La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Lors du sommet européen à Lisbonne, 400 000 personnes ont manifesté contre la flexsécurité ; plusieurs centaines de milliers d'Italiens ont fait de même samedi contre la rigueur et, en France, les trois quarts des cheminots – un record – ont fait savoir jeudi qu'ils n'acceptaient pas que leurs droits soient encore attaqués. Aujourd'hui, devant l'Assemblée, un rassemblement se tient pour le droit à la santé.
Partout en Europe, des hommes et des femmes se lèvent contre ces politiques de régression que vous appelez réformes, mais les gouvernements comme le vôtre continuent d'inspirer l'Union européenne et de s'inspirer de tout ce qu'elle fait. Votre réforme des retraites, votre réforme du droit du travail, les cadeaux pour le patronat, tout s'inscrit dans le carcan du libéralisme de Maastricht.
Nos concitoyens ont dit non à cette Europe-là.
Le Président de la République s'était engagé, dans sa campagne, à renégocier le traité pour faire entendre, disait-il, la voix du non. Au final, il nous impose une copie du projet de constitution que les Français ont rejeté.
Votre traité, qui n'est pas simplifié, c'est le règne de la concurrence libre et non faussée, celui du démantèlement des services publics, de la pression sur les salaires, c'est la poursuite de la précarisation du monde du travail.
Où est la démocratie ?
Les peuples d'Europe veulent être consultés, un sondage en a témoigné. Plus de 60 % des Français et des Françaises veulent un référendum. Ils ont montré en 2005 leur intérêt pour un débat sur la construction européenne. Ils l'ont fait avec sérieux et intelligence. Mais vous avez peur de cette aspiration qui grandit à une Europe sociale et solidaire, une Europe écologique et démocratique, et vous préférez passer en catimini.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous oser organiser le grand débat sur l'Europe dont nous avons besoin ? Notre peuple va-t-il pouvoir, comme il le demande, se prononcer par référendum ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Madame la députée, l'accord de Lisbonne est une bonne nouvelle pour l'Europe, qui sort de plusieurs années de paralysie institutionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Chacun voit bien qu'après le rejet du traité constitutionnel en 2005, il n'y avait pas de « plan B », ou plutôt qu'il y avait une solution, celle que le Président de la République a défendue depuis deux ans dans toutes les capitales européennes comme au plan national. C'est son intuition et sa capacité de persuasion qui ont permis de faire aboutir ce projet. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Ce traité nous donne un cadre institutionnel durable, avec une présidence de l'Union stable, une Commission plus représentative et une subsidiarité mieux garantie par les parlements nationaux.
C'est un traité qui réconcilie les Français autour de l'ambition européenne. (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Ceux qui avaient voté non l'avaient fait parce qu'ils étaient hostiles au fédéralisme (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) et qu'ils voulaient une Europe plus politique. Ce traité exclut toute référence à une Constitution et il renforce le rôle des parlements nationaux.
Ceux qui ont voté oui voulaient une Europe plus efficace. Ce traité donne à l'Europe une présidence stable et des instruments pour décider et pour agir.
Mais ce traité simplifié ne nous exonère pas d'une réflexion de fond sur le projet politique européen à long terme.
Que voulons-nous comme stratégie économique ? Quel modèle social ? Quelles frontières pour l'Europe ? Parallèlement à la négociation du traité modifié, le Président de la République et la diplomatie française ont milité en faveur de la création d'un comité des sages, qui devra réfléchir à un vrai projet politique de long terme, lequel, naturellement, fera ensuite l'objet d'un large débat dans tous les États de l'Union.
Quant à la procédure d'adoption, vous ne pouvez pas être surprise. Le Président de la République a défendu durant toute sa campagne avec courage la ratification par le Parlement de ce traité simplifié.
En l'annonçant avant l'élection présidentielle, il a d'ailleurs pris un risque certain, un risque assumé, un risque qui lui a valu la majorité des suffrages des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.) Les Français se sont prononcés pour cette procédure au premier et au second tour de l'élection présidentielle, au premier et au second tour des élections législatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Madame Buffet, je respecte la cohérence de la position du parti communiste, qui a combattu tous les traités européens depuis le traité de Rome, mais les Français ont choisi Nicolas Sarkozy et son projet politique. C'est la démocratie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des sports. (« Ah ! » sur divers bancs.)
Les coupes du monde de rugby sont terminées. Il y a eu, en effet, avant la grande coupe du monde de rugby, la coupe du monde de rugby des parlementaires, à laquelle j'ai eu l'honneur de participer avec un certain nombre de mes collègues qui ont mouillé leur maillot. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je tiens à leur rendre hommage, de Daniel Mach à Germinal Peiro : je ne vais pas tous les citer.
Avec cette coupe du monde de rugby, notre pays a eu la chance d'organiser le troisième événement sportif planétaire après les Jeux Olympiques et la coupe du monde de football.
Une grande ferveur a parcouru notre pays, qui a été à l'unisson de son équipe, et ce plus particulièrement lors du quart de finale à Cardiff.
Certes, les objectifs n'ont pas été atteints, nous ne sommes pas champions du monde, mais cela a été un moment particulièrement fort, et je tiens à exprimer notre solidarité vis-à-vis de toutes celles et tous ceux qui ont participé à l'encadrement de l'équipe. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. La question !
Il est en effet facile de critiquer aujourd'hui, mais, si nous avions été champions du monde, peut-être les arguments développés ne seraient-ils pas les mêmes. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
On peut dresser un premier bilan : plus de 2 millions de spectateurs, des stades pleins, des records d'audience télévisée, partout en France, au-delà du terroir d'origine de ce sport, le Sud-Ouest, des bénéfices pour l'IRB, qui vont permettre de développer la pratique du rugby en France et partout dans le monde.
Les valeurs de ce sport ont été mises en exergue de la meilleure façon qui soit et l'on n'a pas noté un seul incident, ce qui est un élément particulièrement important.
Dans ces conditions, nous ne pouvons que féliciter le président Lapasset et toute l'équipe du comité d'organisation pour la qualité du travail qui a été effectué. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur le secrétaire d'État, peut-on évaluer les retombées économiques et financières de la présence de plusieurs centaines de milliers de spectateurs et, vu la qualité de l'organisation et notre capacité d'accueil, peut-on envisager une candidature de notre pays et de Paris pour les Jeux olympiques en 2016 ou en 2020 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des sports. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
, secrétaire d'État chargé des sports. Effectivement, monsieur le député, la coupe du monde vient de se terminer. Comme vous l'avez souligné, nous n'avons pas gagné, nous avons terminé quatrièmes.
Cette coupe du monde restera surtout un véritable succès populaire et économique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Succès populaire : plus de 3 milliards de téléspectateurs ont regardé les matches et il y a eu plus de 2,4 millions de spectateurs dans les douze villes hôtes, dont dix villes françaises,
Je tiens d'ailleurs à féliciter ces villes pour la qualité de leur hospitalité, tout le monde l'a souligné dimanche soir à la fête de l'IRB.
Succès économique : le comité d'organisation avait prévu 5,5 millions d'euros de bénéfices, il y en aura pratiquement le double, et cela servira à intégrer les 40 % de licenciés supplémentaires qui se sont inscrits durant le mois de septembre pour pratiquer notre sport favori.
C'est enfin une réussite touristique puisque plus de 350 000 visiteurs étrangers sont venus en France à l'occasion de cette compétition. D'après mon collègue Luc Chatel, cela représente 150 millions d'euros de recettes touristiques supplémentaires.
Je dirai aussi bravo aux 6 000 volontaires sans qui cette coupe du monde n'aurait jamais été ce qu'elle a été. Nous les avons félicités nous-mêmes vendredi soir à Paris, au stade Jean-Bouin. Grâce à leur détermination, à leur dévouement et à leur engagement, cette coupe du monde a été la plus grande jamais organisée.
Après la coupe du monde de football en 1998 et les championnats du monde d'athlétisme en 2003, la France a montré qu'elle avait la capacité d'organiser des compétitions mondiales de ce calibre.
Continuons, il nous reste quatre grosses manifestations à organiser : la coupe du monde de handball féminin dès décembre 2007, qui sera suivie de la coupe du monde de ski alpin à Val d'Isère en 2009, puis des championnats du monde d'escrime en 2010 et de judo en 2011. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, dont plusieurs membres brandissent un carton jaune.)
La parole est à M. Jean Leonetti, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Elle porte sur le même thème que celle de Mme Buffet mais, vous pouvez l'imaginer, l'analyse est légèrement différente.
Plusieurs députés du groupe du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. On imagine !
Les 18 et 19 octobre derniers, vingt-sept chefs d'État et de gouvernement ont finalisé à Lisbonne le traité simplifié grâce auquel, désormais, l'Europe n'est plus en panne.
Vous l'avez dit, monsieur le Premier ministre, c'est une bonne nouvelle pour l'Europe, mais aussi pour la France, qui est à l'origine de cette initiative.
Le Président de la République en avait pris l'engagement pendant la campagne électorale. Il avait en effet affirmé très clairement sa volonté de réconcilier ceux qui avaient voté oui au référendum parce qu'ils étaient européens, et ceux qui avaient voté non bien qu'ils soient européens eux aussi.
Aujourd'hui, avec un traité plus lisible, plus simple, plus compréhensible, nos institutions européennes sont capables de fonctionner à nouveau et l'Europe est à nouveau en marche.
Monsieur le Premier ministre, quelle initiative va prendre votre gouvernement pour que notre fierté soit complète et que la France soit l'un des premiers pays à ratifier ce traité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur Leonetti, l'accord trouvé à Lisbonne est une victoire pour l'Europe, mais aussi pour la France, qui redevient la principale force d'initiative de l'Union, au moment même où elle s'apprête à en prendre la présidence, au deuxième semestre 2008, sans doute pour la dernière fois dans le cadre d'une présidence tournante.
Ce traité nous donne des instruments pour décider et pour agir ensemble. Pour remédier à l'instabilité actuelle, un président du Conseil européen, élu à la majorité qualifiée, exercera ses fonctions pendant deux ans et demi. Pour donner de la cohérence à la diplomatie européenne, la nomination d'un haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de défense est prévue. Pour faire avancer nos politiques communes, le vote à la majorité qualifiée devient la règle, sauf lorsqu'une autre disposition prévoit un autre mode de scrutin. Pour démocratiser les pratiques, le président de la Commission sera élu à la majorité qualifiée par le Conseil européen, en tenant compte des résultats des élections européennes. Pour coordonner nos politiques économiques, l'Eurogroupe, qui n'avait jusqu'à maintenant qu'une existence informelle, sera institutionnalisé. Enfin, pour garantir la subsidiarité, le rôle des parlements nationaux sera renforcé.
Eh bien, monsieur le député, la France entend être le premier pays de l'Union européenne à ratifier ce traité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. - Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
… engagera le processus de ratification dès le 14 décembre, soit le lendemain de la signature des Vingt-sept, celle-ci devant intervenir le 13.
Le texte sera proposé au Conseil constitutionnel avant d'être soumis aux deux chambres du Parlement en vue de sa ratification. (« Et le peuple ? » sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Le Président de la République a indiqué qu'il recevrait dans les prochains jours toutes les forces politiques de notre pays pour en discuter avec elles.
Notre objectif, monsieur le député, c'est une Europe qui se donne les moyens d'agir et de se protéger ; une Europe qui fait respecter ses intérêts économiques ; une Europe qui défend une certaine vision de l'homme et de la justice ; une Europe indépendante. Voilà l'ambition française pour l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.- « Et le peuple ?» sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, je souhaite vous interroger sur une question essentielle pour les Français, celle de leur pouvoir d'achat. C'était l'engagement principal du Président de la République pendant la campagne présidentielle.
Or 85 % des Français estiment aujourd'hui que leur pouvoir d'achat se dégrade. Ces dernières semaines ont d'ailleurs fait apparaître un fossé entre ce juste sentiment et vos déclarations, qui nient la réalité. Celles-ci inquiètent tous les salariés, mais aussi tous les retraités, dont les plus modestes sont en cette fin d'année dans une situation financière très difficile.
Monsieur le Premier ministre, avez-vous bien conscience que les prix des fruits, des légumes et du pain ont augmenté de plus de 10 % ? (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Avez-vous bien conscience que le prix de la viande a augmenté de plus de 18 % ? Avez-vous bien conscience que le prix du gazole a augmenté de plus de 43 %, avec un litre d'essence à dix francs aujourd'hui ? Avez-vous bien conscience que les familles ont vu augmenter tous leurs postes de dépenses, notamment les dépenses de logement ?
En dépit de cette réalité, vous refusez les hausses de salaires, alors qu'elles seraient possibles et utiles. Vous refusez toutes les mesures qui augmenteraient le pouvoir d'achat des petites retraites, reniant ainsi vos engagements de campagne de les augmenter de 25 %. (« Voilà la réalité ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Vous refusez la revalorisation de la prime pour l'emploi.
Pis, vous mettez en place de nouvelles taxes injustes, comme les franchises médicales, qui amputeront encore le pouvoir d'achat des salariés les plus modestes et des retraités. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Avec ces franchises, ils commenceront à payer les 15 milliards d'euros de cadeaux que vous avez faits aux plus riches. (« Voilà la réalité ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Aujourd'hui vous nous proposez comme seule réponse le chant des sirènes libérales, l'ode à la concurrence. J'ai ainsi entendu ce matin Mme la ministre de l'économie envisager, pour compenser la baisse du pouvoir d'achat, un accès plus facile au crédit à la consommation, proposition irrespectueuse pour ceux qui souffrent. (« Indigne ! Irresponsable ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Vous nous préparez pour demain une hausse de la TVA de cinq points. Toutes ces mesures, monsieur le Premier ministre, renforceront les inégalités.
Ma question est simple : si vous ne souhaitez pas incarner le gouvernement de l'impuissance, alors que vous êtes déjà celui de l'injustice, allez-vous prendre enfin des mesures concrètes pour garantir et augmenter le pouvoir d'achat des salariés et des retraités ?
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Vous avez raison, monsieur Le Roux, de poser la question du pouvoir d'achat, sur laquelle le Président de la République a mis l'accent pendant toute sa campagne et ensuite.
C'est justement la raison pour laquelle se tient en ce moment même une conférence sur l'emploi et le pouvoir d'achat, ce qui explique l'absence de Christine Lagarde.
Le Gouvernement s'est engagé dans deux voies pour restaurer un pouvoir d'achat qui a été d'une certaine façon amoindri.
Il ne vous a pas échappé que, dès cet été, il a fait adopter une loi en faveur du travail et du pouvoir d'achat. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Cette loi, en exonérant de l'impôt sur le revenu les heures supplémentaires et en réduisant les charges qui pèsent sur elles, va permettre de libérer le travail. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Nous augmenterons donc le pouvoir d'achat par l'augmentation du travail. Voilà pour la première voie.
Deuxièmement, nous augmenterons le pouvoir d'achat par l'intensification de la concurrence, qui permet la baisse des prix, dans la distribution, dans la banque, chez les opérateurs de communications électroniques.
Favoriser les oligopoles n'a jamais fait baisser les prix, au contraire !
Mesdames et messieurs les députés, si le Gouvernement doit aujourd'hui s'attaquer à ce problème de pouvoir d'achat, c'est tout simplement parce que, dès les années 2000, l'application de la loi sur les 35 heures (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) …
… a généré une stagnation des salaires provoquant une stagnation du pouvoir d'achat : voilà la réalité. Nous allons rendre le pouvoir d'achat que vous avez confisqué en l'an 2000. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, le Président de la République s'était largement engagé, pendant la campagne électorale, dans le domaine de l'environnement et du développement durable. Il s'était ainsi engagé à créer un grand ministère, dont vous avez aujourd'hui la charge, avec Nathalie Kosciusko-Morizet et Dominique Bussereau : première promesse tenue.
Il s'était également engagé à lancer une grande concertation avec tous les acteurs intéressés par le développement durable : deuxième promesse tenue.
Le processus du Grenelle de l'environnement s'achèvera par des tables rondes finales qui se tiendront demain et après-demain. Tous reconnaissent d'ores et déjà que ce Grenelle est un véritable succès : nous avons réussi à réunir autour de la même table des gens qui pensent différemment, chefs d'entreprise, syndicalistes, associations, ONG, élus. Le Parlement s'est également engagé dans ce processus, et l'Assemblée a consacré une séance à débattre des propositions du Grenelle.
Certains de nos collègues vous ont même adressé des contributions personnelles.
Les Français y ont eux-mêmes participé, à travers de grands débats tenus dans les régions. Ces débats ont montré qu'ils sont totalement conscients des efforts à fournir en matière de lutte contre le réchauffement climatique.
Nous n'avons pas le droit désormais de les décevoir : vous le savez bien, monsieur le ministre d'État. (« C'est trop tard ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Jeudi, à l'issue de ces tables rondes, le Président de la République précisera les orientations qu'il tirera des débats du Grenelle. Pouvez-vous me dire, monsieur le ministre d'État, …
… ce que vous souhaitez mettre en exergue au cours de ces tables rondes et surtout comment vous envisagez la suite : quelles mesures pourront prendre corps au Parlement, à travers un projet de loi d'orientation ou de loi-cadre, et dans quel délai ? (« Allô, allô !» sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
Effectivement, monsieur le député, les engagements du Président de la République et du Premier ministre sont parfaitement respectés, puisque les groupes de travail qui se sont constitués depuis un peu plus de trois mois, ont rendu leurs synthèses il y a quinze jours. Ces thèmes ont donné lieu à des forums régionaux, qui se sont tenus jusqu'à hier – le dernier a réuni hier soir à Auch près de 1 700 personnes, m'a-t-on dit. Ils ont également fait l'objet de 350 000 consultations sur Internet et de 15 000 contributions directes.
Au terme de cette première partie du processus, qui s'achève demain, je suis très frappé par l'ampleur de la mobilisation, qui indique la grande maturité de notre pays en ce domaine. J'ai assisté aussi à la défaite en rase campagne des préjugés qui existaient sur certains de ces sujets. J'ai constaté enfin que non seulement le diagnostic de l'urgente nécessité d'agir était partagé, mais aussi la perception de notre capacité à le faire. Il y a là de nombreuses opportunités d'améliorer la qualité de vie de nos concitoyens et d'accomplir des avancées économiques, technologiques et sociales.
Tout cela doit maintenant déboucher sur des programmes opérationnels et des mesures concrètes. Le Parlement sera saisi d'un projet de loi-cadre au premier trimestre 2008, mais des groupes de pilotage des programmes opérationnels se mettront en place dès la semaine prochaine ; ils devront tous être à l'oeuvre d'ici au 15 décembre. Y seront associés des comités d'évaluation et de suivi afin que nous disposions de la plus grande lisibilité sur les grands chantiers emblématiques : transports publics urbains, nationaux et internationaux, secteur aérien, voies navigables, voies maritimes, technologies à promouvoir.
Telle est la méthode : une mission, un objectif, des indicateurs, un comité de pilotage et des comités de suivi. Le Parlement sera bien entendu associé au processus et un nouveau Grenelle se réunira tous les ans à la même date pour dresser l'état exact de notre pays dans ce domaine.
En résumé, cette première phase nous a permis d'avoir une stratégie et une vision claires, et cette longue période de concertation nous permet maintenant d'entrer sans délai dans l'action concrète. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Monsieur le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, il y a quelques semaines, nous avons débattu dans cet hémicycle des régimes spéciaux. Cette conversation …
… nous a convaincus, pour un certain nombre d'entre nous du moins, que l'alignement de la durée de cotisation des régimes spéciaux sur le régime général avait un caractère quasi inéluctable, en tout cas fortement nécessaire à la pérennité du financement de ces régimes. Certes, cette perspective d'alignement provoque de l'inquiétude, parfois même de la colère, chez les agents aujourd'hui éligible à ces régimes. C'est bien compréhensible, car beaucoup d'entre eux ont pris des engagements professionnels sur le long terme en se fondant sur une modalité de financement de leur retraite que nous nous apprêtons aujourd'hui, par nécessité, je le répète, à faire évoluer.
Vous avez donc, monsieur le ministre, engagé la négociation avec les partenaires sociaux sur la refonte de ces régimes. Pourriez-vous préciser à la représentation nationale dans quel esprit vous avez entamé et vous poursuivrez ces négociations ? Quel en est le contenu ? Quel en sera le calendrier ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
Monsieur le député, je garde en permanence, dans la gestion de ce dossier, la conscience du mandat clair que nous ont donné les Français : réussir la réforme des régimes spéciaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Car ce sujet n'arrive pas aujourd'hui par surprise : il a été au coeur de la campagne présidentielle. Le Président de la République a indiqué très clairement aux Français qu'il s'agissait de passer de 37 ans et demi à 40 ans de cotisation pour que tous soient sur un pied d'égalité : il n'y a pas de raison pour que la durée de cotisation de 500 000 Français reste de 37 ans et demi, alors que celle de 25 millions de Français est de 40 ans. C'est une question de justice sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Que les contribuables achètent les actions de Lagardère le double de leur valeur, c'est ça la justice sociale ?
Nous savons en outre que le statu quo mettrait en danger les retraites des agents des régimes spéciaux. Comme tous les salariés, il faut qu'ils travaillent plus longtemps pour que leurs retraites soient garanties à terme.
C'est dans cet esprit que j'ai mis sur la table, voilà dix jours maintenant, un document d'orientation qui précise l'harmonisation des régimes, le passage de 37 ans et demi à 40 ans, sans lequel on ne peut pas réussir cette réforme, ainsi que de nombreux autres aspects.
J'attends maintenant, comme je l'ai indiqué, les propositions des organisations syndicales – j'en ai d'ailleurs déjà reçu certaines. Après avoir rencontré hier au ministère les directions des entreprises, je rencontrerai, à partir de demain et jusqu'à vendredi, les organisations syndicales représentatives dans ces entreprises. J'étudierai sérieusement toutes les propositions qui me seront faites, car quand on joue le jeu de la concertation, on le joue jusqu'au bout. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Une chose est cependant certaine : sur ce sujet, dans la France de 2007, on a plus à gagner à la négociation qu'au conflit. Il y a certes aussi, vous l'avez rappelé, des inquiétudes de la part des agents. Le Président de la République est allé à leur rencontre. Vendredi dernier, j'étais moi-même à Reims pour rencontrer des cheminots et, ce week-end, dans les Yvelines pour m'entretenir avec les agents d'une centrale EDF. Tous ont compris que le passage de 37 ans et demi à 40 ans de cotisation était inévitable, mais ils se posent des questions sur le montant de leur pension. Ils veulent savoir s'ils pourront s'organiser, comme l'ensemble des Français, avec un complément de retraite ou un compte épargne temps, avec le rachat de leurs années d'études ou la prise en compte de la spécificité des métiers.
Tous ces sujets sont aujourd'hui sur la table, mais je tiens aussi à rappeler que nous avons une responsabilité collective – Gouvernement, parlementaires et organisations syndicales – vis-à-vis des agents et des Français : celle de réussir la réforme des régimes spéciaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Madame la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports (« Elle n'est pas là ! » sur plusieurs bancs), vous participez à un gouvernement qui prône la rupture avec vos prédécesseurs, lesquels sont aussi, cela n'aura échappé à personne, vos amis politiques.
M. Douste-Blazy a mis en place les franchises médicales dès 2004. À l'époque, il indiquait ici même, devant la représentation nationale, qu'avec ces mesures, l'équilibre serait atteint en 2007. M. Xavier Bertrand, ministre de la santé dans le précédent gouvernement, n'est pas revenu sur les franchises d'un euro par consultation et de 18 euros sur les examens médicaux importants, alors qu'il avait parfaitement connaissance de la situation dramatique des comptes de l'assurance maladie et de l'inefficacité des mesures de son prédécesseur, qui se soldent aujourd'hui par près de 7 milliards d'euros de déficit.
Madame la ministre, vous recourez aujourd'hui à une taxe sur les malades, qui touchera fortement les plus modestes, après les cadeaux fiscaux de près de 15 milliards d'euros que votre gouvernement a faits aux plus riches. Je ne doute pas que ceux qui ont reçu récemment un chèque du trésor public au titre du bouclier fiscal pourront subir sans conséquences les franchises qui vont s'appliquer. Vous avez osé demander : « Qui n'est pas capable de payer 4 euros par mois pour sa santé ? » Vous savez comme moi que sur une simple prescription médicale, par exemple pour la première pathologie hivernale, la franchise qui s'appliquera pourrait atteindre immédiatement 20 euros. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ces franchises ne rapporteront que 850 millions d'euros. Vous avez en outre décidé de nous faire croire qu'elles serviraient à la lutte contre la maladie d'Alzheimer.
Madame la ministre, je vous le demande au nom de mon groupe et au nom des couches les plus modestes de notre société, pouvez-vous assurer à la représentation nationale que le montant de ces franchises n'augmentera pas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Madame la députée, vous avez raison : la question de l'avenir du financement de notre protection sociale est posée. Cette question qui était au coeur de la campagne électorale, le Président de la République en a rappelé récemment l'importance, et nous devons tenter ensemble de lui apporter des réponses responsables. Dans ce domaine, d'ailleurs, il faut bien l'admettre, vous n'avez pas fait grand-chose. (« Rien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Et vous, pendant cinq ans ?
La franchise est un élément de financement de la protection sociale. Elle va nous permettre de faire face à l'augmentation des dépenses liées à des maladies aussi graves que le cancer ou la maladie d'Alzheimer et au développement des soins palliatifs. Savez-vous que le montant global des dépenses supplémentaires concernant ces trois domaines avoisine 700 à 800 millions d'euros supplémentaires chaque année ? Nous devons y faire face. C'est une question de dignité pour les malades. À titre d'exemple, je rappelle que le coût des médicaments nouveaux destinés à soigner le cancer atteindra 150 millions d'euros supplémentaires cette année.
La franchise est responsable ; elle est aussi juste. Toutes les catégories sociales sont concernées, mais ni les femmes enceintes, ni les enfants, ni les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire ne le seront : 15 millions de nos compatriotes en seront ainsi exemptés.
Je le répète : la franchise est juste. Elle est en effet plafonnée à 50 euros au total, ce qui est un montant adapté. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Cinquante euros pour une année : c'est, compte tenu des exonérations qui seront appliquées, une mesure de justice. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Il n'est pas sérieux de dire que la franchise limitera l'accès aux soins. Ce n'est pas une attitude responsable que de lancer de tels anathèmes ou de faire peur aux Français en les désinformant. Nous prenons nos responsabilités. Vous devez aussi, madame la députée, accepter de prendre les vôtres. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Philippe Goujon, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, le Président de la République vous a demandé d'engager un grand plan national de vidéosurveillance afin d'équiper notre pays de dispositifs dont l'efficacité n'est plus à démontrer et de faire ainsi franchir à nos forces de sécurité un saut qualitatif de première importance, tout en permettant le redéploiement d'effectifs sur le terrain.
Comme la police judiciaire est passée de la religion de l'aveu à la religion de la preuve, la police de voie publique doit, elle aussi, bénéficier des progrès techniques les plus récents. De très nombreuses métropoles sont largement équipées, et depuis longtemps. L'exemple de Londres est assurément le plus significatif : la vidéosurveillance, qui s'appuie sur un réseau de 60 000 caméras reliées à Scotland Yard, y a permis d'identifier des terroristes et de comprendre leurs modes opératoires ; elle a aussi permis d'appréhender, par exemple, deux adolescents auteurs d'un rapt particulièrement odieux.
Cet exemple est loin d'être le seul. Toutes les villes qui s'en sont dotées ont vu la délinquance baisser, dans une proportion atteignant parfois 30 %, sans que les libertés individuelles en aient été pour autant le moins du monde menacées, les garanties prévues par les lois de 1995 de 2006 étant très protectrices – bien davantage d'ailleurs qu'en Grande-Bretagne.
Un problème majeur subsiste néanmoins : notre pays est dramatiquement sous-équipé. Alors qu'un rapport de l'inspection générale vient de vous être remis, où en est, madame la ministre, le plan national de vidéosurveillance que le Président de la République vous a demandé mettre en oeuvre ?
Question complémentaire : alors que la capitale ne compte que 330 caméras de voie publique, la mairie de Paris affichant visiblement d'autres priorités (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), au moment même pourtant où la menace terroriste est élevée et où la délinquance doit continuer de diminuer, les violences physiques ayant commencé à baisser, êtes-vous en mesure d'accélérer la mise en oeuvre de ce plan de vidéotranquillité de 1 000 caméras que je réclame depuis plusieurs années et qu'attend la très grande majorité des Parisiens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Comme vous, monsieur Goujon, je suis persuadée que la vidéosurveillance est un moyen important de protection contre le terrorisme – Londres l'a montré –, de lutte contre l'insécurité et même, accessoirement, de fluidification de la circulation.
Il est vrai que notre pays est encore très sous-équipé, avec à peine 20 000 caméras sur l'ensemble du territoire. Surtout, alors même que 230 villes sont équipées de vidéosurveillance, 53 d'entre elles seulement disposent d'une connexion avec les centres de commandement de la police. Il était donc nécessaire de développer ce dispositif.
Mon action touche deux domaines : la multiplication des caméras de vidéosurveillance et – ce qui est très important – l'augmentation très sensible des connexions avec les caméras existantes mises en place sur la voie publique par des villes ou des organismes.
J'ai donc décidé de mettre en place un plan de triplement du nombre des caméras de vidéosurveillance d'ici à la fin de 2009, ce qui représente une accélération sensible par rapport à ce qui était envisagé, et d'aider, durant la même période, à la connexion avec les services de commandement de la police de toutes les caméras existantes sur la voie publique pour lesquelles ce sera possible.
Une somme de 4 millions d'euros est d'ores et déjà destinée à mettre en place ces connexions d'ici à la fin de l'année, partout où les maires le voudront et où cela sera techniquement possible.
Pour ce qui concerne plus particulièrement Paris, j'ai demandé au préfet de police de mettre en route dès l'année 2008 un plan de mille caméras, qui consiste d'abord à tripler le nombre des caméras de surveillance dans la capitale. Je lui ai d'autre part demandé de relier au centre de commandement de la police, en partenariat avec tous les organismes qui ont des caméras sur la voie publique, le plus grand nombre possible de ces caméras. J'ai également prévu que, dès 2008, 120 caméras seraient embarquées sur des véhicules pour nous permettre de procéder à des contrôles dans différents endroits de la capitale. J'ai enfin demandé qu'à la gare du Nord, où ont eu lieu certains événements – je ne sais pas, messieurs, si vous vous y êtes intéressés autant que nous – (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), un plan conjoint puisse être établi par la RATP, la SNCF et la préfecture de police de Paris.
Oui, nous nous intéressons la sécurité des Français. Nous ne nous contentons pas de le dire : nous prenons des mesures concrètes et nous le faisons, nous, rapidement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de l'enseignement supérieur et la recherche, l'Institut de veille sanitaire vient de faire connaître le décès de cinq personnes, survenu en 2002 et 2003, des suites d'un cancer de la plèvre. Or ces cinq personnes avaient fréquenté le campus de Jussieu pendant plusieurs dizaines d'années.
Dès 1996, des travaux lourds et coûteux de désamiantage du site ont été entrepris. Malgré les nuisances, les personnels et enseignants des universités de Paris VI et Paris VII continuent sans relâche à encadrer les étudiants et à assurer les cours.
L'annonce faite ce matin, liant les causes de ces décès à la fréquentation du site, a provoqué un légitime sentiment d'inquiétude chez des milliers d'étudiants, de chercheurs, d'enseignants et de personnels administratifs et techniques qui travaillent chaque jour à l'université de Jussieu.
Madame la ministre, voilà maintenant très longtemps que l'on parle du problème de l'amiante à Jussieu. Pouvez-vous informer la représentation nationale de l'avancée et du calendrier des travaux ? Surtout, êtes-vous aujourd'hui en mesure de rassurer les étudiants et les personnels sur les conditions de leur sécurité sanitaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Vitel, l'Institut de veille sanitaire vient d'établir que cinq chercheurs – quatre hommes et une femme – sont décédés il y a quelques années d'un cancer de la plèvre à la suite d'une exposition passive à l'amiante d'une durée de 10 à 35 ans sur le campus de Jussieu.
Tout d'abord, je tiens à témoigner à leurs familles toute ma sympathie, toute mon émotion.
Je veux aussi affirmer très clairement et solennellement qu'aujourd'hui, aucune des personnes qui travaillent, qui étudient, qui enseignent ou qui cherchent sur le campus de Jussieu n'est plus exposée à l'amiante. Depuis 1996, des mesures de sécurité ont été prises, de manière à protéger les personnes…
Cela n'existe pas ! Arrêtez ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je vous en prie, c'est un sujet suffisamment grave pour que l'on écoute attentivement Mme la ministre.
Ces mesures de sécurité sont vérifiées et mises à jour chaque année. Les deux tiers du campus sont d'ores et déjà désamiantés.
Pourquoi le chantier dure-t-il depuis si longtemps ? À cause du choix initial qui a été fait de désamianter en site occupé, c'est-à-dire avec 50 000 personnes continuant à y travailler. Cela a été très difficile de déménager des laboratoires de recherche…
Monsieur Gremetz, sur une question aussi grave, je vous demande de bien vouloir écouter attentivement la réponse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je crois que cela intéresse tous les gens qui nous écoutent, monsieur Gremetz. Cela a été très difficile de déménager des laboratoires de recherche dans 120 000 mètres carrés de locaux provisoires, de créer un campus universitaire sur la ZAC de Tolbiac à partir de rien. Cela a pris beaucoup de temps, mais je peux vous assurer que les crédits nécessaires au chantier de Jussieu ont toujours été débloqués par l'État, qui a payé rubis sur l'ongle.
Quand j'ai pris mes fonctions, le chantier était bloqué depuis quelques mois. Il y avait des dysfonctionnements administratifs, des difficultés relationnelles. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Cela m'a conduite à réorganiser l'établissement public en charge du désamiantage. Depuis l'été, les travaux sont relancés, la reconstruction de la tour ouest a commencé. Notre objectif est de finir les travaux, de désamianter et de rénover intégralement le campus d'ici fin 2 011. Nous allons dégager 216 millions d'euros et douze emplois supplémentaires pour mener à bien ces travaux.
Au-delà du campus de Jussieu, nous allons poursuivre à marche forcée le désamiantage de tous les locaux universitaires et de recherche qui le nécessitent. C'est notre responsabilité et nous l'assumons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Notre assemblée va être appelée à s'exprimer tout à l'heure sur le budget de 2008, puis à débattre des comptes sociaux. À M. Woerth, qui a accusé la gauche de n'avoir rien fait, je rappellerai qu'entre 1997 à 2002, lorsqu'elle était au pouvoir, les comptes sociaux avaient non seulement été ramenés à l'équilibre, mais qu'ils étaient excédentaires. (« Faux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. –Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le Premier ministre, vous n'ignorez pas l'état de nos finances publiques puisque vous avez vous-même parlé de faillite pour caractériser la situation financière héritée du gouvernement précédent.
Le débat budgétaire de la semaine dernière nous conduit à douter fortement des prévisions que vous affichez pour l'année prochaine. Ce qui devait être un choc de confiance et de croissance est devenu un choc de défiance, négatif pour la croissance : vous prévoyez un demi point de croissance de moins qu'il y a seulement quelques mois, et votre nouvelle estimation se situe un point en dessous de la croissance européenne.
Beaucoup d'instituts de prévision anticipent une aggravation du déficit des finances publiques pour 2008, et certains envisagent même un glissement au-delà de la barre des 3 %. Nombre d'entre eux estiment aussi que vous serez amenés à prendre des mesures de rigueur pour endiguer ces dérapages.
Ma question, c'est celle que nous n'avons eu de cesse de poser à Mme Lagarde et M. Woerth pendant tout le débat budgétaire. Ils n'y ont pas répondu. Comme vous n'avez pas hésité, par le passé, à vous exprimer sur le sujet – sur la TVA notamment – j'espère que vous nous répondrez. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire si oui ou non, vous excluez toute augmentation de la TVA, de la CSG ou de la CRDS pour 2008 ?
Votre réponse est importante pour éclairer notre assemblée, mais surtout nos concitoyens qui redoutent ce que l'avenir leur réserve. Car après les cadeaux fiscaux accordés cet été aux plus fortunés (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.), beaucoup de Français craignent que les plus modestes d'entre eux ne soient appelés à en régler la note, dans quelques mois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le député, je veux bien répondre encore à cette question à laquelle nous avons répondu pendant tout le débat sur le budget, la semaine dernière, et à laquelle nous répondrons de nouveau lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Sans vouloir donner de leçon, je voudrais quand même vous rappeler que, lorsque nous avons pris le pouvoir, vous nous avez laissé un budget mal préparé et insincère. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Il manquait près de 10 milliards d'euros, trois primes de Noël n'avaient pas été payées, la croissance avait été volontairement surévaluée. Donc, je vous en prie ! Le dernier budget présenté par la gauche était faux, archifaux ! Je souhaite le redire. (« Arrêtez ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Nous avons fait un effort sans précédent pour le budget 2 008 de la France. C'est un budget sincère, sérieux. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) C'est un budget qui s'appuie sur des hypothèses crédibles : 2,25 % de croissance en 2008, qui peut dire aujourd'hui que nous ne les atteindrons pas ? (« Vous ! Vous le savez ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Vous peut-être, parce que vous ne croyez pas en la France ! Jamais vous n'y avez cru ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) En réalité, c'est votre pessimisme qui nous freine. Par des mesures volontaires, sérieuses, de relance et d'investissement, nous souhaitons que la croissance soit au rendez-vous. Ce sera le cas ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Mesdames et messieurs les députés, le budget 2 008 est un jalon sur la trajectoire menant à l'équilibre de nos finances publiques en 2012, comme l'a dit le Président de la République et comme l'a confirmé le Premier ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Vous prétendez que vous aviez réalisé le redressement des comptes sociaux ? Juste une petite remarque : à l'époque, vous aviez bénéficié d'une croissance exceptionnelle. Vous l'avez gâchée ! (Brouhaha sur les mêmes bancs.) Vous n'avez jamais engagé la moindre réforme de structure pour l'assurance maladie ! Vous avez été des fourmis quand vous auriez dû être des cigales ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi et, en son absence, à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.
À la fin de la semaine dernière, une réunion du G7 s'est tenue à Washington. Mme Christine Lagarde y a participé et elle était même la première femme à siéger au sein de cette instance. Selon la presse, le G7 a traité du problème des monnaies faibles et aussi d'un certain nombre de sujets tels que les fonds souverains, voire vautours.
Certes, la faiblesse du yuan chinois pose un problème à l'économie et au commerce international. Mais, on ne peut pas ignorer la cherté de l'euro due à la politique monétaire menée par la Banque centrale européenne, politique totalement inappropriée, notamment à l'état de l'économie française.
Quant aux fonds souverains et vautours, ils montrent la naïveté du tout-libéralisme au niveau mondial. (« Très bien ! » sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Les États doivent se doter de moyens pour contrôler un certain nombre d'acquisitions réalisées sur ces bases.
Alors, monsieur le secrétaire d'État, quel bilan tirez-vous de cette réunion du G7 ? Quelles initiatives la France va-t-elle prendre au niveau européen et mondial pour parvenir à un réajustement des monnaies afin que l'économie française ne soit pas constamment pénalisée ? Quelles initiatives allez-vous surtout prendre en matière de politique industrielle, tant au niveau français qu'européen, pour pouvoir contrôler un certain nombre de mouvements parfaitement inadmissibles. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.
Monsieur Myard, les questions que vous posez sont tout à fait légitimes (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et croyez bien que le Gouvernement y est très attentif.
Christine Lagarde aurait souhaité vous répondre mais, en ce moment, elle préside la conférence sur l'emploi et le pouvoir d'achat. Souffrez que je la remplace.
Ce week-end, vous l'avez rappelé, elle se trouvait avec M. Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, à la réunion du G7 à Washington. À cette occasion et à l'initiative de la France, le communiqué commun comporte un ajout : un appel à l'appréciation accélérée du yuan chinois. Car vous avez raison de souligner qu'il existe un paradoxe entre la sous-évaluation manifeste du yuan et les exceptionnels excédents commerciaux de la Chine. Toujours à l'initiative de la France, les autorités américaines ont reconnu que le dollar devait s'apprécier.
Quant aux fonds dits souverains, ces fonds d'État créés grâce aux excédents commerciaux accumulés par certains pays, ils posent un problème de transparence et de diversification de leurs investissements. Il ne faut pas nier qu'ils peuvent jouer un rôle utile dans le financement de l'économie mondiale, mais leur manque de transparence est source de difficultés. C'est la raison pour laquelle – toujours à l'initiative de la France et de Christine Lagarde – le FMI et l'OCDE réfléchissent au meilleur moyen d'assurer la transparence de ces fonds que vous appelez « vautours » et que nous qualifierons de souverains, si vous le permettez. Donc, la France est très attentive et elle ne restera pas absente sur le terrain de la régulation. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.– Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Reprenant la question de mon collègue Pierre-Alain Muet, je m'adresse à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Je lui demande de bien vouloir répondre à cette simple question, mais de vraiment y répondre : prenez-vous l'engagement solennel, monsieur le ministre, de n'augmenter ni la TVA, ni la CSG, ni la CRDS ? Si vous ne répondez pas, c'est que vous admettez, dans cette enceinte, que vous procéderez à ces augmentations après les élections municipales. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. (Bruits sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Attendons, monsieur le ministre, que tout le monde se calme…
Je voudrais d'abord apporter un petit rectificatif à mes propos de tout à l'heure. Dans le feu de la réponse, j'ai inversé les choses : je voulais dire que l'opposition a été plus cigale que fourmi, et non l'inverse. Je dois cette rectification à la vérité historique des questions au Gouvernement. (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.– Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Je voudrais vous redire simplement, comme lors du débat budgétaire, que nous présentons un budget solide et sérieux. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) C'est un budget fondé notamment sur la baisse des prélèvements obligatoires. (Même mouvement.)
Laissez-moi vous répondre ! Je le dis très clairement : nous voulons abaisser les prélèvements obligatoires. Il y a évidemment un seul budget du pays. Il n'y a pas un budget avant les élections municipales et un autre après. Le budget que nous présentons est fondé sur l'investissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.– Huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Prélèvements fiscaux et sociaux
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt.)
L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2008.
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, dans un instant, vous serez invités à vous prononcer sur la première partie du projet de loi de finances pour 2008.
Je voudrais à cette occasion rappeler brièvement l'esprit dans lequel nous avons élaboré ce budget : il est fondé sur la confiance et la sincérité, mais aussi sur le mouvement et la capacité de faire évoluer les choses.
Il est fondé sur la confiance car il respecte la parole donnée : nous tenons les engagements pris par le Président de la République devant les Français. C'est un facteur de légitimité indispensable pour poursuivre résolument les réformes dont la France a besoin.
Il repose ensuite sur la sincérité parce que les hypothèses de croissance retenues sont raisonnables et justes, les prévisions de recettes prudentes et les dépenses évaluées au plus près. Nous avons inscrit notre démarche dans une totale transparence vis-à-vis de chacune et de chacun d'entre vous. Un nouvel effort a ainsi été fait pour améliorer la qualité des documents budgétaires qui vous sont transmis : je pense notamment aux rapports détaillés sur la dépense et sur les effectifs, qui éclairent précisément nos engagements.
Enfin, ce budget est fondé sur le mouvement car il s'inscrit dans une double dynamique : d'abord, une dynamique de croissance, que nous alimentons dans l'immédiat avec des mesures qui valorisent le travail et le pouvoir d'achat, et pour l'avenir avec la forte priorité donnée à la recherche et à l'innovation. Ce budget s'inscrit par ailleurs dans la dynamique des réformes que nous avons engagées dans tous les domaines : elles nous permettront de maîtriser durablement la dépense et de poursuivre le redressement de nos finances publiques.
À l'issue de ce débat, je voudrais, mesdames et messieurs les députés, vous adresser mes remerciements, en mon nom et en celui de Christine Lagarde. Je vous remercie en particulier du climat dans lequel nous avons travaillé : chacun a pu s'exprimer en toute liberté et en toute clarté, et le Gouvernement, je le crois, a été à l'écoute. Nous avons ainsi travaillé dans le respect mutuel.
Ce climat nous a permis de trouver une solution consensuelle en ce qui concerne le prélèvement libératoire forfaitaire sur les dividendes. De même, la modification apportée au contenu du nouveau contrat de stabilité entre l'État et les collectivités territoriales a permis de mieux prendre en compte la situation des communes rurales les plus fragiles, tout en préservant l'équilibre des finances publiques.
Je souhaite que nous poursuivions dans le même esprit le dialogue sur deux sujets importants, déjà abordés au cours des débats. Il s'agit d'abord des niches fiscales non plafonnées. Votre commission des finances, semble-t-il, souhaite y retravailler : j'y suis favorable et m'engage à répondre à l'ensemble de vos demandes d'informations. L'autre sujet est la possibilité offerte aux dirigeants de PME d'investir une part de leur ISF dans leur entreprise. C'est une mesure de croissance efficace, qui confortera les fonds propres des PME : il est bien naturel que l'on puisse en bénéficier lorsque l'on investit dans sa propre entreprise, et pas uniquement dans celle du voisin. Il faut seulement veiller à ce qu'une telle faculté ne soit pas utilisée à des fins abusives, et je m'engage devant la représentation nationale à vérifier, d'ici à la discussion du PLF au Sénat, que les garde-fous que nous avons prévus sont les bons.
Pour ce qui concerne la compensation des transferts prévus au titre de la décentralisation, je m'engage, comme je l'avais indiqué, à informer préalablement votre commission des finances du réajustement que nous ferons au Sénat.
Enfin, nous avons différé la discussion d'un certain nombre de sujets, qui seront abordés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. Il ne s'agissait pas pour moi de botter en touche : ces sujets seront abordés, comme je m'y suis engagé.
Je voudrais, pour finir, remercier l'ensemble de la représentation nationale pour la qualité des interventions. Je remercie la majorité pour sa présence, son engagement et son soutien à ce projet de budget, ainsi que l'opposition, avec qui nous avons pu débattre courtoisement du fond : je tenais à lui en donner acte. Je remercie plus particulièrement le président de la commission des finances et le rapporteur général, sans oublier tous les collaborateurs du ministère et les services de l'Assemblée nationale, qui ont accompli à nos côtés un travail d'une très grande qualité.
Le souci de l'intérêt général et le sens des responsabilités qui nous animent tous ont permis d'amender ce budget sans porter atteinte à son équilibre. C'est pourquoi je vous appelle maintenant à voter cette première partie du projet de loi de finances pour 2008, un projet de loi qui est au service de l'avenir et de tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2008 s'inscrit d'abord dans une stratégie de relance de la croissance et de la compétitivité, et ce dans la continuité des excellentes mesures adoptées en juillet dernier avec la loi relative à l'emploi, au travail et au pouvoir d'achat. Je pense notamment au puissant dispositif d'exonération des heures supplémentaires, qui doit permettre de travailler plus non seulement pour gagner plus, mais aussi pour produire plus.
Parallèlement à cette stratégie de relance de la croissance, ce budget vise à poursuivre le rétablissement de nos comptes publics en appliquant, comme nous le faisons depuis plusieurs années, des règles de bonne conduite budgétaire : elles ont fait leurs preuves, comme en témoigne la baisse sans précédent du déficit de l'État. Ces règles sont simples : faire en sorte que les dépenses, d'une année à l'autre, n'augmentent pas plus vite que l'inflation ; s'agissant des recettes, se fonder sur des prévisions très prudentes et, au cas où elles génèrent des surplus, en affecter la totalité à la baisse du déficit.
Dans ce contexte, la loi votée pour revaloriser l'emploi, le travail et le pouvoir d'achat aura été un investissement pour relancer la croissance. La seconde étape est le présent projet de budget, qui vise à redresser les comptes publics. S'agissant des dépenses, l'effort demandé est particulièrement exigeant, puisque la norme limitant leur progression à l'inflation s'étend aussi aux prélèvements sur recettes au bénéfice des collectivités territoriales et de l'Union européenne.
Dès lors, la marge de manoeuvre dont nous disposons – environ 5 milliards d'euros – est presque entièrement consommée par l'augmentation mécanique des pensions : 2 milliards, et des intérêts de la dette : 1,5 milliard. Une maîtrise particulièrement exigeante des dépenses relatives aux autres secteurs de l'action publique est donc indispensable, d'autant plus que nous parvenons à financer les deux priorités de ce budget : la justice d'une part, la recherche et l'enseignement supérieur de l'autre.
Le déficit prévisionnel marque, il est vrai, une pause par rapport à celui qui était prévu pour 2007, mais je vous fais confiance, monsieur le ministre, pour qu'il soit revu à la baisse dans l'exécution du budget de 2008 et enregistre donc une aussi forte réduction que les années précédentes.
Je voudrais, pour terminer, saluer la qualité du travail que nous avons eu avec vous, monsieur le ministre, ainsi qu'avec Mme Christine Lagarde et tous vos collaborateurs. J'associe à ces remerciements le président de la commission des finances, Didier Migaud.
Nous nous sommes réunis en amont tout au long de l'été pour préparer les dispositions budgétaires, ce qui a contribué à la qualité de notre collaboration.
Je remercie également les nombreux collègues qui ont participé à nos travaux la semaine dernière, tant en commission des finances que dans cet hémicycle, les présidents de séance, le président de la commission des finances, pour son rôle constructif, la presse, qui a rendu compte de nos travaux, et l'ensemble des personnels de l'Assemblée nationale.
La commission des finances vous invite maintenant, mes chers collègues, à voter la première partie du projet de loi de finances pour 2008. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, comme l'a écrit récemment Patrick Artus, l'un des plus grands économistes français : « Nous avons affaire à un capitalisme sans projet, qui ne fait rien d'utile de ses milliards, qui n'investit guère, qui ne prépare pas assez l'avenir. L'argent coule à flots et alimente plutôt la voracité des investisseurs, dans une course aux rendements financiers à court terme. »
Voilà dans quoi s'inscrit toute votre politique !
Voilà pourquoi, pendant les discussions budgétaires, vous consacrez des heures à gratter une exonération de cotisations sociales par ci – dont, selon la Cour des comptes, 80 % n'améliorent pas l'emploi – un allégement de l'ISF par là, pour empêcher soi-disant la fuite des capitaux alors même que vous ne faites rien contre le scandale des paradis fiscaux.
Vous nous proposez de poursuivre ce que vous faites depuis cinq ans, c'est-à-dire des cadeaux et des exonérations en tout genre. Mais le bilan de votre action justifie-t-il que nous poursuivions dans cette voie ?
Vous avez fait passer la croissance de 2,2 à 1,8 % et augmenté la dette de huit points. Vous avez accru la précarité du travail de 20 % et creusé les inégalités. Si, pour 0,01 % des Français, les revenus ont augmenté de 42,6 %, ils n'ont progressé que de 4,6 % pour 90 % d'entre eux ! Martin Hirsch déclarait récemment : « Le record du nombre de pauvres dans notre pays vient d'être battu dans l'indifférence de tous. » Voilà votre bilan, sans parler de la hausse des prix !
Mais vous avez réussi une chose : en quatre ans, les dividendes des entreprises du CAC 40 se sont accrus de 70 %, pendant que les salaires augmentaient seulement de 6,6 %. Où est la rupture ? C'est celle qui s'aggrave entre la France du fric et des privilèges et la France qui n'a que son travail pour vivre !
Ce budget n'est qu'un modeste avant-goût de ce qui attend la majorité de nos concitoyens. La facture est déjà prête : hausse de la TVA et de la CSG, franchises médicales – dont le montant de 800 millions d'euros, que le ministre a rappelé tout à l'heure, correspond exactement à celui des cadeaux distribués grâce à votre bouclier fiscal. C'est aussi la baisse des subventions aux collectivités locales, la poursuite de la vente du patrimoine national et les attaques en règle contre les retraites et l'assurance maladie. Voilà l'arsenal prévu pour faire grossir des capitaux dont beaucoup ne sont que des parasites !
Aujourd'hui, la sphère de la finance pèse trois fois plus que le produit intérieur brut mondial et les trois quarts ne sont pas investis dans la production. La France n'échappe pas à ce gaspillage gigantesque, au détriment de l'activité économique, du développement durable et du progrès social.
Pourtant, une autre politique est possible. Il faut juste un peu de courage pour résister aux prédateurs financiers, à ces privilégiés qui s'engraissent sur le dos de ceux qui travaillent !
Notre seule vraie richesse se trouve dans les capacités humaines – développons donc l'éducation, la recherche, le pouvoir d'achat, l'emploi et la santé, et dans le même temps, sanctionnons la spéculation financière, les paradis fiscaux et le dumping fiscal et social.
L'argent coule à flots et il est de notre devoir de proposer des mesures afin que le monde financier cesse de prendre le pas sur la justice et le progrès social.
Pourquoi, par exemple, ne pas taxer à 0,5 % les actifs financiers – ce sont 17 milliards d'euros –, imposer les revenus boursiers au même taux que les salaires, ce qui représente 13 milliards d'euros ? Pourquoi, avec les 27 milliards d'euros affectés aux exonérations sociales, ne pas créer un fonds national ouvrant un crédit sélectif pour les PME ? Pourquoi ne pas multiplier par deux l'ISF, ce qui représenterait 4 milliards d'euros, augmenter la progressivité de l'impôt sur le revenu, qui est le plus juste, et réduire la TVA ? En somme, il faut rémunérer le travail plus que les dividendes pour améliorer le pouvoir d'achat, la consommation, les investissements : voilà la clé de la croissance et du progrès social.
Tel n'est pas votre choix. C'est pourquoi les députés communistes, verts et ultramarins du groupe de la Gauche démocrate et républicaine voteront contre votre projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Nouveau Centre se félicite de l'esprit d'ouverture qu'a manifesté le ministre du budget pendant nos débats. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur les bancs du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Il faut le souligner parce que ce n'est pas tellement fréquent, y compris à l'égard de l'opposition, mes chers collègues ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
C'est à l'aune de trois critères que le groupe Nouveau Centre juge ce projet de loi de finances : respect des engagements électoraux pris par le Président de la République et la majorité, respect de la justice fiscale et de l'égalité devant l'impôt ; impact sur la croissance et l'emploi.
Le Nouveau Centre se réjouit d'un certain nombre d'avancées. Le Gouvernement fait un triple effort de maîtrise des dépenses publiques, comme le demande notre groupe depuis longtemps. Il clarifie les relations financières entre l'État et la sécurité sociale en réglant intégralement sa dette de 5,1 milliards à la fin 2006 et en prévoyant une dotation en 2008 pour qu'elle ne reparte pas : cela mérite d'être souligné ! Il fait également un effort de productivité de 1 %, le plus important depuis dix ans, par le non-remplacement d'un fonctionnaire sur trois. Enfin, il encourage les collectivités locales à participer à cet effort.
Le Nouveau Centre approuve le Gouvernement lorsqu'il refuse le saupoudrage et définit trois grandes priorités de la politique publique : la justice, l'enseignement supérieur et la recherche. Vu l'étroitesse des marges de manoeuvre, ce sont des choix courageux.
Ce projet de budget pour 2008 est un projet d'avenir, qui comporte des mesures destinées à encourager l'innovation et à stimuler la croissance économique, de l'allégement de la fiscalité des brevets à la création du statut de jeune entreprise universitaire, en passant par la simplification et l'augmentation du crédit d'impôt-recherche, et par la priorité donnée à l'enseignement supérieur et à la recherche. Toutes ces mesures traduisent sa volonté d'investir dans l'avenir.
Ce projet de budget soutient le pouvoir d'achat et valorise le travail, comme en témoignent le nouveau crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt, à hauteur de 0,3 milliard d'euros, l'amélioration de la rémunération des heures supplémentaires, qui représente 5,5 milliards d'euros, et la revalorisation de la prime pour l'emploi. Il est donc faux de prétendre que la loi relative au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat profite aux riches. Au contraire, ce sont, à 75 %, les ménages modestes qui profiteront des 8,8 milliards d'euros.
Le Nouveau Centre regrette néanmoins que ses deux propositions visant à réduire de 4 milliards le déficit du budget de l'État n'aient pas encore été retenues par le Gouvernement. La première de nos propositions consiste à plafonner l'ensemble des niches fiscales, ce qui permettait une économie de 2 milliards, la seconde à réduire les exonérations de charges patronales accordées aux grandes entreprises.
Le Gouvernement s'est déclaré prêt à examiner le plafonnement des niches fiscales non plafonnées. J'espère que le groupe de travail pluraliste qui va être mis en place nous permettra dès la prochaine loi de finances d'avancer sur une idée largement partagée par tous les groupes.
S'agissant des exonérations de charges sociales patronales, une remise en ordre est nécessaire, car nous assistons à une sédimentation des dispositifs, dont certains, comme le rappelle la Cour des comptes, ne sont pas efficaces.
Par ailleurs, nous allons devoir être très attentifs à l'évolution de la croissance, qui pourrait être fragilisée par des événements extérieurs venant notamment des États-Unis. Monsieur le ministre, conservez précieusement la réserve de 7 milliards, car il faudra probablement l'utiliser pour maintenir la réduction du déficit en cas de décélération.
J'en viens aux mesures fiscales. Le groupe Nouveau Centre se réjouit des engagements pris par le Gouvernement en faveur des PME et de l'adoption de son amendement visant à permettre d'investir dans sa propre entreprise. Il reste encore à supprimer la clause des 25 %, qui exclut de nombreuses PME du bénéfice de cette disposition. Vous vous êtes déclaré prêt, monsieur le ministre, à l'examiner au Sénat. Nous reviendrons sur ce point en commission mixte paritaire.
Le Gouvernement s'est également dit prêt à moraliser les stock-options. Une partie des dispositions que nous préconisons relève de la loi de modernisation de l'économie, mais le Gouvernement s'est montré ouvert à l'idée, défendue par Édouard Balladur, qui consiste à interdire la levée d'option tant que les mandataires sociaux et les cadres dirigeants sont en fonction.
Enfin, s'agissant de la fiscalité locale, vous avez accepté une avancée, monsieur le ministre, mais elle reste insuffisante.
En conclusion, fidèle à ses convictions, le groupe Nouveau Centre souhaite aller plus loin dans la réduction des déficits publics. Il est regrettable que le Gouvernement n'ait pas apporté son soutien à la révolution culturelle initiée par notre groupe et qui consiste, pour la première fois dans cet hémicycle, à privilégier les mesures d'économie au détriment de celles qui augmentent toujours plus la dépense publique.
Seule l'accélération des réformes permettra de tenir les engagements pris devant le peuple français par le Président de la République et la majorité présidentielle. Le groupe Nouveau Centre soutient le Gouvernement et contribuera à la réussite des réformes engagées. Sous réserve du respect des engagements pris par le Gouvernement, nous voterons donc en faveur de ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Avant de donner la parole aux deux derniers orateurs inscrits dans les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin. (Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.)
La parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Le groupe UMP votera pour la partie recettes du projet de loi de finances. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Je sais que cela surprend mes collègues de l'opposition. Oui, monsieur Sandrier, la majorité assume ses convictions : le devenir de l'homme est dans l'effort, non dans la facilité. (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Pour récompenser l'effort, le Gouvernement, soutenu par la majorité, choisit d'investir dans les heures supplémentaires – sur la base des 900 millions d'heures effectuées l'an dernier – 5,5 milliards d'euros, qui vont améliorer le pouvoir d'achat.
Ce faisant, il donne un signe à tous les Français et encourage ceux qui souhaitent travailler plus.
C'est la première mesure phare du projet de loi relatif au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat, dont le financement est prévu dans la partie recettes du projet de loi de finances.
Toujours pour encourager l'effort, le Gouvernement choisit également d'investir dans le crédit d'impôt-recherche, à hauteur d'un milliard d'euros cette année, de 1,4 milliard en 2008 et de 2,4 milliards en 2009. Le passage du plafond de 10 à 30 % est une véritable mesure de structuration de la croissance. Or, qu'est-ce que la croissance, sinon un investissement dans la production nationale ? Et comment celle-ci peut-elle demeurer compétitive, sinon en encourageant la recherche et l'innovation, qui seront les parts de marché de demain ?
La majorité UMP soutient sans réserve ce budget, parce qu'il vise à augmenter le pouvoir d'achat des Français et qu'il constitue un premier pas vers la structuration de la croissance.
Nos débats de ces derniers jours sur le volet recettes ont été nourris. Je tiens à remercier le Gouvernement, et notamment M. le ministre du budget, Éric Woerth, pour son attitude très constructive. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il a entendu la majorité parlementaire et répondu à ses attentes (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), allant jusqu'à fixer un calendrier en dehors du vote du volet recettes : je pense notamment à la mesure encourageant les entrepreneurs soumis à l'ISF à investir dans leur propre entreprise. Cette mesure est très importante car, après la crise des subprimes, les conditions d'obtention d'un crédit sont plus strictes et il devient difficile pour une petite ou moyenne entreprise de trouver des financements. Cette mesure est excellente pour l'économie française, et je tenais, monsieur le ministre, à le souligner. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Le groupe UMP votera donc ce texte et remercie le ministre pour la facilité avec laquelle une démarche de concertation a pu être entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Enfin, je souhaite dire à l'opposition que, si elle acceptait, dans la deuxième partie du projet de loi de finances, de saisir la main qui lui a été tendue (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), le débat démocratique en sortirait grandi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Jérôme Cahuzac, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, beaucoup le craignaient, mais nous le savons tous aujourd'hui : les 15 milliards d'euros de cadeaux fiscaux divers et variés (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) voulus par le Gouvernement et votés par la majorité sans qu'ils soient financés ou gagés, ne le seront toujours pas, puisque ce budget ne le prévoit pas pour l'année prochaine. C'est donc un budget inconséquent et, ne serait-ce que pour cette raison, il ne serait ni raisonnable ni légitime de le voter.
Mais il y a plus grave, car ce budget est celui des promesses oubliées. Il avait été solennellement promis que ceux qui voudraient travailler plus le pourraient : or le nombre d'heures supplémentaires prévu est le même que celui de l'année dernière.
Deuxième promesse oubliée : le candidat Nicolas Sarkozy s'était engagé à permettre à ceux qui le voudraient – ou le pourraient – de gagner plus. Or il résulte des documents budgétaires fournis par le ministère de l'économie et des finances que, l'année prochaine, le pouvoir d'achat n'augmentera pas davantage que cette année, voire plutôt moins. Il est étrange que ce premier budget prévoie une progression du pouvoir d'achat moindre que celle envisagée par le budget précédent, voté sous le gouvernement de Dominique de Villepin. En réalité, la grande promesse de « travailler plus pour gagner plus » ne sera pas tenue en 2008.
Il avait également été promis que tous ceux qui contracteraient un emprunt pour acheter leur résidence principale pourraient déduire les intérêts de leur impôt sur le revenu pendant cinq ans. Mais seuls ceux qui ont contracté un emprunt après le 6 mai seront concernés.
La promesse faite pendant la campagne électorale était juridiquement intenable et il faut rendre hommage au ministre du budget, Éric Woerth, d'avoir été l'un des premiers à le souligner. Il n'aura eu que le tort d'avoir eu raison avant les autres, et surtout, contre le Président de la République…
Il avait été promis, lors d'une réunion électorale à Agen, qu'il serait mis fin aux avantages invraisemblables que se consentent certains dirigeants d'entreprise, qu'il s'agisse de stock-options, de retraites dorés ou de parachutes de la même couleur ! Des mots forts avaient été prononcés contre les « patrons voyous ». Les deux ministres chargés du budget, Mme Lagarde et M. Woerth, n'ont pas dû assister à cette réunion, puisque tous deux ont refusé de prendre des mesures significatives permettant de mettre un terme à des pratiques qui déshonorent leurs auteurs, qui portent préjudice à l'ensemble des dirigeants d'entreprise, mais qui, surtout, font litière des légitimes préoccupations des entreprises et de leurs salariés. Cette promesse a également été oubliée.
Il avait été promis que les efforts nécessaires pour redresser le pays seraient partagés. Force est de le constater, la semaine dernière, la majorité UMP a refusé de taxer les compagnies pétrolières et, cette semaine, elle votera, selon toute vraisemblance, l'instauration des franchises médicales. Cet effort partagé ne le sera donc pas : cette promesse, aussi, a été oubliée.
Enfin, la dette publique de notre pays devait baisser. Nous savons qu'il n'en sera rien, car ce budget est fondé sur un taux de croissance – 2,25 % – dont on sait qu'il ne sera pas celui qu'on pouvait espérer. Au nom de quoi notre pays serait-il le seul épargné par une crise financière quand nos principaux partenaires – je pense notamment à l'Allemagne – révisent à la baisse leurs prévisions de croissance ? Le Président de la République a déclaré vouloir 3 % de croissance. Je ne pense pas que la parole présidentielle soit suffisamment forte pour arrêter la crise financière à nos frontières ! Cette parole présidentielle, c'est la muraille de Chine des temps modernes, la ligne Maginot du XXIe siècle et, naturellement, elle connaîtra le même sort : elle cédera aisément ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Pire encore, ce budget inconséquent, ce budget des promesses oubliées est aussi celui des reniements programmés. Certes, les crédits pour l'enseignement supérieur, la recherche et la justice sont privilégiés, mais ils seront les premières victimes des régulations budgétaires et de la mise en oeuvre de la réserve de 7 milliards d'euros, soit 2 milliards de plus que l'année dernière. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Autre reniement : s'agissant des prélèvements obligatoires, la fiscalité écologique ne se substituera pas, ni en partie ni en totalité, à la fiscalité existante, mais s'y ajoutera. Quant à la CSG, la CRDS et la TVA, la question n'est pas de savoir si la majorité, qui semble s'agiter aujourd'hui, en votera l'augmentation – on connaît déjà la réponse –, mais quand ! Cela se fera certainement après les élections municipales (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)…
Je termine, monsieur le président.
Cela se fera après les élections municipales, mais avant que la France ne préside l'Union européenne, car il serait inimaginable que le chef de l'État ait une quelconque autorité sur les autres chefs d'État et de gouvernement si les finances de son propre pays vont à vau-l'eau !
Budget inconséquent, budget des promesses oubliées, budget des reniements programmés : le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche votera contre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2008.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 561
Nombre de suffrages exprimés 560
Majorité absolue 281
Pour l'adoption 339
Contre 221
L'ensemble de la première partie du projet de loi de finances est adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq.)
L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur le texte de la commission mixte paritaire du projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile.
La parole est à M. le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur Thierry Mariani, …
…mesdames et messieurs les députés, quatre semaines après vous avoir soumis, au nom du Gouvernement, le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile – sur lequel je me suis exprimé ce matin encore –, je constate à quel point ce texte a pu être, en si peu de temps, commenté, débattu, mais aussi largement enrichi. C'est tout à l'honneur du Parlement d'avoir été à l'origine d'échanges aussi constructifs et fructueux. Notre démocratie s'en trouve ainsi renforcée.
Après quarante-cinq heures de débat parlementaire, ce projet de loi parvient à son point d'orgue. La commission mixte paritaire a adopté, la semaine dernière, un texte équilibré, qui fait l'objet de l'accord et du soutien sans réserve du Gouvernement. Je voudrais en remercier tout particulièrement le président de la commission des lois de l'Assemblée, Jean-Luc Warsmann, celui de la commission des lois du Sénat, Jean-Jacques Hyest, ainsi que les rapporteurs des deux chambres, Thierry Mariani et François-Noël Buffet.
Je tiens également à saluer la contribution aux débats des deux porte-parole socialistes de cette assemblée, George Pau-Langevin et Serge Blisko, mais aussi celles de Patrick Braouezec et de Noël Mamère, et plus généralement de toute l'opposition. Assurément, nous avons eu des désaccords, mais ils ne nous ont jamais empêchés de maintenir un dialogue républicain et constructif. La démocratie, j'en suis convaincu, en sort gagnante.
Le moment est donc venu de soumettre ce projet de loi au vote solennel de chacune des deux assemblées.
Plus qu'un aboutissement, ce vote constitue une étape vers une meilleure maîtrise de l'immigration. La nouvelle loi permettra en effet de répondre à la double ambition du Président de la République et du Gouvernement : être plus ferme à l'égard des immigrés qui ne respectent pas les lois de la République et, dans le même temps, mieux protéger ceux qui respectent nos règles et nos valeurs. C'est ainsi que nous favoriserons l'intégration des immigrés légaux et que nous préserverons la cohésion de notre communauté nationale.
Cette vision constitue une rupture avec la politique d'immigration que la France a menée pendant plus de trente ans. Cette rupture consiste à tenir les engagements du Président de la République en faveur d'une politique de l'immigration juste, cohérente et équilibrée.
Elle consiste aussi, pour le Gouvernement, à faire vivre le débat parlementaire, à écouter et respecter le Parlement, et à rechercher avec lui toutes les garanties nécessaires afin d'aboutir à l'équilibre auquel nous sommes parvenus.
J'observe que les 18 articles du projet de loi que j'ai soumis au Parlement ont tous été adoptés – avec des améliorations, mais sans être dénaturés : c'est, je le répète, la traduction des engagements pris.
Première réforme : nous nous donnons les moyens de mieux encadrer le regroupement familial. Désormais, les personnes souhaitant rejoindre la France dans le cadre du regroupement familial, tout comme les conjoints étrangers de Français, seront soumis, dans leurs pays de résidence, à une évaluation de leur degré de connaissance de la langue française et des valeurs de la République.
Cette réforme est le fruit d'une conviction : la langue est le meilleur vecteur d'intégration. Elle est la clef de l'accès à l'emploi, au logement, aux services publics et à une vie normale au sein du pays d'accueil. Il ne faut pas attendre l'arrivée en France pour s'initier à la langue française.
Cette mesure est attendue par nos compatriotes : selon une enquête d'opinion publiée le mois dernier, 74 % des Français l'approuvent. Demander aux candidats à l'immigration familiale de passer un test de français et d'apprendre notre langue, c'est à la fois combattre le communautarisme et récompenser les efforts des étrangers qui souhaitent s'intégrer.
De même, l'étranger souhaitant faire venir sa famille en France devra prouver qu'il dispose de revenus adaptés à la taille de sa famille. Votre rapporteur l'a rappelé ce matin : il s'agit là d'une question de bon sens.
Enfin, nous renforçons le parcours d'intégration grâce à la création d'un « contrat d'accueil et d'intégration pour la famille ». En signant ce contrat avec l'État, les parents des enfants ayant bénéficié du regroupement familial recevront une formation sur les droits et devoirs des parents en France. Ils s'engageront notamment à respecter l'obligation d'instruction, renforçant ainsi les chances de leurs enfants de réussir leur intégration dans notre pays.
Deuxième réforme : nous confortons les procédures d'examen des demandes d'asile, en honorant notre tradition d'accueil des réfugiés politiques.
J'ai rappelé ce matin la formule du préambule de la Constitution de 1946 qui témoigne de l'attachement ancien, et jamais démenti, de notre République pour le droit d'asile. Cette tradition, nous la respectons, puisque 124 000 personnes bénéficient aujourd'hui, en France, du statut de réfugié politique.
La question de l'asile et celle de l'immigration sont distinctes et doivent le rester – j'espère que, sur ce point au moins, M. Blisko est désormais rassuré. Garanti par la convention de Genève, l'asile a sa finalité propre, qui doit être de protéger les personnes qui ne le sont plus par leur propre État. L'asile n'est pas et ne sera pas une variable d'ajustement de la politique d'immigration.
C'est dans cet esprit que le projet de loi tient compte de la nouvelle organisation gouvernementale, en me confiant la tutelle de l'OFPRA. Ce n'est pas moi qui, demain, déciderai si tel ou tel étranger doit être reconnu comme réfugié.
L'OFPRA restera souverain dans ses décisions sur les cas individuels, sous le contrôle de la Commission de recours des réfugiés. Le débat parlementaire a permis – et je m'en réjouis – de renforcer l'indépendance de cette juridiction, qui devient la Cour nationale du droit d'asile, et d'améliorer l'intégration des réfugiés politiques.
Au-delà des dix-huit articles qui vous avaient été soumis, le Parlement a souhaité enrichir le projet de loi par un travail d'une grande qualité, pour le compléter tout en respectant sa cohérence.
Le texte initial a été étoffé et comprend désormais 65 articles. Sans doute ne le savez-vous pas, madame Dumont, car vous n'étiez pas là, mais 460 amendements ont été discutés, et 150 adoptés, sans préjuger de leur origine partisane. Venues de tous les bancs, certaines idées ont entraîné l'adhésion. Ainsi, 41 amendements ont été adoptés à l'initiative de l'UMP, 5 du Nouveau Centre, 15 des socialistes, 4 des Verts et 2 des communistes. J'ajoute que 34 amendements ont été adoptés à l'unanimité.
Je reviendrai d'ailleurs sur quatre amendements importants que je vous rappelle pour mémoire, sans pour autant les détailler.
Le premier amendement crée le livret épargne-codéveloppement qui manifeste l'engagement du Parlement en faveur du codéveloppement. Ce produit financier est ouvert à tous les immigrés séjournant régulièrement en France et leur permet de verser leur épargne sur un livret ouvrant droit à une prime versée par l'État.
Le deuxième généralise le bilan de compétences pour tous les étrangers s'installant en France, ce qui répond à votre désir d'améliorer l'intégration par le travail. Il est vrai que nous nous efforçons de rééquilibrer les flux migratoires en augmentant la part de l'immigration de travail. Il est donc logique que, dans le même temps, les immigrés s'installant en France – y compris les migrants familiaux – bénéficient d'un bilan de compétences pour les orienter vers le marché du travail.
Dans un troisième amendement, vous avez marqué votre refus absolu des régularisations massives, en confirmant que les régularisations doivent conserver un caractère tout à fait exceptionnel. C'est dans ce cadre que vous avez souhaité, à juste titre, donner aux préfets la possibilité de tenir compte, au cas par cas, de la capacité d'intégration par le travail. Il ne s'agit naturellement pas de régulariser tous les travailleurs clandestins, mais d'admettre au séjour, à titre exceptionnel, les étrangers en situation irrégulière dont la compétence professionnelle est tout particulièrement recherchée. Je sais que cette initiative répond tout particulièrement au voeu de Pierre Méhaignerie.
Enfin, comme je vous l'ai proposé, vous avez souhaité créer une carte de résident permanent, d'une durée illimitée, pour faciliter la vie des étrangers parfaitement intégrés qui séjournent depuis très longtemps en France.
Je salue enfin quelques députés qui ont apporté au texte une contribution très utile. Éric Ciotti a proposé la création d'un fichier biométrique pour les bénéficiaires de l'aide au retour volontaire. Nicolas Perruchot a favorisé l'immigration de travail, notamment en supprimant l'interdiction faite aux entreprises de travail temporaire de recruter des intérimaires étrangers. Étienne Pinte, Chantal Brunel et Alain Joyandet ont déposé des amendements tendant à protéger les étrangers victimes de violences conjugales. Frédéric Lefebvre a présenté deux amendements importants qui ont d'ailleurs – je tiens à le souligner – été adoptés à l'unanimité : l'un créant le livret épargne-codéveloppement et l'autre permettant, de manière exceptionnelle, l'admission au séjour par le travail. Enfin Sébastien Huyghe et Michèle Tabarot, à partir de leur expérience de membres de la CNIL, ont plaidé avec succès pour la mise en place très encadrée des statistiques de la diversité.
J'en viens, pour conclure, à l'amendement qui a suscité les débats les plus denses : je veux bien sûr parler de la possibilité, dans le cadre du regroupement familial, d'apporter une preuve de filiation au moyen d'un test ADN.
Nous savons tous combien cet amendement, proposé par le rapporteur de l'Assemblée nationale, Thierry Mariani, a suscité de débats. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Chacun dans l'hémicycle – et, bien au-delà, dans les médias – a pu s'exprimer en son âme et conscience autant qu'il le souhaitait. Bien sûr, je le redis, il y a eu des caricatures. Bien sûr, il y a eu des excès.
Bien sûr, il y a eu des faux procès. Bien sûr, la tactique politique s'est parfois confondue avec les désaccords de principe. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Bien sûr, les postures ont parfois révélé des impostures. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce sont là, sans doute, les règles du jeu démocratique. Mais l'important est ailleurs. Entourée des garanties nécessaires au respect de la vie privée, la procédure des tests ADN donnera aux étrangers de bonne foi un droit nouveau (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)…
…qui leur permettra, s'ils le souhaitent, d'apporter un élément de preuve de leur filiation au soutien d'une demande de regroupement filial. Il s'agit de cela et il ne s'agit que de cela.
Faut-il rappeler, une fois encore, les garanties entourant cette nouvelle procédure ? Ce dispositif ne sera pas obligatoire : il sera facultatif et uniquement fondé sur le volontariat.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est faux !
Il ne sera pas général et permanent, mais, comme cela doit être le cas dans une démocratie moderne, expérimental et d'abord mis en oeuvre dans les pays où l'état civil est déficient. Le Parlement en débattra à nouveau dans dix-huit mois, après l'entrée en vigueur du décret d'application, au vu du rapport d'évaluation qui lui sera remis par une commission de sages dont j'ai donné la composition lors de l'examen de ce texte en première lecture. Cette mesure ne constituera pas non plus un obstacle financier puisqu'elle sera gratuite. La procédure ne conduira naturellement à aucun « fichage génétique ». J'ajoute que seul un élément de preuve de la filiation avec la mère pourra être recherché au moyen de ce test et que cette limitation permettra notamment d'éviter la révélation publique d'un viol.
Nous avons surtout souhaité que ce texte soit explicitement autorisé par le juge civil : l'autorité judiciaire décidera d'autoriser ou non l'identification du demandeur de visa par ses empreintes génétiques. Cela signifie très concrètement que la procédure dans son principe est similaire à celle de l'actuel article 16-11 du code civil, issu de la loi de 1994 – ce n'est pas si récent – relative à la bioéthique et qui dispose que l'identification d'une personne par ses empreintes génétiques peut être recherchée en exécution d'une mesure d'instruction ordonnée par le juge saisi d'une action tendant à l'établissement ou à la contestation d'un lien de filiation. En réalité, la seule différence est que, dans le cadre de l'instruction de la demande de regroupement familial, c'est un élément de preuve de la filiation – et non l'établissement de la filiation – qui sera recherché grâce au test ADN.
Ainsi entouré de garanties claires, nettes et lisibles, le dispositif de ces tests pourra être mis en oeuvre par la France à titre expérimental, aux côtés des douze pays européens qui le pratiquent déjà ou sont en passe de le mettre en oeuvre : le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas, l'Autriche, la Finlande, la Lituanie, la Norvège et la Suède. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) Je me suis rendu la semaine dernière au Royaume-Uni, pays de l'habeas corpus, dirigé par un gouvernement travailliste. Lors d'une conférence de presse, et alors que j'indiquais que ce pays avait pratiqué 10 000 tests, le ministre travailliste en charge de cette question m'a repris et a précisé qu'il s'agissait de 12 000 tests et que cela n'avait posé aucun problème ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Le Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés a lui-même relevé, dans une note de mai dernier, que ces tests ADN étaient de plus en plus utilisés comme moyen de prouver les liens de parenté dans le cadre du regroupement familial.
Pour le HCR, la possibilité de recourir à ces tests pour prouver la filiation répond ainsi à une évolution logique. C'est d'ailleurs aussi la position de la Commission européenne qui, le 4 octobre, il y a à peine quelques jours, a publiquement indiqué que ces tests étaient totalement compatibles avec le droit européen.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, en concluant nos débats, je mesure la mission collective qui nous incombe. En décidant aujourd'hui de la politique d'immigration, nous dessinons la France de demain et d'après-demain. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) À la tête de ce ministère, je souhaite, au nom du Gouvernement et conformément aux engagements de Nicolas Sarkozy, contribuer à définir une politique d'immigration qui permette à la fois l'enrichissement et la préservation de notre communauté nationale.
Parce qu'il est ferme et parce qu'il protège, le projet de loi qui vous est soumis va dans le bon sens : celui d'une France vigilante, fière d'elle-même, désireuse de préserver son équilibre, mais ouverte à l'autre, accueillante à celles et à ceux qui veulent la rejoindre pour s'y intégrer ; le sens d'une France diverse, mais unie, d'une France riche de son harmonie ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. Noël Mamère pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés à un vote solennel et empreint d'une certaine gravité. En effet, lorsque les historiens se pencheront sur ce qui s'est passé ce mardi, ils constateront que nous avons écrit une très mauvaise page de l'histoire (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et que nous avons manqué à la vocation de notre pays.
En effet, avant d'être élu Président de la République, M. Sarkozy a été ministre de l'intérieur, il appartenait donc à une majorité qui siège toujours sur les bancs de cette assemblée. À quatre reprises, monsieur le ministre, vous avez transformé les immigrés en boucs émissaires (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et vous êtes en train de rembourser la dette que vous aviez vis-à-vis de l'extrême droite, qui a permis au Président de la République d'être aujourd'hui à l'Élysée ! Il faut savoir dire ces choses ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
À toutes ces lois ignobles, vous avez ajouté une disposition que l'on peut considérer comme scélérate. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Quelles que soient les explications que vous nous avez données et quels que soient les compromis honteux qui ont été passés au Sénat, ces tests ADN introduisent la peste biologique dans la loi. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ils sont contraires à l'avis du comité d'éthique, aux lois sur la bioéthique, aux droits fondamentaux et à la Constitution ! En fait, par cette nouvelle loi, qui sera sans doute votée par votre majorité, vous instituez la xénophobie d'État. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Vous stigmatisez une partie de la population, que vous excluez du contrat social ! (Mêmes mouvements.) Mais il ne faut pas s'y tromper, cette disposition, qui a retenu notre attention et suscité des débats, n'est en fait qu'un leurre pour mieux dissimuler un texte qui vise tout entier à casser purement et simplement la loi autorisant le regroupement familial votée sous le président Giscard d'Estaing.
Vous avez porté un coup d'arrêt au regroupement familial. Vous grignotez le droit d'asile en plaçant l'OFPRA sous la responsabilité du ministère de l'immigration et de l'identité nationale. Vous pratiquez une sorte de dévoiement, qui prouve bien vos intentions : faire de l'étranger l'indésirable (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) et de l'immigré le profiteur qui n'aurait pas sa place et qui n'aurait pas le droit de vivre en famille, selon les principes de la Constitution et de la convention européenne des droits de l'homme. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) En fait, ceux qui vous intéressent sont les immigrés célibataires, qualifiés, qui peuvent finalement servir de bonne main-d'oeuvre, selon les besoins du patronat. Mais vous ne voulez pas et vous n'aimez pas les couleurs de cette nouvelle immigration, qui vient des pays que nous avons colonisés ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je n'oublie pas que cette loi vient après des propos tenus par le Président de la République à Dakar, qui ont couvert de honte notre pays et qui ont provoqué chez les Africains une juste indignation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je n'oublie pas que, sous la précédente législature, certains de vos collègues ont osé introduire un amendement affirmant que la colonisation avait été un bienfait pour la France ! Oui, cette loi que vous nous proposez aujourd'hui est directement inspirée par cet état d'esprit qui fait de l'immigré un bouc émissaire ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous n'aimez pas la France ! Vous détestez votre pays, monsieur Mamère !
Vous nous dites, monsieur le ministre, que vous avez voulu cette loi au nom des valeurs de la République, et c'est au nom de ces valeurs que vous demandez à ceux qui souhaitent le regroupement familial et qui vivent aux confins du continent africain de posséder la langue française. Alors je vous pose une question : si on avait demandé aux parents ou aux grands-parents du Président de la République, de M. Balladur, de Mme Amara ou de Mme Dati de parler le français, croyez-vous qu'ils auraient pu vivre dans ce pays (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)…
…et que leurs enfants et leurs petits-enfants seraient aujourd'hui membres du Gouvernement ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il faut conclure, monsieur Mamère ! Vous avez épuisé votre temps de parole.
Je n'oublie pas que le Président de la République a demandé que soit lue dans les écoles, le 22 octobre, la lettre de Guy Môquet (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), ce résistant communiste qui a résisté aux côtés de la MOI, de Manouchian, qui ont été considérés comme des terroristes immigrés et assassinés en 1944 ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Leur a-t-on demandé de parler le français ? Leur a-t-on demandé leur origine biologique ? Ils sont morts pour la France, parce qu'ils croyaient en elle ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le grand paradoxe du projet de loi sur la maîtrise de l'immigration, c'est que, comme on vient encore de le voir, il a suscité des débats vifs et passionnés, non pas pour lui-même, mais à cause d'un amendement. Certes, ce débat était bien légitime…
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ce n'était même pas un vrai débat !
…puisqu'il renvoie à une question éthique. Il n'a d'ailleurs pas seulement été conduit par la gauche, mais s'est déroulé sur tous les bancs de l'hémicycle. Il concernait les conditions dans lesquelles on peut permettre à une famille, dans le cadre du regroupement, de prouver sa filiation en recourant à un test ADN. Nombre de députés – et pas seulement au groupe Nouveau Centre – considèrent que cet amendement a occulté le débat de fond et a été discuté dans des conditions indignes d'une démocratie moderne et apaisée, qui se doit de réfléchir non seulement à sa politique d'immigration, mais aussi et surtout à sa politique d'intégration, et c'est bien ce qui doit nous rassembler. Quand on a vu certaines images de désespérance, on se dit que le mot « intégration » doit prendre tout son sens dans un débat tel que celui que nous avons aujourd'hui. C'est l'accueil, la dignité des conditions dans lesquelles il a lieu qui sont en jeu.
J'éprouve aujourd'hui un double regret. D'une part, je déplore que la proposition concernant les tests ADN n'ait pas été examinée pour ce qu'elle était, avec les garanties qu'elle comportait – notamment celle, très forte, de recours au juge. D'autre part, je regrette qu'on n'en ait pas profité pour aborder ce débat dans le cadre d'une harmonisation européenne. On a évoqué la situation de divers pays qui ont permis de résoudre des cas humains en recourant à ces tests et on aurait tort – je le dis à la gauche – de balayer d'un revers de main ce qui a pu se faire ailleurs : s'il est un domaine dans lequel nous devons travailler, c'est bien celui de l'harmonisation européenne des conditions d'accueil de ceux qui, pour des raisons qui peuvent tenir à la liberté, ont fait le choix de notre pays et le choix de l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Certains mots ont été prononcés, qui renvoyaient aux périodes les plus troubles de notre histoire. La clarté du débat gagnerait à la justesse du vocabulaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Les références au nazisme sont inadmissibles pour tous ceux qui se sont battus pour la liberté. Prétendre que le recours aux tests s'apparente à ce qui s'est passé dans des périodes lointaines de notre histoire, ce n'est pas servir un débat qui était utile pour l'avenir du pays. (Mêmes mouvements.)
Mais j'ai un autre regret, monsieur le ministre : le groupe Nouveau Centre et plusieurs collègues d'autres groupes auraient souhaité qu'on renvoie cette question au débat sur la bioéthique que nous devons avoir prochainement et à la préparation duquel certains de nos collègues – notamment Jean Leonetti – ont travaillé activement.
Le texte que vous nous avez proposé est utile pour ceux qui vont bénéficier du regroupement familial avec le contrat d'accueil et d'intégration – car c'est bien le mot « intégration » que nous devons retenir. Il est utile pour accompagner les familles dans une installation durable, pour leur permettre de vivre ici dans des conditions de dignité, la dignité dépendant aussi des moyens de subsistance. Il est utile pour favoriser l'insertion dans la société, grâce à la maîtrise de la langue. Tous ces sujets sont très importants pour garantir la réussite du parcours des étrangers. Mais il s'agit surtout – je le dis comme le ressent le groupe Nouveau Centre – d'éviter la désespérance de tant de ceux qui sont venus ici en croyant y trouver un eldorado.
Nous avons noté d'autres avancées : les dispositions concernant le droit des migrants, la garantie d'un recours effectif pour tous ceux qui, dans leur propre pays, souffrent d'entrave à leur liberté, le fait qu'un débat ouvert ait été engagé sur cette question.
Je vous remercie de bien vouloir conclure, monsieur Sauvadet. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
On critique souvent le Gouvernement, mais je dois dire que vous avez manifesté votre volonté, sinon de parvenir à un improbable consensus, du moins de laisser à chacun le soin d'exprimer sa position. Vous avez voulu tourner le dos à une immigration d'exclusion, pour aller vers une immigration d'intégration. Cet effort mérite d'être salué.
Dans la mesure où nous traitons d'un sujet qui touche à l'éthique, chacun aura à se prononcer en conscience. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Pour ma part, à titre personnel et compte tenu de l'encadrement du recours au juge, pour permettre de débloquer des situations dramatiques, je voterai ce texte. Certains de mes collègues du groupe Nouveau Centre feront un choix différent, mais c'est la liberté de la conscience, celle qui doit s'imposer à chacun d'entre nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mes chers collègues, je vais faire annoncer dès à présent le scrutin public sur le vote de l'ensemble du projet de loi. (Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.)
La parole est à M. Éric Ciotti, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat qui se conclut est important, capital, essentiel. Le texte que vous nous avez présenté, monsieur le ministre, est utile, pertinent,…
Une députée du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Dangereux !
…efficace. C'est avec une grande gravité et une grande détermination que, au nom du groupe de l'UMP, je veux vous dire que nous l'approuverons. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il correspond aux engagements de notre candidat pendant la campagne électorale…
…et aux voeux que les Français ont exprimés au printemps dernier, derrière le Président de la République, en faveur d'une politique nouvelle d'immigration choisie.
Cependant, je veux m'adresser à l'opposition et lui dire qu'elle a incontestablement manqué une nouvelle fois une occasion de se projeter vers le futur (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et d'envisager la gravité d'un problème qui doit largement dépasser les clivages. Qui peut nier, aujourd'hui, que l'immigration constitue pour la France, mais aussi pour l'Europe, un problème majeur, un problème présent, mais surtout un problème futur ? Qui peut nier que la pauvreté, qui ne cesse de se développer dans les pays du Sud ou sur le continent asiatique, risque d'entraîner une vague migratoire qu'il faudra naturellement mieux contrôler et mieux maîtriser ? (Mêmes mouvements.) Il faudra le faire conformément à notre tradition d'accueil et de générosité, dans le cadre des valeurs de la République qui nous unissent et nous rassemblent. Cette question doit mériter un consensus, devrait mériter un rapprochement, comme cela a été le cas dans tous les grands pays de l'Union européenne. Vous êtes, une fois de plus, la gauche la plus archaïque d'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Vous vous arc-boutez sur des positions d'arrière-garde, vous instrumentalisez les étrangers, vous développez des thèmes qui sont injurieux à leur égard. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Les propos qu'a tenus tout à l'heure M. Mamère ont été insultants. Nous n'acceptons pas la caricature. Nous n'acceptons pas le mensonge. Nous n'acceptons pas l'outrance. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Monsieur Mamère, nous n'avons pas de leçons de valeurs républicaines à recevoir de vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Dois-je vous rappeler que, si l'extrême droite a prospéré dans notre pays, c'est grâce à vous et sous vos gouvernements ? (« À cause de vous ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Dois-je vous rappeler que, si l'extrême droite a régressé, c'est grâce au discours républicain du Président de la République ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous ne nous laisserons pas caricaturer. Vous auriez fait preuve de mesure en recherchant, comme Mme Pau-Langevin l'a laissé entrevoir ce matin, un dialogue ouvert, un échange respectueux. Il faut que les problèmes d'immigration ne soient plus l'objet de ces médiocres débats politiciens que vous entretenez depuis trop d'années. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
En regrettant ces outrances,…
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Les vôtres !
…en regrettant ces propos, en regrettant ces mots, je veux vous dire que le texte que nous propose Brice Hortefeux est juste et équilibré. Monsieur le ministre, nous vous remercions d'abord de l'écoute, de l'attention et du respect que vous avez réservés au Parlement. C'est suffisamment rare pour être souligné. (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Ce texte est juste et équilibré, parce qu'il repose sur trois piliers. Le premier est l'intégration. Il faut, en effet, favoriser l'intégration des étrangers : ne pas le faire, c'est développer la haine de l'étranger, le racisme, ce contre quoi, plus que d'autres, nous luttons. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. — Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Le deuxième pilier est le co-développement. Vous l'avez oublié, mais la résolution des problèmes d'immigration passera par le soutien au co-développement.
Le dernier pilier est la lutte contre l'immigration clandestine. Il faudrait à cet égard que nous aboutissions à un consensus. Favoriser l'immigration clandestine, comme vous l'avez fait au cours des années où vous étiez au Gouvernement et comme vous l'avez fait dans ces débats, est le plus grand des maux que l'on puisse infliger aux étrangers dans notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Pour toutes ces raisons, parce que ce texte est juste, équilibré, pertinent et efficace, le groupe de l'UMP, unanime, le votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations et huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. Serge Blisko, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre, pour la quatrième fois en quatre ans, vous présentez un texte qui cède à la tentation électoraliste consistant à multiplier les effets d'annonce, comme autant de remerciements à la frange d'extrême droite de votre électorat. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Par ce texte, vous avez décidé de vous attaquer à l'immigration légale, aux personnes qui sont admises par la loi française sur notre territoire. Vous avez décidé de traiter l'immigration familiale comme une immigration malvenue, alors que le droit de vivre en famille est un droit fondamental inscrit dans la Constitution et dans la Convention européenne des droits de l'homme. Le regroupement familial ne concerne pourtant que 23 000 personnes par an et seulement 11 % des titres délivrés. Dans 68 % des cas, il ne concerne qu'une seule personne. Pourquoi tant de craintes ?
Par ce projet de loi, vous avez décidé de faire une sélection économique des migrants. Vous exigez maintenant de ceux qui veulent faire venir leur famille en France qu'ils disposent de ressources supérieures au SMIC, alors même que nombre de familles françaises vivent avec moins d'un SMIC par mois sans que cela vous alarme outre mesure. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Vous avez également décidé de vous attaquer aux enfants (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), de leur faire passer le test du sang. Pour vous, tel enfant sera biologiquement acceptable et tel autre n'aura pas les bons gènes. On conçoit le malaise qui s'est exprimé dans toute la société française et au sein même de votre majorité, car, en France, la filiation n'a jamais relevé du sang, comme le montre la possession d'état. Pensons aussi aux enfants adoptés, légitimés, aux familles recomposées – il en est de célèbres. Toute recherche génétique, utile en matière scientifique, médicale ou pour la résolution d'affaires judiciaires, sera désormais, à cause de votre texte, entachée d'une connotation douteuse et xénophobe. La science ne peut pas être un instrument idéologique au service d'un clan extrémiste de l'UMP. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous avez décidé de vous attaquer aux conjoints de Français. Au moment où le monde s'ouvre, où 1 million de Français vivent hors de notre pays, vous prônez le conservatisme, la peur de l'autre, la méfiance. Ce ne sont pas les valeurs de la France républicaine.
Vous avez décidé d'entretenir la confusion entre asile et immigration. La France a signé la Convention de Genève de 1951 et a toujours été reconnue internationalement comme un pays d'accueil pour les réfugiés politiques. En transférant l'OFPRA, chargé d'attribuer le statut de réfugié, au ministère de l'immigration, vous privez l'OFPRA de sa source première d'information et d'analyse qu'est le ministère des affaires étrangères. L'asile relève du droit international, il ne doit pas servir une politique de restriction des flux migratoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Il y a pis : vous avez décidé de permettre le recueil de statistiques sur les origines ethniques, en introduisant sans concertation, sans débat, ces dispositions dans un texte touchant le code d'entrée et de séjour des étrangers. C'est, pour le moins, malvenu et ambigu.
Vous avez décidé, monsieur le ministre, de privilégier la communication médiatique par rapport au débat de fond. Le recours aux tests ADN en est un exemple. En multipliant les obstacles à l'immigration régulière, vous incitez les migrants à venir en France clandestinement. À l'encontre du but que vous prétendez poursuivre, vous favoriserez les réseaux de passeurs, vous alimenterez le marché noir des travailleurs clandestins. C'est donc un projet de loi dangereux.
Parce que vous portez un mauvais coup au droit de vivre en famille ;
Parce que vous portez un mauvais coup à la science et à notre conception ouverte de la filiation (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) ;
Parce que vous portez un mauvais coup aux principes républicains ;
Parce que vous continuez à porter un mauvais coup à l'image internationale de la France, et en particulier dans les pays africains après le discours douteux de Dakar, nous, députés socialistes, radicaux et citoyens, avons décidé de rejeter ce projet de loi.
Nous voterons contre ce projet indigne et nous saisirons sans attendre le Conseil constitutionnel pour que les articles contraires à notre Constitution soient censurés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 550
Nombre de suffrages exprimés 517 (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Majorité absolue 259
Pour l'adoption 282
Contre 235
L'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, est adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La séance est suspendue.
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à dix-huit heures.)
L'ordre du jour appelle la prestation de serment devant l'Assemblée nationale d'un juge suppléant de la Cour de justice de la République.
Aux termes de l'article 2 de la loi organique sur la Cour de justice de la République, les juges parlementaires « jurent et promettent de bien et fidèlement remplir leurs fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes et de se conduire en tout comme dignes et loyaux magistrats ».
Je vais donc inviter M. Jean-Paul Garraud à bien vouloir se lever et, levant la main droite, à prononcer les mots : « Je le jure ». (M. Jean-Paul Garraud se lève et dit : « Je le jure ».)
Acte est donné par l'Assemblée nationale du serment qui vient d'être prêté devant elle.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, la valeur fondatrice de la sécurité sociale, c'est la solidarité. Et cette solidarité n'est viable que si elle s'accompagne d'une autre valeur essentielle : la responsabilité. L'une et l'autre ne vont pas de soi : elles demandent à être « plébiscitées tous les jours ».
Ces valeurs se perdent quand ceux qui sont en mesure de cotiser en sont dissuadés : c'est le cas pour les seniors qu'on évince du marché du travail.
Elles se perdent quand ceux qui en bénéficient fraudent les règles de la sécurité sociale pour profiter des droits sans s'acquitter de leurs devoirs.
C'est en redonnant toute leur force à ces valeurs de solidarité et de responsabilité que redresserons durablement nos comptes sociaux.
En matière de protection sociale, la réforme absolue, celle qui résout tout, n'existe pas ; il n'y a qu'un processus de réforme, un processus continu et qui doit être entretenu.
Ne jamais s'arrêter, toujours rester dans le mouvement : c'est ainsi que nous garantirons la pérennité d'un des principaux piliers de notre République. On ne change pas la direction d'un navire qui pèse plus de 350 milliards d'euros, plus du cinquième de la richesse nationale, par quelques coups de barre. Il y faut de la volonté ; il y faut aussi et surtout de la constance, et j'y ajouterai un peu de courage.
C'est cette nouvelle direction – vers un rétablissement des comptes, vers une modernisation plus complète de notre système de santé – que prend ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, le premier de la législature, que nous vous présentons avec Roselyne Bachelot, Xavier Bertrand et Valérie Létard.
Mesdames, messieurs les députés, la sécurité sociale est l'affaire de tous ; le redressement de ses comptes implique par conséquent un effort de tous. Le Gouvernement vous propose un projet de loi équilibré : équilibré entre maîtrise des dépenses, d'une part, et apport de recettes nouvelles, d'autre part – 2 milliards d'un côté, 2 milliards de l'autre – ; équilibré parce que nous demandons des efforts à tous et que l'État fait lui-même un effort supplémentaire.
Nous ramènerons le déficit du régime général à moins de 9 milliards d'euros en 2008. Je sais que c'est encore beaucoup trop, mais c'est nettement moins que les 14 milliards que nous aurions eus si nous n'avions rien fait dès le mois de juillet.
En 2008, la branche famille et la branche accidents du travail retrouveront l'équilibre, et le déficit du régime général d'assurance maladie sera ramené à 4,3 milliards d'euros, soit son niveau le plus faible depuis 2002.
Je vous parlais de responsabilité. Être responsable, c'est respecter ses engagements. Aussi ai-je tenu, dès mon arrivée, à rétablir la clarté et la sincérité dans les relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Je l'ai évoqué lors de la présentation du projet de loi de finances, puisque l'un et l'autre sont évidemment liés.
L'État a remboursé sa dette de 5,1 milliards d'euros à l'égard du régime général le 5 octobre dernier, conformément à mes engagements. Les charges financières de l'ACOSS, qui gère la trésorerie, en seront allégées de 55 millions d'euros cette année et de 220 millions d'euros en 2008. La situation du régime général en sera améliorée d'autant.
Encore faut-il, cependant, qu'on ne laisse pas se reconstituer demain la dette qu'on vient d'effacer aujourd'hui. La responsabilité n'a de sens que si elle s'exerce dans la durée. Pour que les mêmes causes ne produisent pas les mêmes effets, nous avons donc remis à niveau les crédits destinés aux dispositifs gérés par la sécurité sociale, mais financés par l'État. Il s'agit, par exemple, de l'aide médicale d'État, de l'allocation parent isolé, de l'allocation pour adulte handicapé ou de certaines exonérations ciblées.
Parce que je veux que cet effort soit respecté, je vais imposer aux gestionnaires des différents programmes que, contrairement au passé, les dotations destinées à ces dispositifs soient effectivement versées, et non pas consacrées à d'autres fins en fonction des aléas de l'exécution budgétaire.
Cette responsabilité, nous nous y conformons aussi en compensant intégralement l'impact des mesures nouvelles relatives aux heures supplémentaires.
Pour calculer cette compensation, il fallait bien se fonder sur un chiffre, et cela a fait débat aussi au moment de l'examen de la première partie du projet de loi de finances. Nous sommes partis de la seule évaluation que l'on connaisse, celle du montant actuel des heures supplémentaires. Toutefois, il va de soi que le coût que nous avons établi – plus de 5 milliards d'euros en année pleine – sera réajusté en fonction de l'évolution de ce montant au cours de l'année 2008.
Et nous allons plus loin en complétant sans attendre le panier de recettes fiscales affectées à la compensation des allégements généraux sur les bas salaires. Nous transférons notamment l'intégralité des droits sur les tabacs et de la taxe sur les salaires, ainsi que la TVA brute sur les alcools. Au total, les recettes fiscales transférées au régime général devraient passer de 21 milliards à près de 27 milliards, soit une augmentation de près de 30 %.
Enfin, puisque je souhaite une clarification globale, je la mettrai en oeuvre au-delà du régime général en engageant une concertation sur un schéma de redressement durable du Fonds de financement des prestations sociales agricoles. Dès cette année, l'État reprendra à sa charge, en loi de finances rectificative, la dette ancienne qu'il avait vis-à-vis du BAPSA, soit 619 millions d'euros. Et je souhaite – je m'en suis entretenu avec une partie de la profession et des acteurs concernés – qu'en 2008 nous préparions un schéma de financement pérenne de la protection sociale des exploitants agricoles.
Cette responsabilité assumée de l'État s'appuie sur une maîtrise renforcée des dépenses publiques, une maîtrise durable grâce à des réformes de structure et à un réexamen des politiques publiques pour en améliorer l'efficience. Nous faisons de même dans le champ de la protection sociale en engageant, dans ce projet de loi, des réformes de fond pour accroître l'efficacité de notre système de santé et mieux maîtriser nos dépenses d'assurance maladie.
Le taux de progression que nous avons fixé pour les dépenses d'assurance maladie est de 2,8 %. C'est un objectif ambitieux mais réaliste.
Il est réaliste parce que, s'il l'on tient compte de l'impact de la franchise, ce taux correspond en fait à une évolution de 3,4 % de l'ONDAM global. C'est un taux suffisant pour répondre aux besoins de notre système de santé et faire un effort notable en faveur des personnes âgées et handicapées.
Il est réaliste aussi parce que nous renforçons les efforts de maîtrise médicalisée et que nous apportons des améliorations structurelles à l'organisation des soins. Je pense notamment au financement intégral des hôpitaux par la tarification à l'activité ou, pour la médecine de ville, aux mesures qui visent à favoriser de nouveaux modes de rémunération. Roselyne Bachelot y reviendra.
Un taux réaliste, c'est un taux qui doit être impérativement respecté. Les efforts que nous demandons pour tenir cet objectif sont équitablement partagés. Tout le monde est impliqué :
L'État ;
Les patients ;
Les professionnels de santé ;
Les entreprises : elles ne bénéficieront plus d'exonérations de cotisations employeur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, car ces cotisations sont faites pour inciter à la prévention ;
L'industrie des produits de santé, enfin, sera impliquée via une augmentation du taux de la contribution sur le chiffre d'affaires, car nous devons tenir compte de l'accroissement sensible des dépenses de médicaments.
Au total, si l'on tient compte du prélèvement à la source sur les dividendes instauré par le projet de loi de finances, les recettes supplémentaires s'élèveront à 2 milliards d'euros pour la sécurité sociale, dont près de 1,6 milliard pour le régime général.
Mesdames, messieurs les députés, je vous parlais de solidarité. Ce qui fonde la solidarité entre les générations, c'est notre système de répartition. Nous devons impérativement rétablir l'équilibre et la cohérence de ce système.
Il ne peut pas y avoir de plus en plus de pensionnés s'il y a, dans le même temps, de moins en moins de cotisants. Il serait paradoxal et tragique que la sécurité sociale s'affaisse en raison même de ses succès, et je pense bien sûr au succès de la longévité croissante dont bénéficient les Français.
Chacun sait que la clef du redressement des comptes sociaux réside dans le prolongement de l'activité des seniors. Ce projet de loi vous propose donc de dissuader les entreprises de faire partir en pré-retraite ou en retraite les seniors. Xavier Bertrand reviendra sur ces mesures. Nous en attendons 350 millions d'euros de recettes supplémentaires pour la sécurité sociale.
La solidarité a besoin non seulement de la contribution de toutes les personnes d'âge actif, mais aussi de tous les revenus perçus. Nous sommes par conséquent favorables à l'instauration d'une cotisation employeur sur les stocks options et sur les actions attribuées gratuitement. Cette cotisation serait affectée à l'assurance maladie. Nous en discuterons dans le cadre de ce projet de loi.
Enfin, mesdames, messieurs les députés, si les charges qui fondent la solidarité doivent être correctement réparties, elles doivent aussi être impérativement respectées. La fraude mine l'esprit de responsabilité et le sens de la solidarité. On ne peut pas demander aux Français davantage de solidarité si on ne s'attaque pas plus efficacement à ceux qui en abusent.
Avec ce PLFSS, nous entamons la mise en place d'un plan ambitieux, sans précédent, de lutte contre la fraude fiscale et sociale. Ce plan comporte trois grands axes d'action.
Premier axe : nous nous donnons les moyens de mieux contrôler en développant les échanges d'informations entre les services. Je vais en effet profiter du périmètre du ministère des comptes publics pour améliorer la qualité des collaborations entre les services fiscaux et les organismes de sécurité sociale, dans le respect des règles établies par la CNIL, bien évidemment.
Deuxième axe : nous renforçons les pouvoirs de contrôle des organismes sociaux. Leurs agents seront habilités à recueillir des informations auprès de tiers tels que les banques, les fournisseurs d'énergie ou de téléphonie. Ils pourront ainsi mieux contrôler la sincérité des déclarations des assurés et mieux lutter contre la fraude aux cotisations et aux prestations.
Troisième axe : nous aggravons les sanctions. Des peines plancher sont instaurées pour le travail dissimulé : les URSSAF pourront procéder à un redressement forfaitaire correspondant à six mois de salaire minimum. Nous parons ainsi à l'argument de l'employeur pris en flagrant délit qui prétend que le salarié non déclaré a été embauché le matin même, voire l'après-midi si le contrôle a lieu le soir.
Ce plan n'est qu'un début. J'aurai l'occasion de revenir devant vous pour vous présenter d'autres mesures et vous rendre compte des progrès accomplis.
Le redressement définitif de nos comptes sociaux exigera d'aller plus loin, de poursuivre sans relâche les réformes engagées. Les projections pluriannuelles des comptes de la sécurité sociale qui sont données, à titre illustratif, en annexe à ce projet de loi montrent bien la nécessité de poursuivre nos efforts. C'est ce que nous allons faire en engageant trois grandes concertations : sur le financement de la protection sociale, sur le financement de la santé, et sur les retraites.
Ces efforts ne seront possibles et efficaces que s'ils sont compris. C'est pourquoi nous devons sans cesse rappeler à nos concitoyens le sens profond de la sécurité sociale, l'engagement mutuel qu'elle présuppose, la responsabilité sans faille qu'elle exige, l'adaptation permanente qu'elle nécessite. C'est ainsi que nous continuerons à faire vivre la solidarité qui nous unit. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le projet de loi de financement de la sécurité sociale que je vous présente aujourd'hui pour la partie relative à l'assurance maladie est un projet de loi de fondation. Les mesures qu'il comprend procèdent d'un impératif : garantir pour l'avenir, pour nous-mêmes, pour nos enfants, la possibilité effective de bénéficier de soins de qualité. Cet impératif s'impose à tous avec l'évidence d'un axiome. Nous devons agir aujourd'hui de telle sorte que, demain, nous ayons les moyens de satisfaire les besoins de santé d'une population dont l'espérance de vie s'accroît.
Donnons-nous les moyens de faire oeuvre utile en répondant aux attentes légitimes de nos concitoyens. Notre système de santé se situe à la croisée des chemins. L'heure est venue de faire un premier pas dans la bonne direction, pour négocier le virage que les Français attendent. Pour parvenir à cette fin, il n'y a qu'une méthode : une réforme responsable, équilibrée, pragmatique et ambitieuse. Notre système de santé est notre patrimoine commun. Quelle sorte de patrimoine peut prétendre traverser le temps sans que soit assurée de manière responsable la solidité de ses fondements, sans que ses soubassements soient examinés avec régularité et attention ?
Pour nos concitoyens, notre système de santé est cette maison commune aux assises solidaires, dont chacun veut, dans l'intérêt de tous, garantir la pérennité. Vous le savez. Vous pouvez en juger vous-mêmes quand vous allez à la rencontre de nos concitoyens. Les Français attendent que nous apportions sans délai des réponses concrètes à leurs préoccupations, qu'il s'agisse de la maladie d'Alzheimer, du développement des soins palliatifs ou de la présence des médecins sur le territoire. Ils comptent sur nous pour agir, et sur vous, sur la représentation nationale, pour engager un travail de réflexion approfondie.
Saisissons tous ensemble l'occasion d'ouvrir un débat responsable et délesté de toute polémique, dans l'intérêt du pays. Les Français sont républicains dans l'âme. Ils sont fiers de leurs institutions quand elles leur assurent les conditions d'une solidarité effective. Ils savent que cette solidarité n'est pas qu'une pure clause de style. Ils ont parfaitement compris qu'elle n'est pas de toute éternité établie par la seule grâce de l'incantation. Ils savent qu'il faut se battre pour la préserver, lui donner du corps et la faire vivre. Ce combat est le nôtre. Nous le conduirons sans fléchir, sans nous laisser distraire de notre devoir.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est la première étape d'un chantier au long cours. Parce que nous regardons loin devant nous, nous voulons renforcer dans ses fondements mêmes notre édifice de santé publique. Si notre politique est tout entière animée par une véritable ambition prospective, c'est que nous sentons bien qu'il faut dorénavant, en vertu du principe de solidarité entre les générations, consolider les arches qui soutiennent notre édifice de soins et sans doute repenser leur configuration.
Ce PLFSS a été conçu pour épouser, dans sa construction, la structuration en quatre grandes arches qui soutient cet édifice.
La première arche, la première assise, ce sont les recettes, dont il nous faut clairement définir l'origine. Il nous revient à cet égard de nous interroger, dans un constant esprit de justice, sur la diversification possible des sources de financement.
La deuxième arche, le deuxième support déterminant la solidité et l'équilibre de la construction est formé par les dépenses. Il nous faut veiller à leur maîtrise et à leur bonne répartition. Il est temps, en effet, de nous interroger sans tabou sur la structuration optimale des dépenses socialisées.
La troisième arche est constituée par l'efficience de notre système de soins, dont l'amélioration est de nature à garantir sa vitalité au long cours. Là encore, nous devrons être inventifs et audacieux, pour faire en sorte que la logique d'efficience ne se réduise pas à une logique strictement comptable.
La quatrième arche, essentielle, qui devrait constituer l'axe majeur d'une politique de longue haleine, est la prévention. En la matière, la question qui se pose à nous est la suivante : comment élaborer une politique de prévention innovante, qui offre à chaque citoyen les moyens d'opérer des choix réfléchis et éclairés ?
Les recettes constituent donc la première arche de notre édifice de soins. La santé publique a un coût, que nous avons choisi d'assumer collectivement. Nul ne peut ignorer qu'il nous faudra trouver de nouvelles recettes pour être en mesure de répondre aux besoins d'une population dont l'espérance de vie s'accroît. Qui oserait soutenir que la dette constitue un moyen de financement approprié et honnête au regard de nos devoirs envers les générations futures ?
Pour prendre en charge nos nouveaux besoins de santé – Alzheimer, soins palliatifs – tout en respectant l'exigence de solidarité entre les générations, nous ne pouvons nous permettre de grever les comptes de l'assurance maladie et de faire payer ainsi à nos descendants le prix de nos inconséquences.
La seule façon de préserver l'avenir de l'assurance maladie et de mieux satisfaire l'irréfragable obligation de solidarité entre nous est d'assumer pleinement l'impératif d'un financement responsable. Laisser courir des dépassements toujours plus importants que ceux anticipés, ce serait bientôt éroder jusqu'à l'asphyxie nos marges de manoeuvre et mettre ainsi tout l'édifice en péril.
Parce que nous voulons infléchir le cours de choses, nous faisons le choix de regarder la réalité en face. Nous devons pouvoir parler à nos concitoyens en étant capables de les regarder droit dans les yeux. Posons-nous et posons-leur très simplement la question : la santé est-elle un bien parmi d'autres ou est-ce notre bien le plus précieux ? Quelle part de notre budget consentons-nous à y consacrer ? Après quoi, il restera à savoir qui doit payer et à quelle hauteur.
Pour en venir à la question des franchises médicales, je sais ce que quatre euros par mois peuvent représenter pour certains de nos concitoyens. Je n'ignore pas que cette somme constitue parfois un prélèvement significatif.
Ce n'est pas de cette manière que le problème se pose : on n'est pas un peu malade chaque mois !
Cependant, il est important de pouvoir, par cet acte contributif, participer au financement du plan Alzheimer, maladie qui touche d'ores et déjà l'entourage d'un Français sur quatre, des soins palliatifs et de la lutte contre le cancer. Tel est l'enjeu de ces franchises qui nous permettront de nous préparer collectivement à affronter l'avenir et à assurer les investissements importants qu'impliquent le vieillissement de la population et l'apparition de nouvelles maladies. Les enfants ainsi que les femmes enceintes en seront bien sûr exonérés, car nous voulons protéger les familles.
Et les accidentés du travail ou ceux qui souffrent de maladies professionnelles ?
L'exonération touchera quinze millions de nos concitoyens. Quant au montant de la contribution, il sera plafonné à cinquante euros par an pour protéger les plus malades. À cet égard, il convient de souligner que la contribution forfaire sera moins lourde dans notre pays que dans bien d'autres.
Mais celle-ci ne constitue pas, à beaucoup près, le tout de notre politique, tant elle reste modeste au regard des besoins de financement. Elle rapportera 850 millions d'euros, qui permettront de financer des besoins nouveaux et urgents sans creuser la dette ni recourir à un prélèvement obligatoire, tandis que le déficit de l'assurance maladie s'établit à 6,4 milliards d'euros. Notre réflexion sur le financement va donc bien au-delà. Sans doute faudra-t-il en effet songer à opérer un rééquilibrage entre la contribution salariale et celle des autres revenus, notamment financiers.
J'observe à cet égard que le Parlement, jouant pleinement son rôle de force de proposition, s'est d'ores et déjà saisi du sujet. En ouvrant le débat sur la taxation des stock-options, vous engagez une réflexion utile. Il nous revient en effet de découvrir des solutions innovantes, si nous voulons bénéficier de nouvelles recettes et déterminer celles qui seront les plus favorables à une croissance durable. Pourquoi ne pas imaginer par exemple d'exercer un droit de tirage sur la fiscalité écologique ? Ce serait logique, compte tenu de l'impact de la dégradation de l'environnement sur notre santé. Ce n'est pas nécessairement le débat de cette année, mais cette piste ne peut pas être écartée d'emblée.
Cependant, l'équilibre et la solidarité de notre maison commune dépendent aussi très largement de la structuration de nos dépenses. Tel est en effet la deuxième grande arche qui soutient l'édifice des soins. Là encore, certains chantiers doivent être poursuivis, certaines mesures renforcées et d'autres dispositifs inventés.
La question majeure qu'il convient de poser au préalable est de savoir si les dépenses socialisées sont justement réparties et versées comme il le faudrait. Ainsi, la restructuration de nos dépenses est une nécessité à laquelle nul ne saurait se soustraire. Cette restructuration obéit en effet à une seule logique, qui n'est pas strictement comptable mais relève d'une logique de la responsabilité.
En ce sens, il est urgent de rendre dès maintenant beaucoup plus efficace la démarche de maîtrise médicalisée, en concertation avec tous les acteurs de santé, comme le Président de la République m'a expressément demandé de le faire. En contrepartie des revalorisations à venir et de l'amélioration des conditions d'exercice des professionnels de santé, je souhaite que la prescription soit plus efficace et que le parcours de soins gagne en cohérence.
Comment faire pour s'en assurer ? Quelle est la bonne méthode ? Nous proposons tout d'abord qu'une période d'observation soit instaurée avant que n'entrent en vigueur les revalorisations que pourront négocier les partenaires conventionnels. L'État a toujours tenu ses engagements. Ce délai d'observation devra être mis à profit pour que toutes les parties prenantes tiennent les leurs. Le délai de carence assure que les objectifs sont bien en cours de réalisation et leur donne toute leur crédibilité.
Ainsi, lorsque les résultats ne seront pas au rendez-vous, lorsque l'alerte sur les comptes sera déclenchée, chacun devra en revenir à ses responsabilités et retarder les revalorisations. L'importance des enjeux de santé publique exige l'implication responsable de tous, ainsi qu'une réflexion adulte sur la soutenabilité dans le temps des décisions qui sont prises, sans remettre en cause la richesse ni la profondeur du dialogue conventionnel auquel nous sommes profondément attachés.
Le volet santé de ce PLFSS n'a de sens que par les objectifs sanitaires que nous nous sommes assignés. Si la ministre de la qualité des soins que je veux être souhaite optimiser la répartition de nos dépenses, c'est bien pour renforcer in fine l'efficience du système. La solidité de chacune des arches qui soutient notre édifice de santé détermine en effet celle de toutes les autres et permet d'assurer leur équilibre global.
Les mesures incluses dans ce PLFSS participent d'une seule et même volonté : nous donner les moyens de mieux soigner, mieux gérer pour pouvoir soigner mieux, soigner mieux pour éviter les incohérences inutilement coûteuses et préjudiciables au patient. Ministre de la santé, je n'agis pas sur deux fronts séparés. Seule une bonne gestion rend possible ce qui est souhaitable et, réciproquement, l'amélioration qualitative du soin participe d'une bonne gestion. Tel est le cercle vertueux qu'il nous revient de promouvoir.
Tel est le sens de cette mesure forte qui consiste à porter à 100 % la tarification à l'activité. C'est en effet pour donner aux établissements de santé les moyens de leur réorganisation que je propose de porter cette part à 100 % en 2008, contre 50 % cette année.
Dans le même temps, nous veillerons bien entendu à accompagner les établissements. À cet effet, il est prévu que cette montée en charge s'accompagne d'un dispositif de stabilisation permettant d'accompagner les mutations nécessaires.
Cette restructuration n'obéit qu'à un seul objectif : satisfaire les exigences conjointes de qualité, de sécurité et d'efficience.
Dans le même esprit, j'ai souhaité que la Haute autorité de santé puisse réfléchir aux parcours de soins les mieux adaptés à chaque pathologie. La réflexion sur les pathologies chroniques est, en tout état de cause, clairement relancée dans le cadre du débat engagé sur le bouclier sanitaire. S'il ne fait aucun doute que chacun doit payer selon ses moyens, reste à trancher la question de savoir s'il convient de repenser la structuration des dépenses socialisées jusqu'au point où chacun reçoive également selon ses moyens et non plus simplement selon ses besoins. Tel est l'enjeu réel d'un bouclier sanitaire plafonné en fonction des revenus. Voilà qui mérite discussion. Nous devrons ouvrir ce débat sans tabou, animés par le seul souci d'éclairer la voie qu'il convient d'emprunter pour favoriser les réformes utiles au pays.
L'efficience de notre système de soins constitue la troisième arche de notre édifice de santé, celle qui permet d'en garantir l'équilibre et la solidité au long cours. Les progrès de l'efficience auront sans conteste les effets les plus sensibles, les plus directement perceptibles par les usagers.
Qu'attendent nos concitoyens ? Quels seront pour eux les gains réels de la rénovation de notre système de soins ? Une répartition plus harmonieuse de l'offre de soins sur tout le territoire. Une permanence des soins mieux assurée. Des urgences moins saturées par endroits. À l'hôpital, des plateaux techniques plus performants et mieux sécurisés. Dans les villes et dans les campagnes, des médecins de proximité, des pharmacies. Mais aussi une meilleure coordination entre la ville, l'hôpital et le médico-social. Les Français n'ont pas besoin qu'on leur dise ce qu'il faut faire ; ils le savent. Peut-être le terme d'efficience n'appartient-il pas nécessairement à leur vocabulaire, mais ils saisissent tous parfaitement les effets de ses lacunes au quotidien. S'il est toujours possible de réduire le déficit des comptes à une sorte d'abstraction pour s'autoriser à ne rien faire, la dégradation qualitative du système est plus immédiatement intolérable et éthiquement insoutenable.
Ainsi, ne nous y trompons pas, l'amélioration de l'efficience n'est pas une lubie technocratique ou une pure clause de style. Elle constitue la plus pressante de nos obligations. Notre responsabilité est d'agir sans tarder. Nous n'avons pas été élus pour rester inertes et assister au délabrement de notre patrimoine commun. Nous devons entendre les plaintes de nos concitoyens et découvrir maintenant les bons remèdes.
Cependant, nous n'améliorerons pas l'efficience du système sans lui donner les moyens de se réformer. En ce sens, le volet santé du PLFSS se veut pragmatique et modernisateur en son principe.
J'ai souhaité à cet égard, avec Éric Woerth, que l'objectif national de dépense d'assurance maladie ne soit ni démesuré ni sous-estimé. J'ai voulu un ONDAM équilibré. Pour la médecine de ville comme pour l'hôpital, il s'élève à 3,2 % – soit pour la ville 2 % auxquels s'ajoute l'effet des franchises. J'ai voulu un ONDAM réaliste qui permette d'accompagner la réforme de l'hôpital et tienne compte de la progression tendancielle des soins de villes. Il n'est pas pour autant démesuré : les marges de manoeuvre d'importantes économies – près de deux milliards d'euros – car, sans celles-ci, les dépenses progresseraient de 4,2 %. Là encore, l'effort demandé sera bien réparti entre ville et hôpital, et tiendra compte des tendanciels de la dépense.
Il convient avant tout de ne pas placer le système sous le joug de contraintes impossibles, de lui donner davantage de latitude pour se réorganiser et se moderniser quand il le faut. L'hôpital attend quelques restructurations utiles, à la fois vertueuses en termes d'efficience et bénéfiques aux patients, qui pourront profiter de soins de meilleure qualité.
Cependant, l'amélioration de cette efficience ne se décrète pas. Elle suppose au contraire la participation active des personnels et des soignants. Si nous voulons que la logique d'efficience l'emporte sur la froide et stérile mécanique comptable, ne faut-il pas impliquer davantage ceux qui, au jour le jour, font vivre le système ?
Nous savons pertinemment que si nous voulons mieux faire, dans l'intérêt du patient, nous devons mieux gérer les moyens mis au service de cet objectif.
Mais mieux soigner, c'est aussi éviter les redites inutiles, les parcours redondants, les incohérences coûteuses et préjudiciables. J'ai clairement conscience que toutes nos exigences se rejoignent et que, pour les satisfaire, nous devons compter sur l'engagement responsable des professionnels de santé, qui doivent recevoir les marques de notre considération si nous voulons gagner le combat de l'efficience.
Si l'intérêt du patient doit toujours primer, il est, dans les faits, toujours inséparable de celui du personnel soignant. Ainsi, pour ne prendre qu'un exemple, la mutualisation des moyens nécessaires pour garantir sur tout le territoire la permanence des soins hospitaliers est favorable et bénéfique à tous au quotidien.
La dispersion des moyens est non seulement inefficace pour le patient mais aussi préjudiciable pour le personnel hospitalier. Elle engendre des astreintes éprouvantes pour les praticiens et les personnels paramédicaux. C'est pourquoi il est urgent de réfléchir à la mise en place d'un dispositif de mutualisation des gardes entre tous les établissements de santé.
Comment piloter cette réorganisation tant attendue ? La création des agences régionales de santé, les ARS, devra constituer un des moyens de répondre plus efficacement à ces besoins. Nous voulons instituer une structure transversale ayant suffisamment d'autorité pour que soient mis en application de nouveaux outils visant, dans un même mouvement, à mieux satisfaire les besoins de santé des patients et à mieux gérer l'efficience du système, tant hospitalier qu'ambulatoire. Ainsi, les premiers éléments d'arbitrage du périmètre des futures ARS seront connus à la fin de cette année, de manière à favoriser leur mise en place dès 2009.
Cependant, aucune réforme, aussi pressante soit-elle, ne saurait prendre forme et s'incarner dans les faits, sans le concours actif de personnels solidaires et motivés. À cet égard, je crois qu'il est grand temps de rendre plus attractifs les métiers de l'hôpital, de soutenir les vocations et d'encourager les efforts de tous ceux qui contribuent à assurer un service hospitalier de qualité.
Dans le même esprit, il conviendra de dégager les moyens pour inciter les jeunes médecins libéraux à exercer leurs fonctions là où une patientèle les attend. Est-ce trop demander que de vouloir rendre plus attractive l'installation en Mayenne ou dans tel ou tel département limitrophe de Paris ? En effet, les zones de sous-densité ne se situent pas seulement en milieu rural, elles apparaissent désormais aussi en milieu urbain. C'est une crise sanitaire qui se profile si nous ne faisons rien.
Doit-on se résigner à l'avancée inexorable d'un désert médical dans notre pays ? Sur cette question, l'heure n'est plus à l'évaluation. De vous tous, mes chers collègues parlementaires, de mes contacts directs avec nos concitoyens, me remonte cette lancinante question : « Aurai-je demain un médecin près de chez moi pour me soigner ? » Tout le monde le sait depuis longtemps : si rien n'est fait pour rééquilibrer la répartition géographique des médecins, la situation sera rapidement irréversible dans de nombreuses régions.
Est-il concevable qu'il faille parfois attendre un an pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste quand on habite certains départements du nord-est ? Comment est-il possible qu'il y ait dix fois plus de cardiologues en Loire-Atlantique qu'en Mayenne ? Comment accepter que près de quatre millions de nos concitoyens disent éprouver des difficultés pour accéder à un généraliste ?
Comment ne pas réagir quand on constate que, dans le quatrième arrondissement de la ville de Paris, la densité de médecins est deux fois et demie supérieure à la moyenne de l'Île-de-France. En effet, pour cet arrondissement de 30 000 habitants, on compte quarante-six médecins généralistes et cent seize médecins spécialistes. À titre de comparaison, la ville de La Courneuve ne dénombre que vingt-deux généralistes et six spécialistes pour 37 000 habitants.
Face à cette situation, il nous paraît raisonnable de proposer un ensemble de mesures appelant à de nouvelles négociations conventionnelles. Ces mesures ouvrent de nouvelles perspectives avec de nouveaux modes de rémunération, un exercice assoupli et de nouvelles organisations. Aucune mesure coercitive ne sera prise et la liberté d'installation sera garantie. Donnons-nous simplement les moyens d'éviter que la concentration des médecins excède par endroits les besoins de la population tandis qu'ailleurs ces besoins ne se trouvent pas satisfaits. Nous ne pouvons pas nous résoudre à considérer comme une fatalité le creusement de ces inégalités territoriales. Nous ne pouvons pas rester sourds aux aspirations légitimes des médecins, en particulier des jeunes, qui espèrent une amélioration substantielle de leurs conditions de vie et de leurs conditions de travail.
Sur ce sujet, le Gouvernement n'est pas fermé à la discussion. Nous acceptons même l'idée de laisser une marge pour amender notre texte. Mais là encore, parce qu'il y va de l'avenir de notre maison commune, nous avancerons d'une manière constructive et déterminée.
Enfin, comment assurer la pérennité d'un système de soins de qualité sans élaborer une politique de prévention cohérente et globale ? La prévention constitue en effet la quatrième arche de notre édifice de santé.
Il est temps d'élaborer une politique de prévention innovante et ambitieuse qui offre à chaque citoyen les moyens d'opérer des choix réfléchis et autonomes en matière de santé.
Mais vos prédécesseurs, qu'ont-ils fait depuis six ans ? Et vous, monsieur Bertrand, vous n'avez donc rien à votre actif ?
Heureusement que je ne vous ai pas attendu !
Écoutez la ministre, monsieur Bertrand, on vous fait un véritable procès en sorcellerie !
En tout cas ce ne sont pas vos propositions au Sénat qui m'ont marqué.
La réflexion engagée sur les programmes patients, conçus pour permettre l'accompagnement de ceux qui sont atteints de maladies chroniques, ouvre des perspectives particulièrement intéressantes. Le Parlement, jouant, son rôle de force de proposition, devrait ainsi veiller à ce que ces programmes puissent voir le jour dans un cadre éthique rénové et solide.
Pour mener une politique de prévention adaptée aux évolutions du monde contemporain, il convient sans doute de repenser la manière même dont nous nous adressons aux individus qui attendent d'être considérés comme des arbitres autonomes de leur propre santé. Les attentes des patients ont évolué. Ils sont de mieux en mieux informés, et sont parfois même désireux de pouvoir prendre en charge leur inconfort passager sans avoir à consulter un médecin. Sans doute, le fait que des professionnels de santé aguerris, rigoureusement formés, assurent la délivrance du médicament dans le cadre d'une offre de proximité sécurisante, contribue-t-il à garantir en aval la qualité des soins prescrits. À cet égard, l'optimisation du maillage des officines sur tout le territoire doit être assurée. Dans ce contexte, je serai favorable à la mise à disposition de médicaments dits d'automédication devant le comptoir, en valorisant, bien entendu, le conseil pharmaceutique associé.
Décider de sa santé, c'est opérer des choix de vie. Pour être en mesure de le faire, encore faut-il disposer des moyens nécessaires en termes de connaissance et d'information.
La politique de prévention est un combat pour la vie mais aussi pour la liberté. Mais ne s'agit-il pas d'un seul et même combat ? Pour la vie, il implique parfois de défier le préjugé, de faire entendre avec clarté et vigueur les voies de la raison, tant les forces de l'habitude résistent au changement. Pour la liberté, en tant que ministre en charge de la santé et militant pour l'émancipation des femmes, je poursuivrai ce combat et conduirai une politique de santé des femmes qui permette à chacune de s'émanciper des contraintes qui peuvent porter préjudice à sa santé ou encore obérer ses chances de guérison. À cet égard, je me suis exprimée assez largement, en septembre dernier, pour que soit améliorée la santé des femmes, et notamment de celles qui vivent dans les situations les plus précaires, ou de celles qui sont les plus vulnérables.
Dans cet esprit, le PLFSS pour 2008 accordera aux centres de planification familiale la possibilité de pratiquer des IVG par voie médicamenteuse afin de réduire le recours aux IVG chirurgicales, anormalement élevé en France.
Les médecins, dont les contrats individuels pourront dorénavant inclure des activités préventives, ont un rôle déterminant à jouer en cette matière.
Je veillerai également, bien entendu, en étroite concertation avec mes collègues, à ce que les médecins du travail, mais aussi et surtout les médecins scolaires, puissent être à l'avenir considérés comme les nouveaux hussards blancs de cette politique de prévention ambitieuse que j'appelle de mes voeux. (Exclamations sur divers bancs.)
Mesdames, messieurs les députés, certains effets des décisions que nous prenons aujourd'hui se feront sentir bientôt ; d'autres, vous le savez, seront perçus à plus long terme.
Ainsi, nous devrions travailler ici comme si nous étions placés sous le regard de nos enfants.
Ainsi, nous pouvons nous épargner le luxe de vaines querelles. Je vous convie à engager ce débat digne et responsable que les Français attendent depuis trop longtemps.
Avançons sans préjugés. Laissons-nous surprendre, si c'est possible, en découvrant des points d'accord inédits.
J'envie ceux qui sont entrés ici bardés de certitudes. Qu'ils nous fassent donc la grâce de nous révéler leurs vérités toutes faites, s'ils pensent que le temps du débat, de la concertation, de la réflexion, est du temps perdu. Évitons de nous réfugier derrière de faux débats et ayons le courage de réinventer ensemble le pacte de 1945.
Je vous invite à saisir l'occasion de ce débat pour faire en sorte de consolider dans ses fondements, et pour longtemps, conformément aux grands principes de solidarité et de responsabilité qui sont les nôtres, l'édifice de soins qui nous a été légué en partage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)
(Mme Catherine Génisson remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la présidence.)
La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.
Vous auriez donc souhaité que je conserve plus longtemps le portefeuille de la santé, merci messieurs. (Sourires)
Je ne regrette pas d'avoir quitté mes fonctions au début de l'année 2007 étant donné celles que j'ai occupées ensuite au service d'un candidat à la présidence de la République.
Ce PLFSS traduit les axes de réforme voulus par le président de la République, s'agissant des retraites, de la famille, des accidents du travail, des maladies professionnelles, mais aussi de la politique en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées.
Pour la branche vieillesse, nous savons que le rendez-vous de 2008 aura pour objet de conforter notre système de retraite par répartition. En attendant, disons clairement que la dégradation de cette branche est un sujet de préoccupation pour le Gouvernement et pour tous. On ne peut se contenter de se réfugier derrière les explications démographiques, et je pense notamment au papy boom : il faut agir dès maintenant et de façon équilibrée. C'est une question de responsabilité et de respect notamment envers nos enfants. Nous avons même, à leur égard, une obligation de résultat pour préserver le pacte de solidarité entre les générations.
Mais il n'est pas question d'attendre 2008 sans rien faire. Le présent PLFSS doit marquer une première rupture pour modifier réellement les comportements et agir pour l'emploi des seniors, en faveur duquel nous présentons donc plusieurs mesures. Mesdames, messieurs les députés, vous connaissez tous et toutes les chiffres. Dans notre pays, le taux d'emploi des personnes âgées de plus de 55 ans s'élève à 37, 6 % en 2006. Ce chiffre, très inférieur au 45,3 % que connaît en moyenne l'Europe des quinze, reste éloigné de l'objectif de 50 % fixé pour l'horizon 2010 par la stratégie de Lisbonne et très en dessous des 70 % relevés en Suède.
Cette véritable exception française, dont nous nous passerions bien, est surtout le résultat d'un raisonnement faux, celui du partage du travail, selon lequel en maintenant un salarié de 55 ans dans l'emploi, on diminuerait les perspectives d'un jeune. La France détient ainsi ce triste double record d'Europe : le taux d'emploi des seniors le plus faible et le taux de chômage des jeunes le plus élevé.
Conformément aux engagements du Président de la République, le Gouvernement entend supprimer les verrous fiscaux, sociaux et réglementaires qui pénalisent celles et ceux qui voudraient continuer à travailler et qui incitent les entreprises publiques et privées ainsi que les administrations à négliger les seniors dans leur gestion des ressources humaines – si tant est que l'on puisse parler de gestion des ressources humaines à propos des seniors dans les entreprises françaises.
Il faut dépasser les discours et les bonnes intentions pour faire en sorte que les comportements changent vraiment. S'agissant des préretraites, nous ne pouvons plus accepter qu'elles bénéficient d'un assujettissement aux cotisations et à la contribution sociale généralisée plus favorable que les salaires, car il s'agit d'un encouragement de fait à la mise en préretraite. Il vous est donc proposé de porter de 24,15 % à 50 % le taux de la contribution sur les préretraites d'entreprise créée par la loi de 2003. En outre, les allocations de préretraite seront désormais assujetties à la CSG au taux de 7,5 %, tout comme les revenus d'activité. Ces nouvelles dispositions s'appliqueront uniquement aux départs en préretraite intervenant après le 11 octobre 2007, date de la présentation du PLFSS en conseil des ministres.
S'agissant des mises à la retraite d'office, je ne compte pas attendre l'extinction, le 31 décembre 2009, des accords de branche qui les maintiennent à titre dérogatoire pour dissuader très fortement d'avoir recours à cette pratique. Le PLFSS prévoit ainsi de soumettre les indemnités versées dans ce cadre, qui sont aujourd'hui largement exonérées, à une contribution de 25 % en 2008, puis de 50 % en 2009, dont le produit sera affecté à la CNAV. Pour faire suite à la recommandation émise par le COR dans son rapport de janvier 2007, il convient également de revenir sur une disposition, adoptée par amendement dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale, qui prévoyait, dans certaines branches professionnelles, un dispositif incitant à des départs à la retraite plus précoces jusqu'en 2014. Le Gouvernement propose d'aligner le régime fiscal et social de cette indemnité sur celui des indemnités de départ volontaire à la retraite. J'ai bien noté que la commission souhaitait mettre fin à ce dispositif.
J'ai étudié avec Christine Lagarde d'autres mesures que nous présenterons très prochainement. L'objectif est d'aller plus loin et de faire mieux que le « plan seniors » de 2006, non seulement en pénalisant les entreprises qui ne jouent pas le jeu avec les salariés âgés, mais aussi en encourageant celles qui recrutent des seniors ou qui les gardent dans l'emploi. C'est, je le répète, un enjeu majeur, qui est au centre de la réforme des retraites.
Lors de mon audition par votre commission, M. Jacquat m'a interrogé sur la revalorisation des pensions de retraite au 1er janvier 2008, fixée dans le texte à hauteur de 1,1 %. Je sais que la loi du 21 août 2003 permet de garantir le pouvoir d'achat des retraités en prévoyant une indexation des pensions de retraite sur les prix. Si le chiffre qui est fixé aujourd'hui est inférieur à la hausse des prix prévue en 2008, c'est parce qu'en 2007 l'augmentation des pensions a été supérieure à l'inflation. Mais une commission de revalorisation des pensions – qui se réunira fin novembre ou début décembre, dès que les partenaires sociaux auront désigné l'ensemble de leurs représentants – se prononcera sur le point de savoir si le pouvoir d'achat des retraités a été et sera respecté. Si tel n'est pas le cas, le Gouvernement prendra ses responsabilités et, dans le cadre du rendez-vous de 2008, qui traitera notamment de la question des petites pensions, nous proposerons une augmentation des pensions concernées.
Par ailleurs, la réforme de 2003 a fixé un objectif ambitieux pour garantir une retraite égale à 85 % du SMIC aux salariés les plus modestes ayant eu une carrière complète au SMIC. Pour y parvenir, je vous confirme que nous revaloriserons de 3 % le minimum contributif au 1er janvier 2008, ce qui le portera à 633 euros par mois.
S'agissant de la famille, nous avons défini trois axes majeurs dans le PLFSS. Tout d'abord, nous réalisons un effort particulier en faveur des familles les plus modestes pour leur offrir davantage de choix dans le mode de garde de leurs enfants. Aujourd'hui, en effet, le coût qui reste à la charge de la famille qui fait appel à une assistance maternelle agréée est supérieur à celui d'une place en crèche.
Il faut mettre fin à cette distorsion si l'on veut qu'existe un choix réel entre les différents modes de garde. C'est pourquoi il est prévu d'augmenter de 50 euros par mois le complément de libre choix de mode de garde de la PAJE en direction des quelque 60 000 familles qui se trouvent sous le premier seuil de ressources prévu pour cette prestation, c'est-à-dire qui perçoivent des revenus annuels inférieurs à 19 225 euros. La prestation passerait donc ainsi de 375 à 425 euros par mois.
Ensuite, nous voulons rendre nos prestations plus efficaces, en les adaptant davantage aux besoins des allocataires. Une première mesure vise donc à instaurer une majoration unique des allocations familiales à quatorze ans, remplaçant les actuelles majorations qui étaient versées en deux fois, à onze et seize ans. Son montant sera équivalent au montant qui était versé à seize ans, soit 59,57 euros par mois. Cela nous permettra d'être plus en phase avec la réalité vécue par les familles, car les études montrent bien que c'est à quatorze ans que le coût d'un enfant s'accroît. Ces nouvelles dispositions ne s'appliqueront bien sûr que pour l'avenir.
La deuxième mesure, qui correspond à une demande forte des associations familiales, concerne la modulation de l'ARS, l'allocation de rentrée scolaire, en fonction de l'âge. Nous savons pertinemment que le coût de la rentrée au lycée est plus élevé qu'à l'école primaire. Nous proposons donc d'inscrire dans la loi le principe de la modulation. Nous fixerons, dans la plus grande concertation avec les partenaires sociaux et avec les parlementaires, ainsi que je m'y suis engagé devant la commission, les modalités précises du barème par voie réglementaire.
Le troisième axe a trait à la simplification des démarches en vue d'obtenir des prestations familiales. Actuellement, les allocataires doivent remplir, le 1er juillet de chaque année, une déclaration de ressources auprès de leur CAF. Dès 2008, cette déclaration sera supprimée et remplacée par la déclaration d'impôt des demandeurs de prestations. Cette mesure simplifiera la vie des allocataires, qui ne seront plus contraints de remplir des formalités administratives redondantes.
Au-delà de ces mesures immédiates, le Gouvernement entend conforter notre politique familiale en créant notamment une nouvelle structure qui réunira les mouvements familiaux, les partenaires sociaux, les représentants des pouvoirs publics ainsi que des personnalités qualifiées, en vue d'animer le débat et d'alimenter notre réflexion. Cette structure permanente, qui s'inspire du Conseil d'orientation des retraites, du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie et du Conseil d'orientation pour l'emploi, sera placée sous la présidence du Premier ministre. Elle nous permettra d'avoir une vision à la fois prospective et transversale de la politique de la famille, afin d'anticiper l'ensemble des défis que nous aurons à relever à l'avenir, tels que le droit opposable à la garde d'enfant, la dépendance, le handicap ou l'école.
S'agissant de la branche « accidents du travail et maladies professionnelles », le PLFSS améliore la situation des ayants droit de personnes décédées d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle après le 1er septembre 2001, en clarifiant les modalités d'application de la hausse de dix points de leur rente, qui avait été décidée par votre assemblée au lendemain de l'explosion d'AZF à Toulouse. Le PLFSS prévoit également des dotations au fonds « amiante » du même ordre que l'an dernier, ainsi qu'une hausse de six points du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, le FCAATA. Actuellement, ce dispositif ne remplit pas totalement son objectif et n'apparaît pas, aux yeux de certains, comme suffisamment équitable.
C'est pourquoi je mettrai en place, début novembre, un groupe de travail qui sera chargé d'étudier, dans un cadre concerté, les modalités d'un recentrage du FCAATA sur les personnes qui ont été réellement exposées à l'amiante.
Cette question importante n'est pas facile à régler. Ce groupe de travail comprendra les partenaires sociaux, les associations de malades,…
… ainsi que des parlementaires pour prolonger les travaux très riches de l'Assemblée – je pense tout particulièrement à deux députés qui ne siègent plus sur ces bancs aujourd'hui, Jean le Garrec et Jean Lemière – et du Sénat sur le problème de l'amiante.
L'ensemble de ces mesures supposent que l'on respecte un impératif majeur de solidarité, la lutte contre la fraude. Ainsi que l'a rappelé Éric Woerth, la solidarité ne va pas sans la responsabilité. Parce que la sécurité sociale constitue un bien commun dont nous sommes tous responsables, il est impératif de renforcer notre action de lutte contre les abus et les fraudes. Tel est le sens de la politique gouvernementale qui sera menée sur tous les fronts, sous la coordination d'Éric Woerth. Le PLFSS pour 2008 définit trois axes.
Tout d'abord, il vise à clarifier la réglementation en vue d'éviter les abus. La condition d'une résidence stable et régulière sur le territoire sera nécessaire pour l'ouverture de certains droits à prestations sociales aux ressortissants communautaires. Les conditions de contrôle des arrêts de travail en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle seront harmonisées avec celles des arrêts de travail pour maladie.
Le PLFSS propose ensuite de faciliter la détection des comportements frauduleux en décloisonnant l'action des différents services de contrôle. Comme l'a indiqué Éric Woerth, il est important que les agents de la sécurité sociale disposent au même titre que les agents des services fiscaux, notamment pour les prestations servies par les CAF, d'un droit de communication des données permettant, par exemple, d'établir l'adresse d'une personne ou le niveau réel de ses ressources. Or, actuellement, de telles vérifications nécessitent une procédure longue, complexe et décourageante.
Enfin, les sanctions pour recours au travail illégal doivent être plus efficaces pour être plus dissuasives. C'est pourquoi le PLFSS propose un mécanisme de redressement forfaitaire fondé sur une durée de travail illégal présumé de six mois, sanctionné par une amende dont le montant s'élèverait à près de 3 500 euros.
Mesdames, messieurs les députés, les semaines et les mois qui viennent – sans parler des journées au cours desquelles vous examinerez le PLFSS – seront marqués par des réformes importantes et attendues de notre protection sociale, que ce soit dans le champ de la vieillesse – réforme des régimes spéciaux et des retraites –, de la famille – mise en place d'une nouvelle instance permettant de partager et de faire partager une vision large et prospective de la famille – ou de la dépendance, puisque sera mise en place la réponse au cinquième risque social, qui constitue une attente forte de nos concitoyens.
Relever le défi de la solidarité, tel est le mandat qui nous a été confié par les Français. Avec ce PLFSS, nous sommes au rendez-vous de nos engagements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, comme le rappelait à l'instant Xavier Bertrand, la politique en faveur des personnes âgées et des personnes handicapées que nous voulons mettre en oeuvre dans le premier projet de loi de financement de la sécurité sociale du quinquennat est conforme à la feuille de route qui nous a été remise par le Président de la République.
S'agissant des personnes handicapées, celle-ci implique la mise en oeuvre d'un plan quinquennal en faveur des établissements et services pour enfants et adultes handicapés, qui vise à améliorer l'offre de places, quantitativement et qualitativement.
Au plan quantitatif, le PLFSS franchit un premier pas en créant 2 200 places supplémentaires en établissements et services pour enfants et plus de 4 900 places nouvelles en établissements et services pour adultes. En ce qui concerne les enfants, nous avons voulu mettre l'accent sur l'accompagnement à la scolarisation en milieu ordinaire avec la création de 1 250 places supplémentaires en CESSAD. Pour les adultes, nous poursuivons trois objectifs : résorber les listes d'attente, développer les solutions de répit pour les familles et permettre le libre choix entre domicile et établissement. Pour ce faire, nous créons 2 600 places de MAS et de foyer d'accueil médicalisé, 225 places d'accueil temporaire et 2 100 places en services de soins infirmiers à domicile.
Au plan qualitatif, je veux adapter les places à des problématiques insuffisamment prises en compte, en faisant porter notre effort en priorité sur le poly-handicap, l'autisme et les troubles graves du comportement. Ainsi, 300 des 2 200 places en établissements et services pour enfants seront réservées aux enfants autistes, 150 aux enfants poly-handicapés et 300 seront créées en ITEP. Nous avons confié, avec Xavier Bertrand, une mission prospective à Patrick Gohet pour définir les modalités de prise en charge de l'autisme les plus adaptées aux demandes des familles. Afin de préparer nos établissements au défi du vieillissement des personnes handicapées, nous devons également favoriser la médicalisation des foyers de vie : 500 places seront concernées dès 2008.
Mais pour mener à bien ce plan en faveur des établissements pour personnes handicapées, nous avons besoin de personnels formés. C'est la raison pour laquelle je veux lancer, avant la fin de l'année, un plan « métiers du médico-social », afin de nous doter d'outils de gestion prévisionnelle de ces emplois et d'adaptation à l'offre de formation, pour rendre ces métiers attractifs grâce à la définition de filières professionnelles.
Notre feuille de route dans le domaine du handicap implique par ailleurs que soient satisfaites les ambitions de la loi du 11 février 2005. Le PLFSS 2008 y contribue en étendant la prestation de compensation aux enfants. Le mécanisme de droit d'option que nous avons retenu entre les compléments d'AEEH et la prestation de compensation du handicap permettra aux parents d'enfants lourdement handicapés de bénéficier dans les prochains mois d'une meilleure prise en charge des frais qu'ils engagent pour l'accompagnement de leurs enfants.
En ce qui concerne les personnes âgées, les mesures décidées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale constituent la traduction de la volonté du Président de la République de faire de la prise en charge de la maladie d'Alzheimer l'une des grandes causes nationales du quinquennat. Avec 650 millions d'euros de mesures nouvelles, ce PLFSS se donne les moyens de faire davantage pour les personnes âgées : il permet notamment aux personnes âgées dépendantes qui le souhaitent de rester à leur domicile aussi longtemps que possible. Ce projet de loi poursuit également l'effort de création de places en services de soins infirmiers à domicile. L'accélération amorcée l'année dernière se poursuivra en effet en 2008 : là où environ 4 000 places par an étaient créées entre 2004 et 2006, nous serons en mesure de financer la création de 6 000 places cette année, et autant en 2008.
Favoriser le maintien à domicile implique aussi de développer l'accueil de jour et l'hébergement temporaire, notamment pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. En 2008 seront donc financées 2 125 places d'accueil de jour et 1 125 d'hébergement temporaire. Par ailleurs, il ne suffit pas qu'il y ait des places en institution, encore faut-il pouvoir s'y rendre régulièrement : c'est pourquoi les frais de transport des personnes vers les accueils de jour seront désormais pris en charge.
En second lieu, le maintien à domicile n'étant pas toujours possible pour les personnes âgées les plus dépendantes, nous allons fournir un effort très important pour les maisons de retraite en 2008, en finançant la création de 7 500 places d'EHPAD – contre 5 000 places cette année – tout en poursuivant leur médicalisation et leur adaptation, notamment architecturale, à l'accueil des personnes atteintes de troubles du comportement.
Enfin, la nouvelle tarification permettra de prendre en compte non seulement la charge de travail liée à la dépendance, mais également la charge en soins médicaux et techniques requis par les résidents, avec pour conséquence un renforcement de la présence en personnel auprès des personnes. Ces moyens nouveaux permettront de poursuivre l'augmentation des ratios d'encadrement soignant dans les EHPAD existants et la diversification des compétences. Ils permettront ainsi la création dans ces établissements d'environ 10 000 emplois soignants supplémentaires. Il s'agit en effet d'adapter les EHPAD à la prise en charge de la grande dépendance. Pour cela, nous avons voulu agir de manière volontariste en incitant les 1 500 derniers établissements n'ayant pas signé de convention tripartite à se mobiliser. L'objectif est que toutes les conventions soient signées avant la fin de l'année 2008.
L'État, de son côté, fera en sorte que les DDASS fassent de cet objectif une priorité majeure. Des amendements proposant de repousser pour la quatrième fois la signature de ces conventions ont été déposés. Ce n'est pourtant plus possible…
…car tant que l'on ne fait rien, les réserves de la CNSA, qui s'accumulent, ne sont pas affectées aux établissements et ne sont donc pas utilisées directement au service des personnes âgées. Convenez avec moi, madame, que ce n'est pas acceptable. Nous reviendrons sur cette question importante à l'occasion de la discussion sur les amendements, mais je souhaitais d'ores et déjà mentionner les enjeux liés à ce problème et l'importance que j'y attache.
Le PLFSS 2008 sera l'occasion de mettre en oeuvre un plan efficace d'activation des réserves de la CNSA afin de lever les blocages qui freinent le développement des services médico-sociaux. Cette activation prendra la forme d'un soutien financier à l'investissement dans les EHPAD.
La question de l'aide à l'investissement est en effet primordiale. D'une part, pour maîtriser le reste à charge des usagers, qui atteint un niveau difficilement supportable : plus de 1 500 euros par mois pour une retraite des personnes du quatrième âge s'élevant en moyenne à 1 100 euros. D'autre part, pour adapter le bâti aux normes de sécurité et d'incendie, et répondre aux attentes croissantes de la population en termes de modernisation et de rénovation de ces établissements. L'investissement est, de plus, un enjeu important en termes d'emploi. Le plan d'aide à l'investissement 2006 de la CNSA a démontré qu'un euro d'aide générait quatre euros d'investissement. Ainsi, un plan d'au moins 250 millions d'euros permettra un milliard d'euros de travaux, soit 15 000 emplois pendant trois ans.
En étendant les mesures d'aide à l'investissement de la CNSA aux places nouvelles, le PLFSS 2008 assure enfin le maintien d'un rythme suffisant de créations de places agréées à l'aide sociale, à côté d'un secteur privé commercial dynamique qui bénéficie, lui, d'autres sources de financement.
L'ensemble des mesures que nous vous présentons aujourd'hui doit naturellement être replacé dans la perspective des travaux engagés sur le cinquième risque. C'est dans ce cadre que devra s'envisager la poursuite de l'amélioration de la réponse aux besoins des personnes en perte d'autonomie et la solvabilisation de cette réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous avons, lors de la précédente législature, engagé bon nombre de réformes importantes, qui ont constitué de vrais progrès sociaux.
Je pourrais citer la possibilité d'un départ à la retraite anticipé pour les salariés ayant eu des carrières longues ; la mise en place de la prestation d'accueil jeune enfant et les dispositions qui l'accompagnent pour mieux concilier l'accueil d'un enfant et l'exercice d'une activité professionnelle ; la première étape de la réforme des retraites ; la mobilisation de moyens considérables au service des personnes âgées et des personnes handicapées pour développer leur prise en charge à travers la création de la CNSA ; sans oublier, bien sûr, le plan cancer, encore n'ai-je évoqué que les réformes les plus marquantes.
Cependant, nous devons constater que les choix engagés pour maîtriser l'évolution des finances sociales n'ont pas été à la hauteur des exigences. Je le dis tout net : nous ne pouvons nous satisfaire des déficits des comptes sociaux prévus pour 2007. Toutes les branches seront en déficit et la dérive entre les prévisions et la réalité sera de près de 3,9 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires. Heureusement, les élections présidentielles et législatives n'ont lieu que tous les cinq ans !
Le défi financier est considérable. Nous ne pouvons continuer à considérer ces déficits comme une fatalité, mais devons au contraire nous y attaquer avec plus de vigueur, de rigueur et de constance. Dans ce contexte, je perçois des motifs d'inquiétude, mais aussi des raisons d'espérer qui me portent à un optimisme mesuré.
Mon inquiétude se nourrit d'abord de notre addiction à la dépense publique excessive, qui est à la base de notre complaisance ou de notre indifférence aux déficits récurrents. Alors que presque tous nos voisins européens ont accepté l'exigence de finances publiques et sociales en équilibre, alors que toutes les analyses nous alertent sur l'impact financier du vieillissement sur le financement des retraites et sur le coût de la santé – plus de 3,2 % du PIB en 2050, c'est-à-dire environ 60 milliards d'euros valeur 2007 –, nous feignons de croire que, seuls au monde, nous pourrons nous épargner tout effort d'adaptation.
L'inquiétude se nourrit aussi d'une dette sociale que nous ne maîtrisons pas et à laquelle nous tardons à apporter une solution afin de ne pas peser sur la conjoncture, alors que le noeud coulant des taux se resserre et rend la dette de plus en plus coûteuse : un milliard d'euros pour les régimes sociaux en 2008 !
L'inquiétude se nourrit également d'un FFIPSSA que nous laissons délibérément glisser vers un abîme de déficit…
…qui pourrait atteindre, en l'absence de décision, plus de 18 milliards d'euros en 2012.
L'inquiétude se nourrit, enfin, de l'évolution des pathologies chroniques, qui laisse présager que près de 12 millions de personnes seront en ALD à l'horizon 2015, soit 42 % de plus qu'en 2006. Elles concentreront alors 70 % des dépenses de l'assurance maladie. C'est un défi colossal que de mieux prendre en charge une cohorte aussi impressionnante de malades chroniques. Cela doit constituer une priorité absolue pour les acteurs du système de soins car, à défaut d'amélioration, notre système de solidarité risque d'imploser sous le poids de cette prise en charge.
Ce qui, en revanche, me rend raisonnablement optimiste, c'est d'abord l'engagement de notre Président de la République, qui a été élu pour remettre de l'ordre dans la maison France. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Cela vous gêne peut-être, mais ce n'en est pas moins la réalité ! Il a été élu pour redynamiser et moderniser un pays qui étouffe sous le poids des conservatismes et des corporatismes qui nous assiègent et veulent transformer le PLFSS en une tribune pour leurs intérêts et pour leurs égoïsmes à courte vue !
Je me félicite que le Président de la République ait bien pris la mesure des enjeux humains et financiers.
Ce qui m'incline à l'optimisme, c'est aussi la volonté déterminée de chacun des ministres en charge du pôle social d'engager sa responsabilité pour affronter les défis du vieillissement et des besoins de santé. Enfin, on donne un contour sans ambiguïtés à la politique de maintien dans l'emploi des seniors. Il était temps de mettre fin à cette exception française, à cette culture du traitement du chômage par la préretraite qui n'a jamais prouvé son efficacité au profit des jeunes. L'an prochain, nous dialoguerons avec les Français pour donner un contour durable à notre système de retraite, maintenant que tous les actifs vont être inscrits dans un cadre plus équitable.
Un autre facteur d'espoir est de vous voir nous proposer cette année, madame la ministre de la santé, de relever le défi d'une meilleure efficience de notre système de soins, en ville comme à l'hôpital. Les schémas anciens ne peuvent plus rester les seuls repères pour le futur, il nous faut inventer une nouvelle approche plus globale des questions de santé, conjuguant une régulation de l'offre de soins englobant ville et hôpital avec une régulation plus active du parcours de soins ; cette approche innovante sera incarnée par la nouvelle organisation régionale que nous préparons ensemble. Les outils mis en place par la réforme du 13 août 2004 et que nous pouvons porter au crédit de cette réforme sont un atout pour aborder cette nouvelle phase. Je veux parler de l'UNCAM qui, améliorant la connaissance et la gestion du risque, devra trouver sa place dans le futur schéma de la régionalisation de la santé. Je veux parler de la Haute autorité de santé, dont le travail remarquable doit trouver plus d'écho parmi les acteurs de la santé, et qui pourra les éclairer dorénavant sur l'efficience des pratiques et des choix thérapeutiques. Je veux parler encore de la tarification à l'activité, dite T2A, qui doit être déployée plus activement pour rendre l'hôpital plus efficace.
Le Président de la République nous invite à un grand débat autour du financement de la santé au premier semestre de 2008. Il y a effectivement urgence à ouvrir enfin le dialogue sur les problèmes de financement qui se posent à notre société et qui appellent désormais des réponses, tant la dégradation des comptes devient insupportable. Cette approche plus volontariste et moins flamboyante de nos difficultés nous change des annonces fallacieuses et illusoires : celle, par exemple, d'un dossier médical personnel qui pourrait être opérationnel en quelques mois,…
…des annonces avant tout destinées à nous faire croire à des économies qui ne seront jamais au rendez-vous. Prenez le temps nécessaire, madame la ministre de la santé, pour offrir aux assurés et aux malades un véritable outil au service de leur santé et au service d'une meilleure qualité de soins.
Il est temps, mes chers collègues, de se donner les moyens d'un équilibre durable de nos finances sociales.
Il est temps, en effet : cela fait cinq ans que vous êtes au Gouvernement !
Comment y parviendrons-nous ? En appréhendant le financement de notre protection sociale dans son ensemble, y compris le chômage, car on ne peut aborder le déficit de la branche vieillesse sans aborder celui du FSV, étroitement lié au niveau du chômage.
Nous y parviendrons également en bâtissant une stratégie sur des hypothèses macroréalistes et raisonnables tout en évitant de croire ou de faire croire à des recettes miracles comme la TVA sociale, qui ne sont que des transferts d'assiettes poursuivant trop d'objectifs pour être crédibles (« Bravo ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et qui, de surcroît, n'exonéreront pas la sécurité sociale d'inévitables efforts d'adaptation.
Nous y parviendrons, enfin, en donnant de la lisibilité aux finances sociales, afin que chaque citoyen puisse savoir pourquoi et comment il est appelé à contribuer à la solidarité. À cet égard, il est indispensable au nom de l'équité de faire contribuer l'essentiel des revenus, y compris ceux qui constituent aujourd'hui ce que l'on appelle les niches sociales. J'invite l'Assemblée et le Gouvernement à soutenir ma démarche pour faire contribuer les stock-options et les attributions gratuites d'actions.
Le pacte de confiance souhaité par le Président de la République se nourrit aussi de justice et d'équité sociale, et cette contribution sera significative sans nuire pour autant à l'attractivité de nos entreprises. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Cette lisibilité sera exigeante pour les finances publiques, qui doivent accepter cette transparence et assumer les charges financières qui relèvent de l'État. Je veux saluer l'effort de clarification que vous avez accompli, monsieur le ministre des comptes publics, et qui porte sur près de 30 milliards d'euros pour 2008, contre 26 milliards l'an dernier.
Il nous faut revisiter la structure de financement de chacune des branches, en tenant compte des notions de travail ou de résidence et de la nature assurantielle ou solidaire de la prestation sociale. Il nous faut, enfin, mettre en place des stratégies d'ajustement des dépenses aux capacités contributives de tous les Français, en particulier dans le domaine de la prise en charge des soins. Ainsi, chaque professionnel de santé libéral ou hospitalier doit prendre conscience que tout ce qui est inutile ou insuffisamment efficace affaiblit l'esprit même de la solidarité face à la maladie. Chaque assuré engage aussi sa responsabilité pour ne pas abuser d'une solidarité très généreuse…
…car le droit à la santé, ou le droit à des soins de qualité, n'exonère personne des efforts de prévention par des comportements plus respectueux de notre capital santé.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, ce PLFSS pour 2008 ouvre une série de chantiers majeurs pour la sauvegarde de notre protection sociale. D'aucuns auraient pu croire que nous sommes dans une transition : il n'en est rien car le temps ou plutôt les déficits pressent et fragilisent la solidarité à laquelle nous tenons. Vous nous proposez au contraire, mesdames, messieurs les ministres, un PLSS fondateur qui marque le début d'une rupture avec les approches anciennes.
Cela bouscule bien évidemment l'ordre établi et ceux qui croyaient qu'il serait immuable au service des intérêts catégoriels. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) En cela, ce PLFSS s'inscrit au service de l'intérêt général pour adapter et moderniser une solidarité que nous voulons exemplaire.
Notre commission soumettra à l'Assemblée un certain nombre de propositions pour consolider la refondation de notre protection sociale au service de tous les Français.
Avant de conclure définitivement et de quitter cette tribune, permettez-moi, madame la présidente, d'interpeller les ministres et le Gouvernement sur un problème de santé publique qui me tient à coeur et pour lequel je me suis engagé pleinement, je veux parler de l'interdiction de fumer dans tous les lieux publics au 1er janvier 2008, y compris notre buvette parlementaire. (Applaudissements.)
Je veux profiter de la présence de celui qui a compris ce combat pour la santé publique et qui a pris le risque du décret d'interdiction de fumer dans les lieux publics. Je veux également profiter de la présence de la ministre de la santé, qui va devoir faire appliquer l'intégralité du décret, c'est-à-dire dans la restauration, les cafés, bars et discothèques, et dont je connais l'engagement ancien. Et je n'oublierai pas le ministre des comptes, qui est aussi celui de la fiscalité du tabac et celui qui est chargé de verser chaque année près de 150 millions d'euros aux buralistes pour les aider à s'adapter au nouvel environnement, une aide mal répartie par les responsables des buralistes et qui favorise les moins touchés au détriment des buralistes frontaliers.
Quelle est d'après vous la manière intelligente d'appliquer ce décret ? Pour ma part, en matière de santé publique et quand il s'agit de protéger des salariés d'un danger avéré, en l'occurrence celui du tabagisme passif, il n'y a qu'une manière de procéder : il faut appliquer l'interdiction et la faire respecter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, qualifié peut-être un peu trop rapidement de texte de transition par certains observateurs, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, particulièrement dense, est, je le crois, un projet de loi fondateur (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), à la hauteur des actions vigoureuses et profondes qu'imposait la dégradation des comptes de la sécurité sociale.
Avant d'aller plus loin, je veux tout d'abord redire ici qu'en dépit du dépassement, pour partie prévisible, de près de 3 milliards d'euros par rapport à l'ONDAM voté pour 2007 et dont on doit reconnaître qu'il avait été fixé à un niveau particulièrement serré, la réforme de l'assurance maladie engagée en 2004 par M. Philippe Douste-Blazy et poursuivie par M. Xavier Bertrand, loin d'avoir été un coup d'épée dans l'eau, a au contraire marqué une première étape décisive dans le redressement des comptes.(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
En effet, sans la mise en oeuvre de la réforme de 2004 et si l'évolution tendancielle de 5,5 % s'était poursuivie depuis lors, les dépenses à la fin 2006 auraient été supérieures de plus de 6 milliards d'euros aux dépenses constatées. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Par ailleurs, si le déficit prévisionnel de la sécurité sociale atteint près de 12 milliards d'euros pour 2007, soit un niveau proche de celui de 2004, cette évolution n'est plus désormais uniquement imputable au déficit de l'assurance maladie, comme c'était le cas en 2004, mais s'explique également en partie par la dégradation des comptes de la branche vieillesse.
Enfin, pour redresser durablement les comptes, la loi du 13 août 2004 a fait le pari de changer durablement les comportements. Par définition, cela requiert un minimum de temps, et ne pourra produire ses pleins effets que progressivement, au cours des prochaines années. En effet, c'est bien en changeant tous un peu que l'on peut tout changer. L'adhésion de 90 % des Français au dispositif du médecin traitant ou encore les baisses de prescriptions des antibiotiques ou des arrêts de travail, intervenues depuis lors, l'ont clairement démontré.
En s'appuyant sur ces fondations solides, basées sur la maîtrise médicalisée et le choix de la rationalisation plutôt que le rationnement des soins, le présent projet de loi permet de consolider et d'enrichir les axes directeurs de la réforme de 2004, par la mise en place de nouveaux instruments permettant d'en accroître encore davantage l'efficacité mais aussi de les compléter par un volet plus structurel sur l'organisation du système de soins.
S'agissant tout d'abord de la poursuite de la maîtrise médicalisée, la réforme engagée en 2004 a permis de poser les jalons indispensables vers la modernisation du système de soins, en impulsant une dynamique nouvelle de maîtrise médicalisée des dépenses, s'appuyant sur un partenariat rénové avec les professionnels de santé, sans qui évidemment rien ne se fera.
À cet égard, je ne peux que me féliciter que le montant de l'ONDAM proposé pour 2008, en hausse de 2,8 %, autorise la poursuite de cette dynamique.
Cet objectif de dépenses est en effet pleinement réaliste, au regard tant du rythme de croissance des dépenses d'assurance maladie depuis plusieurs années que du plan d'économies, de près de deux milliards d'euros, auquel il s'adosse. Il permet en particulier d'opérer un rééquilibrage nécessaire au profit de la médecine de ville, dont le sous-objectif est en hausse de 3,2 % en incluant l'effet des franchises, soit un taux identique à celui prévu pour l'ONDAM hospitalier, contre 1,1 % dans la précédente loi de financement.
Afin de restaurer la crédibilité de l'ONDAM, et donc son efficacité en tant qu'instrument de pilotage des dépenses, le projet de loi prévoit par ailleurs de renforcer l'efficacité de la procédure d'alerte, ce qui constitue également la contrepartie d'un objectif de dépenses fixé à niveau plus réaliste.
Pour cela, il est proposé que les mesures de revalorisations tarifaires ne puissent entrer en vigueur qu'au terme d'une période d'observation de six mois après la conclusion des accords conventionnels prévus en ce sens, et qu'en cas de déclenchement de la procédure d'alerte ces mesures soient reportées au 1er janvier de l'année suivante.
Sans remettre en cause le principe même de ces dispositions, la commission a adopté deux amendements prévoyant, d'une part, de mieux associer les partenaires conventionnels et, d'autre part, de ne reporter 1'entrée en vigueur des mesures de revalorisations tarifaires que si le risque sérieux de dépassement de l'ONDAM ayant motivé le déclenchement de la procédure d'alerte est imputable, en tout ou partie, à l'évolution des soins de ville.
Parce que des marges de progrès existent pour garantir une prise en charge médicalement justifiée, ce projet de loi comporte par ailleurs un important volet de lutte contre les abus et, plus largement, les dépenses inutiles, en particulier dans le domaine des transports sanitaires ou du contrôle des arrêts de travail. En effet, comme l'a souligné récemment le Président de la République, on ne peut pas demander aux Français d'être solidaires s'ils ne sont pas assurés que chacun est responsable et même irréprochable dans le respect des règles.
Il y a là incontestablement d'importantes économies à réaliser dans ce domaine. À ceux qui en doutent, je rappellerai simplement que, selon les premiers résultats du plan de contrôle national de l'assurance maladie présentés en décembre dernier, six fois plus de fraudes et d'abus ont été détectés en 2006 qu'en 2005, pour un montant total de 120 millions d'euros, ce qui correspond, par exemple, au coût de fonctionnement annuel de quatre hôpitaux publics de taille moyenne. Nous n'avons pas aujourd'hui les moyens de nous priver de telles ressources.
Le projet de loi permet par ailleurs d'accélérer la modernisation du système de soins. En ce sens, il comporte tout d'abord une mesure forte : celle du passage, dès l'année prochaine, à 100 % de la tarification à l'activité pour les établissements de santé anciennement sous dotation globale. À cet égard, la convergence intrasectorielle des tarifs constitue toujours un des volets essentiels de la réforme du financement des établissements de santé à l'activité et s'effectuera, désormais, dans une logique de simplification selon les mêmes modalités pour tous les établissements de santé. La commission a adopté un amendement prévoyant que l'objectif de convergence intersectorielle devra être atteint à 50 % en 2009.
Les professionnels de santé auront par ailleurs la possibilité de conclure des contrats comportant des objectifs individualisés d'amélioration des pratiques avec les caisses d'assurance maladie, et pourront également participer à des expérimentations sur de nouveaux modes de rémunération et d'exercice. Afin notamment de répondre au plus près des besoins locaux, la conduite de ces expérimentations sera confiée aux missions régionales de santé, s'inscrivant ainsi dans le prolongement de la réflexion en cours sur la régionalisation de la politique de santé.
Là encore, la commission a souhaité que les partenaires conventionnels mais aussi, s'agissant de la permanence des soins qui constitue une mission de service public, l'ensemble des syndicats représentant les professionnels et le Conseil national de l'Ordre des médecins soient consultés sur la définition des modalités de mise en oeuvre de ces expérimentations.
Enfin, concernant le dossier médical personnel, le projet de loi prévoit plusieurs dispositions visant à favoriser sa mise en oeuvre, à travers notamment la création d'un portail d'accès unique sécurisé. À mon initiative et à celle de M. Jean-Luc Préel, la commission a également adopté deux amendements destinés à favoriser le déploiement du dossier pharmaceutique, qui est déjà opérationnel sur certaines zones du territoire et qui contribuera à lutter contre les risques de iatrogénie médicamenteuse.
Ce projet de loi vise enfin à améliorer la prise en charge des assurés et à couvrir de nouveaux besoins de santé publique. En effet, les défis exigeants auxquels notre système d'assurance maladie est confronté ne sauraient se résumer à la seule maîtrise des dépenses, aussi nécessaire et aussi morale soit-elle, car il n'est plus supportable de reporter indéfiniment la charge de nos déficits sur les générations futures.
Dans un souci d'équité et de justice sociale, il nous appartient donc d'anticiper dès à présent les besoins de demain, liés par exemple au vieillissement de la population ou aux disparités territoriales, et de veiller à garantir le respect de l'ambition première de notre système de sécurité sociale, c'est-à-dire un égal accès de tous aux soins.
Dans ce sens, le projet de loi prévoit tout d'abord de renforcer la transparence et l'information des assurés quant aux dépassements d'honoraires pratiqués sur les actes les plus coûteux. À cet égard, et de manière plus générale, il me semble fondamental de relancer les négociations conventionnelles sur la création d'un secteur optionnel. Peut-être, madame la ministre, pourrez-vous nous en dire davantage sur ce point ?
Afin de répondre aux ambitions annoncées par le Président de la République pendant la campagne électorale et de permettre la prise en charge de nouveaux besoins de santé, en particulier dans le domaine de la maladie d'Alzheimer, des soins palliatifs et du cancer, sans pour autant reporter de manière irresponsable la charge du financement sur les générations futures, le projet de loi prévoit la création d'une franchise sur les médicaments, les transports et les actes paramédicaux.
Ce n'est pas une franchise : c'est une taxe médicale, un impôt qui va frapper les malades !
Je veux toutefois redire ici que l'égalité d'accès aux soins n'est en rien entravée par cette mesure, puisque les plus fragiles en seront exonérés, soit au total 15 millions de nos concitoyens.
Un plafonnement à 50 euros par an est par ailleurs prévu pour protéger les plus malades, qui continueront donc à bénéficier d'un niveau très élevé de prise en charge. Rappelons que le taux de prise en charge en France est stable depuis plusieurs années et qu'il est élevé : 91 % environ pour les malades en ALD, et plus de 78 % pour ceux qui ne le sont pas. Soulignons en outre que le principe des franchises est tout à fait accepté dans plusieurs pays européens, dont certains dirigés par des gouvernements socialistes.
Ce n'est pas parce que certains font des bêtises qu'il faut que nous en fassions aussi !
La commission a par ailleurs adopté un amendement prévoyant qu'un rapport au Parlement précise, chaque année, les conditions d'utilisation de la franchise, afin de garantir toute la transparence nécessaire en la matière.
Enfin, parce que l'existence d'importantes inégalités territoriale, relayées par les élus locaux, pose aujourd'hui un problème préoccupant en termes d'accès aux soins, le projet de loi comporte des dispositions visant à promouvoir une répartition plus équilibrée des professionnels de santé sur l'ensemble de l'Hexagone.
Si plusieurs inquiétudes se sont exprimées quant à ces dispositions, je souhaite tout d'abord souligner à nouveau l'attachement profond qui est le mien, mais aussi celui du Gouvernement, au principe fondamental de la liberté d'installation.
Il me paraît nécessaire de rappeler la philosophie de ces dispositions, qui est d'abord d'inviter à une très large concertation sur l'ensemble de ces questions, comme sur la modernisation des conditions d'exercice, dans le cadre des États généraux de la démographie, qui auront lieu prochainement.
Dans ce sens, la commission a adopté un amendement qui permet de poser clairement le principe selon lequel les représentants des chefs de clinique, des internes et des étudiants en médecine seront étroitement associés aux négociations conventionnelles et donne ainsi, d'une certaine façon, une base législative à l'organisation des États généraux de la démographie.
Pour l'ensemble de ces raisons, sous la réserve de la centaine d'amendements qu'elle propose, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales suggère donc à l'Assemblée nationale d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'ai un problème, car je viens d'écouter notre rapporteur qui n'a parlé que de l'assurance maladie, sans dire un mot des accidents du travail et des maladies professionnelles.
Quel est donc le rapporteur qui va évoquer ces questions- là ? Il est scandaleux qu'il n'y ait rien dans ce PLFSS ni sur les accidents du travail ni sur les maladies professionnelles ; les rapports des commissions n'en parlent pas non plus.
La FNATH a fait part aujourd'hui dans un communiqué de sa colère, partagée par l'ANDEVA. À la suite de la manifestation du 13 octobre, elles avaient obtenu la promesse d'être reçues par la ministre de la santé. Or cette rencontre vient d'être annulée. C'est bien la logique implacable d'un gouvernement qui n'a rien à faire des accidents du travail ni des maladies professionnelles !
La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour l'assurance vieillesse.
Monsieur Muzeau, il y a dans le PLFSS pour 2008 un chapitre consacré à la branche AT-MP.
La discussion en commission de la branche vieillesse du PLFSS pour 2008 a été marquée par le thème de la revalorisation des pensions de retraite.
L'objectif de dépenses des régimes obligatoires d'assurance vieillesse a été construit sur la base d'une revalorisation de 1,1 % pour 2008, qui fait suite à une revalorisation de 1,8 % en 2007. Ces taux constituent l'application mécanique des dispositions de l'article 27 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites.
Le taux de 1,1 % soulève cependant de fortes protestations, dont votre rapporteur ne peut que se faire l'écho. Néanmoins, un point doit être souligné. L'année 2007, avec la revalorisation de 1,8 %, a donné aux retraités 0,5 point de pouvoir d'achat supplémentaire. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Alors que chacun s'accorde pour reconnaître l'insuffisance du montant des retraites en France, et surtout des petites pensions – mais j'y reviendrai –, le fait que le Gouvernement reprenne l'année suivante le supplément de pouvoir d'achat qu'il a donné en 2007 n'est ni compris ni accepté.
C'est pourtant l'application de la loi, que j'avais défendue personnellement et en tant que porte-parole du groupe UMP : l'indexation des pensions sur l'indice des prix à la consommation hors tabac est la meilleure garantie qui puisse être donnée aux retraités.
La France a expérimenté depuis vingt ans de multiples types de procédure de revalorisation. Je dirai que celui retenu en 2003 est le moins mauvais de tous. C'est pourquoi j'invite le Gouvernement à ne pas modifier le dispositif sous le coup des protestations actuelles.
Car la proposition de revalorisation de 1,1 % ne doit pas masquer la véritable question : comment revaloriser les petites pensions ?
La loi est claire sur ce point. Xavier Bertrand vient de le rappeler : une conférence tripartite rassemblant autour du Gouvernement et des administrations les organisations syndicales et professionnelles représentatives au plan national des salariés et des employeurs doit se réunir au moins une fois tous les trois ans pour apprécier si une correction aux revalorisations annuelles doit ou non être opérée.
Comme le Gouvernement l'a indiqué en commission et en séance publique lors des questions d'actualité, cette conférence sera convoquée pour la fin du mois de novembre ou les tout premiers jours de décembre prochain. Quand la loi invite au dialogue et à la concertation avec les partenaires sociaux, il faut que le Parlement donne à ce dialogue le temps de s'exprimer.
La difficulté est que la loi du 21 août 2003 prévoit qu'une proposition de revalorisation supplémentaire des pensions que formulerait éventuellement cette conférence ne peut être prise en compte que dans le PLFSS suivant, c'est-à-dire aujourd'hui dans le PLFSS pour 2009. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement, adopté par la commission, permettant d'inscrire dans la loi cette modification sans attendre aussi longtemps. Cet amendement permettra d'avoir un débat complet avec vous, mesdames, messieurs les ministres.
J'attends personnellement de cette conférence une proposition consensuelle sur la revalorisation des petites pensions, car chacun de nous connaît la situation de détresse financière de nombreux retraités. Le Président de la République s'est d'ailleurs engagé fortement en faveur de la revalorisation de ces petites pensions.
Par petites pensions, j'entends également les pensions de réversion, les pensions de veuve de guerre et les pensions de veuves d'anciens combattants. L'an dernier, j'avais étudié la situation des veuves et veufs en France : le niveau très faible des pensions, en particulier des veuves de guerre, débouche sur des situations dramatiques où des personnes âgées ne veulent plus aller consulter leur médecin, de crainte de recevoir une prescription qui les conduirait à avoir un reste à charge, ne serait-ce que de 2 ou 3 euros. Or, vous le savez comme moi, certains retraités en sont réduits tous les mois à compter à l'euro près.
La revalorisation de ces pensions n'est pas une obligation mais un devoir d'assistance, je dirai même un devoir d'humanité.
C'est pour cela que je soutiens l'initiative du Président de la République et des ministres du Gouvernement de revaloriser le plus rapidement possible les petites pensions.
La revalorisation de ces pensions, mes chers collègues, n'est pas une obligation mais un devoir d'assistance, et même un devoir d'humanité.
Mesdames, messieurs les ministres, vous attendez de nous des propositions. En voici donc deux : Il faut tout d'abord modifier le calcul de la réversion, soit en relevant le taux de 54 % qui, je le rappelle, n'est que la première étape de la revalorisation du taux décidée par Simone Veil et qui n'a pas eu d'étape suivante ; soit en créant un filet de sécurité permettant que les petites pensions du conjoint décédé ne soient pas réduites à 54 %, mais d'un taux variable permettant qu'un montant de réversion minimal soit garanti.
Ma seconde proposition consiste à modifier le calcul de l'assiette des revenus pris en compte pour calculer le plafond de ressources donnant droit à la réversion. Il n'est pas normal, en effet, que des revenus « fictifs », ne correspondant pas à des rentrées réelles d'argent, soient pris en compte dans le calcul, et il faut revoir la règle d'incorporation des biens immobiliers hors communauté, valorisés à 3 % de leur valeur d'achat. On finit par ne plus calculer les revenus des veuves mais leur patrimoine. On devrait adopter le même principe qu'en matière d'impôt sur le revenu : les biens immobiliers non loués, c'est-à-dire dont on ne tire pas de rentrée d'argent, ne sont pas pris en compte dans le revenu fiscal.
Une autre mesure devrait consister à appliquer l'abattement de 30 % sur les revenus professionnels à tous les veufs. Or l'âge auquel ils bénéficient de cet abattement n'a pas été abaissé parallèlement à l'abaissement en dessous de 55 ans de l'âge auquel le droit à réversion est ouvert.
Quant aux veuves de guerre, même si elles sont de moins en moins nombreuses, nous sommes dans l'indécence pure. Ce n'est pas parce que ces personnes âgées se taisent, par culture toute militaire du silence, qu'il ne faut rien faire. J'adresse en leur nom un appel au secours, car leurs époux se sont battus pour notre pays, et elles se sont souvent retrouvées seules très jeunes.
Ces sujets mis à part, le PLFSS pour 2008 confirme la dégradation des comptes de l'assurance vieillesse observée en 2007. Contrairement aux prévisions, les demandes de liquidation anticipée de pension de retraite au titre des carrières longues ne faiblissent pas. On peut se déclarer satisfait en disant que le Gouvernement avait vu juste en proposant au Parlement d'adopter cette mesure en 2003, mais celle-ci me semble être un signe de l'inquiétude des Français face à l'avenir du système des retraites et du mal-être de nombre d'entre eux dans le monde du travail.
Un remède peut y être apporté par la prise en compte des problèmes de pénibilité au travail et par le rendez-vous de 2008. Je ne reviendrai pas sur la question de la pénibilité, que j'avais longuement développée dans le débat sur les régimes spéciaux, lors de la séance du 10 octobre dernier.
Le Gouvernement a décidé d'agir avec détermination pour l'amélioration du taux d'activité des seniors. Les préretraites et mises à la retraite d'office sont réformées radicalement ; c'est une bonne chose. Cela s'inscrit dans la ligne de la loi Fillon de 2003. Nous aurons ce débat à l'article 10.
Mais il est aujourd'hui indispensable de clarifier l'avenir des retraites. Ce doit être l'objet central du rendez-vous de 2008, qui ne doit pas être présenté comme un nécessaire rendez-vous d'ajustement financier destiné à rétablir l'équilibre des comptes.
Mesdames, messieurs les ministres, vous attendez, disais-je, des propositions des députés. En voici trois autres. Ayant souvent été rapporteur du budget de l'assurance vieillesse, j'apporterais d'abord un bémol à l'idée selon laquelle le gouvernement Jospin n'a rien fait pour réformer les retraites en France.
Il a, en vérité, mis en place le FRR. Mais il n'a fait que cela ! Je l'avais défendu à l'époque, mais à la condition qu'il soit doté de ressources pérennes. Or c'est loin d'être le cas.
Ce FRR est un outil capital. C'est d'ailleurs le seul instrument prospectif de très long terme, avec les lois Balladur et Fillon sur les retraites, existant dans notre pays, qui a l'habitude de gérer les dossiers à un horizon ne dépassant pas les cinq ans.
Nous avons avec ce Fonds de réserve des retraites un instrument financier non seulement performant mais créateur de richesses pour la collectivité nationale.
Il est plus utile en effet d'utiliser des recettes à l'abondement du FRR qu'au désendettement de l'État : les placements du FRR ont rapporté en 2006 6,5 points de plus que les OAT de l'État.
Cet outil doit donc être préservé à tout prix, et le rendez-vous de 2008 doit même être l'occasion de le conforter. Tout d'abord, mesdames, messieurs les ministres, il faut que la loi définisse les missions que l'on attend de lui à compter de 2020, quand il commencera à débloquer ses réserves. À ce titre, la loi devrait confirmer ce que nous avions voté en son temps, à savoir sa mission de lissage des cotisations des assurés du régime général et des régimes alignés salariés agricoles, commerçants et artisans.
Selon la volonté de l'ensemble des députés à l'époque, il ne faut surtout pas élargir l'emploi des réserves aux fonctionnaires, aux professions libérales et aux exploitants agricoles. Cela détruirait l'efficacité du FRR et serait d'une totale iniquité : les pensions des fonctionnaires sont subventionnées à 85 % par le budget de l'État, c'est un choix de gestion qui remonte à 1853, et que tous les gouvernements ont confirmé depuis cette date. Les fonctionnaires y tiennent, et il faut en accepter les avantages et les contraintes.
Il ne faudrait donc pas que le Trésor se serve dans les réserves constituées pour les travailleurs salariés afin de financer les pensions civiles et militaires de l'État. Quant aux professions libérales et aux exploitants agricoles, ils ont fait le choix d'un système indépendant de retraite, fondé sur une gestion propre qui correspond à leurs besoins. L'argent du fonds de réserve des retraites doit rester destiné aux seules personnes affiliées au régime général et aux régimes alignés.
Ma seconde proposition consiste à revoir le calcul de l'assiette des revenus de référence, non pas pour revenir sur les vingt-cinq meilleures années, mais pour faire en sorte que le revenu de référence ne soit pas raboté artificiellement par des modalités comptables.
Ainsi, pourquoi, depuis une circulaire de 1973 du directeur de la CNAV – dont je conteste la légalité qui changeait peu la donne quand on appliquait la règle des 10 meilleures années –, les revenus de l'année de départ en retraite ne peuvent-ils pas être pris en compte dans le calcul des 25 meilleures années ? Les Français nés en fin d'année sont les grands perdants.
Par ailleurs, il faut anticiper l'arrivée à l'âge de la retraite des Français ayant connu une carrière professionnelle discontinue faite de stages, de petits boulots, de chômage, de formations professionnelles financées par les Assedic, de congés de longue maladie, etc. : quand bien même ils auraient pu trouver, par leurs efforts, une stabilité professionnelle à quarante ans, leur revenu de référence les conduira au minimum vieillesse ou tout proche. Les règles de l'assurance vieillesse ont été conçues pour des travailleurs ayant une carrière certes multiple – je rappellerai qu'aujourd'hui, sans doute, plus de la moitié des travailleurs seront des polypensionnés –, mais relativement rectiligne avec quelques périodes de chômage. Il faut réfléchir à leur application à la nouvelle génération de salariés n'ayant connu que la crise économique.
En dernier lieu, on a réglé le problème des polypensionnés en 2003, mais les règles de l'assurance vieillesse ne prennent toujours pas en compte la situation des travailleurs alternant périodes de travail en France et périodes de travail à l'étranger. La Commission européenne a décidé d'instruire pour discrimination et obstacle à la libre circulation une plainte des travailleurs frontaliers français qu'elle a jugée fondée. Il faut parvenir à transposer à ces travailleurs le régime des polypensionnés. Je souhaiterais, madame, messieurs les ministres, que vous donniez des instructions pour étudier cette question pour la préparation du rendez-vous de 2008.
Je pense que la confiance des Français dans leur système des retraites peut revenir grâce à la mise en oeuvre du droit à l'information sur la retraite voté en 2003.
Pour cette raison, j'en ai fait mon thème d'étude de cette année.
Les premiers résultats de la mise en oeuvre du droit à l'information répondent aux demandes du législateur et aux attentes des assurés.
, rapporteur pour l'assurance vieillesse. Je termine.
L'information en France sur le droit à la retraite des salariés est excellente. Et le GIP Info retraite est parfait.
Je me suis récemment rendu en Allemagne pour une mission, dont vous trouverez les conclusions dans mon rapport sur l'assurance vieillesse. L'excellent travail réalisé en France concernant le droit à l'information sur la retraite pourra être enrichi par l'approche allemande : l'assuré dispose en Allemagne, dès l'âge de vingt-sept ans, puis chaque année, d'une estimation minimale de ses droits à pension de retraite.
La parole est à M. Hervé Féron, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille.
, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille. Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la branche famille est le parent pauvre du projet loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, et nombreux sont ceux qui s'interrogent sur la politique familiale du Gouvernement.
Les questions familiales ne figurent certainement pas parmi vos priorités, monsieur le ministre.
Ça commence bien : des contrevérités !
, rapporteur pour la famille. D'ailleurs, votre portefeuille ministériel est tellement large qu'il comprend aussi la famille, mais comme un problème social parmi d'autres !
Les aides publiques en faveur des familles atteignent un montant important, évalué par la Cour des comptes à 69 milliards d'euros ; cependant il ne semble pas exister de stratégie claire en matière de politique familiale.
Il semble donc urgent d'adopter une nouvelle démarche, plus prospective, et d'avoir une vision pluriannuelle pour décider des mesures adaptées. Les enjeux démographiques nécessitent une politique qui tienne compte de facteurs de long terme, d'autant que les résultats d'une politique familiale sont lents à porter leurs fruits car il s'agit d'infléchir des modèles culturels profondément ancrés, comme inciter les pères à réduire leur activité professionnelle lors de la naissance d'un enfant.
La création d'un conseil d'orientation de la politique familiale, permettant d'avoir une vision prospective, semble donc s'imposer.
Cette réflexion doit s'entendre de manière extensive : il s'agit de définir les instruments de politique publique qui permettent de soutenir les familles, sans se limiter aux compétences de la branche famille de la sécurité sociale.
Je souhaiterais que cette instance de proposition permette d'associer les partenaires sociaux, des parlementaires, mais aussi les associations familiales et les grands mouvements associatifs qui, du fait de leur connaissance des mouvements qui traversent le corps social, peuvent avoir leur mot à dire sur les attentes des familles.
Qu'en sera-t-il de la conférence de la famille pour 2007 ? J'aimerais souligner que, même si la conférence de la famille disparaît au profit d'une instance de réflexion permanente, il serait souhaitable qu'une fois par an l'ensemble des acteurs de la politique familiale puissent se réunir autour du Premier ministre pour faire le point sur les projets du Gouvernement concernant les familles. Il s'agit d'un rendez-vous symbolique, qui doit permettre à la politique familiale de gagner en lisibilité et d'affirmer son caractère interministériel.
Dès sa création, cette instance permanente devra se prononcer sur plusieurs sujets qui conditionnent l'avenir de la politique familiale française. En effet, au fil du temps, de nombreuses aides ont été offertes aux familles, mais certaines ont des logiques contradictoires. Il est donc temps, aujourd'hui, de remettre à plat les différents mécanismes de la politique familiale pour se demander s'ils permettent une réelle compensation du coût de l'enfant et s'il est cohérent que plusieurs logiques de compensation se superposent.
Par ailleurs, le système français se caractérise structurellement par un niveau de compensation du coût de l'enfant croissant avec la taille de la famille : les allocations familiales ne sont versées qu'à compter du deuxième enfant et sont majorées à compter du troisième enfant ; un complément familial est versé sous conditions de ressources aux familles d'au moins trois enfants ; une demi-part supplémentaire de quotient familial est attribuée à compter du troisième enfant.
La politique familiale française reste marquée par l'inspiration nataliste originelle et par le traitement préférentiel réservé au troisième enfant depuis la fin des années 1970. Le coût du premier enfant – à un degré moindre, celui du deuxième – est peu compensé, sauf lorsque l'enfant a moins de trois ans, alors même que les familles d'un ou deux enfants sont devenues les plus fréquentes. Là encore, est-il toujours pertinent de maintenir ce ciblage sur le troisième enfant ? Ne faut-il pas réfléchir à la meilleure manière d'inciter les couples à créer une famille et porter de nouveaux efforts sur l'accueil du premier enfant ?
Je ne résiste pas à la tentation de citer les propos de M. Sarkozy qui déclarait pendant la campagne présidentielle, lors d'un déplacement à Maisons-Alfort le 2 février 2007 : « Je souhaite qu'une allocation familiale soit versée dès le premier enfant parce que le premier enfant représente une charge très lourde pour les jeunes couples qui sont au début de leur carrière professionnelle, qui souvent enchaînent les petits boulots et sont confrontés à la précarité. » Ces propos ont le mérite de poser la question de l'incitation des jeunes couples à constituer une famille.
La politique familiale devrait aussi mieux prendre en compte une réalité sociologique lourde de conséquences pour le budget des familles : l'allongement de la durée des études et le poids financier représenté par les adolescents et les jeunes adultes qui restent à la charge de leurs parents beaucoup plus longtemps que par le passé. Dans ce domaine, notre politique familiale n'est pas du tout adaptée. Ne faut-il pas, aujourd'hui, réfléchir aux moyens d'autonomie nécessaires aux jeunes adultes ?
Après avoir clarifié les objectifs de la politique familiale, le conseil d'orientation de la politique familiale devra aussi s'interroger sur les moyens financiers alloués à cette politique. La Cour des comptes, dans son rapport de septembre 2007, estime que la branche famille pourrait revenir à l'équilibre en 2008 et dégager des excédents importants d'ici à 2010.
Dans ce contexte, les arbitrages relatifs à l'évolution des dépenses de la branche famille mériteraient d'être explicités par le conseil d'orientation. Ces arbitrages ne portent pas seulement sur l'évolution relative des différentes prestations de la branche, mais aussi, en amont, sur l'affectation des marges financières dégagées par la branche : est-il légitime que la branche famille assume la charge de dépenses nouvelles, dont certaines peuvent être considérées comme relevant de la politique familiale dans un sens plus large ?
J'aimerais maintenant vous interroger, monsieur le ministre, sur vos projets quant à l'amélioration de l'offre de garde pour les familles.
Depuis quelques mois, l'idée de créer un droit opposable à la garde d'enfant ou un service public de la petite enfance est fréquemment évoquée ; mais si chacun s'accorde à dire qu'il faut améliorer l'offre quantitative de places de garde pour les jeunes enfants, une question reste taboue : quelles doivent être les responsabilités respectives de l'État, de la branche famille et des collectivités locales pour l'organisation et le financement des modes de garde ?
J'attends vos propositions !
, rapporteur pour la famille. N'est-il pas paradoxal d'annoncer que le droit opposable à la garde d'enfant devra être opérationnel d'ici à la fin de la législature alors que, dans le même temps, nombre de communes rencontrent des difficultés pour financer leurs crèches en raison d'un désengagement de la Caisse nationale d'allocations familiales ?
, rapporteur pour la famille. Comment pensez-vous préparer la mise en place de cette réforme de grande ampleur ? Avant de vouloir franchir une nouvelle étape, vous devez être conscient des difficultés actuelles des communes, qui doivent trouver de nouveaux moyens pour financer leurs crèches et leurs centres de loisirs suite à la réforme intervenue en 2006 pour l'emploi des crédits d'action sociale des CAF.
Le nouveau dispositif contractuel de la branche famille intitulé « contrat enfance jeunesse », qui fusionne les dispositifs préexistants du contrat enfance et du contrat temps libre, prévoit un taux de participation unique de 55 %, en forte baisse par rapport aux contrats précédents : la fourchette était de 55 à 70 % du montant des dépenses.
La CNAF a décidé de recentrer sa politique d'action sociale sur les territoires sous-dotés en équipements et, pour cela, elle a demandé aux caisses d'allocations familiales de hiérarchiser les communes pour établir un ordre de priorité en faveur de celles qui sont dépourvues d'équipements.
J'aimerais savoir, monsieur le ministre, si les CAF ont pu aménager les critères de sélectivité proposés par la CNAF pour tenir compte de certaines réalités locales.
Ce désengagement de la branche famille est préjudiciable aux collectivités locales, déjà fortement pénalisées par d'autres transferts de charges du fait de l'État. Les difficultés des collectivités locales pour faire face à ces nouvelles règles de financement ont d'ailleurs conduit la CNAF à mettre en place un fonds doté de 20 millions d'euros, destiné à faciliter la mise en oeuvre du contrat enfance et jeunesse par des mesures ponctuelles d'accompagnement : le fonds national d'accompagnement des contrats enfance et jeunesse, le FACEJ.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous présenter un bilan de l'utilisation des crédits du FACEJ ? L'existence même de ce fonds ne démontre-t-elle pas la nécessité de revoir les critères trop rigoureux du contrat enfance jeunesse ?
Abordons maintenant les articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Les articles relatifs à la famille dans ce PLFSS s'apparentent un peu à la signature d'un chèque en blanc : les parlementaires sont invités à se prononcer sur des principes sur lesquels un large consensus peut se dégager, mais sans qu'il soit possible de savoir comment ces principes seront mis en oeuvre.
Tel est le cas de l'article 59 relatif à la modulation selon l'âge de l'enfant de l'allocation de rentrée scolaire. Tenir compte du surcoût représenté par la scolarité des adolescents est tout à fait pertinent,…
Voilà ! On y vient !
, rapporteur pour la famille. …mais je ne peux accepter l'idée que cette réforme se traduise par une réduction du montant de la prestation pour les jeunes enfants afin de compenser la majoration de l'allocation pour les adolescents.
J'ai été clair en commission, et vous le savez ! Citez les propos que j'ai tenus en commission !
, rapporteur pour la famille. J'aimerais donc que M. le ministre puisse nous indiquer clairement si cette réforme se fera à enveloppe fermée.
Quant à l'extension de la prestation de compensation aux enfants handicapés ouvrant droit au complément de l'allocation d'éducation pour l'enfant handicapé, l'AEEH, je m'interroge sur les raisons qui ont conduit le Gouvernement à restreindre cette possibilité aux seuls enfants percevant un complément d'AEEH, et je me demande si les maisons départementales des personnes handicapées seront en mesure de traiter ces dossiers dans des délais raisonnables, alors qu'elles ont déjà beaucoup de difficultés, faute de moyens suffisants, pour l'instruction des dossiers relatifs à la prestation de compensation présentés par les personnes handicapées adultes.
Je déplore enfin que, pour l'année 2008, le projet de loi de financement de la sécurité sociale se traduise non pas par des moyens accrus offerts aux familles, mais par une économie de la branche de l'ordre de 130 millions d'euros : 80 millions au titre de la suppression de la première majoration pour âge des allocations familiales et 50 millions en raison de l'option pour la prestation de compensation du handicap, qui sera prise en charge par la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
Monsieur le ministre, comment seront utilisées les marges financières ainsi dégagées ?
Ne serait-il pas possible d'utiliser une partie des économies de la branche pour procéder à une revalorisation de l'ARS, ce qui permettrait d'éviter de réduire le montant de l'allocation pour les jeunes enfants et d'adopter une mesure concrète de lutte contre la pauvreté, puisque cette prestation est sous conditions de ressources ?
Lors du conseil des ministres du 17 octobre dernier, M. Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a présenté une communication sur l'engagement national contre la pauvreté.
Il est temps d'agir, car la France ne peut accepter d'avoir deux millions d'enfants pauvres. En effet, selon les résultats d'une étude du CERC sur les enfants pauvres et si l'on se réfère au critère européen du seuil de pauvreté évalué à 60 % du revenu médian, 18 % des enfants, soit près de deux millions de personnes, vivent dans la précarité économique.
Les années précédentes ont été riches de promesses, mais rien de concret n'a été fait pour les familles vulnérables.
Faut-il vous rappeler qu'en 2005 le Gouvernement s'était engagé à faire de la question des enfants pauvres sa priorité ? La conférence de la famille devait annoncer des mesures propres à améliorer la situation des familles vulnérables mais le sujet fut déprogrammé au dernier moment.
En 2006, la pauvreté des enfants devait être à l'ordre du jour de la conférence contre l'exclusion et le Premier ministre déclarait le 6 avril 2006 que la nation devait pouvoir afficher et atteindre des objectifs ambitieux de réduction de la pauvreté, à parti d'indicateurs précis portant notamment sur la pauvreté des enfants, mais aucune mesure significative n'a été adoptée.
J'aimerais donc savoir quelles seront vos initiatives pour lutter contre la pauvreté des enfants.
Je voudrais aussi vous interroger sur l'état d'avancement des textes d'application de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection de l'enfance.
Qu'en est-il de la contribution de la branche famille au fonds de financement de la protection de l'enfance, dont l'objet est de compenser les dépenses nouvelles mises à la charge des départements ?
Lors de votre audition par la commission des affaires sociales, vous m'avez indiqué que cette contribution serait de 30 millions pour 2007, mais qu'en sera-t-il pour 2008 ? Quelle sera la contribution de l'État qui doit être fixée dans le cadre du projet de loi de finances ?
Le droit de la sécurité sociale n'a pas pris en compte certaines évolutions sociologiques. J'en veux pour preuve ses incohérences actuelles dans la prise en compte des familles homoparentales. La HALDE vient récemment d'attirer l'attention du Premier ministre sur cette question.
Je regrette de n'avoir pu faire voter en commission un amendement visant à remplacer le congé de paternité par le congé d'accueil à l'enfant afin que la compagne d'une mère homosexuelle puisse en bénéficier.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est dommage !
Je voudrais dire enfin quelques mots sur les aides à la parentalité,
J'ai cherché à faire un bilan des aides existantes et j'ai constaté que si d'excellentes initiatives avaient été prises localement, il n'existait pas de politique publique de soutien à la fonction parentale. Le dispositif des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents, les REAAP, est globalement positif mais gagnerait à être mieux piloté au niveau national. J'émets le voeu que la délégation interministérielle à la famille joue vraiment son rôle d'impulsion politique et acquière une réelle dimension interministérielle.
Deux autres aspects devraient être améliorés : il faudrait trouver les moyens de pérenniser les financements des associations qui proposent des aides à la parentalité et réfléchir à la manière de toucher les familles les plus vulnérables qui, jusqu'à présent, bénéficient peu des aides à la parentalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Monsieur le président, mesdames, messieurs, le débat s'annonce long, près de 600 amendements ont été déposés. Comme les rapporteurs, je souhaite que l'on aborde la discussion sur ce budget de 540 milliards d'euros avec un sentiment de responsabilité et de solidarité.
L'État-providence français est l'un des plus développés d'Europe. Nous sommes au deuxième rang pour le montant de la dépense, précédés seulement par la Suède, avec vingt-quatre prestations entre la naissance et la mort. Selon le rapport Delors, ceux qui forment le dernier quintile de revenus, c'est-à-dire les 20 % des Français les moins aisés, voient leurs revenus améliorés de 56 % grâce aux prestations.
Nous devons donc être fiers de notre État-providence, mais, en même temps, prendre conscience que nous sommes dans un monde ouvert et qu'il y a un lien direct entre l'emploi et les cotisations sociales qui pèsent sur l'emploi. On l'a suffisamment rappelé cet été.
Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Nous ne sommes pas d'accord !
Il y a aussi un lien direct entre le pouvoir d'achat du salaire direct et le salaire indirect. Dans le rapport de Jacques Delors de 2007, il est dit très clairement qu'au cours de ces dix dernières années, si le pouvoir d'achat a été augmenté, c'est plus par le salaire indirect que par le salaire direct.
Nous devons avoir le sens des responsabilités, et il y a deux dossiers que nous aimerions aborder.
Le premier, c'est la barémisation des allégements de cotisations sociales. Il n'y a aucune lisibilité aujourd'hui, pour les entreprises comme pour les salariés. Je rappelle qu'au niveau du SMIC, les cotisations patronales se situent à un niveau de 20 % pour une moyenne européenne de 32 %.
Le second, c'est l'introduction dans la fiche de paie de la prime pour l'emploi, à laquelle beaucoup d'entre nous sont attachés. C'est un impôt négatif, qui permet de concilier compétitivité et amélioration du pouvoir d'achat.
Nous avons le devoir d'améliorer la performance du secteur social. Il y a eu des progrès au cours des cinq dernières années, ne serait-ce que dans le rythme d'augmentation des dépenses. Nous sommes passés de 5,4 % à 4,4 puis 3,6 %. C'est un effort important. Il ne faudrait pas l'oublier même si nous n'avons fait qu'une partie du chemin.
Des outils ont été mis en place, qui ont apporté leur contribution, que ce soit le Haut conseil de l'assurance maladie, la Haute autorité de santé ou le parcours de santé. Il est bon de rappeler ces éléments pour ne pas perdre espoir.
Nous avons entendu le Gouvernement sur la mise en réserve des 7 milliards d'euros. Mieux vaudrait hiérarchiser les priorités plutôt que d'en avoir trop, pour ne pas nous retrouver en fin d'année avec des annulations de crédits dans certains secteurs.
Après la responsabilité, la solidarité.
La franchise, qui sera critiquée, porte tout de même sur des dérives pour lesquelles chacun a une part de responsabilité, qu'il s'agisse des transports ou des médicaments. Par ailleurs, 15 millions de personnes en seront exonérées. Inutile donc de caricaturer.
Nous avons décidé de porter les recettes de stock-options à 400 millions d'euros.
Il s'est peut-être trompé. (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous sommes dans un monde ouvert. Si l'on prévoit 3 milliards, je puis vous assurer qu'il n'y aura plus beaucoup de sièges sociaux en France.
Lorsque nous avons examiné ce dossier, c'est avec le souhait de faire participer le plus possible ceux qui peuvent payer, sans faire partir nos sièges sociaux, parce que, je le rappelle, nous sommes dans un monde ouvert. C'est trop facile de lancer des slogans !
S'agissant de la solidarité régionale en faveur des zones rurales, madame la ministre, deux réponses ont trop tardé : le financement des maisons médicales de santé, qui est vraiment la réponse positive et non pas négative à l'installation des médecins en zone rurale ou en périphérie de banlieue, et le financement des maisons de garde, qu'on a du mal à pérenniser. Je suis sûr que ce sont des mesures de solidarité.
Pour l'avenir, nous sommes prêts à travailler sur de nombreux dossiers. Sur les agences régionales de santé, nous partageons totalement votre avis. On ne peut plus différencier les dépenses de l'hôpital, les dépenses médico-sociales ou les dépenses de soins de ville. Elles s'interpénètrent, dans l'intérêt des patients. Il y a aussi l'ALD, le dossier médical personnel. Ce sont des éléments sur lesquels il faut jouer.
J'ai voté tout à l'heure le texte sur l'immigration, ce qui n'était pas au point de départ ma position, en raison de l'adoption de l'amendement d'un de nos collègues parlementaires soutenu par le Gouvernement, qui permet à des salariés d'origine étrangère travaillant depuis plusieurs années en France dans des secteurs en tension d'être agréés et reconnus. Je pense qu'une telle mesure permettra d'obtenir des recettes supplémentaires pour le financement de la sécurité sociale.
Comme d'autres l'ont souligné, il faut aborder ces questions avec plus d'espoir que de crainte. Je le dis d'autant plus que ce n'était pas ma responsabilité première. Je vous conseille de lire trois rapports, celui du Haut conseil de l'assurance maladie, qui montre vraiment qu'il y a des solutions d'avenir, celui de la Haute autorité de santé, qui montre les progrès possibles dans la gestion de la santé, et celui du Conseil d'orientation des retraites.
Si nous travaillons avec le sens de la responsabilité et de la solidarité, il y a, pour ce chantier énorme de 540 milliards d'euros, beaucoup d'espoir pour l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale est un bon projet, dont nous n'avons pas souhaité modifier l'équilibre, car il contient des évolutions structurelles qui préparent les réformes à venir.
La commission des finances approuve par ailleurs le calendrier que le Gouvernement s'est fixé, et entend être présente aux grands rendez-vous de 2008, qu'il s'agisse du rendez-vous prévu dans la loi de 2003 portant réforme des retraites (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), …
…du cadre à donner à la prise en charge de la dépendance ou, plus largement, de l'adaptation du financement de la protection sociale aux besoins inéluctables du système.
Concernant l'équilibre du projet, vous le reconnaissez vous-mêmes, mesdames, messieurs les ministres, et la commission des comptes de la sécurité sociale ou la Cour des comptes le disent et le dissèquent dans leurs rapports respectifs, la situation financière des régimes de base de la sécurité sociale n'est pas bonne, et au premier chef le régime général, en particulier pour les branches maladie et vieillesse.
À partir de ce constat, vous avez pris, dès le début de l'été, et vous présentez dans le projet de loi de financement qui nous est soumis des mesures de redressement qui permettent de faire passer le solde tendanciel négatif du régime général de 14 milliards d'euros à 8,9 milliards d'euros en 2008, et il faut, je crois, le souligner.
Pour y parvenir, vous mobilisez à la fois le plan d'économies de juillet pour l'assurance maladie, d'autres mesures d'économie dans le PLFSS, parmi lesquelles les franchises médicales et un renforcement de la lutte contre la fraude, ainsi que 2 milliards d'euros de recettes nouvelles, dont certaines sont contenues dans le projet de loi de finances pour 2008, et que le collectif de fin d'année devrait venir compléter pour l'exercice 2007 en cours.
Parce qu'elle examine, au fond ou pour avis, la totalité de ces textes financiers, la commission des finances peut embrasser du regard l'équilibre que vous lui présentez pour nos finances publiques. À cet égard, la nomination d'un ministre des comptes publics est un réel signe de progrès, avec dès à présent des évolutions très favorables qui, je l'espère, porteront d'autres fruits dans un avenir proche.
Les fruits d'aujourd'hui, c'est surtout le règlement, particulièrement bienvenu, de l'une des querelles de clocher les mieux ancrées dans notre tradition politico-administrative, entre les « financiers » et les « sociaux ». L'apurement de la dette de l'État à l'égard du régime général, pour près de 5,1 milliards d'euros, au terme d'une opération réalisée il y a quelques jours, est un geste très important, qu'il faut souligner.
Certes, les dettes prévisibles de 2007 et 2008 demeurent, pour, respectivement, 700 et 400 millions d'euros environ,…
…mais de très gros efforts sont accomplis pour empêcher une reconstitution de la dette dans les proportions que nous avons connues par le passé. L'État ajustera ses compensations en fonction des pertes de recettes de la sécurité sociale, partagera les recettes fiscales de façon plus nette et plus cohérente, et remettra à niveau les crédits budgétaires qui financent les prestations sociales.
Ce seront autant de frais financiers en moins à la charge de l'ACOSS. Ainsi, l'apurement de la dette lui permettra d'économiser 200 millions d'euros en 2008. Il permet déjà en 2007 de ne pas dépasser le plafond d'emprunt fixé à 28 milliards d'euros pour le régime général.
Ce sujet continuera cependant de retenir toute l'attention de la commission des finances : avec un plafond d'emprunt porté à 36 milliards d'euros pour l'an prochain, le financement via la convention liant l'ACOSS et la Caisse des dépôts atteindra vraisemblablement ses limites dans le cadre actuel, d'autant que l'émission de billets de trésorerie par l'ACOSS, méthode utilisée depuis bientôt un an avec succès, ne présente pas les mêmes garanties de sécurité qu'un amortissement à long terme, à l'abri des fluctuations immédiates du marché.
À cet égard, je me suis intéressée à l'impact, à ce stade, de la crise financière survenue cet été, crise des subprimes, sur la gestion de la trésorerie de la sécurité sociale, et j'ai constaté que l'efficacité des diverses mesures prises en a limité le coût à quelque 300 000 euros, en dépit des décalages de taux. Mais je m'interroge sur le pilotage de ce que je nomme, par analogie, le « risque financier » ou « sixième risque » de la sécurité sociale, qui appelle de notre part la plus grande vigilance. À n'en pas douter, il nous faudra rapidement nous poser la question de la meilleure façon – je veux dire, mes chers collègues, de la façon la plus soutenable – de gérer la dette du régime général : soit au sein de la CADES, avec toutes les implications d'un tel transfert supplémentaire, soit en trésorerie, avec les tensions ponctuelles de gestion qui peuvent en résulter.
Au demeurant il nous faut rester mesurés. En effet, la couverture des dépenses par les recettes de la sécurité sociale avoisine toujours 96 %, comme en témoigne le programme de qualité et d'efficience relatif au financement, annexé au projet de loi. On se prend parfois à penser que l'État ne peut pas en dire autant !
Ces « PQE » sont l'une des avancées permises par la loi organique du 2 août 2005, et le signe qu'un pilotage par la performance de la sécurité sociale, entamé avec les conventions d'objectifs et de gestion bien avant que le budget de l'État ne se mette au régime de la LOLF, est possible.
Les fruits d'une réelle vision consolidée entre finances de l'État et finances sociales sont donc déjà notables. Quant aux récoltes de demain, elles passent par un pilotage financier plus ambitieux encore, et par des mesures connexes, comme le rapprochement, prôné notamment par le président de notre commission, entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il existe des arguments pour et contre une telle évolution ; il nous faudra les évoquer en détail lorsque nous examinerons les moyens d'assurer le financement pérenne et durablement équilibré de notre système de protection sociale.
C'est dans cette logique que j'ai souhaité placer ma réflexion en tant que rapporteure pour avis au nom de la commission des finances. C'est pour ces raisons que la commission n'a pas souhaité reprendre certains amendements : les amendements démagogiques, tels ceux qui proposaient la suppression des mesures destinées à décourager les préretraites et les retraites anticipées ; les amendements incohérents, tels ceux qui réclamaient le maintien de certaines exonérations de cotisations, tout en contestant par ailleurs le principe même de ces exonérations ; les amendements inopérants, tels ceux qui entendaient récrire le principe de compensation de ces exonérations figurant dans le code de la sécurité sociale. Ces amendements n'étaient pas d'une parfaite bonne foi quand ils faisaient mine de s'effaroucher du relèvement du taux K relatif à la clause de sauvegarde concernant l'industrie pharmaceutique, alors que l'audition des ministres venus présenter le PLFSS avait permis de montrer que cette progression était minime par rapport aux demandes des entreprises.
En revanche, certains amendements, qui exprimaient des conceptions opposées aux nôtres, étaient politiquement compréhensibles, tels ceux qui contestent les franchises médicales ou souhaitent taxer les plus-values de cession de stock options ou d'actions gratuites.
À cet égard, je veux dire, à titre personnel, mon soutien à l'amendement pertinent et équilibré de notre collègue Yves Bur, adopté par la commission des affaires sociales, qui crée une contribution patronale et une contribution salariale sur les stock-options et les attributions gratuites d'actions.
Cela donnera évidemment lieu à débat, mais je veux dire d'ores et déjà que c'est la solution qui me paraît la plus juste.
La commission des finances a adopté à mon initiative deux des amendements déposés par le groupe socialiste, républicain et citoyen, dont j'estime qu'ils sont bien dans l'esprit du projet : l'un renforce l'obligation d'information relative aux dépassements d'honoraires figurant à l'article 28 ; l'autre encourage plus vigoureusement les études post-autorisation de mise sur le marché, post-AMM, pour les médicaments.
Pour terminer, je voudrais souligner que ce projet traduit le souci de proposer des solutions structurelles de redressement des comptes : c'est le cas notamment des mesures relatives à l'emploi des seniors, à la répartition géographique des professionnels de santé, ou de celle qui expérimente de nouveaux modes de rémunération des médecins, ou bien encore de la responsabilisation par des franchises ciblées sur les postes de dépenses qui le justifient le plus. Ces choix fondateurs sont le signe tangible d'une démarche de réflexion et de réforme, ambitieuse, volontariste et courageuse.
Cette démarche est également portée par le souci de lutter contre les fraudes, qui apparaissent comme une forme de risque endogène à notre système de protection sociale, puisqu'elles consistent en un détournement de ce système, et sont la conséquence même de la déresponsabilisation de l'ensemble de ses acteurs. C'est pourquoi je me réjouis des dispositions de ce projet de loi qui permettent un renforcement du contrôle, que ce soit sur les indemnités journalières pour cause d'accident du travail ou à travers l'expérimentation de la coordination entre le praticien conseil et le médecin de l'entreprise.
Enfin, cette démarche de réforme est animée par le souci de l'équité, avec une volonté claire de répartir également entre l'ensemble des acteurs les efforts nécessaires à un redressement de la situation financière de notre protection sociale. En effet, si une véritable responsabilisation des assurés est recherchée à travers la mise en place de nouvelles franchises médicales, c'est également un objectif de responsabilité qui inspire la volonté de conditionner les revalorisations tarifaires des professionnels de santé par le non-dépassement excessif de l'objectif des dépenses d'assurance maladie.
Enfin, la demande faite aux entreprises du médicament de consentir un effort substantiel est maintenue. C'est bien une participation équitable de l'ensemble des acteurs qui est requise pour sortir notre système de santé de l'ornière. Ce projet de loi de financement en donne éminemment le gage.
En conclusion, la commission des finances apprécie à sa juste valeur ce texte de refondation et de préparation des réformes à venir, et ne peut que vous encourager, mes chers collègues, à adopter ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq, troisième séance publique :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, no 284 :
Rapport, n° 295, de MM. Yves Bur, Jean-Pierre Door, Denis Jacquat et Hervé Féron, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales :
Tome I de M. Yves Bur : Recettes et équilibre général
Tome II de M. Jean-Pierre Door : Assurance maladie et accidents du travail
Tome III de M. Hervé Féron : Famille
Tome IV de M. Denis Jacquat : Assurance vieillesse
Tome V de MM. Yves Bur, Jean-Pierre Door, Denis Jacquat et Hervé Féron : Tableau comparatif et amendements non adoptés par la commission.
Avis, no 303, de Mme Marie-Anne Montchamp, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton