La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
La séance est suspendue, dans l'attente de M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.
(La séance, suspendue, est reprise à neuf heures quarante.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi ratifiant l'ordonnance portant répartition des sièges et délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés (nos 1893, 1949).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est le suivant : sept heures trente-deux pour le groupe UMP, sept heures dix pour le groupe SRC, trois heures cinquante-cinq pour le groupe GDR, trois heures cinquante-neuf pour le groupe Nouveau Centre et cinquante minutes pour les députés non inscrits.
Mercredi soir, l'Assemblée a continué d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
La parole est à Mme Élisabeth Guigou.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, mes chers collègues, si nul ne conteste qu'un redécoupage est devenu inévitable, la question est de savoir, monsieur Marleix, si celui que vous proposez est équitable. Comme nombre d'orateurs du groupe SRC vous l'ont dit, la démarche que vous avez retenue pour ce redécoupage et vos propositions ne nous paraissent pas conformes à l'esprit républicain. J'ai en mémoire en particulier la très brillante intervention de mon collègue Daniel Goldberg qui a démonté le mécanisme. Je serai plus brève que lui, mais je reviendrai sur quelques points essentiels.
La méthode que vous utilisez est loin de la transparence exigée pour un tel exercice pourtant essentiel pour la démocratie. Les députés socialistes n'ont eu accès qu'à des informations partielles, malgré nos demandes répétées auprès du Président de la République, du Gouvernement et de la commission Guéna. Aucune rencontre officielle avec les chefs des partis politiques n'a été organisée.
à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Si !
Aucune information n'a été donnée, entre la carte électorale publiée au Journal officiel en juin et celle présentée en conseil des ministres. Vous avez refusé de nous transmettre l'avis du Conseil d'État et de le rendre public ; nous en avons appris le contenu par la presse. Sans doute avez-vous décidé de ne pas le publier parce qu'il n'était pas favorable à vos projets.
Sur le fond, votre projet d'ordonnance redécoupe les 577 circonscriptions de façon partiale : sur les trente-trois supprimées, la gauche en perd vingt-trois, quoi que vous disiez, alors que la droite n'en perd que dix. Avec cette nouvelle carte électorale, l'alternance sera plus difficile. Nous avons fait le calcul : demain, pour que la gauche soit majoritaire, il lui faudra recueillir 51,4 % des suffrages tandis que la droite n'aura besoin que de 48,7 % des voix. Si ce découpage avait été appliqué en 2007, la droite aurait obtenu vingt sièges supplémentaires, tandis que les autres partis auraient tous été perdants.
Monsieur le secrétaire d'État, nous contestons formellement votre méthode et les résultats auxquels elle conduit.
J'insisterai, et cela ne vous étonnera pas, sur votre projet de redécoupage en Seine-Saint-Denis. Dans ce département qui compte quelque 1,5 million d'habitants, une des treize circonscriptions doit être supprimée. Reste à savoir laquelle. Le Conseil constitutionnel a posé la règle fondamentale selon laquelle « la répartition des sièges de député doit s'opérer sur des bases essentiellement démographiques ». Or, loin de tirer les conséquences des obligations constitutionnelles, votre projet d'ordonnance ne respecte pas le critère démographique pour notre département.
Contrairement à ce que vous affirmez pour faire croire à un semblant d'équité, ce n'est pas la dixième circonscription, celle de notre collègue UMP Gérard Gaudron, qui est supprimée, mais bien la troisième circonscription du député socialiste Daniel Goldberg, alors que sa population correspond justement à la nouvelle norme des 125 000 habitants.
La logique aurait été de modifier en premier lieu les circonscriptions les moins peuplées, qui sont très loin de la moyenne départementale : il y en a quatre. Vous n'avez pas choisi cette méthode. Pour illustrer mon propos, je citerai la huitième circonscription, celle d'un élu appartenant à l'UMP, qui ne comprend que 107 000, habitants soit un écart de moins 13,74 % par rapport à la moyenne, et qui reste intacte bien qu'elle se situe en dehors des marges admises.
La sixième circonscription, celle de Claude Bartolone, correspond exactement à la moyenne départementale ; la mienne, la neuvième, même si elle est un peu en dessous, reste à l'intérieur de la fourchette. On a choisi de redécouper ces deux circonscriptions. On se demande en vertu de quelle logique.
Avec votre projet, l'unité des villes et des cantons n'est pas respectée : ils sont divisés et répartis sur plusieurs circonscriptions au mépris des bassins de vie existants et des projets de territoires réalisés. Un canton est même éclaté entre trois circonscriptions.
Quant à la ville la plus importante de ma circonscription, Bondy, elle serait désormais coupée en deux circonscriptions différentes, alors qu'elle est déjà traversée par la nationale 3, une autoroute et une voie de chemin de fer.
Il n'était pas nécessaire d'en rajouter, alors que l'on se pique par ailleurs de faire du réaménagement urbain.
Cette division est évidemment insupportable pour les Bondynois qui souffrent déjà de voir l'unité de leur ville malmenée. Nous récusons formellement ce projet.
Enfin, les intercommunalités ne sont pas prises en compte. Aubervilliers et Pantin, qui sont engagées dans des intercommunalités différentes, sont regroupées dans une circonscription commune.
Au final, votre découpage renforce les circonscriptions de l'UMP et du Nouveau Centre mais met à mal celles des socialistes sans aucune logique territoriale ni démographique.
Et pourtant, un redécoupage républicain est possible en Seine-Saint-Denis. Nous vous avons fait une contre-proposition, respectueuse des territoires et des sensibilités politiques diverses, et qui remodèle logiquement les circonscriptions les moins peuplées du département : les quatrième, septième, huitième et dixième. Les autres resteraient inchangées et les communautés d' agglomération seraient confortées. Hélas, vous avez refusé toute concertation transparente sur ces bases.
Puisque vous aviez négligé nos propositions, nous étions au moins en droit d'attendre de vous que vous soyez plus attentif aux avis de la commission Guéna et du Conseil d'État.
En effet, dans son avis du 23 juin 2009, la commission Guéna, mise en place pour garantir l'équité et la transparence sur la procédure de découpage, et composée de représentants que vous avez choisis, monsieur le secrétaire d'État – ils ne sont donc pas suspects de partialité vis-à-vis de votre gouvernement - a constaté que, pour la Seine-Saint-Denis, la proposition de redécoupage du Gouvernement « [laissait] subsister un important déficit démographique – moins 13,74 % – dans la huitième circonscription, aux contours inchangés », circonscription actuellement détenue par l'UMP.
Suivant les recommandations du Conseil constitutionnel, la commission Guéna a corrigé les déséquilibres démographiques relevés en suggérant un nouveau découpage « plus satisfaisant sur le plan démographique ». Elle propose ainsi de recomposer six circonscriptions sur treize, au lieu de huit dans votre projet, en redécoupant, comme nous le préconisons aussi, les circonscriptions les moins peuplées, celles qui ont le plus d' écart par rapport à la moyenne du département : la quatrième, la septième, la huitième et la dixième. Elle ne touche pas aux circonscriptions qui sont dans la moyenne, comprises dans l'écart de plus ou moins 7 % – première, deuxième, neuvième, onzième, douzième, treizième. Elle mentionne particulièrement le maintien du découpage de 1986 pour la neuvième circonscription, qui est la mienne. Cette notation particulière, en ce qu'elle est une exception dans l'avis de la commission, est remarquable.
Même si les propositions de la commission Guéna ne sont pas à nos yeux totalement satisfaisantes, elles corrigent néanmoins les graves disproportions démographiques que laisse subsister dans notre département votre projet de redécoupage et l'injustice politique que nous n'avons cessé de dénoncer.
Sur ce même critère, le préfet de la région Ile-de-France Daniel Canépa a confirmé, dans une lettre adressée à l'un d'entre nous, qu' « un objectif de proportionnalité amène à ne pas modifier les limites des circonscriptions législatives lorsque celles-ci ont une population proche de la moyenne ». Celles des députés socialistes n' auraient ainsi pas dû être redécoupées.
À son tour, le Conseil d' État a émis un avis négatif sur vos propositions le 24 juillet 2009. Reprenant les analyses de la commission Guéna, il a signalé le risque d' inconstitutionnalité du projet du Gouvernement pour le département de Seine-Saint-Denis, considérant qu'il ne tenait pas compte des réalités géographiques et démographiques, et ainsi confirmé la nécessité de le modifier. Vous n'avez pas voulu publier cet avis et vous n'en avez pas tenu compte. Vous n'avez pas davantage suivi les recommandations de la commission Guéna. Nous savons bien pourquoi, même si vous ne vous en êtes pas expliqué.
Votre projet d'ordonnance maintient vos propositions initiales. Si ce projet injuste et injustifiable, tant sur le plan démographique que politique, était voté, nous saisirions le Conseil constitutionnel pour faire respecter le critère constitutionnel de la démographie ainsi que les avis des différentes autorités qui se sont exprimées, et pour revenir à un projet de découpage électoral conforme à l'esprit républicain, en Seine-Saint-Denis comme dans une trentaine d'autres départements. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Le texte qui nous réunit revêt, à n'en point douter, une importance particulière, pour certains d'entre nous en tout cas. Il nous est en effet demandé de nous prononcer sur un sujet délicat qui nous concerne et nous interpelle directement. Comment ne pas constater qu' il s'agit là d'un exercice d'équilibriste, voire quelque fois schizophrénique ?
Cependant, nous savons tous que ce projet de loi est nécessaire, urgent, incontournable, car il répond à une volonté affirmée du Président de la République et représente une avancée sans doute indispensable pour les territoires de demain, qu'il fallait rééquilibrer. La loi prévoyait d'ailleurs une révision de la carte législative dès 1989, puis en 1999. Les dirigeants de l'époque n'ont pas souhaité s'attaquer à ce dossier, comme à beaucoup d'autres…
De surcroît, depuis 2003, le Conseil constitutionnel ne cesse de rappeler la nécessité impérative de réviser la carte électorale compte tenu, en particulier, des évolutions démographiques enregistrées depuis la dernière révision de 1986. Personne ne conteste qu' un redécoupage des circonscriptions s'impose pour mieux tenir compte des réalités et des évolutions démographiques.
L'exercice est d'autant plus difficile que le Gouvernement s'est donné comme contrainte de redécouper les circonscriptions sans augmenter le nombre de députés, alors que la population a progressé, et tout en accordant – c'est une nouveauté – onze sièges aux députés représentant les Français de l'étranger.
Comment conserver le plafond des 577 sièges et créer de nouvelles circonscriptions sans profondément remodeler ou supprimer celles qui existent ? Ce n'était tout simplement pas possible et au final, puisque seules 238 restent à l'identique, 60 % des circonscriptions se trouvent concernées.
La circonscription dont je suis l'élu depuis 1981 comme député suppléant, et titulaire depuis 1995, va ainsi disparaître. Je ne suis pas à cette tribune pour vous sensibiliser à mon sort, car je suis conscient que l'on devait faire cette réforme et que les députés ne sont évidemment pas « propriétaires » de leur circonscription, même si beaucoup disent « ma » circonscription.
Je me suis donc plié aux règles du jeu.
Qu'il me soit toutefois permis, monsieur le secrétaire d'État, d'apporter un bémol…
…à cette courageuse réforme : il concerne la méthode que vous avez employée. Je regrette à mon tour, après d'autres collègues qui vous l'ont dit et vous le diront sûrement encore, le peu, voire le manque de concertation et de consultation de certains élus directement touchés.
Aucune considération pour Jacques Chirac ! Ce ne sont que des ingrats !
Nous aurions aimé être un peu plus consultés sur les décisions envisagées, un peu plus entendus lorsque nous proposions des projets alternatifs de redécoupage, un peu plus informés lorsque les décisions finales ont été prises et validées par le Gouvernement.
Certes, l'existence de la commission consultative a rendu, à vous entendre, l'exercice plus « participatif et transparent »…
…mais, bien souvent, nous avons été informés tardivement ou par voie de presse.
Je nuance mon propos car je comprends évidemment que sur pareil sujet, trop de concertation peut venir parasiter la réflexion et ralentir la décision, mais un peu plus que ce qui a été fait n'aurait pas été de trop !
Les projets alternatifs que nous proposions n'étaient pas destinés à « protéger » l'un ou l'autre, quel que soit son poids politique ou son appartenance, mais à essayer de tenir compte des spécificités des circonscriptions, ces entités dont beaucoup ont une histoire, avec leur population, leur topographie, leur dynamisme économique, mais aussi avec les hommes politiques qui les ont animées, personnalisées, voire symbolisées.
Eh oui ! Chirac en Corrèze, Giscard dans le Puy-de-Dôme. Quelle considération !
Des esprits chagrins n' iront-ils pas jusqu'à imaginer que l'importance locale de certains leaders politiques – de quelque bord qu' ils soient – ait pu peser dans le projet de redécoupage que vous nous proposez aujourd'hui ?
Concevez, monsieur le secrétaire d'État, combien il est difficile pour le député très concerné que je suis de se déterminer pour le vote final, tant je suis partagé, je vous le dis, entre la volonté d'obéir à une certaine discipline de groupe et celle de manifester un vote marqué par un réel désappointement.
Mes chers collègues, les dés sont peut-être jetés,…
…l' heure n'est plus à la lamentation ni aux regrets superflus, mais permettez, à d'autres et à moi-même, de diriger le regard en arrière puisque nous n'avons plus de ligne d'horizon ! (M. Georges Mothron applaudit).
S'il faut saluer l'engagement de la procédure de révision des circonscriptions électorales, il faut aussi appeler l'attention de chacune et chacun sur les conditions d'un redécoupage juste et transparent. Manifestement, monsieur le secrétaire d'État, le gouvernement que vous représentez a renoncé à réunir ces conditions.
Nous ne pouvons que le constater les uns après les autres, le risque d'un exercice purement partisan n'a pas été évité mais, au contraire, minutieusement prémédité.
Votre démarche est aux antipodes de l'idéal démocratique et des objectifs annoncés, la main sur le coeur, au début de la procédure.
Nous le savons, la commission indépendante n'a approuvé qu'une petite partie du projet du Gouvernement et certains choix de méthode sont fortement dénoncés. Visiblement, l'objectif d'un redécoupage démocratique consensuel est délibérément manqué.
La répétition valant pédagogie, ce n'est un secret pour personne, les circonscriptions supprimées, afin notamment de créer les onze destinées aux Français établis hors de France, sont détenues, pour les deux tiers environ, par la gauche et pour un tiers par la droite. Dès lors, vous tombez le masque : vous redécoupez dans le seul but de vous octroyer un avantage structurel afin de vous garantir la majorité absolue dans notre assemblée.
J'en veux pour preuve le découpage dans les Bouches-du-Rhône, en particulier à Marseille et dans sa septième circonscription, qui illustre le travail de dentellière, si ce n'est le charcutage, auquel vous vous êtes livré pour aboutir à ce découpage partisan – je précise que j'ai le plus grand respect pour ces deux métiers en voie de disparition.
Vous vous répétez, monsieur Raoult.
Présentons tout d'abord rapidement le redécoupage à Marseille. Huit des seize circonscriptions des Bouches-du-Rhône sont situées dans Marseille intra muros. Pour des raisons démographiques, Marseille perd une circonscription au profit du reste du département. Le rapport de forces actuel est de six circonscriptions pour la droite et deux pour la gauche. Le projet du préfet, tel que soumis au Gouvernement, consistait – d'après, nous a-t-il dit – la feuille de route qu'il avait reçue – à faire coïncider le plus possible les secteurs municipaux et les circonscriptions législatives : Marseille est composée de huit secteurs municipaux, qui regroupent chacun deux arrondissements.
Il était clair que dans « le plus possible » du préfet, il y avait déjà un exercice non dénué d'arrière-pensées partisanes. Il s'agissait néanmoins d'un bel habillage qui préservait les apparences.
Le 20 février, le préfet transmet son projet au Gouvernement : depuis, plus de son ni d'image ! D'un découpage partisan, celui du préfet, on est littéralement passé, avec le Gouvernement, à un tripatouillage.
Pour donner un point de repère démocratique, je tiens à vous rappeler que, si le rapport de forces entre la droite et la gauche à Marseille est de l'ordre de cinquante-cinquante, en sièges de députés il est de six pour deux en faveur de la droite. La tendance, constatée aux élections municipales, conduirait à un rapport de force de quatre sièges pour la droite contre trois pour la gauche, puisqu'une circonscription disparaît.
Le projet soumis par le Gouvernement tend à concentrer, de la façon la plus amicale, les électeurs de gauche dans deux circonscriptions, afin d'obtenir un rapport de forces de cinq contre deux. Ce résultat est le fruit d'un véritable tour de passe-passe commis au mépris de la cohérence territoriale. En effet, peut-on justifier que les limites d'une circonscription coupent un quartier en deux, voire une cité en deux ? Le bâtiment A votera dans une circonscription et le B dans une autre ! Je ne suis pas certaine que ce genre d'exercice réconcilie les Français avec la politique et nous crédibilise.
Effectuer des délimitations arbitraires pourrait se comprendre si les circonscriptions étaient d'égal poids démographique. Or tel n'est pas le cas puisque, à Marseille, l'amplitude démographique entre deux circonscriptions dépasse 17 000 habitants. La cohérence territoriale, c'est d'inscrire la circonscription dans le secteur municipal, qui est l'unité de gestion urbaine de proximité, comme l'avait expliqué le préfet. Ajouter, sans autre explication, plus de 10 000 habitants en provenance d'un autre secteur municipal, précisément du XIIe arrondissement, secteur évidemment détenu par la droite, n'a qu'un objectif partisan, puisque, de l'autre côté, on détricote savamment, bureau de vote par bureau de vote, canton et secteur municipal.
Votre redécoupage des circonscriptions ne prend pas en compte les évolutions démographiques prévisibles puisqu'il conduit, à Marseille, à construire deux circonscriptions dont la population dépasse la moyenne départementale, et cinq où elle lui est inférieure. Comme par hasard, mes chers collègues, les deux circonscriptions en question sont de gauche. Il est même fort possible que la candidate ou le candidat de gauche passe dès le premier tour. Dans ces conditions, pourquoi se plaindre ? Parce que ces deux circonscriptions, qui recouvrent l'essentiel des quartiers nord, sont à la fois ceux dans lesquels la dynamique démographique est la plus forte, recensement à l'appui, et ceux dont les réserves foncières permettront d'accueillir de nouveaux habitants. Dans moins de dix ans, la plus peuplée de ces deux circonscriptions dépassera de plus de 20 % la moyenne de la population départementale. L'ignorance du dynamisme démographique est délibérée puisqu'elle a pour seul objectif de concentrer les électeurs de gauche dans deux circonscriptions et de construire par ailleurs des circonscriptions qui penchent naturellement à droite.
Pour le redécoupage de la circonscription dans laquelle j'ai encore l'honneur d'être élue, l'arrière-pensée, ou plutôt l'objectif, est double : dans un premier temps, gagner une circonscription à la gauche et, dans un second, se donner les moyens de faire tomber à droite le secteur municipal qui couvrira le quart de la superficie et de la population marseillaise, secteur déterminant pour gagner la mairie en 2014.
Je déplore également que votre découpage aboutisse à ce que les deux seules députées sortantes, sur seize élus, s'affrontent sur le même territoire. Cela fera arithmétiquement une élue de moins dans l'hémicycle. Sans faire du féminisme primaire, je n'ai pas le sentiment que les femmes soient si nombreuses à l'Assemblée nationale : c'est bien de faire de grands discours sur la parité, il serait mieux de nous respecter davantage.
Monsieur le secrétaire d'État, pourquoi ne pas avoir suivi l'avis du préfet ? Que s'est-il passé entre-temps ? Peut-être ne le saurons-nous jamais, à moins que nous ne le sachions que trop !
J'ajoute que l'engagement et la force, voire l'émotion, dont témoignent sur tous les bancs les collègues qui se sont exprimés depuis quelques jours, ne sont pas ceux d'un syndicat de pieds écrasés, mais expriment, pour certains d'entre eux, toute une vie d'engagement au service de l'intérêt général.
Ce projet est injuste et biaisé. Nous le rejetterons. Monsieur le secrétaire d'État, un homme averti en vaut deux : pour être un homme d'expérience, vous savez bien que le peuple souverain a toujours su sanctionner massivement celles et ceux qui tentaient de bafouer ses choix par tous moyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le redécoupage des circonscriptions législatives était devenu, on le sait, un impératif, les distorsions démographiques étant telles que l'égalité des citoyens devant le suffrage universel ne pouvait plus être garantie. Il aura du reste fallu une ultime remontrance du Conseil constitutionnel au début de cette treizième législature pour que votre gouvernement se décide à ouvrir ce chantier important pour notre démocratie.
Les vôtres auraient pu le faire auparavant.
Cet exercice, monsieur le secrétaire d'État, est très difficile en temps de cohabitation. Il est vrai qu'à entendre les débats qui agitent aujourd'hui l'UMP, je me demande si nous n'y sommes pas revenus !
Nous étions en droit d'espérer que le Gouvernement mette à profit une aussi longue attente pour proposer à la représentation nationale une méthode et un calendrier permettant de placer ce projet de redécoupage au-dessus de tout débat partisan, de tout soupçon électoraliste. La réalité nous démontre aujourd'hui qu'il n'en est rien et que vous vous apprêtez à passer en force avec un projet de découpage qui vise à rendre plus difficile toute alternance politique.
Car c'est bien de ceci qu'il s'agit : la façon dont l'UMP, qui détient l'essentiel des pouvoirs politiques, financiers et médiatiques, tente aujourd'hui de se garantir une vingtaine de sièges supplémentaires à l'occasion des prochaines élections législatives, ou encore la façon dont la droite tente de se garantir un airbag électoral pour éviter les conséquences de la contestation, de la colère qui monte partout dans le pays. (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Je n'ai pas évoqué La Défense.
Le débat que nous avons aujourd'hui n'est pas un débat de techniciens. Ce n'est pas même un simple débat gauche-droite. Ce qui est en jeu, ce n'est pas non plus la défense de quelques territoires ou le dernier combat de députés accrochés à la défense de leurs circonscriptions. Ce qui est en jeu, c'est la lourde et ancienne question de la justice électorale, c'est le visage de la démocratie que nous présentons aux Français.
Certes, pour le moment, compte tenu des difficultés économiques et sociales auxquelles ils sont confrontés, ils s'intéressent peu à ce projet de découpage. D'ailleurs, le Gouvernement fait tout pour éviter qu'il ne s'ébruite. Certains, bien sûr, nous ont entendus parler de tripatouillage, de bidouillage ou de charcutage. Toutefois, ce qui compte, monsieur le secrétaire d'État, c'est ce que l'histoire retiendra de ce découpage : bien plus que la simple opération de tripatouillage, c'est le déni de démocratie qui sera peut-être retenu dans les manuels, et ce que, personnellement, vous fabriquez aujourd'hui sera certainement la trace que vous laisserez, comme chacun d'entre nous, dans l'histoire.
Oui, ce projet est indigne de notre République. Oui, il est indigne de ce que nous représentons tous ici collectivement, nous, députés de la nation.
Nous méritons mieux qu'un découpage de pure complaisance politique : nous méritons la transparence et l'équité, et non un rapport de secrétaire national aux élections de l'UMP ! Nous méritons la transparence : nous avons l'opacité et la partialité !
Oui, ce projet aurait mérité mieux que des discussions d'antichambres dans les ministères, mieux que ce simulacre de concertation qui a consisté à recevoir les représentants d'organisations politiques après avoir arrêté les principaux arbitrages, le tout au terme de long mois d'expectative pour l'opposition.
Oui, ce projet aurait mérité que la représentation nationale puisse elle-même décider de son destin et des modalités d'élection de ses représentants, et non que le Gouvernement décide de procéder par ordonnance.
Aujourd'hui, c'est l'autogestion, mais au sein de l'UMP.
Oui, un tel projet aurait pu faire l'objet de la création d'une commission réellement indépendante parce que pluraliste.
En application de l'article 25 de la Constitution, une simple commission ad hoc, présidée par l'impartial Yves Guéna et dont les membres ont tous été nommés par la majorité parlementaire, a bien été chargée de contrôler l'action du Gouvernement. Sans contester les travaux de cette commission – j'y reviendrai –, il aurait été possible de la constituer autrement, par exemple à la proportionnelle des groupes parlementaires, en prenant comme base le bureau de l'Assemblée nationale ou, comme en 1986, uniquement avec de hauts magistrats indépendants, alors que, cette fois-ci, ils représentaient seulement la moitié de la commission, le reste étant composé de personnalités. En quelque sorte et pour faire court, vous avez tenu le crayon et la gomme pour ce qui aurait dû être un grand exercice de démocratie !
Il est en outre assez extraordinaire qu'un gouvernement mette en place une telle commission, insistant sur sa grande indépendance, pour décider ensuite et en plein été que son avis n'avait pas lieu d'être. Pourquoi une telle mascarade si, finalement, tout était d'ores et déjà réglé rue La Boétie ?
De même, monsieur le secrétaire d'État, comment ne pas être choqué de vous entendre, la semaine dernière, devant notre commission des lois, intimer l'ordre aux parlementaires de ne pas examiner le périmètre de chaque circonscription au cas par cas ? Depuis quand, dans notre pays, l'exécutif exige-t-il de la représentation nationale qu'elle s'exprime sur tel ou tel sujet, mais pas sur d'autres ?
Dans cette maison, le Gouvernement est un invité : il n'est pas chez lui.
Voilà encore un exemple du déni de démocratie que j'ai évoqué au début de mon propos. À la transparence, vous avez préféré l'opacité et vous y avez ajouté l'iniquité et la complaisance !
Rappelons-le, le seul et unique objectif de tout redécoupage électoral, défini par l'article L. 125 du code électoral et par la jurisprudence, primordiale en ce domaine, du Conseil constitutionnel, est de réduire les inégalités de population entre circonscriptions électorales.
Il s'agit d'adapter les réalités politiques à la nouvelle donne démographique de notre pays. Or vous faites aujourd'hui tout le contraire en essayant d'adapter les réalités démographiques à vos objectifs politiques et en traçant la carte avant d'appliquer les stricts principes constitutionnels guidant le redécoupage électoral !
La Seine-Saint-Denis est un bon exemple de l'iniquité et de la complaisance avec lesquelles ce projet de découpage a été conduit.
Vous avez tout d'abord choisi la méthode de la tranche, en fixant celle-ci à 125 000 habitants par député. D'autres méthodes auraient pu être proposées. Avec ce mode de calcul, la Seine-Saint-Denis compte désormais douze députés contre treize pour les Hauts-de-Seine, pour un écart de population de 40 000 habitants seulement !
Sans doute ce résultat était-il pour vous bienvenu : je sais toute l'importance que le Gouvernement accorde aux Hauts-de-Seine, objet de toutes les attentions du Président de la République. Toutefois, monsieur le secrétaire d'État, je vous invite à venir expliquer vous-même aux 1,5 million d'habitants de la Seine-Saint-Denis, et singulièrement à ceux qui habitent dans ses quartiers populaires, qu'ils auront désormais une voix de moins pour se faire entendre à l'Assemblée nationale et les aider au quotidien.
Il faut demander à Jospin et à Vaillant !
Monsieur le secrétaire d'État, ce ne sont ni M. Jospin ni M. Vaillant qui ont tenu les ciseaux. Ce ne sont pas eux non plus qui ont été jusqu'à essayer de savoir ce que devait être le mandat de tel ou tel député socialiste lorsque vous avez envisagé d'envoyer l'un ou l'autre au Sénat !
Sans doute direz-vous aux habitants de ce département qu'après avoir été pour l'État depuis des années une variable d'ajustement nationale en matière de politique sociale et économique ou même de sécurité, il est logique que la Seine Saint-Denis soit désormais une variable d'ajustement électorale !
J'ajoute que la prise en compte de la population municipale pénalise des départements comme la Seine Saint-Denis, en croissance démographique constante, par rapport à d'autres départements qui voient leur population stagner ou régresser. Le choix de la population légale sans double décompte lui aurait évité la perte d'un siège.
Après avoir enlevé un député à la Seine-Saint-Denis, le Gouvernement a logiquement décidé de redessiner les frontières des circonscriptions législatives. Or, là encore, les logiques politiques ont primé sur les logiques démographiques. Même la commission Guéna, qu'on ne peut guère soupçonner de complaisance envers l'opposition parlementaire compte tenu de sa composition, s'est trouvée contrainte de constater que la proposition du Gouvernement « [laissait] subsister un important déficit démographique – moins 13,74 % – dans la huitième circonscription, aux contours inchangés », circonscription évidemment détenue par l'UMP, et elle a même suggéré à la suite un autre redécoupage conforme à la loi et aux règles définies par le Conseil constitutionnel, redécoupage qui aurait pu encore être amélioré.C'est bien la preuve qu'il y a eu volonté de malversation démocratique !
Comment le dire autrement, monsieur le secrétaire d'État, lorsque l'on constate que le découpage permet en Seine-Saint-Denis de supprimer une circonscription détenue par le parti socialiste tout en consolidant les bastions de l'UMP et du Nouveau centre ?
À l'examen de la nouvelle carte des circonscriptions, l'objectif de correction des déséquilibres démographiques que vous évoquez avec raison paraît totalement bafoué.
Outre le cas de la huitième circonscription déjà évoqué, le Gouvernement entend en effet supprimer la troisième circonscription du département – La Courneuve, Le Bourget, Aubervilliers Est et Ouest – alors que sa population correspond justement à la nouvelle norme des 125 000 habitants : Daniel Goldberg a dit ce qu'il fallait à ce sujet.
Par ailleurs, trois autres circonscriptions – les troisième, sixième et neuvième – sont redécoupées alors qu'elles correspondent à une moyenne comprise dans un écart de plus ou moins 7 %, situé dans les limites mêmes que vous avez fixées.
Élisabeth Guigou a eu raison de vous rappeler les propos de Daniel Canépa, préfet de la région Île-de-France et à ce titre représentant du Gouvernement, qui s'était lui-même engagé par écrit auprès de nous en répondant, le 13 mars dernier, à l'un de nos collègues : « Un objectif de proportionnalité amène à ne pas modifier les limites des circonscriptions législatives lorsque celles-ci ont une population proche de la moyenne. »
Sans doute les arbitrages effectués, qui vont à l'encontre de cette belle explication de texte, n'ont-ils rien à voir avec la volonté de remodeler les circonscriptions où sont élus les députés socialistes, et de rendre intangibles, acquises, les circonscriptions détenues par l'UMP ou même de renforcer celle détenue par le Nouveau Centre !
Pourtant, le jour même de la publication de l'avis de la commission indépendante au Journal officiel, vous avez fait savoir que, pour la Seine-Saint-Denis, vous n'entendiez pas tenir compte de ses remarques. Vous n'avez même pas essayé de défendre votre projet ni d'expliquer quelle logique objective vous avait conduit à proposer un tel découpage électoral, laissant penser à tous que seul le fait du prince primait.
Même le Conseil d'État, saisi pour avis sur votre projet d'ordonnance, a mis en garde le Gouvernement en relevant le risque d'inconstitutionnalité des propositions faites notamment pour la Seine-Saint-Denis et quelques autres départements. Là encore, l'arbitraire coup de ciseau a primé sur toute autre considération.
Peu importe la démographie, peu importent les risques d'inconstitutionnalité, peu importe que ce projet ne respecte pas l'entièreté des cantons – ceux du Bourget, de Dugny et de Drancy Nord par exemple – et des villes, comme Bondy, ou même celle des intercommunalités, dont vous voulez pourtant faire l'espace local de référence à l'horizon 2014. Ce sont les considérations politiques, les petits arrangements qui ont compté.
Avant-hier, notre collègue UMP Éric Raoult laissait d'ailleurs s'exprimer son inconscient sur ces bancs mêmes lorsqu'il remarquait à haute voix que le projet de redécoupage retenu pour la Seine-Saint-Denis divisait les territoires pour diviser le parti socialiste !
La Seine-Saint-Denis mérite mieux que ce découpage ; elle mérite équité, objectivité et clarté. Ne pouvant accepter que le Gouvernement maintienne en l'état un projet aussi inique, mes collègues Bruno Le Roux, Élisabeth Guigou, Daniel Goldberg, Michel Pajon et moi-même avons donc décidé de déposer un amendement reportant à une date ultérieure le redécoupage législatif du département de la Seine Saint-Denis, en souhaitant que les avis de la commission indépendante et du Conseil d'État soient entendus.
Notre République dans son ensemble exige mieux que cette opération de tripatouillage électoral à court terme, qui fragilise à long terme notre démocratie représentative. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'opération de délimitation des circonscriptions législatives est rendue nécessaire par l'évolution de la démographie, et nous le comprenons. Le nombre de députés, fixé à 577, est diminué dans 27 départements. Ainsi, la région Nord-Pas-de-Calais perd cinq parlementaires – quatre de gauche et un de droite. Dans quinze départements, à l'inverse, le nombre de parlementaires augmente, ainsi que dans trois collectivités d'outre-mer.
Onze circonscriptions sont en outre créées pour assurer la représentation des Français établis hors de France. Combien de fois ces onze parlementaires seront-ils présents vu l'étendue de leur territoire ? Ces députés représenteront une certaine élite expatriée et viendront alors conforter les rangs de la majorité. Monsieur le secrétaire d'État, moi, j'appelle cela du bidouillage pour récupérer des parlementaires.
Le redécoupage que vous nous proposez par la méthode de la tranche supprime deux circonscriptions dans le Pas-de-Calais.
Si le choix avait été celui du plus fort reste, nous resterions certainement treize parlementaires au lieu de douze puisque notre département compte plus de 1 450 000 habitants. C'est que la méthode de la tranche est celle qui vous avantage. Vous dites vouloir corriger les inégalités, mais vous les accentuez au profit de votre majorité. Tout est manoeuvre politique et partisane.
Je suis députée de la onzième circonscription du Pas-de-Calais, la plus peuplée, avec 131 800 habitants, six cantons et trente communes. Le redécoupage supprime ma circonscription avec pour premier but de renforcer politiquement un parlementaire de la majorité élu dans la neuvième, laquelle comptera moins d'habitants après le remodelage : 103 266 contre 104 632 aujourd'hui, soit un écart de 14,74 % par rapport à la moyenne départementale.
Vous oubliez de souligner que cela arrange M. Lefait !
La commission Guéna a émis un avis défavorable mais rien n'a changé. Une simple adjonction du canton de Norrent Fontes à la neuvième circonscription serait parfaitement logique sur le plan social et géographique. Jusqu'où irez-vous, monsieur le secrétaire d'État, pour soutenir ce découpage orienté et déséquilibré ?
Est-il normal, en réorganisant le territoire, de retrouver dans le Pas-de-Calais une circonscription aussi vaste et aussi peuplée avec 295 communes, 11 cantons, et qui s'étend sur le tiers du département ? C'est un monstre ingérable pour Mme Maquet ou tout autre parlementaire. Cet espace est bien plus important que celui, supprimé, de M. Leroy.
Comment voulez-vous faire admettre aux habitants et aux élus locaux ce redécoupage qui ne se justifie ni par l'histoire, ni par la sociologie, ni par l'aménagement du territoire ? Comment faire admettre à nos populations tous ces remaniements, tous ces bouleversements, voire toutes ces magouilles d'intérêts individuels et politiques, quand tout est orienté et déséquilibré dans le Pas-de-Calais et au niveau national ?
Monsieur le secrétaire d'État, ce n'est pas mon poste que je défends, même si je regrette que ce soit la circonscription d'une femme qui disparaisse.
J'aurais voulu être écoutée, entendue, pour que les cantons de ma circonscription se retrouvent dans des territoires homogènes par respect pour les habitants. Je pense notamment aux cantons de Wingles et de Douvrin, qui devraient être rattachés à la troisième circonscription de Lens suivant notre projet fédéral. Je n'oublie pas les incohérences concernant le canton de Cambrin, où je réside, ou celui de Noeux-les-Mines.
Monsieur le secrétaire d'État, si nous voulons redonner à nos populations, à notre jeunesse, le goût, le sens, les valeurs de l'engagement politique, il nous faut être plus justes, transparents et exemplaires. Ce ne sont hélas pas vos convictions, comme le prouve ce redécoupage. Voilà pourquoi je demande l'annulation de l'ordonnance n° 2009-935 du 29 juillet 2009 délimitant les circonscriptions législatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, tout le monde reconnaît qu'il fallait redécouper les circonscriptions.
Nous l'avons dit nous-mêmes à treize reprises dans cet hémicycle. Seulement, la différence entre vous et nous, c'est qu'avec Jospin on réfléchit mais qu'avec Sarkozy on agit. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Sur cette question, la grande différence entre vous, monsieur le secrétaire d'État, nous, députés de la majorité, et eux, députés de l'opposition, c'est que si l'on avait tenu compte de cette demande en 2000-2001, lorsque Claude Bartolone était au gouvernement, nous n'en serions pas là et je n'aurais pas à intervenir.
Mais c'est au titre d'ancien responsable des élections au sein de ma formation politique d'élu de Seine-Saint-Denis, c'est aussi parce que j'ai participé à ce débat et que je suis de près les dossiers relatifs à l'outre-mer, que j'interviens pour apporter ma part de vérité.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez agi avec transparence et en prenant le temps qu'il fallait.
Mais c'est au titre d'ancien responsable des élections au sein de ma formation politique et en tant qu'élu de Seine-Saint-Denis, c'est aussi parce que j'ai participé à ce débat et que je suis de près les dossiers relatifs à l'outre-mer, que j'interviens pour apporter ma part de vérité.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez agi avec transparence et en prenant le temps qu'il fallait.
Mes chers collègues de l'opposition, pour éviter le développement de l'antiparlementarisme (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC),…
…il convient de rappeler que ce dossier a été examiné, avec le concours des préfets,…
…par nous tous dans chaque département. Que ce soit à la préfecture ou dans le train, nous en avons tous parlé.
J'ai été pour la première fois candidat en 1981, dans une circonscription qui comprenait 337 000 habitants ! J'ai été battu…
…quand Claude Bartolone a été élu et qu'il lui fallait aller à la mairie de Bagnolet pour récupérer des résultats que vos collègues du parti communiste, bizarrement absents de l'hémicycle depuis le début de ce débat,…
Claude, si tu lui en veux autant, il ne fallait pas lui serrer la main à la fête de l'Humanité !
Je pense respecter votre fonction. Du reste, l'ayant moi-même assurée, je tiens à vous rappeler, sans donner de leçons, que lorsque l'on est président de séance, on se doit à plus de neutralité que vous n'en avez fait preuve tout au long de ce débat.
Votre façon de procéder, monsieur le secrétaire d'État, n'a pas été adoptée en 1988.
Cher Daniel Goldberg, je comprends votre impression : vous venez d'arriver et, un peu comme dans une entreprise, le dernier arrivé est le premier sorti…
Alors, moi qui suis le premier arrivé, je devrais être le dernier sorti ! Vous n'avez aucune logique !
En 1988, le redécoupage des circonscriptions par Charles Pasqua a été étudié à la loupe par Michel Charasse à l'Élysée et le Président de la République d'alors examinait le cas de chacune d'elles.
Monsieur le secrétaire d'État, vous vous êtes montré placide, débonnaire, souvent patient si j'en juge par ce que j'ai entendu au cours de la dernière séance. En effet, entendre un collègue dont je ne citerai pas le nom traiter un membre du Gouvernement de faisan,…
Non ! Si vous avez besoin de leçons de vocabulaire, je peux vous en donner !
Je n'ai cité personne !
…ou entendre un autre collègue le traiter de voyou, je ne crois pas que Pierre Joxe ou Jean-Pierre Chevènement l'auraient accepté.
Vous n'avez rien compris à rien, comme d'habitude ! Vous étiez dans un état second, la buvette n'était pas loin !
Alors, monsieur le secrétaire d'État, vous avez mené un bon débat.
Puisque nous parlons de la Seine-Saint-Denis, j'ai entendu à l'instant qu'avoir un élu de droite dans ce département, c'était une erreur. Moi, je suis tout d'abord un militant. En 1978, neuf députés sur neuf étaient communistes et je n'ai entendu personne, à l'époque, proposer un redécoupage.
En 1981, tous les députés du département étaient de gauche. Je n'ai pas entendu le parti socialiste faire de demande.
Quand l'instauration de la proportionnelle a abouti à l'élection de vingt-cinq députés du Front national, je n'ai pas entendu le parti socialiste s'exprimer. Et même lorsque, à l'époque, – je crois le savoir – un chef de l'État appelait les présidents de chaîne pour faire passer Le Pen à la télévision, je ne vous ai pas entendus non plus.
Chers collègues du parti socialiste, je parlerai de la douzième circonscription, n'ayant pas la conception patrimoniale des élus du PS, qui disent : « ma » circonscription. Je suis élu dans une circonscription, pendant un moment. Et tout l'enjeu d'être député de la nation, c'est d'être membre de la majorité.
J'ai entendu un certain nombre de collègues de droite et je comprends leur point de vue, parce qu'ils ont travaillé pendant des années sur un secteur. Mais très sincèrement, est-ce que De Gaulle aurait accepté ça ? Et je me tourne aussi vers les élus socialistes : est-ce que Mitterrand aurait accepté votre attitude ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Chers collègues du parti socialiste, je parlerai de la douzième circonscription, n'ayant pas la conception patrimoniale des élus du PS, qui disent : « ma » circonscription. Je suis élu dans une circonscription, pendant un moment. Et tout l'enjeu d'être député de la nation, c'est d'être membre de la majorité.
J'ai entendu un certain nombre de collègues de droite et je comprends leur point de vue, parce qu'ils ont travaillé pendant des années sur leur secteur. Mais très sincèrement, est-ce que De Gaulle aurait accepté ça ? Et je me tourne aussi vers les élus socialistes : est-ce que Mitterrand aurait accepté votre attitude ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président Bartolone, vous le connaissiez mieux que moi, c'est vrai. Mais en l'occurrence, si vous souhaitez gagner les prochaines élections législatives, gagnez d'abord la présidentielle ! Ayez un bon candidat ou une bonne candidate ! Et par la volonté de M. Jospin, il y aura alors une majorité de gauche pour le Président, lorsqu'un Président issu de vos rangs aura été élu.
Vous vous en occupez, mais le Président de la République s'en occupe aussi, et plutôt bien. Attendez-vous à l'avoir en 2012 !
Nous avons, c'est vrai, donné notre avis sur le découpage. Je voudrais prendre Daniel Goldberg au bond. Daniel, puisque le chiffre de 51,4 % a été cité, je fais un pari. En 1988, ma circonscription (« Ma ! » sur les bancs du groupe SRC)…
Un-zéro, vous avez raison. En 1988, la circonscription de Clichy-sous-Bois, Montfermeil, Le Raincy, Livry-Gargan, Vaujours, Coubron, elle n'était pas prévue pour avoir un député de droite. Isabelle Thomas est venue se présenter dans cette circonscription. Elle arrivait en disant : « Bonjour, je suis la candidate de François Mitterrand. »
Elle a été battue, parce qu'on n'est pas le député d'un parti. On est, c'est vrai, le député d'une circonscription, mais on est d'abord et avant tout le député d'une majorité. Et moi, je fais une proposition à Daniel Goldberg. Daniel, viens dans la douzième circonscription. Elle est jouable pour le parti socialiste. C'est ce que le président Bartolone n'arrête pas de dire à l'un de ses vice-présidents : « Reste à Livry-Gargan. Tu verras, le gros, tu l'auras ! »
Bref, que Daniel Goldberg vienne dans la douzième circonscription.
Mes chers collègues, j'ai participé à ce débat. J'ai expliqué quelle était la vérité du département de la Seine-Saint-Denis. Nous avions, c'est vrai, des difficultés. L'ancienne treizième circonscription était accolée. Il y avait une circonscription de 330 000 habitants. Elle a été découpée à l'époque pour avoir un député gaulliste. Oui, mais Jacques Mahéas y a été élu en 1981.
Autrement dit, si vous voulez gagner, rassemblez-vous, abordez d'autres sujets que ce sujet des circonscriptions qui donne une impression détestable à l'extérieur.
Je voudrais à présent ajouter quelques mots concernant l'outre-mer.
Lorsque René Dosière est intervenu avant-hier, il a abordé, s'agissant du nouveau département de Mayotte, un vrai problème, qui est d'ailleurs plus lié, reconnaissons-le, à l'immigration et à la population qu'à d'autres sujets. Il a aussi parlé de la Nouvelle-Calédonie, et je sais que les Néo-calédoniens se sont interrogés sur ce point. Mais dire qu'il n'y a pas eu de concertation à La Réunion, c'est faux, et c'est injuste. Dire qu'il n'y aurait pas d'accord à la Martinique ou en Guadeloupe, c'est faux, et c'est injuste.
Je suis bien au courant parce que, à la demande de Xavier Bertrand et de Jean-François Copé, je suis les dossiers d'outre-mer depuis quelques semaines, et que je les suivais déjà depuis quelques mois.
Le problème, chers collègues, n'est pas un problème de siège, de circonscription. Hier, en écoutant Alain Néri, j'ai eu à un moment, parce que j'ai beaucoup de sympathie pour lui, l'impression qu'il préparait sa reconversion à l'office du tourisme du Puy-de-Dôme. Cher Alain, tu es un militant socialiste. Bosse pour ton parti !
Mme Guigou connaît la Seine-Saint-Denis, mais en l'écoutant, j'étais tenté de lui rappeler que si la RN3 coupe la ville de Bondy, la solution à ce problème ne passe pas franchement par une réflexion sur les limites de sa circonscription.
Chers collègues, je voudrais conclure en vous disant que ce débat a eu lieu normalement et que l'on peut saluer la qualité du ministre. Même s'il connaît bien le monde rural, il n'a pas détourné son attention des circonscriptions urbaines.
S'agissant du 93, lorsque Claude Bartolone et moi écrirons nos mémoires, nous pourrons expliquer ce qui s'est passé durant ce débat.
C'est vrai, Daniel Goldberg, on est gêné, parce que vous êtes un député brillant et courageux. Mais battez-vous, et vous pourrez être ici après 2012 et au-delà.
Et je voudrais dire à notre collègue Aurélie Filippetti que moi aussi j'ai été ému. Mais à un moment, je me suis plu à penser…
Non, je ne prends le boulot de personne.
Je me dis parfois qu'au parti socialiste, plutôt que des sièges, il vous faudrait des divans. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Non, cela n'a rien de sexuel : je pense à la psychanalyse. Il faudrait parfois qu'on vous dise des vérités, mais aussi que l'on vous dise : « Bougez-vous ! Rassemblez-vous ! »
Quand on a découpé ma circonscription, en 1988,…
Pardonnez-moi. Oui, deux-zéro. Quand on a découpé la circonscription dont je suis l'élu, Robert Pandraud m'a dit : « Tu sais, Éric, ce n'est pas de ta circonscription qu'il faut t'occuper, c'est de ton action, de ta campagne. »
Chers collègues socialistes, si vous voulez revenir ici plus nombreux que vous ne l'êtes aujourd'hui, occupez-vous certes des circonscriptions dont vous êtes les élus, mais donnez-vous un chef (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC), donnez-vous une méthode. Et à ce moment-là, vous pourrez redevenir majoritaires. Mais quand je vous regarde, je crains que vous ne soyez encore moins nombreux la prochaine fois.
Je vais, monsieur le secrétaire d'État, reprendre un certain nombre de choses qui ont déjà été dites. Mais j'ai appris que, pour avoir la moindre chance d'être entendu ou écouté, il fallait répéter, répéter et répéter encore. C'est ce que je vais faire.
C'est vrai, une nouvelle délimitation des circonscriptions s'imposait pour réduire les disparités démographiques apparues depuis le découpage de 1986. Personne ne le conteste. Le Conseil constitutionnel la réclamait, l'ordonnance du 29 juillet 2009 en a précisé les dispositions.
En septembre 2008, le Premier ministre annonçait devant les responsables des groupes et des formations politiques sa décision d'engager une procédure juste et transparente. De fait, la volonté de concertation était tangible dans les échanges conduits tant par les préfets que par le secrétaire d'État lui-même. Les rencontres et les tables rondes étaient annoncées, une commission consultative indépendante a été mise en place.
Tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes redécoupé !
La composition de ladite commission indépendante aurait dû nous inciter à la méfiance. Le principe d'impartialité y était allègrement bafoué : trois de ses six membres – dont le président Guéna – étaient nommés, respectivement, par le Président de la République et les présidents de chacune des deux assemblées. De plus, à ma connaissance, nul spécialiste du droit électoral, démographe ou statisticien n'y figurait.
Elle a donc avalisé le choix de la méthode par tranche,…
Déjà retenue pour le précédent redécoupage.
…entériné sans sourciller certains choix partisans du Gouvernement et émis des réserves qui n'ont pas été prises en compte.
Je n'en veux pour preuve que le tout petit coup de rasoir qui a découpé si finement un tout petit canton du Sud Gironde, celui d'Auros, pour le transférer en catimini dans l'Entre-deux-Mers, contre toute attente et au mépris de toute cohérence et de toute concertation avec les principaux intéressés.
C'est ainsi que le 30 juillet dernier, en consultant la presse locale, nombre de députés ont découvert le résultat surprenant de la concertation tant vantée. Un journal paraissant le mercredi a titré « Une dentelle électorale cousue de fil blanc », en hommage à vos doigts de fée, monsieur le secrétaire d'État.
Cela ne va pas gêner M. Deluga ! Cela lui profite ! Il est très content !
Je vous en prie. Vous savez très bien pourquoi vous l'avez fait.
Mais quel que soit l'outil employé, hache, ciseaux ou scalpel, un charcutage reste un charcutage, et les effets de l'anesthésie se sont vite dissipés devant le spectacle des territoires disloqués.
Un « charcutage » de gauche, en l'occurrence !
Vous avez l'air très fier de vous, monsieur le secrétaire d'État.
Le Gouvernement avait insisté sur le caractère limité de l'opération : le nombre de circonscriptions est modifié dans quarante-deux départements et le découpage interne des circonscriptions change dans cinquante-huit départements. On frémit à la seule pensée d'un découpage qui n'eût pas été limité !
La nouvelle carte dédaigne le principe de la continuité territoriale en mettant à mal la cohérence économique, administrative et géographique. Des modifications apparemment anodines peuvent se révéler lourdes de conséquences. J'ajouterai que la tradition républicaine, rappelée à plusieurs reprises par vous-même, et qui devait empêcher de « séparer un parlementaire de la commune ou du canton dont il est l'élu », n'a pas été respectée. De quoi plonger citoyens et élus dans la confusion la plus totale.
Redécoupage et remodelage : de jolis mots qui recouvrent une réalité bien décevante. Comme votre bonhomie, qui masque si bien une tactique subtile et remarquablement efficace au service de la majorité. Comme l'idéal démocratique mis en avant pour mieux dissimuler les véritables objectifs d'une réforme qui vise avant tout à affaiblir l'opposition.
On vous l'a déjà dit, mais je le redis : si l'on prend en compte les résultats des élections législatives de 2007, sur trente-trois circonscriptions supprimées, vingt-trois sont de gauche et dix de droite ; sur trente-trois circonscriptions créées, neuf seraient de gauche et vingt-quatre de droite.
Lors du débat de mardi, vous nous avez mis en garde sur un ton comminatoire : « Vous ne sauriez ici discuter du tracé de telle ou telle circonscription, surtout s'il s'agit de votre propre secteur d'élection, au risque de créer une situation de conflit d'intérêts. » Monsieur le secrétaire d'État, qu'y a-t-il d'incohérent, pour des députés, à parler de ce qu'ils connaissent le mieux : la circonscription dont ils sont l'élu et ses habitants ?
M. Ciotti, au nom de l'UMP, a loué le courage et la sincérité de cette réforme fondée sur le respect de la démocratie. Il en a peut-être fait une lecture un peu hâtive ou orientée. À titre d'exemple, le cas de la Haute-Garonne, dont Martine Martinel, députée de la quatrième circonscription, aurait voulu vous parler ce matin, et dont nous nous sommes entretenus, relève davantage, là aussi, de la logique partisane que d'un souci de rééquilibrage démographique.
Sur les huit circonscriptions actuellement détenues par le PS, sept sont modifiées – pour ne pas dire éclatées –, six cantons sont disloqués au nom de la cohérence des territoires et deux nouvelles circonscriptions vont voir le jour.
Cette création était parfaitement admissible, mais pas telle que vous l'avez conçue. Les députés socialistes ont fait des propositions collectives,…
…vous n'en avez tenu aucun compte, pas plus que des recommandations de la commission Guéna.
Un consensus aurait pu être trouvé mais vous échafaudez en Haute-Garonne, comme dans d'autres départements, une construction électorale complètement décalée par rapport aux réalités territoriales, sociologiques et démographiques. Là encore, vous dépecez des circonscriptions en toute discrétion pour en créer de nouvelles, dont la seule cohérence est de favoriser vos amis politiques.
En outre, à l'Assemblée nationale, il ne vous a pas échappé que les femmes ne sont pas si nombreuses. Quand nous examinons votre ouvrage en détail, il apparaît nettement que ce sont leurs circonscriptions qui pâtiront le plus de vos attentions.
Ce ne sont pas Mmes Marie-Jo Zimmermann et Valérie Boyer qui me contrediront.
En écartant ainsi ces députés jugés encombrants,…
Vous savez très bien que c'est cela, mon cher collègue.
…qui ont pourtant – faut-il le rappeler ? – été élus par leurs concitoyens, vous jetez ces mêmes concitoyens dans le doute et l'incompréhension, qui les détournent des urnes et de la politique au sens le plus noble du terme. C'est une très lourde responsabilité que vous prenez là. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, chers collègues, le texte que nous examinons aujourd'hui apparaît certainement, aux yeux d'un grand nombre de nos concitoyens, comme purement technique, totalement déconnecté de leurs urgences et de leurs difficultés du présent, voire autocentré sur nos nombrils de parlementaires. Il convient pourtant d'essayer de les éclairer.
Comme le Conseil Constitutionnel l'a justement rappelé, le peuple français n'a pas un représentant – le Président de la République –, mais des représentants : le Président et les parlementaires. Dès lors, le mode d'élection de ces derniers détermine directement la manière dont est prise en compte la voix de chaque citoyen de ce pays, qui devrait respecter son droit à l'égalité où qu'il habite.
De ce point de vue, rectifier le découpage des circonscriptions législatives était indispensable, nous en convenons tous. Il aurait été en effet injustifiable d'organiser en 2012 une élection basée sur le recensement datant de 1982. Cet exercice n'est du reste pas simple, nous en convenons également. Le découpage parfait n'existe certainement pas. Cependant, l'observation stricte des règles fixées par le législateur aurait pu, aurait dû, conduire à un résultat incontestable, gage d'une légitimité sans faille pour les prochaines législatures.
Las ! La tentation d'user des ciseaux électoraux afin de faciliter la conservation future du pouvoir était sans doute trop forte, monsieur le secrétaire d'État, vous qui êtes en même temps le spécialiste des questions électorales de l'UMP. C'est sans doute pourquoi, dans de nombreux départements, tels le Pas-de-Calais, la Moselle, Paris et tant d'autres, les principes constitutionnels de découpage, notamment le respect du critère démographique, ont été bien mal appliqués.
C'est également la raison pour laquelle, dans d'autres départements, comme le Nord, au lieu de chercher à réduire les écarts de population par rapport à la moyenne ou à respecter l'unité des territoires et des bassins de vie, c'est plus la volonté de favoriser les uns au détriment des autres qui a dominé. Cela est d'autant plus regrettable que vous disposiez, après la présentation de votre premier projet, d'une seconde chance d'assurer la légitimité de ce découpage. Il suffisait, comme cela se pratique d'ailleurs dans de nombreuses démocraties, que le Gouvernement se rallie sans exception à l'avis rendu par la commission prévue à l'article 25 de la Constitution, dite commission Guéna.
Il n'en a malheureusement rien été. Vous avez préféré faire un tri, ne retenant que quelques propositions, et pas les plus significatives du point de vue du rapport gauche-droite. Vous avez d'ailleurs été aidé en ce sens par la commission elle-même, dont je ne m'explique toujours pas la décision de créer une nuance, juridiquement indéfinie, entre propositions et suggestions, autrement que par la volonté de faciliter ensuite la décision de passer les secondes en pertes et profits.
Le projet de découpage tel qu'il nous est proposé, lorsqu'on le compare aux suggestions formulées par la commission et non retenues, soulève trois critiques principales, de nature démographique, démocratique et territoriale. Le cas de l'arrondissement d'Avesnes, territoire dont je suis élu, est symbolique de cette situation. Il me servira à illustrer ces trois points.
Du point de vue démographique, d'abord, le découpage de l'arrondissement d'Avesnes n'est pas, contrairement à la suggestion de la commission, la solution présentant les écarts les plus faibles par rapport à la moyenne départementale. Au contraire, elle crée un monstre, la future troisième circonscription du Nord, totalisant plus de 143 000 habitants, la plus importante du département, la seconde de France. Autant dire que l'égalité républicaine est mise à mal face à certains députés qui, ailleurs en métropole, seront élus par moitié moins de citoyens, comme en Lozère ou dans le Cantal. Et encore, je veux louer ici la sagacité du Conseil constitutionnel qui a fait droit à la demande du groupe socialiste de mettre fin à un minimum de deux députés par département.
Le biais démocratique découle d'ailleurs de ces déséquilibres démographiques. Il faut préciser que les cantons de Maubeuge et de Trélon, qui formeront le gros de cette troisième circonscription, regroupent en même temps les populations présentant des indicateurs sociaux, économiques et sanitaires parmi les plus inquiétants de France. Comment, dès lors, ne pas relever la part de cynisme présente dans la proposition de faire de cette population, déjà fortement défavorisée, l'une des moins équitablement représentées démocratiquement ? Un Mendois ou un Aurillaçois vaudra deux Maubeugeois !
Quant aux territoires et aux bassins de vie, ils sont les plus grands perdants de ce projet. Certes, constitutionnellement, le député n'est pas l'élu d'un territoire, mais celui de la nation tout entière. Cependant, cette théorie se trouve totalement battue en brèche par la réalité de l'exercice du mandat de député. Je ne connais aucun collègue sur aucun banc de cette assemblée qui me contredira sur ce point. Le député est bel et bien, dans les faits, l'élu d'un territoire, et il doit être identifié comme tel par les citoyens et les acteurs de sa circonscription. D'ailleurs, le choix de maintenir des unités territoriales départementalisées pour les élections législatives montre bien que cet aspect existe et qu'il possède même une importance centrale.
Pourtant, alors que l'arrondissement d'Avesnes se découpe naturellement en deux territoires distincts aux populations comparables – le Val de Sambre au nord, espace urbanisé à vocation industrielle et tertiaire le long de la Sambre, et un territoire plus rural et à vocation artisanale au sud, regroupant l'essentiel du territoire du parc naturel régional de l'Avesnois –, l'arrêté préfère à cette répartition nord-sud une répartition est-ouest dénuée de toute logique territoriale ou historique.
Quant à la ville d'Avesnes-sur-Helpe, qui compte 5 051 habitants, elle se retrouve écartelée entre deux circonscriptions. Certes, cela ne contrevient pas fondamentalement au principe posé par le Conseil constitutionnel de non-découpage des communes de moins de 5 000 habitants. Cependant, cela constitue une partition nouvelle qui contrevient à l'objectif affiché de réduction du nombre de petites communes écartelées.
Face à ce saucissonnage, nous ne pouvons que nourrir les pires craintes vis-à-vis de l'autre projet que vous conduisez, monsieur le secrétaire d'État, celui de la réforme territoriale et de la refonte de la carte intercommunale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il semblerait que le Gouvernement cultive un rapport ambigu avec les règles démocratiques en général et la liberté accordée à Paris et sa région en particulier.
Après le travail du dimanche, imposé sans concertation dans la capitale, après l'absence de dialogue réel autour du Grand Paris – vous ne le contesterez pas, monsieur Raoult –,…
…voici que le pouvoir central tente de compenser ses lacunes électorales parisiennes par l'utilisation peu scrupuleuse de ciseaux bien dirigés.
Ce manque de considération pour les élus de l'opposition dans le redécoupage ne concerne pas que Paris. Mes collègues du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ont déjà eu l'occasion de dénoncer à maintes reprises les exactions commises sur les nouvelles cartes électorales des départements du Tarn, de l'Hérault, de la Somme ou encore de la Seine-Maritime. Vos manipulations grossières font jaser les rédactions parisiennes, celles de la presse quotidienne régionale mais aussi de la presse internationale. Le Soir, en Belgique, parle de « chiquenaude d'avance », Mediapart de « jeu de bonneteau gigantesque ». Jamais, en tout cas, on n'évoque la « transparence », « l'égalité de traitement » ou encore une « commission indépendante », ces termes si nobles dont vous avez usé et abusé mardi soir.
Vous avez également invité les députés à ne pas « discuter du tracé de telle ou telle circonscription surtout s'il s'agit de leur propre secteur d'élection ». Les élus, de droite comme de gauche me semble-t-il, n'aiment rien moins qu'être invités au silence. Cela s'est vérifié en commission des lois la semaine dernière, cela se vérifie encore, depuis trois jours maintenant, dans cet hémicycle. Vous avez sans doute raison quant à la nécessité pour les députés d'oublier la circonscription dont ils sont l'élu. Nous ne sommes pas, j'en conviens, propriétaires de nos circonscriptions, bien que le travail de terrain qu'il effectue régulièrement pendant des années – serrer des mains, s'occuper des gens, tenir sa permanence – compte dans la vie d'un élu. Vous me voyez donc étonnée de l'attitude que vous avez adoptée ces derniers mois en souhaitant recevoir nombre de représentants de la nation pour que certains puissent négocier les contours de leur future terre d'élection.
Pour ma part, je n'aborderai pas les contours des circonscriptions de l'Est parisien où je suis élue, me bornant à des considérations d'ensemble concernant le département-capitale.
Je regrette que la nécessité d'obéir à de grands principes d'équité n'ait été appliquée que lorsque cela vous arrangeait. Je reprends ici les mots de Frédéric Salmon, l'auteur, abondamment cité ces derniers jours, de l'Atlas électoral de la France, pour illustrer mon propos. M. Salmon, pourtant loin d'être systématiquement opposé à vos propositions, débute son étude du cas parisien par les mots suivants : « Ce qu'on n'aurait osé imaginé, il l'a fait. Il a fait la circonscription à laquelle personne n'osait croire à Paris rive gauche, celle pour sauver le 5e arrondissement, dont le total des 5e, 6e et 7e était trop élevé en population et qu'il a dû évider par le sud… Il l'a fait rive droite, ce que personne ne croyait plus qu'aucun ministre, en pays civilisé, en vieille démocratie, oserait faire avec le 17e arrondissement. » Il y avait sans doute quelques soldats de l'UMP parisienne – ils ne sont pas présents aujourd'hui – à sauver. Les voilà soulagés !
Le bilan est éloquent : sur trois disparitions de circonscriptions, deux concernent l'opposition et une seule la majorité.
Ce n'est pas vrai, vous dites n'importe quoi !
C'est absolument exact.
Votre travail d'orfèvre aboutit à la création de circonscriptions taillées sur mesure pour de dignes représentants de la mission de reprise en main de la capitale.
Vous aurez beau jeu, comme vous l'avez fait si souvent depuis mardi soir, de rappeler les surprises qu'ont constituées les résultats aux élections de 1986 et 1997. Il est vrai que « l'opinion se montre toujours, même au milieu des factions qui l'oppriment », comme l'avait déclaré Mme de Staël dans ses Considérations sur la Révolution française. Doit-on pour autant opprimer les voix discordantes en s'en remettant au retour de bâton inévitable de l'opinion ? Mme de Staël ne vous le conseillerait pas, monsieur le secrétaire d'État, elle qui souhaitait au contraire souligner que « le musellement de l'opposition constitue un pari risqué sur l'avenir pour le pouvoir en place ». Cette constatation était valable dans une monarchie, elle le reste dans notre République, surtout quand cette République cultive quelques dérives monarchiques en matière de fabrication autoritaire de la décision, parfois de népotisme ou d'accents décadents.
Ce découpage – je parle de toute la France – s'il en arrivait à être validé, constituerait donc une erreur, dans la lignée de celles accomplies lors de la réforme constitutionnelle et de la réforme du règlement de l'Assemblée nationale : nous l'avons malheureusement constaté hier après-midi.
L'opposition s'opposera donc, dans cet hémicycle et lors de recours éventuels, à cette manifestation évidente de mépris des règles démocratiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le Conseil constitutionnel impose une nouvelle répartition des sièges et des limitations des circonscriptions pour l'élection des députés, devenues nécessaires, puisque figées depuis 1986. Il n'est donc aucunement question de remettre en cause le passage de six à cinq circonscriptions dans le département de la Somme, sa population ayant stagné depuis la dernière révision, sans suivre la progression nationale.
Dans ce département, lors des élections législatives de 2007, 107 voix seulement, soit moins de une pour mille séparaient la droite de la gauche au second tour avec cependant déjà comme résultat l'élection de quatre députés de droite sur six. Dans l'hypothèse où l'ordonnance serait ratifiée en l'état, la projection de ces mêmes résultats de 2007 mènerait à l'élection de quatre députés de droite sur cinq, avec – je le rappelle – un nombre de voix obtenu quasiment identique, et ce dans un département où le conseil général ainsi que les grandes villes comme Amiens, Abbeville et Péronne sont détenus par la gauche.
L'anomalie démocratique préexistante depuis 1986 est donc amplifiée par la création d'un bouclier électoral obtenu par un véritable tripatouillage, choquant au point que tous les médias nationaux se sont emparés du dossier. Selon l'avis même de la commission Guéna, « le découpage proposé fait apparaître une géographie d'une grande complexité ». À lui seul, le choix de supprimer une circonscription de taille moyenne – je ne dirai pas la mienne, mais celle dont je suis l'élu – alors que d'autres étaient bien moins peuplées, ce choix peut déjà porter à contestation.
Toute la population, tous les analystes ont perçu que le but ultime de l'opération consistait à figer à tout jamais la situation actuelle et à réduire au maximum le risque d'alternance politique en confortant les cinq sortants : quatre de droite et un de gauche.
Le travail de dentelle du dépeceur a abouti à la création d'une circonscription atypique, la première, qui englobe la moitié d'Amiens, première ville du département, et Abbeville, deuxième ville, dans sa totalité. La majeure partie des populations du département situées en zone urbaine sensible se retrouverait dans cette première circonscription, qui concentrerait également 70 % du parc de logements sociaux et les populations les plus touchées par les problèmes d'emploi et dont les conditions sociales sont les plus difficiles de la Somme. Goodyear, Valeo, Vénilia, Sièges de France, entreprises disparues ou en grande difficulté, sont connues de tous.
Cette circonscription, qualifiée de pur chef-d'oeuvre par un hebdomadaire du mercredi, est aussi un non-sens, une aberration géographique, historique, sociologique, institutionnelle, culturelle, économique, administrative territoriale et politique. La ville d'Abbeville, chef-lieu d'arrondissement au coeur du pays des trois vallées et d'un futur parc naturel régional, capitale de la Picardie maritime, porte d'entrée de la Baie de Somme, l'une des plus belles baies du monde, se retrouverait ainsi coupée de tous ces territoires, dans une situation de dépendance et quasiment annexée par la capitale amiénoise. Le futur député serait ainsi celui des deux plus grandes villes du département, situées à 45 kilomètres l'une de l'autre, comptant respectivement 130 000 et 25 000 habitants. C'est une incohérence totale.
Abbeville et sa région ont déjà perdu la Banque de France, le tribunal de grande instance, et des menaces pèsent sur l'hôpital et la sous-préfecture. La population n'admet pas ce charcutage qui aboutirait à la suppression de sa circonscription et à la disparition de son député. Il n'est pas incongru de dire qu'elle pense que c'est encore un peu de service public qui disparaît dans la continuité des attaques subies depuis quelques années. Aussi a-t-elle réagi, en se mobilisant, en signant en force une pétition dénonçant le projet. Près d'un millier de signatures ont déjà été collectées. De même, de nombreux conseils municipaux ont voté, très souvent à l'unanimité, et quelle que soit leur majorité politique, une motion demandant le retrait de la proposition.
La population unanime est scandalisée par ce tripatouillage partisan, ce bidouillage dont elle perçoit bien l'objectif. Il y a trop de cohérence dans l'acharnement destructeur contre la deuxième ville du département, pour qu'elle ne s'interroge pas sur le point de savoir qui en veut à ce point à Abbeville.
Et que dire de la future quatrième circonscription aux formes si étranges, si particulières, aux frontières acrobatiques, sans cohérence, avec une continuité territoriale limite, qui prend en tenaille trois autres circonscriptions et dont le seul objet est de conforter le député actuel par l'adjonction de trois cantons de droite ?
Même constat pour la troisième future circonscription qui s'agrandit de deux cantons de droite supplémentaires. Non, la géographie très complexe du redécoupage prévu dans le projet d'ordonnance n'est en rien justifiée par la recherche de l'équilibre géographique entre les cinq circonscriptions du département. Les résultats électoraux des cantons en cause ne laissent pas de doute sur la motivation de ces choix géographiques incohérents.
Monsieur le secrétaire d'État, seuls des objectifs politiques évidents et de petits arrangements entre amis ont guidé les ciseaux des auteurs de ce découpage, que tous s'accordent à dénommer charcutage, ou même tripatouillage, et à qualifier de partisan et de partial. La démocratie politique n'en sort pas grandie, et ne soyons pas surpris si l'abstention progresse encore en réponse à ce qui est une atteinte au suffrage universel et à ce qui ternit encore un peu plus l'image de la classe politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Discussion générale
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures dix, est reprise à onze heures vingt.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je vais évoquer le département des Deux-Sèvres qui, dans le cadre du projet de redécoupage, passera de quatre à trois circonscriptions pour respecter les dispositions du projet de loi organique.
Le débat d'aujourd'hui, il est vrai, ne doit pas porter sur le tracé des circonscriptions. Reconnaissez toutefois, monsieur Marleix, que c'est le seul moment où l'on peut faire part de ses interrogations dès lors qu'elles n'ont pas été prises en compte ni par votre secrétariat d'État, ni par la commission, ni par le Conseil d'état, et que la solution finale ignore complètement les propositions faites à l'occasion de la consultation menée par le préfet auprès des élus du département en ce début d'année.
Lors du redécoupage de 1986, le département des Deux-Sèvres était passé de trois à quatre circonscriptions. Une circonscription du bocage dans le nord autour des villes de Bressuire et de Thouars ; une circonscription de Gâtine dans le centre autour de la ville de Parthenay ; une circonscription autour de Niort, chef-lieu du département, et, enfin, une circonscription dans le sud autour des villes de Saint-Maixent et de Melle, bien connue de toutes les télévisions, puisqu'il s'agit de l'ex-circonscription de Mme Royal.
Le découpage de 1986, qui respectait au mieux la géographie du département et l'équilibre des territoires, n'a pas pénalisé la gauche, monsieur Le Roux, puisque Mme Royal a été élue en 1988 dans le cadre de ce redécoupage et qu'à ce jour le département des Deux-Sèvres est représenté à l'Assemblée nationale par trois députés socialistes et un député UMP.
Ramener aujourd'hui le département de quatre à trois circonscriptions pouvait apparaître chose facile car, pour éviter de mauvaises solutions, il suffisait de revenir à la situation d'avant 1986 en ajustant à la marge le déplacement de certains cantons pour respecter au plus près le nombre minimum d'habitants par circonscription.
Il n'en a rien été puisque la proposition de redécoupage épargne intégralement l'ex-circonscription de Mme Royal. À partir de là, il vous a fallu recomposer les autres circonscriptions et aboutir par voie de conséquence à des solutions inexplicables. La circonscription de Gâtine, au milieu du département, seule circonscription UMP des Deux-Sèvres, se trouve ainsi éclatée sur les trois circonscriptions socialistes : quatre cantons sont rattachés à celle de Niort, trois cantons rejoignent celle du nord du département et trois cantons viennent compléter l'ex-circonscription de Mme Royal.
Qui a dit dans cet hémicycle, monsieur Le Roux, que le redécoupage était fait à sens unique et défavorable à la gauche ?
Ce n'est pas le cas dans le département des Deux-Sèvres. D'ailleurs, le journal Libération, dans son édition du 13 octobre, s'étonnait du silence de Mme Royal sur le redécoupage des Deux-Sèvres. Chacun comprendra facilement pourquoi.
Le département, tiraillé dans le passé entre le nord et le sud, se voit désormais couper de l'est à l'ouest, ce qui provoque de nombreuses incohérences mal comprises des habitants, des élus, des territoires et, parfois même, des militants et responsables socialistes.
Incohérence historique : l'histoire politique du département, quels que soient les précédents redécoupages avant et après 1986, a toujours rattaché les cantons de Gâtine à la circonscription de Parthenay, troisième ville du département, et non à celle de Niort.
Incohérence géographique : comment expliquer que des cantons intégrés dans le schéma de cohérence territoriale du Niortais soient rattachés à la circonscription de Parthenay, distante de près de quatre-vingts kilomètres, alors qu'ils sont proches de Niort, chef-lieu du département ?
Incohérence par rapport aux structures administratives. D'une part, le pays de Gâtine – 104 communes, 10 cantons, 11 communautés de communes –, correspondant à l'actuelle circonscription du centre du département, a derrière lui toute une histoire de solidarité depuis plus de trente ans puisqu'il a été l'un des premiers pays créés en France en 1976. Répartir ses dix cantons sur les trois circonscriptions peut apparaître surprenant et aberrant.
D'autre part, par voie de conséquence, l'arrondissement rural du sous-préfet de Parthenay et de la Gâtine voit également ses huit cantons éclatés sur les trois circonscriptions,
Incohérence par rapport à l'organisation des EPCI : deux cantons du Niortais, dix-neuf communes, se trouvent rattachés à la circonscription de Parthenay – plus de quatre-vingt kilomètres – alors qu'ils sont membres de la communauté d'agglomération de Niort.
Deux cantons d'une communauté de communes, très proches de Niort, se trouvent répartis sur deux circonscriptions – le canton de Prahecq sur le Niortais et celui de Beauvoir sur la Gâtine –, alors qu'ils ont en projet un schéma de cohérence territoriale avec les trente communes de la communauté d'agglomération de Niort.
Votre proposition ne tient aucun compte des relations humaines qui se sont tissées depuis plusieurs décennies à travers la vie culturelle, associative, sociale et économique. Comment, en effet, expliquer que des cantons ruraux qui se trouvent au coeur de la Gâtine, proches du bassin d'emploi de Parthenay, puissent être rattachés au bassin de vie urbain du Niortais alors que des cantons du Marais poitevin, à la limite de la périphérie de Niort, se trouvent insérés dans la Gâtine ?
On peut donc regretter que la proposition de redécoupage pour les Deux-Sèvres n'ait pas pris en compte les recommandations adressées en son temps par une circulaire de votre secrétariat d'État aux préfets. Il était en effet indiqué que les propositions recueillies au cours de la consultation devaient respecter la cohérence historique, géographique, économique, administrative et humaine des territoires.
Cette analyse, monsieur le secrétaire d'État, n'est pas seulement celle du député de Gâtine. Elle est partagée par de nombreux acteurs des Deux-Sèvres et du territoire de Gâtine. Elle est d'abord partagée par le pays de Gâtine, qui regroupe 104 communes et 11 communautés de communes. Lors de son conseil d'administration du 7 septembre dernier, les administrateurs du syndicat mixte du pays ont débattu de cette question très sensible et ont rédigé une motion exprimant une position très majoritaire, au-delà des sensibilités politiques de chacun. Cette motion exprime le souhait collectif que soit conservé un rapport cohérent entre les territoires de projets, pays et agglomérations, et les circonscriptions électorales de leurs représentants.
Cette analyse est partagée par un collectif qui s'est mis en place au début du mois de septembre, lequel rassemble des gens de sensibilité différente, engagés dans des responsabilités très diverses, associatives, culturelles, sociales ou économiques. La proposition de redécoupage ayant été connue au début des vacances d'été, on aurait pu croire qu'il était difficile de mobiliser : il n'en a rien été puisque, dans les quinze premiers jours de septembre, plus de 6 000 personnes ont apporté leur total soutien au collectif en demandant que les cantons des Deux-Sèvres restent rattachés à leur bassin de vie naturel. Plus de 600 personnes, dont près de cent élus avec leur écharpe, se sont retrouvées, à l'appel du collectif, lors du rassemblement du 25 septembre, pour rappeler que le redécoupage devait respecter l'histoire, la géographie, l'identité, la culture et la cohérence des territoires.
Cette analyse est également partagée par la grande majorité des maires et des 1 523 conseillers municipaux des 104 communes du pays de Gâtine qui ont délibéré, souvent à l'unanimité, dans leurs conseils municipaux pour dénoncer le redécoupage proposé.
Elle est également partagée par le président de l'association des maires des Deux-Sèvres, qui a regretté que l'avis des maires n'ait pas été officiellement sollicité dans la mesure où tout un territoire du département se trouve concerné par ce redécoupage.
Elle est partagée enfin par des militants et certains responsables socialistes des Deux-Sèvres et du pays de Gâtine. J'en veux pour preuve une lettre datant du 21 septembre adressée aux maires et adjoints des 104 communes du pays de Gâtine par plusieurs conseillers généraux et régionaux socialistes : « Depuis maintenant quelques mois, il est incontesté que le découpage législatif alimente le débat politique en Deux-Sèvres. En effet, au-delà du simple fait que ce découpage est incohérent, nul n'est dupe pour constater que les Deux-Sèvres ont été la victime collatérale des arbitrages nationaux. Notre département s'est trouvé bouleversé. Aussi, le découpage proposé n'a pas de sens pour le bassin de vie du pays de Gâtine ».
Le département, tiraillé dans le passé entre le nord et le sud, se voit désormais couper de l'est à l'ouest, ce qui provoque de nombreuses incohérences mal comprises des habitants, des élus, des territoires et, parfois même, des militants et responsables socialistes.
Incohérence historique : l'histoire politique du département, quels que soient les précédents redécoupages avant et après 1986, a toujours rattaché les cantons de Gâtine à la circonscription de Parthenay, troisième ville du département, et non à celle de Niort.
Incohérence géographique : comment expliquer que des cantons intégrés dans le schéma de cohérence territoriale du Niortais soient rattachés à la circonscription de Parthenay, distante de près de quatre-vingt kilomètres, alors qu'ils sont proches de Niort, chef-lieu du département ?
Incohérence par rapport aux structures administratives. D'une part, le pays de Gâtine – 104 communes, 10 cantons, 11 communautés de communes –, correspondant à l'actuelle circonscription du centre du département, a derrière lui toute une histoire de solidarité depuis plus de trente ans puisqu'il a été l'un des premiers pays créés en France en 1976. Répartir ses dix cantons sur les trois circonscriptions peut apparaître surprenant et aberrant.
D'autre part, par voie de conséquence, l'arrondissement rural du sous-préfet de Parthenay et de la Gâtine voit également ses huit cantons éclatés sur les trois circonscriptions,
Incohérence par rapport à l'organisation des EPCI : deux cantons du Niortais, dix-neuf communes, se trouvent rattachés à la circonscription de Parthenay – plus de quatre-vingt kilomètres – alors qu'ils sont membres de la communauté d'agglomération de Niort.
Deux cantons d'une communauté de communes, très proches de Niort, se trouvent répartis sur deux circonscriptions – le canton de Prahecq sur le Niortais et celui de Beauvoir sur la Gâtine –, alors qu'ils ont en projet un schéma de cohérence territoriale avec les trente communes de la communauté d'agglomération de Niort.
Votre proposition ne tient aucun compte des relations humaines qui se sont tissées depuis plusieurs décennies à travers la vie culturelle, associative, sociale et économique. Comment, en effet, expliquer que des cantons ruraux qui se trouvent au coeur de la Gâtine, proches du bassin d'emploi de Parthenay, puissent être rattachés au bassin de vie urbain du Niortais alors que des cantons du Marais poitevin, à la limite de la périphérie de Niort, se trouvent insérés dans la Gâtine ?
On peut donc regretter que la proposition de redécoupage pour les Deux-Sèvres n'ait pas pris en compte les recommandations adressées en son temps par une circulaire de votre secrétariat d'État aux préfets. Il était en effet indiqué que les propositions recueillies au cours de la consultation devaient respecter la cohérence historique, géographique, économique, administrative et humaine des territoires.
Cette analyse, monsieur le secrétaire d'État, n'est pas seulement celle du député de Gâtine. Elle est partagée par de nombreux acteurs des Deux-Sèvres et du territoire de Gâtine. Elle est d'abord partagée par le pays de Gâtine, qui regroupe 104 communes et 11 communautés de communes. Lors de son conseil d'administration du 7 septembre dernier, les administrateurs du syndicat mixte du pays ont débattu de cette question très sensible et ont rédigé une motion exprimant une position très majoritaire, au-delà des sensibilités politiques de chacun. Cette motion exprime le souhait collectif que soit conservé un rapport cohérent entre les territoires de projets, pays et agglomérations, et les circonscriptions électorales de leurs représentants.
Cette analyse est partagée par un collectif qui s'est mis en place au début du mois de septembre, lequel rassemble des gens de sensibilité différente, engagés dans des responsabilités très diverses, associatives, culturelles, sociales ou économiques. La proposition de redécoupage ayant été connue au début des vacances d'été, on aurait pu croire qu'il était difficile de mobiliser : il n'en a rien été puisque, dans les quinze premiers jours de septembre, plus de 6 000 personnes ont apporté leur total soutien au collectif en demandant que les cantons des Deux-Sèvres restent rattachés à leur bassin de vie naturel. Plus de 600 personnes, dont près de cent élus avec leur écharpe, se sont retrouvées, à l'appel du collectif, lors du rassemblement du 25 septembre, pour rappeler que le redécoupage devait respecter l'histoire, la géographie, l'identité, la culture et la cohérence des territoires.
Cette analyse est également partagée par la grande majorité des maires et des 1 523 conseillers municipaux des 104 communes du pays de Gâtine qui ont délibéré, souvent à l'unanimité, dans leurs conseils municipaux pour dénoncer le redécoupage proposé.
Elle est également partagée par le président de l'association des maires des Deux-Sèvres, qui a regretté que l'avis des maires n'ait pas été officiellement sollicité dans la mesure où tout un territoire du département se trouve concerné par ce redécoupage.
Elle est partagée enfin par des militants et certains responsables socialistes des Deux-Sèvres et du pays de Gâtine. J'en veux pour preuve une lettre datant du 21 septembre adressée aux maires et adjoints des 104 communes du pays de Gâtine par plusieurs conseillers généraux et régionaux socialistes : « Depuis maintenant quelques mois, il est incontesté que le découpage législatif alimente le débat politique en Deux-Sèvres. En effet, au-delà du simple fait que ce découpage est incohérent, nul n'est dupe pour constater que les Deux-Sèvres ont été la victime collatérale des arbitrages nationaux. Notre département s'est trouvé bouleversé. Aussi, le découpage proposé n'a pas de sens pour le bassin de vie du pays de Gâtine ».
Je suis heureux que vous nous rejoigniez pour critiquer le Gouvernement ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Même ma collègue Delphine Batho – ex-circonscription de Mme Royal – partage cette analyse. Dans un quotidien local, elle a déclaré, le 14 octobre, que le découpage des Deux-Sèvres ne respectait pas les identités territoriales.
Monsieur le secrétaire d'État, compte tenu de ces différentes prises de position, il aurait été préférable de prendre en compte en priorité des logiques respectueuses de la géographie et de l'histoire avant toute autre considération.
C'était chose facile pour le département des Deux-Sèvres. Il convenait seulement de rattacher les cantons membres de la communauté d'agglomération de Niort dans la circonscription du chef-lieu du département et de laisser les cantons ruraux de la Gâtine dans la circonscription de Parthenay. Ce n'était pas une mauvaise solution car elle ne modifiait en rien les équilibres démographiques.
Acteur de la vie du département depuis près de vingt ans en qualité de député de Gâtine et près de dix ans en qualité de président du conseil général, connaissant ainsi tout particulièrement les relations qui se sont nouées au fil du temps entre les habitants et leurs différentes instances de représentation, politiques, administratives culturelles ou économiques, j'ai souhaité au cours de cette discussion vous faire partager mes interrogations suite à ce redécoupage qui n'est pas compris des territoires des Deux-Sèvres.
Porte-parole dans cet hémicycle de toutes celles et tous ceux qui se sont exprimés sur ce dossier ces dernières semaines, vous comprendrez donc, monsieur le secrétaire d'État, qu'il me soit difficile de cautionner le projet d'ordonnance qui fige, pour le département des Deux-Sèvres, un tel redécoupage.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le redécoupage électoral est un exercice nécessaire puisqu'il permet, en principe, de garantir l'égalité de tous devant le suffrage universel. C'est en tout cas ce qui le justifie.
Nous commençons à le savoir : vous êtes le dix-septième intervenant socialiste !
Merci, monsieur Raoult, je vois que vous prêtez une attention toute particulière à nos propos.
Il est rare cependant que ce redécoupage ne soit pas mis à profit par les gouvernements. À cet égard, il est intéressant d'observer qu'il a le plus souvent été pratiqué par des majorités de droite : en 1958, en 1986 et aujourd'hui en 2009.
Cela ne veut pas dire que la gauche aurait été, en y procédant, plus juste que la droite. Cela veut simplement dire qu'elle a eu le mérite de résister à la tentation de ne pas l'être.
Je ne vous accuse pas, monsieur le secrétaire d'État, d'avoir voulu défavoriser l'opposition ; je suggère simplement que vous avez voulu favoriser la majorité, ce qui, vous en conviendrez, revient au même. L'UMP est, en effet, le seul parti qui tire son épingle du jeu.
Il est regrettable que notre République ne soit pas capable, à l'instar d'autres démocraties européennes comme la Grande-Bretagne ou l'Allemagne, de procéder à un découpage incontesté et incontestable, élaboré par une commission réellement indépendante. Nous pouvons le regretter, mais la réalité est bien là : le découpage proposé ne peut pas ne pas être considéré comme présentant de très nombreux défauts sur le plan politique, sur le plan de l'équité et sur le plan de la continuité territoriale.
Comme l'ont fait les orateurs précédents, j'évoquerai plus particulièrement mon département, la Nièvre, auquel je suis tout particulièrement attaché, comme vous pouvez l'imaginer.
En faisant passer le nombre de ses députés de trois à deux, vous allez affaiblir la représentation de la ruralité qui a pourtant bien besoin d'être défendue, surtout dans le contexte actuel, marqué par la crise agricole, les fermetures en série de classes et de services publics et la réduction des moyens des collectivités locales. Nous n'étions pas trop de trois dans notre département pour nous joindre aux députés issus de zones rurales, premières victimes du redécoupage, afin de tenter de faire entendre la voix de ces départements, qui ont aussi à faire valoir un principe d'égalité des droits.
Surtout, ce découpage ne correspond ni à la réalité des territoires, ni aux souhaits des élus locaux.
Compte tenu de la configuration de notre département – près des deux tiers de la population sont concentrés le long de la Loire –, l'exercice relevait certes de la gageure. Mais on pouvait au moins espérer que le redécoupage repose sur des principes incontestables. De ce point de vue, nous ne pouvons être satisfaits.
Lorsque vous avez consulté le groupe socialiste, nous vous avons fait connaître notre opposition à la suppression d'une circonscription et nous avons précisé que si le redécoupage devait tout de même être opéré selon un axe nord-sud, nous tenions à ce que l'intégrité de l'agglomération de Nevers soit préservée. Or, contre l'avis des élus et du président de la communauté d'agglomération de Nevers, l'un de ses cantons a été retiré de la première circonscription pour être rattaché à la seconde. Cette décision n'est pas acceptable : elle va à l'encontre du bon sens, elle est contestée par tous les élus. Il importe de la reconsidérer, ne serait-ce que pour des raisons juridiques.
Ce redécoupage remet d'abord en question la cohérence administrative des circonscriptions. Il a été admis à de nombreuses reprises qu'une telle cohérence devait être préservée. Le Gouvernement lui-même n'a pas hésité à revenir sur certains éléments du découpage proposé par la commission Guéna, au motif que des arrondissements ou ensembles de communes devaient être maintenus au sein de la même circonscription.
Un tel argument aurait pu prévaloir pour ce qui concerne Nevers, dont les cantons appartiennent en totalité à la première circonscription. Toutefois, le canton de Guérigny, qui fait partie de la communauté d'agglomération, a été écarté alors que vous avez demandé que les cantons de certaines villes moyennes, éclatés entre différentes circonscriptions, puissent faire partie d'une même circonscription afin de garantir leur unité. Pourquoi cette logique n'a-t-elle pas été étendue aux communautés d'agglomération qui disposent d'importantes ressources, de compétences propres et qui font l'objet d'une intégration plus poussée ?
Le découpage retenu remet également en cause la cohérence géographique. Le nord de la circonscription n'est rattaché à l'agglomération de Nevers que par un tout petit canton, celui de Pougues, ce qui aboutit à un découpage en L, sans cohérence ni cohésion.
Enfin, vous avez admis que le caractère urbain ou rural d'une circonscription pouvait justifier une exception à la règle de la parité démographique. C'est ainsi que pour préserver la cohérence rurale des deuxième et quatrième circonscriptions de Saône-et-Loire, vous êtes allé à l'encontre de l'avis de la commission Guéna. En toute logique, on aurait pu concevoir que le principe de la cohérence urbaine soit appliqué à la Nièvre et que le canton de Guérigny soit maintenu dans la première circonscription.
Votre choix a fait l'unanimité contre lui, qu'il s'agisse des parlementaires ou des élus locaux. Il y a quinze jours, les maires réunis à l'initiative du conseiller général du canton de Guérigny ont ainsi demandé, à l'unanimité, la réintroduction du canton dans cette circonscription.
Pourquoi donc l'en avoir retiré ? Si c'est parce que c'est le canton de la Nièvre qui vote le plus à gauche, ce motif me semble difficilement recevable. Je ne suis pas certain, en effet, que cela entraîne une modification en profondeur des équilibres politiques.
Mais si vous avez voulu établir une parité démographique entre les deux circonscriptions, pourquoi l'avoir fait au prix d'un déséquilibre territorial et politique ? Il sera extrêmement difficile au député, si talentueux soit-il, de faire un travail de proximité dans un territoire représentant 80 % de la superficie départementale et près de 80 % des communes.
Au nom des habitants et des élus de la Nièvre, j'estime, au-delà de toute considération électoraliste, le redécoupage n'ayant pas d'incidence politique majeure, qu'il importerait de modifier votre ordonnance dans le sens que j'ai indiqué. Cela lèverait un malentendu, réparerait une injustice et répondrait à une véritable revendication démocratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le secrétaire d'État, votre projet de redécoupage, établi sans concertation avec les élus de l'opposition, sans souci d'impartialité et sans considération pour les logiques territoriales, renforce purement et simplement votre majorité.
Vous pourrez désormais conserver la majorité des sièges à l'Assemblée avec seulement 48,7 % des voix. Comme l'a très bien montré mon collègue Bruno Le Roux, pour que la gauche soit majoritaire en sièges, il lui faudra obtenir au minimum 51,4 % des voix.
Les inégalités démographiques devaient être réduites ; c'est loin d'être le cas, notamment dans le département du Pas-de-Calais.
Je m'attacherai à compléter les propos de Catherine Génisson et Odette Duriez pour continuer de dénoncer l'escroquerie que constitue le redécoupage dans ce département, charcuté comme beaucoup d'autres au profit des intérêts de l'actuelle majorité gouvernementale.
Le Pas-de-Calais compte actuellement plus de 1,4 million d'habitants répartis, depuis le redécoupage de 1986, dans quatorze circonscriptions : deux sont à droite, douze à gauche, bastions socialistes qu'il vous faut bien évidemment ébranler !
Le nouveau découpage aboutit à la suppression de la troisième et de la onzième circonscriptions, respectivement celle de Jean-Claude Leroy et celle d'Odette Duriez, tous deux socialistes. Dans l'ensemble, les douze circonscriptions restantes ont une base électorale renforcée – là, monsieur Marleix, ce qui sert, c'est d'avoir des connaissances et de l'expérience, mieux vaut ne pas en être simplement à son premier mandat, et je suis modérée dans mes propos.
La première circonscription fait exception. Elle qui reposait sur un équilibre territorial à la fois urbain et rural, perd toute cohérence territoriale : le redécoupage la prive, au profit de la deuxième circonscription, de son attache arrageoise – vingt-sept de ses trente-trois bureaux de vote se situaient à Arras, ce qui m'avait conduite à installer ma permanence parlementaire dans les quartiers populaires de la ville. J'en profite pour constater que la cohérence urbaine n'a pas toujours été respectée dans d'autres départements.
La circonscription est totalement remaniée : elle devient entièrement rurale et s'étend sur un tiers du département du Pas-de-Calais, atteignant la taille d'un petit département français. De huit cantons, 161 communes et 113 000 habitants, selon le découpage Pasqua qui la destinait déjà à la droite, elle passe à onze cantons : trois de plus, 295 communes : 134 supplémentaires, ce qui en fait l'une des plus grandes circonscriptions de France, et 132 655 habitants. Elle n'a plus aucune unité territoriale. Avec des cantons exclusivement ruraux, elle ne compte plus de ville centre et les chefs-lieux vont de 839 à 5 368 habitants. Situés en totalité dans l'arrondissement d'Arras, ses cantons sont sous l'influence de multiples aires urbaines – Douai, Péronne et Amiens, Saint Pol-sur-Ternoise – mais pas de la principale, Arras.
La situation est totalement ingérable, que l'élu soit de droite ou de gauche : avec près de 300 communes, il sera impossible au député de rencontrer l'ensemble des habitants de la circonscription. Le travail de terrain ne pourra qu'être bâclé. Le rôle du député en tant qu'élu de proximité, que vous vous plaisiez à évoquer, monsieur le secrétaire d'État, n'a ainsi plus aucun sens.
Ce redécoupage est par conséquent irrespectueux des citoyens qui, en votant, ont fait confiance à une personne, laquelle, désormais, sera dans l'incapacité de défendre son action sur l'ensemble du territoire qui lui est confié.
Dans le Pas-de-Calais, non seulement deux circonscriptions socialistes sont supprimées – la troisième et la onzième – mais deux autres sont fragilisées au profit de la droite : la première et la septième.
Monsieur le secrétaire d'État, demain, il nous faudra expliquer ce redécoupage à nos concitoyens. Évitez donc les manoeuvres politiques et partisanes qui priveraient notre population de la représentation nationale qu'elle mérite. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez raison !
(M. Maurice Leroy remplace M. Tony Dreyfus au fauteuil de la présidence.)
Monsieur le secrétaire d'État, sans doute avez-vous vu le film Bienvenue chez les Ch'tis, comme 20 millions de Français. Mais le « Nooord », comme disait avec beaucoup de talent Michel Galabru, ce ne sont pas seulement les Ch'tis, ce sont aussi, plus au nord, les Flamands et les Dunkerquois.
Cette partie du département compte quatre circonscriptions – deux flamandes, deux du littoral – représentées par Françoise Hostalier, Jean-Pierre Decool, Michel Delebarre et moi-même. Ici, il s'est agi pour vous, non pas d'exploser, à la façon d'un puzzle, une circonscription de gauche mais, plus finement, de fusionner par un mouvement tectonique deux circonscriptions de gauche pour n'en faire plus qu'une.
Le département du Nord a d'ailleurs perdu trois circonscriptions, qui sont trois circonscriptions de gauche.
Le « Nooord », comme dit Galabru, où il fait très froid, « moins dix, moins vingt, moins trente », et où l'on peut parfois amputer. Monsieur le ministre, mon titre de médecine générale me permet peut-être de le dire : vous êtes un chirurgien assez particulier parce que vous avez l'habitude d'amputer uniquement à gauche ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Cohabiter avec Michel Delebarre est souvent agréable. Vous qui êtes en charge, au Gouvernement, de l'aménagement du territoire, si vous venez dans le Dunkerquois, vous verrez que l'aménagement du territoire s'y passe plutôt bien. Mais avouez qu'une chaise pour deux n'est pas ce qu'il y a de plus confortable !
Certains ont dû vous parler de charcutage. En l'occurrence, on est ici davantage dans le domaine du traiteur. Nous avons une spécialité, dans le Dunkerquois, qui s'appelle le Beulte Kaze, une espèce de fromage de tête. Là, il s'est agi de resserrer deux circonscriptions de gauche.
Il y a un autre point sur lequel je souhaite intervenir. Le groupe auquel j'ai l'honneur d'appartenir s'appelle le groupe socialiste, radical et citoyen. J'en suis fier. Les socialistes sont au pluriel – vous essayez de faire en sorte qu'il y en ait un petit peu moins –, les radicaux également, mais il n'y a qu'un seul représentant du Mouvement républicain et citoyen de Jean-Pierre Chevènement, moi-même.
Des noms comme Léo Hamon, Jean Charbonnel, le discours de la nouvelle société de Jacques Chaban-Delmas, écrit par Jacques Delors, doivent probablement vous dire quelque chose. Le gaullisme de gauche me semble être une philosophie politique qui mérite de vivre. Or, autant le général avait posé ses ailes bienveillantes sur le gaullisme de gauche pour le protéger, bien qu'il n'ait pas toujours été d'accord avec lui, autant le redécoupage projeté conduit à une forme d'éradication du gaullisme de gauche, en particulier dans le cadre de ma circonscription.
Monsieur Raoult, je n'en ai pas vu beaucoup depuis le début de cette législature ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Comme le dit Mme Génisson, le général de Gaulle appartient à la nation,…
…et les idées du gaullisme de gauche, généreuses et sociales, ne sont pas représentées tous les jours dans cet hémicycle.
Monsieur le secrétaire d'État, si vous avez vu Bienvenue chez les Ch'tis, vous avez probablement lu aussi le livre de Robert Merle Week-end à Zuydcoot, parce que le nouveau découpage est une aberration totale : vous avez réussi à recréer la poche de Dunkerque de 1940.
La nouvelle circonscription dédiée aux Flandres, et à Jean-Pierre Decool en particulier, va de la centrale de Gravelines en passant par toutes les Flandres, et remonte jusqu'au littoral, comprenant même la façade maritime de l'ancienne ville de Malo-les-Bains. C'est la poche de Dunkerque de 1940. Historiquement, c'est absolument magique !
Les hasards de la vie politique ont fait que la deuxième circonscription dont j'ai l'honneur d'être le député a été tenue pendant un bon moment par Paul Reynaud, qui a été président du conseil en 1940. Monsieur le secrétaire d'État, mon ami Michel Delebarre et moi-même n'avons nullement l'intention de déposer les armes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, pour la quatrième fois, la représentativité du peuple français sera peut-être modifiée. Trop c'est trop ! Il y a des limites à la crédibilité d'un mode de scrutin et à l'aire géographique d'une circonscription.
Vous avez réuni les parlementaires pour les informer de vos propositions, et je vous ai alors exprimé mes très vives réticences sur le redécoupage de la première circonscription des Yvelines. Vous nous aviez promis que, dans le cadre de la procédure de concertation engagée, vous réuniriez une nouvelle fois les parlementaires, en particulier ceux qui avaient émis des réserves. J'attends toujours ce rendez-vous. Par lettre en date du 10 juin dernier, je vous confirmais mon opposition à vos propositions. J'attends toujours une réponse écrite.
La révision de la carte électorale étant prévue, il était normal que soient prises en considération les évolutions démographiques dans la représentativité de nos concitoyens à l'Assemblée nationale. Mais une telle opération ne doit pas être seulement le fruit d'une analyse comptable et géographique. Encore faut-il, sur le plan géographique, tenir compte de la continuité territoriale, ce qui malheureusement n'est pas toujours le cas.
Il y a également lieu d'intégrer les évolutions sociologiques, c'est-à-dire l'aspect qualitatif d'une éventuelle modification du territoire que nous représentons. Vous avez fait fi des équilibres sociaux de nos circonscriptions, ou en tout cas de certaines d'entre elles. Vous ne vous êtes pas attaché à la mixité des populations et à leur diversité. Vous avez oublié qu'un territoire doit être une harmonie entre des hommes et des femmes amenés à vivre ensemble, et si possible à bien vivre ensemble. Votre projet, malheureusement, ne procède pas de cette éthique, de cette philosophie, de cette démarche. Vous jouez, me semble-t-il, aux apprentis sorciers. C'est la première raison pour laquelle je ne pourrai pas, en l'état, voter votre texte.
Quant à la représentation de nos concitoyens demeurant à l'étranger, je ne vous cache pas que je ne suis pas du tout favorable à la création de onze députés, même si les principaux candidats à la dernière élection présidentielle l'ont inscrit dans leurs programmes. Ce n'est pas parce que le Sénat recèle en son sein des sénateurs de l'étranger que nous devions faire la même chose.
Je le dis avec d'autant plus de liberté que j'ai moi-même été Français de l'étranger. Et j'étais très satisfait que certains puissent voter dans leur commune de naissance, comme cela se pratique d'ailleurs aujourd'hui au Liban, ou dans leur commune de résidence en France, ce qui était mon cas à l'époque où j'habitais le Japon.
Vous avez décidé qu'il y aurait onze députés représentant les Français de l'étranger, en fonction de leur inscription sur les registres consulaires au 1er janvier 2006. Vous vous êtes ainsi basé sur environ 1,4 million de personnes, alors que plus de deux millions de nos compatriotes vivraient à l'étranger. Qu'avez-vous prévu pour tous ceux qui souhaiteraient voter sans être enregistrés systématiquement dans nos consulats ?
Il faut en tout cas, me semble-t-il, laisser le choix à nos compatriotes de voter pour un candidat qui se présente dans la commune où ils sont domiciliés en France. Il faut offrir à nos enfants expatriés – j'en ai – la possibilité de voter dans la commune où ils sont domiciliés ; il s'agit très souvent de la commune où vivent leurs parents.
Et pourquoi avoir choisi l'enregistrement au 1er janvier 2006 alors que, pour tous nos autres concitoyens, vous vous référez au recensement de 1999 ? Pourquoi ne pas avoir actualisé vos chiffres avec les recensements annuels qui ont été effectués depuis lors ? Il y aura deux catégories de députés, tous n'auront pas la même représentativité, et l'égalité de traitement entre les uns et les autres ne sera pas respectée, ce qui, me semble-t-il, est contraire à notre Constitution.
Enfin, je me suis intéressé aux pratiques de nos partenaires de l'Union européenne, et quelle ne fut pas ma surprise de constater que seuls deux autres pays européens, le Portugal et l'Italie, prévoyaient pour leurs citoyens de l'étranger une représentation parlementaire spécifique ! Il est d'ailleurs curieux que, lorsque cela nous arrange, nous fassions référence aux exemples de nos partenaires européens et que, quand cela peut nous gêner, nous les oubliions ; même notre rapporteur n'en fait pas état dans son rapport.
J'ajouterai que, dans un récent sondage de la RAI International, il apparaît que plus de 45 % des personnes de nationalité italienne interrogées pensent que le vote à l'étranger n'est pas une expérience positive. Je crois que nous devrions méditer cette réalité.
J'aurais préféré que nos concitoyens de la Lozère et de la Creuse puissent conserver deux représentants à l'Assemblée nationale, comme vous l'avez d'ailleurs vous-même souhaité, monsieur le secrétaire d'État.
Vous nous annoncez une réforme de la Constitution d'ici à 2012 pour remédier à l'anomalie de votre projet, mais je ne vois pas très bien comment revenir sur vos propositions d'aujourd'hui, puisque la Constitution a enfermé le nombre de députés à 577. Cela voudrait-il dire que l'on passerait alors à 579 députés ? Ou bien serions-nous obligés de revenir sur l'ordonnance d'aujourd'hui et de supprimer deux circonscriptions ? Mais alors lesquelles ? Qui va se faire hara-kiri, ou plutôt seppuku, comme on le dit dans le pays où j'ai vécu ?
Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d'État, je ne pourrai malheureusement pas voter votre texte en l'état. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La discussion générale est close.
La parole est à M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales.
Mes chers collègues, s'il vous plaît ! Nous allons entendre M. le secrétaire d'État.
Monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, beaucoup d'entre vous sont intervenus dans la discussion générale de ce projet de loi de ratification, et un très grand nombre de questions ont été évoquées, allant parfois au-delà du problème du redécoupage des circonscriptions. Il y a certes des questions de fond. Je voudrais essayer de répondre à tous ceux qui sont encore présents parmi vous aujourd'hui, en mettant en ordre les différents points qu'ils ont pu traiter.
Je ne reviens pas sur le mode de scrutin. M. Asensi a longuement parlé de la proportionnelle ; je le renvoie à ce que j'ai dit dans ma réponse à la motion de son groupe et au futur débat que nous aurons sur le mode d'élection des conseillers territoriaux. Celui-ci fera appel en partie au scrutin proportionnel, en s'inspirant du rapport du doyen Vedel, que M. Asensi a cité à juste titre. Ses critiques visaient d'ailleurs davantage les élus socialistes que le Gouvernement puisque je l'ai entendu leur reprocher de ne pas avoir modifié le mode de scrutin à l'époque où le PS était en mesure de le faire et peut-être de réintroduire la proportionnelle.
En ce qui concerne le bien-fondé de l'ajustement de la carte électorale, j'observe que, comme l'a fait remarquer, par exemple, le président Jean-Marc Ayrault, personne ne conteste qu'il fallait procéder à cette réforme de la carte, parce qu'il était temps de répondre aux injonctions répétées du Conseil constitutionnel.
Il y a donc un consensus. Je suis heureux d'avoir entendu plusieurs interventions en ce sens pour souligner que le Gouvernement avait eu raison de prendre cette question à bras-le-corps. M. Ciotti a même parlé de courage. Je l'en remercie car je dois lui avouer que je n'ai pas vraiment eu le sentiment d'avoir une tâche facile.
Permettez-moi de souligner cependant qu'à la différence des socialistes, nous nous y prenons trois ans à l'avance. Souvenez-vous de l'introduction de la proportionnelle par M. Mitterrand et M. Fabius en 1985, quelques mois avant les élections : la loi est du 10 juillet 1985 et les élections ont eu lieu le 16 mars 1986.
Nous sommes en octobre 2009, et les prochaines élections sont prévues en juin 2012. C'est toute la différence.
En ce qui concerne la préparation de l'ordonnance, M. Cochet a déploré une absence de concertation. Je suis très étonné par cette critique car j'ai reçu aussi bien des responsables de son groupe que le secrétaire national aux élections de sa formation politique. Je l'ai d'ailleurs reçu au moins à cinq reprises.
J'ai fait de même avec tous les groupes politiques et tous les députés qui m'ont demandé de les recevoir. J'ai même vu certains députés au moins à dix reprises.
M. Asensi a critiqué le recours aux ordonnances. Je lui réponds très simplement que cette procédure a été expressément validée par le Conseil constitutionnel, à qui la question avait été posée en 1986.
Mme Karamanli, députée de la Sarthe, a regretté que nous n'ayons pas confié à la commission Guéna une mission plus importante, sur le modèle britannique. Mais nous ne sommes pas en Grande-Bretagne, et nous ne pouvons pas copier purement et simplement l'exemple britannique. Cela étant, c'est une question de fond et, dans mon intervention de mercredi, je n'ai pas écarté l'idée d'un élargissement de ses compétences. Au passage, je note que beaucoup d'entre vous ont cité l'avis du Conseil d'État, ce qui m'étonne puisque celui-ci n'est pas public. Sachez que cet avis reprend quasi intégralement celui de la commission Guéna.
En ce qui concerne les chiffres du recensement, ils soulèvent un vrai problème de fond sur lequel il faudrait que nous parvenions un jour à un consensus.
Plusieurs d'entre vous – je pense à M. Michel et à M. Néri, députés du Puy-de-Dôme, ainsi qu'à MM. Calméjane, Asensi et Goldberg, députés de Seine-Saint-Denis – ont évoqué les chiffres de leur département, très proches, c'est vrai, du seuil démographique donnant droit à un député supplémentaire. Je vais leur répondre, avec beaucoup plus de courtoisie que M. Néri n'en a eu à mon égard. Je suis désolé de leur rappeler que c'est la loi dite de « démocratie de proximité » du 27 février 2002, votée par une majorité de la gauche plurielle, sous le gouvernement de Lionel Jospin, M. Daniel Vaillant étant ministre de l'intérieur, qui a instauré la méthode de recensement glissant que nous avons employée (Exclamations sur divers bancs.) Jusqu'alors, rappelez-vous, il y avait des recensements périodiques de population, et nous disposions tous, à une date donnée, des mêmes chiffres : ceux du dernier recensement ; il n'y en avait pas d'autre. Ainsi, le découpage de 1986 a été fait sur la base du recensement effectué en 1982, et d'autres répartitions de sièges ont été effectuées à partir de celui de 1990, puis de celui de 1999.
Monsieur Pinte, nous nous fondons sur des chiffres publiés à la fin de l'année dernière, mais ils sont réputés être valables depuis le 1er janvier 2006. Cela étant, au moment même où on les prend en compte, par exemple en matière électorale, certaines communes, cantons ou départements disposent déjà de nouveaux chiffres, valables au 1er janvier 2007 ou au 1er janvier 2008. Vous voyez que l'outil est complexe. Ceux qui contestent les données démographiques que nous utilisons en disant qu'elles sont déjà dépassées n'ont pas tout à fait tort, mais ce problème n'existe pas qu'en matière électorale, il se pose aussi dans beaucoup d'autres domaines. C'est ainsi que les dotations aux communes, en particulier aux communes touristiques,…
…les seuils ouvrant droit au scrutin de liste aux élections municipales et les indemnités versées aux élus peuvent, eux aussi, varier non plus tous les cinq ou sept ans, période qui séparait nos recensements d'autrefois, mais d'une année sur l'autre. En tant que secrétaire d'État en charge des collectivités locales, je puis vous affirmer que je vois des cas où le préfet est obligé de demander le remboursement d'un trop-perçu à certains élus à cause de ce système de décompte de la population qui est complètement anormal, antidémocratique et qui va à l'encontre du but recherché. Si c'est ça la démocratie de proximité, je ne sais pas où elle nous mène avec un texte de cette nature : la loi du 27 février 2002 place les élus dans une incertitude permanente à tous les niveaux – on le voit bien à l'occasion de ce découpage électoral. Il faut que les parlementaires en aient conscience au moment de leur vote. Pour ma part, je suis favorable à la modification du mode de recensement.
Bien sûr, les élus du Puy-de-Dôme ou de la Seine-Saint-Denis, qui avaient bénéficié, en 1986, d'un siège supplémentaire bien qu'étant près de la barre, nous disent que, cette fois-ci, ils ont été placés injustement au-dessous de la barre leur donnant droit, dans notre répartition selon la méthode de la tranche, respectivement à six ou à treize députés parce qu'ils ont déjà plus d'habitants que ce seuil. Nous ne pouvons ni leur donner tort ni leur dire qu'ils ont raison puisqu'il nous faut, pour le savoir, attendre les chiffres de tous les départements, que nous ne connaîtrons qu'à la fin de l'année. Si tous les départements ont augmenté, le Puy-de-Dôme et la Seine-Saint-Denis n'auront, malheureusement pour eux, toujours droit qu'à un siège de moins parce que le montant de la tranche aura lui-même augmenté.
Je m'adresse aux membres de votre commission des lois, et plus spécialement à son président, Jean-Luc Warsmann, qui s'est préoccupé de cette instabilité, dans le cadre des propositions de loi de simplification du droit, pour leur demander : ne faudrait-il pas prévoir que, dans certains domaines, les effets du recensement glissant ne se fassent pas sentir chaque année, mais tous les trois, cinq ou dix ans selon les domaines ?
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. M. Warsmann n'est pas là !
Il est à l'Assemblée, je l'ai vu tout à l'heure.
En matière électorale, on ne peut tout de même pas imaginer qu'il faille ajuster chaque année la répartition du nombre de députés, la répartition du nombre de sénateurs, la répartition des effectifs au sein des conseils régionaux ou municipaux, le mode d'élection des communes voisines de 3 500 habitants, et bientôt de 500 habitants seulement – que sais-je encore ? Le système actuel est injuste et incohérent. Il engendre des situations comme celle que nous vivons aujourd'hui.
S'agissant de la méthode de répartition utilisée, je ne reviens pas sur la méthode de la tranche, nous en avons déjà longuement parlé. Je rappelle simplement que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 8 janvier 2009, ne l'a absolument pas condamnée, contrairement à ce qui a été dit, et que nous n'avons fait que reprendre une méthode utilisée par nos prédécesseurs, de droite comme de gauche, le dernier en date étant M. Joxe lorsqu'il était ministre de l'intérieur.
M. Asensi et M. Dosière ont abordé la question des collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin. Je rappelle que la création de ces deux collectivités et leur représentation à l'Assemblée nationale par un député pour chacune d'elles ont été adoptées à l'unanimité dans cet hémicycle.
M. Éric Raoult, qui suit cette question de très près, s'en souvient, lui. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) J'ajoute que M. Lurel, cité par M. Asensi et par M. Dosière pour étayer leur critique, était d'accord avec la création de ces deux sièges. Certes, ceux-ci n'ont pas été pourvus en 2007, mais ils existent dans le code électoral, de sorte que l'effectif de votre assemblée est, en droit, de 579 membres et non de 577. En outre, nous ne pouvions refaire la quatrième circonscription de la Guadeloupe car cela aurait donné une circonscription qui échappait à la répartition par département : elle n'aurait été classée ni dans les circonscriptions des départements, ni dans celles des collectivités d'outre-mer.
Par ailleurs, M. René Dosière a évoqué Mayotte, et je dois dire que je ne suis pas loin de partager son point de vue. Qu'il sache que le Gouvernement a tenté, comme le lui avait suggéré la commission constitutionnelle de contrôle, de transférer à la Nouvelle-Calédonie le second siège prévu pour Mayotte. Mais nous nous sommes heurtés à la position catégorique du Conseil d'État, qui a souligné que nous ne pouvions ni modifier notre façon de recenser la population pour une seule collectivité d'outre-mer, ni anticiper les résultats d'un recensement en cours de réalisation. Nous serons sans aucun doute amenés à réfléchir à la situation inéquitable qui sera créée si les résultats du recensement en Nouvelle-Calédonie donnent les chiffres qui ont été évoqués, de l'ordre de 160 000 habitants, c'est-à-dire plus que la Polynésie française qui, elle, dispose de trois députés.
En ce qui concerne les sièges attribués aux Français de l'étranger, M. Cochet a eu, je le regrette, des mots très durs pour un électorat qu'il a osé qualifier de « marginal », ce qui est tout de même assez extravagant. Quant à M. Asensi, il les a attaqués au motif qu'ils ne paieraient pas d'impôt en France et qu'ils pourraient déjà y voter s'ils le souhaitaient. Il a oublié de dire qu'ils pouvaient être imposables pour leur activité à l'étranger et que cette question a été tranchée lors de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Nous devions donc leur réserver des sièges de député. Je redis à M. Urvoas que nous avons dû augmenter leur nombre par rapport à ce qui était prévu à cause du recours au Conseil constitutionnel qu'il a signé avec ses collègues socialistes. S'il n'y avait eu ce recours, nous en serions restés à notre position initiale : sept, voire huit députés. Je rappelle d'ailleurs qu'il y a bien eu un projet commun aux sénateurs de la majorité et de l'opposition.
Je tiens le document à votre disposition, monsieur Le Roux. Il est signé par des sénateurs de la majorité comme de l'opposition, et comporte deux variantes, qui se rapprochaient de notre découpage dans sept circonscriptions sur onze.
J'en viens aux circonscriptions qui disparaissent. Monsieur Le Roux, je ne dénie pas vos qualités d'expert électoral du parti socialiste, et je ne vous en fais pas le reproche.
Avec plusieurs autres orateurs du groupe socialiste, vous êtes revenu sur la répartition des trente-trois circonscriptions amenées à disparaître du fait de la baisse relative de population de leur département. Vous avez contesté les chiffres que j'avais donnés – dix-huit circonscriptions de gauche, quinze circonscriptions de droite –, prétendant apporter la preuve que ce seraient en réalité vingt-trois circonscriptions à gauche et dix circonscriptions à droite qui disparaîtraient.
Je suis au regret de vous dire que vous travestissez la vérité.
Les propos que vous avez tenus à ce sujet figurent au compte rendu de la séance publié au Journal officiel. Vous avez cité, parmi ces circonscriptions, une circonscription dans le département de la Mayenne, alors que ce département garde ses trois circonscriptions et ne fait donc pas partie des vingt-sept départements qui perdent globalement les trente-trois circonscriptions dont nous parlons.
Monsieur Goldberg, vous avez contesté mon énumération en me disant que, dans le tableau de l'ordonnance, c'est la troisième circonscription, la vôtre, qui disparaissait. Prenons votre critère, mais alors prenons-le partout,…
…et faisons ensemble le travail, dans la plus grande transparence. S'agissant des circonscriptions qui disparaissent, je vous invite à vous reporter aux pages 129 et suivantes de l'excellent rapport de Charles de La Verpillière. Je suis désolé pour les députés concernés mais le groupe socialiste m'oblige à citer leur circonscription. Page 130, troisième circonscription de l'Allier : il s'agit effectivement d'un député socialiste.
Page 135, quatrième circonscription de la Charente : encore un député socialiste.
Mais, à la page 136, troisième circonscription de la Corrèze : député UMP – ce fut celle de Jacques Chirac. Page 137, première ou deuxième circonscription de la Creuse, dont l'une disparaît puisqu'elles fusionnent : député socialiste ou UMP mais, le groupe socialiste le reconnaît lui-même, c'est l'UMP qui disparaît.
Je poursuis l'énumération. Page 143, troisième circonscription de l'Indre : député socialiste, j'en conviens. Page 145, sixième circonscription de la Loire : c'est celle du député Pascal Clément, qui n'est pas passé à gauche, à ma connaissance. Page 147, première ou deuxième circonscription de la Lozère, dont l'une disparaît parce qu'elles fusionnent : député UMP puisque les deux députés sortants sont UMP. Page 147 encore, quatrième circonscription de la Manche : député UMP. Page 148, troisième circonscription de la Marne : député UMP. Page 149, troisième circonscription de la Meurthe-et-Moselle : député UMP – et non pas socialiste, monsieur Le Roux. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous n'avez qu'à ouvrir le rapport de Charles de La Verpillière ! (Mêmes mouvements.)
Page 150, huitième circonscription de la Moselle : député socialiste.
Eh oui, malheureusement.
Page 150 encore, troisième circonscription de la Nièvre : député socialiste. Page 151, troisième circonscription du Nord : député socialiste. Page 151 toujours, douzième circonscription du Nord : député socialiste.
Dont acte. Mais il n'y a rien d'infamant à être membre du groupe socialiste, monsieur Hutin. N'ayez pas honte de ce que vous êtes devenu.
Je ne vous ai pas toujours connu socialiste ; je me souviens de vous dans d'autres familles politiques, mais je respecte votre choix.
Je continue. Page 152, vingt-troisième circonscription du Nord : député UMP…
Ah, j'ignorais que Mme Marin était passée au groupe socialiste ! C'est une nouvelle que vous m'apprenez ! (Rires sur les bancs du groupe UMP.)
Page 153, troisième circonscription du Pas-de-Calais : député socialiste. Page 154, onzième circonscription du Pas-de-Calais : député socialiste. Page 154 encore, deuxième circonscription du Puy-de-Dôme : député socialiste. Page 155, première circonscription des Hautes-Pyrénées : député socialiste,…
…mais page 156, quatrième circonscription du Haut-Rhin : député UMP. Page 158, troisième circonscription de la Haute-Saône : député UMP. Consultez le trombinoscope de l'Assemblée nationale en complément du rapport de M. de la Verpillière !
Page 158 encore, quatrième circonscription de Saône-et-Loire : député socialiste, M. Mathus. Page 159, première circonscription de Paris : député de gauche. Page 159, deuxième ou troisième circonscription de Paris, dont l'une disparaît parce qu'elles fusionnent : député UMP.
Page 161, seizième circonscription de Paris : député UMP. Cela fait bien deux circonscriptions de droite qui disparaissent à Paris, monsieur Leroux ?
Vous avez dit de gauche, ce n'est pas vrai ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Quant à M. Cochet, il a eu tort de se classer parmi les victimes du découpage. Sa circonscription ne disparaît pas ; elle a été modifiée parce que la commission et le Conseil d'État la trouvaient trop petite ; il lui a été ajouté le quartier de Notre-Dame-des-Champs, où vivent d'ailleurs beaucoup de bobos.
Page 161 encore, sixième circonscription de Seine-Maritime : un député communiste. Page 162, douzième circonscription de Seine-Maritime : un député UMP.
Je conteste le résultat ! Le découpage donne un député de moins à la gauche !
Je n'avais pas imaginé qu'il était devenu socialiste, ce n'est pas ce qu'il m'a dit hier !
Page 164, troisième circonscription des Deux-Sèvres : un député UMP, ici présent, M. Morisset. Page 164, quatrième circonscription de la Somme : député socialiste. Page 164, première circonscription du Tarn : député socialiste. Page 166, première circonscription de la Haute-Vienne : député socialiste. Page 169, pour la troisième circonscription de Seine-Saint-Denis, je donne raison à M. Goldberg, s'il le veut…
Mais je prends les mêmes critères ! Page 170, septième circonscription du Val-de-Marne : député UMP.
Voilà. Alors, chacun peut recompter et vérifier : trente-trois circonscriptions disparaissent, quinze étant représentées par des députés UMP et dix-huit par des députés de gauche – dont deux du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et seize du groupe socialiste. Nous sommes loin de vos calculs faisant état de vingt-trois députés de gauche et dix députés de droite !
Mesdames et messieurs de l'opposition, le bouclier électoral évoqué par le président Jean-Marc Ayrault n'existe que dans votre imagination !
Permettez-moi de dire maintenant un mot aux personnes qui représentent ces trente-trois circonscriptions. Je vais essayer d'éviter les polémiques. Pour les personnes concernées, ce sont des décisions importantes et graves.
M. Morel-A-L'Huissier s'exprimait en son nom propre et au nom de son collègue Jean Auclair, député de la Creuse. Comme eux, je regrette que le Conseil constitutionnel – qui n'aurait pas pu s'autosaisir mais a été saisi par le groupe socialiste – ait changé de position et censuré la règle traditionnelle en vigueur depuis trois Républiques, accordant deux députés à chaque département.
S'il n'avait pas été saisi, nous aurions pu maintenir ces deux exceptions à la règle de répartition.
Si on ne saisissait jamais le Conseil constitutionnel, le Gouvernement n'aurait pas de problèmes !
Vous savez, cette évolution inquiète beaucoup de députés socialistes ou radicaux de gauche qui siègent chez vous. Dans l'Ariège, le Gers, les Hautes-Alpes, les Alpes-de-Haute-Provence, vous allez aussi être concernés un jour.
Encore une fois, vous vous êtes tiré une balle dans le pied ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Honnêtement, il ne me paraît pas raisonnable de penser qu'une seule personne puisse représenter plus de 100 000 électeurs et un territoire départemental qui couvre plus de 500 000 hectares et compte plusieurs centaines de communes.
Madame la députée Maquet, j'ai entendu vos propos sur la première circonscription du Pas-de-Calais, et je suis assez d'accord avec votre analyse. Nous y reviendrons. C'est anormal. Je le déplore pour le Pas-de-Calais, mais aussi pour la Creuse et la Lozère. Un député ne peut pas être tout seul sur un territoire aussi vaste.
Cela étant, il n'est pas question de passer outre puisque les décisions du Conseil constitutionnel s'imposent à tous. La haute juridiction est chargée de veiller au respect de la Constitution, et seule une modification de notre texte constitutionnel pourrait redonner deux députés à chacun des départements concernés. Il ne m'appartient pas de dire que cette réforme doit être engagée, je veux seulement dire à M. Jean Auclair, M. Pierre Morel-A-L'Huissier et M. Francis Saint-Léger que je ne serais pas choqué si cette réforme était lancée.
Monsieur Auclair, je le répète, le député de la Creuse représentera, si rien n'est changé, plus de 100 000 électeurs – c'est-à-dire plus de 100 000 citoyens français –, pendant que chaque député de la Seine-Saint-Denis en représentera 50 000 en moyenne. Ce n'est pas une critique, mais il faut le dire aussi, puisque vous avez évoqué le sujet, monsieur Bartolone. Ce sont les chiffres : 100 000 dans la Creuse et 50 000 en moyenne en Seine-Saint-Denis, et la comparaison vaut aussi pour Paris. Ma remarque s'adresse également à M. Pérat, qui doit comparer les électeurs et non pas la population.
Après votre intervention sur la Moselle, madame Zimmermann, je vous invite à regarder les pages 106 à 109 du rapport de M. de la Verpillière.
Même chose pour M. Folliot et M. Valax, députés du Tarn, qui pourront se reporter aux pages 118 et 199 de ce rapport. Ils y trouveront les justifications du découpage retenu pour leur département.
Monsieur Folliot, je vous le dis sans acrimonie, vous vous êtes trompé en affirmant que le Conseil constitutionnel avait interdit de couper les villes, car celui-ci n'a limité que la scission des cantons – et encore, des grands cantons. Votre collègue M. Valax s'est également trompé, car la ville d'Albi a déjà été découpée à plusieurs reprises, notamment en 1986.
Mme Billard et Mme Lepetit – absentes ce matin alors qu'elles sont élues de Paris – sont intervenues sur la fin du découpage en escargot de la capitale. Cette évolution s'explique par des raisons démographiques : avant 1986, la ville de Paris a dû attendre 1889 – c'est-à-dire 75 ans après l'instauration du suffrage uninominal – pour compter un député par arrondissement.
La ville comptait 31 circonscriptions dans le découpage de 1958, mais les quatre arrondissements de la circonscription actuelle de Mme Billard en représentaient deux : les 1er et 4e arrondissements d'un côté ; les 2e et 3e arrondissements de l'autre. À présent, il n'est pas possible d'avoir un député pour chacun des arrondissements dont la population varie entre 18 000 habitants à peine pour le 1er et 233 000 habitants pour le I5e.
Monsieur le député-maire, vous faites bien de rectifier.
Il a donc encore fallu élargir la circonscription de Mme Billard pour lui donner une taille suffisante. Il n'y a évidemment rien contre sa personne, et je démens catégoriquement les paroles qu'elle a prêtées à un élu de l'UMP et qui auraient pu guider ma démarche. Certes, elle n'est pas là, mais mes propos lui seront sûrement rapportés.
En réponse à Mme Lepetit, j'indique que le découpage de Paris est désormais conforme à l'avis de la commission. Si elle s'en félicite, elle peut le dire à M. Cochet qui estime que nous avons strictement suivi cet avis. Il y a quelques jours, dans Le Parisien, Rémi Féraud, le premier secrétaire de la fédération du parti socialise de Paris, a déclaré qu'il trouvait le découpage de la ville bien équilibré. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
J'indique à M. Dupont que je suis sincèrement désolé que la troisième circonscription, celle qui a été si longtemps représentée par le président Jacques Chirac, ne soit plus sur la carte électorale. Qu'il sache que, lorsque j'ai interrogé M. Chirac sur mon projet, celui-ci l'a qualifié de « bon travail ».
Mme Montchamp a parlé du « diable qui se cache dans les détails » en évoquant les cas dans lesquels le Gouvernement n'a pas suivi les recommandations de la commission. Si diable il y a, il est autant de droite que de gauche, car ces recommandations, si elles avaient été partout suivies, pourraient déplaire à l'opposition comme à la majorité, et c'est d'ailleurs le cas dans le Val-de-Marne.
Madame Filippetti, j'ai écouté votre intervention très digne avec beaucoup d'intérêt, comme tout le monde. Vous avez évoqué la disparition de votre circonscription avec talent et émotion. Vous savez que je suis sensible à votre situation. Je vous trouve un peu injuste de vous en être prise directement à moi, et je voudrais tout de même vous rappeler que votre circonscription avait été très critiquée en 1986 et que vous étiez visiblement la seule dans votre département à ne pas vouloir son éclatement. Vos amis étaient d'accord avec d'autres parlementaires pour revenir à une logique d'arrondissement. Je ne suis pas pour les querelles de famille, mais je tiens leur lettre à votre disposition. Vous savez qu'ils l'ont écrite et sont venus m'en parler.
D'ailleurs, c'est peut-être pour cela, madame la députée, que vous avez été candidate aux élections européennes. Compte tenu de votre talent, je ne doute pas que vous trouverez d'ici à 2012, avec l'aide de vos amis – mais les vrais, ceux-là ! – une solution vous permettant de conserver un mandat parlementaire.
Je voudrais redire un mot de la délimitation des circonscriptions.
Je n'ai pas l'impression que Mme Filippetti ne se soit pas reconnue dans mes propos.
Par respect pour eux, je veux répondre à tous ceux qui ont pris la parole. J'invite tous ceux qui m'ont interrogé sur les cas où nous n'avions pas suivi l'avis de la commission, lorsqu'il s'agissait de propositions de sa part, à se référer à l'excellent rapport de M. de la Verpillière.
Dans les pages 95 à 127, il détaille les raisons pour lesquelles ces propositions n'ont pas été retenues. À la page 105, M. Féron pourra lire que le Gouvernement s'est résigné au déplacement du canton de Tomblaine parce que la commission Guéna a souligné avec insistance le très fort déséquilibre démographique existant sans ce transfert. Je peux vous dire que le Conseil d'État est allé dans le même sens.
Madame Génisson, madame Duriez, madame Maquet, vous m'avez interrogé sur l'étendue et le très grand nombre de communes de la première circonscription du Pas-de-Calais. Madame Maquet, je vous répète qu'un canton, Vitry-en-Artois, y a été ajouté à la demande de la commission. Comme vous, je regrette que le respect de l'équilibre démographique nous conduise, ici aussi, à ce que j'appellerai une anomalie géographique.
Je vous le dis très simplement.
S'agissant du Puy-de-Dôme, il y a un instant, j'ai donné les raisons de la disparition d'une circonscription. Celle du député concerné se trouve au milieu du département et ne pouvait donc qu'être affectée.
Monsieur Néri, puisque vous m'avez interpellé, ainsi que votre collègue Jean-Paul Bacquet, je vous signale que le fractionnement du canton de Billom est dû à sa discontinuité. La commune que vous avez citée, Pérignat-sur-Allier, est séparée du reste du canton. Celui-ci était donc sécable, même en comptant moins de 40 000 habitants.
Jacques Domergue, député de l'Hérault, a eu raison de souligner que, si des départements stagnaient en nombre d'habitants, d'autres augmentaient considérablement. Oui, l'Hérault était sous-représenté jusqu'à présent, et l'ordonnance lui rend en quelque sorte justice de son dynamisme démographique. D'ailleurs, je n'ai reçu aucun commentaire défavorable de la part du président du conseil général et du président du conseil régional. Pour une fois, ils sont au moins d'accord sur quelque chose ! Ils devaient m'écrire, mais je n'ai pas reçu de lettre, donc je prends acte.
Exactement !
Mme Sylvie Andrieux m'a interpellé sur le découpage de Marseille. Que je sache, M. Guérini a été informé et je ne l'ai pas entendu protester !
M. Goldberg m'a interpellé de façon vigoureuse sur le découpage de la Seine-Saint-Denis, tout en n'étant d'ailleurs pas très aimable à l'égard du parti communiste et de sa secrétaire nationale. Je ne résiste pas à la tentation de lui montrer – à lui comme à Mme Guigou, à M. Bartolone et à M. Le Roux, qui s'en souviennent – le premier projet de découpage qu'ils avaient élaboré pour leur département. Ils ne faisaient rien de moins que de découper deux cantons et deux villes : Aulnay-sous-Bois et Rosny-sous-Bois ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Si la huitième circonscription est inchangée, ce n'est pas parce qu'elle a un député UMP.
Pourquoi n'avez-vous pas dit la même chose pour la première, la deuxième, la onzième, la douzième et la treizième circonscriptions, qui ont toutes un député de gauche ?
Je remercie Éric Raoult d'avoir mis les choses au point.
En ce qui concerne les circonscriptions des Français de l'étranger, monsieur Urvoas, je ne suis pas responsable de la délimitation des secteurs d'élection des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger. Ce sont vos amis socialistes qui l'ont faite en 1982 !
Nous n'avons rien changé ! Nous nous étions engagés à respecter leurs limites : dès lors qu'on prend la Grèce, la Turquie et Chypre, vous ne pouvez nous le reprocher.
Notre projet, je le répète, s'inspire de celui élaboré par les sénateurs des Français de l'étranger, de la majorité comme de l'opposition ;…
…je le tiens, monsieur Le Roux, à votre disposition.
La continuité géographique est assurée par les mers et les océans, faute de quoi nous aurions du mal à intégrer les Français d'Australie ou de Nouvelle-Zélande dans une circonscription.
Quant à celle contenant Israël, je n'ignore pas le passage dont M. Urvoas a parlé, qui permet de passer d'Israël en Jordanie et réciproquement. Mais, sauf erreur de ma part, ce point de passage se situe du côté d'Aqaba, à l'extrême sud de la Jordanie ; il est donc très éloigné d'Amman, la capitale, et de Beyrouth, où se trouvent la majorité des Français de l'autre secteur électoral. Notre décision de placer Israël avec des pays d'Europe correspond d'ailleurs, je le signale, à l'usage dans de nombreux domaines, qu'il s'agisse de conférences ou de rencontres sportives.
Cette décision, monsieur Urvoas, nous l'avons prise en liaison avec le Quai d'Orsay : une lettre de M. Kouchner au Premier ministre en atteste ; je la tiens à votre disposition. En outre, l'ordonnance relative aux modalités d'élection des futurs députés des Français de l'étranger est bien parue au Journal officiel le 31 juillet, en même temps que celle dont nous discutons aujourd'hui ; enfin le projet de loi de ratification, dont M. de La Verpillière est aussi le rapporteur, vous est déjà parvenu.
Ne pensez pas que nous ayons avancé le premier tour pour favoriser la majorité : cette disposition existe déjà dans certains territoires d'outre-mer. Enfin, je vous donne l'assurance que les associations et les sénateurs des Français de l'étranger seront consultés lors de l'élaboration du décret d'application de la seconde ordonnance, comme ils l'ont été pour la première ; j'ai d'ailleurs pris note de votre disponibilité pour nous aider dans la préparation de ce texte.
Monsieur Gorce, nous avons bien reçu les suggestions des élus quand ceux-ci ont été autorisés à nous en faire, notamment avant le congrès de Reims – puisque, après, cela a été un peu plus difficile. (Rires et exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Nous en avons tenu compte dans toute la mesure du possible. Vous avez évoqué la réintégration du canton de Guérigny. C'est à juste titre que vous arguez de la cohérence géographique, mais le redécoupage ne remet pas en cause l'équilibre politique et n'obéit à aucun motif électoraliste.
S'agissant de la Somme, M. Gilbert Mathon a livré un vibrant plaidoyer ; mais il n'y a aucun « acharnement destructeur », pour reprendre son expression, contre la deuxième ville du département.
En tant que secrétaire d'État rattaché au ministère de l'intérieur, je démens formellement toute menace sur la sous-préfecture d'Abbeville, à laquelle nous sommes très attachés, ou sur l'hôpital, pour lequel l'État a d'ailleurs lancé un grand programme d'investissements.
En tout état de cause, la commission Guéna et le Conseil d'État ont émis un avis favorable sur le redécoupage de cette circonscription.
Certes, monsieur Hutin, les deux circonscriptions que vous avez évoquées disparaîtront pour fusionner ; mais leurs actuels députés peuvent s'entendre !
En outre, il ne vous a pas échappé que les élections sénatoriales avaient lieu en 2011.
J'ai bien entendu, monsieur Morisset, vos remarques sur le redécoupage dans les Deux-Sèvres ; vous m'en aviez d'ailleurs déjà entretenu plusieurs fois avec beaucoup de force de conviction. Vos critiques, je dois le reconnaître, ne manquent pas de pertinence, notamment sur le pays de Gâtine ; j'ai d'ailleurs noté qu'elles avaient suscité des réactions négatives, à gauche comme à droite. Vous avez saisi la commission ainsi que le Conseil d'État ; mais ni l'une ni l'autre, ce que je regrette, n'ont cru devoir nous faire des propositions alternatives. Ce redécoupage n'était d'ailleurs pas facile, compte tenu du passage de quatre à trois circonscriptions et de la configuration particulière du département des Deux-Sèvres – je ne parle évidemment que de la géographie.
Je voudrais, pour terminer, vous rappeler certains points de ma conclusion de mercredi dernier. Nous ne pourrons éviter, me semble-t-il, une réflexion sur la population prise en compte en matière électorale. C'est là un sujet de fond,…
…dont M. Dosière a très bien parlé en évoquant Mayotte. Il sait comme moi que nous ne pouvons pas traiter la question de la population étrangère sans le faire de façon uniforme sur tout le territoire, ainsi que l'a répété le Conseil constitutionnel.
Il me semble, mesdames et messieurs les députés, qu'il vaudrait mieux réfléchir à cette question bien avant les échéances électorales.
Le sujet peut faire consensus, comme l'atteste un amendement de M. Dosière auquel le Gouvernement ne s'était pas opposé et que la majorité avait voté.
L'opinion publique attend que nous nous emparions du sujet ; l'exécutif comme le législatif se grandiraient en le faisant.
Nous ne pourrons pas non plus éviter une réflexion sur les procédures de délimitation des circonscriptions à l'avenir. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) J'ai évoqué certaines pistes ; Mme Karamanli, députée de la Sarthe, en a cité d'autres qui sont proches. Je partage assez son analyse. En dépit d'apparences parfois contraires, les mérites de la commission que nous avons mise en place pour contrôler la répartition des sièges et la délimitation des circonscriptions – ce qui est une première dans nos institutions – ont été loués par beaucoup. La meilleure preuve n'est-elle pas que le Conseil d'État, lors de son propre examen de l'ordonnance, s'est inscrit dans les traces de cette commission ? Je vous invite, là encore, à réfléchir sur la meilleure procédure pour ajuster, à l'avenir, les limites de vos circonscriptions d'élection. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Puis-je à mon tour répondre aux orateurs, monsieur le président ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le rapporteur, un nouveau règlement que, contrairement à nous, vous aviez d'ailleurs voté, a été adopté : respectez-le !
Monsieur le rapporteur, le règlement ne me permet pas de vous donner la parole maintenant, sauf s'il s'agit d'un rappel au règlement.
Je vais maintenant appeler les amendements portant articles additionnels avant l'article unique, puis l'article unique du projet de loi dans le texte de la commission.
En application de l'article 96 du règlement de l'Assemblée nationale, le Gouvernement demande la réserve des votes sur tous les amendements et sur l'article unique. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous avons passé la journée d'hier à débattre de propositions de loi importantes, dont le vote a été réservé par le Gouvernement.
Le texte dont nous débattons aujourd'hui est d'importance, puisqu'il dessine les contours des futures circonscriptions et met en jeu l'expression démocratique de nos concitoyens. Une fois encore, le Gouvernement demande la réserve : pourquoi ? Si vous avez, chers collègues de la majorité, un problème pour mobiliser vos troupes, réglez-le une fois pour toutes ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Il n'y a en effet aucune raison de demander la réserve ; à moins, monsieur le secrétaire d'État, que vous appliquiez ce que vous avez déclaré dès l'ouverture de ce débat, à savoir que nous ne saurions « discuter de telle ou telle circonscription ». Notre pouvoir de légiférer se trouve ainsi remis entre les mains de l'exécutif, que notre assemblée a en outre habilité à légiférer par ordonnance sur ce projet partisan.
Est-ce parce que vous avez un problème de majorité, monsieur le secrétaire d'État, que vous demandez la réserve ? (Nouvelles protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Refuseriez-vous de discuter des amendements ?
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, l'article 3 de la Constitution dispose que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum ». Je suis assez choqué que, à la tribune de notre assemblée, vous présentiez comme vous l'avez fait, et de façon subreptice, la discussion d'une réforme qui au fond touche au préambule et à l'article 3 de la Constitution. Nous exerçons en effet notre mandat non seulement pour les électeurs, mais au nom du peuple français, et nous n'acceptons pas que celui-ci soit restreint dans son droit d'expression. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mon rappel au règlement repose sur l'article 57-1.
Bruno Le Roux vient de demander la poursuite du débat ; or il est douze heures quarante. Nous avons, chers collègues de l'opposition, entendu bien des insultes à l'égard de M. le secrétaire d'État.
Les propos que nous avons entendus, même si certains les ont oubliés, étaient choquants. (Approbations sur les bancs du groupe UMP.)
M. le secrétaire d'État vient de répondre avec beaucoup de clarté à l'ensemble des intervenants ; je lui signale d'ailleurs qu'il a dû égarer la fiche me concernant car il ne m'a pas répondu, ce dont je ne lui tiens aucune rigueur.
J'ai dit, monsieur Le Roux, des choses essentielles pour répondre aux collègues de Seine-Saint-Denis qui avaient oublié la réalité de ce département, collègues que j'avais rencontrés à plusieurs reprises. Claude Bartolone et moi exposerons, dans notre ouvrage, nos débats au sujet du présent découpage et d'un autre encore : celui des cantons. N'oublions pas, en effet, que la Seine-Saint-Denis en compte quarante, contre quarante-neuf dans le Val-de-Marne, pour une population à peu près équivalente.
Au fond, nous avons parlé de l'ensemble des circonscriptions. Au cours de ce débat, où l'on évoquait les ponts de tel ou tel canton, on avait souvent l'impression de se trouver dans un conseil général : on le vérifiera en lisant le compte rendu.
J'ai presque terminé, monsieur le président.
Nous vous avons, chers collègues, patiemment écoutés ; il convient à présent d'appliquer notre règlement, lequel permet au Gouvernement de demander la réserve.
Vous présidez très bien, monsieur le président (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC), et nous regrettons que vous ne l'ayez fait plus tôt dans ce débat : il se serait ainsi achevé plus rapidement.
Bref, dès lors que le Gouvernement demande la réserve, celle-ci doit s'appliquer.
Faisons en sorte que nos débats restent dignes, mes chers collègues : ils ne sont pas seulement suivis dans notre enceinte, mais également consignés au Journal officiel. Retrouvons donc un peu de sérénité pour avancer.
Je rappelle que la réserve est de droit. Le Gouvernement peut ou non s'exprimer : la Constitution en dispose ainsi et elle s'applique à tous.
Je rappelle par ailleurs, monsieur le rapporteur, que le règlement ne me permettait pas de vous donner la parole à l'issue de la discussion générale. Vous pourrez en revanche vous exprimer sur les articles et les amendements.
Nous en venons à l'examen des amendements portant articles additionnels avant l'article unique.
L'amendement n° 3 rectifié est défendu.
La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour soutenir l'amendement n° 1 rectifié .
Je souhaite que le tableau n° 1 annexé au code électoral soit ainsi modifié.
Premièrement, dans la première circonscription de la Moselle les mots : « Metz III – partie non comprise dans la troisième circonscription –» sont remplacés par les mots : « Metz I ».
Deuxièmement, dans la troisième circonscription de la Moselle, les mots : « Metz I, Metz II, Metz III – moins la partie située à l'ouest de la voie ferrée de Nancy à Thionville – » sont remplacés par les mots : « Metz II et Metz III ».
Historiquement, le lit de la Moselle a toujours servi de limite entre la première et la troisième circonscription de la Moselle. Or le Gouvernement a décidé de permuter, entre ces deux circonscriptions, les treize bureaux de vote constituant le canton de Metz I avec, en sens inverse, onze bureaux de vote sélectivement choisis – j'insiste sur ces deux derniers mots – à l'intérieur du canton de Metz III.
Cette permutation n'a aucune justification démographique. En effet, la troisième circonscription n'a que 9,66 % d'habitants de moins que la moyenne départementale, alors que celle de Sarreguemines, que l'ordonnance laisse pourtant inchangée, en a 13,3 % de moins. Vous me demandez, monsieur le secrétaire d'État, de me reporter au rapport : c'est ce que j'y lis.
Par contre, avec ce nouveau découpage, les deux circonscriptions forment l'une dans l'autre des excroissances qui s'enchevêtrent de manière extravagante. En particulier, les bureaux de vote du canton de Metz III transférés à la première circonscription forment une hernie qui n'est rattachée à celle-ci que par un chemin de halage.
Le canton de Metz I, qui est enlevé à la première circonscription, est très à gauche. Il est détenu par le maire socialiste de Metz et, au second tour de l'élection présidentielle – je vous donne quelques chiffres qui montrent le pourquoi de ce découpage –, le Président de la République n'a obtenu que 44,5 % dans le bureau de vote 111, 42,4 % dans le 161 et 41,5 % dans le 171. Je pourrais continuer de la même façon à propos des treize bureaux de vote…
Au contraire, les onze bureaux de vote du canton de Metz III transférés en sens inverse n'ont pas été choisis au hasard. Ils sont parmi les plus à droite de la ville. Au second tour de l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy a, par exemple, obtenu 62 % dans le bureau 321, 71 % dans le 333 et 62 % dans le 343.
À juste titre, la commission de contrôle du redécoupage électoral a demandé le maintien des limites existantes entre les deux circonscriptions. Le Conseil d'État a également rendu un avis dans le même sens. Mais le Gouvernement est passé outre à ces deux avis.
L'objet du présent amendement est de rétablir le statu quo, c'est-à-dire de maintenir le canton de Metz I dans la première circonscription dont il a toujours fait partie, le canton de Met III restant, lui, en entier dans la troisième circonscription, comme cela a toujours été le cas.
La parole est à M. Charles de La Verpillière, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Monsieur le président, je vous remercie de me donner la parole. Mais je ne sais pas si je vais oser aller plus loin…
Je me permets de vous rappeler que l'article 56 de notre règlement dispose que les ministres, les présidents et les rapporteurs des commissions saisies au fond obtiennent la parole quand ils la demandent.
S'agissant de votre amendement, madame Zimmermann, la commission ne l'a pas adopté. La Moselle fait partie des départements qui perdent une circonscription. Il y a donc nécessairement un redécoupage.
Ensuite, les résultats auxquels on aboutit en termes démographiques sont équilibrés : il n'y a aucun écart démographique significatif.
Tant la loi d'habilitation que le Conseil constitutionnel admettent que les cantons dont la population est supérieure à 40 000 habitants puissent être découpés.
Afin qu'il ne subsiste aucune ambiguïté, monsieur le rapporteur, l'article 56 du règlement ne s'applique pas à la discussion générale. Comme on le dit dans ma bonne province du Loir-et-Cher : « C'est le bon sens près de chez vous ! » Pouvez-vous imaginer un seul instant que le rapporteur, quel que soit le texte, puisse demander la parole à tout moment dans la discussion générale, sur le fondement de l'article 56 ?
C'est la tradition républicaine : il appartient au ministre de répondre aux orateurs qui se sont exprimés dans la discussion générale. On n'a jamais vu le rapporteur reprendre la discussion générale, en tout cas pas avant le ministre.
C'est parce que notre rapporteur a trouvé que M. le secrétaire d'État n'était pas assez clair !
C'est une question de simple courtoisie, monsieur le rapporteur : je suis désolé de devoir vous répondre ainsi.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?
Monsieur le président, nous siégeons maintenant depuis plusieurs heures, mais notre débat n'est qu'une parodie ! Et je ne parle pas seulement du débat de ce matin. Le Gouvernement décide de ne pas répondre, hier, les députés du groupe UMP ont quitté l'hémicycle pour faire en sorte que les textes ne puissent pas être débattus.
Nous n'entendons pas le débat comme étant la simple expression de ce que nous souhaitons, mais comme une confrontation, laquelle est ensuite réglée par un scrutin dans cet hémicycle.
Aujourd'hui, ce débat n'est qu'une parodie et la discussion sur les amendements sera sans doute de même nature. Je souhaite, monsieur le président, une suspension de séance de cinq minutes pour réunir mon groupe.
Afin de ne pas hacher nos débats, je souhaite que nous achevions auparavant la discussion sur l'amendement n° 1 rectifié .
Dans son amendement, Mme Zimmermann a soulevé le problème fondamental du redécoupage de Metz.
M. le rapporteur dit que le découpage d'un canton est possible au-delà de 40 000 habitants. D'abord, un seul de ces cantons dépasse les 40 000 habitants. Ensuite, il faut – c'est expressément indiqué dans les préconisations du Conseil constitutionnel – que ce soit pour un motif d'intérêt général et de manière tout à fait exceptionnelle.
Or le dépeçage du canton de Metz III aboutit à extraire onze bureaux de vote dont on ne connaît pas exactement le nombre d'habitants qu'ils représentent. Sur ce point, les chiffres de INSEE ne sont pas fiables, car si nous disposons des chiffres indiquant le nombre d'électeurs, nous n'avons pas ceux relatifs au nombre d'habitants. Nous ne savons pas combien d'habitants vont être transférés de la circonscription de Metz III – celle de Mme Zimmermann – vers la circonscription de Metz I. Par conséquent, nous ne savons pas quel déséquilibre démographique sera, ou non, compensé.
Par ailleurs, quel est, dans ce cas précis, le motif d'intérêt général ? Il n'y en a aucun : le seul motif est politicien ! Non seulement vous supprimez la huitième circonscription dont je suis l'élue, mais l'un de mes cantons, celui de Rombas, a été rattaché à la circonscription de Metz I, détenue actuellement par François Grosdidier. Ce dernier a voulu renforcer sa circonscription à mon détriment et à celui de Mme Zimmermann, en extrayant onze bureaux de vote qui ont voté pour le Président de la République Nicolas Sarkozy à plus de 60 % lors de l'élection présidentielle. Ce n'est pas là un motif d'intérêt général.
Enfin, le Conseil d'État et la commission consultative créée par l'article 25, dite commission Guéna, ont tous deux émis un avis négatif sur le dépeçage du canton de Metz III et sur le transfert du canton de Metz I détenu par un conseiller général socialiste, Dominique Gros. Le canton de Metz I est extrait de la circonscription de François Grosdidier pour rejoindre la circonscription de Marie-Jo Zimmermann. Sur ce trafic de cantons, le Conseil d'État et la commission Guéna ont émis un avis négatif. Le Gouvernement n'en a pas tenu compte, ce qui nous semble extrêmement choquant. D'autant que la circonscription de Metz I telle que redessinée par le projet du Gouvernement va présenter une forme étonnante, avec un appendice, puisque le petit morceau du canton de Metz III ne sera rattaché à la circonscription de Metz I que par une mince bande de terre. Cette partie de Metz n'est d'ailleurs pas contiguë à la circonscription de Metz I : elle touche uniquement la ville de Longeville.
Enfin, dans le rapport, la seule justification de ce dépeçage qui nous ait été donnée est la ligne de chemin de fer, ce qui, vous l'avouerez, est un peu court.
C'est pourquoi nous demandons que l'amendement de Marie-Jo Zimmermann soit adopté, que le canton de Metz III demeure dans son intégrité dans la circonscription de Metz III et que le canton de Metz I demeure intégralement dans la circonscription de Metz I.
La suspension est de droit, je le rappelle, mes chers collègues. Je souhaite que nous puissions nous réunir, à cette occasion, avec le Gouvernement, la commission et un représentant par groupe, pour examiner l'organisation de nos travaux.
Avant l'article unique
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à treize heures cinq.)
Depuis trois jours maintenant, nous assistons à une parodie de débat. Parodie quand il a fallu, alors que nous discutions d'un texte particulièrement important, interrompre la séance dès le mardi soir pour tenter de récupérer les députés de la majorité, en nombre insuffisant dans l'hémicycle.
Parodie hier, lors de l'examen de trois propositions de loi, dont on peut considérer qu'elles avaient chacune une importance pour nos concitoyens, sur le crédit revolving, la rémunération des dirigeants d'entreprises et l'extension du référendum, ce texte étant un engagement du Président de la République lors de la dernière révision constitutionnelle. Pour permettre aux députés de la majorité de regagner leur circonscription un jeudi, le Gouvernement leur avait annoncé à l'avance qu'il demanderait la réserve du vote sur chacun de ces textes d'initiative parlementaire, ce qui a donné lieu à un débat à sens unique. Une conférence de presse aurait été aussi utile que le débat démocratique. Nous ne nous satisfaisons pas de ne pas pouvoir débattre, dans cet hémicycle, des sujets de fond !
C'est faux ! On va voter mardi en faveur de la deuxième proposition de loi !
Le Gouvernement, qui nous a annoncé, au début de la discussion du présent texte – je le répète et j'insiste sur les mots : « Vous ne sauriez ici discuter du tracé de telle ou telle circonscription », ne répond pas aux arguments que nous avons développés dans la discussion générale…
… et met ensuite tout en oeuvre pour que nous ne puissions pas voter sur les amendements, là encore du fait de l'absence de la majorité qui – et je ne sais s'il en va de même dans le pays – n'est plus majoritaire dans l'hémicycle depuis maintenant de nombreuses heures !
Le président de notre assemblée, Bernard Accoyer, a regretté, hier, le comportement de la majorité. Je pense qu'il doit avoir la même opinion aujourd'hui. Nous ne souhaitons donc pas cautionner plus longtemps cette parodie de démocratie que nous infligent le Gouvernement et une majorité minoritaire dans l'hémicycle ! Nous avons défendu et nous continuerons à défendre nos positions avec toutes les voies de recours dont nous disposons. Nous le disons donc au Gouvernement : nous sommes prêts, à l'intérieur ou en dehors de l'hémicycle, à assumer tous les débats politiques qui intéressent nos concitoyens. Mais puisque le Gouvernement n'accepte aucune discussion sur les amendements, aucune mise aux voix, et que les députés de la majorité continuent de déserter le champ du débat démocratique dans l'hémicycle pour préférer qu'il se tienne ailleurs, nous vous laissons faire votre tambouille interne, comme depuis un an ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous poursuivons l'examen des amendements.
Je suis saisi d'un amendement n° 2 rectifié .
La parole est à M. Jean Michel. (« On s'en va ! » sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Vous partez si vous voulez. En ce qui me concerne, j'ai déposé un amendement que je souhaite défendre. (Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et quittent l'hémicycle.)
Cet amendement est ainsi rédigé : « Le tableau n° 1 annexé au code électoral est ainsi modifié :
1° dans la deuxième circonscription du Puy-de-Dôme, après le mot : « Combronde », est inséré le mot : « Ennezat ».
2° dans la cinquième circonscription du Puy-de-Dôme, le mot : « Ennezat » est supprimé. »
Qu'en est-il exactement ? Comme cela a été rappelé, le Conseil constitutionnel a été amené à mentionner à trois reprises – la première fois en 2003, la deuxième en 2005 et la troisième en 2008 – le principe d'égalité des suffrages et à appeler l'attention des gouvernements successifs sur ce principe, sans qu'il soit respecté. Ce n'est donc, mon cher ami Raoult, qu'à partir de 2003…
… que ce rappel a été fait par le Conseil constitutionnel.
Notre collègue Alain Néri s'est exprimé sur ce sujet à différentes reprises.
Si j'ai déposé cet amendement, c'est parce que, dans le département du Puy-de-Dôme, dont le nombre de circonscriptions passe de six à cinq, ledit principe n'est absolument pas respecté, alors qu'il eût été facile d'équilibrer les cinq circonscriptions. Ainsi, on s'aperçoit que l'écart le plus grand, en nombre d'habitants, entre la plus peuplée et la moins peuplée des circonscriptions, est inférieur à 3 000 habitants, et que, par rapport à la moyenne départementale, il est inférieur à 1 500 habitants. La première circonscription compte 123 381 habitants ; la deuxième disparaît ; la troisième, celle de M. Giscard d'Estaing, en compte 123 892 ; la quatrième, celle de M. Bacquet, 126 366 ; la cinquième, celle de M. Chassaigne, 125 837 ; la sixième et dernière, 123 897.
Monsieur le secrétaire d'État, un quart d'heure de réflexion a été nécessaire pour aboutir à ce résultat, dont vous n'avez absolument pas tenu compte. On s'aperçoit que, dans votre proposition, l'écart entre la circonscription la plus peuplée – première circonscription avec 136 207 habitants – et la moins peuplée – deuxième circonscription avec 109 243 habitants – est de 26 964 habitants, soit un écart de 20 %.
Il est paradoxal de constater qu'alors que le département du Puy-de-Dôme a une circonscription de moins, celle de Riom, la sixième à l'heure actuelle, perd 5 414 habitants ! Du jamais vu ! Avec une circonscription en moins de 100 000 habitants, sur les cinq circonscriptions restantes, l'une en perd 5 000 ! Cette circonscription se trouve ainsi en deçà de la moyenne départementale de plus de 15 000 habitants, soit un écart de près de 13 %, ce qui est considérable. Cette situation résulte du transfert du canton d'Ennezat de la deuxième à la cinquième circonscription avec Thiers et Ambert, et ce bien qu'il se situe à quarante kilomètres de Thiers et à soixante-dix kilomètres d'Ambert. J'ai ici la carte du département du Puy-de-Dôme. L'éloignement est considérable. Or le canton d'Ennezat est celui qui est le plus proche de Riom. Quatre communes sur dix dudit canton touchent Riom. Ainsi, les quelque 9 600 habitants du canton d'Ennezat ont l'habitude de se rendre à Riom. Tous les services se trouvent dans l'agglomération riomoise, dont fait partie le canton d'Ennezat. Les collégiens se rendent donc au collège de Riom, les lycéens au lycée de Riom et les habitants d'Ennezat y fréquentent le tribunal de grande instance, l'ANPE… Les principes posés par le Conseil constitutionnel ne sont donc absolument pas respectés.
Il convient donc de rattacher à nouveau le canton d'Ennezat à la circonscription de Riom et de le retrancher de celle de Thiers-Ambert. La circonscription de Riom aura alors 118 873 habitants, ce qui est très proche de la moyenne départementale, et celle de Thiers-Ambert 119 776 habitants, soit exactement le même nombre à moins de 1 000 près. Le principe d'égalité des suffrages sera parfaitement respecté.
Je lis dans votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, que j'ai reçue il y a trois jours, et dans celle de M. Hortefeux : « En revanche, il n'a pas été possible de maintenir dans votre circonscription le canton d'Ennezat. » Donnez-moi une seule raison valable pour laquelle ce canton serait retranché de l'arrondissement de Riom. Je retirerai alors immédiatement mon amendement ; mais il n'y en a aucune.
Ce découpage répond aux mêmes principes que celui qui semble présider au déroulement du quinquennat : se servir plutôt que servir.
La commission n'a pas adopté cet amendement.
Le Puy-de-Dôme, vous l'avez rappelé, est l'un des départements qui perd une circonscription par application de la règle de la tranche.
Le découpage a été modifié à la suite des observations de la commission indépendante. Le Gouvernement a intégralement suivi l'avis de la commission.
Enfin, les écarts démographiques auxquels vous avez fait référence sont faibles puisque la deuxième circonscription, la moins peuplée, n'a qu'un écart de 12,39 % par rapport à la moyenne.
Défavorable. Il y a des observations de la commission de contrôle mais elles ne portaient pas du tout sur le canton d'Ennezat. Par la suite, le Conseil d'État a donné un avis favorable au découpage général du département du Puy-de-Dôme.
Les écarts constatés dans le département du Puy-de-Dôme sont importants, contrairement à ce que vous dites. Près de 27 000 habitants d'écart entre la circonscription la plus peuplée et celle qui est la moins peuplée alors que rien ne le justifie puisqu'il était possible de faire un découpage tel que chacune des circonscriptions ait, à 3 000 habitants près, le même nombre d'habitants.
Avec de surcroît une circonscription en moins, comment pouvez-vous justifier le fait que la circonscription de Riom perde plus de 5 000 habitants ? C'est particulièrement inadmissible. Comment pouvez-vous justifier que l'on enlève le canton le plus proche de Riom, obligeant ses habitants à aller à Thiers ou à Ambert alors qu'ils n'ont avec ces villes aucune relation de vie, si ce n'est parce que le canton d'Ennezat a voté à 57 % à gauche et vote à gauche régulièrement ?
Vous avez même tenté à un moment de rattacher à la circonscription de Riom le canton de Rochefort-Montagne, fief historique de la giscardie, où le président Giscard d'Estaing s'est fait élire après sa défaite électorale en 1981. Le journal local La Montagne avait d'ailleurs écrit : « Rochefort-Montagne reste en giscardie ». Dans votre réponse, vous m'expliquez que j'ai obtenu satisfaction puisqu'on m'a enlevé Rochefort-Montagne, mais ce n'est pas pour moi que vous l'avez enlevé, c'est pour M. Giscard d'Estaing, en raison de sa réclamation.
Rappelez-vous qu'un jour, après les questions d'actualité, je vous avais annoncé que M. Giscard d'Estaing père ne le permettrait pas. « Je n'en ai rien à faire, de Giscard », m'avez-vous répondu. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Le résultat est là.
Il convenait de prendre en compte cette réclamation dans la mesure où la circonscription de Riom perd 5 000 habitants, ce que rien ne justifie.
(Le vote sur l'amendement n° 2 rectifié est réservé.)
Je suis saisi d'un amendement n° 4 rectifié .
La parole est à M. Philippe Folliot.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous ai écouté avec attention, je ne vous ai pas interrompu, j'ai essayé de participer de la manière la plus sereine qui soit à ce débat. Mercredi, lors de mon intervention, j'ai affirmé avec force et conviction un certain nombre d'idées en étant toujours très respectueux de votre personne, et je me désolidarise totalement d'un certain nombre de propos qui auraient pu être tenus ici ou là sur les différents bancs.
Cela dit, la façon dont se passent ces débats, ou, en l'occurrence, cette absence de débat, me gêne à certains égards et j'espère que vous prendrez la peine de me répondre sur plusieurs points que je vais pouvoir enfin aborder.
Tout d'abord, vous n'avez aucunement répondu à l'ensemble des interrogations et remarques qui avaient été les miennes lors de mon intervention de mercredi.
Je constate aussi avec regret que la lettre que je vous avais adressée le 29 juillet dernier est restée sans réponse. Vous avez répondu à M. Michel, et je m'en félicite, mais je regrette que vous n'ayez jamais pris la peine de répondre à mon courrier. J'espère que vous le ferez oralement tout à l'heure.
Dans la mesure où vous n'avez fait que me renvoyer aux pages 118 et 119 du rapport, je me permettrai de relever un certain nombre d'erreurs, d'anomalies et de contradictions qu'il peut y avoir dans ces deux pages.
Vous dites d'abord, monsieur le rapporteur, que le redécoupage du département du Tarn, qui me paraît très contestable et très contesté, se fait en toute logique à partir des circonscriptions les plus peuplées, la deuxième et la quatrième. Permettez-moi simplement de constater un oubli, une erreur. Si l'intégralité de la deuxième circonscription est dans la nouvelle répartition, il n'en est pas de même pour la quatrième. Le canton d'Anglès, qui en faisait partie, ne fera pas partie de la future circonscription, la troisième, Castres-Mazamet-Lavaur.
On lit dans le rapport qu'il n'était pas imposé de reprendre les grandes lignes du redécoupage de 1958. Au-delà du fait que c'est ce que demandent l'ensemble des forces politiques du département, je constate simplement, monsieur le secrétaire d'État, que vous êtes en fondamentale et flagrante contradiction avec les propos qui ont été les vôtres mardi et mercredi puisque vous avez dit que vous suivriez le redécoupage de 1958 du moment qu'il y avait une logique et des équilibres démographiques, ce qui, en l'occurrence, est le cas pour le département du Tarn, comme je l'ai démontré mercredi et comme je vais le démontrer à nouveau tout à l'heure, parce que, visiblement, cela n'a pas été compris.
Concernant l'organisation des nouvelles circonscriptions, vous mettez en avant le fait que les deuxième et troisième circonscriptions sont groupées autour d'importants axes routiers, existants, l'A 68 entre Albi et Toulouse, ou futurs, nous l'espérons, l'autoroute entre Castres et Toulouse, et la notion de perspectives de croissance démographique, que nul ne conteste, autour de ces deux axes structurants.
Permettez-moi simplement de vous faire remarquer que votre projet ne fera qu'aggraver les déséquilibres entre l'ouest et l'est du département puisque la première circonscription, Albi-Castres-montagne, regroupera l'ensemble des secteurs les moins dynamiques du département sur le plan démographique.
Il y a un différentiel de population très élevé, 19 000 habitants, entre l'est et l'ouest du département, entre la première et les deuxième et troisième circonscriptions, qui, en tout état de cause, ira croissant, puisque le secteur de la montagne, malheureusement, perd de la population, ce qui n'est pas indiqué dans le rapport. Ainsi, le canton de Vabre, dont j'étais conseiller général, a perdu 12 % de sa population entre 1990 et 1999, la plus importante baisse de population de la région Midi-Pyrénées. Ne pas tenir compte de ces réalités démographiques fait que nous allons nous retrouver très rapidement avec un écart très élevé de population entre la première circonscription et les deux autres. La notion d'équilibre, d'équité, ne sera pas du tout respectée, avec tout ce que cela représente.
Permettez-moi également de dire un mot de la méconnaissance totale qu'ont vos services ainsi que M. le rapporteur de la géographie du département du Tarn.
Dire que le découpage de la nouvelle première circonscription adosse des cantons castrais et albigeois à l'ensemble de la zone de montagne, d'Anglès au sud à Villefranche au nord, dire que Villefranche d'Albi fait partie de la montagne tarnaise est une contrevérité flagrante qui ne correspond à rien. Vous qui êtes élu du Cantal, qui connaissez les problématiques de montagne, vous savez mieux que quiconque quelle est la différence entre une zone de piémont et une zone de montagne. Dire que Valence-d'Albi ou Villefranche-d'Albi font partie de la zone de montagne, c'est une contrevérité affligeante, et je regrette que cela soit écrit noir sur blanc dans un rapport parlementaire.
Un autre élément me paraît aussi particulièrement choquant. Vous scindez la ville de Castres en deux, ce qui n'a jamais été le cas depuis 1815, c'est-à-dire depuis qu'il y a des circonscriptions, de même que jamais une partie de la ville de Castres ne s'est retrouvée dans la même circonscription qu'une partie de la ville d'Albi. Pour justifier un tel découpage, on peut lire dans le rapport qu'il n'y a pas d'inconvénient à partager la ville de Castres, étant entendu que la communauté d'agglomération Castres-Mazamet est déjà partagée en deux circonscriptions, mais c'est un argument qui ne peut pas être entendu pour une bonne et simple raison, c'est que la communauté d'agglomération a été créée en 1999, donc postérieurement au redécoupage de 1986. Se servir d'un tel argument pour justifier le fait que la commune de Castres sera coupée en deux est un non-sens flagrant et affligeant.
À supposer qu'il soit légitime de scinder la ville de Castres en deux, Mazamet-Lavour étant au sud du département, la logique eût voulu que les deux cantons de Castres raccrochés à la nouvelle circonscription que vous souhaitez créer, la troisième circonscription, Castres-Mazamet-Lavour, fussent les cantons de Castres sud et de Castres ouest.
Pourquoi ? Parce que le canton de Castres ouest a été créé il y a moins d'une dizaine d'années par scission du canton de Castres sud. Plutôt que de choisir cette logique géographique, vous préférez raccrocher à la circonscription les cantons de Castres ouest et de Castres nord, cantons les plus à droite puisque le score de Nicolas Sarkozy au deuxième tour de l'élection présidentielle de 2007 y a été respectivement de 58 % et 54 %. Ce nouveau découpage sera favorable au député UMP Bernard Carayon, dont je regrette l'absence aujourd'hui ; d'ailleurs il a été peu présent lors de la discussion de ce projet de loi.
Pour justifier l'injustifiable, c'est-à-dire le rattachement des cantons de Castres nord et de Castres ouest à la circonscription de Mazamet-Lavaur, vous inventez une nouvelle notion juridique que je ne connaissais pas, celle de communauté de territoires. Mais il y a autant de communautés de territoires que de territoires dans notre pays. Votre logique est d'autant plus surprenante que vous ne voyez aucun inconvénient à scinder en deux la communauté d'agglomération Castres-Mazamet et, a fortiori, la ville de Castres. Permettez-moi de vous dire que vos arguments ne tiennent pas la route.
Pour justifier ce redécoupage, vous vous appuyez sur la seule lettre du maire de Castres. Or, comme je vous l'ai dit mercredi dernier, une cinquantaine d'élus de l'est et du sud du Tarn se sont associés au recours que j'ai formé devant le Conseil d'État pour contester ce redécoupage. Par ailleurs, une dizaine de conseillers généraux se sont prononcés contre votre proposition que l'association des maires du Tarn a rejetée à l'unanimité, toutes tendances confondues, lors de son conseil d'administration. Je regrette que vous négligiez la position de ceux qui, pour la plupart, sont de vos amis.
Face à une non-réponse de votre part, je me vois dans l'obligation de défendre l'amendement n° 4 rectifié .
Il nous paraît nécessaire, pour des raisons démographiques, territoriales et démocratiques, de substituer à votre projet de redécoupage un projet qui reprend point par point les propositions de la commission Guéna, laquelle, en quelque sorte, a mis un zéro pointé à votre copie sur le Tarn puisqu'elle a proposé une complète réécriture.
L'argument démographique met en évidence un écart très important – 18 663 habitants – dans la proposition du Gouvernement entre la circonscription la plus peuplée, celle de Castres-Lavaur-Mazamet, et la moins peuplée, celle d'Albi-Castres-montagne. Ce déséquilibre va inévitablement s'accroître dans la mesure où l'ouest du Tarn bénéficie d'une dynamique démographique importante et constante en raison de l'autoroute Toulouse-Albi tandis que l'est du département voit sa population stagner, voire diminuer légèrement dans certains cantons ruraux. L'évolution logique et prévisible de ces tendances aboutira sans conteste, dans les années qui viennent, à aggraver le déséquilibre démographique que le présent redécoupage a pourtant vocation à corriger au nom de l'égalité devant le suffrage.
En revanche, le retour légèrement aménagé aux trois circonscriptions en vigueur entre 1958 et 1986, proposé par la commission Guéna et validé par la section de l'intérieur du Conseil d'État, présente l'avantage de réduire à 4 000 habitants l'écart maximum entre la circonscription la plus peuplée et la circonscription la moins peuplée, et donne de surcroît une avance démographique à la circonscription de l'est tarnais qui présente les caractéristiques d'un maintien ou d'un ralentissement démographique, contrairement aux deux autres circonscriptions.
L'argument territorial a été à juste titre mis en évidence par la commission Guéna, qui propose de s'appuyer sur la distinction traditionnelle des bassins de vie du Tarn, à savoir Albi-Carmaux, Castres-Mazamet et Gaillac-Graulhet-Lavaur. Cette proposition présente l'avantage de correspondre aux grands pôles historiques, géographiques et économiques du département que sont le nord, l'est et l'ouest. Je ne reviendrai pas sur certains éléments du rapport qui sont à la limite du supportable en ce qui concerne les difficultés que le bassin textile du sud du département a connues.
Cette proposition fonctionne aussi de manière cohérente avec les organisations territoriales administratives et politiques tarnaises que sont par exemple la communauté d'agglomération Castres-Mazamet et celle d'Albi. A contrario la proposition du Gouvernement non seulement divise ces regroupements intercommunaux mais plus encore aboutit à couper les communes d'Albi et de Castres entre deux circonscriptions distinctes, si bien qu'un des deux députés de Castres, sous-préfecture du Tarn, serait aussi celui de la préfecture d'Albi.
On m'opposera l'argument selon lequel la ville d'Albi était déjà coupée. En 1987, le choix avait été fait de diviser en deux la ville d'Albi sur une base géographique, la rivière, connue et reconnue par tout le monde. Avec un redécoupage en trois circonscriptions, la logique est totalement différente. Diviser l'une ou l'autre des deux villes et mettre un bout de l'une avec un bout de l'autre est contraire à toute logique historique et territoriale. Si cette solution peut s'imposer dans les grandes villes françaises, elle est totalement incompréhensible dans le cas de deux villes dont la population va de 43 000 à 50 000 habitants.
L'argument démocratique découle de cette dernière observation. Si le député n'est pas à proprement parler l'élu d'un territoire – mais que le député qui n'a jamais pris la parole ici pour défendre son territoire se lève –, il importe qu'il soit clairement identifié par les citoyens et les acteurs de la circonscription électorale dans laquelle il est élu puisque le choix a été fait de maintenir des unités territoriales pour l'élection des députés. Il est en effet dans la pratique de sa fonction le relais des dossiers de sa circonscription à Paris ou au niveau des administrations concernées. De ce point de vue, la proposition du Gouvernement ne fait qu'introduire inutilement de la confusion et de l'incompréhension et risque de susciter un sentiment de soupçon sur les réelles motivations de ce redécoupage contre-nature. C'est pourquoi l'association des maires du Tarn s'est prononcée à l'unanimité contre cette proposition et de nombreux autres élus locaux ont également fait part de leur rejet.
Mes chers collègues de la majorité, il est des moments où notre devoir de parlementaire est de s'affranchir de certaines disciplines pour essayer de rééquilibrer et de rétablir un certain nombre de principes. C'est ce que je vous propose de faire en votant cet amendement qui ne fait que reprendre les propositions de la commission Guéna, validées par la section de l'intérieur du Conseil d'État, dont vous avez dit vous-même, monsieur le secrétaire d'État, que c'était une institution permanente de la République à l'autorité incontestable.
J'espère que vous accepterez cet amendement. Nous y serions tous très sensibles. Cela nous permettrait de sortir grandis d'une opération considérée sur le terrain comme une opération politicienne, un charcutage, mais non comme un redécoupage républicain.
Le remodelage des circonscriptions législatives conduit à la disparition de trente-trois circonscriptions, dont une dans le département du Tarn. Effectivement, monsieur Folliot, le redécoupage y est plus difficile qu'ailleurs et je respecte votre position et vos préoccupations.
C'est l'un des départements pour lesquels le Gouvernement n'a pas suivi l'avis de la commission indépendante.
Je vous le répète, je n'en sais rien !
J'aurais peut-être pu me procurer l'avis de l'assemblée générale du Conseil d'État, mais je ne l'ai pas fait et je ne l'ai jamais vu. Cet avis a été donné au Gouvernement et à lui seul. Je ne peux donc pas prendre partie sur un avis que je n'ai pas vu.
En revanche, il est vrai que le Gouvernement n'a pas suivi l'avis public de la commission indépendante et il s'en est expliqué. À cet égard, je vous renvoie aux pages 118 et 119 de mon rapport qui sont extraites d'un document du Gouvernement.
Vous avez avancé des arguments à l'encontre de ce redécoupage et d'autres en faveur d'un découpage que vous proposez, arguments de nature politique, territoriale et administrative.
Effectivement.
La commission, quant à elle, a pris une position de principe conforme à la loi d'habilitation telle qu'interprétée et confirmée par le Conseil constitutionnel : s'en tenir au seul critère démographique. L'objectif que la loi d'habilitation fixait au Gouvernement, validé et même sacralisé par le Conseil constitutionnel, est d'aboutir à un découpage des circonscriptions, à l'intérieur de chaque département, respectueux de l'équilibre démographique. À cet égard, le découpage du Tarn, dont personne ne conteste la difficulté, respecte parfaitement cet équilibre démographique.
Détaillons. Le Gouvernement a divisé Albi et Castres : il en avait le droit…
…selon la loi d'habilitation, et le résultat auquel on aboutit est démographiquement équilibré puisque aucune circonscription ne s'écarte de plus ou de moins 20 % de la moyenne départementale et que l'écart le plus fort est de 9,27 %.
Dans ces conditions, la commission n'a pu donner un avis favorable à votre amendement.
Monsieur le secrétaire d'État, le fait que vous ne me répondiez pas me consterne. Au moins le rapporteur aura-t-il essayé, tant bien que mal, de défendre l'indéfendable, et je reconnais que l'exercice n'est pas facile.
Vous avez fait référence, monsieur le rapporteur, à l'avis du Conseil d'État. Je constate simplement que les extraits qui allaient dans le sens du Gouvernement ont été publiés, mais pas les autres, comme par hasard.
Je suis catastrophé. La situation méritait, monsieur le secrétaire d'État, que vous preniez la peine de me répondre en quelques mots.
Monsieur le rapporteur, vous mettez en avant des arguments démographiques, mais je vous ai expliqué en long et en large que votre projet conduirait à un écart de 19 000 habitants entre la circonscription la plus peuplée et la moins peuplée. Tout le monde le sait, cet écart ne pourra que s'aggraver et nous dépasserons très rapidement, si tant est que ce ne soit déjà fait, le seuil fixé par la loi d'habilitation.
Ce n'est pas ma proposition que je défends, mais celle de la commission indépendante prévue par l'article 25 de la Constitution, dite commission Guéna, et qui est plus équilibrée sur le plan démographique. Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas dire que votre proposition respecte les équilibres démographiques. Elle les respecte beaucoup moins que la proposition de la commission Guéna, et c'est pour cela que je me bats !
Un homme politique ne s'arrête pas à ses intérêts personnels car nul ne sait s'il sera candidat à sa propre succession.
Son travail s'inscrit dans la durée, vous-même l'avez dit, monsieur le secrétaire d'État. Malheureusement, au regard des évolutions démographiques, vous ne vous situez pas dans la durée.
N'oubliez pas que l'on nous regarde. Comment voulez-vous que nos concitoyens croient en la chose publique, en la politique, quand nous agissons ainsi ? Quand vous cautionnez de tels comportements ? Quand vous n'osez même pas me répondre devant la représentation nationale ? Quand vous ne répondez même pas à mes courriers ?
Vous ne m'avez pas répondu mais, puisque vous affirmez le contraire, lisez donc cette lettre devant la représentation nationale. C'est regrettable, c'est dommage. Ce n'est pas ainsi que nous rapprocherons nos concitoyens de la politique. Je ne me bats pas pour moi mais pour des principes. Je suis député depuis 2002 et j'ai toujours affiché mes convictions. Peut-être me reproche-t-on aujourd'hui d'avoir osé, parfois, être différent, mais j'ai toujours été franc et loyal. Je n'en attends pas moins de vous.
Le vote sur l'amendement n° 4 rectifié est réservé.
Je suis saisi d'un amendement n°5 rectifié .
La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp.
Le redécoupage électoral dans le Val-de-Marne nécessite en effet de supprimer une circonscription, et la septième, dont je suis l'élue, étant la plus petite, il est assez normal qu'elle soit redécoupée. Ma pensée, si vous me le permettez, va vers Roland Nungesser, qui m'a, en quelque sorte, passé le relais, et dont les quatre cantons de la circonscription – Nogent-sur-Marne, Joinville-le-Pont, Champigny ouest et Saint-Maur ouest – portent encore le témoignage de sa remarquable action.
Monsieur le secrétaire d'État, en vertu de l'usage républicain, je ne parlerai pas ici de mon cas, exauçant ainsi le voeu liminaire que vous avez formulé. L'amendement n° 5 rectifié tend simplement à ajuster, si vous me le permettez, votre projet aux préconisations de la commission consultative indépendante, dont je pense, mais vous pourrez le vérifier, qu'elles ont été confortées par l'avis du Conseil d'État et qu'elles aboutissent à un écart démographique, après redécoupage, plus réduit que celui auquel conduit votre projet. Il me semble que telle était la tâche qui vous fut confiée. Aller dans le sens des préconisations de la commission consultative indépendante permettrait de mieux y satisfaire.
J'ajoute que je ne saurais me contenter des explications bredouillées par l'un de vos collaborateurs car j'aurais préféré ne pas les avoir entendues.
Nous sommes une nouvelle fois, mais ce n'est pas un hasard, confrontés à un département qui perd une circonscription. Il est logique que notre discussion, ainsi que les amendements présentés, se focalisent sur ces départements-là. La suppression d'une circonscription, outre qu'elle porte atteinte à l'un d'entre nous, qu'il soit de la majorité ou de l'opposition, affecte l'ensemble du département. Ces cas sont forcément les plus difficiles.
S'agissant plus particulièrement du Val-de-Marne, la question est d'autant plus délicate qu'il s'agit d'un grand département, avec des cantons très peuplés, une agglomération continue. C'est une difficulté supplémentaire.
C'est vrai, le Gouvernement n'a pas suivi l'avis de la commission indépendante. Il s'en est expliqué dans les fiches qu'il nous a fait parvenir et qui sont jointes au rapport.
La commission des lois a pris le parti de s'en tenir au seul critère démographique car c'est celui qui figure dans la loi d'habilitation et auquel le Conseil constitutionnel a conféré un caractère quasi exclusif, dirai-je.
Le résultat auquel l'on aboutit dans le Val-de-Marne respecte l'écart maximal de 20 %, en plus ou en moins, que la loi d'habilitation prévoit.
Pour ces raisons, la commission n'a pas pu adopter votre amendement.
Mon intervention s'adressait essentiellement aux députés socialistes de Seine-Saint-Denis. Puisqu'ils ont malheureusement choisi de quitter l'hémicycle, je n'ai plus de raison de m'exprimer, d'autant plus que le ministre a en partie repris les arguments que je voulais développer.
Les amendements déposés sur l'article unique ne sont pas défendus : par conséquent, nous avons achevé l'examen de cet article. La suite de la discussion de ce texte aura lieu le mardi 20 octobre, après les questions au Gouvernement.
Vous avez néanmoins la parole, monsieur Folliot.
Je ne vais pas revenir sur ce que j'ai dit il y a un instant, mais j'aimerais lire la lettre que je vous ai adressée le 29 juillet dernier. J'espère que cela vous donnera le temps de préparer votre réponse, monsieur le secrétaire d'État.
« Monsieur le Ministre,
« J'ai pris note que lors du conseil des ministres de ce matin, pour ce qui a trait au redécoupage concernant le département du Tarn, vous avez choisi de persévérer dans votre projet initial.
« Cela appelle de ma part des remarques tant de forme que de fond.
« Sur la forme tout d'abord, lors de notre seule et unique rencontre sur ce sujet au mois d'octobre dernier, alors que vous me faisiez part de vos projets en compagnie de M. Hervé Fabre-Aubrespy, conseiller du Premier ministre et de M. Ange Sitbon, permanent de l'UMP, je vous indiquai mon opposition à votre projet se traduisant plus particulièrement par une cassure des villes d'Albi et de Castres partiellement regroupées, et mon souhait que soient respectées les logiques territoriales, démographiques et historiques par un retour aux grands équilibres des circonscriptions de 1958. Vous m'expliquiez que cela vous semblait contradictoire avec votre objectif « de préserver les intérêts du député UMP Bernard Carayon ». Vous m'indiquiez que vous chargeriez M. le préfet du Tarn d'une consultation de l'ensemble des forces politiques du département, et qu'éventuellement vous tiendriez compte de ses suggestions avant la saisine de la commission indépendante prévue à l'article 25 de la Constitution. À l'issue de sa consultation, et répondant au voeu quasi-unanime – à l'exception de l'UMP – de l'ensemble des forces politiques du département, celui-ci proposait un scénario sur les bases des circonscriptions de 1958. Malgré cela, lors d' un échange avant la saisine de la « commission Guéna », vous me précisiez vous sentir obligé de maintenir vos propositions initiales tout en déclarant, compte tenu de leur nature, « ne vous faire guère d'illusions sur les conclusions de cette commission », laissant supposer que vous en tiendriez compte avant la saisine du Conseil d'État. L'avis sans ambiguïté de la « commission Guéna » est tombé, réécrivant totalement pour le Tarn la proposition initiale du Gouvernement en reprenant pour l'essentiel le redécoupage de 1958. Avant la saisine du Conseil d'Etat vous m'expliquiez au téléphone votre volonté de ne pas suivre l'avis de la « commission Guéna » tant que celui-ci ne serait pas confirmé par le Conseil d'État, tout en m'expliquant que « l'installation d'un nouveau régiment à Castres serait une bonne compensation » ! Je constate amèrement qu'après un nouvel avis défavorable, cette fois-ci du Conseil d'État, vous avez une nouvelle fois choisi de ne pas en tenir compte. Je m'interroge sur l'opportunité et l'intérêt de tels concertations et avis si c'est pour les ignorer systématiquement...
« Par ailleurs, au-delà d'un certain manque de courage dans cette affaire puisque vous n'avez même pas pris la peine de m'appeler contrairement à vos engagements initiaux, je suis outré que vous osiez justifier, comme me l'a confirmé le journaliste intéressé, le redécoupage du Tarn en faisant écrire dans un article du Monde en date des 27-28 juillet qu' il est le résultat d'un « subtil équilibre [...] pour préserver le siège de l'actuel député Nouveau Centre Philippe Folliot ». Une telle présentation des choses, parfaitement contraire à la vérité, me révolte, et le fait que vous n' assumiez pas le caractère politicien d'une telle manoeuvre au seul profit du député UMP du département me désole.
« Sur le fond, mon analyse, partagée officiellement et unanimement entre autres par l'Association des maires du Tarn, demeure inchangée : votre projet est contraire aux logiques démographique, géographique et historique de ce département. Comme l'a proposé la « commission Guéna », un autre redécoupage est non seulement possible mais souhaitable à travers un retour rééquilibré aux trois circonscriptions de 58-86 : Castres-Mazamet-montagne, Albi-Carmaux-Ségala, Gaillac-Graulhet-Lavaur. Celui-ci respectera mieux et durablement les critères démographiques fixés par la loi d'habilitation (4 000 habitants d'écart entre la circonscription la moins peuplée et la plus peuplée contre 19 000 dans votre projet), tout en prenant en compte les réalités historiques des bassins de vie et les structures administratives communales et intercommunales. Mais, par-dessus tout, il sera mieux compris par nos concitoyens qui cherchent dans la démocratie représentative des repères et des réponses à leurs préoccupations quotidiennes.
« N'ayant qu'une parole, assumant tous mes choix de député depuis 2002, je crois encore à certains principes. Aussi, par courtoisie républicaine, est-ce par écrit que je vous informe de mon intention de déposer dans les prochains jours un recours devant le Conseil d'État contre votre ordonnance et de ma volonté d'utiliser toutes les voies possibles pour m'opposer à votre projet. En effet, je pense qu'un redécoupage ne doit pas être construit en vue d'être favorable à tel ou tel mais doit se faire avec un esprit et une volonté de respect des principes républicains et des règles élémentaires de la démocratie, qui, visiblement, ne le sont pas ici, comme les élus tarnais de tous bords vous l'ont écrit.
« J'espère vous lire, vous voir ou vous entendre très prochainement et, en l'attente, vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l'expression de mes sentiments les meilleurs.
Philippe Folliot »
Il est vrai, monsieur le secrétaire d'État, que j'ai eu un accusé de réception téléphonique, au travers d'un message que vous avez laissé le 31 juillet dernier au soir, de Montpellier, sur ma messagerie. Vous m'y précisiez que vous n'étiez pas à Paris mais que, dès que vous prendriez connaissance de ce courrier, vous me répondriez en me rappelant ou en m'écrivant. Malheureusement, tel n'a pas été le cas et je le regrette.
Cela étant, j'ai déposé un recours devant le Conseil d'État – un référé et un recours au fond. Lors de la défense du référé, le représentant du Gouvernement a soutenu qu'il n'était pas judicieux ni utile d'accepter le référé de M. Folliot, ainsi que ceux qui avaient été déposés par d'autres députés ou par des formations politiques, au motif que, le Parlement ayant jusqu'à la fin du mois de novembre pour ratifier l'ordonnance, le délai était largement suffisant pour que le Conseil d'État puisse se prononcer au fond. Je constate qu'en dépit d'un ordre du jour très chargé, que le représentant du Gouvernement avait précisément invoqué comme argument pour défendre sa position, vous avez finalement choisi de faire examiner ce texte par l'Assemblée nationale plus tôt, la conséquence étant que le Conseil d'État n'a pas pu se prononcer au fond. Cela pose un problème de droit, mes chers collègues, puisque, après le vote de ce projet de loi ratifiant l'ordonnance, aucun recours ne sera plus possible, ce qui est contraire à tous les principes élémentaires du droit, lesquels assurent un recours avant ou après la décision. La seule possibilité serait en effet de déposer un recours devant le Conseil constitutionnel. Or, monsieur le secrétaire d'État, vous n'êtes pas sans savoir que seuls les groupes disposant de soixante députés au moins peuvent déposer un recours devant le Conseil constitutionnel, les élus d'un groupe ne disposant pas du nombre de députés requis se trouvant dès lors empêchés d'exercer une telle faculté.
Monsieur le président de la commission des lois, vous qui êtes un juriste averti et un homme soucieux d'assurer l'État de droit, vous reconnaîtrez avec moi qu'un tel état de fait mérite réflexion. À un moment ou à un autre, nous devrons nous interroger ! Je le répète : le fait de ne pas pouvoir contester une décision pose un problème en termes d'équilibre démocratique et d'organisation des pouvoirs.
J'espère, monsieur le secrétaire d'État, que vous avez enfin la réponse à ma lettre et que vous allez pouvoir nous en donner lecture, ce qui serait une manière plus honorable de conclure nos débats.
Alors que j'avais demandé la parole à l'issue de la discussion générale, je n'ai pas pu m'exprimer. Toutefois, je reconnais volontiers que, s'agissant d'un article unique, le fait de ne prendre la parole qu'à la fin de nos débats revient à peu près au même que si je m'étais exprimé plus tôt sur l'ensemble de la loi.
Afin de ne pas allonger un débat qui, parfois, a été très fourni, voire très vif, je me contenterai de rectifier trois affirmations fausses de nos collègues socialistes. Je regrette qu'ils ne soient plus là pour m'entendre.
Ils ont premièrement affirmé que la suppression des circonscriptions concerne majoritairement des circonscriptions de gauche. Ils sont même allés jusqu'à donner des chiffres. Selon eux, le projet du Gouvernement supprimerait vingt-trois circonscriptions de l'opposition ou de la gauche contre seulement dix de la majorité présidentielle. C'est faux. Si trente-trois circonscriptions sont bel et bien supprimées, il convient tout d'abord de mettre à part le cas de la Creuse, qui voit la fusion de deux circonscriptions, une appartenant à la gauche et une à la droite, si bien qu'on ne peut déterminer le camp dans lequel il convient de ranger la circonscription supprimée. Ensuite, sur les trente-deux circonscriptions restantes, seize sont socialistes ou apparentées, quatorze appartiennent à l'UMP ou au Nouveau Centre et deux à la Gauche démocratique et républicaine. Les chiffres donnés par le parti socialiste – vingt-trois contre dix – sont donc faux et il s'agit bien de sa part d'une affirmation erronée, voire d'un mensonge caractérisé.
La deuxième affirmation fausse du parti socialiste consiste à prétendre que la méthode de répartition des sièges, dite méthode de la tranche commencée, avantage la droite et la majorité présidentielle ainsi que les petits départements ruraux, qui sont supposés être plutôt favorables à la majorité présidentielle. C'est de nouveau inexact.
Si on prend les départements dans lesquels l'attribution du dernier siège s'est jouée dans un écart démographique allant de un à 20 000, on s'aperçoit que les résultats sont très partagés. Le deuxième siège des Hautes-Alpes a été attribué pour une différence de 5 725 habitants, le deuxième siège de la Corse-du-Sud pour une différence de 10 718 habitants, le cinquième siège de la Côte-d'Or – un grand département – pour une différence de 17 168 habitants, le cinquième siège du Doubs – un autre grand département – pour une différence de 16 157 habitants, le huitième siège du Finistère – nous entrons dans la catégorie des poids lourds – pour une différence de 8 001 habitants, le douzième siège de la Gironde – un grand département de gauche – pour une différence de 18 758 habitants, le neuvième siège de l'Hérault – un autre grand département de gauche – pour une différence de 1 041 habitants, le troisième siège du Jura pour une différence de 7 399 habitants, le septième siège du Maine-et-Loire pour une différence de 16 659 habitants, le sixième siège des Pyrénées Atlantiques pour une différence de 11 840 habitants et le quatrième siège des Vosges pour une différence de 4 975 habitants. Le parti socialiste est de nouveau pris la main dans le sac : l'affirmation selon laquelle l'application de la méthode de répartition dite de la tranche commencée avantage la majorité présidentielle est fausse.
La troisième et dernière affirmation inexacte et mensongère du parti socialiste a été martelée sur tous les tons, de façon, sans doute, à impressionner, non pas les députés, mais la presse : le tracé des circonscriptions avantagerait l'UMP. Le parti socialiste a même été plus précis puisqu'il prétend que la gauche aurait, avec le nouveau découpage, besoin de 51,4 % des voix pour avoir une majorité en sièges. Eh bien, cette affirmation-là aussi est fausse !
En effet, pour la justifier, le parti socialiste a appliqué le nouveau découpage au résultat des élections législatives de 2007. Or, pour ce faire, il a, d'une part, retenu les résultats du deuxième tour des élections de 2007 et, d'autre part, additionné les résultats des différents candidats appartenant à la même tendance politique, afin de calculer les résultats des nouvelles circonscriptions lorsqu'elles sont constituées de territoires provenant de circonscriptions différentes. Cette méthode ne saurait fonctionner puisqu'elle consiste à additionner, ou plutôt à amalgamer des résultats de circonscriptions gagnées au second tour avec des résultats de circonscriptions gagnées dès le premier tour, ainsi que des résultats de personnalités différentes.
Monsieur le secrétaire d'État, on vous a beaucoup traité, avec une grande discourtoisie, de charcutier. Avec une telle méthode, qui consiste à amalgamer des résultats de candidats différents et de circonscriptions gagnées, les unes au premier tour et les autres au second – méthode, qui, je tiens à le souligner, n'a reçu le soutien d'aucun expert indépendant –, le parti socialiste additionne, lui, des navets et des carottes. J'ignore si vous étiez au rayon charcuterie : en tout cas, nos collègues socialistes sont allés se servir au rayon produits frais. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Prochaine séance, mardi vingt octobre à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Quatre votes solennels sur :
Le projet de loi ratifiant l'ordonnance portant délimitation des circonscriptions pour l'élection des députés ;
La proposition de loi relative à l'encadrement des crédits à la consommation et l'action de groupe ;
La proposition de loi relative à la rémunération des dirigeants d'entreprises et des opérateurs de marché ;
La proposition de résolution sur l'extension du référendum ;
Discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2010.
La séance est levée.
(La séance est levée à quatorze heures quinze.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma