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Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 9 septembre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarisol Touraine :

Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir excuser le retard avec lequel certains d'entre nous ont rejoint l'hémicycle : nous écoutions l'intervention du Premier ministre.

L'article 4 porte sur la question de l'allongement de la durée de cotisation et ses modalités de calcul. C'est pour moi l'occasion de formuler deux observations.

Premièrement, contrairement à ce que vous affirmez, l'allongement de la durée de cotisation constitue pour nous une mesure démographique plus juste que celle que vous préconisez vous-même, laquelle s'appuie sur le simple relèvement des âges légaux. Nous ne récusons pas la place des mesures démographiques dans le projet que nous proposons. Nous considérons simplement que de telles mesures ne peuvent à elles seules constituer la totalité de la réforme. Parmi les mesures démographiques retenues, la seule qui est juste, à nos yeux, est l'allongement de la durée de cotisation car elle tient compte de l'âge de début d'entrée dans la carrière professionnelle.

À partir du moment où l'espérance de vie s'allonge, plus particulièrement l'espérance de vie en bonne santé, il est normal qu'une partie du temps ainsi gagné soit consacrée à l'activité. Depuis 2003, vous avez fait le choix de consacrer les deux tiers de ce temps au travail et un tiers seulement à la retraite. Cela nous paraît être un choix sévère pour les Français car c'est aussi une conquête sociale que de pouvoir disposer de temps, de temps pour soi, de temps pour les activités associatives, de temps pour sa famille, de temps pour des projets personnels. C'est la raison pour laquelle il nous semble plus juste d'aboutir à un partage strictement égal, à « cinquante-cinquante », du temps d'espérance de vie gagné entre le travail et la retraite.

L'allongement de la durée de cotisation s'inscrit pour nous dans le cadre d'une démarche qui prend en compte la diversité des parcours professionnels.

Cela m'amène à ma deuxième observation. Je vois bien ce que vous allez nous réponse, à un moment ou à un autre, car vous avez déjà eu l'occasion d'affirmer à plusieurs reprises que les socialistes accepteraient aujourd'hui ce qu'ils ont refusé hier, qu'ils feraient leurs des propositions qu'ils ont combattues auparavant. Après le flop du discours selon lequel les socialistes n'auraient rien à proposer, ces affirmations sont même devenues la nouvelle rengaine que l'on entend sur vos bancs. C'est si vrai que le Premier ministre a jugé utile ce soir de conclure sur cette idée – on voit à quel niveau il se plaçait pour s'adresser aux Français !

Mais nous récusons ces assertions. Nous ne reprenons pas des mesures que nous avons contestées parce qu'elles auraient été bonnes à un moment et que nous ne l'aurions pas compris. Nous les reprenons de manière différente et dans le cadre d'une réforme plus générale qui englobe d'autres mesures.

En 2003, le pivot de la réforme Fillon – son socle, son pilier – était l'allongement de la durée de cotisation comme aujourd'hui le pivot de la réforme des retraites est le recul de l'âge légal, qui est la seule et unique mesure de la réforme portée par M. Woerth. Nous récusons, dans un cas comme dans l'autre, l'idée que la réforme des retraites puisse s'appuyer sur un seul mécanisme.

En 2003, vous avez refusé comme aujourd'hui que les mesures démographiques soient accompagnées de la recherche de prélèvements et de ressources complémentaires quelle qu'en soit la nature – augmentation de cotisations, CSG, prélèvements sur les revenus du capital. C'est cela qui est fondamental : une mesure prise indépendamment d'autres mesures n'a absolument aucun sens. On ne peut se dire favorable à l'allongement de la durée de cotisation de manière absolue mais seulement à certaines conditions.

Elle doit être limitée, intégrée dans une réforme qui comporte des mesures de prélèvement sur les revenus du capital. Elle ne doit pas manger l'ensemble des gains d'espérance de vie. Elle doit surtout prendre en compte la diversité des parcours professionnels – nous y reviendrons dans quelques instants à travers les amendements que nous avons déposés à l'article 4 qui déclinent le thème de la retraite choisie.

La durée de cotisation ne peut être la même pour tout le monde. Il faut créer des incitations pour que certaines personnes travaillent plus longtemps. Il faut, à l'inverse, mettre en place des bonifications d'assurance qui permettent à d'autres de travailler moins longtemps, compte tenu de la difficulté de leur parcours.

C'est cet ensemble qu'il importe de prendre en compte. C'est la raison pour laquelle, contrairement à ce que vous affirmez, nous ne reprenons pas aujourd'hui des mesures que nous avons combattues hier. Nous proposons aujourd'hui un dispositif global qui intègre des mesures démographiques qui ne sont qu'un élément parmi bien d'autres de nos propositions.

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