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Intervention de Geneviève Gaillard

Réunion du 24 mars 2011 à 15h00
Proposition de résolution sur le climat — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeneviève Gaillard :

…celle de l'efficacité énergétique. L'énergie la moins chère, la moins polluante, c'est l'énergie qui n'est pas consommée. Gagner 20 % en termes d'efficience énergétique d'ici à 2020 correspond à un des engagements du plan énergie-climat de l'Union européenne, mais la France a un fort retard, notamment dans le secteur du bâtiment. L'efficience énergétique constitue aussi, d'après les récentes analyses, un moyen de réduire les émissions de CO2, donc d'atteindre l'objectif de réduction de 20 % des gaz à effet de serre. Enfin, gagner en efficacité énergétique, c'est éviter de produire davantage d'énergie et donc, mécaniquement, accroître la part des énergies renouvelables, ce qui participe de l'objectif de 23 % de la consommation finale d'énergie issue des énergies renouvelables.

L'Agence européenne de l'environnement a démontré qu'au niveau mondial, l'efficacité énergétique contribuerait pour plus de 60 % à la réalisation de l'objectif de réduction des émissions de CO2 d'ici à 2050 ! Le chantier est colossal. La France a pris un retard considérable par rapport à ses voisins et partenaires européens. Précisons que même si l'Europe a décidé de prendre le leadership mondial de la lutte contre le changement climatique, le traité européen ne confère aucune compétence dans le domaine de l'énergie à l'Union européenne. La politique énergétique demeure donc une prérogative des États, et du point de vue de l'efficacité énergétique, nous ne sommes pas les meilleurs élèves, loin s'en faut.

Il existe bien une directive sur l'efficacité énergétique et les services énergétiques, mais il appartient aux membres de l'appliquer via des plans nationaux d'action pour l'efficacité énergétique, et force est de constater que nous n'avançons pas tous avec le même élan. Ainsi, au Danemark, dès 2007, a été décidé de ne plus construire après 2015 des bâtiments qui consommeraient de l'énergie, alors qu'en France, nous avons eu du mal à imposer la norme bâtiment basse consommation et son seuil de 50 kilowattheures par mètre carré et par an. Un ménage français consomme près de 30 % d'énergie en plus qu'un ménage vivant dans un des pays de l'Union les plus volontaristes en la matière, tels les Pays-Bas.

La Commission européenne vient juste d'élaborer un document fixant un plan global 2011 pour l'efficacité énergétique avec, en entame, un constat préoccupant : « Malgré les mesures considérables qui ont été prises pour atteindre cet objectif, notamment sur les marchés des appareils électroniques et des bâtiments, des estimations récentes de la Commission laissent à penser que l'Union européenne ne parviendra à réaliser que la moitié de l'objectif des 20 %. »

Si l'Union veut pouvoir atteindre pleinement son objectif, c'est maintenant qu'elle doit agir, donnant suite à l'appel du Conseil européen du 4 février 2011, qui demandait d'« agir avec détermination pour exploiter le potentiel considérable qu'offrent les bâtiments, les transports et les procédés de production en termes d'augmentation des économies d'énergie ».

La Commission met aussi le doigt sur une lacune évidente, que nous avons particulièrement mesurée lors de l'examen des lois Grenelle, à savoir le déficit criant de professionnels formés pour la rénovation thermique des bâtiments. En effet, les solutions en faveur de l'efficacité énergétique des bâtiments sont souvent exigeantes sur le plan technique. II existe des lacunes en ce qui concerne la formation adaptée des architectes, des ingénieurs, des contrôleurs, des artisans, des techniciens et des installateurs, et plus particulièrement des professionnels impliqués dans les activités de rénovation. À ce jour, au niveau global de l'Union européenne, il existe environ 1,1 million de travailleurs qualifiés alors que l'on estime qu'il en faudra 2,5 millions en 2015. C'est pourquoi la Commission lance l'initiative intitulée : « Renforcement des compétences ». Il est donc primordial que la France ne rate pas ce train si elle veut avancer !

La voie de l'efficacité n'est pas neutre socialement, le poste de l'énergie étant devenu un poste très impactant sur le budget des ménages en France. Les crises successives, le renchérissement chronique des énergies fossiles et l'indexation sur le pétrole aggravent les termes de cette équation, ajoutent de l'enjeu au défi énergétique. J'ai bien noté, madame la ministre, que vous avez installé, le 1er mars dernier, l'Observatoire national de la précarité énergétique. Il était grand temps ! Aujourd'hui, 3,4 millions de ménages consacrent plus de 10 % de leurs revenus à payer leurs factures énergétiques ! Lorsqu'ils n'y parviennent pas, ce sont les collectivités qui s'en chargent. Il est donc urgent de mettre en place des dispositifs vertueux poussant, incitant, récompensant les économies d'énergies. Or nous subissons, au contraire, le règne du gaspillage énergétique.

Le dispositif des certificats d'économies d'énergie, issu de la loi de programme du 13 juillet 2005, est vertueux. C'est un des outils déterminants de la politique d'efficacité énergétique. Il a démontré son efficacité. On a ainsi augmenté significativement les termes de l'obligation d'économies d'énergies. C'est bien, mais il conviendrait d'accroître le champ des personnes éligibles, « les obligés », selon les dispositions du texte, pour multiplier l'impact du dispositif et augmenter la part des économies d'énergie réalisées au bénéfice direct des ménages en précarité énergétique.

Pour atteindre l'objectif 2020, il est nécessaire de jeter les bases d'une politique publique énergétique intégrée, cohérente et convergente, en mobilisant tous les secteurs d'activités et leurs capacités d'auto-régulation : par exemple, dans les transports, cela veut dire du fret ferroviaire plutôt que des super-bahuts de 44 tonnes ; par exemple, s'agissant de l'urbanisme, cela veut dire bien sûr la rénovation thermique des bâtiments, mais aussi et surtout la lutte contre l'étalement urbain. Notre politique énergétique doit en effet s'appuyer sur une politique clairvoyante de l'aménagement du territoire. C'est une des conditions de sa réussite. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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