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Séance en hémicycle du 24 mars 2011 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution de M. Jean-Marc Ayrault et plusieurs de ses collègues, sur le climat tendant à mettre en oeuvre les engagements du Grenelle et à réduire les émissions de gaz à effet de serre (3186).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Paul Chanteguet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Monsieur le président, madame la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, il ressort d'une enquête réalisée par l'IFOP pour Le Monde et effectuée du 8 au 10 novembre 2010, que les Français, s'ils étaient en priorité préoccupés par la crise économique, l'étaient aussi par les risques liés au changement climatique, à la pollution des eaux et, déjà, au nucléaire. En effet, 56 % d'entre eux considéraient que le réchauffement climatique constituait une menace et ils étaient 74 % à penser que l'augmentation de la température était le résultat des activités humaines.

La France, depuis la publication du premier rapport du GIEC, a participé très concrètement à la prise de conscience mondiale sur les changements climatiques et la perte de biodiversité, ce dont nous devons, bien entendu, nous féliciter : avec François Mitterrand qui signa, au Sommet de la terre à Rio en juin 1992, la convention cadre des Nations unies reconnaissant la responsabilité historique des pays industrialisés dans le changement climatique et invitant chaque État, et plus particulièrement les pays riches, à prendre des mesures pour atténuer ces émissions de gaz à effet de serre ; avec Lionel Jospin qui négocia pour la France et pour l'Europe l'accord de Kyoto en 1997 ; avec le Président de la République et Jean-Louis Borloo, qui ont porté au niveau européen l'adoption, fin 2008, du paquet « énergie-climat » qui engage les États membres à respecter un triple objectif en matière de lutte contre le changement climatique – réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20 % par rapport à 1990 à l'horizon 2020, gagner 20 % en termes d'efficience énergétique et faire passer la part des énergies renouvelables dans la consommation totale d'énergie finale à 20 % d'ici à 2020.

Ces objectifs ont été traduits dans la loi dite « Grenelle 1 », en son article 2 qui précise que « la France se fixe comme objectif de devenir l'économie la plus efficiente, en équivalent carbone, de la Communauté européenne d'ici à 2020 ». Cet objectif ambitieux nous rappelle, madame la ministre, le temps, qui n'est pas encore très loin, où nous avons pensé que les responsables politiques de votre majorité s'étaient approprié les défis environnementaux auxquels notre planète est confrontée et qu'ils en avaient compris les enjeux. Souvenons-nous des déclarations du Président de la République, en octobre 2007, à l'occasion de la remise des conclusions des tables rondes du Grenelle. Souvenons-nous du plan « justice-climat » présenté par Jean-Louis Borloo peu de temps avant Copenhague, dont nous avons partagé les orientations, mais qui, malheureusement, ne vécut que l'instant d'une annonce médiatique, voué à l'échec qu'il était puisque issu de l'activation d'une diplomatie parallèle à celle de l'ONU et de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Souvenons-nous, enfin, des gesticulations du Président de la République avant et pendant le sommet international de Copenhague. Seul, il se faisait fort d'entraîner dans son sillage la Chine, les États-Unis, l'Inde, le Brésil et bien d'autres pays encore. Puis, vint l'année 2010, l'année des déclarations fracassantes, qui marqua la fin de l'ambition écologique qui s'était manifestée jusqu'alors.

Le défi du réchauffement climatique, qui avait fait l'objet de toutes vos attentions, tomba rapidement dans l'oubli. Absent de la déclaration de politique générale du nouveau Premier ministre, le 24 novembre 2010, il ne fit l'objet d'aucun débat au sein de l'Assemblée, avant le sommet de Cancùn en décembre 2010, comme ce fut le cas juste avant celui de Copenhague. De plus, le Premier ministre vous chargea, madame la ministre, à l'occasion des négociations de ce sommet, de porter un message confus, mais que votre intelligence et votre compétence vous auront permis de comprendre puisqu'il évoquait de manière sibylline « l'écologie créatrice qui est une source d'emploi, qui sait valoriser ses ressources et qui ne gâche pas son patrimoine »

Alors qu'à Bruxelles, des discussions ont lieu sur la nouvelle feuille de route sur le climat et sur l'efficacité énergétique, qu'en France s'est tenu dernièrement un conseil de politique nucléaire sous la présidence du Président de la République, que Mme la ministre de l'économie a annoncé une conférence nationale sur l'énergie, que les prix du pétrole flambent et que le Gouvernement n'informe pas de manière régulière et très précise le Parlement sur l'application de la loi Grenelle et sur les résultats de sa politique en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre, nous avons pris la décision de l'obliger à en débattre en inscrivant à l'ordre du jour cette proposition de résolution.

Pour nous, la lutte contre le réchauffement climatique vise, bien sûr, à réduire les conséquences négatives de l'élévation du niveau de température, mais aussi à instaurer un autre modèle de société, un autre modèle de développement. Il s'agit, en effet, de passer d'une société du gaspillage à une société de la sobriété, car moins émettrice en CO2 et plus économe en ressources. Nous le savons, nous devrons changer notre manière de vivre, d'habiter, de nous déplacer et de consommer ; nous devrons aussi transformer nos filières de productions énergétiques, industrielles et de services.

Pour nous, socialistes, le défi climatique, tant au niveau de la France qu'au niveau du monde, peut rencontrer le défi social. N'y a-t-il pas en France, aujourd'hui, 3,5 millions de ménages en situation de précarité énergétique ? N'y a-t-il pas des millions et des millions de Français confrontés à l'importante augmentation des prix de l'énergie et des carburants ?

Quelle n'a pas été notre surprise, madame la ministre, de constater, à la lecture d'un rapport du Commissariat général au développement durable, que la France, fin 2007, ne rejetait pas moins de CO2 qu'en 1990 ! En effet, les progrès en efficacité énergétique ont été annulés par l'augmentation de la population de 9,5 % et par la croissance du produit intérieur brut de 38 % ; 439 millions de tonnes de CO2 en 2007 contre 438 millions en 1990, soit une tonne de plus : un résultat assez éloigné de l'ambition affichée par votre gouvernement ! Pire, l'empreinte carbone de la demande finale française, une fois pris en compte le solde des émissions liées aux importations et aux exportations, est de l'ordre de neuf tonnes de CO2 par personne et par an, soit 545 millions de tonnes de CO2: 33 % de plus que le chiffre officiel. Ce niveau élevé nous interroge donc sur la capacité de la France à atteindre ses engagements à plus long terme : moins 20 % d'ici à 2020 et quatre fois moins en 2050. Le Gouvernement n'aura, cependant, pas manqué de pousser un ouf de soulagement à la lecture d'autres chiffres plus récents montrant que, fin 2009, les émissions françaises avaient baissé de 10,3 % par rapport à 1990. Nous pensons que le Gouvernement a attribué cette baisse un peu trop vite aux politiques de lutte contre les changements climatiques, symbolisées par la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement dont nous venons de passer le troisième anniversaire. En effet, l'analyse statistique révèle une tout autre réalité : la baisse s'explique non pas par une transformation structurelle de la production et de la consommation d'énergie en France, mais essentiellement par la crise économique récente. Les statistiques montrent qu'avec la mondialisation de l'économie, les émissions de gaz à effet de serre nécessaires à la satisfaction des besoins français suivent une tendance lourde à la hausse à travers leur délocalisation.

La France, en proposant un mécanisme d'inclusion aux frontières, se pare d'une vertu qu'elle ne possède pas et renvoie la responsabilité d'efforts supplémentaires à ses partenaires économiques. En réalité, elle semble profiter d'échanges croissants avec eux pour masquer le niveau réel, spécifiquement trop élevé, des émissions associées à la demande économique. Cette proposition semble d'autant plus à contresens que la France n'a pas mené à son terme son projet de se doter d'une contribution « climat-énergie ». Pour nous, la France n'est pas actuellement en mesure, en dépit de l'évolution positive de ses émissions de gaz à effet de serre fin 2009, de revendiquer une quelconque avance en termes de sobriété énergétique. Il lui reste à mettre réellement en oeuvre une mutation de son système énergétique et de son économie, comme le rappelle la Commissaire générale au développement durable qui considère que l'objectif prévu dans le plan « énergie-climat » ne pourra être atteint que si nous « fixons un prix au carbone et accomplissons des progrès importants, y compris dans nos modes de comportements individuels pour réduire la consommation d'énergie et de ressources par habitant ».

L'équation aujourd'hui est connue : pas de réduction substantielle des émissions de gaz à effet de serre sans augmentation importante de l'efficacité énergétique et de la part des énergies renouvelables ; efficacité énergétique qui, au niveau mondial augmente de 1,6 % par an depuis 1990, poussée notamment, depuis 2000, par l'augmentation des prix du pétrole. Sans cette amélioration continue, nous consommerions aujourd'hui 40 % d'énergie de plus par an pour satisfaire les mêmes besoins. D'ailleurs, l'Agence européenne de l'environnement a montré qu'au niveau mondial l'efficacité énergétique représente, à elle seule, plus de 60 % du gisement de réduction des émissions de CO2d'ici à 2050.

La France, comme la plupart des autres pays de l'Union européenne, par manque de volonté politique, ne s'est pas donné les moyens de respecter l'engagement qu'elle a pris d'accroître d'ici à 2020 son efficacité énergétique de 20 %. N'est-ce pas José Manuel Barroso qui, dernièrement, déclarait : « en matière d'efficacité énergétique, l'Union européenne n'arrivera qu'à 10 % en 2020, si nous restons sur la base actuelle » ?

Alors que le GIEC, dans son dernier rapport, recommande pour les pays industrialisés une réduction comprise entre 25 et 40 % de leurs émissions pour 2020, nous pensons, avec Jean-Louis Borloo et les ministres de l'environnement britannique et allemand, qui ont publié une tribune commune dans Le Monde en juillet 2010, que seule une réduction de 30 % de nos émissions de gaz à effet de serre nous permettra de respecter le facteur 4 en 2050. Il faut, disent-ils, mettre nos pays sur la voie d'un modèle durable à faibles émissions de carbone, afin de ne pas être dépendants des coûts significatifs engendrés par la volatilité des prix de l'énergie et par un climat de plus en plus instable. Pour eux, l'objectif actuel de 20 % semble désormais insuffisant pour effectuer une transition vers ce nouveau modèle. Ils proposent donc d'adopter un objectif plus ambitieux de 30 %. Ainsi, l'Union européenne enverrait un signal fort aux autres pays du monde quant à sa détermination pour un surcoût annuel peu important, compte tenu des baisses d'émissions dues à la récession, puisqu'il ne s'élèverait qu'à 12 milliards d'euros dans le cas d'un baril à 88 dollars en 2020. L'augmentation régulière des prix du pétrole qui viennent d'atteindre les 110 dollars le baril, augmentation dont beaucoup aujourd'hui considèrent qu'elle est structurelle et non pas conjoncturelle, doit nous inciter à défendre un tel objectif qui sera d'autant plus facilement atteignable sur le plan financier que les cours du pétrole seront élevés.

Madame la ministre, au travers de cette proposition de résolution, c'est un appel que nous vous lançons. Votre gouvernement, après avoir porté les lois Grenelle, ne doit pas céder à la dictature du court terme, qu'elle porte le nom de crise, de profits, de campagne électorale ou de lobbies. Sa responsabilité, face aux défis environnementaux que sont le réchauffement climatique et la perte de biodiversité, est immense, comme sera immense, demain, celle de ceux qui, à votre place, seront chargés d'agir. De reculs en renoncements, vous prenez le risque d'engager notre pays sur le mauvais chemin, celui qui, à tout jamais, nous éloignerait de la transition écologique qui doit nous conduire vers une société de la sobriété. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette résolution est bienvenue et je félicite mes collègues socialistes de leur initiative. Elle reprend les grandes dates des accords climatiques. De grands objectifs ont été fixés aux horizons 2020 et 2050, mais il y a des objectifs intermédiaires.

Les dernières estimations du GIEC prévoient une hausse de 2 degrés, et non de 2 % comme l'avait annoncé le Président de la République il y a un an et demi. Des initiatives locales d'atténuation sont donc essentielles. Bien que ce soit un combat mondial, tout le monde doit y participer. Nous sommes donc tout à fait favorables à l'adoption de cette résolution.

Il est nécessaire de rappeler les engagements du Gouvernement. Le Grenelle devait être un monument législatif, et je ne rappelle pas les paroles extrêmement fortes du Président de la République le 25 octobre 2007. La question environnementale devait traverser toutes les politiques publiques, c'était une mutation, voire une révolution.

Il y eut ensuite les lois Grenelle 1 et Grenelle 2, et nous avons vu un certain nombre d'abandons, notamment celui de la taxe carbone, que nous préférons appeler contribution énergie-climat.

Ce Grenelle, avec sa traduction juridique, était-ce simplement une question de mode ? Le Président de la République y croyait-il ? Y avez-vous cru vous-même, madame la ministre, et y croyez-vous encore ? À quel point veut-on vraiment mettre en oeuvre les engagements du Grenelle ? Est-on prêt à aller à l'encontre des grands industriels et des pratiques habituelles de notre administration ? Tout cela est un peu lourd, il y a beaucoup d'inertie, et, en pensant à une autre formule du Président de la République, on pourrait se poser la question suivante : est-ce que le Grenelle, ça commence à bien faire ?

À Copenhague, il y a eu quelques difficultés diplomatiques de notre part. Il y avait peut-être un peu trop d'allant et pas assez de diplomatie. Nous avons vu le report, voire la mort de la contribution énergie-climat.

La transition énergétique n'a pas eu lieu. On peut penser qu'elle a commencé, mais elle est illisible à notre avis. Le crédit d'impôt développement durable a diminué dans le projet de loi de finances pour 2011. Les énergies renouvelables, on ne sait plus très bien, avec cette politique de stop and go, si on est plutôt pour ou s'il faut modérer leur croissance. Quant au nucléaire, je le signale à nos camarades socialistes, il n'en est pas question dans leur résolution. Dans le Grand Journal de Canal +, lundi soir, Mme Martine Aubry elle-même a annoncé par deux fois qu'il fallait sortir du nucléaire. Dans vingt, vingt-cinq ou trente ans,…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…nous verrons mais la bascule politique est remarquable. Il y a un débat interne chez vous, nous en reparlerons.

Nous appellerons bien sûr tous nos collègues à voter la semaine prochaine en faveur de cette résolution, mais, entre le débat parlementaire, le débat politique, le débat intellectuel et la réalité des choses, il y a toujours un décalage, qui avait été observé d'ailleurs il y a très longtemps par la psychosociologie marxiste selon laquelle les conditions objectives de notre existence en tant qu'êtres humains sont toujours un peu en avance par rapport aux opinions qui sont partagées entre les gens, c'est-à-dire que l'histoire, et notamment l'histoire biophysique, va beaucoup plus vite que les décisions politiques pour essayer de la rattraper.

Certains ont découvert le changement climatique il y a quelques années, d'autres il y a vingt ans, mais voici ce que l'on peut lire aux pages 7 et 8 du livre programme de notre ami René Dumont pour l'élection présidentielle de 1974 : « par épuisement des réserves minérales et pétrolières, par la dégradation poussée des sols, par la pollution devenue insoutenable de l'air et des eaux, des rivières aux littoraux marins, enfin, par une altération des climats, due notamment à l'accumulation de gaz carbonique ». Comme quoi il est bon parfois d'écouter quelques propositions, quelques intuitions, quelques analyses des écologistes pour être de son temps. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens d'abord à remercier M. Chanteguet d'avoir proposé l'inscription de ce débat à notre ordre du jour.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Je salue la fine fleur de l'Assemblée nationale qui se retrouve de part et d'autre de ces bancs, et tout particulièrement celle de l'UMP. (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Ils sont en train de cueillir des chrysanthèmes !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Monsieur Chanteguet, vous avez raison dans deux de vos attendus initiaux au moins : c'est cette majorité qui, notamment avec le Grenelle, s'est intéressée à la problématique du réchauffement climatique, avec toute l'ampleur que l'on connaît, et nous sommes tous d'accord, je crois, pour affirmer que nous sommes dans une transition, que c'est loin d'être évident et que nous avons la responsabilité de permettre cette transition vers un autre modèle de société.

Vous avez cité le Président Mitterrand. Moi, vous vous en doutez, je citerai Jacques Chirac qui, lors du sommet de Johannesburg, avait eu cette très belle formule : notre maison brûle et nous regardons ailleurs.

Monsieur Cochet, vous avez évoqué le programme de René Dumont pour la campagne de 1974. En 1972, vous le savez, dans une analyse qu'on lui a beaucoup reprochée à l'époque, le Club de Rome avait mis en avant la question de l'épuisement des ressources énergétiques et des matières premières. Puisque je parle de l'année 1972, je pourrais citer la première des conférences du programme des Nations unies pour l'environnement, en tout cas l'une des plus marquantes, celle de Stockholm. C'est dire que, vous avez raison, ces problématiques étaient tout à fait connues mais pas encore intégrées dans nos sociétés.

Pour la clarté du débat, je vais reprendre un certain nombre de chiffres, sans en abuser.

Le total des émissions de gaz à effet de serre en équivalent CO2 pour la planète tout entière est évalué à 49 milliards de tonnes. Si, parmi les six principaux gaz à effet de serre, l'on ne s'intéresse qu'au CO2, responsable des trois quarts des émissions, on arrive à un sous-total de 37 milliards de tonnes. Si l'on prend les émissions de CO2 dues à la combustion d'énergies, on arrive à 29 milliards de tonnes, et c'est ce chiffre qui m'intéresse un peu plus que les autres parce que c'est celui qui, la plupart du temps, sert à élaborer des comparaisons et permet notamment de voir quelles sont les émissions respectives des États.

Dans ces 29 milliards de tonnes, les émissions de la France représentent 368 millions de tonnes. Je ne conteste pas votre chiffre, monsieur Chanteguet, et c'est la raison pour laquelle je précise la méthode de calcul par laquelle j'arrive à ces 368 millions de tonnes, ce qui représente exactement 1,3 % des émissions mondiales. C'est moins que la seule augmentation des émissions de gaz à effet de serre de la Chine chaque année, qui est de l'ordre de 500 millions de tonnes.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Ce qui compte, c'est le chiffre par habitant !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Ce qui compte, c'est ce que l'on rejette dans l'atmosphère, mais on pourrait prendre un tel paramètre, qui est intéressant, j'en conviens.

Tout cela pour dire, je le répète, que, lorsque nous parlons de la France, nous parlons d'un volume total qui est inférieur à l'augmentation du volume de la seule Chine. La Chine, qui est devenue le premier émetteur de gaz à effet de serre et notamment de CO2, était à 6,5 milliards de tonnes en 2008, devant les États-Unis, à 5,6, l'Union à vingt-sept, à 3,8, puis la Russie, l'Inde et le Japon. Ce sont des ordres de grandeur qui sont, je crois, utiles à notre débat.

Cela ne signifie certainement pas que, puisque nous émettons peu, nous pouvons continuer. En effet, au-delà de la réduction de nos émissions, il est essentiel d'entraîner l'ensemble de la communauté internationale. Nous l'avons d'ailleurs dit à Copenhague et à Cancùn notamment, il y a la valeur de l'exemple et l'effet d'entraînement, et nous y sommes évidemment extrêmement sensibles.

Où en est-on aujourd'hui ? Si j'essaie de m'extraire de la diatribe un peu politique ou politicienne – sur un tel sujet, nous devons faire preuve d'honnêteté intellectuelle – il y a deux visions des choses.

Selon la première, à court terme, la dynamique créée par le Grenelle a tendance à s'épuiser et nous sommes dans une phase de latence, parce que la dynamique ne peut pas s'auto-entraîner en permanence.

La seconde vision s'inscrit plus dans la logique de Fernand Braudel, grand historien, la logique du temps long : grâce à ce qui a été fait antérieurement et à la dynamique du Grenelle, on a créé une irréversibilité qui conduit à modifier totalement notre axe de consommation et de production, et l'on est bien engagé dans cette mutation de société.

Même si c'est forcément imparfait, comme étaient forcément imparfaites les premières lois sociales, j'ai la conviction que nous avons engagé cette irréversibilité et que notre responsabilité à présent est de maintenir le mouvement pour éviter d'éventuels retours en arrière. En tout état de cause, je pense que cette irréversibilité s'inscrit dans le temps long.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Pas sûr que vous convainquiez vos collègues aujourd'hui !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Je suis sûr que je convaincs totalement ceux d'entre eux qui sont présents ! (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

D'ailleurs, je me permets de vous faire remarquer que nous avons en quelques instants doublé nos effectifs ! (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Mais vous êtes toujours minoritaires ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Chers collègues, n'interrompez pas l'orateur, qui doit bientôt achever !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Merci, monsieur le président, de me le rappeler !

Le Grenelle est engagé. Il a déjà donné, en très peu de temps, des résultats significatifs. Dans le domaine du photovoltaïque, nous étions à 50 mégawatts en 2007 et nous sommes à 300 mégawatts aujourd'hui, en avance sur les prévisions !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Dans l'éolien, nous sommes passés de 2 500 à plus de 4 500 mégawatts.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

En tant que maire d'Orléans, je pourrais apporter de multiples témoignages quant aux avancées concrètes sur le terrain : dans le domaine du logement, la mise en oeuvre prochaine de la réglementation thermique 2012 ; dans les transports en commun, l'effort sur les TCSP… Je ne nie pas, pour autant, que dans d'autres domaines l'effort doive être poursuivi.

La présente proposition de résolution a son intérêt sur le fond et elle a le mérite d'engager ce débat, ce dont je me réjouis, mais je pense qu'elle est redondante, eu égard à l'action que nous sommes en train de mener. Je souhaite que nous soyons nombreux – plus nombreux qu'aujourd'hui – à continuer de porter ces problématiques, car nous ne réussirons ensemble que dans la durée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous discutons aujourd'hui d'une proposition de résolution rappelant au Gouvernement qu'il doit mettre en oeuvre les mesures du Grenelle de l'environnement telles que nous les avons votées à la quasi-unanimité dans le Grenelle 1. En effet, après les reculs du Grenelle 2, beaucoup de décisions vont à rencontre du Grenelle 1,…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

…alors que la crise écologique s'aggrave, en particulier dans les domaines du réchauffement climatique et de la dégradation de la biodiversité.

Aujourd'hui, notre interpellation porte plus précisément sur le climat ; d'abord parce que les changements climatiques conditionnent en partie la biodiversité ; ensuite parce que les engagements de la France sur ce thème ont été relayés par l'accord de l'Union européenne sous présidence française dit des « trois fois vingt » ; enfin parce que le débat devenu incontournable sur la place du nucléaire dans notre pays nous amènera inéluctablement à développer les moyens alternatifs qui nous permettent de remplir nos engagements sur le climat.

Or il apparaît déjà, aujourd'hui, que la France qui se voulait « exemplaire » ne tiendra pas les engagements européens qu'elle a pourtant demandé aux autres pays de prendre. Et ce dans un contexte international post-Copenhague où les annonces des pays sur leurs projets en termes de réduction volontaire de gaz à effet de serre conduisent, selon les experts, à des perspectives de réchauffement largement au-delà des deux degrés, limite maximale souhaitable si l'on veut éviter de léguer aux générations futures une terre très inhospitalière.

Alors, il faut que chacun se ressaisisse, c'est-à-dire, d'abord, l'Union européenne dans le monde, mais aussi la France, qui revendiquait le leadership sur ce thème en Europe. Il faut réaffirmer une volonté politique pour gommer la désastreuse déclaration du Président de la République au salon de l'agriculture l'an dernier : « L'environnement, ça commence à bien faire. »

À partir de ce message, à l'instar de celui du ministre de l'agriculture à propos des pesticides, chaque « lobby » qui avait accepté des compromis lors des discussions du Grenelle est revenu sur ses concessions en faisant pression pour échapper aux mesures environnementales prévues, trouvant malheureusement une oreille trop souvent compréhensive auprès du Gouvernement.

De fait, depuis un an, après les reculs du Grenelle 2, toute occasion est bonne pour « détricoter » le Grenelle. Dans ces conditions, il paraît de plus en plus évident que les objectifs que nous avons approuvés ensemble dans le Grenelle 1 ne seront pas atteints,…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

…au risque, d'abord, d'une déception profonde des acteurs de la concertation, ensuite, d'une démobilisation de nos concitoyens.

Il est des renoncements qui aggravent même la situation. Ainsi, on a proposé à certains secteurs – et c'est normal – des compensations à la prise de mesures environnementales. Sauf que, si l'on a accordé les compensations, on n'a pas pris les mesures environnementales correspondantes, faisant ainsi de fait des cadeaux aux secteurs les plus polluants.

C'est le cas, par exemple, des poids lourds, soumis à une écotaxe prévue d'abord en 2011, puis repoussée en 2012 et annoncée maintenant en 2013. La compensation – quasi-suppression de la taxe à l'essieu – a été mise en place, elle, dès le 1er janvier 2009.

De même, un rapport avait été demandé, dans le Grenelle 1, sur l'impact à la fois de l'autorisation éventuelle des « quarante-quatre tonnes »…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

…et de la limitation à 80 kilomètres-heure de la vitesse des poids lourds sur les autoroutes, avec interdiction de se dépasser. Ce rapport n'a pas été rendu,…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

…et l'autorisation des « quarante-quatre tonnes » a été prise sans aucun lien avec l'éventualité de la baisse de la vitesse et de l'interdiction de dépassement sur autoroutes.

Comment s'étonner, dès lors, qu'un échec déjà constaté du Grenelle 1 porte sur l'objectif de transfert modal du transport de fret ? La part du non-routier n'a cessé de décroître depuis dix ans, passant de 18,7 % en 2000 à 12 % en 2009. Le 21 février dernier, plusieurs associations et syndicats parties prenantes du Grenelle ont tenu à alerter le Gouvernement en rendant publique une lettre adressée en janvier au président de l'Assemblée nationale, que je cite : « Nous sommes devant un report massif du rail vers la route ». Ces parties prenantes dénoncent un « reniement » des dispositions du Grenelle en matière de transport de marchandises.

Autre exemple de cadeau sous prétexte de compensation : la défunte taxe carbone compensée pour les entreprises par la réforme de la taxe professionnelle, qui a globalement allégé leurs charges. L'allégement est entré en vigueur mais pas la taxe carbone !

À partir de propositions initiales équilibrées, le Gouvernement a de fait favorisé le transport routier et les entreprises les plus polluantes, aggravant ainsi les émissions de gaz à effet de serre.

D'autres instruments potentiellement très efficaces ont été abandonnés. Pour obtenir de l'Union européenne la possibilité de réduire la TVA pour les restaurateurs, le Gouvernement a abandonné la négociation qu'il menait sur la possibilité d'une TVA verte modulée selon des critères environnementaux.

On peut toujours rectifier ses erreurs ; encore faut-il exprimer une volonté politique de considérer l'environnement comme un des secteurs d'avenir pour nos entreprises et comme un facteur positif de leur image. Or la gestion chaotique du photovoltaïque, les freins au développement de l'éolien terrestre, les tergiversations sur les seuils concernant la RSE et les bilans carbone des entreprises, tout cela tend à montrer que les questions environnementales, pourtant porteuses d'avenir, sont devenues secondaires pour le Gouvernement.

Il est urgent de retrouver « l'esprit du Grenelle », de prendre des décisions et de dégager les moyens permettant de redonner de la crédibilité aux objectifs du Grenelle 1. Cette interpellation est le sens de notre résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette proposition de résolution du groupe socialiste s'articule autour de deux axes principaux. Elle reprend, d'une part, les engagements internationaux de la France en matière de lutte contre le changement climatique. Elle traduit, d'autre part, l'insuffisance des moyens d'action de l'État pour satisfaire à ces engagements comme aux objectifs fixés nationalement dans le cadre des deux lois Grenelle 1 et Grenelle 2.

Je regrette cependant que l'exposé des motifs ne souligne pas suffisamment le glissement qui s'opère au plan international vers un système non contraignant, tout particulièrement pour les principaux pays émetteurs. Le rejet par les grandes puissances de tout cadre coercitif pour prolonger les engagements du protocole de Kyoto est un échec majeur et un acte d'irresponsabilité dramatique pour les générations futures !

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Un jour, il faudra bien régler le passif.

En laissant toujours plus le soin de régler l'enjeu climatique au seul marché et aux principaux agents économiques et financiers – dont nous ne connaissons que trop bien l'éthique –, sur la base de leur responsabilité en matière d'intérêt général climatique, nous avons le plus sûr moyen de nous écarter des objectifs de réduction prônés par le GIEC.

Il ne faut d'ailleurs pas être grand clerc pour faire le constat des renoncements majeurs qui se sont concrétisés à Copenhague comme à Cancùn. Et la conférence de Durban fin 2011 poursuivra sans nul doute sur le même chemin du renoncement. « Si le climat était une banque, vous l'auriez déjà sauvé », lançait Hugo Chavez à Copenhague. Cruelle lucidité !

Pourtant, madame la ministre, c'est sur ce chemin du renoncement, de l'inefficacité climatique et de l'irresponsabilité environnementale que se complaît malheureusement notre pays.

Ainsi, en janvier dernier, lors de votre audition devant la commission du développement durable, qui portait précisément sur les suites du sommet de Cancùn et la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, vous aviez fait l'éloge des avancées de ce sommet.

La première de ces avancées, c'était, je vous cite, « la confiance retrouvée dans un système de négociation onusien ébranlé par la conférence de Copenhague ». Alors que la maison ne cesse de brûler, vous conviendrez que cet acte de foi ne pèse pas lourd en termes de réduction d'émissions !

La seconde avancée tout aussi majeure pour répondre à l'urgence climatique, c'est la création d'un Fonds vert pour les pays du Sud afin de financer les mesures d'adaptation et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Un fonds vert qui devait s'élever, je vous cite à nouveau, « à 100 milliards de dollars annuels attendus à l'horizon 2020 dont l'essentiel devra provenir de financements innovants ». Et vous ajoutiez : « La période d'engagement du protocole de Kyoto s'achève fin 2012. Si aucune suite ne lui est donnée d'ici là, nous n'aurons plus d'instrument contraignant. La disparition des plafonds risque de conduire à un effondrement du marché du carbone, sur lequel nous misons pour le financement. Bref, sans contrainte, il n'y a plus de marché carbone, et sans marché du carbone, il n'y a plus de moyens ni de possibilité d'associer les pays du Sud ; c'est l'ensemble d'un système, certes imparfait, mais qui a le mérite d'exister, qui s'effondre. »

En écoutant ces propos, cette fois clairvoyants, de Mme la ministre, vous conviendrez, chers collègues, que la réussite de ce fonds virtuel est plus qu'hasardeuse.

Venons-en aux grandes avancées nationales contenues dans les deux lois Grenelle.

À plusieurs reprises, vous avez souhaité, madame la ministre, remettre à la commission du développement durable un point précis sur les avancées en termes de traduction réglementaire. La majorité des décrets sont-ils aujourd'hui publiés ?

Mais surtout – j'ai déjà eu l'occasion de le rappeler – les engagements du Grenelle sont devenus de plus en plus malléables au fil du temps, alors même que les moyens alloués par l'État pour les atteindre se réduisent comme peau de chagrin.

Ainsi, quand je vous ai interrogée, en janvier, sur la baisse induite par la RGPP du nombre des emplois publics pour contrôler le respect des engagements ou pour permettre aux communes de vérifier sur le terrain la réalité des informations sur la rénovation énergétique des bâtiments, vous m'avez répondu que vous étiez « au travail » sur ces questions. Où en êtes-vous de cette tâche colossale ?

Nous le voyons, le principe général de soumission de la politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre au seul marché montre aujourd'hui toutes ses contradictions, au niveau international comme à l'échelle nationale. Non seulement nous nous éloignons des objectifs impératifs fixés par le GIEC, mais toutes les dérives sont également encouragées : détournement des marchés carbone, délocalisation des émissions européennes dans les pays du Sud avant réimportation des productions, démantèlement des outils indispensables que sont les services publics comme le fret SNCF, fuite en avant sur la production d'agrocarburants, perte de capacités en matière de recherche publique.

Si je me réjouis, naturellement, de l'interpellation du Gouvernement, par la présente résolution, sur ses engagements non tenus, je crois qu'au-delà ce sont les principes mêmes, le socle idéologique qui sous-tend toutes les mesures du Grenelle de l'environnement qu'il faut réinterroger.

Le fossé entre les effets d'annonce et les résultats concrets, les aberrations visibles entre les objectifs et les politiques publiques sont autant d'éléments qui doivent nous convaincre de la nécessité d'une tout autre politique environnementale. Assez de communication flatteuse et sans effet !

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Une véritable planification écologique est devenue indispensable.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Cette planification doit d'abord s'appuyer sur des engagements fermes de l'État en termes de moyens et de projets publics, notamment s'agissant de la recherche et des infrastructures de transports collectifs. Mais elle doit aussi s'appuyer sur un nouveau mode de développement, c'est-à-dire sur de nouveaux critères de gestion en matière économique, de nouveaux critères de choix en matière d'investissement et de financement, avec des droits nouveaux pour les travailleurs et les citoyens ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Bouillon

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'augmentation moyenne des températures est aujourd'hui un fait. Personne ne le conteste sérieusement. Le climat se dérègle, les multiples événements climatiques extrêmes de ces dernières années nous le prouvent. Nous savons que nous devons chacun, à notre niveau, agir au plus vite. Sans grossir le trait, nous pouvons même parler d'une véritable urgence climatique.

La France, à l'instar d'autres pays européens, s'est notamment engagée à réduire ses émissions d'au moins 20 % à l'horizon 2020. Alors que le Grenelle de l'environnement annonçait, en 2007, des lendemains prometteurs en termes de réalisation des engagements pris par la France sur la scène européenne et internationale pour lutter contre le changement climatique, force est de constater que le Gouvernement a, depuis, revu sa copie. Comme beaucoup nous y avions cru, et nous sommes aujourd'hui déçus. D'évidence, le Gouvernement ne soutient plus la transition énergétique devant permettre une division par quatre des émissions françaises d'ici à 2050. Les données portées à notre connaissance suggèrent même que celles-ci suivent malheureusement une tendance à la hausse car, en l'état actuel, elles sont nécessaires à la satisfaction des besoins français.

Je voudrais évoquer la situation du secteur du bâtiment. Nous savons qu'il est le plus gros consommateur d'énergie de notre pays : il représente 43 % de la consommation d'énergie totale finale et 123 millions de tonnes de CO2 par an, c'est-à-dire 25 % des émissions nationales.

Le Grenelle 1 fixait un objectif très ambitieux : la réduction de 38 % des consommations énergétiques du parc d'ici à 2020. Les outils et les moyens déployés ne sont malheureusement pas à la hauteur de l'enjeu. Preuve en est le constat du Centre interprofessionnel technique d'étude de la pollution atmosphérique : les émissions du secteur résidentiel et tertiaire sont en hausse. Elles ont augmenté de 10 % entre 1990 et 2008. Il est en de même de la consommation d'énergie du secteur. Si la politique gouvernementale de réduction du bilan carbone des bâtiments n'est pas suffisamment volontaire, il est à craindre que les objectifs globaux du Grenelle ne soient pas atteints.

Certes, la généralisation des bâtiments neufs à basse consommation semble sur la bonne voie, bien que les retards s'accumulent. Ainsi, le démarrage de la réglementation thermique – RT 2012 – pour les bâtiments publics et pour les bâtiments tertiaires ne sera effectif qu'à l'automne 2011, et principalement pour les zones ANRU. Il faudra attendre 2013 pour que les bâtiments à usage d'habitation principale soient concernés. Pourquoi ne pas appliquer dès 2012 à l'ensemble des bâtiments cette nouvelle réglementation thermique ? Nous savons que, dans ce domaine, les collectivités territoriales ont un rôle capital à jouer. Le rapport Jarlier rappelait, par exemple, que les bâtiments communaux représentent les trois quarts de la consommation d'énergie des communes. Il y a donc là un formidable gisement d'économies. La question qui se pose alors est de savoir comment financer ces travaux. Je rappelle à cet égard le refus de la majorité d'adopter l'amendement du groupe socialiste au projet de loi Grenelle 2, qui visait à étendre le bénéfice des éco-prêts à taux zéro aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale. Il faut reconnaître que l'exigence de performance énergétique globale de 50 kilowattheures par mètre carré et par an pour le logement collectif constitue une avancée. Néanmoins, pourquoi attendre 2015 ?

Un autre enjeu doit être souligné : celui de la rénovation thermique des bâtiments existants. C'est la clé d'une réduction significative des consommations et des émissions. Il existe en France aujourd'hui trente-deux millions de logements. C'est là que doit porter l'essentiel des efforts. Les engagements du Grenelle ont d'ailleurs acté « un chantier de rénovation énergétique radical des bâtiments existants ». Cela s'est traduit, dans l'article 5 de la loi Grenelle 1, par un objectif de réduction des consommations d'énergie d'au moins 38 % d'ici à 2020 avec, en conséquence, une rénovation complète, financée par l'État, d'au moins 400 000 logements chaque année à compter de 2013. Or, en 2010, seuls 150 000 logements ont été concernés. Et rien n'indique que l'on fera mieux en 2011. Les outils actuellement mis en place poussent à faire de la rénovation à des seuils insuffisamment ambitieux, ignorant de fait d'énormes gisements d'économies d'énergie, impossibles à récupérer une fois les travaux effectués.

Au lieu de mettre en oeuvre un prêt à taux zéro universel, il aurait été beaucoup plus pertinent de prévoir un crédit d'impôt visant à faire baisser le coût des nouvelles technologies dans le domaine de l'efficacité énergétique, complémentaire à un éco-PTZ efficace.

Par ailleurs, j'insiste sur le fait qu'il aurait été intéressant de revoir le prêt de la Caisse des dépôts et consignations pour les travaux de rénovation énergétique, notamment en direction des logements sociaux. Il y a 4,5 millions de logements sociaux aujourd'hui. Or, on ne compte que 115 000 rénovations entreprises à ce jour. Comment dès lors atteindre les objectifs sans donner un véritable coup d'accélérateur dans ce domaine ?

Enfin, le Grenelle de l'environnement concluait qu'il fallait lancer un plan de recrutement, de formation et de qualification des professionnels du bâtiment, plan intégrant la performance énergétique, la réduction des gaz à effet de serre, l'adaptation climatique et la qualité sanitaire intérieure. Malheureusement, l'article 6 de la loi Grenelle 1 a rapidement calmé cet enthousiasme : il est seulement question d'incitation et non pas d'obligation. Cela est de mauvais augure au vu de la crise économique. Je rappelle que la filière du bâtiment représente 4 millions d'emplois en France et que l'on estime le potentiel de création d'emplois à 20 000 dans le cadre de la rénovation.

Avant de conclure, un mot sur la question de la précarité énergétique qui doit, elle aussi, être au coeur de nos préoccupations : 13 % des ménages sont concernés, soit 3,4 millions de foyers. Agir sur les bâtiments est non seulement bon pour réduire les émissions et les consommations, mais aussi bon pour le pouvoir d'achat. Or nous sommes dans l'attente d'un véritable plan national contre la précarité énergétique.

Le secteur du bâtiment offre de belles perspectives de réduction d'émissions de gaz à effet de serre, mais il faut avoir une volonté forte dans ce domaine. Agir dans le secteur du bâtiment, c'est aussi le moyen de développer les énergies renouvelables, notamment le solaire et la biomasse. Mais les reculades de ces derniers mois en matière d'énergie solaire ont cassé l'élan.

Madame la ministre, un collègue l'a rappelé : un président a dit un jour que la maison brûle et que nous regardons ailleurs ; aujourd'hui, la maison est toujours mal isolée, elle brûle toujours trop d'énergie : il ne faut pas perdre de temps et regarder la réalité en face. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Gaillard

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, réduire les émissions de gaz à effet de serre pour atteindre les objectifs qui sont les nôtres nous oblige à avoir une obsession :…

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Gaillard

…celle de l'efficacité énergétique. L'énergie la moins chère, la moins polluante, c'est l'énergie qui n'est pas consommée. Gagner 20 % en termes d'efficience énergétique d'ici à 2020 correspond à un des engagements du plan énergie-climat de l'Union européenne, mais la France a un fort retard, notamment dans le secteur du bâtiment. L'efficience énergétique constitue aussi, d'après les récentes analyses, un moyen de réduire les émissions de CO2, donc d'atteindre l'objectif de réduction de 20 % des gaz à effet de serre. Enfin, gagner en efficacité énergétique, c'est éviter de produire davantage d'énergie et donc, mécaniquement, accroître la part des énergies renouvelables, ce qui participe de l'objectif de 23 % de la consommation finale d'énergie issue des énergies renouvelables.

L'Agence européenne de l'environnement a démontré qu'au niveau mondial, l'efficacité énergétique contribuerait pour plus de 60 % à la réalisation de l'objectif de réduction des émissions de CO2 d'ici à 2050 ! Le chantier est colossal. La France a pris un retard considérable par rapport à ses voisins et partenaires européens. Précisons que même si l'Europe a décidé de prendre le leadership mondial de la lutte contre le changement climatique, le traité européen ne confère aucune compétence dans le domaine de l'énergie à l'Union européenne. La politique énergétique demeure donc une prérogative des États, et du point de vue de l'efficacité énergétique, nous ne sommes pas les meilleurs élèves, loin s'en faut.

Il existe bien une directive sur l'efficacité énergétique et les services énergétiques, mais il appartient aux membres de l'appliquer via des plans nationaux d'action pour l'efficacité énergétique, et force est de constater que nous n'avançons pas tous avec le même élan. Ainsi, au Danemark, dès 2007, a été décidé de ne plus construire après 2015 des bâtiments qui consommeraient de l'énergie, alors qu'en France, nous avons eu du mal à imposer la norme bâtiment basse consommation et son seuil de 50 kilowattheures par mètre carré et par an. Un ménage français consomme près de 30 % d'énergie en plus qu'un ménage vivant dans un des pays de l'Union les plus volontaristes en la matière, tels les Pays-Bas.

La Commission européenne vient juste d'élaborer un document fixant un plan global 2011 pour l'efficacité énergétique avec, en entame, un constat préoccupant : « Malgré les mesures considérables qui ont été prises pour atteindre cet objectif, notamment sur les marchés des appareils électroniques et des bâtiments, des estimations récentes de la Commission laissent à penser que l'Union européenne ne parviendra à réaliser que la moitié de l'objectif des 20 %. »

Si l'Union veut pouvoir atteindre pleinement son objectif, c'est maintenant qu'elle doit agir, donnant suite à l'appel du Conseil européen du 4 février 2011, qui demandait d'« agir avec détermination pour exploiter le potentiel considérable qu'offrent les bâtiments, les transports et les procédés de production en termes d'augmentation des économies d'énergie ».

La Commission met aussi le doigt sur une lacune évidente, que nous avons particulièrement mesurée lors de l'examen des lois Grenelle, à savoir le déficit criant de professionnels formés pour la rénovation thermique des bâtiments. En effet, les solutions en faveur de l'efficacité énergétique des bâtiments sont souvent exigeantes sur le plan technique. II existe des lacunes en ce qui concerne la formation adaptée des architectes, des ingénieurs, des contrôleurs, des artisans, des techniciens et des installateurs, et plus particulièrement des professionnels impliqués dans les activités de rénovation. À ce jour, au niveau global de l'Union européenne, il existe environ 1,1 million de travailleurs qualifiés alors que l'on estime qu'il en faudra 2,5 millions en 2015. C'est pourquoi la Commission lance l'initiative intitulée : « Renforcement des compétences ». Il est donc primordial que la France ne rate pas ce train si elle veut avancer !

La voie de l'efficacité n'est pas neutre socialement, le poste de l'énergie étant devenu un poste très impactant sur le budget des ménages en France. Les crises successives, le renchérissement chronique des énergies fossiles et l'indexation sur le pétrole aggravent les termes de cette équation, ajoutent de l'enjeu au défi énergétique. J'ai bien noté, madame la ministre, que vous avez installé, le 1er mars dernier, l'Observatoire national de la précarité énergétique. Il était grand temps ! Aujourd'hui, 3,4 millions de ménages consacrent plus de 10 % de leurs revenus à payer leurs factures énergétiques ! Lorsqu'ils n'y parviennent pas, ce sont les collectivités qui s'en chargent. Il est donc urgent de mettre en place des dispositifs vertueux poussant, incitant, récompensant les économies d'énergies. Or nous subissons, au contraire, le règne du gaspillage énergétique.

Le dispositif des certificats d'économies d'énergie, issu de la loi de programme du 13 juillet 2005, est vertueux. C'est un des outils déterminants de la politique d'efficacité énergétique. Il a démontré son efficacité. On a ainsi augmenté significativement les termes de l'obligation d'économies d'énergies. C'est bien, mais il conviendrait d'accroître le champ des personnes éligibles, « les obligés », selon les dispositions du texte, pour multiplier l'impact du dispositif et augmenter la part des économies d'énergie réalisées au bénéfice direct des ménages en précarité énergétique.

Pour atteindre l'objectif 2020, il est nécessaire de jeter les bases d'une politique publique énergétique intégrée, cohérente et convergente, en mobilisant tous les secteurs d'activités et leurs capacités d'auto-régulation : par exemple, dans les transports, cela veut dire du fret ferroviaire plutôt que des super-bahuts de 44 tonnes ; par exemple, s'agissant de l'urbanisme, cela veut dire bien sûr la rénovation thermique des bâtiments, mais aussi et surtout la lutte contre l'étalement urbain. Notre politique énergétique doit en effet s'appuyer sur une politique clairvoyante de l'aménagement du territoire. C'est une des conditions de sa réussite. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

La parole est à M. Philippe Plisson, dernier orateur inscrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, les ressources naturelles sont à la base du fonctionnement de l'économie européenne et mondiale et elles contribuent de manière essentielle à notre qualité de vie. Ces ressources, qui englobent non seulement les matières premières telles que les combustibles, les minéraux et les métaux, mais aussi les produits alimentaires, le sol, l'eau, l'air, la biomasse et les écosystèmes, subissent des pressions de plus en plus fortes.

Si les tendances actuelles se maintiennent, la population mondiale devrait avoir augmenté de 30 % d'ici à 2050 pour atteindre neuf milliards de personnes et les habitants des pays en développement et des pays émergents aspireront, en toute légitimité, aux mêmes niveaux de bien-être et de consommation que les pays développés.

Aussi la Commission européenne a-t-elle publié, le 8 mars 2011, deux communications clefs dans le cadre de son initiative pour 2011 « Une Europe efficace dans l'utilisation de ses ressources » : une feuille de route pour 2050 qui décrit un scénario climatique à long terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre ; et un plan sur l'efficacité énergétique en 2020.

L'initiative « Une Europe efficace dans l'utilisation de ses ressources » compte parmi les sept initiatives phares de la stratégie Europe 2020, qui vise à favoriser une croissance intelligente, durable et inclusive. C'est principalement sur cette stratégie, soutenue par le Parlement et le Conseil européen, que l'Europe s'appuie désormais pour générer de la croissance et créer de l'emploi.

Selon Réseau Action Climat-France, l'objectif actuel de réduction de gaz à effet de serre proposé par la Commission semble contradictoire car il met à mal l'ambition de réduire de 80 % à 95 % les émissions européennes à l'horizon 2050.

Alors que d'importants États européens – Grèce, Grande-Bretagne, Suède, Danemark, Espagne, Portugal et Allemagne – se sont officiellement positionnés en faveur d'un objectif de baisse de 30 % au niveau européen d'ici à 2020, la France reste étrangement muette.

« Nous croyons qu'il est vital d'appliquer aujourd'hui et non dans quarante ans un plan faisant avancer les investissements nécessaires », écrivent les sept ministres. Ils soulignent également qu'en plus de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique, le développement d'énergies propres permettra à l'Europe de réduire sa dépendance aux énergies importées et de concurrencer les économies émergentes sur les marchés en développement rapide des biens et services verts.

Selon une étude du WWF, si l'Europe et la France se fixaient l'objectif de réduire de 30 % leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020, l'impact sur l'emploi serait positif, avec la création nette de plus de 680 000 postes dont 316 000 dans le secteur des énergies renouvelables et 564 000 en faveur de l'efficacité énergétique.

Madame la ministre, la perspective de réduction de 30 % des émissions de gaz à effet de serre est donc un objectif vertueux pour la planète à plus d'un titre. Cette réduction diminuerait d'autant le réchauffement climatique, cause de tous nos maux ; elle serait sobre et efficace pour les ressources naturelles dont l'épuisement est programmé dans notre monde fini ; qui plus est, elle serait efficace pour l'emploi puisqu'elle permettrait de créer 680 000 emplois, entraînant une baisse de 3 points du taux de chômage et de 15 % du déficit de la sécurité sociale – l'effet serait même double si l'on y adjoignait des mesures visant à améliorer la qualité de l'air.

Or, madame la ministre, le Centre interprofessionnel technique d'étude de la pollution atmosphérique démontre dans son dernier rapport que la mise en oeuvre de toutes les mesures en faveur des économies d'énergie ne permettra même pas d'atteindre les objectifs du Grenelle, malgré un scénario qui pousse le fonctionnement des centrales nucléaires actuelles au-delà des quarante ans de la raison.

Madame la ministre, votre Gouvernement a successivement déstabilisé la filière éolienne par l'adjonction de mesures draconiennes à leur installation lors du Grenelle 2…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

…puis récemment donné un coup d'arrêt mortifère à la filière photovoltaïque, ce qui, d'une part, rend inaccessible l'objectif du Grenelle 1 de 23 % d'énergies renouvelables à l'échéance de 2020 et, d'autre part, contribue à rendre aussi inatteignable l'objectif de baisse de 20 % des émissions de gaz à effet de serre, comme le démontre le CITEPA.

Madame la ministre, nous vous interpellons aujourd'hui : êtes-vous prête à reconsidérer les mesures qui handicapent les énergies renouvelables pour vous donner les moyens de respecter vos engagements ? Dans un sursaut de volontarisme vertueux, acceptez-vous de positionner la France aux côtés des sept pays de l'Europe qui militent pour l'objectif de baisse de 30 % des émissions de gaz à effet de serre ? C'est à cette aune que nous jugerons de votre sincérité et de votre ambition pour la France et pour la planète. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Monsieur le président, monsieur le président de la commission du développement durable, Serge Grouard, mesdames, messieurs les députés, vous avez rappelé avec justesse le défi majeur qu'est la lutte contre le changement climatique. Chacun de vous, à raison, a fait état de l'urgence avec laquelle nous devons relever ce défi et agir.

Nous avons besoin d'une politique ambitieuse, cohérente et résolue, je vous l'accorde. C'est la raison pour laquelle la France, en s'appuyant sur le diagnostic des scientifiques du GIEC, milite avec force pour une réduction des émissions à l'horizon 2050 bien sûr, mais aussi dès 2020, selon une trajectoire vertueuse.

La vertu, justement, le député Philippe Plisson y appelle dans une ode au Grenelle de l'environnement que vous reprenez tous. Mesdames, messieurs les députés, ce « plus grenellien que moi tu meurs » est un hommage à l'oeuvre de cette majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

J'apprécie votre soutien. Nous aurions aimé l'éprouver plus souvent à l'occasion de la mise en oeuvre de mesures qui ne sont pas toutes faciles comme la taxe carbone.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Certains qui versent aujourd'hui des larmes de crocodile n'ont pas fortement manifesté leur soutien à ce moment-là.

Dépassons cela. Nos objectifs sont extrêmement ambitieux et nous ne serons pas trop – ceux qui sont présents dans l'hémicycle et même quelques autres – pour pouvoir les atteindre. En effet, alors que l'Europe vise une réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre, la France tend à porter la part de ses énergies renouvelables à 23 % et à réduire de 38 % la consommation énergétique des bâtiments d'ici à 2020. Ces objectifs sont d'autant plus significatifs que la France est déjà un pays très sobre en carbone : 8 tonnes de CO2 produits par habitant contre 12 tonnes au Royaume-Uni ou 20 tonnes aux États-Unis.

Pour atteindre cet objectif, nous avons besoin d'engager notre économie dans une transformation structurelle. Nous partageons aussi ce constat. Si cette transformation est loin d'être achevée, elle est cependant engagée, je tiens à le dire notamment à Yves Cochet et André Chassaigne qui semblaient en douter. Monsieur Jean-Paul Chanteguet, cette transformation est d'abord engagée dans le domaine de l'énergie, sujet auquel vous vous êtes particulièrement attaché.

Comme nous le rappellent les fluctuations des prix des hydrocarbures ou le dramatique accident de Fukushima, le secteur va devoir relever un triple défi : celui de la sécurité de l'approvisionnement ; celui de la compétitivité en matière pas seulement de prix mais aussi d'efficacité énergétique ; et celui du climat. En outre, il devra le faire tout en respectant les plus hautes exigences en matière de sécurité et de protection de l'environnement.

L'amorce de cette transformation se manifeste par un véritable bond en matière d'énergies renouvelables. Au-delà de toutes les polémiques, j'aimerais que l'on puisse en convenir sur la base de chiffres objectifs.

En dehors de l'hydraulique, qui est à peu près stable nonobstant des variations climatiques, la croissance de la production d'énergie renouvelable a atteint 23 % entre 2007 et 2009. Cette croissance, mesdames, messieurs les députés, succède à plus de trente ans d'une stagnation dont nous pouvons convenir que nous sommes tous collectivement responsables.

Nous consommons actuellement environ 13 % d'énergie renouvelable, contre 10 % il y a cinq ans, et cette évolution se traduit dans toutes les catégories : en deux ans le parc photovoltaïque a été multiplié par 13 – il est vrai que l'on partait de peu – et le parc éolien par deux.

Pour le solaire photovoltaïque, nous avions au 31 décembre 2010 une capacité de production de plus de 1 000 mégawatts. Cette augmentation va continuer à un rythme bien supérieur aux 500 mégawatts par an, le plafond momentanément fixé, puisqu'elle devrait atteindre plus de 1 000 mégawatts par an, compte tenu des projets en attente. En fait, en 2011 et 2012 seront raccordés plus de mégawatts en solaire photovoltaïque que jamais par le passé. La France atteindra avant 2016 l'objectif qu'elle s'était fixé pour 2020 dans le cadre du Grenelle.

Dans l'éolien, chaque année, ce sont désormais 1 000 mégawatts de capacité qui sont raccordés, soit l'équivalent de la puissance d'une centrale nucléaire actuelle – l'EPR étant plus puissant. En dépit de la conjoncture, et des difficultés, 5 700 mégawatts étaient raccordées fin 2010. C'est moins que notre objectif de 19 gigawatts en 2020, mais c'est beaucoup plus que ce que nous promettaient les Cassandre il y a quelques années, et même il y a encore deux ans.

Nous avons fait le choix d'un déploiement encadré et concerté. Le cadre législatif fixé dans la loi Grenelle 2 a été jugé contraignant, mais il permet un développement de cette énergie maîtrisé, concerté, partagé avec les élus et donc, in fine, de grande ampleur.

Ce matin, à l'occasion de la réunion des préfets qui a été organisée par le ministre de l'intérieur, je rappelais combien j'attachais d'importance à la création rapide des schémas régionaux de développement des énergies renouvelables, en particulier de l'énergie éolienne. Je signalerai aux préfets votre disponibilité à tous pour accueillir des éoliennes dans vos circonscriptions…

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

…puisque c'est ce que j'ai retenu de vos différentes interventions. L'acceptabilité locale est une condition importante et je vous remercie pour votre mobilisation.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Un mot sur l'éolien en mer. Au mois de novembre ou décembre, j'entendais dire : le Gouvernement a renoncé ; il n'y aura pas d'appels à projet ou alors a minima. Eh bien non ! Le Président de la République et le Premier ministre ont tranché : nous lançons trois gigawatts d'éolien en mer, c'est-à-dire une première tranche qui correspond d'ores et déjà à la moitié de l'objectif de six gigawatts prévu pour 2020. Cela permettra, je l'espère, de faire de la France un leader de cette énergie. Notre pays a tous les atouts technologiques et naturels – elle a notamment un plateau continental assez plat – pour le devenir. Votre inquiétude, monsieur Philippe Tourtelier, n'est donc pas justifiée.

Cette transformation est également en cours dans le domaine des transports. La France a l'un des parcs automobiles les plus sobres d'Europe…

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

…grâce notamment au bonus-malus qui a rencontré un succès populaire considérable et qui a permis de faire baisser les émissions des véhicules neufs de 149 grammes de CO2 au kilomètre en 2007 à 130 grammes de CO2 au kilomètre en 2010. Auparavant, la baisse était de 1 à 2 grammes de CO2 par an.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Vous avez raison, ça peut continuer. Le résultat est déjà très notable actuellement puisque la moyenne des émissions des véhicules neufs vendus en France en 2009 est la plus faible d'Europe. Cela se fait naturellement sans préjudice pour le plan d'investissements très ambitieux en faveur des modes de transports propres, collectifs. J'aurais aimé que vous vous fassiez écho, par exemple, des deux tranches déjà annoncées pour les transports en commun en site propre hors Île-de-France – 800 millions d'euros, puis 600 millions d'euros – ou du plan TGV qui prévoit le lancement de 800 kilomètres de nouvelles lignes et un objectif de 2 000 kilomètres en 2020 qui sera tenu.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Après l'énergie et le transport, j'en viens au bâtiment pour répondre en particulier à Christophe Bouillon. Au passage, je salue Christian Kert qui arrive, doublant ainsi la présence de son groupe dans l'hémicycle. (Sourires.)

Vous avez, les uns et les autres, salué la nouvelle réglementation thermique, Geneviève Gaillard regrettant qu'elle n'ait pas été adoptée plus tôt. Véritable révolution, cette nouvelle réglementation thermique permet une division par trois des consommations dans le neuf, par rapport aux normes actuelles. Elle est déjà anticipée : l'immense majorité des permis actuellement déposés par les promoteurs le sont pour des bâtiments en norme basse consommation. La réglementation thermique 2012 est d'ores et déjà anticipée dans les dépôts de permis de construire par les opérateurs du marché du logement.

Le neuf ne représentant que 1 % du logement par an, plusieurs mesures fiscales – crédit d'impôt durable ou éco-PTZ – ont été prises pour soutenir les travaux de rénovation et d'amélioration de la performance énergétique.

Je partage la déception exprimée par l'un des parlementaires sur le niveau atteint par l'éco-PTZ : 150 000 par an, c'est déjà bien, mais c'est loin de l'objectif de 400 000 que nous nous étions fixé. Je travaille actuellement avec Benoist Apparu à une réforme de ce prêt, afin de le rendre plus attractif et l'aider à monter en puissance.

Je tiens à signaler un programme, trop peu relayé à mon goût par les élus et par les collectivités territoriales : le programme « Habiter mieux ». Geneviève Gaillard et Christophe Bouillon ont souligné le fait qu'un nombre important de nos concitoyens vivent en situation de précarité énergétique, c'est-à-dire que leur facture énergétique représente, chaque mois, plus de 10 % de leurs revenus. Ces Français n'ont pas les moyens d'investir dans des travaux permettant d'améliorer l'efficacité énergétique et ne peuvent pas, non plus, bénéficier de notre éco-prêt à taux zéro puisqu'ils peinent, mois après mois, à payer leurs charges.

Le Gouvernement a débloqué pour eux ce plan particulier « Habiter mieux », d'un montant de 1,250 milliard d'euros, dont 500 millions d'euros provenant du programme « Investissements d'avenir » et 750 millions d'euros de l'Agence nationale de l'habitat – ANAH. Cette subvention, distribuée en partenariat avec les départements, permet de financer des travaux chez les personnes qui n'ont pas les moyens de les réaliser par ailleurs. Je vous invite à mobiliser vos collectivités territoriales pour mettre en oeuvre ce plan, disponible depuis trois mois.

Nous travaillons également sur la réduction des émissions au niveau de la consommation – je ne crois pas avoir entendu quelqu'un évoquer ce sujet. Nous agissons par le biais du bonus-malus, de l'affichage environnemental, de l'affichage CO2 et du bilan des émissions de gaz à effet de serre pour les collectivités et pour les entreprises. Notre objectif est de permettre à nos concitoyens de connaître le prix écologique à côté du prix économique : c'est un moyen de les mobiliser, mais également de les aider à mettre, dans leurs actes de consommation, leurs achats en conformité avec leur engagement en faveur de l'environnement.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

La mise en oeuvre de cette politique et les résultats auxquels elle donne lieu montrent que la France est aujourd'hui sur une trajectoire qui va lui permettre d'atteindre ses objectifs. Je remercie à ce titre le président de la commission du développement durable, Serge Grouard,…

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

d'avoir salué l'effort entrepris pour mettre en oeuvre cette politique.

Je vous rappelle, mesdames et messieurs les députés, que l'application des objectifs du Grenelle de l'Environnement conduit à une réduction de 23 % des émissions de gaz à effet de serre, alors qu'un scénario sans Grenelle se serait traduit par une baisse de seulement 2,4 %. Les émissions de gaz à effet de serre de la France ont diminué de 10 % entre 1990 et 2009.

Cette baisse est en partie liée à la crise économique, c'est exact, mais elle est aussi largement imputable aux politiques mises en place : ainsi, entre 2008 et 2009, la baisse a été de 4,2 % alors que le PIB évoluait dans le même temps de 2,4 %.

Les émissions de gaz à effet de serre baissant également au niveau européen, on peut se demander si la France est bien dans le rythme : si nous avons diminué de 10 % nos émissions, celles de l'Europe ont connu une baisse de 17 %. Toutefois, ce chiffre doit être apprécié avec discernement parce qu'il intègre les anciens pays du bloc de l'Est qui ont suivi une phase de désindustrialisation.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Mais si l'on regarde les choses de près et si l'on prend en compte cet élément, la France est bien sur la trajectoire et même un peu au-delà.

Du reste, si on compare les émissions 2008 des principaux pays signataires du protocole de Kyoto, en tenant compte de leurs objectifs initiaux, la France figure dans le peloton de tête. Je tiens à signaler ce point à André Chassaigne, qui est intervenu sur le sujet tout à l'heure. Il est vrai qu'une étude de WWF donne une note « moyenne » à la France en termes de politique climatique : mais elle ne prend pas en compte la situation initiale de la France et elle néglige des mesures structurantes comme les investissements d'avenir. Au contraire, l'image vertueuse de la France en termes d'émissions de gaz à effet de serre est indiscutablement établie de par le monde.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

C'est d'ailleurs ce que montre une étude réalisée en 2010 par Deloitte à la demande du gouvernement canadien. Associant des critères relatifs aux émissions, à l'innovation et à l'investissement, elle conclut que le pays le plus engagé du G8 est bien la France.

Nous avons aussi progressé en intensité énergétique : la consommation d'énergie primaire rapportée au nombre d'habitants à ainsi baissé de 5,7 % entre 2005 et 2009. Un ménage français consomme 10 % de plus qu'un ménage néerlandais, autant qu'un ménage anglais et 24 % de moins qu'un ménage allemand.

Ces chiffres ne nous dispensent d'aucun effort, même s'ils sont encourageants. Il nous faut poursuivre et aller plus loin.

Une question se pose, qui a été évoquée par Philippe Tourtelier : c'est celle du relèvement du niveau d'effort européen, qui est fixé aujourd'hui à moins 20 % pour 2020. Ce relèvement est indispensable, d'abord pour des raisons scientifiques : selon l'avis des experts aujourd'hui, il est nécessaire, pour éviter une hausse des températures supérieure à 2 °C, de baisser les émissions de 25 % dès 2020. Par ailleurs, si nous repoussions à l'après 2020 une trop grande partie de l'effort, notre objectif de réduction des émissions de 80 % en 2050 en deviendrait plus coûteux.

Cependant, ce relèvement ne saurait être, chacun en conviendra, ni indifférencié, ni inconditionnel.

Il ne peut pas être indifférencié parce qu'il existe une palette d'options dans la répartition de l'effort entre secteurs et entre États membres. Viser un relèvement suppose de répondre à la question du partage de l'effort.

Il ne peut pas non plus être inconditionnel : accroître les efforts demandés à certains secteurs fortement exposés à la concurrence internationale, aboutirait à favoriser les fuites de carbone et à pénaliser la compétitivité de nos entreprises. Yves Cochet a signalé la proposition de la France d'instituer un mécanisme d'inclusion carbone. Nous y sommes fortement attachés.

Qui plus est, la question est internationale. Elle a une dimension stratégique dans le cadre des négociations engagées dans la suite du protocole de Kyoto, cadre dans lequel le Gouvernement a soutenu, jusqu'à présent, un objectif de 30 % sous réserve d'engagements équivalents des grands émetteurs de CO2.

Nous sommes en train de réévaluer cet engagement. Le sujet est trop important pour en faire un effet d'annonce. Il faut débattre de mesures concrètes. C'est notamment l'objectif du conseil informel des ministres européens de l'Environnement qui se tiendra ce week-end, à Gōdōllō en Hongrie.

Je dirai maintenant quelques mots de la mise en oeuvre de la loi Grenelle 1. Comme le président Grouard pourra en témoigner, le Gouvernement et Bertrand Pancher communiquent chaque année un rapport au Parlement sur la mise en oeuvre du Grenelle.

Sur le climat, par ailleurs, la France réalise, chaque année, un inventaire de ses émissions pour suivre les évolutions. Pour assurer la transparence sur les moyens engagés, les dépenses budgétaires et fiscales consacrées à la lutte contre le changement climatique sont également retracées dans un document de politique transversale annexé au projet de loi de finances.

Bref, les dispositifs sont nombreux pour suivre notre effort, effort que, non seulement nous poursuivons, mais encore nous approfondissons.

Plusieurs d'entre vous m'ont interpellée sur la sortie des décrets d'application Grenelle.

Les lois Grenelle 1 et Grenelle 2 ont été longuement débattues. La loi Grenelle 2 a finalement été promulguée l'été dernier. Elle donne lieu à une importante matière réglementaire : 200 décrets d'application, dont 135 en Conseil d'État.

J'ai le plaisir de vous signaler que plus de 20 % des décrets sont déjà publiés ou sur le point de l'être, c'est-à-dire dans le circuit de signature ou en examen en Conseil d'État.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Près de la moitié des décrets sont aujourd'hui techniquement achevés : ils donnent lieu au travail interministériel habituel préalable à l'envoi au Conseil d'État. Ils feront ensuite l'objet d'une concertation et vous seront donc soumis, mesdames et messieurs les députés.

Selon mes projections, tous les textes d'application auront été pris avant la fin de l'année 2011, et une très grande majorité d'entre eux – 80 %, selon mes espérances – dès l'été. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

C'est un travail de très grande ampleur. Il mobilise tous les ministères parce que beaucoup de ces textes sont interministériels. Chaque semaine, une réunion est spécifiquement consacrée à ce sujet à Matignon et rassemble tous les ministères concernés.

Je tiens à dire à Philippe Tourtelier que la mise en place de financements innovants est une des priorités de la France dans le cadre de la présidence du G20. Le Président de la République a récemment confié une mission à Bill Gates sur ce sujet. Plusieurs pistes sont d'ores et déjà identifiées.

Le Président de la République appréciera, j'en suis sûr, le soutien apporté tout à l'heure par André Chassaigne : nous aurions aimé l'entendre il y a quinze jours quand un premier pas a été franchi au niveau européen avec l'adhésion de l'ensemble des pays européens au projet français.

Sur la prolongation du protocole de Kyoto, nous sommes totalement mobilisés pour obtenir des décisions efficaces et juridiquement contraignantes à Durban. Nous comptons, là aussi, sur votre collègue André Chassaigne pour convaincre ses camarades du parti communiste chinois qui, pour le moment, ne partagent pas totalement notre enthousiasme. (Rires sur tous les bancs.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Mesdames et messieurs les députés, comme vous l'avez compris, nous sommes totalement mobilisés – grâce à vous notamment.

Nous établirons également d'ici à la mi-2011 un plan national d'adaptation au changement climatique. Nous serons un des premiers pays à le faire.

La lutte contre le changement climatique nous mobilise totalement, comme aucun gouvernement avant nous. Par conséquent, il ne me semble pas utile d'alourdir davantage la procédure d'information du Parlement, telle qu'elle existe aujourd'hui. Elle est déjà très performante.

J'espère vous avoir convaincus, mesdames et messieurs les députés, que cette résolution, pour vertueuse et intéressante qu'elle soit, n'était pas utile. Elle présente même le défaut de jeter à tort le discrédit sur nos actions – qui sont aussi les vôtres. Le Grenelle doit être un projet partagé. Merci à tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur la proposition de résolution auront lieu, le mardi 29 mars, après les questions au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

L'ordre du jour appelle le débat sur la question climatique.

La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Monsieur le président, madame la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, mes chers collègues, le réchauffement climatique est en marche, et il est à craindre qu'il se produise plus vite que nous ne le pensions il y a quelques années.

En effet, le niveau de la mer s'élève substantiellement plus rapidement que les modèles ne le prévoyaient et la banquise ainsi que les calottes glaciaires déclinent beaucoup plus vite que prévu.

Comme le précise un article paru dans la revue Nature, les 700 milliards de tonnes de carbone qui, s'ils étaient émis au cours des quarante prochaines années, nous permettraient de rester sous la limite des 2 °C, le seront en fait, au rythme actuel, en une vingtaine d'années.

Nous devons donc passer d'un régime d'augmentation des émissions à un régime de baisse d'ici à cinq ou dix ans.

Nous le savons, il est d'autant plus urgent d'agir que l'inertie du système est grande.

Personne aujourd'hui, compte tenu des décisions prises par le Gouvernement, madame la ministre, ne pense que l'objectif des 23 % d'énergie renouvelable sera atteint.

Il n'est qu'à analyser les textes relatifs au nouveau dispositif de soutien au photovoltaïque : à la lecture de la déclaration de M. le Premier ministre, les professionnels de cette filière ont exprimé stupéfaction et incompréhension. Pour beaucoup, les dispositifs proposés sont mortifères pour la filière.

En effet, il est difficile de croire que les prévisions du Gouvernement concernant le marché 2011 et 2012 portant sur 3 000 mégawatts seront tenues, puisque celui-ci se fixe une cible annuelle de 500 mégawatts, bien inférieure aux 700 à 1 000 mégawatts demandés par les acteurs industriels et aux 800 mégawatts proposés par nos deux présidents des commissions du développement durable et des affaires économiques : Serge Grouard et Serge Poignant.

Par ailleurs, est-il utile de rappeler que la filière méthanisation est à ce jour sinistrée : on compte 30 installations en France, pour 5 000 en Allemagne. On attend toujours les décrets fixant les nouveaux tarifs d'achat d'électricité issue du biogaz ou le tarif d'injection du biogaz dans le réseau de gaz naturel. Les procédures d'autorisation sont toujours aussi lourdes et des délais de raccordement des installations toujours aussi longs : près d'un an, contre quatre à cinq mois en Allemagne.

Pour ce qui concerne l'éolien, le durcissement de la législation actée dans le texte Grenelle 2, sous la pression de votre majorité, a freiné les investisseurs : comme le remarque Arnaud Gossement, il est aujourd'hui plus facile dans notre pays de créer une centrale nucléaire qu'un parc éolien.

La plupart des projets faisant l'objet d'un recours, vous n'atteindrez pas les 500 mâts inscrits dans la loi et ce n'est pas le lancement d'un appel d'offres portant sur une puissance installée de 3 000 mégawatts en éolien offshore qui nous permettra d'atteindre les 25 000 mégawatts prévus en 2010.

Personnellement, je considère que la politique énergétique en France est une politique à contre-courant, qui regarde vers le passé et ferme la porte à l'avenir, au risque de renier les quelques avancées du Grenelle de l'Environnement. Elle vise à tuer les énergies renouvelables au profit d'autres filières jugées plus stratégiques, comme le nucléaire, les gaz de schistes ou les forages en eaux profondes.

N'est-ce pas Mme Lagarde qui, à l'occasion de sa cérémonie des voeux, le 14 janvier dernier, déclarait que l'« un des atouts de notre compétitivité économique est de disposer d'une énergie peu coûteuse. Or, partout dans le monde, l'industrie nucléaire connaît un essor rapide, des gisements de gaz et de pétrole sont régulièrement découverts, de nouvelles technologies d'exploitation mises au point » ?

Je voudrais revenir sur le débat entre nucléaire et énergies renouvelables qui agite aujourd'hui la classe politique. Il est d'actualité : le Président de la République n'a-t-il pas réuni, il y a peu, le Conseil de la politique nucléaire ? Je rappelle que le rapport de M. Roussely a été classé « secret défense ». Pour le Président de la République, en effet, le nucléaire doit faire l'objet d'un choix régalien, à l'abri du débat public, comme le prouvent d'ailleurs les décisions qu'il prend, qu'il s'agisse d'exclure ce sujet lourd des débats du Grenelle de l'environnement ou d'engager en janvier 2009 – c'est-à-dire en pleine discussion au Parlement du texte sur le Grenelle 1 – la construction, sans concertation, sans transparence, sans évaluation des besoins énergétiques, d'un deuxième EPR à Penly, en Seine-Maritime.

N'appartenant pas au club des bien-pensants, je m'inquiète et m'interroge. Je m'inquiète lorsque je constate, à l'occasion de l'accident nucléaire qui s'est produit au Japon il y a quelques jours, à la suite du tremblement de terre et du tsunami, que l'énergie nucléaire est incontrôlable et dangereuse, et que la France dispose, après les États-Unis, du deuxième plus important parc électronucléaire au monde. Je m'inquiète lorsque j'apprends que les déchets de haute activité s'accumulent et qu'ils sont, pour le moment, entreposés à La Hague, Marcoule et Cadarache, dans l'attente d'un centre de stockage profond. Je m'inquiète lorsque je découvre, dans un rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, que le projet de stockage géologique profond pourrait être remis en cause par les grands producteurs de déchets radioactifs, en raison de son coût estimé à 35 milliards par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs. Enfin, je m'interroge sur la décision de la France de développer des réacteurs de faible puissance de 100 à 300 mégawatts. S'agit-il de permettre, demain, à certaines industries ou à certains territoires de disposer de leur propre centrale nucléaire ? Allons-nous vers une dissémination nucléaire ? La question mérite d'être posée.

Alors que les Français sont très favorables aux énergies renouvelables, comme le montre une enquête commandée par l'ADEME, et alors que votre majorité est aux responsabilités depuis près de dix ans, comment expliquer que la puissance installée en éolien soit cinq fois plus grande en Allemagne qu'en France ? Comment expliquer que la puissance en photovoltaïque soit en Allemagne vingt et une fois celle de la France ? Comment expliquer que la France autorise à prolonger de dix ans l'exploitation de la centrale du Tricastin et s'apprête à faire de même, en 2011, pour dix autres réacteurs, sans demander aucune contrepartie, alors que l'Allemagne, qui a prolongé ses centrales en moyenne de douze ans, impose les opérateurs à hauteur de 13,8 milliards d'euros, afin de financer le développement des énergies renouvelables et la recherche dans le secteur des énergies propres ?

Même si, comme le laissent penser les propos tenus mercredi à Francfort par Angela Merkel, l'Allemagne semble revenir sur son choix de ne plus sortir du nucléaire, elle a fait du développement des énergies renouvelables un axe majeur de sa politique énergétique et industrielle en prévoyant d'atteindre 60 % de renouvelables dans sa consommation d'énergie en 2050. Grâce à ce choix, 200 000 emplois ont été créés, les industriels allemands de la filière éolienne disposent aujourd'hui d'une avance considérable qui leur assure une position dominante sur les grands marchés et les marchés émergents. Ils sont, derrière la Chine et le Japon, les troisièmes fabricants au monde de cellules photovoltaïques, et leur chiffre d'affaires approche les 15 milliards d'euros.

Vos choix en matière énergétique, madame la ministre, ne sont pas les nôtres. Aujourd'hui, dans notre pays, la production d'électricité est exclusivement dépendante du nucléaire. Cette énergie n'est pas durable et sa place doit être réduite, mais cela exige une volonté politique affirmée et des engagements budgétaires forts dans deux directions. En effet, la survalorisation du nucléaire a conduit à une consommation structurelle unique au monde : nous devons donc donner la priorité à la sobriété et à l'efficacité énergétique et investir massivement dans les énergies renouvelables, dont le potentiel est considérable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Lou Marcel

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, un débat sur la question du climat s'avère particulièrement important, alors même que les objectifs du Grenelle ont été revus à la baisse et que, tous les jours, nous voyons et subissons les conséquences du dérèglement climatique. En effet, je suis convaincue que les problèmes environnementaux – la situation au Japon plaide également en ce sens –, comme les gaz à effet de serre, ou les menaces que subissent les mondes végétal ou animal appellent un débat national, puis international, pour que se construisent, en toute cohérence, des politiques volontaristes d'accompagnement.

C'est dans cette optique que les pays membres de l'Union européenne se sont engagés dans un processus de propositions concrètes en signant dès 2008 un « plan énergie climat ». Il fixe, à l'échéance de 2020, un triple objectif à la lutte contre le changement climatique, visant à réduire de 20 % des gaz à effet de serre, à obtenir un gain de 20 % d'efficience énergétique et à atteindre 20 % d'énergies renouvelables dans la consommation totale d'énergie finale. Mais ces propositions pour atteindre une nouvelle « sobriété énergétique » – qui doit procéder d'une nouvelle stratégie favorisant notamment le développement des énergies propres et renouvelables – ne font pas l'unanimité dans notre pays et nous avons appris avec stupéfaction que l'ancien ministre de l'écologie, pourtant censé promouvoir le Grenelle de l'environnement, a délivré en catimini des permis d'exploration de gaz de schiste.

Ce dossier, dans lequel on favorise l'exploitation d'une énergie fossile, revêt une importance majeure au point de vue environnemental et sanitaire. Aujourd'hui, grâce aux pressions exercées par les élus, vous avez promis un moratoire dans l'attente des résultats de la mission confiée aux conseils généraux de l'industrie et de l'environnement et chargée d'évaluer les enjeux, notamment environnementaux, des gaz de schiste. Mais il faut bien avoir à l'esprit que, dès lors que l'on délivre des permis d'exploration de gaz de schiste, on est prêt à délivrer des permis d'exploitation.

Rappelons quelques faits. On extrait du gaz de schiste selon un procédé particulièrement dégradant et traumatisant pour l'écosystème du puits d'exploitation. L'extraction par fracture hydraulique de la roche nuira gravement à nos ressources en eau : la fracturation exige chaque jour de 10 000 à 20 000 mètres cubes d'eau, soit l'équivalent de la consommation quotidienne d'une ville de 40 000 habitants.

En outre, si l'on ignore la composition de la moitié des 944 additifs chimiques ajoutés à l'eau, on sait que 52 % des 353 molécules qui ont été identifiées affectent le système nerveux, 40 % le système immunitaire et rénal, 46 % le système cardiovasculaire. Un quart d'entre elles sont cancérigènes et mutagènes, 37 % peuvent affecter le système endocrinien, plus du tiers sont volatiles. Naturellement, la plupart peuvent contaminer les eaux souterraines.

Il faut ajouter à cela que les débris de forages et des eaux usées et sursalées sont potentiellement radioactifs.

Par ailleurs, en crevant des poches naturelles de méthane, certains forages ont provoqué des explosions et des incendies : le 7 juin 2010, sept ouvriers présents sur un site de forage américain ont été brûlés et, quelques jours plus tôt, ce sont des boues de forage toxiques qui, à la suite d'une explosion, se sont écoulées durant seize heures dans une forêt voisine.

La réalité des forages de gaz de schiste est donc désormais connue aux États-Unis et elle est tellement contestée que l'État de New York a décidé un moratoire sur les permis d'exploitation. De même, le Parlement européen et le commissaire européen à l'énergie se sont prononcés en faveur d'un moratoire.

Je souhaite rappeler les engagements de la France en matière d'environnement avec, d'une part, le respect du principe de précaution désormais inscrit dans la Constitution et, d'autre part, le respect des engagements du Grenelle qui incite plutôt au développement des énergies nouvelles et renouvelables et non pas à celui d'une énergie fossile dont l'exploitation provoquerait des dégâts irréversibles. Nos concitoyens ont le droit d'être informés et vous avez le devoir de les rassurer.

Dans l'Aveyron, a été délivré un permis, dit « de Nant », qui concerne le sud du département. En outre, un permis, dit « de Cahors », a été déclaré « recevable en cours d'instruction » au 31 décembre 2010 selon le BMI par la Direction générale de l'énergie et du climat.

Même si, aujourd'hui, à la suite du drame japonais, on risque d'assister à un regain d'intérêt pour les énergies fossiles, jugées moins dangereuses, l'exploitation du gaz de schiste serait une catastrophe environnementale et sanitaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bertrand Pancher

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat sur la question climatique qu'a demandé le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et auquel je me réjouis de participer, est loin d'être insignifiant : en ce domaine, nos efforts sont certes importants, mais ils doivent en permanence être mis sous tension, car c'est d'eux que dépend la prise en compte de la réalité climatique et énergétique tant nationale qu'internationale.

La crise environnementale n'est qu'une facette d'un développement effréné, sans règles. Nos concitoyens commencent à se rendre compte que ce mode de développement est condamné et que, si nous restons inactifs, nous irons dans le mur. À très court terme, si nous ne faisons pas tout pour l'endiguer, l'inexorable réchauffement climatique entraînera d'immenses désastres.

Au président Roosevelt, qui lui demandait ce qu'il pensait de la Seconde Guerre mondiale, Winston Churchill répondit : « Absurde ! » Il voulait dire qu'elle aurait pu être évitée sans difficulté à de nombreuses reprises, mais que la communauté internationale avait préféré fuir ses responsabilités et fermer les yeux.

Les récentes catastrophes climatiques – de la tempête Xynthia, qui a frappé chez nous, aux sécheresses et inondations qui ont sévi dans le monde en 2010 – nous ont rappelé à quel point il était urgent d'agir. Les drames humanitaires, dus aux colères de la Terre que nous avons provoquées, ne cesseront de se multiplier tant que nous ne nous donnerons pas les moyens de les éviter, car ils peuvent l'être en grande partie. Cela relève de notre seule responsabilité.

Notre planète a toujours connu des catastrophes naturelles, mais les phénomènes auxquels nous sommes confrontés sont nouveaux. Les conséquences de ces catastrophes sont de plus en plus dramatiques, en raison de l'accroissement de la population, de sa concentration dans les zones urbaines et des activités humaines poussées à outrance qui n'ont pas tenu compte des conséquences qu'elles peuvent avoir sur l'environnement. Aujourd'hui, nous le savons, la modification globale du climat engendre une augmentation du rythme des catastrophes climatiques. Comment ne pas être frappé par les analyses de plus en plus sombres sur les conséquences de la fonte de la banquise ou par certaines études récentes qui prévoient, pour la fin du siècle, une augmentation du niveau de l'océan entre 80 centimètres et 2 mètres ?

Les instruments économiques qui doivent être mobilisés pour lutter contre le changement climatique et limiter ses conséquences sur nos sociétés sont plus que jamais au coeur de nos réflexions et de nos actions. Cependant, ils ne nous dispenseront pas d'engager une réflexion plus large sur le type de développement que nous voulons substituer à cette croissance aveugle et sans limites. Il faudra que nos concitoyens intègrent ce changement de modèle de société et que l'ensemble des acteurs approfondissent les conditions matérielles de sa réussite.

Sans attendre, nos politiques économiques de lutte contre le changement climatique se concentrent sur deux types d'actions : la réduction des émissions de gaz à effet de serre et l'adaptation de nos sociétés au changement climatique. S'il n'est pas possible d'éviter le changement climatique qui se produira au cours des deux ou trois prochaines décennies, il est en revanche possible de ne pas contribuer à un emballement non maîtrisé du climat et d'éviter la catastrophe. Il est également nécessaire et essentiel d'adopter au plus vite des mesures destinées à réduire les émissions de gaz à effet de serre et de renforcer nos facultés d'adaptation, en minimisant leurs coûts. La France l'a parfaitement compris et s'y engage pleinement. Notre pays, qui avait pris beaucoup de retard sur le plan environnemental ces dernières décennies, est désormais à la tête du peloton des nations développées, contribue à entraîner l'Europe et à faire du continent européen le moteur d'une nouvelle régulation mondiale. L'espoir est dorénavant dans notre camp et je voudrais remercier l'ensemble de nos collègues, notamment ceux de l'opposition, qui ne se sont pas trompés en votant la loi Grenelle 1.

Selon les scientifiques du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, pour limiter la hausse des températures moyennes de la planète à moins de deux degrés par rapport aux niveaux de l'ère préindustrielle, il faudrait que les émissions des pays industrialisés diminuent de 20 à 40 % d'ici à 2020, et de 80 à 95 % d'ici à 2050.

Est-ce possible ? Oui, si nous changeons radicalement nos modes de consommation, si nous privilégions la qualité de vie à la quantité de biens de consommation, si nous sommes attentifs au respect des ressources et matières premières, notamment énergétiques, et si nous poursuivons notre développement en nous fondant sur des objectifs partagés, au service de l'épanouissement de tous les êtres humains. Aujourd'hui, ces questions environnementales provoquent une remise en question de notre modèle économique dans sa totalité, ainsi que de notre pensée.

Les objectifs de réduction des émissions des pays industrialisés pour 2020 sont inscrits dans la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques, signée à Cancùn, et un dispositif d'enregistrement et de vérification des actions des pays en développement a été mis en place. Je souligne à cet égard l'action menée par notre ministre, notamment à Cancùn. L'objectif de limiter à long terme l'augmentation de la température globale à deux degrés est également inscrit dans cette convention Climat.

La nécessité, fixée par l'accord de Copenhague, d'atteindre au plus vite le pic des émissions est reprise par le texte.

Le fonds vert pour le climat, qui a pour objet de soutenir les projets, les programmes et les politiques des pays en développement, a été créé, ainsi que les organes de sa gouvernance.

Un comité pour l'adaptation aux effets du changement climatique a été institué pour guider les actions des pays en développement.

Enfin, un mécanisme de lutte contre la déforestation a été créé.

Ces résultats permettent d'envisager avec confiance qu'un accord visant à ouvrir une deuxième période du protocole de Kyoto soit conclu lors de la conférence de Durban en 2011.

Cette conférence conforte l'engagement et la détermination de la France, qui entend faire de sa politique climatique et de sa participation à la négociation climatique mondiale l'une de ses priorités stratégiques. Je rappelle combien la politique de notre pays en la matière est essentielle. Nous devons devenir le moteur de l'Europe en matière environnementale et climatique, et l'Europe, géant économique, doit pouvoir réguler le monde dans ce domaine. Encore faut-il que les Européens et les Français en aient conscience et que nous continuions à agir avant qu'il ne soit trop tard.

La France respectera les engagements financiers pris à Copenhague : 412 millions d'euros par an au titre du programme de financements précoces, avec des versements qui s'échelonneront jusqu'en 2012.

L'image vertueuse de notre pays en termes d'émissions de gaz à effet de serre est largement reconnue au plan international. Mme la ministre l'a souligné il y a quelques instants.

Dans le domaine des transports, premier secteur en termes d'émission de CO2, le parc automobile de la France est l'un des plus sobres d'Europe. La mise en place du bonus-malus automobile a permis de réduire les émissions des véhicules neufs de 149 à 130 grammes par kilomètre entre 2007 et 2011. Ainsi, la moyenne des émissions des véhicules neufs vendus en France en 2009 est la plus faible d'Europe.

Le Grenelle de l'environnement a également décidé d'un plan d'investissement très ambitieux en faveur des modes de transports propres, qu'aucun maire de grande ville, qu'il soit de gauche ou de droite, ne saurait renier.

Dans le domaine du bâtiment, qui se caractérise par le deuxième plus mauvais bilan carbonique, la nouvelle réglementation thermique élaborée pour le neuf permettra une division par trois des consommations par rapport aux normes actuelles. Dans l'existant, le Grenelle prévoyait un vaste chantier de rénovation qu'il faudra suivre de façon attentive ; ce sujet est complexe et nécessitera peut-être d'autres outils incitatifs. Je ne doute pas, chers collègues, que nous saurons ensemble les forger.

Qui peut donc douter, dans ces conditions, que nous atteindrons les objectifs que nous nous sommes fixés à Kyoto ?

J'ai bien à l'esprit le débat qui anime actuellement la Commission européenne et que relaient un certain nombre de ministres en charge de l'environnement. Certains, et je m'en félicite, réclament une diminution de 30 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020. Il convient d'élever le niveau de nos ambitions, mais en tenant compte des efforts déjà réalisés.

Il est sans doute légitime de mesurer l'impact de cet objectif de 30 % sur la compétitivité de notre industrie, car tout cela est évidemment important. Cela suppose également d'obtenir des engagements comparables des autres pays grands émetteurs de gaz à effet de serre. Nous vous soutiendrons, madame la ministre, sur cette ligne.

Dans le domaine de l'énergie, nous ne pourrons pas faire l'économie d'un grand débat national, qui devrait, à mon sens, être confié à un organisme indépendant, la commission nationale du débat public. Qui parmi nos concitoyens a conscience des enjeux ainsi que des contraintes futures ? Qui mesure réellement l'ampleur de la métamorphose actuelle de notre société ? Comment faire, enfin, de la crise que nous vivons une réelle opportunité ? En chinois, le mot « crise » est la juxtaposition de deux autres mots : « danger » et « opportunité ». Le danger est de ne rien faire ou de croire que le destin nous entraîne vers un avenir irrémédiablement sombre. L'opportunité consiste à anticiper le danger et à construire un futur différent, auquel nous ne pensions pas mais qui, finalement, se révélera salvateur.

Nous ne disposons pas encore de toutes les clefs pour ouvrir les portes de ce nouveau monde. Certaines sont encore fermées par des combinaisons difficiles à décoder. Cependant, des idées s'imposent, qui, il y a quelques années, auraient fait passer ceux qui s'en revendiquaient pour de doux illuminés : nouvelle gouvernance mondiale, règles environnementales aux frontières, instance mondiale de l'environnement contrepoids à l'OMC, Europe plus politique, responsabilité sociale et environnementale des entreprises, commerce équitable, financement du développement et de l'adaptation des pays pauvres par une taxe mondiale, diminution de la consommation énergétique, taxation des poids lourds, 10 % de réserves dans les océans, objectifs partagés entre chasseurs, agriculteurs et ONG, nouvelle démocratie, développement plus équilibré. Aujourd'hui, grâce notamment aux efforts de la France, qui oserait nous accuser de rêver ?

Mes chers collègues, notre pays, à travers son histoire, a su prouver à maintes reprises sa capacité à mesurer les enjeux auxquels il était confronté et à prendre les décisions qui s'imposaient. Le monde de demain est-il plus incertain qu'entre 1914 et 1917 ou entre 1940 et 1943 ? Je ne le pense pas. L'enjeu climatique est indéniablement l'un des principaux enjeux de ce XXIe siècle naissant Nous avons pris acte de cette menace de bouleversement et agi non seulement pour les Français mais pour les populations du monde entier, en montrant le chemin à suivre.

Dans une société aussi internationale et globalisée que celle dans laquelle nous vivons, il est essentiel de préserver notre planète : c'est elle qui, grâce à sa composition intrinsèque, ses mécanismes naturels et sa biodiversité, nous permet de vivre.

L'être humain dispose d'une des plus belles richesses qui existe : sa conscience. Le réchauffement climatique est aujourd'hui entré dans nos consciences. J'ai confiance dans notre capacité de réflexion et d'action, sur le climat comme, d'ailleurs, dans tous les autres domaines liés aux autres risques environnementaux, économiques et sanitaires. Il suffit que nous nous en donnions progressivement les moyens, et que nous partagions ces moyens. Entre une croissance effrénée sans règles et une décroissance sans horizon, nous continuerons à nous donner les moyens de trouver l'équilibre nécessaire pour un développement économique au service de tous les hommes et la préservation notre environnement. Tout simplement parce que nous n'avons plus le choix. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le climat de la planète a évolué au cours des siècles précédents. Il continuera de changer dans les décennies à venir. Ces changements climatiques sont aujourd'hui plus importants et plus rapides que par le passé à cause des activités des hommes et du dérèglement du cycle du carbone que l'espèce humaine a provoqué avec une accumulation de gaz à effet de serre dans l'atmosphère, notamment le CO2.

Les grandes forêts du monde jouent un rôle important dans le cycle carbone. La déforestation impacte donc directement le climat mondial. La forêt primaire de nombreux pays du Sud est de plus en plus perçue comme un bien économique rapidement exploitable. Les poumons de la planète, situés en Afrique équatoriale, en Amazonie, en Sibérie ou bien encore dans le sud de l'Asie, sont en danger. Chaque jour, des arbres sont abattus. Le bois noble est alors vendu sur le marché mondial ou tout simplement brûlé afin de pouvoir étendre les exploitations agricoles intensives de soja, de canne à sucre ou d'autres cultures. Avec la disparition des précieux puits de carbone que sont les arbres, c'est aussi tout un écosystème forestier qui disparaît : une faune et une flore spécifiques bien sûr, mais aussi le plus important des réservoirs dérivés de la forêt : les détritus et réserves organiques du sol.

La France possède un important couvert forestier en milieu tempéré, en métropole, et tropical, en Guyane, avec plus de huit millions d'hectares. Nous disposons également d'une tradition forestière séculaire et notre savoir-faire en matière de gestion durable des forêts est reconnu dans le monde entier. Il nous incombe bien sûr de le transmettre aux autres pays forestiers.

La communauté internationale a décidé de renforcer les mécanismes de lutte contre la déforestation, lors de la conférence internationale sur le climat de Cancùn, à la fin de l'année dernière. Un programme de réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts, dit « REDD + », a été adopté à cette occasion. Le mécanisme du partenariat semble assez simple à première vue : il consiste à attribuer des quotas correspondants à la quantité d'émissions de gaz à effet de serre évitée par un projet de reboisement ou de préservation des forêts dans les pays en voie de développement.

Les interrogations sont néanmoins nombreuses à ce jour. On ne dispose d'aucun cahier des charges précisant la nature du reboisement. Personne ne sait exactement sur quel marché ces quotas seront vendus et échangés et à quel prix. En outre, en fonction de quelle méthode seront-ils déterminés ? Enfin, aucune autorité de contrôle n'est prévue pour réguler l'achat de quotas et l'effectivité du reboisement. En résumé, la bonne idée théorique du reboisement est là, mais aucun mécanisme précis n'a, à ce jour, été adopté pour la mettre en oeuvre.

Néanmoins, les premiers crédits du partenariat REDD + ont été accordés précipitamment le 8 février dernier à un projet de reboisement au Kenya. Dit « corridor de Kasigau », ce projet est porté par l'ONG WildlifeWorksdans une zone semi-tropicale du sud-ouest de ce pays, et il est certifié par une entreprise norvégienne. Madame la ministre, à votre connaissance, y a-t-il des entreprises françaises qui travaillent actuellement sur un projet de reboisement éligible au programme REDD + ? Si c'est le cas, pouvez-vous indiquer à la représentation nationale quelles sont ces entreprises ?

REDD + rassemble à ce jour soixante-dix pays forestiers et donateurs et mobilise plus de quatre milliards de dollars de financement potentiel sur trois ans. La France, initiatrice du projet, et le Brésil, grand pays forestier, assurent la présidence du partenariat pour ce premier trimestre 2011. La dernière loi de finances a créé un compte d'affectation spéciale intitulé « Engagements en faveur de la forêt dans le cadre la lutte contre le changement climatique » qui permet, entre autres, de financer cette initiative REDD +.

Depuis la conférence de Copenhague de 2009 et sans attendre les résultats de la conférence de Cancùn de décembre 2010, la France s'était particulièrement engagée sur le front de la lutte contre la déforestation avec la Norvège. Des conférences ont eu lieu à Paris et Oslo en 2010. Elles ont permis de réfléchir à la mise en oeuvre des dispositions de l'accord de Copenhague relatives à la protection des forêts, avec l'instauration d'un partenariat expérimental de REDD +.

L'empressement et la précipitation de la France sur ce sujet soulèvent un certain nombre d'interrogations. Vous allez me répondre que ces deux conférences ont permis de trouver plus facilement qu'à l'ONU un consensus sur de nombreuses questions. Cependant, si une telle méthode devait à l'avenir faire jurisprudence, elle affaiblirait sûrement le processus décisionnaire de l'ONU. De plus, ce partenariat présente une grosse lacune en matière de transparence et de fonctionnement démocratique : les représentants de la société civile et des peuples autochtones concernés ne sont pas associés dans l'organisation. La France va-t-elle prochainement prendre l'initiative de corriger ces problèmes afin que les peuples directement concernés par ces programmes de protection des forêts ou de reboisement puissent logiquement faire entendre leur voix ?

Enfin, madame la ministre, reboiser et préserver l'existant, c'est bien, mais ces forêts sont souvent implantées dans des pays où la démocratie n'est pas encore totalement aboutie, où la corruption est forte, où les moyens de l'État sont faibles et où, hélas ! l'exploitation illégale des forêts et son commerce ne sont pas rares. Comment la France entend-elle s'impliquer, et par quel biais, dans la lutte contre l'exploitation illégale du bois et dans l'aide aux États qui en sont victimes? Je rappelle que l'Union Européenne vient d'adopter un règlement européen interdisant l'importation en Europe de bois illégal, auquel la France s'est longtemps opposée.

2011 est l'année internationale des forêts, aujourd'hui plus que jamais il est urgent de les protéger, de les préserver et de mener en ce sens une politique ambitieuse au niveau international. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Gonzales

Monsieur le président, madame la ministre, cher président Grouard, mes chers collègues, nul ne conteste aujourd'hui le réchauffement planétaire. Les rapports successifs du GIEC ont ainsi démontré l'urgence climatique et la nécessité de trouver des réponses adaptées. Car les émissions de gaz à effet de serre, responsables « très probables » de ce réchauffement, selon les experts du GIEC, ont augmenté de 38 % depuis 1990.

La consommation énergétique pour se chauffer, pour produire, pour se déplacer, contribue à l'augmentation de ces gaz à effet de serre, au rang desquels figure le CO2. Nous avons donc la double priorité de favoriser les énergies décarbonées tout en réduisant l'empreinte carbone de l'activité humaine. Parmi les énergies décarbonées, on compte notamment l'énergie nucléaire, qui est ces jours-ci sous les feux des projecteurs.

À ce sujet, la position du Gouvernement, qui a demandé un audit sur les dix-neuf sites nucléaires français afin de disposer d'une information transparente et fiable, me paraît empreinte de sagesse.

N'oublions pas que nos amis allemands ont choisi une autre voie en privilégiant le charbon, avec, pour résultat, des émissions de CO2 par habitant supérieures de 60 % à celles de la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Gonzales

Si, aujourd'hui, le nucléaire semble encore indispensable pour une production électrique décarbonée, l'effort en direction des énergies renouvelables doit être assurément poursuivi et amplifié.

Chers collègues, sur tous ces bancs, nous avons fait le choix de la responsabilité. Avec le Grenelle de l'environnement, voté à la quasi-unanimité dans notre hémicycle, nous regardons l'avenir en face.

C'est un effort sans précédent que nous engageons en faveur des énergies renouvelables afin qu'elles atteignent 23 % dans la consommation d'énergie.

De multiples programmes de développement des énergies renouvelables sont en cours dans les secteurs de l'éolien, l'éolien offshore notamment, de la méthanisation ou du photovoltaïque. La puissance cumulée du parc photovoltaïque est ainsi passée de 81 mégawatts fin 2008 à 1 025 mégawatts fin 2010 – Mme la ministre l'a rappelé –, en avance sur les objectifs du Grenelle.

En parallèle, le combat contre le réchauffement climatique se traduit par la réduction de l'empreinte énergétique.

Au niveau de l'habitat, c'est notre mode de vie qui évolue. Le chauffage, la ventilation, la climatisation, la production d'eau chaude sanitaire et l'éclairage sont concernés. Là encore, excusez du peu, suite au Grenelle, nous passerons bientôt à la réglementation thermique 2012 pour aboutir à une RT 2020 qui prévoit des bâtiments à énergie positive.

Nos habitudes de consommation sont également à repenser. L'idée est de rapprocher l'assiette du producteur, de consommer des produits de saison, cultivés dans un périmètre à l'entour. Ces circuits courts sont un outil de lutte contre le réchauffement climatique ; ils représentent également un formidable outil d'aménagement du territoire en préservant les espaces agricoles de l'urbanisation et en favorisant le maintien d'une agriculture périurbaine.

Quant au secteur des transports, il s'agit du premier contributeur en termes de gaz à effet de serre – 43 %. Son impact carbone doit être internalisé. La pollution atmosphérique générée par le transport aérien est ainsi davantage prise en compte. Dans une semaine, le 31 mars, les compagnies aériennes devront remettre deux rapports qui serviront de base au calcul du quota d'émissions gratuites de CO2 qu'elles se verront allouer. À compter du 1er janvier 2012, ces compagnies devront en effet plafonner leurs émissions à 97 % d'un niveau de référence.

Mais les rejets de CO2 ne constituent qu'une partie du problème. L'aviation rejette également des oxydes d'azote – les NOx – au pouvoir réchauffant indirect via la formation d'ozone, et des traînées de condensation, parfois à l'origine des nuages qui finissent par entretenir une couverture permanente autour du globe et augmentent l'effet de serre.

Néanmoins, en matière de transport aérien, mais aussi terrestre, comment ne pas saluer le programme des investissements d'avenir issu du grand emprunt et qui vise à développer les recherches sur des véhicules et avions moins bruyants, plus propres, mais aussi moins énergivores ?

Mes chers collègues, la question climatique est un sujet difficile, tout comme il est difficile de conclure des accords internationaux entre 200 pays. Mais en France, le train du Grenelle est irréversiblement lancé et, à bien des égards, exemplaire. Avec le Grenelle 1, nous avons fixé le cap, Avec le Grenelle 2, nous le tenons. Notre pays n'a certainement pas à rougir d'avoir verdi notre société… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je viens de lire il y a quelques minutes un mèl indiquant que Mme Figueres, au nom de l'UNFCCC – United Nations Framework Convention on Climate Change – exhortait les gouvernements du monde à maintenir ce qu'elle appelle le momentum, c'est-à-dire la dynamique qui, selon elle, s'est enclenchée à Cancùn après l'échec de Copenhague, pour les grands rendez-vous de Durban de la fin de l'année et ce rendez-vous intermédiaire qui aura lieu dans quelques jours à Bangkok. Je ne sais si vous irez à Bangkok, madame la ministre, mais j'aimerais savoir quelle sera la position de la France par rapport à ce qui a été débattu et plus ou moins engagé à Cancùn.

Cela étant, je vais élargir mon propos en citant quelques exemples.

En 2006, Nicholas Stern a publié un rapport que nous avions salué car, pour la première fois, il était l'oeuvre d'un économiste patenté – Nicholas Stern a été chief economist à la Banque mondiale, puis chief economist à la BERD, professeur à la London school of economics et enfin conseiller de Tony Blair. Bref, un économiste reconnu, avec sans doute un petit côté libéral – c'était l'époque du New Labour. Or il concluait dans son rapport que si l'on ne faisait rien contre le changement climatique en réduisant notamment les émissions de gaz à effet de serre, cette inaction coûterait beaucoup plus cher que si l'on engageait, par exemple, 1 % du PIB mondial dans les actions d'atténuation, de réduction et d'adaptation.

Ce rapport a été longuement discuté : enfin, on avait quelque chose de sérieux. Le 10 mars dernier, le même Nicholas Stern a donné dans un journal une interview en trois parties, très intéressante. Je vous en rapporte quelques passages. « Mon rapport de 2006, dit-il, a minimisé les risques. » « Les conséquences de la situation actuelle défient le champ du langage économique standard ». Plus loin : « en l'absence de politique globale de réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre, il y a un risque supérieur à 50 % »…

À ce propos, peut-être Nicholas Stern n'a-t-il pas tout à fait saisi ce que signifie le mot « risque ». Ce n'est pas tout à fait la même chose que la probabilité – on a pu le constater à propos de Fukushima. En général, le risque est mesuré par ce que l'on appelle « l'espérance mathématique » : c'est la multiplication d'une probabilité, en général très faible, par le coût d'un dommage, en général très fort. Quand la probabilité est faible, sans être infinitésimale, et que le coût est fort, mais pas trop, la multiplication n'est pas trop instable. Il est donc possible de faire des calculs de risque : c'est ainsi que l'on procède pour les industries du type Seveso où il y a une échelle des risques et du coût. Et dès lors que le calcul est à peu près stable, les assureurs, qui s'intéressent beaucoup au changement climatique et à tout ce qui touche aux risques industriels, sont disposés à assurer, parce qu'ils savent ce qu'ils devront payer.

Il en va tout autrement lorsqu'il s'agit de nucléaire ou de changement climatique : si la probabilité est très faible, le dommage potentiel, lui, est énorme. Ainsi, l'accident de Fukushima coûtera des centaines de milliards d'euros. Dans un tel cas de figure, la multiplication est un peu plus instable et les assureurs ne veulent pas assurer, car ils ne savent pas exactement ce qu'ils devront couvrir.

C'est un peu ce que dit M. Nicholas Stern – j'y reviens – lorsqu'il affirme qu'« il y a un risque supérieur à 50 % que se déclenche une troisième guerre mondiale ». Et ce n'est pas un écologiste farfelu comme moi qui le dis ! Selon lui, cette guerre aura pour cause principale les centaines de millions de réfugiés climatiques dans la deuxième moitié de ce siècle – on en compte déjà 40 ou 50 millions.

À noter que ce n'est pas tant la banquise qui pose problème – même si désormais les bateaux pourront traverser le Pôle nord pendant l'été – que la calotte glaciaire : car si la calotte fond, l'eau se déversera dans la mer et le niveau s'élèvera d'un mètre, deux mètres, cinq mètres, personne ne le sait. Tandis que la banquise flotte, et même si elle fond, le niveau de la mer reste stable – c'est le principe d'Archimède, que vous connaissez sans doute, madame la ministre.(Sourires.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Je pensais aux enfants qui suivent notre débat dans les tribunes du public et je trouve que c'est très bien d'en parler ainsi !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Tout à fait. Les éducateurs pourront peut-être leur parler du principe d'Archimède, même à l'école primaire. Après tout, il suffit de se plonger dans une baignoire… (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Tout cela est très sérieux, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

C'est un exercice de réflexion auquel je vous engage, madame la ministre, chers collègues.

En gros, cette convention climatique existe depuis 1992. Le sommet prévu l'an prochain sera en fait un « Rio plus 20 ». Par ailleurs, le protocole de Kyoto continuera-t-il d'exister au-delà de 2012 ? Apparemment, vous y travaillez, madame la ministre, mais certains sont plus réticents, parce qu'ils savent ce qu'est la contrainte internationale : certains pays sont fiers et disent qu'ils n'ont pas besoin de tribunaux environnementaux pour leur dire ce qu'ils doivent faire. Ils assurent que s'ils s'engagent, ils tiendront leur parole, mais ils ne veulent pas être surveillés de l'extérieur.

Finalement, le protocole de Kyoto, la convention climatique, Cancùn et tout le reste, cela consiste à s'adresser à des milliards d'émetteurs de gaz à effet de serre – en gros, à tous les habitants du monde qui, bon an mal an, qu'ils le veuillent ou non, émettent des gaz à effet de serre : il n'est qu'à penser au milliard de voitures qui roulent sur le globe ou aux centrales au fioul. Tout le monde brûle, d'une manière ou d'une autre, des combustibles fossiles. Ce sont donc des milliards de gens qu'il faut convaincre, par des politiques publiques, mais aussi par des incitations individuelles, de baisser leurs émissions et notamment de brûler moins de combustibles fossiles.

Il pourrait y avoir une autre manière de faire : cela consisterait à renverser la perspective en s'adressant seulement à une centaine de personnes, ce qui pourrait avoir le même effet. Plutôt que de s'adresser au consommateur, c'est-à-dire à l'aval, pourquoi ne pas s'adresser à l'amont du carbone, c'est-à-dire aux producteurs de combustibles fossiles. Entre les pays de l'OPEP et les vendeurs de gaz et de charbon, ils ne sont guère qu'une centaine,peut-être 150 ou 200, mais pas plus. Il faudrait tenter de les convaincre qu'ils pourraient vendre et exporter raisonnablement du gaz, du charbon et du pétrole – qui est l'énergie fossile la plus utilisée –, mais dans le cadre onusien.

Mme Ostrom, prix Nobel d'économie, qui s'occupe des biens publics mondiaux, a écrit un très beau livre traduit récemment en français. Elle se demande pourquoi, s'agissant du pétrole, voire de tout le sous-sol – car la déplétion ne concerne pas uniquement les fossiles, mais aussi les minerais, les minéraux et les métaux –, on ne pourrait pas mettre en place un protocole amont, et non plus un protocole aval comme celui de Kyoto, obligeant les producteurs à une certaine mesure, à une relative sobriété d'extraction, de production, de vente et de diffusion. Ce serait peut-être aussi efficace : cela s'adresserait à beaucoup moins de monde, s de personnes, mais il s'agit de personnages puissants. Le roi Abdallah d'Arabie Saoudite, par exemple », pourrait s'étonner que vous lui demandiez que son pétrole devienne un bien public mondial géré par l'ONU ! (Sourires.) Mais pourquoi pas ?

J'ai déjà fait la publicité d'un livre dans la première partie de mon exposé ; j'en ai publié un autre voilà six ans, où je parle du protocole de déplétion, qui place en amont les fossiles et en aval les gaz à effet de serre. Après tout, l'atmosphère peut être considérée comme un bien public mondial géré par l'ONU ; pourquoi donc le pétrole et tous les combustibles fossiles, ne seraient-ils pas des biens publics mondiaux gérés par l'ONU ? Pour commencer, cela permettrait à tous les pays d'avoir un peu de pétrole, car à voir la façon dont les cours augmentent et le prix qu'atteint le baril à New York, on peut se demander comment un villageois du Burkina fera fonctionner le dispensaire avec un générateur diesel lorsque le gazole coûtera deux ou trois euros le litre ! Il y a là un réel problème humanitaire. Pourquoi ne pas renverser la perspective, en s'adressant plutôt aux producteurs qu'aux consommateurs que nous sommes tous ? Et pourquoi ne pas confier la gestion de l'énergie à l'ONU ? Peut-être pourriez-vous réfléchir à ces hypothèses, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon propos sera beaucoup plus modeste que celui de M. Cochet : il portera essentiellement sur la production de CO2 de la sidérurgie française.

Les trois sites industriels les plus émetteurs de CO2 en France sont des sites sidérurgiques, Dunkerque, Fos-sur-Mer et la région lorraine, avec au total sept hauts fourneaux. Les émissions de ces trois sites représentent 21,7 millions de tonnes de CO2 par an. C'est dire combien il est important de travailler à des procédés de rupture technologique pour limiter cette pollution.

Cela étant, je ne dis pas que rien n'a été fait : la sidérurgie a déjà largement progressé dans ce domaine, du moins en Europe. Si l'on compare les sidérurgies française et chinoise, les émissions vont du simple au double : en France, depuis 1990, les quantités rejetées ont même régressé alors que la production a légèrement augmenté : le gain d'émission à la tonne d'acier produite a atteint 17 %.

Depuis 2004, dans le cadre d'un consortium européen dénommé ULCOS – Ultra Low Carbon Dioxide Steelmaking –, représentant quarante-huit entreprises implantées dans quinze pays de l'Union européenne, de nouveaux procédés sont étudiés pour réduire de manière plus significative encore les émissions de CO2 liées à la production d'acier.

Parmi les solutions retenues par ce consortium figure, à court terme, le captage-stockage du CO2 des hauts fourneaux. Les premières expériences ont déjà été menées en Suède sur un micro-haut fourneau ; la phase pré-opérationnelle, elle a eu lieu en Allemagne à Eisenuttenstadt. Désormais, c'est un projet de démonstrateur industriel qui doit être développé et mis en oeuvre à Hayange, capitale de la sidérurgie en Lorraine, et plus précisément sur le site d'ArcelorMittal, porteur du projet pour l'ensemble des quarante-huit partenaires industriels européens.

Ce procédé de séparation des gaz, de récupération du CO2 puis de son stockage est une vraie technologie de rupture puisqu'il pourrait réduire de manière plus drastique encore la production de CO2 – de l'ordre de 50 % par tonne produite. Pour la sidérurgie française, mais aussi européenne, il s'agit d'un enjeu majeur puisqu'elle est soumise au système des quotas d'émissions de CO2 adopté par l'Union européenne. Ce projet est également décisif pour la pérennité des filières liquides, notamment continentales, car il donnera à ce site français de production en particulier, et aux sites européens en général, un avantage technologique et donc compétitif majeur. Il en ira ainsi jusque dans les années 2050, 2060 puisque l'on continuera de produire de l'acier de la même manière avant que des procédés nouveaux – je pense à l'électrolyse – ne soient véritablement au point.

Rappelons-le, l'acier aujourd'hui, en France, c'est 15 millions de tonnes, c'est 15 % de la production européenne et plus de 20 000 emplois directs.

Comme pour tous les autres projets de ce type, le captage-stockage a cependant un coût économique et sociétal. Le premier est évalué à 623 millions d'euros d'investissement. Sans les aides européennes sollicitées – 256 millions d'euros –, sans le soutien de l'État français au travers du fonds démonstrateur de l'ADEME et des crédits sollicités dans le cadre du Grand emprunt – 159 millions d'euros – et enfin sans la participation de la région Lorraine, à hauteur de 30 millions d'euros, l'industriel ne pourrait pas développer cettetechnique.

Je vous demande donc, madame la ministre, si les engagements pris par le Président de la République lors de sa visite à Gandrange, seront tenus – je ne parle pas de sa première venue au cours de laquelle il avait annoncé le maintien de l'usine, mais de la seconde, lorsqu'il avait pris acte de la fermeture de l'usine et déclaré qu'il fallait absolument s'engager dans le processus du captage-stockage. Il importe aujourd'hui que son engagement soit tenu et que le projet ULCOS, qui a été déposé le 9 février dernier au ministère de l'industrie et qui sera présenté en mai prochain à la Commission européenne, soit défendu par le Gouvernement français.

Enfin, madame la ministre, pouvez-vous m'indiquer quand sera transposée dans le droit français la directive européenne sur le stockage géologique du CO2 ? C'est un élément majeur sur le plan environnemental mais également économique dans notre stratégie de réduction des émissions de CO2 et de l'effet de serre.

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Gaillard

La question climatique est consubstantielle à celle des énergies. Or, comme je l'ai dit tout à l'heure, les mesures gouvernementales en faveur de l'efficacité énergétique sont parfois poussives. Quant à celles visant à développer d'autres sources d'énergie, elles sont criantes d'insuffisance ou très peu pertinentes, voire totalement contradictoires avec les objectifs du Grenelle.

Rappelez-vous, le Gouvernement nous avait fait miroiter, il y a deux ans, une solution agrocarburant : le bioéthanol devait nous sauver. Mais son bilan écologique s'est avéré pitoyable. Les biocarburants et le nucléaire constituent d'ailleurs les deux sujets majeurs que le Grenelle n'a pas intégrés.

La question des biocarburants a finalement été débattue en conseil des ministres. Il a été décidé qu'un débat au niveau européen serait demandé, que la France se tournerait plutôt vers les biocarburants de deuxième génération, que dans cette attente, elle n'importerait des biocarburants que des seuls pays qui se conforment au droit du travail international et qui appliquent une politique respectueuse des forêts et de la diversité biologique.

Concernant la production nationale, il semble que l'objectif de faire passer de 7 à 10 % la consommation de carburants issus de biocarburants a été finalement – et heureusement ! – remis en cause. Où en est-on aujourd'hui ?

Le Gouvernement a ensuite abandonné l'idée d'une contribution énergétique dite taxe carbone comme si l'urgence du réchauffement climatique ne justifiait pas que l'on se creuse un peu la tête pour parvenir à une application socialement juste de ce dispositif destiné à orienter les comportements vers le non-gaspillage énergétique.

Le Gouvernement a encore repoussé l'application de l'éco-redevance pour les poids lourds, tout en autorisant l'utilisation et le passage des 44 tonnes.

Le Gouvernement a aussi opéré un désengagement fiscal qui dopait le photovoltaïque.

Concernant enfin le développement de l'éolien, la dernière décision prise à propos de la mise en place de la procédure ICPE rend encore plus difficile l'implantation des installations.

Alors que leur vocation est de produire une énergie non polluante, classer les éoliennes parmi les installations susceptibles de créer, par danger d'exploitation ou d'émanation de produits nocifs, les risques les plus graves pour la santé et l'environnement semblait pourtant totalement aberrant. Aucun pays au monde n'avait jamais mis en oeuvre, ni même envisagé, un encadrement aussi rigide. L'énergie éolienne est partout considérée comme une énergie éminemment renouvelable, participant à la lutte contre le changement climatique, sans risque, sans production de déchet ni de CO2, une énergie appelée à jouer un rôle éminent dans les politiques de développement durable et de protection de l'environnement. Elle est par ailleurs plébiscitée par nos concitoyens. Faut-il le rappeler, l'éolien est indispensable pour atteindre les objectifs français en 2020.

Vous avez enfin récemment accordé dans la plus grande discrétion des permis d'exploration visant à exploiter des gaz et des huiles de schiste au moyen de techniques de fragmentation dont on mesure avec stupeur, grâce au retour d'expérience des Américains et Canadiens, l'impact extrêmement nocif pour l'environnement, voire la santé humaine. Tout cela à rebours du Grenelle pour grappiller les dernières ressources d'énergies fossiles, et ce, à n'importe quel prix écologique. Ce qui n'arrangera évidemment rien au climat.

La dernière mesure en date est la prime à la casse pour les chaudières censées favoriser l'efficacité énergétique. Seulement voilà quand on compare les 250 euros accordés au regard du budget moyen du remplacement d'une chaudière à performances technologiques, soit 3 000 à 5 000 euros, on mesure toute la gadgétisation de cette mesure. Cela ne représente que 5 % à 7 % du coût du remplacement. Comment les Français en précarité énergétique et en précarité tout court pourront-ils bénéficier d'une telle disposition ? Elle sera plus perçue comme une aubaine pour les opérateurs installateurs et les Français aisés qui, eux, peuvent financer un tel investissement. Au surplus, je précise que le remplacement d'une chaudière relève des charges non locatives. C'est donc aux propriétaires qu'il revient de prendre la décision et de l'assumer, ce qui limite encore la portée effective de cette mesure.

Cette évocation tout indicative et non exhaustive de la piètre concrétisation de la politique énergétique française face à l'urgence et à l'ambition des objectifs à atteindre nous désillusionne et nous donne souvent le sentiment que le Gouvernement, à l'ombre des centrales nucléaires, n'a pas mis tout en oeuvre pour parvenir à une restructuration de notre modèle énergétique. Madame la ministre, nous avons perdu beaucoup de temps. Ne serait-il pas possible de lancer, dès maintenant, un débat sur notre stratégie énergétique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Gaillard

Cela nous permettrait d'avoir les idées claires et de lutter enfin de manière efficace contre les changements climatiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Dans ce débat, il a souvent été question d'orientations générales. Or il ne faut pas oublier qu'il y a un enjeu très important devant nous : je veux parler de la mise en place de la troisième phase du marché européen de quotas d'émissions. Je m'en tiendrai donc, quant à moi, aux interrogations soulevées à cet égard, tant dans notre pays que sur le plan européen.

Évacuons d'emblée le problème de la pertinence de ce dispositif. Certes, il a été décidé à une époque où la crise financière ne s'était pas encore produite et que les questions relatives aux mécanismes spéculatifs n'étaient pas encore posées. Y a-t-il de la bonne et de la mauvaise spéculation ? Est-on capable de distinguer l'une de l'autre ? Il peut y avoir un paradoxe à créer un marché sur les quotas d'émissions – certes avec un objectif vertueux – tout en s'interrogeant sur la régulation des marchés des matières premières, qui ont par ailleurs dérapé.

Quoi qu'il en soit, nous sommes engagés dans ce processus, qui n'est d'ailleurs pas exclusif d'autres dispositifs – je pense notamment à la mise en place d'une taxe carbone, au niveau national comme au niveau européen.

Madame la ministre, d'ici à 2013, la France sera confrontée à une difficulté : elle n'a pas suffisamment de quotas d'émissions. Peut-être a-t-elle sous-évalué ses besoins ou a-t-elle été trop généreuse dans l'allocation des quotas ? Aujourd'hui, en tout cas, elle doit racheter des quotas. Une telle opération coûtera cher. Le Sénat avait étudié une solution que le Gouvernement avait laissé passer, mais sans se faire trop d'illusions : elle consistait à anticiper la mise aux enchères d'une partie des quotas. C'était évidemment en contradiction avec les engagements que nous avons pris ; la Commission n'aurait donc sans doute pas approuvé ce choix et, du reste, le Conseil d'État a annulé cette disposition.

La question est donc de savoir comment le Gouvernement va faire face à cette situation. J'aimerais, madame la ministre, que vous nous donniez des précisions. J'ai cru comprendre que cela portait sur 400 millions d'euros, ce qui n'est pas totalement anecdotique, surtout dans la situation de nos finances publiques. Avez-vous des pistes ?

Le second point que je souhaite aborder est de nature européenne. Il s'agit du bon fonctionnement de ce marché. Là aussi, il y a un certain nombre d'interrogations : le rapport de M. Gonnot, rendu au nom de la mission d'information présidée par Philippe Martin, s'était fait l'écho des sérieux dysfonctionnements. D'abord, ce fut une fraude à la TVA, qui portait sur des sommes importantes – plusieurs milliards d'euros. Il y en a eu ensuite d'autres plus subtiles : si j'ai bien compris, on a vendu des quotas d'émissions qui n'auraient pas dû se trouver sur le marché. Ces derniers jours encore, deux places ont interrompu les cotations et suspendu les transactions sur les quotas d'émissions.

Il y a donc de réels dysfonctionnements. D'où ces questions au Gouvernement : quelles informations celui-ci peut-il nous donner sur la manière dont la sécurisation va se faire pour les opérateurs ? Quelles sont les propositions de la France dans ce domaine ?

Une piste, évoquée notamment par le rapport Charpin, consisterait à centraliser l'organisation des enchères. Aujourd'hui, il y a sept places sur lesquelles il est possible d'échanger des quotas d'émissions. Où en est cette idée ? Une telle centralisation permettrait sans aucun doute d'améliorer la transparence et le contrôle.

En tout état de cause il est clair que si l'Europe ne surmonte pas ces difficultés récurrentes, elle aura du mal à faire face en 2013 à la mise en place définitive du mécanisme. Il faut donc impérativement que des décisions soient prises. Là encore, j'aimerais que le Gouvernement nous donne des précisions.

Au départ, les pays européens n'étaient pas très favorables à un dispositif de ce type : ils étaient plutôt enclins à défendre une taxation du carbone. C'est au fil des négociations, avec les États-Unis notamment, que l'Europe s'est décidée à le mettre en place. Le paradoxe est que les États-Unis se sont retirés de la négociation et que l'Europe se retrouve avec ce système, et tenue de le mettre en place ! Reste qu'il est permis de s'interroger. Les doutes doivent être levés car ce dispositif se traduirait par une extrême volatilité des prix, qui ne serait pas tenable, au premier chef pour les opérateurs du marché. Il faut donc que celui-ci soi régulé, faute de quoi je crains qu'il n'atteigne pas les objectifs que nous lui avons assignés.

Telles sont les questions que je voulais vous poser à l'occasion de ce débat. Le sujet que j'ai abordé n'est pas très présent dans le débat public et dans l'actualité, mais le problème va désormais se poser très rapidement pour l'Europe et le Gouvernement français. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je suis heureuse de pouvoir à nouveau évoquer les enjeux climatiques devant vous.

Je me propose, pour éviter une redite par rapport au débat précédent, de vous montrer à travers quelques exemples de mesures, tout en répondant aux propos des uns et des autres, comment cette transformation que nous appelons tous de nos voeux prend corps, mois après mois, pour répondre au défi du changement climatique.

J'évoquerai donc plus particulièrement les mesures d'économies d'énergie et les actions menées dans le bâtiment, en écho à l'intervention de Didier Gonzales. Je parlerai ensuite des négociations internationales sur le climat pour vous en proposer, à la suite de l'intervention de Bertrand Pancher, un état des lieux. Enfin, je répondrai à toutes les questions qui se sont fait jour dans vos interventions.

Pourquoi un mot plus particulier sur le bâtiment ? Parce que ce secteur est aujourd'hui le plus gros consommateur d'énergie en France : 42 % de l'énergie produite et 23 % des émissions de CO2. C'est probablement aussi le secteur dans lequel la transformation engagée à la suite du Grenelle de l'environnement est la plus avancée et la plus profonde, mais paradoxalement la moins connue du grand public.

Mais je voudrais commencer par donner quelques chiffres pour nous rappeler aux réalités. Fin 2010, plus de 60 000 logements et 1,8 million de mètres carrés dans le tertiaire avaient déjà fait l'objet d'une demande ou d'une attribution de certification « bâtiments basse consommation » pour le neuf. Cette donnée est en contradiction avec les propos tenus tout à l'heure par Geneviève Gaillard. Si l'éco-PTZ n'a pas encore pris, comme je le rappelais tout à l'heure, l'ampleur que nous souhaitions, il n'en reste pas moins que, d'ores et déjà, 150 000 rénovations ont été aidées et 6 millions de ménages ont bénéficié du crédit d'impôt. Ce à quoi il faut ajouter – on les oublie trop souvent – les rénovations aidées dans le parc social, elles aussi fruit du Grenelle de l'environnement : on en compte à ce jour 65 000.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Nous ne devons pas gaspiller l'énergie que nous produisons ou transformons. J'ai eu l'occasion de le redire récemment : l'énergie la moins chère et la meilleure est celle que nous ne consommons pas.

Nos efforts sont donc d'abord engagés en faveur de l'efficacité énergétique pour tous. Je rappelle à cet égard l'existence du programme « Habiter mieux » au profit des personnes en situation de précarité. L'objectif est d'aider 300 000 personnes d'ici à 2017 à baisser leurs charges et à entrer elles aussi dans un cercle vertueux pour l'environnement comme pour le pouvoir d'achat.

Certains outils du Grenelle de l'environnement n'ont pas été évoqués dans notre débat alors qu'ils auraient mérité de l'être. Je pense par exemple au document de performance énergétique, à l'affichage CO2 sous toutes ses formes ou encore au bilan des émissions de gaz à effet de serre pour les collectivités et les entreprises.

Tous ces dispositifs d'affichage destinés aux consommateurs et aux particuliers pour les informer du prix écologique de ce qu'ils consomment et de ce qu'ils achètent sont, je le crois, doublement vertueux : grâce à eux, le consommateur peut faire les bons choix et, en même temps, on exerce une pression sur les vendeurs et sur les producteurs de logements, de biens ou d'équipements, afin qu'ils transforment leurs modes de production.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Et pourquoi n'obligez-vous pas à la rénovation thermique au moment de la vente d'un logement ?

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

La question a été évoquée, monsieur Cochet. Pour ma part, je n'exclus pas qu'il faille en passer par là un jour, mais cela n'est possible qu'une fois que le marché est très fortement développé et que le prix de la rénovation a un peu baissé. Pourquoi ? Parce que si on le fait trop tôt, on risque de figer le marché,…

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

…alors même que l'on sait que la rigidité du marché du logement est un des problèmes qui pèsent, par ailleurs, sur l'emploi en France. Mais cela sera vraisemblablement nécessaire pour aller plus loin dans la grande transformation qui est en cours.

Un mot aussi sur le levier de la consommation. Il peut accélérer la mutation de notre économie, mais aussi redonner de la compétitivité au « made in France ». J'ai la conviction que le fait d'actionner ce levier, ce qui revient en fait à encourager la relocalisation des produits et à utiliser des circuits courts, est aussi un moyen de redonner du lustre à la production nationale et de réorienter vers elle – donc vers l'emploi en France – un certain nombre de nos consommations.

Je voudrais parler des actions menées dans le transport, l'industrie ou l'agriculture, qui poursuivent les mêmes objectifs. Je confirme ici à Didier Gonzales, qui l'évoquait tout à l'heure, que nous explorons tous les gisements de réduction des émissions. J'aurais souhaité développer ce point, mais compte tenu de la teneur des interventions, il vaut mieux que je me concentre maintenant sur les négociations internationales.

Les derniers accords en date sont ceux de la conférence de Cancún. Celle-ci a d'ailleurs été importante en elle-même car le simple fait d'avoir un accord a permis de restaurer la confiance nécessaire à la coopération internationale qui – disons-le – était entamée après la réunion de Copenhague.

Cancún a donc été un succès, mais bien évidemment beaucoup reste à faire. Cancún est non pas la fin de l'histoire des négociations climatiques, mais seulement une étape utile.

Le plus important – le plus difficile aussi – sera sans doute de rapprocher les besoins globaux, tels que les définissent les scientifiques, et les actions menées au niveau national et local, qui, pour l'heure, sont très nettement insuffisantes. J'ai bien noté, à ce propos, la citation que faisait Yves Cochet tout à l'heure de la dernière interview de Nicholas Stern, qui se fait l'écho d'une dure réalité : celle de l'urgence qu'il y a à agir.

Pour renforcer le niveau d'ambition collectif, nous pourrons nous appuyer sur la décision prise à Cancún de fixer une date pour le pic des émissions, à laquelle s'ajoute un objectif global de réduction des émissions pour 2050. Ce dernier point est important : on se donne une cible tout en décrivant le chemin pour y arriver.

Nous pourrons valoriser les positions de l'Europe, qui est en pointe sur cette question, et aussi montrer l'exemple, avec l'élaboration d'une feuille de route à cette échéance. Bertrand Pancher le disait : nous devons être le moteur de l'Union européenne. La France se veut à la pointe de cette négociation et du dispositif engagé, aussi bien par ses actions que par les objectifs ambitieux qu'elle porte.

Au niveau européen, on l'a dit, le débat portera essentiellement sur le relèvement de l'objectif de réduction d'émissions européen, aujourd'hui fixé à 20 %. La France y prendra sa part. Renforcer l'objectif de réduction des émissions à court terme permettrait d'acquérir un avantage compétitif évident : ce serait prendre de l'avance dans l'entreprise de transformation profonde de notre économie.

Par ailleurs, comme j'ai eu l'occasion de le dire tout à l'heure, si nous repoussions à l'après-2020 une trop grande partie de l'effort, l'objectif d'une réduction des émissions de 80 % à 95 % en 2050 en deviendrait plus coûteux. Pour autant, nous devons nous mettre d'accord sur la bonne manière d'augmenter cet objectif pour 2025 et de le faire passer de 20 % à 25 % ou 30 %. Sur ce sujet, les effets d'annonce sont contre-productifs.

Si l'Union européenne choisit d'aller plus vite que ses partenaires vers l'objectif commun, elle devra se prémunir contre les risques de fuites de carbone qui se feraient au détriment de ses objectifs environnementaux. Nous devons travailler sur la façon dont cet objectif pourrait être poursuivi selon les secteurs d'activité. Ce travail est engagé ; la France se veut porteuse de propositions au niveau européen.

Nous continuons par ailleurs – et je fais ici écho à une remarque de Geneviève Gaillard – à soutenir le principe d'une contribution carbone européenne qui permettra de donner un prix au carbone. Nous avons demandé à la Commission de présenter sans attendre son nouveau projet de directive sur la taxation de l'énergie. La majorité a suffisamment montré, même si elle prêchait parfois dans le désert, combien elle était motivée par cet objectif. S'il n'a pas été encore possible de l'atteindre au niveau national, nous continuons à le porter, y compris au niveau européen.

Un deuxième grand chantier a été évoqué, celui des financements innovants. À Copenhague et à Cancùn, nous avons promis 100 milliards de dollars par an d'ici à 2020 pour l'atténuation et l'adaptation des pays en développement. La France a fait de la mise en place de ces financements une des priorités de sa présidence du G20, et le Président de la République a confié une mission à Bill Gates sur les financements du développement.

Des financements innovants existent déjà, notamment dans le domaine des transports, avec l'expérience, sur une base volontaire, d'UNITAID, mais ces financements ne sont pas à la hauteur des besoins. Nous avons d'ores et déjà identifié plusieurs pistes à explorer et nous comptons avancer durant l'année 2011 sur ce dossier.

Des débats sont en cours au sein des organisations mondiales compétentes que sont l'Organisation maritime internationale et l'Organisation de l'aviation civile internationale, pour la mise en place de permis d'émission sur le transport aérien et maritime et d'un prélèvement sur ce permis d'émission qui permettrait d'abonder le Fonds vert. Christine Lagarde et moi-même avons saisi les responsables de ces organisations pour qu'ils aillent de l'avant, en lien avec les travaux du G20. Les émissions de ces secteurs ont été laissées à l'écart par le protocole de Kyoto. Il y a là une occasion à saisir de les ramener dans le champ des négociations tout en levant des fonds pour pouvoir financer nos engagements et atteindre nos objectifs en matière de réduction des émissions.

La diminution des subventions aux énergies fossiles, nécessaire pour rendre compétitives les énergies renouvelables, pourrait également permettre de financer des actions en faveur du climat. C'est une des pistes que nous explorons.

Des facilités d'assurance contre le risque climatique pourraient également être mises en place. C'est une piste moins « grand public », un peu plus complexe. Elles permettraient de faire face aux événements climatiques extrêmes dont les travaux scientifiques montrent que la fréquence va augmenter en lien avec le changement climatique.

D'autres idées existent, comme une fiscalité adaptée sur la forêt, sans préjudice évidemment de la taxe sur les transactions financières, portée par le Président de la République et qui est peut-être aujourd'hui la plus avancée, même si les oppositions sont nombreuses au niveau international. Je ne détaillerai pas toutes les propositions, vous connaissez le projet d'utilisation des recettes des enchères carbones ou, dans une tout autre direction, le projet d'une taxe sur le tabac.

De mon point de vue, toutes ces pistes doivent être poussées, d'une part, parce que nous aurons probablement besoin de plusieurs d'entre elles – il sera difficile de trouver 100 milliards de dollars à horizon 2020 avec une seule ressource –, d'autre part, parce que c'est en jouant de l'un contre l'autre et en poussant tout de concert qu'on a les meilleures chances d'arriver in fine à un résultat.

Un mot sur le partenariat REDD + pour répondre à Philippe Plisson même s'il n'est plus là pour l'entendre.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Ce partenariat a été lancé en 2010 par la France, avec d'autres. C'est elle qui en assure actuellement la coprésidence avec le Brésil. Pour l'heure, notre pays tient ses engagements : à ce stade, il s'agit de financements exclusivement budgétaires, il n'y a pas encore d'ouverture sur les mécanismes de flexibilité, même si ce n'est pas fermé pour la suite. La France souhaite profiter de sa coprésidence avec le Brésil, pour développer le partenariat REDD + et notamment associer plus largement les ONG pour permettre, à travers elles, de rechercher l'association de nouveaux pays.

Nous avons soutenu et nous continuons à soutenir la mise en oeuvre du règlement FLEGT destiné à lutter au niveau communautaire contre le commerce illégal de bois. D'une manière générale, la France se veut à la pointe de ce qui se fait en matière d'intégration de la forêt dans la lutte contre le changement climatique.

Nous soutenons à tel point la proposition REDD + que nous proposerons le 21 avril prochain, à l'occasion d'une réunion dans le cadre d'une initiative que nous appelons « Paris-Nairobi » car organisée avec le premier ministre du Kenya, la mise en place d'un partenariat pour le développement de l'énergie propre dans les pays d'Afrique et les pays les plus vulnérables, sur le même modèle que REDD + : l'objectif est de sécuriser et de maximiser les financements climat dans le domaine de l'accès à l'énergie, mais également de valoriser l'action de la France et de lier davantage la négociation sur les changements climatiques avec les problématiques de transition énergétique. Il s'agit enfin de mettre au point une offre peut-être plus adaptée à des pays comme les pays africains qui ne se retrouvent pas toujours forcément dans les dispositifs de flexibilité qui existent dans le cadre de la convention climat.

Je voudrais dire un mot sur le marché de quotas, pour répondre à Christophe Caresche. Le marché des quotas de CO2 est encore jeune. Les événements récents ne remettent pas en cause la pertinence du système, mais ils montrent sans doute la nécessité d'un meilleur encadrement, sur le modèle de la régulation financière que la France promeut par ailleurs.

Notre pays s'est très tôt engagé dans ce sens et notre dispositif national de gestion des quotas a plutôt bien résisté aux dernières attaques. Le registre français est un des premiers qui ont été rouverts. Au niveau européen, des mesures urgentes ont été prises pour bloquer les comptes frauduleux. Nous travaillons activement, fort de notre propre expérience, à rehausser les exigences de transparence et d'intégrité du marché. Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Le régime « nouveaux entrants » a été mal calibré et la réserve s'avère totalement insuffisante. L'article 64 de la loi de finances a reçu un avis négatif du Conseil d'État. Mais mon ministère l'avait un peu anticipé et nous travaillons donc à d'autres sources de financement ; mais la solution n'est pas encore arrêtée et je m'en voudrais de vous faire ici des annonces qui ne seraient pas forcément définitives.

Je confirme à M. Liebgott que le Président et le Gouvernement soutiennent la réalisation du projet stratégique pour le futur de l'industrie européenne de la sidérurgie. Nous lui apporterons notamment un soutien dans le cadre des investissements d'avenir et nous solliciterons par ailleurs l'aide financière de l'Union européenne dans le cadre de l'appel à projet NER 300.

Enfin, Geneviève Gaillard et Marie-Lou Marcel m'ont interpellée sur la question des gaz de schistes. Je le répète ici solennellement, la méthode d'exploitation utilisée aux États-Unis pour le gaz de schiste, qui nous paraît dangereuse pour l'environnement, pour les paysages mais également pour les nappes phréatiques, n'est pas acceptable en France.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

C'est la raison pour laquelle, à la demande du Premier ministre, les projets de fracturation hydraulique ont tous été suspendus dans l'attente de la remise du rapport que nous avons commandé, Éric Besson et moi-même, et du rapport parlementaire qui doit être rédigé à peu près dans le même temps. Cela a été l'occasion pour moi de constater que le code minier était un peu ancien et les procédures de consultation – au stade des autorisations d'exploration beaucoup plus qu'à celui des autorisations d'exploitation – minimales.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Du coup, le Gouvernement a décidé, à l'occasion du dépôt de la loi de ratification sur l'ordonnance de codification minière, de proposer à votre assemblée une adaptation prévoyant une procédure de consultation publique dès le stade du permis d'exploration.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Un mot de réponse à Jean-Paul Chanteguet qui est revenu sur les énergies, notamment les énergies renouvelables. On oublie trop souvent qu'à travers l'obligation d'achat, ce sont plusieurs dizaines de milliards d'euros pendant vingt ans qui vont être dépensés sur les énergies renouvelables. Le soutien est donc bien réel, et financièrement lourd. Ce à quoi s'ajoutent 1 350 millions d'euros d'investissements d'avenir pour les démonstrateurs, 1 000 millions d'euros pour les instituts d'excellence dans les énergies décarbonées, la parité des dépenses publiques de recherche entre les nouvelles technologies de l'énergie et l'énergie nucléaire, et récemment l'appel à projet sur l'éolien offshore ainsi que la revalorisation pour la méthanisation du tarif d'achat de l'électricité et le soutien à l'injection directe de biogaz dans les réseaux de gaz. Les décrets sont prêts et le Conseil d'État en sera prochainement saisi.

Un mot sur les biocarburants, en réponse à Geneviève Gaillard. Nous sommes en train de mettre en place un dispositif pour contrôler la durabilité des biocarburants et notamment la protection de la production alimentaire et de la biodiversité. Un appel à manifestation d'intérêt a été lancé par l'ADEME fin février pour soutenir les biocarburants les plus avancés, les plus économiques, les moins émetteurs de CO2, les plus respectueux de l'environnement. Là aussi, nous avançons sur la voie que nous nous sommes tracée. Tout cela se veut à la fois extrêmement ambitieux, efficace et opérant.

Pour finir, j'ai bien entendu la proposition d'Yves Cochet d'inviter le roi Abdallah à transformer en biens publics mondiaux ses réserves de pétrole. Je ne manquerai pas de la transmettre par les canaux diplomatiques, même si je doute de l'efficacité et du grand succès de l'opération… (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Voilà du travail pour la diplomatie française, madame la ministre ! (Sourires.)

Le débat est clos.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Prochaine séance, mardi 29 mars 2011 à neuf heures trente :

Questions orales sans débat.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-sept heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma