Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-France
La table ronde débute à neuf heures dix.
Après avoir entendu, hier soir, les associations d'usagers, nous allons entendre, ce matin, les représentants des organisations syndicales des deux opérateurs du RER, la RATP et la SNCF. Nous sommes heureux d'accueillir MMAlain Ternois et Thierry Marchand de la CFE-CGC de la RATP, Mme Patricia Lasalmonie, MM. Alain Beslin, Noël Duflos et Emmanuel Benassaya de FORCE OUVRIÈRE-RATP, MM. Thierry Babec et Frédéric Sarrassat de l'UNSA-RATP, MM. Philippe Touzet, Jean-Luc Viard, Patrick Sivadier et Jean-Christophe Delprat de Sud RATP, MM. Jacques Eliez, François Gillard et Thierry Dumez de la CGT-RATP, M. Laurent Gardoni de la CFDT RATP et M. Philippe Goullieux du comité régional Transport- Équipement (CRTE) de la CFDT, MM. Dominique Aubry et Franck Drago de la CFDT Cheminots, M. Thierry Roy de la CGT des chemins de fer français et M. Dominique Launay de l'Union interfédérale CGT des Transports, et M. Philippe Cornière de l'UNSA Cheminots SNCF.
Je précise que nous avons déjà programmé les auditions des dirigeants de ces deux entreprises et de Réseau ferré de France, RFF. Elles auront lieu ultérieurement à cette seconde table ronde. Elles sont prévues pour la semaine prochaine. Nous entendrons également les responsables du Syndicat des transports d'Île-de-France, le STIF, ainsi qu'un certain nombre de personnalités qualifiées.
À mon sens, la commission d'enquête doit aborder sans a priori les problèmes de la qualité comme de la régularité du service du RER. Chacun connaît ici les dysfonctionnements qui affectent le quotidien des usagers. Les élus que nous sommes – et nombreux sont ceux qui empruntent le RER – recueillent les plaintes d'usagers excédés par les pannes et les retards qu'ils subissent dans leurs trajets.
Lundi dernier, en fin d'après-midi, une rame a ainsi été immobilisée pendant près de trois heures dans un tunnel de la ligne A, et les voyageurs dont l'évacuation a été périlleuse ont été plongés dans l'obscurité ! De tels incidents ne se produisent heureusement pas tous les jours. Cependant cet événement, dont les conséquences se sont fait sentir sur la totalité de la ligne et au-delà, la ligne 1 du métro s'étant retrouvée saturée, illustre la fragilité du réseau du RER.
S'il me paraît souhaitable d'éviter toute polémique stérile, toute mise en cause institutionnelle, voire personnelle, qui ne serait pas étayée par des faits précis, notre commission doit néanmoins aborder ces questions sans complaisance, en distinguant aussi précisément que possible ce qui relève des défaillances techniques, sans omettre les raisons de leur caractère durable, de ce qui relève du défaut d'organisation et des retards d'investissements qui en résulteraient.
C'est pourquoi nous attendons beaucoup de cette table ronde. Nous vous invitons évidemment à vous exprimer en toute liberté. Vos revendications nous intéressent, tout comme vos propositions. En effet, il me paraît essentiel que le travail de la commission d'enquête débouche sur des recommandations concrètes, aussi claires qu'il soit possible pour les usagers et assorties d'un calendrier réaliste de mise en oeuvre. L'objectif collectivement partagé me semble être de rétablir une situation plus acceptable sur le plan de la qualité du service dû aux usagers.
Je souhaiterais notamment que vous nous expliquiez de la façon la plus concrète comment se passe, au niveau des personnels, la « cogestion » des lignes A et B par la RATP et la SNCF, non seulement en ce qui concerne le service des seuls personnels de conduite, mais également sur le plan de la gestion des matériels et leur entretien ? Beaucoup de choses ont été dites, voire écrites, sur le sujet, mais les évolutions déjà intervenues en ce domaine ont sans doute pour effet de rendre caduques ou d'atténuer la portée de certaines critiques.
Je vous rappelle, madame, messieurs, que l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires exige des personnes auditionnées par une commission d'enquête qu'elles prêtent serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.
M. Alain Ternois, Mme Patricia Lasalmonie, M. Thierry Babec, M. Philippe Touzet, M. Jacques Eliez, M. Laurent Gardoni, M. Dominique Aubry, M. Thierry Roy, et M. Philippe Cornière prêtent successivement serment.
Je vais m'exprimer également au nom de la CGT-RATP.
Monsieur le président, Monsieur le rapporteur, Mesdames, Messieurs les députés, nous voudrions au préalable préciser que nous n'avons pas pu préparer cette rencontre dans les meilleures conditions, puisque nous n'avons été convoqués que tardivement – juste avant les fêtes de fin d'année.
La volonté de la commission de limiter ses travaux à la question du RER nous interpelle. En effet, le constat relatif aux dysfonctionnements du réseau nous parait devoir s'inscrire dans une réflexion plus globale sur les infrastructures ferroviaires en Île-de-France, qu'elles soient exploitées par la RATP ou la SNCF et qu'elles concernent les voyageurs ou les marchandises, du moins si on veut travailler de façon cohérente et prendre en compte les attentes et les besoins des Franciliens. Bien plus, on ne saurait traiter de façon objective la question des transports en Île-de-France sans prendre en compte la place de cette région dans l'ensemble du territoire, en termes de PIB comme sur le plan démographique, mais aussi son rôle dans les transports tant nationaux qu'européens.
Nous voudrions d'abord revenir sur les causes de la situation actuelle. Nous payons aujourd'hui plus de trente ans de retard d'investissement dans les infrastructures : du fait du désengagement de l'État, en dépit des évolutions positives que l'on constate depuis le changement de gouvernance du STIF et l'implication du conseil régional d'Île-de-France.
À ce désengagement de l'État s'est ajoutée la création de Réseau ferré de France (RFF) en 1997, sous le gouvernement de M. Juppé. Cette institution, que notre syndicat a toujours combattue, a été un frein à la rénovation du réseau et à la création de nouvelles infrastructures – beaucoup de celles prévues dans les différents contrats de plan entre l'État et la Région ne sont toujours pas mises en oeuvre. La CGT continue à demander l'abolition des dispositions législatives ayant permis la création de RFF, alors qu'une simple séparation comptable aurait suffi. La question du désendettement du système ferroviaire reste entière. Elle est même devenue un enjeu politique majeur depuis que le Grenelle de l'environnement a fait de l'évolution du transport ferroviaire dans notre pays et en Île-de-France un de ses objectifs. Il est établi aujourd'hui que la création de RFF a nui au développement et à la régénération du rail dans notre pays. Pour nous, RFF doit réintégrer la SNCF !
De même, la désignation par la loi de la RATP comme gestionnaire d'infrastructures, non seulement n'améliore pas la situation mais génère des coûts supplémentaires qui pénalisent l'investissement. Puisque nous avons la chance d'avoir, en Île-de-France, deux grandes entreprises nationales de transport, pourquoi ne pas les faire coopérer plutôt que de les placer en concurrence ? Ce n'est pas en fragilisant ces deux entreprises et le service public qu'elles assurent, en ouvrant à la concurrence les transports régionaux, en privatisant les transports publics qu'on fera évoluer la qualité des transports en Île-de-France.
La maîtrise publique du système de transport est nécessaire. Elle est tout à fait elle possible. Il s'agit d'un choix politique. Le service public de transports a besoin d'être renforcé.
C'est pourquoi la CGT propose depuis plusieurs années la création d'un pôle financier public afin de réorienter les ressources, les financements et l'épargne vers l'investissement à finalité sociale et le développement durable, en lieu et place de la spéculation financière. Il faut mettre à contribution ceux qui profitent – au sens de « faire du profit » – des équipements publics et du transport, telles l'industrie du tourisme, la grande distribution, les zones d'hyper concentration de bureaux, comme La Défense.
Il faut étendre le versement transports à toutes les entreprises. Il faut également réformer la fiscalité du transport professionnel, afin que celle-ci prenne en compte les coûts externes – pollutions, nuisances, coûts d'infrastructures, coûts des accidents, etc. – aujourd'hui à la charge de la collectivité. Il faut en effet rappeler avec force que le transport le plus subventionné c'est le transport routier des marchandises et des voyageurs. Que l'État arrête, en outre, de siphonner les caisses des entreprises publiques comme la SNCF, qui a reversé depuis 2009 600 millions d'euros à l'État, et le financement des infrastructures publiques pourra rester public, comme il doit l'être. Nous sommes totalement opposés aux formules du partenariat public privé, le PPP. Elles conduisent à une privatisation des infrastructures dont on connaît les effets négatifs notamment sur le plan financier.
Il faut par ailleurs mettre fin à la réduction des effectifs, tant à la RATP qu'à la SNCF – à la RATP, 700 postes ont été supprimés pour la seule année 2011 ; la situation est similaire à la SNCF. Bien plus, il faut accroître le nombre des personnels qui travaillent à l'entretien de l'infrastructure et des matériels, dans les gares et les stations, si on veut améliorer la qualité du service et la régularité ; sans oublier la sécurité des personnes et des biens, qui est pour nous une priorité. On pourra ainsi remédier à la déshumanisation des gares, renforcer la présence dans les trains d'agents à statut, et lutter contre les incivilités, qui ont également un impact sur les retards.
Je voudrais ici saluer le savoir-faire de ces deux entreprises et l'investissement des personnels. Sans eux rien ne fonctionnerait. Sur la ligne A, c'est dix millions de déplacements quotidiens, 1,2 million de voyageurs par jour ouvrable ; 290 millions par an. À la station Châtelet, ce sont 900 voyageurs à la minute. Sur la ligne D, le nombre de voyageurs a progressé de 40% en huit ans, de 30% sur la ligne B. Or, cette explosion du trafic est assurée par les mêmes infrastructures qu'il y a quarante ou cinquante ans. Ces chiffres permettent de mesurer l'insuffisance des investissements et l'état de sous-effectif permanent. Assurer le service public dans ces conditions constitue quasiment une prouesse quotidienne, tant à la RATP qu'à la SNCF. À cela s'ajoutent les réorganisations permanentes, plus particulièrement à la SNCF, qui désorganisent complètement la production : elles entraînent la perte de savoir-faire et la réduction de la réactivité. Celles-ci ont des répercussions délétères, non seulement sur la vie quotidienne des usagers, mais aussi sur les conditions de travail des personnels de plus en plus en souffrance en Île-de-France.
Si nous voulons améliorer les conditions de transports des Franciliens, il faut aussi arrêter de créer de nouveaux besoins de transports. Cela pose la question de l'aménagement du territoire, du logement et de son coût. En Île-de-France, les temps de transports journaliers sont d'une heure trente en moyenne. Sur la ligne A, complètement saturée, plus de 70% des transports sont traversants. L'arrivée potentielle de 35 000 à 60 000 nouveaux salariés sur la dalle de La Défense va encore aggraver significativement la situation.
On ne saurait parler d'aménagement du territoire sans évoquer le projet de Grand Paris. À nos yeux, il s'agit d'abord et surtout du projet capitalistique de création d'une métropole financière de rang mondial, dont la majorité des Franciliens n'a rien à en attendre en matière de logement, de services publics ou pour leurs transports. Il en est de même du projet Grand Paris Express. Si on doit se féliciter de l'instauration de dessertes supplémentaires de proximité grâce à l'action conjuguée d'élus locaux, d'usagers et de la population, ce projet reste loin de répondre aux attentes et besoins. Il va au contraire renforcer les inégalités, au détriment notamment des populations moins bien dotées en matière de transports collectifs.
Les déplacements en voiture ne représentent que 13% des déplacements dans Paris intra muros, contre 43% des déplacements pour l'ensemble des Franciliens. Persister dans la voie de l'hyper concentration de lieux de travail, souvent le fruit de délocalisations, complètement déconnectées de l'habitat et des lieux de vie, continuer à implanter des centres commerciaux au milieu des champs de betterave, c'est augmenter les besoins de transports et multiplier les coûts. Par ailleurs, le projet du Grand Paris ignore le transport de marchandises. Si nous ne voulons pas atteindre un point de non-retour, il est nécessaire de constituer des réserves foncières en préservant pour le fret des sites et des voies ferrées, qui pourront aussi servir pour le transport de voyageurs
Améliorer la situation suppose des solutions à court terme et à moyen et long terme.
À court terme, il faut augmenter les effectifs pour assurer une meilleure maintenance des infrastructures, renforcer les astreintes, notamment de proximité, pour assurer une plus grande réactivité en cas d'incident. Il faut revoir l'organisation des roulements, détendre les journées de travail comme le roulement des rames, augmenter le nombre des agents de réserve, particulièrement à la conduite. Il faut consacrer également des effectifs supplémentaires à l'entretien du matériel qui subit les conséquences d'une perte du savoir-faire. Le problème d'essieux qui a récemment perturbé le trafic sur la ligne D illustre la désorganisation provoquée par les réformes mises en place à la SNCF. Ce sont là des situations que l'on peut résoudre rapidement, pourvu qu'on en ait la volonté.
Sur le moyen et long terme, des projets prévus depuis longtemps par les contrats de plans État-Région commencent à être mis en oeuvre, grâce notamment à l'engagement des élus régionaux : je pense au programme IMPACT sur la ligne D, ligne classée sensible, au projet RER B + ou encore à l'arrivée de nouvelles rames sur la ligne A. D'autres travaux prévus de longue date doivent être immédiatement engagés, comme le dédoublement du tunnel entre Châtelet et la Gare du nord pour désengorger les lignes B et D.
Il faut quadrupler la ligne 1 entre Lagny et Meaux, augmenter le nombre de rames sur la ligne E et la prolonger jusqu'à La Défense. Sur la ligne C, nous demandons le sextuplement des voies de Paris à Brétigny, qui est inscrit au schéma directeur depuis 1992. Il faut aussi prolonger cette ligne jusqu'à l'intérieur du Marché d'intérêt national (MIN) de Rungis. Il faut également renouveler les sous-stations électriques. Pour les lignes N et U, classées sensibles, nous demandons depuis des années la création d'un « saute-mouton » à Porchefontaine et des travaux de rénovation, notamment à Versailles. Il faut favoriser les interconnections en développant les tangentielles, travailler à un périphérique ferroviaire de Grande Couronne. La réouverture de la Petite Couronne ferroviaire est aussi une perspective intéressante. Il faut cependant savoir qu'il se passe plus de dix ans entre le lancement d'un projet et sa réalisation, ce qui fait que, bien souvent, une infrastructure est saturée dès sa mise en service.
S'agissant du matériel, nous constatons que l'engagement du conseil régional, en collaboration avec la RATP et la SNCF a permis au cours de ces dernières années un progrès, tant qualitatif que quantitatif, mais on doit encore amplifier la démarche si on veut qu'elle soit à la hauteur des besoins.
Concernant la maintenance, il faut stopper la tendance à recourir toujours plus à la sous-traitance. Il faut renforcer l'intégration de la maintenance au sein des entreprises publiques de service public : elle a fait ses preuves en matière d'efficacité sociale et économique. Le problème des essieux sur la ligne D et, plus récemment, la découverte d'amiante sur la ligne B posent la question de la pérennité de la rénovation du matériel ferroviaire en France.
Telles sont les solutions si on veut endiguer les déplacements routiers en Île de France et diminuer l'émission des gaz à effet de serre.
Nous espérons que la mise en place de cette commission d'enquête permettra un travail objectif ; l'enjeu des transports dépassant largement des échéances électorales. C'est pourquoi la CGT demande la tenue d'Assises consacrées aux transports collectifs en Île-de-France qui réuniraient le Gouvernement, des élus, les collectivités territoriales, les usagers et les organisations syndicales.
Je peux immédiatement répondre à vos interrogations concernant les modalités de nos travaux.
L'Assemblée nationale a adopté la résolution tendant à la création de cette commission d'enquête à la fin de l'année 2011. L'Assemblée suspendant ses travaux entre la fin du mois février et le début du mois de mars, le rapport de la commission d'enquête devrait être voté avant la mi-mars. Ce calendrier contraint explique la rapidité de votre convocation.
Cela explique également le choix de limiter nos travaux à la question du RER, laissant de côté les autres modes de transports publics. Ce réseau nous a paru en effet concentrer le plus grand nombre de dysfonctionnements, ou du moins des interrogations des usagers. Cela ne signifie évidemment pas que les problématiques relatives aux autres modes de transport collectif ou à l'aménagement du territoire soient totalement absentes de nos travaux.
En préambule la CFDT tient à réaffirmer qu'elle est favorable à la mise en oeuvre d'une politique de complémentarité des transports.
Les transports en Île-de-France jouent un rôle majeur en matière d'intégration et de cohérence sociale dans un environnement économique et politique fluctuant. Le transport ferroviaire est un atout majeur du développement économique de l'Île-de-France, tout en répondant aux enjeux environnementaux. Le ferroviaire représente une véritable alternative à un réseau routier de plus en plus saturé. Il est cependant urgent de trouver, malgré la crise, des financements pérennes pour l'entretenir, le moderniser, le développer et rénover le matériel roulant ou le remplacer pour cause de vétusté.
Comptant plus de onze millions d'habitants et produisant 29 % du PIB de la France, l'Île-de-France est une région capitale, au niveau tant européen que national, en termes économiques et touristiques. L'infrastructure de transport doit être à la hauteur de ces enjeux. En conséquence, son financement ne saurait reposer sur les seuls contribuables franciliens.
L'ouverture à la concurrence ne saurait cependant être la solution miracle pour financer les transports en commun, et on ne doit pas, comme le font certains, laisser penser aux usagers qu'ils verraient grâce à elle baisser leur contribution financière alors qu'il n'en serait rien. Nous réitérons également notre opposition aux partenariats publics privés, les PPP, pour financer les infrastructures ferroviaires, celles-ci générant bien souvent des coûts supérieurs de 20% à 30% par rapport au financement classique.
Dans son audit, la Cour des comptes met l'accent sur les limites auxquelles se heurtent les gains de productivité demandés à la RATP et à la SNCF. Pour la CFDT, il n'est pas question de faire payer aux salariés des opérateurs de transport les décisions politiques responsables des décennies de retard que connaissent les investissements publics dans le domaine ferroviaire. Les salariés de la RATP et de la SNCF ont déjà payé un lourd tribut aux sacro-saints gains de productivité exigés par nos directions et les pouvoirs publics, avec des effectifs en baisse constante depuis des années et des conditions de travail en perpétuelle dégradation. J'en veux pour exemple la découverte d'amiante sur les rames MI79 tout juste rénovées, ou les dysfonctionnements des nouvelles automotrices du Transilien fabriquées par Bombardier, qui ont fait la une de la presse.
Faire des gains de productivité le seul vecteur de gestion conduit les entreprises à prendre des risques industriels – le problème d'essieux des rames de la ligne D en est une parfaite illustration. Le fait de réduire la fréquence des visites jusqu'aux limites des pas de maintenance a conduit à une explosion, qui n'avait pas été anticipée, du nombre des rames immobilisées et à la dégradation de l'offre de transport. Ces économies de court terme ont donc été rapidement annulées par les coûts générés par les immobilisations des rames et la dégradation du plan de transport.
Nous nous interrogeons également sur la politique tarifaire des transports collectifs, notamment sur la fixation par le STIF d'un tarif unique du Pass Navigo d'environ 62 euros, alors que le prix d'équilibre est plus proche des 90 euros. Pour la CFDT, la création d'une zone unique en Île-de-France ne correspond à aucune demande réelle, d'autant que les zones 1, 2 et 3 sont les plus utilisées par les détenteurs du Pass Navigo. Pour un moindre coût, il serait plus judicieux de pratiquer un « dézonage » total, les week-ends et jours fériés, à l'image de ce que le STIF a décidé pour la carte Imagine R des étudiants.
Il y a d'autres systèmes à mettre en place pour garantir des ressources pérennes en faveur du développement durable, tels qu'une modification du régime du versement transport (VT). On pourrait envisager son extension à l'ensemble des entreprises dès le premier salarié, mais une telle mesure risquerait de pénaliser les petites entreprises les plus fragiles, notamment les entreprises unipersonnelles, qui se développent particulièrement en temps de crise. Il serait plus judicieux de fixer un taux de VT plus important pour les très grosses entreprises, au-dessus d'un seuil à déterminer. On pourrait également uniformiser le taux du VT. On pourrait encore envisager de reverser au STIF l'intégralité du produit des amendes de stationnement.
Il est aujourd'hui nécessaire que les transports franciliens évoluent, mais cela nécessite des efforts financiers importants, notamment de la part de l'État, afin de renouveler à grande échelle les matériels roulants pour assurer un plus grand confort des voyageurs, obtenir une meilleure régularité et surtout rénover des infrastructures vieillissantes et désengorger le réseau. Le projet du Grand Paris Express répond en partie à ces besoins, mais il néglige la problématique du logement et de l'éloignement du lieu de travail. En outre, le coût exponentiel d'un projet que certains ont appelé « le grand canyon financier » ne peut que nous laisser sceptiques sur sa crédibilité.
Au-delà du financement, la priorité doit être donnée aux projets de tangentielles ferroviaires de banlieue à banlieue, à l'amélioration de la fluidité de circulation sur les lignes B et D via notamment le doublement du tunnel de Châtelet. En revanche, le projet parallèle de CDG Express ne nous apparaît plus pertinent, pas plus que le projet de métro lourd sur le plateau de Saclay. Les marges financières que libérerait l'abandon de ces deux projets doivent servir à financer d'autres priorités.
Il y a urgence à agir : les décisions en termes d'infrastructures doivent se penser à long terme dans une vision globale d'intérêt public. Chaque décision engagera les générations actuelles et à venir. Dans le domaine des transports, les investissements traduisent une volonté politique. Pour la CFDT la vigilance est de mise, le temps de l'intérêt général n'étant pas forcément le même que celui du politique. Pourtant « gouverner, c'est prévoir ».
Si nous nous exprimons ici, ce n'est pas seulement comme syndicalistes, mais avant tout comme citoyens. À ce titre, nous refusons catégoriquement qu'on nous oppose aux usagers : subissant les mêmes problèmes, nous avons les mêmes intérêts. De ce point de vue, on ne peut que se féliciter de voir la représentation nationale s'emparer de problématiques qui ont un impact direct sur le quotidien des usagers du RER – je pensais en effet que nous étions là pour parler du RER. Ce que nous attendons de cette initiative, ce sont des propositions concrètes. Nous souhaitons qu'elle ne soit pas une initiative isolée destinée à calmer momentanément le mécontentement des usagers ou à vocation électoraliste, mais qu'elle inaugure un dialogue permanent entre les usagers et les professionnels du transport et les responsables politiques, qui sont les seuls à pouvoir actionner les leviers, notamment financiers, pour résoudre les problèmes.
Notre objet, ce matin, n'est pas de vous faire des propositions détaillées : cela fait des années que nos militants de terrain proposent aux représentants du peuple français, ainsi qu'aux directions de nos entreprises, des solutions extrêmement précises, et on ne peut que s'étonner qu'elles ne soient toujours pas mises en oeuvre, même quand leur coût est faible. Nous ne pouvons qu'inviter votre commission à favoriser la mise en oeuvre de ces propositions.
Le transport est un élément fondamental de la vie quotidienne des Franciliens : sa qualité est aussi essentielle pour celle-ci que celle de l'environnement, de l'air ou de l'urbanisme et cela a un coût. En tant que professionnels des transports, nous partageons le souci de tous les citoyens de ne pas dépenser les deniers publics à tort et à travers, mais il y a des coûts incompressibles. Or les deux entreprises publiques sont aujourd'hui incitées au-delà du raisonnable à réaliser des économies budgétaires et des gains de productivité, aux dépens des usagers autant que les agents du service public. Dans ces conditions, il n'y a rien d'étonnant à voir surgir des problèmes. Dans le secteur des transports collectifs, la concurrence a ses limites.
Étant donné les mérites des transports collectifs, il serait malvenu de dire qu'il y a trop de voyageurs. Pourtant d'une certaine façon, nos transports collectifs sont victimes de leur succès, et les problèmes du RER A sont de ce point de vue les mêmes que ceux de l'autoroute A 4 : quand il y a trop de monde, il y a inévitablement des bouchons. C'est qu'on n'a pas suffisamment pris en compte le fait que les transports collectifs étaient partie prenante de l'aménagement du territoire. Pendant des décennies, ce secteur n'a pas bénéficié d'un effort d'investissement suffisant pour entretenir les structures existantes ou mettre en place de nouvelles dessertes. On voit certes aujourd'hui une prise de conscience, mais on ne rattrape pas en quelques mois un retard de plusieurs décennies, et les problèmes que connaît actuellement le RER d'Île-de-France sont appelés à durer. On peut même s'attendre à voir surgir à l'avenir des problèmes beaucoup plus graves que le blocage d'un train dans un tunnel. Cela pose la question du coût que la collectivité est prête à assumer pour ses transports collectifs.
Au-delà de la problématique principale de l'insuffisance des investissements publics, nous souhaitons vous soumettre des propositions concrètes et d'un coût supportable pour la collectivité. L'origine de l'engorgement du RER, notamment de la ligne A, est connu : les Franciliens vivent à l'est et travaillent à l'ouest. Il serait utile de réfléchir à la mise en place de postes de commandement centralisés pour les deux lignes, qui aurait même dû être réalisée avant l'interopérabilité. Il nous semble impossible d'éviter un doublement du tunnel Châtelet-Gare du Nord, d'autant qu'il est prévu d'y faire passer douze RER D en 2013, alors qu'il en passe huit aujourd'hui.
La poursuite de l'effort d'investissement dans le matériel existant permettra simplement de « sauver les meubles » pendant deux ans, étant donné la densification de l'habitat en Île-de-France. Le Grand Paris sera la seule solution pérenne, mais il ne sera pas achevé avant une quinzaine d'années. En attendant, il faut gérer la transition, en continuant d'investir dans le matériel roulant aussi bien que dans les structures.
Notre dernière proposition est la plus simple à mettre en oeuvre, bien que les directions de nos deux entreprises semblent avoir du mal à la prendre en compte : écouter les salariés qui assurent quotidiennement le transport de nos concitoyens. Ceux-ci proposent depuis des années à leur encadrement et aux directions des solutions précises et peu coûteuses, telles que l'incorporation de glissements dans les terminus de retournement, la suppression de missions sans arrêt dans certaines gares, le pré positionnement de trains de réserve, et d'autres mesures relatives aux tableaux de roulement et aux horaires de début et de fin de service, que je ne développerai pas ici.
La CFE-CGC du personnel du groupe RATP tient en premier lieu à remercier la commission d'avoir sollicité l'avis des organisations syndicales sur un sujet aussi important que le projet de rénovation du RER, plus particulièrement pour ce qui nous concerne des lignes A et B du RER.
Comme tous les Franciliens, nous connaissons les problèmes rencontrés quotidiennement par les utilisateurs des transports en commun en région capitale ; comme agents d'une entreprise nationale publique en charge d'une partie de ces transports en Île-de-France nous y sommes encore plus sensibles. La priorité de l'ensemble des agents de l'entreprise est d'offrir un service de qualité – régularité, continuité du service, propreté et sécurité – à l'ensemble des voyageurs empruntant nos réseaux.
La saturation du réseau, particulièrement sur la ligne A, est due essentiellement aux différentes politiques d'aménagement du territoire menées depuis près de cinquante ans. Celles-ci se sont traduites par la construction de bureaux à l'Ouest et de logements à l'Est sans qu'on en tire les conséquences en termes d'investissement dans les transports : depuis quinze ans, ce réseau n'a pas bénéficié d'investissement structurant des collectivités. Les difficultés sont encore aggravées par la multiplicité des acteurs assurant l'exploitation des lignes, ce qui complique et ralentit le processus de décision. Nous constatons enfin que la RATP souffre d'une différence de traitement quant à l'acquisition du matériel ferroviaire.
Nous ne négligeons pas les efforts mis en oeuvre pour pallier certaines difficultés, notamment l'accroissement significatif depuis quatre ans des investissements de transport dans notre région, sans compter ceux prévus dans le cadre du Grand Paris Express. En revanche, la mise en place depuis 2009 de l'interopérabilité entre la RATP et la SNCF sur la ligne B n'a pas apporté des bénéfices à la hauteur du niveau de complexité atteint pour exploiter la ligne de bout en bout. Concernant le financement du matériel roulant, la prise en charge par le STIF, à hauteur de 30%, des nouvelles rames circulant sur la ligne A aura des retombées positives sur les comptes de l'entreprise.
Il y a des moyens d'améliorer le service rendu aux Franciliens sur les lignes A et B du RER. Confier à un opérateur unique l'exploitation de l'ensemble d'une ligne est pour notre organisation syndicale la solution la plus appropriée pour assurer la régularité, la continuité du service et sa gestion en mode dégradé. Il nous semble que la RATP est l'entreprise la plus à même d'être cet opérateur unique sur les lignes A et B du RER. Cela serait conforme au sens de l'histoire : déjà en 1937, la ligne de Sceaux est passée de la SNCF à la Compagnie du chemin de fer métropolitain de Paris, l'ancêtre de la RATP ; la ligne de Saint Germain a suivi en 1964 et celle de Vincennes en 1969.
Deuxièmement, la RATP dispose des meilleures compétences pour exploiter un réseau urbain, ainsi qu'elle le démontre quotidiennement par l'exploitation des quatorze lignes de métro. Par ses caractéristiques – nombreux arrêts, forte fréquentation et intervalles faibles –, l'exploitation des lignes A et B du RER se rapproche beaucoup plus de celle d'un réseau de métro que du transport ferroviaire de grande vitesse, dont la SNCF est l'un des meilleurs spécialistes au monde. À cet égard, il est important de noter qu'à la RATP, les conducteurs du RER sont tous d'anciens conducteurs de métro, habitués à conduire avec de faibles intervalles, en zone urbaine, et avec de forts échanges voyageurs.
Troisièmement, la RATP n'a jamais cessé d'investir pour entretenir, voire améliorer les infrastructures et le matériel. On ne peut pas en dire autant de la SNCF sur le réseau francilien : ainsi l'ensemble des investissements pour le projet RER B Nord + a été réalisé par l'État et la Région.
En outre, la qualité du dialogue social dans notre entreprise, qui a permis de mettre en oeuvre des dispositions innovantes, telles que l'alarme sociale pour prévenir les risques sociaux, a des effets très positifs sur la continuité du service, comme le prouve la réduction depuis plusieurs années de la conflictualité et du nombre moyen de jours de grève. Il faut aussi souligner que l'encadrement de proximité, qui est très présent à la RATP, notamment en soutien des agents, permet une grande réactivité en situation dégradée.
Deuxième piste d'amélioration du service, des infrastructures dédiées et un commandement unique pour chaque ligne permettraient d'assurer une réactivité maximale en cas de dysfonctionnement. Il conviendrait donc que des voies soient réellement dédiées au nord de la ligne, ce qui permettrait de supprimer les ralentissements dus à la circulation d'autres trains, tels que des trains de marchandises, d'améliorer la fréquence des trains en équilibrant les intervalles entre deux trains, d'assurer une maintenance adaptée aux horaires du service voyageurs. Par ailleurs, la RATP demande depuis longtemps la mise en place d'un poste de commande centralisé par ligne, commun aux deux exploitants. Si l'unicité de l'opérateur ne pouvait pas être réalisée, la CFE-CGC de la RATP estime que ses autres propositions doivent absolument être mises en oeuvre pour assurer un meilleur service aux voyageurs sur la ligne B.
Concernant la ligne A, la seule solution réellement envisageable est celle de l'exploitation par la RATP de la ligne sur la partie Réseau Ferré National, RFN. En effet, mettre en place l'interopérabilité sur cette ligne n'aurait que peu d'impact sur la régularité. Les retards actuels étant plus certainement la conséquence de la configuration de la ligne exploitée en fourche que de la relève des conducteurs à Nanterre. On pourrait même craindre une dégradation de la régularité compte tenu des cultures différentes de régulation des conducteurs des deux entreprises.
Concernant le financement, la CFE CGC-RATP demande que la RATP bénéficie comme les autres opérateurs de la prise en charge de 50 % du coût du matériel roulant ferroviaire.
L'impact sur l'environnement dépendra du succès du transfert modal de la voiture aux transports en commun. Plus le développement du territoire et celui des transports seront en adéquation, plus l'impact sur l'environnement sera positif. Cela nécessite, non seulement un accroissement de l'offre de transport sous différentes formes – trains à deux niveaux, réduction des intervalles, etc. –, mais également la construction de nombreux parkings de rabattement, ainsi que l'élaboration de programmes de logements au plus près des lieux de travail.
Je dirais d'abord, comme mon camarade de l'UNSA, que c'est également en tant qu'usager du RER que je voudrais aussi m'exprimer, même si ce sont les salariés que je représente ici. Comme usagère depuis près de cinquante ans du RER B, et victime comme tous les usagers des dysfonctionnements de cette ligne, j'ai observé durant toutes ces années des évolutions dont les politiques ne prennent conscience que maintenant. Aujourd'hui, c'est la RATP qui paye le prix de ce retard, contrainte qu'elle est de résoudre sous la pression des problèmes dont la résolution demande de la réflexion. C'est pourquoi on peut se féliciter de la mise en place d'une telle commission d'enquête, qui n'a pas de précédent.
Cela fait bien longtemps que les syndicats de la RATP proposent des solutions propres à améliorer la régularité du RER. Ils y ont d'autant plus intérêt qu'ils subissent une énorme pression pour assurer cette régularité. La signature par la direction et les syndicats d'un protocole de prévention des risques psychosociaux est révélatrice à cet égard, tout autant que l'était l'importance des grèves qui ont perturbé le trafic sur la ligne A en 2009.
Ce mouvement de grève ne soutenait pas seulement une revendication salariale, il exprimait aussi l'exaspération de personnels qui avaient des propositions à formuler pour améliorer aussi bien leurs conditions de travail que l'accueil des usagers. Aucun salarié, qu'il s'agisse des agents en gare ou des agents de conduite, n'apprécie de subir la pression quotidienne d'un million de voyageurs qui l'interpellent sur les problèmes de fonctionnement de la RATP. Il n'est pas responsable de cinquante ans d'immobilisme. Ne confondons donc pas vitesse et précipitation en essayant de résoudre en deux ou trois ans ce qu'on n'a pas réussi à faire pendant tout ce temps.
On met en avant l'esthétique des nouveaux matériels et des nouveaux locaux, notamment en gare, sans prendre suffisamment en compte la maintenance des infrastructures.
La séparation comptable intervenue au sein de la RATP, entre l'opérateur de transport et le gestionnaire des infrastructures, conduit à faire peser 50 % de la dette sur chacun de ces deux organismes et entend faire porter les réductions de coûts sur les salariés. Mais on ne peut, à la fois, vouloir des transports novateurs et efficaces et réaliser des économies sur le dos des personnels.
Comme l'a déjà exposé M. Thierry Babec, d'autres solutions existent, notamment la révision des tableaux de services de conduite, qu'on ne peut appliquer en supprimant des effectifs. Ainsi, les propositions présentées par les organisations syndicales se trouvent toujours contredites par l'objectif systématique de réduction de la masse salariale. Une bonne productivité consiste à offrir un service de qualité aux usagers et non pas à diminuer les moyens pour y parvenir.
Nous attendons aussi de mieux connaître la démarche de votre commission d'enquête qui, à ce stade, nous inquiète plutôt qu'elle ne nous rassure quant à l'avenir de la RATP et de la SNCF. Il ne faudrait pas imputer aux personnels de ces entreprises des responsabilités qui ne leur appartiennent pas.
Je ne reviens pas outre mesure sur le choix politique ayant consisté à construire les logements à l'est de Paris mais les lieux de travail à l'ouest, ni sur les mauvaises dessertes de la capitale : par exemple, habitant à sept kilomètres du centre ville, il me faut une heure et quart pour m'y rendre. Un meilleur développement du réseau de transport dans les banlieues serait nécessaire mais présenterait évidemment un coût. Cependant il faudra bien, un jour ou l'autre, effectuer les investissements nécessaires. Et ce n'est pas la réduction des effectifs de personnels qui facilitera la réalisation de cet objectif.
Il est vrai que le contexte de crise, en outre mondiale, ne facilite pas la solution d'un problème vieux de cinquante ans et qui se traduit notamment aujourd'hui par le vieillissement du matériel. Certains croient encore que des équipements datant de 1900 permettent néanmoins de faire fonctionner un métro du troisième millénaire.
Si une volonté politique se manifeste pour développer les transports collectifs en Île-de-France, nous l'approuverons mais à la condition de créer ainsi des emplois : avec deux millions de chômeurs en France, il n'est plus possible d'accepter qu'on supprime encore des postes dans les entreprises de transports, compte tenu de la pression que subit aujourd'hui ce secteur. Nous attendons des entreprises publiques qu'elles rendent un service public efficace.
La démarche de notre commission d'enquête ne vise pas à faire émerger un nouveau modèle de réseau de transport préalablement préparé, non plus que de nouvelles clés de financement que nous sortirions de notre poche.
Notre rôle de parlementaires consiste, d'une part, à élaborer les lois, d'autre part – ce qui est moins connu de nos concitoyens – à contrôler l'action de l'exécutif et à veiller à la bonne marche de notre pays.
Les dysfonctionnements, quotidiennement ressentis par des centaines de milliers d'usagers, doivent être compris afin de dégager un certain nombre de propositions concrètes permettant d'améliorer le service public. Tel est notre objectif, notamment au travers d'auditions comme celles de ce matin.
Les représentants de SUD SNCF n'ont pu cependant être présents, en raison d'une cérémonie funèbre.
Le syndicat SUD RATP se réjouit que l'Assemblée nationale se soucie des problèmes du Réseau Express régional d'Île- de-France, en espérant que ses motivations ne sont pas uniquement dictées par des motifs électoraux.
Nous n'interviendrons qu'à propos des lignes A et B du RER, dont la RATP est le principal opérateur de transport et gestionnaire d'infrastructures.
Après des années de sous-investissement, voilà donc que le RER redevient l'objet de toutes les attentions, jusqu' à celle du Chef de l'État qui l'a érigé en enjeu national lors de son discours du 5 décembre 2011. Cette situation nous rend interrogatifs vis-à-vis de la politique de décentralisation des transports en Île-de-France initiée en 2000 avec la loi « SRU », d'autant qu'à moyen terme, nous risquons d'assister à un éclatement des transports franciliens avec la mise en oeuvre de la loi dite « ORTF » de 2009.
Considérer les problèmes du RER indépendamment des autres modes de transport serait une grave erreur, tout comme l'éclatement de la RATP sera préjudiciable aux usagers, sauf si le but recherché est bien de favoriser une économie de marché, en opposition avec un service public de qualité.
Effectivement, les usagers des lignes A et B du RER représentent une clientèle captive car, davantage que des mouvements sociaux, c'est bien du manque d'alternative qu'ils sont les otages – selon un terme à la mode – en raison d'une politique d'urbanisation non maîtrisée et d'une absence d'investissements en matière de transports qui a créé une dichotomie entre les pôles d'emplois et les lieux d'habitation.
La saturation des lignes A et B du RER n'est pas un risque : c'est déjà une réalité que vivent presque quotidiennement près de deux millions de voyageurs. Dès lors, la moindre interruption d'exploitation devient un problème pour tous ceux qui ne disposent d'aucune alternative pour rejoindre leur lieu de travail ou d'habitation.
Le RER est d'abord une infrastructure de transport surexploitée, qu'il s'agisse des voies ou des caténaires, soumise à une charge de plus en plus lourde, notamment avec les trains à deux niveaux MI2N et MI09, et à une fréquence de plus en plus tendue. Il subit également une surcharge de ses matériels de transport anciens, que sont les trains MI84 et MS61, comme des gares et des pôles d'échange. Ce qui crée des dangers aux heures d'affluence, tant à bord des trains, où des voyageurs connaissent des malaises, que sur les quais, avec des chutes sur les voies.
Parallèlement, le réseau souffre d'un désengagement en matière de maintenance, avec de plus en plus d'opérations curatives au détriment des actions préventives, une gestion des stocks de pièces à flux tendu et le recours à l'externalisation de certaines opérations contreproductives. La découverte de poussières d'amiante dans les trains MI79, qui sortaient de rénovation, démontre l'inefficacité d'une politique consistant à externaliser des opérations que pourrait efficacement réaliser la RATP.
Il faut aussi s'interroger sur les coûts directs et indirects de la rénovation, aux limites d'une technologie vieillissante qui peut occasionner des pannes, comme encore cette semaine sur la ligne A du RER.
Au-delà de leur fréquentation, c'est bien de retards à répétition que souffrent les lignes A et B du RER, les deux étant intimement liés, la surcharge et la surexploitation entraînant une multiplication des incidents et donc des retards. S' y ajoutent les conséquences des colis suspects, des incivilités et des actes de vandalisme.
Les conflits sociaux ne représentent qu'une infime partie des perturbations, dans un contexte de gel des salaires et de reculs sociaux sans précédent qui mériteraient un plus haut niveau de mobilisation des salariés. SUD RATP ne se réjouit donc pas du faible niveau de conflictualité de l'année 2011, avec seulement 0,56 jour de grève par agent sur la ligne A du RER et 0,96 sur la ligne B.
Les conséquences de la grève, montées en épingles par quelques démagogues, sont donc loin de représenter le problème majeur du RER. Mais il suffirait d'arrêter la casse des acquis sociaux, d'augmenter les salaires, d'améliorer les conditions de travail et de mener une politique de l'emploi pour que cessent les grèves, conséquences avant tout des attaques incessantes du gouvernement et de la surdité de la direction de notre entreprise. SUD RATP continuera donc, par tous les moyens, à défendre les intérêts des salariés : c'est sa seule raison d'être.
En matière d'environnement, le nombre de voyageurs transportés par les RER A et B met en lumière l'intérêt des transports en commun en matière de développement durable. Le facteur d'émission de la voiture particulière en milieu urbain est en effet 55 fois plus élevé que le facteur d'émission moyen des modes ferrés. Cependant il parait nécessaire de remplacer certains matériels roulants, comme le MS61, qui reste très polluant et qui ne restitue pas d'énergie au freinage, contrairement aux matériels plus récents.
Enfin, l'interopérabilité sur les lignes A et B du RER est une fausse bonne solution car la relève entre les conducteurs est un faux problème qui n'est pas en lui-même celui de ces deux lignes. Ainsi, l'interopérabilité de la ligne B n'a toujours pas démontré son efficacité, et les difficiles relations, voire la compétition, entre la SNCF et la RATP ne favorisent pas l'interpénétration des réseaux RFF et RATP. À l'image du poste de commandement unique, CUB, qui n'a toujours pas été créé sur la ligne B.
Sur la ligne A, l'interopérabilité, souhaitée par le Président de la République lui-même, risque de créer plus de problèmes qu'elle n'en résoudra. En effet, les temps de relève entre les conducteurs de la RATP et de la SNCF ne sont pas différents des inévitables temps de relève des conducteurs de la RATP entre eux. Sauf à remplacer les hommes par des machines, il faudra toujours procéder à des changements de conducteurs.
L'interopérabilité n'apportera rien de positif sur la ligne A du RER, si ce n'est une perte d'expérience dommageable à la régularité et à l'efficacité de la ligne, surtout dans son tronçon central où la RATP possède la maîtrise d'une fréquence d'exploitation plus proche de celle du métro que de celle du train.
Voici maintenant quelques pistes pour améliorer le fonctionnement des lignes A et B du RER.
En premier lieu, il faut favoriser la création d'emplois au plus près des zones d'habitation pour éviter d'accentuer le phénomène d'éloignement entre le domicile et le travail au regard du coût du logement en Île-de-France. On constate aujourd'hui une forte déconnexion entre des sièges sociaux qui s'installent à l'Ouest et des zones d'habitation qui se construisent à l'Est.
Il convient ensuite de développer des alternatives pour les usagers, de plus en plus nombreux, situés en bout de ligne des RER A et B.
Même le Grand Paris n'apporte pas de solution à moyen ou à long terme sur certains secteurs de la grande couronne, comme celui de Marne-la-Vallée Chessy, alors que les besoins de transports ne cessent de croître en Seine-et-Marne et que le TGV n'est évidemment pas un mode adapté à des déplacements urbains et semi urbains quotidiens.
De la même manière, le développement du plateau de Saclay ne doit pas s'effectuer sans un renforcement de la ligne B du RER, en attendant une ou des alternatives dédiées.
Il convient également d'améliorer l'offre de transport globale et la fréquence dans les branches du RER. Il est nécessaire pour cela de doubler les voies et les tunnels des RER A et B afin d'augmenter la capacité de leur tronçon central.
Nous préconisons aussi de poursuivre le remplacement de tous les anciens matériels roulants par des trains du type MI09. Ce qui pose la question du financement au moment où l'État prend des décisions augmentant la dette de la RATP et pesant sur des salariés soumis à un effort de productivité sans précédent, justement pour la réduire. Autrement dit : l'État décide des dépenses et les salariés en payent la note.
En dehors du périmètre de la RATP, il conviendrait de mettre en place des voies dédiées au RER car le réseau RFN n'est pas adapté aux exigences et aux fréquences des RER A et B, dont les voies ne souffrent pas d'être partagées avec d'autres lignes ou d'autres services.
L'augmentation des effectifs de conducteurs permettrait également d'améliorer la régularité, avec des glissements aux terminus pour compenser et rattraper une partie du retard pris en ligne.
Le nombre de stagiaires conducteurs devrait être accru. Actuellement, le département « métro » de la RATP ne pourvoit pas le département RER en mutations suffisantes pour remplacer, dans les délais impartis, tous les conducteurs du RER partant en retraite.
Nous réclamons une véritable politique de maintenance préventive, comportant des entretiens techniques et des visites systématiques, ce qui éviterait certains incidents en ligne, que subissent trop souvent les usagers.
Il faut renforcer la sécurité sur les voies afin d'éviter les vols de câbles, récurrents ces derniers mois. Nous sommes toujours en attente du renfort des 300 agents du service interne de sécurité de la RATP, le GPSR, annoncé le 11 mars 2011 par le ministre de l'intérieur.
Afin de mieux assister les voyageurs dans leurs déplacements occasionnels ou quotidiens et de mettre un terme à la politique de déshumanisation, nous souhaitons que l'accueil dans les gares soit amélioré.
Enfin, nous proposons de renouveler l'infrastructure de transport, méthodiquement la nuit, pour éviter des fermetures d'exploitation sur des périodes données – dont vous pouvez imaginer les conséquences – telles que les envisage pourtant la RATP, qui prévoit de renouveler l'intégralité du ballaste et des voies du tronçon central du RER A à l'horizon 2014.
Pour ne pas entrer dans un débat politique, nous n'interviendrons pas spécifiquement sur la question du financement, simple problème à nos yeux de redistribution et de partage des richesses. À l'heure où l'État veut augmenter les impôts indirects, avec une « TVA antisociale », tout en continuant d'exonérer les plus hauts revenus de l'imposition directe, nous estimons que les sources de financement se trouvent là où il y a de l'argent, et non pas dans les poches des plus défavorisés.
Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
Je tiens à préciser pour l'ensemble des personnes auditionnées qu'une commission d'enquête parlementaire constitue un dispositif relativement exceptionnel. Chaque législature n'en compte, en moyenne, qu'une dizaine. Avant d'en créer une nouvelle, il convient donc de réaliser, en amont, un long travail pédagogique. C'est bien pourquoi on ne peut dire que la présente commission s'inscrive dans le calendrier électoral du premier semestre 2012.
Nous avons choisi d'effectuer un « zoom » sur le réseau express régional, qui transporte tous les jours près de trois millions de Franciliens, après que nombre de missions parlementaires d'information se sont pertinemment penchées sur les thèmes du transport ferroviaire et du fret, également analysés par la Cour des Comptes dans un rapport de novembre 2010. La formule de la commission d'enquête nous a semblé bien adaptée à notre démarche en raison des moyens spécifiques, et particulièrement puissants, dont elle dispose et qui permettront peut-être de débloquer certaines situations que vous-même avez rappelées.
Un consensus se dégage sur la problématique d'aménagement du territoire, illustrée notamment par le fait que 18% des Franciliens habitent dans Paris où sont concentrés 32% des emplois, traduisant un mouvement inexorable et dépassant le constat traditionnel du logement à l'Est et du travail à l'Ouest.
Il en va de même du constat d'un réseau ferroviaire vieillissant sur lequel presque aucun investissement n'a été réalisé au cours des deux dernières décennies, ainsi que de l'augmentation du trafic de 30% durant les dix dernières années avec, en perspective, une augmentation analogue pour les dix prochaines. Ce qui a conduit à la surcharge que nous connaissons, où le moindre incident aboutit à une situation cauchemardesque, comme cela a encore été le cas lundi dernier.
Les personnels des entreprises de transport ne sauraient évidemment être tenus pour responsables de la « galère » subie par les usagers. Notre objectif n'est pas d'instruire leur procès mais de conduire une réflexion pragmatique qui soit de nature à résoudre un certain nombre de problèmes pratiques, aussi bien, à long terme, par une relance des investissements, qu'à court terme par l'adoption de quelques solutions concrètes. En tant qu'acteurs du système de transport, vous détenez la maîtrise de celles-ci et pouvez donc les soumettre à notre commission dans un esprit d'intérêt partagé. Je souhaiterais donc que vous nous en présentiez un relevé exhaustif, assorti d'une hiérarchisation des causes de dysfonctionnements du réseau que vous avez relevées.
J'aimerais également recueillir le sentiment des organisations syndicales de la RATP et de la SNCF sur la nécessité d'assurer une coordination efficace des différents opérateurs, aussi bien au titre du poste de commandement centralisé que dans la perspective d'un opérateur unique, notamment pour les lignes A et B du RER.
Enfin, quel bilan tirez-vous des lois de 2007 sur la modernisation du dialogue social et sur le service minimum dans les transports ?
La commission d'enquête ne comporte que des élus d'Île-de-France, ce que j'approuve car les conditions de vie sont plus difficiles, plus complexes et plus coûteuses en région parisienne qu'en province. Notre problématique est spécifique.
Les transports en commun, spécialement le RER, comptent parmi les facteurs de qualité de la vie.
Plusieurs propositions formulées ce matin par les uns et par les autres me paraissent particulièrement intéressantes.
Un de nos problèmes majeurs réside dans le nombre trop élevé de voyageurs par rapport à ce que permettent les infrastructures actuelles. N'oublions pas que la région d'Île-de-France est la première d'Europe, devant le Bade-Wurtemberg, par le niveau de son PIB ; nous souhaitons qu'elle le reste.
Pour cela, des investissements importants devront être réalisés dans le secteur du rail, d'autre part des solutions devront être trouvées pour rapprocher les usagers de leur lieu de travail. Ne devrait-on pas envisager la mise en place d'aides publiques dans ce but ? Ce qui coûterait beaucoup moins cher que des investissements massifs pour accroître les capacités de transport. Dans la plupart des ménages, l'homme et la femme travaillent et ne déménagent pas si seulement l'un des deux prend un emploi dans un lieu plus éloigné : ne peut-on imaginer que, au moins, les personnels fonctionnaires, nationaux ou territoriaux, ou d'organismes dépendant de l'État, puissent faire valoir des priorités pour leur mutation en fonction du lieu de résidence de leur ménage ?
Il faut aussi évoquer le covoiturage et le péage, sujets encore peu explorés en France, alors qu'aux États-Unis la première formule se pratique depuis près de trente ans. En Île-de-France, les autoroutes A4, A15 et A86 pourraient l'expérimenter dans certaines tranches horaires matinales.
Sur toutes ces questions, existent, pour notre commission, des gisements de propositions.
Élu de la partie ouest de la région parisienne, j'entends dire que le changement de conducteur du RER à Nanterre constitue un problème majeur, provoquant parfois des retards. Pourrais-je obtenir des précisions sur les difficultés créées en la matière par les fourches ?
Personne n'a encore parlé de l'insécurité. Considérez-vous qu'elle relève d'une certaine désorganisation du trafic ? Avez-vous des propositions à faire en la matière ?
Trois grands opérateurs interviennent en Île-de-France : la RATP, la SNCF et RFF. Est-ce trop ? Un opérateur unique des réseaux RATP et RER, permettant notamment une unité de commandement et de gestion des personnels, serait-il préférable ? Cette formule résoudrait-elle les problèmes d'interopérabilité qui ont été évoqués ?
Le rapprochement entre lieu d'habitat et lieu de travail préoccupe bien sûr les maires que nous sommes. Mais il faut savoir que les populations, souvent favorables à la construction de logements dans leurs quartiers, le sont beaucoup moins à la constitution d'une nouvelle zone d'activités économiques, dont elles redoutent les pollutions et les nuisances diverses.
Usager du RER C, je constate qu'il fonctionne plutôt bien et n'a pas, d'ailleurs, été cité ce matin. Mais se pose désormais le problème de la saturation des parcs de stationnement à proximité des gares du RER, nos concitoyens étant de plus en plus incités à préférer les transports en commun à l'utilisation de leurs voitures individuelles. L'augmentation du prix de l'essence et les discours officiels sur le développement durable ont contribué à cette évolution, ainsi que les difficultés rencontrées pour entrer dans Paris. La ville n'est pas adaptée à l'accueil d'un nombre très élevé de véhicules, manquant notamment de possibilités de stationnement.
La ligne C du RER va donner lieu à des études et à des travaux d'amélioration. L'État a signé un contrat de plan avec la région, avec un apport d'un milliard d'euros : 370 millions d'euros sont affectés à la ligne C, dont 70 millions pour la rénovation des gares et 300 millions au titre notamment de l'étude de son sextuplement entre Paris et Juvisy ainsi que pour résoudre le problème du noeud ferroviaire de Brétigny. Nous connaîtrons bientôt le calendrier des travaux.
Depuis la fin de la décennie de 1970, existait, dans le département de l'Essonne, un projet de tangentielle ferrée de grande ceinture sud-ouest, dont la réalisation a été abandonnée en 2002 pour être remplacée par celle du Tram Train entre Massy et Evry (TTME) et, peut-être, Versailles. La ligne devrait être ouverte en 2017, améliorant ainsi les déplacements entre banlieues.
Usager de la ligne E du RER, je constate aussi une saturation du trafic à certaines heures.
La ligne A du RER a été inaugurée en 1969 : on ne peut donc parler, comme l'a fait Mme Patricia Lasalmonie, d'une période de cinquante ans.
J'aimerais maintenant entendre les propositions, présentées tout à l'heure comme pratiques et pas chères par le représentant de l'UNSA.
La carte Imagine R, destinée aux étudiants de 12 à 25 ans, n'est « dézonée » que du samedi à zéro heure au dimanche à zéro heure, alors que la période de loisir des lycéens commence plutôt le vendredi vers 17 heures. Son mode de diffusion est également trop restreint : dans quatre gares seulement pour un département de 1,5 millions d'habitants.
En matière de sécurité, dispose-t-on de données quantifiées sur les fraudes ? Il semblerait qu'un nombre relativement élevé de personnes emprunte sans payer les différentes lignes du RER. Les transports ont un coût, qui doit être équitablement réparti.
Hors lignes nouvelles, quels investissements ont été réalisés en matériels et en infrastructures au cours des vingt dernières années ? On nous dit parfois que rien n'a été fait : j'aimerais disposer de données précises et mesurer ainsi les besoins des prochaines années.
En Île-de-France, région capitale et la plus riche d'Europe, on se déplace pour son travail mais aussi pour ses loisirs. Comment améliorer l'image de Paris, une des capitales mondiales du tourisme, vis-à-vis de ceux qui utilisent les transports en commun dans ce cadre ? Les liaisons et interconnexions ainsi que les tarifications sont souvent complexes, la sécurité n'est pas parfaitement assurée.
Les investissements récents réalisés autour des gares n'ont pas suffisamment pris en compte les parcs de stationnement.
Le péage existe, de fait, pour l'entrée dans Paris, en raison de l'impossibilité de stationner sur la voie publique et du quasi-monopole détenu par un opérateur privé sur les parkings souterrains qui lui ont été concédés. N'est-ce pas la conséquence d'une politique de la ville cherchant à éliminer l'automobile en surface ?
Usager de la ligne C, j'ai retenu du premier tour de table de ce matin que l'on pouvait identifier un certain nombre de mesures pratiques propres à améliorer les choses dans l'immédiat. Elles méritent donc d'être relevées et expertisées. Mais on voit bien que le fond du problème est celui de l'aménagement du territoire et que les chiffres d'évolution du trafic de voyageurs sont alarmants. De simples ajustements ne semblent pas se situer à la hauteur des enjeux.
J'approuve donc l'idée, esquissée par M. Axel Poniatowski, d'élargir le champ des travaux de notre commission au-delà des seules questions concernant le RER afin d'appréhender le problème plus vaste d'aménagement du territoire.
Notre président et notre rapporteur sont-ils disposés, à ce stade de la réflexion, à prendre en compte la dimension réelle des thèmes sur lesquels nous travaillons ?
Il s'agit en effet de sujets très vastes, touchant à l'aménagement du territoire, à l'équilibre entre l'habitat et l'emploi, que nous aborderons dans le cadre de cette commission. Nous entendrons d'autres responsables que ceux du seul secteur des transports, notamment des personnalités qualifiées qui ont établi le lien entre transports et aménagement du territoire. Mais il faut d'abord nous concentrer sur les dysfonctionnements du RER.
L'interopérabilité me semble apporter une bonne solution pour améliorer la qualité du service mais il semblerait que le dossier soit bloqué. Qui bloque ? Et pourquoi ?
La sécurité des usagers ne me semble pas avoir suscité beaucoup de propositions de la part des syndicats. J'aimerais qu'ils nous en parlent davantage.
La CFDT a présenté des propositions pour la tarification unique. Peut-elle les mieux les préciser, s'agissant notamment des calculs de coût ?
À nos yeux, l'opérateur unique est une fausse bonne solution. Une seule des organisations assises autour de cette table l'a proposée. Les présidents de deux entreprises publiques concernées n'y semblent pas très favorables.
La SNCF est l'opérateur exclusif de trois des cinq lignes du RER et pour moitié, s'agissant des deux autres lignes A et B. La professionnalisation de ses salariés n'est donc pas en cause : ils savent travailler en banlieue dense. Les personnels n'ont pas à être opposés les uns aux autres au titre de leur savoir-faire : appartenant à la SNCF ou à la RATP, ils disposent de leur propre technicité.
Certaines des voies exploitées par la SNCF relèvent du Réseau ferré national (RFN). Si donc on transfère les lignes à la RATP, il faudra déclasser ces voies. Or elles sont également utilisées, notamment la nuit, par des trains de fret. Il vaut donc mieux réfléchir à des solutions qui favoriseraient les interfaces, telle que le commandement unique, afin d'améliorer la gestion des situations de crise. Mais l'opérateur unique ne résoudrait pas le problème de la saturation du réseau, particulièrement de la ligne A.
Le problème de la relève des conducteurs se pose de la même manière qu'il s'agisse de conducteurs appartenant à deux entreprises ou à une seule. En outre, le temps de montée et de descente des usagers dans le train est supérieur à celui de la relève des conducteurs.
Il est, au surplus, paradoxal d'évoquer la perspective d'un opérateur unique quand, par ailleurs, on met en concurrence les deux entreprises concernées et qu'on multiplie les opérateurs sur les réseaux d'autobus. Comment un opérateur unique représenterait-il une bonne solution en souterrain mais pas en surface ? La réalité est que nous avons deux entreprises publiques qui savent chacune faire fonctionner un réseau, et la bonne question consiste à se demander comment mieux les faire travailler ensemble.
Un consensus se dégage sur la notion de poste de commandement centralisé, au nom de la bonne coordination.
Absolument, et il existe déjà … même s'il ne fonctionne pas.
Ce poste étant donc quelque peu virtuel, comment verriez-vous, en tant que professionnels du transport, s'effectuer sa mise en oeuvre opérationnelle ? Dans quel délai ?
Cela peut intervenir très rapidement. Rapprocher physiquement les équipes de la SNCF et de la RATP ne soulève pas de difficultés particulières.
De plus, il faut savoir que 60% des déplacements qui s'effectuent sur le réseau de la RATP ne sont pas dus au trajet entre le domicile et le lieu de travail. Ce qui pose des problèmes de signalétique adaptée et d'accueil orienté vers des usages touristiques, notamment en terme d'effectifs de personnels : les touristes, spécialement les étrangers, ont besoin d'agents qui les renseignent dans les gares et qui puissent souvent leur parler en anglais. La Gare du Nord, première d'Europe par son trafic, souffre ainsi d'une insuffisance d'accueil et de bonne orientation des touristes.
La sécurité des usagers est liée aux comportements d'incivilité, comme la résistance à la fermeture des portes qui empêche le train de partir. Se pose aussi la question de l'accompagnement des voyageurs dans les voitures, difficile à mettre en oeuvre en banlieue dans des wagons bondés.
La question de la présence humaine se pose donc d'une façon générale, dans les gares et dans les trains. On sait bien que la déshumanisation conduit directement à l'insécurité. La SNCF a accru les effectifs de sa surveillance générale (SUGE) dans le cadre de la police ferroviaire. Mais il faut aussi assurer une meilleure ouverture de la gare au public, grâce à une présence humaine du premier au dernier train.
La question de l'opérateur unique éveille immanquablement une querelle de clochers entre deux entreprises publiques …
Le protocole que nous avons signé sur l'interopérabilité date de 2009 et, depuis lors, on parle du CUB comme d'une Arlésienne : rien ne se passe, la RATP et la SNCF ne cessant de se renvoyer la balle. Les mêmes questions demeurent sans réponses : qui va commander les conducteurs ? La RATP exercera-t-elle une quelconque autorité sur les conducteurs de la SNCF, et réciproquement ? Le CUB sera-t-il installé à Denfert-Rochereau ou dans le nord de Paris ? Les intérêts divergents bloquent toujours les discussions. Comment faire maintenant progresser le dossier ? Pour la partie commandement, c'est possible rapidement mais la volonté politique fait défaut.
J'entends également parler d'interopérabilité sur la ligne A afin de résoudre le problème de la fourche. Il vaudrait mieux commencer par mettre en place un commandement centralisé : quand il n'existe qu'une seule autorité, la régularité s'améliore.
La problématique de la fourche réside dans l'arrivée de deux branches sur un tronçon central, comme dans un entonnoir. Avec ou sans relève des conducteurs, les difficultés restent donc les mêmes quant à la régularité du trafic. Sur la ligne B, des études réalisées en 2008 ont conclu que la seule solution résidait dans l'interopérabilité. Or, gare du Nord, l'existence d'un seul tunnel oblige les trains à attendre presque une minute trente avant que le signal passe au vert. La seule solution viable est donc, tout simplement, le doublement du tunnel.
Par ailleurs, par rapport aux quelques milliards d'investissement réalisés dans certains secteurs, il existe des solutions simples et peu chères.
Ainsi, placer une quinzaine de conducteurs supplémentaires à certains terminus pour faire tourner les trains améliorerait la fluidité. Nous le demandons depuis trois ans, mais cela ne s'est jamais fait. Il est tout de même incroyable de ne pas trouver quinze conducteurs supplémentaires pour la ligne A, qui transporte 1 200 000 voyageurs par jour !
Toujours sur la ligne A, il conviendrait d'installer le système SACEM jusqu'à Noisy-le-Grand. Il s'agit d'un système d'aide à la conduite, à l'exploitation et à la maintenance, mis en place en 1988. Il permet de ne garder qu'un espace très réduit entre deux trains, mais n'existe que sur le tronçon central. Sur les lignes B et D, il n'y a pas de système SACEM, ce qui oblige les conducteurs à travailler aux signaux. Comment pourra-t-on, en 2013, faire passer 32 trains dans un tunnel aux heures de pointe ? C'est quasiment impossible.
Pour améliorer la fluidité, on fait circuler des trains « haut le pied » en ne prenant pas de voyageurs pendant deux stations, pour arriver à l'heure ; en clair, on saute deux stations. Malheureusement, l'information des voyageurs n'est pas toujours assurée en temps et en heure, ce qui suscite des mécontentements, que certains manifestent parfois en actionnant les freins de secours.
J'en viens à l'insécurité.
Par exemple, au nord de la ligne B, les voyageurs se font régulièrement « dépouiller » en sortant de l'aéroport Charles-de-Gaulle. Le phénomène est connu et a été maintes fois relayé par les organisations syndicales et par les conducteurs eux-mêmes.
Sur le RER A, les freins de secours sont actionnés 600 fois par an, la plupart du temps sans aucun motif : il s'agit d'actes d'incivilité pure, qui provoquent des retards que l'on n'arrive pas à récupérer. En effet, depuis que l'on a augmenté l'offre de services sur la branche de Cergy-Pontoise en 2008, nous ne bénéficions plus, dans la journée, de la respiration qui nous permettait de nous remettre à l'heure.
Nous n'arrivons pas à faire passer suffisamment de trains dans le tronçon central aux heures de pointe.
Pour les habitants de Cergy-Pontoise, oui. Mais tout le reste de la ligne A s'en est trouvée perturbé.
Sur cette question, je vous suggère d'entendre M. Luc Offenstein, conducteur sur cette ligne depuis quinze ans.
Entre 2003 et 2008, le nombre de journées pendant lesquelles nous transportons plus d'un million de voyageurs est passé de 7 à 185 – en fait, tous les jours ouvrables hors périodes de congés scolaires. Nous avons subi de plein fouet cette augmentation, d'autant que dans le même temps, les investissements n'ont pas suivi. On s'est contenté, par exemple, de rénover un ancien matériel, le MS61, qui n'est plus adapté à la ligne A.
Voici un peu plus de trois ans, nous avons travaillé sur les améliorations qu'il était possible d'apporter et nous avons transmis tous nos documents à notre PDG. Malheureusement, nos propositions sont restées lettre morte. Je les récapitule.
En premier lieu, il serait de bonne méthode de n'utiliser qu'un seul type de matériel, c'est-à-dire aujourd'hui le matériel type MI2N et MI09, qui est compatible et permet d'augmenter le nombre de voyageurs.
Nous demandons aussi une extension et une amélioration du système SACEM, qui permet de rouler à moins de deux minutes d'intervalle, avec des trains qui, théoriquement, peuvent atteindre 100 kmh dans le tronçon central. Aujourd'hui, ce système sature : en cas de dysfonctionnement, le conducteur n'a d'autre solution que celle de repartir avec l'ancien système, à savoir la signalisation fixe ; or celle-ci augmente les intervalles et nous fait perdre encore du temps.
Il faudrait également achever la modernisation des dispositifs de visualisation des portes – je pense aux moniteurs de télévision et aux grands rétroviseurs, qui permettent un meilleur échange des voyageurs.
Nous souhaitons que le radiotéléphone fixe – dans notre jargon le RTF – soit remplacé par une radio numérique type TETRA, embarquée directement dans les trains. Nous aimerions que l'on étende le système SIEL (système d'information en ligne), développé au niveau du CDSMG (Centre de surveillance multi gares) de Val d'Europe, qui harmonise l'information avec l'exploitation en temps réel. En ce domaine, en effet, des progrès restent à accomplir.
De même, il conviendrait de raccourcir les temps de translation des aiguillages et de moderniser la signalisation environnante des services provisoires. J'entends par « services provisoires » les changements de voie : en situation dégradée, nous pouvons changer de voie et rouler à contresens pour utiliser la ligne, au moins partiellement.
Un schéma directeur nous a bien été présenté le 16 décembre. Toutefois, si sa faisabilité est établie, le délai de mise en oeuvre est de cinq ans. Or c'est beaucoup trop long ! Il faut rallonger certaines voies et installer des intercommunications de voies le plus rapidement possible, en profitant du renouvellement de la voie et du ballast – ou RVB. Pour le RER B, cela aurait déjà dû être fait en 2012 ; on a porté le délai à 2014. Il serait temps de s'en préoccuper.
À Saint-Germain, il faut reprendre l'implantation de la signalisation. Et si on veut y faire passer davantage de trains, il faudra ouvrir l'arrière gare pour permettre le « retournement après gare ». De même, à Torcy, il est nécessaire de modifier l'arrière gare et l'infrastructure ferroviaire.
En ce qui concerne, les personnels, je serai très clair : la tendance actuelle, qui est de diminuer les effectifs, principalement roulant, constitue une très grave erreur. Pour illustrer mon propos, je prendrai l'exemple du problème causé par le renforcement de l'offre sur la branche Cergy. Pour le résoudre, il faudrait pouvoir rattraper, en bout de ligne, le retard qu'il a occasionné. En effet, ce renforcement nous a obligés à mettre cinq trains supplémentaires dans le tronçon central, qui est devenu un entonnoir. Auparavant, pendant les heures creuses, nous pouvions rattraper le retard que nous prenions pendant les heures pleines. Maintenant, ce n'est plus le cas. La solution la plus logique et la plus facile à mettre en oeuvre consisterait à placer des conducteurs de réserve aux terminus intermédiaires – à la Varenne-Chennevières, Torcy, Rueil-Malmaison – pour tourner les trains qui ont pris du retard. De la sorte, les conducteurs des trains retardés changeraient de voie et pourraient repartir à l'heure après une pause. C'est une solution immédiate, mais qu'il n'est pas possible d'appliquer aujourd'hui.
Nous allons transmettre par écrit toutes ces propositions à la commission d'enquête.
La ligne A est actuellement victime de son succès. Depuis 2007-2008, des trains ont été rajoutés sur Cergy, mais le tronçon central ne comporte toujours que deux voies… ce qui revient à verser 1,25 litre dans une bouteille d'un litre.
Au moment de l'accroissement de l'offre sur Cergy, des trains qui allaient de Cergy à Paris Saint-Lazare ont été reportés sur la ligne À, tandis que la direction de l'entreprise souhaitait que soit assurée, dans le tronçon central, une équidistance des temps de passage entre chaque train. Cette situation a conduit à rajouter aux trains venant de Cergy des trains de service partiel allant de La Défense à Noisy-le-Grand. Il fallait en effet faire en sorte que, dans Paris, se présente un train toutes les deux ou trois minutes, de manière fixe. Bref, la ligne est surexploitée. Dans le même temps, on n'utilise pas toutes les capacités de retournement en terminus disponibles pour ces trains. Certaines gares comme celle de Joinville, sur la branche de Boissy-saint-Léger, pourraient servir de terminus partiels pour des trains navettes, d'autant qu'on trouve dans cette zone des pôles touristiques intéressants : Bois de Vincennes, camping européen de Paris, hippodrome de Vincennes… Il est dommage de ne pas exploiter cette gare, qui permettrait d'absorber quelques trains.
En outre, le matériel choisi, le MI09, appartient déjà au passé – les moteurs sont récents mais la carrosserie a été conçue en 1996 – et ne répond plus aux normes de sécurité du ferroviaire. Sur le RFN, donc sur les parties de la ligne A allant de Nanterre-Préfecture jusqu'à Poissy et Cergy, ce matériel est soumis à dérogation et ne peut pas circuler ailleurs. Alstom et Bombardier avaient en projet des matériels gros porteurs permettant de passer à un matériel de nouvelle génération, qui, lui, aurait pu être développé tant à la RATP qu'à la SNCF, et sans restriction de circulation sur le RFN. Toutefois, un an à dix-huit mois d'attente étaient nécessaires, et les autorités de tutelle ont préféré le MI09. En conséquence, nous devons « traîner » des matériels très disparates, d'âge et de conception différents : certains datent de l'époque du vieux moteur à explosion d'avant l'électronique ; d'autres appartiennent aux dernières générations. De plus, il a fallu re-développer des outils de maintenance pour les matériels anciens, reformer des équipes pour les entretenir et conserver de grandes surfaces à cet effet. Cela s'est évidemment fait au détriment de l'entretien et de la maintenance du matériel neuf, ce qui est tout à fait regrettable.
Nous ne voyons pas comment les lignes du RER pourraient être désengorgées car nous sommes tributaires des mouvements pendulaires des voyageurs et de leurs trajets entre leur lieu de travail et leur domicile.
Actuellement, les lignes C et D du RER ont limité le parcours de certaines missions : des trains partant de Saint-Martin d'Étampes sur la ligne C font terminus à Austerlitz ; des trains de la ligne D venant du sud-est font terminus à la Gare de Lyon, de manière à délester le tronçon. Cela se fait au détriment des voyageurs, puisqu'il y a rupture de charge.
Sur la ligne A, le tronçon central est plus chargé, et les voyageurs qui allaient à Saint-Lazare sont désavantagés : certaines gares, entre Cergy et Saint-Lazare, sont moins bien desservies et les voyageurs sont systématiquement dirigés sur ce tronçon central.
Enfin, il est évident que si le personnel travaille à flux tendu, la machine se grippe dès qu'un incident se produit, comme ce fut le cas lundi dernier sur la ligne A. Avec davantage de personnels, nous aurions certainement pu résoudre plus rapidement le problème.
Nous partageons ce qui a été dit précédemment sur l'opérateur unique. Même si ce n'est pas le sujet du débat, il est hors de question de mettre en concurrence les salariés du monde du transport.
La particularité de la ligne B vient de la séparation des gestionnaires d'infrastructures.
Par ailleurs, la particularité des postes de commandement, sur la partie SNCF, tient au fait qu'ils se trouvent dans les postes de commandement de l'infrastructure. C'est là que réside la complémentarité du système. L'intérêt est de pouvoir anticiper les divers incidents et d'échanger avec les gestionnaires d'infrastructures.
Je ne comprends pas pourquoi l'institution d'un opérateur unique mettrait en concurrence les personnels. Mais passons.
En revanche, j'ai cru comprendre que vous proposiez qu'il y ait un opérateur unique, non pour l'exploitation, mais pour les infrastructures. Pouvez-vous préciser votre pensée ?
Nous considérons que la séparation entre le gestionnaire de l'infrastructure et les opérateurs ferroviaires mise en oeuvre par l'État aboutit à la multiplication des acteurs qui se partagent le réseau – trains de fret, transporteurs de SNCF Voyage, TGV, etc. – et à la multiplication des points de vue individuels. Il n'y a plus de réflexion collective. Cela dit, nous n'avons pas à nous engager sur ce terrain.
En tout état de cause, et quelles que soient l'organisation et la gouvernance mises en oeuvre, faute des investissements nécessaires, les problèmes perdureront. Les camarades ont parlé de solutions « pas très chères ». Mais dès que l'on commence à toucher aux infrastructures et au matériel, il faut s'attendre à devoir y consacrer plusieurs centaines de millions ; on atteint rapidement le milliard. Comme cela a été souligné, sur RFN, les normes sont différentes. Enfin, il faut rénover les matériels anciens. Vous pouvez le constater, les problèmes sont très divers et on ne saurait leur apporter une solution unique.
Certains ont évoqué l'aggravation des problèmes de sécurité sur les différents réseaux. Des opérations de sensibilisation ont été lancées à l'intention des usagers, auxquels ont été distribuées des plaquettes. Sur la ligne D, par exemple, il a été expliqué que bloquer la fermeture des portes pour laisser rentrer un voyageur faisait perdre 30 secondes, ce qui provoquait des décalages, des bouchons et finalement d'énormes retards.
Aujourd'hui, la tendance est à la rationalisation. Ainsi, quand il existe une possibilité d'évitement pour faire en sorte que la situation d'un train n'ait pas de répercussions sur l'ensemble du plan de transport, on préfère intégrer l'utilisation de cette possibilité dans un calcul statistique… ce qui conduit, la plupart du temps, à la supprimer parce qu'à court terme, cela permet de réaliser des économies. Nous ne sommes pas convaincus qu'une telle solution soit valable sur le long terme.
En outre, des moyens devraient être consacrés à la sécurité des transports en Île-de-France, et une réflexion engagée sur l'aménagement des gares et sur les flux des voyageurs. L'augmentation de la fréquentation est telle que les gares ne sont plus adaptées à l'accueil des voyageurs.
Les opérateurs historiques sont soumis par ailleurs à des exigences de productivité. Quand l'État ou les collectivités ne financent pas, ils suppriment ou tentent de faire plus à coûts constants. Mais cela mène droit dans le mur : à vouloir « gratter » sur les coûts et à refuser d'admettre qu'on ne peut pas tout faire, qu'on ne peut pas toujours augmenter les fréquences, tous les acteurs se retrouvent en difficulté.
En matière de covoiturage, des essais ont été réalisés – consultation dans une gare, grâce à des téléphones mobiles de nouvelle génération, des offres de covoiturage. Toutefois, ce mode de transport pose des problèmes de coût et de fiabilité. Les transports en commun sont finalement plus sûrs. En outre, les utilisateurs risquent de ne pas sentir en sécurité.
Enfin, pour vous répondre sur le mode de financement, nous aurions besoin de précisions de votre part.
Je répondrai sur les problèmes de tarification, mais je tiens tout d'abord à présenter quelques observations.
En premier lieu, je ne représente pas la CFDT-RATP, mais le comité régional des « Transport et Équipement » (CRTE), qui réunit en son sein, pour traiter notamment des questions d'aménagement du territoire, tous les syndicats CFDT liés aux activités du transport, dont les cheminots, les urbains et les aériens.
En deuxième lieu, bien que plusieurs intervenants aient insisté sur le financement, il convient de se pencher avant tout sur l'aménagement du territoire. Prenez l'exemple de l'incident qui est survenu lundi sur le RER A : il s'explique par le fait que le réseau du RER a été construit au moindre coût, à une époque où le trafic était bien moins dense qu'aujourd'hui. C'est un problème commun à la SNCF et à la RATP. En cas d'accident, nous ne disposons d'aucune voie d'évitement pour dégager les matériels en panne. Nous préconisons donc que, dans les infrastructures qui seront développées à l'avenir, de telles voies soient aménagées.
En troisième lieu, vous avez parlé de la sécurité. Mais je ne sais pas si vous visiez les voyageurs, qui peuvent être victimes d'agression, ou la circulation des trains.
Nous visions la répercussion que peuvent avoir sur le trafic les problèmes d'insécurité que peuvent rencontrer les voyageurs.
Nous n'avons pas de solution magique à vous proposer. Cela dit, dans les zones denses, une des réponses pourrait consister à multiplier les portes automatiques sur les quais : celles-ci rassurent les voyageurs, qui peuvent craindre d'être poussés sur les voies. Le problème concerne, là encore, aussi bien la SNCF que la RATP. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai précisé que je ne représentais ni l'une ni l'autre : ma représentation est interprofessionnelle.
Personne ne représente la SNCF ou la RATP : vous êtes tous les représentants d'organisations de salariés. En outre, chacun s'exprime librement.
Venons-en à la problématique de la tarification. Le budget du STIF dépasse les 8 milliards d'euros, dont un peu plus de 3 milliards proviennent des billets payés par les usagers. Nous constatons que l'institution d'un Pass Navigo à tarif unique sur l'ensemble de l'Île de France n'est pas une demande forte des usagers, puisqu'un tel titre de transport est surtout utilisé dans les zones 1, 2 et 3, les zones plus denses. Par ailleurs, si ce Pass unique coûtait 62 euros, soit le tarif minimum des zones 1 et 2, son institution entraînerait une perte financière élevée pour le STIF. Pour l'éviter, il faudrait que le Pass coûte au moins 90 ou 92 euros.
Nous proposons une autre solution qui, elle, arrangerait la plupart des salariés : la réduction du nombre des zones. Une nouvelle zone 1 intégrerait les zones 1, 2 et 3, tandis que la seconde zone comprendrait les zones 4 et 5. En outre, nous pensons que les salariés et l'ensemble des voyageurs de cette première zone seraient intéressés par la possibilité de circuler jusqu'à la zone 5 pendant les week-ends et les périodes de fêtes.
Enfin, je tiens à dénoncer une anomalie. En Île-de-France, sauf lorsqu'ils sont titulaires de la carte Améthyste, réservée aux personnes non imposables ou handicapées, les retraités ne bénéficient d'aucune réduction. Pourtant, ils représentent 20% de la population de la région, contribuent, lorsqu'ils sont imposables, au financement du STIF, sont actifs dans des associations et participent à la vie de la communauté.
Les décisions qui seront prises à propos du Pass Navigo nous échappent. Nous nous en tiendrons donc à notre rôle de syndicalistes. Il nous semble malgré tout que l'instauration d'un tarif unique, qui aura un coût pour la région et réduira d'autant les investissements, ne constitue peut-être pas une priorité. Cela risque, en outre, de conduire à des suppressions de personnel dans les stations et les gares ; or rien ne remplace le contact direct d'un représentant de l'entreprise, qui peut rassurer les voyageurs.
À propos de l'opérateur unique, je ferai remarquer que chaque entreprise possède sa propre culture et qu'il faut tenir compte du sentiment d'appartenance des personnels à leur entreprise. La fusion des deux opérateurs pourrait, au moins pendant un certain temps, s'accompagner d'une certaine désorganisation.
Cela dit, nous nous félicitons presque qu'il soit envisagé aujourd'hui un seul transporteur en Île-de-France, car, depuis plus de vingt ans que je travaille à la RATP, j'ai entendu un discours inverse. Or la multiplication des acteurs ne pourra que multiplier les problèmes, chacun ayant ses procédures, ses réglementations internes, et donc sa culture – c'est déjà le cas aujourd'hui.
Nous serions plutôt favorables à un poste de commandement centralisé, dont l'institution constitue une réponse rapide et concrète aux difficultés rencontrées par les voyageurs – qui ne peuvent pas attendre le Grand Paris pendant quinze ou vingt ans. Bien sûr, cela suppose la fin des guerres de clocher. Dans l'intérêt des Franciliens, les deux entreprises doivent se mettre d'accord. Mais n'oublions pas que le pouvoir politique a son mot à dire : c'est lui qui commande. C'est votre rôle d'en décider, ce n'est pas le nôtre. Une telle solution permettrait d'harmoniser les réglementations et les procédures des deux opérateurs historiques.
Je vous suggère de nous adresser une contribution écrite sur le sujet, qui me semble très important.
Avez-vous mis en place des programmes de formation pour standardiser les procédures ? Je pense plus particulièrement à la gestion de crise.
S'agissant des textes sur le service minimum – ou plus exactement l'obligation de déposer un préavis –, ils n'ont pas changé grand-chose. En revanche, la mise en place de l'alarme sociale – en 1996 à la RATP – a amélioré la situation, dans la mesure où elle a donné sa chance au dialogue social. Auparavant, il fallait déposer un préavis de grève pour pouvoir rencontrer l'employeur. Maintenant, il suffit de lui envoyer un courrier ou un fax, et il est devant vous dans les cinq jours. Ensuite, bien évidemment, il faut que les deux parties jouent le jeu, rentrent dans la salle pour négocier, avec la volonté d'aboutir. Bref, le service minimum n'a rien changé à notre quotidien. Pour nous, c'est du politique – au mauvais sens du terme.
Je répondrai à M. Poniatowski que logement et transport sont effectivement liés. Mais comment faire en sorte de rapprocher les usagers de leur lieu de travail ? Seule la puissance publique est à même de modifier les lois naturelles du marché. Tant que les logements situés à l'Ouest coûteront 8 000 ou 10 000 euros le mètre carré, peu de gens s'y installeront. Vous avez malgré tout raison : il serait très efficace de réfléchir de manière globale.
Enfin, il faut sortir des évidences. Constatant que les voyageurs sont serrés dans les trains, les politiques ont tendance à demander à l'opérateur d'en rajouter. Or si l'on veut que la situation s'améliore, il faut, au contraire, en supprimer même sur le RER A ou le RER B. Cessons d'en augmenter le nombre ; cela risque même de nous conduire à la catastrophe : des trains ont déjà failli se retrouver face à face!
Les voyageurs seront-ils plus serrés ? Ce n'est même pas sûr. Je prends le RER A tous les jours et je constate qu'à deux minutes d'intervalle, un train peut être bondé et le suivant beaucoup moins chargé. C'est plus une question de régularité que d'offre de transport. Mais la régularité ne sera possible que si l'on arrête de rajouter des trains sur les lignes.
Ce que ne supportent pas les voyageurs, ce n'est pas tant le fait d'attendre ou d'être très serrés, c'est que le nombre de trains ne soit pas équilibré en fonction des destinations.
S'agissant des fourches, ce qui pose problème, en fait, c'est que deux trains sur trois puissent aller dans une direction et qu'un seul aille dans une autre.
Je partage votre point de vue. J'emprunte quotidiennement le RER A à Nation, pour rentrer chez moi, sur la branche de Chessy. Or, quand je vois deux trains qui vont vers la branche Saint-Maur – Joinville dans lesquels les gens sont très à l'aise, alors qu'un seul va vers Chessy et que, dans celui-ci, nous sommes « serrés comme des sardines », je suis choqué. J'en viens à penser que certains électeurs sont moins influents que d'autres. Mais sans doute est-ce de ma part du mauvais esprit…
À l'ouest de la ligne A, dans l'autre sens, la raréfaction de l'offre de transport sur la branche allant vers Saint-Germain-en Laye, dont on pourrait pourtant supposer que les habitants ont un bon carnet d'adresses, constitue un contre-exemple !
Mettons en place des postes de commandement centralisés, harmonisons les procédures et les réglementations, apprenons aux entreprises à travailler ensemble : ce serait déjà une première réponse.
L'un d'entre nous a déclaré que les investissements réalisés initialement sur la ligne A n'avaient pas été à la hauteur. Pour ma part, je pense le contraire. Le problème est que depuis bientôt trente ans, la situation n'a pas évolué.
Un autre a préconisé l'installation de portes palières. Cette solution est pertinente pour le métro. Elle l'est aussi sur le tronçon central du RER A, sauf que, pour l'instant, c'est impossible : nous utilisons en effet quatre matériels différents, avec des techniques et un espacement des portes différents.
Ce que l'on appelle les « accidents de personnes » – 90 % sont des suicides – affectent la régularité du trafic. Les procédures judiciaires actuelles sont très compliquées : on ne peut pas toucher le corps, ce qui conduit à bloquer le train et donc la voie ; il faut prévenir un officier de police judiciaire (OPJ), le Parquet, etc. De telles procédures prennent au moins une heure à la RATP, et deux heures à la SNCF ; il faudrait réfléchir à les alléger.
On compte 35 à 45 accidents voyageurs graves par an, uniquement sur la ligne A, et pratiquement deux par jour sur l'ensemble du réseau ferré d'Île-de-France.
S'agissant du service minimum, nous y avons été défavorables dès l'origine. Il n'a fait que rendre plus compliqué l'exercice du droit de grève sans améliorer aucunement le dialogue social. Ce n'était pas la grève qui était responsable de l'irrégularité du trafic.
En matière de sécurité, je tiens à faire remarquer que l'État a sa part de responsabilité. Cela étant, les deux entreprises publiques ont aussi la leur – du reste, elles organisent des contrôles. Toutefois, elles ne peuvent pas assurer cette sécurité à elles seules. Il ne faut donc pas leur en déléguer l'entière responsabilité.
Notre organisation syndicale était effectivement la seule à parler d'opérateur unique. Mais les propos des uns et les autres – sur les fameuses « guerres de clochers », sur l'endroit où l'on pourrait installer le PCC et sur son commandement – amènent à penser que la solution consisterait peut-être à n'avoir qu'un seul patron. Reste à savoir qui, de la RATP ou de la SNCF ? J'ai développé les raisons qui font que nous pensons que ce doit être la SNCF. Celle-ci devrait pouvoir opérer seule sur les lignes A et B du RER ; sur les lignes C, D et E, c'est déjà le cas, de bout en bout.
L'idée n'est pas d'avoir un opérateur unique en Île-de-France, mais d'avoir un opérateur unique sur les lignes A et B du RER. Il ne s'agit pas de remettre en cause les compétences des conducteurs de la SNCF ou de la RATP. Simplement, chacun travaille avec sa culture, et les règles de régulation et de conduite sont différentes. Aujourd'hui, lorsqu'un conducteur SNCF voit un panneau d'avertissement, il réduit immédiatement sa vitesse ; ce n'est pas le cas d'un conducteur RATP, qui continue jusqu'au feu rouge suivant. Tout cela peut évidemment créer des problèmes de régulation dans le tronçon central.
C'est absolument n'importe quoi !
Dans la mesure où il n'y a pas d'opérateur unique, il faut à tout prix des voies dédiées. Or je crois savoir que RFF envisage, lorsque sera réalisé le projet d'amélioration au nord du RER B, d'y faire rouler des trains de marchandises et d'autres trains. Il n'y aura donc pas réellement de voies dédiées.
Je remarquerai, pour terminer, que le doublement du tunnel entre Châtelet et Gare du Nord est également prioritaire si l'on veut pouvoir faire passer dans de bonnes conditions les trains du RER B et du RER D.
J'habite depuis cinquante ans sur la fourche de Robinson, au sud du RER B, l'ancienne ligne de Sceaux. Sur cette fourche, dont on ne parle jamais, il n'y a que trois gares. Les foyers qu'elles desservent ne sont pas parmi les plus pauvres. Quant aux associations d'usagers du secteur, elles sont très virulentes. Il n'empêche que les trains qui sont supprimés pour améliorer la régularité de la ligne sont les nôtres, et qu'il nous arrive de devoir attendre huit trains pour regagner Robinson.
Les fourches posent donc de vrais problèmes. Mais je ne pense pas que changer d'opérateur améliorera la situation de ce secteur. Comme sur la ligne A, le problème vient du tronçon central, et c'est lui qu'il faut traiter.
Je remarque par ailleurs que l'on a beaucoup parlé de la sécurité des personnes. Cela ne doit pas nous conduire à négliger la sécurité ferroviaire. Certes, des incivilités sont à déplorer, mais celles-ci ne sont que le reflet de ce qui se passe aujourd'hui dans notre société. Je préfère insister sur le fait qu'en voulant faire de la productivité, la sécurité ferroviaire est mise en danger. De nombreuses organisations syndicales – en tout cas à la RATP – sont intervenues sur ce sujet. Par trois fois, en effet, nous avons failli faire la une du 20 heures, pour des accidents graves dans lesquels plusieurs centaines de voyageurs auraient pu trouver la mort. La sécurité ferroviaire a un coût, et, en ce domaine, il n'est pas possible de faire des économies.
Tout le monde semble avoir oublié que la RATP comme la SNCF, ont le même patron, à savoir l'État. C'est donc à lui de prendre des décisions pour faire en sorte que la situation s'améliore.
La question de l'opérateur unique ne se pose que parce que l'on a souhaité l'interopérabilité. Or l'interopérabilité est comme l'Europe : on a ouvert les frontières avant d'avoir harmonisé les règles. Il ne fallait pas laisser les conducteurs interpénétrer les réseaux. Il aurait fallu mettre en place un poste de commandement central.
Un changement de conducteur ne prend pas plus de temps que le mouvement des voyageurs. Mais il ne faut pas faire n'importe quoi. Il faut développer des interfaces techniques et se préoccuper de la sécurité ferroviaire, ce qui demande une certaine préparation. Si la décision peut-être prise rapidement, il en va tout autrement de sa mise en oeuvre. Ainsi, lors de l'incident de lundi dernier, on s'est aperçu que lorsqu'il n'y avait plus de courant, il n'était plus possible de communiquer avec le conducteur et que celui-ci ne pouvait plus communiquer avec les voyageurs !
Dès l'origine, l'attention a été focalisée sur les conducteurs, lesquels seraient de dangereux irresponsables. Il aurait mieux valu se préoccuper de mettre en place un PC centralisé. Reste à savoir qui commanderait un tel PC. En outre, si l'on décidait de garder les deux entreprises, elles devraient y participer l'une et l'autre ; dans ce cas, pourrait imaginer un seul chef de salle, mais avec des systèmes d'interfaces. Tout cela est réalisable, mais doit être réfléchi.
Aujourd'hui, le principal problème qui se pose concerne le RER A – et le RER B suit le même chemin. Les autres lignes rencontrent aussi des problèmes, mais bien moindres. Il faut dire que le RER A et le RER B concentrent les deux tiers du trafic et que les fréquences des trains y sont bien plus élevées. Aux heures de pointe, sur Eole, il y a un train toutes les 20 minutes ; mais sur le tronçon central de la ligne A, lorsqu'un train arrive sur une station, l'arrière de celui qui en sort est encore visible – les conducteurs conduisent à vue.
Sauf incident, en heures creuses, la capacité de transport est suffisante sur la ligne A. Le problème se pose aux heures de pointe dans le tronçon central, par lequel on ne peut pas faire passer davantage de trains. La solution – qui suppose qu'on ait de l'argent –serait de doubler le tunnel ; de cette façon peut-être pourrait-on maintenir la même fréquence sur le tronçon central que sur les branches.
Si la tarification unique fait baisser le prix du Pass Navigo, nous sommes d'accord. En tout cas, il ne faut pas faire payer plus cher les usagers qui habitent en bout de ligne et dont ce n'est pas forcément le choix. En zone 5, il n'y a pas beaucoup de transport ; les Parisiens n'imaginent pas la chance qu'ils ont en termes d'offres de transport !
Comme l'a fait observer le représentant de l'UNSA, les portes palières ne constituent pas une solution. On peut envisager d'en installer au moment de l'installation, mais pas sur des systèmes existants. Sur la ligne 1, dans certaines stations, il a fallu affecter du personnel à la surveillance des portes palières : en effet, il existe un intervalle entre ces portes et les portes du train, qui fait que des voyageurs peuvent tomber sur les voies.
S'il est institué un péage sur les autoroutes à l'entrée de Paris, nous explosons ! Je propose une autre solution : supprimez les autoroutes ; rien que sur l'A 4, vous pourrez construire huit voies de RER …
S'agissant de la sécurité, nous l'avons déjà dit, nous attendons toujours le personnel promis par le ministre de l'intérieur. Évidemment, cela coûte de l'argent …
En cas de colis suspect, nous faisons appel aux services de déminage. Mais pourquoi ne formerait-on pas du personnel en interne ? Aujourd'hui, la gestion des colis suspects n'est pas satisfaisante et nous ne sommes pas à l'abri d'un accident. Il serait d'ailleurs intéressant que vous interpelliez la direction de la RATP à ce propos : il arrive, en effet, alors que des équipes de sécurité ont circonscrit le colis suspect, que des responsables de la RATP procèdent à son ouverture, alors qu'ils n'ont pas la formation nécessaire. Bien évidemment, tout comme les agressions, la présence des colis suspects peut entraîner des problèmes et des retards.
J'insisterai maintenant sur la baisse de qualité des contrôles à la RATP. Auparavant, il y avait des contrôles dédiés par réseau – RER, métro et bus. Pour satisfaire à une volonté politique, un service de contrôle unique a été mis en place. Selon moi, c'est une catastrophe.
Les contrôles ont fait apparaître un autre problème : celui des « pièges tarifaires ». Il est très difficile, notamment pour les touristes, de s'y retrouver entre les différentes zones et entre les zones gérées par la RATP et la SNCF. Le passe unique aurait au moins l'avantage de résoudre ce problème.
Pour ce qui est des accidents graves de voyageurs, je comprends qu'une intervention rapide soit souhaitée lorsqu'ils se produisent. Toutefois, on ne peut pas demander au conducteur de débarrasser rapidement un corps, et on ne peut pas non plus faire n'importe quoi – ce n'est pas notre métier. À ce propos, permettez-moi de relater un incident dont la télévision s'est fait l'écho : alors qu'une personne était morte après que sa tête eut heurté un marchepied – elle avait été poussée – les passagers se sont surtout inquiétés de savoir quand ils allaient pouvoir repartir, certains même n'hésitant pas à enjamber le corps ! J'ajoute que la rapidité d'une intervention dépend de la proximité de ceux qui interviennent.
Je voulais répondre à M. Poniatowski à propos de la desserte des branches. Dans mon entreprise, les organisations syndicales ont travaillé sur les tableaux de service, lesquels sont construits de manière que les branches soient desservies à part égale, ou pratiquement à part égale. Cela étant, sur la ligne A du RER, nous nous heurtons à plusieurs difficultés. Certaines sont d'ordre technique : quatre matériels sont utilisés, dont un matériel monovoltage, qui ne permet pas aux trains de rouler sur les branches SNCF. D'autres difficultés sont liées aux infrastructures : ainsi, à Saint-Germain-en-Laye, la gare ne permet pas de faire un retournement après-gare, ce qui explique qu'aux heures de pointe, tous les trains ne peuvent desservir cette station. Mais le problème majeur réside dans le tronçon central, qui est trop chargé et qui déséquilibre l'ensemble de la ligne. On l'a dit : il n'est pas possible de mettre 1,25 litre dans une bouteille d'un litre.
Il me semble que les lignes sont trop longues et trop complexes : une porte qui se ferme avec du retard à Dourdan ou à Étampes peut perturber le reste de la ligne C jusqu'à Pontoise.
Quand la liaison Tram Train entre Massy et Évry sera ouverte, la mission Z 6 sera supprimée. Cela ne pourra qu'améliorer le trafic de la ligne C. En effet, lorsque les trains de la mission patinent sur des feuilles mortes à Jouy-en-Josas, ils perturbent cette ligne, qu'ils rejoignent ensuite à Savigny-sur-Orge. Le bénéfice apporté par une telle suppression ne sera pas négligeable, malgré la rupture de charge qui en résultera pour les usagers, qui devront changer à Épinay-sur-Orge. Cet exemple prouve que si l'on arrivait à « débrancher » quelques unes des tentacules de ces lignes qui s'apparentent à de véritables pieuvres, on renforcerait le réseau central.
L'un des intervenants a par ailleurs indiqué que, dans le schéma directeur, on avait prévu des trains terminus à Austerlitz ou à la Bibliothèque François Mitterrand (BFM), lesquels ne traverseraient pas Paris : j'y vois un moyen d'améliorer la régularité des trains. Il faudrait limiter les inconvénients de la rupture de charge qui en résulterait en organisant à BFM, à Austerlitz, voire à Javel, des correspondances de quai à quai, avec des navettes qui circuleraient à l'intérieur de Paris. En tout cas, la porte qui se fermerait mal ou qui se fermerait en retard à Étampes ou à Dourdan ne perturberait pas la ligne jusqu'à Pontoise ou à Cergy, mais seulement jusqu'à Javel, Austerlitz ou BFM.
Il conviendrait, bien évidemment, d'apprécier les avantages et les inconvénients de ce genre de solutions. Personnellement, je pense que nous y gagnerions.
Enfin, abstraction faite de toute considération politique, je dois dire qu'en tant qu'usager, j'apprécie le service minimum. Auparavant, les jours de grève, il m'arrivait d'attendre un train trois quarts d'heures sur le quai. Maintenant, je regarde la veille au soir les horaires des trains annoncés et je sais que peux m'y fier. Cela me permet d'organiser mon emploi du temps.
Mon cher collègue, je tiens à vous faire remarquer qu'on ne peut pas parler de service minimum, dans la mesure où, ces jours-là, il n'y a pas de réquisition du personnel et où la circulation des trains résulte d'un accord négocié précédemment dans l'entreprise.
Mesdames, messieurs, je souhaiterais que vous formuliez par écrit vos propositions en les hiérarchisant et en précisant les délais et les moyens qui seraient nécessaires, selon vous, à leur mise en oeuvre. Il conviendrait que vous nous les adressiez rapidement. En effet, nous aurons à coeur de les transmettre aux responsables des différentes directions de transport, que nous allons auditionner.
Je tiens à insister plus particulièrement sur l'harmonisation des procédures et la mise en place de programmes de formation pour y parvenir. Cela me semble en effet extrêmement important.
J'aimerais enfin que vous nous donniez, là encore par écrit, votre sentiment de professionnels sur les éventuelles possibilités d'automatisation de tout ou partie du RER, à l'instar de ce qui s'est fait sur la ligne 1.du métro.
La table ronde prend fin à douze heures vingt-cinq.
◊
◊ ◊
Membres présents ou excusés
Commission d'enquête relative aux modalités, au financement et à l'impact sur l'environnement du projet de rénovation du réseau express régional d'Île-de-France
Réunion du jeudi 12 janvier 2012 à 9 h 15
Présents. - Mme Françoise Briand, M. Patrice Calméjane, M. Christophe Caresche, Mme Cécile Dumoulin, M. Gérard Gaudron, M. Daniel Goldberg, M. Didier Gonzales, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Guy Malherbe, M. Pierre Morange, M. Axel Poniatowski, M. Arnaud Richard, M. Yves Vandewalle
Excusés. - M. François Asensi, M. Yanick Paternotte