La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif au Grand Paris (nos 1961, 2068, 2013, 2008).
La Conférence des présidents a décidé d'appliquer à cette discussion la procédure du temps législatif programmé sur la base d'un temps attribué aux groupes de 25 heures.
Chacun des groupes dispose du temps de parole suivant : Pour le groupe UMP, 7 heures 05 ; pour le groupe SRC, 9 heures 50 ; pour le groupe GDR, 4 heures 45 ; pour le groupe du Nouveau centre 3 heures 20. Les députés non inscrits disposent de 40 minutes.
En conséquence, chacune des interventions des députés, en dehors de celles du rapporteur et du président de la commission saisie au fond, sera décomptée du temps du groupe de l'orateur.
Les temps qui figurent sur la feuille jaune ne sont en tout état de cause qu'indicatifs.
Fondé, monsieur le président, sur l'article 58, alinéa premier.
Nous avons découvert cet après-midi, par une dépêche de l'AFP, que vous-même et le président du groupe UMP, Jean-François Copé, avez demandé aujourd'hui même que le Gouvernement lève l'urgence sur l'examen du projet de loi relatif au Grand Paris. Les parlementaires de l'opposition, et sans doute toute l'Assemblée, souhaitent avoir des éclaircissements. Vous avez, monsieur le président, d'une certaine manière répondu à l'annonce de l'urgence faite par le Gouvernement. Je souhaite donc interroger le secrétaire d'État pour savoir, avant même d'entamer l'examen du projet de loi, quel va être le calendrier, si l'urgence est déclarée ou non sur ce texte, et si c'est le cas, pourquoi l'urgence est ainsi déclarée au dernier moment. Elle ne l'était pas lorsque nous avons entendu le ministre, débattu et examiné les nombreux amendements en commission.
Tout à l'heure, lors de la réunion de la commission du développement durable pour examiner les amendements, j'ai interrogé son président, Christian Jacob. Il m'a donné son point de vue. Je souhaite maintenant interroger le Gouvernement.
Je m'apprêtais à donner la parole à M. le secrétaire d'État au moment où vous l'avez demandée pour ce rappel au règlement, qui entre tout à fait dans le cadre de nos débats. Je pense que M. le secrétaire d'État aura plaisir à répondre à cette question importante, sur laquelle j'ai moi-même adressé une lettre à M. le Premier ministre.
La parole est à M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, il est exact que le Premier ministre a demandé que la procédure accélérée soit appliquée à l'examen de ce projet de loi.
Quant au fond, je crois savoir que la demande a été formulée par le Sénat.
Je parle du fond. Le Sénat, semble-t-il pour un problème de calendrier au premier semestre, aura des difficultés à organiser un, voire deux débats. Etant donné l'importance attachée par le Gouvernement à ce projet de loi et la nécessité de pouvoir lancer un certain nombre de procédures et en particulier la consultation du débat public dans les délais les meilleurs, cette procédure a été demandée. Voilà ce que je peux vous dire à ce sujet.
Monsieur le secrétaire d'État, nous ne pouvons accepter que l'une des deux assemblées dicte sa loi au Gouvernement sur une décision qui ne relève que de lui. La moindre des choses aurait été que les deux assemblées soient consultées. En l'occurrence, c'est pour cette raison que j'ai écrit à M. le Premier ministre, après m'en être entretenu avec lui, afin qu'il sursoie à la convocation de la CMP jusqu'à ce que nos deux assemblées aient trouvé une position suffisamment rapprochée. C'est de cette façon que nous entendons légiférer dans les meilleures conditions.
Pour tout dire, monsieur le secrétaire d'État, je pensais que vous alliez répondre en introduction à votre discours. Mais vous avez choisi une autre façon de le faire.
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
Il me semble judicieux que nous ayons ce débat préalable.
En premier lieu, nous vous remercions, monsieur le président, d'avoir rappelé ces éléments fondamentaux auxquels tous les députés sont attachés. Votre qualité donne plus de poids à cette observation.
Sur le fond se pose un problème dont la solution est d'une certaine manière de nature à modifier le cours de ce débat. En déclarant l'urgence, le Gouvernement laisse planer sur nos travaux un élément aléatoire : à la fin de la lecture au Sénat, il peut demander la réunion de la CMP ou ne pas le faire. Or chacun ici a assez d'expérience pour savoir qu'un débat n'est pas conduit de la même manière quand il est possible de résoudre des difficultés, de prévoir des précisions au moment de la deuxième lecture, ou quand cette possibilité n'existe pas. Et ne pas l'avoir c'est une chose, mais rester dans l'incertitude à ce sujet c'est plus grave, sur tous les textes sans doute, mais plus encore sur ce texte qui concerne le Grand Paris. Le Gouvernement et M. Blanc nous délivrent un message qui compte en nous disant que l'Assemblée ne pourra consacrer qu'une lecture à l'examen de ce texte et que nous laisserons une CMP trancher sur les points en débat.
Monsieur le président, nous souhaitons que vous puissiez obtenir du Gouvernement le retrait de la procédure d'urgence car il nous paraît inacceptable qu'un tel doute subsiste pendant tout le temps que nous allons consacrer à l'examen de ce texte. Je vous en remercie par avance au nom de mon groupe.
La parole est à M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, permettez-moi de remercier les présidents des commissions du développement durable, des affaires économiques et des lois, MM. Jacob, Ollier et Warsmann, ainsi que les rapporteurs, MM. Albarello et Bénisti. Je voudrais tout particulièrement remercier Yves Albarello, rapporteur au fond, pour son engagement dans l'amélioration du texte.
Je voudrais également remercier les députés membres des différentes commissions, qui, quelle que soit leur appartenance, ont participé de façon constructive à l'élaboration de ce projet important pour le pays.
Siècle après siècle, Paris a conquis puis conservé une place d'exception dans le monde. La seule question que nous devons aujourd'hui nous poser est : voulons-nous que cela soit encore le cas demain ? Voulons-nous que Paris soit encore, comme l'écrivait Michelet, « le grand carrefour des routes des nations » et « le congrès permanent des âges et des peuples » ?
Voulons-nous attirer les talents et les inventeurs de demain et continuer à écrire notre histoire ? Voulons-nous que Paris soit une capitale mondiale de l'art de vivre ? Voulons-nous que Paris compte encore sur l'échiquier politique et économique mondial, mais aussi parmi les acteurs décisifs du monde scientifique, artistique, intellectuel ? Voulons-nous que le Grand Paris soit une « ville-monde » du XXIe siècle ?
Quand nous parlons du Grand Paris, nous entendons la France. Quand le Président de la République, Nicolas Sarkozy, décide de créer le Grand Paris, d'en libérer les potentiels, il s'agit d'un choix stratégique pour toute la nation.
Le Grand Paris, c'est le rayonnement de la France vers le monde, c'est une source d'attractivité pour le monde. Le Grand Paris, c'est une ville-monde pour la France.
Cette idée de ville-monde, l'historien Fernand Braudel nous l'a léguée. Que sont ces villes ?
Ce sont, à toutes les époques, les phares de l'innovation et de la création. Ce sont les puissances économiques, financières, décisionnelles, mais aussi scientifiques, technologiques et culturelles de leur époque.
Les villes-monde, ce sont les centres névralgiques mondiaux et les carrefours de voyageurs, d'idées nouvelles et d'excellences de tous ordres.
Les villes-monde, comme à la transition du Moyen-Âge vers la Renaissance, décrite par Braudel, ce sont les moteurs toujours en mouvement de la croissance.
Hier, les cités de la Hanse, Venise ou Anvers ; aujourd'hui Londres, New York, Tokyo et Paris. Et toujours, entre ces villes, règne une concurrence incessante, qui oblige à rivaliser d'excellence pour continuer à compter. Aujourd'hui, déjà, Shanghai et Bombay nous talonnent.
Hier, les villes des foires de Champagne, vers lesquelles convergeaient les étoffes du Nord et les épices d'Italie, donnaient déjà à Paris le statut d'une ville-monde, en dotant ce coeur de la France d'un incomparable rayonnement politique, économique, mais aussi intellectuel avec la Sorbonne, et artistique et spirituel, avec les cathédrales gothiques, qui témoignent encore de ce moment d'exception.
Aujourd'hui, les mécanismes sont les mêmes, à l'échelle plus vaste du monde globalisé : les villes-monde, en réseau avec d'autres villes-métropoles, forment des économies-monde.
Au-delà de ses portes que sont, aujourd'hui, ses gares TGV, ses aéroports internationaux et sa façade maritime du Havre et de Rouen, le Grand Paris ouvre sur Chartres, Le Mans, Orléans, Amiens et Reims, et au-delà encore sur toutes les grandes métropoles du territoire français, qui, par la mise en valeur de leurs complémentarités, constitueront une économie-monde. Car une ville-monde n'est jamais seule : elle fonctionne en synergie avec le monde entier, et dans le même temps tout un archipel de métropoles régionales se développe avec elle.
Aujourd'hui comme hier, la réussite du coeur de la France sera la réussite de toute la France,
Pour porter une telle ambition, seul l'État stratège, garant du temps long, peut s'engager. Et, du reste, au-delà des clivages partisans, personne ne lui conteste cette prérogative historique. C'est aussi pour cette raison que le Président de la République a souhaité créer un secrétariat d'État chargé du développement de la région capitale.
Comment, dès lors, engager l'action, devant un objectif d'une telle ampleur ? Souvenons-nous de la phrase du général de Gaulle, gagnant le Liban en 1941 : « Vers l'Orient compliqué, je volais avec des idées simples. » Nous sommes donc partis, méthodiquement, des idées les plus simples et les plus éprouvées.
En premier lieu, il s'agit de valoriser l'existant, déjà considérable. L'existant, ce sont l'attractivité mondiale de la région capitale depuis des siècles, sa situation de carrefour de transports, l'excellence de ses chercheurs, les formations de haut niveau qu'elle dispense, sa main-d'oeuvre qualifiée, ses industries pharmaceutique ou de création numérique, son importance en termes d'organisation de salons, d'implantation des sièges des plus grandes entreprises mondiales, en matière de tourisme, de culture, d'art et d'industrie de luxe.
Ensuite, nous devons identifier les potentiels du Grand Paris, les développer et les ouvrir au monde, grâce, d'une part, aux portes internationales que sont Roissy, Orly, Le Bourget et les gares européennes et, d'autre part, à ces portes internationales du savoir et de l'innovation que constituent Saclay, la vallée des biotechnologies, le territoire de la création autour de La Plaine Saint-Denis, ou encore la Cité Descartes.
La troisième étape a consisté à définir des objectifs pour répondre aux insuffisances en matière de transport, de cohésion sociale – on constate des déséquilibres territoriaux flagrants –, mais aussi aux besoins de logements, et à la nécessité d'un développement économique durable. Le projet du Grand Paris fera de la banlieue, souvent négligée, son enjeu et sa chance.
Enfin, il a fallu concevoir les dispositifs techniques et juridiques qui permettront la mise en oeuvre, la plus rapide possible, d'un grand projet urbain tel que les urbanistes-architectes l'ont imaginé lors de la consultation internationale ; tout en sachant que les grandes mutations urbaines dans l'histoire ont toujours été le fruit de l'expansion économique.
À partir de ces balises, nous avons conçu un projet de loi qui repose sur trois piliers fondamentaux constituant son socle : le développement des territoires économiques et urbains, la question des transports et de leur interconnection, enfin les sciences et l'innovation. Dans le texte qui vous est soumis, nous vous proposons les outils qui nous permettront de réaliser progressivement cette ambition.
Tout d'abord, il s'agit des contrats de développement territorial.
J'ai beaucoup lu et beaucoup entendu à propos du prétendu « jacobinisme» de ce projet de loi,…
… ou de la « recentralisation » qu'il serait censé organiser.
Or c'est pour tous d'une évidence : au xxie siècle, quand il s'agit de développer ou de remodeler la ville, rien d'ambitieux ne peut être fait sans la volonté des communes.
Ainsi, le projet de loi repose bien sur l'affirmation d'un partenariat contractuel, encore inédit en droit français, entre l'État stratège et les communes, qui sont les premiers acteurs du développement des territoires.
Ensemble, ils s'accorderont sur les modèles de développement économique, la politique foncière, mais aussi sur l'urbanisme, le nombre et le type de logements nécessaires. Ils imagineront les réponses les plus fécondes aux problèmes de mixité sociale et de mixité fonctionnelle, et ils permettront d'accueillir, dans un même élan, les transports, l'activité économique, le logement, la formation et la culture là où ils ne coexistent pas.
Pour atteindre ces objectifs, l'État mettra à la disposition des communes ses propres outils d'aménagement : les ZAD, ou zones d'aménagement différé, et les PIG, les projets d'intérêt général.
Contrairement à ce qui s'est dit, rien, absolument rien, n'est retiré aux communes qui signeraient un contrat de développement territorial, bien au contraire.
À titre d'exemple, et pour reprendre le plus polémique des arguments utilisés, rappelons qu'aujourd'hui l'État peut instituer un droit de préemption sur le territoire d'une commune même si celle-ci le refuse. Dans le cadre des contrats créés par ce projet de loi, la commune et l'État décideront ensemble des modalités de l'institution d'un tel droit, et elles s'entendront aussi sur ses bénéficiaires, qui pourront être la commune elle-même.
Ces contrats de développement territorial autoriseront le développement d'un urbanisme partant du projet. Cela permettra immédiatement d'éprouver l'imagination et l'action des dix équipes d'architectes-urbanistes, ou d'autres, invitées à imaginer la ville-monde post-Kyoto voulue par le Président de la République.
Ensuite, ce projet de loi permet aussi la création rapide d'un nouveau réseau de transports, interconnecté tant avec les portes internationales de la région capitale qu'avec le réseau régional existant.
Une fois encore, je ne peux pas oublier comment Paris a été transformé au XIXe siècle : cela s'est fait en traçant des lignes de transports régulières entre les gares, en amenuisant les distances entre les différents quartiers de la capitale, en la transformant en un centre attractif international moderne, et en améliorant le quotidien des Parisiens. À la fin du XIXe siècle, le réseau du métro, accouché au milieu de tant de combats politiques et de retards par rapport aux autres métropoles de l'époque, a été une nouvelle étape dans cette révolution urbaine. À côté des lignes d'omnibus, il a offert la rapidité et l'efficacité d'un nouveau réseau de transport. Selon la belle expression de l'écrivain allemand Walter Benjamin, Paris a été la « capitale du XIXe siècle ». Il s'agit aujourd'hui qu'elle soit capitale du XXIe siècle et, une fois encore, les transports seront la bataille décisive.
Nous devons donc construire un nouveau réseau de transports, de manière efficace et rapide. Ce dernier répond en effet à une nécessité économique et urbaine, et à un impératif de cohésion sociale.
Que voyons-nous aujourd'hui ? Un réseau public régional de transport saturé et des passagers en souffrance. Le maillage radioconcentrique ne correspond pas toujours ni aux flux de circulation, qui aujourd'hui, pour 70 %, se font de banlieue à banlieue, ni aux horaires de travail. Pouvons-nous continuer de l'ignorer ?
Nous savons bien que la région et le STIF, dans leurs compétences que ce projet de loi respecte pleinement, portent un « plan de mobilisation » censé donner des réponses ponctuelles à ces difficultés. L'État, comme l'a annoncé le Président de la République, tiendra les engagements pris auprès de la région dans le cadre du contrat de projet État-région. Mais n'opposons pas la réponse à donner aux urgences d'aujourd'hui et les nécessités de demain.
Quand l'État prend ses responsabilités en réalisant un futur réseau de métro automatique rapide, interconnecté au réseau existant, il répond à un double enjeu.
En effet, ce réseau structurera le Grand Paris en reliant à la fois les aéroports, les centres urbains et des pôles économiques, universitaires et stratégiques. Ainsi, il le rendra plus dynamique et plus attractif : c'est là sa mission d'intérêt national. Par ailleurs, il permettra de répondre aux urgences quotidiennes de la région capitale de manière rapide et efficace. Après le métropolitain et le RER, ce métro automatique de grande capacité, sillonnant la région capitale sur cent trente kilomètres, constituera la troisième génération de transports parisiens. À son achèvement, dans treize ans, il pourra transporter trois millions de passagers par jour, soit autant que le réseau actuel du métro.
Que peuvent penser des arguments présentés par les détracteurs des tracés indicatifs du réseau de métro automatique les habitants de Clichy-sous-Bois, Montfermeil, Sevran, Saint-Ouen, Créteil, Vitry, Versailles, Boulogne, Nanterre, ou ceux de Paris ? Encore n'ai-je cité que quelques exemples parmi les communes concernées ; la liste complète serait beaucoup plus longue.
Est-ce vraiment là un réseau conçu uniquement pour relier seulement des pôles de développement économique ?
C'est également pourquoi le projet de loi prévoit des procédures qui permettront à l'État de réaliser rapidement ce réseau, et cela dans le plein respect des exigences de la démocratie locale.
À la charnière la plus concrète du réseau de transports et des territoires, il y a le défi de l'interconnection et des gares. Ce réseau doit être interconnecté à la fois à l'international et au réseau existant ou à créer, et ses gares doivent être des lieux d'intermodalité efficace. Elles seront, comme les organes vitaux qu'elles représentent dans le nouveau réseau, des lieux d'échange vivants, agréables et sûrs.
Le développement des territoires, les transports, l'interconnexion sont les éléments structurants d'une action qui va se dérouler dans le temps et dont la cohérence, je le répète, est essentielle.
Devant ce projet d'échelle inédite, il faut un maître d'ouvrage adéquat, garant du temps long, qui sera le partenaire privilégié des collectivités. Il doit être capable de garantir la parfaite efficacité d'une consultation du public qui touchera potentiellement neuf millions de citoyens. Il doit être capable de réaliser les gares d'interconnection avec le réseau existant et d'accompagner les projets de territoires liés à ces gares.
C'est pour cette raison que le projet de loi propose la création d'un outil spécifique, l'établissement public appelé Société du Grand Paris, qui nous est apparu comme le plus efficace pour accomplir ce vaste projet.
À de nombreuses reprises dans notre histoire, l'État a engagé la France dans des projets audacieux, dans lesquels s'est pleinement exprimé le génie français. Cela a été vrai pour le remodelage de Paris au XIXe siècle, pour le développement de l'énergie nucléaire, et pour le TGV, il y a déjà plusieurs décennies. Chacun de ces projets a pu devenir réalité parce qu'ont été mises en place des équipes dédiées d'hommes et de femmes capables de relever ces défis. Pour relever le nouveau défi qu'est la réalisation, en moins de quinze ans, du réseau du Grand Paris, il n'y a aucune raison de ne pas procéder comme nos aînés.
Là où il nous faut prendre plus de distance avec certains de ces illustres aînés, c'est sur ces questions simples : peut-on créer des transports sans repenser la ville en même temps, et peut-on remodeler la ville en faisant abstraction des transports ? Les architectes-urbanistes qui, pendant des mois, se sont penchés sur l'avenir possible du Grand Paris, répondent unanimement par la négative à cette double question. Ville et transports doivent se bâtir ensemble, et il s'agit de les penser et de se donner les moyens de les réaliser de manière concomitante.
Comme nous l'ont fait observer les architectes-urbanistes, avec le projet de loi du Grand Paris, pour la première fois dans notre histoire, un schéma de transports et le développement des territoires qu'il dessert vont être conçus simultanément.
C'est pourquoi le projet qui vous est soumis crée un établissement public dédié, la Société du Grand Paris, au conseil de surveillance duquel siégeront des représentants de l'État, de la région Île-de-France et de chaque département, ainsi que d'un représentant des communes ou intercommunalités.
Il lui donne deux pieds, deux missions – une relative au transport, l'autre à l'aménagement – quand certains préféreraient créer un monstre à une seule jambe et à deux têtes.
Regardons un instant ensemble ce dont il est au juste question, si vous le voulez bien.
En premier lieu, en ce qui concerne les transports, que fera au juste la Société du Grand Paris ?
Dès sa constitution, elle va élaborer un schéma de transport et préparer le dossier de débat public lui correspondant. Elle va écouter les avis exprimés par les citoyens lors de ce débat et prendre en compte les avis demandés à toutes les collectivités territoriales d'Île-de-France. Puis elle va faire évoluer ce schéma pour tenir compte de l'ensemble de ces suggestions et avis. Le tracé définitif et l'emplacement des gares feront alors l'objet d'un décret pris en Conseil d'État.
Passée cette première année, la Société du Grand Paris va s'assurer de la réalisation de ce schéma : elle rédigera les cahiers des charges, lancera les consultations, notifiera les marchés, vérifiera la bonne réalisation des prestations, conduira les procédures administratives.
En second lieu, qu'en est-il en ce qui concerne l'aménagement ?
Beaucoup de fausses idées circulent au sujet de la Société du Grand Paris, comme si le texte examiné aujourd'hui en était resté à sa version primitive, avant la concertation que j'ai menée avec les élus.
Or, je tiens à le rappeler ici, cette concertation, depuis le mois d'août, a été importante et elle m'a amené à faire évoluer sur ce point le projet de loi, en plein accord avec le Premier ministre.
Dans l'exaltation du débat des prochaines élections régionales, j'ai entendu certains manier des chiffres pour le moins surprenants : 37 000 hectares seraient préemptés au profit de la Société du Grand Paris ! Il est curieux de voir les mêmes affirmer que le projet de loi du Grand Paris, rétréci par rapport aux ambitions annoncées le 29 avril dernier par le Président de la République, est ramené à un seul réseau de métro, et que ceci les entraîne à demander – nous le verrons plus tard – la modification de l'intitulé du texte. Alors, mesdames, messieurs les députés, choisissez : mais pas tout et son contraire.
Plutôt que de faire référence à des chiffres obtenus on ne sait comment, regardons ce que dit le texte. À l'article 7, il est écrit que la Société du Grand Paris pourra conduire des opérations d'aménagement là où elle dispose d'un droit de préemption. Et plus loin, à l'article 18, que les contrats de développement territorial définissent les zones d'aménagement différé. On pourrait ajouter qu'ils définissent les bénéficiaires des droits de préemption ainsi institués. Ces bénéficiaires peuvent être la Société du Grand Paris, un établissement d'aménagement, ou encore les communes elles-mêmes.
Concrètement qu'est-ce que cela signifie ? Cela veut dire que la Société du Grand Paris pourra être aménageur là où les communes et l'État auront décidé ensemble, par contrat, des modalités de son intervention.
La compétence d'aménagement de la Société du Grand Paris est donc une compétence encadrée par les termes du contrat qui lie les maires et l'État. Le pouvoir des maires sur les opérations qui les concernent directement s'exerce donc au travers des contrats, qu'ils sont libres de signer ou non.
Enfin, le projet du Grand Paris, porte aussi en son coeur le savoir et l'innovation avec l'élan nouveau que nous voulons donner au territoire de Saclay.
Nous entrons dans un siècle qui sera, plus que les précédents, marqué par la fluidité et la rapidité : fluidité et rapidité des transports, des communications, de l'innovation.
La gageure, pour nos sociétés modernes, est immense : il s'agit de mobiliser toutes nos forces et de libérer toutes nos énergies pour être disponibles et nous adapter constamment. La nouvelle économie de la connaissance signifie, pour nous, être perpétuellement à la pointe de l'innovation dans les technologies nouvelles. Nous devons mener un combat stratégique dans le domaine des TIC, des nanotechnologies, des biotechnologies. Et la clé d'une innovation pleinement efficace est le lien entre la recherche scientifique, la formation universitaire et le monde de l'entreprise. C'est tout l'enjeu des dispositions concernant le territoire de Saclay.
Dans l'histoire de la région capitale et de la France, Saclay occupe une place singulière : au XVIIe siècle, ce territoire, qui compte parmi les terres agricoles les plus riches du pays, a été drainé, au prix d'innovations techniques remarquables pour l'époque, afin d'alimenter Versailles.
Aujourd'hui, Saclay est riche d'un potentiel d'excellence scientifique, universitaire et industriel incomparable, auquel il s'agit de donner plus de dynamisme. Saclay concentre 10 % de la recherche publique française, soit 17 000 chercheurs, 10 % de la recherche-développement privée française, soit 20 000 personnes, et plus de 47 000 étudiants, en sciences dures, mais aussi en médecine, en droit, en management. Ce ne sont pas des chiffres, ce sont des talents et des espoirs. Nous avons le devoir de leur donner les meilleures conditions de vie et de travail, parce qu'ils sont, avec beaucoup d'autres, l'avenir de la France.
Nous devons y attirer encore plus de nouveaux talents : nous y construirons le campus du XXIe siècle, qui sera moderne, écologique et humain. Il constituera l'articulation vivante du monde académique avec le monde économique. Nous y favoriserons l'implantation de davantage de jeunes entreprises innovantes.
Pour autant, la concentration des talents dans chaque domaine ne suffit pas : encore faut-il que le territoire où ils vivent et travaillent soit favorable à leur travail en commun. Les institutions et les entreprises doivent y être en synergie entre elles, et avec le reste du territoire régional, national et international.
C'est d'ailleurs pour partie déjà le cas. En matière de nanotechnologies, Saclay est articulé avec les autres centres du réseau Nano-INNOV de Toulouse et de Grenoble ; le futur regroupement des sites franciliens d'AgroParisTech sera un moteur mondialement visible, en réseau avec les pôles régionaux. En informatique, l'INRIA collabore déjà avec Grenoble et Rennes.
Les travaux du Prix Nobel 2007, le professeur Albert Fert, et de ses équipes à l'université Paris-Sud, au sein de l'unité mixte de recherche CNRS-Thales, ou ceux des équipes du professeur Patrick Couvreur en matière de nano-médicaments, sont deux exemples des collaborations internationales qui donnent un rayonnement mondial aux établissements du plateau de Saclay. Ces collaborations et ces complémentarités sortiront renforcées du projet du Grand Paris.
Le projet de loi réaffirme aussi la protection de l'activité agricole, des espaces naturels, agricoles et forestiers, ainsi que la pérennité du patrimoine hydraulique de ce territoire exceptionnel.
Là encore, il nous faut une structure adéquate pour piloter, à sa juste mesure et avec une pleine efficacité, ce projet essentiel d'intérêt national : ce sera l'établissement public scientifique et technologique de Paris-Saclay.
Pour signifier toute son ambition, son conseil d'administration sera composé de représentants de l'État, d'élus représentants des collectivités locales, de personnalités du monde académique, scientifique, et du monde de l'entreprise. Il sera secondé d'un comité consultatif formé de personnalités représentatives du mouvement associatif, des organisations professionnelles agricoles, des chambres consulaires, des organisations syndicales, ainsi que des associations agréées dans le domaine de l'environnement.
Oui, décidément, Saclay est emblématique de l'alliance de la technologie et de la richesse agricole, forestière et paysagère, du passé, du présent et de l'avenir de la région capitale. Et il montre que, sous des visages très divers, en imaginant cette ville-monde, ce moteur de croissance, cette capitale du XXIe siècle, c'est l'histoire de notre pays que nous continuons à écrire.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, depuis Shanghai ou Los Angeles, aux yeux des étrangers, la question du Grand Paris ne se pose déjà plus. Ils sont en avance sur la réalité, comme le sont les idées qui transforment le monde. Regardons notre pays avec leurs yeux, car leur regard est celui du monde en marche.
Un jour sans doute, la question de la gouvernance du Grand Paris sera à l'ordre du jour : nous n'en sommes pas là. Nous avons aujourd'hui entre les mains les moyens de réaliser une ville-monde compétitive et attractive qui soit un phare de croissance, d'innovation et de création artistique et intellectuelle au XXIe siècle.
Notre défi est celui de l'ambition et de la confiance. Je sais qu'il est plus facile de réaliser de vastes projets de développement urbain en temps de prospérité et d'expansion économique. Les projets colossaux et volontaristes du Grand Shanghai ou de São Paulo, auxquels participent nos meilleurs architectes, nous le rappellent. Toutefois, nous avons le devoir d'entreprendre, en regardant au-delà de la crise actuelle. C'est de l'avenir de notre pays que nous parlons aujourd'hui.
En lançant le Grand Paris, le Président de la République a rappelé, le 29 avril dernier : « Le Grand Paris, c'est un projet qui ne peut réussir que s'il est partagé par tous ».
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je vous propose de saisir aujourd'hui l'élan créé par ce projet historique et d'apposer ensemble notre signature à son acte de naissance. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Yves Albarello, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, messieurs les présidents des commissions, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le texte soumis à notre examen aujourd'hui est intitulé : « projet de loi relatif au Grand Paris ». Ce libellé peut paraître réducteur. En réalité, il n'en est rien.
Il ne s'agit pas du tout de mettre en cause le statut de la ville de Paris fixé de 1975 à 1983. Il ne s'agit pas non plus de modifier celui de la région Île-de-France, dont les structures remontent à 1976, avec, depuis, le transfert à la région de la responsabilité des transports collectifs urbains dans le cadre du STIF. Non, il s'agit de tout autre chose.
Le Grand Paris, c'est d'abord une immense ambition nationale, une mobilisation pour toute la France à travers un exceptionnel projet de développement à la mesure du XXIe siècle, de ses enjeux, de la compétition internationale à laquelle notre pays se trouve confronté, et de la place que le Président de la République entend lui conférer à travers un rayonnement mondial amplifié et accéléré.
Voilà ce qu'est le Grand Paris. C'est la valorisation intelligente, dans l'intérêt de tous les Français, de l'extraordinaire potentiel que possède, autour de la ville lumière que nous aimons profondément et dont nous sommes fiers, la région capitale qui est la locomotive du TGV national lancé à la conquête d'un prix d'excellence parmi les grandes nations de ce monde.
Cette valorisation passe par la réalisation d'une grande opération d'intérêt national.
Depuis un demi-siècle, notre pays a connu plusieurs de ces opérations qui nous ont permis de faire face aux adaptations exigées par le monde moderne. Ainsi, tant en Île-de-France qu'en province, de grands chantiers, variés, et de grandes opérations furent lancés : les ports, les plateformes aéroportuaires, les zones d'industrialisation ou de conversion industrielle et les zones d'aménagement, les villes nouvelles, les grands quartiers d'activités comme La Défense ou Lyon La Part-Dieu, les autoroutes, les TGV, etc. Bref, les années 1960 à 1990 furent l'époque d'un engagement de toute la France en faveur de projets bénéfiques pour tous, sans considération du lieu de leur réalisation.
Nous avons tous vibré et nous fûmes fiers lorsque Grenoble puis la Savoie reçurent ces formidables coups d'accélérateur que furent les Jeux Olympiques d'hiver. Inversement, nous avons tous pleuré l'échec de la candidature de Paris malgré les efforts conjoints de Jacques Chirac et de Bertrand Delanoë, unis vers l'obtention d'un résultat positif tant espéré dans un effort commun.
Car une opération exemplaire d'intérêt national a pour caractéristique majeure de fédérer toutes les volontés et toutes les énergies, par delà les idéologies et les clivages, afin d'atteindre le but poursuivi.
Le Grand Paris, c'est un vrai pari pour la France : celle qui a toujours su relever la tête dans les moments difficiles, celle qui gagne dans le concert des nations quand elle croit en elle-même, celle qui ne renonce jamais face à la difficulté,
Voilà à quoi nous appelle le Président, avec toute la vigueur que nous lui connaissons.
Depuis plus de vingt ans maintenant, nous vivions sur l'acquis des dernières grandes opérations d'intérêt national des années 1970 à 1980. Parallèlement, des réformes administratives très importantes avaient reconnu aux collectivités territoriales, accrues de la création des régions, des attributions et responsabilités de plus en plus importantes. On pouvait croire alors que le temps des grandes opérations structurantes était révolu.
On pouvait d'autant plus l'imaginer que, dans le même temps, le statut de la capitale et de ses voisins avait été modifié en prenant le contre-pied d'une évolution naturelle multiséculaire consistant à reculer périodiquement les limites géographiques et administratives de Paris.
C'est ainsi que la disparition du département de la Seine, accompagnée du cantonnement de Paris dans les limites haussmanniennes de 1860, a eu pour conséquence l'affaiblissement de la solidarité dans un destin commun unissant alors Paris et ses riverains. Cela a conduit la capitale à subir un relatif isolement et à se priver de certaines potentialités.
Reconnaissons toutefois, objectivement, les efforts consentis par les maires successifs de Paris, depuis 1977, pour rompre cette improductive barrière du repli.
Mais il faut aller beaucoup plus loin. C'est à cela que le Président, le Gouvernement et vous-même, monsieur le secrétaire d'État, vous nous conviez avec ardeur. Tout le monde reconnaît qu'un Grand Paris est indispensable, car c'est la France tout entière, et pas seulement les Franciliens, qui en a besoin.
Et puis, pourrait-on pardonner le gâchis qui résulterait de la perte de cette chance pour la France qu'offre le Grand Paris ? Non évidemment. Alors, il faut faire le Grand Paris.
Mais quel Grand Paris ? Et comment ? Géographique, administratif, économique ? Et par quel bout commencer ? Tout le débat est là.
Au lendemain de la guerre, lorsque la nécessité apparut de construire l'Europe sur les ruines laissées par l'effroyable conflit, les mêmes interrogations s'exprimaient vis-à-vis de l'Europe. L'un de ses pères fondateurs, Robert Schuman, trouva alors la bonne solution : écartant les constructions juridiques théoriques et les déclarations d'intention politiques, il posa le principe fondamental, toujours d'actualité aujourd'hui, que l'Europe se construirait par des réalisations concrètes conduisant à une solidarité de fait.
L'expérience a donné pleinement raison au président Schuman. Réjouissons-nous donc que, dans ce dossier si difficile du Grand Paris, où même le général de Gaulle, Georges Pompidou, Paul Delouvrier et Maurice Doublet entre autres, commirent, en toute bonne foi, un contresens voici quarante ans en démembrant le département de la Seine, le président Nicolas Sarkozy ait compris qu'il était temps de réparer l'erreur et d'entreprendre l'une des réformes majeures de son septennat en lançant la construction du Grand Paris pour la France du XXIe siècle. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Quelle marche en avant ! On en revient au département de la Seine : bravo !
La démarche pragmatique du président Sarkozy est comparable à celle du président Schuman.
Rompant avec la traditionnelle technique de définition préalable de grands schémas d'aménagement et de statuts institutionnels – les lois Boscher et Rocard pour les villes nouvelles en sont un bon exemple –, …
…la méthode empirique choisie par le Président de la République et dont votre projet, monsieur le secrétaire d'État, est le reflet, vise à la traduction législative de réalisations concrètes conduisant à une solidarité de fait.
C'est pourquoi, si l'on compare à une fusée le projet global du Grand Paris, dans le long terme, dépassant l'instant présent qui nous occupe, on peut dire que nous sommes pour le moment en face du premier étage de cette fusée. Le reste, d'une ampleur encore plus grande, suivra. Mais il faut d'abord faire partir le premier étage de la fusée. C'est un préalable indispensable. (« Qui le fera ? » sur les bancs du groupe SRC.)
Tous les Franciliens sont d'accord pour constater que le problème crucial en Île-de-France est la maîtrise des transports. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est pourquoi votre projet de métro automatique en rocade en forme de double boucle est l'élément structurant de base autour duquel doivent se greffer deux actions prioritaires préalables à tout développement.
Première action : l'interconnexion des réseaux existants – TGV, autres trains, RER, métros – avec la double boucle, ainsi que leur modernisation. On ne saurait en effet imaginer la construction d'un nouveau réseau ultramoderne sans, en même temps, améliorer substantiellement l'existant vu le considérable et anormal retard pris, au cours des trois dernières décennies, par le réseau ferroviaire francilien.
Seconde action : la mise en oeuvre de projets d'aménagement et de développement territorial, à finalité économique et sociale, induisant une forte solidarité au sein de l'agglomération urbaine en Île-de-France. Dans ces projets, tout ce qui relève de la recherche et de l'innovation serait privilégié. Mais les logements, notamment sociaux, et les équipements collectifs nécessaires ne seraient pas oubliés. Leur réalisation s'inscrirait dans une dynamique de développement, ce qui est un élément nouveau, au même titre que la réalisation préalable du réseau de transports structurant de la double boucle.
Les caractéristiques, l'ambition, l'enjeu d'une telle opération d'intérêt national exigent le recours à une procédure spécifique, adaptée aux besoins du but poursuivi, et permettant le dégagement des moyens appropriés. C'est à cela que correspond la création de la Société du Grand Paris.
Comme nombre de structures antérieures des grandes opérations d'intérêt national du XXe siècle, il s'agit d'un établissement public à caractère industriel et commercial. Les Franciliens connaissent bien ces structures, telles que l'ÉPAD à La Défense…
…ou bien ÉPAMARNE et ÉPAFRANCE à Marne-la-Vallée. La souplesse juridique du statut de ces établissements a permis de faire face à des exigences aussi différentes que l'aménagement d'un quartier d'affaires à La Défense ou l'accueil du Disneyland à Marne-la-Vallée. Ce Disneyland dont toute la France profite, depuis le fin fond de nos provinces, ainsi qu'une grande partie de l'Europe, qui nous apporte nombre de touristes bienvenus.
La Société du Grand Paris, telle que le projet l'organise, paraît bien adaptée à ses missions. En outre, l'appellation n'est pas neutre. Ce nom de société, que porte déjà la SNCF et que personne ne songe à remettre en cause, traduit l'engagement du projet de Grand Paris dans notre époque présente. Le XXe siècle était le temps des établissements publics. Au XXIe siècle, dans la compétition internationale qui nous entoure, après l'abandon des lourdeurs et des rigidités de l'économie administrée, devenue obsolète, le nom de société s'impose parfaitement. Après tout, la SNCF n'hésite pas aujourd'hui à parler de clients et non plus d'usagers.
Un autre élément essentiel du texte est le contrat de développement territorial évoqué à l'article 18.
En droit français, ce type de contrat n'existait pas jusqu'à présent Cette innovation remarquable présente un double avantage.
D'une part, l'introduction de cette contractualisation entre l'État et les communes, parties prenantes au projet de développement territorial, traduit l'évolution de nos institutions dans le sens d'une démocratie locale croissante. Il y a quarante ans, on ne s'embarrassait guère de concertation, encore moins de partenariat avec les collectivités territoriales. Aujourd'hui, la décentralisation est passée par là et il faut en tenir compte.
Le contrat de développement territorial est le meilleur moyen de concilier l'autonomie et les prérogatives des communes, renforcées par la décentralisation, avec la nécessité pour l'État de continuer à conduire les grandes opérations d'intérêt national.
Hier, l'État agissait seul, bousculant les pouvoirs locaux, comme on l'a vu pour les villes nouvelles. Aujourd'hui, il agit avec les communes en responsabilité partagée. Le contrat de développement territorial marque ainsi un progrès très important dans le processus de démocratisation de la vie locale.
D'autre part, c'est le contrat de développement territorial qui permettra de fixer le partage des produits de la plus-value foncière autour des gares. Ainsi, là où elle existera, elle sera répartie dans un cadre contractuel, celui du contrat de développement territorial. Naturellement, tant en ce qui concerne la Société du Grand Paris que les contrats de développement territorial, il sera possible de recourir, sous certaines conditions, à des procédures dérogatoires au droit commun de l'urbanisme.
Je voudrais maintenant remercier tous ceux qui, dans les diverses auditions, m'ont apporté un concours toujours positif par-delà les légitimes divergences politiques des élus. Parmi eux, je voudrais citer le président du conseil régional, Jean-Paul Huchon, et le président du groupe UMP de la région, Roger Karoutchi. Je voudrais spécialement remercier mon collègue François Lamy et les élus du plateau de Saclay, ainsi que ma collègue Annick Lepetit et la délégation parisienne conduite par Anne Hidalgo. Par ailleurs, Valérie Pécresse m'a également fait part de ses réflexions. Je n'oublie pas enfin les apports de qualité fournis par les représentants des agriculteurs et des associations de l'environnement. Toutes les observations des uns et des autres ont été soigneusement notées et nombre d'entre elles ont fait l'objet d'amendements susceptibles d'enrichir votre texte, monsieur le secrétaire d'État.
Permettez-moi toutefois, malgré la qualité de votre projet, d'émettre un regret. Le temps a manqué, tant à vous, lors de son élaboration, pour lui donner une dimension plus grande encore,…
…qu'à nous, pour lui apporter les développements qu'un projet de cette ampleur aurait mérité de présenter dès maintenant.
Plusieurs députés du groupe SRC. Alors, faites lever l'urgence !
Voici quelques exemples. Le vice-président du conseil général des Yvelines, Jean-François Bel, m'a justement fait remarquer que la vallée du Mantois, dite de l'automobile, avait été oubliée dans l'étude d'impact, ce qui est une lacune à corriger.
On pouvait surtout espérer dans votre texte, monsieur le secrétaire d'État, qu'outre la réalisation du métro automatique en double boucle, nous soyons saisis d'autres applications territoriales que celle du Plateau de Saclay.
On pourrait peut-être comprendre que vous n'évoquiez pas La Défense, car cette opération est en cours de réalisation depuis longtemps, mais néanmoins son importante extension, récemment décidée, aurait mérité d'être évoquée dans votre projet de loi.
Plus grave encore me semble l'incertitude en ce qui concerne le pôle majeur de développement de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle. Certes, on voit bien que vous voulez mettre en valeur le lien qui unit l'aéroport d'affaires du Bourget à celui de Roissy-Charles-de-Gaulle. Mais cette seule approche est insuffisante et réductrice par rapport au formidable potentiel de la zone aéroportuaire de Roissy-Charles-de-Gaulle, qui implique largement le Val d'Oise et la Seine-et-Marne. Or rien n'est dit à cet égard dans votre projet de loi et le constat que l'aéroport est desservi non par la double boucle mais par la seule ligne en cul-de-sac de l'ensemble peut inspirer des inquiétudes s'ajoutant à l'insuffisance de l'information.
Je sais enfin qu'un certain nombre de mes collègues nourrissent de réelles craintes quant à certaines des interconnexions indispensables entre les actuels réseaux RER et transiliens avec la double boucle. Le fait, monsieur le secrétaire d'État que vous ayez fait connaître certaines gares et pas d'autres est un réel sujet de préoccupation, non à l'Ouest et au Sud, ni dans la partie Nord proche de Paris. Mais je comprends parfaitement la réaction de mon collègue Yannick Paternotte et des élus du Val d'Oise lorsqu'ils estiment anormal de voir leur département exclu de la double boucle.
Il en est de même pour Gérard Gaudron, qui ne veut pas voir mourir économiquement une ville de 80 000 habitants, « siphonnée » au profit d'un pôle de développement le plus proche possible de Villepinte, faisant du même coup de l'autre branche du RER B un bras mort de cette ligne. Sommes-nous bien assurés qu'à l'Est, où la Seine-et-Marne représente 50 % du territoire francilien et où elle est l'espace ouvert sur la province le plus proche de l'Europe, laquelle n'est pas riveraine de la façade maritime atlantique, les interconnexions indispensables avec les réseaux RER et transiliens seront réalisées ? En commission, nous avons amendé votre projet en ce sens. Mais nous n'avons pas encore reçu toutes les garanties nécessaires.
Telles sont, monsieur le secrétaire d'État, les réserves que je voulais faire. Elles restent marginales par rapport à l'ensemble de votre texte que je salue avec enthousiasme, car il fait honneur à notre exécutif, invitant toute la France à se lancer dans une grande aventure digne du XXIe siècle. C'est pourquoi je suis certain que mes collègues, après vous avoir écouté, sauront maintenant nous montrer qu'ils vous ont entendu. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Patrick Ollier, président et rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite situer le Grand Paris dans une ambition mondiale.
À l'heure où la mondialisation tient déjà lieu d'environnement naturel pour nos économies et notre mode de vie, la place n'est plus aux simples capitales, elle est aux villes-monde ! Étrange concept que celui-ci ! Établie en 1999 par l'Université de Loughborough, la notion de ville-monde désigne toute ville qui, à raison tant de son poids économique que de la place qu'elle a laissée dans l'histoire, mérite de figurer au premier rang des métropoles de la planète. Si Paris compte, au même titre que New York, Londres et Tokyo parmi les quatre villes-monde actuellement recensées, il ne faut pas se leurrer pour autant.
Les prétendantes au statut de ville-monde sont nombreuses : Bombay, Milan, Shanghai, Chicago. Ce sont des concurrents sérieux. Il importe donc de conforter et, plus encore, de faire progresser la place de Paris et de son environnement, qui ne doit pas se laisser enfermer, de façon nostalgique, dans l'image d'une ville romantique où il fait bon vivre ! Depuis plusieurs années, Paris a en effet l'image d'une belle endormie qui s'est, peu à peu, laissée distancer par de nouveaux concurrents. En effet, mes chers collègues, la mondialisation a notamment eu pour effet de susciter une compétition extrêmement forte entre diverses mégalopoles à travers le monde, qui sont autant de centres économiques, de centres de production industrielle, de centres culturels. Plus que jamais un sursaut était nécessaire. À l'image de ce que Paul Delouvrier avait lancé dès la fin des années cinquante sous la houlette du général de Gaulle, anticipant dès cette époque la concurrence que l'émergence de grandes cités allait nécessairement engendrer, il faut aujourd'hui conduire une politique qui soit à la fois globale et volontariste.
Souvenons-nous que c'est ce type d'impulsion qui permit à l'Île-de-France de se doter d'une politique cohérente tant en matière d'aménagement que d'urbanisme et que c'est sur cette base que la région capitale a vu naître le RER et les villes nouvelles.
Aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'État, nous avons pour ambition de faire de l'agglomération parisienne une ville-monde à l'avant-garde de l'innovation, forte de son patrimoine historique exceptionnel.
C'est tout à l'honneur de ce gouvernement d'avoir pris le problème de l'avenir du Grand Paris à bras-le-corps et d'avoir substitué à quelques initiatives éparses une vision d'ensemble, seule façon d'être efficace et d'afficher une véritable ambition. Ce projet de loi, mes chers collègues, vise, pour évoquer les propos de Nicolas Sarkozy, « à mettre l'homme au coeur de la ville, pour reconstruire le lien civique, restaurer le lien social, et en faire un lieu de progrès et de partage ». Le Président de la République s'est ainsi personnellement investi dans ce projet en vous confiant, monsieur le secrétaire d'État, pour mission de déterminer les orientations stratégiques du Gouvernement pour le développement durable de la région capitale.
Nous écrivons donc ensemble cette nouvelle page de l'histoire de la région capitale en examinant ce projet de loi, pour déterminer les instruments juridiques nécessaires à une action rapide et efficace, mais aussi pour préparer le réseau de transports nécessaire à ce projet. Le Gouvernement a défini un calendrier et des montages financiers : là encore, on ne peut que se féliciter de ce volontarisme. Je tiens à ce sujet à souligner l'importance du dialogue que l'État doit entretenir avec les élus de terrain sur ce projet : rien ne pourra se faire sans les collectivités intéressées, a fortiori contre elles, et je sais que vous y êtes attentif, monsieur le secrétaire d'État. Vous avez en effet abondamment discuté en amont – en dépit de tout ce qui est dit et j'en suis le témoin – avec l'ensemble des élus concernés ; il importe, mais je sais que telle est votre volonté, de maintenir ce dialogue afin que chacun puisse pleinement participer à l'élaboration du Grand Paris et, tout le monde le souhaite, se féliciter de sa réussite.
Première étape d'une série de textes qui constitueront véritablement le projet du Grand Paris, ce projet de loi aborde le dispositif de transport nécessaire à l'irrigation du futur Grand Paris. Il crée les instruments juridiques indispensables à sa mise en oeuvre, prévoit les moyens d'accélération des procédures et crée le premier pôle de développement, celui du plateau de Saclay.
L'État pourra conclure avec les communes ou établissements publics de coopération intercommunale intéressés des contrats de développement territorial, outil juridique nouveau qui vise à l'aménagement urbain et économique des espaces. Instrument de dialogue autant que de développement, ces contrats devraient permettre à l'avenir de revitaliser considérablement le tissu francilien et, de ce fait, de contribuer activement au développement du Grand Paris. Par ailleurs, il est prévu de créer un établissement public spécifique, la Société du Grand Paris, qui aura la charge d'établir un schéma d'ensemble du réseau de transports publics du Grand Paris et d'assurer la maîtrise d'ouvrage des travaux nécessaires à l'établissement du réseau de transports publics dans la région capitale. Comme vous pouvez le constater, l'État a véritablement mis tous les atouts de son côté pour réussir cette opération d'envergure. Certes, c'est le retour de l'État organisateur, de l'État aménageur. Personnellement, je m'en réjouis,…
…après les constats terribles de notre inefficacité pendant tant et tant d'années. Seul l'État pouvait nous faire sortir de nos atermoiements afin de redynamiser la région capitale.
Qui d'autre que l'État pouvait afficher son ambition d'investir plus de 35 milliards d'euros en faveur des transports ? Qui d'autre que l'État peut aujourd'hui s'engager dans un processus global d'aménagement qui a vocation à s'étendre sur plus de dix ans ? Qui d'autre que l'État peut passer outre aux réticences locales afin d'aménager la vallée de la Seine et faire du Havre le débouché maritime de la capitale ? Personne, nous le savons bien. Bravo, monsieur le secrétaire d'État, de vous être engagé dans cette voie.
Deuxième point important de ce projet de loi, l'aménagement du plateau de Saclay et la constitution, dans son périmètre, d'un pôle scientifique et de recherche de dimension internationale. On le sait, l'Île-de-France représente un lieu tout à fait exceptionnel sur le plan de la recherche et de l'enseignement supérieur en regroupant sur son territoire plus de 45 % de la recherche française tant publique que privée ainsi qu'un ensemble comprenant pas moins de dix-sept universités. Afin de fédérer les énergies et le potentiel absolument sans équivalent en France du plateau de Saclay – où sont établis plusieurs établissements de renom parmi lesquels l'École Polytechnique, HEC, l'École Centrale, Supélec, l'École normale supérieure de Cachan, une partie de l'Université de Paris XI Paris-Sud –, il est prévu qu'un établissement public spécifique là aussi, l'établissement public de Paris-Saclay, soit créé. La commission des affaires économiques, qui s'est saisie pour avis des titres IV et V du projet de loi, a souhaité par le biais de divers amendements et d'une discussion approfondie, en améliorer la gouvernance en s'assurant notamment que les élus concernés au premier chef par les opérations décidées sur le Plateau pourraient être effectivement représentés au conseil d'administration de l'établissement. Par ailleurs, et comme cela se fait déjà pour d'autres autorités de premier plan, nous avons souhaité intégrer la représentation nationale dans le processus, en procédant, préalablement à sa nomination par décret du Président de la République, à l'audition de la personnalité pressentie pour exercer les fonctions de président-directeur général de l'établissement par les commissions permanentes compétentes tant de l'Assemblée nationale que du Sénat, avec un vote pour avis.
Encore une fois, il importe de mobiliser l'ensemble des acteurs sur le projet du Grand Paris qui, ne l'oublions pas, concerne l'ensemble de notre territoire et pas seulement la région capitale. À cet effet, il convient d'insister sur l'effet de levier que cet immense chantier devrait jouer à l'avenir. Certes, le projet est avant tout francilien mais, de même qu'il dépasse largement la seule ville de Paris, de même il a vocation à entraîner avec lui l'activité de la France tout entière et, les infrastructures de transports aidant, à dynamiser l'ensemble des régions. D'ailleurs, toujours avec cette même volonté d'entretenir et de développer la coopération entre les élus locaux et l'État, je souhaite ardemment que le Gouvernement réfléchisse à la possibilité de créer de futurs instruments d'organisation territoriale, adaptés aux futurs pôles de développement des « directives locales d'aménagement », sur le modèle des directives territoriales d'aménagement qui ont vu le jour en 1994. Ces directives serviraient ainsi de cadre fixant les orientations des futurs pôles. Il serait ensuite facile de réunir les élus et de contractualiser en fonction des orientations prévues, et les EPIC mettraient en oeuvre ces contrats d'objectifs. C'est un souhait auquel je souhaiterais que vous réfléchissiez.
Enfin, je souhaite saluer la volonté du Gouvernement de vouloir préserver, sur le site même du plateau de Saclay, des espaces agricoles – 2 300 hectares – propres à inscrire le développement de cet espace dans une perspective de développement durable. Je remercie M. Pierre Lasbordes d'avoir, en commission, argumenté avec compétence pour cette protection. En tant que président de la commission des affaires économiques, je ne peux qu'être sensible à un objectif de maintien des espaces agricoles déjà affirmé dans la loi relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement et appelé à figurer à la première place dans la future loi de modernisation de l'agriculture. Nous devons être capables de démontrer que tout cela est parfaitement compatible avec un aménagement raisonné de la région capitale.
Comme vous pouvez le constater, la commission des affaires économiques a décidé de s'engager très fermement à vos côtés, monsieur le secrétaire d'État, pour mettre le Grand Paris au coeur de notre attractivité française. N'en doutons pas, ce texte inaugure une ambition de long terme dont chaque commune française tirera profit : c'est la raison pour laquelle je ne doute pas que notre assemblée vote en faveur d'un projet de loi qui est également un acte de foi en l'avenir de la région capitale. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Jacques Alain Bénisti, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, saisie pour avis.
(M. Marc Laffineur remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la présidence.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi que notre assemblée s'apprête à examiner n'est bien sûr qu'une première étape sur la voie du Grand Paris, mais il est déjà très attendu. Pendant des décennies, notre politique d'aménagement du territoire a conçu l'expansion de notre belle métropole comme un problème plutôt que comme une chance pour la France. Aujourd'hui, nous allons enfin rompre avec une approche trop timorée et trop étroite du développement de la région parisienne, en conduisant de grands projets à l'échelle métropolitaine.
Il est bien évident que les limites administratives de Paris ne sont plus en phase avec sa réalité économique et sociale. C'est à l'échelle de l'agglomération parisienne que nous pourrons, à l'instar de ce qui a été fait pour le Grand Londres, penser de manière pertinente les modes de transport, les logements, l'aménagement urbain et les activités économiques. Le projet de loi qui nous est présenté permettra de donner un caractère bien concret à ce changement d'échelle, en reliant rapidement entre eux les grands pôles de développement économique, ce qui de toute évidence améliorera la vie quotidienne de nos concitoyens et renforcera la compétitivité de nos entreprises, dont le tissu est si dense en Île-de-France.
Pendant nos débats en commission, des considérations locales, des schémas ou des enjeux régionaux ont souvent été évoqués par les uns et les autres. Cela peut bien sûr se comprendre, d'autant que si chacun d'entre nous délibère ici en tant qu'élu de la nation, nombreuses sont les expériences d'élu local qui peuvent utilement éclairer nos choix de législateur. Mais je tiens à rappeler que le Grand Paris n'est pas un projet seulement local ; il est avant tout une ambition nationale, car il est dans l'intérêt général de lancer rapidement le grand chantier du métro automatique en rocade autour de Paris. Si la croissance économique augmente, si des « ponts » sont lancés pour désenclaver certaines de nos banlieues, si les transports deviennent plus écologiques, plus rapides et plus sûrs, c'est bien la France dans son ensemble qui en bénéficiera.
Cette stratégie sera élaborée, à l'échelle métropolitaine, en ne réduisant ni la concertation démocratique,…
…ni les préoccupations environnementales, avant d'être mise en oeuvre par la Société du Grand Paris, ce nouvel établissement public industriel et commercial placé sous le contrôle de l'État. Les projets de formation, de recherche et d'innovation industrielle seront quant à eux stimulés par un second ÉPIC, l'établissement public de Paris-Saclay. Enfin, les contrats de développement territoriaux permettront à l'État d'élaborer en commun avec les communes et les intercommunalités parisiennes des initiatives d'aménagement urbain qui s'inscriront dans une logique cohérente à l'échelle métropolitaine : il s'agira bien d'un dialogue et d'une négociation, car aucune zone d'aménagement différé ne pourra être créée dans ce cadre sans l'adhésion préalable des collectivités au projet.
Ces innovations seront donc très utiles pour mener une politique moins disparate d'aménagement de l'espace et de développement économique en faveur de l'agglomération parisienne.
Monsieur le secrétaire d'État, quelques correctifs ou compléments nous ont toutefois paru nécessaires et je me réjouis à cet égard que la nouvelle commission du développement durable ait souscrit à la quasi-totalité des changements proposés par la commission des lois. Ceux-ci sont donc déjà intégrés au texte qui nous sert aujourd'hui de base de discussion.
La commission des lois a d'abord souhaité confier à la Commission nationale du débat public, plutôt qu'au préfet de région, qui a bien d'autres choses à faire, le pilotage du débat public précédant l'élaboration du schéma d'ensemble du réseau de transports publics du Grand Paris. L'audition du président de cette autorité administrative indépendante m'a en effet convaincu qu'elle dispose de l'expérience et de la crédibilité requises pour mener cette tâche dans les meilleures conditions d'intégrité et d'indépendance absolue.
La commission des lois a également souhaité mieux associer les communes et leurs groupements à l'action des deux nouveaux établissements publics, en améliorant leur représentation au sein de leurs conseils d'administration ou de surveillance, en prévoyant leur consultation sur toute modification ultérieure de leur périmètre d'intervention et en leur permettant de confier des missions complémentaires à ces établissements. Nous avons aussi estimé essentiel pour les collectivités d'obtenir l'inscription, dans les contrats de développement territorial, de la liste et du périmètre des zones d'aménagement différé, les ZAD, dont la création est prévue, ainsi que des conditions générales de financement de l'ensemble des projets de développement économique et urbain inscrits dans chaque contrat. Tout cela figure donc aujourd'hui dans le texte adopté par la commission du développement durable.
Il nous reste toutefois à fixer dans la loi le socle indispensable de publicité à garantir pour ces contrats de développement territorial, car on ne peut renvoyer entièrement cette responsabilité au pouvoir réglementaire s'agissant d'un nouvel outil juridique : en tant que législateur, nous devons bien exercer notre compétence sur cette question. Je vous proposerai donc, avec le rapporteur de la commission du développement durable, de rendre applicables aux contrats de développement territorial des modalités de publicité déjà existantes pour certaines délibérations municipales à caractère économique. Cela permettra d'assurer la nécessaire transparence sur ces décisions importantes, tout en restant dans un cadre juridique connu.
Enfin, la commission des lois a décidé de renforcer, par plusieurs amendements, l'encadrement juridique et financier des interventions des deux nouveaux établissements publics. Il s'agissait d'abord de mieux préciser l'enchaînement des différentes étapes de l'élaboration du schéma d'ensemble du réseau de transports publics du Grand Paris ; d'écarter en tout état de cause la distribution de jetons de présence ou rémunérations exceptionnelles aux membres du conseil de surveillance de la Société du Grand Paris.
Ces changements ont bien été intégrés au texte de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire et j'en remercie évidemment son président, Christian Jacob.
En revanche, tel n'a pas été le cas de l'amendement proposé par la commission des lois et tendant à soumettre l'activité des éventuelles filiales de cet établissement et de celui de Paris-Saclay à un contrôle effectif du commissaire du Gouvernement. En effet, cette question du contrôle de l'activité des filiales ne s'est pas posée devant la commission du développement durable, celle-ci ayant tout simplement décidé, comme le proposaient du reste nos collègues du groupe SRC, de priver le commissaire du Gouvernement de tout pouvoir d'opposition, même aux décisions du conseil d'administration de l'établissement public.
Ce choix me paraît d'autant plus surprenant et contestable que ces mêmes pouvoirs sont prévus pour la Société du Grand Paris, établissement public dirigé par un conseil de surveillance au sein duquel l'État sera majoritaire. Dans le cas de Saclay, ce filet de sécurité serait donc supprimé alors même que l'État est minoritaire au sein du conseil d'administration de cet établissement public, qu'il devrait pourtant largement financer. Voilà qui serait pour le moins curieux et imprudent.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous proposerai donc par voie d'amendement de revenir à la solution adoptée par la commission des lois.
Pour conclure, mes chers collègues, je vous rappelle que, tout en proposant ces améliorations, la commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi. Si ce texte ne peut naturellement résumer à lui seul le projet du Grand Paris, il permet d'en préparer dès aujourd'hui l'émergence. Cette initiative mérite à mes yeux le soutien du plus grand nombre d'entre nous, car, en favorisant concrètement un développement économique et urbain de la région parisienne plus harmonieux et plus ambitieux, c'est à la nation tout entière que nous rendrons service. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Christian Jacob, président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Mes chers collègues, permettez-moi d'abord de remercier tout particulièrement notre rapporteur pour le travail qu'il a accompli dans un délai relativement court – il l'a dit lui-même –, ce qui ne l'a pas empêché de procéder à de nombreuses auditions fort constructives et d'associer à sa démarche le plus grand nombre de parties intéressées.
Je tiens également à remercier Patrick Ollier, président et rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques,…
…dont la commission et les amendements ont apporté à notre texte une contribution importante, et Jacques Alain Bénisti, rapporteur pour avis de la commission des lois.
Je tiens également à vous remercier, cher Christian Blanc, monsieur le secrétaire d'État, d'être venu présenter le texte devant la commission et d'avoir assisté aux trois séances qu'elle a consacrées à son examen. Je ne doute pas que vous serez d'une grande disponibilité en séance publique, comme vous l'avez été en commission, et que vous répondrez de même très précisément aux questions qui ne manqueront pas de vous être posées. Merci encore d'avoir été aussi présent et disponible lors de nos travaux.
La commission a consacré ces derniers à tenter d'améliorer plusieurs équilibres qui traduisaient les objectifs initiaux du projet du Grand Paris dans le texte que vous nous avez soumis.
Le premier équilibre tient à l'articulation des rôles respectifs de l'État, des collectivités territoriales et du public. L'efficacité justifie que l'État soit au coeur du dispositif s'agissant d'un projet d'intérêt national, ainsi que Patrick Ollier l'a rappelé, et que l'on prévoie des dérogations aux procédures de droit commun. Cependant, il nous a semblé nécessaire d'associer plus étroitement les parties intéressées – public et collectivités locales – à l'élaboration puis à la gestion du projet.
Voilà pourquoi nous avons souhaité réécrire l'article 3 afin de redonner à la Commission nationale du débat public évoquée tout à l'heure par Jacques Alain Bénisti, et dont tous reconnaissent la compétence et l'indépendance, un rôle central dans la consultation et l'information du public. De même, il a semblé nécessaire de modifier le système de gouvernance prévu pour les deux établissements publics que sont la Société du Grand Paris et l'Établissement Paris-Saclay, afin d'y associer plus étroitement les représentants des collectivités locales concernées.
Le second équilibre que nous avons recherché réside dans l'articulation entre ce futur réseau de transports et les infrastructures existantes. Pour notre commission, il était évident qu'il ne fallait instaurer aucune concurrence entre les réseaux de transport public existants et le futur métro automatique en rocade. Nous avons donc introduit dans le texte plusieurs principes essentiels à nos yeux.
Le premier est l'articulation des réseaux présents ou à venir, afin que le maillage final assure toutes les connexions possibles avec les lignes actuelles de métro, de RER ou de train.
Le deuxième principe est l'indépendance des financements alloués à la réalisation de la double boucle à l'égard des travaux d'amélioration et de modernisation des infrastructures existantes. En effet, il ne saurait évidemment y avoir de concurrence en la matière. Conformément à cette logique, nous avons souhaité que le STIF soit consulté sur le projet de schéma des infrastructures avant même que celui-ci soit élaboré et soumis au public. Il s'agit d'une avancée importante.
En effet, si le tracé définitif des lignes et l'emplacement des gares seront fixés au terme de la consultation, l'élaboration du schéma des nouvelles infrastructures ne peut assurément faire abstraction des projets de transports publics conduits par le STIF. Celui-ci devra donc être consulté ; un décret en Conseil d'État prévoira les modalités de cette consultation.
Le troisième principe décliné par la commission exige de mieux prendre en considération les enjeux environnementaux et les conclusions du Grenelle de l'environnement. Certes, l'étude d'impact que vous avez annexée au projet de loi applique les enjeux environnementaux aux objectifs du Grand Paris. Mais la commission du développement durable, rejoignant plusieurs préoccupations de la commission des lois, a souhaité conforter ces dispositions, en rapprochant les procédures de débat public prévues notamment à l'article 3 des normes de droit commun visées par la loi Grenelle I et en prévoyant d'appliquer les objectifs de multimodalité des transports aux infrastructures reliées aux gares ou aux aires de stationnement.
Ainsi enrichi par le travail des trois rapporteurs et des trois commissions associées, le texte est désormais parfaitement équilibré. J'inviterai donc nos collègues à adopter ce bon texte à l'issue de nos débats, monsieur le secrétaire d'État. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe SRC une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est àMme Annick Lepetit.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de Grand Paris commençait pourtant bien.
Il est tout à fait louable d'afficher de grandes ambitions pour la région capitale, et l'on ne pouvait qu'être d'accord avec le Président de la République lorsqu'il annonçait le 29 avril dernier vouloir faire entrer la métropole parisienne dans le monde de l'après-Kyoto, afin que « la ville s'allie avec la nature au lieu de la combattre ». Le travail titanesque fourni par dix équipes constituées d'architectes, d'urbanistes, d'ingénieurs, de poètes même, tous mondialement reconnus,…
…nous a permis d'imaginer une Île-de-France plus grande, plus belle, plus humaine. Pas moins de six mille pages d'idées nouvelles sont venues nourrir notre réflexion. Les multiples solutions ainsi proposées pour le logement, les transports, l'urbanisme, l'emploi, le vivre ensemble ou l'accès à la culture ont étendu le champ des possibles en nous offrant, à nous, dirigeants politiques, une formidable boîte à outils où puiser.
Puis le projet de loi du Gouvernement est arrivé. Il faut bien le reconnaître : le Grand Paris que vous nous proposez, monsieur le secrétaire d'État, se limite à un schéma de transport pour un métro automatique reliant entre eux des pôles économiques totalement déconnectés des bassins de vie, et à l'organisation du Plateau de Saclay.
En somme, vous n'avez rien repris du travail des architectes. Au regard de tout ce qui a été imaginé, le résultat est même pauvre. À quoi sert-il de mobiliser les esprits les plus brillants si l'on ne s'inspire pas de leurs propositions ? Le soir de l'inauguration de l'exposition présentant leur travail, au lieu d'écouter ce qu'ils avaient à vous dire, au lieu de vous en servir pour construire et enrichir vos projets, vous leur avez présenté votre propre vision du Grand Paris. Je comprends la grande déception de ceux qui ont cru en la parole de Nicolas Sarkozy, et la colère que leur inspirent la méthode employée et le maigre résultat qui en découle.
Il y a de quoi désenchanter. Sans doute est-ce pour cette raison que vous achetez des encarts publicitaires dans la presse. En voici un exemplaire, que je montre à nos collègues au cas où certains ne l'auraient pas vu : « Le Grand Paris, une grande idée qui a besoin des vôtres ».
Ne les confondez pas avec ceux de Jean-Paul Huchon ! Il y a investi un million par an !
Ces encarts entretiennent l'illusion : vous appelez nos concitoyens à faire part au mois de décembre d'idées dont vous ne tiendrez plus compte après le 21 mars ! Voilà qui est bien dommage ; les habitants de notre métropole n'ont pas mérité cela.
Bien dommage, car nous devons effectivement réfléchir à la place de Paris à l'échelle de la planète. Notre capitale est l'un des lieux majeurs de la mondialisation ; elle est intégrée aux flux de communication et d'échanges de biens, de services, d'idées. Paris ville mondiale : voilà un fait que nous devons continuer d'encourager et de développer dans un monde où la concurrence, dans tous les domaines, va toujours plus vite. Il faut tenir notre place, notre rang, tout en préservant la qualité de vie de tous les habitants.
Ce débat n'oppose donc pas les anciens aux modernes, les conservateurs qui ne voudraient rien changer aux visionnaires seuls porteurs d'une ambition pour la région capitale. Il s'agit d'un débat sur la définition de cette ambition et sur le meilleur moyen de la mettre en oeuvre. Il s'agit d'un débat sur la place et le rôle de tous les acteurs qui contribueront à porter, à renforcer et à accélérer le développement juste, équilibré et durable de la métropole.
Sur toutes ces questions, des divergences profondes nous opposent.
Avant de parler de ce que renferme votre texte, j'évoquerai tout ce qui n'y figure pas et qui, à nos yeux, fait cruellement défaut. Ainsi, il est aberrant qu'un projet de loi qui prétend structurer l'organisation urbaine et économique de la région ne consacre pas un article, pas un mot au logement.
L'Île-de-France souffre particulièrement dans ce domaine. Il y manque des centaines de milliers de logements et la mise en oeuvre du droit au logement opposable constitue, reconnaissons-le, un véritable échec. De notre côté, nous avions plutôt milité pour qu'un plus grand nombre de logements soient construits.
Combien de logements sociaux dans le schéma directeur de la région ? Vous vous limitez à 20 % !
Même si l'activité des individus vous importe plus que la manière dont ils vivent une fois sortis du travail, vous ne pouvez ignorer cette situation et ses conséquences sur la vie de millions de personnes. Fût-ce d'un point de vue strictement économique, nous savons tous que la mobilité dans l'emploi est aujourd'hui fortement entravée par les difficultés à se loger que rencontrent les candidats à l'embauche.
La lutte contre la fragmentation sociale de la métropole et l'aide au désenclavement des quartiers est tout aussi absente de votre vision, monsieur le secrétaire d'État. Au contraire, même, vous fondez votre projet sur l'idée que seules certaines zones mériteraient d'être activement soutenues pour développer leur potentiel économique. Rien n'est dit sur les conséquences de la concentration des richesses dans certains lieux. Qu'en sera-t-il de la solidarité financière entre les territoires ?
Autre manque flagrant, qui fait que votre texte semble sur certains points un peu daté – vous me pardonnerez cette expression, monsieur le secrétaire d'État – : le développement durable. Certes, la notion est évoquée dans les discours et le travail actif que nous avons mené en commission a permis de faire quelques ajouts en ce sens, et j'en profite pour remercier notre rapporteur, Yves Albarello.
Mais concrètement, qu'en sera-t-il ? En faisant traverser par votre métro des zones peu denses, vous allez inévitablement provoquer un étalement urbain, qui constitue la négation de tous les processus encouragés par le Grenelle de l'environnement. À l'heure où la ville dense est perçue comme l'une des seules manières de réduire durablement et efficacement notre consommation d'énergie, vous mettez tout en place pour que l'on commette les mêmes erreurs qu'au XXe siècle. On a bien dû mal à faire ressortir de votre projet de loi une véritable vision urbaine, géographique, économique, sociale et finalement humaine de ce que devrait être, selon vous, la région de demain.
La grande ambition de construire une nouvelle métropole est devenue un nouveau métro. Vous me répondrez sans doute, comme vous l'avez fait au cours des réunions de la commission, monsieur le secrétaire d'État, que nous n'en sommes qu'à l'acte I du Grand Paris et que nos interrogations trouveront réponse dans de prochains textes de loi. Mais en attendant d'éventuels actes II, III ou IV, dont on ne sait ni quand, ni par qui ils seront présentés devant notre assemblée, nous n'avons que ce texte et, malheureusement, il est décevant, eu égard à la faible ambition qui l'anime, et inquiétant, compte tenu des présupposés sur lesquels il est bâti.
L'une des grandes promesses de ce projet est d'entraîner la création d'un million d'emplois en Île-de-France au cours des quinze prochaines années en suscitant une croissance économique double de la moyenne nationale. Au-delà de la faible ambition globale du texte, je m'inquiète de la crédibilité de cet objectif.
Bien sûr, la création d'emplois constitue une priorité et je soutiendrai toutes les mesures susceptibles d'avoir un impact positif sur cette dynamique. Mais force est de constater que votre objectif, monsieur le secrétaire d'État, est en complète contradiction avec toutes les études économiques et démographiques connues, y compris celles fournies par l'INSEE.
En effet, il a été démontré qu'un lien fort unit l'évolution de la population active et l'évolution de l'emploi. Or la population active a cessé de croître au niveau national depuis 2006 : pour l'Île-de-France, seuls les mouvements migratoires laissent espérer une légère progression dans les années à venir, mais à un rythme qui n'aura plus rien à voir avec celui des années antérieures. Il faudrait dès lors plus de 13 millions d'habitants en Île-de-France en 2020 pour compter suffisamment d'actifs, soit 1 million de plus que les estimations les plus optimistes.
Dans ce contexte, annoncer la création de plus de 65 000 emplois supplémentaires par an, ce qui suppose un rythme deux fois et demi supérieur à celui observé depuis quinze ans, revient à annoncer une déconnexion totalement inédite et improbable entre population active et emploi. Ou alors faut-il penser que vous comptez vous appuyer sur une immigration massive vers la région parisienne, hypothèse que vous n'avez toutefois jamais évoquée ?
Celle-ci devra provenir, d'une part, du reste de la France, et en ce cas, je pense que nos collègues qui ne sont pas élus d'Île-de-France, quels que soient leurs bancs, auront un avis à donner sur le futur assèchement économique et démographique de leurs régions.
D'autre part, cette immigration devra venir d'autres pays, auquel cas il faudra le dire haut et fort à vos chers collègues de l'UMP et revoir profondément la politique que vous menez depuis sept ans en ce domaine.
Selon les estimations de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme d'Île-de-France, ce sont 90 000 logements neufs qu'il faudra faire sortir de terre chaque année, chiffre à comparer aux 40 000 logements construits par an en moyenne depuis 1989, aux 60 000 inscrits dans le projet du schéma directeur d'Île-de-France et aux 70 000 annoncés par le chef de l'État. Je n'ai pas trouvé une seule ligne dans ce projet de loi qui tente d'apporter une solution à cette question.
L'analyse est la même au sujet de l'immobilier de bureau. En supposant que les trois quarts des emplois soient créés dans le secteur tertiaire et soient localisés principalement dans les nouveaux pôles, c'est à un besoin de 7 millions de mètres carrés de bureaux qu'il faudra répondre dans les quinze prochaines années, soit bien plus que ce qui a été construit lors des quinze dernières années. L'inertie est très forte dans ce secteur et l'on sait déjà où sera localisée une grande partie des futurs bureaux : mis à part ceux situés à La Défense, ils sont en majorité éloignés du tracé de votre futur métro.
Ces constatations sont très inquiétantes car si vos hypothèses de départ sont irréalistes et déconnectées de la réalité, votre projet de transport ne pourra être rentabilisé et deviendra un gouffre financier que l'ensemble des Français devra supporter.
Je crois que votre texte souffre avant tout d'un problème de diagnostic. Vous nous avez expliqué que l'objectif de votre grand huit était de relier entre eux les différents pôles que vous comptez créer. Aujourd'hui, les trajets d'une entreprise à une autre ne représentent que 3 % de l'ensemble des déplacements quotidiens des personnes,…
…et seulement 1,7 % pour ce qui est des transports en commun. C'est vingt fois moins que les déplacements domicile-travail, que vous n'évoquez même pas, sans parler des déplacements autres, comme les loisirs, par exemple, qui jusqu'à nouvel ordre existent encore.
Au vu de ces chiffres, on ne peut que se demander comment il est possible de bâtir un projet d'une telle ampleur sur l'hypothèse qu'améliorer les déplacements travail-travail va apporter de la croissance.
Un problème de diagnostic se pose encore s'agissant de l'importance que vous donnez aux pôles économiques. Il suffit de regarder au-delà de nos frontières pour constater que la logique de concentration des forces productives dans quelques pôles spécialisés va à l'encontre de la manière dont se recomposent les autres grandes métropoles. La seule ville au monde fondée sur la labellisation de quelques quartiers spécialisés est Dubaï. Cela ne peut tout de même pas être votre modèle, monsieur le secrétaire d'État.
La dynamique industrielle et commerciale qui existe en Île-de-France naît de la possibilité pour les différents porteurs de projets de se croiser et d'inventer les activités économiques de demain. C'est l'agglomération de ces excellences qui crée les conditions de l'émergence, en certains endroits, de concentrations d'emplois. Les pôles sont donc une conséquence de la dynamique francilienne, certainement pas une cause.
La majorité des entreprises naissent au coeur de la métropole pour s'installer ensuite dans la deuxième couronne, éventuellement plus loin. L'enjeu n'est donc pas de renforcer la spécialisation de ces pôles mais de mieux intégrer cette deuxième couronne au coeur de la métropole, ce que ne permettra pas votre nouveau métro lorsqu'il sera construit.
Vous ne vous êtes pas seulement trompé sur le diagnostic et sur les prévisions, vous vous êtes également trompé sur la méthode. Comment prétendre construire la métropole du XXIe siècle en utilisant les pratiques des années cinquante ?
Le monde a changé depuis Delouvrier et plus encore depuis le baron Haussmann. Un projet de cette ampleur ne peut plus se faire uniquement par injonction venant du sommet de l'État, sans concertation avec les élus et les citoyens.
Vous avez agi comme si la décentralisation n'avait pas eu lieu ces trente dernières années, comme si la société civile n'avait pas pris son essor, comme si le schéma directeur de l'Île-de-France n'existait pas alors qu'il est un instrument extrêmement utile. Il a d'ailleurs fait l'objet d'une concertation approfondie et a été approuvé par le conseil régional et six conseils généraux. Il est à même d'entraîner une dynamique collective là où votre projet ne conduit qu'à clivages et blocages. Ce n'est pas en pensant que l'on a raison seul contre tous que l'on construit un projet fédérateur, porteur de dynamiques et d'espoirs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Venons en maintenant au texte à proprement parler. Au coeur de votre dispositif, il y a la création de cette Société du Grand Paris à laquelle le titre II est consacré. Elle est chargée d'élaborer, de faire réaliser et de financer les infrastructures et matériels d'exploitation. Elle obtient également le rôle d'aménageur dans le périmètre des gares.
On peut s'interroger sur la pertinence même de créer cette nouvelle structure. N'êtes-vous pas en train d'ajouter une couche au millefeuille administratif que le Gouvernement et sa majorité critiquent pourtant ?
Si cette création signe le retour de l'État dans les transports franciliens, elle est surtout la marque d'un violent recul en matière de décentralisation. Je ne conteste pas à l'État le droit de venir aider les collectivités locales à financer les transports publics, ...
…bien au contraire puisque son désengagement financier est même en partie responsable de l'état actuel du réseau.
Depuis 2002, les sommes que l'État a consacrées aux transports franciliens sont en chute de 48 %. Mais la forme que prend ce retour est un véritable coup porté à la décentralisation. La loi du 13 août 2004 a donné à la région la majorité des sièges au conseil d'administration du STIF et le réseau que les élus se sont vu confier à ce moment-là était déjà en assez mauvais état.
Le manque flagrant d'investissements depuis les années quatre-vingt-dix ainsi que la concentration des efforts sur la ligne 14 et le RER E ont conduit à la vétusté du matériel roulant et à la saturation de plusieurs lignes.
La région et les départements d'Île-de-France se sont lancés dans la préparation du plan de mobilisation pour les transports, d'un montant de 18 milliards d'euros, afin de répondre aux attentes immédiates de nos concitoyens. Alors que vous faites de la vitesse un argument pour expliquer toutes les dérogations au droit commun que vous organisez dans ce texte, je constate que l'État est beaucoup moins prompt à donner une réponse quant à sa participation ou non à ce plan.
L'utilité de cette Société du Grand Paris est toujours à démontrer car le Syndicat des transports publics d'Île-de-France a la compétence et la légitimité pour planifier la construction de nouvelles lignes. Au lieu de cela, ce projet de loi risque de faire peser sur lui des charges inconnues à ce jour, ce qui est probablement anticonstitutionnel.
Les articles 1 à 4 traitent de l'élaboration, de la conception et de la construction d'un projet de métro en Île-de-France qui, comme il est indiqué dans l'étude d'impact, devra être financé par la Société du Grand Paris. Pour ce faire, elle empruntera plusieurs milliards d'euros et confiera la maîtrise d'ouvrage et la gestion ultérieure du réseau à la RATP. Celui-ci sera ensuite confié au STIF qui en déléguera l'exploitation à un exploitant de son choix et en assumera le déficit d'exploitation. La loi ne précise nulle part ces transferts de charges.
Les redevances de réseau imposées à la RATP ne sont pas détaillées et il n'est pas possible à ce stade de distinguer quelle est la part de l'amortissement de la dette de la Société du Grand Paris. Le péage d'infrastructures que la RATP imposera à l'exploitant n'est même pas évoqué. Vous le savez fort bien, monsieur le secrétaire d'État, vous qui connaissez parfaitement ces sujets.
Ces transferts financiers détermineront le déficit d'exploitation de la future infrastructure, qui sera imposée au STIF. En cela, la loi n'est pas intelligible et ne met pas en place les dispositifs permettant de préciser ces éléments. Le coût de cette nouvelle infrastructure, considérable, risque de faire peser de très importantes charges financières sur le STIF. Le rapport de notre collègue Gilles Carrez évoque plusieurs centaines de millions d'euros. Ces charges obligatoires sont susceptibles d'obérer sa capacité à assumer ses autres missions, je pense notamment aux projets d'urgence qui sont déjà prêts et qu'il faut mettre en oeuvre.
C'est pour cette raison que ce projet de loi est contraire au principe de libre administration. Une méthode simple pour sortir de cette situation, sans attendre que le Conseil constitutionnel vous y oblige, monsieur le secrétaire d'État, consisterait à inscrire dans le projet de loi l'avis conforme du STIF, comme le propose l'un de nos amendements.
Le fonctionnement de cette Société du Grand Paris pose aussi problème : votre choix de la bâtir sous la forme d'un établissement public industriel et commercial permet à l'État d'y concentrer tous les pouvoirs. Les collectivités territoriales pourront, certes, venir faire de la figuration dans le conseil de surveillance et dans le comité constitué des représentants des communes et des EPCI, mais leur avis n'aura aucun impact. Le vrai organe de décision sera le directoire, dont les membres sont nommés par décret. C'est un recul démocratique majeur car, depuis que la gauche a lancé le mouvement de la décentralisation il y a près de trente ans, c'est la première fois que l'on éloigne la prise de décision des élus qui en avaient la charge. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Le vocabulaire employé, plus proche de la société anonyme que de l'établissement public, ne peut que faire naître quelques doutes sur l'évolution de cette structure. Il sera tellement facile et tentant de la privatiser dans quelques années.
Les prérogatives que vous confiez à la Société du Grand Paris sont exorbitantes du droit commun en matière d'urbanisme et d'aménagement. Des dérogations inédites lui sont ainsi offertes, comme la possibilité d'acquérir, par voie d'expropriation ou de préemption, des biens de toutes natures nécessaires à ses opérations d'aménagement du réseau de transport. Les communes se verront ainsi dépossédées de la maîtrise de leurs sols sur des portions importantes de leur territoire. De même, les propriétés des collectivités publiques et de leurs établissements situées autour des gares seront cédées gratuitement à la Société du Grand Paris, à sa demande.
Par ailleurs, la maîtrise d'ouvrage publique de la réalisation des nouvelles infrastructures ne fera plus partie des prérogatives du STIF, mais de celles de la Société du Grand Paris. En revanche, le STIF se verra confier la gestion une fois les travaux finis, sans avoir été associé à la conception ni être intégré à la gouvernance de la Société du Grand Paris.
Après avoir dépossédé le STIF de la quasi-totalité de ses actifs par un amendement nocturne au texte ARAF – je sais que ce n'est pas vous qui l'avez déposé, monsieur le secrétaire d'État, mais le secrétaire d'État chargé des transports – vous lui imposez cela aujourd'hui. Si vous voulez la mort du STIF, pourquoi ne pas le dire clairement ?
Autre nouveauté : les contrats de développement territorial qui peuvent être conclus avec les communes et les intercommunalités. Conformes à votre souhait de revenir sur la décentralisation, ils permettent à l'État de récupérer tout ou partie des compétences d'urbanisme dévolues aux communes. Puisque leur seule limite est de concourir à la réalisation de l'article 1er, ces contrats peuvent concerner des zones dont le périmètre peut être très large, puisqu'il n'est pas défini. Ils pourront même concerner des villes situées en dehors de la région parisienne puisque l'objectif est de bénéficier à l'ensemble du territoire national. On a beaucoup de mal à imaginer de quel pouvoir de négociation un maire pourra disposer face à l'État et comment il pourra refuser de signer de tels contrats.
Surtout, ce fonctionnement annule toute ambition d'un projet urbain cohérent, pensé globalement à l'échelle de la région. Le SDRIF, schéma issu d'une longue et fructueuse concertation entre tous les acteurs, porte cette ambition. Mais vous bloquez son transfert au Conseil d'État depuis plus d'un an.
L'article 18 prévoit que les contrats de développement territorial donnent lieu à une mise en compatibilité du SDRIF et des documents de rang inférieur. Cela signifie que votre projet va transformer l'Île-de-France en un véritable gruyère, où chaque gare, et la zone qui l'entoure, seront autant de trous sortant du schéma global.
Vous annoncez que l'urgence justifie de telles mesures, mais rien ne garantit que cette procédure d'exception permettra de gagner du temps. Ce n'est pas celui que vous passerez à négocier les contrats qui sera long – dans ce domaine, je vous fais confiance et certains préfets sont déjà à l'oeuvre avant même le vote de la loi – mais le mécanisme de mise en compatibilité, qui est juridiquement incertain. Avant que la Société du Grand Paris ne puisse préempter ou exproprier, il faudra mettre en compatibilité le SDRIF, ce qui nécessite une consultation publique et un décret en Conseil d'État. Cela prendra au minimum un an. Ensuite, ce sera au tour des plans locaux d'urbanisme d'être modifiés. Là aussi une consultation publique est nécessaire, ce qui prolonge d'au moins dix mois les délais. En conséquence, entre la signature d'un contrat de développement territorial et le moment où il prendra effet, il faudra attendre près de deux ans, sans compter l'incertitude juridique créée aux quatre coins de l'Île-de-France puisqu'aucun dossier ne saurait être tranché par les juges administratifs tant que des procédures sont en cours. Vous allez ouvrir de véritables nids à contentieux, pour rien, puisque les contrats de développement territorial ne vous permettront pas d'aller plus vite.
Mes chers collègues, je déplore aussi la manière dont nous travaillons. Alors que le coeur de ce projet de loi est un schéma de transport, aucune carte n'a été présentée aux parlementaires. Seule la presse en a eu connaissance.
Ce flou organisé sur le tracé s'accompagne de sérieux doutes quant à l'articulation de votre « grand huit » avec le réseau existant. L'idée, qui paraît pourtant de bon sens, n'était même pas présente dans le texte d'origine, comme l'ont rappelé le président de la commission du développement durable et le rapporteur. Il a fallu un amendement, voté à l'unanimité, pour intégrer au texte cette notion fondamentale. Cela fait naître des craintes légitimes car c'est la preuve que cette interconnexion n'a pas été pensée en amont. C'est ce que nous ont d'ailleurs confirmé les représentants des entreprises gestionnaires des réseaux de transports que nous avons auditionnés.
D'une certaine manière, cela montre aussi votre état d'esprit. Vous semblez souvent travailler comme si rien n'avait existé avant vous. Vous créez un métro sans vous soucier du réseau de transports existant, vous annoncez des pôles de compétitivité sans regarder où est l'activité, vous annoncez un million d'emplois sans vous demander où ces salariés vont habiter, ni comment ils iront travailler.
C'est surtout votre manque de considération pour le réseau existant et les millions de personnes qui l'utilisent chaque jour qui transparaît. Aujourd'hui, la vraie priorité des Franciliens est l'amélioration de leurs conditions de transport.
Elle ne fait que proposer, alors que nous, nous présentons des projets concrets : ce ne sont pas des rêves !
Des priorités y ont été établies comme l'amélioration des RER, le prolongement d'Éole à l'ouest, la désaturation de la ligne 13 ou encore le prolongement de la ligne 14.
Des travaux ont été menés, des études lancées, des débats publics préparés. Mais il y a aujourd'hui un vrai risque de voir ces projets ralentis à cause du « grand huit ».
Que va, par exemple, devenir le prolongement de la ligne 14, voté par le conseil administratif du STIF, alors que cette ligne fait aussi partie de votre projet ?
Comment être sûr que tous les autres projets d'infrastructures de transports ne verront pas leurs fonds siphonnés et réaffectés au « grand huit » ? Des effets d'éviction seront inévitables. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Ah ! Je vous vois vous agiter un peu plus dès que l'on parle du réseau existant, mes chers collègues ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez bien conscience que c'est une priorité puisque vous avez déposé des amendements à ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Étant donné le niveau d'endettement auquel la mauvaise gestion de votre gouvernement a mené nos finances publiques, et vu la manière dont vous maltraitez les collectivités locales et leurs sources de financement, ces craintes sont plus que légitimes. Le financement de ce nouveau métro est d'ailleurs extrêmement flou.
Vous l'avez chiffré à 21 milliards, monsieur le secrétaire d'État, lors de votre audition devant la commission du développement durable. Une partie –on ne sait pas combien puisque vous ne voulez pas citer de chiffres – sera financée par l'emprunt. À quand les arbitrages du Président de la République ?
En tout cas, le Grand Paris est absent des recommandations du rapport Rocard-Juppé sur le grand emprunt.
Par ailleurs, Gilles Carrez a dirigé, il y a quelques mois, une mission chargée de trouver comment financer les 35 milliards annoncés par Nicolas Sarkozy pour les transports franciliens.
Décidément, M. Carrez est indispensable partout : sécurité ou transports !
Avec mes collègues Daniel Goldberg et François Lamy, nous avons participé à cette mission. Le rapport qui en est issu...
..a fait l'objet d'un consensus sur plusieurs points. En particulier, il souligne la nécessité d'un phasage entre ce qu'il était urgent de réaliser, à savoir les projets du plan de mobilisation pour les transports en Île-de-France, dont une partie – je pense à la rocade autour de Paris, Arc Express – peut s'apparenter à une des boucles de votre projet, monsieur le secrétaire d'État, et ce qui devrait attendre 2025, soit le reste de votre « grand huit ». Ce travail a le mérite d'établir une synthèse et d'être salué sur tous ces bancs. Comment se fait-il que le projet de loi n'en tienne aucun compte ?
Ce travail a également le mérite de dégager clairement des priorités et des axes crédibles pour les financer. C'est ce que nous demandons. Puisque vous ne faites jamais référence à ce document, vous comprendrez que la manière dont vous allez financer vos travaux soulève des inquiétudes légitimes, et pas simplement de la part des députés de l'opposition.
..mais toutes les études sérieuses, à commencer par le rapport Carrez, ont démontré qu'il ne fallait pas en attendre plus que quelques centaines de millions d'euros.
J'en viens maintenant au titre V, qui semble une loi dans la loi puisqu'il s'agit de la création du pôle scientifique sur le plateau de Saclay.
Comme pour la Société du Grand Paris, vous rajoutez une couche au millefeuille en étendant cette nouvelle structure sur quarante-neuf communes, soit une zone qui ne respecte ni les frontières des communautés d'agglomération, ni celle de l'opération d'intérêt national. Vous privilégiez une fois de plus la dérogation au droit commun, notamment en créant un syndicat mixte de transport qui aura la capacité, unique à ce jour, d'imposer son plan local de transport au STIF.
Avant de conclure (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), je voudrais faire une remarque sur un cavalier législatif qui s'est glissé dans ce projet de loi à l'article 17. En effet, un amendement adopté en commission prévoit que la RATP devra être séparée en deux entités distinctes une fois ce projet de loi voté, l'une gérant les infrastructures, l'autre assurant l'exploitation.
Sur la forme, cet amendement n'avait rien à faire dans le débat qui nous occupe. Le statut de la RATP nécessite un débat à lui seul, étant donné les enjeux énormes qu'il implique en termes d'emploi, d'organisation des transports et de continuité du service public, à laquelle, j'en suis sûre, vous êtes tous très attachés. Ce sujet mérite mieux qu'un amendement discuté cinq minutes en commission.
Sur le fond, il est contradictoire avec l'amendement que le Gouvernement avait déposé sur le projet de loi ARAF, qui spoliait le STIF de plusieurs milliards d'euros d'actifs et prolongeait de trente ans la durée du monopole de la RATP.
Je sais, monsieur le secrétaire d'État, que vous avez demandé le rejet de cet amendement de la commission et j'imagine que nous y reviendrons lors de l'examen de l'article 17. Cet épisode montre néanmoins la vraie volonté de la droite qui, derrière ses discours visant à rassurer les représentants du personnel de la RATP, organise déjà le démantèlement, et logiquement ensuite, la privatisation de cette entreprise publique.
Finalement, votre projet de loi ressemble beaucoup à de petites manoeuvres. J'avoue en être étonnée même si je sais que nous sommes à la veille des élections régionales, et si c'est pour cette raison, je pense, que vous n'êtes pas le seul, au Gouvernement ou à l'Élysée, à le porter.
En Île-de-France, la question des transports sera l'un des principaux enjeux de la prochaine campagne.
Pourquoi êtes-vous inquiète ? Si ce projet est si mauvais, vous devriez être rassurée !
Il est aisé d'imaginer le bénéfice politique que votre camp aurait pu tirer du Grand Paris s'il avait répondu à ses promesses. Il reste les illusions…
Vos propres amis ont du mal à vous soutenir. J'ai eu beau chercher, rares sont les personnes à avoir publiquement pris le risque de vous suivre, monsieur le secrétaire d'État. En revanche, les voix qui se sont élevées pour expliquer les lacunes et les dangers de votre projet ne sont plus à compter. Je pense aux architectes de la consultation sur le Grand Paris qu'on ne peut traiter ni de partisans, ni d'incompétents. Je pense aux nombreux économistes et urbanistes qui ont écrit sur le sujet. Je pense aux dirigeants de la RATP et de la SNCF, qui ont surtout rappelé la nécessité d'améliorer le réseau existant et de développer les projets en cours. Je pense aux associations d'usagers des transports ou de défense de l'environnement que nous avons auditionnées. Même le MEDEF (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…
…a eu des mots très durs pour ce projet du Gouvernement.
Dans ces conditions, vous comprendrez, mes chers collègues, que je vous appelle à voter le rejet préalable.
Avant que nous ne procédions au vote, j'aimerais tout de même signaler, à la suite d'Yves Albarello, notre rapporteur,….
Plusieurs députés du groupe UMP. Excellent rapporteur !
C'est justement pour cela que je reprends ses propos, à savoir que nos conditions de travail sur ce texte posent un vrai problème.
…mais de la gestion du temps. Entre le dépôt du texte et son examen, le délai fut extrêmement court !
Et nous voici aujourd'hui limités dans notre expression par le temps global qui a été imposé sur ce projet. Mon groupe s'est vu attribuer neuf heures cinquante, soit autant que pour le débat sur le projet de loi relatif à la récidive, la semaine dernière, lequel texte comptait pourtant trois fois moins d'articles et deux fois moins d'amendements que celui-ci. Nous devons donc aujourd'hui l'étudier au pas de charge. Encore une fois, c'est dommage pour un projet qui aurait dû avoir de l'envergure, de l'ambition et de la hauteur.
La loi sort toujours grandie d'un vrai débat démocratique, arguments contre arguments. Malheureusement, dans ces conditions, le débat sera forcément tronqué. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous ferai remarquer très amicalement, madame Lepetit, que si vous vous plaignez de ne pas disposer d'un temps de parole suffisant, vous venez de parler quarante minutes, soit davantage que vous ne l'auriez pu en l'absence de temps global.
Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. Yves Jégo.
Je m'attendais, comme beaucoup d'entre vous, à ce que l'orateur du groupe socialiste appuie sa démonstration sur des arguments de fond, des arguments juridiques, des arguments constitutionnels qui auraient justifié le rejet préalable.
Je n'ai malheureusement entendu que des arguments de basse politique (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.), révélateurs de la très grande gêne que doit éprouver le groupe socialiste face à la volonté du chef de l'État et de l'exécutif de mener à son terme le projet du Grand Paris qui, en deux ans à peine, a davantage fait bouger l'Île-de-France que bien des majorités de gauche depuis douze ans, un projet dont vous avez reconnu vous-même, madame Lepetit, qu'avec la réflexion des architectes, le travail présenté en avril par le chef de l'État, il avait mis en mouvement cette région qui en avait bien besoin. Vous avez souligné par là même l'immobilisme dont elle était frappée.
Je m'attendais également ce soir à ce que l'on parle des Franciliens, de leurs difficultés à se déplacer, des 300 000 emplois perdus en Île-de-France depuis quelques années, de la mondialisation et de la concurrence qui pourraient nous condamner à devenir peu à peu, si nous n'y prenions garde, une toute petite région.
Nous laisserions alors à nos enfants, sans doute de longs débats sur les problèmes internes au parti socialiste, mais peu de chances de pouvoir vivre et travailler dans cette région que nous apprécions.
Oui, aujourd'hui, vos arguments manquent de souffle.
Vous manquez d'arguments juridiques pour, tout d'abord, démontrer qu'il n'y aurait pas d'urgence. Il faut croire que vous n'entendez pas tous les jours les cris des Franciliens, dont le quotidien serait amélioré par le progrès des transports en commun. Il faut croire encore que vous ne mesurez pas combien, depuis douze ans que vous êtes aux responsabilités, cette Île-de-France est en panne de projets, de réalisations. J'ai bien lu, moi aussi, les campagnes de communication du conseil régional : 1 500 000 euros des impôts des Franciliens dépensés depuis deux mois pour nous expliquer que, si tout va bien, si M. Huchon est réélu, dans deux, trois, voire quatre ans, nous aurons peut-être de nouveaux trains ! Eh bien, le Gouvernement et la majorité ont pris une autre décision, celle d'avancer tout de suite et de financer une partie importante des transports.
Je salue à cet égard le travail du secrétaire d'État sur le projet de métro : c'est toujours cela que vous aurez de moins à faire et que le STIF n'aura pas à réaliser ! Et ce sera toujours un million de Franciliens en moins dans le reste des transports du STIF.
Vous le voyez, ce projet comporte de nombreuses raisons d'avancer et de ne pas sombrer dans l'aigreur politique qui est la vôtre. Mais vous n'y avez pas pensé, vous n'y avez jamais travaillé, alors même que M. Delanoë est conseiller de Paris depuis trente-deux ans et M. Huchon président de la région depuis douze ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés SRC. Il est élu !
Que n'ont-ils imaginé le Grand Paris, aujourd'hui porté par la majorité présidentielle ? La voilà, la raison de votre rejet ! Vous refusez toute bonne idée qui ne viendrait pas de vous. J'appelle bien évidemment la majorité à ne pas voter votre motion de rejet pour avancer dans l'intérêt de toute l'Île-de-France et des Franciliens, qui n'en peuvent plus d'attendre.
L'explication de M. Jégo était très intéressante : il nous a parlé du texte sans jamais y faire référence !
Si nous proposons cette motion de rejet préalable – je dis bien rejet préalable et non rejet pour inconstitutionnalité : le règlement a changé –, c'est parce que nous considérons que ce texte pose des problèmes très précis.
Avant de vous les exposer, je ferai une première remarque : pour la première fois dans cette assemblée, nous allons discuter d'un projet de loi qui combinera les deux dispositifs du temps programmé et de la déclaration d'urgence, désormais procédure accélérée. Nous en avons parlé en commission du développement durable, monsieur Jégo, aujourd'hui mais aussi lors de l'examen au fond du texte – malheureusement, vous n'étiez pas là. Pour la première fois dans cet hémicycle, nous n'allons discuter qu'une seule fois d'un texte dans le cadre d'un temps couperet. C'est la première raison pour laquelle nous devons voter cette motion de rejet préalable, afin d'étudier de manière plus approfondie ce projet.
Tout à l'heure, mes chers collègues, vous avez conspué Annick Lepetit quand elle rapportait les propos du MEDEF. Nous en sommes estomaqués car vous ne manquez pas, en général, de vous en inspirer. Permettez-moi de vous rappeler ce que dit le MEDEF de ce projet de loi.
Il dénonce un texte qui pose des problèmes de fond et des problèmes juridiques, dont l'horizon est lointain, qui ne profite ni à l'hyper-centre, ni même au coeur de l'agglomération, qui pose une grande interrogation sur le devenir des futurs pôles. Il remarque encore que la ville durable impose de créer des quartiers évolutifs et non plus des quartiers spécialisés. Il refuse l'urbanisation des périphéries. Ce même MEDEF souligne que nous sommes loin de la concertation promise par le Président de la République, regrette ainsi l'absence d'instances de concertation et dénonce la zone d'ombre du financement.
Si vous n'êtes pas convaincus par les arguments des députés socialistes, soyez-le au moins, comme d'habitude, par ceux du MEDEF. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Jégo résidant dans la steppe seine-et-marnaise, il ne doit venir que rarement à Paris, sinon il saurait que Bertrand Delanoë n'est pas maire depuis trente-deux ans puisque, avant lui, régna la chiraquie pendant dix-huit ans et la tibéria pendant six ans.
À chacun son dû.
Monsieur le secrétaire d'État, nous avons appris, le 29 avril, à la Cité de l'architecture, que le Président de la République vous avait désigné. Il dit à l'époque : « J'ai souhaité confier à Christian Blanc, homme d'expérience, de rigueur et d'audace, la responsabilité du secrétariat d'État au développement de la région capitale. »
Quand on entend parler d'audace, on pense à Danton ! Eh bien, on ne vous y reconnaît pas, monsieur le secrétaire d'État.
Le Président de la République dit encore – il ne doit pas sortir beaucoup : « C'est la première fois dans le monde qu'une réflexion de cette ampleur est engagée sur le phénomène de la grande métropole moderne. » Qu'il aille donc voir ailleurs de quoi il retourne !
Il avait sans doute ce jour-là une plume à ses côtés – pas comme aujourd'hui à Épinay, Bobigny ou au Perreux, où la plume était restée à la maison – puisqu'il a ajouté : « Certains d'entre vous se souviennent peut-être du beau texte de Victor Hugo – Nicolas Sarkozy citant Victor Hugo, cela valait le déplacement à la Cité de l'architecture – qu'il écrivit sur Paris pendant son exil à Guernesey : il voyait en Paris la ville héritière de Jérusalem, d'Athènes et de Rome, incarnant en elle : “le Vrai, le Beau, le Grand” Le Vrai, le Beau, le Grand, c'est exactement ce que nous voulons faire avec le Grand Paris. »
Et combien cela coûtera-t-il. ? Le Président de la République répond : « C'est une question mal posée. Sur le financement des transports, j'ai confié à un élu francilien, Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, la mission de me faire des propositions. » Il a bien fait, Nicolas Sarkozy, de confier cette mission à Gilles Carrez, mais il aurait dû lire son rapport ; ainsi n'aurait-il pas fait déposer ce projet de loi !
Que dit-on, monsieur le secrétaire d'État, de votre oeuvre, celle qui résulterait de votre audace, de votre compétence, de votre rigueur ? Qu'en dit Paul Chemetov, par exemple, homme de compétence, dont la valeur est confirmée depuis une soixantaine d'années,…
Plusieurs députés UMP. Un communiste !
…homme cultivé aussi, à la différence du Président de la République ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Il est vrai que son beau-père était Philippe Soupault, que le Président n'a pas lu, n'étant lui-même ni des surréalistes, ni des réalistes d'ailleurs. (Rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Que dit Paul Chemetov, le président du conseil scientifique de la consultation ? Dans une tribune au Moniteur, début novembre, il évoque « les travaux des architectes, réduits par la méthode jivaro à un tube automatisé de 130 kilomètres ». Dans ce texte décapant pour celui qu'il appelle - c'est de vous qu'il parle, monsieur le secrétaire d'État – le « gouverneur du Grand Paris », il pose clairement la question de votre compétence : « Est-ce parce que Christian Blanc présida Air France et la RATP qu'un tube vers un aéroport est son seul souci ? »
C'est bien vu !
On reconnaît bien là la sagesse, l'expérience accumulée par Paul Chemetov. Mais si seul Paul Chemetov s'exprimait ainsi, on pourrait soupçonner une fixation sur Christian Blanc. Or d'éminents architectes, comme Jean Nouvel ou Christian de Portzamparc, se désolent de ce qu'ils prennent pour une « petite ambition ». De quoi rêvent les architectes ? De cités idéales.
Les Échos ajoutent : « Des élus locaux de gauche se gaussent de ce réseau censé circuler sous les champs de patates pour relier pôles de compétitivité et centres d'affaires en ignorant les lieux de vie. » Parce que c'est bien de cela qu'il s'agit.
Monsieur le secrétaire d'État, votre Grand Paris, présenté à la veille de Noël, suggère un jeu de construction : vous avez imaginé un Lego qui donne certainement forme à vos fantasmes ; mais les élus n'ont pas attendu pour travailler ! Demandez à Jean-Yves Le Bouillonnec,…
…qui préside le syndicat mixte d'études « Paris Métropole », composé de représentants de la droite et de la gauche...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. De la gauche !
…jusqu'à ce que, rappelés à l'ordre, les élus des Hauts-de-Seine appartenant à la majorité aient fait sécession.
Reste que, parmi les élus de l'UMP, se trouvent des gens de réflexion. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) Pas beaucoup, certes. (Rires.)
J'en compte au moins deux, dont Gilles Carrez. (M. Carrez fait des signes de dénégation.) Je sens bien, mon cher collègue, que je vous nuis en disant cela. (Sourires.) Gilles Carrez, que j'ai connu, dans le cadre de la coopération intercommunale, toujours à l'écoute de la diversité des points de vue ; il était ainsi capable d'entendre celui de Dominique Adenot, maire de Champigny-sur-Marne. Voilà un vrai élu, issu du terrain.
Si j'évoque indistinctement Gilles Carrez et Dominique Adenot, laissez-moi en citer un autre, plus improbable pourtant : Jean-François Copé (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), votre adjudant-chef (« Oh ! » sur les mêmes bancs). Que demande-t-il ? L'abandon de la procédure accélérée afin que nous disposions du temps voulu pour discuter du projet.
Or vous voulez le discuter à la cosaque, monsieur le secrétaire d'État (Protestations sur les bancs du groupe UMP), comme dans les steppes du Kouban, sabre au clair ! Et vous voulez réduire les élus, les bâillonner pour les empêcher d'exprimer les aspirations de la population.
Il s'agit pour nous d'organiser le vivre-ensemble pour surmonter le sentiment de mal-vie dans nos banlieues. Pour vous, les personnes ne sont pas des citoyens mais, comme aurait dit notre grand ancêtre Karl Marx (Rires), de la force de travail. Notre collègue Annick Lepetit l'a souligné : même le MEDEF qui, lui, a le sens de ses intérêts immédiats, estime que vous l'emmenez dans le brouillard. (M. Jean-Claude Lenoir fait claquer son pupitre.) Le MEDEF considère qu'il y a des urgences, comme le doublement de la ligne A du RER. (« Concluez ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Il y a déjà des territoires relégués. Des projets étaient prévus pour les désenclaver.
Je sens bien que vous mesurez le degré de pénétration de mes propos chez nos collègues de l'UMP et que cela vous indispose.
Vous organisez, monsieur le secrétaire d'État la relégation de nouveaux territoires, comme Montreuil (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), Vincennes, Saint-Mandé, Champigny, Rosny, Noisy-le-Sec, Bondy où des projets étaient prévus. Vous excluez désormais ces territoires qui comptent plusieurs centaines de milliers d'habitants : ils ne disposeront pas des moyens de transport auxquels ils pouvaient aspirer.
Vous remettez en cause les libertés communales qui trouvent leurs racines au Moyen Âge. Votre texte est cohérent avec le projet de loi visant à restructurer le territoire national et remettant en cause l'héritage de la Révolution française.
Où est la vision d'une région d'excellence ? Où est la réflexion préparant la conférence de Copenhague pour un environnement durable ? Où est la vision d'une zone de bien-être exemplaire ? Sûrement pas dans votre projet. Vous n'avez pas réfléchi à la place et au rôle de la région capitale en France et dans le contexte européen. Des pans entiers demeurent absents du texte, comme le logement.
Nous avons donc toutes les raisons de voter la motion de rejet présentée par Annick Lepetit. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
À la fin de son intervention, Mme Lepetit nous a invités à faire montre d'envergure, d'ambition et de hauteur. Ses arguments pour que nous rejetions ce texte m'ont quelque peu étonné. Uniquement justifiée par l'approche des échéances électorales, votre démonstration, ma chère collègue, ne tenait pas debout. Ainsi, vous appuyant sur l'article 1er, qui précise simplement que le projet du Grand Paris a pour objet de susciter le développement économique de la région capitale au bénéfice de l'ensemble du territoire national, vous êtes allée jusqu'à expliquer que les maires de l'ensemble du territoire allaient se trouver dépossédés de leurs compétences en matière d'urbanisme ! Sans doute, pour occuper les trente minutes dévolues à votre intervention, vos collaborateurs, ne sachant plus quoi écrire, ont-ils tenté de vous faire démontrer l'indémontrable.
Il suffit de lire la presse pour constater, chers collègues de l'opposition, que, face à un dispositif assez complexe, vous avez réussi une opération politicienne consistant à démontrer que le présent texte serait le projet du Grand Paris.
Or ce texte n'est pas le Grand Paris. Vous voulez le faire croire pour des raisons électorales mais ce projet n'en est que la première pierre, le premier instrument d'une boîte à outils.
Pardon de vous rappeler que le Président de la République, le Premier ministre et le secrétaire d'État ont souligné que cette construction se fera par étapes, la première étant la constitution d'une nouvelle infrastructure de transports intégralement financée par l'État. Ce dernier point gêne ceux qui en hériteront : vous nous expliquiez que le STIF était parfaitement capable de construire cette infrastructure, encore faudrait-il qu'il se montre à même d'assurer celle dont il a la charge aujourd'hui, ce qui n'est pas le cas.
Le STIF se retrouve donc dans une situation privilégiée : l'État va construire 130 kilomètres de métro qui lui seront confiés alors que, j'insiste, il n'en aura pas payé l'infrastructure. Il en assurera l'exploitation, ce qui est bien le moins. Nombre de collectivités rêveraient de se trouver dans cette situation ; j'imagine ce que diraient les présidents de région, en province, s'ils bénéficiaient d'une telle chance !
Non, ce projet ne sera pas le seul concernant le Grand Paris : deux autres sont annoncés, monsieur le président de la commission des affaires économiques. Il n'est pas question ici de réaliser le Grand Paris mais de donner les outils à l'État et aux élus locaux pour travailler ensemble dans cette perspective.
L'opposition nous reproche de ne pas tenir compte du logement. J'aimerais beaucoup que les élus de Paris en tiennent eux-mêmes un plus grand compte quand je constate que le schéma directeur, dont vous déplorez qu'il ne soit pas encore transmis au Conseil d'État, schéma adopté par la majorité régionale de M. Huchon, prévoit 20 % de logements sociaux à Paris et 40 % en Seine-Saint-Denis.
Les efforts ne sont donc pas pour Paris. Aussi, j'éprouve quelque mal à entendre les leçons de ce département voisin du mien.
Vous soutenez ensuite que le projet ne prévoit rien en matière de développement durable. Évidemment, ce n'est pas en créant deux établissements publics que l'on y pourvoira. Mais quand on prévoit de transporter 3 millions de passagers par jour, essentiellement de banlieue à banlieue, dans un métro automatique, et qu'on leur permet ainsi de renoncer à leur voiture, on contribue indéniablement au développement durable et à l'aménagement du territoire.
Vous avez évoqué les encarts publicitaires du Premier ministre. Pardon de vous rappeler que j'ai été élu conseiller régional en 1998 – Julien Dray, ici présent, sait de quoi je parle. À l'époque, pour des départements comme le Val-d'Oise, la Seine-Saint-Denis ou les Yvelines, on parlait de la tangentielle nord. Douze ans plus tard – c'était il y a deux mois –, j'ai eu la chance de découvrir des encarts publicitaires, sur de grands panneaux, annonçant qu'enfin – enfin – le projet envisagé alors avait avancé de plusieurs kilomètres ; pas d'un seul, en fait, en termes de travaux, mais de plusieurs kilomètres de papiers, documents et études. Et si tout allait bien, toujours selon ces publicités, nous devrions passer à la réalisation en 2012, 2013 voire 2014…
Cet exemple montre que la méthode choisie par le Gouvernement est la plus efficace. Depuis que le STIF doit gérer les infrastructures de transport et depuis que la région tient en la matière un rôle croissant, j'attends toujours de voir - dans un département qui est le nôtre, monsieur Bartolone - où et quand commenceront les travaux du RER B plus, où en sont les avancées de la tangentielle. De telles avancées ne doivent-elles donc ne concerner que le tramway parisien qui a pompé l'essentiel des finances régionales au profit de quelques-uns ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Vous prétendez que le projet, à hauteur de 21 milliards d'euros, serait un gouffre financier. C'est assez amusant de l'entendre quand on sait que le projet de la région d'investir 20 milliards d'euros dans des bouts de ficelles électoralistes permet de satisfaire tel ou tel coin mais ne permet aucune impulsion en matière de développement économique, aucune forme de retour sur investissement pour l'ensemble de la région en termes de création d'emplois et de réduction des inégalités territoriales.
Vous préférez, vous, dépenser 20 milliards en petites mesures incohérentes, dans le cadre d'un schéma d'aménagement qui ne sera d'ailleurs pas touché par la réforme et que vous aurez par conséquent tout loisir de gérer si vous êtes réélus, puisque rien n'est ôté au STIF et rien aux contrats de projet État-région. L'État se contente, en effet, de financer lui-même un projet supplémentaire.
Il est enfin pour le moins surprenant d'avoir entendu à plusieurs reprises – outre notre collègue Jean-Pierre Brard qui nous a habitués à ses envolées – le groupe socialiste, par la voix de Mme Lepetit et par celle de M. Goldberg, nous inciter à écouter désormais le MEDEF, qui pourtant, selon vous, soutiendrait par nature des thèses horribles, insupportables, contraires à l'intérêt général puisque, d'après M. Brard, il ne voit que son intérêt immédiat.
Le présent texte offre un outil destiné à servir l'intérêt général et vous préférez défendre le projet beaucoup plus immédiat du MEDEF… Je ne doute pas que vous retrouverez après les élections régionales le sens de l'intérêt général et que vous oublierez les positions du MEDEF, qui s'y retrouvera très bien dans quelques années quand notre région aura à son actif plus d'emplois, de meilleures capacités de transport, un plus fort développement économique et moins d'inégalités territoriales.
Nous voterons donc contre la motion de rejet présentée par le groupe SRC.
(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
J'ai reçu de M. Jean-Claude Sandrier et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.
La parole est à M. Pierre Gosnat.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, avant d'intervenir sur le fond du texte et sur la motion de renvoi en commission, permettez-moi de formuler une remarque quant à l'organisation de nos travaux. L'aménagement de la région Île-de-France est un sujet majeur qui laisse apparaître de véritables différences politiques. Le présent débat aurait dû permettre des échanges pluralistes et non se réduire à l'imposition autoritaire du projet gouvernemental.
Or le débat démocratique est rendu en partie impossible par l'utilisation abusive de l'article 40 de la Constitution, relatif à l'irrecevabilité financière des amendements d'origine parlementaire. Pour les seuls députés communistes et républicains, dix amendements ont ainsi été déclarés irrecevables, dix amendements qui concernaient le logement, le service public, le développement économique de la région, la place du STIF et du SDRIF.
Mais comment avancer nos propositions sur l'aménagement de la région Île-de-France sans engager des dépenses supplémentaires pour l'État ou les organismes publics ? Comment repenser la ville et l'agglomération sans proposer d'investir le moindre euro ?
Au-delà même de la question de l'article 40, c'est l'ensemble des conditions d'examen du texte que je dénonce. Nous avons appris hier soir que le Gouvernement avait décrété la procédure accélérée pour l'examen de ce projet. Pour quelles raisons alors que ce débat est annoncé depuis plus de deux ans ? En bref : trois jours de débats et fermez le ban ! Deux passages devant l'Assemblée n'auraient pourtant pas été superflus.
J'ajoute que le texte de la commission n'a été mis en ligne que le lundi 16 novembre à vingt et une heures. Comment travailler dans ces conditions alors que la date limite de dépôt des amendements était fixé à vendredi dix-sept heures ?
Ces remarques justifieraient à elles seules le renvoi de ce texte en commission. Mais j'en viens à son contenu.
Le 29 avril dernier, Nicolas Sarkozy revêtait le costume de grand architecte, de démiurge façonnant un grand projet, celui du Grand Paris. Le lyrisme était au rendez-vous, Jean-Pierre Brard l'a rappelé, mais j'ai moi aussi quelques citations.
Il s'agissait alors d'impulser ce que le Président appelait « le plus grand défi politique du xxie siècle ». Dans son élan, il ajoutait : « Le Grand Paris est l'occasion de remettre l'architecture au coeur de nos choix politiques. […] La ville est faite pour l'homme, et non l'homme pour la ville. […] Le Grand Paris, c'est un processus de transformation, l'exploitation de tous les possibles. » C'était très beau, et même un brin émouvant, au point que mon ami, l'architecte Roland Castro, s'est sans doute senti quelque peu dépassé par tant de lyrisme.
Le Président Pompidou avait eu, en son temps, le Centre Beaubourg, Mitterrand ses pyramides, Chirac son musée du quai Branly ; Nicolas Sarkozy, quant à lui, redessinerait la région capitale tout entière. Chapeau !
Au demeurant, je reconnais que la décision de confier à une dizaine d'architectes et à leurs équipes la responsabilité de se pencher au chevet de la région capitale afin d'explorer tous les possibles, voire les utopies, était inédite et politiquement intéressante. De fait, leurs propositions innovantes nous offrirent la vision d'un Paris du futur et d'une région Île-de-France métropole d'avant-garde. Leurs réflexions mettaient en évidence la nécessité d'articuler le développement et l'aménagement du territoire autour d'enjeux fondamentaux et diversifiés : le transport, certes, mais aussi le logement, l'environnement, l'architecture, le développement économique. Ils s'interrogeaient également sur des notions essentielles, telles que la densité urbaine ou le développement durable.
Au moment d'examiner la traduction politique et juridique de ces travaux, force est de constater que nous sommes bien loin du compte. Tous ces projets, toute la synergie créée autour de cette mission se trouvent abandonnés, trahis, en quelque sorte, par le texte qui nous est soumis. Au reste, vous savez, monsieur le secrétaire d'État, que l'ensemble de ces architectes ressentent, plus que du désarroi, de la colère. Car, en définitive, le projet du Grand Paris se résume à un texte de loi de vingt-neuf articles – j'ai d'ailleurs cru comprendre qu'il ne fallait plus parler de « Grand Paris » – et à la création d'un ÉPIC destiné à contourner les collectivités territoriales et à créer un réseau de transport privatisable à terme. En prélude à cette privatisation, un amendement a d'ailleurs été adopté à l'article 17, qui organise la scission de l'entreprise nationale RATP.
Que reste-t-il de la cité idéale de M. Sarkozy ? Rien. L'article 1er du projet de loi sonne le glas de toute ambition en la matière, en restreignant le Grand Paris à la « création d'un réseau de transport public de voyageurs unissant les grands territoires stratégiques de la région Île-de-France. » Quant aux autres territoires – non stratégiques, selon le Gouvernement –, ils sont condamnés à voir passer les trains et à attendre les éventuelles retombées des pôles d'excellence.
Fallait-il un projet de loi-cadre pour l'aménagement la région Île-de-France ? Certainement. Un projet de loi était-il nécessaire pour créer, dans cette région, un réseau de transport automatique et un ÉPIC local ? Certainement pas ! À ce propos, je vous renvoie, mes chers collègues, à l'article 34 de la Constitution, qui définit le domaine de la loi. Si celle-ci peut parfaitement fixer les règles concernant la création de catégories d'établissements publics, elle n'est nullement nécessaire pour créer spécifiquement l'un de ces établissements ; un décret suffit.
Cette motion de renvoi en commission est d'autant plus justifiée que l'ensemble des outils nécessaires à la création d'un réseau de transport de banlieue à banlieue, public et utile à tous les citoyens, existent déjà. Le Syndicat des transports d'Île-de-France a toutes les compétences requises pour cela : il assure la bonne coordination et la concertation entre les différents acteurs, nationaux, régionaux et départementaux ; il est en outre, depuis quelques années, présidé par un élu, le président du conseil régional, ce qui représente un progrès démocratique ; enfin, le STIF a démontré son efficacité depuis sa création.
Or, ce projet et la décision de transférer ses actifs à la RATP le menacent de mort. Que restera-t-il, en effet, des autres projets d'extension et de modernisation du réseau actuel, quand 35 milliards d'euros auront été injectés dans le « grand huit » ? Certes, M. Blanc et M. Bussereau nous assurent qu'ils n'en pâtiront pas. Mais comment les croire, quand le déficit public atteint des sommets et qu'un plan drastique de diminution des dépenses publiques d'ici à deux ans a d'ores et déjà été annoncé ? Qu'en sera-t-il des projets d'avenir, qui ne sont pas encore conceptualisés, mais qui seront indispensables à moyen terme ? Je pense notamment aux transports de banlieue à banlieue qui ne sont pas concernés par le « grand huit ».
Outre son coût exorbitant, monsieur le secrétaire d'État, votre projet est largement insuffisant. D'autres investissements massifs sont à prévoir pour mettre fin à l'asphyxie francilienne. À cet égard, les travaux menés par la commission Carrez, à laquelle j'ai participé, avaient ouvert des pistes et pris en compte un certain nombre de projets, qui ne figurent pas dans le texte qui nous est soumis. J'ajoute que l'on peut se demander quelle sera la contribution de l'État aux futurs CPER, étant donné qu'il a de plus en plus de difficultés à assumer ses propres engagements.
Ce projet de loi mérite d'autant plus d'être renvoyé en commission qu'il constitue un dispositif dérogatoire aux droits et procédures en vigueur. Vous allez vite, monsieur le secrétaire d'État. Ne vous ai-je pas entendu déclarer en commission que vous souhaitiez faire en trois ans ce que l'on fait normalement en sept ans ? Sans doute est-ce l'impatience de la jeunesse.
Mais ne confondez pas vitesse et précipitation. Nous sommes encore dans un État de droit, qui impose que l'on respecte certaines procédures, et la démocratie prend du temps. Vous ne pouvez pas mettre en oeuvre un tel projet en faisant fi de l'avis des populations et des élus. Or, quand Jean-Paul Huchon déclare devant les députés de la commission que vous ne l'avez jamais officiellement auditionné, il est permis d'émettre quelques réserves sur la nature de cette concertation.
Il est vrai que vous n'avez pas ménagé vos déplacements au cours des derniers mois ; je vous ai moi-même reçu à Ivry, pour vous présenter un projet opérationnel de 5 000 logements et 25 000 emplois pour les quinze ans à venir. Mais qu'avez-vous réellement retenu de ces déplacements, à Ivry et ailleurs, dans ces villes qui souffrent et qui sont pourtant pleines d'espoirs et riches de projets, trop longtemps ignorés, voire méprisés par l'État ?
Cette absence de concertation, les conditions d'élaboration du projet de loi et son contenu même ne font que renforcer le caractère autoritaire de l'intervention gouvernementale. Oui, l'autoritarisme se fait chaque jour plus pressant dans ce pays. L'État, qui veut réduire tous les contre-pouvoirs, organise l'offensive. La région Île-de-France, une majorité de départements et un grand nombre de villes sont dirigés par la gauche ? Qu'importe ! L'État crée un établissement public à caractère industriel et commercial pour reprendre la main sur l'aménagement du territoire, car, au total, ce sont bien 35 000 hectares qui sont concernés. Quant à la liberté qu'ont les maires de signer ou non les contrats avec l'État, elle est très aléatoire, et vous le savez pertinemment.
Par ailleurs, la composition de la structure de gouvernance de la Société du Grand Paris ne laisse planer aucun doute sur les visées du Gouvernement. Le présent projet de loi propose en effet de créer un ÉPA, dirigé par un directoire dont les membres seraient nommés par décret. Pourtant, traditionnellement, les établissements publics sont gouvernés par un conseil d'administration qui élit son président parmi ses membres. Sans doute est-ce trop démocratique, ou trop risqué. Il vous serait en effet difficile d'assumer d'autres tragicomédies à la Jean Sarkozy !
Encore cette structure politico-administrative ad hoc n'est-elle pas suffisante. Pour être le bras armé du Gouvernement, elle doit être indéfectible. L'État s'assure donc qu'il aura la majorité au sein du conseil de surveillance : un seul maire pourra y siéger et – avancée considérable par rapport au texte initial – il pourra même voter. Mais sait-on jamais ? Quinze protections valent mieux qu'une. L'alinéa 11 de l'article 8 renvoie donc à un décret la définition des conditions dans lesquelles le commissaire du Gouvernement pourra s'opposer aux décisions du directoire. Cette construction juridique est un véritable morceau d'anthologie. Et puisque je parle de construction, il me semblait que nous avions récemment célébré la chute d'un mur. Eh bien, je constate, mes chers collègues, que l'on en reconstruit un. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plus sérieusement, c'est une nouvelle fois la décentralisation qui est en cause, et je ne peux m'empêcher de comparer le libéralisme économique de l'État avec son interventionnisme au plan politique. En somme, c'est un gant de velours pour les patrons et une main de fer pour les élus. Car chacun comprendra que le projet de loi relatif au Grand Paris doit être appréhendé dans l'ensemble de mesures et de lois au centre duquel se trouvent la réforme territoriale et la suppression de la taxe professionnelle. En effet, redoutant peut-être une fronde des collectivités qui, en son temps, avait fait vaciller la monarchie absolue de Louis xiv – il s'agissait, à l'époque, des parlements –, le Président de la République redessine progressivement les contours institutionnels de la Ve République et limite peu à peu l'expression de l'opposition. Le projet présidentiel est clair et le texte relatif au Grand Paris en est presque la caricature : moins d'élus et plus de technocrates.
Remplaçons les représentants du peuple par des envoyés du seigneur ! Il s'agit, en somme, d'un interventionnisme politique au service d'un libéralisme économique.
Monsieur le secrétaire d'État, votre projet d'aménagement repose sur une vision ultralibérale du développement. Que sait-on, d'ailleurs, de ce projet, sinon qu'il organise la mise en concurrence des territoires et qu'il concentre l'effort de l'État sur les pôles de compétitivité, souvent en inadéquation totale avec les besoins des populations ? Vous définissez ainsi neuf grands territoires stratégiques de la région Île-de-France, mais nous n'avons pas la même définition de ce qu'est un territoire stratégique. Les millions de Franciliennes et de Franciliens, notamment les plus modestes, qui vivent en banlieue, sont les oubliés de votre projet. Ceux-là continueront à connaître la galère des transports et, dans quelques années, ils verront passer des trains rapides ultramodernes, qui ne s'arrêteront pas dans leur gare. Ce qui est stratégique, donc prioritaire, pour vous, c'est de relier, par exemple, les deux aéroports parisiens via la Défense, en y consacrant tous les moyens nécessaires pour assurer d'abord et avant tout le confort des hommes d'affaires fraîchement débarqués de leurs avions.
Vous nous annoncez un métro rapide à grande capacité qui transportera, selon vos prévisions, 3 millions de voyageurs par jour. Or rien n'est moins sûr, puisque vous prévoyez que les gares seront séparées par une distance moyenne de six kilomètres, soit quatre gares pour le Val-de-Marne, alors que le projet Orbival, élaboré par le conseil général, prévoit d'en implanter vingt dans le département.
Pour qui ce projet et ce métro sont-ils stratégiques ? Vous voulez nous convaincre que le projet du Grand Paris aura un impact positif sur l'ensemble du territoire national, alors qu'il n'est même pas à la hauteur des enjeux de la seule région Île-de-France ! Pour ma part, je suis convaincu que faire de la création de pôles de compétitivité ou de leur renforcement le moteur du développement de la région est un leurre. En effet, le cluster exclut plus encore qu'il n'inclut. Certes, il concentre sur le même territoire une activité à forte potentialité économique, souvent spécifique, qui rassemble à la fois institutions, infrastructures, entreprises, universités et centres de recherche ; en créant ainsi un mouvement de concentration et de centralisation de l'activité, il inclut. Mais il implique également une fermeture vis-à-vis de son environnement géographique proche. On le voit bien avec le quartier de la Défense, qu'on appelle d'ailleurs, comme l'un de nos collègues l'a rappelé tout à l'heure, le « quartier des affaires », dont l'activité a davantage d'impact à Londres ou New York qu'à Nanterre. Ainsi la notion libérale de l'aménagement du territoire, selon laquelle la création d'un grand pôle de développement économique bénéficierait à l'ensemble de la région, est loin d'être validée. Il suffit, du reste, de regarder ce qui s'est passé au cours des décennies précédentes : les inégalités territoriales se sont aggravées, s'ajoutant toujours aux inégalités sociales et culturelles, aux inégalités de vie en général.
C'est pourquoi les députés communistes sont opposés à votre vision de la région capitale et de son avenir. Nous défendons, quant à nous, un développement qui se fonde sur les besoins des bassins de population, c'est-à-dire le droit au logement, les transports de banlieue à banlieue, l'emploi, l'environnement, l'accès aux sports, à la culture, aux loisirs. De cela, il n'est pas question dans votre schéma. Les Franciliens veulent un développement concerté, partagé et solidaire. Voilà un projet qui pourrait rassembler ! Il pourrait, du reste, s'appuyer sur le schéma directeur de la région Île-de-France, lequel a été adopté non seulement par le conseil régional, mais aussi par la plupart des départements et par un grand nombre de villes. Hélas ! L'État refuse toujours de le faire enregistrer par le Conseil d'État.
Au-delà, nous savons qu'il existe en Île-de-France des potentialités humaines, scientifiques, technologiques et culturelles considérables, qui ne sont jamais exploitées, quand elles ne sont pas étouffées ou brisées par le chômage, la précarité et vos choix économiques. C'est pourtant bien là qu'elle se situe, monsieur le secrétaire d'État, la ville-monde dont vous parlez si souvent, dans ces potentialités aujourd'hui méprisées.
Enfin, personne n'est dupe, dans cette assemblée, quant au caractère opportuniste du présent projet de loi. La perspective des régionales de mars 2010 n'est évidemment pas étrangère à la parution de ce texte, la droite francilienne n'ayant pas grand-chose à proposer aux habitants de l'Île-de-France et ayant laissé, lors de son passage à la direction du conseil régional, un lourd passif dans le domaine des lycées, des transports ou du logement.
Tenter de faire rêver les électeurs en présentant les superbes projets de dix cabinets d'architectes et d'urbanistes pour, finalement, ne rien en retenir, voilà qui relève de la prestidigitation à quelques mois des élections régionales. Que restera-t-il de tout cela ? Je ne suis pas convaincu que le débat d'aujourd'hui, dans les conditions où il se tient, nous permette d'en savoir plus. C'est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter cette motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, quelle déception de voir que M. Gosnat n'a pas compris le texte, qu'il n'a pas vu quel est l'enjeu du Grand Paris ! (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)
Avec vous, je n'ai pas affaire à un ingrat, monsieur Brard !
Quelle déception de voir que, pour le groupe GDR, le schéma directeur serait la nouvelle bible, l'étalon suprême, la référence !
À vous entendre, sans SDRIF, point d'avenir, pas d'élections, pas de Grand Paris !
Franchement, on peut se demander ce qu'est l'opportunisme électoral : est-ce le SDRIF ou est-ce l'ambition ? Le GDR n'aurait-il pas peur de la démocratie ?
Vous nous parlez d'opportunisme électoral : jouons donc cartes sur table, projet contre projet !
Si vous n'avez pas la volonté de porter ce projet, nous le porterons pour vous, et je pense qu'une majorité se prononcera en sa faveur.
Vous nous avez parlé de solidarité. Mais comment voulez-vous partager ce que vous ne créez pas ? Comment voulez-vous espérer tirer vers le haut une région sans projets et sans ambitions ?
Je crois que nous n'avons pas tout à fait la même vision de ce texte de loi qui, comme cela a été dit tant par le secrétaire d'État et le rapporteur que par Jean-Christophe Lagarde, ne constitue qu'une étape sur le chemin d'une vision ambitieuse où l'urbanisme reprendra de plein droit sa vocation, une fois qu'un réseau de capillarité aura enfin été construit dans un délai raisonnable.
Vous avez cherché des tas d'explications pour justifier votre point de vue négatif. Ainsi, monsieur Gosnat, vous avez parlé d'autoritarisme de l'État vis-à-vis des collectivités – ce qui s'explique certainement par le fait que, n'étant pas présent en commission, vous n'avez pas pris part aux lectures du texte auxquelles nous avons procédé. (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)
Parler d'autoritarisme, quelle perte de confiance ! Avez-vous donc perdu tout espoir d'alternance politique, monsieur Gosnat ? Pensez-vous que la majorité restera du même côté pendant trente ans ? Nous serions, certes, partisans d'un tel scénario. Mais quel manque d'ambition politique de votre part !
Sans doute est-ce parce que j'essaie de répondre point par point à votre intervention, qui mélangeait tout : vous avez voulu mettre en parallèle la loi du Grand Paris avec les réformes territoriales, en expliquant que le Grand Paris était une loi ultralibérale. Mazette, quelle affaire, quand on sait que l'État va financer, comme vous l'avez reconnu vous-même, l'essentiel du projet ! Comment pouvez-vous y voir de l'ultralibéralisme ?
Nous n'avons pas les mêmes valeurs, monsieur Gosnat, ni les mêmes références.
Quant aux clusters – je suppose que vous parliez de Saclay et des sept pôles de compétitivité –, …
…vous êtes sans doute l'un des seuls, sur le territoire francilien, à ne pas croire à leur utilité. Allez donc dire aux chercheurs du génopôle que les clusters n'ont aucun intérêt ! Allez donc dire à toutes les PME innovantes qui se créent grâce aux clusters que tout cela n'a pas d'importance ! Allez donc dire à tous les jeunes qui trouvent des emplois grâce à ces PME que tout cela ne sert à rien ! Un peu de bon sens, franchement !
Vous mettez à profit le règlement pour demander le renvoi de ce texte en commission. Nous avons passé, en commission du développement durable, douze heures à analyser ce texte. Nous avons examiné 380 amendements à cette occasion et tout à l'heure, lors de notre réunion au titre de l'article 88, nous en avons validé plus de 300, qui vont être débattus dans les jours et les nuits qui viennent. N'est-ce pas là de l'expression démocratique ? Ne s'agit-il pas d'une volonté d'améliorer le texte ? Le travail de bon aloi qui a été fait en commission du développement durable, en commission des affaires économiques et en commission des lois, n'a-t-il aucune valeur à vos yeux ?
Le groupe UMP veut débattre dès maintenant sur ce qu'il considère comme un bon texte. Il s'opposera donc au renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Si l'on compte bien, la commission n'a consacré qu'une minute à chaque amendement !
Mes chers collègues, l'explication de Pierre Gosnat était limpide, et il est dommage que vous soyez prisonniers de décisions déjà prises – car chacun sait que le groupe UMP doit marcher au sifflet…
…comme cela a été le cas pour la taxe professionnelle ou le rétablissement du taux de TVA dans la restauration. Sa majesté impériale a en effet déclaré, cet après-midi, qu'elle ne reviendrait jamais sur cette disposition – oubliant simplement que cela n'était pas de sa compétence.
Vous pourriez respecter le Président de la République, qui a été élu au suffrage universel !
Cela ne change rien à son autoritarisme, à son arrogance et au viol quotidien de la Constitution, en particulier de son article 5, qui limite ses pouvoirs. J'ai beaucoup de respect pour vous et vos compétences, monsieur Martin-Lalande, mais…
Il n'y a pas lieu de parler de majesté impériale pour un Président de la République élu au suffrage universel !
Je vous confirme que notre Président de la République se prend pour l'imperator, à la façon de Napoléon III – mais l'histoire rendra certainement justice à l'un et à l'autre, et ce ne sera pas à l'avantage de Nicolas Sarkozy !
Mais revenons, monsieur le secrétaire d'État, à notre sujet. Il a été dit par Pierre Gosnat que vous n'aviez pas discuté avec la région. Vous avez compté pour quantité négligeable le président du conseil régional. Vous passez à l'essoreuse la représentation des élus, puisqu'un seul maire siégera à la Société du Grand Paris. Vous remettez en cause la décentralisation ; que veulent les élus de la région parisienne ? Pratiquer la coopération, afin de trouver les meilleurs équilibres possibles, pour dessiner un avenir pour la région qui donne une place à chacune et à chacun de ses habitants. À cela, vous opposez la concurrence des territoires.
Sans doute pensez-vous aux élections régionales qui vont avoir lieu au printemps prochain, mais il me semble que vous devriez présenter certains sujets en creux plutôt qu'en relief. Je pense notamment à la suppression de la forêt de Saclay, à un moment où l'environnement n'a jamais autant occupé les esprits. Il y a quelques instants, M. Paternotte parlait des chercheurs. J'étais justement, lundi dernier, à l'École centrale, où j'ai évoqué cette affaire avec les chercheurs brillantissimes qui y travaillent. Vous ne les avez évidemment pas consultés, puisque vous ne consultez personne ! C'est dommage, car si vous l'aviez fait, vous auriez pu mesurer l'attachement de ces chercheurs à la préservation des poumons de verdure que vous vous apprêtez à supprimer.
M. Paternotte nous a offert une caricature. Un vrai projet aurait dû comporter des propositions pour le mieux-vivre, supprimer les ghettos de la misère que vous avez constitués au fil des décennies, fournir des solutions pour mieux diversifier les territoires, pour mieux mixer les populations, pour supprimer les réserves à bourgeois qui constituent le pendant des poches de misère. Rien, dans votre projet, sur les équipements éducatifs ! Où sont les lycées internationaux, tellement nécessaires à notre région ?
Allons, monsieur Jégo ! Je comprends que vous ayez la nostalgie des îles, mais c'est de l'Île-de-France que nous parlons ici !
Où sont les lycées internationaux pour les jeunes de nos banlieues, avec les internats qui permettraient aux enfants des familles les plus modestes d'étudier dans les meilleures conditions ? Vous n'en proposez pas parce que vous ne placez pas au coeur de votre démarche la recherche de l'égalité républicaine, qui suppose que l'on donne plus de chances à ceux que leur origine sociale a marqués de stigmates. Pas de projet éducatif, pas de projet culturel, pas de projet sportif !
M. Paternotte a un argument extraordinaire : il s'étonne que l'on reproche à la majorité son autoritarisme, puisqu'en vertu du jeu de l'alternance, c'est l'opposition actuelle qui, demain, exercera cet autoritarisme. Mais nous n'en voulons pas, ni pour vous, ni pour nous ! D'autant que nous ne croyons pas à l'alternance, mais à l'alternative pour de vrais changements, de vraies ruptures.
Pas le grand soir, non, mais une éternité pleine de bonheur pour ceux qui nous ont donné le pouvoir de siéger dans cette assemblée. Malheureusement, c'est pour ceux dont vous représentez les intérêts - que l'on désignait autrefois par une expression ayant le mérite de la clarté : le grand capital – c'est avant tout pour eux, monsieur Jacob, que vous travaillez ici, et c'est pour eux, monsieur Blanc, que vous aménagez la région. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
L'intérêt de la motion soutenue par Pierre Gosnat est de nous permettre de répondre aux questions que nous nous posons depuis le début de ce débat.
Premièrement, renvoyer ce texte en commission serait la meilleure réponse que pourraient donner les députés à la décision du Gouvernement de déclarer l'urgence. Si nous avions un tant soit peu la volonté d'imposer le travail des députés, nous commencerions par renvoyer ce texte en commission, afin que le Gouvernement prenne conscience – au-delà de M. Blanc, que je ne mets pas particulièrement en cause – du fait que ce n'est pas le Sénat qui doit dicter les conditions de travail de l'Assemblée nationale. Rien que pour cette raison, mes chers collègues, cela vaudrait la peine, au moins ce soir, de voter la motion de renvoi, afin de montrer que nous ne pourrons pas accepter de continuer à reculer face à des déclarations d'urgence qui se cumulent avec le temps global.
Mais il y a bien d'autres raisons de voter cette motion. Je veux parler, par exemple, des conditions de notre travail préparatoire. Sans mettre en cause ni les présidents des commissions ni les rapporteurs, force est cependant de constater que, sur un texte de cette nature, inscrit peu après le projet de loi de finances, le débat n'a pas été suffisamment anticipé. Du fait de la diversité des enjeux, des paramètres, des données, de la nécessité de puiser dans les nombreux rapports d'expertise réunis au fil du temps, il fallait que les commissions travaillent dans une approche de la stratégie métropolitaine et ne se contentent pas de répondre à l'offre du Gouvernement.
Ensuite, il importe de pouvoir répondre à toutes les questions que soulève ce texte. Nous connaissons bien nos territoires. Je suis donc sûr que les élus de la majorité accompagneront ceux de l'opposition dans leur questionnement. À cet égard, je commencerai par rappeler les interrogations de notre rapporteur qui, tout à l'heure, a remarquablement fait observer au ministre que le texte n'apportait aucune réponse à nombre de questions, et notamment à celles qui concernent les territoires pour lesquels il fait preuve d'une attention légitime : cela relève de son mandat d'élu. Monsieur le rapporteur, vous devriez donc voter le renvoi en commission. Ce serait l'occasion de demander à M. le secrétaire d'État s'il y a d'autres pôles économiques possibles, si ceux qu'il a prévus répondent à l'attente des territoires.
M. Paternotte a prétendu que nous refusions les clusters. Non, personne ne les refuse. Mais chacun sait qu'un cluster ne se décrète pas : il doit se construire à partir de stratégies qui ne se contentent pas d'accueillir des pôles de recherche, d'enseignement, de développement économique. Toutes les conditions doivent être réunies pour qu'il se développe : aménagement du territoire, transport, logement, loisirs. Or il n'est rien dit à ce sujet.
J'en viens enfin au rapport Carrez. Si l'analyse et la stratégie proposées dans ce document ont fait l'objet d'un satisfecit général, elles ont cependant été écartées.
Ne pas nous saisir de ce travail constitue une faute majeure. S'il était intégré dans le présent texte, il concourrait à sa réussite.
L'envie du Grand Paris, d'une stratégie métropolitaine, nous la portons nous aussi. L'échec de cette loi sera celui de tous ceux qui croient à ce territoire métropolitain. Voilà pourquoi nous soutenons le renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La région Île-de-France est aujourd'hui asphyxiée dans ses transports, noyée dans ses problèmes de logement ; elle croule sous les inégalités territoriales et manque de dynamisme économique. Sur les quinze dernières années, il apparaît que cette région, et principalement son coeur, sa métropole, sa zone la plus urbanisée, a enregistré un déficit de croissance économique. Une comparaison avec les quatre ou cinq autres grandes métropoles internationales montre deux fois moins de croissance qu'ailleurs.
Réfléchir sur le Grand Paris, c'est voir comment résorber ses inégalités territoriales. Des élus issus de la Seine-Saint-Denis peuvent constater qu'un effort particulier a été consenti en faveur d'un département et d'une zone connue pour avoir accumulé les retards.
Tout le monde peut voir que l'ambition en matière de transport est l'acte I du projet Grand Paris pour assurer un développement économique qui permettrait de tirer en avant non seulement la région Île-de-France, dont les habitants vivraient dans de meilleures conditions, mais également l'ensemble du pays.
Dans les régions voisines, des parlementaires, bien sûr, mais aussi des maires, des présidents de conseils généraux sont intéressés par ce qui va se passer autour de Paris. Ils savent bien que, si nous réussissons à concrétiser cette grande ambition économique et territoriale, ils bénéficieront des retombées.
Alors, on nous explique qu'il faut renvoyer ce texte en commission. C'est un exercice de style classique dans toutes les discussions parlementaires, qui permet de gagner un peu de temps. Moi, je souhaite qu'on en gagne pour pouvoir avancer dans l'examen de ce texte.
Votre projet, monsieur le secrétaire d'État, comporte un certain nombre d'options. Je voudrais en discuter, non pas en commission, mais dans l'hémicycle afin que tous les parlementaires ici présents puissent participer au débat et pas seulement les membres de la commission saisie au fond.
Je ne souhaite pas, en tout cas, qu'on continue à faire croire que ce texte est l'alpha et l'oméga de la construction du projet du Grand Paris, lancé par le Président de la République il y a quelques mois. Il n'en est que l'alpha. C'est la clé qui permet de lever un certain nombre de blocages et qui donnera la possibilité, ensuite, de traiter le problème des inégalités territoriales, du logement et tous les maux dont nous souffrons dans cette région. Il est donc urgent, non seulement de ne pas renvoyer ce texte en commission, mais de poursuivre le débat. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion sur le rapport de la commission mixte paritaire du projet de loi de financement de la sécurité sociale ;
Suite du projet de loi relatif au Grand Paris.
La séance est levée.
(La séance est levée, le mercredi 25 novembre 2009, à zéro heure trente-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma