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Séance en hémicycle du 10 décembre 2008 à 15h00

Résumé de la séance

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  • présidence

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation…

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. De l'UMP ! (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

…du Bundestag, conduite par M. Eduard Oswald, président de la commission des finances. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, il y a tout juste soixante ans, le 10 décembre 1948, l'Assemblée générale des Nations unies adoptait, à Paris, la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Au fait, où est Rama Yade ? Elle s'occupe des enfants ? (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour la première fois, était ainsi reconnue, au lendemain de la victoire sur les régimes totalitaires, la portée universelle des droits de l'homme, car, selon la belle expression de René Cassin : « Il n'y aura pas de paix sur cette planète tant que les droits de l'homme seront violés en quelque partie du monde que ce soit ».

La défense des droits de l'homme partout dans le monde est au coeur des préoccupations de l'Assemblée nationale. Elle est au premier rang de ses actions.

L'Assemblée se devait donc de rendre hommage aux auteurs de la Déclaration universelle des droits de l'homme et à tous ceux – individus, institutions ou organisations non gouvernementales – qui participent partout inlassablement à la protection des droits fondamentaux.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Où est la majorité, monsieur le président ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle une déclaration du Gouvernement préalable au Conseil européen et le débat sur cette déclaration.

La parole est à M. François Fillon, Premier ministre. (Exclamations prolongées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Le quorum ! Le quorum !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur le Premier ministre, dès que les esprits se seront calmés, vous pourrez vous exprimer.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Où sont passés nos collègues du groupe UMP ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ils sont en train de manger leur plat de lentilles !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, demain et après-demain se tiendra à Bruxelles le dernier Conseil européen de la présidence française.

Cette présidence française s'était fixé des objectifs très ambitieux : un accord sur le climat, la coordination des politiques européennes d'immigration, le bilan de santé de la politique agricole commune et la relance de la politique européenne de défense. Comme vous le savez, trois crises majeures se sont inscrites dans cet agenda : la crise géorgienne, la crise financière et la crise économique. Tout le monde le reconnaît, l'Europe a su affronter ces trois crises et elle le doit en grande partie au travail réalisé par la France, par le Président de la République, par le ministre des affaires étrangères et européennes, par le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Nous avons ainsi démontré que l'impuissance de l'Europe et son absence dans les grands débats internationaux n'étaient pas une fatalité.

Nous avons également démontré l'importance des réformes institutionnelles en cours et la nécessité d'assurer un véritable leadership, durable, notamment s'agissant de la présidence du Conseil européen. (« Voilà quelques députés UMP ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Libérez Copé ! Libérez Copé !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je vous en prie, mes chers collègues ! Je vous rappelle que notre séance est retransmise à la télévision. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Justement ! Où est l'UMP ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Soyez conscients de l'avantage qui est ainsi offert à la représentation nationale et ayez à coeur de défendre l'image de l'institution !

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Nous la défendons, nous ! Nous sommes là !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Le premier sujet qui est inscrit à l'ordre du jour du Conseil européen, si cela vous intéresse,…

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est l'UMP que cela n'intéresse pas !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…c'est la question du changement climatique. (Exclamations prolongées sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Écoutez donc ! Vous nous ferez ensuite connaître votre avis et nous pourrons enfin avoir un débat. Vous rendez-vous compte que 300 millions d'Européens ont les yeux tournés vers le Conseil européen et vers ce que nous sommes en train de faire aujourd'hui ? Pourrions-nous, pour une fois, avoir un débat dépassionné sur des enjeux qui dépassent les clivages politiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

La question qui va dominer le Conseil européen est donc celle du réchauffement climatique. Une conférence internationale se déroule actuellement à Poznan et, à la fin de l'année 2009, nous aurons, à Copenhague, un rendez-vous historique – le rendez-vous de la dernière chance. L'Europe, qui, depuis des années, a été le moteur du combat contre le réchauffement climatique, sera-t-elle au rendez-vous de la conférence de Copenhague ou sera-t-elle responsable de l'échec du sommet ? C'est la question qui sera tranchée jeudi et vendredi à Bruxelles. La France, avec le soutien du Parlement européen dans son ensemble, a fait tous les efforts, pris toutes les initiatives, tous les risques, pour aboutir à un compromis ambitieux. Nous pensons en effet que, sur ce sujet, l'Europe n'a pas droit à l'erreur, car, d'une part, le changement climatique ignore la crise financière et la crise économique, et, d'autre part, la question du réchauffement climatique sur laquelle, depuis des années, les États-Unis étaient en retard, a été au coeur de la campagne présidentielle américaine – il semble même, d'après les propos qu'il a tenus, que le nouveau président des États-Unis soit décidé à faire avancer son pays sur la voie d'un accord international à Copenhague.

Dans ces conditions, l'Europe doit agir sans délai. Dans ces temps d'incertitude économique, les entreprises européennes ont besoin de vision de long terme, de prévisibilité. Quelle que soit l'évolution de la conjoncture, on sait que, à l'avenir, les économies qui se seront le mieux préparées à une production peu carbonée disposeront d'un avantage comparatif décisif. Préparer nos entreprises à lutter contre l'effet de serre, c'est d'abord lutter contre le réchauffement climatique, mais c'est aussi les préparer à mieux affronter la concurrence internationale.

La présidence française a cherché à tenir compte non seulement des difficultés économiques actuelles, mais des spécificités de chaque État membre. Dans le compromis que nous allons présenter à nos partenaires, nous avons veillé à ce que les intérêts légitimes de l'industrie européenne soient préservés, notamment grâce à un mécanisme de lutte contre le dumping environnemental qui pourrait nous menacer si certains de nos partenaires internationaux refusaient, l'année prochaine, de s'associer à l'effort mondial de lutte contre les émissions de CO2.Le premier enjeu de la discussion de demain, c'est de faire accepter la mise en place de ce mécanisme, qui ne servira que si des pays extérieurs à l'Union européenne refusaient d'entrer dans la négociation à Copenhague.

Nous avons ensuite proposé des périodes de transition pour la mise en place du système d'enchères sur les quotas de CO2 pour les centrales électriques. Chacun sait que nombre de pays européens possèdent des centrales électriques émettrices de gaz à effet de serre. Il faut que ces pays investissent soit dans le changement des sources d'énergie, soit dans la modernisation de leurs centrales. Mais ils ont besoin d'un délai pour le faire. Nous proposons donc des périodes de transition, en particulier pour tenir compte des besoins particuliers des pays d'Europe de l'Est.

En revanche, la présidence française a refusé depuis le début des discussions et refusera toujours de transiger sur l'essentiel : toutes les industries, tous les États membres, sans exception, doivent contribuer de manière équitable à la baisse des émissions de CO2. Cela signifie que tous doivent accepter des objectifs adaptés de développement des énergies renouvelables.

Je voudrais rappeler – et il n'est pas anodin de le faire aujourd'hui – que tous les objectifs ambitieux décidés au printemps 2007 l'ont été sous la présidence allemande et, pour une large part, à l'initiative de l'Allemagne. Or, dans la proposition de compromis de la présidence, tous ces objectifs sont scrupuleusement respectés. Aussi, nous attendons que tous les pays européens, et au premier rang d'entre eux l'Allemagne, les respectent.

Ne nous le cachons pas, la négociation que nous allons mener, demain et après-demain à Bruxelles, sera très difficile et son issue n'est absolument pas écrite. Malgré nos efforts, malgré l'esprit de conciliation dont le Parlement européen a fait preuve – et il faut rendre hommage au Parlement européen…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…car, dans ce domaine, il a été un moteur pour maintenir l'ambition initiale de la présidence allemande –, certains États membres continuent d'exprimer de très fortes réticences sur les éléments centraux du compromis. Je pense qu'un succès est néanmoins possible si tous acceptent les conditions indispensables d'un accord final : le strict respect des objectifs de réduction de gaz à effet de serre décidés en 2007, la protection contre le risque de dumping environnemental, le juste partage des efforts entre les États membres et la solidarité avec les États membres les moins prospères. Ce qui se joue à partir de demain, mesdames, messieurs les députés, c'est, pour une très large part, la réussite ou l'échec de Copenhague. Demain, l'Europe ne décidera pas seulement pour elle-même : d'une certaine manière, elle décidera aussi pour le monde.

La deuxième priorité du Conseil, c'est la crise économique et financière. L'Union européenne tout entière est désormais menacée par la récession. Dans cette situation exceptionnelle, personne ne comprendrait que, à l'occasion de ce Conseil, des moyens exceptionnels ne soient pas mobilisés à travers tout le continent.

La France vient elle-même de lancer un plan de relance de 26 milliards d'euros et le Parlement sera saisi dès le début de janvier des mesures qui le composent. L'enjeu du Conseil européen, c'est maintenant de décider d'un plan de relance économique à l'échelle européenne, pour offrir à l'action de l'Union européenne et de tous ses États membres un cadre de cohérence tenant compte de la situation de chacun et qui permette surtout, en harmonisant les plans de relance, de fournir un effet de levier sur l'économie beaucoup plus fort que des plans de relance isolés, voire contradictoires.

L'Union européenne, pour sa part, doit agir en augmentant fortement les prêts à l'économie de la Banque européenne d'investissement, en particulier ceux destinés aux énergies renouvelables, aux petites et moyennes entreprises et au secteur automobile. Nous demanderons que le Fonds social européen lance rapidement de nouvelles actions, notamment au bénéfice des populations les plus vulnérables. Les investissements financés par les fonds structurels ou par le Fonds européen agricole pour le développement rural devraient être accélérés, en particulier s'agissant des infrastructures et du renforcement de l'efficacité énergétique.

Enfin, nous demanderons que les règles européennes soient adaptées d'urgence pour répondre aux besoins immédiats suscités par la lutte contre le risque de récession en Europe. La Commission devra rapidement modifier les règles de contrôle des aides d'État pour l'industrie, comme elle vient déjà de le faire pour le secteur financier. Notre pays continuera à se battre pour revoir à la baisse les taux de TVA s'appliquant aux secteurs à haute intensité de main d'oeuvre.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

L'action de l'Union européenne est indispensable, mais il va de soi que l'essentiel de la relance budgétaire européenne viendra des États membres eux-mêmes. Nous souhaitons que ceux-ci décident, à l'occasion du Conseil européen qui se déroulera jeudi et vendredi, de concentrer leurs actions sur des mesures à effet immédiat, limitées dans le temps et ciblées sur les secteurs les plus touchés, dont l'automobile et le bâtiment. Selon la situation de chaque État membre, ces actions prendront la forme de dépenses publiques supplémentaires, de réduction de la pression fiscale ou de diminution des charges sociales, de soutien aux entreprises ou d'aides directes aux populations les plus fragiles.

Cette relance européenne est compatible avec le pacte de stabilité et de croissance qui offre, dans sa rédaction initiale, les flexibilités nécessaires. Elle ne dispense donc pas les États européens de respecter l'objectif de soutenabilité budgétaire à moyen terme, et de planifier un retour à des déficits moins élevés.

D'autres décisions importantes figurent au programme du Conseil européen. Tout d'abord, une feuille de route devra être définie pour achever la ratification du traité de Lisbonne dont les trois crises récentes ont prouvé la nécessité, et particulièrement celle des nouvelles institutions. L'objectif de la présidence française est, plus que jamais, de permettre l'entrée en vigueur du nouveau traité avant la fin de l'année prochaine. Les consultations très étroites conduites avec le gouvernement irlandais ont été constructives : la voie de la ratification est de nouveau ouverte dans ce pays. Même si tout n'est pas résolu, loin s'en faut, une solution semble maintenant à portée de main. Si tel était le cas, ce serait une bonne nouvelle pour l'Europe, qui a un besoin croissant d'institutions renouvelées et adaptées à l'élargissement, d'une présidence stable, d'un usage plus étendu du vote à la majorité qualifiée et du renforcement des pouvoirs de contrôle des parlements nationaux sur le processus européen de décision.

Le Conseil européen devrait aussi valider les travaux accomplis pour relancer l'Europe de la défense, à commencer par un plan de renforcement des capacités militaires des États membres. La naissance d'une véritable défense européenne digne de ce nom passe par l'adoption de ce plan, même s'il n'est qu'une étape sur la voie d'un objectif que la France défend depuis longtemps.

Le Conseil devrait également accélérer les travaux en matière de sécurité énergétique et prendre acte du succès de la négociation du bilan de santé de la PAC – un résultat très important pour le renforcement de la politique agricole européenne, dans la perspective des négociations qui vont s'engager sur son adaptation aux défis actuels.

Enfin, le pacte européen sur l'immigration et l'asile ayant été adopté lors du Conseil européen d'octobre, le Conseil qui aura lieu demain devrait permettre de constater que la présidence française a été en mesure de mener à bien l'ensemble des priorités fixées au début de cette année par le chef de l'État. (Applaudissements sur les bancs des groupe UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Glavany

Pourquoi M. Copé n'est-il pas là pour applaudir ?

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Tels sont les enjeux du très important Conseil européen de jeudi et vendredi. Je conclurai mon propos en rendant hommage au travail accompli par le ministre des affaires étrangères, M. Bernard Kouchner.

Plusieurs députés du groupe SRC. Et Rama Yade ?

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Permettez-moi aussi de rendre un hommage particulier au secrétaire d'État aux affaires européennes, M. Jean-Pierre Jouyet (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur quelques bancs du groupe SRC), qui quittera ses fonctions dans quelques jours, et qui est responsable pour une bonne part de la réussite de la présidence française.

Plusieurs députés du groupe UMP. Bravo !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

M. Jouyet a été, tant auprès du Parlement européen qu'auprès des parlements nationaux et de la Commission européenne, un travailleur infatigable, toujours à la recherche de compromis compatibles avec la volonté exprimée par le Gouvernement français. L'ensemble de l'Assemblée nationale peut lui rendre hommage ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Libérez Copé ! Libérez Copé !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Compte tenu de la teneur et de l'importance du débat, je vous appelle à davantage d'attention, chers collègues ! (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Gardez vos leçons pour M. Copé, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Rudy Salles, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Le Conseil européen qui se tiendra à partir de demain à Bruxelles sera l'un des derniers temps forts d'une présidence française de l'Union européenne au cours de laquelle s'est manifestée, d'une manière plus criante que jamais, la nécessité d'une Europe unie.

Non contente de suivre au cours de ce semestre le programme de travail ambitieux qu'elle s'était fixée, la présidence française, dont je tiens au nom du groupe Nouveau Centre à saluer une nouvelle fois l'action, a également eu à faire face à des crises qui, nous le mesurons tous ici, appellent des réponses collectives et concertées tant elles ignorent nos frontières nationales.

Saisissante par son ampleur comme par la rapidité de sa contagion à la sphère financière mondiale, la crise financière à laquelle nous sommes confrontés – comme la plupart des économies mondialisées – aura, malgré les doutes et les incertitudes qu'elle continue d'imposer à nos concitoyens, au moins été utile en ce qu'elle a permis l'émergence, dans les faits comme dans les consciences, d'une Europe plus protectrice. Songeons aux conséquences qu'aurait eues la crise sur les économies européennes si l'union monétaire et l'euro n'avaient pas existé ! Songeons à la violence des mouvements qui auraient agité les marchés de change européens et qui auraient acculé nombre d'Etats, dont probablement la France, à un sévère relèvement de leurs taux d'intérêt. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.) Ainsi l'euro a-t-il non seulement joué le rôle d'un véritable bouclier mais, grâce à l'union monétaire, la Banque centrale européenne a pu s'engager dans une politique de baisse de ses taux directeurs.

Aucun État européen n'ayant la capacité de parer seul aux effets de la crise, et le bon sens prenant le pas sur les approches idéologiques, nous avons vu s'élaborer, par le biais d'une méthode jusqu'alors inédite, une réponse commune à l'ensemble des États membres. Le Conseil européen devra permettre d'aller plus loin encore, en définissant notamment une articulation efficace entre les plans nationaux de relance et les initiatives de la Commission. À l'heure où nous sommes confrontés à l'interdépendance manifeste des économies comme des circuits financiers, la concertation est l'une des conditions sine qua non du succès des initiatives qui seront prises.

La crise que nous traversons – et avec nous l'ensemble de nos partenaires européens – est l'occasion pour l'Europe de retrouver le coeur de ses citoyens. Pour cela, elle doit s'imposer comme le véritable cadre de réponse à cette crise en mobilisant l'ensemble des leviers dont elle dispose. À ce titre, le Nouveau Centre renouvelle sa proposition en faveur du lancement d'un programme de grands travaux à l'échelle européenne – une vieille idée défendue en 1993 par Jacques Delors dans son Livre blanc sur la croissance, la compétitivité et l'emploi, qui permettrait de moderniser les grandes infrastructures de notre continent en s'appuyant sur le lancement d'un grand emprunt via la Banque européenne d'investissement et qui aurait un impact fort sur la confiance des acteurs de notre économie. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

L'Union européenne est aujourd'hui en mesure de répondre aux attentes que nous plaçons en elle. À ce titre, l'énergie déployée par le Président de la République à l'occasion de la crise russo-géorgienne de cet été a sans doute marqué un tournant décisif dans l'émergence sur la scène internationale d'un acteur européen global. Nous étions nombreux à penser que la chute du mur de Berlin sonnerait enfin l'heure de l'Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Pourtant, l'ultime décennie du siècle dernier fut aussi celle du retour de la guerre au coeur même de notre continent. Nous avons alors été nombreux à manifester notre déception face aux limites de la politique extérieure et de sécurité commune – la PESC – annoncée à Maastricht.

En août dernier, les troupes russes arrêtaient leur progression à quelques dizaines de kilomètres seulement de Tbilissi, après qu'en quelques heures les vingt-sept gouvernements européens se furent unis pour permettre à la Géorgie de sauvegarder son indépendance. Il nous appartient à présent de tout faire pour que l'histoire retienne cette crise non pas comme un épisode isolé, mais bien comme l'heure où l'Europe a enfin joué tout son rôle sur la scène internationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Au cours de ce semestre, la présidence française ne s'est pas contentée de démontrer sa capacité à gérer des situations de crise ; elle a également permis à l'Europe de continuer à avancer en obtenant de nombreux résultats concrets quant aux priorités qu'elle s'était fixées.

Le pacte européen pour l'immigration et l'asile constitue à ce titre un progrès majeur pour l'Europe : treize ans après que la suppression des contrôles aux frontières intérieures de l'Union a condamné à l'inefficacité toute gestion à la seule échelle nationale des flux migratoires, et alors que l'Europe souffrait d'un manque chronique de cohérence tant dans l'organisation de l'immigration légale que dans la lutte contre les réseaux clandestins, les vingt-sept disposent désormais sur cette question d'une stratégie commune et n'en sont plus réduits à de vaines incantations en faveur de la solidarité entre États membres.

La relance de l'Europe de la défense constituait une autre priorité de la présidence française. Soulignons le fait que les réunions informelles des ministres de la défense des vingt-sept ont accouché de mesures concrètes : le lancement d'une flotte commune d'avions de transport polyvalents, la création d'un programme « Erasmus » pour les officiers européens en formation ou encore le développement en étroite coopération de la nouvelle génération de satellites militaires illustrent la volonté retrouvée de l'Europe d'avancer sur ces questions, et prouvent qu'à l'heure où l'Union européenne mène sur des théâtres extérieurs des opérations militaires complexes, son ambition est réelle.

Le « paquet énergie-climat » est également à l'ordre du jour du prochain Conseil européen. Il touche à des questions dont notre Assemblée a déjà eu l'occasion de débattre lors de l'examen du Grenelle de l'environnement et à l'occasion d'un débat dédié. Aussi, alors que la question climatique s'annonce comme la question majeure de notre siècle, je rappellerai que l'Europe ne peut ni ne doit céder aux visions de court terme. Sans doute des mécanismes de solidarité en direction de nos partenaires d'Europe centrale sont-ils nécessaires, mais il n'en demeure pas moins que l'adoption de ce paquet procède d'une impérieuse nécessité. Si l'Europe se doit d'apporter sa valeur ajoutée aux mesures environnementales prises par chaque État, les mesures contenues dans ce « paquet énergie-climat » peuvent également bénéficier d'un lien direct avec les mesures de relance prises aux plans économique et financier. À quelques jours de la fin de la présidence française de l'Union européenne, nous avons là une occasion de laisser une trace importante dans l'histoire de sa construction que nous n'avons pas le droit de laisser passer.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

J'en viens à la question, tant débattue dans les enceintes européennes, du bilan de santé de la politique agricole commune. Le maintien des instruments de stabilisation et d'intervention constitue une victoire pour tous ceux qui refusent un marché agricole dérégulé. Toutefois, le débat ne saurait être clos, à l'heure où sont menacés les grands équilibres alimentaires mondiaux et où les prix des denrées agricoles sont sujets à une dangereuse volatilité. Dans ces circonstances, c'est non pas d'un démantèlement – même partiel –, mais bien d'une refondation ambitieuse que la PAC a besoin…

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

… pour permettre l'avènement d'un nouveau système agricole européen fondé sur une agriculture performante, de qualité et éco-responsable. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Mes chers collègues, en permettant à l'Europe d'apparaître désormais comme un rempart face aux crises qui agitent le monde dans lequel nous vivons, ces derniers mois ont permis aux questions institutionnelles de se trouver éclairées d'un jour nouveau. Afin qu'elle puisse à l'avenir jouer tout son rôle, l'Europe de demain ne peut se passer d'une présidence forte et stable. Aussi le Nouveau Centre tient-il à saluer la poursuite du processus de ratification qui, après la ratification suédoise de novembre dernier, a franchi hier une nouvelle étape décisive, avec la fixation d'une date pour l'examen du traité de Lisbonne par nos partenaires tchèques.

La présidence française de l'Union européenne constituait un rendez-vous historique pour notre pays, comme pour sa place dans le monde. Aussi, je voudrais, avant de conclure, rendre un hommage appuyé à tous ceux qui ont permis qu'elle soit d'ores et déjà perçue comme un exercice réussi par l'ensemble de nos partenaires. Si l'énergie et les convictions européennes du Président de la République y sont pour beaucoup, je souhaiterais également saluer l'action du Gouvernement, du Premier ministre, du ministre des affaires étrangères et, bien sûr, celle du secrétaire d'État aux affaires européennes, tout particulièrement pour la qualité des contacts entretenus avec les parlementaires de l'ensemble des bancs de cette assemblée, ainsi que celle des agents de nos postes diplomatiques, comme de l'ensemble des administrations que cette présidence a sollicités et qui se sont en tous points montrés à la hauteur du défi. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bruno Le Maire, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Le Maire

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame la ministre du logement et de la ville, monsieur le ministre des affaires étrangères et européennes, monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, mes chers collègues, au terme de six mois de présidence de l'Union européenne, la France a été à la hauteur des espoirs placés en elle et des enjeux. En matière de défense, de politique agricole et d'immigration, nous avons su faire progresser l'Europe de manière concrète, en tenant compte des contraintes de nos partenaires et des attentes des peuples.

Ce succès est celui d'une méthode, dont vous avez été, monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, l'inspirateur et le praticien.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Le Maire

Vous avez toujours privilégié le dialogue à l'affirmation péremptoire, vous avez tissé un à un les liens de la confiance avec les autres États membres. Nous vous devons beaucoup. Nous voulons vous témoigner aujourd'hui notre reconnaissance, au moment où vous vous apprêtez à quitter vos fonctions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ce succès est aussi celui de l'engagement du Premier ministre et de l'ensemble du Gouvernement, en particulier du ministre des affaires étrangères, pour faire en sorte que l'Europe retrouve des marges de manoeuvre politiques et réponde concrètement aux inquiétudes de nos concitoyens. Dans la période difficile que nous traversons, il reste encore aux États membres à confirmer leur capacité à faire front commun. Mais au moins n'y a-t-il plus aucun doute sur la capacité de la France à reprendre sa place en Europe, après l'échec du référendum de 2005.

Ce succès, il est enfin celui de la volonté personnelle dont a fait preuve le Président de la République tout au long de ces six mois. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Il est celui de la ténacité montrée à convaincre nos partenaires de prendre leurs responsabilités face à un monde dans lequel l'ordre et la règle font désormais défaut.

Je pense à deux moments précis de la présidence française, qui resteront chacun comme un progrès majeur dans l'affirmation de la puissance politique européenne : pas une puissance pour la domination, mais une puissance pour le droit et la stabilité.

Le premier est la réaction coordonnée des États européens aux faits de guerre en Géorgie. Pour la première fois de son histoire récente, l'Europe a su répondre dans l'urgence à une menace sérieuse à ses frontières, sans recourir à son allié américain. Elle l'a fait avec discernement. Elle l'a fait avec fermeté. Même si les conditions de la stabilité dans le Caucase sont encore loin d'être réunies, au moins la paix l'a emporté. En entérinant la réponse commune des États membres, le Conseil européen du 1er septembre dernier a ouvert la voie à un engagement politique de l'Europe dans le règlement des conflits proches. Sous la présidence française, nous aurons donc montré que, pour l'Europe, la paix ne se résume pas à un mot, mais exige des actes.

Le deuxième moment que je veux rappeler est la réunion exceptionnelle de l'Eurogroupe, le 12 octobre dernier, non seulement parce qu'elle s'est tenue pour la première fois au niveau des chefs d'État et de Gouvernement, mais surtout parce que l'Europe a su rompre avec ses habitudes, bousculer son agenda, pour déployer des moyens massifs en réponse à la crise financière internationale. D'ordinaire, la rapidité d'exécution n'est pas la première qualité de l'Europe. Cette fois, nous avons apporté la preuve qu'avec de la méthode, avec de la volonté et sous la pression des événements, nous pouvions être vingt-sept et aller vite.

Alors, bien sûr, tous les égoïsmes nationaux n'ont pas disparu comme par enchantement. Il reste des obstacles importants à franchir, comme nous le voyons actuellement dans la négociation climat. Mais la présidence française aura su retourner les crises économiques et politiques au bénéfice du continent européen. Elle aura su faire l'illustration par l'exemple de la capacité de l'Europe à être plus grande, plus forte, plus rassemblée. Ce n'est pas au nom de la France que notre présidence aura été réussie, c'est au nom de l'Europe.

À quelques semaines de la présidence tchèque et à la veille du Conseil européen, nous sommes maintenant à un moment de vérité. Soit nous inscrivons dans la durée ce qui a été construit dans la crise, soit nous retournons aux vieux réflexes nationaux qui affaibliront l'Europe et chacune des nations qui la composent. Soit nous avançons, soit nous reculons.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Le Maire

Le statu quo n'est pas possible. Qui peut croire en effet que, pour défendre durablement notre industrie, pour progresser en matière de protection de l'environnement, pour garantir notre approvisionnement énergétique, pour remettre les exigences sociales au premier plan de nos préoccupations, nous puissions faire l'économie de politiques communes plus ambitieuses ?

En 2009, nous avons devant nous trois défis à relever, qui apporteront, ou non, la preuve de la capacité de l'Europe à se renouveler et à conserver l'élan de 2008.

Le premier défi est économique : chaque jour qui passe nous confirme, dans nos circonscriptions et ailleurs, que la crise économique sera d'une ampleur sans précédent. Elle n'épargnera aucun pays. Elle touchera toutes les activités.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Le Maire

Face à cette crise, il fallait réagir vite, en fixant un cap clair. Le Président de la République et le Gouvernement l'ont fait, avec un plan de relance fondé sur l'investissement. Avec l'ensemble de mes collègues de la majorité, je tiens à le saluer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Il est regrettable néanmoins que ni la Commission ni les principaux États membres n'aient encore réussi à définir une réponse forte et véritablement coordonnée. Pour des raisons légitimes, qui tiennent en particulier à l'effort de désendettement consenti depuis des années, l'Allemagne hésite encore à s'engager dans ce sens. Pourtant, nous devons tous avoir conscience que le temps joue contre nous. C'est maintenant que se joue la stabilité économique de demain. C'est maintenant que les États membres de l'Union, après avoir su réagir pour sauver le système bancaire, doivent s'engager concrètement pour en réévaluer les règles, les modalités de contrôle, le bon fonctionnement. C'est maintenant que doivent être jetées les bases d'une meilleure gouvernance économique européenne, en partant d'une meilleure coordination entre les États membres de la zone euro.

Le deuxième défi est budgétaire et financier. Nous ne pouvons pas espérer que l'Europe joue un rôle toujours plus important en matière de recherche, de politique industrielle, d'action extérieure, de mobilité des jeunes, d'environnement, si elle ne dispose pas des moyens pour le faire. Avec un budget qui représente moins de 1 % du PNB européen, nous en sommes loin. La négociation budgétaire ne s'ouvrira que dans la dernière partie de l'année 2009, mais, pour ne pas répéter les erreurs du passé, pour prendre acte également de la fin de certains équilibres, notamment sur la PAC, nous devons préparer le terrain sans tarder.

Le dernier défi, le plus immédiat et le plus lourd, est politique : nous avons devant nous la perspective d'un nouveau référendum irlandais sur le traité de Lisbonne, la poursuite de l'élargissement aux Balkans, le risque d'un retour à la mécanique administrative européenne après les audaces de la présidence française. Tous ces éléments, auxquels s'ajoute la priorité que certains États accorderont à la redéfinition de leur relation transatlantique bilatérale, à la suite de l'élection de Barack Obama, pourraient favoriser un repli de l'Europe au moment même où elle choisira ses nouveaux représentants au Parlement. Mettons donc de l'audace et du courage dans notre engagement européen, pour que la résignation et les habitudes ne l'emportent pas au final. À force de patience, à force de dialogue avec tous les États membres sans exclusive, en allant jusqu'au bout de la refondation de notre relation avec l'Allemagne, notre pays frère, nous trouverons la voie de l'avenir.

Pour notre part, nous, députés de la majorité, sommes fiers de ce qui a été accompli par le Président de la République et le Gouvernement depuis six mois dans le domaine européen. Nous n'avons qu'un objectif : poursuivre le travail accompli ; qu'un mot d'ordre : la cohésion de notre majorité face aux échéances européennes ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Le Maire

…qu'une vision : un idéalisme pragmatique, au service de tous les citoyens de l'Europe. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christophe Caresche, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Vous nous avez appelés, monsieur le président, à davantage de sérénité, et vous avez raison, car le sujet le justifie. Reconnaissez toutefois qu'il est un peu inattendu d'assister à un discours du Premier ministre devant des bancs clairsemés du groupe UMP et en l'absence de son président ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Le Conseil européen, qui se réunira demain, revêt une importance particulière. En pleine crise économique mondiale, il devra prendre des décisions lourdes dans au moins trois domaines cruciaux pour l'avenir de l'Europe : la ratification du traité de Lisbonne, les mesures de réponse à la crise financière et économique, et la mise en oeuvre du paquet énergie climat. Mais il est aussi le dernier, sauf imprévu, de la présidence française. Je n'ai pas le temps, ici, d'en dresser le bilan, mais permettez-moi d'en dire un mot.

Reconnaissons que, lors de cette présidence, rien ne s'est véritablement passé comme prévu, crise financière oblige. L'Europe, comme le monde, vient de connaître un de ces bouleversements dont il est difficile, encore aujourd'hui, de mesurer toutes les conséquences, Dans ce contexte, l'Union européenne a su réagir en prenant des initiatives, face à une Commission européenne dont le président, José Manuel Barroso, a paru dépassé par les événements. Il faut convenir que l'inspiration très libérale de sa politique ne le prédisposait pas à des remises en cause dont il doit encore s'étonner lui-même !

Je tire personnellement une conclusion de cet épisode.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Il faut un leadership fort en Europe, si l'on veut que les choses bougent. Mais je n'oublie pas que les questions financières et économiques n'étaient pas inscrites initialement à l'ordre du jour de la présidence française, alors même que les premiers signaux de la crise se manifestaient et que certains vous pressaient de le faire. En réalité, la France a fait preuve de réactivité, mais pas d'anticipation !

S'agissant de la ratification du traité de Lisbonne, qui sera le premier sujet à l'ordre du jour du Conseil, il est souhaitable que celle-ci se fasse rapidement et qu'un accord soit trouvé en ce sens. Il faut mettre fin à l'interminable débat institutionnel dans lequel l'Europe et les pays qui la composent se sont enlisés. L'Europe a besoin, dans la situation de crise que nous connaissons, d'institutions plus lisibles et plus performantes,

Une solution est en vue avec l'Irlande, au prix de l'abandon du système de répartition des commissaires européens, prévu dans le traité de Lisbonne. Ce système, qui aurait temporairement privé la France et les grands pays européens d'une représentation à la Commission, a fait l'objet de nombreuses critiques, Je ne suis pas certain qu'il faille regretter cet abandon. Espérons que cet accord permette de relancer une dynamique qui entraînera, par exemple, la ratification par la République tchèque dans les prochaines semaines.

Cependant, les interrogations que beaucoup d'entre nous avions sur ce traité demeurent et ont été renforcées par l'actualité récente. Il est clair que la période que nous venons de vivre a montré l'impérieuse nécessité d'une gouvernance économique européenne.

S'il y a, malgré tout, un acquis de cette crise auprès de nos concitoyens, c'est bien qu'une régulation financière et économique est nécessaire et que le niveau européen est pertinent pour l'exercer.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Il faut pour cela donner à l'Europe les moyens politiques et économiques d'y parvenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Ce sera un des enjeux de ce Conseil, qui sera dominé par les conséquences et les réponses à la crise financière et économique. Nous savons désormais que celle-ci sera profonde et durable. Dans ce contexte, l'Europe a besoin de mobiliser tous les instruments économiques et monétaires pour relancer l'économie, quitte à remettre en cause certains de ses dogmes qui, malheureusement, ont jusqu'à présent pesé à l'excès sur son action.

Il faut saluer la récente baisse des taux de la Banque centrale européenne qui, je l'espère, en annonce d'autres, rompant ainsi avec une vision trop rigide de sa politique, comme il faut se féliciter de la flexibilité reconnue à l'application des règles de concurrence par la Commission et au pacte de croissance et de stabilité.

Cependant, la France serait mieux placée dans son dialogue – parfois, semble-t-il, musclé – avec la Commission si, dans un passé récent, elle n'avait pas choisi d'alléger les impôts des plus riches plutôt que de réduire ses déficits et sa dette ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Le paquet fiscal pèse lourd aujourd'hui non seulement parce qu'il nous prive de marges de manoeuvre au moment où nous en avons le plus besoin,…

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

…mais aussi parce qu'il est difficile, vis-à-vis de la Commission et de certains de nos partenaires – je pense à l'Allemagne – de demander à être exonéré de règles que l'on a jamais respectées ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

De même, le Conseil verra l'épilogue du bras de fer entre la France et la Commission s'agissant de l'approbation du plan de soutien français aux banques, puisque la Commission a validé hier le plan français, monsieur le Premier ministre.

Comme vous, nous considérons que les règles de la concurrence ne doivent pas entraver ce plan, mais nous déplorons – et nous l'avons précisé lors du débat sur les conséquences économiques et financières de la crise – que ce plan n'offre pas suffisamment de garanties au regard de l'utilisation des aides versées qui, selon nous, devraient aller entièrement au financement de l'économie réelle. Alors qu'en Grande-Bretagne, pays du libéralisme, l'État entre au conseil d'administration des banques concernées avec un véritable droit de regard sur l'utilisation des fonds, en France, ce ne sera pas le cas ! (Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP.) Pour faire face à la récession qui s'annonce, l'Europe a besoin d'une relance économique forte et concertée. Ce serait une erreur de sous-estimer la nécessité d'une relance de l'activité par la demande et la dépense publique.

Le plan présenté par la Commission, et qui sera adopté au Conseil, s'il contient des éléments positifs, n'est pas à la hauteur des enjeux. Il souffre, tout d'abord, d'un manque de cohérence et de coordination. Il s'agit en effet, pour l'essentiel, de l'addition de plans nationaux. La dimension européenne de ce plan est très insuffisante. Il est, par ailleurs, peu crédible et notablement insuffisant dans son ampleur. Il est peu crédible, car les 200 milliards d'euros annoncés sont probablement surestimés, si on considère, par exemple, la réalité du plan français dont le montant réel est plus proche des 10 milliards d'euros que des 26 milliards annoncés et revendiqués ! Enfin, si ce plan est marqué par des mesures de soutien de la demande dans certains pays européens, comme l'Angleterre ou l'Espagne, il privilégie l'offre et les entreprises dans d'autres. C'est ce choix qu'a fait la France et qui nous paraît contestable. Il faut, dans les circonstances actuelles, faire le choix d'une relance massive par les salaires et par le pouvoir d'achat. C'est juste socialement et efficace économiquement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Vous l'aurez compris, nous attendons plus de la France et de l'Europe. D'ores et déjà, il faut envisager les conditions d'une action économique au niveau européen dans la durée. Nous savons que, pour maintenir le niveau de l'emploi en Europe, il faudra investir non seulement en 2009, comme le propose la Commission, mais également en 2010 et 2011 pour des montants sans doute équivalents.

L'Europe doit dès maintenant se préparer à adopter de nouvelles mesures de relance qui devront être prises au deuxième semestre 2009. Pour cela, nous proposons qu'une évaluation du plan actuel soit d'ores et déjà prévue au cours du premier semestre 2009. Dans ce cadre, la Banque européenne d'investissement devrait être plus sollicitée.

Cette action devra également être mieux coordonnée. C'est avant tout une question de volonté politique. Contrairement à ce qui est dit parfois, l'article 99 du Traité instituant la Communauté européenne, qui invite les États à considérer leurs politiques économiques comme des questions « d'intérêt commun », autorise une véritable coordination des politiques économiques des États membres, s'ils le décident. Il est possible, sur cette base, d'envisager la mutualisation, dans un grand emprunt européen, des emprunts des États membres de la zone euro. Cette solution, proposée par les socialistes européens, permettrait de démultiplier les effets des différents plans nationaux.

Il convient donc d'impulser une dynamique réellement européenne. Pour cela, la présidence française aurait pu proposer que soit établi un rapport sur le coût de la « non- coordination », comme il y en a eu un en 1988 sur le coût de la « non-Europe » et qui a débouché sur le Livre blanc. Ce rapport permettrait la mise en évidence les bénéfices et la valeur ajoutée que les États membres pourraient tirer d'une pareille coordination.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Telles sont les propositions qui auraient pu guider une approche réellement communautaire de la relance économique européenne.

On le voit, l'Europe est à la croisée des chemins. La crise économique et la crise écologique sont des défis redoutables qui la mettent à l'épreuve, mais qui suscitent aussi une formidable attente de la part de nos concitoyens. À nous de démontrer que l'Europe peut apporter des solutions au bouleversement du monde, qu'elle peut protéger et préparer l'avenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, le programme du Conseil européen qui s'ouvre demain sera, une nouvelle fois, essentiellement consacré à la lutte contre la crise financière et la récession dans laquelle l'Europe est plongée et dont pâtissent directement nos concitoyens. Les dirigeants européens devront se prononcer sur le « plan de relance » présenté par la Commission européenne. Sur les 200 milliards d'euros proposés, seuls 5 milliards seront en fait réinjectés dans l'économie réelle, au nom de la Communauté européenne, les 195 milliards qui restent étant des plans d'État.

Le plan présenté par la Commission européenne manque d'ambition. Il consiste, en fait, à octroyer un label européen aux plans de relance nationaux déjà annoncés. Sur le fond, nous déplorons qu'aucune directive ne soit donnée et qu'aucune recommandation ne soit faite aux États de veiller à ce que l'argent mobilisé serve bien l'emploi et le pouvoir d'achat.

Croyez-vous que les Français soient rassurés par votre mobilisation en faveur des banques et des entreprises ? Votre gouvernement ne parle que des banques et minimise les conséquences sociales de cette crise. Pourtant, les plans sociaux, les fermetures d'usines et l'aggravation du chômage – vacances forcées pour plusieurs semaines dues au chômage technique – témoignent des conséquences dramatiques de cette crise pour les salariés et les chômeurs. À titre d'exemple, en Seine-Maritime, la crise se traduit concrètement par des suppressions d'emplois et des fermetures d'usines – nous l'avons souvent évoqué dans cet hémicycle – à Renault Sandouville : 1150 suppressions d'emplois ; à Millenium au Havre : 280 suppressions d'emplois ; à Cooper Standard à Lillebonne et Bolbec : 81 suppressions d'emplois. La presse locale avait consacré une page entière aux entreprises fermées, condamnant les salariés à des vacances forcées. Je ne donne que ces exemples, mais la liste est bien plus longue. La situation est catastrophique pour les salariés !

Les Français sont exaspérés de voir que votre gouvernement et les dirigeants européens sont capables de mobiliser des centaines de milliards pour garantir les banques et pas un seul pour garantir les salaires, même dans les cas de chômage technique, et pour obliger les entreprises à garantir l'emploi. Bref, ce plan de relance de la Commission ne répond manifestement pas aux attentes de nos concitoyens !

Nous devons être conscients que nous ne traversons pas une simple crise conjoncturelle, un mauvais moment à passer avant de repartir de l'avant. Nous vivons l'échec du système du capitalisme ! Au-delà des discours naïfs et autres gesticulations de nos gouvernants, leur responsabilité politique est engagée pleinement !

Nous avons, pour notre part, formulé des propositions pour en finir avec ce modèle économique qui est en faillite. Nous proposons, en premier lieu, la création d'un pôle financier public ayant pour mission de garantir l'accès à des crédits à faible taux afin de permettre aux entreprises de développer la recherche, l'emploi et l'investissement productif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Le pouvoir d'achat des salariés et des retraités doit être revalorisé. Cela passe par une augmentation significative du SMIC et par la garantie d'une hausse des salaires de même niveau que la croissance de la productivité. Il convient, ensuite, de stopper la course à la rentabilité pour le profit maximum des entreprises et, pour cela, imputer le coût des suppressions d'emplois décidées par les entreprises cotées sur le niveau des dividendes afin d'empêcher les licenciements boursiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Il faut opérer une réforme fiscale d'ensemble visant à limiter la rentabilité des investissements financiers, plafonner à 10% la part des dividendes dans l'autofinancement brut. Il faut, enfin, réduire les inégalités de revenus, notamment à l'égard des grandes fortunes et, pour ce faire, supprimer les avantages exorbitants représentés par les éléments de rémunération, indemnités et avantages du type des parachutes dorés, golden hello et autres stock-options. Il faut décider d'un prélèvement exceptionnel sur les grandes fortunes et, enfin, supprimer le bouclier fiscal.

Au plan européen, la France doit engager avec ses partenaires un processus de négociation visant à mettre fin à l'indépendance de la Banque centrale européenne, à changer sa politique de crédit et à mettre fin à la politique de concurrence et de dumping social et fiscal ; à entreprendre sans tarder l'éradication des paradis fiscaux et bancaires et à élaborer une politique industrielle commune pour répondre aux grands enjeux de demain. Il est également nécessaire de mettre en place une politique de taxation des importations aux frontières de l'Union en tenant compte des normes sociales et environnementales – en vigueur ou pas – dans les pays d'origine des produits.

Alors que nous subissons de plein fouet les conséquences de l'application des dogmes de l'Europe libérale, il convient de reconnaître que la poursuite dans la voie de la libéralisation à marche forcée ne permet pas de répondre aux urgences auxquelles nous sommes confrontés. Il faut revenir sur les privatisations, remettre dans le domaine public des secteurs privatisés au premier rang desquels figurent France Télécom, Air France, EDF-GDF. Il faut créer des services publics européens, notamment dans les secteurs de l'énergie, des transports et de la communication.

S'agissant, par exemple, du « paquet énergie-climat » à l'ordre du jour du Conseil européen de demain, force est de constater que le productivisme capitaliste détruit les deux sources de la richesse sociale : le travail par l'exploitation acharnée ; la nature et les ressources naturelles par leur pillage et leur gaspillage. Bien entendu, nous ne pouvons qu'approuver l'ambitieux dessein de la Commission présenté dans le cadre du « paquet énergie-climat ». Mais, alors que la conférence de Poznan va s'achever et à la veille de la conférence de Copenhague en 2009, les États membres peinent à trouver un consensus en la matière. Contribuer à relever les défis énergétiques et climatiques du XXIe siècle est une responsabilité européenne, mais cela ne peut aller de pair avec une course effrénée à la rentabilité ou une concurrence débridée. Nous considérons que la réalisation de ces objectifs ambitieux appelle la mise en oeuvre d'un autre mode de croissance et de développement tout à la fois durable et soutenable, social et solidaire. Pour cela, il convient de s'affranchir des politiques libérales européennes et internationales actuelles. Nous estimons qu'il est possible et nécessaire de construire une autre Europe en intégrant le dépassement de la crise écologique comme l'un des éléments majeurs de la transformation sociale, ce qui passe par la mise en place d'un service public européen de l'énergie garanti par un pôle public…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

… soit exactement l'inverse de la politique menée en France, une politique de privatisation des grands opérateurs nationaux. Les Français en subissent les conséquences notamment avec la scandaleuse augmentation du prix du gaz qui grève encore un peu plus le pouvoir d'achat des ménages !

Autre illustration des conséquences désastreuses du néolibéralisme : les nouvelles orientations de la politique agricole commune. Alors que le secteur agricole, et plus particulièrement l'élevage, se trouve aujourd'hui dans une situation catastrophique, aucun signe n'est donné aux agriculteurs ni dans le sens de prix rémunérateurs qui leur seraient garantis ni dans la mise en oeuvre d'indispensables mesures de régulation. Alors que les parlementaires français avaient justement porté l'exigence d'une régulation à l'échelon communautaire, d'une réorientation des aides en faveur des filières en difficulté et d'une réhabilitation de la « préférence communautaire », l'accord adopté le 19 novembre par les ministres européens de l'agriculture entérine une plus grande libéralisation des échanges agricoles et l'absence d'une véritable politique des prix pour les producteurs. L'exemple de la suppression programmée des quotas laitiers est à ce titre révélateur. Les décideurs européens ne sont donc pas parvenus à saisir l'opportunité d'impulser une nouvelle dynamique à la politique agricole commune et à lui donner toute sa pertinence dans le contexte alimentaire mondial actuel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

C'est dans ce contexte de crise généralisée que les chefs d'État et de gouvernement devront se prononcer sur la question du devenir du traité de Lisbonne.

Alors que la chambre basse du Parlement tchèque a repoussé, hier, le vote sur le traité de Lisbonne au 3 février 2009, et tandis que le Parlement irlandais a publié un rapport ouvrant la voie à un second référendum en Irlande, il convient de rappeler – j'ai eu l'occasion de le dire plusieurs fois dans cet hémicycle – que, sur le plan juridique, l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne est subordonnée à sa ratification unanime par les vingt-sept États membres de l'Union. Chacun d'entre eux détient un droit de veto. En votant « non », le peuple irlandais a exprimé clairement et massivement sa souveraineté. Le traité de Lisbonne est donc caduc !

Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Ce n'est pas en faisant pression sur le peuple irlandais pour faire passer en force le traité de Lisbonne que les dirigeants européens résoudront la crise démocratique que traverse l'Union européenne. Ces pratiques donnent une triste, mais réaliste image de la manière dont l'Europe fonctionne.

Au-delà de cet aspect démocratique, le contexte de crise généralisée que nous vivons pose la question de l'avenir de l'Europe et de son sens. L'activisme des dirigeants européens en faveur de la dérégulation, de la déréglementation et d'une politique économique et monétaire tout entière tournée vers la spéculation est responsable de la déconnexion entre économie de production, économie réelle et marchés financiers.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Il ne faut pas exagérer, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

J'ai encore une minute et demie, monsieur le président !

Les dogmes de l'Europe libérale, que sont le pacte de stabilité, la marchandisation de toutes les activités humaines et l'indépendance de la Banque centrale européenne, sont inscrits au coeur même des traités européens, de celui de Maastricht à celui de Lisbonne !

Pour enrayer la crise et éviter à l'avenir d'autres effondrements, il faut restructurer en profondeur la construction européenne. La présidence française aurait pu, aurait dû, proposer l'arrêt du processus de ratification et engager l'élaboration d'un nouveau traité fondateur de l'Union européenne sur de tout autres bases, rompant avec les logiques libérales qui la conduisent de crise en crise.

Enfin, s'agissant des relations de l'Union européenne avec Israël, je souhaiterais dire solennellement, comme l'ont fait les parlementaires européens, qu'il ne peut y avoir de perspectives de « rehaussement » des relations avec Israël alors que les autorités israéliennes violent, de manière flagrante et permanente, le droit international et tous les engagements pris auprès du « quartet » et de la communauté internationale.

Cette pratique du « deux poids, deux mesures » mine, à raison, la confiance des Palestiniens à l'égard du processus de paix. J'ai rencontré, ce matin, deux Palestiniens décorés par la Ligue des droits de l'homme allemande pour leur résistance pacifique à Israël.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Lecoq, vous avez largement épuisé votre temps de parole ! (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Dans le contexte du soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'Homme, il est impensable que l'Union européenne accorde à Israël un statut privilégié en son sein. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre Lequiller, président de la commission chargée des affaires européennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Lequiller

, président de la commission chargée des affaires européennes. Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'actualité européenne est chargée en cette fin de présidence, et c'est l'un des grands mérites de la France que d'avoir su remettre l'Europe en mouvement. Il est vrai que, sous la précipitation des événements, le besoin d'Europe a rarement été aussi fort. L'Europe est en mouvement parce ce besoin a rencontré ce qui lui faisait parfois défaut, une forte volonté politique à sa tête.

Bien sûr, l'Histoire retiendra avant tout ce que l'Union a fait, et continue de faire, pour protéger ses peuples d'une crise économique et financière d'une ampleur sans précédent car, mes chers collègues, s'il y a bien des sujets sur lesquels nous pouvons nous réjouir du bilan de la présidence française, comme tous nos partenaires européens, la réponse de l'Union européenne face à la crise financière est sans doute historique. Cette réponse vient de loin, ne l'oublions pas. Je veux en effet insister, ce qui est trop rarement fait, sur tout ce que l'on doit à l'euro.

Sans zone euro, les banques centrales européennes auraient-elles été capables de se coordonner pour apporter des injections de liquidités aussi massives que celles qu'a réalisées la BCE ? Les monnaies européennes auraient-elles résisté au choc ? Demandez aux pays européens hors de la zone euro, qui ont payé le plus lourd tribut à la tempête financière, ce qu'ils en pensent.

Sans zone euro, le Président de la République n'aurait pas pu réunir les responsables et coordonner les actions. C'est au niveau de la zone euro qu'ont été prises, le 12 octobre dernier, les décisions qui ont marqué un tournant, et qui ont ensuite seulement été entérinées par les vingt-sept lors du Conseil européen. La zone euro a pris à cette occasion toute sa dimension politique, démultipliée d'ailleurs par l'association des Britanniques.

Les chefs d'État et de gouvernement ont su trouver les chemins de l'unité sur des points essentiels pour restaurer la confiance sur les marchés et chez les citoyens : ne laisser aucune grande banque européenne tomber en faillite, garantir les dépôts des particuliers et, surtout, se doter d'une doctrine, d'un plan et d'une cellule de crise communs.

À présent que la crise financière est devenue également une crise économique, l'Union européenne doit démontrer sa capacité à coordonner les plans de relance, ce qu'elle a fait, monsieur Caresche.

Chacun sait que des programmes nationaux isolés ne seraient que des gouttes d'eau dans l'océan et, je le dis sans détour, sans la première économie européenne, sans notre principal partenaire européen, l'Allemagne, nos efforts risquent fort d'être vains. Nous devons donc parvenir à convaincre nos amis allemands, dont je connais bien la situation politique, qu'au milieu des turbulences, l'Europe a besoin comme jamais de ses deux moteurs à plein régime.

L'entente franco-allemande sera d'ailleurs l'une des clés du succès du paquet énergie-climat, qui constitue le second grand dossier sur lequel on attend des avancées décisives au cours du Conseil européen. Je veux ici rendre hommage à la force de conviction de la présidence française, qui est parvenue à ne pas renvoyer cette question essentielle à des lendemains incertains.

Nos collègues Deflesselles et Lambert ont, dans leur récent rapport, très justement insisté sur la dimension internationale de cette question. L'Europe se doit de conserver un rôle exemplaire pour amener les autres parties à signer un accord ambitieux lors du sommet de Copenhague en décembre 2009. Les États-Unis, en particulier, ont annoncé leur intention de s'engager dans les négociations post-Kyoto, mais il serait naïf de croire qu'ils ont pour autant accepté de prendre des engagements contraignants. Pour aboutir à un tel résultat, le monde a besoin que l'Europe soit un leader incontestable, pesant sur les négociations.

À quelques heures de ce Conseil européen difficile, l'issue n'est pas certaine face aux craintes exprimées par la Pologne et la plupart des nouveaux États membres pour leurs secteurs énergétiques et aux réticences manifestées par des industries çà et là. On assiste à une certaine dramatisation, qui fait partie du jeu habituel des négociations. Je crois néanmoins qu'un accord est à portée de main. L'enjeu est trop essentiel pour être compromis par quelques égoïsmes nationaux ou sectoriels.

Les motifs d'espérer sont aussi puissants pour le dernier grand défi du Conseil européen : trouver une solution à la question institutionnelle. Nos collègues tchèques débattront finalement de la ratification du traité de Lisbonne le 3 février 2009. Le nouveau traité poursuit donc lentement son chemin. De très nombreux pays l'ont approuvé. Jamais un traité n'avait été ratifié par tant d'États de façon aussi concentrée.

Reste, évidemment, l'essentiel : répondre aux craintes exprimées par le peuple irlandais, lui donner des gages tangibles sur les sujets qui lui importent, pour ouvrir la voie à un second référendum. Le Président Barroso a déclaré hier que les demandes exprimées par les Irlandais pour organiser un second référendum pouvaient être honorées, en particulier sur la préservation d'un poste de commissaire par État membre. J'aimerais, monsieur le secrétaire d'État que vous nous répondiez sur ce point.

Les événements qui se sont passés au cours du dernier semestre – crise entre la Géorgie et la Russie, crise financière – ont montré plus que jamais la nécessité d'une Europe politique. Pour faire face à de tels problèmes, nous devons être dotés d'institutions stables, contenues dans le traité de Lisbonne.

Notre Assemblée a su apporter sa pierre à l'édifice. Je remercie le Gouvernement tout entier, qui s'est mobilisé lors de cette présidence française, mais vous en particulier, monsieur Jouyet, qui vous êtes tant donné pour son succès. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Axel Poniatowski, président de la commission des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Axel Poniatowski

, président de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la présidence française de l'Union européenne aura été un exercice de haute politique.

La gestion des crises restera l'aspect le plus emblématique de cette présidence mais, à deux jours du Conseil européen, l'heure est celle du bilan : il s'agit d'évaluer les résultats par rapport aux ambitions fixées.

Dans le domaine de l'asile et de l'immigration, les objectifs ont été atteints, en particulier avec l'adoption du pacte ad hoc par les vingt-sept, les 15 et 16 octobre derniers.

S'agissant de la politique agricole commune, un bon accord a été obtenu au terme de discussions parfois difficiles.

Dans le domaine de la défense, des progrès importants ont été accomplis, tant sur la stratégie qu'en termes de programmes opérationnels même s'il reste encore beaucoup à faire.

Le quatrième point est plus délicat. Au sein du « paquet énergie-climat », des avancées ont été enregistrées, qui contribuent à façonner une future Europe de l'énergie. Dans la lutte contre le changement climatique, il faut encore discuter avec ceux de nos partenaires d'Europe centrale et orientale qui produisent du charbon, afin de sceller un accord qui soit à la hauteur de l'enjeu.

Sur des sujets cruciaux pour l'avenir de la construction européenne, il y a donc tout lieu de saluer les résultats obtenus, alors que la France n'avait pas fait le choix de la facilité.

Au-delà de ce bilan, nous avons déjà eu l'occasion de saluer la conduite exemplaire de la présidence de l'Union, et je pense évidemment à la crise russo-géorgienne survenue cet été et à la crise bancaire et financière, qui a atteint cet automne sa phase la plus aiguë, mais je voudrais porter mon regard vers l'avenir.

Mes chers collègues, les événements exceptionnels auxquels nous avons été confrontés ont justifié un fonctionnement institutionnel de l'Union lui-même exceptionnel, mais peut-on pour autant revenir au statu quo ante comme si de rien n'était ? Je ne le pense pas.

Le premier enseignement à tirer de ces épisodes, c'est que l'Europe, quand elle le veut, sait être politique. Il n'est pas anodin de souligner que, lors des deux crises de ce semestre, c'est elle qui a été à la manoeuvre alors que les États-Unis se faisaient discrets. Le poids de l'Europe est devenu incontestable, et il fallait une volonté politique pour mettre l'Union en mouvement. Nicolas Sarkozy a incarné cette volonté.

Le second enseignement à tirer, c'est un rééquilibrage manifeste entre l'intergouvernemental et le communautaire. Qu'il s'agisse du Conseil de l'Union européenne, du Conseil européen, de l'Eurogroupe, ou de formats innovants tels que le G 4 ou le G 20, les exemples abondent de la réactivité et de l'efficacité coordonnée des États. J'y vois l'illustration évidente du fait que nous formons, à vingt-sept, cette « Union d'États souverains » qui est la caractéristique originale de l'Union européenne.

En revanche, les organes proprement communautaires se sont davantage trouvés en situation de répondre aux initiatives des États plutôt que de prendre eux-mêmes l'initiative. Je pense en particulier à la Commission européenne. Au plus fort de la crise, elle s'est contentée d'admettre que les règles communautaires pouvaient être quelque peu assouplies, mais, alors que le danger d'une faillite globale du système s'est éloigné, elle a freiné la mise en oeuvre des décisions des États pour garantir le rôle des banques dans le financement de l'économie. Il faut désormais, à la lumière de cet épisode, que le Conseil européen fasse entendre à la Commission qu'elle doit être plus réactive.

Dès lors, permettez-moi de formuler deux recommandations pour le proche avenir de l'Union.

En premier lieu, les avancées en matière de représentation extérieure de l'Union contenues dans le traité de Lisbonne sont plus que jamais nécessaires. Nous avons besoin d'une présidence stable du Conseil européen, incarnée par une personnalité de premier plan. Nous avons besoin d'un Haut représentant pour les affaires étrangères qui soit à même de jouer un rôle actif, en s'appuyant sur un service européen d'action extérieure qui combine les forces de la Commission et celles des États membres. Il faut donc souhaiter qu'à défaut d'une entrée en vigueur du Traité avant le renouvellement du Parlement et de la Commission en 2009, une perspective claire soit tracée dans les plus brefs délais.

En second lieu, je me réjouis que le thème de l'Europe dans le monde soit l'une des trois priorités de la présidence tchèque, et la France l'appuiera naturellement dans le cadre de la troïka, mais faire exister l'Union européenne sur la scène internationale est autre chose que faire progresser pendant six mois le consensus à vingt-sept sur les dossiers d'intérêt communautaire du moment. C'est pourquoi je préconise un engagement à la fois simple et éloquent : que la future Commission européenne désignée en 2009 le soit dans une composition entièrement nouvelle. Elle sera ainsi le sang neuf de la machine communautaire.

Les crises de ce semestre ont démontré avec plus d'évidence que tous les discours combien l'Europe, une Europe politique, était indispensable, au sein de ses frontières et pour le monde. La cause européenne aura, comme jamais auparavant, progressé dans l'opinion publique.

Monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, cher Jean-Pierre Jouyet, vous y avez pris une part essentielle, non seulement depuis juillet dernier, mais au cours des dix-huit mois qui viennent de s'écouler. La commission des affaires étrangères a eu l'occasion, la semaine dernière, de vous féliciter pour votre action. Je suis heureux de vous redire, dans le cadre solennel de cet hémicycle, combien nous avons apprécié votre implication et votre honnêteté intellectuelle. Vous le savez, tous nos voeux de succès vous accompagnent dans l'accomplissement de votre nouvelle mission à la tête de l'Autorité des marchés financiers. Bonne chance et merci. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, m'inscrivant dans la continuité des propos qui viennent d'être tenus, et malgré la neutralité qu'exige ma fonction, j'ai beaucoup de plaisir à vous donner la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Offrez-lui une statue par souscription nationale ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je tiens à vous remercier pour votre collaboration ainsi que les aimables paroles que vous avez eues à mon endroit.

Je voudrais dire à MM. les présidents Poniatowski et Lequiller le plaisir tout particulier que j'ai eu à travailler avec la commission des affaires étrangères et la commission des affaires européennes. Ils ont eu raison de rappeler que le traité de Lisbonne était plus que jamais nécessaire, parce que c'est dans les périodes de crise que nous avons besoin de continuité, de politique et de leadership, et que c'est par le biais des mesures institutionnelles prévues par ce traité que nous pourrons conjuguer tous ces éléments.

Les retards intervenus, en République tchèque notamment, sont évidemment regrettables. Il me semble que cela est lié à des problèmes internes, que la ratification du traité est prise en otage par d'autres sujets. Nous avons pourtant besoin de la continuité et de la stabilité institutionnelles rendues possibles par le traité de Lisbonne.

Comme l'ont souligné M. Lequiller et M. Salles, il est clair également que c'est, en cette période de crise, un avantage incontestable de posséder l'euro – un euro qui est à la fois bouclier et solidarité, et qui est enfin devenu politique, y compris grâce à l'action de la Banque centrale européenne. Je note que le dialogue qui s'est noué entre la BCE et les chefs d'État et de gouvernement, dont je souhaite qu'il soit renouvelé, n'a nui ni à l'indépendance de l'une ni à l'impulsion politique des autres. Cela a été un jeu gagnant-gagnant.

En réponse à M. Lequiller et à d'autres intervenants, comme M. Lecoq, sur le « paquet énergie-climat », il est vrai que rien n'est joué, car il reste trois difficiles problèmes à régler : la solidarité entre États membres, les fuites de carbone et, dans le cadre des enchères relatives à l'électricité, la flexibilité qu'il sera nécessaire d'accorder à un certain nombre de secteurs industriels compte tenu de la période que nous vivons.

Ce Conseil européen sera le moment où se joue non seulement la solidarité européenne dans les domaines économique, énergétique, climatique, mais aussi l'épreuve institutionnelle, notamment à l'égard de nos amis irlandais.

Cher Bruno Le Maire, je vous remercie très sincèrement de votre intervention, au-delà de la proximité normande et amicale qui nous lie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ah ! C'est l'Ancien Testament et le Nouveau Testament ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Vous avez très bien relevé ce que peut apporter l'Europe, quand elle est unie, au règlement des conflits proches. Au-delà des mots, c'est la première fois que l'Europe, sous la présidence française, est parvenue à agir avec succès pour régler, en Géorgie, un conflit international. Je n'ai pas encore vu d'alternative à ce qui a été proposé, et qui a permis à la situation de se stabiliser. On peut avoir des opinions plus ou moins différentes, mais il n'en reste pas moins qu'une étape irréversible a été franchie en ce qui concerne la visibilité de l'Europe.

Comme vous l'avez souligné, la présidence française a été confrontée à plusieurs défis et le sera vraisemblablement encore au cours de l'année à venir. L'Europe a bousculé son agenda, et nous aurons besoin d'une zone euro réactive, comme elle l'a été et, à mon avis, comme elle le restera.

Vous avez posé à juste titre la question du budget communautaire, ce qui me permet de répondre également à M. Lecoq et à M. Caresche. Avec le plan de relance, on peut évidemment voir le verre à moitié plein ou à moitié vide. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est qu'un problème structurel se pose dès lors que les moyens à la disposition de l'Union européenne au niveau communautaire sont en inadéquation avec les ambitions de l'Union dans le domaine économique, ou pour les actions extérieures qu'elle doit mener, ou encore pour répondre aux nouveaux défis. De ce point de vue, M. Le Maire a eu raison de souligner qu'il y avait un fossé à combler entre le budget communautaire et les ambitions européennes.

Vous avez également évoqué, monsieur Le Maire, la nécessité d'aller jusqu'au bout de la refondation de notre relation avec l'Allemagne. J'ignore quelles seront vos responsabilités à l'avenir, mais ce que je sais, c'est que votre connaissance de la langue allemande sera déterminante là où vous serez.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Cher Christophe Caresche, il est parfaitement juste que rien ne s'est passé comme prévu et, comme l'a souligné le président Poniatowski, la Commission a dû revoir un certain nombre de ses dogmes. Elle les revoit à son rythme.

Comme je l'ai dit, un leadership est nécessaire. Entre anticipation et réactivité, la distinction n'est pas toujours facile à faire. Nous avons su réagir à l'imprévisible ; je l'ai dit à propos de la guerre en Géorgie, mais c'est le cas également pour la crise économique et financière. Dans le cadre de nos priorités, nous avons anticipé les défis auxquels l'Europe est confrontée en termes migratoires, en termes de développement durable, à travers le « paquet énergie-climat », en termes de sécurité, à travers les orientations de la politique européenne de sécurité et de défense, et ce conformément aux anticipations qui étaient celles des autorités françaises dans l'exercice de la présidence.

Je voudrais dire à M. Lecoq, outre le fait que je connais bien la Seine-Maritime, qu'il convient de distinguer l'effort budgétaire communautaire – à ce propos, les 5 milliards sont la seule marge aujourd'hui disponible sur le budget communautaire – et la coordination des efforts en matière nationale, qui doit être également renforcée.

En ce qui concerne les prêts à taux réduit aux PME, il faut aller dans ce sens. C'est ce que nous faisons, et l'effort doit être amplifié, sur le modèle notamment de ce qui avait été proposé par Jacques Delors en 1992 et 1993, s'agissant de la BEI.

Contrairement à ce que M. Lecoq a indiqué, l'accord auquel est parvenu Michel Barnier sur le bilan de santé de la politique agricole commune ouvre la voie à une nouvelle régulation, au moment où une crise alimentaire majeure a éclaté au plan international. Nous avons préservé des mécanismes d'intervention et relevé les mécanismes de redistribution entre les secteurs agricoles les plus favorisés et les moins favorisés, tout en portant une attention particulière aux territoires les plus fragiles, dans un souci de solidarité.

Mesdames, messieurs les députés, nous sommes à la veille d'un Conseil européen décisif, qui sera extrêmement difficile. Mieux vaut affronter les défis, mettre chacun devant ses responsabilités plutôt que se satisfaire d'un consensus mou. Au terme de cette intervention, je souhaiterais exprimer, non sans une certaine émotion, deux convictions qui sont les miennes.

La première, c'est que le statu quo ne sera plus possible dans l'Union européenne. Pierre Lequiller a eu raison d'insister sur ce point. Rien ne sera plus comme avant, du fait de l'évolution de l'histoire, de la gestion des crises que nous avons vécues, de la manière dont la présidence française a été exercée par le Président de la République. Le politique sera davantage présent. L'Europe sera plus visible au plan international. Il y a certes eu une fenêtre d'opportunité liée aux élections américaines, mais ce qui est acquis est acquis. Il existe un nouvel équilibre institutionnel entre l'intergouvernemental et le communautaire, qu'il faut cesser d'opposer. Enfin, il existe un nouvel équilibre entre les institutions et les hommes : nous avons montré que, si l'Europe n'est rien sans les institutions, elle n'est rien non plus sans leadership. Cela aussi, nous le devons au Président de la République.

Ma seconde conviction, c'est qu'il faut faire vivre le débat européen. Il est sain et juste que des différences de sensibilité s'expriment dans le débat sur l'Europe ; les orientations du projet européen peuvent être contestées et débattues. Cependant, je reste convaincu qu'en tout état de cause, ce projet est indépassable et indispensable pour l'avenir de notre pays et celui de l'Europe sur la scène internationale. Telle est ma conviction ; telle est aussi mon ambition là où je servirai.

Monsieur le président, je ne terminerai pas sans vous remercier pour l'attention que vous avez toujours porté aux questions européennes ainsi qu'au secrétaire d'État que je suis.

Je remercie également l'ensemble des bancs. Je le dis devant Élisabeth Guigou, Christophe Caresche et d'autres, j'y ai des amis. J'ai toujours été à l'écoute des critiques constructives qui m'ont été faites, comme à tous ceux qui ont distingué les différences de jugement et de sensibilité par rapport aux relations personnelles.

Enfin, je remercie la majorité pour son soutien constant, même dans les moments où cela n'était pas simple, pour sa solidarité et son aide dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Je remercie les présidents des commissions des affaires étrangères et européennes pour le dialogue que nous avons su nouer. Je ne l'oublierai pas. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Je remercie également M. Brard, à titre personnel et pour le festival du cinéma. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt-cinq, est reprise à seize heures trente-cinq, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2008. (nos 1266, 1297,1290).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Avant de revenir à la discussion des articles, j'informe l'Assemblée qu'à la demande du Gouvernement, et en application de l'article 95 du règlement, nous allons examiner ce soir, à vingt et une heures trente, les articles 18 à avant 21, puis les articles 52 à 56.

La réserve est de droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Hier soir, l'Assemblée a commencé l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous en venons aux amendements sur l'article 7.

Je suis saisi d'un amendement rédactionnel n° 61.

(L'amendement n° 61 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 24 .

La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cet amendement vise à maintenir la disposition actuelle selon laquelle, en cas d'écart constaté entre le produit du panier de recettes affectées aux organismes sociaux et le montant définitif de la perte de recettes enregistrée par ces organismes, cet écart fait l'objet d'une régularisation par la plus prochaine loi de finances. Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, vous ne pouvez qu'y être sensible, vous qui suivez à la fois les comptes de l'État et les comptes sociaux. Il s'agit en effet d'assurer le suivi le plus rigoureux possible des relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Je sais que vous y êtes particulièrement attaché, vous qui avez fortement contribué à la résorption de la dette de l'État envers les comptes sociaux.

(L'amendement n° 24 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement de précision du Gouvernement, n° 386.

(L'amendement n° 386 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 387 .

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est un amendement de précision.

(L'amendement n° 387 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement de précision du Gouvernement, n° 388.

(L'amendement n° 388 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 62.

(L'amendement n° 62 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement de clarification, n° 63.

(L'amendement n° 63 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 7, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Michel Bouvard, inscrit sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

J'ai demandé à être inscrit sur cet article qui concerne les mesures relatives au compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » parce que j'avais déposé un amendement, malheureusement tombé sous les foudres de l'article 40, et dont je souhaite exposer les motifs.

Sans revenir sur le long débat que nous avons depuis plusieurs semaines sur l'audiovisuel, il me paraît nécessaire, au regard de l'exigence de performance que doit avoir la représentation nationale s'agissant de l'usage des deniers publics, de nous assurer que les chaînes de l'audiovisuel public respectent bien leur cahier des charges. Dès lors que celui-ci existe, il doit être respecté.

Or on sait que, sur certains points, le cahier des charges est loin d'être respecté, notamment en ce qui concerne la retransmission des manifestations sportives. Un certain nombre de sports n'ont droit de cité sur les chaînes de l'audiovisuel public que tous les quatre ans, à l'occasion des Jeux olympiques, et, ensuite, ils disparaissent de la circulation.François Goulard hausse les épaules : mais si, c'est grave, cher François ! En effet, pour certains de ces sports, les fédérations internationales n'autorisent l'organisation d'épreuves que si le pays d'accueil les retransmet sur les chaînes publiques. C'est, par exemple, le cas pour les compétitions de ski, et la Fédération internationale de ski avait fait des observations à la France il y a quelques années.

Pourtant, le cahier des charges de l'audiovisuel public prévoit explicitement qu'une place doit être faite à ce type de manifestations. Les arguments développés par les chaînes publiques – que j'ai eu la surprise de voir repris par la ministre des sports dans une réponse à une question écrite ! – consistent à expliquer que le taux d'audience n'est pas suffisant. Or ces arguments ne tiennent pas, non seulement compte tenu du cahier des charges, mais aussi parce que si ces chaînes bénéficient de la redevance, c'est pour compenser des ressources qu'elles n'ont pas par ailleurs.

J'avais donc déposé un amendement qui proposait de procéder à une réfaction à l'année n +1 sur les ressources attribuées à l'audiovisuel public dès lors que le cahier des charges n'était pas respecté. Je me demande pourquoi il a été déclaré irrecevable en application de l'article 40. En effet, s'il prive d'une ressource dédiée l'audiovisuel public, il ne contribue pas à un alourdissement des charges de l'Etat, car celui-ci n'a pas de raison de rétablir sur des crédits budgétaires une ressource retirée du fait du non-respect d'un cahier des charges que le Gouvernement a lui-même signé avec les responsables des chaînes.

L'État doit satisfaire à une exigence de qualité et de responsabilité en faisant en sorte que, dès lors qu'un cahier des charges est établi, il soit respecté. C'est un vrai problème, qui ne se pose pas d'ailleurs que pour l'audiovisuel public. Il faut s'assurer du respect de ce type de documents par tous les opérateurs. Dès lors que l'audiovisuel public vit grâce à des crédits d'État, il peut à juste titre être considéré comme un opérateur de l'État.

(L'article 8 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 227 tendant à supprimer l'article 9.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, le rythme accéléré que vous imprimez à la discussion des articles m'empêche de me concentrer. (Sourires.) Comme nous sommes tous destinés à passer quelques heures ensemble, il vaudrait mieux ne pas nous stresser parce que sinon, après, cela pourrait dégénérer.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Vous allez tous nous déstresser, mon cher collègue, j'en suis sûr ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je l'espère !

Les dispositions de l'article 9 visent à modifier les modalités de calcul des redevances de façon à faire bénéficier rétroactivement, au 1er janvier 2008, les opérateurs de satellite des dispositions plus favorables du décret et de l'arrêté du 2 juillet 2008 relatifs à ces redevances.

Dans le cas d'une application normale, c'est-à-dire non rétroactive des textes, l'effet de cette disposition serait de priver l'État de 3,5 millions d'euros de recettes non fiscales cette année, selon Gilles Carrez, notre rapporteur général. Cette disposition paraît bel et bien relever de la politique du moins-disant fiscal, très répandue durant ces dernières années, particulièrement au sein de l'Union européenne, faute d'harmonisation politique. Pourtant, dès le début de la crise financière, nous avons pu mesurer les conséquences redoutables de cette absence d'harmonisation.

Lors du colloque organisé par le président de la commission des finances, qui avait invité ses homologues européens pour l'occasion, nous avons pu observer les réactions assez effrayantes de nos collègues européens et l'absence totale d'initiative de la présidence française sur ce sujet extrêmement important de l'harmonisation fiscale,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…n'en déplaise à Jérôme Chartier qui va sûrement nous faire des révélations, compte tenu de ses liens intimes avec le Président de la République.

Pour justifier ce qu'il faut bien appeler un cadeau, on utilise un argument massue : il faut éviter les transferts d'activité vers les pays voisins – le chantage à la délocalisation constitue le meilleur et le plus sûr ressort du dumping fiscal. Au moment où le Gouvernement cherche de l'argent pour tout – pour financer chichement le RSA ou l'audiovisuel public, par exemple –, il nous paraît tout à fait inopportun de renoncer à cette recette. Nous proposons donc de supprimer l'article 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Avis défavorable, car l'article 9 vise à réparer une erreur d'appréciation de l'administration dans le calcul de ces redevances. En effet, le calcul actuel reviendrait à multiplier par huit les redevances qui passeraient ainsi de 600 000 euros à 4,6 millions d'euros. Nous nous exposerions à de sérieux contentieux. L'article 9 vise seulement à réparer une erreur technique ; il est dénué de toute malignité politique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Les propositions du Gouvernement sont toujours exemptes de malignité (Sourires), je voudrais rassurer le rapporteur général et M. Brard à ce sujet. Effectivement, il s'agit de réparer une erreur : les tarifs ont été anormalement multipliés par sept ou huit et, grâce à la rétroactivité, cet article permet de les ramener au niveau prévu au départ.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Alors là, je ne suis plus stressé, mais je suis interloqué ! Nous aurions besoin d'un peu plus de détails. Qui bénéficie de cette baisse ? Comment une telle erreur est-elle possible ? Si une erreur aussi gigantesque a été commise, qui rend des comptes ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

La recette !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est le résultat d'un calcul !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous ne pouvons nous satisfaire de votre réponse. Quelqu'un a commis une erreur et doit donc rendre des comptes. Pour notre part, nous devons le faire devant nos électeurs. Un fonctionnaire, aussi élevé soit-il dans la hiérarchie, doit aussi rendre des comptes.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Ce n'est sérieux comme explication, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Soit l'hypothèse maligne d'Henri Emmanuelli est juste, et votre explication ne vaut pas. Soit votre explication est exacte, mais nécessite davantage d'éclaircissements. Je suis convaincu que nous sommes tous d'accord sur ce point, quelle que soit notre place dans l'hémicycle : en cas d'erreur, il faut rendre des comptes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Contrairement à vous, nous faisons confiance au Gouvernement !

(L'amendement n° 227 n'est pas adopté.)

(L'article 9 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à M. François Pupponi.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pupponi

Cet article m'étonne à deux titres : l'incapacité à consommer les crédits et la manière dont ils sont réaffectés. Sur les 457 millions d'euros affectés au renouvellement urbain en l'an 2000, seulement 399 millions d'euros ont été dépensés en 2008. Comment se fait-il que 78 millions n'aient pas été utilisés, alors qu'ils étaient dans un fonds dédié ? Le renouvellement urbain est bénéfique pour les habitants, l'économie, le logement. Tout le monde s'accorde à dire qu'il faut en faire, tout le monde a soutenu le plan de rénovation urbaine, or les crédits affectés ne sont pas dépensés. Il faut s'interroger sur cette incapacité à consommer les crédits.

Puisqu'il reste de l'argent dans ce fonds créé en l'an 2000, on peut comprendre la volonté de le récupérer. Une partie est affectée à l'ANRU, et c'est très bien, mais qu'une autre partie retombe dans le budget de l'État, cela me choque. On pourrait tout de même imaginer que ces fonds de renouvellement urbain soient reversés en totalité à l'ANRU qui se plaint de n'avoir pas assez de moyens pour financer tous les projets qui lui sont soumis ou le surplus des programmes qu'elle a conventionnés. Cela étant, et j'y reviendrai à propos de l'article 13, il faut aussi interroger l'ANRU sur sa propre incapacité à dépenser l'argent qui lui est accordé : l'Agence rend une grande partie de crédits de paiement qui lui avaient été octroyés, comme nous le verrons tout à l'heure.

Je poserai donc deux questions au Gouvernement. Comment faire pour que toutes les sommes soient réinjectées dans l'ANRU ? Ne faudrait-il pas créer une mission pour comprendre pourquoi nous n'arrivons pas à dépenser tous les fonds dédiés au renouvellement urbain ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rodet

Comme mon collègue Pupponi, je trouve cet article préoccupant. Comment se fait-il, compte tenu des besoins, que 48 millions d'euros n'aient pas été affectés ? Autre problème : l'ANRU connaît des difficultés, elle annonce des gels et des annulations de crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Elle n'a pas d'argent, nous n'avons pas rêvé, tout de même !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rodet

Nous avions souhaité auditionner le président et le directeur général de l'ANRU en commission des finances, il y a un peu plus de deux ans. Elle devait être le guichet unique, l'agence qui allait transformer et restructurer de fond en comble les quartiers difficiles. Or nous avons constaté que, bien souvent, elle avait des procédures longues, très centralisées, et parfois un peu tatillonnes. Dans ces conditions, le compte n'y est pas. Certes, ces 48 millions sont affectés à l'ANRU, mais si c'est pour jouer au Sapeur Camembert – creuser un trou pour en boucher un autre –, la cause du renouvellement urbain est mal partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 25 et 90 .

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

, rapporteur général. C'est M. Michel Bouvard qui va présenter ces amendements, si vous le permettez, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Cet amendement, que j'ai déposé avec François Goulard, a été accepté par la commission des finances. Au préalable, je voudrais dire que je comprends les interrogations sur l'incapacité de l'ANRU à consommer les crédits qui lui sont affectés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

En l'occurrence, il n'y a pas de réduction de crédits. Cet article ne pose pas d'autre problème que celui qui a motivé cet amendement. L'article 10 organise précisément les modalités de clôture du Fonds pour le renouvellement urbain en tant que tel, en précisant bien la réaffectation de la totalité des disponibilités – aucun prélèvement n'est opéré.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

En revanche, il omet de préciser le devenir de deux autres petits fonds de garantie : le FGRU et le Fonds de Roubaix. Le FGRU est une assiette de garantie de 21,3 millions d'euros, portant sur douze prêts délivrés à partir des ressources sur Fonds d'Épargne de la Caisse des dépôts et consignation, et d'une durée maximale de vingt-cinq ans. Le Fonds de Roubaix est une assiette de garantie de 548 000 euros, portant sur soixante-deux prêts « habitat privé » d'une durée maximale de dix ans. Ces fonds étaient jusque-là logés dans le Fonds de renouvellement urbain et gérés dans le cadre de celui-ci, sous le contrôle efficace du Comité d'orientation et d'emploi des fonds que préside François Goulard.

Ces fonds ne devant pas arriver à expiration avant plusieurs années, il convient donc, monsieur le ministre, de préciser leur cadre de gestion, celle-ci restant confiée à la Caisse des dépôts. L'amendement prévoit également le reversement des disponibilités au budget général jusqu'à l'extinction du fonds, ce qui évitera de devoir régler par la loi la question de leur solde à leur expiration.

Pour ces deux petits fonds, nous avons ainsi un dispositif parfaitement clair, transparent en ce qui concerne le retour au budget général, et précisant les conditions de gestion jusqu'à l'expiration des fonds.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je souhaite apporter une précision à M. Pupponi. Il est exact que, dans le cadre de la clôture du FRU, 13 millions d'euros iraient au budget de l'État. Cependant, on peut considérer que ce montant est modeste comparé aux 457 millions d'euros de départ. L'essentiel des fonds sortis du FRU a été affecté à l'ANRU, au cours des dernières années.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Jusqu'à il y a deux ans, je siégeais au conseil d'administration de l'ANRU, et je peux vous assurer que nous y avons pris des engagements pour la totalité des 12 milliards d'euros, et ils seront tenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il ne faut pas vous inquiéter. Depuis peu, un financement 1 % prend le relais, mais cette nouvelle modalité ne remet pas en cause les engagements pris pour 12 milliards d'euros.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 25 , sous réserve de deux petites corrections sur les noms des fonds en question. Il faut remplacer « Fonds de garantie de rénovation urbaine » par « Fonds de garantie pour le renouvellement urbain », et « Fonds de Roubaix » par « Fonds de solidarité habitat ». Ce sont les dénominations juridiques correctes.

Pour le reste, il s'agit bien de retours de prêts consentis par le FRU, et qui doivent être réaffectés en raison de la suppression de ce fonds. Il ne s'agit pas de disponibilités, de crédits non consommés. La majeure partie de ces retours de prêts – 48 millions d'euros – est affectée à l'ANRU. Le reste se répartit de la manière suivante : 15 millions d'euros alimentent le Fonds d'urgence pour le logement ; trois millions d'euros sont destinés à l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux – l'EPARECA – et le solde comptable, c'est-à-dire quasiment rien, est versé au budget de l'État.

Les choses sont donc parfaitement claires. L'article 10 vise essentiellement à supprimer le FRU qui n'a plus de raison d'exister, et à répartir au mieux les moyens qui s'y trouvent mais qui ne sont pas des crédits non consommés.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je vais rappeler les rectifications à apporter aux noms des fonds dont il est question dans l'amendement. Il faut remplacer « Fonds de garantie de rénovation urbaine » par « Fonds de garantie pour le renouvellement urbain », et « Fonds de Roubaix » par « Fonds de solidarité habitat ».

Monsieur Bouvard, êtes-vous d'accord pour que l'amendement n° 25 soit ainsi rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Tout à fait, monsieur le président. Cependant, s'il est clair que nous ne parlons pas ici de crédits non consommés, je voudrais revenir sur un point. Quand à la fin d'un exercice budgétaire comme celui de l'an dernier, l'ANRU se retrouve avec une trésorerie abondante et sollicite des versements supplémentaires, notamment de la part de Caisse des dépôts, il est légitime de s'interroger sur les taux de consommation et les raisons de la trésorerie. Les rapporteurs spéciaux et tous les députés doivent s'intéresser à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pupponi

J'ai bien compris que le FRU était soldé, que l'ANRU récupérait la majeure partie des fonds et l'État un montant plus faible. Néanmoins, je voudrais revenir sur l'ANRU qui affirme assurer le financement des 12 milliards d'euros dédiés au renouvellement urbain. Or, la réalisation de ces 12 milliards d'euros coûtera en réalité 13 ou 14 milliards d'euros, compte tenu du coût des appels d'offre, de l'augmentation du coût de la vie et de l'écart qui existe toujours entre l'évaluation et le coût réel.

Pour le renouvellement urbain à Sarcelles, exemple que je connais bien, nous avons ainsi signé une convention avec l'ANRU pour 220 millions d'euros, alors que le coût réel est de 240 millions. Or l'ANRU refuse de payer le surplus de 10 %, ce qui nous oblige à lui rendre les 220 millions. Cela pose problème dans le contexte de crise du logement et du bâtiment que nous connaissons.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pupponi

Je découvre par ailleurs avec stupéfaction que l'ANRU dispose d'une réserve de trésorerie de 750 millions d'euros. Or – renseignez-vous auprès des communes, monsieur le ministre –, l'ANRU refuse de payer ! Pas plus tard que la semaine dernière, elle devait encore 4 millions d'euros à la ville de Sarcelles ! Il est essentiel que nous traitions ce problème de la dépense des fonds de renouvellement urbain, car des projets sont enterrés faute de crédits.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je ne suis pas un spécialiste de l'ANRU : il faudra en parler au ministre concerné.

L'ANRU dispose d'une réserve de trésorerie importante, de 600 à 700 millions d'euros : je l'ai signalé lors du débat sur les crédits de la ville dans le cadre du PLF.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Cette somme n'est certes pas inutile : elle permet à l'ANRU d'honorer ses engagements. Reste que les 12 milliards d'euros prévus par le plan seront dépensés.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je ne puis me prononcer sur chaque projet, monsieur Pupponi, mais l'État a bien l'intention d'assumer ses responsabilités vis-à-vis de l'ANRU, en dépit des problèmes de gestion qui peuvent apparaître.

Les quelque 200 millions d'euros prévus par le plan de relance pour l'ANRU doperont dès 2009 ses capacités d'action.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

L'ANRU, en tout cas, a considéré qu'elle le pouvait, et qu'un nombre suffisant de projets pouvaient être avancés. Prélever 12 millions d'euros au profit de l'État n'a donc pas d'incidence majeure, puisque l'État, je le répète, dotera l'ANRU de 200 millions supplémentaires en 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

Ayant été rapporteur spécial des crédits de la ville dans le PLF, je puis répondre à nos collègues socialistes que l'on est en effet en droit de s'interroger sur les capacités qu'aura l'ANRU à se financer dans quelques années. Tous les spécialistes savent que les programmes concernés se développent, de sorte qu'un surcroît de financement sera nécessaire en 2011 ou 2012. Il n'en est pas moins vrai que, aujourd'hui, nonobstant des difficultés de paiement qui tiennent à l'appréciation que l'ANRU peut avoir sur les dossiers, cette dernière dispose d'une trésorerie largement excédentaire.

J'ajoute que l'ANRU a déjà amélioré ses procédures de paiement : les délais sont désormais satisfaisants au regard des usages de la sphère publique. Reste que, dans trois ou quatre ans, de nouveaux crédits seront nécessaires, malgré le financement assuré par le 1 % logement.

En l'occurrence, l'article 10 concerne la liquidation d'un fonds antérieur au programme de rénovation urbaine de 2003. Il était donc logique de dissoudre ce dispositif modeste par son ampleur et complexe du point de vue administratif. L'amendement de la commission vise à régler certains détails. Il reviendra par ailleurs au Parlement de veiller à ce que l'ANRU dispose, dans les prochaines années, des crédits nécessaires pour répondre à ce grand programme d'intérêt national qu'est le renouvellement urbain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Je remercie François Goulard d'avoir si bien éclairé l'Assemblée sur la question des crédits de l'ANRU. Je souhaite néanmoins appeler l'attention du ministre sur la situation de Sarcelles.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pupponi

Heureusement que Sarcelles est dans votre circonscription !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Il n'est pas acceptable, en ces temps budgétaires difficiles, que l'ANRU n'honore pas ses obligations à l'égard de cette ville. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vous faire le porte-parole des députés auprès de votre collègue en charge du logement pour résoudre ce problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

J'ai pris bonne note des raisons exposées par M. Goulard en faveur de l'amendement.

Je le dis d'autant plus aisément que ma circonscription n'est pas concernée par les problèmes urbains : le présent débat nous offre l'occasion de réfléchir à la gestion de l'ANRU. Comme l'ont expliqué mes collègues Rodet et Pupponi, monsieur le ministre, si l'ANRU ne s'engage pas sur les surcoûts des programmes, rien ne sera possible pour les collectivités, notamment celles qui sont le plus en difficulté.

Les quelque 200 millions d'euros supplémentaires prévus par le plan de relance doivent impérativement être fléchés vers les opérations en cours. Faute de quoi il ne s'agirait que d'affichage ! Lesdites opérations, indispensables dans certains quartiers prioritaires, ne pourraient alors se réaliser, tant les collectivités sont étranglées financièrement. Le ministre des comptes publics peut faire pression sur l'ANRU pour qu'elle utilise, malgré les problèmes de trésorerie que cela peut lui poser, tous les crédits prévus au titre des actions déjà engagées, ou envisagées, par les collectivités.

(L'amendement n° 25 rectifié est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

En conséquence, l'amendement n° 90 tombe.

(L'article 10, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 398 rectifié , portant article additionnel après l'article 10.

La parole est à M. le ministre du budget.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Sénat a émis, sur l'article 22 du projet de loi de finances pour 2009, un vote conforme à celui de votre assemblée. Or cet article prévoit une réforme importante du CNC – le Centre national de la cinématographie – avec la clôture du compte d'affectation spéciale « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » au 31 décembre 2008. L'amendement proposé est une mesure technique destinée à permettre le versement effectif du solde des deux premières sections du compte d'affectation spéciale au CNC.

Le solde définitif dudit compte ne sera connu que dans les premiers jours de janvier 2009 : nous communiquerons alors les chiffres à la commission des finances. Afin de ne pas risquer que ce solde n'aille pas au CNC, il est nécessaire d'autoriser un versement au titre de la période complémentaire de 2008, et de voter la présente disposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

S'intéresser de la sorte au CNC m'inquiète, d'autant que, sur l'audiovisuel, des dispositions seront apparemment adoptées par voie d'ordonnances.

Vous dites qu'il faut faire vite, monsieur le ministre. Mais, puisque vous avez annoncé hier un nouveau projet de loi de finances rectificative, pourquoi ne pas attendre de connaître les chiffres ? Cela me semblerait logique. Si ce texte n'était pas programmé, on pourrait envisager l'hypothèse que vous ayez raison. Mais je ne vois pas, en l'occurrence, l'intérêt d'une telle précipitation, d'autant que notre assemblée aura l'occasion de débattre du CNC dans la suite de la discussion sur l'audiovisuel public.

Un tel amendement technique, s'agissant du CNC, ne me dit rien qui vaille. Vous tenterez peut-être de nous rassurer, avec votre ton patelin habituel. Mais aux patelineries, je préfère les arguments.

Debut de section - PermalienPhoto de André Wojciechowski

Nous devons tous nous retrouver, monsieur Brard, sur l'utilité du CNC, qui a besoin d'argent.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Patelin ou non, monsieur Brard, je m'efforce toujours de donner les explications les plus précises.

Le prochain collectif concernera l'année 2009 et le plan de relance. Or, la disposition technique que je vous ai présentée doit être adoptée pour 2008 : la LOLF nous oblige donc à la voter dans le présent collectif.

(L'amendement n° 398 rectifié est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 412 .

La parole est à M. le ministre du budget.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Nous en arrivons à l'article d'équilibre qui clôt la première partie. L'amendement est destiné à prendre en compte l'impact sur cet article des dispositions votées avec la première partie, ainsi que, par anticipation, des amendements sur les crédits que le Gouvernement vous présentera aux articles 12 et 13. Il tient donc compte de la diminution de 68,4 millions d'euros de la part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers revenant à l'État, du fait de l'adoption des amendements nos 394 et 395 du Gouvernement aux articles 1er et 2.

S'agissant de la prise en compte des amendements du Gouvernement aux articles 12 et 13, le présent amendement tire les conséquences par anticipation de la suppression de l'annulation de 60 millions d'euros de crédits de la provision relative aux rémunérations publiques initialement proposée dans le projet de loi de finances rectificative, ainsi que de l'augmentation de 11,4 millions d'euros des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et de 0,6 million d'euros des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales, compte tenu, d'une part, de la compensation des transferts de compétences non compensés par des transferts de recettes fiscales, et, d'autre part, de l'amendement n° 393 du Gouvernement portant article additionnel après l'article 5 et concernant la création des collectivités locales de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy.

En conséquence, le déficit prévisionnel de l'État en 2008 s'établit à 51,514 milliards d'euros, en hausse de 141 millions d'euros par rapport au projet de loi initial.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Notre assemblée a adopté, la nuit dernière, un prélèvement supplémentaire, destiné, d'une part, à alimenter la DGF, et de l'autre le FIPD. Ce prélèvement n'est-il pas intégré ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Le prélèvement que vous évoquez, monsieur de Courson, porte sur le produit des amendes. Il y a donc une inscription en recettes et une inscription en prélèvements sur recettes : sous réserve de la réponse du Gouvernement, je pense donc que cela n'a pas d'effets sur le solde.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le FIPD, ce sont des prélèvements sur recettes.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Précisément, dans l'amendement, vous modifiez le prélèvement sur recettes !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Oui, mais celui-ci n'a pas d'impact sur le solde.

(L'amendement n° 412 est adopté.)

(L'article 11, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2008.

(L'ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2008 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous abordons maintenant la seconde partie du projet de loi de finances rectificative pour 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Gilbert Le Bris, inscrit sur l'article 12.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Le Bris

Touché coulé, pourrait-on dire : le projet de loi de finances rectificative supprime les 1 976 264 315 euros d'autorisations d'engagement inscrits au programme 146, destiné à financer le deuxième porte-avions. Ces crédits traduisaient dans les chiffres une volonté clairement affichée dans maintes déclarations d'intention – de bonnes intentions, devrais-je dire. Je ne résiste pas à l'envie de vous en citer quelques-unes. Le 7 février 2007, le candidat Sarkozy se déclarait favorable à cette « évidence opérationnelle et politique ». Le 24 juin de la même année, le ministre de la défense, Hervé Morin, indiquait, quant à lui : « Si l'on est cohérent, il faut un second porte-avions », ajoutant : « C'est la volonté du Président de la République, et c'est acté. » Enfin, le président de la commission de la défense, Guy Teissier, assurait qu'« avoir un seul porte-avions revient à n'en avoir qu'un demi. » Je pourrais puiser d'autres citations dans ce florilège de belles paroles reniées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Le Bris

Les candidats et élus RPR et UMP n'en ont pas été avares, à l'instar du Président Chirac, qui comparait les porte-avions aux gendarmes, qui ne peuvent aller que par deux. La majorité s'est donc rendue coupable de reniements et de tromperie démocratique. Quant au pseudo report de la décision à 2011 ou 2012, il s'apparente à des soins palliatifs prodigués à un projet que la droite ballade de report en report, faute d'oser avouer qu'elle y a renoncé.

Or, tout cela a un coût : 250 millions d'euros, une somme qui aura largement contribué au financement du design des porte-avions anglais ! Dix ans après les accords du 4 décembre 1998 à Saint-Malo, on peut dire qu'il s'agit d'un gâchis majeur pour les Français. En effet, 250 millions d'euros, cela correspond au prix de dix hélicoptères ou à 60 % du coût des aides à la restructuration des territoires touchés par la suppression d'installations de défense, pour ne parler que du secteur de la défense. Je n'aurai pas la cruauté de vous dire quelles mesures en matière d'aide sociale, d'impulsion économique ou quels équipements scolaires, par exemple, cette somme permettrait de financer.

Deux cent cinquante millions d'euros partis en fumée ! Car il ne faut pas croire que ce qu'ils ont financé sera utile dans le futur : nous ne travaillerons plus avec des Anglais sur ce type de projet. Je suis convaincu que, si une décision est prise au milieu de la prochaine décennie, elle retrouvera l'option d'un second porte-avions nucléaire. En effet, tout plaide en faveur de ce choix, notamment l'épuisement de la ressource pétrolière, le choix volontariste et autonome des Britanniques, l'excellence, nourrie du retour d'expérience, de la technologie française dans ce domaine de propulsion et les synergies créées par deux bateaux du même type.

Peut-être même la somme dépensée est-elle supérieure à 250 millions d'euros. Aussi souhaiterais-je que le Gouvernement nous indique quel est le volume exact des crédits dépensés et quelle est la structure de la dépense effectuée pour ce porte-avions qui restera virtuel. Je précise qu'il faut inclure, dans les postes de dépenses, les frais engendrés par une équipe de quelque quatre-vingts spécialistes travaillant à plein-temps sur ce dossier depuis 2005. Quel gâchis d'argent public, surtout quand on sait combien celui-ci est rare !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jacques Lamblin, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Lamblin

Je vais tenter de m'exprimer avec plus de calme et d'objectivité que M. Le Bris, ce qui ne sera pas difficile.

Son intervention portait à la fois sur l'article 12 et l'article 13. L'article 12 prévoit plutôt des ouvertures de crédits que des annulations, notamment, pour ce qui est de la défense nationale, 57 millions d'euros, qui correspondent à des autorisations d'engagement pour la préparation et l'emploi de forces.

Quant à l'article 13, il comporte, en effet, des annulations d'autorisations d'engagement : 151 millions inscrits au programme 212 et, vous avez raison, monsieur Le Bris, 1 976 millions inscrits au programme 146, lequel concerne le porte-avions 2. Plus précisément, le montant des autorisations d'engagement destinées à la production du porte-avions s'élevait à trois milliards d'euros, dont une partie a déjà été annulée en cours d'exercice. L'annulation est, en outre, minorée d'une certaine somme, qui servira à régulariser des autorisations d'engagement concernant le Commissariat à l'énergie atomique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On sent que vous y aspirez fortement ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Lamblin

…mais je suis en mesure de répondre à la question qui a été posée en commission de la défense sur le montant des dépenses consacrées aux études amont. Parmi celles-ci figurent des études préliminaires sur l'intérêt d'une propulsion classique, d'autres concernant la levée de risque et une définition préalable au lancement de la réalisation, un budget prévoyant l'accès à titre onéreux aux résultats des études menées antérieurement, ainsi que la contribution française au tiers du financement des études communes menées avec les Anglais en 2006. S'y ajoute une autre ligne de crédits anecdotique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Lamblin

Non, M. Le Bris a estimé le total bien au-delà de 250 millions. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Il est facile de refaire l'histoire après-coup. Je suis élu de Lunéville, en Meurthe-et-Moselle, où était implantée la division Hadès, c'est-à-dire des missiles de courte portée – 400 kilomètres – dirigés vers l'Allemagne. Naturellement, nos partenaires allemands appréciaient moyennement cette perspective.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ils avaient l'habitude de les envoyer plutôt que de les recevoir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Lamblin

Et ils connaissent bien la Lorraine, où ils sont venus assez souvent. (Sourires.)

Bref, c'est le même Président de la République – un homme que vous avez beaucoup apprécié – qui a décidé de produire les missiles Hadès, de les installer, puis de les supprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 406 .

La parole est à M. le ministre du budget.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur le président, je vais présenter, si vous en êtes d'accord, l'amendement n° 410 à l'article 13 en même temps que l'amendement n° 406 .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

L'amendement n° 406 vise à majorer les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » à hauteur de 11,4 millions d'euros, qui correspondent, d'une part, à une ouverture de crédits de 11,6 millions et à une annulation de 0,2 million. Cette mesure résulte de trois types d'ajustement.

Il s'agit, tout d'abord, d'ajustements réalisés au titre des transferts de décentralisation, en application de la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales. Ce sont des transferts de compétences qui ne peuvent être compensés par des transferts de recettes fiscales et qui le sont donc sous forme de dotation générale de décentralisation. Il s'agit, pour être clair, du transfert des personnels du ministère de la culture, du ministère chargé de l'équipement et de celui de l'éducation nationale, pour un montant total de 8,1 millions d'euros.

Il s'agit, ensuite, de mouvements de crédits liés à la création des deux collectivités territoriales d'outre-mer, Saint-Martin et Saint-Barthélemy, pour un montant de 3,3 millions d'euros. Cet amendement tient ainsi compte du débat que nous avons eu hier soir à propos de ces deux collectivités, pour lesquelles les transferts de charges sont intervenus en 2008. Il est fondé sur le montant définitif des dotations qui doivent leur être attribuées et que je peux détailler par collectivité, si vous le souhaitez.

Quant à l'amendement n° 410 , il vise à supprimer l'annulation des 60 millions inscrite sur le programme « Provision relative aux rémunérations publiques ». Les dernières prévisions de la fin de gestion de 2008 concernant la masse salariale montrent en effet que nous aurons besoin de ces crédits. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaite revenir sur l'annulation qu'il avait prévue dans le projet de loi de finances rectificative.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Cet amendement du Gouvernement, qui vise à réaffecter des crédits de la dotation globale de décentralisation aux collectivités territoriales,…

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Il n'y a que Saint-Barthélemy qui intéresse le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

…procède à quelques réajustements ; j'en prends acte. Je souhaiterais néanmoins poser une question à M. le ministre. Il a été dit, au cours des derniers mois, que le Gouvernement s'engagerait à compenser l'ensemble des transferts de compétences aux collectivités territoriales. En 2009, l'une des compétences transférées concerne le service des tutelles. Or, dans aucun des budgets que vous avez présentés, que ce soit au titre du projet de loi de finances initiale ou du projet de loi de finances rectificative, je n'ai vu de compensation prévue. Je souhaiterais donc savoir si les collectivités départementales bénéficieront ou pas d'un transfert de ressources pour gérer ces services de tutelle, qui seront coûteux pour les départements. Certes, les sommes en jeu sont moins importantes que celles liées aux transferts des techniciens ouvriers de service ou du RMI. Mais si l'on ajoute cette dépense supplémentaire à celles que les collectivités assument déjà, alors que leurs ressources liées aux droits de mutation ou à la taxe professionnelle sont faibles, nous aurons des situations extrêmement compliquées. Nous serions donc très heureux que vous puissiez nous répondre sur ce point, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je vous rassure, monsieur Terrasse : il est bien évident que, lorsque ces dépenses seront effectives, la commission d'évaluation des charges, présidée par notre collègue Carcenac, sera saisie et les moyens de la compensation seront mis en oeuvre. Je ne peux pas vous dire quel type de crédits sera concerné, mais je pense qu'il s'agira de la dotation générale de décentralisation.

(L'amendement n° 406 est adopté.)

(L'article 12, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. François Pupponi, inscrit sur l'article 13.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pupponi

Parmi les crédits de paiement annulés, pour un montant important, figurent 150 millions d'euros qui concernent l'ANRU. Le rapporteur général indique lui-même, dans son rapport, que « l'effet probablement le plus pervers de la sous-consommation des crédits de paiement destinés à l'ANRU est le caractère quelque peu “virtuel” ainsi conféré au budget consacré à la rénovation urbaine. Or, cette impression ne saurait masquer l'essentiel : l'ensemble des engagements non couverts par des CP devrait, à la fin 2009, atteindre environ 1,5 milliard d'euros », étant entendu que, sur les 227 millions d'euros inscrits au budget initial, 155 millions – 120 dans le collectif et 33,5 par décret – ont été repris.

Comme cela a été souligné, certaines collectivités qui souhaitent obtenir des financements de l'ANRU voient leurs demandes rejetées. Dans le même temps, certains projets qui devaient être réalisés en 2008 ne l'ayant pas été, les crédits correspondants ne seront pas consommés. Cette situation demande à être clarifiée, a fortiori quand le Président de la République annonce, lors de la présentation de son plan de relance, que 200 millions d'euros vont être alloués aux programmes de rénovation urbaine.

Afin de nous permettre d'être le plus efficaces possible dans ce domaine très sensible pour l'avenir de notre économie nationale, il me paraît important de savoir comment cet argent, indispensable à nos territoires et à nos quartiers, va être dépensé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Les amendements nos 410 et 411 du Gouvernement ont déjà été défendus.

(Ces amendements, acceptés par la commission, sont successivement adoptés.)

(L'article 13, amendé, et l'État B' sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 64 de M. Carrez est rédactionnel.

(L'amendement n° 64 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 14, amendé, et l'État C sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 382 .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Cet amendement, conformément aux dispositions de l'article 13 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, a pour objet de ratifier le dernier décret d'avance pris en cours de gestion 2008.

Ce décret a ouvert 1 294,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et 1 253,2 millions d'euros en crédits de paiement sur le budget général et 34,6 millions d'euros en AE et CP sur le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Il est destiné à financer plusieurs dépenses urgentes dont, comme le veut la loi, la commission a eu connaissance : ouverture et ajustement de la répartition des dotations en crédits de titre II, ouvertures en faveur du financement des opérations extérieures de la défense, ouvertures en faveur de l'emploi, en faveur de l'épargne réglementée et en faveur de la prévention de l'exclusion et de l'insertion des personnes vulnérables.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a émis un avis favorable à cet amendement lorsqu'elle a examiné le troisième décret d'avance, qui portait sur le montant considérable de 1,3 milliard d'euros. Nous avons assorti cet avis des réserves habituelles, soulignant notamment qu'il fallait compléter les crédits sur les OPEX et ceux sur les emplois aidés. Nous avons donc souligné qu'il serait préférable d'avoir, dès la loi de finances initiale, une budgétisation la plus proche possible de la réalité, afin de ne pas devoir rajouter des crédits en cours d'année.

Cela étant, ces ouvertures de crédits ont fait l'objet d'annulations à l'euro l'euro et ne pèsent donc pas sur les déficits. Ayant donné un avis favorable il y a quinze jours, nous le renouvelons aujourd'hui, monsieur le ministre, puisqu'il s'agit en fait d'entériner par la loi ce troisième décret d'avance.

(L'amendement n° 382 est adopté.)

(L'article 17, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je rappelle que les articles 18 à avant 21 ont été réservés.

Nous en venons par conséquent à l'article 21.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 262 de M. Carrez est rédactionnel.

(L'amendement n° 262 , accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 29 .

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cet amendement a pour objet de prévoir la prorogation du délai d'un an dont dispose l'administration à compter de la demande de contrôle dans le cas d'une procédure d'assistance administrative.

(L'amendement n° 29 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 21, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'une série d'amendements portant articles additionnels après l'article 21.

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 30 .

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cet amendement, qui avait été proposé par notre collègue Nicolas Forissier, vise à instituer un report des plus-values réalisées à l'occasion de la cession d'un immeuble à une société de crédit-bail, lorsque cette dernière concède immédiatement la jouissance de l'immeuble à la société vendeuse.

Cela peut paraître compliqué au premier abord, mais il s'agit en fait d'une mesure très simple, visant à ce que les entreprises concernées puissent dégager une trésorerie supplémentaire. Le produit de la cession bénéficie d'une exonération temporaire de la taxation sur les bénéfices, qui prend fin à l'issue du crédit-bail.

J'ai, en commission des finances, émis une réserve sur cet amendement susceptible de créer un précédent, dans la mesure où il prévoit une exonération portant sur une cession effective, donc sur l'encaissement d'une plus-value par une entreprise, alors que de tels dispositifs n'existent jusqu'à présent que pour des cessions différées. Je reconnais toutefois l'intérêt de cet amendement, consistant à permettre à certaines sociétés d'améliorer leur fonds de roulement en tirant une recette de l'externalisation de leur immobilier.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, même si l'on peut envisager de le retravailler.

Les entreprises qui effectuent des opérations de restructuration bénéficient de régimes de report d'imposition pour tenir compte du fait que les opérations réalisées ne génèrent pas de liquidités. Or ce n'est pas le cas du dispositif proposé et il n'y a donc aucune raison de permettre à l'entreprise qui aura encaissé des fonds de défiscaliser le profit réalisé. Par ailleurs, cet argent servira à l'entreprise à payer des loyers à son crédit-bailleur, loyers qu'elle pourra déduire ultérieurement au titre de charges.

Enfin, et surtout, l'affectation du montant de l'impôt à un compte de réserve pendant cinq ans ne permet pas de garantir le réinvestissement de la plus-value par l'entreprise. Ainsi, les deux tiers du montant de la plus-value pourraient être distribués aux associés immédiatement, le solde pouvant l'être au bout de cinq ans.

Pour l'ensemble de ces raisons, je préférerais que cet amendement soit retiré.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Pour une fois, je suis d'accord avec vous, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Le groupe UMP soutient la position du Gouvernement. Nous avons déjà examiné cet amendement en loi de finances initiale et l'Assemblée s'était alors exprimée défavorablement. Comme le dit très justement M. le ministre, rien ne permet de garantir que les fonds, même affectés à un fonds spécial, soient utilisés pour réaliser un investissement. À mon sens, ce serait donc une erreur que d'adopter cet amendement.

(L'amendement n° 30 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 414 .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Cet amendement constitue en fait une nouvelle version, réécrite, de l'amendement n° 285 qu'avait proposé M. Le Fur.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La réécriture a été assez conséquente, puisque alors que l'amendement n° 285 faisait deux lignes, celui-ci remplit trois pages ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le présent amendement institue un dispositif d'exonération d'impôt sur le revenu s'appliquant aux gains réalisés par les associés personnes physiques dits « passifs » de sociétés de personnes soumises à l'impôt sur le revenu lors de la cession de leurs parts ou droits dans ces sociétés.

Afin que la mesure envisagée s'inscrive en cohérence avec les régimes existants d'exonération des plus-values, ses conditions d'application devraient se rapprocher de celles prévues aujourd'hui pour les associés professionnels de ces sociétés plutôt que des dispositions en faveur des cessions de titres de sociétés de capitaux.

Comme je m'y étais engagé lors de l'examen du projet de loi de finances initial au Sénat, mes services ont préparé ce nouvel amendement – dont la longueur s'explique par la nécessité d'y faire figurer certaines précisions juridiques – qui prévoit une exonération sous conditions de recettes des plus-values réalisées par les associés dits « passifs » de sociétés de personnes, détenant leurs titres depuis plus de huit ans. Nous avons donc repris le principe de base de l'amendement initial de M. Le Fur tout en sécurisant ses modalités d'application.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

L'amendement n° 414 réécrit un amendement qui avait déjà été déposé l'an dernier par notre collègue Charles de Courson, et qui l'a été cette année par Marc Le Fur.

Nous sommes favorables à cet amendement qui supprime une distorsion entre les actionnaires de sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés et les associés dits « passifs » de sociétés de personnes soumises à l'impôt sur le revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Alors que nous avons eu, il y a peu de temps, un débat sur la suppression des niches fiscales, il me semble que M. le rapporteur général fait preuve de bien peu de transparence en omettant de faire observer à notre assemblée que nous sommes en train d'en fabriquer une nouvelle. Je trouve cela pour le moins curieux, surtout dans le contexte actuel !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je veux rassurer mon collègue Henri Emmanuelli au sujet de cette question dont nous débattons depuis plusieurs années en commission des finances.

Nous avons voté des dispositions en faveur des actionnaires actifs, c'est-à-dire de ceux qui participent à la vie de l'entreprise, mais nous n'avons rien prévu pour les actionnaires passifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur Emmanuelli, il y a une discrimination entre les actionnaires actifs et les actionnaires passifs. Cela fait des années que nous en débattons. Nous ne créons pas une niche : nous proposons une solution pour respecter l'égalité de traitement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Non ! La mesure est au contraire destinée à faciliter la pérennité des entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

J'ajoute qu'elle ne s'appliquera qu'à partir de 2014, puisque la condition de maintien dans l'entreprise est de huit ans. Les spéculateurs, qui, eux, font des aller et retour, ne pourront donc pas bénéficier de cette mesure. L'amendement est très équilibré.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

C'est pour ceux qui n'ont pas besoin de leur argent pendant huit ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur Emmanuelli, nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut encourager les placements longs dans les entreprises. Cet amendement favorisera précisément un engagement durable des actionnaires. S'ils retirent leur argent, ils ne bénéficieront pas du dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Comme l'a rappelé Charles de Courson, nous avons voté il y a quatre ans une exonération tendant à encourager la détention longue d'actions, mais tout le monde l'a oublié car la mesure n'interviendra qu'à partir de 2012 et n'atteindra son plein régime qu'à partir de 2014. Dès lors qu'un détenteur de valeurs mobilières gardera ces valeurs plus de huit ans, il bénéficiera d'une exonération de plus-values.

À l'époque, nous avions cependant repéré un certain nombre de failles dans le dispositif, dont celle que vient d'évoquer Charles de Courson. Nous avons donc à plusieurs reprises présenté un amendement, non pas pour créer une niche supplémentaire, mais pour étendre un régime de droit commun au cas particulier des associés passifs des sociétés de personnes. Il s'agit de mettre en place le même dispositif pour les associés, actifs ou passifs, de sociétés à l'IS ou de personnes.

(L'amendement n° 414 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

En conséquence, l'amendement n° 285 tombe.

Nous en venons donc à l'amendement n° 244 , qui fait l'objet d'un sous-amendement n° 415 .

La parole est à M. Charles de Courson pour défendre l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

L'article 151 nonies du code général des impôts prévoit que la plus-value professionnelle constatée à l'occasion de la transmission à titre gratuit de parts de société dans laquelle le cédant exerce son activité professionnelle bénéficie d'un report d'imposition et est définitivement exonérée si l'activité est poursuivie pendant au moins cinq ans après la transmission.

Dans un souci d'équité et de cohérence, il est proposé que cette exonération s'applique également aux plus-values professionnelles en report du fait de la cessation d'activité de l'associé lorsque les parts sociales concernées sont transmises à titre gratuit.

Toutefois, l'exonération doit favoriser la continuité de l'entreprise transmise, ce qui implique une double condition : d'une part que la société poursuive elle-même son activité pendant au moins cinq ans et, d'autre part, que cette activité soit exercée, au sein de la société, par les bénéficiaires de la transmission, ou au moins l'un d'entre eux. Une fois encore, il s'agit d'encourager le maintien de l'activité et des apporteurs de capitaux, notamment de ceux qui travaillent dans l'entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

C'est logique pour ceux qui travaillent dans l'entreprise ! Pas pour ceux qui n'y travaillent pas comme précédemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement et présenter le sous-amendement n° 415 .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement est favorable à l'amendement de M. de Courson sous réserve de l'adoption de son sous-amendement, qui répond d'ailleurs au souci de M. Emmanuelli.

En effet, ce sous-amendement vise à réserver l'exonération aux seules parts cédées à des associés actifs dans la société, par parallélisme, du reste, avec les dispositions qui ont été adoptées l'an dernier par votre assemblée. L'exonération s'appliquera également aux parts cédées à des personnes n'exerçant pas leur activité dans l'entreprise. On resserre le dispositif aux seules parts cédées à des associés actifs dans la société et pas à des personnes extérieures.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Vous avez accepté l'inverse, il y a un instant !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission avait repoussé l'amendement n° 244 car elle avait trouvé le dispositif trop large. Avec le sous-amendement du Gouvernement, il est recentré.

Je m'interroge cependant une fois de plus sur cet amendement qui ne garantit pas la continuité de l'activité professionnelle. Prenons l'exemple d'un expert-comptable : il y aura exonération de la plus-value même si celui-ci cède son cabinet après avoir cependant arrêté son activité professionnelle depuis plusieurs années. Monsieur de Courson, j'aimerais avoir une explication sur ce point qui reste obscur pour moi.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

M. le ministre a justifié la mesure en annonçant un sous-amendement. Or celui-ci bat en brèche le raisonnement que vous teniez sur l'amendement précédent, à savoir qu'il faut traiter de manière différente les actionnaires actifs et les actionnaires passifs. Avec un premier amendement, on supprime la différence et avec un second, on justifie la distinction. C'est pour le moins curieux.

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je souhaiterais en outre que les amendements de cet ordre fassent l'objet d'une évaluation. Quelle incidence financière auront-ils ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

J'en conviens, la rédaction de mon amendement était imparfaite. J'approuve donc le sous-amendement n° 415 du Gouvernement, qui précise les choses : « En cas de transmission à titre gratuit réalisée dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, la plus-value en report détenue par le bénéficiaire de la transmission est définitivement exonérée lorsque, de manière continue pendant les cinq années suivant la transmission, ce bénéficiaire de la transmission exerce son activité professionnelle au sein de la société, dans les conditions prévues au I ou au 1° du III, ».

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Vous avez soutenu le raisonnement inverse à l'amendement précédent !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je ne sais si cela rassurera M. Emmanuelli, mais il y a bien une différence entre les associés actifs et les associés passifs. L'exonération d'IR est prévue au bout de huit ans en cas de détention sous condition de seuil pour l'associé passif, et de cinq ans pour l'associé actif. Il y a donc bien des différences d'appréciation entre les associés dits actifs et dits passifs. Il en va de même pour l'amendement n° 244 sous-amendé par le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur le sous-amendement n° 415 , je suis saisi par le groupe GDR d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, la confusion règne et on ne sait plus à quel saint se vouer. Cependant le plus choquant, c'est que, de nouveau et comme d'habitude, on nous propose de voter une mesure qui n'a fait l'objet ni d'une étude d'impact ni d'une évaluation préalable. Or il faut en finir avec ces méthodes de Gribouille. Peut-être ces mesures constituent-elles un investissement, ce que vous ne nous avez cependant pas démontré avec clarté. En tout cas, elles vont avoir un coût dans un premier temps. Or il paraît qu'il n'y a plus de sous ! Pourtant les nouvelles dépenses que vous nous proposez bénéficient à chaque fois aux actionnaires.

Dommage, monsieur de Courson, que vous ne manifestiez pas autant d'attention, de considération et de fascination pour ceux qui triment et qui ont du mal à joindre les deux bouts à la fin du mois. Lorsque des mesures les concernent, vous n'oubliez pas de faire des études d'impact et des évaluations. Pour les plus modestes, vous êtes toujours pingre. Vous ne voulez rien leur lâcher. Vous êtes relayé par le ministre, qui a besoin de vos voix dans certaines circonstances. Pour ne pas vous mécontenter, il a donc sous-amendé votre amendement. Pour notre part, comme nous n'avons pas été convaincus, nous ne le voterons pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je l'ai rappelé, le nouveau régime entrera partiellement en vigueur à partir de 2012 et atteindra son plein régime en 2014. Je le répète, ces amendements visent à maintenir l'actionnariat. Nous sommes en effet nombreux à considérer que l'instabilité des actionnaires va à l'encontre de l'intérêt à long terme des entreprises. Il s'agit donc d'inciter les actionnaires à rester dans l'entreprise. S'ils se retirent, ils seront soumis au régime de droit commun pour leurs plus-values.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Si ! Une bonne partie de la gauche partage d'ailleurs cette préoccupation puisqu'elle a voté plusieurs dispositions allant dans la même direction.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Quant au coût, il est nul sur les années 2009, 2010, 2011 et il est très faible en 2012, 2013 et 2014.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le Gouvernement vous dira ce qu'il en est exactement, mais les sommes ne sont pas importantes et sont extrêmement différées. Dans la période actuelle, l'intérêt national est de conforter l'actionnariat de ces entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons procéder au scrutin public sur le sous-amendement n° 415 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 60

Nombre de suffrages exprimés 60

Majorité absolue 31

Pour l'adoption 35

Contre 25

(Le sous-amendement n° 415 est adopté.)

(L'amendement n° 244 , sous-amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements, nos 305 et 287 , pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 287 de M. Le Fur est défende (Sourires.)

La parole est à M. Charles de Courson, pour présenter l'amendement n° 305 .

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Cet amendement tend à relever à 100 000 euros le seuil fixé à l'article 793 bis du code général des impôts en deçà duquel les parts de groupements fonciers agricoles et les biens ruraux loués par bail à long terme bénéficient d'une exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit à concurrence de 75 % de leur valeur. Au-delà, l'exonération partielle est ramenée à 50 %. Une actualisation annuelle du seuil est également introduite. En effet, ce seuil n'a pas été réévalué depuis une douzaine d'années. Il convient donc de prévoir une actualisation annuelle en fonction du barème de l'impôt sur le revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission est favorable à l'amendement n° 305 qui vise à faire passer de 76 000 à 100 000 euros le seuil d'exonération des droits de mutation à titre gratuit. Cela n'avait pas été fait depuis longtemps.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 305 et lève le gage.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 287 est retiré.

(L'amendement n° 305 , modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Nicolas Forissier pour défendre l'amendement n° 31 .

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Forissier

Cet amendement, adopté par la commission des finances, a pour but, toujours dans la perspective d'améliorer le financement en fonds propres des sociétés en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion, de mieux cibler l'avantage au titre de l'ISF accordé aux sociétés holding par la loi TEPA.

Cet avantage fiscal important doit concerner des souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de petites entreprises, au sens communautaire, à savoir des entreprises dont le total de bilan est inférieur à 10 millions d'euros et qui emploient moins de 50 salariés. Ces entreprises doivent avoir moins de dix ans, et la société holding doit s'engager à y investir au moins 60 % de sa situation nette.

Par ailleurs, afin d'éviter les dérives, nous proposons que ces sociétés holdings soient agréées par un organisme, lequel pourra être désigné par décret, de manière à permettre une certaine souplesse. Cela permettra de concentrer les apports de fonds liés à cette réduction de l'ISF sur les entreprises qui en ont véritablement besoin.

Je me permets de signaler que le Sénat a adopté hier un amendement de Philippe Adnot au projet de loi de finances initiale, qui vise également à mieux concentrer l'investissement des sociétés holdings sur les entreprises qui en ont vraiment besoin. Cependant, cet amendement me paraît extrêmement réducteur car il limite à vingt-cinq le nombre de souscripteurs dans ces holdings. Notre proposition, moins restrictive, nous paraît donc une manière plus raisonnable de recadrer la mesure adoptée par le Parlement dans le cadre de la loi TEPA.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

On a en effet pu constater des utilisations abusives de ces structures holdings permettant de bénéficier de la réduction au taux maximal, c'est-à-dire 75 %. La proposition de Nicolas Forissier constitue la meilleure réponse possible à ces abus, en recentrant le dispositif sur les entreprises en amorçage, ayant moins de 50 salariés et moins de dix ans d'existence. Le fait que ces sociétés soient par ailleurs labellisées par OSEO renforce l'intérêt du dispositif.

Je pense par ailleurs, comme Nicolas Forissier, que l'amendement adopté hier par le Sénat est beaucoup trop restrictif.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Pour une fois, je ne partage pas l'avis du rapporteur. Le Gouvernement considère en effet que l'amendement de M. Forissier resserre le dispositif d'allégement de l'ISF…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

…favorisant l'investissement dans les PME, alors que, en période de restriction des crédits, il doit pouvoir s'appliquer le plus largement possible.

Vous souhaitez lutter contre les abus, souci que je partage mais auquel répondent les dispositions introduites au Sénat par M. Adnot dans le PLF pour 2009, dispositions qui devraient obtenir votre assentiment.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

J'ai bien compris que vous les approuviez !

Elles interdisent notamment aux sociétés d'attirer les souscripteurs en leur garantissant, en plus de l'avantage fiscal dont ils bénéficient à l'entrée, qu'ils pourront sortir du capital au terme du délai fiscal de cinq ans en récupérant leur mise. En effet, ces garanties ont entraîné des abus, puisqu'elles permettaient de bénéficier des 75 % de réduction sans courir aucun risque, en violation totale de l'état d'esprit dans lequel le Gouvernement et le législateur ont conçu ce dispositif.

Puisque les mesures adoptées préviennent les abus, il n'est pas nécessaire de recentrer le dispositif sur les entreprises en amorçage, ce qui reviendrait à tuer plusieurs de ces sociétés organisées pour entrer dans le capital de PME sans aucune arrière-pensée frauduleuse. Qu'il s'agisse des FIP ou des holdings ISF, ces structures ne se constituent pas systématiquement dans le but de détourner la loi et de garantir une sortie certaine à leurs actionnaires.

Tenons-nous en donc aux dispositions du sénateur Adnot, qui devraient vous satisfaire, sans resserrer un dispositif qui fonctionne.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

L'amendement de M. Forissier me paraissait déjà curieux mais la réponse du ministre est encore plus intéressante.

En pleine crise financière et économique, le souci du Gouvernement reste malgré tout de préserver des sociétés holdings spécialisées, malgré les dénégations du ministre, dans ce qui s'apparente à de la fraude fiscale, puisqu'elles permettent à des gens de ne plus payer l'ISF grâce à des investissements qui leur rapporteront.

Monsieur Forissier, vous étiez bien innocent si vous pensiez que le but du Gouvernement était d'aider les entreprises. Vous venez de constater qu'il s'agissait plutôt de mettre fin à l'ISF en déguisant cette suppression en mesure de relance économique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Mais non !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Mais si ! Dans la période que nous traversons et alors que votre plan de relance ne consacre que 700 millions d'euros à l'ensemble des salariés français, c'est scandaleux !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Forissier

Si je vous comprends bien, monsieur Emmanuelli, vous soutenez cet amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Je ne soutiens pas cet amendement, car il réduit l'ISF, mais vous faites preuve d'une grande naïveté !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Forissier

Monsieur le ministre, je ne comprends pas votre position. L'amendement de Philippe Adnot limite à vingt-cinq le nombre de souscripteurs dans ces holdings, ce qui est une catastrophe, car cela signifie qu'elles ne peuvent plus exister. L'intérêt de ces holdings est en effet de mutualiser les réductions d'impôts de contribuables à l'ISF qui, individuellement, bénéficient de petites réductions mais peuvent, en se regroupant, concentrer les levées de fonds et répondre aux vrais besoins des entreprises. Si votre réduction d'impôt s'élève à 2 000 euros, il vous faudra une centaine de partenaires pour arriver à un total de 200 000 euros de réduction, ce qui constitue un ticket intéressant pour financer une PME en développement. Malgré tout le respect que j'ai pour Philippe Adnot, il n'est donc pas possible que nous conservions la mesure qu'il a fait adopter par le Sénat.

Vous me parlez d'autre part de resserrement, monsieur le ministre. Or il s'agit non pas de resserrer mais de cibler l'avantage fiscal et la collecte réalisée au travers de cet avantage fiscal vers les entreprises qui en ont le plus besoin.

Après un an d'auditions, la mission d'information de la commission des finances qui travaille sur le renforcement en fonds propres des petites et moyennes entreprises dans ce pays est arrivée à la conclusion que le segment le plus faible dans la chaîne de financement des entreprises était celui des entreprises en amorçage et en démarrage. Il faut savoir qu'il est beaucoup plus facile de trouver 1 million ou 1,5 million d'euros auprès d'un fonds d'investissement ou auprès du secteur bancaire que de trouver les 300 000 ou 500 000 premiers euros qui vont permettre le décollage de ces petites entreprises appelées à devenir les grosses PME que vous réclamez et qui créeront les emplois dont nous avons besoin.

Cette mesure va dont tout à fait dans le sens de la politique du Gouvernement et permet de faire en sorte que l'esprit comme la lettre de la loi TEPA soient mieux respectés.

Je le répète, il ne s'agit pas d'un resserrement ; nous voulons éviter les dévoiements en rendant obligatoire l'investissement de 60 % des souscriptions et en demandant que ces holdings soient agréées. Les chiffres sont parlants : sur les 120 millions d'euros collectés cette année par des holdings bénéficiant de l'avantage ISF, 80 millions l'ont été par trois d'entre elles. Cela prouve bien que ces structures peuvent servir le plus légalement du monde d'instruments financiers sans rapport avec l'esprit initial de la loi qui consistait à soutenir le financement des petites entreprises en démarrage.

Voilà pourquoi la disposition proposée, et adoptée, je le rappelle, par la commission des finances, est une bonne mesure. J'espère, monsieur le ministre, que nos explications vous auront éclairé.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je ne suis pas d'accord. Je pense qu'il faut garder aux mesures que l'on adopte toute leur efficacité, et ce n'est pas le moment de réduire la portée de ce dispositif en limitant l'investissement des holdings à l'amorçage.

Je peux comprendre que vous vouliez combattre les abus.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Tel est précisément le sens des dispositions que nous avons prises un an après la mise en oeuvre de la loi, en obligeant, d'une part, à conserver les titres pendant cinq ans et en interdisant, d'autre part, le rachat automatique des parts, ce qui vous préserve du risque et fait que vous n'êtes pas réellement dans la situation d'un actionnaire.

Ni le Gouvernement ni le législateur n'entendaient en effet faire de ces holdings de simples instruments d'optimisation fiscale. Leur but doit bien être d'investir dans des PME. Toutefois celles-ci ont accès à d'autres vecteurs financiers, et je ne comprends pas pourquoi vous vous concentrez sur l'amorçage. Je le comprends d'autant moins que l'amorçage bénéficie déjà d'aides particulières, puisque, en phase d'amorçage, le niveau d'investissement possible passe de 200 000 à 1,5 million d'euros. Dans la mesure où l'amorçage est déjà facilité, je ne vois pas pourquoi vous resserrez le dispositif.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Permettez-moi de comprendre cette démarche comme un resserrement du champ d'intervention des holdings.

Cet article de la loi TEPA fonctionne : 932 millions d'euros ont été investis, dont 126 millions par le biais des holdings, sachant que la première source de fonds provient des investissements directs, qui représentent 480 millions d'euros, suivis par les Fonds d'investissement de proximité. Nous avons prévu des clauses anti-abus ; il n'est donc pas utile de toucher à cette mesure.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur le ministre, permettez-moi d'ajouter un mot puisque j'ai été rapporteur de ce dispositif dans le cadre du projet de loi TEPA.

Il y a deux façons d'investir : soit l'investissement direct dans une PME, qui fait bénéficier l'investisseur d'une réduction de 75 % dans la limite des 50 000 euros ; soit l'investissement intermédié par le biais d'un FIP, d'un FCPI ou d'un FCPR, pour lequel la réduction n'est que de 50 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

À l'époque, en juillet 2007, j'avais déjà mis en garde sur les risques d'abus, ce qui n'a pas manqué de se produire.

Nous avons longuement réfléchi à la question, monsieur le ministre et, si nous jugeons l'amendement de Nicolas Forissier excellent, c'est d'abord parce qu'il permet de limiter ces abus et ensuite parce que le segment qui manque le plus de fonds propres est celui des entreprises en amorçage, vers lequel il réoriente le dispositif de juillet 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur le vote de l'amendement n° 31 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous savez que je crois à la valeur de la pédagogie politique. J'ai donc tenté de me mettre à la place des personnes qui assistent à nos débats depuis les tribunes ou les regardent à la télévision ou sur Internet. « De quoi causent-ils ? », doivent-ils se dire. « On n'y comprend rien ! »

Or l'échange entre le ministre et notre collègue M. Forissier, pimenté par le rapporteur général, était tout à fait intéressant. Nous n'avons malheureusement pas le droit de nous adresser directement au public assis dans les tribunes, mais la seule chose à comprendre est la suivante : on a permis aux riches, notamment par la loi TEPA, c'est-à-dire ce que l'on a appelé le paquet fiscal, de ne pas payer l'impôt sur la fortune et d'en détourner une partie vers les entreprises. Ainsi, bien qu'il n'y ait plus d'argent dans les caisses, comme nous le raconte le Président de la République après les avoir vidées depuis son entrée en fonctions…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…, on continue de faire des cadeaux en permettant à des personnes suffisamment argentées pour être soumises à l'impôt sur la fortune de ne pas le payer.

Le moyen le plus efficace et le plus simple d'empêcher les abus est de supprimer les privilèges. Or la possibilité offerte à des personnes riches de ne pas payer tout ou partie de l'impôt sur la fortune en est un.

Messieurs les ministres, lors du plan de sauvetage des banques, le Président de la République – qui, vous le savez, se mêle de tout, surtout de ce qui ne le regarde pas ! – a tancé les banquiers, les enjoignant à aider les PMI-PME. En outre, doutant de son autorité sur les banquiers, il a réuni les préfets pour leur donner des ordres, comme il en a le droit, ce qui ne signifie pas qu'il sera entendu. Enfin, conscient de ce dernier risque, il a même désigné un médiateur. C'est aux banques de faire du crédit pour développer l'activité économique, ce n'est pas à vous de renoncer à la contribution des riches assujettis à l'impôt sur la fortune en leur permettant de financer les entreprises.

C'est ce que tente de dissimuler le débat quelque peu confus – de manière en partie délibérée – dont nous avons été témoins. Vous avez permis à des personnes qui peuvent payer l'impôt sur la fortune, puisqu'elles lui sont assujetties, de ne pas l'acquitter. Et maintenant nous assistons à une discussion d'épiciers ou de marchands de tapis pour déterminer à quel niveau on va arrêter le curseur.

Bernard Debré, bien qu'étant de droite, est d'accord avec moi pour dire qu'il faut être juste et frapper là où il faut, comme quand il manie le bistouri ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je conclus, monsieur le président.

En réalité, tout cela ne vise qu'à noyer le poisson : ce qu'il faut essentiellement retenir, c'est que l'on a permis à des gens bien dotés, dont les coffres et les poches sont pleins, de ne pas payer l'impôt malgré leur richesse.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je répète que le Gouvernement ne souhaite pas que l'on resserre le dispositif permettant d'investir l'ISF dans les PME. Celui-ci doit au contraire être étendu à n'importe quel instrument juridique dès lors qu'il n'existe pas d'abus. S'il y en a, il faut les combattre, et non limiter le dispositif. Nous devons ouvrir à celles et ceux qui souhaitent investir une grande partie de leur ISF dans les PME l'accès à l'instrument juridique de leur choix.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Ceux qui recourent à des FIP peuvent choisir d'investir dans des PME d'amorçage, dans de jeunes PME, ou bien dans d'autres PME. Il en va de même de ceux qui investissent directement. Ceux qui passent par l'intermédiaire d'une holding doivent donc pouvoir investir dans le même champ, dès lors – comme l'a dit Gilles Carrez, qui nous avait effectivement mis en garde sur ce point l'an dernier – que le dispositif est assorti de clauses permettant d'éviter les abus que nous avons connus cette année.

Du reste, dans le cadre de la loi Madelin, qui permet d'imputer à l'impôt sur le revenu une partie de l'investissement dans des PME, il est possible de passer par l'intermédiaire d'une holding même si la PME concernée n'est pas en phase d'amorçage.

N'introduisez donc pas de différence entre les instruments juridiques, mais laissez les investisseurs choisir celui qu'ils souhaitent utiliser, en toute sécurité, sans abus ni détournement de la procédure voulue par le législateur et par le Gouvernement. Pourquoi chercher à rogner un dispositif efficace ? (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je trouve ce débat étonnant, car nous sommes à fronts renversés. En effet, puisque nous ne voulons plus d'abus, nous proposons au Gouvernement, au d) de l'amendement, de désigner par décret l'organisme – probablement OSEO, ou bien un autre, à sa convenance – chargé de définir les sociétés d'investissement, d'amorçage et de premier développement. Monsieur le ministre, nous vous laissons tout de même une grande liberté ! Ce dispositif, si nous le votons, vous donnera donc tous les moyens d'action.

Nous proposons d'autre part de l'encadrer. Sur ce point, nous avons eu le même débat avec Mme Lagarde lors de l'examen de la loi TEPA : nous avons dû nous battre comme des chiens pour lui expliquer qu'il n'y avait pas que la love money et qu'il fallait mutualiser. On a donc mutualisé les FIP, les FCPI et les FCPA, ainsi que ces holdings.

Notre rapporteur général avait bien souligné que nous n'avions pas suffisamment encadré le dispositif ; les faits lui ont donné raison. Nous vous proposons donc de l'encadrer, en vous donnant les outils de calibrage nécessaires.

Mes chers collègues, suivons donc la commission des finances ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Forissier

Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas parler de resserrement. Aux termes de cet amendement, 60 % seulement de l'actif net de la société devraient être réservés aux petites et moyennes entreprises en développement ; cela correspond à la plupart des dispositifs existants.

En outre, les entreprises concernées devraient avoir moins de dix ans, employer moins de cinquante salariés et réaliser un total de bilan inférieur à 10 millions d'euros, ce qui correspond exactement à la définition européenne de la « petite entreprise communautaire ». Le champ est donc extrêmement vaste.

Permettez-moi de vous donner un exemple.

J'ai rencontré hier les représentants de l'une des trois principales holdings créées dans ce cadre, qui a levé 43 des 120 millions d'euros résultant des mesures de la loi TEPA sur l'ISF. Ils m'ont indiqué que cet amendement ne leur posait aucun problème, puisqu'ils investissent déjà 65 % de cette collecte dans des entreprises satisfaisant aux critères qu'il énonce.

Il s'agit simplement, Gilles Carrez l'a fort bien rappelé, d'abonder dans le sens de la loi TEPA et d'éviter les dérives en permettant au Gouvernement, comme l'a dit notre collègue et ami Charles de Courson, d'agréer un organisme donné. Il s'agit donc d'une mesure de bon sens ; en toute franchise, je ne vois pas où est le problème. Il n'est naturellement pas question de réduire les possibilités d'investissement dans les petites entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 31 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 59

Nombre de suffrages exprimés 50

Majorité absolue 26

Pour l'adoption 37

Contre 13

(L'amendement n° 31 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pierre-Alain Muet pour défendre l'amendement n° 268 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Cet amendement tend à supprimer l'indexation automatique de l'impôt de solidarité sur la fortune. Vous l'avez instaurée il y a deux ans, mais vous avez toujours refusé d'indexer également la prime pour l'emploi. Il y a donc deux poids, deux mesures, les tranches de barème pour l'ISF étant indexées sur l'inflation alors que la prime pour l'emploi ne l'est pas.

Cette situation est d'autant plus choquante que, pour financer le RSA, vous avez gelé la PPE afin d'économiser 400 millions d'euros. Vous avez donc financé le RSA par une sorte d'impôt sur les plus modestes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Avis défavorable.

Monsieur Muet, la prime pour l'emploi a si bien été indexée qu'elle est passée d'un peu plus de 2 milliards en 2002 à plus de 4 milliards aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique pour donner l'avis du Gouvernement.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Vous proposez de supprimer l'actualisation annuelle du barème de l'ISF en fonction de celle qui s'applique à l'impôt sur le revenu. Le Gouvernement ne peut accepter cette proposition : aucune raison objective ne justifie que les tranches du barème de l'ISF ne soient pas actualisées en fonction de l'inflation, comme le sont d'une manière générale nos barèmes, seuils ou abattements fiscaux.

Votre proposition découle en réalité d'une volonté politique…, celle d'alourdir la fiscalité du patrimoine.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Soit ! Mais ce n'est pas le cas du Gouvernement.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrais un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le secrétaire d'État, il faut vous reconnaître une vertu : la sincérité. Ainsi que vous venez de le répondre à Pierre-Alain Muet, il s'agit d'un amendement politique, visant à alourdir la fiscalité pesant sur ceux qui peuvent payer l'impôt sur la fortune.

Il faut dire que vous avez largement dévitalisé et amputé cet impôt, améliorant ainsi, bouclier fiscal aidant, la situation de bien des contribuables qui lui sont assujettis. Il faudrait donc en élargir l'assiette, par exemple en y intégrant – à un faible taux, naturellement – les biens professionnels, mais aussi les oeuvres d'art, lesquelles bénéficient de conditions d'exonération qui transforment les propriétaires de Modigliani, de Rouault, de Derain ou de Degas en gardiens bénévoles de ces oeuvres dès lors qu'ils les présentent au public une fois par an.

Or vous vous y refusez, alors que vous savez que les oeuvres d'art sont un extraordinaire canal de blanchiment de l'argent issu de la criminalité, puisqu'il n'est pas obligatoire de les déclarer. Si elles étaient intégrées à l'assiette de l'impôt sur la fortune, non seulement tous ceux qui refusent de montrer les oeuvres qu'ils possèdent rapporteraient de l'argent à l'État, mais cela constituerait un gage de moralisation. En fait nous avons bien compris que le Gouvernement ne veut ni transparence ni moralisation lorsque ceux qu'il aime le plus, c'est-à-dire les plus riches, sont concernés.

(L'amendement n° 268 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pierre-Alain Muet pour soutenir l'amendement n°274 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je défendrai en même temps l'amendement n° 275 , car si l'amendement n° 274 concerne le principe du bouclier fiscal, l'amendement n° 275 porte sur ses modalités d'application.

Nous vous proposons de supprimer le bouclier fiscal…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Eh oui ! Nous le ferons autant de fois qu'il sera nécessaire. Cela me semble particulièrement pertinent à l'heure où l'on parle de moraliser l'activité financière.

Les documents qui nous ont été communiqués par le ministère des finances à la demande du président de la commission des finances, qui sont relatifs à l'ancien bouclier fiscal, c'est-à-dire au bouclier qui s'appliquait en 2007, montrent déjà que 68 % du coût du bouclier fiscal bénéficient à des ménages qui ont un patrimoine de 15 millions d'euros et qui perçoivent individuellement des restitutions de 230 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Ce bouclier fiscal est particulièrement choquant parce qu'il concerne des impôts aussi divers que l'impôt sur le revenu, sur le patrimoine, sur le foncier, et l'ISF. Vous y avez même ajouté dans la loi TEPA, la CSG et la CRDS ! Toutes ces sommes sont rapportées à un revenu qui n'est pas le revenu réel mais une sorte de revenu fiscal, qui se prête à toutes les optimisations fiscales. On arrive à des résultats tout à fait étonnants, comme on le constate dans le dossier statistique qui a été remis par le ministère des finances. Ainsi, parmi les contribuables qui disposent de 15 millions de patrimoine, individuellement, vingt-sept déclarent un revenu inférieur à 1 000 euros par mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Comment, avec un tel patrimoine, peut-on déclarer un revenu aussi faible ? L'explication est très simple : il suffit d'utiliser toutes les niches fiscales. On peut tellement réduire le revenu imposable que, grâce au bouclier fiscal, on peut arriver à s'exonérer de tout impôt. C'est proprement scandaleux.

Nous demandons un scrutin public sur les deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 274 et 275 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a donné un avis défavorable, comme à chaque fois que ces propositions nous sont faites. En effet, cela fait plusieurs lois de finances que nous essayons d'appliquer, comme le font d'ailleurs tous les pays démocratiques, ce principe très important que l'impôt ne peut pas être confiscatoire, ne peut pas être spoliateur. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mettre en place un plafond qui fait que nul ménage ne pourra dorénavant, dans notre pays, payer plus de 50 % de son revenu sous forme d'impôt paraît tout à fait légitime.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La seule critique valable que vous pouviez faire à propos du bouclier, c'était de dire qu'un certain nombre de ménages échappaient, grâce à lui, complètement à l'impôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La question se posait depuis vingt ans ; vous-mêmes n'aviez pas réussi à la régler quand vous étiez majoritaires. Nous, nous l'avons résolue il y a un mois, en introduisant, dans la loi de finances pour 2009, le plafonnement global des niches fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Dorénavant, un ménage qui a des revenus importants ne pourra plus échapper à l'impôt comme cela lui était possible depuis vingt ou trente ans. Il aura beau utiliser toutes les niches imaginables – et Dieu sait si elles sont nombreuses dans notre droit fiscal – il ne pourra dorénavant défiscaliser plus de 25 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Nous avons ainsi, reconnaissez-le, considérablement progressé. Nous avons maintenant deux principes : d'une part, l'impôt ne peut pas être spoliateur, grâce à l'utilisation du plafond, d'autre part, l'impôt est obligatoirement payé par les ménages qui ont les revenus les plus importants. Nous avons trouvé un équilibre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur les votes des amendements nos 274 et 275 , je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de demandes de scrutin public.

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Mesdames et messieurs les députés, vous ne serez pas surpris que nous reprenions l'excellente argumentation du rapporteur général.

En affirmant qu'aucun contribuable ne pourra être taxé au-delà de 50 % de son revenu au titre des impôts directs, nous donnons une chance à notre pays de conserver, d'attirer les talents et les investissements dont il a besoin.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Selon un principe essentiel de notre fiscalité, il s'agit de prévenir le caractère confiscatoire de l'impôt qui décourage le travail et l'initiative, de prévenir des situations aberrantes dans lesquelles le montant total des impositions pouvait dépasser le montant des revenus.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Ce principe est protecteur, pas seulement, vous le savez bien, pour les ménages soumis à l'ISF que vous invoquez. Il s'inscrit également dans notre volonté de renforcer l'attractivité fiscale de la France dans un contexte de forte concurrence internationale.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Un retour en arrière n'est pas envisageable.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Le sujet est un peu plus compliqué que ne le disent le rapporteur général et le secrétaire d'État. D'ailleurs certains membres de la majorité s'interrogent sur le niveau du bouclier fiscal à 50 %. Sous un gouvernement précédent, il avait été proposé 60 %, CSG non comprise. Le fait d'avoir placé le bouclier fiscal à 50 %, CSG comprise, donne des effets extrêmement puissants à la mesure et a pour conséquence qu'une personne peut disposer de revenus confortables et se retrouver encore exonérée du paiement de tout impôt sur le revenu. Nous avons eu l'occasion de donner quelques exemples lors de la discussion du projet de loi de finances. C'est bien la question de la définition du revenu imposable qui se trouve posée.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Monsieur le secrétaire d'État, vous dites qu'il ne doit pas être possible de payer plus de 50 % de ce que l'on gagne. Encore faut-il que l'on s'entende sur la définition de ce que l'on gagne. À partir du moment où vous permettez que ce que l'on gagne puisse être minoré du bénéfice d'un certain nombre de niches fiscales qui continuent d'exister, il y a tromperie sur la marchandise.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Et les injustices sont criantes.

Vous nous rétorquerez que cela concerne peu de personnes.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Quand même ! D'autant que cela concerne des personnes qui, justement, auraient les moyens de payer un peu d'impôt sur le revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

M. le secrétaire d'État semble convaincu, mais il ne peut rien faire !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Comment pouvez-vous expliquer que des personnes qui déclarent un revenu imposable de moins de 4 000 euros par an puissent, comme par hasard, se voir rembourser 200 000 euros par le fisc, car cela suppose qu'ils ont payé plus de 200 000 euros d'impôts, tout confondu, alors même qu'ils déclarent 3 700 euros de revenu imposable ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…qui ont tout à fait les moyens de payer un impôt sur le revenu. Or vous n'avez pas voulu régler ce problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Non, monsieur le rapporteur général, il reste les exonérations liées aux monuments historiques. Sans compter que le Sénat vient de corriger une proposition que nous avions adoptée ici, qui consistait à plafonner le total des niches à 200 000 euros. Le Sénat a fait sauter ce plafonnement. On pourra donc retrouver les mêmes situations.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Cependant, même si vous conservez le plafond de 200 000 euros, cela veut dire qu'il sera possible de déduire 200 000 euros de son revenu imposable. Vous rendez-vous compte de ce que représentent 200 000 euros pour beaucoup de nos concitoyens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Je tenais, monsieur le rapporteur général, à tempérer votre enthousiasme et à nuancer votre propos.

Quelques progrès ont été faits, je le concède.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Un plafonnement des niches fiscales a en effet été décidé, mais il se situe à un niveau très élevé.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Du coup, il n'aura pas d'effet pour un grand nombre de contribuables. En outre, nous n'avons toujours pas réglé le problème de la définition du revenu imposable.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Je regrette, monsieur Santini, que vous ayez fait cette déclaration compte tenu du contexte. Nous connaissons, je le rappelle, une crise financière grave, laquelle a été occasionnée par des abus tout aussi graves. Or nombre de ces excès découlaient de ce que l'on appelle la théorie du ruissellement, que vous venez de développer une fois de plus comme si rien ne s'était produit.

Vous avez parlé de ménager le travail. Je vous en prie, le salaire médian en France se situe entre 1 500 et 2 000 euros ; ce ne sont donc pas ces gens-là qui sont concernés. Cessons l'hypocrisie ! Les salariés qui pourraient être intéressés par ces dispositifs ne doivent pas être nombreux dans ce pays, et s'il y en a, ils sont à l'abri du besoin.

Vous avez vu ce qu'a donné la théorie du ruissellement et, malgré ça, vous recommencez, en disant que si on n'impose pas le capital, l'argent pourra être réinvesti. Pourtant, tout ce que nous venons de vivre au cours des dernières années démontre le contraire. Cela a provoqué des bulles spéculatives, dans l'immobilier ou sur d'autres produits, sans apporter la prospérité.

Il faudrait peut-être que vous cessiez d'être décalés par rapport à la réalité et que vous trouviez d'autres arguments. Vous pourriez dire, par exemple, que vous voulez protéger les patrimoines, que votre inclination naturelle vous pousse à vouloir protéger le capital plutôt qu'à vous lancer dans d'autres actions. En tout état de cause, cessez d'être hypocrites !

En plus, monsieur le rapporteur général, qu'est-ce que cette histoire de 25 000 euros ? Que je sache, le plafonnement est un pourcentage du revenu, non une somme forfaitaire ! Et je rappelle que le salaire médian se situe entre 1 500 et 2 000 euros.

Vous dites par ailleurs que vous avez plafonné les niches. Je veux bien, mais moi, cette année, je ne paie pas d'impôt sur le revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Et je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de députés qui en paient.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Grâce aux niches, monsieur Carrez ! Je déduis les salaires de ma femme de ménage ; je déclare, c'est normal, le montant de mes cotisations ; je déclare les sommes versées à l'atelier protégé départemental qui taille mes haies… Avec tout cela, j'arrive à un montant déductible tel qu'à l'arrivée, j'ai zéro euro à payer. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Je comprends que mon propos suscite un peu d'émoi dans l'hémicycle, mais je considère qu'il faut en finir avec l'hypocrisie. Je ne paie pas d'impôt sur le revenu, mais mon attachée de presse, qui gagne disons moins de la moitié que moi, en paie, elle.

Vous dites que vous avez plafonné mais vous n'avez plafonné que les excès, et notre système fiscal reste foncièrement injuste.

Malgré tout, j'hésite toujours, mes chers collègues, à utiliser cet argument. Je l'ai fait une fois en public, et les gens ont compris que je ne payais pas d'impôt parce que j'étais député ; ils étaient persuadés que les députés bénéficiaient d'un régime spécial. J'ai alors compris que cet argument n'était pas très opératoire auprès du plus grand nombre. En revanche je peux l'utiliser ici car nous connaissons la réalité et nous savons que nous sommes au régime normal.

Cela signifie que ceux qui ont les moyens de s'offrir une femme de ménage et qui la paient correctement, y compris avec un treizième mois, qui ont les moyens de s'offrir un certain nombre de services déductibles, ne paient pas d'impôt sur le revenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

C'est ça la vérité !

Et à côté de cela, on nous annonce des déficits budgétaires abyssaux ! Vous savez aussi bien que moi que si tout le monde payait non pas de manière confiscatoire mais régulièrement sa part d'impôt, et que, par ailleurs, on faisait un petit effort sur la fraude fiscale, on ne serait pas en déficit ; on serait en excédent.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Cette vérité ne semble pas intéresser les médias. Peut-être est-elle un peu compliquée, mais, je vous en prie, monsieur Santini, ne nous faites une déclaration qui se situe entre la virtualité et la fausse morale ! Ce n'est ni le moment ni le sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 274 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 76

Nombre de suffrages exprimés 76

Majorité absolue 39

Pour l'adoption 23

Contre 53

(L'amendement n° 274 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 275 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 75

Nombre de suffrages exprimés 75

Majorité absolue 38

Pour l'adoption 24

Contre 51

(L'amendement n° 275 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pascal Terrasse pour défendre l'amendement n° 280 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Cet amendement tend à exclure l'impôt de solidarité sur la fortune des impositions à prendre en compte pour la détermination du droit à restitution dû au titre du bouclier fiscal.

Je vous rappelle les termes d'un article paru hier dans Le Monde, et qui ne me paraît pas inintéressant : « Tout d'abord, la justice fiscale : ce fut un thème fort de notre action pendant des années. Ce ne l'est plus pour Nicolas Sarkozy et son entourage. Lors du vote du projet TEPA, en juillet 2007, nous étions déjà un certain nombre à nous alarmer du renforcement excessif du bouclier fiscal et notamment de son extension à la CSG. » Nous connaissons tous l'auteur de ces lignes : c'est notre collègue Daniel Garrigue, membre de la commission des finances, qui vient de démissionner de l'UMP. Il ne dit rien d'autre, dans ce passage, que ce que nous rappelons depuis deux ans : le bouclier fiscal, injuste du point de vue social est aussi inefficace du point de vue économique.

La démonstration d'Henri Emmanuelli à propos des dispositifs d'allégement de l'IRPP vient de mettre en lumière une autre anomalie : sa femme de ménage est financée à 50 % par l'État. Étant donné qu'à ce titre, elle est à moitié fonctionnaire, nous ne pouvons que nous réjouir de la présence du secrétaire d'État chargé de la fonction publique dans l'hémicycle !

Plus sérieusement, puisque le paquet fiscal s'est avéré totalement inutile sur le plan économique, excluons l'impôt de solidarité sur la fortune des impositions à prendre en compte pour bénéficier du bouclier fiscal, et revenons sur cette disposition que M. Garrigue n'a pas hésité à attaquer hier dans Le Monde.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Avis défavorable, pour les raisons que j'ai déjà développées il y a trois semaines, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2009.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Même avis que la commission.

(L'amendement n° 280 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pascal Terrasse pour soutenir l'amendement n° 281 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Défendu.

(L'amendement n° 281 , repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pierre-Alain Muet pour défendre l'amendement n° 272 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Cet amendement, qui s'appuie sur l'argumentation développée par le président de la commission, propose que les cotisations versées à des plans d'épargne retraite par capitalisation ne soient plus déductibles des revenus pris en compte pour le calcul du bouclier fiscal.

M. Migaud a souligné une aberration du système actuel : le revenu de référence pour le bouclier fiscal n'est pas le revenu réel, puisqu'il peut être diminué par le biais de diverses niches. Les données transmises, à la demande du président de la commission, par le ministère des finances font même apparaître que le revenu fiscal de référence des treize contribuables dont le patrimoine excède 15 millions d'euros, n'est que de 3 700 euros par an, ce qui ne représente pratiquement rien. Non assujettis à l'impôt sur le revenu, ils perçoivent même 141 700 de remboursement au titre du bouclier fiscal.

Il s'agit d'une situation profondément scandaleuse, que le plafonnement des niches ne suffit pas à éliminer. Comment est-il possible que des contribuables qui ont vraisemblablement des revenus très élevés puissent s'exonérer de tout impôt et recevoir en plus de l'argent de l'État ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Ces chiffres montrent assez clairement, s'il en est encore besoin, que le bouclier fiscal est une mesure scandaleuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Avis défavorable.

Je vous rappelle, monsieur Muet, que nous avons considérablement progressé sur le sujet, en transformant en réduction d'impôts le dispositif Malraux et celui des meublés professionnels ou non professionnels, à la seule exclusion de celui des monuments historiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Et des cotisations versées à des plans d'épargne retraite par capitalisation !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Oui, mais il est essentiel que les Français se dotent d'une retraite complémentaire par capitalisation. Notre pays est le seul à souffrir d'un tel retard dans ce domaine. Il faut donc par tous les moyens inciter nos compatriotes à compléter par un régime d'épargne retraite…

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Par des placements en bourse comme on le leur a conseillé. Et ils se retrouvent maintenant tout nus !

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Monsieur Muet, je partage votre souci de débarrasser le bouclier fiscal de ses scories, car il conforte indirectement la légitimité de ce dispositif. Cela étant, nous ne devons pas perdre de vue certains principes simples.

En premier lieu, le plafonnement des impôts directs en fonction du revenu, que vous proposez de restreindre, est devenu un principe essentiel de notre droit fiscal. Il interdit que, de manière aberrante, le montant total des impôts puisse représenter la moitié, sinon la totalité des revenus. En garantissant solennellement qu'aucun contribuable ne pourra être taxé au-delà de 50 % de son revenu au titre des impôts directs, il donne une chance supplémentaire à la France de conserver les talents et les investissements.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Enfin, en évitant que l'impôt ne devienne désincitatif, voire confiscatoire (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), il renforce la compétitivité fiscale de la France, qui peut toujours se comparer avantageusement à ses principaux partenaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Le secrétaire d'État lit un papier qu'on lui a préparé. Il se moque de nous !

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Je n'oserais jamais !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Pourquoi le ministre du budget n'est-il pas dans l'hémicycle ?

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

En second lieu, ce dispositif juste et simple ne doit pas être détourné de son objet pour permettre des optimisations que n'ont souhaitées ni le Parlement ni le Gouvernement. Le rapporteur général l'a rappelé : la transformation du dispositif Malraux en réduction d'impôts, adoptée dans le cadre du PLF pour 2009, supprime l'effet de ce dispositif sur le bouclier fiscal, puisque les charges autrefois prises en compte pour la détermination du revenu imposable à l'impôt sur le revenu ne viendront plus diminuer ces impôts, mais ouvriront droit à une réduction d'impôts.

En troisième lieu, la situation que vous proposez de corriger ne me semble pas relever de l'optimisation fiscale ni constituer une anomalie. Les contribuables qui versent des cotisations d'épargne retraite, notamment au titre du PERP, le plan d'épargne retraite populaire, se dessaisissent effectivement des sommes qu'ils versent sur ces plans. Ceux-ci sont des produits tunnels à imposition différée, dont le dénouement n'intervient, sous forme de rente viagère, qu'à compter du départ à la retraite des souscripteurs. On ne peut pas soutenir que le revenu réel de ces contribuables devrait être constitué de sommes dont ils ne disposent pas et qui, de surcroît, seront soumises à l'impôt sur le revenu à partir de leur départ en retraite. Votre proposition conduirait in fine à prendre deux fois en compte le même revenu pour le calcul du bouclier fiscal.

En tout état de cause, je ne crois pas qu'il faille voir dans les versements à des plans d'épargne retraite une source d'optimisation du bouclier fiscal.

Sous le bénéfice de ces explications, je vous suggère de retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement en demanderait le rejet.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de vous dire que votre raisonnement ne tient pas totalement la route. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Le dispositif actuel permet un double dividende, puisque le contribuable peut à la fois réduire son revenu imposable et minorer le montant pris en compte pour le calcul du bouclier fiscal. Il est injuste, sinon pervers, de ne pas raisonner en termes de revenu réel. C'est sur celui-ci que doit être calculé l'impôt, en vertu d'une logique implacable.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Mais il s'agit d'un revenu différé !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Ce principe s'applique d'ailleurs au calcul du plafonnement des abattements de la taxe d'habitation. Dès lors, pourquoi instaurer deux poids, deux mesures ? Il est illogique de complexifier, comme vous le faites, la définition du revenu total de référence.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

D'habitude, je suis toujours d'accord avec vous, monsieur Migaud, mais, en l'occurrence, je vous trouve un peu injuste : ce n'est pas la faute du secrétaire d'État, s'il n'est pas d'accord avec vous, mais celle des gens qui ont rédigé le papier qu'il nous a lu !

Je trouve profondément anormal que cette discussion se déroule en l'absence du ministre du budget. Cela me semble en outre une première !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je rappelle que le Gouvernement est représenté.

(L'amendement n° 272 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pierre-Alain Muet pour soutenir l'amendement n° 273 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Cet amendement emportera peut-être l'adhésion de M. Santini.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Voyons cela ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Le Gouvernement prétend sans cesse qu'il veut moraliser les pratiques en matière de stock-options. Or, puisque celles-ci sont prises en compte pour le calcul du bouclier fiscal, ceux qui en perçoivent peuvent échapper en grande partie à l'impôt.

C'est pourquoi, par cet amendement, nous proposons d'exclure du calcul du droit de restitution dû au titre du bouclier fiscal toutes les impositions qui portent sur les revenus issus des stock-options, des parachutes dorés et des retraites chapeaux. Cette mesure me semble en totale cohérence avec le discours du Président de la République et de certains membres du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cet amendement, qui avait déjà été présenté lors de la première partie de la loi de finances, a été rejeté par la commission.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Levons d'emblée le suspense : le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement, pour des raisons de morale fiscale.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

La possibilité pour une société de consentir des options de souscription ou d'achat de ses propres actions lui permet d'encourager et de fidéliser le personnel essentiel à son développement. De plus, ce dispositif peut concerner l'ensemble des personnels salariés, et pas uniquement ceux qui exercent des fonctions de direction. C'est ce que prévoit la loi 2008-1258 du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail.

L'adoption de l'amendement pénaliserait les salariés ou les dirigeants d'entreprise dans les cas où ceux-ci verseraient une imposition au titre de la levée de leurs options et seraient en même temps susceptibles de bénéficier du bouclier fiscal.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Je vous rappelle que l'imposition des gains de levée d'option relève soit d'un taux proportionnel, soit du barème progressif de l'impôt sur le revenu. Elle peut atteindre 40 %, auxquels il faut ajouter les prélèvements sociaux qui s'élèvent à 12,1 % à compter de 2008. De plus, pour les options attribuées depuis le 16 octobre 2007, les gains de levée d'option sont soumis à une contribution sociale spécifique de 2,5 %, dont le produit est affecté à l'assurance maladie.

Vous constatez, monsieur Muet, que l'imposition des stock-options est justement calibrée. Dès lors, il ne semble pas approprié d'opérer une discrimination entre les contribuables, selon qu'ils en détiennent ou non.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Lors de l'examen de la récente loi sur les revenus du travail, à laquelle M. le secrétaire d'État a fait référence, nous avons été amenés à débattre longuement du sujet dont traite cet amendement. Certains parmi vous s'en souviennent.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Or le Gouvernement utilise systématiquement les mêmes arguments : « Nous avons demandé la moralisation des stock-options et autres avantages, et nous avons confiance. » Il paraît d'ailleurs que le MEDEF a signé une charte à ce sujet. Néanmoins permettez-moi de vous dire, monsieur le secrétaire d'État, que nous ne sommes pas entièrement rassurés par le fait que le MEDEF ait signé une charte ! Nous aurions préféré que le législateur, animé par la volonté politique que vous évoquiez, inscrive dans la loi des dispositions qui permettraient de moraliser quelque peu la distribution de rémunérations que je n'ose pas qualifier de complémentaires, car elles viennent souvent s'ajouter à des revenus déjà substantiels.

M. Santini met aussi en avant le fait que la loi sur les revenus du travail – je la connais un peu, pour avoir consacré trois jours et trois nuits à débattre de ce texte dans l'hémicycle – permet de distribuer des stock-options à l'ensemble des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

S'il est vrai qu'un amendement adopté par le Sénat, que je qualifierais d'alibi, traite de cette possibilité, celle-ci a toujours existé. Rien n'a jamais empêché une entreprise de distribuer des stock-options à l'ensemble de ses salariés. Cependant, contrairement au souhait que nous avions exprimé – en particulier lors de la commission mixte paritaire –, il n'a pas été possible de préciser dans la loi quelle proportion de stock-options pourrait revenir aux salariés.

Nous nous honorerions tous d'adopter l'amendement n° 273 car il permettrait de moraliser l'imposition des stock-options. Tous ceux qui demandaient cette moralisation voteront donc l'amendement avec nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Nous arrivons au terme d'une série d'amendements que notre groupe tenait à défendre.

Cependant, comme hier soir, le ministre du budget nous a fait faux bond. Et même si nous connaissons tous la civilité de M. Santini, certaines questions relatives à l'ISF, au bouclier fiscal ou au paquet fiscal n'ont pas eu de réponses au fond, excusez-moi de vous le dire, monsieur le rapporteur général. Les statistiques du ministère sont parlantes et mêmes criantes. Elles disent des évidences qui posent des problèmes de morale que vous ne voulez pas reconnaître. C'est vraiment dommage !

L'amendement n° 273 subira sans doute le même sort que les précédents, mais, comme nous l'avions fait en commission, nous avons tenu à poser, en bénéficiant de l'écho de la séance publique, des questions de fond, auxquelles vous ne voulez pas accorder d'importance.

(L'amendement n° 273 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 72 de la commission est rédactionnel.

(L'amendement n° 72 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 22, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur l'article 24, je suis saisi d'un amendement n° 132 .

La parole est à M. Lionel Tardy.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

La procédure du rescrit impose à l'administration de répondre aux questions des administrés et de se tenir aux réponses fournies. Je ne peux qu'encourager son extension, mais je souhaite attirer l'attention sur l'existence d'une faille.

En effet, les articles de loi traitant du rescrit mettent l'administration en demeure de fournir des réponses, et l'empêchent de poursuivre un contribuable si celles-ci ne sont pas données dans les délais prescrits. Mais que se passe-t-il quand l'administration donne une réponse dans les délais, mais que cette dernière n'est pas explicite pour le redevable ? L'administration française est malheureusement parfois très douée pour fournir des « non-réponses ». Voyez, mes chers collègues, ce qu'il en est des réponses à nos questions écrites : souvent, elles ne nous font pas avancer d'un iota.

Je vous citerai le cas d'un redevable qui, après avoir interrogé l'administration fiscale, a reçu une réponse dans un charabia administratif auquel il n'a rien compris, alors que sa question était limpide. Il a renouvelé sa question, sans pour autant comprendre qu'elle devait être son choix et fini par opter pour la solution la plus avantageuse pour lui. Que croyez-vous qu'il arriva ? Un redressement, bien sûr ! Le redevable n'avait pas choisi la « bonne » option. Ce genre de mésaventure est malheureusement trop courant.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

L'objet du rescrit est précisément de permettre à un administré de savoir à quoi s'en tenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Mais avec vous, on ne sait plus à quoi s'en tenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Ce dernier a donc besoin d'une réponse claire et sans équivoque.

C'est pourquoi l'amendement n° 132 vise à obliger l'administration à fournir une réponse claire et utilisable par le demandeur, sous peine d'empêcher cette dernière de poursuivre le redevable qui, de fait, n'a pas de réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Pas du tout, ce problème se pose fréquemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

C'est pourquoi une disposition de l'article 26 crée une procédure d'appel pour le cas où la réponse à une demande de rescrit ne serait pas satisfaisante. Il s'agit d'un progrès important. En effet, pour limiter les contentieux en aval – et nous y avons tout intérêt –, autant que l'administration exprime en amont une position claire.

La procédure de rescrit reste, jusqu'à présent, insuffisamment utilisée. Elle sera étendue par différents articles de ce projet de loi, qui crée aussi la possibilité d'un recours.

Je considère donc que l'amendement est satisfait par l'article 26, et j'y suis défavorable.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

La question soulevée par M. Tardy relève de la pratique fiscale et concerne nos administrés.

Le Gouvernement est soucieux d'assurer une meilleure sécurité juridique aux contribuables. Les réponses de l'administration aux demandes de rescrits qu'ils formulent doivent être précises et complètes. S'il peut arriver que certaines d'entre elles ne soient pas suffisamment claires pour le contribuable, la solution que vous proposez, monsieur le député, ne me paraît pas de nature à résoudre cette difficulté.

En effet, prévoir qu'une réponse imprécise vaut réponse favorable susciterait inévitablement des litiges sur le caractère incomplet ou imprécis de la réponse en cause. Le contribuable serait donc placé dans une nouvelle situation d'insécurité juridique. Si ce dernier n'est pas satisfait de la réponse qu'il a reçue, la meilleure façon pour lui d'être sécurisé consiste à demander à l'administration de préciser sa position. Pour ce faire, il peut, soit s'adresser au même service, soit, le cas échéant, exercer le nouveau recours créé par l'article 26 du présent projet de loi. Seules ces démarches permettront au contribuable d'obtenir la sécurité juridique souhaitée.

Au bénéfice de ces explications, nous vous serions reconnaissants, monsieur le député, de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Je suis particulièrement heureux que cette question suscite enfin de l'intérêt. Contrairement à ce que certains pensent, ce type de problème se pose très souvent.

Compte tenu des arguments du rapporteur et du ministre relatifs à l'article 26, je retire mon amendement.

(L'amendement n° 132 est retiré.)

(L'article 24 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur l'article 26, je suis d'abord saisi de l'amendement n° 129 , accepté par la commission.

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur le président, je vous remercie de me permettre de soutenir l'amendement de notre collègue Jean-Yves Cousin, accepté par la commission des finances. Il permettra de doubler le délai au cours duquel le contribuable peut user du nouveau droit de recours en matière de rescrit. Il améliorera ainsi la protection des administrés.

(L'amendement n° 129 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Charles de Courson pour défendre l'amendement n° 311 .

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Les entreprises, et particulièrement les PME, sont réticentes à utiliser les dispositifs de demande préalable de position par l'administration, notamment parce que, en cas de refus de l'administration, elles n'ont aucune voie de recours.

L'institution d'une possibilité de second examen par l'administration, effectuée de manière collégiale, peut être une réponse à ces difficultés. Toutefois ce second examen ne peut avoir un intérêt et constituer une véritable évolution que si le contribuable est assuré qu'il se fera sans a priori et en toute neutralité. C'est pourquoi il est nécessaire de prévoir dans la loi une indépendance hiérarchique entre les deux services examinateurs.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Monsieur de Courson, je partage pleinement votre préoccupation. La collégialité sera organisée sous la forme d'une commission composée de six membres, ce qui me paraît de nature à garantir l'impartialité de ses décisions. Nous avons souhaité aller plus loin pour faire de cette voie de recours une garantie de la qualité des prises de position de l'administration fiscale. Nous avons donc d'ores et déjà demandé que les commissions saisies soient composées, au niveau national comme au plan local, de cadres de haut niveau de la direction générale des finances publiques, dont l'expérience et la capacité de décision garantiront la sécurité juridique, la qualité et la neutralité des positions définitives.

Au plan national, la commission sera composée du directeur général et des responsables des services en charge de la fiscalité ou de leurs représentants. Au plan local, deux directeurs des services fiscaux et des cadres supérieurs seront mobilisés. La composition de la commission retenue lors de chaque saisine permettra de garantir l'indépendance des membres par rapport au dossier traité. S'il apparaissait que l'un des membres de la commission a eu à prendre position dans l'une des affaires soumises à la commission, il ne participerait pas à la décision de celle-ci dans l'affaire concernée.

Cependant, vous comprendrez, monsieur de Courson, que ces modalités de fonctionnement, qui me paraissent répondre pleinement à vos préoccupations, ne relèvent pas du domaine de la loi. Les modalités de fonctionnement et la composition des commissions seront précisées par voie réglementaire. Nous veillerons à ce que les mesures d'application soient prises dans les meilleurs délais.

Monsieur le député, au bénéfice de cet engagement, nous vous suggérons de retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur Santini, après avoir entendu vos explications, je suis prêt à retirer mon amendement. Toutefois, vous n'avez pas répondu au point très précis que soulève mon amendement.

Vous engagez-vous à ce qu'il n'y ait pas dans les commissions, qu'elles soient locales ou nationale, de membres ayant un lien hiérarchique avec la personne qui a procédé au premier examen ?

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Oui !

(L'amendement n° 311 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le rapporteur général pour soutenir l'amendement n° 140 .

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cet amendement de notre collègue Jean-Yves Cousin améliore la procédure de recours sur une demande de rescrit en permettant au contribuable d'être entendu par le collège de second examen.

(L'amendement n° 140 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 26, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

En accord avec le rapporteur général, je vous propose de réserver les articles 27, 28, après l'article 28, 29, 30, 31 et après l'article 31, qui concernent la fraude fiscale. Nous souhaiterions aborder ce sujet en présence du ministre Éric Woerth, qui, pris par une obligation, ne peut plus être des nôtres aujourd'hui. La discussion sur ces articles pourrait avoir lieu demain matin.

Je propose donc que nous poursuivions l'examen du projet de loi à partir de l'article 32.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 74 de la commission des finances est rédactionnel.

(L'amendement n° 74 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 32, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Il en est de même de l'amendement n° 75 .

(L'amendement n° 75 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 33, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 130 et 233 , qui tendent à supprimer l'article 34. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 130 et 233 , repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L'article 34 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 260 est de précision, de coordination rédactionnelle et je dirais de francisation (Sourires.)

(L'amendement n° 260 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 261 est rédactionnel.

(L'amendement n° 261 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 37, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour soutenir l'amendement n° 234 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Voter les alinéas 1 et 2 de l'article 38 reviendrait à signer un chèque en blanc au Gouvernement pour qu'il déréglemente par simple arrêté ministériel une activité professionnelle sensible. En règle générale, je n'aime guère les chèques en blanc, encore moins quand ils sont donnés au Gouvernement.

Ces alinéas concernent les fabricants et les marchands d'or, d'argent et de platine, et toutes les personnes qui détiennent des matières et ouvrages en métaux précieux pour l'exercice de leur profession. Elles doivent tenir un registre de leurs achats, ventes, réceptions et livraisons, pour les transactions d'un montant égal ou supérieur à 15 000 euros. Ce registre doit être présenté à l'autorité publique à toute réquisition et mentionner l'identité des parties aux transactions sur ces métaux précieux. L'exposé des motifs de ces deux alinéas indique de manière aussi benoîte qu'elliptique que « ces allégements devraient être définis ultérieurement après concertation avec les représentants des organisations professionnelles concernées ». On admirera l'emploi prudent du conditionnel.

Notre rapporteur général, l'excellent Gilles Carrez, ne s'est pas contenté de ce qu'on hésite à désigner comme des informations et s'en est allé à la pêche aux précisions. Selon celles qu'il a recueillies avec beaucoup de difficultés, « il s'agit d'alléger les procédures pour les professionnels limitant leur activité aux ouvrages en plaqué de métal précieux. La DGDDI est notamment favorable à une dispense de l'inscription des ouvrages en plaqué qui ne sont pas marqués du poinçon de garantie. »

Nous ne sommes donc guère plus avancés et ces objets, bien que plaqués, ne sont concernés par la législation actuelle que s'ils sont d'un prix égal ou supérieur à 15 000 euros, somme déjà considérable. On peut craindre que la déréglementation ait pour conséquence de favoriser des trafics, les métaux précieux devenant une valeur refuge par ces temps de crise et d'extrême volatilité boursière. On sait que les trafics de métaux précieux sont déjà nombreux, en particulier dans nos banlieues. Si la législation actuelle ne s'applique que pour un prix égal ou supérieur à 15 000 euros, il suffit de fixer son prix à 14 995 euros pour y échapper : comme pour les surfaces commerciales, on sait comment procéder.

Nous proposons donc de supprimer ces alinéas, car, si le besoin de légiférer en la matière se faisait vraiment sentir, il faudrait que les termes en soient établis et que la concertation qu'on nous annonce ait eu lieu pour que nous puissions nous déterminer en connaissance de cause. Vraiment, je me demande quelle mouche a pu piquer le Gouvernement pour qu'il nous demande un chèque en blanc sur un sujet aussi sensible. On sait pourtant que, dans ce domaine, la morale n'est que rarement au rendez-vous, sauf pour les meilleurs professionnels, et que les trafics de toute sorte se donnent libre cours, y compris sur notre territoire national. Voter le texte du Gouvernement, c'est encourager la fraude, le vol et la corruption.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Carrément !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

, rapporteur. Cher collègue Jean-Pierre Brard, vous me pardonnerez de vous répondre aussi cavalièrement, mais il me semble que vous êtes à côté de la plaque ! (Sourires.) Cette dérogation ne porte en effet que sur le plaqué.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Tout ce qui concerne les vrais métaux précieux ne fait l'objet d'aucune modification et les textes en vigueur sont maintenus. Il n'y a qu'une dérogation à l'obligation de tenir un registre pour les professionnels qui limitent leur activité aux ouvrages en plaqué de métal précieux. En dehors de cela, rien ne change.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur le vote de l'amendement n° 234 , je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 234 ?

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Je m'étonne que M. Brard, dont on connaît la profondeur des convictions, nous ramène d'un seul coup au plaqué. Nous l'avons connu beaucoup plus authentique. (Sourires.) Il ne s'agit pas, cette fois, de légiférer sur les puces de Montreuil, monsieur Brard, car c'est bien à cela que vous faisiez allusion.

Nous ne supprimons pas le livre de police, qui reste un outil de contrôle indispensable pour assurer la traçabilité des ouvrages en métaux précieux et prévenir ainsi le recel. Nous allons simplement l'adapter au niveau d'exigence réellement nécessaire au contrôle. Monsieur Brard, j'ai fait quelques recherches spécialement pour vous.

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Aujourd'hui, sur ce livre, on note le poids, l'origine, la nature : bague ou collier.

La DGDDI, chargée de la garantie des métaux précieux, travaille en étroite collaboration avec les organisations professionnelles représentatives, qui sont favorables à cette évolution de la réglementation. Cette modification de l'article 537 du CGI permettra de poursuivre la demande d'adaptation des exigences réglementaires en concertation avec les socioprofessionnels, tout en conservant les capacités de contrôle des administrations.

Pour illustrer mon propos, je prends l'exemple des commerçants qui vendent des ouvrages en plaqué or ou argent et qui, aujourd'hui, sont soumis aux mêmes exigences que ceux qui vendent des ouvrages en or massif. Ce niveau d'exigence ne se justifie pas, les enjeux n'étant pas comparables. Je ne serais donc pas surpris que M. Brard retire son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le secrétaire d'État, vous dites que vous allez maintenir les capacités de contrôle alors que vous nous proposez précisément d'y renoncer. Il ne s'agit donc pas de les conserver, mais d'abdiquer une compétence de l'État.

Par ailleurs, sans être un spécialiste, je sais que l'épaisseur du placage peut varier et que la quantité de métal précieux peut être plus importante que celle à laquelle on aurait pu s'attendre.

Enfin, tout dépend de la taille de l'objet. M. le rapporteur général a-t-il déjà vu le sarcophage plaqué or qu'il a évoqué ? Il faut le croire, mais, à défaut de sarcophage, imaginez ce que vaudrait une statue grandeur nature de M. Sarkozy – même si elle ne saurait évidemment être gigantesque. Imaginez, même, un bouddha en plaqué or, ce qui est beaucoup plus courant !

Debut de section - PermalienAndré Santini, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Pas d'attaques personnelles ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Si la statue est grande, elle peut valoir plus de 15 000 euros ; dès lors, la fraude est parfaitement possible.

Ce qui m'étonne, c'est que, chaque fois que ce gouvernement a l'occasion de lever des contraintes qui permettent de combattre la fraude, il le fait. C'est comme pour les paradis fiscaux : on parle toujours du Liechtenstein et de Monaco, mais on regrette le général de Gaulle qui, lui, faisait ce qu'il disait et avait soumis le prince Rainier en 1963. Avec vous, il n'y aura plus à soumettre personne, puisque vous n'imposerez plus de règles, en tout cas pas à ceux qui ont une curieuse propension à violer celles qui sont en vigueur. Je suis donc déterminé à maintenir mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 234 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 50

Nombre de suffrages exprimés 50

Majorité absolue 26

Pour l'adoption 7

Contre 43

(L'amendement n° 234 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de trois amendements rédactionnels de la commission, nos 76, 77 et 78, auxquels le Gouvernement est favorable.

(Les amendements nos 76 , 77 et 78 sont successivement adoptés.)

(L'article 38, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Prochaine séance, ce soir, à vingt-deux heures :

Suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2008.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma