Je dirais d'abord, comme mon camarade de l'UNSA, que c'est également en tant qu'usager du RER que je voudrais aussi m'exprimer, même si ce sont les salariés que je représente ici. Comme usagère depuis près de cinquante ans du RER B, et victime comme tous les usagers des dysfonctionnements de cette ligne, j'ai observé durant toutes ces années des évolutions dont les politiques ne prennent conscience que maintenant. Aujourd'hui, c'est la RATP qui paye le prix de ce retard, contrainte qu'elle est de résoudre sous la pression des problèmes dont la résolution demande de la réflexion. C'est pourquoi on peut se féliciter de la mise en place d'une telle commission d'enquête, qui n'a pas de précédent.
Cela fait bien longtemps que les syndicats de la RATP proposent des solutions propres à améliorer la régularité du RER. Ils y ont d'autant plus intérêt qu'ils subissent une énorme pression pour assurer cette régularité. La signature par la direction et les syndicats d'un protocole de prévention des risques psychosociaux est révélatrice à cet égard, tout autant que l'était l'importance des grèves qui ont perturbé le trafic sur la ligne A en 2009.
Ce mouvement de grève ne soutenait pas seulement une revendication salariale, il exprimait aussi l'exaspération de personnels qui avaient des propositions à formuler pour améliorer aussi bien leurs conditions de travail que l'accueil des usagers. Aucun salarié, qu'il s'agisse des agents en gare ou des agents de conduite, n'apprécie de subir la pression quotidienne d'un million de voyageurs qui l'interpellent sur les problèmes de fonctionnement de la RATP. Il n'est pas responsable de cinquante ans d'immobilisme. Ne confondons donc pas vitesse et précipitation en essayant de résoudre en deux ou trois ans ce qu'on n'a pas réussi à faire pendant tout ce temps.
On met en avant l'esthétique des nouveaux matériels et des nouveaux locaux, notamment en gare, sans prendre suffisamment en compte la maintenance des infrastructures.
La séparation comptable intervenue au sein de la RATP, entre l'opérateur de transport et le gestionnaire des infrastructures, conduit à faire peser 50 % de la dette sur chacun de ces deux organismes et entend faire porter les réductions de coûts sur les salariés. Mais on ne peut, à la fois, vouloir des transports novateurs et efficaces et réaliser des économies sur le dos des personnels.
Comme l'a déjà exposé M. Thierry Babec, d'autres solutions existent, notamment la révision des tableaux de services de conduite, qu'on ne peut appliquer en supprimant des effectifs. Ainsi, les propositions présentées par les organisations syndicales se trouvent toujours contredites par l'objectif systématique de réduction de la masse salariale. Une bonne productivité consiste à offrir un service de qualité aux usagers et non pas à diminuer les moyens pour y parvenir.
Nous attendons aussi de mieux connaître la démarche de votre commission d'enquête qui, à ce stade, nous inquiète plutôt qu'elle ne nous rassure quant à l'avenir de la RATP et de la SNCF. Il ne faudrait pas imputer aux personnels de ces entreprises des responsabilités qui ne leur appartiennent pas.
Je ne reviens pas outre mesure sur le choix politique ayant consisté à construire les logements à l'est de Paris mais les lieux de travail à l'ouest, ni sur les mauvaises dessertes de la capitale : par exemple, habitant à sept kilomètres du centre ville, il me faut une heure et quart pour m'y rendre. Un meilleur développement du réseau de transport dans les banlieues serait nécessaire mais présenterait évidemment un coût. Cependant il faudra bien, un jour ou l'autre, effectuer les investissements nécessaires. Et ce n'est pas la réduction des effectifs de personnels qui facilitera la réalisation de cet objectif.
Il est vrai que le contexte de crise, en outre mondiale, ne facilite pas la solution d'un problème vieux de cinquante ans et qui se traduit notamment aujourd'hui par le vieillissement du matériel. Certains croient encore que des équipements datant de 1900 permettent néanmoins de faire fonctionner un métro du troisième millénaire.
Si une volonté politique se manifeste pour développer les transports collectifs en Île-de-France, nous l'approuverons mais à la condition de créer ainsi des emplois : avec deux millions de chômeurs en France, il n'est plus possible d'accepter qu'on supprime encore des postes dans les entreprises de transports, compte tenu de la pression que subit aujourd'hui ce secteur. Nous attendons des entreprises publiques qu'elles rendent un service public efficace.