchise et votre détermination pour les aider à surmonter une situation difficile. Nous savons aussi combien vous êtes soucieuse de ce que les Polynésiens fassent leurs propres choix et les assument. Je ne peux, en tant que député de la République, que saluer cette préoccupation. Et je vous le dis sans détours, ne refusons pas aux Polynésiens la possibilité de faire ces choix à l'occasion de nouvelles élections et de saisir ainsi la chance de se donner une véritable majorité pour changer vraiment.
Pour conduire la réforme, nous devons renouer avec un exercice du pouvoir fondé sur la légitimité du suffrage universel et sur la prise en compte de l'intérêt général. Madame la ministre, vous pouvez compter sur mon soutien et sur mon vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, je persiste à croire que la façon dont se déroulent nos débats constitue un bien mauvaise manière à notre égard : quoi que dise le règlement, il me semble que Mme la ministre aurait pu nous exposer son budget avant que les orateurs ne s'expriment.
Madame la ministre, vous nous présentez un très mauvais budget, qui ne nous inspire que de l'accablement. Certes, nous devons contribuer comme les autres à payer la facture d'une crise aggravée par trois années d'une mauvaise politique. Cependant, nous n'acceptons pas d'être mis doublement à contribution.
Premièrement, vos crédits baissent deux fois plus que les autres dépenses, avec notamment une véritable Berezina pour le logement social, à savoir la suppression pure et simple de 34 millions d'euros de crédits. C'est l'équivalent de la LBU pour la Martinique qui disparaît, alors même que la mise en oeuvre de la défiscalisation dans ce domaine est une catastrophe et que, comme vous le savez, tous les dossiers sont bloqués à Bercy ! Je n'aurai pas le temps, en cinq minutes, de détailler les différentes coupes budgétaires qui nous inquiètent. Je vous ai posé une douzaine de questions très précises lors de votre audition en commission, auxquelles je n'ai toujours aucune réponse – mais nous y reviendrons avec nos amendements.
Deuxièmement, nous déplorons l'assèchement, à hauteur de 330 millions d'euros, des investissements outre-mer qui touchent sans distinction le logement, les investissements productifs, les secteurs pourtant considérés comme prioritaire par la LODEOM – dont, par ailleurs, un tiers des mesures, en général les seules positives, ne sont toujours pas mises en oeuvre dix-huit mois après le vote de la loi !
Nous payons même une troisième fois la facture en voyant – certes, comme tout le monde – les moyens des politiques publiques se faire ratiboiser dans le cadre de la fameuse RGPP, qui se traduit par une baisse drastique des moyens de l'éducation nationale, de la santé, des dotations aux collectivités, et j'en passe. Ainsi, le fameux effort national de l'État de 16 milliards d'euros pour les outre-mer, auquel vous nous renvoyez chaque année, est lui-même en baisse sensible – de 150 millions d'euros en autorisations d'engagement ou de 300 millions d'euros en crédits de paiement.
Ce fameux document de politique transversale est d'ailleurs particulièrement choquant dans sa conception et dans sa philosophie : pourquoi les outre-mer seraient-ils les seuls à devoir se résumer à un coût pour la Nation ? Pourquoi ne présente-t-on pas également le coût d'autres régions comme l'Île-de-France, la Corse, la Bretagne ou que sais-je encore ? Regardez ce document : tout y est comptabilisé, les dépenses de police et de gendarmerie, celles de la défense, les salaires des fonctionnaires, pour en venir à la conclusion que la République « aide les outre-mer » ! Non, le fait que la République dote les outre-mer des moyens nécessaires à leur fonctionnement est simplement normal ! Madame la ministre, la stigmatisation des outre-mer, la voilà, nourrie par l'ignorance de nos réalités !
Comment faire mine d'ignorer le tribut prélevé depuis des décennies par les transporteurs aériens, en particulier Air France, et l'impuissance récurrente du législateur et des exécutifs face à ces injustices ? Devoir payer 1 000, 2 000 ou 3 000 euros pour un billet d'avion, c'est un scandale qui ne dérange plus personne ! Pourtant, ces exactions alimentent la révolte et affaiblissent le sentiment républicain. Nous avions obtenu, lors de la LODEOM, que ces compagnies aériennes vous transmettent, avant le 1er septembre, un rapport sur leur politique tarifaire : où est ce rapport, madame la ministre ?
Comment ignorer le tribut payé à CMA-CGM et aux transporteurs maritimes, qui prélèvent une énorme dîme dans l'indifférence générale et l'opacité la plus totale ? Comment accepter ce traitement inégal qui nous est infligé au nom du dogme libéral et de la toute puissance du marché ?
Comment peut-on faire mine d'ignorer le tribut payé par nos régions en matière de téléphonie et en frais d'itinérance, le fameux roaming ? Nous sommes considérés comme vivant à l'étranger, nous sommes des « Français itinérants » et nous payons une fortune pour communiquer avec les nôtres. Comment donc ignorer la prédation imposée par quelques opérateurs de ce secteur, au moment même où France Télécom vient de supprimer la distinction entre appel local et appel national, acceptant une perte de 170 millions d'euros ? Nos territoires sont considérés comme étrangers. Faites l'expérience, téléphonez donc avec votre portable et vous verrez !
Comment croire que la puissance tutélaire de l'État républicain est incapable d'empêcher les exactions des banques, assurances, assureurs-crédits et autres affameurs qui étouffent la production, et fait prospérer l'hubris de la consommation ?
Comment accepter que la position extérieure de ces mêmes banques et institutions financières soit positive et que l'épargne de nos régions soit investie ailleurs, et d'abord en métropole, en silence, dans l'anonymat le plus total, sans broncher, mais que, de l'autre coté, on tienne une comptabilité scrupuleuse des avantages fiscaux octroyés et des dépenses fiscales tolérées avec, chaque année, des coups de rabot qui rajoutent, au passage, à la stigmatisation et au mépris ?
Comment accepter cette dissymétrie et, pour être plus simple, comment vivre avec cette injustice ? Comment ne pas la crier de cette tribune pour avoir au moins le sentiment d'avoir plaidé et, peut-être, d'avoir été écouté et entendu ? Le Président de la République avait accepté notre proposition d'utiliser l'épargne locale pour dynamiser l'investissement sur place. Où est le fonds d'investissement de proximité dans les DOM, madame la ministre ?
Comment faire lorsque les grands groupes de commerce et d'import-distribution décident souverainement du niveau de notre pouvoir d'achat et que, même après le grand raptus social de quarante-quatre jours en 2009 en Guadeloupe et de trente-huit jours en Martinique, l'État se révèle incapable de lutter efficacement contre la vie chère ? Il donne à sentir cette curieuse, j'allais presque dire cette furieuse impression que le système n'est pas réformable ; il l'essentialise même et le grave dans le marbre de l'éternité.
Nous avions obtenu que l'État puisse intervenir pour réglementer les prix et fasse cesser le scandale de la « profitation » pétrolière ? Pourquoi continuez-vous à payer aux pétroliers ce prétendu manque à gagner – 176 millions d'euros – sans informer la représentation nationale de l'état des négociations apparemment toujours en cours ?
Comment, dans ces conditions, face à cette inertie et à cette impotence, faire croire aux jeunes générations que la politique commande aux « hauteurs dominantes de l'économie » et qu'elle est faite pour maîtriser l'avenir et décider du destin ?
Comment voulez-vous qu'on accepte de subir une récession, que dis-je, une crise gravissime avec un recul de 6,5 % du PIB en Martinique, 4,8 % en Guadeloupe en 2009, de voir exploser le chômage – plus 6,2 % en un an –, se multiplier les dépôts de bilan, savoir que plus de 50 % des jeunes de moins de vingt-cinq ans ne travaillent pas et piétinent sur le parvis de l'emploi ? Comment accepter que mon département soit considéré comme le plus violent de France, celui où circulent le plus d'armes, devant deux autres que je n'ose désigner, et où on laisse, faute de moyens, se développer les incivilités ? Comment voulez-vous accepter dans le même temps que les crédits budgétaires en faveur des contrats aidés et des politiques de retour à l'emploi outre-mer diminuent de 44 millions d'euros cette année, de près de 100 millions sur deux ans ?
Comment entendre sans cesse rappeler les dispositifs relatifs aux 40 % de vie chère, à la défiscalisation quand on sait que le niveau de vie dans nos territoires est nettement inférieur à celui de la métropole ? Pire encore, sur la base de fausses croyances et d'une irréelle prospérité, une fantasmatique priviligencia qui s'épanouirait sous les cocotiers, il nous faut subir des coups de rabot et des coupes claires dans nos maigres budgets – 1,9 milliard sur votre mission et 3,2 milliards de dépenses fiscales. Par provocation, nous vous proposons de nous donner ces 5 milliards de crédits budgétaires. Nous n'en parlerions plus. L'affaire serait entendue. Accepterez-vous nos amendements en ce sens ?
Jusqu'ici, on faisait mine de croire que les éminences ministérielles n'étaient pas au parfum, pas au fait, pas bien informées : on s'accusait même de n'avoir pas fait remonter l'information et d'avoir échoué dans le lobbying.
Nous nous trompions : aujourd'hui, vous êtes dans la place, vous êtes ministre de la République, conseillère régionale de Guadeloupe mais nous osons vous dire – et cela m'est pénible – que ce ministère, qui perd systématiquement et consciencieusement tous ses arbitrages, ne sert à rien, comme l'ont encore récemment démontré nos collègues sénateurs Massion et Doligé. Chers collègues des outre-mer, je vous assure que nous n'avons tiré aucun avantage de la présence de notre compatriote rue Oudinot. Au contraire, même…
Comment se fait-il, madame la ministre, alors même que votre collègue du budget, lui-même anciennement chargé de l'outre-mer, déclare publiquement mi-septembre que « remettre en cause la défiscalisation outre-mer serait un désastre pour nos territoires », que le principal vecteur de financement de nos économies se retrouve réformé pour une quatrième fois en deux ans ? Et ce alors même que les investisseurs ont avant tout besoin de stabilité juridique et fiscale, comme le rappelait d'ailleurs le Président de la République dans son discours du 12 juillet 2006 en clôture de la convention UMP sur l'Outre-mer : « La défiscalisation est, en réalité, un outil de développement pour des économies sous-capitalisées et spontanément peu attractives pour des investisseurs. Des engagements ont été pris par l'État sur quinze ans, ils doivent être respectés. »
Tout comme pour la mise en oeuvre de la LODEOM – ou plutôt la non-mise en oeuvre ou mauvaise application de la loi –, votre ministère est incapable de mettre en musique les annonces faites par le Président de la République, il y a quasiment un an jour pour jour, lors du conseil interministériel des outre-mer. C'était le 6 novembre 2009. À part les mesures cosmétiques ou symboliques, nous ne voyons toujours rien venir. Telle la Soeur Anne du conte de Perrault, nous continuons de scruter l'horizon. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur Lurel, l'examen en séance publique de la seconde partie du projet de loi de finances relative aux dépenses répond à des règles particulières destinées notamment à permettre le respect des délais constitutionnels et organiques, qui sont de quarante jours pour l'adoption en première lecture par l'Assemblée nationale et de soixante-dix jours pour l'adoption définitive.
Ces règles sont confirmées chaque année par la Conférence des présidents. L'une d'entre elles prévoit que, contrairement à une discussion générale classique, le ministre n'intervient qu'une seule fois après avoir entendu les orateurs inscrits.
Vous savez l'importance que j'attache à ce budget. Je tenais donc à vous rassurer et à faire en sorte qu'aucun doute ne puisse persister.
La parole est à Mme Huguette Bello.
