La séance est ouverte à 10 heures.
Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président.
La Commission examine, sur le rapporte de M. Étienne Blanc, la proposition de loi, adoptée par le Sénat, sur les sondages visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral (n° 3163).
Faisant suite au rapport d'information Sondages et démocratie rédigé par un groupe de travail ad hoc au nom de la Commission des lois du Sénat, la présente proposition de loi, déposée au mois d'octobre 2010, résulte d'une réflexion sur l'opportunité d'une adaptation de la loi du 19 juillet 1977, qui définit, aujourd'hui encore, le cadre juridique pour la réalisation des sondages d'opinion – même si des modifications ont été apportées, essentiellement par la loi du 19 février 2002.
Cette loi s'applique à tout sondage publié ou diffusé « ayant un rapport direct ou indirect avec un référendum, une élection présidentielle ou l'une des élections réglementées par le code électoral ainsi qu'avec l'élection des représentants au Parlement européen ». Dans sa jurisprudence, la commission des sondages a retenu une conception extensive de ce champ d'application pour les périodes précédant les élections, plus restrictive au lendemain de celles-ci.
La loi de 1977 impose plusieurs obligations à l'organisme ayant réalisé un sondage. Avant la publication ou la diffusion de celui-ci, il doit déposer auprès de la commission des sondages un document, appelé communément « notice méthodologique », donnant un certain nombre d'informations sur la manière dont a été réalisé le sondage. Il doit en outre tenir à la disposition de la commission les documents sur la base desquels le sondage a été publié ou diffusé. L'organisme qui publie ou diffuse le sondage doit, quant à lui, faire état de plusieurs mentions légales, établies sous la responsabilité de l'organisme ayant réalisé le sondage.
La loi de 1977 a également institué la commission des sondages, organisme chargé d'étudier et de proposer des règles tendant à assurer l'objectivité et la qualité des sondages publiés ou diffusés. Elle est composée de neuf hauts magistrats et, depuis la loi du 19 février 2002, de deux personnalités qualifiées. La commission peut imposer la publication de mises au point aux organes d'information qui auraient publié ou diffusé des sondages en violation des dispositions légales.
Enfin, la loi de 1977 prévoit des dispositions spéciales applicables en période électorale ; elle interdit, notamment, la publication et la diffusion de tout sondage la veille et le jour du scrutin.
Plus de trente ans après la première loi sur les sondages, certaines évolutions conduisent à s'interroger sur l'opportunité de procéder à une modification du cadre juridique en vigueur.
Depuis la réalisation des premiers sondages d'opinion, dans les années 1930, cette pratique n'a cessé de se développer ; en France, le nombre des sondages publiés a doublé entre 1980 et 2000. Surtout, sous l'effet de l'internationalisation de l'information et de l'essor des nouvelles technologies, les sondages ont changé de nature. On note ainsi une multiplication des enquêtes « en ligne », dont les méthodes d'élaboration divergent parfois de celles utilisées d'ordinaire ; certains sondages, réalisés dans d'autres pays, sont relayés par les médias français ; plus généralement, Internet joue un rôle croissant dans l'information des citoyens.
On observe par ailleurs une exigence de transparence accrue, ce qui témoigne d'une attention nouvelle portée aux conditions de réalisation des sondages.
Enfin, se pose la question d'une éventuelle modernisation des instances de régulation des politiques publiques, notamment de la commission des sondages.
Pour faire face à ces enjeux, il existait d'autres solutions que l'intervention législative. Plusieurs pays ont ainsi choisi d'encadrer la pratique des sondages par des mécanismes d'autorégulation.
En Grande-Bretagne, les principaux instituts de sondage ont créé, en 2004, le British Polling Council (BPC). Cet organisme, dont les instances regroupent des représentants des instituts de sondage, des journalistes et des universitaires, est chargé de définir les règles de bonne pratique et d'instruire d'éventuelles plaintes.
En Allemagne, le syndicat professionnel des études de marché a élaboré une directive sur la publication des sondages d'opinion ; les éventuels litiges relèvent du processus disciplinaire conçu pour traiter les plaintes concernant l'ensemble des études de marché.
Aux États-Unis, un organisme spécifique, le National Council on Public Polls (NCPP), créé en 1969 par 17 instituts de sondage, définit les règles de bonne pratique en matière de publication des sondages d'opinion et exerce un pouvoir disciplinaire.
Aux Pays-Bas, des règles de bonne conduite ont été élaborées par le syndicat professionnel des études de marché et d'opinion.
Au Canada, la loi électorale se contente de préciser la liste des informations techniques devant être publiées par les médias.
En Suisse, le Conseil fédéral a renoncé en novembre 2010 à élaborer un cadre légal visant à réglementer la publication des sondages d'opinion, jugeant que cela était contraire aux principes de la liberté d'opinion et de la liberté de la presse.
Si force est de constater que de tels dispositifs d'autorégulation sont étroitement liés à l'existence de traditions juridiques particulières, ces exemples montrent qu'il n'est pas toujours nécessaire de recourir à une loi pour encadrer l'ensemble des pratiques en matière de sondages – d'autant plus que l'on dispose déjà, en France, de la jurisprudence de la commission des sondages.
La présente proposition de loi vise trois objectifs principaux.
Il s'agit en premier lieu de rendre plus sincères et transparents les sondages à caractère politique ou électoral. Alors que la loi du 19 juillet 1977 ne donnait pas de définition du sondage, le nouveau texte le caractérise comme « une enquête statistique visant à donner une indication quantitative, à une date déterminée, des opinions, souhaits, attitudes ou comportements d'une population par l'interrogation d'un échantillon représentatif de celle-ci, qu'il soit constitué selon la méthode des quotas ou selon la méthode aléatoire ». Il étend par ailleurs le champ d'application de la loi à l'ensemble des sondages politiques, au-delà de ceux ayant un rapport direct ou indirect avec un scrutin, et interdit aux personnes interrogées de recevoir une gratification, de quelque nature que ce soit. Parmi les indications qui devront accompagner la première publication ou la première diffusion d'un sondage figureront désormais « le nom et la qualité du commanditaire du sondage ou de la partie du sondage, ainsi que ceux de l'acheteur s'il est différent », de manière à avoir une meilleure connaissance de tous les maillons de la chaîne du sondage. Les marges d'erreur devront également être indiquées, le cas échéant par référence à la méthode aléatoire.
Par ailleurs, la proposition de loi prévoit que la notice méthodologique accompagnant le sondage sera systématiquement mise en ligne par la commission des sondages, et qu'elle mentionnera les critères précis de redressement des résultats bruts.
Le deuxième objectif est de renforcer la cohérence du dispositif. À cet effet, le texte prévoit que les hypothèses testées dans un sondage relatif au second tour d'une élection, publié ou diffusé avant le premier tour, devront tenir compte des données qui résultent d'un sondage de premier tour, obligatoirement publié ou diffusé en même temps. Il tend par ailleurs à clarifier le dispositif pénal existant et à en étendre la portée.
Afin de renforcer la légitimité et l'efficacité de la commission des sondages, la proposition de loi érige celle-ci en « autorité administrative indépendante » et en modifie la composition : la part des personnalités qualifiées augmente, les mandats ne sont plus renouvelables et le régime des incompatibilités est renforcé. En outre, la commission reçoit la compétence de présenter, dans le mois précédant un scrutin, des observations relatives à la méthodologie d'élaboration d'un sondage, qui devront accompagner la publication ou la diffusion de ce dernier. Enfin, la visibilité des mises au point ordonnées a posteriori par la commission est renforcée.
Au total, le texte adopté par le Sénat introduit de nombreuses modifications. Si certaines de ces mesures méritent d'être saluées, d'autres soulèvent à la fois des difficultés pratiques et des questions de principe.
L'extension du champ d'application de la loi à l'ensemble des sondages politiques suscite ainsi de fortes interrogations. Que recouvre, exactement, la notion de « débat politique » ? Qui plus est, la jurisprudence de la commission des sondages permet déjà une modulation du champ d'application de la loi. Sur ce point, le Gouvernement comme la commission des sondages ont signalé des obstacles d'ordre constitutionnel.
Par ailleurs, pourquoi vouloir interdire toute gratification, sachant que les montants en jeu sont symboliques, mais indispensables si l'on veut constituer des panels, et qu'ils n'ont aucune incidence sur le résultat du sondage ?
Le dispositif prévoyant la présentation a priori d'observations sur les sondages soulève des difficultés considérables au regard des principes de la liberté d'expression et de la liberté de la presse inscrits dans la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen et dans la Convention européenne des droits de l'homme – ce que nous ont confirmé les juristes que nous avons interrogés. Il pose également des problèmes pratiques, en raison notamment de la perte de « fraîcheur » des sondages, pour reprendre l'expression consacrée. Par ailleurs, le délai prévu pour la procédure de contrôle sera-t-il suffisant pour garantir un débat contradictoire et respecter les droits de la défense des personnes mises en cause ?
De même, l'encadrement des sondages de second tour soulève des questions de compatibilité avec le respect des principes de la liberté de la presse et de la liberté d'expression – bien qu'il convienne d'attirer l'attention de nos concitoyens sur le caractère peu réaliste de certaines hypothèses. Je présenterai donc un amendement proposant une autre solution pour satisfaire à cette préoccupation.
L'obligation de diffusion des critères de redressement des résultats bruts fait également problème, même si elle répond à une exigence de transparence que je partage. Sur son site Internet, la commission des sondages souligne le risque d'atteinte au secret industriel en cette matière. Il faut en outre s'interroger sur le préjudice commercial qu'une telle mesure pourrait causer à l'organisme concerné. En outre, quel intérêt y aurait-il à transmettre les données techniques à tout un chacun, alors que la commission des sondages disposera d'une information exhaustive sur les sondages publiés ?
Enfin, l'information sur les marges d'erreur semble difficile à mettre en oeuvre, du moins si l'on veut qu'elle ne soit pas trop complexe. Je présenterai un amendement tendant à répondre à cette préoccupation de lisibilité.
Je ne doute pas que la discussion permettra d'aboutir à des solutions équilibrées, répondant aux exigences de sincérité, de cohérence et d'efficacité affirmées par le Sénat, mais dans le respect des grands principes démocratiques et des impératifs pratiques, qui, seuls, peuvent présider à l'élaboration d'une législation juste et efficace en matière de réglementation des sondages.
Au préalable, je remercie le rapporteur de nous avoir associés aux nombreuses auditions qu'il a conduites.
L'inscription de la présente proposition de loi à l'ordre du jour de notre commission est la bienvenue. Ce texte a pour origine, je le rappelle, l'affaire des sondages de l'Élysée. Notre demande de commission d'enquête avait été bloquée par la majorité parlementaire, qui avait fait obstacle à l'exercice du droit de tirage accordé à l'opposition. Heureusement, le Sénat a créé une mission d'information, qui a mis en lumière, d'une part, le poids des sondages dans la vie politique française – la France, avec trois sondages politiques publiés chaque jour, est le plus grand consommateur de sondages au monde – et, d'autre part, la relative indigence de la législation française, qui date de 1977 et qui, bien que complétée et améliorée en 2002, demeure largement insuffisante.
Le Sénat a adopté la proposition de loi à l'unanimité, contre l'avis du Gouvernement, le 14 février dernier. Depuis, nous ne cessons de demander qu'elle soit inscrite à l'ordre du jour prioritaire de l'Assemblée nationale. Nous souhaitons donc qu'après son examen en commission, elle vienne rapidement en discussion en séance publique.
Il ne s'agit pas d'un texte de circonstance : les problèmes posés par la mise en scène médiatique des sondages d'opinion, les questions méthodologiques que ceux-ci soulèvent, les pratiques mises en lumière par l'affaire des sondages de l'Élysée – comme la commande publique massive de sondages d'opinion, ensuite publiés dans certains médias en vue de faire la météo du débat politique – ne datent pas d'hier. Et je précise que la volonté du groupe socialiste de réviser la législation actuelle n'est pas liée à la publication récente de certain sondage ayant défrayé la chronique…
Le débat n'est pas de savoir si l'on est pour ou contre les sondages d'opinion : ceux-ci peuvent être des indicateurs utiles. D'ailleurs, lors des auditions, tous les sondeurs ont souligné combien leur image et leur crédibilité avaient pâti de l'affaire des sondages de l'Élysée. Ce que nous dénonçons, c'est un système dans lequel il existe une connivence entre le pouvoir, les instituts de sondage et un certain nombre de médias, dans lequel on instrumentalise l'opinion, dans lequel le sondage sert, non à connaître l'opinion publique, mais à la fabriquer.
Force est de constater que la législation en vigueur n'a pas empêché ces dérives.
Le mérite de la présente proposition de loi est de résoudre un certain nombre de problèmes. En premier lieu, elle introduit, par l'article 2, l'obligation d'indiquer qui est le commanditaire ou l'acheteur du sondage – ou de la partie de sondage, s'il s'agit d'une enquête omnibus.
Par ailleurs, on voit fleurir, dans les médias, les « questions du jour » et les « consultations » sur tel ou tel sujet. Ces enquêtes sont parfois présentées comme d'authentiques sondages d'opinion, alors qu'elles ne sont pas basées sur des échantillons représentatifs de la population. Il était donc nécessaire de définir ce qu'est un sondage : c'est ce qui est fait à l'article 1er.
Le texte prévoit également d'élargir les compétences de la commission à l'ensemble des sondages politiques, ce qui permet d'intégrer la jurisprudence de la commission des sondages, tout en la généralisant au-delà des seules périodes électorales.
Autre disposition essentielle, la publication des marges d'erreur : il importe que les citoyens soient informés de ce que le résultat du sondage est relatif et qu'il existe, statistiquement parlant, une marge d'erreur.
D'ailleurs, la commission des sondages, avait publié, le 16 avril 2002, le communiqué suivant – qui semble être alors passé inaperçu :
« Après avoir constaté qu'un certain nombre des règles qu'elle est chargée de faire respecter avaient été méconnues, la commission des sondages a été amenée à intervenir de plus en plus fréquemment depuis quelques semaines auprès des instituts de sondage ou des organes de presse qui ont assuré la diffusion des résultats.
« Elle estime nécessaire, à quelques jours du scrutin, d'insister sur la prudence avec laquelle les sondages d'intention de vote doivent être interprétés, et ceci pour deux séries de raisons. La première tient aux modalités de constitution des échantillons des personnes interrogées, à la proportion élevée des personnes sondées n'exprimant aucun choix, et à celle, parmi les intentions exprimées, des personnes qui ne sont pas sûres de leur choix. La seconde tient à certains des procédés de redressement auxquels ont actuellement recours les instituts de sondage.
« Dans ces conditions, la commission des sondages tient à souligner les limites de la fiabilité des sondages. La commission rappelle enfin que les sondages ne sont qu'un instrument d'analyse de l'opinion publique, et non pas un outil de prévision des résultats électoraux. »
Ce rappel semble utile au regard des éléments présentés par le rapporteur comme posant problème : si l'expertise des instituts de sondage doit être prise en considération, ils ne doivent pas pour autant tenir la plume du législateur !
Nous sommes néanmoins prêts à discuter d'un certain nombre de points sur lesquels le texte du Sénat peut être amélioré. Le groupe socialiste présentera notamment des amendements visant à régler quelques problèmes juridiques. En particulier, nous proposons de limiter le dispositif de contrôle a priori à la campagne officielle précédant un scrutin et d'instituer un mécanisme de saisine de la commission des sondages, qui lui imposera de se prononcer sur un éventuel défaut, à la demande d'un responsable politique.
Nous souhaitons par ailleurs compléter la proposition de loi sur deux points fondamentaux. Tout d'abord, il convient d'interdire l'utilisation par un candidat ou par un parti politique de sondages commandités ou achetés par des personnes morales de droit public – ce qui s'était produit lors de l'affaire des sondages de l'Élysée, la présidence de la République ayant acheté des sondages pour choisir le candidat du parti majoritaire aux élections régionales en Île-de-France.
Si cette interdiction est bafouée, la commission des sondages doit pouvoir saisir la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, qui pourra imputer le coût du sondage concerné sur les comptes de campagne. Je signale qu'en 2010, l'Élysée a dépensé 1,4 million d'euros en commandes de sondages et que le Service d'information du Gouvernement (SIG) en a acheté pour 3,9 millions d'euros – son budget ayant augmenté de 292 %. On avait prétendu que cette hausse se justifiait par le fait que le budget inclurait désormais les dépenses des différents ministères en sondages, ce qui est faux : en 2010, le ministère de l'enseignement supérieur a dépensé à ce titre 104 281 euros, le ministère de l'éducation nationale, 655 723 euros, le ministère de l'économie et des finances, 679 345 euros, le ministère du travail, 192 000 euros, et le ministère de la défense, 500 000 euros. Selon Médiapart, ce dernier ministère aurait même acheté un sondage comportant des questions sur le caractère plus ou moins convaincant des déclarations de Gérard Longuet sur le conflit entre Jean-François Copé et François Fillon. Est-ce à cela que doit servir l'argent public ?
Nous souhaitons que le texte adopté par le Sénat ne soit pas dénaturé ; c'est pourquoi nous ne sommes pas favorables à certains amendements du rapporteur. À ce stade, la principale question reste toutefois de savoir quand la proposition de loi sera inscrite à l'ordre du jour de la séance publique.
Le groupe GDR est lui aussi favorable à ce texte, qui améliore sensiblement la loi de 1977 en mettant en place un meilleur encadrement juridique, pour une plus grande sincérité et fiabilité des sondages. Donner le nom du ou des commanditaires, apporter des précisions sur le taux de non-réponses, sur les marges d'erreur et sur les critères de redressement sont autant de dispositions pratiques allant dans le bon sens.
La proposition de loi a été adoptée à l'unanimité au Sénat – après un travail fort intéressant mené par la mission d'information constituée sur ce sujet –, contre l'avis du Gouvernement, qui, pour justifier sa position, a donné des arguments peu convaincants, notamment sur la prétendue non-constitutionnalité de certaines dispositions : la liberté de la presse n'est nullement menacée, dans la mesure où aucune publication ne sera interdite.
Nous souhaitons que ce texte soit inscrit le plus rapidement possible à l'ordre du jour de la séance publique. Il est certainement possible de l'améliorer sur certains points, mais il nous semble inimaginable de reculer par rapport à la version adoptée par le Sénat.
Monsieur le rapporteur, vous avez annoncé des amendements allant plutôt, manifestement, dans le sens d'une régression, mais que pensez-vous, globalement, de cette proposition de loi ?
Je veux moi aussi apporter mon soutien à ce texte et à son inspiration. Il s'agit bien d'une urgence.
Parmi les éléments qui contribuent à nourrir les doutes de nos concitoyens sur la vie publique, il y a le comportement des responsables politiques, les médias et les instituts de sondage – à juste titre, car, comme le soulignait Delphine Batho, les sondages ne sont plus utilisés pour rendre compte de l'évolution de l'opinion publique, mais pour la susciter. Ils sont devenus un instrument de la guerre politique et sont instrumentalisés en tant que tels, ce qui crée un déséquilibre entre ceux qui ont les moyens de se livrer à de telles manipulations et ceux qui ne les ont pas. On en arrive à des résultats aberrants !
Lors de l'élection présidentielle de 2007, un grand institut de sondage m'a situé à la veille du scrutin, le vendredi soir, derrière M. Le Pen ; le lendemain, je recueillais deux fois plus de voix que lui ! Je veux bien qu'il existe des marges d'erreur, mais je suis certain que cette manipulation eût été impossible si le sondeur avait eu l'obligation de publier les résultats bruts.
Par ailleurs, j'ai noté avec amusement que, le 10 mai 2011, trois sondages visant à désigner le meilleur héritier de François Mitterrand avaient donné trois résultats différents : il s'agissait de François Hollande pour le premier, de Martine Aubry pour le deuxième, et de Dominique Strauss-Kahn pour le troisième !
Je soutiens donc l'inspiration générale de ce texte, et plus particulièrement celle des dispositions relatives à l'information sur le commanditaire, aux relations entre celui-ci et les organes de presse qui publient le sondage, et à la publication des données relatives aux résultats bruts. Naturellement, les sondeurs sont hostiles à cette dernière disposition, mais nous serions bien inspirés de conserver un tel garde-fou.
Par ailleurs, il importe d'améliorer la composition et les missions de la commission des sondages. À l'heure actuelle, celle-ci ne contrôle ni le bien-fondé, ni la méthode d'élaboration des sondages, mais se borne à enregistrer les déclarations – toujours vertueuses ! – des instituts de sondage. Il serait bon qu'un plus grand nombre de techniciens siègent au sein de la commission, afin qu'en cas de saisine, celle-ci puisse contrôler avec précision la taille et la composition de l'échantillon.
Quoi qu'il en soit, la mission du Parlement est de mettre fin au soupçon actuel de l'opinion – que je crois être fondé.
J'ai pour ma part saisi à deux reprises la commission des sondages pour défaut de publication de la fiche technique : un grand quotidien régional avait en effet publié, à l'occasion d'abord de l'élection présidentielle, puis des élections régionales, des chiffres qui se sont révélés erronés à 20 points près ! La commission n'a jamais accusé réception de ma demande, ni répondu sur le fond. On ne peut donc pas savoir si elle fait une mise au point et demande la publication de la fiche technique manquante. Il y a là un défaut de fonctionnement et de transparence ; la moindre des choses serait de répondre aux courriers !
Monsieur Dolez, je pense qu'en exigeant la publication des éléments méthodologiques, ce texte permet d'assurer une meilleure transparence et une plus grande honnêteté de la pratique des sondages, ce qui est fort utile pour une démocratie comme la nôtre, où il faut tout savoir pour bien juger et bien raisonner.
En revanche, j'estime qu'il va trop loin en matière de contrôle et d'obligations imposées à la presse et aux instituts de sondage. Les professeurs de droit constitutionnel et de droit européen que nous avons auditionnés nous ont signalé des problèmes de constitutionnalité et de conventionnalité : l'information étant libre, on doit pouvoir sonder les opinions librement ; il faut préciser la méthode employée et les conditions dans lesquelles le sondage a été réalisé, mais tout contrôle a priori est à proscrire. C'est sur ce point que mes amendements s'éloignent le plus du texte adopté par le Sénat.
Quant au témoignage de Dominique Bussereau, il m'étonne : lors de son audition, le secrétaire général de la commission des sondages a déclaré qu'en règle générale, la commission répondait dans les cinq jours suivant sa saisine, et que le nombre de saisines diminuait régulièrement.
Il serait intéressant de commander à la commission une étude sur les sondages erronés. J'en ai cité deux, mais il en existe de nombreux autres exemples, comme l'ont montré les dernières élections cantonales. Une telle démarche d'apurement technique serait dissuasive.
J'indique que notre amendement CL 14 vise à mettre en place un mécanisme de saisine de la commission des sondages, avec obligation pour celle-ci – ce qui n'est pas le cas actuellement – de se prononcer dans les 24 heures : soit la demande est déclarée infondée, soit des investigations complémentaires sont diligentées, soit la commission se prononce immédiatement sur le fond.
La commission, quant à elle, affirme qu'elle est de moins en moins saisie : d'ailleurs, le nombre de réclamations est passé de 17 aux présidentielles de 1988 à 7 en 2007, et de 46 aux municipales de 2001 à 11 en 2008.
Par ailleurs, le dispositif proposé utilise pleinement Internet et la diffusion en ligne d'informations pour accroître en transparence. Désormais, tout citoyen pourra accéder aux informations, via le site de l'organe de presse et celui de la commission.
À l'issue de cette discussion générale, chacun semble d'accord pour dire que cette proposition de loi est opportune. Quand sera-t-elle inscrite à l'ordre du jour de la séance publique ?
La question devra être évoquée en Conférence des présidents. Le texte pourra être inscrit à tout moment, dès lors que la Commission aura fini son travail. Sachez qu'à titre personnel, j'y suis favorable.
La Commission procède à l'examen des articles de la proposition de loi.
TITRE Ier MODIFICATIONS DE LA LOI N° 77-808 DU 19 JUILLET 1977 RELATIVE À LA PUBLICATION ET À LA DIFFUSION DE CERTAINS SONDAGES D'OPINION
Article 1er(article 1er de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Définition des sondages – Principes généraux
La Commission est saisie de l'amendement CL 33 du rapporteur.
Cet amendement tend à restreindre le champ d'application de la loi aux sondages portant sur des sujets liés au débat électoral, la notion de « débat politique » étant trop vaste et trop vague. Par exemple, un thème comme la surcharge pondérale des adolescents est susceptible d'avoir des conséquences sur la législation relative à l'alimentation et à l'utilisation de certains médicaments, donc sur le comportement électoral. Dans ces conditions, la quasi-totalité des enquêtes entrerait dans le champ d'application de la loi. C'est pourquoi il convient de supprimer la référence au « débat politique ».
D'ailleurs, lorsqu'un sondage possède manifestement une portée politique, la commission des sondages étend d'elle-même le champ d'application de la loi, comme le montre sa jurisprudence.
Dans l'exposé des motifs, vous expliquez à la fois que la jurisprudence de la commission des sondages motive le texte du Sénat et qu'il convient de réduire le champ d'application de la loi en raison de cette jurisprudence : voilà qui est paradoxal !
Les organes de presse publient régulièrement des sondages qui, sans être « liés de manière directe ou indirecte au débat électoral », tendent à mesurer la popularité des hommes et des femmes politiques et, partant, ont une incidence sur les intentions de vote, dans une société où le débat politique s'apparente de plus en plus à un concours entre pronostiqueurs – quasiment à la manière du PMU. Nous préférons donc maintenir la version du Sénat.
Si l'on se réfère à la jurisprudence de la commission des sondages, cet amendement aura pour conséquence d'empêcher tout contrôle sur les sondages portant sur la popularité des responsables politiques ou sur la politique gouvernementale en dehors des périodes électorales – ce qui pose problème, eu égard au poids de ces enquêtes. Si le rapporteur n'était pas d'accord avec la rédaction du Sénat, il aurait pu en proposer une autre, qui aurait ratifié la jurisprudence actuelle en l'étendant à toutes les périodes, mais avec cet amendement, on en reste au statu quo !
Non, puisque le dispositif proposé ne limite pas les contrôles aux périodes précédant les scrutins !
Ce que nous reprochons au texte du Sénat, c'est d'étendre le champ d'application de la loi à tout sujet politique – qu'est-ce qui n'est pas politique ? Nous estimons qu'il convient de s'en tenir au débat électoral : à ce titre, la mesure de la popularité d'un responsable politique entrera dans le champ d'application de la loi.
La jurisprudence de la commission des sondages tend, dans la période qui précède un scrutin, à retenir une conception extensive de la notion de « débat électoral ». Plus précisément, elle nous a indiqué qu'elle « a admis, pour la période précédant les élections législatives, que la définition donnée à l'article 1er de la loi couvre, non seulement les sondages sur les intentions de vote des électeurs, mais aussi sur la popularité des hommes politiques, sur l'opinion à l'égard du Gouvernement, des partis ou groupements politiques, de leur programme ou, généralement, des sujets liés au débat électoral. »
Enfin, il nous a été confirmé lors des auditions que le texte du Sénat soulevait un problème constitutionnel. Pour réglementer l'exercice de la liberté d'expression et de la liberté de la presse, il faut s'en référer à un principe de valeur constitutionnelle. En l'occurrence, il s'agit d'assurer la sincérité de l'information pour ne pas perturber un scrutin. Mais l'extension de ce contrôle à tout le champ politique constituerait une restriction trop importante de la liberté d'expression et de la liberté de la presse : une telle disposition tomberait sous le coup de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et risquerait, à ce titre, d'être censurée par le Conseil constitutionnel.
La jurisprudence dit aussi que le champ d'application de la loi est limité aux périodes électorales : la commission des sondages n'aura donc pas compétence pour contrôler des sondages de nature politique en dehors de celles-ci.
Je répète que la référence au « débat électoral » permettra d'étendre le champ d'application de la loi à tous les sondages susceptibles d'avoir une incidence sur une élection future. La notion de « politique » est beaucoup trop imprécise : même une étude de consommation pourrait être qualifiée de politique et entrer dans le champ d'application de la loi. Cela poserait un problème constitutionnel !
La Commission adopte l'amendement CL 33.
La Commission est saisie des amendements CL 34 du rapporteur et CL 3 de Mme Delphine Batho.
Cet amendement vise à revenir sur une disposition adoptée par le Sénat, qui interdit toute gratification aux personnes interrogées dans le cadre d'un sondage. Elle semblait partir d'une bonne intention, une rémunération pouvant influencer les réponses. Dans les faits, ces gratifications sont extrêmement minimes, correspondent souvent à l'attribution de miles – un miles ayant, par exemple, une valeur de dix centimes – et ont pour objet de fidéliser un panel.
Selon les instituts que nous avons interrogés, elles sont de l'ordre de dix centimes d'euros à un euro pour les sondages en ligne. Dans une année, les mêmes personnes sont sondées deux ou trois fois, d'où une fourchette de gratification allant de dix centimes à 3 euros. De tels montants peuvent-ils fausser les résultats ? Tous les professionnels des sondages nous ont assuré que non.
La gratification sert à fidéliser le panel des personnes sondées. Faute de quoi, les résultats obtenus peuvent devenir aléatoires. Elle est donc indispensable. C'est pourquoi je propose de supprimer son interdiction.
Toutefois, l'existence d'une gratification peut figurer dans la notice et dans les informations fournies au public.
Nous étions a priori favorable à la disposition retenue par le Sénat. Il nous paraissait anormal que des personnes sondées bénéficient de gratifications. Nous nous sommes ensuite rendu compte, au cours des auditions, que la nature et le montant de celles-ci sont tels que le risque de fausser les résultats est très limité.
C'est pourquoi nous proposons de réserver les gratifications aux sondages par Internet – sachant qu'elles aident les instituts à constituer des panels importants et à bénéficier ainsi de retours d'opinions plus substantiels – et à les interdire pour les sondages par téléphone.
Par ailleurs, nous proposerons à l'article 2 un amendement prévoyant, dans l'hypothèse d'une gratification, que le public est informé de la nature de celle-ci.
Dans la mesure où, pour certains sondages effectués en période électorale, des gratifications – donc des financements privés – sont versées, n'y a-t-il pas, indirectement, un financement privé de la vie politique ?
J'ai mal compris l'argumentation du rapporteur. Il nous dit que les gratifications étant d'un montant peu élevé, cela ne pose pas de problème. Mais la seule question qui se pose est de savoir si on doit ouvrir les enquêtes d'opinion à la logique marchande. Si c'est le cas, rien n'empêchera que, dans quelques années, on augmente le montant des gratifications. Ce domaine doit donc rester en dehors de la marchandisation.
Les propos du rapporteur me rappellent très exactement l'argumentation que développaient les représentants de l'institut de sondage qui avait été accusé de payer les personnes interrogées.
Je rappelle que ces gratifications visent à constituer des panels et à fidéliser un certain nombre de personnes qui acceptent de répondre régulièrement à des questions, notamment à des sondages omnibus. Compte tenu du montant de ces gratifications – qui est anecdotique – , elles ne sauraient biaiser les résultats.
De la même façon, en l'absence de gratification, il faut s'attendre à ce que les personnes hésitent à se déplacer pour répondre à un sondage en face à face.
C'est pourquoi, l'interdiction posée par le Sénat ne se justifie pas.
Je ne comprends pas la logique de notre rapporteur : d'un côté, il affirme que la gratification est indispensable pour former un panel ; de l'autre, il indique qu'elle n'a aucune incidence sur les résultats du sondage. Or, si la motivation du panéliste tient en partie à la gratification, celle-ci a nécessairement une influence sur le résultat puisqu'elle en a déjà une sur la composition du panel. C'est pourquoi le Sénat a voulu neutraliser le rapport à l'argent dans le régime juridique des sondages d'opinion.
On pourrait aussi renverser l'argument du rapporteur : puisque la rémunération est si faible, pourquoi ne pas l'écarter quand on sait les soupçons qui pèsent sur un instrument indispensable à la démocratie ? Votre entêtement sur ce point, monsieur le rapporteur, ne rend pas service à celle-ci.
Le montant de la gratification ne saurait servir d'argument. Aujourd'hui, il ne s'agit que de quelques centimes, mais, en l'absence de précisions dans le texte, rien n'empêchera à terme que la somme augmente fortement.
Il est cependant vrai que, partout dans le monde, les enquêtes en ligne donnent lieu à gratification. Je propose de rectifier notre amendement CL3 en précisant qu'il s'agit de sondages « quantitatifs ». À défaut d'obtenir l'interdiction totale de la gratification, nous souhaitons à tout le moins que cette interdiction puisse s'appliquer pour les sondages quantitatifs effectués par téléphone.
Nous avons interrogé à ce sujet la commission des sondages. Elle nous a indiqué que parler de gratification relève de l'abus de langage si l'on s'en tient aux définitions courantes du mot.
Bien entendu ! Nous avons aussi interrogé tous les instituts de sondage. La seule question qui se pose est de savoir si la gratification peut avoir une incidence sur les résultats. Selon les professionnels, selon la commission des sondages, et selon mon avis en tant que rapporteur, elle n'a en aucune.
Le rapporteur insiste sur la modicité des sommes concernées. Mais, comme l'a fait remarquer Mme Delphine Batho, en l'absence de précisions, il se peut que si, dans les années à venir, les instituts éprouvent des difficultés à constituer des panels, ils ne soient conduits à étendre le mécanisme de gratification. Sans limites, on ouvre la porte à toutes les dérives.
Il faut bien comprendre que, sans gratification, on ne peut pas constituer les panels. Et sans panels, il n'y a pas de sondages sincères.
La Commission adopte l'amendement CL 34.
Puis elle rejette l'amendement CL 3 rectifié.
La Commission adopte ensuite l'article 1er modifié.
Après l'article 1er
La Commission examine l'amendement CL 5 de Mme Delphine Batho, portant article additionnel après l'article 1er.
Cet amendement est très important car il vise à interdire l'utilisation par un candidat ou par un parti politique de sondages portant sur des sujets liés au débat politique et électoral et commandés ou achetés par des personnes morales de droit public. Faute de quoi la législation sur le financement de la vie politique risque d'être transgressée.
Nous pensons à ce sondage financé par le ministère de la défense afin se savoir si le ministre s'était montré convaincant sur des sujets politiques sans aucun rapport avec son domaine de compétence. Nous pensons aussi à la commande par la présidence de la République de ce sondage – qui a soulevé tant de polémiques en raison de son coût, du prestataire qui l'a effectué et de sa véritable finalité – portant sur le climat politique en France, mais se limitant à seule l'Île-de-France afin de déterminer quel serait le meilleur candidat de la majorité aux élections régionales – Jean Launay l'a évoqué dans son rapport sur les comptes de la présidence de la République.
Avis défavorable. Grâce aux dispositions de l'article 2, on connaîtra à la fois la personne qui a acheté le sondage et celle qui l'a commandé.
L'amendement soulève en outre un problème constitutionnel, relatif à la liberté de d'expression : à quel titre interdirait-on à quiconque de se prévaloir des résultats d'un sondage qu'une collectivité a fait réaliser ?
Il pose enfin un problème de mise en oeuvre pratique : que veut-on interdire ? De faire référence au sondage dans un écrit ou sur une estrade lors d'une réunion électorale ? D'y faire allusion de manière indirecte ? Comme traduire cela en termes juridiques pour que la disposition soit applicable ? Cela me semble impossible.
Vous avez restreint le champ du texte à la période électorale. Pourquoi défendez-vous alors la possibilité pour une collectivité publique, en période électorale, de commander et de payer des sondages portant sur l'élection considérée ?
Rappeler qu'une collectivité publique ne doit, en aucun cas, participer au financement d'une campagne électorale, y compris au moyen de sondages, n'est pas porter atteinte à la liberté d'expression.
Je ne comprends pas l'argumentation du rapporteur dans la mesure où il existe déjà une législation sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Le but de notre amendement est, par exemple, d'assimiler à des dons en nature le financement de sondages par la présidence de la République pour savoir quel est le meilleur candidat de la majorité pour les élections régionales en Île-de-France. C'est à l'UMP de payer un tel sondage.
Rien n'interdit à une collectivité publique de faire réaliser un sondage : il sera indiqué qui l'a commandé et qui l'a payé. Chacun pourra ensuite le commenter et l'utiliser. S'il est fait dans des conditions illégales, le droit commun s'applique.
Il est faux de dire que nous avons restreint le champ d'application de la loi de 1977 aux périodes électorales : nous l'avons circonscrit aux débats électoraux. Il en existe en dehors des périodes électorales.
La Commission rejette l'amendement.
Article 2 (article 2 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Indications devant accompagner la première publication ou première diffusion de tout sondage
La Commission adopte les amendements rédactionnels CL 22 et CL 23 du rapporteur.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement CL 8 de Mme Delphine Batho.
La Commission en vient à l'amendement CL 35 du rapporteur.
Je ne comprends pas l'intérêt de ce amendement dans la mesure où le premier alinéa du texte proposé pour l'article 2 répond déjà à l'objectif poursuivi en mentionnant « la diffusion de tout sondage, tel que défini à l'article 1er».
Il s'agit d'un amendement de précision. En effet, dans le cas, par exemple, d'un sondage « omnibus » de 180 questions, le texte actuel laisse entendre qu'il faut toutes les publier. Nous proposons de permettre expressément de ne publier que les questions relevant du champ de la loi de 1977.
L'amendement est adopté.
La Commission passe à l'examen des amendements CL 36 du rapporteur et CL6 de Mme Delphine Batho.
Le texte adopté par le Sénat impose la publication des marges d'erreur sur le support papier qui publie le sondage. Or les marges d'erreur s'avèrent extrêmement variables en fonction des résultats obtenus. Ainsi, pour un candidat recueillant par exemple 5 ou 6% des intentions de vote ou d'opinions favorables, la marge d'erreur est beaucoup plus élevée que pour un candidat en recueillant 25 ou 26%. C'est pourquoi les instituts de sondage publient un tableau des marges d'erreur. Selon la rédaction du Sénat, il faudrait le rendre public lors de chaque sondage ou, du moins, communiquer les marges d'erreur par résultat individualisé, ce qui nuit à la visibilité du sondage. Nous proposons donc que ce tableau soit publié sur le site en ligne de l'organe de presse qui exploite le sondage et que, sur le journal, on mentionne seulement l'existence de marges d'erreur avec une référence à ce site.
Il s'agit d'une disposition essentielle de la proposition de loi : que les citoyens soient informés de l'existence d'une marge d'erreur dans les résultats d'un sondage. Nous en avons compris les inconvénients pratiques pour un organe de presse. C'est pourquoi nous avons déposé un amendement – le CL 7 – qui poursuit le même but que celui du rapporteur et propose que le tableau récapitulatif concernant les marges d'erreur figure sur le site de communication en ligne de l'organe d'information.
Quant à notre amendement CL 6, il tend à préciser que c'est la marge d'erreur maximale qui doit être communiquée au public par l'organe d'information diffusant le sondage, lors de sa première publication.
Avis défavorable à l'amendement CL 6. Il est suffisant d'indiquer sur le support principal l'existence de marges d'erreur et de renvoyer au tableau correspondant publié en ligne.
Nous touchons ici le point peut-être le plus important du texte. Nos concitoyens ont, en effet, tendance à prendre pour argent comptant ce qu'ils lisent dans la presse, et c'est, a priori, assez normal. De ce fait, ils considèrent qu'un candidat est mieux placé qu'un autre avec seulement 1% d'écart dans le sondage, alors que la marge d'erreur est supérieure. Se contenter de mentionner qu'il existe une marge d'erreur ne suffit donc pas. Il convient de faire figurer sa valeur maximale car elle seule fait réellement comprendre au lecteur qu'un taux fourni par un sondage exprime en fait une fourchette de taux. C'est ce qui permettra au citoyen de relativiser les résultats du sondage et de les ramener à leur véritable nature : une estimation des intentions de vote à un moment donné avec une incertitude relativement importante.
Je rappelle que la publication des tableaux de marges d'erreur montrera que, par exemple, pour un effectif de 1000, s'agissant d'un taux de 5 ou 95%, la marge d'erreur est de 1,4, d'un taux de 10 ou 90% de 1,8, d'un taux de 20 ou 80% de 2,5, etc. Le tableau suffit à éclairer le lecteur.
La Commission adopte l'amendement CL 36.
Puis elle rejette l'amendement CL 6.
La Commission examine ensuite l'amendement CL 37 du rapporteur.
Cet amendement vise à supprimer le dispositif de formulation des observations méthodologiques qui accompagne la publication ou la diffusion des sondages et comporte l'obligation de transmettre à la commission des sondages la notice technique vingt-quatre heures avant la publication ou la diffusion de ceux-ci. Un tel dispositif introduirait un contrôle a priori de l'information. Il pose dès lors un problème de droit au regard de l'article 11 de la déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen et de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans notre système juridique, le contrôle de l'information ne peut s'exercer qu'a posteriori.
Pour les organes de presse comme pour les instituts de sondage, la pire des sanctions réside dans la publication, même à posteriori, sur le même support et en ligne, des observations de la commission des sondages, car elle peut discréditer leur travail. Ces outils nous semblent suffisants pour garantir la sincérité d'un sondage.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CL 4 de Mme Delphine Batho.
Cet amendement de repli propose que, à tout le moins, lorsqu'un sondage donne lieu à gratification, la notice le mentionne.
Avis défavorable. Nous ne considérons pas que la gratification puisse biaiser les résultats d'un sondage.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel CL 24 du rapporteur.
L'amendement CL 7 de Mme Delphine Batho est retiré.
La Commission adopte les amendements rédactionnels CL 25 et CL 26 du rapporteur.
Puis la Commission adopte l'article 2 modifié.
Article 3 (article 3 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Dépôt de la notice méthodologique auprès de la commission des sondages
La Commission adopte l'amendement CL 38 du rapporteur.
Elle examine l'amendement CL 11 de Mme Delphine Batho.
Nous proposons de supprimer le délai de vingt-quatre heures pour la communication de la notice et le contrôle a priori de la commission des sondages, sauf lorsqu'on se situe dans les délais de la campagne électorale officielle. Durant cette période, des règles spéciales s'imposent aux médias afin d'assurer l'équilibre du débat, notamment celui des temps de parole. La rédaction de l'amendement ne soulève pas de difficulté constitutionnelle car elle est proportionnée aux contraintes particulières de cette période.
Avis défavorable. L'amendement pose bien un problème constitutionnel car il s'oriente vers un contrôle a priori de l'information.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement CL 9 de Mme Delphine Batho.
Elle examine ensuite les amendements CL 39 du rapporteur et CL 10 de Mme Delphine Batho.
Il existe plusieurs méthodes de redressement des résultats d'un sondage. Certaines sont générales et largement partagées. D'autres, plus précises, relèvent du savoir-faire de chaque institut : leur divulgation peut alors porter une atteinte patrimoniale à l'entreprise. Nous proposons donc que ne soient publiés que les critères généraux de redressement et que les critères plus fins soient seulement communiqués à la commission des sondages afin qu'elle puisse les contrôler.
Le texte du Sénat ne prévoit pas de rendre obligatoire la publication des résultats bruts, mais seulement les critères précis de redressement.
Certes, les méthodes de redressement ne constituent pas un élément brevetable relevant de la propriété intellectuelle. Toutefois, chaque institut détenant un savoir-faire, des problèmes de concurrence pourraient se poser si les critères de redressement les plus précis étaient rendus publics. Je considère bien sûr qu'il ne faut rien cacher aux citoyens, mais qu'apporterait à la lecture du sondage la publication de tous les critères de redressement, feront valoir certains ? En tout état de cause, s'ils ne sont pas rendus publics, nous souhaitons que la commission des sondages puisse examiner tous les critères de redressement et que, dans le cadre de la procédure de saisine que nous proposons en cas de problème sur un sondage, ils puissent alors être exposés.
Je me suis procuré le texte des marchés de sondage de la présidence de la République. Il est intéressant de constater que celle-ci souhaite que lui soient communiqués les résultats redressés uniquement selon des critères sociaux et démographiques, et en aucun cas selon des critères politiques.
Le sujet est donc sensible. Il ne faut pas aller totalement à contre-courant de la position prise par le Sénat.
Nous procédons là à un exercice d'équilibre visant, à la fois, à assurer la protection des droits patrimoniaux des entreprises dans un marché très concurrentiel et à garantir la transparence. Le texte tel que nous proposons de l'amender apporte une réponse à ces deux préoccupations : les critères généraux de redressement seront publiés ; il n'y aura pas d'accès au savoir-faire en tant que patrimoine de l'entreprise mais le contrôle de la commission des sondages permettra d'assurer la sincérité de l'ensemble des critères et méthodes utilisées par les instituts.
La Commission adopte l'amendement CL 39.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement CL 10.
Puis elle adopte l'article 3 modifié.
Article 4 (article 4 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Possibilité de consulter l'ensemble des documents sur la base desquels un sondage a été publié ou diffusé
La Commission est saisie de l'amendement CL 40 du rapporteur.
Nous proposons de supprimer le droit ouvert à toute personne de consulter, auprès de la commission des sondages, les documents sur la base desquels un sondage a été publié ou diffusé.
Je comprends votre souci de préserver la valeur patrimoniale des entreprises, mais, si cet amendement est adopté, le remède sera pire que le mal. En voulant supprimer toute possibilité d'accès du citoyen à la consultation des documents de la commission des sondages, que deviennent la transparence et l'équité souhaitées tant par le Sénat que par nous-mêmes ? À tout le moins, vous auriez pu vous contenter de limiter cette possibilité aux personnes concernées par le sondage. De fait, cet amendement supprime la valeur ajoutée de la commission des sondages. Si personne ne peut consulter les documents, à quoi sert-elle ?
Il existe deux catégories de critères de redressement : des critères généraux, qui seront publiés, et des critères plus précis, assortis de documents techniques qui permettent de comprendre ces critères et qui constituent des éléments patrimoniaux de l'entreprise. Chacun pourra accéder aux premiers mais non aux seconds.
En revanche, la commission des sondages pourra contrôler l'ensemble des critères, généraux ou précis.
Nous avons trouvé là un juste équilibre. L'intérêt général est préservé par la commission des sondages, tandis que le « droit de la concurrence » entre instituts est préservé par la protection des critères précis.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 4 modifié.
Article 5 (article 4-1 [nouveau] de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Sondages relatifs au second tour d'une élection
La commission examine, en discussion commune, les amendements CL 41 du rapporteur et CL 12 de Mme Delphine Batho.
Le texte du Sénat dispose qu'un sondage de deuxième tour doit tenir compte du sondage de premier tour. Je propose que les deux sondages soient simplement publiés en même temps.
Notre amendement s'inspire d'une observation récurrente de la commission des sondages. Au cours de la campagne présidentielle de 2007 avaient été publiés des sondages prenant comme hypothèse la présence de M. François Bayrou au deuxième tour, alors que tous les sondages de premier tour l'excluaient. De la même façon, pour la préparation des primaires au sein du parti socialiste en vue de la prochaine élection présidentielle, des sondages ont testé des hypothèses de second tour totalement farfelues au regard des résultats de ces mêmes sondages pour le premier tour.
La proposition du rapporteur consiste à rendre obligatoire la publication concomitante des deux types de sondages, le citoyen pouvant alors se rendre compte par lui-même de leur incohérence, ou non. Or nous avons déjà vécu cette pratique pour les primaires ; cela n'a pas empêché de nombreux médias de reprendre les résultats des sondages de second tour indépendamment de ceux du premier, comme s'ils étaient crédibles par eux-mêmes.
Mais il est vrai que la publication simultanée peut poser aux organes de presse des problèmes pratiques, notamment d'occupation de l'espace éditorial. Nous proposons donc une autre formule : la publication du sondage de premier tour sur le site en ligne quand le sondage de deuxième tour est publié sur le support principal. Compte tenu des marges d'erreur, ce dispositif permet de tester une multiplicité d'hypothèses de second tour sans porter atteinte à la liberté de l'information.
La Commission adopte l'amendement CL 41.
En conséquence, l'amendement CL 12 devient sans objet.
La Commission adopte ensuite l'article 5 modifié.
Article 6 (article 5 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Indépendance et compétence générale de la commission des sondages
La Commission examine l'amendement CL 14 de Mme Delphine Batho.
Cet amendement porte sur le mécanisme de saisine de la commission des sondages que nous avons déjà évoqué lors de la discussion générale. Le texte du Sénat ne prévoit pas de procédure de saisine de la commission, ni ne fixe les obligations de celle-ci lorsqu'elle est saisie. Notre amendement tend à combler cette lacune.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis la Commission adopte l'article 6 sans modification.
Article 7 (article 6 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Composition de la commission des sondages et régime d'incompatibilités de ses membres et de son personnel
La Commission est saisie de l'amendement CL 20 de M. Patrice Verchère.
Mon amendement a pour objet de modifier la composition de la commission des sondages. Elle comprend actuellement neuf magistrats et deux personnalités qualifiées. La proposition de loi fait passer le nombre de magistrats à six et celui des personnalités qualifiées à cinq. Si un rééquilibrage est envisageable, il ne doit pas pour autant conduire à bouleverser le fonctionnement de la commission, ni à dénaturer ses missions. C'est pourquoi je propose que la commission comporte trois personnalités qualifiées en matière de sondages, désignées respectivement par le président de la République, le président du Sénat et celui de l'Assemblée nationale.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Après que le rapporteur eut donné un avis défavorable, la Commission rejette l'amendement CL 16 de Mme Delphine Batho.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel CL 27 du rapporteur.
Puis la Commission adopte l'article 7 modifié.
Article 8 (article 7 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Coordination
La Commission adopte l'article 8 sans modification.
Article 9 (article 8 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Coordination
La Commission adopte l'article 9 sans modification.
Article 10 (article 9 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Observations méthodologiques et mises au point de la commission des sondages
La Commission est saisie de l'amendement CL 42 du rapporteur.
Cet amendement tend à supprimer la possibilité nouvelle pour la commission des sondages, dans le mois précédant un scrutin, de présenter des observations quant à la méthodologie d'élaboration du sondage, observations qui accompagnent la publication ou la diffusion de celui-ci : ce contrôle a priori de l'information ne nous semble pas conforme à l'article 11 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen.
Les sondages à l'approche d'un scrutin ont un impact considérable sur les citoyens. Comme je l'ai indiqué, on ne porte pas assez attention, aujourd'hui, aux communiqués de la commission des sondages. Il faut donc maintenir le texte adopté par le Sénat.
La Commission adopte l'amendement.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement CL 17 de Mme Delphine Batho.
La Commission ensuite adopte l'article 10 modifié.
Après l'article 10
La Commission est saisie de l'amendement CL 15 de Mme Delphine Batho, portant article additionnel après l'article 10.
Cet amendement vise à mettre en place une procédure de saisine de la commission des sondages, toute saisine devant donner lieu, après débat contradictoire, à une décision publique et motivée sur le ou les sondages contestés. Dans le cadre de ce contentieux, la commission communique à toutes les parties les documents qui lui ont été transmis par les instituts de sondages.
La Commission rejette l'amendement.
Article 11 (article 10 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Publicité des décisions de la commission des sondages et recours contre ces décisions
La Commission adopte l'article 11 sans modification.
Article 12 (articles 10-1 et 10-2 [nouveaux] de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Rapport annuel et autonomie budgétaire de la commission des sondages
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL 28 du rapporteur.
Elle examine ensuite l'amendement CL 21 de M. Patrice Verchère.
Mon amendement vise à supprimer l'alinéa 3 de cet article : au vu de la modestie du budget de la commission des sondages, il paraît superflu de lui consacrer un programme budgétaire spécifique.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel CL 29 du rapporteur.
Puis la Commission adopte l'article 12 modifié.
Article 13 (article 11 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Interdiction de la publication, de la diffusion et du commentaire des sondages électoraux la veille et le jour d'un scrutin
La Commission est saisie de l'amendement CL 2 de M. Lionel Tardy.
À l'heure d'Internet, interdire la diffusion d'informations existantes est totalement illusoire. La seule solution pour préserver la tranquillité de la période de réserve, la veille et le jour du scrutin, est d'interdire purement et simplement la réalisation des sondages. Il n'y aurait ainsi aucune information à diffuser.
Avis défavorable. Cet amendement me paraît contraire au principe de la liberté du commerce comme à celui de la liberté d'information. En outre, des sondages pourraient être réalisés depuis l'étranger.
Nous soutenons l'amendement car il permettrait d'introduire un facteur d'égalité entre les protagonistes du débat politique et d'éviter que des candidats accèdent à des informations que d'autres ne peuvent se procurer.
La Commission rejette l'amendement CL 2.
Puis elle adopte l'article 13 sans modification.
Article 14 (intitulé de la section V et article 12 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Dispositions pénales
La Commission adopte l'amendement de coordination CL 43 et l'amendement rédactionnel CL 30 du rapporteur.
Elle adopte ensuite l'article 14 modifié.
Article 15 (article 13 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Conditions d'application de la loi
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL 31 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 15 modifié.
Article 16 (article 14 de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Application outre-mer de la loi
La Commission adopte l'article 16 sans modification.
Article 17 (intitulé de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977) : Intitulé de la loi
La Commission adopte l'amendement CL 44 du rapporteur.
En conséquence, l'article 17 est supprimé.
TITRE II MODIFICATIONS DU CODE ÉLECTORAL
Avant l'article 18
La Commission examine l'amendement CL 1 de M. Lionel Tardy, tendant à introduire un article additionnel avant l'article 18.
Lors de l'examen du « paquet électoral », les sénateurs ont introduit dans le texte une disposition prévoyant que les dispositions du code électoral relatives aux interdictions en matière de propagande électorale sont applicables à Internet. Celle-ci est totalement inutile car il est évident que la loi s'applique aussi à Internet : les juges en sanctionnent depuis longtemps les dérapages, y compris en matière électorale. Elle est aussi dangereuse car elle pourrait conduire les juges à imputer aux candidats tout ce qui se dit et se fait sur Internet, ce qui leur est impossible à maîtriser, y compris les agissements de leurs propres partisans.
Je vous propose donc, comme je l'avais fait lors de l'examen du « paquet électoral », d'abroger l'article L 48-1 du code électoral qui, partant sans doute d'une bonne intention des sénateurs, risque de s'avérer nuisible.
Avis défavorable. Le débat a déjà eu lieu, ici et en séance publique, il a été tranché. C'est maintenant à la jurisprudence de prendre le relais.
La Commission rejette l'amendement.
Article 18 (article L. 52-2 du code électoral) : Interdiction de la divulgation anticipée de résultats électoraux
La Commission adopte l'article 18 sans modification.
Article 19 (articles L. 55 et L. 56 du code électoral) : Coordination relative à la dérogation à la règle d'organisation du scrutin le dimanche
La Commission maintient la suppression de l'article 19.
Article 20 (article L. 89 du code électoral) : Coordination
La Commission adopte l'article 20 sans modification.
Article 21 (article L. 90-1 du code électoral) : Réévaluation de l'amende prévue en cas de divulgation anticipée des résultats d'une élection
La Commission adopte l'article 21 sans modification.
Après l'article 21
La Commission examine l'amendement CL 18 de Mme Delphine Batho, portant article additionnel après l'article 21.
Cet amendement propose que la commission des comptes de campagne et des financements politiques puisse être saisie par la commission des sondages lorsqu'il apparaît qu'un sondage commandé par des personnes de droit public a bénéficié directement à un candidat ou à une formation politique. Le coût du sondage en question pourrait être imputé sur les comptes de campagne.
Avis défavorable. Si un sondage est réalisé à la demande d'un candidat, son coût est déjà imputé sur ses comptes de campagne.
Par ailleurs, l'article 2 du texte prévoit déjà l'indication de celui qui commande et de celui qui finance le sondage.
Enfin, l'amendement soulèverait des difficultés pratiques considérables : on entrerait dans des situations incontrôlables et juridiquement très floues.
Un sondage payé, par exemple, par la présidence de la République au bénéfice d'un candidat s'apparente à un don en nature. Nous proposons que dans ce cas, aujourd'hui illégal, il existe un mécanisme permettant à la commission nationale des comptes de campagne d'être saisie.
La commission des comptes de campagne est évidemment saisie des comptes de campagne. Si elle considère qu'une opération de sondage entre dans les dépenses de campagne, elle l'intègre à ce titre. Le droit existant est suffisant, par ailleurs, pour assurer la sanction des situations illégales.
La Commission rejette l'amendement.
TITRE III DISPOSITIONS TRANSITOIRES
Article 22 : Cessation des mandats en cours des membres de la commission des sondages
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL 32 du rapporteur.
Elle adopte ensuite l'article 22 modifié.
Titre
La Commission adopte l'amendement de conséquence CL 45 du rapporteur.
Le Titre est ainsi modifié.
Nous approuvons le texte, mais, compte tenu des amendements adoptés au cours de cette séance, et qui représentent un recul, le groupe SRC s'abstiendra sur le vote d'ensemble.
Le texte ne traite pas des sondages effectués à la sortie des urnes et qui, parfois, diffusent des informations erronées. Que peut-on faire ?
Ces sondages entrent aussi dans le champ de la loi. La meilleure sanction des erreurs réside dans la publication des observations de la commission des sondages.
La Commission adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
La séance est levée à 12 heures.