La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant réforme des retraites (nos 2760, 2770, 2768, 2767).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de douze heures et vingt-cinq minutes pour le groupe UMP dont 165 amendements restent en discussion, quatorze heures et cinquante-neuf minutes pour le groupe SRC dont 132 amendements restent en discussion, trois heures cinquante et une minutes pour le groupe GDR dont 109 amendements restent en discussion, quatre heures et trente-six minutes pour le groupe Nouveau Centre dont 38 amendements restent en discussion et vingt-quatre minutes pour les députés non-inscrits, dont cinq amendements sont encore en discussion.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 4.
Sur cet article, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Christian Vanneste.
Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, monsieur le secrétaire d'État chargé de la fonction publique, mes chers collègues, j'avais déposé un amendement portant article additionnel après l'article 4 tombé sous les fourches caudines de l'article 40 puisqu'il envisageait de nouvelles prestations de retraite.
Je voudrais néanmoins vous interroger, monsieur le ministre, sur la possibilité de faire bénéficier d'un avantage spécifique ceux qui consacrent, en plus de leur travail, une partie de leur temps libre à une activité utile à la société, bénévole ou faiblement indemnisée par le biais de vacations.
De façon légitime, notre majorité a déjà instauré en 2005 une prestation de fidélisation et de reconnaissance en faveur des sapeurs-pompiers volontaires ayant exercé au moins vingt ans d'activité. Celle-ci était une reconnaissance nécessaire à l'égard de ces hommes et de ces femmes particulièrement exposés et constituait un encouragement de nature à enrayer l'érosion du nombre des volontaires.
À cet égard, j'attire votre attention sur le risque qui résulte du recul de la date d'accès aux droits pour des volontaires dont l'engagement physique est primordial – les pompiers volontaires partiront plus tard à la retraite.
Ma question est cependant plus large. Le bénévolat, le dévouement et souvent la compétence technique, faiblement indemnisés chez de nombreux encadrants associatifs, exposent à un risque l'évolution de ce type d'engagement si utile au lien social dans la mesure où les contraintes du mode de vie actuel et l'absence de compensations sérieuses peuvent demain tarir les vocations.
Beaucoup de ces intervenants pourront d'ailleurs poursuivre ces activités grâce au temps libre de la retraite, à condition toutefois d'y avoir été encouragés au préalable.
Afin de circonscrire cet avantage, j'avais proposé d'accorder la validation d'un trimestre pour chaque année d'activité bénévole dans le cadre d'associations reconnues d'utilité publique ou, par exemple, d'associations sportives ayant délégation de missions de service public. Je pense, entre autres, aux arbitres de fédération faiblement indemnisés dont il serait facile de vérifier dans un premier temps la validité de l'engagement.
Cette action, qui serait d'ailleurs facilitée dans le cadre des comptes notionnels beaucoup plus que dans le système actuel, correspond à une proposition de loi, que j'avais déposée il y a maintenant deux ans, qui consistait à attribuer un trimestre de droits pour sept années d'activités bénévoles.
Jean-Pierre Decool – nordiste comme moi, autrement dit passionnément attaché aux associations – rappellera dans quelques instants que Nicolas Sarkozy avait un jour évoqué cette possibilité d'un soutien à la retraite des bénévoles des associations. Il faudrait aujourd'hui s'en souvenir.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaiterais attirer l'attention du Gouvernement sur la prise en compte du bénévolat associatif dans le calcul des retraites.
Dans un chapitre consacré aux bonifications, il me paraît pour le moins normal que le dévouement inlassable des bénévoles trouve une juste récompense, une légitime reconnaissance dans le cadre du calcul des retraites.
Dans le même temps, j'ai conscience qu'il convient dans un tel dispositif de prévoir une délimitation du champ d'application de cette mesure afin d'éviter tout risque de détournement ou d'utilisation abusive. Il faudrait en ce cas prévoir un nombre maximal de retraites validables après décision des services de l'État et après présentation d'un dossier par le bénévole. Un décret en Conseil d'État pourra fixer les modalités d'application du dispositif.
Nous étions quarante députés à défendre cette proposition à travers un amendement qui a été jugé irrecevable par la commission des finances au titre de l'article 40.
Monsieur le ministre, au regard des arguments évoqués, vous êtes le dernier recours du monde associatif qui attend un signe de la part du Gouvernement. Je vous propose donc de soutenir la mise en oeuvre d'un tel dispositif par le biais d'un amendement du Gouvernement afin de faire un geste fort envers les bénévoles issus du monde associatif, ce que ne reniera pas le Président de la République, …
Alors là, ne vous engagez pas trop : les reniements, c'est sa profession !
…qui, à plusieurs reprises, a évoqué avec conviction la nécessité pour la société de valoriser celles et ceux qui se dévouent pour elle.
Monsieur le ministre, la vie associative dans notre pays représente une richesse extraordinaire. C'est le premier creuset de la démocratie. Chacun sait que les activités menées par les associations sont souvent bien faites et coûtent moins cher, y compris à l'État. Leur témoigner une reconnaissance, leur accorder une récompense serait adresser un signe fort à l'endroit de celles et ceux qui savent donner sans compter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir excuser le retard avec lequel certains d'entre nous ont rejoint l'hémicycle : nous écoutions l'intervention du Premier ministre.
L'article 4 porte sur la question de l'allongement de la durée de cotisation et ses modalités de calcul. C'est pour moi l'occasion de formuler deux observations.
Premièrement, contrairement à ce que vous affirmez, l'allongement de la durée de cotisation constitue pour nous une mesure démographique plus juste que celle que vous préconisez vous-même, laquelle s'appuie sur le simple relèvement des âges légaux. Nous ne récusons pas la place des mesures démographiques dans le projet que nous proposons. Nous considérons simplement que de telles mesures ne peuvent à elles seules constituer la totalité de la réforme. Parmi les mesures démographiques retenues, la seule qui est juste, à nos yeux, est l'allongement de la durée de cotisation car elle tient compte de l'âge de début d'entrée dans la carrière professionnelle.
À partir du moment où l'espérance de vie s'allonge, plus particulièrement l'espérance de vie en bonne santé, il est normal qu'une partie du temps ainsi gagné soit consacrée à l'activité. Depuis 2003, vous avez fait le choix de consacrer les deux tiers de ce temps au travail et un tiers seulement à la retraite. Cela nous paraît être un choix sévère pour les Français car c'est aussi une conquête sociale que de pouvoir disposer de temps, de temps pour soi, de temps pour les activités associatives, de temps pour sa famille, de temps pour des projets personnels. C'est la raison pour laquelle il nous semble plus juste d'aboutir à un partage strictement égal, à « cinquante-cinquante », du temps d'espérance de vie gagné entre le travail et la retraite.
L'allongement de la durée de cotisation s'inscrit pour nous dans le cadre d'une démarche qui prend en compte la diversité des parcours professionnels.
Cela m'amène à ma deuxième observation. Je vois bien ce que vous allez nous réponse, à un moment ou à un autre, car vous avez déjà eu l'occasion d'affirmer à plusieurs reprises que les socialistes accepteraient aujourd'hui ce qu'ils ont refusé hier, qu'ils feraient leurs des propositions qu'ils ont combattues auparavant. Après le flop du discours selon lequel les socialistes n'auraient rien à proposer, ces affirmations sont même devenues la nouvelle rengaine que l'on entend sur vos bancs. C'est si vrai que le Premier ministre a jugé utile ce soir de conclure sur cette idée – on voit à quel niveau il se plaçait pour s'adresser aux Français !
Mais nous récusons ces assertions. Nous ne reprenons pas des mesures que nous avons contestées parce qu'elles auraient été bonnes à un moment et que nous ne l'aurions pas compris. Nous les reprenons de manière différente et dans le cadre d'une réforme plus générale qui englobe d'autres mesures.
En 2003, le pivot de la réforme Fillon – son socle, son pilier – était l'allongement de la durée de cotisation comme aujourd'hui le pivot de la réforme des retraites est le recul de l'âge légal, qui est la seule et unique mesure de la réforme portée par M. Woerth. Nous récusons, dans un cas comme dans l'autre, l'idée que la réforme des retraites puisse s'appuyer sur un seul mécanisme.
En 2003, vous avez refusé comme aujourd'hui que les mesures démographiques soient accompagnées de la recherche de prélèvements et de ressources complémentaires quelle qu'en soit la nature – augmentation de cotisations, CSG, prélèvements sur les revenus du capital. C'est cela qui est fondamental : une mesure prise indépendamment d'autres mesures n'a absolument aucun sens. On ne peut se dire favorable à l'allongement de la durée de cotisation de manière absolue mais seulement à certaines conditions.
Elle doit être limitée, intégrée dans une réforme qui comporte des mesures de prélèvement sur les revenus du capital. Elle ne doit pas manger l'ensemble des gains d'espérance de vie. Elle doit surtout prendre en compte la diversité des parcours professionnels – nous y reviendrons dans quelques instants à travers les amendements que nous avons déposés à l'article 4 qui déclinent le thème de la retraite choisie.
La durée de cotisation ne peut être la même pour tout le monde. Il faut créer des incitations pour que certaines personnes travaillent plus longtemps. Il faut, à l'inverse, mettre en place des bonifications d'assurance qui permettent à d'autres de travailler moins longtemps, compte tenu de la difficulté de leur parcours.
C'est cet ensemble qu'il importe de prendre en compte. C'est la raison pour laquelle, contrairement à ce que vous affirmez, nous ne reprenons pas aujourd'hui des mesures que nous avons combattues hier. Nous proposons aujourd'hui un dispositif global qui intègre des mesures démographiques qui ne sont qu'un élément parmi bien d'autres de nos propositions.
Vous encaissez les bénéfices de mesures que vous avez combattues auparavant !
Nous sommes à un moment où le débat pourrait être simple, voire simpliste, un peu comme si la logique que vous essayez de déployer en permanence – il est normal que l'on travaille plus longtemps puisque l'on vit plus longtemps – était isolée de tout le reste de la problématique qui se pose à nous.
À l'évidence, il y a un accroissement de la durée de la vie et il faut s'en féliciter. Dans le modèle de société auquel nous sommes attachés, nous considérons que si cet allongement doit avoir une incidence sur le travail et les cotisations, il faut aussi tenir compte de la diversité des parcours, de la réalité des actions menées par les uns ou par les autres. C'est pourquoi nous estimons que le gain de temps résultant de l'allongement de la durée de vie ne doit être consacré que pour moitié au travail et pour une autre moitié à ce temps de retraite que chacun a bien mérité.
Il s'agit aussi de savoir dans quel état de santé on partira à la retraite et quelle qualité de vie on aura. De ce point de vue, l'espérance de vie dont nous avons dit qu'elle avait été allongée est un élément qu'il faut capitaliser dans un modèle de société où le travail ne peut pas être tout, où le travail ne peut pas être le seul identifiant, surtout quand on sait que nous passerons un nombre d'années conséquent à la retraite.
Ce temps de travail, le parti socialiste souhaite le présenter au travers de la thématique du choix, c'est-à-dire d'une forme de souplesse. Or les propositions que vous nous faites ne nous permettent pas d'y répondre. On le sait, les professions ont changé, les métiers, les rythmes de travail, les formes de contrat, les relations dans l'entreprise ont changé. Il serait dramatique d'adresser ce seul message à nos concitoyens : travailler, travailler, travailler encore.
Une émission diffusée tout à l'heure nous montre des Français qui ont l'impression que l'âge de départ à la retraite sera perpétuellement reculé, comme s'ils n'avaient aucune possibilité de voir ce temps de retraite comme un temps d'épanouissement.
S'agissant du financement des retraites, dès lors que les clés que vous avez retenues font porter l'effort sur celles et ceux dont la crise a fait les principales victimes, il est clair qu'elles ne permettent pas de répondre au défi que nous devons relever aujourd'hui. Voilà pourquoi le parti socialiste propose que l'effort porte sur les deux jambes, c'est-à-dire à la fois sur les cotisations des salariés et les revenus du capital. Personne ne peut comprendre que les quelque 2 milliards que vous suggérez soient à la hauteur de l'enjeu que nous avons à relever. Il n'est pas possible que 90 % des efforts soient faits par les salariés et que seulement 10 % proviennent des revenus du capital.
Cet équilibre dans le financement, la répartition entre le temps de cotisation et le temps de retraite est sans aucun doute l'un des éléments qui peut faire mieux accepter cette nécessaire réforme par l'ensemble de nos concitoyens.
Le débat général sur l'article 4 nous donne l'occasion de clarifier quelques notions et de nous mettre d'accord, surtout après l'intervention du Premier ministre, qui a été quelque peu confus dans les notions qu'il a utilisées en s'adressant aux Français. En effet, il a mélangé la notion d'âge de départ à la retraite et celle de durée de cotisation. L'âge légal de départ à la retraite correspond à un seuil, tandis que la durée de cotisation correspond à une durée. Nous sommes attachés à ce seuil de soixante ans, seuil protecteur pour celles et ceux qui ont eu les carrières les plus difficiles et qui ont commencé à travailler tôt.
L'espérance de vie à la naissance a augmenté, et c'est une bonne chose. Nous gagnons chaque année environ trois mois d'espérance de vie, ce qui me conduit parfois à faire une mauvaise plaisanterie en disant que le jour où nous gagnerons chaque année treize mois d'espérance de vie, nous serons immortels !
L'exposé des motifs du projet de loi rappelle que l'espérance de vie a augmenté de 6,3 ans depuis 1982. C'est vrai. Mais, quand la retraite à soixante ans a été instaurée, la durée de cotisation était de 150 trimestres. Or, depuis, elle est passée à 162. Sur ces 6,3 ans, nous avons donc déjà « donné » trois ans au temps travaillé.
J'en viens maintenant à l'espérance de vie à soixante ans. Combien, à soixante ans, me reste-t-il d'années à vivre ?
Depuis 1982, l'espérance de vie à soixante ans s'est améliorée de deux ans. Nous avons donc donné plus de temps au travail que gagné en espérance de vie à soixante ans.
Quant à l'espérance de vie en bonne santé, quelle est-elle ? Tout à l'heure, en commission, M. Woerth m'a donné acte de l'exactitude des chiffres que j'ai avancés puisqu'ils proviennent de ses services. L'espérance de vie en bonne santé est de 61,3 ans pour les hommes et de 62,4 ans pour les femmes, l'âge réel de départ à la retrait étant de 61,5 ans. L'âge que vous proposez pour le seuil légal, c'est-à-dire soixante-deux ans, donne à penser qu'une personne sur deux partira à la retraite en mauvaise santé.
Ma dernière observation se fonde sur le constat que l'espérance de vie à la naissance est inférieure de sept ans pour un ouvrier que pour un cadre supérieur. Il est donc logique que celles et ceux qui ont un travail plus pénible puissent partir plus tôt à la retraite puisque leur espérance de vie est plus faible. Cette notion est totalement différente de celle d'incapacité que vous appliquez dans votre projet. Comme ce débat aura lieu dans les heures qui viennent, je n'allongerai pas plus mon intervention.
Le seul argument que vous utilisez pour justifier l'allongement de la durée de cotisation que vous proposez est l'allongement de l'espérance de vie. Mais, pour pouvoir rester au travail, l'important ce n'est pas l'espérance de vie, mais d'être capable de travailler, c'est-à-dire d'avoir une espérance de vie en bonne santé. Je rappelle, moi aussi, que l'espérance de vie en bonne santé pour un ouvrier est de cinquante-neuf ans, contre soixante-neuf ans pour les cadres. Il y a donc une grande différence.
Les générations du baby-boom devaient d'abord cotiser trente sept ans et demi ans, puis ce fut quarante. Nous en sommes maintenant à quarante et un ans. Elles sont entrées plus tôt sur le marché du travail pour deux raisons : premièrement, parce que le taux de chômage était quasiment nul, deuxièmement parce, parmi elles, beaucoup moins de personnes avaient fait des études. À l'époque, on pouvait devenir cadre grâce à la promotion interne. Le taux de salariés ayant fait des études à bac + 3 ou bac + 5 était bien inférieur à ce qu'il est aujourd'hui. Commençant plus jeunes, ces salariés avaient, à soixante ans, le nombre d'annuités requis. Aujourd'hui, même en ayant fait des études, les salariés ne sont pas nécessairement cadres.
En 1965, l'âge moyen d'entrée dans la vie active était de 18,3 ans. Les salariés de cette génération peuvent donc atteindre l'âge de départ à la retraite sans problème de durée de cotisation. En 1997, cet âge moyen était passé à 21,7 ans, ce qui veut dire que, avec votre projet, ces salariés ne pourront pas partir en moyenne avant soixante-trois ans, ce qui relativise déjà beaucoup le passage de la borne à soixante-deux ans. Soit ils auront commencé à travailler très jeunes, à 18 ans par exemple, et ils seront obligés de cotiser 44 ans, soit ils auront fait des études, donc commencé à travailler plus tard, et alors ils n'auront aucune chance de pouvoir prendre leur retraite à soixante-deux ans.
En 2007, comme cela a déjà été dit, l'espérance de vie en bonne santé était en moyenne de 63,1 ans. Si vous repoussez l'âge de départ à la retraite, les personnes seront peu d'années en bonne santé à la retraite. Ce sera au mieux une année pour ceux qui pourront partir à la retraite à soixante-deux ans.
En 2007 encore, l'UMP et le Gouvernement utilisaient le slogan « Travailler plus pour gagner plus ». Depuis le début du débat, avec Jean-François Copé et d'autres députés, ce slogan est devenu « Travailler plus, cela veut dire travailler mieux ». Il n'est plus question aujourd'hui de gagner plus, et les salariés de ce pays s'en sont rendu compte. Il est important de souligner l'évolution de votre langage au cours de ce débat. Cela signifie-t-il que les travailleurs français travaillent mal ? Dire qu'il faut travailler mieux, c'est quelque peu insultant pour ceux qui sont soumis à l'intensification du travail, des cadences, au travail de nuit qui se développe de plus en plus, ou au travail le dimanche, y compris dans les supermarchés d'alimentation qui ouvrent même le dimanche après-midi malgré nos protestations auprès de la direction du travail.
Souvenez-vous de cette vague de suicides qui ont eu lieu dans de nombreuses entreprises, justement parce qu'on demandait aux salariés de travailler plus, pas nécessairement pour gagner plus d'ailleurs. N'oublions pas non plus le temps partiel imposé dont 80 % des femmes sont victimes. Ce temps partiel est mal payé. Il permet notamment à la grande distribution de faire des profits faramineux.
Hier, Éric Woerth disait, en réponse à Marc Dolez, que nous étions face à un choix de civilisation. Nous considérons, pour notre part, que la retraite est un droit. Il est légitime, en effet, de ne pas passer toute sa vie à la gagner. Il est légitime de partir à la retraite tant qu'on est en bonne santé. La retraite ne doit pas être synonyme de dépendance, il doit exister un troisième temps de la vie libéré des contraintes du travail qui permet de se livrer à d'autres activités, y compris d'avoir le droit de ne rien faire. On peut avoir le droit de rêver, de lire,...
..on n'est pas obligé d'être toujours utile, à soixante-cinq ans et plus.
Comme vous l'aurez compris, le parti de gauche est totalement opposé à l'augmentation de l'allongement de la durée de cotisation car cela signifie, pour une majorité de salariés, le non-respect de la borne des soixante ans.
Il est contradictoire de défendre à la fois le départ à la retraite à soixante ans et l'allongement de la durée de cotisation. En effet, on ne pourra, sur la base de quarante-deux ans de cotisation, partir à la retraite à soixante ans que si l'on a commencé à travailler très jeune.
Nous sommes donc pour la retraite à soixante ans et la non-augmentation de la durée de cotisation. Nous sommes même pour la réduire par rapport à l'augmentation à laquelle nous assistons actuellement. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
La réforme dont nous discutons les modalités, outre qu'elle permettra d'assurer le financement de notre système de retraite par répartition au moins jusqu'à l'horizon 2020, apporte une véritable visibilité pour l'ensemble des salariés et des actifs.
L'absence de réforme, alors que chaque Français savait pourtant que l'équation démographique imposerait à nos régimes de retraites des contraintes inédites mais inévitables, a créé progressivement une incertitude sociale qui allait miner de manière croissante le moral de nos concitoyens et leur confiance dans l'avenir.
Chaque Français savait depuis longtemps que la solidarité pour assurer les revenus de nos retraités ne serait viable à moyen et à long terme que si nous acceptions collectivement de l'adapter à la nouvelle donne démographique et financière. À défaut, c'est le financement même des pensions qui était mis en cause, c'est la sauvegarde de cette solidarité vis-à-vis de nos aînés qui était fragilisée.
L'un des nombreux mérites des décisions prises en 1993 et de la première réforme lancée en 2003 est le courage d'avoir imposé cette question dans le débat public. En entamant ces changements, nous avions signifié aux Français que notre société était engagée sur un long chemin pour faire évoluer notre système de retraite, pour le solvabiliser en prenant en compte les contraintes démographiques comme les limites financières.
Alors que d'autres pays ont accepté d'inscrire ces évolutions dans le long terme, comme les Allemands qui construisent leur modèle – avec le soutien, je le note une fois de plus, de vos amis socialistes – à l'horizon 2029, pour repousser l'âge pivot de la retraite à soixante-sept ans, notre pays a du mal à accepter aussi rationnellement et aussi spontanément les évolutions pourtant prévisibles dès 1988, dès la publication du fameux Livre blanc de M. Rocard.
Parce qu'en 2003 il nous a semblé difficile de faire accepter une évolution plus marquée de notre système de retraite – les résistances que nous rencontrons encore aujourd'hui montrent que nous avons sur ce point peu évolué –, il nous a semblé qu'au contraire de ce qui avait cours dans d'autres pays, nous ne pouvions pas transformer complètement notre dispositif.
Aussi la réforme de 2003 a-t-elle introduit une notion de progressivité dans l'adaptation en instaurant des « rendez-vous retraites » tous les quatre ans jusqu'à 2020. Nous devions adapter, lors de ces rendez-vous, la durée d'assurance aux évolutions démographiques et à l'allongement de l'espérance de vie. Le principe voulait que le rapport constaté entre la durée d'assurance et la durée moyenne de retraite soit constant au fil des années. Ces rendez-vous devaient permettre à la France d'anticiper les évolutions nécessaires et d'adapter de manière rationnelle et pragmatique la durée d'assurance pour bénéficier du taux plein et garantir à notre régime de retraite l'équilibre financier.
Très vite, nous avons constaté que ce rythme quadriennal était anxiogène pour tous ceux qui s'approchaient de l'âge de départ à la retraite. Nous en avons mesuré les conséquences négatives pour les salariés qui pouvaient bénéficier de départs anticipés pour carrière longue – avancée sociale dont nous pouvons au demeurant nous féliciter, et à porter au crédit de la majorité actuelle puisque vous l'avez toujours refusée.
Un rendez-vous retraite ayant été annoncé en 2008, de nombreux salariés ont préféré liquider leur retraite par peur d'une remise en cause de la durée d'assurance exigée. Nous avons ainsi pu mesurer l'effet pervers d'un système de retraite dont les conditions sont révisées à échéances trop brèves. Cette incertitude sur les conditions de départ à la retraite, liée au manque de confiance dans la loi et le règlement, liée à l'instabilité des conditions de durée d'assurance, en particulier pour bénéficier du taux plein, a été source d'anxiété et a de fait découragé de nombreux salariés de poursuivre leur activité alors qu'ils avaient peut-être envie de continuer au-delà du seuil où ils pouvaient bénéficier du taux plein, par peur de cette remise en cause des conditions existantes, considérées comme trop précaires.
Nous en avons tiré deux leçons : une réforme sérieuse doit d'abord donner aux salariés une véritable visibilité à moyen et à long terme afin que chacun d'eux puisse construire son plan de carrière mais aussi son projet de retraite. Seconde leçon, il était essentiel de mieux informer les salariés, non pas à quelques mois de l'échéance de la liquidation de leur retraite, mais suffisamment en amont pour donner une véritable visibilité individuelle à chaque salarié de ses conditions de départ à la retraite. C'est l'objet de l'article 4 et nous ne pouvons que nous en féliciter.
Je ne relancerai pas le débat sur l'information que nous devons aux salariés. Je souhaite seulement qu'elle soit la plus précoce possible. Nous avons fait un choix sans doute insuffisant. Laissez-moi vous montrer l'enveloppe orange que les Suédois reçoivent chaque année, dès le début de leur carrière, dans laquelle figurent leurs droits cumulés à la retraite. Ils savent donc chaque année où ils en sont. Ils n'ont pas peur, eux, de l'avenir, de l'évolution de leur système de retraite. Nous devons souhaiter pour la France que nos concitoyens adoptent le même état d'esprit ; or la présente réforme tâche d'y contribuer. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
À travers l'article 4 nous allons évoquer l'aménagement de la procédure déterminant la durée d'assurance. Le débat me paraît prendre une bonne tournure…
Celle-ci reconnaît les deux piliers de la réforme : augmentation de la durée de cotisation, qu'elle a qualifiée de normale, et relèvement de l'âge légal dont elle nous accorde qu'il présente aussi un intérêt – pour reprendre les mots de M. Sirugue selon lequel cette réforme a bien deux pieds.
Mme Touraine, trouvant sans doute qu'elle était allée un peu loin, a déclaré que nous allions le lui reprocher. Nous n'allons pas le lui reprocher puisque, tout comme en 1993, tout comme en 2003, nous avons pris des mesures sur les retraites que le parti socialiste s'est empressé, après avoir promis le contraire, d'intégrer dans son programme, à moins qu'il ne se soit contenté de faire silence sur l'éventuelle abrogation de ces dispositions en cas de victoire à l'issue des échéances législatives ou présidentielles suivantes.
M. de Rugy fait exception – et le compte rendu paru au Journal officiel en fait foi – puisqu'il a indiqué de façon précise,…
…comme vous, monsieur Muzeau, que vous reviendriez sur le report de l'âge légal de départ à la retraite, déclarations qui ont quelque peu terrifié sur les bancs qui jouxtent les vôtres.
L'intervention de Mme Billard présente un autre élément intéressant. Vous nous avez rappelé, madame Billard, la notion de durée de vie en bonne santé. Cet indicateur existe,…
…tout comme ceux dont M. Mallot s'est servi. Nous ne contesterons pas les vérités qu'ils révèlent.
Merci de le reconnaître !
Être en bonne santé, voilà qui est important. Or, avec l'amendement présenté hier par le Gouvernement, prévoyant que la prévention serait une nouvelle mission du médecin du travail, nous allons enfin pouvoir accorder l'importance qu'elle mérite à la santé au travail.
Ainsi, au lieu d'attendre que la retraite vienne combler des difficultés liées à la pénibilité, nous pourrons mettre en place un dispositif permettant, pendant l'activité professionnelle, de prévenir les difficultés inhérentes à certaines professions, difficultés dont nous ne nions pas la réalité, bien au contraire.
Nous avons donc deux bonnes nouvelles : la reconnaissance des deux piliers sur lesquels repose cette réforme et…
…la reconnaissance qu'il fallait confier au médecin du travail une mission de prévention,…
…afin de s'assurer de l'augmentation de la durée de vie en bonne santé des salariés. Je suis donc ravie de nos échanges.
L'article 4 simplifie le dispositif d'allongement automatique de la durée d'assurance conditionnant l'attribution d'une pension de retraite à taux plein en fonction de l'espérance de vie. Cette disposition prévoit que la durée d'assurance requise pour le taux plein évolue de manière à maintenir constant jusqu'en 2020 le rapport constaté en 2003 entre la durée d'assurance et la durée moyenne de retraite. Des rendez-vous quadriennaux ont été programmés – en 2008, 2012 et 2016 – pour fixer, au terme d'une procédure précise, l'évolution de la durée d'assurance, conformément à cette règle d'indexation.
Aux termes du présent texte, serait substituée à ce dispositif pour la période postérieure à 2012, une procédure plus simple, glissante, permettant une information plus précoce des assurés. Ainsi, à compter de la génération 1955, la durée d'assurance ou de services et bonifications serait fixée chaque année par décret pris après avis du conseil d'orientation des retraites, quatre ans avant que la génération concernée n'atteigne l'âge de soixante ans.
Ce nouveau dispositif s'appliquerait donc pour la première fois en 2011, pour déterminer la durée de référence applicable aux assurés nés après le 1er janvier 1955 qui atteindront l'âge de soixante ans en 2015. En outre, l'article confirme le principe de garantie générationnelle par la loi de 2003 qui donne à un assuré la certitude que s'il retarde son départ à la retraite, les règles ne changeront pas en sa défaveur, compte tenu du décalage à soixante-deux ans de l'âge d'ouverture des droits.
En examinant cet article et en entendant ce qu'ont pu déclarer les socialistes dans leur ébauche de projet alternatif,…
…on constate qu'ils sont finalement favorables à l'augmentation de la durée de cotisation. J'imagine donc qu'ils ne peuvent pas ne pas voter cet article.
Je suis arrivé un peu en retard dans l'hémicycle car je souhaitais entendre l'avis que Ségolène Royal donnait sur ce projet sur une grande chaîne de télévision.
Mme Royal a osé déclarer ce que Pierre Moscovici n'avait pas osé dire à notre président de groupe Jean-François Copé : elle a annoncé que si les socialistes revenaient au pouvoir, ils rétabliraient l'âge légal de départ à la retraite à soixante ans.
Il me semble qu'elle a oublié de rappeler aux Français ce que Martine Aubry – vous savez que j'aime bien Martine Aubry –…
…évoquait du bout des lèvres : le retour à la retraite à soixante ans entraînerait la diminution corrélative du montant des pensions.
Pour connaître la réalité de la position du PS sur la réforme des retraites, pour mieux cerner les contours de leur projet alternatif, il faut donc aller piocher dans les déclarations de ses différents leaders. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je pensais aborder l'examen de l'article 4 en montrant l'intérêt qu'il présente puisqu'il traite à la fois de l'allongement de la durée d'assurance mais aussi des modalités d'application de l'aménagement du principe de garantie générationnelle, et puisqu'il correspond à une simplification de l'article 5 de la loi de 2003. Mais mon collègue Sébastien Huyghe l'a fait, et l'a très bien fait. J'aborderai donc cet aspect de la réforme des retraites sous un autre angle.
La génération du baby-boom, et on le sait depuis fort longtemps, puisque déjà la réforme de 2003 avait abordé cet aspect, allait bien évidemment, au moment de son départ en retraite, poser des difficultés.
Ce n'est pas la génération du baby-boom qui est à l'origine des difficultés !
Mais c'est mieux de le rappeler, parce que vous semblez parfois l'oublier, mes chers collègues. Le rapport du COR sur le sujet est relativement édifiant, et si vous prenez le temps de vous pencher sur ses préconisations, vous comprendrez mieux.
Bien évidemment, et le Premier ministre l'a rappelé il y a quelques instants, les effets de la crise que nous avons connue en octobre 2008 ont généré des diminutions de recettes. Le phénomène s'est donc accéléré. Le rendez-vous avait été fixé en 2018, mais la difficulté, c'est qu'il fallait, de manière prudentielle, et compte tenu des déficits, l'aborder dès aujourd'hui.
Dans ma circonscription, j'ai organisé des réunions pour parler de la perspective de la réforme des retraites.
Quand vous expliquez à vos concitoyens qu'il y a trois paramètres sur lesquels on peut agir, ils comprennent très facilement. C'est simple.
Vous pouvez diminuer le niveau des pensions des retraités actuels pour pouvoir garantir la retraite, qui est un droit, dans le cadre de notre pacte social, à toute personne ayant cotisé, ayant ouvert des droits. Mais paupériser les retraités actuels, ce n'était pas du tout notre vision de la réforme des retraites.
Deuxième perspective, on aurait pu augmenter de façon considérable – et c'est d'ailleurs en partie ce que vous proposez dans votre projet, chers collègues de l'opposition – les cotisations des actifs. C'était bien évidemment paupériser les salariés actuels.
Nous avons, de façon tout à fait légitime et logique, refusé ces deux perspectives. Il restait donc un paramètre sur lequel on pouvait intervenir. C'est celui qui a semblé le plus logique et le plus légitime. C'est la durée de cotisation et l'âge légal du départ en retraite.
On peut encourager la création d'emplois, par exemple. Ou encore, lutter contre les délocalisations.
Je ne sais pas si nous avons regardé la même émission télévisée, mais moi, j'ai écouté attentivement le Premier ministre. Il a évoqué trois aspects. En vérité, il n'a fait que confirmer ce que les journalistes lui annonçaient. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe GDR.) Les journalistes ont commencé par dire, premièrement, que l'âge légal du départ en retraite, même fixé à soixante-deux ans, restait le plus précoce de tous les pays européens. J'espère que vous avez entendu la même chose. Ce sont bien les journalistes qui l'ont posé comme un principe à M. le Premier ministre. Bien sûr, il ne pouvait que le confirmer. Même fixé à soixante-deux ans, l'âge légal reste le plus précoce de l'Union européenne.
Deuxième principe qui a été posé par les journalistes : le niveau moyen des pensions en France, vous l'avez entendu comme moi, est de 1 100 euros. Bien évidemment, c'est une moyenne qui recouvre des disparités, notamment entre le public et le privé. Mais partons de ce principe : le niveau moyen des pensions en France, soit 1 100 euros, est supérieur à ce qu'il est dans les autres pays européens, et notamment chez nos voisins. Ce sont des principes qui ont été posés. Je crois qu'il est bon de les rappeler.
Je ne savais pas que c'étaient les journalistes qui faisaient la politique du Gouvernement !
Je constate que mes collègues s'énervent, alors que je suis très calme, et que je pose des données très simples.
Le troisième constat, c'est que lorsque la réforme des retraites, et notamment l'allongement de la durée de cotisation, a été négociée dans les autres pays d'Europe, et sous un gouvernement de coalition associant la gauche et la droite ou la droite et la gauche, la négociation s'est faite, très généralement, de façon systématique, dans le consensus politique. Force est de constater qu'en France, nous ne bénéficions pas de cet avantage.
Cela étant, j'ai quand même noté une vraie avancée. Notre collègue Mme Touraine a fait remarquer tout à l'heure, et très judicieusement, qu'il y avait un accord sur l'allongement de la durée d'assurance. Il ne s'agit pas de la notion d'âge légal du départ en retraite, mais vous avez admis le principe d'un allongement de la durée d'assurance. Je l'ai noté, tant j'ai été surprise. Je trouve que cette avancée est significative. Elle me sied parfaitement.
Vous avez entendu comme moi un journaliste – parce que je n'ai pas seulement été attentive aux propos du Premier ministre, qui étaient fort intéressants –, M. Jean Boissonnat, qui a dit en substance : « La gauche n'a quasiment rien fait pour les retraites, sauf le fonds de réserve. »
Dans le cadre démocratique de notre débat, Mme Touraine a dit tout à l'heure qu'elle acceptait le principe d'un allongement de la durée d'assurance. Réciproquement, je reconnais, de mon côté, le bien-fondé de la création de ce fonds de réserve, parce que, dans le cadre de cette réforme, il prend toute sa dimension. Je crois que c'est là l'intérêt d'un travail commun qui a été fait dans le passé et qui va nous servir pour l'avenir. Il va permettre, comme l'a très bien dit M. le Premier ministre, de préserver le niveau des pensions pour toutes les générations à venir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je souhaitais m'exprimer pour soutenir l'amendement qui a été déposé par notre collègue Jean-Pierre Decool et que j'ai cosigné. Il proposait de prendre en compte le bénévolat dans le calcul de la retraite, jusqu'à douze trimestres, comme il l'a expliqué tout à l'heure. Cet amendement a malheureusement été déclaré irrecevable. J'en prends acte.
Toutefois, je profite de cette intervention pour vous demander, monsieur le secrétaire d'État, de faire un geste envers les millions de bénévoles que compte notre pays, et qui représentent les forces vives de notre territoire, notamment en milieu rural. Je suis bien placé pour le constater chaque jour dans mon département de la Mayenne.
Ils font preuve, tous, de générosité et de dévouement, d'un véritable sens de l'engagement. Il est temps, il est même grand temps que nous leur exprimions notre reconnaissance.
Au-delà de cette reconnaissance, une telle mesure permettrait aussi de redynamiser et de pérenniser l'action associative dans notre pays.
Enfin, je rappelle que le Président de la République, à l'occasion de la vingtième Journée mondiale du refus de la misère, avait prononcé un discours où il avait évoqué sa volonté de voir les années de bénévolat prises en compte dans le calcul de la retraite.
C'est pourquoi il me paraîtrait tout à fait légitime de mettre en place un dispositif qui aille dans ce sens, et je vous en remercie vivement par avance.
Nous avons eu à plusieurs reprises l'occasion de revenir sur l'opposition qui existe entre les différents types de réforme que nous voulons faire. Je voulais insister sur le véritable enjeu de la réforme des retraites, qui, selon nous, est un peu différent. Il s'agit d'assurer le financement des retraites des toutes prochaines années, mais aussi de le garantir en procédant à une répartition équitable, à travers une participation accrue des revenus du capital, lesquels, plus que ceux des salariés, ont bénéficié de la richesse produite collectivement ces dernières années.
Mais au-delà même du débat sur les retraites, se posent, plus fondamentalement, les questions du travail, de la possibilité d'avoir des perspectives de carrière, de se former, de contribuer à la vie sociale sous d'autres formes que les seuls emplois du marché, de partir en retraite de façon choisie, en fonction de ce que l'on veut faire. Plusieurs collègues, sur différents bancs, ont rappelé tout à l'heure ces questions, qui se posent à nous tous.
La réforme qui nous est proposée aligne l'âge légal tout en l'augmentant, et ce alors même que l'hétérogénéité des carrières, avec des temps de cotisation variables, va priver des salariés dont la carrière a été longue de la possibilité de partir en retraite.
La diversité des parcours existait hier, elle ne va pas disparaître demain. Elle va même s'accroître. Prendre sa retraite, donc, interroge sur la mobilité des salariés et l'égalité qu'il convient d'améliorer entre eux : certains auront eu une vie professionnelle bien remplie, d'autres n'auront pu éviter les périodes de chômage, d'autres encore auront connu le temps partiel subi.
Je l'ai dit, beaucoup de salariés ont travaillé assez pour pouvoir partir en retraite sans attendre soixante ans. À l'inverse, certains entrent – et entreront demain – plus tardivement dans le monde du travail et pourront choisir de rester au-delà de cet âge légal, que nous souhaitons fixer au plus bas, justement pour favoriser les choix.
C'est pourquoi, logiquement, nous proposons aussi la création d'un compte temps personnalisé, qui doit inclure le temps du travail, mais aussi le temps de la formation, initiale ou continue, ainsi que le temps passé à des activités choisies non salariées, et le temps de la retraite. Ce suivi individualisé pourrait ouvrir des droits dans le cadre du système de retraite par répartition.
Ces droits pourraient être répartis tout au long de la vie. Ainsi, le temps consacré à se former pourrait constituer un crédit qui serait réparti plus tard, si l'on n'a pas été contraint de commencer à travailler tôt.
Ces droits pourraient aussi être pondérés ou bonifiés en fonction des choix collectifs.
Tel est le sens de la création d'un compte temps individualisé, qui aurait pu être aussi celui des droits. On établirait ainsi un double lien : un lien entre les droits individuels, disponibles et acquis, et les différentes périodes de la vie ; et un lien entre les droits personnels, les priorités collectivement définies et les temps individuellement choisis par chacun.
Vous le voyez, l'enjeu est de procéder à une réforme juste. Celle qui nous est proposée ne l'est pas. Et le débat sur les amendements nous permettra de mesurer tout l'intérêt qu'il y aurait à définir ces différents temps, tout au long de notre carrière, qu'il s'agisse de la formation ou du travail. Il est possible de construire notre vie autrement que sur le schéma : formation, travail et retraite.
Je voudrais parler du maintien des possibilités de départ anticipé. L'exposé des motifs du projet de loi précise que le report de l'âge légal s'accompagne du maintien du dispositif de départ anticipé pour carrière longue, qui a été créé par la loi Fillon. On ne peut que s'en réjouir. Et d'ailleurs, tout le monde s'en réjouit aujourd'hui, même ceux qui ne l'avaient pas approuvé à l'époque.
Toutefois, monsieur le secrétaire d'État, pour les non-salariés agricoles, ce dispositif est, en l'état, difficilement applicable. En effet, ils n'ont eu la possibilité de cotiser pour l'assurance vieillesse qu'à compter de leur majorité, qui était de vingt et un ans pour les générations qui partent actuellement en retraite. Ainsi, tout départ anticipé est impossible, puisque le dispositif n'est ouvert qu'à ceux qui ont débuté leur activité au plus tard à dix-sept ans.
La seule solution consiste à ouvrir des possibilités de rachat. C'est ce qui a été fait en 2004 pour les aides familiaux. Les tarifs ont malheureusement été revus à la hausse en 2009, empêchant de fait tout départ anticipé.
Monsieur le secrétaire d'État, le report de l'âge légal ne peut donc s'entendre que si des possibilités de départ anticipé sont ouvertes pour ceux qui ont débuté leur carrière de manière précoce. Ainsi, il est nécessaire de permettre des rachats aux aides familiaux, mais aussi aux chefs d'exploitations et aux conjoints qui ont exercé avant dix-sept ans, ce qui n'est pas le cas actuellement. Il est indispensable, en outre, que ces rachats puissent s'opérer à un coût raisonnable, car le nombre d'années à racheter est au minimum de quatre.
En abordant l'examen de ces articles 4 et 5, nous sommes au coeur de cette réforme, et aussi, d'une certaine manière, au coeur de la différence entre les approches qui sont les nôtres.
En effet, l'allongement de la durée de cotisation ou le report de l'âge légal se heurtent d'une manière ou d'une autre à l'aspiration forte de nos compatriotes à une retraite la plus longue possible. On est dans l'ère de la société du loisir, chacun l'a bien compris. J'ai entendu à gauche un certain nombre de propos caricaturaux qui ne vous grandissent pas, mes chers collègues : nous n'avons pas plus que vous la volonté d'imposer à nos compatriotes un dernier temps de vie qui serait un enfer. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous voulons autant que vous qu'il soit un nouveau temps, agréable et intéressant où l'individu puisse construire une autre période de son existence.
Si l'on examine les propositions en présence, il faut constater, mes chers collègues de gauche, que vous n'êtes absolument pas d'accord sur les retraites. La démonstration de Mme Billard a eu le mérite de la cohérence.
Mais ce n'est déjà pas si mal parce qu'en politique, la cohérence n'est pas toujours la qualité la mieux répartie. Vous dites, madame Billard, que vous êtes plutôt pour l'augmentation de la durée de cotisation. Mais comme vous avez compris, suite aux rapports du COR et de nombreux experts, que cette donnée ne serait pas efficace, vous l'excluez elle aussi.
Alors que votre discours, chers collègues socialistes, est fondé sur une double ambiguïté – ou sur une double hypocrisie, madame Touraine. En effet, depuis les quinze dernières années, vous avez voté systématiquement contre tous les projets de réforme des retraites : contre l'allongement de la durée de cotisation, puis contre l'harmonisation entre les fonctionnaires et les salariés du privé ; or aujourd'hui, mine de rien, vous entérinez ces réformes et ne revenez pas dessus ! Le Premier ministre le disait mardi : en matière de réforme, vous avez toujours une réforme de retard. Mais contrairement à Mme Royal qui affirme, avec un sang-froid incroyable, que vous reviendriez sur le report de l'âge légal si votre parti devenait majoritaire, pas un de nous ici ne le croit une seule seconde. Si, d'aventure, vous reveniez au pouvoir,…
…vous engrangeriez les bénéfices de cette réforme comme vous avez empoché les bénéfices de toutes celles que vous n'avez pas votées.
Pour tout dire, au début du débat, j'étais de ceux qui préféraient travailler sur la durée de cotisation.
J'avais le sentiment que c'était plus juste. Mais, mes chers collègues de la commission des affaires sociales, vous ne pouvez qu'avoir entendu comme moi, de la part de nombre de personnes qualifiées que nous avons auditionnées, que l'augmentation de la durée de cotisation portait en germe des injustices.
Je pense notamment aux étudiants. Une intervenante présente aujourd'hui dans les tribunes l'a très bien montré : si on ne table que sur la durée de cotisation, les étudiants qui font des études longues arriveront à la retraite à un âge proche de l'infini. (Protestations sur de nombreux bancs du groupe SRC.) Madame Touraine, le paramètre de la cotisation n'est donc pas, à lui seul, un paramètre juste. Il présente de surcroît un défaut énorme que tous les experts ont souligné : il serait inefficace jusqu'en 2030 – Mme Billard l'a fort bien montré. Prétendre utiliser la durée de cotisation, c'est se moquer du monde puisqu'un tel paramètre ne permettrait en rien d'atteindre l'objectif d'efficacité que nous recherchons pour essayer de sauver notre régime par répartition.
Oui, je crois, après la trentaine d'auditions que nous avons conduites, que la durée de l'âge légal est un paramètre plus efficace.
Toutes ces auditions ne peuvent pas tout de même n'avoir servi à rien, n'avoir abouti qu'à se retrouver au point de départ : projet contre projet ou thèse contre thèse. Le critère de justice introduit par le Gouvernement dans l'augmentation de la durée du temps de travail légal, c'est bien sûr le fameux dispositif des carrières longues. Il permettra d'une certaine manière de revenir au paramètre de la durée de cotisation, et même un peu au-delà de ce qui existe aujourd'hui dans notre droit positif. Le Gouvernement franchit ainsi une étape de plus en ce domaine.
La discussion des articles 4 et 5 nous place au coeur du sujet qui nous préoccupe. Il semble qu'en 2030, le critère de durée de cotisation deviendra le critère le plus efficace ; aussi peut-être, monsieur le secrétaire d'État, nos successeurs conduiront-ils alors une nouvelle réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Excellent !
Quelques mots, notamment pour répondre à notre collègueMarie-Christine Dalloz, qui, fidèle aux thèses que défend sa majorité, a tenu des propos qui ne sont pas honnêtes.
Elle nous dit qu'elle explique à ses électeurs qu'il manque des sous et qu'il faut bien combler le trou. Personne, ni dans cet hémicycle ni dans le pays – sauf des irresponsables –, ne peut penser le contraire. Permettez-moi de vous rappeler que nous rencontrons, nous aussi, les électeurs. Mais, chère collègue, là où vous n'êtes pas honnête, c'est quand vous leur affirmez qu'il n'y a que trois solutions possibles. La première, c'est la baisse du niveau des pensions, solution technique qui ne doit pas provoquer l'enthousiasme général. Je note en passant que le pouvoir d'achat des retraités a considérablement baissé depuis quelques années.
Deuxième solution : fragmenter nettement les cotisations. Cela ne déclenche pas non plus l'enthousiasme des foules.
Vous vendez donc sur un plateau, comme une évidence, une troisième solution : jouer sur la durée de cotisation ou reculer les deux bornes d'âge de départ à la retraite. C'est ce dernier choix qu'a fait votre majorité.
Certes, ces trois pistes existent, mais il y en a au moins une quatrième, que vous avez sciemment oubliée : trouver d'autres sources de financement. Je sais que cela vous gêne, mais je vous rappelle qu'il existe des sources de financement tout à fait importantes auxquelles vous et vos collègues ne voulez pas toucher, par amitiés personnelles peut-être, sous l'influence de ceux qui possèdent les fortunes concernées, par idéologie, que sais-je encore ?
Quand on rend 30 millions à Mme Bettencourt, vous comprendrez que cela heurte une immense majorité de Français. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Madame Dalloz, vous avez évoqué l'interview du Premier ministre. Un journaliste – dont je crois savoir qu'il n'est pas un dangereux révolutionnaire – lui a demandé si, eu égard à la crise actuelle, il ne serait pas judicieux de trouver des sources de financement nouvelles et de faire au moins une pause dans l'application du bouclier fiscal. Nous sommes évidemment partisans de le supprimer, mais une pause de quatre ou cinq ans serait de toute façon très bien comprise. Mais on s'est rendu compte qu'il y avait un blocage complet. Vous restez, comme lui, droit dans vos bottes. Il serait pourtant honnête de dire aux Français qu'il n'y a pas que trois pistes. Chacun pourrait après choisir, prendre ses marques, se positionner dans un camp ou dans l'autre. Mais il y a bien quatre voies. Vous contestez la quatrième que nous prônons, c'est votre choix, mais vous ne pouvez pas dire aux électeurs qu'il n'y en a que trois. C'est faux. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Quel que soit le sérieux des textes que l'on examine, quels que soient nos choix politiques et nos différences, il y a des moments où on arrive in fine à avoir de véritables échanges, qui montrent qu'au moins certaines analyses nous sont communes. Les différentes analyses exposées ont montré beaucoup de points de convergence que l'on ne met pas forcément en avant.
Quel que soit le regard que l'on porte sur la loi de 2003 et sur ce projet de loi, nous faisons tous le même constat :…
…nous sommes fiers du système par répartition, de ce système qui consiste à payer les actifs du moment sur la base des cotisations du moment, dans l'exigence d'un minimum d'équité et de justice. C'est un premier point de convergence. De facto, je crois foncièrement que nous sommes tous attachés au régime par répartition.
Mais je crains, monsieur Roy, que le projet présenté par le parti socialiste nous fasse sortir de ce régime. En effet, si l'on fiscalise les ressources pour payer les retraites du moment, on risque d'asseoir leur financement sur un aléa : celui de la crise. Tout le monde sait que les recettes fiscales s'effondrent lors d'une crise. Sans polémiques inutiles, je tenais à vous montrer que nos interrogations sur votre quatrième piste sont légitimes. En tout cas, notre volonté commune de préserver le système par répartition suscite un consensus sur le fait de devoir tenir compte de l'accroissement de l'espérance de vie.
Deuxième point de convergence : nous considérons qu'il faut faire une partition entre ce qui va relever de la retraite et ce qui va relever du temps de travail pour faire un calcul qui soit juste. Pourquoi cette règle instaurée par la loi de 2003 est-elle une bonne règle ? Parce qu'elle permet d'assurer le maintien du versement des pensions à un taux constant en ajustant le dispositif dans le temps, quelles que soient les différences en termes de pyramide des âges, d'espérance de vie, de longévité en bonne santé, etc. Sur la base de l'application de la loi de 2003, nous savons que l'on maintient le rendement et que l'on répond ainsi à une requête et à une aspiration naturelle de nos concitoyens.
Et puis il y a un troisième point de convergence, que Dominique Dord, a parfaitement résumé : nous sommes dans une logique simple et pratique, basée sur la possibilité d'augmenter le nombre des années de cotisation mais également sur la possibilité de retarder l'âge légal d'ouverture des droits à la retraite. C'est un vrai sujet dont nous pouvons parler sans polémiquer. Si l'on avait misé exclusivement sur l'allongement de la durée de cotisation, Éric Woerth l'a répété, nous aurions été amenés à proposer quarante-sept années de cotisation pour avoir le même rendement.
Quel est finalement l'objectif que nous poursuivons, quelles que soient les imperfections des systèmes que nous proposons ? Aboutir à un dispositif qui garantisse le système par répartition, qui nous permette de payer les retraites sur la base des cotisations des actifs.
Notre logique montre notre attachement au système par répartition.
Vous me permettrez de poser une question, suite à l'intervention de Mme Touraine, très simplement et avec beaucoup de précautions, afin de tenter de rester dans l'esprit décrit précédemment.
Madame, philosophiquement, je suis assez proche de la théorie qui consiste à s'intéresser à ce que vous appelez la retraite à la carte, choisie en quelque sorte. Vous l'avez expliquée clairement…
…et comme d'habitude élégamment, de telle sorte que l'on puisse comprendre que vous êtes attachée à la prise en compte des différentes situations, sans avoir un modèle qui s'applique de façon univoque et uniforme à tout le monde.
Nous sommes totalement d'accord avec cela. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle plusieurs de mes amis du groupe UMP ont bien exprimé les choix que nous avons portés : celui des carrières longues, qui montre que nous tenons compte de ces différences de vies professionnelles ; notre manière d'appréhender la pénibilité. Pardon de le dire, les derniers amendements présentés par le Gouvernement témoignent de notre volonté d'avancer dans cette direction.
Cela étant, l'une de mes interrogations va certainement susciter des raisonnements sur ces bancs. À un moment ou un autre, cette retraite choisie ne risque-t-elle pas de générer des inégalités ? Ceux qui ont plus de bonnes raisons ou de chances de prendre leur retraite plus tôt pourraient le faire alors que d'autres, en situation de plus grande fragilité, ne le pourraient pas.
Monsieur Mallot, je poserai la question différemment : alors même que nous tentons de faire en sorte que la réforme soit équitable, juste, dans la tradition de la retraite par répartition,…
…votre petit dispositif, faute d'être totalement contrôlé, n'introduirait-il pas un peu d'iniquité dans le système ? Ce serait contraire aux traditions de notre pays, à la philosophie qui est la nôtre et sans doute la vôtre aussi – je ne fais aucun procès d'intention sur ce sujet. Autrement dit, les plus chanceux dans la vie pourraient disposer d'une retraite anticipée, tandis que les autres ne le pourraient pas.
Je me permets de vous poser la question car, très franchement, j'en suis au stade où je me dis qu'il vaut mieux un dispositif qui assure la pérennité du système qu'un autre qui génère un peu de risque. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
L'idée est très séduisante, mais il faut la décliner de manière à en mesurer les effets afin de ne pas risquer de casser le système.
Notre projet n'a pas la prétention de proposer une espèce de « grand soir » général remettant tout en cause. Cet après-midi, nous avons même manifesté notre volonté d'étudier d'autres pistes. Le Gouvernement ainsi que plusieurs orateurs de la majorité comme de l'opposition sont partis de l'idée selon laquelle d'autres pistes pouvaient être explorées. Il a été envisagé de s'orienter, à terme, vers d'autres systèmes : optionnels, par points. Toutes les options sont possibles.
Cela étant, nous sommes actuellement confrontés au défi du financement tout en étant attachés à la retraite par répartition et en ne voulant en aucun cas introduire de l'injustice dans le système.
Dans ces conditions, peut-être est-il prudent de s'orienter vers les solutions de sagesse que nous proposons ensemble, dans le cadre d'un débat apaisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je suis saisi d'un amendement n° 145 , tendant à supprimer l'article 4.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Depuis la réforme Fillon de 2003, l'allongement de la durée de cotisations est, semble-t-il, définitivement devenu l'alpha et l'oméga de votre politique.
Il se poursuit, pénalisant particulièrement les moins qualifiés, les femmes, toutes celles et ceux ayant des carrières incomplètes, chaotiques. Haro sur les quarante annuités, place aux quarante ans et demi aujourd'hui, aux quarante et un ans en 2012, aux quarante et un ans et demi en 2020, bref à des durées de cotisations de plus en plus élevées.
Rappelons une nouvelle fois que, dans votre projet, l'effort et l'équité – comme vous dites – repose à plus de 80 % sur les salariés.
Dans le prolongement de la loi de 2003, l'article 4 de votre réforme, que nous proposons de supprimer, confirme et conforte le principe tout à fait discutable d'allongement automatique de la durée d'assurance en fonction de l'allongement de l'espérance de vie moyenne, conduisant à partager les gains d'espérance de vie à hauteur d'un tiers pour la retraite et de deux tiers pour le travail.
Non, mesdames et messieurs, il n'y a rien de normal, rien d'évident, rien de logique à ce que l'augmentation de l'espérance de vie soit synonyme d'allongement de la durée du travail. Souvenez-vous que notre pays compte 10 % de chômeurs et du fait que 680 000 emplois ont été détruits au cours des dix-huit derniers mois.
Comme mes amis l'ont fait depuis le début des débats, je rappelle que 100 000 emplois représentent 1,9 milliard de recettes de cotisations en moins, dont 40 % pour les retraites.
Plus d'espérance de vie, c'est aussi le droit à une autre vie. Jamais nous n'accepterons que les retraités soient considérés comme une charge pour la nation, ce que vous faites en permanence. Ils sont un atout pour un autre développement de notre société.
Ce principe automatique, aveugle, accentue les inégalités entre les retraités : temps de vie à la retraite, montant de pension. Il ne tient absolument pas compte des différences d'espérance de vie marquées selon les catégories socioprofessionnelles, ni des écarts d'espérance de vie en bonne santé après soixante ans, plus sensibles encore.
Rappelons encore une fois qu'à soixante ans, un cadre peut espérer vivre sept ans de plus qu'un ouvrier. Rappelons aussi qu'un ouvrier de trente-cinq ans peut aujourd'hui espérer une vie sans incapacité sensorielle ou physique jusqu'à cinquante-neuf ans, alors que cette espérance est de soixante-neuf ans chez les cadres, soit dix ans de plus. Il y a encore beaucoup de progrès à faire.
Les inégalités sociales d'espérance de vie se doublent donc d'inégalités d'espérance de vie sans incapacité. Cette double peine pour les ouvriers, mise en lumière par l'INED depuis 2003, est une réalité que votre réforme ignore et conduira même à aggraver.
De la même façon, il est faux de prétendre aux vertus d'un choix de départ à la carte. Cela n'existe pas.
Il n'y a pas de choix quand il y a une décote, par exemple. Aucun salarié qui peut prétendre à une retraite d'environ 1 000 euros ne peut se permette de perdre 100 euros. Cela n'existe pas.
En couplant les deux paramètres – durcissement des bornes d'âge et des durées de cotisation –, vous faites le choix de faire de notre système de retraite l'un des plus durs d'Europe.
Nous contestons vos choix. Je rappelle encore une fois quelques chiffres. Entre 1983 et 2006, la part des salaires dans la valeur ajoutée a chuté de 9,3 % – 100 milliards d'euros par an ! – entraînant des conséquences sur les recettes de cotisations. Au cours de la même période, la part des dividendes versés aux actionnaires est passée de 3,2 % à 8,5 % du PIB.
Si vous voulez comprendre, vous pouvez aussi réfléchir à un autre chiffre. Entre 1993 et 2009, les revenus financiers des entreprises et des banques ont progressé de 143 %. Regardez le champ des possibles, ce qui est ouvert avec une autre répartition des richesses entre travail, capital, développement de l'emploi et des rémunérations.
Nous rejetons donc, vous l'avez compris, votre perspective qui vise la capitalisation à terme. Nous demandons donc la suppression de cet article 4.
Cet article simplifie le dispositif d'allongement de la durée de cotisation prévu par la loi Fillon et il le rend plus lisible. Pourquoi le modifier ? J'émets donc un avis défavorable à l'amendement présenté par M. Muzeau.
Le Gouvernement est évidemment du même avis que la commission.
Je ferai trois remarques. Depuis 1982, l'espérance de vie a augmenté de six ans et trois mois.
De fait, l'article 4 ne fait que proroger le rapport constant entre durée d'activité et de retraite, qui est favorable au régime sans pénaliser les assurés.
Monsieur Muzeau, la suppression de l'article 4 entraînerait aussi celle de deux dispositifs importants. Le premier, explicitement évoqué par les précédents orateurs, permet aux assurés de disposer d'une information nettement plus claire, récurrente et lisible, répondant davantage à leurs attentes. En second lieu, nous assurons des droits qui sont ceux de l'âge de soixante ans, et non pas ceux de la génération à laquelle on appartient – ce qui peut inciter à partir plus tard.
Ce dispositif est bon pour le système et pour les assurés. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable à l'amendement de suppression.
Cet amendement du groupe GDR est très important. Il reprend autrement mais avec la même cohérence la démonstration faite par Mme Billard dans son intervention.
Très important et très cohérent, il est aussi le seul amendement de suppression présenté sur cet article. Mes chers collègues du groupe GDR, cela veut dire que vos collègues de l'opposition sont sur une ligne différente de la vôtre, comme je le disais tout à l'heure.
Par conséquent, quand vous fustigez cet article 4, cela s'adresse autant au Gouvernement et à la majorité qu'à vos collègues de l'opposition.
Monsieur Muzeau, vous avez eu raison de rappeler votre opposition, argumentée mais systématique, à toute augmentation de la durée de cotisation. Vous avez rappelé que vous étiez hostile à l'augmentation de la durée de cotisation prévue par la loi Balladur pour les salariés du privé. Vous avez rappelé que vous étiez hostile à l'harmonisation à la hausse de la durée de cotisation prévue pour les salariés du public. Nous aurions probablement pu continuer la démonstration sur les régimes spéciaux.
Faisant preuve d'une grande cohérence, vous demandez donc la suppression de cet article.
Nos collègues socialistes, eux, empochent les réformes des régimes de retraites adoptées depuis quinze ans, après avoir été hostiles à chacune d'entre elles. Ils ne reviennent pas sur ces augmentations de la durée de cotisation ; ils les empochent.
Ils y étaient hostiles ; ils sont pour à présent. Ils ont toujours une réforme des retraites de retard. Je déplore qu'ils n'aient pas la cohérence dont vous faites preuve dans votre propre raisonnement.
Je suis saisi d'un amendement n° 288 .
La parole est à Mme Marisol Touraine.
Mais au fond, en dehors de M. Tron qui a quitté l'hémicycle pour l'instant et qui a exprimé la position du Gouvernement avec un minimum d'élégance – je lui renvoie la courtoisie qu'il a manifestée à mon égard –….
…ce n'est pas la façon dont vous vous exprimez, ce n'est pas l'intervention de François Fillon, ce soir à la télévision, qui va vous fournir des argumentaires lorsque vous irez sur les marchés de vos circonscriptions au cours des prochains jours.
Avec les arguments qu'il a avancés, vous avez déjà réussi à mettre deux millions et demi de personnes dans la rue. Rien n'a changé, rien n'a bougé. Aucune des solutions qu'il a proposées ne rencontre l'assentiment des Français.
C'est pourquoi je pense que vous feriez bien d'être un peu plus humbles dans votre manière de présenter les choses.
S'il y a bien une raison pour laquelle nous n'empochons pas, pour reprendre l'expression fort discutable qui a été utilisée…
Elle est assez malvenue, en effet. Si nous n'empochons pas les réformes passées…
…c'est pour une raison très simple : elles ont provoqué la baisse du niveau des pensions.
Elles ont provoqué le retour de la pauvreté chez les personnes âgées et retraitées. En les mettant en place, sans aucun autre mécanisme d'accompagnement, vous avez engagé un processus de paupérisation des personnes âgées qui avait disparu de notre pays.
J'en viens à la question fondamentale de la durée d'assurance. Contrairement à ce que vous affirmez, il n'y a pas de points de convergence sur toute une série de sujets sur lesquels nous n'avons aucun point de convergence.
Êtes-vous d'accord pour prendre en compte la pénibilité ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.) La réponse est clairement non, comme on le voit dans votre projet original et dans les amendements présentés hier par le Gouvernement. Or la question n'est pas de savoir si l'on fixe une durée de cotisation identique pour tout le monde et gravée à jamais dans le marbre. Elle est de réfléchir au moyen d'intégrer non seulement les différences de parcours et les différences de pénibilité, mais également les différences d'aspiration individuelle.
Pour les étudiants, dont la situation a été évoquée par M. Dord, nous préconisons toute une série de mesures permettant d'aboutir à une modulation de la durée cotisée, comme le paiement d'une surcotisation lors du premier emploi afin de valider les années d'étude. Il n'y a aucune raison, en effet, que les étudiants rentrent dans la vie active avec la perspective d'en sortir à je ne sais quel âge.
La vraie question consiste donc à savoir comment on intègre dans la fixation des conditions de départ en retraite la réalité des conditions de travail.
Contrairement à ce que vous affirmez, nous ne proposons pas un mécanisme plus avantageux pour certains que pour d'autres. Nous proposons un système de protection fondamentale des salariés les plus modestes. C'est pourquoi – je le répète et nous le réaffirmerons lors de l'examen de l'article 5 – il n'est pas question pour nous de toucher à l'âge légal de départ en retraite car il est aujourd'hui la meilleure protection pour les salariés ayant commencé à travailler jeunes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Cette protection doit être réaffirmée, consolidée, renforcée grâce à la prise en compte de la pénibilité et à l'instauration d'un dispositif « carrières longues »…
… et d'un dispositif d'accompagnement des étudiants, toutes dispositions qui ne figurent pas dans votre réforme.
Nous proposons un choix de liberté alors que vous imposez. Or, en imposant comme vous le faites, ce sont les plus modestes qui vont trinquer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La commission a repoussé cet amendement, qui remet totalement en cause la logique de la loi Fillon.
Nous avons assisté, pendant une petite demi-heure, à une offensive qui, si elle laissait à désirer d'un point de vue rationnel, a été assez intéressante sur le plan politique. J'ai beaucoup aimé ce moment de distraction. Au terme d'une longue démonstration, M. Dord a délivré un message politique très fort consistant finalement à dire aux Français que, puisqu'ils ne sont pas sûrs d'avoir tous une retraite au taux maximal à soixante ans avec les socialistes, il valait mieux attendre de l'avoir à soixante-deux ans avec la majorité. Je vous souhaite bon courage pour défendre cette idée sur les estrades.
Mais la caricature n'est pas au rendez-vous. La question principale pour nous est la différence d'espérance de vie, qui constitue la plus grande des injustices et que nous ne pouvons pas ignorer dans ce débat. Nous retrouverons cette difficulté lorsque nous examinerons la question de la pénibilité. Selon les analyses de l'Institut national d'études démographiques, l'espérance de vie d'un ouvrier dans notre pays – cela fait partie de notre histoire collective – est inférieure de sept ans à celle d'un cadre, et la différence d'espérance de vie en bonne santé entre les deux est de dix ans.
Nous ne pouvons ignorer ce problème quand on parle d'accès à l'âge de la retraite. Selon l'INED, l'espérance de vie en bonne santé d'un ouvrier est, à trente-cinq ans, de vingt-quatre ans, ce qui nous mène à cinquante-neuf ans. Pour un cadre, on rajoute dix ans. Ce problème doit également être pris en compte pour l'allongement de la durée des cotisations.
Vous prétendez que notre système n'existe pas, que si nous maintenons l'âge légal de départ à la retraite à soixante ans tout en procédant à un allongement de la durée de cotisation, cela aboutit à une contradiction, de telle sorte que le droit accordé sera extrêmement minoré.
Je me permets de rappeler que la remise en cause de la durée de cotisation n'apparaît pas dans la plateforme commune des organisations syndicales. Elle figure dans les revendications de l'une ou de l'autre, mais pas dans les revendications communes à toutes.
Par ailleurs, nous savons que ceux qui ont l'espérance de vie en bonne santé la plus faible sont ceux qui arrivent à soixante ans avec la totalité des cotisations, c'est-à-dire prochainement quarante et une annuités. Comment ? Par la bonification. C'est pourquoi le débat sur la pénibilité aurait dû précéder celui sur les retraites. C'est la seule entrée qui aurait permis d'aboutir avec les partenaires sociaux à une réforme juste et de prendre en compte les travaux de l'INED et du COR : à quelqu'un qui a travaillé dix ans aux intempéries, en « trois huit » ou de nuit, on pourrait, comme nous le proposons, proposer une ou deux années de cotisation de compensation. Les conclusions du dernier rapport du Conseil économique et social sur le travail de nuit sont pires que ce que l'on pouvait imaginer. J'ignorais moi-même le lien qui pouvait exister entre le travail de nuit et le développement du cancer du sein chez les femmes.
Pour ceux qui rentrent plus tard dans la vie active, parce qu'ils ont fait des études – ce qui représente une chance –, on leur offre la possibilité de payer des cotisations supplémentaires au cours de la première partie de leur vie active afin d'arriver à soixante ans avec le nombre d'annuités requises.
Quand nous parlons de retraite choisie, cela signifie pour le travailleur se mettre dans la situation de pouvoir partir à soixante ans, soit par le biais de bonifications, soit en se dotant des annuités nécessaires.
Il y aura toujours des personnes qui partiront après soixante ans. C'est la réalité d'aujourd'hui puisque l'âge moyen de départ volontaire à la retraite est de soixante et un ans, sauf que l'âge effectif où l'on quitte le marché de l'emploi est de cinquante-huit ans : des gens quittent le marché du travail non par choix, mais parce qu'ils sont mis dehors.
Quand l'ensemble de ces paramètres est pris en compte, notre projet nous semble juste et équilibré. Dans tous les cas, il ne présente pas la facture à ceux qui sont déjà le plus en difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je remercie M. Vidalies d'avoir, d'une certaine manière, reconnu, avec honnêteté, que le groupe socialiste ne revient pas sur les réformes précédentes, qu'il n'a pourtant pas votées.
Vous avez vu dans quel état vous avez laissé les finances de la France ?
Vous justifiez votre position par le fait que, puisque cela ne figure pas dans la plateforme commune des organisations syndicales, il n'y a pas lieu de revenir dessus. Je me permets de vous faire remarquer, monsieur Vidalies, que votre groupe aurait pu tenir le même raisonnement en 2003 puisque la CFDT avait signé la réforme que nous proposions et voter celle-ci. Le raisonnement que vous tenez aujourd'hui n'était pas valable hier.
Il y avait des conditions ! Vous n'avez pas écouté ce qu'a dit M. Chérèque aujourd'hui !
Mais peu importe. Le coeur de votre intervention – et c'est ce qui est le plus intéressant – porte sur la différence d'espérance de vie et, même si vous avez pris des accents un peu larmoyants, je comprends la démonstration. Personne ne peut être insensible à la question de la différence d'espérance de vie existant entre un ouvrier et un cadre.
Je vous ferai simplement remarquer que, dans la réforme proposée, il y a une manière assez simple de tenir compte des différences d'espérance de vie : par le biais du dispositif « carrières longues », qui permet de prendre en compte jusqu'à 80 % de ce problème.
Je vous fais également remarquer que vous ne l'avez pas voté la première fois.
Pour vraiment tenir compte de la différence d'espérance de vie des ouvriers par rapport aux autres travailleurs, il faut tenir compte également du fait qu'ils commencent généralement à travailleur plus tôt et donc voter le dispositif carrières longues qui leur est bénéfique. Vous n'avez pas été au premier rendez-vous de ce dispositif. Je crains fort que vous ne le soyez pas non plus au deuxième que le Gouvernement va vous proposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je tiens à attirer l'attention de l'assemblée, sans esprit polémique ni intention d'argumenter dans un sens ou dans l'autre, sur la question de l'espérance de vie.
Je veux simplement rappeler que l'espérance de vie de chaque individu est multi-factorielle et que le travail est relativement mineur par rapport aux autres éléments notamment d'ordre génétique, environnemental ou tenant aux habitudes de vie qui entrent en jeu.
Je veux également souligner le danger qu'il y a de catégoriser des professions en laissant entendre que les personnes bénéficiant d'une espérance de vie plus longue devraient travailler plus longtemps.
Les maîtres d'école sont ceux qui ont la durée de vie la plus longue dans notre pays. Faut-il leur demander, en compensation, de faire des années supplémentaires ?
Par ailleurs, nous savons tous que les femmes ont une espérance de vie plus longue que les hommes. Va-t-on, sur la base de ce critère, leur demander de travailler plus longtemps et, ainsi, aggraver l'inégalité hommesfemmes existant déjà sur le plan des salaires ?
La question de l'espérance de vie doit être prise en compte dans sa globalité. Il est vrai que certains métiers sont plus à risques que d'autres. Mais, si l'on prend le cas des métiers exposés à l'extérieur, nous nous apercevons qu'il y a, paradoxalement, une insuffisance respiratoire plus importante que chez les autres professions : cela vient, non seulement de l'exposition aux intempéries, mais également du fort tabagisme qui y règne, du fait de l'habitude ou de l'impression que fumer réchauffe lorsqu'on a froid à l'extérieur. Cela favorise le broncho-emphysème et l'insuffisance respiratoire.
Ce sont donc de nombreux éléments qui entrent en ligne de compte. Ne vaut-il pas mieux renforcer la médecine du travail pour garantir une meilleure prévention des pathologies dans le cadre d'une profession donnée, plutôt que de définir des catégories qui vous obligeraient à dire, par exemple, que, puisqu'ils vivent cinq ans de plus que les ouvriers, les enseignants devront travailler cinq ans de plus ? À ne retenir qu'un seul critère, on risque de commettre des erreurs fondamentales.
Je voudrais évoquer l'exemple, heureusement ancien, mais que les médecins connaissent bien, des mineurs de fond. Ils avaient atteint un tel degré de silicose qu'on leur donnait le droit partir plus tôt, mais, comme ils ne survivaient en moyenne qu'un an après la cessation de leur activité, cette retraite anticipée n'était en aucun cas compensatrice des pathologies engendrées par le métier non seulement pénible, mais générateur de mort, qu'ils avaient été obligés d'exercer. C'est dire qu'il est assez paradoxal de rapprocher, comme vous le faites souvent – et surtout dans le groupe de l'opposition –,…
…la pénibilité et l'invalidité. Certes, ce sont des éléments proches, mais ils ne se confondent pas totalement. C'est d'autant plus évident lorsque vous passez sans transition de la pénibilité à la mortalité, en omettant le passage par l'invalidité, qui paraît pourtant inévitable. Je vous exhorte donc à la réflexion, et à éviter les situations caricaturales.
Non, nous sommes au contraire en plein XXI e siècle ! Et des personnes telles que vous, mon cher collègue, vivront plus longtemps que moi qui, pendant trente ans, ai pris une garde de nuit sur deux. Vous le voyez, il y a des inégalités dans la vie. Peut-être l'hémicycle profitera-t-il de vous plus longtemps qu'il n'aura profité de ma parole, ce qui est tout de même assez scandaleux – en tout cas de mon point de vue. (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
N'oublions pas que la médecine du travail doit prévenir les maladies professionnelles, qu'il ne faut pas confondre avec la pénibilité, laquelle peut engendrer une certaine incapacité qui, même légère – 10 % –, doit permettre de partir plus tôt. Enfin, il est dangereux de raisonner en fonction de la durée de vie de telle ou telle catégorie, car, dans ce cas, les enseignants vont devoir travailler cinq ans de plus.
Réfléchissez bien. Cet argument vous servira peut-être sous les préaux ou, comme le disait Marisol Touraine, sur les marchés, mais, si vous précisez que les enseignants vont travailler cinq ans de plus, il n'aura peut-être pas l'.impact que vous souhaiteriez. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Sans doute, contrairement aux souhaits de certains, n'avançons-nous pas très vite dans l'examen du texte. Ce qui avance, toutefois, c'est la prise de conscience, sur certains bancs, que, contrairement à ce qui se dit et à ce qui s'écrit ici ou là, ce ne sont pas deux projets qui s'opposent, mais au moins trois.
Je remercie Dominique Dord d'avoir compris qu'il n'y a pas, dans cet hémicycle, une opposition, mais des oppositions. Je voudrais qu'on le réaffirme avec force et que les médias l'entendent. Quand Jean-Claude Sandrier intervient à la tribune pour dire que votre projet est un « projet Canada Dry », et que, une heure plus tard, France Info annonce que le groupe socialiste a considéré que le projet du Gouvernement était Canada Dry, je me demande à quoi nous servons.
Ce matin, mon collègue Roland Muzeau souligne que nous avons une heure et demie de débats supplémentaires, puis Marisol Touraine reprend à juste titre cet argument, après quoi une dépêche AFP annonce que les socialistes ont imposé une heure et demie supplémentaire à la majorité. Il faudrait rétablir certaines vérités. Fermons la parenthèse.
Ce n'est pas l'essentiel de mon intervention, mais je tenais à faire cette mise au point. La proposition de loi que nous avons déposée repose sur deux constats. D'une part, si la situation en matière de financement des retraites est ce qu'elle est, c'est parce que la France compte au moins 5 millions de travailleurs potentiels privés d'emploi. D'autre part, puisqu'on nous demande de prendre en compte l'allongement de la durée de la vie, nous demandons, pour notre part, qu'on prenne aussi en compte le fait que, alors que, il y a trente ans, tous les revenus étaient issus du travail, une part croissante des revenus n'est aujourd'hui plus liée au travail et ne contribue donc pas au financement des retraites.
Dans le cadre d'une véritable réforme du régime des retraites et de leur financement pour les années à venir, il faudrait prendre en considération le grand nombre de personnes qui, en France comme dans d'autres pays, bâtissent des fortunes sans travailler. Si on l'ignore, on ne réglera jamais la question des retraites. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales.
Dès lors qu'il y a accord et consensus sur la nécessité de la réforme, le débat se déplace sur la justice. D'autres solutions ont été étudiées. On pouvait, par exemple, préférer une augmentation des cotisations pesant sur le pouvoir d'achat. Or nous avons déjà un salaire direct qui, compte tenu de la puissance de notre salaire indirect, est relativement modéré. C'est donc une piste assez dangereuse, ne serait-ce que pour la motivation des salariés.
La deuxième solution, c'est l'augmentation des cotisations sur les entreprises. Mais, quand on connaît les décisions prises par l'Allemagne, ce serait aggraver à coup sûr la plus grave des inégalités, le chômage.
Troisième possibilité : on peut baisser le pouvoir d'achat des retraités. C'est une option que nous n'avons pas voulu retenir.
La quatrième solution, c'est ce que j'appelle, sans vouloir caricaturer, la « solution Père Noël » : l'augmentation des prélèvements sur le capital et sur les revenus. On devra augmenter, en effet, les impôts sur les revenus les plus élevés, non pas en augmentant les taux, mais en remettant en question certaines niches fiscales.
Mais, comme l'a dit votre ami Michel Rocard, financer des retraites par la fiscalité n'est pas une solution conforme. Dans la situation actuelle, la fiscalité doit d'abord réduire les déficits.
Les pistes alternatives, sont donc, je crois, plus désagréables du point de vue de la justice, et ont des conséquences plus nuisibles pour la croissance et la lutte contre les inégalités dues au chômage.
Si nous en restions là, chers collègues, je comprendrais vos critiques. Mais nous sommes dans la ligne de la loi de 2003. Si nous n'avions pas traité les longues carrières, si nous n'avions pas traité le handicap, si nous ne traitions pas, par des amendements que nous allons déposer, la possibilité d'expérimenter des solutions individuelles dans les entreprises, vous auriez en partie raison. Mais je rappelle que, sur 700 000 départs en retraite chaque année – au lieu de 500 000 il y a quelques années –, 135 000 à 150 000 personnes pourront partir à 60 ans ou avant. Y a-t-il un autre pays où 150 000 personnes sur 700 000 peuvent, chaque année, prendre leur retraite à 60 ans ou avant ?
Cet effort extrêmement important va dans le sens de la lutte contre le chômage, inégalité majeure, et prend en compte les problèmes de pénibilité et de longue carrière.
La solution que nous avons choisie est donc une solution de justice. C'est celle qui a été retenue partout en Europe. Cela veut dire quelque chose. Quand tous nos voisins choisissent la même solution, c'est probablement que ce n'est pas la plus mauvaise. En matière de justice, l'opposition n'a pas forcément la meilleure solution. Celle que nous proposons me paraît aller dans la bonne voie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je voudrais, comme le président Méhaignerie, revenir un moment en arrière. La question de la pénibilité au travail, qu'a reprise tout à l'heure M. Leonetti, qui veut opposer les maîtres d'école et les ouvriers, n'a pas été réglée.
Vous essayez toujours d'opposer les Français les uns aux autres. C'est votre politique depuis des mois : la stigmatisation des uns par rapport aux autres. C'est valable pour les Roms vis-à-vis du reste de la population, pour les maîtres d'école vis-à-vis des ouvriers, pour les fonctionnaires vis-à-vis des salariés du privé.
Je dis que la proposition de l'opposition est dangereuse. Ce n'est pas la peine de vous énerver et de déraper !
Je me souviens des débats que nous avons eus, il y a quelques mois ou il y a quelques années. Vous disiez que nous allions avoir des oppositions à propos de l'âge légal de départ à la retraite ou de la retraite à taux plein, mais que, sur la pénibilité, vous proposeriez une solution consensuelle. Alors que le débat sur les articles commence à peine, nous continuons à avoir des appréciations complètement différentes sur le sujet, parce que vous n'avez pas pris le temps de le régler sérieusement.
Le président Méhaignerie vient de dire que 165 000 personnes vont pouvoir partir plus tôt que l'âge légal de départ à la retraite s'il est relevé à 62 ans. Or ce ne sont pas du tout les chiffres que vient de donner le Premier ministre.
Jean Leonetti, tout à l'heure, disait qu'il ne fallait pas s'inquiéter, que la question des carrières longues avait été réglée pour ceux qui ont commencé à travailler à 14 ou 15 ans. Mais un ouvrier qui a commencé à travailler à 20 ans, ce qui n'est pas exceptionnel dans la France d'aujourd'hui, et qui aura travaillé 40 ans à refaire le bitume sur les chaussées, n'aura pas eu une carrière longue au sens où vous l'entendez, alors qu'elle aura tout de même duré quatre décennies. La pénibilité de son travail ne sera absolument pas prise en compte par votre texte, sauf si, par malheur pour lui, il peut démontrer, à 60 ans, que, à titre personnel, il a 10 % d'incapacité de travail.
La pénibilité du métier exercé n'est donc pas du tout prise en compte, même pas la pénibilité qui a pu se manifester par le développement d'un certain nombre de maladies ; c'est seulement un possible accident qui est pris en compte. Vous n'avez donc pas du tout réglé la question de la pénibilité.
Par ailleurs, je vous ai entendu, monsieur Léonetti, évoquer votre métier et les gardes de nuit, forme certaine de pénibilité, et indiquer que l'espérance de vie était plus élevée pour certains métiers, comme celui des maîtres d'école. Vous avez estimé que les personnes exerçant ces métiers devraient donc cotiser plus longtemps.
Nous n'abordons pas du tout les choses dans cet esprit. Nous voulons, pour notre part, que cette réforme, nécessaire, soit juste et que l'effort soit équitablement réparti, mais, lorsque nous indiquons que les revenus du capital ne contribuent pas de manière équitable au financement de notre système de retraite, vous écartez cette piste d'un revers de main.
Finalement, c'est sur nos conceptions respectives de la loi et de ce que doit être le droit que nous nous opposons le plus. Nous voulons laisser à chaque personne la possibilité de partir à la retraite à soixante ans, en fonction d'un choix personnel déterminé notamment par un parcours professionnel et des choix de vie. C'est précisément ce que vous refusez, comme le montrent les solutions que vous proposez. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Comme le débat s'éternise quelque peu, je serai bref. Je souhaite simplement montrer l'incohérence des orateurs socialistes : les positions qu'ils viennent d'exprimer contreviennent à leur volonté d'essayer de remonter le taux d'emploi des seniors, sujet qui sera examiné plus tard.
Je vous signale – mais vous le savez parfaitement, chers collègues – que l'âge effectif de départ en retraite est strictement corrélé à l'âge légal. Si vous ne modifiez pas l'âge légal, et vous avez dit et répété cent fois que vous ne vouliez pas le faire, vous ne changerez rien à la situation de l'emploi des seniors.
(L'amendement n° 288 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 146 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
Il est défendu.
(L'amendement n° 146 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 147 .
La parole est à Mme Martine Billard.
Il est défendu.
(L'amendement n° 147 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 148 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
À peine le dispositif de fixation de la durée d'assurance applicable est-il mis en place qu'il y est dérogé. En effet, pour les personnes nées en 1953 et 1954, il est proposé de déroger au délai préalable d'information de quatre ans.
Les auteurs de l'amendement proposent que, pour ces deux générations, soient maintenues les dispositions en vigueur pour l'année 2010.
Défavorable également.
La durée d'assurance a été programmée. Le législateur avait retenu l'année 2003. Il est logique que la durée d'assurance soit corrélée aux gains d'espérance de vie, et les générations 1953 et 1954 sont concernées comme toutes les générations. Ces gains d'espérance de vie sont réels, même si l'on constatera, à un moment donné, une forme de plafonnement, après des années de rattrapage.
(L'amendement n° 148 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 141 rectifié .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Par cet amendement, nous voulons aborder la situation des agents de la fonction publique actuellement en cessation progressive d'activité et interroger le ministre sur l'avenir de ce dispositif. Comme vous le savez, la précédente réforme Fillon de 2003 a supprimé les congés de fin d'activité, qui permettaient une cessation anticipée d'activité dans la fonction publique, et modifié en profondeur le dispositif de cessation progressive.
Avant 2003, les agents âgés de 55 ans pouvaient prétendre, après 25 ans d'activité, au bénéfice de ce dispositif qui leur permettait de travailler à mi-temps tout en percevant 80 % de leur rémunération. En 2003, il a été décidé de porter l'âge d'ouverture à 57 ans, sous réserve d'une activité de 33 ans, le tout assorti d'une rémunération dégressive. La cessation progressive d'activité a ainsi été rendue moins attractive, sans qu'aucune réflexion – c'est fort dommage – ne soit par ailleurs conduite sur la pénibilité de certains métiers de la fonction publique. Il va pourtant sans dire que ce dispositif intéressait en premier lieu les agents exerçant des métiers pénibles.
De même, aucune réflexion n'a été conduite à propos de la possible diversification de la fin de carrière des personnels de la fonction publique, alors que des fonctions de tutorat ou de formation pourraient, par exemple, leur être proposées.
Pour notre part, nous sommes profondément convaincus, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, que le dispositif de cessation progressive d'activité doit aujourd'hui être amélioré, élargi et assoupli, comme le revendiquent d'ailleurs les syndicats, tels la FSU, et non sacrifiés sur l'autel d'un rapprochement entre le public et le privé. Je pense qu'il serait d'ailleurs pertinent, vu la recrudescence des signes de souffrance au travail et la multiplication des suicides, d'envisager d'étendre de tels dispositifs au secteur privé. Si vous tenez à l'harmonisation, harmonisons dans le sens d'une amélioration pour tous, non celui de la régression au détriment des agents de la fonction publique qui bénéficiaient de ce dispositif.
Par notre amendement, nous entendons donc combler une lacune de votre projet, lequel ne traite pas de la situation des agents de la fonction publique en cessation progressive d'activité, qui ont fait ce choix en pensant possible leur départ en retraite à 60 ans. Certains de ces agents pourront, de fait, se voir privés de la possibilité de liquider leur pension lorsqu'ils cesseront leur activité ou bien percevoir un traitement inférieur à celui auquel ils auraient eu droit, sans pouvoir prolonger leur activité. Il s'agit d'éviter de telles situations préoccupantes.
Nous écouterons avec beaucoup d'attention, monsieur le secrétaire d'État, votre réponse à cette question concrète qui concerne beaucoup de personnes.
Mme Fraysse étant impatiente d'entendre la réponse du ministre, je ne voulais pas faire perdre de temps.
Votre question comporte deux volets.
Tout d'abord, la cessation progressive d'activité est un dispositif de préretraite. Par définition, le principe d'un tel dispositif – convenons-en quels que soient nos points de vue respectifs – n'est pas compatible avec l'esprit et la lettre de la réforme.
Nous sommes parfaitement d'accord sur ce point, monsieur Braouezec.
Il ne faut cependant pas que cela aboutisse à une rupture entre la rémunération et la retraite payée à l'agent public. Le recul des limites d'âge s'appliquera aux contractuels et agents publics bénéficiant des cessations progressives d'activité, mais il n'y aura évidemment aucune rupture entre la rémunération et la pension. Il va de soi que les agents seront payés jusqu'à ce qu'ils prennent leur retraite et aient droit à leur pension. Cette question ne doit inspirer aucune inquiétude.
Je suis saisi d'un amendement n° 396 , portant article additionnel après l'article 4.
Il est défendu.
(L'amendement n° 396 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 470 , portant article additionnel après l'article 4.
La parole est à M. Alain Vidalies.
Cet amendement vise à rétablir le droit existant pour les carrières longues. L'exposé des motifs de notre amendement est assez détaillé.
Le moment nous semble venu pour que le rapporteur ou le Gouvernement nous expliquent en quoi consistent exactement les améliorations qu'apporterait ce projet de loi en matière de carrières longues. Vous nous répétez effectivement depuis le début qu'il en apporte, et M. le Premier ministre a évoqué cette question, en donnant un chiffre de bénéficiaires potentiels singulièrement différent de celui de M. le président de la commission des affaires sociales, ce qui montre un problème de coordination.
Notre exposé des motifs rappelle le droit existant, qui, je le rappelle, résulte d'une partie, que nous avions votée, de la réforme de 2003.
Cela dit, vous ne rappelez pas souvent la manière dont vous avez modifié le système des carrières longues en 2008. Lorsque le nombre d'annuités nécessaires est passé de 42 à 43, cela a en effet immédiatement et considérablement réduit le champ des bénéficiaires, hors de tout processus de réforme des retraites. Entre la réforme des retraites de 2003 et la réforme d'aujourd'hui, en août 2008, vous avez changé le système par décret et sans aucun débat, non parce qu'il ne marchait pas mais parce qu'il marchait trop bien ! Sur la dernière génération, le nombre de bénéficiaires est donc subitement passé de 95 000 à 25 000.
Vous appliquez maintenant cette grille à la réforme d'aujourd'hui, en affirmant que certains bénéficieront du dispositif des carrières longues. J'attends que vous me démontriez que certains en bénéficieront effectivement, comme cela avait été le cas en 2003.
Recourrez-vous à l'un de ces raisonnements paradoxaux que M. Dord manie avec délectation…
… et selon lesquels toute absence de recul est une avancée ? En somme, ce serait mieux, parce que ce serait moins pire !
Peut-être me trompé-je, mais M. le ministre ou M. le rapporteur m'expliqueront.
Les gens qui avaient commencé à travailler à dix-sept ou dix-huit ans pouvaient partir en retraite à soixante ans à taux plein, en ayant simplement leurs quarante et une annuités. Si la démonstration consiste à dire qu'ils pourront bénéficier du système carrières longues parce qu'ils pourront continuer de partir à 60 ans, il ne faut pas oublier que la condition est d'avoir les quarante-trois annuités. Ce qui est présenté comme une avancée est seulement moins pire que le cas général. Mais par rapport au dispositif carrières longues d'aujourd'hui, c'est un véritable recul.
Pour ma part, je souhaite, étant probablement dans l'erreur – mais ayant suffisamment détaillé l'exposé des motifs –, qu'un débat vienne corriger mon erreur. Nous pourrions alors enfin comprendre pourquoi ce texte n'est pas un recul par rapport au droit positif, mais une avancée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je rappelle à M. Vidalies que dans le tome 1 de mon rapport, à la page 31, figurent toutes les explications qu'il demande. Je regrette qu'il ne l'ait pas lu auparavant.
Monsieur Terrasse, nous ne sommes pas à l'école et je ne suis pas là pour vous lire le rapport ! Il y a en tout 777 pages…
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. M. Brottes se réveille !
Nous vous demandons des explications ! C'est une exigence légitime du Parlement !
Chers collègues du groupe SRC, M. Vidalies a dit à l'instant qu'aucune explication n'avait été donnée concernant la procédure carrières longues. Ce n'est pas exact, et il suffit de regarder dans le rapport pour constater que cela a été fait.
Concernant la procédure carrières longues et pour compléter ce qui a déjà été dit, ce dispositif a été introduit en 2003 dans la loi Fillon et 700 000 personnes ont pu en bénéficier. Vous savez fort bien que nombreux sont ceux qui se sont précipités sur ce dispositif et qui, après s'être renseignés, ont pu partir immédiatement. Vous savez également que, dans le cadre de la régularisation concernant la procédure, il y a eu des déclarations sur l'honneur quelque peu frauduleuses, lesquelles ont entraîné un durcissement des règles dans un deuxième temps. Enfin, la scolarité a évolué en devenant obligatoire jusqu'à seize ans, ce qui a provoqué une chute du nombre de personnes – de plusieurs dizaines de milliers, on est passé à 25 000 – qui ont pu en bénéficier chaque année. Bref, l'ensemble de ces paramètres a tout de même permis à 700 000 personnes de bénéficier du dispositif.
Le Gouvernement a proposé de prolonger ce processus de carrières longues qui rentre dans le cadre de la pénibilité. Dans le projet de loi, aux articles 25, 26 et 27, vous retrouvez les différentes indications à ce sujet. Le dispositif est étendu jusqu'à l'âge de dix-huit ans. À l'époque, Lionel Jospin n'avait pas introduit la procédure carrières longues, alors que certains membres éminents du parti socialiste le souhaitaient. Ce processus fonctionne et beaucoup de gens demandent à en bénéficier. Nous avons donc décidé de l'étendre et c'est tout à notre honneur de l'avoir mis en place.
La commission est défavorable à l'amendement que vous avez proposé, car votre dispositif est moins favorable que le nôtre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur Vidalies, cet amendement est en réalité un hommage tardif que vous rendez à la réforme de 2003 ! Celle-ci a introduit le dispositif de carrière longue dont vous reconnaissez l'efficacité. Je m'en félicite !
Nous maintenons ce dispositif. Mais, sans revenir sur les propos du rapporteur, il y a un décalage, que nous assumons. Quand on dit « carrière longue », cela veut dire que l'on a effectivement commencé à travailler plus tôt. Dans ce dispositif, on a travaillé plus longtemps, on a commencé plus tôt et il faut deux ans de durée de cotisation supplémentaires par rapport aux autres salariés pour pouvoir partir plus tôt, parce que ce sont des carrières longues.
Dans le projet de loi, pour les personnes qui ont commencé à travailler à dix-sept ans – ce qui n'était pas le cas dans le projet de François Fillon qui avait fixé l'âge à seize ans – et qui voudraient partir à 57 ans, ce sera décalé à 57 ans et 4 mois, 57 ans et 8 mois et cela ira jusqu'à 59 ans. En tout cas, l'âge est plafonné à 60 ans pour tous ceux qui ont commencé de travailler à partir de 17 ans, tandis que les autres salariés travailleront jusqu'à 62 ans.
Nous prenons en compte le temps de travail, la durée de cotisation qui est plus longue, ce qui est normal puisqu'il s'agit d'un dispositif de carrière longue ; nous prenons également en compte le fait que l'on a commencé plus tôt puisqu'on a la possibilité de partir plus tôt.
S'agissant de l'Allemagne, monsieur Terrasse, il faudrait vérifier vos sources ! Il y a un dispositif de carrière longue en Allemagne, avec 45 ans de cotisation – je parle sous le contrôle de M. Bur. Après la réforme, c'est 45 ans à partir de 65 ans. Si vous estimez que l'Allemagne a un meilleur régime de retraite…
…nous n'avons plus qu'à décalquer la réforme allemande ce qui, à n'en pas douter, vous donnera le hoquet ! Très sincèrement, le dispositif français est plus favorable. Il concerne, monsieur Vidalies, 90 000 personnes à l'horizon 2015, soit un nombre important de personnes.
Pour ces raisons, je suis défavorable à votre amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Je remercie M. le ministre pour ses explications et j'espère que les membres de la majorité et surtout le rapporteur l'ont écouté, car le ministre a dit que j'avais raison…
Il y a un décalage, contrairement à ce que disait le rapporteur qui affirmait que la réforme ne changeait rien. C'est ce que j'ai précisé dans mon amendement et qui n'est pas très explicite dans le rapport : aujourd'hui, lorsqu'on a commencé à travailler à 14 ans ou à 15 ans, on peut partir à 57 ans si l'on remplit les conditions. Demain, on pourra partir seulement à 59 ans.
Aujourd'hui, si l'on a commencé à travailler à 16 ans – pour la génération 1953 – le dispositif est ouvert à 59 ans. Demain, on ne pourra partir qu'à 60 ans. Autrement dit, c'est moins pire, mais il n'y a aujourd'hui aucune amélioration par rapport au dispositif carrière longue. Les propos du ministre étaient tout à fait compréhensibles.
Jusqu'à présent, dans les propos des membres du Gouvernement, des parlementaires du groupe UMP et du rapporteur, ce n'était pas la lecture qui était faite de votre rapport…
Oui, mais si je n'avais pas posé la question ni présenté cet amendement et si M. le ministre n'avait pas répondu avec franchise, nous serions encore dans l'ambiguïté ! J'ai le sentiment que nombre d'entre vous devront rectifier les lettres qu'ils ont envoyés à leurs concitoyens. Vous faites campagne depuis plusieurs jours en expliquant partout que la réforme des retraites ne changeait rien sur ce point, au point que, jusqu'à présent, beaucoup de gens, y compris dans les médias, ont cru que, pour les carrières longues, la réforme était neutre. Non ! Les carrières longues seront plus longues. Cela n'enlève rien au mérite du système, monsieur le ministre. Nous avions d'ailleurs voté cette partie de la réforme de 2003, car il s'agissait d'une initiative intéressante, et vous ne nous avez jamais entendus critiquer ce système. Dans la réforme de 2003, nous avions voté les articles portant sur les carrières longues…
Nous n'avions émis aucune critique sur ces articles et nous n'étions pas opposés à la mise en place des carrières longues. Pour autant, le rapporteur n'avait pas réussi à nous convaincre du bien-fondé de l'ensemble du texte. À l'époque, il n'était peut-être pas assez efficace ! Mais il ne faut pas réécrire l'histoire. Nous avions soutenu ce système.
C'est vrai, ainsi que Xavier Bertrand.
Aujourd'hui, la situation est claire : le système carrière longue évolue avec l'ensemble de la réforme…
Toutefois, avant la discussion de l'amendement, j'étais, à l'exception du ministre, le seul à avoir compris puisque vous contestiez mes propos. Cela va vous obliger à changer votre propagande. Si vous pensez que c'est mieux parce que c'est moins pire, même si c'est moins bien qu'avant, je vous laisse développer l'argument ! Quoi qu'il en soit, les gens qui ont déjà une carrière longue devront, avec votre réforme, travailler encore plus longtemps.
Après ce que vient de rappeler avec brio Alain Vidalies, je voudrais revenir sur les propos du rapporteur concernant les carrières longues.
Monsieur Dord, j'ai fait partie de ceux qui, en 2003, avec votre collègue Xavier Bertrand, ont passé plus de deux mois dans cet hémicycle, à une époque où nous avions le temps d'exprimer nos positions et de les défendre. Aujourd'hui, compte tenu de la réforme institutionnelle qui devait donner plus de pouvoirs au Parlement, ce n'est malheureusement plus le cas…
À l'époque, nous avions voté les deux articles concernant les carrières longues, dispositif qui avait d'ailleurs permis à une organisation syndicale d'apposer sa signature sur la réforme de 2003. Aujourd'hui, j'ai écouté le secrétaire général de cette organisation qui a indiqué, après l'intervention du Premier ministre, que le compte n'y était pas.
Certes, on peut imaginer de demander des efforts aux Français, mais je ne rouvrirai pas le débat sur l'allongement de la durée de cotisation. Néanmoins, il fallait tenir compte de deux éléments. D'abord, la pénibilité, problématique à laquelle vous ne répondez pas. Nous aurons l'occasion de le démontrer, vous confondez allègrement pénibilité et handicap qui sont deux situations différentes. S'agissant ensuite des carrières longues, il faut dire la vérité. En réalité, il faudra 43 ou 44 ans de cotisations pour pouvoir bénéficier du dispositif carrières longues, ce qui n'était pas le cas dans le passé. J'avais en son temps critiqué un point de ce dispositif : j'estimais en effet que, si la mesure était équitable, elle n'était pas financée. D'ailleurs tous les experts en la matière démontrent aujourd'hui que l'ensemble de cette mesure a, en effet, coûté 2,7 milliards d'euros et qu'elle n'était pas financée.
Peut-être serait-il bon que M. le ministre, qui est en charge des équilibres financiers concernant ce texte, nous dise précisément dans l'étude d'impact quel sera le coût de cette mesure. L'étude d'impact ne le précise pas et, en dépit des compétences de notre rapporteur, cela ne figure pas non plus dans le tableau qu'il nous a remis. On peut imaginer un certain nombre de bénéficiaires, et nous ne savons pas comment ces carrières longues seront financées. Je pose donc cette question. Compte tenu de la restriction du dispositif que vous mettez en place à travers la mesure « carrières longues », ce ne sont pas, contrairement à ce qu'a dit Pierre Méhaignerie, 70 000 ou 100 000 personnes qui en bénéficieront, mais vraisemblablement, au grand maximum, 30 000 à 40 000 personnes. Nous sommes évidemment très loin de ce qui était attendu. Nous considérons donc que l'amendement défendu par Alain Vidalies a du sens et qu'il permet de remettre un peu de vérité dans l'actuelle propagande médiatique du Gouvernement.
Je serai très bref. Je veux simplement rappeler à M. Vidalies qu'effectivement, si les carrières longues seront, demain, plus longues, elles seront toujours plus courtes que lorsque vous étiez au gouvernement, puisque vous n'avez jamais agi sur ce sujet !
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
Il est des moments où le débat est sérieux et je pense qu'il vous a été attribué un rôle de divertissement. Je le prends ainsi. (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Cela permet de détendre l'atmosphère !
Il est vrai que, s'agissant de la pénibilité et des carrières longues, on entend dire que rien n'a jamais existé. Le monde se serait créé en 2003 ! Je donnerai juste deux exemples – nous ne sommes d'ailleurs pas à l'origine du premier. En 1975, alors que le départ à la retraite était fixé à soixante-cinq ans, le Parlement a adopté une loi extrêmement intéressante, et dont assez curieusement personne ne parle jamais. Cette loi passionnante à relire était alors proposée par un ministre qui se nommait Stoléru. La question de la pénibilité s'est à l'époque posée et l'âge de départ à la retraite a été ramené à soixante ans à partir de critères qui n'étaient pas d'incapacité, mais d'exposition aux risques. Cette question a donc déjà été soulevée et cela a permis d'avancer l'âge de la retraite. Nous avons ensuite généralisé la retraite à 60 ans. Pour que vous soyez totalement informé, je citerai aussi le CATS, mis en place par Martine Aubry, qui prenait en compte des facteurs permettant de partir avant soixante ans. Évitez d'utiliser des slogans qui marchent sans doute lors des réunions de l'UMP, mais nous sommes ici à l'Assemblée nationale et il serait préférable de s'en tenir à des arguments un peu plus rigoureux.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Très bien !
(L'amendement n° 470 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 472 .
La parole est à M. Alain Vidalies.
J'ai été quelque peu déstabilisé par la référence aux difficultés historiques évoquées.
Nous traitons toujours des carrières longues. Quelle approche peut-on avoir de ce système ? Le ministre a fait preuve d'objectivité, ce dont je lui donne acte, lorsqu'il a précisé dans son intervention que les carrières longues devraient être plus longues. Le décalage automatique de l'ensemble du système est-il aussi rationnel qu'il y paraît ? Le fait de dire – y compris pour les carrières longues – que l'âge de départ à la retraite sera retardé est-il marqué du sceau de l'évidence ? Non ! Le débat mérite au moins d'être ouvert. En effet, exiger, puisque vous en avez ainsi décidé, le report de l'âge de départ à la retraite à soixante-deux ans pour une personne en bonne santé ou qui a eu une carrière normale – qui le supportera, ou en subira les conséquences plus tard – n'a pas la même portée qu'ajouter, sans prendre en compte l'incidence physique et le risque encouru, des années de travail à une personne qui a travaillé longtemps ! Face aux propos tenus par M. Leonetti…
… je suis, pour ma part, assez réservé. Nous y reviendrons lorsque nous débattrons de la pénibilité, mais tout de même ! M. Leonetti a voulu démontrer, s'agissant de l'état de santé des salariés, et ce en dépit des travaux de l'INED, qu'on ne pouvait privilégier le lien entre activité professionnelle et espérance de vie, mais qu'il convenait de s'intéresser aux conditions de vie. Nous sommes près de la ligne jaune ! Décidément, on entend parfois des discours qui appartiennent à une histoire sociale que je croyais révolue à droite – au temps où certains s'opposaient aux congés payés parce qu'ils ne savaient pas très bien quel usage en feraient les ouvriers…
Je le pense très honnêtement, le discours selon lequel le mode de vie justifie probablement une espérance de vie différente est difficilement acceptable. Je vous le dis comme je l'ai ressenti. Nous aurons ce débat lorsque nous aborderons la pénibilité.
Je tiens simplement à préciser à ce stade qu'il n'est pas évident d'appliquer automatiquement le décalage. Nous souhaitons, pour notre part, nous en tenir au droit positif. Puisque, à vous entendre – exception faite de l'intervention de M. le ministre –, il semble que la règle ne soit pas changée, votez notre amendement.
Les explications sont les mêmes que celles que je viens de donner pour l'amendement n° 470 . Donc, avis défavorable.
Avis défavorable. Nous avons déjà évoqué le sujet.
Je peux retenir l'idée forte qui consiste à se demander à quel âge on est en bonne santé et à quel âge on ne l'est plus. Les statistiques diffèrent. Eurostat gère le problème d'une certaine manière. Il est alors pris en compte le fait que l'on ne souffre d'aucune affection, d'aucune gêne physique, ce qui est relativement rare. Tout cela relève du déclaratif. L'INSEE considère, pour sa part, l'espérance de vie sans incapacité, qui arrive heureusement beaucoup plus tard et s'allonge sensiblement. Une personne ayant eu une carrière longue partira à moins de soixante ans ou à soixante ans. Elle ne sera pas impliquée dans les dispositifs de pénibilité. Seul sera considéré le fait qu'elle a travaillé plus longtemps que les autres parce qu'elle a commencé plus tôt. Je pense que c'est un bon dispositif et qu'il ne faut pas le changer aujourd'hui. Les efforts consentis par les uns doivent l'être aussi par les autres. Quand on allonge le temps où l'on a l'âge de travailler, cela concerne également les carrières longues en dessous de soixante ans.
Je suis saisi d'un amendement n° 474 .
La parole est à Mme Marietta Karamanli.
Par cet amendement, nous demandons que soit dressé un état des lieux s'agissant des carrières longues. On l'a dit tout à l'heure, de nombreux Français travaillent ou vont travailler tôt et longtemps. La possibilité de prendre sa retraite, après avoir cotisé suffisamment longtemps, pour profiter de la vie à venir est tout de même un principe de justice. M. Vidalies a particulièrement insisté sur ce point.
Nous avons également évoqué précédemment l'espérance de vie. Si l'espérance de vie à la naissance et l'espérance de vie à soixante ans progressent, reconnaissons que l'espérance de vie, qui plus est en bonne santé, après soixante ans est plus courte. Notre collègue Mallot a rappelé tout à l'heure que l'espérance de vie pour un homme est actuellement de soixante-trois ans. Cela signifie qu'en moyenne, à partir de cet âge, surviennent souvent de graves ennuis de santé, sans compter ceux liés au travail lui-même. Dans ces conditions, préserver le droit de partir plus tôt pour ceux qui ont commencé tôt n'est que justice.
Il convient aussi de rappeler qu'à la question des carrières longues, s'ajoute celle des effets du durcissement de la législation. Concrètement, de nombreux Français peuvent se voir refuser un droit au départ, même après une longue carrière, au motif que, n'étant pas nés au bon trimestre ou à la bonne date, parfois à quelques jours près, ils ne peuvent pas faire valoir le temps requis. Ces fameux effets de seuil doivent être mieux connus et évalués pour que soit apportée une réponse adaptée aux salariés concernés.
C'est pourquoi nous demandons qu'on fasse le point sur les effets d'une mesure progressivement vidée de la justice qu'elle a pu comporter, et qui doit être corrigée pour permettre à ceux qui ont travaillé tôt et longtemps de partir plus tôt à la retraite et de passer un plus long temps en bonne santé. Tel est l'objet de cet amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Des évaluations régulières sont réalisées, d'une part, par la Cour des comptes et, d'autre part, par la Commission des comptes de la sécurité sociale. Les chiffres nous sont communiqués chaque année au moment de la discussion du PLFSS. Nous pouvons donc très bien, PLFSS après PLFSS, transcrire dans les rapports élaborés à cette occasion la demande faite ici.
Pour compléter la réponse que j'ai faite tout à l'heure à M. Vidalies, qui me reprochait de ne pas avoir inséré un tableau dans mon rapport, je tiens à lui indiquer que le tableau demandé se trouve page 35 du rapport de Laurent Hénart, et que l'argent disponible sera de 1,2 milliard d'euros pour 2020.
Donc, avis défavorable à cet amendement.
Cela figure dans le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale présenté chaque année devant la commission, au sein de laquelle siègent des parlementaires.
Je tenais simplement à rappeler que le dispositif « carrières longues » concerne à peu près 90 000 personnes auxquelles s'ajouteront, si vous votez l'amendement que nous proposerons, 30 000 personnes au titre de la pénibilité, ce qui fera 120 000 personnes. À cela s'ajouteront aussi les fonctionnaires en catégorie active – façon de traiter la pénibilité dans le domaine de la fonction publique – ce qui représente entre 30 000 et 40 000 personnes, avec les militaires.
Ce sont donc 150 000 à 160 000 personnes sur 700 000 qui continueront à partir à 60 ans ou avant, parce que l'on aura pris en compte le fait qu'elles ont travaillé plus tôt et donc plus longtemps, ou simplement qu'elles ont été soumises à des facteurs de pénibilité qui les ont prématurément usées physiquement. C'est une proportion considérable, et je pense que c'est une preuve de justice sociale. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Puisque vous nous expliquez depuis un moment qu'avant vous, rien n'avait été fait pour les carrières longues, je vais me permettre de revenir sur quelques dispositifs qui semblent vous avoir échappé.
Antérieurement à la loi Fillon, le problème des carrières longues et des emplois pénibles n'était pas, c'est le moins que l'on puisse dire, posé dans les mêmes termes car la durée d'assurance n'était que de 37,5 annuités. Avec une durée allongée à 40 annuités, 41 annuités en 2012 et plus, il se pose avec une autre acuité, et il s'aggrave évidemment si l'on fait passer l'âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans. Je tiens d'ailleurs à souligner à quel point il est incohérent de vouloir en même temps parler de la problématique des carrières longues et reculer l'âge légal de départ à la retraite.
Déjà, pour les chômeurs ayant acquis un nombre suffisant d'annuités pour leur retraite avant l'âge de soixante ans, le gouvernement Jospin avait instauré l'AER, l'allocation équivalent retraite, par la loi du 28 décembre 2001. Elle était destinée aux personnes ayant commencé à travailler très jeunes, qui n'avaient plus droit à l'assurance chômage et bénéficiaient seulement de l'ASS ou du RMI, du régime de solidarité, et qui pouvaient justifier de 160 trimestres validés avant l'âge de 60 ans.
Ce dispositif, dont tout le monde, j'imagine, se souvient parfaitement, a été abrogé par la loi de finances pour 2008, à compter du 31 décembre 2008. Il a été cependant prorogé en 2009 en raison de la crise. Rappelez-vous ces personnes qui s'inquiétaient de savoir ce qu'il allait advenir d'elles quand la crise s'est accentuée. C'est d'ailleurs dans le cadre des mesures d'emploi du plan de relance de l'économie que vous avez vous-mêmes initié que vous avez souhaité proroger ce dispositif, prorogé tout récemment pour 2010 à la suite du sommet social du 18 février dernier.
Le dispositif de l'AER appliqué depuis 2002 a d'abord concerné les salariés qui ont commencé à travailler jeunes après la guerre et connu des conditions de travail difficiles. En 2008, il ne concerne plus que 45 000 personnes. Pour 2009, on prévoyait 15 300 bénéficiaires.
Il y avait donc bien un dispositif permettant d'accompagner les personnes se trouvant dans une telle situation, dispositif que vous avez souhaité mettre à mal et que vous avez finalement maintenu pour atténuer comme vous le pouviez les conséquences de la crise.
Dans les années 80, par ailleurs, les grandes restructurations du secteur industriel – et ceux qui, comme moi, sont élus dans les circonscriptions de la région se souviennent de ce qui a pu arriver par exemple aux entreprises Creusot-Loire – avaient conduit à la mise en place de conventions importantes de départ en préretraite du fonds national de l'emploi. Heureusement d'ailleurs qu'il y avait eu à l'époque de telles initiatives pour soutenir ces territoires confrontés à de lourdes difficultés pendant de nombreuses années, différents gouvernements ayant dû adopter des plans pour essayer d'accompagner les reconversions.
Nous pourrions en débattre longuement, mais j'en reviens à l'essentiel pour vous démontrer que vous n'êtes pas les premiers à vous préoccuper des carrières longues. L'organisation par le fonds national de l'emploi de départs en préretraite à 55 ans prouve bien que le gouvernement qui était en place au début des années 80 avait le souci d'accompagner les salariés. Vous n'avez pas ce privilège, je voulais simplement vous le rappeler. Déjà, à l'époque, les départs en préretraite à 55 ans ont permis d'accompagner ceux qui étaient confrontés aux difficultés économiques. Il y a eu des mesures d'accompagnement en direction des plus fragiles, notamment ceux qui ont travaillé longtemps et qui, comme le disait Alain Vidalies, sont aujourd'hui victimes de votre dispositif. Mieux encore, dans la métallurgie, l'automobile, la sidérurgie ou les chantiers navals, une convention spécifique avait été mise en place, qui prévoyait des départs à 50 ans.
Ces dispositifs montrent que vous n'êtes pas les seuls à vous préoccuper des carrières longues, contrairement à ce que disait Mme Rosso-Debord cet après-midi, essayant de nous faire croire que seule la droite s'intéressait à ces problèmes. Ce fut le cas en 1975, bien avant vous, bien avant moi, dans les années 80, dans les années 90, et c'est le cas aujourd'hui, même s'il nous faut regarder avec attention ce que seront les conséquences du texte que vous nous proposez, car je maintiens qu'un texte qui veut travailler sur la problématique des carrières longues mais décale l'âge légal de départ à la retraite est pour le moins un peu incohérent.
Voilà, mes chers collègues, les éléments d'histoire que j'ai voulu rappeler, en évitant bien sûr de trop développer les différentes mesures mises en place par les gouvernements tout au long de ces dernières années. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Tout à l'heure, M. Leonetti, répondant à Alain Vidalies, a mis en avant la pénibilité de son métier de médecin ayant fait des gardes de nuit. Aussi, je voudrais vous rappeler qu'avant que nous discutions de ce texte, qui occupe actuellement nos soirées, vous avez déjà réformé rapidement et sans concertation les métiers de soins, les métiers d'infirmiers.
Au mois de février, vous vous êtes attaqués au départ en retraite des infirmières, et le Gouvernement a sciemment, à cette occasion, ignoré la problématique particulière de la pénibilité liée au travail de nuit dans le milieu hospitalier.
En juillet, le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière avait pourtant émis un avis défavorable sur le projet de loi portant réforme des retraites, dont le Gouvernement n'a pas tenu compte.
Il s'est constitué un front commun des soignants
Le 24 juin, neuf organisations de praticiens ont écrit ensemble une lettre ouverte au Président de la République, pour lui demander la mise en place sans délai de négociations sur la pénibilité liée au travail de nuit dans leurs métiers. Ils n'ont pas eu de réponse.
Ces organisations représentent des spécialités – pédiatrie, obstétrique, anesthésie-réanimation, chirurgie et urgences – et des statuts – hospitaliers et hospitalo-universitaires – fortement impliqués dans la permanence des soins.
Elles estiment que la pénibilité liée à l'exercice de leur profession, cumulée au fil des années, est totalement occultée du débat actuel dans le cadre du projet de réforme des retraites du Gouvernement, qui prévoit un relèvement à 62 ans de l'âge légal de départ à la retraite, à l'exception notamment des assurés dont l'état de santé est dégradé à la suite d'expositions à des facteurs de pénibilité.
Les médecins hospitaliers passent quatre à cinq ans au moins de leur carrière en travail de nuit ou de week-end, ont une profession reconnue stressante et difficile et font de fortes amplitudes horaires.
Des études scientifiques, des rapports successifs de l'Assemblée nationale ou du Conseil économique et social prouvent les effets induits du travail de nuit : troubles cardiovasculaires, cancers, troubles du sommeil, troubles psychologiques allant parfois jusqu'à des cas de mort violente, et Alain Vidalies nous parlait de cancers du sein chez les femmes.
Actuellement, les praticiens hospitaliers prennent déjà leur retraite en moyenne à 63,8 ans.
Il n'y a pas de problème d'emploi des seniors. Par contre, la démographie des praticiens hospitaliers les oblige à continuer à travailler la nuit jusqu'à leur départ en retraite. Or il n'existe aucun aménagement de fin de carrière qui pourrait permettre de limiter le phénomène d'épuisement. De plus, le dépistage individuel des praticiens devenus invalides n'est pas satisfaisant.
Ces organisations demandent une meilleure prévention des conséquences dramatiques de cette pénibilité. Or, jusqu'à présent, elles ont été mises à l'écart des débats et se disent lassées par les promesses non tenues.
Pour que soit reconnue et compensée la pénibilité, elles demandent qu'une nuit sur place de 14 heures compte pour trois demi-journées, que toutes les permanences de soins sur place soient rémunérées au même tarif, 450 euros, que le temps de déplacement en astreinte soit reconnu comme du temps de travail, que le repos quotidien après déplacement soit respecté.
Elles estiment qu'à partir d'un certain seuil quantifiable et fixé à un minimum de 1 000 permanences de soins sur une carrière, le travail de nuit doit être compté comme une pénibilité en raison des conséquences reconnues sur la santé.
Cela implique la reconstitution de l'exposition individuelle au facteur de risque que constitue le travail de nuit. Cela pourrait prendre la forme d'un curriculum laboris, qui individualiserait les gardes effectuées avant 1996, date d'inclusion des gardes dans l'assiette de cotisation – toutes les gardes effectuées avant sont neutres en termes de retraite –, et celles effectuées avant 2003, date d'instauration par la loi du repos post-garde.
Au-delà de 1 000 nuits travaillées, le médecin qui continuerait à être exposé au risque devrait obtenir des compensations : doublement des cotisations IRCANTEC sur la rémunération de nuit, part salariale et part employeur.
Elles demandent que l'on ne puisse pas imposer des gardes à un médecin qui ne le souhaite pas à partir de 60 ans.
Elles demandent que, pour les titulaires hospitalo-universitaires, les gardes et astreintes soient également valorisées dans le cadre du calcul de la rente.
Nous avons assisté à une mobilisation des infirmiers et des aides soignants après la remise en cause de la pénibilité liée à l'exercice de leur métier.
L'ensemble de ces professionnels, qui sont majoritairement des femmes, se sont joints au mouvement national du 7 septembre, d'autant que le Président de la République n'a pas donné suite à sa promesse de discuter avec leurs représentants syndicaux.
Le 24 février, le Gouvernement avait décidé d'utiliser le projet de loi sur la rénovation du dialogue social pour introduire des modifications législatives faisant passer le droit de départ à la retraite des infirmiers et infirmières et des personnels paramédicaux de 55 ans à 60 ans, sans négociation, et supprimant le classement en catégorie active et la majoration de durée d'assurance, en échange d'un passage en catégorie A de la fonction publique.
Il a profité ainsi d'une réforme statutaire pour amorcer sa réforme des retraites, en rendant applicable une disposition du protocole. Les députés de notre groupe ont dénoncé cette remise en cause de la pénibilité du travail de ces professionnels.
Le projet de loi sur les retraites comporte des mesures qui neutralisent, pour les personnels qui opteront pour les nouveaux corps en catégorie A sédentaire, le relèvement de l'âge d'ouverture des droits à la retraite à 62 ans ainsi que le relèvement de la limite d'âge à 67 ans. Ainsi, l'âge d'ouverture des droits passera de 55 à 57 ans pour les infirmières qui choisissent de rester en catégorie B et sera relevé à 62 ans pour les grades supérieurs.
Deux amendements du Gouvernement prévoient de ne pas majorer, pour les agents ayant opté pour la catégorie sédentaire, la durée d'occupation d'un emploi en catégorie active. Le second vise à reporter la date de dépôt des demandes de départ en retraite pour les parents de trois enfants et ayant 15 ans de services du 13 juillet au 31 décembre, pour un départ au plus tard au 1er juillet 2011. Vous aviez provoqué une grande cacophonie en annonçant subitement la date du 13 juillet 2010.
Le mouvement de protestation a certainement contribué à la mise en place de la nouvelle mesure, qui maintient la retraite à 60 ans aux infirmiers ayant choisi la catégorie A, même si cela reste largement insuffisant.
Les infirmiers anesthésistes ont également protesté contre la perte de la reconnaissance de la pénibilité de leur emploi et l'insuffisante revalorisation de leurs salaires dans ce même protocole. Un IADE touche une pension de 1 800 euros après 40 ans de travail : on est bien loin des aristocrates dont a parlé Mme Bachelot.
Dernier point, les mouvements de grève des gardes et astreintes dans les hôpitaux
Un grand nombre de syndicats ont entamé une grève illimitée des gardes et astreintes dès le mercredi 1er septembre pour demander une prise en compte de la pénibilité du travail de nuit, tout en prenant leurs responsabilités pour assurer la sécurité des patients.
Ils ont demandé le 2 septembre dernier, dans un communiqué commun, à être reçus par M. Éric Woerth, pour que soit prise en compte la pénibilité propre aux métiers de soignants à l'hôpital public dans le cadre de la réforme des retraites.
Cette réforme obligera par exemple les médecins anesthésistes à partir à la retraite à 67 ans. Or qui acceptera par exemple de se faire anesthésier à trois heures du matin par un médecin de 66 ans usé par le travail ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Par ailleurs, la négation de la pénibilité est en partie responsable de la désaffection des jeunes médecins pour l'exercice hospitalier.
Avec ce mouvement de grève, avec assignation pour chaque garde et astreinte, ils souhaitent obtenir des mesures compensatoires au travail de nuit. Ils demandent aussi que soient enfin organisées les négociations avec tous les acteurs de la permanence des soins prévues dans le relevé de conclusions signé en mai 2008. C'est la première fois qu'au-delà des spécificités s'ouvre un front commun de tous les soignants concernés par le travail de nuit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je pense qu'il est important, à cette heure tardive de nos débats, de poursuivre le travail de clarification que nous avons entrepris il y a quelques minutes (Rires sur les bancs du groupe UMP),…
…et auquel M. le secrétaire d'État Tron a d'ailleurs rendu hommage, s'agissant en particulier de la distinction extrêmement importante entre la notion d'âge et celle de durée, « durée de travail », comme le disait à la télévision tout à l'heure le Premier ministre, ou, plus clairement, « durée de cotisation ».
Dans le débat que nous avons depuis un moment sur les carrières longues et la pénibilité, un travail de clarification serait nécessaire de la part du Gouvernement. À aucun moment ce dernier n'a négocié le projet dont nous discutons. Il avait lancé au mois de juin, je crois, avec l'argent du contribuable, une grande campagne publicitaire – presse écrite, télévision, radio –, et nous avions eu l'occasion d'aborder ce sujet en commission au mois de juillet, avant de partir en vacances, pour déplorer la méthode. Avant de négocier, le Gouvernement communique ; il donne le résultat de ses décisions avant même d'en avoir discuté avec les partenaires sociaux. Et cela a coûté pas moins de 7 ou 8 millions d'euros au contribuable, ce qui est, vous en conviendrez, une somme extrêmement importante.
En outre, c'était un acte de mépris caractérisé à l'égard du Parlement, puisque cette démarche présupposait que nous n'aurions rien à dire, qu'il suffisait de communiquer sur la décision prise par le Président de la République. Nous savons – M. Fillon l'a confirmé tout à l'heure à la télévision – que, dans ce pays, le Premier ministre ne sert plus à rien ; il n'est plus désormais que le porte-parole de l'Élysée. D'ailleurs, le Président de la République a de nombreux porte-parole, des grands, comme M. Guéant, et des petits. Nous y reviendrons.
Cette campagne de publicité avait l'avantage de nous fournir des arguments. Je voudrais revenir sur un échange que je me rappelle avoir eu avec Mme Rosso-Debord en commission. Alors que je reprochais au Gouvernement de ne pas traiter véritablement, même s'il prétend le faire, la question de la pénibilité, Mme Rosso-Debord me répondit, sur le conseil de M. Copé, qui ne nous a pas fait l'honneur de sa présence ce soir, que la question était bien prise en considération, que les carrières longues y pourvoiraient. (Mouvements divers.)
Cependant, compte tenu de l'heure tardive et de la dissipation de nos interlocuteurs de l'UMP, je pense vous réserver, monsieur le président, la primeur de la poursuite de mon propos demain matin. (Rires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, nous sommes d'accord pour que la séance soit levée au terme de l'examen de cette série d'amendements.
Je mets aux voix l'amendement n° 474.
(L'amendement n° 474 n'est pas adopté.)
Il est défendu.
(L'amendement n° 476, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Laurence Dumont, pour soutenir l'amendement n° 478.
Cet amendement vise à commander un rapport sur les conséquences du relèvement de soixante à soixante-deux ans de l'âge légal sur le dispositif des carrières longues. Cela me donne l'occasion de m'exprimer dès à présent sur le passage à soixante-deux ans.
En 1993, M. Sarkozy déclarait avoir voté en 1982 la retraite à soixante ans – il ne nous a pas échappé qu'il n'était devenu député qu'en 1988. En 2007, il affirmait que ce droit devait demeurer, de même, disait-il d'ailleurs, que le droit aux trente-cinq heures. En 2008, il déclarait, en réponse au MEDEF, qui trépignait un peu sur cette question, qu'il ne toucherait pas à ce droit, qu'il n'avait pas de mandat pour le faire car cela ne constituait pas un engagement de sa campagne : « Je n'ai pas de mandat pour faire ça, et ça compte, vous savez, pour moi. » Je m'interroge donc sur la nature et la provenance du mandat que les Français auraient donné depuis lors au Président, lui permettant de mettre en place l'injustice qui consiste à revenir sur l'âge légal de départ à la retraite à soixante ans.
Mes chers collègues, il ne s'agit pas pour les socialistes de s'arc-bouter sur une réforme fondamentale du septennat de François Mitterrand, comme vous vous plaisez à le répéter. Il s'agit bien plus d'une garantie pour ceux qui ont atteint leur durée de cotisation, d'une protection pour les salariés usés par le travail, d'une liberté de choix pour tous les Français et d'une borne indispensable qui n'interdit nullement à ceux qui le souhaitent de travailler plus longtemps. (Mouvements divers.)
C'est pourquoi nous nous sommes engagés – vous l'avez entendu ce soir à la télévision –, si votre texte passe, à revenir dessus en 2012. (Mouvements divers.)
Merci, monsieur le président.
Vous avez sans doute vu comme moi, monsieur le ministre, le sondage qui vous dit que 55 % des Français pensent que vous devez reculer sur le report de l'âge légal. À cette heure, même tardive, je pense que vous devriez les écouter ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
(L'amendement n° 478, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Prochaine séance, vendredi 10 septembre à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi portant réforme des retraites.
La séance est levée.
(La séance est levée, le vendredi 10 septembre 2010, à minuit quarante.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma