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Intervention de Marie-Lou Marcel

Réunion du 24 mars 2011 à 15h00
Débat sur la question climatique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Lou Marcel :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, un débat sur la question du climat s'avère particulièrement important, alors même que les objectifs du Grenelle ont été revus à la baisse et que, tous les jours, nous voyons et subissons les conséquences du dérèglement climatique. En effet, je suis convaincue que les problèmes environnementaux – la situation au Japon plaide également en ce sens –, comme les gaz à effet de serre, ou les menaces que subissent les mondes végétal ou animal appellent un débat national, puis international, pour que se construisent, en toute cohérence, des politiques volontaristes d'accompagnement.

C'est dans cette optique que les pays membres de l'Union européenne se sont engagés dans un processus de propositions concrètes en signant dès 2008 un « plan énergie climat ». Il fixe, à l'échéance de 2020, un triple objectif à la lutte contre le changement climatique, visant à réduire de 20 % des gaz à effet de serre, à obtenir un gain de 20 % d'efficience énergétique et à atteindre 20 % d'énergies renouvelables dans la consommation totale d'énergie finale. Mais ces propositions pour atteindre une nouvelle « sobriété énergétique » – qui doit procéder d'une nouvelle stratégie favorisant notamment le développement des énergies propres et renouvelables – ne font pas l'unanimité dans notre pays et nous avons appris avec stupéfaction que l'ancien ministre de l'écologie, pourtant censé promouvoir le Grenelle de l'environnement, a délivré en catimini des permis d'exploration de gaz de schiste.

Ce dossier, dans lequel on favorise l'exploitation d'une énergie fossile, revêt une importance majeure au point de vue environnemental et sanitaire. Aujourd'hui, grâce aux pressions exercées par les élus, vous avez promis un moratoire dans l'attente des résultats de la mission confiée aux conseils généraux de l'industrie et de l'environnement et chargée d'évaluer les enjeux, notamment environnementaux, des gaz de schiste. Mais il faut bien avoir à l'esprit que, dès lors que l'on délivre des permis d'exploration de gaz de schiste, on est prêt à délivrer des permis d'exploitation.

Rappelons quelques faits. On extrait du gaz de schiste selon un procédé particulièrement dégradant et traumatisant pour l'écosystème du puits d'exploitation. L'extraction par fracture hydraulique de la roche nuira gravement à nos ressources en eau : la fracturation exige chaque jour de 10 000 à 20 000 mètres cubes d'eau, soit l'équivalent de la consommation quotidienne d'une ville de 40 000 habitants.

En outre, si l'on ignore la composition de la moitié des 944 additifs chimiques ajoutés à l'eau, on sait que 52 % des 353 molécules qui ont été identifiées affectent le système nerveux, 40 % le système immunitaire et rénal, 46 % le système cardiovasculaire. Un quart d'entre elles sont cancérigènes et mutagènes, 37 % peuvent affecter le système endocrinien, plus du tiers sont volatiles. Naturellement, la plupart peuvent contaminer les eaux souterraines.

Il faut ajouter à cela que les débris de forages et des eaux usées et sursalées sont potentiellement radioactifs.

Par ailleurs, en crevant des poches naturelles de méthane, certains forages ont provoqué des explosions et des incendies : le 7 juin 2010, sept ouvriers présents sur un site de forage américain ont été brûlés et, quelques jours plus tôt, ce sont des boues de forage toxiques qui, à la suite d'une explosion, se sont écoulées durant seize heures dans une forêt voisine.

La réalité des forages de gaz de schiste est donc désormais connue aux États-Unis et elle est tellement contestée que l'État de New York a décidé un moratoire sur les permis d'exploitation. De même, le Parlement européen et le commissaire européen à l'énergie se sont prononcés en faveur d'un moratoire.

Je souhaite rappeler les engagements de la France en matière d'environnement avec, d'une part, le respect du principe de précaution désormais inscrit dans la Constitution et, d'autre part, le respect des engagements du Grenelle qui incite plutôt au développement des énergies nouvelles et renouvelables et non pas à celui d'une énergie fossile dont l'exploitation provoquerait des dégâts irréversibles. Nos concitoyens ont le droit d'être informés et vous avez le devoir de les rassurer.

Dans l'Aveyron, a été délivré un permis, dit « de Nant », qui concerne le sud du département. En outre, un permis, dit « de Cahors », a été déclaré « recevable en cours d'instruction » au 31 décembre 2010 selon le BMI par la Direction générale de l'énergie et du climat.

Même si, aujourd'hui, à la suite du drame japonais, on risque d'assister à un regain d'intérêt pour les énergies fossiles, jugées moins dangereuses, l'exploitation du gaz de schiste serait une catastrophe environnementale et sanitaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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