Commission des affaires économiques
La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean Proriol, les articles du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif au statut de l'entreprise publique La Poste et aux activités postales (n° 2060).
Nous en venons à l'examen des amendements.
Après consultation de la Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, je déclare irrecevables au sens de l'article 40 de la Constitution, les amendements CE 2 portant article additionnel avant l'article 1er et CE 48 à l'article 16 de M. Daniel Paul, ainsi que les amendements CE 117 et CE 118 à l'article 2, CE 135 et CE 136 à l'article 2 bis et CE 139 à l'article 4 de M. François Brottes.
TITRE IER
Dispositions relatives à La Poste et modifiant la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom
La Commission est saisie de l'amendement CE 1 de M. Daniel Paul.
Le changement de statut de la Poste ne constitue pas un préalable nécessaire à sa modernisation. Au contraire, en ouvrant la voie à sa privatisation, il met en danger la pérennité de ses missions de service public.
Avis défavorable. L'intitulé du titre se justifie par lui-même. Il s'agit de modifier la loi Quilès de 1990 et d'organiser le service public de la Poste, désormais séparée de France Télécom.
Avis défavorable.
La Commission rejette cet amendement.
Avant l'article 1er
La Commission examine l'amendement CE 99 de M. François Brottes.
Si le Gouvernement acceptait cet amendement, cela modifierait la tournure du débat. Il s'agit en effet de transcrire fidèlement dans la loi, avec des mots simples et compréhensibles, les propos tenus tout à l'heure par le ministre.
Le souhait de M. Brottes est déjà satisfait par l'article 1er, qui va même au-delà. Cet ajout ne ferait qu'alourdir le projet de loi. Avis défavorable.
Cet amendement est satisfait par le jeu combiné de la dernière phrase du deuxième alinéa de l'article 1er et de l'alinéa 9 du préambule de la Constitution de 1946, qui dispose : « Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité. »
Le projet de loi n'indique malheureusement pas quelles seront les conséquences de son adoption. De surcroît, nous savons comment ont été détournés les textes relatifs à France Télécom ou à Gaz de France. Si vous refusez d'adopter cet amendement, c'est que vous n'avez pas l'intention de laisser la Poste demeurer propriété collective de la nation. C'est un aveu !
M. Brottes est assez fin juriste pour mesurer combien sont fortes les garanties citées par le rapporteur, là où son amendement ressemble davantage à un exposé des motifs qu'à une norme législative. L'intention est louable mais cet amendement n'apporte rien en droit.
Le verbe « demeure », insuffisamment précis, induit peut-être une fragilité juridique. Il aurait été assurément préférable d'écrire : « La Poste est la propriété collective de la nation. »
Je retire donc mon amendement, et je le retravaillerai dans la perspective de l'examen en séance publique.
L'amendement CE 99 est retiré.
La Commission en vient à l'amendement CE 8 de M. Daniel Paul.
Nous abordons une série d'amendements dépourvus d'effets juridiques, purement déclaratoires. Le Conseil constitutionnel ne s'y est d'ailleurs pas trompé en rappelant le législateur à ses devoirs : nous avons vocation à inscrire dans le droit positif français des règles revêtant une portée normative.
La cohésion sociale, la lutte contre les exclusions et le développement équilibré des territoires correspondent à des politiques gouvernementales. Mon amendement a donc bien une portée législative.
La Commission rejette cet amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CE 5 de M. Daniel Paul.
Avis défavorable. L'énonciation de ces principes généraux pourrait être répétée dans tous les textes de loi.
La Commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE 98 de M. François Brottes.
Les principes de responsabilité et d'accessibilité sur tout le territoire national valent pour la Poste comme pour tous les services publics. L'air de rien, le passage en société anonyme, avec le souci d'ouvrir le capital de l'entreprise et de distribuer des dividendes, entraînera le sacrifice de tournées : le nombre de jours de distribution diminuera et le courrier n'arrivera plus jusque chez certains destinataires. Il importe de garantir que la Poste, animée par une éthique qui n'est pas forcément partagée par ses concurrents, restera au contact des usagers.
Nous partageons le souci de M. Brottes. Chacune des quatre missions de service public confiées à la Poste fait l'objet d'un dispositif spécifique fixé soit dans la loi du 2 juillet 1990, soit dans le code des postes et des télécommunications électroniques, soit dans le code monétaire et financier. Par ailleurs, un article du présent projet de loi reprend ces quatre missions de service public en les définissant, en précisant les obligations afférentes à chacune et identifiant leur financement ainsi que les responsabilités respectives des parties concernées. Enfin, la mise en oeuvre de ces missions est soumise à des mécanismes de contrôle et de suivi. Il serait par conséquent raisonnable que M. Brottes retire cet amendement.
Ce rappel vise à garantir le respect des principes transversaux à toutes les missions de service public. Mon amendement est donc complémentaire avec les dispositifs juridiques énoncés par le ministre.
La Commission rejette cet amendement.
Elle en vient à l'amendement CE 97 de M. François Brottes.
Il est nécessaire de réaffirmer les principes fondamentaux du service public car le changement de statut de la Poste risque de se produire à leur détriment, avec une réduction de la présence postale sur le territoire, et par conséquent des discriminations dans l'accès au service universel postal de proximité.
Même argument que sur l'amendement précédent. Avis défavorable.
La Commission rejette cet amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CE 93 de M. François Brottes.
Il s'agit encore de réaffirmer les principes fondamentaux du service public, afin qu'ils soient garantis pour tous nos concitoyens.
Même avis.
Vous avez bien compris le rapporteur : il a voulu dire que cela était déjà écrit ailleurs.
Le Conseil constitutionnel a reconnu la neutralité, l'égalité et la continuité comme des principes à valeur constitutionnelle. Je vous renvoie par exemple à la décision du 18 septembre 1986 pour la neutralité. L'universalité du service postal est garantie par les directives européennes. La confidentialité s'applique en matière postale, avec des sanctions pouvant aller jusqu'au pénal. Quant à la mutabilité, c'est un principe général du droit, reconnu par la jurisprudence administrative.
Merci pour ces réponses précises. Mais l'universalité, par exemple, ne s'applique pas aux services financiers. Cet ajout embrassant les quatre missions de service public ne serait donc pas redondant.
La Commission rejette cet amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE 100 de M. François Brottes.
Le changement de statut ne doit pas se traduire par une régression mais par une progression du service, qu'il s'agisse du nombre de jours d'ouverture, des horaires non modulables ou de la distribution du courrier à J+1.
La Commission rejette cet amendement.
Elle en vient aux amendements CE 101, CE 102 et CE 103 de M. François Brottes.
M. le ministre, cet après-midi, nous a indiqué qu'une loi pouvait être modifiée par une autre loi et il a défié quiconque d'affirmer que l'état de fait ne pourra pas être changé après l'adoption de ce texte. Mais il a ajouté que les normes constitutionnelles font exception. Nous souhaitons lui donner le moyen d'obtenir cette garantie suprême. Puisque nous n'avons pas le pouvoir, à ce stade, de modifier la Constitution, je propose que le Parlement charge le Gouvernement d'étudier la faisabilité de l'inscription du principe du service public postal dans le marbre du texte fondamental, en prenant tout le temps qui lui sera nécessaire. Ce serait la meilleure réponse à tous nos procès d'intention.
Le préambule de 1946 contient déjà une norme constitutionnelle déterminant ce qui doit rester sous le contrôle de l'État.
Je remercie M. Brottes de vouloir m'aider mais le texte que nous proposons permet déjà de franchir un palier en consolidant les garanties constitutionnelles du service public à caractère national. Refuser ce projet de loi, c'est se prononcer pour le maintien d'un statut plus fragile que celui que nous proposons.
Dans un recours devant le Conseil constitutionnel, par lequel nous cherchions à faire valoir l'impossibilité de privatiser Gaz de France avant le 1er juillet 2009, nous nous étions appuyés sur la norme invoquée par le rapporteur. Mais cette norme ne pose qu'un principe général, susceptible d'être contourné. Puisque nous sommes en désaccord, en tout cas, raisons de plus pour demander un rapport !
La rédaction à laquelle nous sommes arrivés apporte un niveau de protection inédit au caractère public de la Poste. Le préambule de 1946 dispose qu'un service public à caractère national, défini ainsi dans une loi, ne peut être privatisé, sauf si les missions de service public concernées sont supprimées. Or, cette majorité a la volonté d'inscrire dans la loi, noir sur blanc, les quatre missions de service public. Par conséquent, pour que la Poste puisse devenir privatisable, il faudrait adopter quatre nouvelles lois supprimant les quatre missions de service public. Qui pourrait imaginer que cette majorité défasse demain ce qu'elle accomplit aujourd'hui ? Seule l'opposition pourrait en avoir la volonté si elle revient aux affaires. Ne vous trahissez pas, monsieur Brottes !
Je conteste cette argumentation. Deux conditions sont nécessaires pour que la Constitution joue pleinement son rôle : que la loi affirme les missions de service public ; qu'un opérateur soit désigné pour les assumer en exclusivité. Si l'une des deux conditions n'est pas remplie, le préambule de la Constitution n'apporte plus sa sécurité. Demain, il ne sera pas compliqué de répartir ces missions entre plusieurs opérateurs ou de les confier à la Poste après appel d'offres, comme pour France Télécom.
Je répète donc une dernière fois mes arguments de droit.
Le juge constitutionnel a défini ainsi le service public à caractère national : l'entreprise doit être chargée d'une mission de service public ; cette mission doit être attribuée par la loi ; elle doit être exercée sur l'ensemble du territoire. la Poste est donc clairement un service public à caractère national. Elle remplit en outre les quatre missions de service public : le service universel postal ; l'aménagement du territoire ; l'accessibilité bancaire ; le transport de la presse. Pour que le préambule de 1946 ne s'applique plus et pour rendre la Poste privatisable, il faudrait voter une loi supprimant ces quatre missions de service public.
Dans sa décision du 30 novembre 2006, le Conseil constitutionnel explique en effet qu'inscrire dans une loi le caractère national d'un service public n'empêche pas sa privatisation. Mais il a aussi précisé qu'un éventuel transfert au secteur privé suppose « que le législateur prive l'entreprise des caractéristiques qui en faisaient un service public national ». Concrètement, pour privatiser la Poste, il faudrait supprimer les critères objectifs qui font de la Poste un service public à caractère national, c'est-à-dire lui retirer ses quatre missions. Je souhaite bien du courage à ceux qui s'y aventureraient. Peut-être en avez-vous l'intention ? Une chose est sûre, ce n'est pas le cas du côté de la majorité.
GDF, auquel vous faites sans cesse référence – sans oublier France Télécom, qui a été privatisée par vos soins –, a deux métiers : le transport de gaz et la fourniture de gaz aux particuliers. Sur l'activité de transport, concurrentielle depuis 1949, GDF exerce un service non pas national mais local, ce qui met de côté l'un des trois critères du préambule de 1946. Sur l'activité de fourniture, GDF bénéficiait jusqu'au 1er janvier 2007 d'une exclusivité qu'elle a perdue avec l'ouverture à la concurrence, alors que la Poste, malgré l'ouverture à la concurrence au 1er janvier 2011, conservera une exclusivité. Le texte que nous vous soumettons n'a donc rien à voir avec celui adopté en 2007 concernant GDF.
Pour privatiser, il faut soit supprimer les missions de service public, soit les banaliser. D'ici au débat dans l'hémicycle, je vous invite à regarder comment votre majorité a fait passer sous la barre des 50 % le taux du capital de France Télécom détenu par l'État, sans que cela empêche l'entreprise de continuer à assumer le service universel.
La Commission rejette successivement les amendements CE 101, CE 102 et CE 103.
Elle est ensuite saisie des amendements CE 95 et CE 94 de M. François Brottes.
Nos concitoyens restent fortement attachés aux services publics et la Poste, à leurs yeux, est le plus symbolique des services publics. Annexer à la Constitution une charte des services publics leur conférerait la dimension constitutionnelle que nous leur reconnaissons manifestement tous.
La Commission rejette successivement ces amendements.
La Commission examine les amendements CE 91 et CE 92 de M. François Brottes.
Ils sont motivés par le succès de la votation citoyenne, qui a rassemblé 2 millions de participants. Un changement de statut ne saurait intervenir sans consultation populaire.
Sur avis défavorable du rapporteur et du Gouvernement, la Commission rejette successivement ces amendements.
Puis elle en vient à l'amendement CE 104 de M. François Brottes.
Il convient d'éclairer le Parlement à propos des textes communautaires qui imposeraient un changement de statut de la Poste.
Le droit communautaire ne nous impose nullement de faire évoluer le statut de la Poste ; il reste neutre vis-à-vis de la forme juridique et du régime de propriété des acteurs économiques. En revanche, des règles communautaires auxquelles la France a souscrit imposent une concurrence équitable et interdisent les aides d'État. L'apport des fonds propres nécessaires au développement de la Poste, devenue une société anonyme, de la part de la Caisse des dépôts et consignations, satisferait bien mieux à ces exigences que la recapitalisation de l'EPIC.
Des postiers nous informent qu'ils sont convoqués à des réunions au cours desquelles on leur explique que l'Europe exige un changement de statut, ce qui, à notre connaissance, est faux. Il importe d'apporter un démenti.
Je précise que la Commission n'interdit pas les aides de l'État lorsque celles-ci couvrent des charges liées à l'exercice de missions de service public, qui, par nature, sont souvent déficitaires, notamment la présence postale territoriale en milieu rural ou l'aide à la diffusion de la presse.
La Commission rejette cet amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE 7 de M. Daniel Paul.
M. le ministre a confirmé combien les directives européennes pèsent dans la libéralisation du secteur postal.
La directive en cause a été validée le 15 décembre 1997, par un gouvernement que vous souteniez. Avis défavorable.
La Commission rejette cet amendement.
Puis elle examine l'amendement CE 4 de M. Daniel Paul.
Nous avons déjà réclamé à plusieurs reprises un rapport sur le bilan de la déréglementation dans le secteur postal, en France comme à l'étranger.
Avis défavorable. Outre que le délai du 30 décembre est un peu irréaliste, la plupart des informations sont disponibles dans divers rapports.
La Commission rejette cet amendement.
Elle en vient à l'amendement CE 96 de M. François Brottes.
Nous ne nous sommes jamais opposés à ce que la Banque postale devienne une société anonyme. Mais nous souhaitons qu'elle reste 100 %. Je rappelle que M. Proriol a beaucoup insisté, par le passé, pour que son capital soit ouvert. Afin d'exercer son métier, elle doit adopter les mêmes caractéristiques que les autres banques – nous sommes notamment très attachés à ce qu'elle puisse accorder des prêts à la consommation. Mais c'est bien parce qu'elle est publique qu'elle n'a pas acheté d'actifs nocifs et n'a donc pas eu besoin des aides de l'État, contrairement à ses concurrents.
En revanche, si la maison mère devenait une société anonyme, ce serait le début de la privatisation. Peut-être l'établissement public, dans sa configuration actuelle, est-il insuffisamment adapté aux nécessités de gestion des différentes filiales. Pour être constructifs, nous proposons qu'une véritable réflexion soit menée en vue de créer une nouvelle catégorie d'établissements publics industriels et commerciaux, chargés d'offrir des services d'intérêt économique général.
Sur avis défavorable du rapporteur et du Gouvernement, la Commission rejette cet amendement.
Elle est saisie de l'amendement CE 3 de M. Daniel Paul.
L'ouverture à la concurrence n'est pas neutre socialement, qu'il s'agisse du secteur postal comme des autres secteurs. Nous préconisons donc la rédaction d'un rapport avant la promulgation de la présente loi, c'est-à-dire en fin d'année 2009.
La Commission rejette cet amendement.
Elle examine l'amendement CE 6 de M. Daniel Paul.
La Poste s'est fait beaucoup de contre-publicité avec les conditions de travail de ses salariés et surtout la multiplication des formes d'emploi précaire. Elle a régulièrement perdu les procès que lui ont intentés des salariés lésés dans le déroulement de leur carrière. Tout cela serait réglé depuis plusieurs années. Il n'empêche, nous souhaitons qu'un bilan soit établi.
Avis défavorable. À la Poste, le taux d'utilisation à temps plein des salariés employés sous contrat à durée indéterminée atteint désormais 88 %, contre 67 % en 2003, et le recours aux contrats à durée déterminée est limité à 3,3 % des effectifs environ. La précarité y est donc très marginale.
La Commission rejette cet amendement.
Article 1er (Article 1-2 nouveau de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la Poste et à France Télécom) : Statut de La Poste
La Commission examine les amendements de suppression CE 9 de M. Daniel Paul, CE 183 de M. Jean-Marc Ayrault, CE 65 de M. François Brottes, CE 66 de M. Henri Jibrayel, CE 67 de Mme Catherine Coutelle, CE 75 de M. Jean Grellier, CE 83 de Mme Marie-Lou Marcel et CE 85 de Mme Frédérique Massat.
Nous militons pour le rejet du présent texte et pour commencer du présent article, comme l'ensemble des organisations syndicales de cette grande entreprise, à une exception près, sans oublier les 2 millions de personnes qui se sont prononcées lors de la récente votation citoyenne.
Il est des domaines qu'il serait carrément nocif de laisser au seul secteur marchand, alors que celui-ci privilégie la recherche du profit au détriment des services rendus à la population.
Le service public de la Poste permet que le courrier soit distribué partout, y compris dans les endroits les plus reculés. C'est aussi à la Poste que les personnes défavorisées, qui sont de plus en plus nombreuses, peuvent percevoir leurs minima sociaux. C'est pour cela que nous y sommes attachés et c'est aussi pour cela que nous sommes aujourd'hui très inquiets, tout comme le sont les Français – leur participation massive à la votation citoyenne en atteste –, et les syndicats, qui s'opposent très majoritairement au changement de statut.
Ce texte a pour seul objectif de modifier le statut de la Poste afin de préparer la privatisation. Or, nous avons bien vu dans l'énergie, dans les transports ou dans les télécommunications qu'à chaque fois qu'un statut change, l'emploi recule, les prix augmentent et la qualité de services diminue.
On met en avant la diminution du volume du courrier, mais celle-ci n'a pas grand-chose à voir avec le statut actuel de la Poste ni même avec la crise. C'est une évolution liée au changement des pratiques. Et la Poste peut parfaitement s'adapter et se moderniser sous son statut actuel, d'autant qu'un très grand nombre de ses filiales sont déjà organisés en sociétés anonymes.
Tout ceci nous montre que ce projet répond en réalité à la volonté idéologique de casser tout ce qui relève de l'intérêt public. C'est pour cela que nous souhaitons la suppression de cet article.
Si nous nous opposons à la privatisation de la Poste – car c'est bien de cela qu'il s'agit ici – c'est parce que nous voulons préserver son rôle de lien social – on se souvient de ce qu'ont pu faire les facteurs pendant la canicule. Pourquoi renoncer à ce qu'apportent les bureaux de poste dans les zones rurales, où les points de contact n'offriront pas le même degré de professionnalisme, dans les quartiers populaires et dans les zones sensibles ? Pourquoi privatiser un service public dont 80 % des Français se disent aujourd'hui satisfaits ?
Le texte prévoit à la fois que le réseau de la Poste comportera 17 000 points de contact et que les bureaux de poste proposeront l'Internet à haut débit. Je ne suis pas sûre que ces deux dispositions soient compatibles.
Par ailleurs, la Banque postale joue un rôle important vis-à-vis des populations fragiles, non seulement parce qu'elle les accepte alors que les banques de droit commun les rejettent, mais aussi parce que le personnel apporte aux guichets une assistance dans la gestion des comptes, qui évite souvent le surendettement. C'est aussi pour cela qu'il faut conserver à la Poste un statut d'entreprise publique.
Le statut de société anonyme ne paraît pas à même de garantir que la Poste ne sera pas privatisée. Or, dans mon département, les assises des territoires ruraux ont fortement insisté sur la nécessité de maintenir le service public, de garantir la pérennité des bureaux de poste qui jouent un rôle majeur sur le plan économique comme dans la préservation du lien social.
Nous sommes aussi attachés au service public de la Poste que les 2,5 millions de Français qui ont participé à la votation citoyenne. Alors que la réforme de la carte judiciaire a aggravé la désertification et que la réforme en préparation de la carte hospitalière l'amplifiera encore, le service postal est souvent le seul contact que les personnes âgées conservent avec l'extérieur. De ce point de vue, je puis aussi témoigner de l'inquiétude des participants aux assises des territoires ruraux quant au maintien du service public de proximité.
Pourquoi vouloir à tout prix que ce texte soit adopté avant le 1erjanvier 2010 ? Pourquoi avoir imposé au Parlement une procédure accélérée ?
Nous savons bien par ailleurs que ce qu'une loi a fait, une autre loi peut le défaire et que le nouveau statut permettra l'ouverture du capital, donc la privatisation, partielle et totale, de la Poste. Si demain, l'État était tellement endetté que la seule possibilité de continuer à financer l'entreprise soit d'ouvrir son capital au privé, en la dotant aujourd'hui d'un statut de société anonyme, vous n'auriez fait que préparer le terrain.
La Commission rejette les amendements de suppression.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE 105 de M. François Brottes.
Allant exactement à l'opposé de votre texte, nous proposons par l'amendement CE 105 de conforter le statut de droit public de la Poste.
Je m'interroge par ailleurs, comme Frédérique Massat, sur l'utilité de la procédure d'urgence : y aurait-il anguille sous roche ?
Nous ne saurions bien évidemment adopter un amendement qui a pour objet de renoncer à la transformation de la Poste en société anonyme.
Je reviens sur un point évoqué tout à l'heure. Nul n'a prétendu que l'ouverture à la concurrence et la directive postale obligeaient à changer de statut. Je rappelle du reste que l'ouverture à la concurrence a été engagée en 1997 : avec la troisième directive postale, nous ne faisons que poursuivre un mouvement lancé par le Gouvernement que vous souteniez.
S'agissant de l'urgence, outre que nous sommes exactement à un an de l'ouverture à la concurrence, je rappelle que les crédits ont déjà été inscrits dans la loi de finances pour 2010 et que la Caisse des dépôts a pris de son côté les mesures nécessaires pour pouvoir entrer au capital de la Poste. Pourquoi ne nous mettrions-nous pas en situation de consommer ces crédits dès aujourd'hui et ne permettrions-nous pas à la Poste de se moderniser dès maintenant pour faire face dans un an à l'ouverture à la concurrence ?
Évitons de réécrire l'histoire ! Si la France avait accepté en 1997 une part d'ouverture à la concurrence, elle avait jusque-là tenu bon pour que les plis de moins de 50 grammes demeurent sous monopole, afin que le volume du courrier garantisse la péréquation tarifaire sur le territoire. En outre, nous n'avions accepté l'ouverture à la concurrence que pour les entreprises, pas pour les ménages, et Jacques Chirac lui-même s'était alors montré solidaire de la décision de Lionel Jospin. C'est bien votre majorité qui devra assumer l'ouverture à la concurrence pour les ménages et pour l'ensemble du territoire !
La Commission rejette cet amendement.
Puis elle examine l'amendement CE 109 de M. François Brottes.
Il s'agit de préciser que la Poste agit pour le compte de la collectivité nationale et non pour celui d'autres intérêts.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE 111 de M. François Brottes, visant à supprimer le deuxième alinéa de l'article.
La Poste a investi en Allemagne et en Espagne, elle a créé de nombreux partenariats financiers, elle a mis 3,4 milliards d'euros dans la rénovation de 1500 bureaux : on le voit, elle n'a nul besoin d'être transformée en société anonyme pour se moderniser et pour investir.
Sur l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE 110 de M. François Brottes.
Nous voulons réaffirmer que la Poste demeure la propriété collective des citoyens de ce pays car nous savons bien, pour l'avoir vu avec France Telecom et avec Gaz de France, qu'elle leur échappera dès lors qu'elle sera transformée en société anonyme.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite trois amendements pouvant être soumis à discussion commune, l'amendement CE 11 de M. Daniel Paul et les amendements CE 108 et CE 107 de M. François Brottes.
Afin de réaffirmer notre opposition au changement de statut, nous proposons de rappeler que l'intégralité du capital reste la propriété de l'État et qu'il est réputé inaliénable.
Avis défavorable car cela supprimerait la possibilité pour la Caisse des dépôts et pour le personnel de devenir actionnaires de la Poste.
J'aurai l'occasion d'expliquer en séance publique pourquoi je préfère des augmentations de salaires à une distribution d'actions. Sur le principe des fonctionnaires actionnaires, j'avais d'ailleurs interrogé M. Bailly.
La commission rejette les amendements.
Puis elle examine les amendements CE 106 de M. François Brottes et CE 10 de M. Daniel Paul, pouvant être soumis à une discussion commune.
Afin de lever toute ambiguïté, nous proposons de supprimer la référence aux « statuts initiaux » de la nouvelle société anonyme, qui permettrait l'ouverture du capital dans un second temps.
Avis défavorable car il est bien nécessaire de préciser à quelle date débutera l'opération. Avec ces amendements, l'État serait le seul actionnaire de la Poste. Ce n'est pas vraiment ce que nous voulons faire !
Au moment du changement de statut, l'État sera seul actionnaire, mais il y en aura un autre dans quelques mois, lorsque la Caisse des dépôts entrera au capital. Il y aura donc bien une période de transition, ce qui oblige à préciser à quel moment elle débute.
Procédera-t-on à une augmentation de capital au moment de l'entrée de la Caisse des dépôts ou bien cette dernière achètera-t-elle à l'État une part du capital qu'il détient ?
Par ailleurs, jusqu'à quel pourcentage de capital l'État demeurera-t-il en position majoritaire ?
On procédera à une augmentation de capital, et le pourcentage dépendra de la valorisation.
La commission rejette les amendements.
Elle examine ensuite l'amendement CE 63 de M. Michel Raison.
Bien que ce projet ne vise nullement à privatiser la Poste, nos concitoyens ont été abusés par la formulation de la question qui leur a été posée lors de ce que l'on a curieusement appelé « votation citoyenne », le nombre des participants étant en outre sujet à caution, la CGT n'ayant pas répondu à ma demande de consulter les listes d'émargement.
Quoi qu'il en soit, cet amendement vise à les rassurer en précisant qu'au cas où d'autres que nous décideraient un jour de faire entrer des fonds privés dans le capital de la Poste, l'avis des Français serait sollicité par référendum.
Avis défavorable car le législateur ne saurait ni lier sa compétence ni obliger le Président de la République à organiser un référendum. Qui plus est, cet amendement aurait pour conséquence d'obliger à soumettre au référendum la distribution d'actions au personnel.
Par cet amendement, Michel Raison et ses collègues de l'UMP cosignataires montrent clairement que cette majorité n'entend pas remettre un jour en question le caractère « imprivatisable » de la Poste. Je crains toutefois qu'il ne donne à tort le sentiment que des fonds privés pourraient entrer dans le capital alors que nous avons souhaité donner toutes les garanties que cela ne se produira jamais.
Cet amendement traduit l'inquiétude de nos collègues de l'UMP vis-à-vis d'une éventuelle entourloupe... Parce que nous la partageons, nous le voterons.
Les dirigeants de La Poste dans mon département m'ont aussi fait valoir que cet amendement pourrait poser problème lorsque les salariés voudront entrer au capital.
Le ministre ayant en outre confirmé que la rédaction même du texte interdit l'entrée de fonds privés au capital de La Poste, je retire l'amendement.
Je n'ai pas cosigné cet amendement, d'une part parce que l'arrivée de capitaux privés ne ferait pas obligatoirement perdre à La Poste son caractère public, d'autre part parce qu'obliger à organiser un référendum pour permettre l'arrivée de fonds privés priverait l'entreprise de sa réactivité dans un marché concurrentiel.
Merci pour votre franchise : vous faites partie de ceux que l'arrivée de capitaux privés ne gêne pas. Au moins, vous annoncez la couleur au lieu de faire semblant de croire que cela n'arrivera jamais…
Mais je remercie aussi Michel Raison, qui semble mieux informé que nous quant à la possibilité de mettre un jour en oeuvre le référendum fantôme, qui est aujourd'hui inapplicable bien qu'il soit inscrit à l'article 11 de la Constitution.
Enfin, le rapporteur craint que le législateur ne se prive de son pouvoir ; pour autant, il ne faudrait pas priver le peuple de la capacité de prendre des décisions par référendum !
Pour toutes ces raisons, je reprends cet amendement, en précisant que sera soumise au référendum toute ouverture du capital, en dehors de la part réservée aux salariés.
Le nombre important des signataires de cet amendement montre les doutes de la majorité quant aux objectifs exacts de ce texte. Tout en rappelant que le projet ne vise pas à privatiser La Poste, M. Raison éprouve le besoin d'ajouter une garantie…
Pour sa part, M. Taugourdeau, qui s'est bien gardé de parler d'entreprise publique, nous a montré que, pour un certain nombre de nos collègues, l'ouverture du capital de La Poste au privé n'est pas un problème.
J'ai dit que l'entrée de fonds privés dans le capital de La Poste ne lui ferait pas perdre son caractère d'entreprise publique.
Par ailleurs, le meilleur service que les citoyens peuvent rendre à La Poste, ce n'est pas de participer à une votation mais de se rendre dans les bureaux rénovés et d'utiliser ses services. Ils ne doivent pas adopter l'attitude de ceux qui veulent que l'on conserve une épicerie dans les villages mais ne s'y rendent jamais…
Pour que des fonds privés puissent entrer au capital de La Poste, il faudrait une autre loi. Cet amendement n'a donc pas de raison d'être.
La Commission rejette l'amendement rectifié.
La Commission adopte l'article premier sans modification.
Article 2 (Article 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom) : Missions de service public de La Poste et autres activités
La Commission examine l'amendement CE 12 de M. Daniel Paul ainsi que les amendements CE 122 et CE 121 de M. François Brottes, qui peuvent être soumis à discussion commune.
Par l'amendement CE 122, nous voulons insister sur la nécessité d'un aménagement des locaux qui garantisse aux usagers la confidentialité à laquelle ils ont droit.
Monsieur Taugourdeau, pour que les bureaux rénovés soient davantage fréquentés, il conviendrait que les horaires soient adaptés aux nouveaux rythmes de vie de nos concitoyens.
L'amendement CE 121 vise à rappeler l'importance d'une implantation territoriale permettant à chacun d'accéder aux services postaux.
La commission rejette les amendements.
Puis elle examine les amendements CE 120, CE 124 et CE 125 de M. François Brottes, pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement CE 120 est destiné à insister sur le rôle de La Poste dans la stratégie nationale de développement durable. Dans la logique du Grenelle de l'environnement, il est essentiel que l'entreprise prenne en compte les dimensions économique, sociale et environnementale dans l'exercice de ses missions.
L'amendement CE 124 a un objectif similaire : nous devons désormais veiller à ce que les textes que nous adoptons prennent en compte les objectifs du développement durable, ce que nous n'avons pas su faire à l'occasion de la réforme de la carte judiciaire.
L'amendement CE 125 vise à rendre « grenellement compatible » toute réorganisation des réseaux postaux, dont il obligerait à examiner l'impact environnemental et le bilan carbone. Avec l'arrêt du fret isolé et la fermeture de lignes, la réorganisation du transport ferroviaire est bien éloignée des bonnes intentions du Grenelle I. Il ne faudrait pas faire de même avec La Poste.
Les amendements CE 120 et 124 me paraissent très déclaratifs.
S'agissant de l'amendement CE 125, outre que le Grenelle II s'appliquera bien évidemment à La Poste dès que le texte aura été adopté, il me paraîtrait gênant de geler toute réorganisation du réseau de celle-ci alors qu'elle sera soumise dans un an à la concurrence internationale.
La concurrence n'a rien à voir avec le réseau mais avec la distribution du courrier et des colis. La présence territoriale de La Poste ne sera donc pas davantage menacée demain qu'elle ne l'est aujourd'hui…
Par ailleurs, je comprends que le ministre éprouve quelques réticences vis-à-vis du développement durable dans la mesure où, à l'occasion de l'examen du Grenelle I, 24 de ses amendements n'ont pas été couronnés de succès…
Les trois amendements que j'ai effectivement soutenus ont été adoptés !
J'indique par ailleurs, en tant que ministre des écotechnologies, que les états généraux de l'industrie permettront d'apporter des réponses à vos préoccupations. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CE 184 du rapporteur.
Elle examine ensuite les amendements CE 13 et CE 14 de M. Daniel Paul, qui peuvent être soumis à une discussion commune.
Les bureaux de poste disparaissent au profit d'agences postales communales, voire de points - relais installés chez les commerçants et la qualité du service s'en ressent tandis que les zones « blanches » s'étendent. C'est pourquoi je propose par l'amendement CE 13 que le réseau soit constitué d'au moins un bureau de poste de plein exercice par canton.
Quant à l'amendement CE 14, il vise à substituer aux mots « points de contact » les mots « bureaux de poste de plein exercice ».
Notre collègue devrait prendre garde à la diminution du nombre de cantons que risque d'entraîner la réforme territoriale…
L'amendement CE 14 ne nous pose pas de problème et nous le voterons. En revanche, si je comprends la volonté de notre collègue de conforter le réseau, je ne pourrai voter l'amendement CE 13, qui pourrait avoir comme effet pervers de servir de prétexte à La Poste pour réduire à un seul le nombre des bureaux dans chaque canton. C'est pour la même raison que j'avais, lors d'un débat précédent, combattu la proposition de M. Proriol visant à inscrire dans la loi que 90 % de la population devaient se trouver à proximité d'un bureau de poste : il m'avait semblé impossible de poser « en creux » que les 10 % restants pourraient n'avoir droit à aucun service postal.
Je salue le courage et l'obstination de Daniel Paul, mais je ne puis que reprendre les arguments de nos collègues Taugourdeau et Brottes et donner un avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Puis elle examine les amendements CE 115 et CE 113 de M. François Brottes, qui peuvent être soumis à une discussion commune.
Si l'on parle beaucoup de la mission d'aménagement du territoire de La Poste, il nous semblerait utile de la définir plus précisément, notamment au regard des zones enclavées. Tel est l'objet de l'amendement CE 115.
L'amendement CE 113 a le même objet. Ces amendements visent aussi à insister sur l'accessibilité, la proximité, la fréquence et la régularité des services postaux outre-mer.
La mission d'aménagement du territoire de La Poste est longuement définie à l'article 6 de la loi Quilès du 2 juillet 1990. Avis défavorable.
Les départements et territoires d'outre-mer ont subi beaucoup d'évolutions institutionnelles depuis 1990 et il conviendrait de s'assurer que personne n'y est aujourd'hui privé de l'accès à ce service public.
L'intention est louable mais on ne saurait confondre départements et territoires d'outre-mer d'autant que, dans ces derniers, La Poste relève de la compétence du gouvernement local – de sorte que le Conseil constitutionnel ne manquerait pas de censurer cette rédaction.
L'amendement CE 113 est retiré.
La commission rejette l'amendement CE 115.
Elle est ensuite saisie de deux amendements identiques, CE 119 de M. François Brottes et CE 185 du rapporteur.
Il s'agit d'amendements de précision, renvoyant à l'article L. 4 du code des postes et des communications électroniques.
La commission adopte les amendements.
La Commission adopte ensuite, après avis favorable du Gouvernement, l'amendement rédactionnel CE 186 du rapporteur.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE 116 de M. François Brottes.
Cet amendement tend à préciser la mission d'accessibilité bancaire de La Poste : il s'agit de garantir à tous, sans discrimination, la possibilité de bénéficier « d'une prestation de domiciliation de ses revenus, de retrait d'argent et d'émission de paiement ».
Monsieur le rapporteur, l'intégralité des dispositions proposées par l'amendement figure-t-elle dans le code auquel vous faites référence ? Nous nous sommes en effet efforcés de trouver une rédaction qui garantisse à chacun des services élémentaires.
Le code monétaire et financier, dans ses articles L. 221-1et suivants, traite plus particulièrement du livret A. La Banque postale permet précisément à chacun d'ouvrir un livret A, et cela depuis toujours.
J'ai demandé la semaine dernière à M. Bailly s'il serait possible que le livret A permette la domiciliation et des virements, mais cela ne semble pas prévu dans l'immédiat.
Votre réponse confirme que la portée de l'amendement proposé dépasse celle des textes existants, qui se limitent au livret A. J'invite donc mes collègues à voter cet amendement, qui constituerait une avancée vers la bancarisation de tous, sans discrimination.
En justifiant son avis défavorable par le fait que l'amendement serait satisfait, le rapporteur confirme son accord sur le fond. Or, nous venons de vérifier que les dispositions existantes sont assez éloignées de celles que propose l'amendement. Sauf s'il a changé d'avis, le rapporteur ne peut donc qu'approuver celui-ci.
L'amendement proposé vise à décrire en grand détail la nature de la mission d'accessibilité bancaire. Il ne me semble pas souhaitable d'entrer dans de telles précisions, chacune des quatre missions de service public étant déjà définies dans des textes auxquels l'article 2 renvoie explicitement.
La loi de modernisation de l'économie d'août 2008 définit les contours de la mission d'accessibilité bancaire. Elle est complétée par des décrets d'application de décembre 2008, ainsi que par des textes de nature conventionnelle. Il me semble difficile et prématuré de remettre en cause ces équilibres qui datent de moins d'un an.
Peut-être faut-il placer cette disposition plus loin dans le texte. Toujours est-il que le fait d'indiquer que l'accessibilité bancaire doit être possible « sans discrimination » n'est pas une précision excessive. De même, évoquer la domiciliation, les retraits et les paiements revient à poser des principes d'une bancarisation pour tous. Du reste, le texte qui nous est soumis se situe souvent lui-même au niveau du détail. Quant à la loi de modernisation de l'économie, il y est essentiellement question du livret A, auquel on ne saurait réduire la bancarisation.
La Commission rejette cet amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE 15 de M. Daniel Paul.
Les centres de tri ont connu d'importants changements. Dans ma région, par exemple, tout le courrier qui circule au Havre passe par Rouen, ce qui, au regard du Grenelle de l'environnement, est une véritable hérésie. L'amendement proposé éviterait de telles situations.
« La Poste s'engage », est-il écrit dans l'amendement, ce qui est une formulation étrange. Défavorable.
Après avis défavorable du Gouvernement, la Commission rejette cet amendement.
Monsieur le ministre, votre réponse est un peu courte. Vous nous avez demandé tout à l'heure de regarder vers l'avenir en laissant espérer que vous accueilleriez alors favorablement nos amendements. Celui-ci tendait précisément à rétablir les centres de tri dans les territoires qui en ont été privés.
La Commission examine ensuite les amendements CE 16 de M. Daniel Paul et CE 187 du rapporteur, pouvant faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement CE 16 doit être rectifié : il tend à la suppression des alinéas 11 et 12 de l'article 2, afin de ne pas soumettre La Poste au droit commun des sociétés.
Avis défavorable. Pour ce qui concerne la suppression de l'alinéa 12, l'amendement sera bientôt satisfait par l'amendement CE 188.
La Commission rejette l'amendement CE 16 rectifié de M. Daniel Paul.
L'amendement CE 187 du rapporteur est retiré.
La Commission examine ensuite les amendements CE 114, CE 112 et CE 123 de M. François Brottes et CE 188 du rapporteur.
L'amendement CE 114 tend à éviter que La Poste conclue un accord avec des sociétés proposant des crédits « revolving », qui sont cause de surendettement pour un grand nombre de nos concitoyens.
L'amendement CE 112 précise les produits bancaires que La Poste doit proposer.
Je souhaiterais une précision : la présentation de La Poste, au début de l'article 2, comme « un groupe public qui remplit des missions de service public » est-elle compatible avec le fait, précisé au II, qu'elle assure des activités de tri, de collecte, etc. « selon les règles de droit commun » ?
Conformément à notre position constante, l'amendement CE 123 tend à aller contre la banalisation de la distribution du livret A. Il faut rétablir la justice entre la Banque postale et les autres établissements.
Pour ce qui est de l'amendement CE 114, je rappelle que le président de La Poste s'est engagé devant notre Commission à ne pas proposer de crédit renouvelable. Faisons-lui confiance.
L'amendement CE 112 est satisfait par l'article L. 221-2 du code monétaire et financier.
L'amendement CE 123 n'a pas de rapport avec le texte et le débat sur ce sujet a déjà eu lieu avant votre arrivée, madame Lebranchu.
Quant à l'amendement CE 188, qui tend à supprimer l'alinéa 12 de l'article 2, il supprime une redondance.
Avis favorable à l'amendement CE 188 du rapporteur et défavorable aux amendements CE 114, CE 112 et CE 123.
L'amendement CE 114 ne me gêne pas. Lors de tous les débats qui ont porté sur les crédits à la consommation, nous avons été nombreux, sur divers bancs, à soulever le problème du crédit « revolving », qui enfonce un grand nombre de nos concitoyens dans le surendettement. M. Martin Hirsch lui-même partage notre préoccupation.
À défaut d'inscrire dans la loi l'engagement pris par M. Bailly, on pourrait au moins le formaliser dans le cadre du contrat d'entreprise conclu entre La Poste et l'État. L'amendement de nos collègues socialistes pourrait donc être déplacé à l'article 4.
Le rapporteur semble très favorable à l'esprit de l'amendement CE 114, car le seul argument qu'il lui oppose est que le président de La Poste a pris un engagement en ce sens. Cependant, M. Bailly n'est pas immortel et d'autres lui succéderont un jour à la tête de La Poste. Il serait donc plus rassurant d'inscrire dans la loi la disposition qu'il s'est engagé à respecter.
Rien n'assure que le président Bailly pourra tenir son engagement. De fait, le rapporteur a retiré tout à l'heure un amendement qui tendait à autoriser La Poste à travailler avec d'autres banques que la Banque postale – ce qui montre que cette éventualité a été envisagée.
Par ailleurs, le Gouvernement a décidé d'autoriser La Poste à proposer des prêts à la consommation, ce qui était jusqu'à présent impossible. Or, La Poste est bien placée pour ce faire, notamment au bénéfice des titulaires de faibles revenus, publics fragiles qui sont en outre les plus susceptibles d'être victimes du crédit « revolving », puisque celui-ci est souscrit pour les deux tiers par des gens à qui un prêt classique a été refusé – de sorte qu'on fait payer aux pauvres cinq ou six fois plus d'intérêts qu'aux plus riches ! Il faut donc avoir la garantie absolue que jamais la Banque postale ne recourra à un dispositif de cette nature.
Enfin, ne disposant pas du savoir-faire nécessaire, la Banque postale a passé un accord avec une banque de la place pour organiser la distribution de prêts à la consommation. Si, comme c'est vraisemblable, cette banque pratique le crédit « revolving », la rédaction un peu trop large de l'amendement CE 114 pourrait aller contre cet accord. Nous sommes donc prêts, si nos arguments sont entendus, à retirer cet amendement pour le réécrire en nous contentant de préciser que la Banque postale, pour sa part, ne commercialisera jamais ce genre de crédit.
L'État a toujours fixé à la Banque postale des engagements en matière de lutte contre le surendettement, mais ceux-ci n'ont pas vocation à figurer dans la loi que nous examinons. Par ailleurs, un prochain projet de loi tendra à transposer la directive relative au crédit à la consommation.
Je suis en revanche favorable à ce que, comme le propose M. Dionis du Séjour, ces engagements figurent dans le contrat d'entreprise signé entre l'État et La Poste et je m'engage à ce que ce soit le cas.
Au bénéfice de ces explications, il me semble que l'amendement CE 114 pourrait être retiré.
L'engagement du ministre devrait permettre de parvenir à un accord.
Je rappelle par ailleurs que notre commission étudiera la semaine prochaine un texte entièrement consacré au crédit renouvelable – terme qui me paraît préférable à l'anglicisme « revolving ».
L'amendement CE 114 est retiré. La Commission rejette ensuite les amendements CE 112 et CE 123, puis adopte l'amendement CE 188.
Elle adopte ensuite l'article 2 ainsi modifié.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mardi 1er décembre 2009 à 21 h 30
Présents. - M. Jean-Paul Anciaux, M. Gabriel Biancheri, M. François Brottes, Mme Catherine Coutelle, M. Jean-Pierre Decool, M. Jean Dionis du Séjour, M. Daniel Fasquelle, M. Claude Gatignol, M. Bernard Gérard, M. Jean Grellier, M. Louis Guédon, M. Henri Jibrayel, M. Jean-Claude Lenoir, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Patrick Ollier, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. Michel Raison, M. Franck Reynier, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau
Excusés. - M. Jean-Pierre Abelin, M. Pierre Lasbordes, M. Jean-Yves Le Déaut
Assistaient également à la réunion. - Mme Marylise Lebranchu, M. Daniel Paul, M. Patrick Roy