Budget de toutes les promesses, budget d'une ambition renouvelée pour les outre-mer, budget d'un développement nécessairement endogène, évidemment durable et immanquablement solidaire : le budget pour 2011 que nous examinons aujourd'hui devait être tout cela à la fois. En effet, c'est en lui que la crise sociale qui, en 2009, a bouleversé nos régions et la crise mondiale, qui est loin de nous avoir épargnés, était censée trouver ses remèdes. Ce budget devait être aussi le reflet financier des dispositifs votés dans la LODEOM et des mesures énoncées par le Président de la République lors du comité interministériel pour l'Outre-mer de novembre 2009. En un mot comme en cent, ce budget était appelé à devenir le symbole de la politique présidentielle dans les outre-mer. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Mais patatras, à l'arrivée le compte n'y est pas ! Le budget de l'outre-mer pour 2011 diminue. Et il diminue fortement. Moins 46 millions d'euros par rapport à l'année dernière. Madame la ministre, vous vous évertuez à atténuer ce désengagement, vous raisonnez, de manière étonnante, à partir des autorisations de programmes alors que tout le monde sait que ce sont – surtout en période de crise – les crédits de paiement qui comptent. Vous entonnez le refrain de la responsabilité qui doit être la nôtre et celui de la contribution des outre-mer à l'effort national de réduction budgétaire. Nous vous entendons. Mais au nom de quoi la diminution de notre budget doit-elle être deux fois plus importante ?
Le document de politique transversale qui récapitule l'ensemble des sommes que l'État consacre aux outre-mer ne vient pas à votre secours. Sa lecture nous révèle cette fois une diminution de près d'un milliard d'euros. Il va de soi qu'au lieu d'être un budget de relance, voire de sauvegarde, il s'agit d'un budget de renforcement de la crise. D'ores et déjà, nos économies enregistrent leur plus mauvais taux de croissance depuis vingt ans : à la Réunion, près de six points de moins en un an.
Les répercussions sur chacune des missions sont prévisibles, hélas ! Celles qui affectent le logement méritent un examen particulièrement attentif non seulement, comme nous le savons tous, parce que l'ampleur des besoins est gigantesque dans ce domaine, mais aussi à cause des modifications substantielles introduites dans son financement. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : à ce jour, 22 500 familles réunionnaises ont déposé une demande de logement. En 2009, seuls 6 200 logements ont été construits pour l'ensemble de l'outre-mer. Si l'on veut réellement en finir avec ce décalage dramatique, il est urgent d'augmenter la ligne budgétaire unique et, pour commencer, d'honorer la promesse de rallonge de 20 millions d'euros attendue par les bailleurs sociaux de la Réunion.
De même, il devient primordial de rectifier le tir tout de suite quant à la mise en oeuvre de la défiscalisation appliquée au logement social, dispositif, rappelons-le, pensé et voulu par le Gouvernement. Faire dépendre le logement social des arbitrages des investisseurs privés n'a jamais été notre choix. Remarquons d'ailleurs une nouvelle fois que les familles d'outre-mer sont les seules à subir un tel régime.
Nulle part ailleurs dans la République, le logement social n'est financé par la défiscalisation. Nulle part ailleurs on ne répudie aussi brutalement le modèle que le monde entier envie à la France, le financement du logement social, depuis des décennies, par l'épargne populaire du livret A.
L'arrivée de la défiscalisation était censée relancer une production de logements sociaux devenue insuffisante. Et voici qu'après quelques mois seulement d'application, les bailleurs sociaux tirent la sonnette d'alarme. Alors qu'ils ont rarement présenté autant de projets pour la construction de nouveaux logements – 5 100 pour la seule Réunion –, les réalisations n'ont jamais été aussi peu nombreuses. L'explication de ce paradoxe de la défiscalisation est principalement à rechercher du côté de l'instruction des dossiers par les services fiscaux. Selon les professionnels du secteur, ceux-ci feraient preuve d'une imagination débordante qui n'épargne à peu près rien : les seuils, les loyers-plafonds, les justificatifs, les délais, les assiettes éligibles, tout y passe. Plus grave encore, tout est réinterprété au-delà des textes législatifs et réglementaires. C'est ainsi que, pour la Réunion, 3 800 dossiers bloqués depuis plusieurs mois attendent l'agrément de défiscalisation et que, par conséquent, 3 800 familles devront attendre un peu – ou beaucoup – plus longtemps d'entrer dans leur logement.
On nous dit que le coup de rabot 2011 a épargné la niche fiscale qu'est devenu le logement social outre-mer : voilà une bien piètre consolation si on la rapporte aux effets de la surenchère des services fiscaux et aux blocages qu'elle provoque.
Si vous reprenez la main, madame la ministre, nous vous soutiendrons dans votre démarche. Le logement social outre-mer a relevé tantôt du ministère du logement, tantôt, comme c'est le cas aujourd'hui, du ministère de l'outre-mer. Sans initiative forte de votre part, il risque de dépendre, à l'avenir, du ministère des finances, de Bercy. Nous nous joignons à la demande des professionnels qui jugent urgente une concertation interministérielle sous l'égide du Premier ministre.
L'heure est aussi venue de donner tout son poids au premier alinéa de l'article 33 que les parlementaires ont introduit dans la LODEOM, et selon lequel « la LBU reste le socle du financement du logement social outre-mer ». Nous souhaitons tous, à cet égard, être éclairés sur les objectifs et la portée de votre circulaire du 1er juin 2010, mentionnée par nos collègues Gaël Yanno et Claude Bartolone dans leur excellent rapport d'information. La « modération de la subvention » sur la LBU que vous préconisez, « voire une absence totale de subvention », laisse penser que c'est la défiscalisation qui est appelée à devenir le socle du financement du logement social outre-mer. Le Gouvernement aurait-il aussi déjà enterré l'article 33 de la LODEOM ?
Secteur sensible s'il en est, le logement social ne peut pas devenir un instrument de régulation des finances publiques.
Offrir à tous ceux qui en ont besoin un habitat décent contre un loyer adapté et maîtrisé, telle est la politique du logement que nous souhaitons voir mise en oeuvre. Dans l'outre-mer aussi elle doit relever de la puissance publique.
Cette désorganisation dans le grand chantier que devrait constituer le logement social n'est pas sans impact sur l'emploi, particulièrement dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, et cela d'autant plus que les constructions dans le secteur libre se sont effondrées. À la Réunion, nous sommes passés de 8 000 nouveaux logements à 800. Dans nos économies fragiles, la crise a des effets dévastateurs, auxquels seule une véritable volonté politique peut tenter de remédier. Or tel n'est pas le cas.
Le chômage, du coup, atteint des sommets. Il augmente six fois plus vite qu'en France continentale. Selon les derniers chiffres de Pôle emploi, la Réunion compte plus de 140 000 demandeurs d'emploi, parmi lesquels un nombre grandissant de personnes en fin de droits.
Mais, si nous nous référons aux décisions du Gouvernement en matière d'emploi, nous voyons qu'il lui importe peu que notre taux de chômage – 27 % – soit trois fois plus important et qu'il soit, et de loin, le plus élevé d'Europe !
Les contrats aidés pour l'outre-mer subiront eux aussi une coupe sévère. Avec assurance et aveuglement, le Gouvernement a diminué leur financement de plus de 40 millions d'euros.
Le vrai courage aurait été a minima de maintenir les dotations et non pas de réaliser des économies faciles aux dépens des plus démunis.
Je viens d'apprendre aujourd'hui même que plusieurs associations de Saint-Paul se sont vu refuser des contrats aidés pour les chantiers d'insertion qu'elles souhaitent mener dans les quartiers de Savanna, de l'Étang, de Bois de Nèfles et de Bellemène. En somme, vous programmez une augmentation du chômage.
De surcroît, comme si cela ne suffisait pas, le Gouvernement a décidé de revoir à la baisse la part du salaire prise en charge par l'État. Ainsi, nos collectivités, déjà confrontées à des défis de toutes sortes et au gel strict des dotations de l'État, devront faire face à de nouvelles charges.
Là encore, madame la ministre, intervenez au nom des outre-mer auprès du ministre de l'emploi ; nous vous soutiendrons. Ne laissons pas le désespoir envahir nos outre-mer.
L'épisode que nous venons de vivre avec le photovoltaïque est très révélateur. Le Gouvernement a sciemment coupé les ailes d'un secteur riche de promesses et d'emplois où l'outre-mer était en pointe. C'est curieux : il n'en finit pas de prôner la création d'activité et d'emplois marchands et, quand nous le faisons, par exemple avec les énergies renouvelables, il saborde ! On nous applique la politique de la double contrainte. Nous savons à quelles impasses elle mène et nous la condamnons.
Troisième point que je souhaite aborder : le désenclavement de nos territoires. À défaut de progresser réellement, il est devenu un grand classique des discours et des textes législatifs. Qu'il s'agisse des hommes ou des marchandises, les mesures de la LODEOM s'y rapportant ne sont toujours pas entrées en vigueur.
Dix-huit mois après le vote de la loi, et un an après votre engagement solennel au Sénat, les décrets d'application ne sont toujours pas publiés !
Le nouveau dispositif de continuité territoriale balbutie à peine. Les pratiques tarifaires des compagnies aériennes flottent dans un clair-obscur. Quant au rapport de synthèse, prévu par la loi, sur les coûts et prix pratiqués par les transporteurs soumis à obligation de service public, les parlementaires attendent toujours ; la transparence aussi.
Pour sa part, l'aide au fret pour les entreprises ne cesse d'accumuler des retards. D'une portée déjà fort limitée, puisque visant exclusivement les échanges avec l'Union européenne, au détriment d'une insertion dans les environnements régionaux, ce dispositif reste virtuel, en dépit des financements prévus depuis deux ans.
Un mot encore sur l'égalité numérique. Elle ne sera réalisée que lorsque les offres d'internet à haut débit seront moins onéreuses et de meilleure qualité.
Ce budget est bien décevant. Il y a fort à parier que l'année des outre-mer, au demeurant préparée dans le plus grand secret, n'y changera pas grand-chose. Nous nous doutions depuis longtemps que les outre-mer n'étaient pas une priorité de votre majorité.
Nous avons à présent la certitude qu'ils ne le seront jamais. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais m'éloigner quelque peu des stricts éléments budgétaires, mon collègue Jean-Christophe Lagarde ayant très bien explicité la position de notre groupe en la matière.
Je pense, mes chers collègues, que notre pays souffre d'un grand mal, d'un mal profond, qui s'appelle le « métropolocentrisme ». C'est une forme de négation de lui-même, ou tout au moins d'une partie de lui-même, à laquelle nous assistons depuis trop longtemps.
Nous devons assurément mener une véritable révolution copernicienne, afin de reconnaître notre pays pour ce qu'il est, et non pas en fonction de l'image que certains de nos compatriotes en ont. Notre pays, ce sont 675 000 kilomètres carrés, et non 550 000 comme on nous l'explique trop souvent dans les manuels de géographie ; ce sont 11 millions de kilomètres carrés au travers de notre domaine maritime – le deuxième au monde –, dont 97 % sont liés à l'outre-mer.
En fait, plus que de superficie et de territoires, c'est d'histoire, de culture, de droit, d'engagement mutuel, de respect et de fidélité que nous devons parler.
Il peut être intéressant, à certains moments, d'avoir un regard prospectif, au-delà des légitimes interrogations et contraintes liées à la situation. La France se doit de respecter les différences de ses territoires et de ses concitoyens ; elle doit apporter à toutes et à tous, de la manière la plus égalitaire qui soit, la sécurité et le développement économique, social, mais aussi culturel.
Nous sommes dans un monde multipolaire ; l'Europe n'est plus le centre de tout. Finalement, le fait d'être présent grâce à ces outre-mer sur quatre continents et dans trois océans est une chance pour notre pays. Nous devons en faire prendre conscience à l'ensemble de nos concitoyens. En effet, il y a trois défis majeurs à relever au XXIe siècle : l'alimentation, l'énergie et l'accès à l'eau. Les océans, et donc les outre-mer, seront des atouts majeurs pour aider notre pays à les relever.
La France est une puissance maritime et ultramarine qui s'ignore. Il paraît essentiel que nos concitoyens de métropole puissent s'intéresser à ces questions, ne serait-ce que pour que cette espérance dont j'ai parlé soit commune.
À cet égard, et en tant qu'élu du Tarn – un département qui a tout de même vu naître La Pérouse et Jean-Louis Étienne, c'est-à-dire des explorateurs qui ont beaucoup apporté sur la mer à la France –, j'ai l'intime conviction qu'un pays qui ne se reconnaît pas et ne s'aime pas dans ses différences est un pays qui n'a pas d'avenir. L'outre-mer n'est pas une charge pour notre pays, c'est une chance. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je n'ai pas l'intention de commenter le projet de budget que vous nous présentez. Il me semble en effet que, compte tenu des contraintes qui sont les vôtres, nos populations n'ont finalement pas à se plaindre des engagements renouvelés de l'État.
Mais je souhaite profiter de ce moment pour vous sensibiliser à nouveau à la situation budgétaire inédite de la province Sud en Nouvelle-Calédonie. Rassurez-vous, c'est la dernière fois que je le ferai.
Vous connaissez la donne. En 1988, lors de la signature des accords de Matignon, trois collectivités nouvelles ont été créées en Nouvelle-Calédonie, dotées d'une assemblée élue, d'un exécutif et d'un budget propre.
Il s'agit des trois provinces auxquelles le législateur reconnaît l'exercice des compétences de droit commun, mais pas l'autonomie fiscale, puisque les recettes fiscales collectées sur la totalité du territoire sont redistribuées dans chaque province suivant une clef de répartition inégalitaire, au nom du partage et du rééquilibrage.
C'est ainsi que la province Sud qui, en 1988, comptait sur son territoire un peu plus de 60 % de la population, reçut 50 % des recettes fiscales, quand la province Nord en percevait 32 % et la province des Îles 18 %. Or, comme vous le savez, la province Sud génère plus de 90 % de la matière fiscale. Toutefois, cette répartition avait un sens, puisqu'il s'agissait d'organiser le rééquilibrage et de permettre à la province Nord et à la province des Îles de parvenir dans les meilleurs délais au niveau moyen de développement de la province Sud.
Mais que constatons-nous vingt-deux ans après ? La province Sud héberge maintenant 75 % de la population et reçoit toujours 50 % des recettes fiscales. Surtout, plus de 60 % de ses dépenses sont consacrées à la santé, à l'enseignement et aux interventions sociales, c'est-à-dire à des dépenses directement liées à l'explosion démographique dans cette province.
Ainsi, notre impasse budgétaire pour l'exercice 2011 s'élève à 50 millions d'euros, alors que la province des Îles a épargné durant la période 50 millions d'euros et la province Nord quelque 220 millions d'euros, dont la moitié sont placés en bons du trésor, alors que leur population continue de diminuer.
Comprenez-moi bien : je ne porte aucun jugement sur la manière dont la province Nord et la province des Îles font usage des moyens dont elles disposent, mais je suis obligé de poser la question suivante : est-ce que la répartition inégalitaire que nous avons acceptée en 1988 était faite pour cela ? Était-ce sa vocation ?
Je sais, madame la ministre, que vous vous garderez bien de répondre à ces questions et que vous me renverrez à la loi organique, qui dispose que cette clef de répartition peut être modifiée à la majorité qualifiée du Congrès de la Nouvelle-Calédonie.
Mais vous savez aussi qu'il s'agit d'un problème politique et je n'ai pas envie, pour ma part, d'ouvrir ce débat maintenant, après avoir accompli le geste solennel de reconnaissance mutuelle que fut la levée, côte à côte, du drapeau bleu, blanc, rouge et de l'emblème identitaire kanak. Car je suis conscient que quelques-uns de nos adversaires irréductibles n'attendent que cela pour remettre en cause la feuille de route que nous avons patiemment élaborée, et validée lors du comité des signataires de juin dernier.
En conséquence, pour présenter un budget en équilibre, je n'aurai d'autre choix que de prendre des décisions lourdes, qui pourront être durement ressenties par les populations originaires de la province Sud, qui ne les méritent pas.
Mais permettez-moi de vous dire que ce sujet aurait pu être traité autrement, si en temps utile l'État s'y était intéressé au lieu de feindre l'ignorer.
En effet, je vous rappelle que l'État est signataire, partenaire des accords avec nous et qu'à ce titre chacune des parties – en l'occurrence celle que je représente – a droit à autant de considération que les autres.
Alors, puisque vous ne pouvez pas intervenir dans l'équilibre budgétaire de la province, que pourriez-vous faire ? À l'heure où nous négocions la nouvelle génération des contrats de développement, il me semble que l'État pourrait retenir une répartition plus équitable des enveloppes allouées respectivement aux trois provinces.
Au cours des dix dernières années, la part de l'État dans ces contrats s'est élevée à près de 500 millions d'euros, dont seulement 30 % ont bénéficié à la province Sud. Il semblerait plus acceptable que l'enveloppe allouée aux provinces soit établie sur la base de celle qui est prévue dans la loi organique pour la répartition des ressources fiscales calédoniennes, soit 50 % pour la province Sud, 32 % pour la province Nord et 18 % pour la province des Îles.
Cette répartition, je tiens à le signaler, resterait très largement favorable aux provinces du Nord et des Îles. Mais elle permettrait néanmoins à la province Sud de disposer d'une enveloppe de financement plus importante, pour satisfaire à son programme pluriannuel d'équipement et fournir l'effort conséquent qu'elle doit accomplir notamment dans la construction de logements sociaux et dans le développement de ses infrastructures routières.
En conséquence, mon vote dépendra de la réponse que vous serez susceptible de m'apporter, car je considère que l'État a sa part de responsabilité dans la situation que je viens de vous exposer. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici ce soir réunis pour l'examen de la mission « Outre-mer ».
Comme chaque année depuis 2007, la présentation de ce budget s'accompagne d'une grande déception. Beaucoup de mes collègues, si ce n'est tous ceux qui siègent sur les bancs de la majorité, ont parlé de « sanctuarisation » en matière de crédits affectés au logement social. Or s'il est bien une chose que vous et le Gouvernement avez su sanctuariser depuis 2007, c'est bien la déception. (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)
Malgré cela, cette année, l'indignation prend le pas sur la déception, car ce budget-ci est encore plus cruel pour nos territoires : non seulement le projet proposé par le Gouvernement ne répond pas à nos vrais besoins, mais surtout il porte un nouveau coup très dur à nos économies et à nos populations – sans doute le coup de trop.
J'aurais aimé constater ce soir la prise de conscience par le Gouvernement de la situation alarmante de nos territoires et des conditions dramatiques dans lesquelles vit une grande partie de nos concitoyens.
J'aurais aimé participer à la traduction concrète d'un espoir que les états généraux de l'outre-mer auraient dû susciter.
J'aurais aimé souligner un premier bilan positif de la LODEOM. J'aurais aimé surtout, madame la ministre, pouvoir, malgré nos divergences, approuver votre action au service de l'outre-mer ; j'espérais qu'une ultramarine, en responsabilité de l'outre-mer, aurait pu avoir les capacités mais surtout la conviction pour porter le changement nécessaire.
Mais force est de déplorer que ce soit sous votre responsabilité que l'outre-mer a été le plus durement atteint. Certains évoqueront la crise ; mais elle a bon dos, et elle sera bientôt courbée. Non, l'outre-mer n'a jamais été aussi maltraité.
C'est sous votre responsabilité qu'ont été remis en cause des mécanismes de soutien fiscal à l'investissement ; c'est sous votre responsabilité que le gouvernement UMP a abandonné l'ambition de l'autonomie énergétique ; c'est sous votre responsabilité que le gouvernement UMP a réduit l'ampleur des dispositifs destinés à améliorer la situation du logement outre-mer ; c'est enfin sous votre responsabilité que le gouvernement UMP a capitulé face aux défis de la mutation économique et du redressement social.
Madame la ministre, je crois à ce stade qu'il faut vous rappeler les données économiques et sociales de la Réunion, que l'on retrouve dans tous nos territoires d'outre-mer : il y a 30 % de chômeurs ; plus de 52 % de la population vit sous le seuil de pauvreté. Ces données incontestables symbolisent l'échec absolu, non pas du modèle de développement comme le voudraient certains, mais d'un système économique qui favorise la rente, d'un système oligarchique dans lequel les fortunes insolentes de quelques familles côtoient la misère la plus extrême du plus grand nombre.
Madame la ministre, mes chers collègues, allons au-delà d'une querelle de chiffres sur les crédits de paiement ou les autorisations d'engagement : au regard de la situation quotidienne du plus grand nombre de nos concitoyens, ces polémiques sont indignes. Il est, je crois, plus que temps de rompre profondément avec un système dépassé, à bout de souffle, avec un système qui préserve des situations bien souvent mal acquises au fil des siècles, avec un système qui paralyse les énergies mais surtout l'espoir de ceux qui aspirent à l'émancipation et au bonheur, avec un système qui engendre la misère, le renoncement et la résignation.
Madame la ministre, le renoncement financier de votre gouvernement est le symbole de son renoncement moral.
Le Gouvernement n'a aucune considération pour les plus faibles, c'est-à-dire pour ceux qui justement ont le plus besoin de soutien.
Heureusement, dans quelques mois, nous aurons la possibilité de rompre avec ces conservatismes et ces blocages. Nous aurons une chance unique de donner un élan et enfin un réel espoir à l'outre-mer.
Cette nouvelle donne doit nécessairement passer par une remise en cause profonde du système actuel. En priorité, ce défi consistera à nous attaquer réellement aux retards énormes de nos territoires dans de multiples domaines : la santé, les infrastructures, l'emploi, l'éducation et l'alphabétisation, le logement.
Mon cher collègue, quand le rêve des uns se conjugue avec le cauchemar des autres, on est peut-être entré dans la réalité : je vous donne rendez-vous dans quelques mois.
Ensuite, nous devrons lutter contre l'intolérable phénomène de la vie chère, en remettant totalement en cause les circuits économiques, mais également en soutenant de manière directe le pouvoir d'achat, par le SMIC, par les minima sociaux et par le conditionnement de la défiscalisation dans les entreprises à des négociations salariales régulières.
Nous devrons surtout jeter très rapidement les bases d'un nouvel ordre économique et définir, enfin, un véritable modèle pour nos territoires : ce modèle économique devra remettre en cause des situations monopolistiques dépassées et ineptes ; il devra libérer et soutenir les énergies créatrices des ultramarins, au profit des ultramarins ; il devra redonner confiance et espoir à notre jeunesse.
Pour permettre ce nouvel ordre économique, l'État devra avoir un rôle moteur. Il devra actionner les leviers dont il dispose pour la réussite de nos territoires. Il ne devra plus osciller en permanence entre un assistanat démobilisateur et un lâchage brutal.
Ce défi fondateur pour l'outre-mer, qu'avec d'autres j'appelle de mes voeux, est à mon sens infiniment plus crucial que le spectacle attristant et quotidien des différents ministres prêts à tous les renoncements pour figurer encore dans le prochain casting gouvernemental. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues de l'Assemblée, la crise est toujours là, plus tenace que jamais, plus durable que prévu. Elle semble s'enraciner, en dépit des diligences mises en oeuvre et des grands moyens déployés en France pour la déchouquer au plus vite.
Après coup, il faut reconnaître que les premiers soins financiers prodigués à profusion n'ont pas donné tous les résultats escomptés. Et c'est peu dire.
N'aurait-il pas fallu mettre en place une multi-thérapie, plus appropriée à l'état général, et qui aurait pris en compte le social, la formation et la requalification, l'emploi des jeunes, l'accès plus aisé aux prêts destinés à l'investissement productif et pourvoyeur d'emplois ? À mon avis, le choc aurait été plus amorti et le redémarrage plus pertinent.
À cet égard, sans entrer dans le dédale des chiffres, il faut rappeler que déficit et endettement marchent d'un même pas cadencé. Chaque année, ce couple infernal pulvérise son précédent record : l'INSEE indiquait tout récemment que la dette publique de la France atteignait 1 591,5 milliards, soit 82,9 % du PIB.
Ce niveau est nettement supérieur au plafond de 60 % fixé par les traités européens. Et la rude grimpée devrait se poursuivre encore dans les deux à trois ans qui viennent, selon les prévisions les plus optimistes.
En ce domaine sensible, il n'y a qu'une chose certaine, c'est l'incertitude.
La situation devenant pratiquement ingérable, le Gouvernement acculé impose des plans d'austérité, et des cures d'amaigrissement en tous genres pouvant conduire jusqu'à l'anorexie. C'est un choix difficilement défendable car il s'agit de résorber en trois ans trente-six années de dérapages non contrôlés : au laxisme du passé succède aujourd'hui un drastique plein pot.
Cet effort de rattrapage se révèle alors exorbitant. À qui la faute de cette crise, je vous le demande ? Au menu peuple, aux petites et moyennes entreprises, aux handicapés, aux smicards, aux retraités vivant au-dessous du seuil de pauvreté, aux jeunes clochardisés ? Ou bien aux théoriciens de la culture intensive du déficit et de la gestion hasardeuse ?
Pour parer au plus pressé, on va jusqu'à infliger des ponctions sur l'utile et même sur le futile.
Et la potion finale servie est particulièrement amère, d'autant plus amère que l'on s'est focalisé sur les dépenses de l'État sans tenir compte en parallèle de l'utilisation efficace de ses recettes. N'oublions pas que dans les dix dernières années, l'État a gracieusement sacrifié pas moins de 100 milliards d'euros de ses recettes fiscales, dont deux tiers au titre de baisses d'impôts pas toujours judicieuses, car sans retour bénéfique sur la croissance et la création d'emplois pérennes.
On peut s'interroger d'ailleurs sur la finalité et la logique de ces plans qui annoncent en filigrane un véritable changement de système : on réduit d'abord les recettes pour ensuite réduire les dépenses. Ainsi l'État, rendu impécunieux par lui-même, s'exonère de plus en plus de ses engagements essentiels. Or l'on sait, d'expérience, que l'effet de l'amenuisement progressif et irréversible des dépenses publiques, conjugué à l'abaissement continu et inconsidéré de recettes substantielles, peut nourrir la crise au lieu de l'éloigner.
En ce sens, la crise peut avoir bon dos pour tourner le dos aux obligations qui incombent normalement à l'État. Car, en dernier ressort, ce sont les populations à risque, les plus fragiles et les plus exposées, qui en feront les frais.
Maintenant, passons en revue de façon plus concrète encore la situation de la Martinique.
Les réformes envisagées et les mesures retenues par le Gouvernement sont plutôt porteuses de risques et de difficultés supplémentaires. Si on les ajoute bout à bout et qu'on les rapporte à l'échelle de sa population, la Martinique voit son effort décuplé, et non pas doublé, par rapport à celui de la France, les chiffres le prouvent.
Déjà, la crise de février-mars 2009 a fortement endommagé, en sus des entreprises, les finances des collectivités. L'octroi de mer, leur ressource principale, a subi des tirs croisés de partout, j'en sais quelque chose, au prétexte qu'il était facteur de vie chère. Et le gel pendant trois ans, décidé par le Gouvernement, des dotations des collectivités, que l'on peut juger aberrantes, aggravera encore leur condition. Cette décision s'apparente à une sanction à l'égard de celles qui ont honoré leurs engagements sans défaillance et qui se sont désendettées sans hausse d'impôts.
La perte de l'autonomie financière des collectivités confisquée par l'État ajoute à la détérioration générale. Ainsi, on casse les pôles de rebond possible, comme si les collectivités étaient des concurrentes.
De plus, la loi d'orientation pour le développement économique des outre-mer du 27 mai 2009 n'est, à ce jour, que partiellement mise en oeuvre. La ligne budgétaire unique s'amenuise de 21 millions d'euros et les crédits consacrés aux logements sociaux et très sociaux se rapetissent, eux, de 34 millions.
Le conseil interministériel de l'outre-mer du 6 novembre 2009, consacré prioritairement au développement, est pratiquement au point mort.
La banane est menacée, une fois de plus, par les multinationales américaines. Là, les règles de l'Organisation mondiale du commerce s'appliquent avec tranchant et sans appel.
Le tourisme s'effondre, la croisière atteignant ses niveaux les plus bas.
Pourtant, dans tous les domaines, paradoxe regrettable, les plans n'ont pas manqué.
En effet, à chaque ministre qui arrive, son plan de relance, sa LOOM, sa LOPOM, sa LODEOM, et leur longue liste de mesures annoncées avec fracas. Puis, à chaque départ, le plan précédent rend l'âme avant d'atteindre son régime de croisière et de donner son plein rendement. C'est là, madame la ministre, que résident en fait l'instabilité, l'incohérence, le manque de visibilité, et non dans une évolution institutionnelle vers plus de responsabilité.
Avant de terminer, permettez-moi d'évoquer le problème de la défiscalisation et du photovoltaïque.
Il y a défiscalisation et défiscalisation.
Bienvenue à celle qui développe sans polluer, sans détériorer. Le photovoltaïque sur les toits développe. Il faut d'ailleurs permettre que s'achèvent les travaux déjà commencés sur les toitures.
En revanche, à bas celle qui ne fait que spéculer et dilapider. Le photovoltaïque au sol dilapide le peu de foncier qui reste encore à la Martinique.
Le photovoltaïque est non réglementé à ce jour. C'est vogue la galère ! En effet les projets en portefeuille sacrifieraient 700 à 800 hectares de terre sur les 25 000 qui nous restent. Les douze permis de construire délivrés par les services préfectoraux congèlent déjà 350 hectares. À la limite, on pourrait accepter un ou deux exemplaires de fermes de faibles dimensions mais pas cette avalanche débridée.
J'avais personnellement déposé en son temps plusieurs amendements sur la réglementation du photovoltaïque, dont un qui recommandait le développement du photovoltaïque sur les toitures. Il fut adopté non sans mal après d'âpres discussions.
Devant l'anarchie grandissante, je fus amené à déposer ensuite un autre amendement demandant l'interdiction pure et simple du photovoltaïque sur les sols agricoles. Il fut rejeté sèchement, avec arrogance et sans explication.
C'était la porte grande ouverte à toutes les dérives.
Vu la rareté du foncier agricole, c'est un véritable sacrilège que de continuer à le détruire à la moyenne de 1 000 hectares par an.
En définitive, ce n'est sain pour personne que la Martinique perde toute capacité, toute compétence, tout pouvoir d'intervention dans ce domaine crucial comme dans bien d'autres.
C'était d'ailleurs tout le sens et toute la portée de la consultation du 10 janvier 2010 que j'avais soutenue en préconisant l'autonomie dans le cadre de l'article 74 de la Constitution, qui énonce clairement et sans ambiguïté que le statut tient compte des intérêts propres de la collectivité. Le peuple martiniquais l'a repoussée mais a approuvé le 24 janvier, soit quinze jours après, la mise en place d'une assemblée unique regroupant les compétences dévolues au département et à la région. Subitement, j'ai ouï dire que l'article 73 ne sied pas à notre situation et qu'en plus, il faudrait reporter à 2014 cette mise en place prévue pour 2012.
Par ces temps de crise aiguë, n'ajoutez pas, à l'instabilité chronique des plans gouvernementaux successifs, une instabilité artificielle échafaudée à la dernière minute.
Que le choix du peuple martiniquais soit totalement respecté. Que la date initialement retenue de 2012 soit maintenue. Que la parole donnée soit honorée. Car chez nous, la parole de l'homme vaut l'homme. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Le soutien que nous apportons à la politique que vous menez pour le Gouvernement, madame la ministre, nous amène à approuver ce budget qui est globalement un bon budget. Mais la discussion budgétaire doit être l'occasion de vous poser quelques questions, presque un an après le conseil interministériel pour l'outre-mer, sur la réalisation, la matérialisation des orientations du conseil et la manière dont le budget que nous allons approuver permettra de répondre aux objectifs que vous avez fixés, objectifs au demeurant tout à fait pertinents.
Je reprendrai donc les principaux objectifs des décisions que vous avez prises le 6 novembre 2009, pour vous demander ce qu'il en est aujourd'hui, 3 novembre 2010.
Premier sujet qui avait beaucoup animé l'actualité au début de l'année 2009, celui de la formation des prix, du fonctionnement du marché et de la concurrence.
Vous avez pris plusieurs initiatives d'organisation et des mesures administratives. Quel est, concrètement, l'effet de ces dispositions sur les défauts que l'on pouvait constater dans la formation des prix, par exemple des carburants, sur le fonctionnement du marché et la concurrence ? Il est bien de prendre des orientations administratives, il est important d'apporter à nos concitoyens d'outre-mer les réponses qui sont attendues.
S'agissant du développement des productions locales, du développement endogène, vous avez suivi, madame la ministre, les débats sur l'article 13 de la première partie du projet de loi de finances, avec le problème que pose l'évolution inattendue de la fiscalité du photovoltaïque. Au-delà de la difficulté concrète qui est apparue à cette occasion, n'est-ce pas le plan même pour la pleine capacité énergétique de l'outre-mer qu'il convient de préciser ? Si EDF nous explique aujourd'hui qu'il est difficile de faire entrer sur le réseau dans de bonnes conditions la totalité de l'énergie renouvelable, en partie photovoltaïque, fournie ou qui sera fournie à court terme, est-ce la fourniture locale d'énergie qu'il faut brider, ou est-ce l'organisation du système électrique dont il faut envisager la réforme ?
Je voudrais aborder le sujet des grands projets structurants. Nos collègues de la Réunion en parleraient mieux que moi, le projet de tram-train de la Réunion a été arrêté, sans doute du fait de la situation financière difficile de la région avant l'alternance qu'elle a connue. Quels sont les grands projets structurants pour l'outre-mer aujourd'hui ?
Il y a quelque temps, je vous ai entendue, madame la ministre, évoquer les questions de santé. Si elles font en effet partie des grands projets structurants qu'on peut avoir pour l'outre-mer, il est important de nourrir toute la matière de cette grande orientation.
Pour la gouvernance, je crois que nous serons nombreux ici à penser que les enjeux de gouvernance sont certes importants, mais qu'ils ne doivent pas – réserve faite sans doute de l'urgence qu'il y a en Polynésie –capter une trop grande part de l'attention, car nos concitoyens outre-mer sont, pour l'essentiel, confrontés à des problèmes de nature économique et sociale, bien davantage qu'aux seules questions de gouvernance.
En ce qui concerne l'insertion de l'outre-mer dans son environnement régional et dans l'espace communautaire, vous avez demandé à UBIFRANCE d'assurer un certain nombre de missions tout à fait utiles pour favoriser l'exportation provenant de l'outre-mer ; mais l'enjeu est d'une telle dimension qu'au-delà de cette initiative, utile mais modeste, j'aimerais savoir quels sont les objectifs du Gouvernement et les moyens qu'il propose de mettre en oeuvre pour favoriser cette insertion.
J'en viens à l'égalité des chances, des jeunes particulièrement. Le Gouvernement a annoncé le doublement, à terme, du nombre de postes offerts dans le cadre du service militaire adapté. Le service militaire adapté est un dispositif intelligent, efficace, qui améliore considérablement les conditions d'insertion des jeunes. Seulement, nous avons cru comprendre que parallèlement à l'augmentation du nombre de contrats, la durée de ces mêmes contrats serait diminuée.
Sur une enveloppe budgétaire constante, serez-vous en mesure d'apporter réellement de meilleures chances d'insertion aux jeunes bénéficiaires du SMA ?
J'en viens enfin à l'identité culturelle, sur laquelle notre collègue Philippe Folliot s'est exprimé tout à l'heure. 2011 est l'année de l'outre-mer. Je souhaite, comme tout le monde ici, je pense, que ce soit l'année d'une bonne compréhension et d'un bon dialogue entre l'outre-mer et l'ensemble de la République. Nos concitoyens en métropole interrogent souvent l'outre-mer dans des termes plus sévères et plus injustes que nos concitoyens d'outre-mer eux-mêmes.
Nos concitoyens d'outre-mer, nous l'avons constaté au moment des événements de Guadeloupe au début de l'année 2009, expriment une adhésion très forte et très intense à la République. Cette adhésion, il est essentiel qu'elle soit réciproque. Je souhaite que l'année 2011, année de l'outre-mer, soit bien l'occasion d'affirmer cette identité culturelle de l'outre-mer dans la France et de la France avec l'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2011 :
Outre-mer (suite).
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma