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Intervention de Christophe Sirugue

Réunion du 9 septembre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Après l'article 4, amendement 474

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Sirugue :

Puisque vous nous expliquez depuis un moment qu'avant vous, rien n'avait été fait pour les carrières longues, je vais me permettre de revenir sur quelques dispositifs qui semblent vous avoir échappé.

Antérieurement à la loi Fillon, le problème des carrières longues et des emplois pénibles n'était pas, c'est le moins que l'on puisse dire, posé dans les mêmes termes car la durée d'assurance n'était que de 37,5 annuités. Avec une durée allongée à 40 annuités, 41 annuités en 2012 et plus, il se pose avec une autre acuité, et il s'aggrave évidemment si l'on fait passer l'âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans. Je tiens d'ailleurs à souligner à quel point il est incohérent de vouloir en même temps parler de la problématique des carrières longues et reculer l'âge légal de départ à la retraite.

Déjà, pour les chômeurs ayant acquis un nombre suffisant d'annuités pour leur retraite avant l'âge de soixante ans, le gouvernement Jospin avait instauré l'AER, l'allocation équivalent retraite, par la loi du 28 décembre 2001. Elle était destinée aux personnes ayant commencé à travailler très jeunes, qui n'avaient plus droit à l'assurance chômage et bénéficiaient seulement de l'ASS ou du RMI, du régime de solidarité, et qui pouvaient justifier de 160 trimestres validés avant l'âge de 60 ans.

Ce dispositif, dont tout le monde, j'imagine, se souvient parfaitement, a été abrogé par la loi de finances pour 2008, à compter du 31 décembre 2008. Il a été cependant prorogé en 2009 en raison de la crise. Rappelez-vous ces personnes qui s'inquiétaient de savoir ce qu'il allait advenir d'elles quand la crise s'est accentuée. C'est d'ailleurs dans le cadre des mesures d'emploi du plan de relance de l'économie que vous avez vous-mêmes initié que vous avez souhaité proroger ce dispositif, prorogé tout récemment pour 2010 à la suite du sommet social du 18 février dernier.

Le dispositif de l'AER appliqué depuis 2002 a d'abord concerné les salariés qui ont commencé à travailler jeunes après la guerre et connu des conditions de travail difficiles. En 2008, il ne concerne plus que 45 000 personnes. Pour 2009, on prévoyait 15 300 bénéficiaires.

Il y avait donc bien un dispositif permettant d'accompagner les personnes se trouvant dans une telle situation, dispositif que vous avez souhaité mettre à mal et que vous avez finalement maintenu pour atténuer comme vous le pouviez les conséquences de la crise.

Dans les années 80, par ailleurs, les grandes restructurations du secteur industriel – et ceux qui, comme moi, sont élus dans les circonscriptions de la région se souviennent de ce qui a pu arriver par exemple aux entreprises Creusot-Loire – avaient conduit à la mise en place de conventions importantes de départ en préretraite du fonds national de l'emploi. Heureusement d'ailleurs qu'il y avait eu à l'époque de telles initiatives pour soutenir ces territoires confrontés à de lourdes difficultés pendant de nombreuses années, différents gouvernements ayant dû adopter des plans pour essayer d'accompagner les reconversions.

Nous pourrions en débattre longuement, mais j'en reviens à l'essentiel pour vous démontrer que vous n'êtes pas les premiers à vous préoccuper des carrières longues. L'organisation par le fonds national de l'emploi de départs en préretraite à 55 ans prouve bien que le gouvernement qui était en place au début des années 80 avait le souci d'accompagner les salariés. Vous n'avez pas ce privilège, je voulais simplement vous le rappeler. Déjà, à l'époque, les départs en préretraite à 55 ans ont permis d'accompagner ceux qui étaient confrontés aux difficultés économiques. Il y a eu des mesures d'accompagnement en direction des plus fragiles, notamment ceux qui ont travaillé longtemps et qui, comme le disait Alain Vidalies, sont aujourd'hui victimes de votre dispositif. Mieux encore, dans la métallurgie, l'automobile, la sidérurgie ou les chantiers navals, une convention spécifique avait été mise en place, qui prévoyait des départs à 50 ans.

Ces dispositifs montrent que vous n'êtes pas les seuls à vous préoccuper des carrières longues, contrairement à ce que disait Mme Rosso-Debord cet après-midi, essayant de nous faire croire que seule la droite s'intéressait à ces problèmes. Ce fut le cas en 1975, bien avant vous, bien avant moi, dans les années 80, dans les années 90, et c'est le cas aujourd'hui, même s'il nous faut regarder avec attention ce que seront les conséquences du texte que vous nous proposez, car je maintiens qu'un texte qui veut travailler sur la problématique des carrières longues mais décale l'âge légal de départ à la retraite est pour le moins un peu incohérent.

Voilà, mes chers collègues, les éléments d'histoire que j'ai voulu rappeler, en évitant bien sûr de trop développer les différentes mesures mises en place par les gouvernements tout au long de ces dernières années. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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