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Séance en hémicycle du 24 juin 2009 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • bande
  • délinquance
  • phénomène
  • scolaire
  • violence

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Le Président de la République a semblé nous dire à Versailles que la crise avait ébranlé ses dogmes et ses certitudes. Comment ne pas nous féliciter de l'abandon de chimères autour de la discrimination ou de la laïcité positives ? Comment, surtout, ne pas savourer la spectaculaire conversion à la défense du modèle social français, jusqu'ici paré de tous les archaïsmes, avec lequel le Président de la République avait décidé de rompre ?

La question qui vous est désormais posée est celle de la part de sincérité de ces déclarations. Si l'intention est de préserver le modèle social français, qui puise pour partie ses racines dans l'oeuvre du Front populaire et dans le programme du Conseil national de la Résistance, eh bien nous répondrons présents !

Mais, mes chers collègues, nous avons appris à nous méfier des mots. Jacques Chirac avait déjà cette spécialité : capter les mots pour mieux les vider de leur sens.

Oui, nous sommes favorables à une réforme pour garantir le financement des retraites, mais nous ne sommes pas favorables à la retraite à soixante-sept ans ! Oui, nous voulons développer les services publics, mais nous ne voulons pas la privatisation de la Poste, comme vous l'avez fait pour le gaz. Nous voulons préserver la sécurité sociale, mais nous ne voulons ni des franchises médicales ni du télétravail forcé pour les femmes enceintes et les malades !

Ce sont ces ambiguïtés, voire ces contradictions, entre les orientations de Versailles et la réalité d'une politique, que nous devons lever. Alors, pour toutes ces raisons, monsieur le Premier Ministre, puisque vous êtes reconduit à la tête d'un Gouvernement largement remanié, je vous demande, au nom du groupe socialiste, radical et citoyen, de venir devant l'Assemblée nationale, selon la tradition républicaine, présenter votre programme de gouvernement et d'accepter un débat, suivi d'un vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. — Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Permettez-moi d'abord, monsieur Ayrault, de vous féliciter pour votre réélection à la tête du groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Depuis deux ans – et depuis quelques mois dans un contexte international extrêmement difficile – le Gouvernement a conduit une soixantaine de réformes. Je voudrais d'abord rendre hommage à tous les ministres, qui ont cherché à faire de leur mieux dans le sens de l'intérêt général. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Nous avons, avec le Président de la République, procédé à certains changements de personnes. Ces changements de personnes, monsieur Ayrault, ne signifient pas un changement de politique. Il n'est d'ailleurs pas question de changer de politique au moment où nous connaissons une crise aussi grave !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Les priorités du Gouvernement sont connues.

C'est, d'abord, l'amplification de l'effort de relance, avec en particulier la définition de priorités stratégiques nationales pour lesquelles le Parlement sera largement sollicité dans les prochaines semaines.

C'est, ensuite, la mise en oeuvre intégrale des engagements du Grenelle de l'environnement, pour réorienter notre modèle économique vers une croissance verte.

C'est aussi le renforcement de notre contrat social, avec la réforme de la formation professionnelle et l'extension du contrat de transition professionnelle, afin de nous donner les moyens d'atteindre l'objectif que nous a fixé le Président de la République à Versailles : faire en sorte que toute personne qui perd son emploi puisse bénéficier d'un an de salaire et des formations qui lui permettront de retrouver un travail.

C'est encore la poursuite des réformes de structure, sans lesquelles notre pays ne pourra pas se moderniser. Je pense prioritairement à la réforme de l'organisation du territoire et de la fiscalité locale, dont vous allez avoir à débattre dans les prochaines semaines.

C'est enfin la continuation de la lutte contre les déficits structurels. Le budget pour 2010 qui vous sera proposé sera, pour la troisième fois, un budget où les dépenses seront strictement reconduites. Nous continuerons à réduire le nombre des emplois publics.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

La lutte contre les déficits est un objectif auquel je ne renoncerai jamais ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Monsieur Ayrault, vous pouvez choisir d'accompagner, de façon critique, cette politique. Vous pouvez choisir de vous y opposer. Vous pouvez même déposer une motion de censure – ce sera la troisième en deux ans, et ce sera d'ailleurs l'occasion d'éclairer les Français sur les propositions alternatives du parti socialiste, que pour le moment ils n'ont pas complètement discernées. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Mais je ne saurais mieux faire, pour répondre à votre question, monsieur Ayrault, que de reprendre exactement les mots qui étaient ici ceux de Lionel Jospin au mois de mars 2000, quand l'opposition d'alors lui posait une question identique à la vôtre.

Il répondait alors : « J'ai indiqué clairement […] que je n'ai pas fait un changement de gouvernement, mais un changement dans le Gouvernement pour continuer, approfondir la politique que j'ai présentée aux Français et que la majorité plurielle soutient […]. C'est dans ce cadre que nous agissons et que vous vous opposez. Quant à vos rêveries, gardez-les, mesdames, messieurs, pour vous. » C'est Lionel Jospin qui parle ; on ne peut pas dire mieux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Ma question, à laquelle j'associe mes collègues du Nouveau Centre, notamment M. Olivier Jardé, s'adresse à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État. Elle concerne l'annonce, faite par le Président de la République le 5 février dernier, de la suppression de la taxe professionnelle dès 2010.

Les députés du groupe Nouveau Centre partagent bien entendu la volonté du Président de la République de renforcer la compétitivité de nos entreprises, surtout en période de crise. Cependant, l'absence d'informations concrètes depuis cette annonce, notamment sur les compensations éventuelles du manque à gagner pour les collectivités territoriales, soulève beaucoup d'inquiétudes, d'interrogations et, par voie de conséquence, de rumeurs chez les élus locaux.

La taxe professionnelle représente une grande partie des ressources budgétaires locales, autour de 44% je crois. Certaines intercommunalités, comme celle que je préside, ont opté pour le régime de la taxe professionnelle unique, elles sont donc, de façon quasi intégrale, dépendantes de cette taxe.

Certaines d'entre-elles, qui se lancent actuellement dans de gros projets de créations de zones d'entreprises, n'ont comme perspectives de recettes, face aux lourdes dépenses d'aménagement, que la vente des parcelles et cette fameuse taxe professionnelle.

Il est donc urgent que des précisions soient apportées sur le calendrier de cette réforme – si toutefois elle est maintenue –, sur les concertations en cours avec les organisations d'élus et sur les solutions de compensation envisagées. Dans quelques semaines, de nombreux élus locaux vont commencer à esquisser leur budget pour 2010. Il est urgent de lever certaines inquiétudes sur le sujet.

Je remercie le Gouvernement de bien vouloir éclairer sur ce point la représentation nationale et, à travers elle, tous les élus locaux de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le député, vous l'avez rappelé, l'annonce de la suppression de la taxe professionnelle sur les investissements a été faite par le Président de la République le 5 février dernier. Cette décision est avant tout une affaire de compétitivité pour nos entreprises.

Sur tous les bancs de cette assemblée, mais également ailleurs, cette taxe professionnelle était critiquée. Je vous rappelle les propos de M. Mitterrand – je veux parler de François Mitterrand, l'ancien Président de la République, (Rires et exclamations.) –qui avait ainsi dénoncé la taxe professionnelle comme une « taxe imbécile ».

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Il faut redonner de la compétitivité à nos entreprises. Sinon, celles-ci iront ailleurs. Or cette taxe professionnelle, qui n'est pratiquée qu'en France, pèse sur cette compétitivité.

Se pose également – vous avez eu raison de le souligner – la question de la compensation, pour les finances locales, de cette perte de recettes. Je rappelle que les recettes générées par la taxe professionnelle sont de l'ordre de 28 milliards d'euros pour les collectivités locales.

L'annonce a été faite de la compensation, à l'euro près, de ces pertes de recettes liées à la suppression de la taxe professionnelle. Comment allons-nous procéder ?

D'abord dans la concertation la plus grande : Christine Lagarde, Éric Woerth et le ministre de l'intérieur ont entamé des concertations avec les organisations des collectivités territoriales et avec les représentants des entreprises. Je crois que cette méthode est la bonne. La concertation permettra d'aboutir à des propositions lors du prochain projet de loi de finances pour 2010. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-George Buffet

Monsieur le Premier ministre, vous avez reçu lundi la charge de travail pour votre nouveau gouvernement, à savoir redonner sa chance au modèle français.

Or le modèle français, monsieur le Premier ministre, c'étaient des services publics forts, de grandes entreprises nationales, émancipées des actionnaires et acteurs de grands acquis sociaux et démocratiques. Le modèle français, c'était une protection sociale universelle pour la santé, les retraites, la famille. Le modèle français, c'étaient de nouveaux droits syndicaux, des luttes sociales victorieuses pour les salaires, la formation, l'égalité professionnelle, une éducation porteuse de promotion sociale.

Ma question est simple, monsieur le Premier ministre : allez-vous inverser à 100% votre politique pour atteindre cet objectif ?

Vous étiez sur la mise en concurrence ; allez-vous exiger de l'Union européenne un moratoire immédiat sur les directives de privatisation ? Allez-vous préserver La Poste, EDF, GDF, du tout marchand ? Après avoir refusé toute relance par la consommation, allez-vous convoquer une grande négociation sur les salaires ? Allez-vous renoncer à la retraite à soixante-sept ans pour mieux réduire les pensions ? Allez-vous rémunérer justement le travail au lieu de soigner les dividendes ?

Au lieu de poursuivre la RGPP, allez-vous donner à l'éducation nationale et à toute la fonction publique les moyens de répondre aux besoins vitaux de nos concitoyens ? Face à l'intransigeance des actionnaires, allez-vous assurer des droits nouveaux aux salariés dans les entreprises ?

Monsieur le premier ministre, allez-vous procéder à ces ruptures ou allez-vous poursuivre vos réformes régressives et mettre ainsi à mal ce qui reste du modèle français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.

Debut de section - PermalienXavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité

Madame la députée, dire, comme l'a fait le Président de la République, que la crise financière nous imposait de réfléchir à une régulation de la mondialisation et des marchés, c'est défendre le modèle social français. Dire, comme l'a fait le Président de la République, qu'il fallait trouver un équilibre entre les revenus du travail et les revenus du capital, c'est défendre le modèle social français.

Debut de section - PermalienXavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité

Dire qu'il ne faut pas séparer la croissance du progrès des relations sociales, c'est également défendre le modèle social français.

Le véritable ennemi de ce modèle social, c'est l'indifférence ou l'aveuglement qui a pu être celui de bien des responsables pendant des décennies, alors que nous nous rendons compte aujourd'hui que des difficultés majeures se posent à nous.

Quand vous parlez du problème des retraites, madame Buffet, vous n'expliquez pas comment, avec un vieillissement de la population, avec une volonté de ne pas augmenter les cotisations et de ne pas toucher aux prestations, on peut faire autrement que de repousser l'âge de la retraite. (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienXavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité

Ce que nous voulons, c'est que chacun puisse vivre de son travail et être protégé dans son emploi. Ce que nous voulons, c'est que chacun soit autonome évidemment, mais qu'il existe une solidarité entre les générations. Ce que nous voulons, c'est que la générosité des prestations sociales ne nous affranchisse pas de notre responsabilité dans la gestion des comptes sociaux.

Debut de section - PermalienXavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité

Tout cela, madame Buffet, ne se fera pas en ouvrant sans fin le robinet de la dépense publique. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Cela se fera par un dialogue social nouveau, un dialogue auquel tout le monde est appelé, non par un dialogue qui anticipe les facteurs de blocage comme vous l'indiquez. Je le répète, le Président de la République et le Premier ministre vous offrent un dialogue à l'horizon 2010 pour penser, ensemble, un nouveau projet social français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Ciotti, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Madame la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, permettez-moi d'abord de vous adresser nos plus sincères félicitations pour votre nomination à ce ministère ô combien important pour les libertés publiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Au premier rang de ces libertés figure la sécurité. Hier soir, l'Assemblée nationale a commencé à examiner la proposition de loi déposée par Christian Estrosi, qui vise à lutter contre les bandes et à mieux protéger l'école de la République. L'actualité tragique – je pense aux événements de ce week-end au Blanc-Mesnil, avec la mort du jeune Mehdi, ou à ceux plus anciens de Gagny – nous rappellent qu'il est urgent de légiférer. Ils nous invitent aussi à nous mobiliser unanimement pour voter ce texte, comme certains membres de l'opposition ont déjà appelé à le faire.

Oui, il est urgent que notre pays se dote d'une législation pour éradiquer les bandes et éviter de connaître une évolution comparable à celle des États-Unis ou du Canada. Ce texte nous offrira des armes juridiques extrêmement pertinentes, en sanctionnant de trois ans de prison les regroupements de bandes violentes.

Madame la ministre d'État, personne ne peut et ne doit s'approprier un territoire de la République. Quelle politique pénale comptez-vous engager pour combattre ces phénomènes extrêmement préoccupants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur le député, nul ne peut contester la réalité du phénomène des bandes, qui, sans être nouveau, se radicalise. Nous devons adapter nos moyens et nos textes pour être en mesure de mieux protéger nos concitoyens.

La proposition de loi déposée en son temps par Christian Estrosi, dont vous êtes le remarquable rapporteur, tend justement à nous donner les moyens d'agir avant qu'il ne soit trop tard, c'est-à-dire avant que les bandes n'agressent, ne blessent, voire ne tuent quelqu'un. Elle nous permettra d'agir préventivement et d'éviter que certains ne se réfugient dans l'anonymat du groupe pour fuir leurs responsabilités.

Pour autant, il n'est pas question d'instaurer une responsabilité collective. C'est bien la responsabilité individuelle qui est en cause, dès lors que quelqu'un participe à une bande qui va commettre des actes de violence.

Soyez assuré qu'en tant que garde des sceaux, je veillerai avec attention et détermination à la fermeté de l'action publique pour la protection de nos concitoyens. Je m'en entretiendrai d'ailleurs très prochainement avec les procureurs généraux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Vous me permettrez, monsieur le président, de répondre tout d'abord au Premier ministre qui, pour justifier son refus d'engager la responsabilité du Gouvernement devant l'Assemblée nationale, a cité Lionel Jospin. Mais comparaison n'est pas raison puisque Lionel Jospin, lui, était Premier ministre. Il respectait la Constitution. En vertu des articles 20 et 21, il déterminait et conduisait la politique de la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Cette fonction de Premier ministre, le Président de la République l'a enterrée lundi dernier. (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Monsieur le ministre des affaires étrangères et européennes, ma question porte sur la dégradation de la situation en Iran. Vous le savez, la répression contre ceux qui protestent contre les résultats des élections s'accroît chaque jour un peu plus. Nous avons tous été émus par la bravoure des manifestants, en particulier par le courage de ces femmes défendant au péril de leur vie leur vision de la liberté et de la démocratie. Nous sommes tous choqués par la violence inouïe dont font preuve les milices qui répriment les opposants à coups de barres de fer.

Sans que les chiffres ne soient connus, il est probable que le nombre des morts se multiplie. L'intransigeance du régime est telle que les pires hypothèses ne sont malheureusement plus à exclure.

La France, tout en respectant scrupuleusement la souveraineté de la grande nation iranienne, a exprimé sa volonté qu'une enquête impartiale soit menée sur les allégations d'irrégularité du scrutin. Elle a aussi condamné fermement toutes les atteintes aux droits individuels.

Hier, Shirin Ebadi, prix Nobel de la Paix, a appelé les pays de l'Union à rompre toute relation diplomatique avec le régime et à conditionner leur reprise à l'arrêt des violences. Cette option radicale est-elle envisagée ? Si tel n'est pas le cas, comment le Gouvernement compte-t-il démontrer notre attachement au respect des libertés publiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.

Debut de section - PermalienBernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes

Monsieur le député, la France a condamné on ne peut plus fermement les brutalités inacceptables que vous avez rappelées. Elle l'a fait dès le premier jour, quand nous avons appris ce qui se passait à Téhéran. Nous répéterons ces condamnations.

Vous m'avez posé deux questions précises.

Comment faire cesser ces violences ? Nous ne pouvons pas exercer seuls de pression opérationnelle , mais nous disposons déjà d'une déclaration et du soutien de tous les pays européens. Le Président des États-Unis a nettement changé de ton. Enfin, un texte se prépare au G8, même si tous ses membres ne sont pas d'accord entre eux, puisque certains pays n'approuvent pas la position de la France.

Allons-nous rompre les relations diplomatiques ? Non, au contraire : nous allons nous servir des liens qui existent encore, si ténus soient-ils, entre nos pays, pour faire pression en faveur de la liberté de manifestation et de parole, pour que les Iraniens puissent respirer un peu plus facilement.

Mais si les expulsions se poursuivent, et si nous devons manifester notre solidarité aux côtés de nos amis britanniques ou des autres Européens, nous le ferons, comme ce fut le cas en 1997. Peut-on faire plus en respectant, bien entendu, le souvenir d'Enda, cette femme que le monde entier a vu mourir, assassinée en pleine manifestation, alors qu'elle était jeune, belle et déterminée ? (Murmures sur les bancs du groupe SRC.) Nous devons insister pour que soit maintenu ce mouvement qui a prouvé qu'il représentait en profondeur la société iranienne.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Breton, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Breton

Madame la garde des sceaux, la bioéthique fait aujourd'hui l'objet d'un débat passionnant dans notre pays.

On sait qu'elle cherche à répondre aux questions soulevées par le progrès scientifique et technique, au regard des valeurs de notre société. Elle cherche aussi à garantir le respect de la dignité humaine et la protection des plus vulnérables contre toute forme d'exploitation. C'est ainsi que au-delà des débats sur les mères porteuses ou sur les bébés médicaments, se posent des questions essentielles pour notre société : quel modèle de parenté et de filiation voulons-nous développer ? Certaines pratiques de dépistage ne portent-elles pas en elles-mêmes des risques de dérives eugénistes ? Comment la médecine prédictive s'intégrera-t-elle dans notre système de santé et dans notre modèle social ?

En France – c'est une spécificité de notre pays –, toutes ces réflexions et toutes ces activités sont encadrées par une loi : la loi de bioéthique. Afin de tenir compte des avancées de la science et de leurs enjeux pour la société, ce texte fait régulièrement l'objet d'une révision. Une première a eu lieu en 2004, et une nouvelle révision est prévue dans les prochains mois. La préparation de cette révision est aujourd'hui assurée par une mission parlementaire présidée par notre collègue, Alain Clayes, dont le rapporteur est Jean Leonetti.

Par ailleurs, afin d'associer le plus grand nombre de Français à ce débat, le Gouvernement a souhaité organiser des états généraux de la bioéthique. Un site internet a été ainsi mis à la disposition du grand public et des contributions ont pu y être déposées par tous ceux qui le souhaitaient.

Dans le même temps, se sont tenus trois forums régionaux avec, il faut le souligner, la participation de citoyens qui avait bénéficié d'une formation adaptée.

Enfin, un colloque national s'est déroulé hier matin au cours duquel la synthèse des travaux de ces états généraux a été effectuée.

Madame la garde des sceaux, pouvez-vous nous indiquer les enseignements que vous avez tirés de ces états généraux ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur Breton, les états généraux de la bioéthique, souhaités par le Président de la République, ont permis aux Français de s'exprimer largement sur ces questions extrêmement sensibles qui engagent notre avenir commun.

Le comité de pilotage, dont le rapporteur est Jean Leonetti, en liaison avec le ministère de la santé et l'agence de biomédecine, a permis, au cours des six derniers mois, que se déroulent de nombreux entretiens et qu'émergent de nombreuses prises de position. Vous avez parlé des forums régionaux, des réunions, des consultations sur internet : tout cela nous permet de connaître l'avis de nos concitoyens sur les cinq grands thèmes que constituent les cellules souches embryonnaires, le diagnostic prénatal ou préimplantatoire, l'assistance médicale à la procréation, les greffes d'organes, et les tests génétiques.

D'ores et déjà, le rapporteur des états généraux a tracé les grandes lignes convergentes de l'ensemble de ces avis. Tous ces éléments seront intégrés dans le rapport qui sera remis au Président de la République avant la fin du mois. Bien entendu, dans le cadre du texte qui devrait être examiné par l'Assemblée nationale au début de l'année 2010, ces avis viendront s'ajouter aux résultats de mission parlementaire de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Daniel Paul, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le président, je veux tout d'abord regretter l'absence de réponse de la part de M. Darcos à la question relative aux services publics posée par Marie-George Buffet.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le ministre chargé de l'industrie, au nom des dogmes libéraux, vous allez faire de La Poste une société anonyme et ouvrir son capital.

Votre but, c'est sa privatisation, mais l'opération est politiquement sensible tant les Français sont attachés à leur Poste ; alors, vous annoncez que seuls des opérateurs financiers publics entreront, aux côtés de l'État, dans le capital de la nouvelle SA La Poste, qui recevra 2,7 milliards d'euros pour sa modernisation !

Toutefois, votre objectif demeure et, par cette porte ouverte, des capitaux privés entreront à leur tour au capital, afin que la part de l'État baisse, prélude à une privatisation, comme celles de France Télécom et de GDF.

Cette opération va accélérer la mutation des bureaux de poste en « points de contact », avec des services réduits à la population, tels les « lundis bleus » dans certains départements, et une dégradation de la présence postale territoriale, en milieu rural et en zones urbaines. À terme, cela signifie la désagrégation de l'opérateur public.

Quant aux postiers, loin de croire vos bonnes paroles, ils savent que ce sont leurs conditions de travail et leurs métiers qui seront affectés.

Pourtant, rien ne vous oblige à opérer de la sorte ; le statut de l'entreprise publique actuelle n'est en aucun cas un obstacle à la modernisation de cette dernière, à une bonne couverture territoriale, à des réponses pertinentes aux besoins des entreprises et de la population.

Pour signifier votre intention d'aller vite en besogne, vous annoncez que votre projet passera en urgence au Parlement, avant la fin de l'année.

Monsieur le ministre, maintiendrez-vous ce funeste projet ? Accepterez-vous, comme le demandent des milliers d'élus locaux de toutes tendances, d'engager un large débat public ? Ils vous demandent même de soumettre votre texte à un référendum : le ferez-vous ? Allez-vous mettre un terme à la suppression de bureaux de poste de plein exercice ?...

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Paul, votre temps de parole est écoulé.

La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Monsieur Daniel Paul, je veux vous rassurer : il n'y a pas de danger concernant l'avenir de La Poste ou ses compétences en matière de mission de service public. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Le Président de la République s'est engagé au mois de décembre dernier :…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Estrosi

…La Poste restera détenue à 100 % par des acteurs publics. L'article 1er du projet de loi sur lequel avait commencé à travailler mon collègue Luc Chatel pose ce principe, et toutes les garanties sont apportées sur ce point.

Pour chacune et chacun d'entre nous, La Poste est l'incarnation d'un des services de proximité les plus importants aux yeux de nos concitoyens. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Estrosi

La Poste est d'abord le deuxième service public le plus apprécié des Français ; elle est ensuite le premier employeur avec 300 000 collaborateurs. Finalement, La Poste, c'est 17 000 points publics fréquentés tous les jours par près de deux millions de nos concitoyens.

Quel est l'enjeu ? En 1997 a eu lieu l'ouverture du marché européen du courrier. Qui étaient aux affaires en 1997 ? En tout cas, monsieur Paul, ce n'était pas nous ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Aujourd'hui, nous sommes contraints d'appliquer avant janvier 2011 la décision prise à cette date.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Estrosi

Pour cette raison, mais aussi pour faire face aux nouvelles concurrences, comme celle d'internet et des nouveaux métiers des relais de croissance, nous avons besoin de faire de nouveaux investissements.

Monsieur Paul, vous étiez vous-même membre de la commission Ailleret qui associait tous les syndicats, tous les partenaires publics, et vous avez proposé que l'État et la Caisse des dépôts s'engagent à investir 2,7 milliards d'euros : nous avons pris cet engagement. C'est comme cela que nous garantirons la pérennité de La Poste. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Gaël Yanno, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaël Yanno

Monsieur le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, au début de cette année, vous avez pris l'initiative de lancer, après le Grenelle de l'environnement, le Grenelle de la mer. Quatre groupes de travail réunissant experts, élus, représentants des syndicats, du patronat, de l'État, des associations et des ONG de protection de l'environnement ont ainsi élaboré des propositions afin de traiter les grands enjeux liés à la mer, à la préservation et à l'exploitation durable de ses ressources.

Couvrant 70 % de notre planète, les mers et les océans peuvent fournir des ressources essentielles et représentent un potentiel unique en matière d'énergie et de biodiversité. Toutefois, ces richesses sont extrêmement fragiles et soumises à de fortes pressions résultant de l'activité humaine. Or, la mer peut nous apporter des solutions durables pour notre avenir, en nous permettant de répondre aux défis alimentaire et énergétique, aux besoins de transport et aux équilibres climatiques et géopolitiques de la planète.

Dans ce domaine, la France occupe une place toute particulière. Elle se distingue, en effet, des vingt-six autres pays européens grâce à ses outre-mer. Elle est ainsi la seule puissance européenne présente sur les trois grands océans – Atlantique, Pacifique et Indien – et elle abrite 10 % des écosystèmes récifo-lagunaires de la planète. Avec plus de 11 millions de km2, elle représente la seconde zone économique exclusive du monde. Notre espace maritime occupe également la deuxième place, derrière les États-Unis, mais il serait classé au quarante-cinquième rang mondial s'il se limitait aux seules frontières de la France métropolitaine.

Monsieur le ministre d'État, pouvez-vous nous indiquer les suites que vous entendez donner, en métropole et dans les outre-mer, aux premières conclusions du Grenelle de la mer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Monsieur le député, je vous remercie du soutien permanent que vous apportez au Grenelle de la mer et des océans, soutien auquel le territoire dont vous êtes l'élu n'est évidemment pas étranger. Le Président de la République et le Premier ministre ont voulu ce Grenelle, non seulement parce que les mers et les océans recèlent les principales richesses de la planète, mais aussi parce qu'ils représentent des énergies considérables en très grande fragilité.

À l'instar de ce que nous avons fait lors du Grenelle de l'environnement, nous avons voulu réunir toutes les forces vives de ce secteur. Les groupes de travail se sont donc réunis et ils ont formulé plus de 600 propositions. À cet égard, je tiens à remercier Jérôme Bignon (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC), qui a conduit une délégation aux Antilles, ainsi que Christian Buchet, qui s'est rendu dans l'Océan indien.

Aujourd'hui, ces propositions font l'objet de débats régionaux, en métropole et dans les outre-mer français qui représentent 80 % de nos capacités dans ce domaine. Une fois que la synthèse en sera réalisée, un débat aura lieu ; celui-ci a, du reste, déjà commencé sur Internet, puisque 20 000 contributions ont été publiées. Une proposition de négociation finale aura lieu entre le 5 et le 7 juillet, qui fera évidemment l'objet d'un arbitrage du Premier ministre et du Président de la République.

Monsieur le député, nous sommes convaincus qu'outre la biodiversité, les principales richesses, qu'elles soient nutritionnelles, moléculaires ou énergétiques, se trouvent dans les mers et les océans. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Pierre Kucheida, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Kucheida

Le Premier ministre refuse de présenter son programme de gouvernement. Faut-il en conclure que le changement annoncé n'a aucune traduction concrète pour les Français ou que la fonction de Premier ministre a disparu ? C'est la question que nous nous posons. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

« Le gaspillage des intelligences et des talents, c'est le pire gaspillage pour un pays », a affirmé le Président de la République, lundi, à Versailles. Nous sommes tous d'accord avec lui sur ce point, mais quelles sont les réalités ? Dans la seule académie de Lille, depuis 2002, 800 suppressions de postes par an sont intervenues, alors que le besoin d'encadrement y est plus nécessaire qu'ailleurs, car un fils d'ouvrier est davantage pénalisé qu'un fils de cadre.

Cerise sur le gâteau, M. Darcos a annoncé, avant son départ, la surpression de 16 000 postes, surtout de stagiaires en formation ! (« C'est honteux ! » sur les bancs du groupe SRC.)

S'exprimant, la semaine dernière, sur son rapport public intitulé Les communes et l'école de la République, Philippe Séguin, Président de la Cour des comptes, a clairement mis en exergue que le désengagement de l'État en matière scolaire créait des déséquilibres majeurs et générait une obligation morale pour les communes de compenser ces défaillances de la nation.

L'organisation des heures de soutien, l'accompagnement des élèves en difficulté, l'extension des horaires d'accueil, le financement des manuels scolaires, de l'informatique, des activités sportives, culturelles et de loisir sont des domaines où les communes sont contraintes de se substituer à l'État. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. - Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Que peuvent faire les communes les plus déshéritées, celles des veilles régions industrielles et des banlieues ? Cette politique condamne donc les plus modestes qui ont, eux aussi, talents et intelligence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Kucheida

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, allez-vous enfin changer de politique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le député, vous venez d'exposer une vision caricaturale de la situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.- Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Depuis deux ans, le gouvernement de François Fillon a réformé en profondeur le système éducatif en suivant, sous la houlette de Xavier Darcos, une ligne conductrice qui pourrait se résumer ainsi : plus de justice, plus d'efficacité et de meilleures conditions de travail pour les enseignants. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Plus de justice, grâce à la mise en oeuvre de dispositifs individualisés, avec notamment des stages organisés pendant les vacances scolaires et des cours de soutien dans les établissements les plus difficiles.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Plus de justice également, grâce à la rénovation de la filière professionnelle, dont on sait qu'elle conduit, aujourd'hui encore, trop souvent à l'échec les jeunes qui la choisissent.

Plus de justice, en facilitant l'accès des élèves handicapés au système scolaire traditionnel, grâce à la création de 10 000 places supplémentaires par an, qui permettront de mieux les insérer par l'école.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Quant à l'efficacité, elle est au coeur de la réforme du primaire qui a conduit à mettre en place de nouveaux horaires, de nouveaux programmes et une aide personnalisée pour les élèves. Cette efficacité se traduit également par la reconquête du mois de juin, que Xavier Darcos a voulue.

Enfin, nous avons amélioré les conditions de travail des enseignants, grâce aux heures supplémentaires.

Monsieur le député, vous demandez un changement de politique, mais le Premier ministre s'est exprimé clairement sur ce sujet tout à l'heure. Vous avez, du reste, entendu le Président de la République rappeler, lundi, que le principe du non-renouvellement d'un départ à la retraite sur deux permettrait de dégager des moyens pour les filières d'avenir, dont fait partie l'éducation nationale.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Je suis fier d'être le ministre de l'éducation nationale d'un gouvernement qui, parce qu'il croit en l'avenir de ses enfants, mise sur l'éducation nationale, ainsi que le Président de la République l'a rappelé à Versailles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Lionel Tardy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Monsieur le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, dans son discours de lundi devant le Parlement réuni en congrès, le Président de la République nous a fixé comme priorité d'identifier les dispositifs inutiles et les organismes qui ne servent à rien. Plus globalement, il nous a demandé de nous mobiliser pour une meilleure efficacité de la dépense publique.

Depuis deux ans, je fais la chasse aux comités consultatifs qui ne servent à rien, mais coûtent de l'argent et ralentissent les décisions. Au début du mois, une série de décrets en a supprimé un grand nombre, mais il en reste encore beaucoup trop. Je suis également de près le chantier ouvert par le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, sur la question de la qualité de la loi. Je sais, monsieur le ministre, pouvoir compter sur votre entier soutien concernant ces initiatives.

Dans le cadre des états généraux de la dépense publique, lancés par le groupe UMP sous l'impulsion de Jean-François Copé, nous avons organisé des réunions de terrain qui nous ont amenés à formuler des propositions en phase avec ce que les Français souhaitent et ce qu'ils sont prêts à accepter. Nous seuls, parlementaires, pouvons prendre ce type d'initiatives et faire remonter les informations. Nous devons le faire plus souvent, comme l'a parfaitement compris le président de la République

De votre côté, dès votre entrée en fonction, vous avez pris ce sujet à bras-le-corps. Je souhaite saluer l'effort considérable que représente la révision générale des politiques publiques, lancée en 2007, qui commence à porter ses premiers fruits. Néanmoins, là encore, il reste beaucoup à faire et l'expérience de terrain des parlementaires compléterait avantageusement le travail des experts.

Monsieur le ministre, comment comptez-vous procéder, notamment dans le cadre de la préparation du budget, pour que nous puissions mieux travailler ensemble, parlementaires et Gouvernement, sur ce vaste chantier de la suppression des dépenses inutiles ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Monsieur le député, il y a trop de dépenses publiques en France ; je pense que nous sommes pratiquement tous d'accord sur ce point. Notre niveau de dépense publique est plus élevé que celui de la plupart des grands pays industrialisés, seule la Suède se trouvant à peu près au même niveau que nous. Nous devons donc progresser pour essayer de faire en sorte que la qualité du service public soit rendue à un juste coût, ce qui n'est évidemment pas le cas aujourd'hui.

J'ai expliqué à plusieurs reprises, lors de débats sur ce thème, que les dépenses publiques sont de plusieurs natures. À côté des dépenses courantes – celles de fonctionnement –, on trouve les dépenses d'avenir – celles d'investissement – mais aussi, depuis un certain temps, les dépenses liées à la crise. Chaque catégorie de dépenses publiques obéit à sa propre logique et concourt, d'une façon qui est propre, à nos déficits.

Comme vous l'avez rappelé, nous avons entrepris de contrôler et de mieux maîtriser les dépenses courantes, notamment au moyen de la révision générale des politiques publiques. Nous allons continuer et amplifier cette révision générale des politiques publiques, qui a déjà permis d'obtenir environ 7 milliards d'euros d'économies.

Le Président de la République, lorsqu'il est intervenu devant les parlementaires en congrès à Versailles, nous a demandé d'aller beaucoup plus loin et beaucoup plus vite, en privilégiant les dépenses d'investissement. C'est ce que va faire le gouvernement de François Fillon. Ainsi, dans les semaines qui viennent, je vous proposerai une nouvelle liste d'organismes inutiles à supprimer et de nouvelles méthodes d'évaluation des dépenses publiques. Je m'appuierai sur les propositions des parlementaires, notamment de l'UMP, à commencer par ceux ayant participé aux états généraux de la dépense publique. (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Robin-Rodrigo

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

La loi prévoit que les tarifs réglementés du gaz naturel évoluent à la hausse comme à la baisse chaque trimestre, en fonction du prix du pétrole, du cours du dollar, ainsi que des coûts d'acheminement, de stockage et de commercialisation. Compte tenu de ces éléments, le prix du gaz devrait baisser au 1er juillet. Or il semble que cela ne soit pas dans les intentions du Gouvernement. Déjà, en avril, vous aviez attendu la fin de l'hiver pour baisser de 11,3 % les tarifs réglementés, alors que vous n'aviez pas hésité à les augmenter de 15,2 % dès juillet 2008.

Dans le même temps, le groupe énergétique a enregistré en 2008 un bénéfice net de 6,5 milliards d'euros et a servi à son président directeur général une rémunération de 3,2 millions d'euros – en augmentation de 15 % – et à son vice-président, M. Cirelli, une augmentation de 180 %, faisant passer sa rémunération de 460 000 euros à 1,3 million d'euros.

Madame la ministre, au moment où le Gouvernement refuse, pour la troisième année consécutive, de donner un coup de pouce au SMIC, se contentant de la hausse mécanique de 1,25 %, soit 13,47 euros par mois,…

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

C'est facile de demander un coup de pouce, quand ce n'est pas vous qui payez !

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Robin-Rodrigo

…au moment où le chômage ne cesse d'augmenter, au moment où l'on compte de plus en plus de familles surendettées, et alors que le Président de la République a déclaré, lors du congrès de Versailles, que « pour atteindre l'égalité, il faut savoir donner plus à ceux qui ont moins », allez-vous donner un peu plus de pouvoir d'achat à nos concitoyens en répercutant, conformément à vos engagements, la baisse du prix du pétrole dès juillet sur la facture de gaz des Français ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Madame la députée, vous n'ignorez pas que le système français de régulation a permis de ne pas répercuter sur le consommateur l'explosion des prix du pétrole qui s'est produite il y a douze et seize mois. Vous n'ignorez pas non plus que les prix du gaz ont baissé en avril de 11,3 %, malgré un doublement du prix du pétrole lors des six derniers mois. Ce système doit donc être maintenu.

Par ailleurs, vous savez que nous avons mis en place en France un prix social du gaz – ce que vous n'aviez pas fait – et qu'il n'est pas prévu de modification ou de majoration des prix du gaz. Enfin, vous savez qu'alors qu'il s'agit d'un produit presque intégralement importé, le prix du gaz en France est inférieur de 10 % à celui des pays voisins. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Rémi Delatte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Delatte

Ma question s'adresse à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Les soldes d'été, particulièrement attendues en cette période de crise, ont débuté ce matin. La réforme des soldes, votée dans le cadre de la loi de modernisation de l'économie en 2008, fixe de nouveaux objectifs : simplifier le système dans un contexte de concurrence loyale entre les commerçants, faire bénéficier le consommateur de soldes et de promotions plus nombreuses tout au long de l'année, enfin, permettre aux commerçants de mettre en place, sans risque juridique, des opérations qui dynamisent leurs ventes et écoulent leurs stocks.

Alors que les soldes dureront jusqu'au 28 juillet, les commerçants affichent dès le premier jour des réductions allant de 30 à 50 %, certains sites Internet vont même bien au-delà.

Eu égard à cette conjoncture difficile pour le commerce en général, les soldes arrivent donc au bon moment. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous préciser en quoi la nouvelle réglementation sur l'organisation des soldes contribue à améliorer à la fois le pouvoir d'achat des Français et la situation de nos commerçants ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le député, cette question sur l'organisation des soldes dans notre pays est très importante. Ce matin, je me suis rendu avec Christine Lagarde dans un grand magasin, à l'ouverture des soldes d'été. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

J'ai pu constater combien les prix étaient à la baisse : 50 % en moyenne. D'après les indications dont nous disposons, ces soldes d'été devraient connaître un grand succès. Pourquoi ? D'abord parce que les Français apprécient ce coup de pouce au pouvoir d'achat. Ils sont près de 53 % à considérer que les soldes sont une bonne mesure.

Comme vous l'avez rappelé, la loi de modernisation de l'économie a permis un assouplissement en la matière. Il y a à présent deux périodes principales, les soldes d'été et les soldes d'hiver, plus une période de deux semaines laissée à l'appréciation des commerçants, qui peuvent ainsi librement choisir le moment de ces soldes additionnels.

Tout cela permet de donner un coup de pouce au pouvoir d'achat des Français. C'est bienvenu en ces temps de crise.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Vous le savez, la consommation se tient encore bien. Les prévisions de l'INSEE enregistrent une croissance de 0,3 % au cours du deuxième trimestre. Avec le dispositif mis en place, nous améliorons encore le pouvoir d'achat. Nous oeuvrons en faveur à la fois des consommateurs et des commerçants. C'est tout le sens qui est donné à cette mesure d'assouplissement des soldes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Le secteur des télécommunications doit faire face à des enjeux considérables en termes d'innovation et d'investissements. Des restructurations s'opèrent chez les équipementiers. Ainsi, le groupe Alcatel-Lucent, 6 500 salariés en France, vient d'annoncer qu'il allait externaliser une partie de ses activités : la maintenance des réseaux et l'informatique.

Certaines filiales du groupe, comme RFS, ainsi que les sous-traitants font face à des baisses de plan de charges. Les salariés sont inquiets, notamment à Lannion, dans ma circonscription, et à Strasbourg-Illkirch chez mon collègue Armand Jung.

Face à cette situation, nous attendons de votre part une politique volontariste pour soutenir l'emploi et accélérer l'investissement dans cette filière :

D'abord, le développement du très haut débit pour tous, enjeu industriel considérable. Il figure au plan numérique 2012, tombé, semble t-il, aux oubliettes, et dans votre plan de relance. Pourtant, il tarde à être mis en oeuvre alors même que les citoyens et les acteurs économiques attendent. Où en êtes-vous ?

Ensuite, l'Internet du futur – nouveaux réseaux, usages et services – est un véritable défi que nous devons relever, à condition de garder en France un potentiel de recherche et de compétences, des opérateurs, équipementiers et PME innovantes dotés d'une capacité d'investissement forte comme aux États-Unis, en Chine ou en Inde.

L'économie numérique est un formidable levier de croissance, mais les évolutions technologiques sont rapides et leurs répercussions souvent violentes pour les salariés.

Votre responsabilité est de les anticiper et de les corriger. Cela requiert une stratégie industrielle pour sauvegarder l'emploi et développer de nouvelles compétences. Quelle est votre stratégie ? Quelles sont vos propositions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Madame la députée, oui, Alcatel-Lucent traverse, comme beaucoup d'entreprises en cette période de crise internationale sans précédent, des difficultés qui ne sont pas négligeables. Face à ce contexte économique, difficile et contraint, Alcatel-Lucent cherche, et c'est normal, à réduire ses coûts, à optimiser son activité et son marché en se rapprochant notamment, s'agissant du transfert de ses activités de services informatiques, de Hewlett-Packard.

Bien évidemment, je comprends l'inquiétude de ses salariés. Face à cette décision qui peut être comprise comme une poursuite des restructurations du groupe, il nous faut être particulièrement vigilants. Nous veillerons aux conséquences de cette alliance, notamment en termes d'emplois.

Je vois cependant dans cet accord comme un renforcement de la position d'Alcatel qui prend acte de la convergence des protocoles téléphoniques et Internet, qui décide de s'allier à un leader mondial au savoir-faire complémentaire et qui pourra ainsi fortement augmenter sa performance économique.

Pour autant, on peut s'interroger, et c'était l'une de vos questions : n'y a-t-il pas des risques de délocalisations ? Le sujet est grave ; aussi je demande solennellement qu'aucun amalgame ne soit fait entre une décision visant à améliorer la compétence de l'entreprise par une alliance stratégique et la perte de compétence en recherche et développement. Je vais demander à Alcatel-Lucent, dont je rencontrerai des représentants, de me faire part de son interprétation. Nous devons être mobilisés ensemble à 100 %.

Par ailleurs, j'exigerai que nous puissions conforter chez Alcatel-Lucent ces activités de recherche et de développement. Nous le ferons en matière d'économie numérique avec Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Franck Gilard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Gilard

Monsieur le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, la crise économique a un fort impact sur les comptes de la sécurité sociale – c'est une évidence. Sur les 20 milliards d'euros de déficit du régime général en 2009, la moitié – soit 10 milliards – correspond à un déficit conjoncturel, lié à la chute brutale des recettes.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Gilard

Le déficit structurel, d'environ 10 milliards, s'est stabilisé entre 2008 et 2009 : même en période de crise, le Gouvernement maintient le cap de la maîtrise de la dépense.

Monsieur le ministre, vous avez affiché votre volonté de maintenir l'effort sur ces déficits structurels, notamment en renforçant la politique de contrôle. On constate en effet, sur notre territoire, de fortes disparités dans le nombre d'arrêts de travail, lesquelles ne sont pas liées à l'état de santé de nos concitoyens. Selon un bilan des contrôles réalisés par l'assurance maladie en 2008, 11 % des arrêts de plus de quarante-cinq jours sont « inadaptés ou injustifiés ». Pour les arrêts courts, ce taux serait de 13 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Extraordinaire ! C'est toujours la faute des salariés !

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Gilard

Pouvez-vous précisez à la représentation nationale vos intentions en la matière et les dispositions que vous entendez prendre pour mettre fin à cette situation ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Monsieur le député, j'ai en effet l'intention de renforcer le nombre de contrôles concernant les arrêts maladie, car les abus sont aujourd'hui trop nombreux – ce n'est pas moi qui le dis, mais la Caisse nationale d'assurance maladie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Desallangre

Et ceux qui ne se mettent pas en arrêt maladie parce qu'ils ne peuvent pas ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Le volume d'indemnités journalières versées dans le cadre des arrêts maladie s'est accru de 7 % depuis l'année dernière, ce qui est beaucoup trop. Un frein avait été posé à cette dérive il y a quelques années ; nous devons de nouveau nous mobiliser sur ce sujet et lutter contre ceux qui abusent de la sécurité sociale, afin de protéger ceux qui n'en abusent pas. Personne ne peut prétendre qu'il n'y a pas d'abus dans le domaine des arrêts maladie. Ils existent et nous sommes là pour les combattre, au nom de la solidarité et de la justice sociale. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Combien manquera-t-il en recettes à cause du chômage ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Nous allons, avec Roselyne Bachelot, envoyer un millier de lettres d'avertissement aux plus gros prescripteurs d'arrêts maladie, ceux prescrivant au-delà de la moyenne nationale ; nous allons également généraliser la contre-visite de l'employeur, déjà expérimentée dans une dizaine de départements : des médecins pourront aller contrôler la réalité des arrêts maladie et demander, le cas échéant, à la sécurité sociale de suspendre le versement des indemnités journalières. Nous allons enfin adapter aux fonctionnaires les règles applicables aux salariés du secteur privé. Cela fait l'objet de discussions que j'ai en ce moment avec les partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Notre objectif est de mettre fin aux abus et de créer un système plus juste, en limitant les dépenses de l'assurance maladie pour mieux soigner. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Patrick Roy, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Huées sur les bancs du groupe UMP.)

Mes chers collègues, voilà plusieurs séances que M. Roy fait de remarquables efforts. Je vous demande donc de bien vouloir écouter sa question. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Merci, monsieur le président.

Ma question s'adresse à Mme Alliot-Marie, toute nouvelle garde des sceaux.

Samedi dernier, à Dunkerque, et venant de toute la France, les veuves de l'amiante ont une nouvelle fois, comme depuis tant d'années, crié leur colère. Elles ont réclamé justice ! (De très nombreux députés du groupe UMP se lèvent et quittent l'hémicycle. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Comment accepter en effet que ce drame, qui ne semble pas beaucoup intéresser les députés de l'UMP mais fait dix morts chaque jour en France, puisse rester impuni ? Un drame qui n'est pas un accident. En conscience en effet, en cachant la vérité aux travailleurs, des industriels sans scrupules ont fait respirer de l'amiante, poison mortel, aux futures victimes. Le crime doit être jugé !

Depuis des années – cela est encore plus vrai depuis un an –, le Gouvernement nous ment et met tout en oeuvre pour que le procès pénal de l'amiante ne puisse jamais voir le jour. Le pôle judiciaire s'enlise par manque de moyens, moyens promis ici même l'an dernier par la ministre qui vous a précédée mais qui jamais, jamais ne sont venus. La juge est aujourd'hui désespérée.

Madame la ministre d'État, avec mes collègues Michel Delebarre et Christian Hutin, présents avec moi samedi à Dunkerque, aux côtés des victimes de l'amiante, nous nous tournons vers vous : voulez-vous vraiment un procès pénal de l'amiante ? Si oui, allez-vous doter le pôle judiciaire des moyens indispensables pour aller au bout de l'enquête ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur Roy, je l'ai prouvé dans mes précédentes fonctions, je suis particulièrement attachée au droit des victimes, à leur droit à l'écoute, à la vérité et à une juste indemnisation.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je sais le drame que représente l'amiante. Soyez donc assuré que je suivrai personnellement et de très près ce dossier. Je suis d'ailleurs prête à vous rencontrer, monsieur Roy, puisque vous présidez le groupe d'étude sur l'amiante. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP, SRC et NC.)

Il s'agit d'un problème extrêmement complexe, qui exige des études techniques, longues à réaliser. Depuis le début de l'année, nous avons donc renforcé les moyens alloués à ce dossier. Désormais, au sein de la cellule amiante de l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, onze enquêteurs assurent à temps plein la gestion des commissions rogatoires et des enquêtes préliminaires, pour les pôles santé de Marseille et de Paris.

Vous le voyez, je n'ai en aucun cas l'intention de laisser végéter le dossier de l'amiante. Notre devoir à tous est de penser aux victimes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP, SRC et NC.)

Procès de l'amiante

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d'une mission de service public (nos 1641, 1734).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Hier soir, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à M. Philippe Goujon.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Monsieur le président, madame la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, mes chers collègues, la discussion d'hier soir l'a amplement démontré, en matière de sécurité, il y aura toujours des voix à gauche pour expliquer que nous en faisons trop. Nous avons vu le résultat de ce type de discours : l'explosion de la délinquance sous le Gouvernement Jospin. Il faut toujours rappeler, et vous avez eu raison de le faire encore hier soir, madame la ministre, qu'entre 1997 et 2002, la délinquance générale a augmenté de 15 %, alors qu'entre mai 2002 et mai 2009, elle a diminué dans les mêmes proportions. Cela représente tout de même quelque 2 millions de victimes en moins !

Faut-il s'arrêter là ? Certainement pas ! Si l'on constate une diminution de la délinquance d'appropriation, les violences non crapuleuses continuent d'augmenter. De nouvelles formes de délinquance apparaissent, de plus en plus violentes. La réactivité et l'adaptation sont les conditions du succès en ce domaine. On ne peut pas se dire qu'on va légiférer une fois pour toutes. La loi, elle aussi, doit s'adapter régulièrement aux évolutions de la criminalité et de la délinquance. La recherche de la sécurité durable, que poursuit le Président de la République et que nous soutenons, impose le mouvement. Les délinquants les plus astucieux, ceux qui n'ont de cesse de s'engouffrer dans les moindres failles juridiques, doivent savoir que notre détermination nous conduira, aussi souvent que nécessaire, à adapter l'arsenal législatif. C'est ce que nous ferons prochainement avec l'adoption d'une nouvelle LOPPSI.

Aujourd'hui, il nous faut enrayer la multiplication des violences commises par des bandes, soit contre les personnes et les biens, soit sous la forme d'affrontements entre bandes rivales, soit par la recherche de la confrontation avec les forces de l'ordre. Le phénomène nouveau n'est pas celui des bandes, mais le degré d'intensité de la violence dont elles font preuve. Ces affrontements peuvent être mortels, comme ce fut le cas, le 18 décembre dernier, à deux pas de la tour Eiffel, où un jeune a été tué d'un coup de couteau. Le 19 mars, c'était un vigile qui était grièvement blessé au Forum des Halles. Samedi dernier encore, au Blanc-Mesnil, une rixe a causé la mort par balle d'un adolescent.

Tous les territoires sont concernés, tous peuvent être touchés, des cités de banlieue au Champs de Mars. Ces bandes violentes, composées pour moitié de mineurs et localisées, pour 80 % d'entre elles, en région parisienne – à cet égard, je me félicite de la création d'une police d'agglomération qui appréhendera plus efficacement le phénomène grâce au commandement unique par le préfet de police –, terrorisent nos concitoyens dans la rue, dans les manifestations, dans les établissements scolaires et dans les halls d'immeubles.

« Ce qui manque à notre arsenal, c'est de pouvoir poursuivre et condamner les personnes qui constituent une bande dans le but de commettre des atteintes aux personnes ou aux biens », a dit le Président de la République à Gagny, le 18 mars dernier. La proposition de loi déposée par Christian Estrosi, finalement rapportée par Éric Ciotti et cosignée par près de 200 d'entre nous, répond précisément à cette ardente nécessité. C'est une proposition utile et, contrairement à ce que j'ai entendu dire sur certains bancs, très respectueuse de nos libertés publiques. Elle ne se substitue nullement à l'infraction d'association de malfaiteurs, qui ne vise que les délits punis d'au moins cinq ans de prison et pour laquelle surtout la qualification pénale est complexe, comme nous l'a dit un procureur lors de son audition. Elle permet, de plus, de sanctionner ceux qui, agissant avec des intentions nuisibles, cherchent à dissimuler leur visage pour préparer leur mauvais coup.

Dans cet esprit, j'ai présenté un amendement tendant à affiner la définition du délit d'attroupement dans les halls d'immeubles, afin d'améliorer son application par les tribunaux. La certitude de la sanction doit être la règle. Jusqu'à présent la preuve du délit était souvent difficile à apporter, les victimes refusant, par exemple, de porter plainte de peur de représailles. Désormais, l'action de la police sera facilitée, car il lui sera possible d'avoir accès en temps réel aux images fournies par les caméras installées par les bailleurs, ce qui lui permettra de mieux préparer ses interventions, d'identifier les auteurs et de réduire les contestations a posteriori.

En la matière, la vidéoprotection est une parade indispensable. Son apport dans l'administration de la preuve est précieux, ce qui milite, comme je le fais d'ailleurs à Paris – qui n'est quasiment pas équipé à ce jour hélas ! – pour que les bailleurs sociaux s'en équipent et mutualisent leur dispositif avec celui de la police.

Le même pragmatisme doit nous conduire à doter les personnels de surveillance constitués par les bailleurs sociaux d'un moyen de défense. Ils travaillent dans des zones sensibles où ils sont fortement exposés à la violence des bandes, à laquelle ils paient un lourd tribut en nombre de blessés. Ils doivent pouvoir se protéger et se dégager en attendant l'arrivée de la police. C'est le sens d'un autre amendement que j'ai déposé.

La protection des fonctionnaires de police, notamment par le développement des moyens passifs permettant d'éviter les guets-apens tendus par les délinquants, doit aussi figurer parmi nos priorités. J'appelle de mes voeux la mise en place d'un plan de protection des fonctionnaires de police.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

La protection des touristes et des passants dans les lieux touristiques très fréquentés sera aussi mieux assurée par la répression des comportements agressifs lors de ventes à la sauvette en groupe.

La multiplication des agressions commises contre les personnels de l'éducation nationale ne doit pas non plus se banaliser, comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui. Ce texte complète utilement l'arsenal déjà disponible. Le travail d'adaptation législative doit être poursuivi, car il nous faut absolument sanctuariser les établissements scolaires. C'est pourquoi il était si important de combler une lacune, héritée des textes précédents, alors même que les agressions d'enseignants augmentent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Les personnels de l'éducation nationale et leurs proches, seront enfin mieux protégés, et les vols, extorsions et intrusions d'armes seront mieux réprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Il faudra aller jusqu'à autoriser les fouilles de cartables par les personnes habilitées.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

La perspective du plan de prévention de la délinquance devrait aussi nous permettre de généraliser l'utilisation du contrat de responsabilité parentale – une excellente mesure pour lutter contre l'absentéisme scolaire qui, chacun le sait, porte en germe la délinquance.

Cette proposition de loi, que nous devons à l'initiative de M. Christian Estrosi et à sa fine connaissance des questions de sécurité, s'inscrit ainsi dans un ensemble cohérent et durable de mesures fortes, décidées par le Gouvernement pour que la peur change de camp. On en a déjà vu les effets positifs depuis plusieurs années. Ils se trouveront amplifiés grâce à ce texte.

Mes chers collègues, sur un thème autour duquel les Français nous attendent rassemblés, j'appelle la gauche à faire preuve d'esprit de responsabilité plutôt que d'esprit partisan, en adoptant ce texte avec nous à l'unanimité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Je suis heureux, madame la ministre, de vous revoir aujourd'hui dans ces fonctions. Je crois, monsieur le rapporteur, que le sujet dont nous débattons depuis hier est très important.

Pourquoi une nouvelle loi relative aux problèmes d'insécurité ? Et pourquoi consacrer spécifiquement cette proposition de loi de notre collègue Estrosi aux violences de groupe ?

J'ai voulu intervenir pour témoigner de ce que le maire d'une commune de 16 000 habitants – une commune de qualité, agréable et touristique – vit jour après jour. J'ai voulu intervenir pour vous dire ce que ressentent nos policiers, de même que le procureur de la République, qui a d'ailleurs été auditionné par le rapporteur.

Hier soir, j'ai été frappé d'entendre les membres de l'opposition concentrer leurs interventions sur ce que diront le Conseil d'État ou le Conseil constitutionnel. Pour moi, la réalité est sur le terrain. Dans ma ville, tous les outils de lutte contre l'insécurité installés depuis six ans – un système de vidéoprotection efficace déployé aux quatre coins de la commune, des effectifs adéquats dans la police nationale et municipale, un contrat opérationnel de prévention et de sécurité signé depuis 2003, un conseil des droits et des devoirs des familles, un service de prévention spécialisée ainsi qu'un service d'adultes-relais qui se déplacent dans les quartiers sensibles – ont permis de réduire de moitié la délinquance. Un tel résultat a aussi été apprécié par le conseil départemental de prévention de la délinquance.

Quel est donc mon problème, me direz-vous ? Mon problème, c'est la pollution de quelques quartiers par des bandes, l'occupation et la dégradation d'entrées d'immeubles – pour plus de 200 000 euros aux frais des HLM cette année – ou encore les incendies de poubelles et de voitures, madame la ministre, le caillassage des autobus et des véhicules de pompiers – souvent attirés comme dans un guet-apens – et même des élus. Après avoir été moi-même caillassé, j'ai saisi le tribunal correctionnel pour obtenir un euro de dédommagement.

Ces bandes sont constituées d'une quinzaine d'individus identifiés et reconnus, qui font l'objet de nombreux rappels à l'ordre, mais de sanctions si faibles qu'elles en font des caïds. Ces individus sont aussi suivis par le groupe local de traitement de la délinquance avec notamment le procureur, le commissaire et les bailleurs sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Nous avons un GLTD depuis plus d'un an.

Comme vous le savez, madame la ministre, en fin de semaine dernière, il s'est produit des attaques lors de la Fête de la musique : agressions, vols de portefeuilles et de téléphones portables, destruction du véhicule d'un touriste qui venait participer à la fête – tout cela du fait de cette même bande, qui vit sur le terrain depuis des années. Heureusement, l'action de la police nationale, assistée par la vidéo, a permis l'arrestation puis la comparution immédiate de sept individus. Une sanction de trois à six mois de prison ferme ou avec sursis a été confirmée immédiatement – elle est un résultat positif du système de vidéoprotection.

Qui est le coupable, celui qui jette les pierres et fait le coup de poing ou ceux qui l'accompagnent et s'excitent, se croyant invulnérables ? Au fond, le sentiment d'impunité entraîne l'agacement des élus comme de l'ensemble de notre population. Il va de soi que la sanction est indispensable et doit être suffisante ; c'est ce que propose le texte de M. Estrosi, qui vise à ce que les faits de responsabilité de la bande soient reconnus et jugés au plan pénal comme un délit. Puisse aussi le fait de porter la sanction à trois ans d'emprisonnement constituer un signal d'alarme, afin de réduire au maximum le sentiment d'impunité.

Face à cette forme de délinquance, l'angélisme n'est plus de mise. Les services judiciaires ont besoin d'outils pour prononcer de véritables sanctions. La présente proposition de loi va dans le bon sens ; comme le groupe UMP, je la voterai, tant il faut qu'elle soit opérationnelle au plus vite, afin que nous passions un été calme dans nos petites villes de province. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

La Seine-Saint-Denis vous regarde, monsieur Bartolone !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Je n'en doute pas.

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, la proposition de loi qui est aujourd'hui soumise à notre examen vise à lutter contre les violences de groupe et à protéger les personnes chargées d'une mission de service public.

Fort de mon expérience au contact d'une certaine réalité, je vous propose, comme première approche de ce texte, un cheminement pragmatique fait d'un constat précis, d'une méthode de travail et de pistes d'évolution à mon sens nécessaires.

Tout d'abord, force est de constater que la nature des crimes et des délits commis en réunion est en évolution constante. Les actes recensés sont de plus en plus graves, qu'il s'agisse des tirs à l'arme à feu contre les policiers de La Courneuve – que vous avez eu l'occasion de rencontrer, madame la ministre – le mois dernier, des rixes de cette fin de semaine entre bandes au Blanc-Mesnil, qui se sont hélas soldées par un décès de plus, ou encore des guet-apens et des rapprochements entre la délinquance et le moyen ou le grand banditisme.

Cette insécurité prend aujourd'hui de multiples formes, d'une délinquance mafieuse à une violence très spontanée – écume d'une vague de dégradation des relations quotidiennes entre les citoyens, à mon sens bien plus inquiétante que le phénomène des bandes.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Le nombre d'infractions constatées augmente également. L'insécurité est de plus en plus enracinée dans certains quartiers périurbains. Dans un contexte national d'augmentation des violences physiques, que souligne l'Observatoire national de la délinquance, la Seine-Saint-Denis, dont je suis ici l'un des représentants à m'exprimer…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

… est au premier rang des départements concernés. Les vols à main armée y ont augmenté de plus de 20 % et les incendies de véhicules de 8 % l'année dernière. Cette année, les violences physiques progressent encore de plus de 3 %, tandis que les infractions à la législation sur les stupéfiants explosent de plus de 14 % : la situation est évidemment alarmante. Dans le droit fil de la politique mise en place par l'État depuis 2002, le texte présenté par notre ancien collègue, Christian Estrosi, tente d'y répondre d'une manière biaisée. C'est pour cette raison que les députés du groupe SRC ont décidé de proposer à la majorité parlementaire des pistes pour construire une politique de sécurité efficace à long terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Vous me connaissez assez, cher collègue, pour savoir que, sur les questions de sécurité, je n'ai jamais éprouvé aucune gêne.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Nous verrons ce que vous ferez de nos amendements.

Le constat que je viens de faire appelle une méthode de travail et d'action. Dans un esprit résolument républicain, j'estime qu'endiguer les phénomènes d'insécurité passe par trois étapes. La première consiste à mettre fin aux querelles de chiffres, stériles pour nos concitoyens, afin d'anticiper, département par département, les mutations des phénomènes de délinquance. Deuxième étape : il faut mener une concertation durable entre les élus des territoires concernés et l'État, dont la sécurité est une responsabilité régalienne, afin d'ancrer sur le terrain les politiques engagées. Enfin, nous devrons entrer collectivement dans une phase d'action qui passe, entre autres choses, par un renforcement notable des dispositifs humains intervenant dans la politique de sécurité publique.

Sans cette démarche de dialogue et d'action, le texte que nous examinons ratera sa cible et aggravera même la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Si mes collègues et moi regrettons l'inflation législative en matière de sécurité depuis 2002, ce n'est pas par plaisir : quinze lois en sept ans et 116 modifications du code pénal témoignent d'un écart évident entre les objectifs escomptés et les résultats obtenus.

C'est en partant de ce constat et de cette méthode que des écueils pourront être évités et des actions définies. Légiférer ne doit plus verser dans le domaine du symbolique – pour ne pas dire du médiatique. Sur le terrain, le sentiment d'impunité est proportionnel à l'agitation législative. Créer, récréer sans cesse des sanctions pénales déjà existantes ne fait que désorganiser un peu plus la hiérarchie des normes et la hiérarchie des peines, entraînant une incompréhension totale de la part des victimes et souvent des condamnés eux-mêmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Cette désorganisation est d'autant plus aiguë que l'écart entre les peines maximales prévues par le législateur et leur application réelle est de plus en plus grand. Lorsqu'il nous est proposé de punir de six mois d'emprisonnement une vente forcée, nous avons là l'exemple même du fossé qui sépare aujourd'hui les auteurs de ce texte et la réalité judiciaire. L'état scandaleux du patrimoine immobilier de la justice – auquel, si mes souvenirs sont bons, un ministre avait même déjà été affecté en vain il y a quelques années – empêche de fait l'application de la peine prévue. Prévoir des peines maximales surdimensionnées par simple tactique dissuasive, ainsi que la quasi absence de définition de peines de substitution, crée un vide puis une incohérence judiciaires.

Le premier délit n'est souvent pas puni tandis que l'éventuelle première récidive est, quant à elle, brutalement sanctionnée par une peine de prison ferme. Après une situation d'impunité non comprise, un petit délinquant se retrouve donc confronté à une surpopulation carcérale, qui limite de fait l'application des politiques de réinsertion nécessaires à la pédagogie de la peine, et favorise l'escalade qui conduit du délit mineur au crime. Je passe à dessein sur les 3 750 euros d'amende prévues pour des individus que la justice reconnaît la plupart du temps comme insolvables.

Bref, dans cette course folle au durcissement incessant de peines inapplicables, jamais notre système judiciaire ne se donne les moyens de responsabiliser les auteurs de faits délictueux pour prévenir la récidive.

Une piste à suivre pourrait consister à favoriser le développement – sans cesse rappelé – des travaux d'intérêt général, qui auraient sans aucun doute une lisibilité beaucoup plus grande, compte tenu de leur application plus rapide et de leur impact psychologique sur le condamné, par le biais du regard que la société porte sur la dimension réparatrice de ce type de peine.

Comme le soulignent d'ailleurs magistrats et policiers, la fuite en avant législative, qui relève d'une méconnaissance de la réalité de terrain, renforce le sentiment d'impunité et de puissance des quelques-uns qui gâchent la vie du plus grand nombre.

Témoin quotidien de l'évolution des violences, je suis convaincu qu'il est urgent que l'État revienne sur le terrain politique qui est celui du réel. Cela passe avant tout par une meilleure organisation du maintien de l'ordre et par la mobilisation d'effectifs suffisants. En Seine-Saint-Denis, plus de 400 policiers manquent réellement à l'appel dans nos commissariats – et l'on a du mal à se retrouver dans la profusion de chiffres communiqués – malgré l'annonce de l'arrivée, à date non précisée, de 200 fonctionnaires de police, soit un ou deux de plus par établissement.

C'est maintenant, madame la ministre d'État, et pas seulement d'ici à 2013 comme le prévoit la prochaine loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, que les territoires qui connaissent des phénomènes de violence ont un besoin vital de plans de rattrapage concernant les effectifs de forces de l'ordre. Il devrait en être de même, par ailleurs, pour les affectations d'enseignants, de surveillants, de magistrats, de greffiers en chef, de greffiers et de fonctionnaires des services judiciaires ! Cela ne serait que répondre à l'un des voeux formulés par le Président de la République à Versailles !

Au-delà de cette urgence conjoncturelle, c'est d'une politique globale et durable de sécurité qu'un département comme le mien a besoin. Cela passe par une police de quartier pérenne, ancrée localement, constituée de fonctionnaires expérimentés formés tout au long de leur carrière et en lien constant avec les populations jeunes comme moins jeunes. Le retrait depuis 2002 de la police de proximité, créée par la gauche, a entraîné une recrudescence quasi immédiate de la délinquance et de la criminalité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) La création parallèle de trois unités territoriales de quartier est insuffisante, madame la ministre d'État. Leur développement se fait au compte-gouttes : seulement trois unités supplémentaires sont annoncées, en Seine-Saint-Denis, entre fin 2009 et 2011, alors qu'elles sont indispensables ! Cela passe aussi par des sanctions immédiates, et enfin adaptées, contre l'impunité, par une prévention moderne contre les violences des mineurs, et par de nouvelles protections pour les victimes.

Au regard de cette analyse rapide mais pragmatique, ce texte, en l'état, ne répond pas aux questions que nous nous posons tous. Le premier sentiment qui se dégage de sa lecture est qu'il s'agit d'une proposition de loi hors-sol. Ce n'est pas sur la dureté des sanctions, somme toute technique, que nous devrions nous pencher, mais sur les solutions pratiques à apporter aux problèmes posés. Se focaliser juridiquement sur la phase suivant l'interpellation n'est pas suffisant. Il est nécessaire, je le répète, de se donner les moyens d'empêcher que les infractions soient commises ; la menace de nouvelles peines n'a plus d'effet de dissuasion car la parole de l'État a trop été affaiblie ces dernières années. C'est pourquoi, mes chers collègues, la logique d'inflation législative est d'une inefficacité absolue ; elle est même sans objet. Au cours du débat qui débute aujourd'hui, posons-nous une question simple avant de légiférer : la République dispose-t-elle d'un arsenal juridique insuffisant ou se trouve-t-elle seulement dans l'incapacité d'effectuer les missions de tranquillité publique qui sont les siennes ?

Le pragmatisme doit être de mise pour que l'État retrouve le dessein de l'égalité entre ses citoyens où qu'ils vivent. C'est pour cette raison que le groupe SRC proposera à votre approbation un certain nombre d'amendements constructifs. Du sort que vous leur réserverez dépendra notre vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, depuis deux ans, votre gouvernement n'a de cesse, au prétexte de lutter contre l'insécurité, de faire légiférer le Parlement sur des textes fondés sur une logique sécuritaire, répressive et ayant pour base la peur organisée de l'autre. Cette proposition de loi ne déroge pas à la règle. Comme l'a très bien démontré Michel Vaxès, hier soir, votre Gouvernement dispose déjà d'un arsenal juridique suffisant pour combattre des faits que tous, ici, nous condamnons. Même si nous en contestons certains dispositifs, rien ne vous empêche de le mettre en oeuvre si ce n'est le manque de moyens, de formation des personnels et d'une politique de prévention.

Une fois de plus, ce texte centré sur l'émotion et non sur la raison, est lourd de conséquences pour les libertés de chacun. Il ne fera, comme vient de le dire Claude Bartolone, qu'ajouter de la loi à la loi, aussi inapplicable que les précédentes sauf de manière occasionnelle et médiatique. Cette loi sera inefficace car elle n'apporte pas de vraie réponse et elle ne s'appuie pas sur la responsabilité individuelle.

À partir de ce qui s'est passé à Gagny le 10 mars dernier, le Gouvernement par une nouvelle loi d'affichage, voire populiste – en répondant dans l'urgence et à la lecture de ce projet de façon totalement inappropriée – ne prend pas ses responsabilités face aux problèmes d'exclusion que rencontrent nombre de jeunes des villes, des cités et même des campagnes.

Ce projet, comme de nombreux autres qui nous ont été imposés de manière totalement unilatérale, a un impact sur nos libertés publiques, c'est patent ; une fois de plus c'est l'État de droit que vous fragilisez en instaurant des mesures inadéquates, qui risquent d'entraîner des dérives importantes quant aux libertés fondamentales.

Les raisons qui poussent à ce projet sont parfaitement contextualisées et ne sauraient être généralisées à moins de vouloir les instrumentaliser pour continuer à mener ce que Naomi Klein appelle « La stratégie du choc ». Elle démontre avec brio et exemples à l'appui que les gouvernements qui utilisent ce processus instrumentalisent des événements pour mieux réduire les libertés tant sociales et économiques que publiques et privées. L'objectif étant de contrôler la population pour mieux lui faire avaler, par exemple en ce qui concerne la France, «l'ampleur» de la crise financière et le fait que rien ne changera pour les salariés, sauf que le nombre de suppressions de postes ainsi que le nombre des personnes expulsées de leur logement ne cessent d'augmenter.

Le Gouvernement se lave les mains des conséquences de cette crise si concrète pour nos concitoyens. Il préfère nous faire légiférer sur des projets indignes d'une démocratie reposant sur les valeurs de la solidarité, du partage et du respect des droits humains. Nous sommes ici quelques-uns à vouloir défendre ces principes.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Le Gouvernement vise, parce qu'il préfère que l'État soit répressif, à pousser à l'indifférence, à la résignation et à I'apathie. Dès lors, il n'existe aucun moyen de défendre les citoyens ou de les protéger, excepté avec ce que l'État a mis en place pour lutter contre «la» menace du terrorisme, contre l'insécurité qui, aux dires de certains collègues ou ministres ou encore de certains médias, envahit complètement l'espace social, et pis, menace la République.

Croyez-vous qu'en ayant un recours accru, depuis 2005, à la vidéosurveillance, à l'accès à des données relatives aux communications électroniques, à la constitution de fichiers concernant les étrangers qui voyagent, aux possibilités de contrôler et de photographier, en tout point du territoire, les occupants de véhicules, ou, enfin, à la consultation de multiples fichiers par des agents de la police et de la gendarmerie nationale, sans oublier que vous y avez ajouté le contrôle renforcé des mouvements transfrontaliers, voire de la circulation intérieure, avec une accessibilité facilitée des fichiers informatiques existants, un élargissement des possibilités de contrôle d'identité, une aggravation des peines et du régime de leur exécution, pour en arriver aujourd'hui à interdire «la participation à une bande ayant l'intention de commettre des violences ou des atteintes aux biens concertées», croyez-vous donc qu'un tel arsenal permettra de régler les problèmes sociaux et politiques auxquels sont confrontés le pays et plus largement l'Europe ?

Vous feignez de le croire. Dès lors, rien ne vous stoppe et cela nous inquiète. Jusqu'où irez-vous ? Pour notre part, alors qu'il est évident qu'avec cette crise économique, le vieux monde se meurt, et que le nouveau tarde à paraître, nous nous opposons à ces politiques liberticides et surtout à ce que dans ce clair-obscur, les monstres apparaissent, je reprends ici à mon compte les propos d'Antonio Gramsci.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Nous nous opposons aux coups que ce Gouvernement porte aux libertés afin de mieux contrôler, museler, encadrer la société et de mieux dominer, en faisant oublier les dérégulations économiques, sociales, culturelles, civiles et politiques.

Comme le groupe socialiste, nous défendrons des amendements : nous verrons bien si vous les adopterez ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Guibal

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, de bonnes âmes – nous venons d'en entendre – s'émeuvent que l'on puisse encore voter une loi sur la sécurité ! Et l'on pourrait, l'on doit même, en conscience, se poser la question : ne risquons-nous pas, en voulant mieux assurer la sécurité de nos concitoyens, de porter atteinte à leurs libertés ? Cette question, je me la suis posée et ma réponse est claire : madame la ministre d'État, monsieur le rapporteur, je voterai sans hésitation le texte qui nous est soumis.

Je le voterai parce que je crois que l'épanouissement individuel et l'harmonie collective ne peuvent, sauf en de très rares époques, se réaliser que dans une société ordonnée.

Je le voterai parce que je crois qu'une société livrée à elle-même – et cela vaut pour l'économie comme pour l'ordre public – débouche immanquablement sur des phénomènes pathologiques.

Je crois, en d'autres termes, qu'une société libre et sûre ne peut naître que de l'intervention de l'État et des autres pouvoirs publics, tant au niveau de l'éducation que de la prévention et, en dernier recours, de la répression.

Je suis convaincu, de surcroît, de la nécessité des interdits, tant il est vrai que la personnalité d'un être humain se construit par rapport à eux, y compris lorsqu'il les transgresse.

La société des hommes n'est pas immuable. Celle de notre temps, travaillée par de très nombreuses et profondes mutations, en est une parfaite illustration.

Les technologies changent mais aussi la démographie, la géopolitique, les modes de vie, les moeurs et, parfois, les valeurs. Le code pénal doit donc pouvoir changer aussi pour s'adapter aux évolutions de la société.

Pour s'en tenir aux deux volets du texte qui nous est proposé, force est de constater que de nouvelles formes de délinquance sont apparues, telles les violences de groupes et celles commises à l'égard des personnes qui travaillent dans les établissements scolaires.

Pour que l'État puisse continuer à jouer pleinement son rôle de protection des personnes et des biens, il convient de conforter la LOPPSI II en renforçant les peines qui sanctionnent les auteurs de ces nouvelles formes de violences.

Ces violences sont le produit d'interactions entre des éléments aussi divers que le délitement de l'identité collective, l'effacement du civisme, la mise en cause des institutions, le rejet de l'autorité, les ratés de l'intégration, le fractionnement du corps social en tribus et en bandes, l'occultation du monde réel par un monde virtuel, la préférence pour l'immédiateté au détriment de la durée, la substitution du consommateur au citoyen, le tout – et le reste que je n'ai pas évoqué, comme le trafic de drogue – aggravé par les effets de la crise économique.

Les formes nouvelles que prennent ces violences et les moyens auxquels elles recourent sont proprement inacceptables. On ne peut pas tolérer que des bandes armées et cagoulées s'en prennent aux personnes et aux biens, de même qu'on ne peut pas tolérer que des personnes étrangères aux établissements d'enseignement y fassent intrusion et y mettent fonctionnaires et élèves sous la menace de leurs armes. On ne peut davantage envisager de laisser se perpétuer les actes de barbarie auxquels se livrent certaines bandes, souvent au détriment de mineurs.

Il convient, dès à présent, de mettre un terme à ces dérives indignes d'un pays civilisé. Les mesures qui sont proposées dans le cadre de la proposition de loi, initiée par Christian Estrosi, ont le mérite d'être ciblées et raisonnablement équilibrées. En comblant certaines lacunes de notre code pénal, elles participent d'une démarche pragmatique et s'inscrivent, en même temps, dans une approche globale.

Bien sûr, elles ne sont pas – mais pas moins que d'autres – des armes absolues. Elles ne sont que des outils dont l'efficacité dépendra du savoir-faire des policiers et de la sagesse des magistrats. Bien utilisées, elles permettront aux praticiens de l'ordre public de faire face plus efficacement aux nouvelles formes de délinquance tout en respectant les libertés individuelles.

C'est là une raison suffisante de les rajouter à notre dispositif répressif. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Perruchot

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, assurer la sécurité de nos concitoyens, de manière continue sur l'ensemble du territoire, constitue pour l'État l'une de ses prérogatives les plus fondamentales. C'est conscients de toucher le coeur même de notre pacte républicain que nous abordons ce débat.

Depuis maintenant quelques mois, nous observons une hausse sensible du nombre de crimes et délits constatés alors que ceux-ci étaient en baisse depuis 2002. C'est dans ce contexte particulier que s'inscrit notre discussion.

Certaines tendances profondes de l'évolution actuelle de la délinquance sont plus inquiétantes encore, je veux parler de l'augmentation des violences commises par ce qu'il est convenu d'appeler les bandes et de l'installation de cette violence au sein des établissements scolaires. En aucun cas, la République ne doit les tolérer. Chacun d'entre nous ayant été, en tant qu'élu local, confronté à ce type de difficultés, sait combien il s'agit-là de phénomènes complexes et de tendances déjà anciennes.

Derrière le terme même de bandes, se cache une réalité diverse et multiple, en perpétuelle évolution de surcroît. Il convient à ce titre de distinguer les véritables regroupements structurés de délinquants, le plus souvent adossés à un réseau de trafiquants de stupéfiants, voire à la criminalité organisée, d'une nébuleuse d'organisations plus informelles fédérées autour du sentiment d'appartenance à un territoire sur lequel elles s'estiment en droit de dicter leur loi. Il faut également distinguer, parmi les individus qui les composent, ceux qui en forment la colonne vertébrale de ceux qui ne font que graviter occasionnellement autour d'elles.

Leur répertoire d'actions est lui-même extrêmement large, allant des petites incivilités récurrentes aux crimes et délits les plus graves, en passant par les affrontements spectaculaires auxquelles elles se livrent entre elles pour des motifs le plus souvent dérisoires, ce dont nous avons encore eu tout récemment la tragique démonstration.

J'évoquais à l'instant la nature déjà ancienne de ce phénomène. J'ajouterai que nombreux sont, en conséquence, les outils juridiques qui ont été définis ici même au fil du temps pour combattre ces bandes, les derniers en date l'ayant été lors de la précédente législature avec la loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance. Celle-ci avait notamment permis de définir l'incrimination de guet-apens afin de répondre à la multiplication des attaques perpétrées contre les forces de police ou contre les sapeurs pompiers.

Mettre un terme à l'emprise totalement inacceptable des bandes sur certaines parties du territoire doit être un combat permanent. Cela implique pour les parlementaires que nous sommes de toujours chercher à doter les forces de l'ordre des moyens qui leur permettront de répondre de la manière la plus efficace possible aux évolutions de cette forme de délinquance.

Toutefois, la répression de la seule participation aux agissements d'une bande violente doit être conciliée avec l'un des principes directeurs de notre droit pénal selon lequel nul ne peut être pénalement responsable que de ses propres agissements. Dans ces conditions, il est, le plus souvent, extrêmement difficile aux enquêteurs d'établir le détail des responsabilités individuelles. Commettre des délits en bande représente ainsi pour les délinquants une sorte de protection dans la mesure où leur responsabilité individuelle se trouve fortement diluée quand elle n'est pas complètement noyée.

En créant une infraction de participation à une bande, l'article 1er de la proposition de loi permet une avancée notable dont nous nous réjouissons tout particulièrement. Dorénavant, il sera possible d'incriminer individuellement les membres d'une bande dont il aura été prouvé qu'ils ont l'intention de commettre des violences ou des dégradations.

Cette disposition ne peut cependant à elle seule constituer l'alpha et l'oméga de la lutte contre la loi des bandes. Elle ne peut en aucun cas nous affranchir d'un débat construit sur notre politique de prévention. À cet égard, j'insisterai sur le point suivant : le ministère de l'intérieur estime que près de 50 % des 5 000 individus qui composent les 220 bandes recensées à ce jour sont des mineurs et qu'un grand nombre de leurs membres n'auraient pas même treize ans. De ce constat découle la nécessité de ne pas céder au tout pénal pour contrer ce phénomène. Implantées sur des territoires souvent sinistrés, les bandes, nous le savons, peuvent malheureusement constituer pour nos jeunes un lieu attractif de socialisation souterraine, devenant ainsi de véritables écoles de la délinquance.

Briser cette tendance implique d'ouvrir d'autres horizons à ceux qui se voient tentés de rejoindre ces regroupements. Un tel objectif implique un effort accru en direction de l'ensemble des acteurs qui concourent, sur le terrain, à la politique de prévention, qu'ils soient issus du monde éducatif, du monde associatif ou encore de celui de l'entreprise.

Sur ces territoires, il nous faut redonner toute sa place à l'école car c'est là où sont formés les futurs citoyens de notre pays mais aussi là où se construit la République de demain. C'est pourquoi nous ne pouvons en aucun cas fermer les yeux sur la banalisation de la violence au sein même des établissements scolaires et sur les agressions dont sont victimes les enseignants, les personnels d'encadrement et leurs proches.

De cette proposition de loi, je retiens particulièrement les mesures visant à rendre plus dissuasives les peines encourues en cas d'agression d'un enseignant ou de l'un de ses proches. Dans la même logique, je salue la correctionnalisation des peines pouvant être prononcées à la suite d'une intrusion injustifiée en milieu scolaire. Cette mesure permettra en effet de mettre fin au paradoxe selon lequel ce type d'intrusion ne peut être sanctionnée que d'une simple contravention, fut-elle de cinquième classe, alors même que les actes effectivement commis se révèlent d'une extrême gravité, comme nous en avons malheureusement eu l'illustration récemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Perruchot

Je voudrais revenir sur un point tout aussi déterminant dans la lutte contre les bandes, madame la ministre d'État. Pour que celles-ci cessent d'apparaître comme un univers attractif, principalement pour nos jeunes, il faut également que nous tirions toutes les conséquences de la tournure alarmante que prend dans notre pays le trafic de stupéfiants. En laissant s'installer ces réseaux sur notre territoire, nous acceptons aussi que se répande l'idée que le crime est une source de profit rapide et facile. Il nous faut briser le train de vie parfois ostentatoire de certains délinquants, synonyme de promesses d'argent facilement gagné.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Perruchot

Notre assemblée a récemment adopté une proposition de loi du président de la commission des lois qui permettra dorénavant à la justice de confisquer plus facilement les avoirs criminels, notamment ceux des trafiquants de stupéfiants. C'est incontestablement un pas dans la bonne direction, je tiens à le saluer.

Toutefois, il importe que nous puissions rapidement couper court à ces trafics. En de nombreux points de notre territoire, des produits tels que l'héroïne ou la cocaïne sont de plus en plus facilement accessibles, à des prix malheureusement de plus en plus bas. En 2008, le recentrage des missions des groupements d'intervention régionaux, les GIR, a eu des résultats souvent extrêmement probants, notamment en matière de lutte contre les réseaux d'économie souterraine. Il nous faut poursuivre dans cette voie car c'est bien là que réside, au moins en partie, le pouvoir d'attraction que les bandes exercent sur nos jeunes.

Mes chers collègues, cette proposition de loi permet nombre d'avancées significatives, extrêmement utiles pour l'ensemble des acteurs actuellement confrontés aux bandes. Les députés centristes soutiennent résolument le sens de cette proposition mais ils souhaitent que ce texte soit également l'occasion pour nous tous d'avoir un débat approfondi sur notre politique de prévention de la délinquance, débat que nous ne pouvons plus reporter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Garraud

Monsieur le président, madame la ministre d'État, garde des sceaux, mes chers collègues, de l'avis de tous les professionnels de la sécurité et des criminologues, la délinquance et surtout les violences dans certaines banlieues sont en nette progression alors que partout ailleurs un phénomène inverse est constaté.

Certains chiffres sont éloquents : les vols à main armée sont en augmentation de 34 % dans les petits commerces, de 40 % dans la grande distribution, sans compter les règlements de compte quotidiens à l'arme à feu entre voyous, les intrusions et les violences dans les établissements scolaires et même un mitraillage au fusil d'assaut contre un car de police à La Courneuve dans la nuit du 16 mai dernier.

À juste titre, la présente proposition de loi veut s'attaquer à l'un des aspects de cette nouvelle criminalité : la délinquance de groupe de type urbain avec des passages à l'acte parfois très violents qui ne peuvent, en général, être poursuivis sous des qualifications existantes et dont l'identification des auteurs par les services de police s'avère quasiment impossible. Plusieurs types de difficultés aboutissent en effet à une véritable impunité, qui favorise la multiplication de ces agissements.

On a affaire désormais à une délinquance de comportement, avec violences gratuites commises souvent par des mineurs très jeunes et masqués. Les faits se déroulent dans de telles conditions qu'il n'est pas possible d'attribuer avec certitude à chaque participant le détail des infractions qu'il a pu commettre. Si les arrestations entraînent des gardes à vue, éventuellement des présentations au parquet, rares sont ceux qui sont traduits en comparution immédiate, jugés et sanctionnés.

Aussi, la police peut parfois se décourager, la justice est accusée de laxisme, l'opinion publique ne comprend pas cette impunité.

Les juges ne peuvent en réalité imputer juridiquement tel fait à tel individu. Le moindre doute joue en faveur du suspect – ce qui est bien naturel – et les qualifications juridiques existantes ne sont pas suffisantes pour incriminer ces nouveaux actes délictueux, d'où la nécessité de compléter le dispositif législatif par la présente proposition de loi.

Au problème d'identification rencontré par les services de police lors des enquêtes s'ajoute le problème rencontré par le juge quant à l'imputabilité et donc à la responsabilité pénale, surtout s'agissant de mineurs.

De plus, même dans l'hypothèse où le parquet traduit un prévenu devant la juridiction, la qualification pénale retenue ne fait jamais référence à une violence de groupe qui, en droit, n'existe quasiment pas. En outre, le jeu délétère de la correctionnalisation aboutit souvent à l'oubli de circonstances aggravantes qui permettraient de qualifier l'acte d'infraction criminelle, ce qui est très préjudiciable à l'efficacité de toute politique pénale. Mais c'est là un autre sujet à explorer.

Enfin, même dans les cas rarissimes de condamnation à une peine d'emprisonnement ferme, se pose la question de l'exécution réelle de la peine. D'ailleurs qui peut sérieusement affirmer qu'il y a une réponse pénale systématique à toute infraction pénale ?

Pour franchir tous ces obstacles et pour parvenir à lutter efficacement contre ces bandes, il n'existe, à mon sens, qu'une seule solution qui consisterait à faire évoluer le concept de responsabilité pénale individuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Garraud

À délinquances et violences collectives doit correspondre une responsabilité pénale spécifique – je ne dis pas « collective » mais « spécifique ». Aux individus qui participent sciemment à des actions violentes de groupe doit correspondre une incrimination adaptée à de tels actes.

La proposition de loi, dans son article 1er, calque le dispositif relatif à l'association de malfaiteurs pour l'appliquer aux bandes, à la condition que la participation soit volontaire et que le groupement se soit constitué dans le but de commettre des violences ou des dégradations. Néanmoins, il me semble que le cas des attroupements spontanés aboutissant aux mêmes dérives violentes et aux mêmes dégradations, n'est pas prévu. C'est là une lacune qu'il conviendrait de combler. J'espère que le débat nous donnera l'occasion d'éclaircir ce point car en l'absence de précisions sur le cas des attroupements spontanés, il sera impossible d'établir l'intention d'une participation volontaire à une bande constituée dans le but de commettre des violences et des dégradations, qui suppose, par définition, une anticipation. Or, les cas où des bandes se forment subitement, au gré des circonstances, ne sont pas rares et les débordements dont elles sont à l'origine sont tout aussi graves de conséquences.

Sans parvenir à l'instauration d'une nouvelle loi anticasseurs qui risquerait d'être censurée par le Conseil constitutionnel, il me semble nécessaire de faire encore évoluer le concept juridique de responsabilité pénale afin de donner aux forces de l'ordre et à la justice les moyens de lutter contre ces voyous, ces délinquants qui sont de plus en plus violents. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, que dire dans cette discussion générale qui ne l'a pas déjà été ?

D'abord, il faut évidemment éviter la caricature, qui renvoie les uns à la seule répression, les autres à une sorte d'angélisme. Je crois que nous n'avons fait preuve, les uns et les autres, ni d'esprit répressif ni d'angélisme excessif.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Ensuite, ce n'est pas parce que ce texte est imparfait qu'il est forcément inutile.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Ne vous réjouissez pas trop vite, monsieur Raoult !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Ce texte n'est pas parfait car il sera difficile de caractériser l'infraction. Cela nécessite que l'on prouve que celui que l'on va poursuivre participait, en toute connaissance de cause, à un regroupement qui avait pour but de commettre des infractions contre les personnes ou des dégradations contre les biens.

Le présent texte risque de connaître le même sort que celui concernant l'infraction prévue par l'article 450 du code pénal relatif à la participation à une association de malfaiteurs qui sert très peu de base à des poursuites sauf lorsqu'elle est associée à une autre infraction. À cet égard, le site internet du ministère de la justice que j'ai consulté répertorie très peu de cas de poursuites uniquement au titre de cet article.

Par ailleurs, on pourrait invoquer la défense des droits de l'homme. Compte tenu de sa généralité et de son imprécision, et sans faire de procès d'intention, ce texte pourrait servir de base à des poursuites dans une période troublée. Voilà pourquoi nous vous proposons des amendements qui visent à l'améliorer – nous ne prétendons pas lui faire atteindre la perfection.

Nous proposons ainsi que ce texte ne soit pas applicable dès lors que l'on a affaire à une manifestation déclarée, ce qui nous mettrait à l'abri de toute critique de la part des défenseurs des droits de l'homme qui estimeraient que l'on va se servir de ce texte à des fins de répression syndicale ou politique.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Monsieur Raimbourg, me permettez-vous de vous interrompre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Éric Raoult, avec l'autorisation de l'orateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Mon cher collègue, vos propos sont fondés et intéressants. Ils montrent une évolution au sein du groupe socialiste.

Pouvez-vous vérifier que lors des cinq dernières manifestations étudiantes ou lycéennes que Mme Batho connaît bien, il y a eu des phénomènes de bandes à l'intérieur de la manifestation et qu'il a été nécessaire de protéger les responsables étudiants tant les violences étaient particulièrement dures, notamment sur l'esplanade des Invalides ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Il est important de souligner qu'il est parfois nécessaire d'intervenir lorsqu'il y a intrusion à l'intérieur des manifestations autorisées étant donné qu'une bande n'est pas une association enregistrée en préfecture.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Monsieur le président, me permettez-vous de répondre à M. Raoult ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Il est certain que des problèmes ont eu lieu sur l'esplanade des Invalides, mais il est prudent de se mettre à l'abri des critiques de la part des défenseurs des droits de l'homme.

Nous proposons une autre série d'amendements qui prévoient d'inclure des dispositifs de prévention car chacun s'accorde à reconnaître que ceux issus de la loi du 5 mars 2007 ne fonctionnent pas.

Nous proposons encore la création d'une police de quartier qui serait chargée d'un travail d'infiltration, de renseignements, d'enquête, d'interpellations. Il faut reconstituer la chaîne qui part de la prévention, passe par l'interpellation et débouche sur une enquête qui permet ensuite une condamnation fondée.

Il est nécessaire que les décisions judiciaires dans ce type d'affaires, compte tenu de la spécificité du phénomène auquel nous nous attaquons, interviennent très rapidement. Aussi prévoyons-nous des dates butoir, pour les majeurs comme pour les mineurs.

Nous proposons, par ailleurs, des dispositifs propres à l'éducation nationale. La violence n'est pas toujours extérieure aux établissements scolaires, elle est parfois interne. Il faut gérer les exclusions, mettre en place des tuteurs référents en cas d'exclusion, de façon à ne pas générer des sentiments anti-scolaires, et gérer le retour des enfants déscolarisés.

Enfin, il serait bon que nous nous appliquions à éradiquer ces phénomènes sans trop communiquer à leur sujet.

En conclusion, j'estime que nos propositions sont à même d'apporter une contribution positive à ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je vous écoute s'il s'agit d'un vrai rappel au règlement. Sinon je serai obligé de vous retirer la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Monsieur le président, mon collègue Dominique Raimbourg a autorisé M. Raoult à l'interrompre. À mon tour, j'ai demandé à le faire car nous discutions d'un point important. Il aurait été bon que je puisse réagir à ses propos. Aussi, avec votre autorisation, je souhaiterais m'exprimer sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Non, ma chère collègue. Nous sommes dans le cadre de la discussion générale et celle-ci est organisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Pourquoi, alors que M. Raoult a pu interrompre l'orateur, ne le puis-je pas ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

C'est toujours la même chose : il y a deux poids, deux mesures !

Debut de section - PermalienPhoto de Manuel Aeschlimann

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, s'il est un phénomène qui est évolutif, c'est bien la délinquance : évolutif par son ampleur, par son mode d'action, par les dégâts qu'il engendre.

Évoquer cette caractéristique du phénomène délinquant, c'est déjà répondre à ceux qui s'étonnent de voir naître un énième texte législatif en la matière.

C'est toute la différence entre une approche figée, quasi idéologique de l'insécurité au quotidien, et notre approche, faite d'évaluation des dispositifs existants et de recherche d'améliorations toujours possibles.

Lorsque Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, a eu le courage de s'affranchir des tabous et s'est attaqué avec le talent et la force qu'on lui connaît à l'insécurité, nul ne pouvait s'imaginer que les résultats seraient si exceptionnels. Exceptionnels, ils l'ont été : la délinquance a connu une baisse constante durant sept ans.

Pourtant, en dépit de cette évolution, Nicolas Sarkozy et tous ceux qui lui ont succédé dans ce domaine dont vous, madame la ministre d'État, ont toujours tenu un langage clair, sincère et réaliste.

Non, personne n'a jamais prétendu que l'insécurité était éradiquée. Non, personne n'a jamais prétendu que la lutte contre les délinquants n'était pas une remise en cause quotidienne.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Mon cher collègue, me permettez-vous de vous interrompre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Il y a deux poids, deux mesures, dans cet hémicycle !

Debut de section - PermalienPhoto de Manuel Aeschlimann

C'est cette humilité-là, dont on retrouve l'esprit dans le texte que nous examinons aujourd'hui. Comme une marque de fabrique, on y retrouve ce qui a fait le succès des projets de Nicolas Sarkozy : courage, pragmatisme et réalisme.

Un constat simple : parmi ce qu'on a mis en place, il y a des choses qui marchent et d'autres qui ne marchent pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Ayez le courage d'être interrompu, monsieur Aeschlimann !

Debut de section - PermalienPhoto de Manuel Aeschlimann

Je sais que les questions de sécurité vous rendent nerveux, mais laissez-moi terminer !

Debut de section - PermalienPhoto de Manuel Aeschlimann

Interrompre l'orateur, monsieur Urvoas, ce n'est pas nécessairement faire preuve d'un haut niveau !

Debut de section - PermalienPhoto de Manuel Aeschlimann

Parmi ce qu'on a mis en place, disais-je, il y a les choses qui marchent et d'autres qui ne marchent pas. Des dispositifs sont à affiner, à améliorer, en étant toujours ancré dans le concret et l'expérimentation de l'existant.

En premier lieu, c'est donc cet aspect-là que je voulais mettre en exergue, parce que les idéologies laxistes du passé nous ont fait trop de mal, et parce que l'action contre les voyous de tous crins n'est définitivement pas compatible avec les bons sentiments déconnectés du monde réel. Nous parlons de souplesse là ou d'autres marquent, une fois de plus, leur rigidité doctrinaire. Dont acte.

Alors oui, nous sommes fiers une fois encore de faire face à l'évolution de la délinquance dans notre pays et de soutenir les processus proposés dans le présent texte.

Celui-ci concerne la vie quotidienne des Français. Qui n'a pas été confronté à des ventes à la sauvette qui dégénèrent ? Qui n'a pas croisé, notamment dans les grandes villes, ces bandes qui marquent leur territoire à grands coups de violences aveugles ? Qui n'a pas aperçu des groupes d'individus cagoulés, en se demandant s'il s'agit d'une mode ou d'une volonté de dissimulation ?

À toutes ces questions, la présente proposition de loi apporte des réponses. Notre famille politique, soutenue par le Gouvernement, prend une fois encore l'initiative en la matière.

Créer une nouvelle incrimination contre les bandes violentes, renforcer le délit d'attroupement dans les halls d'immeubles, réglementer le port de la cagoule, durcir les sanctions à l'encontre des attroupements armés, mieux protéger les établissements scolaires contre les intrusions et les violences venues de l'extérieur, développer et encadrer la vidéosurveillance : tels sont les objectifs du texte qui nous est soumis.

Et dans ces domaines du quotidien, il est bon que l'État renforce son rôle d'impulsion, de coordination et de contrôle. Par là même, il vient au secours de tous ces élus locaux pleins de bonne volonté mais pas toujours armés en la matière. Car qui, sinon les élus locaux, ont été les premiers confrontés à ces phénomènes et à mettre en exergue tous ces cas pratiques de l'insécurité au quotidien ?

Ces élus locaux ont agi avec les moyens qu'on leur donnait. Or, force est de constater que toutes les politiques de prévention mises en place sous le vocable de politique de la ville ont été des échecs successifs, même si d'excellents ministres les ont défendues – n'est-ce pas, cher Éric Raoult ? – du saupoudrage de fonds publics pas assez importants pour gagner un semblant de paix sociale.

En Europe, les mêmes phénomènes se sont produits : des gouvernements sociaux-démocrates ont défendu une politique de prévention sociale sans lui donner les ressources et les professionnels aguerris dont elle aurait eu besoin pour remettre à égalité les quartiers relégués avec le reste de la société. Aucun moyen de convaincre les enseignants, les policiers, les juges et les éducateurs les plus expérimentés d'y travailler massivement n'a été trouvé.

Ce qui a été présenté dans les années 80 comme le modèle français de la prévention de la délinquance a trop privilégié rétrospectivement la prévention sociale au détriment de réponses immédiates à la montée de la délinquance urbaine.

Je considère, comme tant d'autres, que la prévention est nécessaire, mais que brandir des sanctions potentielles est justement la première et la plus efficace des préventions.

Depuis 2007, le Gouvernement de François Fillon multiplie des mesures qui allient efficacement action sociale et responsabilisation. La main est bien tendue à celles et ceux qui veulent s'en sortir. Le Président Nicolas Sarkozy, lors de son discours prononcé au Congrès de Versailles, le 22 juin dernier, a lui aussi évoqué cette nécessité de ne laisser personne sur le bord du chemin. Car pour être efficace, une politique de sécurité doit pouvoir s'appuyer sur une politique sociale bien menée. C'est cet équilibre qui contribue à aider ceux qui, pour des raisons diverses liées à la naissance ou à des capacités moindres, n'ont pas su saisir les chances que leur offrait la vie.

En conclusion, c'est donc cette constante recherche de justice dans l'action qui est le fil conducteur des réformes conduites par notre président : être sévère, mais juste, de cette justice qui rend légitime la sanction, et de cette justesse qui permet de prendre les mesures appropriées aux problèmes posés. Le présent texte participe de cet équilibre entre main tendue et sanction exemplaire.

Parce que, dans ce domaine plus que dans tout autre, faire de l'angélisme serait notoirement irresponsable, je soutiens et voterai ces mesures destinées à renforcer la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Monsieur le président, nous avions un débat intéressant qu'il aurait été bon de poursuivre.

Comme nous devons réfléchir à l'organisation de la suite de la discussion générale, je vous demande une suspension de séance, sur la base de l'article 58, alinéa 3, afin de réunir mon groupe.

Discussion générale

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Elle est de droit. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures trente-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Calméjane

Député de Seine-Saint-Denis, j'ai été malheureusement confronté au phénomène des bandes puisque le 10 mars dernier, treize individus cagoulés et armés sont entrés par effraction dans les locaux du lycée Jean-Baptiste Clément à Gagny, dans ma circonscription. Cette incursion d'une bande dans un établissement scolaire a montré au plus haut niveau de l'État l'ampleur et la dangerosité du phénomène. Le Président de la République, qui s'est rendu sur les lieux le 18 mars, a demandé au ministre de l'intérieur Michèle Alliot-Marie et au ministre de l'éducation nationale, Xavier Darcos, « de lancer, en concertation avec les collectivités locales concernées, une réflexion destinée à renforcer par des mesures opérationnelles la sécurisation des établissements scolaires ». Il a par ailleurs chargé Mme Alliot-Marie de lui présenter un plan d'action destiné à renforcer la lutte contre le phénomène des bandes violentes.

La proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d'une mission de service public, aujourd'hui discutée, répond à une préoccupation majeure de nos concitoyens puisque les phénomènes de bandes augmentent. Ils démontrent que la délinquance est en constante mutation. L'incursion dans le lycée de Gagny a ainsi surpris tout le monde, Gagny faisant partie des communes dont le taux de délinquance est le plus faible de la Seine-Saint-Denis. Cette proposition est ferme avec les voyous et les délinquants et juste pour les victimes et les honnêtes citoyens. Elle complète sur plusieurs points les dispositions du code pénal et du code de procédure pénale afin de mieux réprimer les phénomènes des bandes violentes et de mieux protéger les personnes travaillant dans les établissements d'enseignement.

J'ai de surcroît rédigé, avec mes deux collègues de Seine-Saint-Denis, Messieurs Raoult et Gaudron, six amendements qui visent à protéger les transports publics des violences de groupes, des vols à la portière et de l'utilisation de fumigènes ou d'engins pyrotechniques. Par ailleurs, le 93 étant particulièrement confronté aux problèmes de bandes, comme en témoignent encore les récents événements du Blanc-Mesnil, ne serait-il pas opportun d'expérimenter en Seine-Saint-Denis la présente proposition de loi ?

Je le rappelle, des outils destinés à prévenir la délinquance au sein des communes existent déjà. Indépendamment des associations de quartier, dont nous reconnaissons tous le travail au quotidien, la loi du 5 mars 2007 permet de mettre en place, par une délibération en conseil municipal, un Conseil des droits et devoirs des familles qui peut « entendre une famille, l'informer de ses droits et devoirs envers l'enfant et lui adresser des recommandations destinées à prévenir des comportements susceptibles de mettre l'enfant en danger ou de causer des troubles pour autrui ».

L'opposition a tort, nous ne combattons pas le phénomène de la délinquance uniquement sous l'optique de la répression. Nous ne pourrons lutter efficacement contre la délinquance qu'en prenant également des mesures sociales et des mesures de prévention.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Calméjane

Donc, la prévention est en place. Reste qu'il faut améliorer et actualiser le volet répression. Enfin, une fois ce texte voté, il ne sera efficace que si les magistrats en prennent toute la mesure. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Gérard Gaudron. Nous restons dans le même département.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Si quelques doutes subsistaient quant à l'opportunité de débattre aujourd'hui d'une proposition de loi visant à lutter contre les bandes, la rixe entre bandes qui a causé la mort d'un jeune par arme à feu samedi dernier au Blanc-Mesnil suffirait à les lever.

Le colonel des pompiers venu pour apporter les premiers secours à celui qui n'était encore qu'un blessé grave m'a appris ce matin qu'il avait dû intervenir au milieu des échanges de projectiles entre les deux bandes qui ne se préoccupaient ni de l'état du blessé ni de ceux qui lui venaient en aide. C'est inadmissible.

Voici quelques semaines, c'était à Aulnay-sous-Bois que deux bandes rivales s'affrontaient, faisant là encore de nombreux blessés. C'est tout aussi inadmissible.

Notre majorité a eu raison de relever le défi de l'insécurité. Les résultats en témoignent : entre 1997 et 2002 la délinquance générale avait augmenté de 15%. Elle a diminué d'autant entre 2002 et 2009.

Si nous devons rester modestes, ces chiffres nous engagent tout de même à poursuivre notre combat, en particulier contre les bandes. La France compte aujourd'hui plus de 200 bandes reconnues, ce qui n'est pas de nature à rassurer nos concitoyens.

Si le phénomène des bandes n'est pas nouveau, il s'est amplifié ces dernières années, se traduisant par davantage de violence et la radicalisation de certains, sans parler d'actes inacceptables comme l'intrusion de bandes dans un lycée de Gagny, alors même que les lycées ont toujours été considérés comme des sanctuaires.

À cause des bandes, les conditions de vie se dégradent dans nos quartiers : actes de vandalisme, rodéos dans les rues, occupations des halls d'immeubles, tapages. Les habitants, exaspérés, se sentent de moins en moins en sécurité.

Des motifs futiles suffisent souvent à déchaîner les violences, qui s'exercent au moyen de marteaux, de battes de baseball, voire d'armes à feu.

L'autorité de l'État est fondamentale et doit s'appliquer sur tout le territoire national, sans exception. Heureusement, le Président de la République et le Gouvernement ont toujours été très fermes sur ces principes.

Cela étant, nous devons rester vigilants quant aux moyens de traiter ce problème. Je salue à ce propos le travail que les forces de l'ordre ont réalisé et dont vous avez pu vous rendre compte, Madame la ministre, lorsque vous vous êtes rendue, avec le Premier ministre, dans ma circonscription d'Aulnay-sous-Bois le 12 juin dernier. L'unité de quartier que vous nous avez alors promise nous sera d'une grande aide.

Mais, à côté de la répression, les mesures de prévention sont essentielles et les acteurs locaux, qui en ont pleinement conscience, font des efforts en ce sens.

Malheureusement, les délinquants ont compris que les actions en bandes organisées bénéficiaient d'une certaine impunité. Il était devenu nécessaire de créer une nouvelle infraction, réprimant spécifiquement la participation à une bande violente y compris celle de personnes non armées dès lors que l'un des membres du groupe est armé.

Une peine aggravée est par ailleurs prévue en cas de dissimulation du visage, phénomène de plus en plus fréquent. Cette mesure est indispensable pour permettre de reconnaître les voyous.

Il est encore prévu de renforcer la protection des établissements scolaires et des personnels enseignants. La commission des lois a, quant à elle, proposé de définir plus efficacement le délit d'attroupement dans les halls d'immeuble et d'instaurer une peine complémentaire de travail d'intérêt général pour occupation abusive des halls d'immeuble.

Avec Eric Raoult et Patrice Calméjane, nous avons déposé des amendements pour lutter contre les jets de pierre sur les autobus et pour réprimer plus sévèrement les vols à la portière.

Enfin, la vidéosurveillance contribue pour une large part à faire reculer l'insécurité, tout comme le sentiment d'insécurité. Nous devons étendre ce dispositif, qui doit rester relié au commissariat.

Nous souhaitons, avec mes collègues députés de Seine-Saint-Denis, que cette proposition de loi soit votée à l'unanimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Le phénomène des bandes touche toutes les villes. En matière d'insécurité, il ne devrait pas y avoir d'un côté ceux qui en parlent et de l'autre ceux qui agissent, passant ainsi pour des ultra-sécuritaires.

Ce texte difficile, même s'il ne traite pas des rassemblements spontanés qui peuvent avoir des conséquences aussi graves, est attendu par tous nos concitoyens, en particulier ceux de Seine-Saint-Denis. Les habitants attendent un geste fort et nous, députés de la majorité, nous voterons cette proposition qui va dans le sens de l'intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Daniel Goldberg. Toute la Seine-Saint-Denis se sera exprimée !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Appelez donc à voter ce texte, monsieur Goldberg, vous ferez un scoop !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, une nouvelle fois, l'Assemblée nationale est appelée à légiférer sur les questions de sécurité. Ce texte qui sera, s'il est adopté, la quinzième loi sur la sécurité depuis 2002, répond à une commande du Président de la République, comme l'a avoué, dans l'élan de sa soudaine nomination, notre nouveau rapporteur. Il constitue une étape supplémentaire dans votre frénésie législative. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) En fait, si cette proposition n'avait qu'un seul objet, ce serait celui de masquer l'échec de votre majorité, en particulier de celui qui, ministre de l'intérieur dès 2002, a défendu une certaine conception de l'organisation des forces de l'ordre tout en se répandant en déclarations tapageuses et inefficaces.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Ce travers aura surtout brisé le lien de confiance avec l'ensemble de la population, qui demande plus de sécurité, notamment avec les habitants des quartiers populaires de Seine-Saint-Denis.

Lors de nos échanges dans cet hémicycle, le 19 mai dernier, madame la ministre, vous avez semblé me reprocher de trop en faire sur le sujet – de « rouler des mécaniques », pour reprendre l'expression que vous avez employée ce jour-là, marquant, peut-être, l'exaspération devant mon exigence de résultats, en même temps qu'une entorse au respect réciproque que nous nous devons dans cette enceinte.

Mon exigence vient de loin. Il y a quatre ans, presque jour pour jour, Nicolas Sarkozy venait à La Courneuve, où je suis élu, après le meurtre d'un jeune enfant : il promettait d'en finir avec les problèmes de sécurité, multipliant dans la ville des shows médiatiques dont il a, j'en conviens, le savoir-faire, comme nous avons encore pu le constater lundi au Congrès du Parlement à Versailles. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Or, à La Courneuve, comme du reste à Versailles, nombre d'habitants constatent sur le terrain qu'il y a bien loin des paroles aux actes, et encore plus aux résultats. Dois-je rappeler que celui qui, en 2005, roulait les mécaniques de sa future campagne électorale, avait choisi le terme méprisant de « nettoyage » pour qualifier ma ville et ses habitants ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Mais lui a été élu tandis que votre candidate a été battue !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Du reste, Nicolas Sarkozy s'était exprimé d'une manière claire : « S'il n'y a pas de recul durable de la violence, j'en tirerai toutes les conséquences ». Elles méritent donc d'être tirées aujourd'hui.

Pourquoi, chers collègues de la majorité, êtes-vous contraints de proposer une nouvelle loi sur les violences – il s'agit cette fois des violences commises en groupe –, loi dont la grande majorité des policiers ou des magistrats mettent déjà en cause l'inefficacité prévisible ?

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Tout simplement parce que vous n'avez pas réglé le problème de la sécurité quotidienne, je veux parler des vols avec violences dans les quartiers populaires.

Si vous souhaitez un débat serein sur cette question, reconnaissez, vous qui dénonciez le moindre fait divers lorsqu'il intervenait sous un gouvernement de gauche, que vous avez laissé s'agréger et s'affermir une délinquance sur laquelle vos méthodes n'ont pas trouvé prise,…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

…et que vous n'avez pas su, malgré des promesses de condamnations toujours plus fortes, mais peu crédibles, réduire le sentiment d'impunité dont peuvent se prévaloir certains délinquants et que, surtout, partage la grande majorité des habitants. De fait, ce texte est un aveu d'impuissance.

La suppression de la police de proximité décidée par Nicolas Sarkozy nous a fait perdre du temps et abandonné du terrain dans nos villes. Si j'ai salué la mise en place, par vous, madame la ministre, en janvier 2008, des trois premières unités territoriales de quartiers, ainsi que le courage des policiers qui en font partie, notamment dans ma commune, nous sommes toutefois encore éloignés de ce que de nombreux professionnels, élus et citoyens réclament : la rupture, une vraie, cette fois, avec les dogmes appliqués par votre majorité depuis sept ans.

Cette vraie rupture exigerait, tout d'abord, non pas qu'on abaisse, comme cela a été annoncé, les effectifs de fonctionnaires, qui sont déjà en nombre insuffisant dans notre département, mais qu'on les augmente au contraire dans les commissariats de secteur,…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

…et qu'on forme parfaitement les nouveaux arrivants à l'action dans les quartiers.

Il faudrait ensuite, en agissant sur le déroulement de leur carrière et en accompagnant leur installation, notamment en matière de logement, inciter les policiers à rester plus longtemps sur un même poste. Cela leur permettrait, grâce à une meilleure connaissance du terrain et des familles dans toute leur diversité, de mener leur action dans une relation de respect mutuel avec les habitants, surtout s'ils pouvaient parallèlement bénéficier des moyens humains et matériels adéquats, de jour comme de nuit, pour intervenir partout.

Il conviendrait également de développer une police de proximité, visible au quotidien, seule capable de restaurer une relation de confiance avec les habitants, tout en renforçant les moyens de la police d'investigation pour lutter contre les filières et le développement du grand banditisme.

La justice, devrait, quant à elle, disposer des moyens lui permettant, à la fois, d'assurer ses fonctions, notamment par des peines adaptées et précoces, et de mettre en oeuvre des mesures d'accompagnement destinées aux primo-délinquants.

Il conviendrait enfin de mettre en place, avec des professionnels de terrain, une vraie politique de prévention qui ne laisse aucun jeune en jachère, sur le bord du chemin.

C'est en mettant en oeuvre ces mesures fortes et utiles que l'État pourra garantir le droit à la tranquillité dans les villes de ma circonscription, Aubervilliers, La Courneuve ou Le Bourget, un droit qui doit être équivalent à celui des banlieues favorisées. Sur tous ces sujets, nous faisons des propositions par voie d'amendements, qui vous permettront de sortir de vos postures inefficaces. J'invite celles et ceux qui contestent, dans cet hémicycle, le bilan que nous faisons des sept années durant lesquelles vous avez eu la responsabilité de la sécurité des Français à venir avec moi dialoguer avec les habitants de ma circonscription.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Je ne désire juger cette proposition de loi qu'à l'aune du seul objectif d'efficacité. Entendons-nous bien : s'il s'agit d'envoyer un message aux délinquants affirmant la volonté des pouvoirs publics, je peux y être favorable, mais à la condition que ce message se prolonge au-delà du générique de fin des journaux télévisés et se traduise dans les faits.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Si ce n'est qu'une loi de circonstance médiatique, nous aurons collectivement reculé sur la question de la sécurité et vous en porterez la responsabilité. Lisant récemment que, selon notre précédent rapporteur, la tragédie d'Ilan Halimi aurait été à coup sûr évitée avec les dispositifs qu'il propose,…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

…je crains que nous ne soyons davantage dans l'affichage que dans la résolution des problèmes.

L'article phare de la proposition de loi – l'article 1er –, qui vise à poursuivre ce que j'appellerai le « délit de dangerosité supposée », s'appuie sur des fondements juridiques instables, qui le rendront difficile à appliquer tant pour les policiers que pour les magistrats. Qu'est-ce qu'un « groupement, même formé de manière temporaire » ? Comment pourra-t-on vérifier que l'individu y aura participé « en connaissance de cause » ? Comment démontrer cette intention devant un magistrat ? Sans vouloir trop extrapoler, quelles assurances avez-vous que ce délit d'intention, que vous mettez en place et que j'ai pu comparer, en privé, au film Minority Report, dans lequel des individus sont poursuivis parce qu'on sait qu'ils seront délinquants, ne connaîtra pas le même sort que la loi sur les halls d'immeubles, qui a finalement renforcé le sentiment d'abandon de nos concitoyens devant un problème dont on les avait assurés qu'il était réglé ?

Si la bande délinquante est déjà structurée, l'ensemble des dispositions relatives à la bande organisée s'appliquent. Si, en revanche, la bande résulte d'un agrégat formé de manière spontanée comme, par exemple, à la Gare du Nord il y a deux ans, les dispositions relatives à l'attroupement sont bien plus efficaces.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Je ne saurais donc être convaincu par votre argument à propos d'un vide juridique : il conviendrait plutôt de recourir à la notion de « coauteur », que nous vous proposons.

Non seulement ce texte risque de n'être qu'une loi d'affichage laissant nos concitoyens seuls face aux difficultés et compliquant inutilement le travail des forces de l'ordre, mais, de plus, il pourrait avoir une application en termes de contrôle social, s'il servait à réprimer des manifestants pacifiques qui auraient été, notamment à la fin des cortèges, voisins de casseurs. Je comprends que vous n'ayez pas l'habitude des manifestations : vous êtes plutôt de l'école du chef qui décide et des collaborateurs qui s'exécutent.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Nous avons encore pu le constater, avant-hier, à Versailles.

C'est la raison pour laquelle je tiens à faire oeuvre de pédagogue en vous expliquant comment se déroulent effectivement les mouvements revendicatifs. Le fait d'être en groupe ne porte pas nécessairement à la violence, y compris dans une manifestation et même s'il ne s'agit pas d'un meeting de l'UMP ! Une lecture de la proposition de loi pourrait conduire à considérer comme potentiellement violents toute une partie de la jeunesse, les salariés en grève pour défendre leur outil de travail, les manifestants qui se mobilisent pour des libertés publiques ou les parents d'élèves rassemblés pour défendre l'école, en les assimilant, tous, à des regroupements potentiellement violents ! C'est, de facto, la dissuasion de tout mouvement social revendicatif et le retour des fameuses « classes laborieuses, classes dangereuses » !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Monsieur Goldberg, nous n'allons pas jouer à nous interpeller entre membres d'un même groupe : c'est pourquoi cette intervention sera décomptée de votre temps de parole. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Je serai brève, monsieur Goldberg, mais je tiens à prolonger votre raisonnement.

Le problème du texte, monsieur Raoult, c'est qu'il s'en prend aux manifestants et non aux casseurs. Il convient en effet de souligner une évolution marquante depuis quelques années : les casseurs ne s'en prennent plus aux vitrines mais aux manifestants. Dois-je rappeler l'inaction et le silence coupables, en mars 2005, du Gouvernement vis-à-vis de tels agissements ? Lorsqu'on veut agir, on sait agir, ce qui avait été le cas après la manifestation, aux Invalides, contre le CPE. Vous pouvez interroger les fonctionnaires de la DOPC de la préfecture de police de Paris sur les dispositifs mis en place : ils vous confirmeront qu'il n'existe aucune difficulté d'ordre juridique pour agir aujourd'hui contre les casseurs dans les manifestations.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

S'il est vrai que les phénomènes de délinquance ont des déterminants sociaux, ceux-ci sont loin de tout expliquer et, surtout, ils ne justifient en rien les actes de certains individus. Ces déterminants doivent être traités en profondeur pour assurer dans la durée un droit à la sécurité partout et pour tous. C'est pourquoi nous ne pensons pas que la répétition d'actions « coup-de-poing » et le vote d'une loi après chaque fait divers soient efficaces.

Madame la ministre, pour combattre l'insécurité, vous nous trouverez toujours à vos côtés. Écoutez nos propositions et ayons un débat de fond sur ces questions : vous verrez sans doute apparaître des solutions que bon nombre d'élus locaux, de tous bords, préconisent depuis longtemps. En revanche, si vous continuez à promouvoir des choix inefficaces, qui peuvent, de plus, se révéler dangereux pour les libertés individuelles et les libertés publiques, nous ne vous suivrons pas. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons compte deux volets. Le second vise à renforcer la protection des acteurs et des lieux de la vie scolaire. Le respect de l'école est indissociable de la République. Toute mesure qui va en ce sens est donc salutaire.

Le premier volet vise à réprimer les bandes violentes. Il n'est pas sans lien avec le second, puisque les agressions contre les écoles peuvent être le fait de bandes et qu'il y a entre les bandes et les attaques menées contre les institutions et les symboles de la République un lien évident, non pas celui d'une délinquance banale mais plutôt celui d'une déviance culturelle. C'est sur ce second sujet que portera mon intervention.

Les bandes de jeunes ont toujours existé. C'est ce que souligne le sociologue Michel Fize : « Le regroupement est un phénomène caractéristique de l'adolescent, c'est chez lui une tendance naturelle et universelle ».

Les bandes sont diverses. Il peut s'agir de groupements informels, spontanés et liés par une même appartenance géographique. Il peut également s'agir, selon le commissaire Yvars, d'un « groupement volontaire d'individus dans une structure dirigée par un chef, avec des règles, un territoire, un nom, un langage, des épreuves initiatiques, un look, des surnoms, un objectif précis ». Entre le groupe spontané et la bande organisée, toute la palette se déploie. La délinquance peut s'y développer en même temps que les liens avec des trafics locaux. Cela n'est pas nouveau.

Ce qui est nouveau, selon Michel Fize, c'est que « les bandes de banlieue sortent de leur aire géographique » ; c'est également « la multiplicité des petits faits : insultes, menaces, bousculades, qui viennent contrarier l'harmonie des rapports sociaux ». On pourrait ajouter : ce qui est nouveau, c'est l'extrême violence et l'utilisation des armes. Il arrive aujourd'hui qu'on tue pour un regard.

Les causes permanentes de l'existence des bandes sont nombreuses : elles résident d'abord dans les difficultés du passage de l'enfance à l'âge adulte où s'entrechoquent les énergies de la puberté et les angoisses de l'intégration sociale. Les pairs des groupes remplacent les pères de famille dans une autosocialisation qui peut se faire en harmonie avec la société si celle-ci en organise les rites, ou contre elle, si l'exclusion, la frustration économique et le vide culturel se sont développés.

La dérive vers la délinquance violente est donc facilitée de nos jours par la disparition ou l'affaiblissement des institutions qui encadraient ce passage : le service national n'existe plus et la famille, au sein de laquelle le père est toujours plus absent, abandonne son rôle éducatif de plus en plus tôt alors que le statut d'adulte s'acquiert de plus en plus tard – 70 % des membres des bandes proviennent de familles dissociées. L'école ne jouit plus du prestige d'autrefois. L'Église est moins présente et des confessions concurrentes interviennent désormais, laissant entre elles de vastes espaces en friche.

La proposition de loi de Christian Estrosi s'attelle donc à un véritable problème. Elle ne peut y répondre de manière totalement satisfaisante, tant celui-ci est vaste et complexe.

Ce texte – Jean-Paul Garraud et Dominique Raimbourg l'ont remarqué tous deux même si c'est de manière divergente –, pose des difficultés d'ordre juridique. La première tient au fait que la proposition de loi se situe à mi-chemin de la loi anti-casseurs et des textes qui visent les bandes organisées et les associations de malfaiteurs. Or, sans vouloir ressusciter la première, elle cherche, contrairement aux seconds, à répondre à la délinquance créée par des groupes souvent sans structure et sans but.

Seconde difficulté : il n'y a dans notre droit ni responsabilité collective ni délit involontaire. Or, nous avons souvent affaire à des groupes dénués de projets mais qui, par la pression qu'ils exercent sur chacun de leurs membres, sont clairement à l'origine de la violence. Il y a une action collective, mais dénuée de véritable conscience anticipatrice – c'est là que réside la grande difficulté.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

Nous nous rejoignons…

On peut aussi s'interroger sur l'efficacité du texte dans la mesure où il ne s'attaque pas à la racine, ce « minuscule de la violence » dont parle Philippe Robert, qui, dans les quartiers, installe la domination d'un groupe sur un territoire d'où il mènera éventuellement des « raids ». J'ai d'ailleurs déposé un amendement concernant le harcèlement social. Il serait bon, à ce sujet, de procéder à un examen minutieux de la mise en oeuvre du texte sur les halls d'immeuble.

On peut enfin noter que ce texte est essentiellement répressif, prévoyant des peines de prison et d'amendes inadaptées en raison de la saturation des prisons et de l'impécuniosité du public visé. Il faut réfléchir à des peines plus efficaces et à un système de prévention qui soit à la hauteur du sujet.

Il convient de développer les travaux d'intérêt général, les centres de défense deuxième chance, que l'on doit au ministre de la défense de 2005, c'est-à-dire au même ministre qui est en ce moment devant moi. Ces dispositifs constituent en effet des réponses a posteriori beaucoup plus pertinentes.

Reste la grande question de la prévention qui n'est pas l'objet de la loi, mais qui demeure essentielle. La réduction de ce problème à des données socio-économiques, voire urbanistiques – n'est-ce pas, monsieur Raoult ? –, est évidemment insuffisante. Une société matérialiste peut être riche et puissante et avoir perdu les instruments institutionnels et humains de la socialisation. Telle est la situation de notre société et tel est le problème auquel nous sommes confrontés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Louise Fort

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, notre pays, État de droit, est engagé dans un combat permanent contre la violence, contre l'arbitraire, contre la loi du plus fort et surtout, le plus souvent, contre celle du plus stupide. La victoire n'est jamais acquise, comme nous le rappelle la tragédie survenue dimanche dernier au Blanc-Mesnil où un jeune homme a été tué.

Médiatisation et contamination aidant, le phénomène ne s'arrête plus aux banlieues. Il s'étend aux quartiers des villes moyennes et touche des individus de plus en plus jeunes.

Ce que nous appelons désormais « délinquance », qui recouvre violence et bafouement des valeurs de solidarité, de fraternité, de liberté, ne cesse d'évoluer et il est important que nous adaptions nos outils à ses différentes expressions et mutations.

Madame le garde des sceaux, vous nous le rappeliez hier soir : Oui, la délinquance a baissé de 15 % depuis 2002 alors qu'elle avait augmenté de 15 % entre 1997 et 2002. Oui, grâce à l'impulsion des ministres de l'intérieur Nicolas Sarkozy et vous-même, les forces de l'ordre interviennent sur l'ensemble du territoire pour en finir avec ce qu'on appelle communément les zones de non-droit. Et cette réalité nécessite que le travail de la police soit soutenu par la loi. Oui, enfin, la situation évolue et la proposition de loi de Christian Estrosi a le mérite d'apporter des réponses efficaces et attendues.

Au cours des six derniers mois de 2008, les forces de l'ordre ont décompté 200 affrontements entre bandes rivales, des bandes qui se nourrissent des profits de la drogue et de trafics divers. Or, grâce au présent texte, il sera désormais possible d'incriminer les membres d'une bande dont il est prouvé qu'ils ont l'intention de commettre des violences ou des dégradations. De même, dissimuler volontairement son visage pour échapper à toute identification et donc à toute poursuite judiciaire deviendra une circonstance aggravante de certains faits de violences ou de dégradations. Ainsi, celui qui agit au sein d'un groupe ne pourra plus s'exonérer de ses propres responsabilités.

En outre, les enregistrements effectués par la police nationale ou par la gendarmerie pourront être versés au dossier et les forces de l'ordre pourront être raccordées sur les systèmes de vidéoprotection mis en place par les bailleurs.

Qu'on ne me parle donc pas de mesures liberticides. La liberté, c'est avoir le courage d'assumer ses actes. Ce texte prévoit des mesures de bon sens. Soyons pragmatiques et attentifs au sort des victimes que nous sommes tous en ces circonstances, sort qui doit rester au coeur de nos préoccupations.

Ce texte répond également à la multiplication des violences commises en milieu scolaire. On ne peut admettre que la violence s'y introduise et mette en péril les enseignants, les personnels et les élèves. L'école, pilier de la vie de nos enfants, doit être un territoire sacré.

Je me réjouis donc que le texte réponde plus finement à la douloureuse question du racket et de la violence que subissent quotidiennement nombre d'enfants qui considèrent alors leur école, collège ou lycée, comme un enfer. Les parents doivent confier en toute sécurité leur enfant à l'école. L'égalité des chances dont on parle tant passe par cette sécurité.

J'évoquerai aussi tous ces enseignants et personnels souvent jeunes et toujours mal armés pour lutter contre la violence. Ils arrivent la peur au ventre, le matin, à la porte de leur établissement.

La première mission de l'État est d'assurer la sécurité des personnes et des biens. Je m'honore donc pour ma part, en tant que membre de la représentation nationale, de soutenir cette proposition de loi. Populiste, liberticide, de circonstance, au dire de certains collègues de gauche ? Sûrement pas : pragmatique et ciblée sûrement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

La tonalité va changer. D'ailleurs, Mme Mazetier ne sourit pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Delphine Batho ainsi que tous les intervenants du groupe SRC ont déjà largement démontré en quoi ce texte inefficace risquait d'affaiblir encore l'autorité de la loi et de la République, en apportant une preuve supplémentaire de l'impuissance de la majorité à régler les problèmes de nos concitoyens.

Le quart de ce texte étant relatif aux établissements scolaires et à leurs personnels, je consacrerai mon intervention à la question des violences scolaires à laquelle cette proposition prétend aussi donner l'illusion d'une réponse.

Je l'ai déjà dit en commission mais vous ne l'avez manifestement pas entendu, il y a deux manières de mépriser les victimes de violences : le déni et l'instrumentalisation. Faire une loi pour répondre à l'agression récente à l'arme blanche d'une enseignante en Haute-Garonne ou à l'intrusion d'une bande violente dans un lycée professionnel de Gagny, c'est généraliser ce qui est arrivé dans ces établissements, c'est noyer dans le sensationnalisme l'extrême gravité des faits dont ces personnels ont été victimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Si vous continuez à camper sur de telles positions, vous resterez encore longtemps dans l'opposition !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Ainsi, s'agissant des violences scolaires, ce texte accomplit la double performance d'être à la fois dans le déni du réel et dans l'exploitation sensationnelle.

Si nous ne sommes pas hostiles à certaines dispositions comme celle destinée à lutter contre l'introduction d'armes dans les établissements,…

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Louise Fort

Alors il est inutile de dénoncer la proposition de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

…l'essentiel des mesures contenues dans le texte ne répondent ni à l'ampleur ni à la nature du problème.

Ce texte est d'abord, son titre lui-même l'indique, dans le déni de la réalité quotidienne des violences scolaires. Vous commettez en effet plusieurs erreurs en prétendant « sanctuariser » les établissements à travers des mesures aggravant les peines encourues en cas d'intrusion.

La première – et peut-être la plus grave – est d'installer l'idée, ou plutôt d'entretenir le mythe d'une violence exogène, extérieure aux établissements, d'une violence qui ne serait qu'un avatar des violences urbaines et qu'on pourrait donc s'en protéger par l'enfermement, par des moyens techniques.

Or si des dispositifs techniques peuvent ponctuellement et localement se révéler utiles, la violence en milieu scolaire relève pour une très faible part d'intrusions : 6 % des cas seulement en France, et même seulement 2,2 % dans les collèges ruraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Seulement 6,5 % des agressions contre les professeurs sont le fait de personnes extérieures à l'établissement. Par surcroît, la moitié de celles-ci sont le fait des parents d'élèves.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Vous passez donc sous silence et négligez près de 95 % des victimes de violences scolaires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Victimes au premier rang desquels on trouve les élèves eux-mêmes, que votre loi ne pense pas une seconde à protéger. J'ai bien écouté l'ensemble des orateurs de l'UMP : à aucun moment ils n'ont évoqué les élèves.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Votre texte occulte donc les violences ordinaires, cumulées, répétitives : les pratiques de harcèlement, les insultes, l'agressivité verbale, qui s'accompagnent aussi de jeux dangereux, de détériorations matérielles, et qui devraient être repérées, évaluées pour être efficacement combattues.

Ces violences mineures qui pourrissent la vie d'un établissement et qui, par leur répétition, créent le climat que l'on sait, viennent à bout des personnels et des élèves les plus motivés. Ces violences insidieuses dont les victimes, adultes mais surtout mineures, sont isolées et fragiles, leurs auteurs en ont parfois été aussi les victimes.

Et dans le lit de cette violence ordinaire, non repérée, non traitée, naît aussi la violence en groupe qui s'exerce entre pairs contre des individus isolés, choisis sur des critères identitaires et parfois d'appartenance ethnique, des groupes construits sur des logiques de territoire. Dans le lit de ces violences ordinaires, tolérées par le système, aussi invraisemblable que cela puisse paraître, de ces violences scolaires, naissent aussi les violences antiscolaires, contre l'institution et ses personnels, ces violences contre l'autorité que vous dénonciez hier soir, madame la ministre.

C'est pourquoi, forts de nos convictions sur la nécessité de prévention et de sanction précoces, nous pensons qu'il faut rester attentifs et traiter ces violences ordinaires, répétitives, qui touchent globalement 11 % des élèves – c'est énorme – et 16 % des élèves scolarisés dans les établissements situés en zones d'éducation prioritaire.

Occulter cette réalité est grave et coûteux. C'est une faute morale à l'égard des victimes. C'est une erreur, car le coût de cette négligence est important pour les personnes concernées comme pour la collectivité. Or, toutes les études le montrent, il existe une forte corrélation entre le harcèlement entre élèves et le décrochage scolaire, l'absentéisme, voire les tentatives de suicide.

Détourner le regard après avoir haussé le menton pour dénoncer les armes par destination, c'est laisser le champ libre au mécanisme oppressif du harcèlement, de la pression psychologique, de la loi du plus fort. C'est renvoyer chacun à sa solitude, au repli sur soi, confiner chacun dans sa classe – « entre les murs » comme dirait François Bégaudeau. Car la loi du silence et l'abandon de l'espace public vont de pair avec la loi du plus fort. C'est aussi vrai à l'intérieur des établissements scolaires qu'à l'extérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Pour citer Éric Debarbieux, directeur de l'Observatoire international de la violence à l'école, auteur d'un formidable ouvrage intitulé Les dix commandements contre la violence à l'école, livre dont je vous conseille vivement la lecture, « la loi du plus fort n'a pas obligatoirement besoin pour s'imposer de la fiesta sanglante et chaotique qui marque l'opinion. Une pression continue, une répétition tyrannique lui sont au moins aussi efficaces ».

À ces violences, il n'y a ni cause unique ni solutions miracles, il y a un panel d'outils et une approche radicalement différente que nous vous proposons pour mettre fin à une spirale qui n'en finit plus de se dérouler et que vous échouez manifestement à enrayer.

Songez que l'on a adopté près d'un plan ou train de mesures par an, depuis dix ans, contre les violences scolaires et mis en place déjà deux systèmes de recensement quantitatif, SIGNA puis CIVIS – et rien ne change.

C'est pourquoi nous avançons plusieurs propositions pour lutter aussi dans l'enceinte des établissements scolaires contre la loi du plus fort, pour donner la parole aux victimes et reconquérir cet espace public. Cela implique une présence humaine, une incarnation, la cohésion des équipes,…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

…des échanges, des personnes responsables, identifiées, un groupe qui fait corps au sein et en dehors de l'établissement, à l'échelle de la vie, à l'échelle où les violences peuvent se produire et où l'on peut les prévenir.

Nos propositions prennent ainsi en compte la réalité, la nécessité de la continuité de présence et d'échanges entre tous ceux qui sont amenés à faire face aux violences, à les prévenir et à les sanctionner. C'est ce à quoi vous a invités François Pupponi en relatant le travail mené à Sarcelles avec Dominique Strauss-Kahn. Manuel Valls aurait pu tenir des propos similaires au sujet d'Évry

Nos propositions visent à évaluer ce qui a déjà été mis en place et à mesurer le climat des établissements sensibles et des violences ordinaires, à donner aux acteurs concernés les moyens d'une coopération efficace.

Quand on prétend « sanctuariser » les établissements scolaires, on commence par y rétablir la présence d'adultes. Or, depuis 2002, 20 000 surveillants ont disparu de ces établissements, soit entre quatre et cinq par établissement, ces adultes dont la présence est la base de la prévention des violences. Et le ministre sortant vient encore d'annoncer 16 000 suppressions de postes pour la rentrée 2010 dans l'éducation nationale !

Nous avons déposé des amendements pour la création d'un corps de surveillants et la présence en nombre suffisant des conseillers principaux d'éducation, parce que sans eux, il est impossible de s'attaquer correctement au décrochage scolaire, à l'absentéisme. Parce que sans personnel dédié, la communauté éducative a le plus grand mal à participer de manière efficace et pérenne aux conseils locaux ou intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

Nos propositions visent à mettre fin à la fragmentation des actions , à la multiplicité des intervenants, au fait qu'ils ne se connaissent pas toujours directement et que le mineur concerné est parfois la seule personne à connaître l'ensemble de la chaîne censée l'accompagner, le protéger ou le rappeler à la loi.

Votre solitude, madame la ministre, aujourd'hui, au banc du Gouvernement,…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Quelle solitude ? Nous sommes là, avec elle !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

…incarne cette vieille manière de traiter le problème dont nous parlons.

Nos propositions sont pragmatiques et déterminées. Elles reposent sur les convictions suivantes : il n'y a pas plus de déterminisme social ou local qu'il n'y a de fatalité à la méfiance réciproque entre justice, police, éducation nationale, parents, élus, éducateurs et responsables locaux. Il y a au contraire des expériences, en France comme ailleurs – et Delphine Batho a évoqué hier ce qui se faisait au Québec –, des expériences de processus réussi, de dispositif efficace, dont on devrait s'inspirer avant que de légiférer ou de réglementer. C'est en tout cas comme cela que nous avons construit nos amendements : en écoutant les acteurs de terrain, en apportant des réponses concrètes et utiles.

Chacun appelle à la coopération inter-institutionnelle, mais elle nécessite des moyens et ne doit certainement pas oublier la participation des habitants eux-mêmes, des acteurs de l'environnement des établissements, au lieu de théoriser sans cesse la sanctuarisation, la fermeture, le repli qui ne fait que diviser, séparer, opposer des univers qui, d'ailleurs, adorent se détester entre eux et que le présent et l'avenir de nos enfants devraient au contraire rassembler.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Nous présentons des amendements très concrets pour qu'un élève ne soit plus jamais « dans la nature » parce qu'exclu d'un établissement ; pour que les victimes – toutes les victimes – des violences scolaires soient écoutées et entendues ; pour que des responsables, identifiés, suivent les élèves et adolescents en rupture ; pour que la communauté scolaire soit associée – c'est bien le moins – à la définition des moyens nécessaires à la lutte contre les violences dont elle est victime ; pour que les collectivités qui le souhaitent puissent accueillir en stage citoyen des adolescents en rupture – qui est contre, dans cet hémicycle ? – ; pour que, à l'échelle locale ou intercommunale, tous les acteurs puissent oeuvrer ensemble à la lutte contre ces violences. Qui est contre ?

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je l'ai dit !

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Dans ce cas, que la majorité vote nos amendements !

Nous déposons aussi des amendements très principiels, pour que la parole de la République se traduise en acte ; pour que les internats de réussite éducative prévus par la loi de cohésion sociale de 2005 voient enfin le jour dans la proximité, à une échelle pertinente ; pour que l'État assure la sécurité des élèves et des personnels aux abords des établissements, ce que la suppression de 8 000 postes de policiers va rendre quasiment impossible.

« Je crois que la prévention est particulièrement nécessaire en matière de violence scolaire. Et je crois aussi que la réponse à la violence ne peut être uniforme. C'est donc sans doute un peu plus compliqué encore que la lutte contre la délinquance en général, et c'est une raison de plus pour ne pas attendre. » Qui a dit cela ? Le candidat Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, le 3 février 2006.

« Quand on perd la trace des enfants en difficulté qui se trouvent de facto exclus du système scolaire avant d'avoir achevé leur scolarité obligatoire parce que l'on n'a pas de structures adaptées pour eux, on ne fait pas des économies. On prépare une augmentation considérable des dépenses futures parce que l'on paiera très cher le coût de cette désocialisation. » Qui a dit cela ? Le président Sarkozy, avant-hier, à Versailles.

Eh bien, n'attendez plus pour répondre à ces vibrants appels : votez nos amendements !

Or, vous les avez refusés, alors qu'ils s'attachent, précisément, à répondre aux demandes que nous adressent depuis longtemps les élus et acteurs locaux, la communauté éducative dans son ensemble.

En revanche, sous couvert de lutter contre les intrusions, vous créez un délit punissant d'un an à trois ans d'emprisonnement et de 7 500 à 45 000 euros d'amende le fait d'occuper un établissement scolaire. Or qui occupe les établissements scolaires ? Les bandes violentes ? Les racailles ? Les caïds et trafiquants ? Les tortionnaires et assassins d'Ilan Halimi ? Naturellement non, et vous le savez. Ce sont ceux qui se battent pour l'école et le droit à l'éducation,…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

…contre les fermetures de classe, pour les dotations horaires. Ce sont ceux qui s'investissent dans l'école, au lieu de la déserter comme vous le faites. Et ce sont eux que vous vous apprêtez à dissuader et à lourdement punir.

Je demande d'ailleurs que le nouveau ministre de l'éducation nationale se prononce immédiatement sur l'article 7, qui pénalise la nuit des écoles, les mobilisations de parents d'élèves, d'élèves ou d'enseignants.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Il est temps, mes chers collègues, de méditer la traduction contemporaine d'une phrase qui nous vient d'un siècle où l'on croyait encore au progrès, à la force des idées, à la force de la République. Je veux parler de cette phrase de Victor Hugo qui disait : « Celui qui ouvre une porte d'école ferme une prison ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Il est temps que vous assumiez vos échecs, vos erreurs, et que vous saisissiez l'occasion de les corriger en adoptant une nouvelle approche, décloisonnée, concrète, celle que nous vous proposons. En un mot, il est temps que vous preniez vos responsabilités.

En articulant nos propositions contre les zones de non-droit et pour la police des quartiers, contre l'impunité et pour la sanction précoce, contre les violences juvéniles et pour la prévention précoce, contre la loi du silence et pour de nouvelles protections pour les victimes, nous militons pour l'espoir et nous prenons date devant les Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Bouchet

Vous n'êtes pas seule, madame la garde des sceaux. Toute la majorité est avec vous, et même certainement au-delà, sachez-le !

« Faute de présence publique forte, ce quartier est, au fil du temps, devenu l'espace réservé d'une poignée de délinquants qui fait régner la loi du silence. Ce sentiment d'impunité les encourage également à venir en centre ville pour faire la démonstration de cette impunité – attroupements, provocations, vols, … – »

Cet extrait ne concerne pas une banlieue de Paris. Il est tiré du rapport du groupement local de traitement de la délinquance – par la voix du vice-procureur – d'une ville moyenne, voire d'une petite ville, Cavaillon, 26 000 habitants, dont je suis également le maire.

Si les médias rapportent principalement les faits divers qui surviennent dans les grandes villes, les problèmes n'en sont pas moins présents dans les petites villes ou les villages.

Ainsi, mes chers collègues, et je m'adresse ici plus particulièrement à ceux d'entre vous qui exercent également un mandat local, vous qui êtes tout au long de l'année au contact de nos administrés, vous savez que s'il y a un sujet auquel les habitants des villes et des villages sont particulièrement sensibles, c'est bien celui de la sécurité. La sécurité au quotidien, cette sécurité que l'État, les forces de l'ordre, la justice et les communes s'efforcent d'assurer jour et nuit pour protéger nos concitoyens de la délinquance, des violences et des incivilités, qui empoisonnent souvent le quotidien.

La sécurité n'est-elle pas la première des libertés ? Sans elle, il n'est point de liberté d'aller et de venir en toute sérénité, il n'est point non plus de liberté d'entreprendre ou de s'exprimer en toute quiétude. C'est un droit fondamental pour chacun d'entre nous. C'est un devoir pour les responsables politiques que nous sommes. C'est une responsabilité partagée à laquelle chacun d'entre nous, en tant que citoyen, doit contribuer. Au nom de ce droit, de ce devoir, de cette responsabilité, l'État a fait de la sécurité l'une de ses priorités, sinon la première.

Depuis quelques années maintenant, cette priorité a été sans cesse réaffirmée, renforcée et ancrée dans la durée, échappant à tout effet d'annonce, se traduisant au contraire par une mobilisation sans précédent de personnels toujours mieux formés, de moyens matériels et techniques toujours plus performants, et par un engagement constant aux côtés des communes.

Le texte qui nous est présenté aujourd'hui, n'en déplaise à certains, n'est pas opportuniste. Il est simplement dans la continuité de l'action de l'État. Il symbolise l'engagement et l'adaptation d'un État qui donne les moyens à la société de se protéger, ou plutôt qui protège ses citoyens.

À ceux qui diront : « encore une loi autoritaire et répressive ! », je répondrai que nous devons légiférer sans cesse, car la délinquance évolue en permanence. Nous devons nous adapter. Je répondrai aussi que la prévention atteint aujourd'hui ses limites. Et nombreux sont celles et ceux qui abusent de la faiblesse et de l'impuissance de notre système. Pour ceux-là, l'État doit faire preuve d'encore plus de fermeté.

Chaque jour, les maires sont en relation avec les services de l'État en ce qui concerne les problèmes liés à la sécurité, ou plutôt à l'insécurité.

Chaque jour, nous pouvons mesurer la force de ce partenariat.

Chaque jour, les maires sont sur le terrain. Ils mesurent l'évolution, l'adaptation de cette délinquance et souffrent de l'impuissance ponctuelle de l'État quand les moyens ne sont pas au niveau !

Ce texte sera un outil supplémentaire permettant d'affirmer aux citoyens, aux mères de familles ayant peur de sortir seules, que l'État est solidaire et refuse de se laisser « marcher sur les pieds ».

Alors, oui à une loi permettant d'être ferme avec les voyous et les délinquants et juste pour les victimes et les honnêtes citoyens. C'est pourquoi, c'est sans état d'âme que je voterai ce texte, qui sera suivi – c'est indispensable – de décrets d'application immédiats. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Madame Batho, je voudrais d'abord vous poser une question. Connaissez-vous le rapport d'information n° 2832 sur la violence des jeunes en banlieue ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Il date, je crois, de 1992. Ce rapport était lucide et prémonitoire. Son auteur n'était ni Christian Estrosi ni Éric Ciotti, mais notre collègue Julien Dray, député de l'Essonne, qui a toujours suivi les débats sur la sécurité et qui nous manque aujourd'hui. Il suscita en son temps une vive polémique – vous devez vous en souvenir – auprès de son propre parti, qui lui demanda, à l'époque, de ne pas le rendre public pendant près d'un an.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Regardez vos fiches, et interrogez les premiers secrétaires de l'époque !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Oui, les bandes existent, comme les intrusions dans les écoles. Le phénomène des bandes n'est pas nouveau. Depuis plusieurs années, nous sommes nombreux à avoir alerté les différents ministres de l'intérieur, de droite comme de gauche, par questions écrites, orales et visites de terrain, sur l'émergence de ce phénomène.

Le constat des réponses des différents ministres a prouvé que le problème existait, et que la police et la justice n'avaient pas toujours les outils juridiques suffisants pour endiguer ce phénomène. On a cité beaucoup de commissaires, de magistrats. L'un d'entre eux m'avait dit : « Vous savez, monsieur le ministre, ils sont avec leur casquette retournée quand ils mettent le feu à une voiture, mais quand ils arrivent devant le tribunal, ils sont en costume cravate. »

Madame la ministre, vous connaissez bien ce dossier, vous l'avez abordé à plusieurs reprises en Seine-Saint-Denis, en étant l'un des ministres de l'intérieur qui aura été le plus présent dans ce département.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Et l'on ne compte pas le nombre de maires du parti socialiste ou du parti communiste qui souhaitaient se faire prendre en photo à vos côtés.

C'est aussi tout à l'honneur du Président de la République d'en avoir pris la mesure en venant sur place, à Gagny, le 18 mars dernier.

Monsieur le rapporteur, vous avez pris le relais de Christian Estrosi. Vous avez eu peu de temps pour ce faire, mais vous connaissez bien ce dossier. Vous répondez concrètement à ces phénomènes qui nous interpellent et pour lesquels le manque de solutions contribue au sentiment d'impunité de ces groupes de jeunes violents.

Son prénom a été cité plusieurs fois dans cet hémicycle : Mehdi. Un de ses copains du Blanc-Mesnil l'avait regardé. Trois coups de feu pour un simple regard ! Un jeune du 212 a été tué par – vraisemblablement – un jeune des Tilleuls. Oui, quand on nie le problème, chers collègues socialistes, on obtient toujours le drame à la fin. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Garraud

C'est la vérité qui blesse ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Que ce soit scandaleux ou pas, je ne pratique pas la politique du double langage, dans le XXe arrondissement et dans l'hémicycle ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Avec Patrice Calméjane et Gérard Gaudron, dans nos circonscriptions de banlieue, notamment en Seine-Saint-Denis, nous sommes, monsieur le rapporteur, très intéressés par le principe de sécurité durable que vous avez développé ; car ces phénomènes, nous les abordons non pas comme le fait un sociologue national, mais comme le fait un élu local, praticien au niveau de sa commune.

En effet, très franchement, sur de tels problèmes nous devrions être solidaires. Je comprends votre gêne…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

…car quand vous reviendrez dans vos circonscriptions, il faudra expliquer ce que vous avez dit ici.

D'ailleurs, nous sommes tous solidaires quand le maire adjoint socialiste de Noisy-le-Sec se fait fracturer la mâchoire, dimanche soir, par une bande de jeunes violents, lors de la fête de la musique de sa commune.

Dans un grand quotidien du matin, la maire socialiste de Noisy-Ie-Sec s'est dite « peinée ».

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Mais, devons-nous, nous aussi, être seulement peinés, ou devons-nous prendre la mesure du problème par une véritable mobilisation ?

Il y a quelques jours, nous avions proposé une concertation à nos collègues de gauche de Seine-Saint-Denis – comme le proposait d'ailleurs, dans le journal Le Parisien, le président du conseil général. Nous avions repris la déclaration de Manuel Valls : c'est un problème que nous connaissons tous, nous pourrions tous nous retrouver pour voter ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Cette proposition est malheureusement restée sans réponse. Le président du conseil général de Seine-Saint-Denis n'est d'ailleurs plus dans l'hémicycle, alors même que ce département est l'un de ceux qui sont le plus touchés par ces violences.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Monsieur Raoult, je ne vous ai pas vu souvent aux réunions de la commission des lois !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Mon collègue Daniel Goldberg m'a invité à venir à La Courneuve. Je lui dis chiche ! Prenons nos calepins à la fin de la séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Mais je suis aussi tenté de l'inviter à Aulnay, à Villepinte et à Noisy-le-Sec.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

À Aulnay-sous-Bois, mon collègue Gérard Gaudron, stupéfait, a entendu le maire socialiste, qui bloque les crédits de la vidéosurveillance et qui risque de supprimer des postes dans la police municipale, expliquer au ministre de l'intérieur et au Premier ministre ce qu'il avait fait pour lutter contre l'insécurité à Aulnay-sous-Bois.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

À Noisy-le-Sec, le maire supprime les crédits de la vidéosurveillance.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Chers collègues, je vous le dis en toute convivialité : en vous entendant, je serais tenté de penser que vous réagissez devant les bandes comme Guy Mollet devait réagir devant les blousons noirs. Sur l'insécurité, sur les bandes, vous en êtes restés à West Side Story ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Vous conviendrez, monsieur le président, que j'ai été interrompu plus d'une fois ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Il faut être particulièrement vigilant. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Mais quand on dit des vérités, cela vous gêne !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Parce qu'une bande violente est non pas un groupe de potes, mais l'apparition d'un réseau mafieux ; parce qu'une manifestation n'est pas une émeute, et que l'autorisation de manifester librement n'est pas le droit de tout casser et de tout saccager ; parce que la violence dans l'école est un phénomène qui peut faire basculer une société, il est indispensable d'adopter cette proposition de loi pour nos quartiers et nos banlieues.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Elle mériterait d'ailleurs de l'être à l'unanimité. Chers collègues socialistes, si vous voulez un jour gagner les élections, votez cette proposition de loi, ou vous resterez dans l'opposition dans les années qui viennent,…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

… car si Lionel Jospin disait avoir été naïf sur l'insécurité, nous, nous ne voulons pas l'être ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme George Pau-Langevin, dernière oratrice inscrite.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Cette loi pose une nouvelle fois une question qui préoccupe nos concitoyens – et qui nous préoccupe en tant qu'élus. Pour répondre à Éric Raoult, je dirai même que j'ai moi aussi, comme professionnelle du droit, accompagné des mères qui venaient de perdre leur enfant dans un affrontement entre bandes. J'ai aussi accompagné des mères qui venaient d'apprendre que, dans un affrontement entre bandes, leur fils était devenu criminel et allait passer de longues années en prison. Je sais donc ce que c'est. Nous savons que ces sujets sont dramatiques, et ce que nous voulons, en en discutant, c'est aller au fond des choses et proposer de vraies solutions, au lieu de le faire pour gagner les élections – comme vous nous y incitez si souvent, mon cher collègue. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce qui nous intéresse, c'est d'aller au fond des choses et de régler les problèmes des gens !

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Les bandes violentes menacent, effectivement, la sécurité. Mais lorsque vous en parlez aujourd'hui, on a l'impression que vous ne tenez pas à régler la question : vous pensez uniquement à exploiter les problèmes ; vous suscitez de faux espoirs, qui risquent malheureusement d'être déçus.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Je pense que, dans cet affrontement avec la gauche, vous ne tenez pas compte de la réalité et que vous proposez des solutions qui n'ont aucune chance d'aboutir !

Toutes les organisations syndicales de magistrats que nous avons entendues se sont montrées particulièrement sceptiques devant vos propositions, et devant les définitions juridiques que vous donnez. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) En l'espèce, on voit bien que vous utilisez ce qui est une vraie préoccupation des gens de façon purement politique !

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Mais qu'est-ce qui préoccupe les gens ? En regardant votre texte, on a l'impression que vous essayez d'abord de régler des questions de manifestations, alors que, dans nos quartiers populaires, ce qui préoccupe les gens au quotidien, ce sont non pas les bandes que vous décrivez, mais des rassemblements de jeunes au pied des immeubles, qui sont désoeuvrés et se livrent à diverses incivilités. Ils s'affrontent d'ailleurs souvent entre eux ; et les jeunes qui font partie de ces bandes sont à la fois auteurs et victimes de ces violences.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

C'est à ce vrai sujet, je crois, que vous devriez vous attaquer.

Vous nous proposez des solutions qui, si le sujet n'était pas si grave, seraient simplement risibles. Vous nous parlez de cagoules alors que n'importe qui, en se promenant dans les quartiers le soir, voit que les jeunes ont non pas des cagoules, mais des capuches !

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Lorsque vous proposez de supprimer les cagoules lors des manifestations, pensez-vous aussi supprimer les capuches ? Je vous signale que tous ces jeunes ont des tee-shirts à capuches. Allez-vous interdire la vente de ces vêtements ? (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Allez-vous leur interdire, un jour, de porter les vêtements qu'ils portent habituellement ? Cette loi est ridicule.

Vous nous parlez des mineurs. Mais nous attendons depuis plusieurs mois la réforme de l'ordonnance de 1945 ! Mme Dati avait lancé une réflexion sur ce sujet, mais le sujet semble enterré ! On nous a pourtant beaucoup parlé du rapport Varinard. Celui-ci rappelait quelque chose de très important : la primauté de l'éducatif. La France, disait-il, n'est pas assez riche d'enfants pour avoir le droit de négliger tout ce qui peut faire de ces enfants des êtres sains. Il y a là un vrai sujet.

Pour les jeunes majeurs, on voit bien que les dispositifs sociaux ne sont plus financés par l'État. Le contrat parisien de sécurité embrasse de nombreuses problématiques – échec scolaire, drogue, alcool. La hargne des jeunes monte, car ils sont dans la rue sans solution : ils sont déscolarisés, ne trouvent pas de stages, et lorsqu'ils ont été formés, ils ne trouvent pas non plus d'emploi…

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

…parce qu'ils rencontrent des problèmes de discrimination.

Voilà, je crois, les problèmes que vous devez régler ! Mais vous supprimez au contraire les crédits de la politique de la ville, vous diminuez les crédits des organisations qui soutiennent la parentalité.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Vous ne vous occupez pas de créer des internats. Lorsque le Président de la République a parlé d'internats, j'ai pensé qu'il allait parler de choses qui concernent nos jeunes ; mais il n'a parlé que d'internats d'excellence. Aujourd'hui, quand vous vous attaquez à ces sujets, vous ne parlez pas des vrais problèmes !

Dans le 20e arrondissement, on a construit un commissariat formidable, mais en même temps plusieurs antennes de quartier qui se trouvaient justement dans les quartiers difficiles ont été fermées.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Le maire, monsieur Raoult, ne recrute pas les policiers ! Nous sommes obligés d'avoir, à la Direction de la prévention et de la protection de la Ville de Paris, des coordinateurs de rue qui font ce que ne fait plus la police.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Que fait le maire ? Le congrès socialiste, c'est bien, mais la ville, c'est mieux !

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Monsieur Raoult, ce n'est pas en hurlant que vous réglerez les problèmes !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Madame Pau-Laugevin, ce n'est pas un débat entre vous et M. Raoult ! Il est temps de conclure !

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Vous réglerez les problèmes en donnant aux quartiers les moyens, les policiers, les centres sociaux qui permettent d'appréhender les problèmes. Nous aurons ainsi la possibilité de répondre aux jeunes qui ne trouvent pas d'emploi, qui ne trouvent pas de stage.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Raoult

Quand Chirac était maire de Paris, ça allait mieux ! (Rires sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

À lui seul, il fait autant de bruit qu'une bande !

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Monsieur Raoult, il est bien trop facile de hurler ; votre comportement montre que vous ne cherchez pas des moyens efficaces de lutter contre la délinquance et de répondre aux préoccupations des gens !

Ce n'est pas en légiférant sur les cagoules que nous répondrons à un problème autrement plus sérieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

À l'issue de la discussion générale, je voudrais vous donner mon sentiment et quelques indications, peut-être, sur le déroulement de la suite des débats.

Cette première partie a été – malgré les traditionnelles exagérations, voire les polémiques, qui sont la règle du jeu de l'hémicycle – extrêmement intéressante par l'analyse des phénomènes qui a été faite. Ces phénomènes, nous y sommes tous confrontés, et nous avons la responsabilité de leur apporter des solutions.

Qu'une loi soit nécessaire, c'est une réalité et une évidence saluée par les orateurs de la majorité : MM. Herbillon, Goujon, Door, Guibal, Perruchot, Garraud, Aeschlimann, Calméjane, Gaudron, Mme Fort, MM. Bouchet et Raoult. Nous constatons actuellement une lacune juridique : il y a donc un besoin. Je l'ai expliqué dans mon introduction générale : les textes actuels ne nous permettent pas de répondre à tous les cas de figure.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Le but de cette loi n'est évidemment pas de régler tous les problèmes de délinquance. D'ailleurs je vous l'ai dit aussi en introduction, comme je le dis depuis des années : résoudre les problèmes de violence ou de délinquance relève d'une chaîne de la sécurité.

Un texte seul ne réglera pas le problème ; mais la police seule ou la justice seule ne le régleront pas plus. Certains d'entre vous l'ont dit : c'est l'ensemble de ceux qui participent à cette chaîne de la sécurité – maires, éducateurs de l'éducation nationale, associations – qui pourront répondre à ces problèmes. Chacun séparément ne peut rien !

Il est donc indispensable que les uns et les autres se parlent. C'est d'ailleurs le sens des conférences de cohésion que j'avais créées – les premières l'ont été en Seine-Saint-Denis : elles permettent à tous les acteurs de réfléchir ensemble pour trouver des solutions. C'est cela, la réalité.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Ce qu'il nous faut faire aujourd'hui, c'est, à l'écoute de tous, traiter ces réalités qui sont à la fois exaspérantes – notamment pour ceux qui vivent dans les quartiers les plus défavorisés – et dangereuses : vous avez les uns et les autres porté témoignage de cas où il y a eu des décès, notamment de jeunes.

Ce que nous voulons faire, c'est répondre à un besoin, sans bien sûr mettre en cause, comme je l'ai entendu, la liberté de manifester : je répète depuis des années que je suis aussi responsable de l'exercice de cette liberté. Les forces de police y participent d'ailleurs pour permettre à chacun d'exprimer ses idées en toute sécurité – sécurité mise en cause, dans certains cas, par des groupes infiltrés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Les syndicats eux-mêmes nous demandent, lors des grandes manifestations sociales, de prendre en compte ces problèmes, et nous y aident parfois, en expulsant du centre de la manifestation des groupes violents.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je l'ai constaté à de nombreuses reprises au cours de ces deux dernières années.

D'un autre côté, nous voulons aussi, je l'ai dit dans mon propos introductif, que l'école soit un lieu où les élèves et les enseignants soient en sécurité. Je suis d'accord avec vous, madame Mazetier, la violence exogène n'est pas la seule au sein de l'école. Mais justement, le texte prévoit aussi de trouver des solutions pour tenter de dissuader, par la menace de sanctions, la violence qui peut s'exprimer à l'intérieur de l'école et de la part des élèves, y compris avec les armes par destination.

Bien sûr, ce texte est un nouveau texte, qui vient après d'autres, certains d'entre vous l'ont dit. Beaucoup de mesures ont en effet déjà été prises, notamment pour lutter contre les trafics de stupéfiants, monsieur Perruchot. Ainsi, la relance des groupes d'intervention régionaux à laquelle j'ai procédé a permis non seulement d'arrêter des dealers et de récupérer de la drogue en quantité, mais également de démanteler, depuis le début de l'année, des réseaux entiers. Plus d'une quarantaine de réseaux, composés de quinze personnes minimum à cinquante personnes maximum, ont été arrêtés. Cela explique sans doute d'ailleurs une partie de la violence de certaines bandes dont l'activité est étroitement liée à la drogue. Nous les dérangeons.

De la même façon, des mesures ont déjà été décidées dans le cadre de la LOPSI que vous aurez à examiner prochainement. Elles doivent permettre de faciliter la confiscation et le retour des véhicules des trafiquants vers les policiers pour que, dans les quartiers, les petits caïds voient des policiers passer dans la voiture avec laquelle ils se pavanaient quelque temps avant. Nous le savons, dans ces cas-là, la psychologie compte énormément. Il est bon que les caïds soient dévalorisés aux yeux des jeunes qui tournent autour d'eux. C'est le genre d'opérations que nous devons mener.

Ensuite, certains d'entre vous ont salué, je les en remercie, la création des unités territoriales de quartiers. Je souhaiterais en effet que les UTEC se multiplient et mettent en place plus rapidement, mais je vous rappelle qu'elles se font sur la base d'un recrutement volontaire et qu'elles exigent une formation relativement longue compte tenu des conditions dans lesquelles ces policiers travaillent. Ces policiers, monsieur Goldberg, sont fidélisés grâce à la création, à mon initiative, d'un concours de recrutement spécifique notamment en Île-de-France, et aux mesures qui sont prises pour aider au logement des policiers, pour accélérer les carrières et distribuer des primes supplémentaires.

Toutes ces mesures que vous réclamez, elles existent donc et, pour la plupart d'entre elles, sont déjà mises en place depuis dix-huit mois.

De la même façon, monsieur Bartolone, il faut des peines qui responsabilisent, j'en suis d'accord, mais, là aussi, il faut regarder la réalité. Et la réalité, ce sont les travaux d'intérêt général qui sont prononcés notamment à l'égard de certains jeunes. Ces travaux d'intérêt général sont même en nette augmentation puisque, entre 2005 et 2007 simplement, ils ont augmenté de 22 %. Des sanctions éducatives sont également prévues.

Bien entendu, monsieur Braouezec, cela ne réglera pas l'ensemble des problèmes sociaux, mais je note que la violence et l'insécurité contribuent à aggraver ces derniers. Certains sujets relèvent d'autres ministères que celui-ci, et d'autres politiques que celle-ci, mais ce qui est certain, c'est que nous devons lutter contre la violence parce que les premières victimes sont d'abord ceux qui connaissent les situations les plus fragiles et qui subissent doublement la violence, non seulement dans leur quartier, mais également à l'extérieur quand ils recherchent une activité professionnelle car le fait de venir d'un quartier est stigmatisé.

C'est la raison pour laquelle il est indispensable que nous travaillions ensemble. Je vous ai entendus, les uns et les autres, dire que vous vouliez avoir une attitude constructive. Eh bien, je souhaite que cette attitude constructive se concrétise ce soir, à l'occasion de l'examen des articles et des amendements. En ce qui me concerne, je suis prête à regarder les amendements.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Toutefois, je note que certains, qu'ils viennent de la majorité ou de l'opposition, ne relèvent pas de la loi ou de cette loi – je pense à certains qui proposent des mesures concrètes.

En revanche, d'autres propositions s'inscrivent dans la logique d'un texte tel que celui-ci. Ainsi, MM. Fabius, Goujon, Bartelone ou Calméjane ont proposé des choses qui méritent d'être examinées. Je souhaiterais, après cette discussion générale où tout le monde a pu exprimer sa passion et son analyse, que nous essayions d'aboutir à un texte qui soit à la fois efficace et consensuel, et peut-être encore plus efficace parce que consensuel. Ce serait un signal très fort qui serait ainsi donné par l'ensemble de la représentation nationale aux délinquants et à ceux qui pourraient avoir la tentation d'aller vers ces bandes. Nous pourrions ainsi mettre au point un texte qui réponde aux besoins dans un esprit non pas de système, mais de pragmatisme. C'est en tout cas ce que je vous propose de faire durant la séance de ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La discussion générale est close.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion de la proposition de loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d'une mission de service public.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma