La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix-huit heures.)
Jeudi dernier, l'Assemblée a poursuivi l'examen des amendements portant articles additionnels avant le titre 1er.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme, mes chers collègues, il est toujours difficile de reprendre un débat interrompu plusieurs jours auparavant. Cela l'est d'autant plus, en l'occurrence, qu'il m'aurait semblé plus judicieux que l'amendement n° 74 , que nous avons sans doute déposé avant l'amendement n° 79 , soit discuté avant ce dernier. En effet, l'amendement n° 74 , en proposant la création d'un fichier de l'endettement à la Banque de France, permet, comme le préconise l'amendement n° 79 , à tout prêteur de s'informer sur la solvabilité d'un emprunteur.
Jusqu'à présent, pour obtenir cette information, la solution consistait à demander à l'emprunteur une déclaration sur l'honneur. Or on sait ce que peut valoir ce genre de procédure pour des gens qui sont dans des situations financières inextricables, qui ont la corde au cou.
Nous proposons donc que le prêteur qui n'a pas pris les précautions de vérifier la situation d'endettement du consommateur soit tenu pour responsable de l'endettement supplémentaire de ce dernier. En effet, on sait que certains prêteurs n'hésitent pas à suggérer à leurs clients qui signent ces déclarations de ne pas tout mentionner. En situation de besoin, il est facile alors d'omettre de déclarer une carte de crédit ou un emprunt bancaire à moyen ou long terme. Ce type de pratiques, je le précise, est essentiellement le fait des établissements de crédits à la consommation, installés sur les lieux mêmes de vente, les hypermarchés ou les surfaces spécialisées.
Nous avions suggéré, la semaine dernière, de distinguer entre établissements de crédit, mais la majorité a refusé nos amendements. J'espère, néanmoins, qu'elle acceptera cet amendement de responsabilisation, qui vise surtout les établissements de crédit à la consommation. Les établissements de crédit à moyen et long terme – les crédits immobiliers, en particulier – prennent, eux, beaucoup plus de renseignements sur leurs emprunteurs, allant jusqu'à utiliser des moyens sinon légaux du moins justifiés d'un point de vue moral, pour vérifier auprès des autres banques l'endettement des clients sur lesquels ils ont un doute.
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l'amendement n° 212 .
Le groupe Nouveau Centre ne s'était pas associé aux amendements en discussion à la fin de notre précédente séance, qui tendaient à réduire les tentations auxquelles est soumis le consommateur ; en revanche, nous pensons que la responsabilisation de l'établissement prêteur est un moyen efficace de lutter contre le surendettement.
Les chiffres sont en effet sidérants : 63 % des personnes surendettées cumulent six à sept crédits. Cela prouve bien que les établissements prêteurs ne vérifient absolument pas la solvabilité des emprunteurs et vont jusqu'à pratiquer, dans certains cas, du soutien abusif.
Le problème n'est pas nouveau. Deux propositions de loi et trois amendements ont déjà été soumis à l'Assemblée par le groupe UDF, et il est temps que nous ayons sur la question un débat de fond.
Qu'on ne nous objecte donc pas que notre amendement sort de nulle part. Il s'agit d'une demande récurrente du Parlement, fondée notamment sur ce qui se fait dans d'autres pays. L'inscription des crédits à la Banque de France que nous vous proposons aujourd'hui, avec la sécurité et la responsabilisation des organismes prêteurs qu'implique ce dispositif, est un système qui existe dans quinze des vingt-sept États membres de l'Union européenne, dotés d'un fichier positif. Si l'on veut améliorer la protection du consommateur dans notre pays, nous devons donc franchir le pas.
Autant j'étais critique sur les autres amendements socialistes, autant celui-ci me paraît une réponse équilibrée, susceptible de satisfaire à la fois ceux qui défendent l'utilité du crédit, comme notre rapporteur Michel Raison, et ceux qui s'inquiètent des situations de détresse et des drames que génère le surendettement.
La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
Cers amendements tendent à interdire au prêteur qui ne s'est pas assuré de la solvabilité de l'emprunteur le recouvrement de ses créances en cas de défaillance de l'emprunteur.
Pour ma part, je persiste dans ma logique de l'autre jour, tout en gardant l'esprit ouvert. Nous nous sommes assez plaints, sur ces bancs, de la frilosité des établissements de crédits – même si je sais que ce ne sont pas les banques que vous visez, chers collègues, mais surtout les organismes de crédits à la consommation –, pour ne pas risquer, avec des amendements comme ceux que vous nous proposez, de mettre sous tutelle l'ensemble des Français, au prétexte qu'une partie d'entre eux connaît des difficultés de gestion.
On ne peut pas à la fois reprocher aux banques d'être trop frileuses, en particulier pour les personnes en CDD ou intérimaires – nous les voyons, dans nos permanences, venir se plaindre de ne pas pouvoir obtenir les prêts qu'ils réclament –, et leur imposer des obligations qui risqueraient de se retourner contre les consommateurs.
Par ailleurs, je ne vois pas comment le prêteur pourrait vérifier la solvabilité de l'emprunteur, puisque votre amendement n° 74 , monsieur Gaubert, prévoit que les banques n'auront pas accès au fichier positif, ce qui, aux yeux de la commission, rend le dispositif inopérant.
Cette difficulté ne se pose pas pour l'amendement de M. Dionis du Séjour, mais je ne suis pas sûr qu'il faille s'en réjouir pour autant, car il devient problématique dès lors au regard du principe de respect de la vie privée et de la confidentialité des données personnelles. L'avis de la commission est donc défavorable.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme ?
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement comprend l'esprit des amendements nos 79 et 212 , qui visent à détailler dans la loi l'étendue de la responsabilité du prêteur lorsqu'il accorde un prêt.
Cependant, nous pensons, d'abord, que l'objectif qu'ils poursuivent est atteint par la jurisprudence de la Cour de cassation, qui définit de manière très précise les responsabilités et les devoirs du prêteur.
Ensuite, nous craignons que ces amendements ne soient pas adaptés à certain types de prêts – je pense notamment aux prêts sur gage, pour lesquels le prêteur n'a pas à s'informer de la solvabilité de l'emprunteur, puisque les prêts sont accordés contre le dépôt d'un objet de valeur. Les prêts sur gage, auxquels ont encore recours certaines catégories de population, deviendraient impossibles avec votre dispositif.
Pour ces deux raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à ces deux amendements.
Monsieur le rapporteur, vous dites comprendre l'esprit de cet amendement, mais sans y être favorable et en mélangeant deux types de cas. Il y a en effet, d'une part, les banques – ce que vous avez expliqué sur les prêts sur gage concerne le système bancaire – et, d'autre part, les établissements de crédit à la consommation. Ce n'est pas la même chose.
Aujourd'hui, ce qu'il faut comprendre, c'est que les ménages s'endettent de plus en plus. L'INSEE indique que le taux de pauvreté a augmenté de 11,7 % en 2005 et de 12,2 % en 2006. Ce sont des chiffres officiels ! Or non seulement les établissements de crédit à la consommation – que je distingue des banques – ne tiennent absolument pas les clients potentiels informés de leur état d'endettement, mais, en plus, ils ne les informent pas ou mal des conditions de crédit. Ainsi, des personnes, qui ont déjà emprunté, empruntent encore plus et se retrouvent dans une situation catastrophique.
Je vais vous donner l'exemple d'une personne surendettée qui est venue me voir, ce week-end, dans ma circonscription. La totalité de ses crédits comprend un crédit d'un établissement de crédit à la consommation – accordé très facilement pour acheter un appareil photo ou un appareil électroménager… – de 2 500 euros. L'établissement de crédit lui ayant expliqué : « c'est simple, vous ne paierez que 100 euros par mois », cette personne croyait en avoir pour deux ans de remboursement. Or la réalité est tout autre ! Car s'ajoutent près 30 euros de frais financiers et 15 euros de tenue de compte par mois, dont elle n'avait pas été informée ! Et l'établissement ne s'était pas renseigné sur la totalité des crédits que cette personne avait contractés auparavant.
Voilà comment des personnes s'endettent de plus en plus, et n'arrivent pas à rembourser car elles pensent qu'en contractant un crédit pas très élevé, elles pourront rembourser assez rapidement, ce qu'elles n'arrivent pas à faire.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, soit vous pensez que l'encadrement, les garde-fous sont suffisants, et nous ne faisons rien. Soit vous pensez, au contraire, qu'il serait bien non pas de brimer les banques, mais de traiter cette question, sinon le taux de pauvreté des ménages va continuer à augmenter.
Je veux bien vous redonner la parole, monsieur Dionis du Séjour, mais vous pouvez revenir sur ce sujet avec les amendements suivants.
Vous avez raison, monsieur le président, mais nous sommes sur un sujet très important.
D'abord, ce phénomène de surendettement n'est pas stabilisé. Il y a dix ans, la commission de surendettement recevait 56 000 dossiers par an ; elle en reçoit aujourd'hui 150 000.
Il faut donc une réponse publique à ce phénomène en hausse.
Ensuite, le rapporteur nous parle de problèmes de vie privée. Or la CNIL a déjà autorisé, dans certains cas bien précis, les échanges entre banques.
Enfin, un sondage réalisé par un grand institut révèle que le dispositif du fichier positif est approuvé par 90 % des gens !
De quoi a-t-on peur et qui bloque dans cette affaire ?
Je rappelle à mes collègues, y compris de la majorité, que des propositions de loi UMP et UDF avaient été déposées. Je crois même que le ministre en avait naguère déposé une…
Pourquoi ne pas saisir l'occasion d'avancer ce soir sur une proposition sérieuse ?
J'interviens contre les amendements. Je comprends bien votre souhait, messieurs Gaubert, Le Déaut et Dionis du Séjour, mais je ne suis pas d'accord sur votre solution.
Mettre à la charge du prêteur l'obligation de s'informer sur la solvabilité des demandeurs de crédit est une bonne idée, mais un problème se pose : comment le prêteur peut-il s'informer, la Banque de France ne gérant que des fichiers négatifs ?
À mon avis, la solution serait un fichier central des crédits qui permette au prêteur de connaître le niveau d'endettement, et donc la solvabilité du souscripteur. Nous allons en débattre avec d'autres amendements.
Des problèmes de confidentialité peuvent se poser, effectivement, mais dans d'autres domaines, notamment celui du casier judiciaire, on a réussi à trouver des solutions en évitant les fuites.
Je ne comprends pas les raisons qui poussent le Gouvernement et le rapporteur à refuser notre amendement, sauf à penser qu'il est tellement bon qu'ils regrettent de ne pas l'avoir déposé eux-mêmes. (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Car cet amendement présente toutes les garanties et c'est ça qui les gêne !
C'est comme pour certains amendements que nous avons examinés la semaine dernière, en particulier sur l'action de groupe : vous étiez tellement embêtés qu'on vous ait pris de vitesse que vous avez préféré voter contre en annonçant une proposition ultérieure ! (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous verrons s'il y a quelque chose plus tard ; en tout cas, pour le moment, il ne se passe pas grand-chose sur ce texte.
Il y a parfois des hasards intéressants. Je voudrais vous faire lecture d'une « confession », publiée la semaine dernière dans la presse locale de ma circonscription, intitulée : « Quand j'étais marchand de crédit ». Un ancien employé d'un organisme prêteur, qui a souhaité garder l'anonymat, confirme qu'« il faudrait moraliser les pratiques ». Il raconte ce qu'il faisait : « Je formais les vendeurs à proposer le plus souvent possible des crédits et à remplir les dossiers. Aujourd'hui, ce ne sont plus des produits qu'ils vendent, mais des crédits. Les sociétés les rémunèrent à 3 % en moyenne. Il reste encore de la marge puisque les crédits sont à 18 %. Quant à l'entreprise de financement, elle ne fait pas de vérification, elle se dissimule derrière le porteur d'affaires. Normalement, les sociétés de crédit devraient exiger des relevés de compte de leurs clients, mais elles ne le font pas. »
Je voudrais demander au rapporteur de faire preuve d'honnêteté intellectuelle – et il sait le faire quand il le veut ! Nous ne confondons pas les établissements bancaires avec les établissements de crédit qui, souvent, commissionnent des gens auxquels ils n'imposent aucune règle éthique.
C'est parfois justement parce que les établissements bancaires refusent ce genre de crédit – parce qu'ils savent, eux, que le consommateur ne pourra pas les assumer – que les consommateurs s'orientent vers ces établissements de crédit où ils paieront des taux plus élevés. Je l'ai dit la semaine dernière, mais peut-être l'avez-vous déjà oublié !
Si vous m'expliquez qu'une banque sérieuse refuse un crédit à 6 %, estimant que le demandeur ne pourra pas le rembourser, comment pouvez-vous penser que celui-ci puisse aller chercher un crédit à 18 % qu'il ne pourra pas rembourser ? Voilà la question centrale. C'est la raison pour laquelle nous voulons responsabiliser ces établissements qui ne prennent pas un minimum de précautions par rapport aux emprunteurs.
Non, monsieur le président, c'est moi qui sais si j'ai défendu mon amendement ou pas ! J'avais dit tout à l'heure qu'il aurait été préférable qu'il soit présenté en discussion commune avec mon précédent amendement. Cela n'a pas été le cas, mais ce n'est pas moi qui organise la séance !
Les amendements sont classés en fonction des codes auxquels ils font référence, monsieur Gaubert.
Veuillez défendre votre amendement.
C'est moi qui préside la séance, ne l'oubliez pas ! Vous avez la parole !
C'est vrai que j'avais rappelé la semaine dernière que c'était le président qui présidait ! Nous sommes d'accord au moins sur ce point-là !
Le problème aujourd'hui est de connaître la situation réelle d'un emprunteur. Dans nos débats avec les banquiers, les établissements de crédit à la consommation, les associations de consommateurs, les gens qui traitent du surendettement, en particulier nos services sociaux dans les départements, nos villes, nos communes, la question qui se pose est de savoir comment on peut faire pour la connaître.
La solution serait que la Banque de France puisse centraliser un fichier. Le casier judiciaire, par exemple, est un fichier centralisé. Un nouveau fichier centralisé existe depuis quelque temps : celui relatif à l'ensemble des contraventions pour excès de vitesse ou pour d'autres infractions au code de la route commises sur l'ensemble du territoire français. On m'a même dit que, un jour, on serait capable de collecter les contraventions que nous pourrions avoir dans d'autres pays. Tous ces fichiers marchent très bien.
Le fichier central que nous proposons ne doit pas pouvoir être interrogé par le secteur bancaire lui-même, sauf à entraîner des dérives, comme aller chercher les clients les plus solvables, ou proposer à certains des systèmes de retraitement de créances – on voit de la publicité à ce sujet.
Ce fichier positif d'endettement ne doit pouvoir être interrogé que par la personne physique qui veut souscrire un emprunt. Elle interroge la Banque de France et, à partir de là, elle peut venir dans un établissement prêteur, dire qu'elle est endettée avec trois crédits, deux pour sa maison, un pour sa voiture, par exemple. La banque ou l'établissement de crédit consommateur saura s'il peut faire confiance à la personne qui veut souscrire un emprunt, ou non. Il prêtera en toute connaissance de cause.
Ce dispositif est cohérent et permet à la banque d'être responsabilisée. Si elle prête à un consommateur, libre à elle de prendre des risques, mais elle aura étudié la situation financière du souscripteur. Aujourd'hui, elle ne la connaît pas toujours.
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l'amendement n° 213 .
Chaque crédit donnerait lieu à une inscription dans un fichier à la Banque de France, cette dernière garantissant le respect de la vie privée des personnes concernées. Mais – et l'amendement le dit clairement – « la Banque de France est déliée du secret professionnel pour la diffusion, aux établissements de crédit et aux services financiers susvisés, des informations nominatives contenues dans le fichier à la demande de ceux-ci avec l'accord écrit préalable du souscripteur. »
Rendez-vous compte : 63 % des personnes en situation de surendettement ont 6 à 7 crédits ! Est-ce alors exorbitant de demander aux banques et notamment aux établissements qui font du crédit à la consommation de vérifier s'ils ne sont pas en train d'accorder le sixième, le septième, voire le huitième crédit à la même personne ?
Cet amendement propose une mesure de bon sens. Entre nous, elle va même dans le sens de la protection de l'acte bancaire. Quinze pays européens sur vingt-sept l'ont même adoptée, et parmi eux de très grandes démocraties !
Aujourd'hui, le débat de fond avec le rapporteur et le ministre doit s'engager.
Qu'est-ce qui bloque ? Est-ce que ce sont les banques ? Et pourquoi les banques bloqueraient-elles ? Ont-elles peur qu'on connaisse les conditions particulières qu'elles accordent à certains clients ? À mon avis, cette crainte est tout à fait injustifiée ; ce n'est pas un bon argument.
Est-ce l'opinion qui bloque ? Je ne le crois pas, toutes les enquêtes montrant qu'à 90 %, l'opinion attend ce répertoire des crédits.
Mes jeunes collègues – notamment ceux de la majorité présidentielle – doivent savoir que nous y travaillons depuis des années. Un collègue de l'UMP, M. Masdeu-Arus, a déposé une proposition de loi sur le sujet ; Jean-Christophe Lagarde, de l'UDF, en a déposé deux ; le PS a fait de même. Qu'attend-on ? Monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'État, il faut maintenant que vous nous disiez ce qui bloque et quel est votre plan : parlons-en, réagissons, discutons. La mesure que nous proposons est de bon sens et finira pas s'imposer. Faites-nous connaître votre position, débattons-en et chacun pourra, ensuite, se déterminer.
Nous disposons d'un rapport du Conseil économique et social sur le surendettement des particuliers, présenté par Mme Pierrette Crosemarie. On peut y lire que « le Conseil économique et social est très réservé sur l'instauration d'un fichier positif. Il constate qu'actuellement, tant les professionnels que la grande majorité des associations de protection des consommateurs et enfin la CNIL y sont opposés. » Cela ne veut pas dire que l'Assemblée doit être définitivement opposée à un tel dossier, mais la question est très délicate. Dans un instant, le président de la commission vous fera quelques propositions à ce sujet.
On sait pertinemment qu'il n'y a pas de lien entre l'augmentation de la pauvreté, dont on a parlé tout à l'heure, et le surendettement. Il existe deux types de surendettement : le surendettement actif et le surendettement passif. Le premier est lié à une mauvaise gestion du ménage : on est surpris lorsqu'on connaît le niveau des revenus des familles qui en sont victimes. Ce type de surendettement représentait 36,4 % des dossiers en 2001 ; aujourd'hui, il n'est plus qu'à 27 %. Ainsi, une meilleure gestion a suffi à réduire le nombre des surendettés.
Quant au surendettement passif, dont j'ai déjà parlé l'autre jour, il est lié aux aléas de la vie, tels qu'un accident ou un divorce, et il représente 73 % des dossiers. Le fichier positif ne changerait rien à l'affaire, puisque, dans de tels cas, la survenue du surendettement ne peut être prévue.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas poursuivre la réflexion sur ce dossier difficile, mais je recommande la plus grande prudence. La commission est donc défavorable à cet amendement.
Je voudrais faire deux remarques préliminaires. M. Dionis du Séjour a justement remarqué que le nombre des dossiers de surendettement augmentait. Sans doute faut-il rapporter cela à l'augmentation considérable du nombre de dossiers de crédit à la consommation qui a été constatée ces dix dernières années. C'est en tout cas une donnée à prendre en compte.
D'autre part, au lieu d'étudier sur une période courte la question des ménages fragiles – c'est-à-dire ceux qui ont déposé un dossier en commission de surendettement, ceux qui estiment leur charge de remboursement beaucoup trop élevée et ceux qui, enfin, déclarent que les dettes leur sont nécessaires –, on peut privilégier une période plus longue, soit une décennie. On s'aperçoit alors que, selon les chiffres de l'observatoire de l'endettement des ménages, la proportion de ces ménages fragiles, qui était de 4,3 % en 1997, était de 4,4 % en 2006. Selon les années, ce chiffre oscille entre 3,9 et 4,5. Avec dix ans d'écart, on reste donc grosso modo dans la même fourchette.
Cela signifie-t-il que nous ne devons rien faire pour limiter le surendettement en amont ? Bien sûr que non, et le Gouvernement a d'ailleurs pris une première initiative en la matière. À la fin du mois d'octobre, à l'issue de la table ronde avec les établissements bancaires qu'avait organisée à l'Élysée le Président de la République, il a été annoncé que le Gouvernement demandait à la Banque de France l'amélioration de son fichier d'incidents de paiement. Aujourd'hui, le fichier ne fonctionne pas bien, en raison d'une réactivité beaucoup trop lente. Mme Lagarde a indiqué au gouverneur de la Banque de France les pistes sur lesquelles elle souhaitait qu'il avance et des propositions seront faites au Gouvernement au cours du premier trimestre 2008.
Faut-il aller plus loin, jusqu'à un fichier positif ? Je ne vous cache pas que ce sujet m'interpelle. Vous l'avez rappelé, j'ai travaillé sur cette question.
J'ai pu voir à quel point elle était controversée et qu'elle ne faisait pas l'objet d'un consensus. On trouve autant d'associations de consommateurs favorables au fichier positif que d'associations qui y sont opposées. Certains professionnels, tels les établissements de crédit, y sont favorables, alors que d'autres, comme les banques, y sont opposés. Moi-même, quand j'étais parlementaire, j'ai été auditionné par la CNIL, qui m'avait indiqué qu'elle n'était pas favorable à la mise en place d'un tel fichier. Le rapporteur a très justement souligné que le Conseil économique et social vient de rendre un rapport sur le surendettement qui émet clairement un avis négatif sur la mise en place d'un tel fichier.
Loin de briser notre élan, cela doit au contraire nous encourager à trouver un consensus. Nous sommes face à un vrai choix de société : faut-il exiger que 100 % des crédits soient recensés pour seulement 4 % des problèmes ? Faut-il que 96 % des ménages français qui ont recours à l'endettement et pour lesquels il n'y a pas de difficulté particulière soient systématiquement fichés dans leurs actes de la vie courante ? Je ne réponds pas non a priori. Le Gouvernement est ouvert à la discussion avec votre assemblée. Nous souhaitons que puissent être explorées des voies de travail en commun. Il faut rechercher le consensus qui, seul, nous permettrait de légiférer sur la question.
Dans l'attente de ce consensus, le Gouvernement vous demande de retirer vos amendements, messieurs les députés. À défaut, il y serait défavorable.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, M. Dionis du Séjour et M. Gaubert ont soulevé un vrai problème, qui nous interpelle autant qu'eux et qui appelle, de notre part, une décision. Dans l'immédiat, je ne vois qu'une difficulté : la solution que proposent leurs amendements n'est pas satisfaisante et ils méritent d'être travaillés. Ainsi, ils ne disent pas qui transmettrait le renseignement. Ils ne parlent pas non plus d'un certificat de la Banque de France, dont nous avons discuté. De nombreux éléments mériteraient d'être pris en compte.
Comme nous étions désireux de trouver une issue, nous en avons discuté ensemble, le secrétaire d'État, le rapporteur et moi-même. Aussi, je puis vous proposer de créer une mission d'information dès la fin de ce débat. M. Dionis du Séjour et M. Gaubert pourraient, bien entendu, en être les premiers artisans. Elle pourrait, dans les trois ou quatre prochains mois, formuler des solutions concrètes en relation avec les services du secrétariat d'État – puisque nous avons toujours travaillé en amont, avec eux. Cette mission pourrait explorer toutes les pistes afin de sécuriser le dispositif. Nous avons tous la volonté de trouver une solution, mais constatons également que les deux amendements ne répondent pas pleinement à nos préoccupations. Si leurs auteurs acceptent de les retirer, comme le secrétaire d'État le leur a demandé, je m'engage à faire en sorte que, dès la prochaine réunion de la commission, la mission d'information soit créée, dans l'esprit, défini par le secrétaire d'État, d'un partenariat interactif et efficace.
Je vous remercie, monsieur le président, de me donner la parole avant que les auteurs des amendements nous disent s'ils les retirent. Je l'avais demandée avant Patrick Ollier : il est normal que le président de la commission l'ait eue avant moi, mais je me félicite que nous soyons, une nouvelle fois, totalement en phase.
Nous abordons là, en effet, un vrai sujet de fond, entre la question du pouvoir d'achat que nous voulons défendre et celle du surendettement. Les exemples concrets qui ont été cités prouvent que les dispositions actuelles, qu'elles soient législatives ou réglementaires, ne suffisent pas à protéger certains de nos concitoyens. Compte tenu de la complexité du sujet, on ne peut pas, aujourd'hui, à l'occasion de cette seule séance, faire le tour du débat de fond que M. Jean Dionis du Séjour appelle de ses voeux et dont le secrétaire d'État et le président de la commission confirment la légitimité.
Je suis mille fois d'accord avec M. Ollier sur la nécessité de créer une mission d'information. Il s'agit là d'un engagement pris à la fois par le président de la commission et par l'UMP, en présence de son président,…
Ici, je parle du groupe parlementaire de l'UMP, dont je suis le porte-parole, sauf quand son président est là : je m'efface alors avec toute la loyauté qui sied à mon éthique et à son rang.
Ce ne sont pas les socialistes qui parleraient ainsi de Jean-Marc Ayrault ! (Sourires.)
Chez nous, il n'est pas nécessaire de faire allégeance : il n'y a pas de problème !
Toujours est-il que nous nous engageons, les uns et les autres, à étudier ce dossier ô combien complexe et douloureux d'ici à la fin du mois de mars.
Au risque de ne pas me faire que des amis, je ne retire pas mon amendement. Je sais que je vais décevoir, mais j'assume. Nous sommes au Parlement.
Monsieur Ollier, vous êtes président de la commission et vous déciderez de créer une mission si vous le souhaitez. Moi, je suis député du Nouveau Centre et je sais que nous parlons de ce sujet depuis cinq ans. J'ai envie de vous faire une contre-proposition. Je m'adresse au secrétaire d'État et au rapporteur, sous la haute autorité du président : laissez passer cet amendement. Vous disposez de tous les outils et vous pourrez retravailler l'amendement au Sénat.
Cela mettra un peu de pression sur votre administration, mais elle est de qualité, monsieur le secrétaire d'État.
Nous avons commencé, en 2003, avec plusieurs propositions de loi, une de l'UMP, deux de l'UDF, une autre du groupe socialiste. Aujourd'hui, quinze pays ont adopté une mesure semblable. Le secrétaire d'État nous dit qu'il va améliorer le fichier des incidents de paiement. Il a raison, il y a des choses à améliorer. Mais, ce faisant, on est toujours dans la logique du traitement a posteriori. Ce que nous voulons, c'est changer de logique, c'est faire de la prévention. Nous voulons prévenir le surendettement et non pas travailler uniquement sur les gens qui ont connu des incidents de paiement. C'est avant l'incident qu'il faut intervenir.
Le secrétaire d'État pose une vraie question en demandant s'il faut gêner les 96 % de gens qui empruntent sans problème, alors que les difficultés ne concernent que 4 % des emprunteurs.
Mais de quelle gêne s'agit-il ? Notre amendement prévoit que ce sont les établissements prêteurs qui font une déclaration à la Banque de France : il n'y a aucune gêne pour les emprunteurs.
Enfin, le président de la commission nous dit que l'amendement n'est pas assez élaboré. Nous y travaillons depuis cinq ans : nous avons pris le temps d'en parler avec la Banque de France et avec la CNIL. Vous nous dites que l'amendement ne précise pas qui donne les informations. Il stipule pourtant bien que « les établissements de crédit […] sont tenus de déclarer à la Banque de France les principales caractéristiques des crédits accordés à chaque emprunteur ». On ne peut pas être plus précis.
Vous demandiez qui avait les informations ; je vous réponds que ce sont les établissements de crédit, qui transmettent à la Banque de France.
Et je vous fais une contre-proposition. Nous avons beaucoup travaillé sur le sujet, l'amendement est prêt – peut-être n'est-il pas assez fini, j'accepte cette critique, mais il pourra être peaufiné au Sénat et CMP – laissez-nous jouer notre rôle de parlementaire et terminons-en sur cette affaire.
Je voudrais d'abord remercier chaleureusement le président de la commission des affaires économiques, M. Ollier, de sa proposition : ma grand-mère avait toujours rêvé que je devienne missionnaire. (Sourires.)
Plus sérieusement, je voudrais revenir sur les arguments qui ont été employés.
Il nous arrive assez souvent de nous dire, en vous écoutant, que nous n'avons pas assez travaillé tel aspect, que vous avez bien vu le point où cela ne collait pas. Mais cette fois-ci, nous ne trouvons dans vos réponses aucun argument valable, si ce n'est de vouloir temporiser – ce que l'on peut comprendre.
Vous utilisez par exemple l'argument du CES. Mais celui-ci évoquait la création d'un fichier consultable par les banques.
Ça, c'est l'amendement de M. Dionis du Séjour.
Non. Le CES évoquait un fichier consultable par les banques. Nous, nous proposons qu'il ne puisse être consulté que par l'emprunteur.
À quoi sert-il alors ?
Il sert au candidat à l'emprunt lui-même, comme le casier judiciaire. Vous ne pouvez pas demander un extrait de casier judiciaire de Jean Gaubert, mais vous pouvez me demander de vous en fournir un. Vous ne pouvez pas aller consulter mon solde de points de permis de conduire sur le fichier du ministère de l'intérieur mais vous pouvez me demander, si vous êtes assureur, de vous fournir une attestation sur mon solde de points.
Eh bien, c'est la même chose ici : je peux aller consulter ma situation à la Banque de France et ensuite me présenter devant un établissement bancaire et lui montrer le certificat de la Banque de France sur mon endettement. C'est d'ailleurs ce que je fais quand je vais emprunter moi-même : mon banquier m'interroge sur mes engagements, je lui donne ces informations parce que je n'ai pas peur et que j'ai le sentiment que je peux encore emprunter.
Donc, ne nous opposez pas la réponse du CES parce qu'elle vise une situation que nous ne proposons pas.
Par ailleurs, si c'est le mot « fichier » qui vous gêne et si vous préférez le remplacer par le terme « répertoire », nous n'y sommes absolument pas hostiles.
Mais ne faites pas de confusion. Les Français considèrent-ils la dette comme nécessaire, vous demandiez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat ? Il n'est pas nécessaire de commander un sondage pour connaître la réponse : bien évidemment que les Français considèrent que la dette est nécessaire, utile et positive. C'est le surendettement qui est en cause, pas l'endettement. Moi-même j'ai été endetté, et je le suis encore, comme sans doute beaucoup d'entre nous ici – certains le sont même par opportunité fiscale. Ce n'est pas de cela que nous parlons aujourd'hui. Nous parlons seulement du surendettement.
On nous dit que seuls 4 % de Français seraient concernés. Mais ces 4 % de Français, on leur rendra service en empêchant qu'ils se voient accordé des prêts trop risqués, Quant aux autres, ils seront comme ceux à qui on demande un extrait de casier judiciaire, cela ne les dérangera pas beaucoup parce qu'ils pourront prouver que leur situation est tout à fait saine. Il n'y a pas 100 % de Français qui sont concernés par des actions en justice, mais, sur un certain nombre de sujets, on demande à tous les Français d'apporter la preuve de leur situation par rapport à la justice. Nous sommes là dans la même situation.
Ce qui est extraordinaire, c'est que vous nous répondez sur la sanction alors que nous vous avons interrogés sur la prévention. Vous nous avez parlé des problèmes que la Banque de France pouvait avoir avec le fichier des incidents de paiement, qui sont très lourds et sur lesquels on a encore accentué les sanctions, et vous ne répondez pas sur la prévention que nous vous proposons pour éviter une sanction.
Nous en sommes vraiment désolés mais, au point où nous en sommes, nous ne pouvons pas retirer cet amendement, malgré l'envie que j'ai de faire plaisir au président de la commission.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Je crois qu'il faut en terminer avec cette discussion.
Monsieur Gaubert, je ne vais pas énoncer encore toutes les suggestions qu'on pourrait faire pour améliorer la proposition que vous faites, j'en évoquerai simplement une.
Vous voulez un fichier national « recensant les crédits accordés », n'est-ce pas ?
L'objectif est bien d'essayer d'aider ceux de nos concitoyens qui sont dans les situations les plus critiques et les plus difficiles par rapport à l'endettement excessif, nous sommes bien d'accord ?
Mais vous semblez considérer que l'endettement excessif n'est lié qu'aux crédits accordés. Or l'endettement excessif, ce sont les crédits et tout le reste : la dette fiscale, les emprunts faits à autrui, des autorisations de découvert, des loyers…
C'est la preuve que votre proposition n'a pas été assez travaillée – ce n'est pas une critique, c'est un constat. J'apprécie le fait que vous avez fait un effort pour apporter une solution, mais j'essaie de faire de bonnes lois, comme vous. Or je vous rappelle, monsieur Dionis du Séjour, que ce projet de loi a fait l'objet d'une déclaration d'urgence, nous n'aurons donc pas le temps de débattre de cette question au Sénat, et la commission mixte paritaire ne pourra pas non plus en juger utilement.
En tout état de cause, je maintiens l'engagement que j'ai pris de lancer une mission d'information.
Simplement, je trouve regrettable, compte tenu du climat très positif dans lequel se déroule cette discussion, que vous ne retiriez pas ces amendements.
Et je demande à la majorité de les rejeter.
Je trouve regrettable, monsieur Dionis du Séjour, que chaque fois que vous proposez un amendement, vous nous demandiez de le laisser passer, en nous disant « on verra plus tard ».
Cela ne constitue pas un argument pour convaincre la commission et le Gouvernement.
Donc, je maintiens, au nom de la commission, un avis défavorable sur ces amendements, tout en confirmant l'engagement de travailler cette question dans le cadre d'une mission d'information, en espérant que dans les trois ou quatre mois qui viennent, nous serons à même de vous proposer, monsieur le secrétaire d'État, un dispositif abouti que la majorité aura à coeur de faire voter.
La parole est à M. André Chassaigne.
Je vous indique, mes chers collègues, que, dans la discussion, je donnerai la parole, en réponse à la commission et au Gouvernement, à un orateur, et un seul, par groupe.
Je serai rapide, monsieur le président. Je voulais simplement indiquer que ces amendements me semblent bons – d'ailleurs, s'ils avaient été retirés, je crois que j'en aurai repris un – et surtout exprimer le sentiment de malaise que je ressens depuis le début de la discussion de ce projet de loi.
En effet je constate, depuis le début, que vous vous arc-boutez pour refuser toute proposition qui peut être faite, en utilisant tous les arguments possibles et inimaginables.
La semaine dernière, alors que des amendements de bon sens vous ont été présentés, vous les avez refusés.
Ils portaient sur un autre sujet. Mais, vous verrez, on acceptera certains de vos amendements.
Et aujourd'hui, vos arguments, monsieur le président de la commission, sont même en contradiction avec ceux que vous utilisez d'habitude. En effet, vous nous dites souvent que la loi ne doit pas aller trop loin, entrer dans le détail. Et là, vous avancez un argument contraire, en disant que les amendements ne sont pas suffisamment précis, qu'ils ne répondent pas à toutes les questions.
Je pense qu'il y a là une forme de contradiction.
Je me demande, la suite du débat nous éclairera sans doute, si vous ne seriez-vous pas gênés par tout ce qui peut entraver la grande distribution et les organismes de crédit. Vous donnez en effet l'impression de vouloir leur laisser pleine liberté.
Même si, au final, quand vous recevez dans vos permanences, comme nous tous, des personnes qui éprouvent les pires difficultés, vous regrettez, j'en suis persuadé, que de tels crédits puissent être possibles et qu'on en arrive à de telles situations.
Le dispositif proposé par ces amendements n'est pas inspiré par une démarche coercitive envers l'ensemble des consommateurs, il s'agit tout simplement de tenir compte de ceux qui vivent dans la plus grande précarité, qui sont cassés par la vie et qui, quelquefois, parce qu'ils souffrent beaucoup, ont besoin d'un accompagnement particulier.
Je suis saisi d'un amendement n° 316 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le soutenir.
Monsieur le secrétaire d'État, pour développer une concurrence équilibrée au service des consommateurs, pour éviter les pratiques abusives – on a même employé sur tous les bancs le mot de « racket » dans les rapports entre production et distribution –, pour dissuader les positions dominantes, il faut une police. Sans police en matière de prix ou d'organisation, nous ne pouvons faire cesser les abus.
Aujourd'hui, la police est divisée en deux : d'un côté le Conseil de la concurrence, qui a un pouvoir décisionnel en matière de pratiques anticoncurrentielles mais qui n'a qu'un pouvoir consultatif sur le contrôle des concentrations, et de l'autre, la DGCCRF, dont dépend le Conseil de la concurrence, et qui, elle, dispose d'un corps d'inspecteurs pour la réalisation d'enquêtes dont est saisi le Conseil de la concurrence.
Ces deux polices sont complémentaires et je voudrais rendre hommage au travail de qualité qui est fourni par le Conseil de la concurrence. Tout le monde reconnaît ses incomparables qualités d'expertise et l'autorité de ses avis, mais tout le monde considère aussi que ce système de contrôle de l'organisation du commerce à deux têtes manque de réactivité. On n'a pas de véritable pouvoir de contrôle ; on ne peut pas connaître la vérité sur les prix prédateurs ; on ne peut pas envoyer dans les délais des agents habilités pour constater des faits suspects ; on n'a pas de capacité d'autosaisine face à des pratiques déloyales ou lorsque les victimes n'osent pas saisir. D'ailleurs, vous l'avez reconnu vous-même, monsieur le secrétaire d'État, il y a peu d'actions judiciaires au regard du nombre d'infractions présumées. Les victimes sont dans la crainte. J'ai connu un certain nombre de PME qui se sont rebellées : elles se sont faites déréferencées immédiatement ou après un laps de temps, puis elles sont mortes. Celui qui ose dire que ce qu'on lui propose n'est peut-être pas légal, il n'existe plus quelques années plus tard. Par ailleurs, il est difficile de réunir les preuves.
Une véritable autorité de la concurrence, qui regrouperait le Conseil de la concurrence et la partie de la DGCCRF qui s'occupe de la concurrence, serait bien sûr en mesure de constater les infractions mais également de garantir la réparation, la sanction de ces infractions.
La création d'une véritable autorité de la concurrence en France est un vrai sujet. Nous en avons déjà parlé dans cet hémicycle, c'est une des propositions du rapport Attali aujourd'hui et dans le rapport que nous avions rédigé en 2000, Jean-Paul Charié et moi, intitulé « De la coopération commerciale à la domination commerciale », nous souhaitions déjà évoluer vers ce type de pratique.
L'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 porte en lui-même l'impossibilité de résoudre le problème en évoquant la prohibition des actions concertées lorsque les pratiques « ont pour objet ou peuvent avoir pour objet d'empêcher, de restreindre, ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché ». Or une PME ou une PMI qui vend quelques produits dans trois ou quatre grandes surfaces, elle ne fausse pas le marché, elle peut mourir sans qu'il y ait atteinte au jeu de la concurrence et il n'y a pas de caractérisation de l'abus de dépendance économique.
Donc, si nous créons cette autorité de la concurrence, ce que nous sommes plusieurs à souhaiter ici, il faudrait en même temps redéfinir l'abus de dépendance économique.
Cette autorité de la concurrence est donc nécessaire. Elle pourra se saisir de toute question en matière de concurrence, imposer des pratiques uniformes pour les prix et les conditions de vente, vérifier la réalité de la coopération commerciale, qualifier les clauses abusives et les abus de dépendance économique. Surtout, elle aura pouvoir de faire cesser les pratiques litigieuses, de rétablir tout contrat, d'attribuer des allocations de réparation aux parties lésées.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. Il part d'un bon sentiment et d'une bonne idée qui inspire d'ailleurs certains regroupements auxquels nous assistons aujourd'hui. Je veux commencer par rendre hommage au travail efficace de la DGCCRF et du Conseil de la concurrence,…
…qui travaillent en meilleure intelligence que vous ne le laissez entendre. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas encore améliorer les choses, mais M. Attali, qui n'en est qu'à son rapport d'étape, ne doit rendre son rapport définitif qu'au mois de janvier. Laissons-le finir son travail et nous pourrons ensuite reprendre certaines de ses propositions. À titre personnel, je suis donc défavorable à cet amendement.
Monsieur Le Déaut, notre système de contrôle de la concurrence est efficace. En effet, il repose sur la complémentarité entre une autorité administrative indépendante et une administration décentralisée qui assure un excellent maillage territorial, au plus près des réalités économiques locales.
En témoignent les nombreux jugements qui ont été rendus ces dernières années grâce à l'action conjuguée de ces deux services. S'agissant de la DGCCRF, 140 décisions judiciaires ont été rendues pour les questions touchant aux pratiques abusives dans le domaine des activités industrielles et commerciales. Pour le Conseil de la concurrence, des condamnations sont intervenues sur la base d'enquêtes d'ailleurs réalisées par les agents de la DGCCRF – cela témoigne de la complémentarité de ces services. Je citerai les plus connues et les plus importantes : la condamnation des opérateurs de téléphonie pour entente et entrave à la concurrence ; la condamnation, en mars 2006, de distributeurs de parfum pour entente verticale ; la condamnation, en novembre 2005, d'un opérateur de téléphonie pour abus de position de dominante sur le marché de gros de l'Internet. Ces différentes autorités mènent donc une action efficace. Faut-il pour autant en rester là et ne pas réfléchir à la façon d'améliorer cette collaboration ? La réponse est non. Le Gouvernement est très sensible à deux éléments nouveaux.
D'abord, comme l'a indiqué M. le rapporteur, les travaux de la commission Attali. Celle-ci rendra son rapport au début de l'année 2008. Elle s'est d'ores et déjà emparée de cette question et a émis, dans son rapport d'étape, des propositions auxquelles le Gouvernement sera très attentif.
Ensuite, la revue générale des politiques publiques. Au cours du premier semestre 2008, le Gouvernement travaillera, à partir des travaux qui ont été menés sur cette revue, sur la complémentarité et la façon d'améliorer la qualité du service rendu à l'usager à partir des moyens qui sont affectés par le Parlement.
En attendant, il me semble prématuré d'agir sur cette question à laquelle le Gouvernement restera néanmoins très attentif. C'est la raison pour laquelle je vous demande, monsieur Le Déaut, de retirer votre amendement, faute de quoi je devrais émettre un avis défavorable.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, pour cette réponse. Elle ne ressemble pas à celles du rapporteur qui se contente généralement d'abattre trois cartes maîtresses : « Tout va bien ; il ne faut rien changer » ; « Ce n'est pas le moment » ou bien « Le sujet est intéressant, mais la réflexion n'est pas aboutie ». Vous avez répondu sur un autre ton, monsieur le secrétaire d'État, et je vous en remercie. Simplement, nous ne vous mettons pas le couteau sur la gorge, puisque la création d'une telle autorité n'interviendrait qu'à compter du 1er janvier 2009. Entre ce texte sur lequel vous avez déclaré l'urgence – ce n'est pas de notre fait – et le suivant qui doit nous être soumis en 2008, nous aurons donc tout loisir de préciser les modalités de mise en place d'une telle autorité.
Je crois que vous en convenez, monsieur le secrétaire d'État, nous faisons du bricolage en la matière. Même si le Conseil de la concurrence prend des décisions nombreuses et souvent pertinentes, beaucoup de secteurs se sont ouverts à la concurrence depuis quelques années, ce qui donne lieu à de nouveaux comportements défavorables aux consommateurs. Or, après un vote serré, l'Assemblée a décidé de ne pas permettre les actions de groupe. De plus, les régulateurs dans le domaine de l'énergie ou des télécommunications se soucient essentiellement des opérateurs, et non des consommateurs. Le droit des consommateurs n'est donc pas pris en compte. Ces derniers vont pleurer misère auprès de médiateurs qui n'ont aucun pouvoir pour faire droit à leurs revendications, si justifiées soient-elles. Vous nous dites que la DGCCRF réalise un excellent travail, et nous le reconnaissons, mais votre logique de réduction du nombre de fonctionnaires va la priver d'une vingtaine de personnes. Elle a plus de missions, plus de marchés à surveiller, et moins de moyens !
Les droits des consommateurs ne sont pas aussi bien défendus dans notre pays qu'ils devraient l'être, et vous l'avez reconnu à l'instant, monsieur le secrétaire d'État. Nous vous proposons donc d'adopter le principe de la création d'une autorité unique et indépendante qui pourrait faire oeuvre utile aux côtés des consommateurs.
Cet amendement pose un problème de fond. En effet, il ne peut y avoir de développement de la concurrence sans un régulateur fort. Le régulateur doit-il être sectoriel, comme la CRE ou l'ARCEP, ou transversal, comme l'autorité de la concurrence que cet amendement vise à créer ? En outre, doit-il être national ou bien européen ? Je rappelle que l'organisation de la concurrence est inscrite dans le marbre de tous les traités européens. Enfin, le contrôle doit-il porter sur les seuls rapports entre opérateurs, ou bien, comme le suggère M. Brottes, s'étendre au partage de la valeur ajoutée entre opérateurs et consommateurs ? Voilà des questions lourdes qui méritent un débat approfondi.
Nos collègues socialistes ont eu le mérite d'ouvrir le débat, mais il s'agit d'une question de fond pour l'évolution de notre modèle économique européen que nous ne pouvons traiter par le biais d'un amendement. Autant nous allons faire le fichier positif, autant là nous devons nous donner du temps, car nous sommes au coeur de notre modèle économique. La stratégie qui consiste à attendre les conclusions du rapport Attali, puis la proposition de loi, est la bonne. C'est la raison pour laquelle le groupe Nouveau Centre ne votera pas cet amendement.
Nous avons toujours salué la réelle compétence en la matière de MM. Brottes, Gaubert et Le Déaut, mais ce n'est pas parce qu'ils posent de vraies questions que nous devons aujourd'hui les traiter. Dans un article de ce matin, Le Figaro se demande qui a réellement autorité sur le Conseil de la concurrence à propos d'une décision sur l'industrie des jouets. Nous sommes tous parfaitement conscients que, si nous voulons corriger certaines pratiques, il faudra mener une réflexion d'ensemble, notamment sur la négociabilité des prix.
Il faudra aussi réfléchir au fait que le client ne pourra plus facturer des services à son fournisseur et qu'en compensation les clients seront tenus à leur engagement – cela figure dans notre rapport commun, monsieur Le Déaut. En outre, une instance unique aura le pouvoir d'aider les ministres, les politiques à faire respecter la loi car, comme j'ai eu l'honnêteté de le dire ici, le problème est non pas de changer la loi, mais de la faire appliquer. Les actions de groupe, qui devront être permises dans un certain cadre,…
Je ne suis pas maître de l'ordre du jour, mais on nous a dit que cela serait fait avant la fin du premier semestre 2008 ! Ces actions de groupe contribueront à faire appliquer la loi.
Monsieur Le Déaut, vous avez dit vous-même que si cet amendement était adopté, il faudrait revoir le problème des abus de dépendance économique, celui des clauses abusives, la question des incidences sur le marché. On ne peut traiter séparément les sujets. C'est pourquoi une réflexion globale aura lieu dans les meilleurs délais. Nous nous y sommes clairement engagés !
Nous avons fait des propositions globales sur tout ce qui touche à la consommation, qu'il s'agisse du Conseil de la concurrence, des actions de groupe ou du surendettement. Vous évoquez une réflexion globale, mais nous n'attendons que cela ! Pourquoi refuser des amendements qui élargiraient le champ des mesures concernées ? C'est une contradiction !
Il est enfin regrettable que le Gouvernement ait déclaré l'urgence sur ce texte, car nous n'aurons pas le temps d'affiner sereinement les mesures adoptées à l'Assemblée et au Sénat. Chacun devra se contenter de jouer sa partition de son côté, et il faudra s'ajuster au mieux en CMP.
Nous pensons que ce texte était l'occasion de mener un travail global, ce qui nécessite de se donner du temps pour travailler. Vous nous demandez systématiquement d'attendre le mois de mars. Pourquoi ? Il n'y a pas d'élections présidentielle ou législatives en mars, que je sache ! (Sourires.) Il y a simplement le fait que l'on vous a obligés à vous cantonner à deux ou trois sujets.
Oui, mais je retiens surtout l'argument selon lequel « on verra plus tard ». Vous ne pouvez pas nous opposer deux objections contraires !
J'irai dans le même sens que M. Gaubert. Le texte en discussion s'intitule « projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs ». Si nous ne pouvons débattre que des articles proposés par le Gouvernement et que les députés ne peuvent pas défendre une conception globale de la concurrence au service des consommateurs, on est en droit de s'interroger sur notre manière de travailler. Je n'en suis, il est vrai, qu'à mon second mandat – certains collègues, députés depuis plus longtemps que moi, objecteront peut-être qu'il en a toujours été ainsi –, mais je trouve dommage que nous votions une loi, sur laquelle le Gouvernement a déclaré l'urgence, sachant qu'il faudra examiner un autre texte sur le même sujet dans six mois.
Et c'est continuellement le cas ! Qui pourrait s'y retrouver dans ces conditions ?
Quand on travaille ainsi, les textes sont nécessairement mal rédigés. Les décrets d'application d'une loi ne sont même pas encore parus que l'on est déjà en train de voter la suivante. Cela signifie que ni les entreprises ni les institutions ni les intéressés – en l'occurrence, les consommateurs – ne peuvent suivre les modifications législatives. On se plaint constamment de l'inflation des textes juridiques. Elle tient aux méthodes de travail du Gouvernement actuel et de ceux qui l'ont précédé depuis cinq ans.
Ce texte contient-il des dispositions qui ne pouvaient pas attendre trois mois ? Qu'on m'en cite une seule, qui aurait un tel impact économique et social…
Pour avoir attentivement suivi les débats, je ne suis pas convaincue qu'on ne pouvait pas attendre trois mois !
Non ! C'est tout le problème ! Souvenons-nous du débat que nous avons eu la semaine dernière sur l'action de groupe. Je vous rappelle que l'UMP est au pouvoir depuis 2002 et que, comme l'a observé notre collègue du groupe Nouveau Centre, ce débat est présent, non seulement à l'Assemblée nationale et au Sénat, mais aussi dans l'opinion publique, où il est porté par les associations de consommateurs. On ne peut plus faire l'économie d'une approche globale.
Vous me permettrez de conclure par une boutade. On se gausse souvent de la IVe République en disant que, chaque fois qu'un problème survenait, on créait une commission. Nous, dans la même situation, nous installons une mission. Certes, les missions sont positives. Elles accomplissent un excellent travail, mais…
On voit que vous ne siégez pas à la commission des affaires économiques !
Je siège à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, qui ne travaille pas moins sérieusement.
Même si les missions débouchent souvent sur un travail très intéressant, elles ne doivent pas devenir un prétexte, pour nous éviter de trancher un débat politique.
Je suis saisi d'un amendement n° 309 deuxième rectification.
La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.
J'espère que cet amendement, qui vise à appeler l'attention du Gouvernement et de l'Assemblée sur une catégorie de salariés de la grande distribution, ne sera pas traité de façon cavalière.
Quand on parle de concurrence au service des consommateurs, il ne faut pas oublier les salariés de la grande distribution, plus particulièrement les caissiers ou plutôt – j'emploie le féminin à dessein, car la profession est fortement féminisée – les caissières. Le plus souvent, on ne leur propose que des contrats de travail à temps partiel, de trente ou trente-deux heures, au gré de l'employeur. Contrairement à ce que l'on prétend parfois, une très grande partie de ces femmes ne choisit pas le temps réduit. Des études montrent qu'elles ne trouvent pas d'offre à temps plein dans la grande distribution. Autrement dit, les salariées de ce secteur ne travaillent pas à temps partiel de leur propre initiative. Leur temps réduit ne leur permet d'ailleurs pas de concilier vie familiale et vie professionnelle, puisqu'elles l'effectuent souvent en horaires décalés et parfois tard dans la soirée. Leurs conditions de travail sont encore dégradées par l'extension des horaires d'ouverture des grands magasins.
Quant au pouvoir d'achat et au salaire des caissières, reconnaissons que la rémunération de trente ou trente-deux heures payées sur la base du SMIC horaire, c'est peu, surtout quand on possède une famille à charge. Le fait que les entreprises de distribution ne leur offrent pas la possibilité de travailler à temps plein les empêche même de prétendre à un SMIC complet. Cette situation inadmissible contribue à augmenter les cohortes de salariés pauvres dont on sait qu'ils constituent une part de plus en plus importante du salariat français.
Cette question pose aussi celle de l'égalité de salaires entre les hommes et les femmes. Dans ce domaine, il ne suffit pas de défendre les femmes cadres. Il faut avoir conscience du fait que certains métiers sont réservés à des femmes, qui pâtissent de ce fait d'une inégalité salariale très importante. Celui de caissière si pénible, fait de tâches répétitives, fastidieuses, accompagnées d'un stress permanent provoqué par le règne des petits chefs de la grande distribution et celui du client roi, s'effectue dans une ambiance de flicage généralisé, avec la hantise permanente de l'écart de caisse. Autant de caractéristiques qui justifient à nos yeux que nous demandions, par cet amendement, qu'un rapport « sur l'ampleur et l'opportunité du travail à temps partiel dans le secteur de la grande distribution, ainsi que sur le pouvoir d'achat des salarié-e-s de ce secteur » soit réalisé avant le 31 janvier 2008. Nous pensons en effet que notre responsabilité est de prendre en compte la situation spécifique de cette profession. Il serait regrettable que, à l'occasion de cette loi, on ne pense pas aux salariées qui occupent les places les plus difficiles dans la grande distribution.
Le sujet abordé par M. Chassaigne est grave, mais, hélas, le problème ne touche pas seulement la grande distribution ! Quoi qu'il en soit, et même s'il y a un lien entre le pouvoir d'achat et les salaires, il relève du code du travail plus que du texte en discussion. J'ajoute que, dans beaucoup entreprises, des salariés connaissent une situation difficile liée aux abus du temps partiel.
La commission a émis un avis défavorable non sur le fond, mais parce que l'amendement ne semble pas trouver sa place dans le projet de loi.
Les signataires de l'amendement demandent au Gouvernement de déposer un rapport au Parlement sur l'ampleur et l'opportunité du travail à temps partiel, ainsi que sur le pouvoir d'achat des salariés de ce secteur.
Le problème du temps partiel est suivi de près, au niveau statistique, par tous les ministères concernés. Son organisation fait l'objet, dans chaque secteur d'activité ou dans chaque entreprise, d'une concertation, par le biais d'une convention, d'un accord collectif de branche étendu ou d'un accord d'entreprise ou d'établissement, qui pose les conditions générales d'organisation de ce mode de travail.
Quant à la question du pouvoir d'achat des salariés à temps partiel, il se pose au même titre que celui de tous les Français. Mais nous ne pensons pas qu'elle doive être traitée de manière spécifique sous l'angle d'une catégorie particulière ou d'un métier précis.
Enfin, pour ce qui est du coût de la vie, Christine Lagarde et moi-même avons annoncé, au cours de la dernière conférence sur l'emploi et le pouvoir d'achat, la mise en place de nouveaux indicateurs qui visent à mieux prendre en compte la réalité en distinguant chaque catégorie de Français. Le « panier » d'un célibataire, et celui d'une famille de deux enfants ou d'un retraité ne sont pas identiques. Nous allons par conséquent mettre en place un système prenant en compte différentes situations, notamment celle des travailleurs à temps partiel.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement.
Le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche aurait pu, lui aussi, déposer l'amendement, mais je ne suis pas étonné que le Gouvernement n'y soit pas favorable. On sait qu'il éprouve une certaine aversion à l'idée de remettre des rapports au Parlement. En outre, il a tendance à remettre le règlement de tous les problèmes à plus tard.
Comme l'a souligné M. Chassaigne, ce n'est pas le travail à temps partiel lui-même qu'il faut condamner, mais le temps partiel imposé, surtout quand il est segmenté. Savez-vous quelle est la vie d'une caissière ? Convoquée à son poste entre onze heures quinze et midi quinze, on la prévient à midi dix que l'affluence exige qu'elle reste jusqu'à une heure. L'après-midi, si elle doit travailler entre seize heures trente et dix-huit heures, il arrive, s'il y a peu de clients quand elle se présente, qu'on lui impose une autre tranche, allant par exemple de dix-sept heures à dix-neuf heures. Comment une jeune mère qui a charge d'enfants peut-elle travailler dans de telles conditions ?
Je n'ai aucune solution à proposer. Mais nous devons tous comprendre que la situation de quelqu'un qui ne trouve pas d'autre travail est extrêmement difficile à vivre. Un rapport qui dresserait un état des lieux, préciserait les conditions de travail et préconiserait certaines améliorations, y compris du comportement de certains consommateurs, pourrait être utilement présenté au Parlement avant le débat sur le travail du dimanche – autre temps de travail subi –,…
…qui viendra inévitablement devant le Parlement, si j'ai compris ce qui se disait sur certains bancs et dans certains lieux.
Vous avez parlé de concertation, monsieur le secrétaire d'État. Y en a-t-il, dans la grande distribution ? On sait que, dans beaucoup de grandes surfaces, il n'y a pas de syndicalisation ni de représentants du personnel, et donc pas de concertation.
Quant aux indicateurs de pouvoir d'achat, je sais gré au Gouvernement d'en rechercher de meilleurs. Il est vrai qu'une des difficultés que nous éprouvons aujourd'hui tient à ce que notre indice des prix s'applique au consommateur moyen, défini dans un panel. Or les consommateurs atypiques sont très nombreux. Vous avez cité les célibataires ou les familles monoparentales. De fait, quand on vit seul, le coût du logement pèse beaucoup plus que lorsqu'on dispose de deux revenus. D'où la nécessité de trouver de meilleurs indicateurs.
Reste que les caissières connaissent un vrai problème de pouvoir d'achat et de salaire. Le plus médiatique des présidents de chaînes de grands magasins affirme volontiers qu'il voudrait bien pouvoir redonner du pouvoir d'achat aux consommateurs – sous-entendant qu'il a lui-même trop d'argent – mais qu'on l'empêche de le faire. Il serait moins difficile d'accorder un tant soit peu de crédit à ses propos s'il commençait par augmenter ses propres salariés.
Monsieur secrétaire d'État, cet amendement est d'autant plus intéressant que nous devons dans une dizaine de jours examiner un projet de loi ratifiant une ordonnance du 12 mars 2007 qui propose une nouvelle codification du droit du travail. Les textes prévoient actuellement que des rapports doivent être remis au comité d'entreprise notamment sur le travail de nuit et le travail à temps partiel. Or je crains que le document consacré à ce dernier sujet ne passe à la trappe avec la recodification qui devait pourtant se faire à droit constant.
Si cet amendement concerne la grande distribution, ce n'est pas un hasard. En effet, l'immense majorité des contrats de travail – si on exclut les postes d'encadrement – en vigueur dans ce secteur sont des contrats de travail à temps partiel. Ils sont préjudiciables aux salariées à qui on fait miroiter la possibilité de faire des heures complémentaires – et la loi TEPA va encore faciliter les choses. Elles acceptent le temps partiel, dans l'espoir d'un contrat de travail à temps plein qu'elles attendent très longtemps et n'obtiennent qu'assez rarement.
Les dirigeants des entreprises de la grande distribution le disent eux-mêmes, ils ne voient pas l'intérêt de l'emploi à temps complet dans une activité soumise à des fluctuations horaires très fortes : ils ne vont pas payer des caissières, bien utiles aux heures de pointe, à attendre, pendant les heures creuses de la journée, des consommateurs absents !
Or la grande distribution fait des bénéfices faramineux, il serait normal, quitte à ce qu'ils diminuent un peu – mais il est difficile de nous faire pleurer sur les difficultés de la grande distribution –, qu'ils profitent au consommateur, aux producteurs qu'elle pressure, et notamment les producteurs locaux en jouant sur les prix, mais aussi à ses salariées. Sans qualifications et sans responsabilités ces dernières sont presque toutes employées au SMIC à temps partiel et se trouvent dans des situations particulièrement difficiles, encore aggravées dans les agglomérations comme en l'Île-de-France où elles ne peuvent pas toujours se loger à côté du magasin qui les emploie.
Au-delà des questions relatives aux consommateurs, traitées dans ce projet, il serait très important que nous ayons une vision plus précise de la répartition des bénéfices de la grande distribution et de la part attribuée aux salariées à temps partiel.
Je mets aux voix l'amendement n° 309 , deuxième rectification.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Avant l'article 1er, je suis d'abord saisi d'un amendement n° 240 .
La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.
Cet amendement, déposé au nom des quatre députés Verts, est relatif aux ventes liées. Les règles prévues en ce domaine par le code du commerce ne s'appliquent pas en raison de diverses failles de notre droit – Jean-Paul Charié évoquait justement les difficultés rencontrées pour faire respecter la loi en matière de droit de la concurrence. L'article L. 420-2 du code du commerce doit donc être complété.
Monsieur le secrétaire d'État, lors de la discussion générale de ce projet de loi, vous avez prétendu, en répondant à un orateur du groupe socialiste, qu'il était aujourd'hui possible d'acheter des ordinateurs non équipés de logiciels et d'y installer ensuite le logiciel gratuit Linux. Vous le savez pertinemment, la réalité est tout autre : il est maintenant très difficile d'acheter un ordinateur qui ne soit pas déjà équipé par les produits Microsoft ou bien, mais moins souvent, Apple. Dans les enseignes de la grande distribution, le consommateur n'est pas en mesure de comparer les prix d'un ordinateur fournis avec logiciel et ceux du même ordinateur non équipé. Seuls les petits magasins ou Internet offrent cette possibilité.
Cette vente forcée des logiciels pose le problème de la transparence des prix. Le consommateur ne sait pas quelle part du prix correspond à celle du logiciel et quelle part correspond à l'ordinateur. Cela est d'autant plus difficile qu'outre le système d'exploitation, sont vendus aux consommateurs d'autres logiciels d'une utilité souvent très restreinte – ce dont il ne se rend pas toujours compte sur le moment – sans qu'il en connaisse le coût.
Par ailleurs, les versions des logiciels installés sont souvent bridées par rapport aux produits vendus sans ordinateur. De plus, il faut rappeler qu'en France et en Europe, les prix de certains logiciels sont particulièrement élevés, ainsi, le logiciel Vista coûte 213 euros de plus en Europe qu'aux États-Unis. Enfin, le consommateur qui se trouve obligé d'acheter un ordinateur équipé est confronté aux problèmes posés par les mises à jour et les changements de logiciels. Le passage de Windows 95 à Windows 98, celui de Millenium à XP ne se font pas gratuitement, le consommateur doit payer. Et comme il y a très peu de concurrence sur ce marché des systèmes d'exploitation, Microsoft se permet d'installer des versions qui sont particulièrement défaillantes et le pauvre consommateur a parfois un peu de mal à faire fonctionner son ordinateur.
J'en termine monsieur le président. J'ai beaucoup insisté sur les problèmes des consommateurs – j'aurai également pu évoquer la question de l'iPhone qui doit être commercialisé à la fin de l'année – mais se pose aussi la question de la concurrence, car pour les entreprises qui veulent vendre ou distribuer d'autres logiciels que ceux proposés dans l'actuel « monopole obligatoire », la tâche est particulièrement difficile.
Aujourd'hui, la DGCCRF ne répond pas aux plaintes des consommateurs, et pourtant les premières ne datent pas d'hier, la réunion qui devait avoir lieu et faire des propositions sur le sujet ne s'est pas tenue, rien n'avance ! Monsieur le secrétaire d'État, quand le consommateur pourra-t-il, s'il le souhaite, faire le choix d'acheter des ordinateurs non équipés, sans être obligé de faire les boutiques de l'avenue Daumesnil ou de passer par Internet ?
Madame, vous le dites dans l'exposé sommaire de votre amendement : le code du commerce interdit l'abus de position dominante. Vous avez pris l'exemple de Microsoft, mais il faut rester prudent. Cet amendement qui vise à écrire dans le code du commerce que l'ensemble des accords d'exclusivité pourrait constituer un abus de position dominante est très dangereux parce qu'il existe des accords d'exclusivité qui n'ont rien à voir avec un abus de position dominante. C'est pourquoi la commission a rejeté cet amendement.
Le Gouvernement partage l'avis du rapporteur. Madame la députée, vous savez que le législateur s'est toujours attaché à trouver un bon équilibre entre le principe de la liberté du commerce et celui de la défense de l'ordre public économique.
Si votre amendement était adopté, le fabricant d'appareil photos ou d'un quelconque matériel qui choisit un distributeur pour un lancement promotionnel ne pourrait plus faire d'accord d'exclusivité. Pourtant, cette pratique commerciale profite au consommateur qui bénéficie d'une promotion sur le produit !
Nous considérons aujourd'hui que l'exploitation abusive des accords d'exclusivité est sanctionnée par le droit des pratiques anticoncurrentielles. La jurisprudence prend en compte la situation de dépendance qui résulte de ce type de contrats. il n'est donc pas opportun de légiférer sur ce point. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement, ce qu'il ne se trouverait pas dans l'obligation de faire si vous le retiriez.
Je m'étonne un peu de la position que prend M. le secrétaire d'État Chatel car il n'avait pas la même lorsqu'il était le député Chatel. Comme moi-même, comme Christian Bataille, Mme Marie-Renée Oget, Philippe Tourtelier, ou comme Mme Corinne Marchal-Tarnus ; Luc Chatel a posé une question écrite au gouvernement sur ce sujet alors qu'il était député. À l'époque, monsieur le secrétaire d'État, vous souhaitiez « une lisibilité des prix affichés dans le cas de vente liée pour le matériel informatique ». En relevant un usage qui permet aux consommateurs de bénéficier de logiciel préinstallé, vous notiez que le prix de ce logiciel, que l'acheteur peut théoriquement refuser, n'est pas indiqué, « ce qui laisse croire qu'il s'agit d'une offre gratuite alors que l'on peut estimer le coût de ce logiciel à près de 25 % du coût total de l'achat ». Vous souhaitiez savoir s'il ne serait pas plus pertinent d'imposer un affichage qui distinguerait le prix de l'ordinateur de celui des logiciels préinstallés, ce qui permettrait une meilleure information des consommateurs qui pourraient alors choisir plus librement d'acquérir des logiciels ou non.
Député, vous aviez raison de poser une question écrite. Cette question aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'État, nous vous la posons. Si on peut admettre que l'amendement défendu par Mme Billard n'a pas la meilleure rédaction possible, vous ne pouvez vous contenter de répondre par une pirouette et affirmer qu'aujourd'hui la situation est réglée par notre droit : ce n'est pas vrai !
En France et en Europe, la domination des matériels américains est écrasante et 95 % des ventes au grand public sont effectuées par un seul opérateur. Il n'y a pas de concurrence, nous sommes en situation de monopole. Comment cette situation peut-elle vous satisfaire, vous qui êtes des libéraux ?
Les logiciels préinstallés peuvent être pratiques mais, à la différence des particuliers, l'industriel qui commande des ordinateurs peut imposer qu'ils soient livrés sans logiciel. Finalement, la poule aux oeufs d'or ce sont les 30 millions de personnes détentrices d'ordinateurs ou des téléphones mobiles car elles paient des logiciels préinstallés et sont victimes de ventes liées.
Ce monopole n'est plus tolérable, tous ceux qui défendent le logiciel libre en France le soulignent.
Monsieur le secrétaire d'État, si cette situation vous satisfait, ne faites rien, mais vous aviez eu raison de posez votre question écrite et je regrette que vous vous en tiriez aujourd'hui par une pirouette. Les consommateurs ne l'apprécient pas non plus.
La réponse que vous nous avez apportée ne vous fait pas honneur, monsieur le secrétaire d'État. Un débat de fond existe, vous le savez puisque vous en avez souvent été l'un des acteurs.
Votre argument n'est pas valable car l'amendement n° 240 vise les accords d'exclusivité dans la mesure où ils ont pour objet de limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence. Cet amendement ne prohibe pas systématiquement ces accords mais s'appliquerait à la situation actuelle de la vente des ordinateurs équipés de logiciels préinstallés.
Le consommateur devrait pouvoir choisir, dans n'importe quel magasin de la grande distribution, entre un ordinateur sur lequel Windows est préinstallé – et il doit alors être informé de la part du prix d'achat correspondant au logiciel – et un ordinateur où il ne l'est pas et sur lequel il installera lui-même soit un système d'exploitation libre, soit Windows. La situation actuelle est dénoncée par de nombreuses associations de consommateurs, dont les plaintes n'avancent pas car, contrairement à ce qui a été dit, la DGCCRF a manifestement pour consigne de ne pas intervenir.
Monsieur le secrétaire d'État, vous qui vous dites libéral et qui, en tant que tel, défendez la concurrence, vous devez permettre aux consommateurs de choisir sans qu'ils soient obligés d'acheter leurs ordinateurs sur Internet ou dans des boutiques très spécialisées.
Monsieur Le Déaut, il convient de garder son calme et d'éviter de mélanger des règles relatives à la concurrence et d'autres qui concernent la consommation. Il ne vous a pas échappé, ni à Mme Billard, que l'article L. 122-1 du code de la consommation prohibe déjà la vente liée. La règle est donc déjà fixée dans la loi.
Néanmoins, le juge a considéré jusqu'à présent que l'intérêt du consommateur était avant tout que l'ordinateur fonctionne. Il n'a donc pas exigé une application stricte du droit.
Ce sujet m'intéresse autant comme secrétaire d'État qu'il m'a intéressé comme député. C'est la raison pour laquelle nous avons confié des travaux d'expertise à la DGCCRF. Parallèlement, une association de consommateurs a souhaité lancer une nouvelle action en justice, ce qui a eu pour effet de geler les discussions en cours. Le jugement est attendu pour le début de l'année 2008. Il est bien évident que les travaux d'expertise de la DGCCRF seront versés au dossier examiné par le tribunal. Nous verrons alors si la jurisprudence évolue. Mais, encore une fois, ce n'est pas un problème d'ordre législatif car, sur le plan légal, la vente liée est d'ores et déjà interdite.
Ces deux amendements concernent les marges des distributeurs. La distribution est un secteur dont les pratiques sont extrêmement floues, pour ne pas utiliser d'autres termes. D'une année à l'autre, les choses changent beaucoup. Que ce soit avec les lois Galland en 1996, avec la loi NRE en 1999 ou avec la loi Dutreil en 2004, nous avons tenté, les uns et les autres, de mettre un peu de clarté et de morale dans ces pratiques. Nous n'y sommes pas parvenus, sans doute parce qu'il faudrait remettre en cause l'ensemble du système, mais aussi par ignorance. Car pour bien légiférer, il faut bien connaître la situation.
Les amendements nos 114 et 113 visent donc à confier à la commission d'examen des pratiques commerciales pour l'un, à la DGCCRF pour l'autre, le soin de remettre chaque année au Premier ministre un rapport public relatif à l'évolution des marges pratiquées par les distributeurs. Faites votre choix ! Il est vrai néanmoins, et François Brottes l'a rappelé, que l'on étend très souvent les compétences de la DGCCRF sans que ses moyens augmentent, quand ils ne diminuent pas.
Monsieur Gaubert, il s'agit de bons amendements… puisqu'ils sont satisfaits.
Mme la ministre des finances, de l'économie et de l'emploi a en effet annoncé, le 5 novembre dernier, la création d'un observatoire des prix et des coûts qui me paraît répondre en partie à votre demande.
Surtout, la commission d'examen des pratiques commerciales, qui publie un certain nombre de rapports, exerce, en vertu de l'article L. 440-1, un « rôle d'observatoire régulier des pratiques commerciales, des facturations et des contrats conclus entre producteurs, fournisseurs, revendeurs qui lui sont soumis. Elle établit chaque année un rapport d'activité qu'elle transmet au Gouvernement et aux assemblées parlementaires. Ce rapport est rendu public. Il comprend une analyse détaillée du nombre et de la nature des infractions aux dispositions du présent titre ayant fait l'objet de sanctions administratives ou pénales. Il comprend également les décisions rendues en matière civile sur les opérations engageant la responsabilité de leurs auteurs. »
Si jamais vous n'avez pas reçu ce rapport, nous pouvons vous le faire parvenir. En tout état de cause, vos amendements sont satisfaits. La commission a donc émis un avis défavorable.
Tout d'abord, Mme Lagarde a en effet annoncé qu'un observatoire serait prochainement mis en place sur ces questions. Par ailleurs, nous ne souhaitons pas que la CEPC, qui est une instance d'examen et d'analyse des pratiques commerciales, soit chargée d'une mission supplémentaire. Quant à la DGCCRF, elle est une administration de contrôle des pratiques et des abus dans les relations entre fournisseurs et distributeurs, et non des marges des distributeurs stricto sensu. Pour ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à ces deux amendements.
Monsieur le rapporteur, je possède déjà le rapport que vous avez cité, et c'est précisément parce que je l'ai lu que j'ai déposé ces amendements. En effet, la CEPC n'est saisie que lorsqu'une personne qui s'estime lésée dépose une plainte. Or de très nombreuses pratiques ne font pas l'objet de plaintes parce que le chef d'une petite entreprise qui en est victime a peur de subir des mesures de rétorsion et ne veut pas prendre le risque de disparaître. Il faudrait donc que la commission puisse s'autosaisir.
Je suis saisi d'un amendement n° 300 .
La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.
Comment parler de la revalorisation du pouvoir d'achat, qui est l'objectif de ce projet de loi, sans évoquer la question des salaires ? La baisse du pouvoir d'achat, qui est une préoccupation majeure d'une grande partie de la population française, serait également, nous dit-on, une priorité gouvernementale. On attend d'ailleurs une déclaration très importante du Président de la République sur le sujet.
On peut être dubitatif sur ce point. En tout cas, il conviendrait que l'Assemblée s'intéresse un peu au moins au pouvoir d'achat du Président de la République et un peu plus à celui de l'ensemble des Français.
Vous avez beau affirmer que la hausse du pouvoir d'achat ne se fera pas du jour au lendemain, mais seulement dans quelques mois, cela fait tout de même six mois que vous êtes au pouvoir !
Il est donc nécessaire que le Gouvernement organise rapidement – et tel est l'objet de notre amendement – un Grenelle des salaires reposant sur une négociation entre les représentants syndicaux, patronaux et l'État. Il se conclura par la négociation d'accords de branche avant le 31 décembre 2007 et d'accords d'entreprise avant le 1er juillet 2008.
Grâce à cette forme de négociation tripartite, les représentants des salariés auront enfin la possibilité de donner leur avis sur les meilleurs moyens de défendre leurs droits. Ainsi, au lieu de négocier en catimini entre Matignon et le Parlement, comme ce fut le cas au mois de juillet lors du vote du scandaleux texte TEPA, le Gouvernement pourra donner l'occasion à la démocratie sociale de s'exercer.
L'avis de la commission est défavorable. Le pouvoir d'achat dépend à la fois des prix d'achat et des revenus. Or le projet de loi de Luc Chatel concerne uniquement la concurrence et les consommateurs. Cela ne veut pas dire que le Gouvernement se désintéresse de la question des revenus, mais ce n'est pas le sujet qui nous préoccupe dans le cadre de ce débat.
Du reste, je rappelle que, le 23 octobre dernier, le Gouvernement a réuni une conférence sur l'emploi, avec la participation de Luc Chatel, Christine Lagarde, Xavier Bertrand et Martin Hirsch. Bien entendu, le sujet est complexe, puisqu'il faut parvenir, y compris dans ce texte, à un équilibre entre les prix d'achat et les salaires, lesquels sont liés. Ainsi, si l'on diminue trop les prix, les salaires risquent de baisser et si l'on augmente trop les salaires, on augmente également les prix et on risque de favoriser les importations. Il s'agit d'un véritable problème, qui est traité par le Gouvernement. Votre amendement est hors sujet dans le cadre de ce projet de loi.
Le Gouvernement vous demande de retirer votre amendement, monsieur Chassaigne, car il considère qu'il est satisfait. Vous pouvez en effet appeler « Grenelle » le cycle de travail sur l'emploi et le pouvoir d'achat qui a été ouvert par le Gouvernement le 23 octobre dernier et qui a fait l'objet de la conférence qu'évoquait à l'instant votre rapporteur. Je rappelle que ce cycle va durer plusieurs mois, qu'il offre un cadre pertinent de discussion entre le Gouvernement, les représentants des syndicats et ceux du patronat et qu'il va déboucher notamment sur la mise en place d'une conditionnalité des allégements de charges pour redynamiser la négociation salariale dans les branches. En outre, nous avons présenté, au cours de la première réunion, le nouveau mode de revalorisation du SMIC – car nous estimons qu'il y a lieu d'évoluer en la matière – ou encore le projet de nouveaux indices de l'INSEE.
Le Gouvernement a examiné ces questions avec beaucoup d'ascension (Sourires), pardon : d'attention et de sérieux. Vous pouvez donc baptiser « Grenelle » le cycle de travail qui a été engagé le 23 octobre dernier.
M. le ministre vient de parler d'ascension, et on a parfois effectivement l'impression que vouloir progresser sur la question des salaires revient à gravir une colline, en une ascension qui paraît longue et décourageante à ceux qui n'en aperçoivent pas même le sommet – j'espère en tout cas pour les salariés que le « cycle de négociations » sur les salaires qui vient d'être évoqué ne sera pas aussi long que le cycle de Doha effectué sous l'égide de l'OMC !
Monsieur le rapporteur, vos propos n'ont pas manqué de m'étonner : n'avez-vous pas entendu les ministres nous expliquer que l'objet de ce texte de loi était de donner du pouvoir d'achat ? En tout état de cause, vous devez bien le savoir, puisqu'il vous est arrivé de le dire vous-même ! Mais alors, comment pouvez-vous reprocher à notre collègue Chassaigne, qui ne propose pourtant pas autre chose, d'être hors sujet ?
Vous pouvez dire que la proposition de M. Chassaigne ne vous convient pas, mais certainement pas qu'elle est hors sujet : au contraire, elle répond parfaitement à la question posée !
C'est si vrai, d'ailleurs, que le journal La Tribune de ce matin, dans un article intitulé « La consommation des ménages s'essouffle », constate que « les déceptions économiques s'accumulent ». La Tribune n'est pourtant pas, que je sache, un journal violemment gauchiste, et vous ne pouvez l'accuser de forcer le trait, comme vous auriez sans doute été tenté de le faire s'il s'était agi de L'Humanité ! Tout le monde est aujourd'hui conscient de la réalité du problème, et vous ne pouvez sérieusement prétendre que cette question est hors sujet, monsieur le rapporteur.
Je mets aux voix l'amendement n° 300 rectifié .
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 313 .
La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.
Les Restos du Coeur et d'autres associations similaires constatent, depuis quelque temps, que de plus en plus de personnes ont recours à leurs services, alors même qu'elles occupent un emploi. Les salariés payés à hauteur du SMIC – 15 % des actifs, et pas seulement en début de carrière – alimentent ces cohortes de travailleurs pauvres. Nous avons tous l'occasion de constater, dans nos permanences, la montée de cette précarité.
La plupart du temps, ces salariés ne parviennent pas à assurer la satisfaction de leurs besoins élémentaires – se loger, se nourrir, se déplacer – sans devoir systématiquement rogner sur la dépense. La baisse de quelques centimes du prix du beurre que leur offriront peut-être Carrefour ou Casino ne changera pas grand-chose en termes de pouvoir d'achat pour ces personnes, pas plus que la non-facturation du temps d'attente sur les hotlines des services après-vente !
Les dépenses contraintes ont augmenté de toutes parts depuis 2002 : l'ouverture à la concurrence du secteur de l'énergie a provoqué une hausse sans pareille du prix de l'énergie – notamment du gaz – au détriment des ménages les plus modestes, qui se retrouvent parfois dans l'impossibilité de s'acquitter de leurs factures d'énergie. L'introduction d'une franchise médicale supplémentaire ne manquera pas d'entraîner de nouveaux coûts pour les personnes malades. Quant aux attaques portées contre le service public, hypocritement dénommées « réformes » – je pense à la refonte de la carte judiciaire, ou encore au démantèlement de l'implantation territoriale de nombreux services de l'État –, elles contraindront nombre de nos concitoyens, surtout dans les zones rurales, à utiliser davantage leur voiture, avec les dépenses que cela implique.
Ces coups portés au pouvoir d'achat des ménages les plus modestes ne sont d'ailleurs pas le fruit de la fatalité, mais de vos choix politiques : volonté de mettre à mal le service public et faillite organisée de l'État avec des cadeaux fiscaux inconsidérés ne sont pas pour rien dans les problèmes que nous rencontrons actuellement !
L'absence de revalorisation du SMIC pousse une part importante des ménages français vers la précarité. Pour ces personnes, la priorité absolue est le salaire, qui n'est malheureusement plus un rempart contre la pauvreté – cet aspect du problème est directement lié à ce qui constitue l'objet de notre débat,
C'est pourquoi nous proposons, avec l'amendement n° 313 , que le Gouvernement dépose un rapport sur les conséquences de la très faible revalorisation du SMIC au cours des dernières années sur le pouvoir d'achat des salariés à revenu modeste. La représentation nationale doit en effet pouvoir disposer de données précises sur cette question afin de pouvoir lutter en toute connaissance de cause contre la diminution importante de pouvoir d'achat de toute une catégorie de citoyens et l'incidence de ce phénomène sur l'augmentation de la pauvreté en France.
Contrairement à ce que vous affirmez, monsieur le président de la commission, notre proposition est en rapport direct avec le texte : rien ne sert d'agiter la muleta devant les prix si l'on néglige l'essentiel, à savoir l'augmentation des salaires !
Je dirai en préalable que M. Gaubert nous avait habitués à moins de mauvaise foi que celle dont il a fait preuve tout à l'heure !
Il suffira de se reporter au compte rendu des débats pour vérifier que je n'ai jamais prétendu résumer la problématique du pouvoir d'achat à la loi dont nous débattons actuellement. Je continue toutefois de considérer que la consommation et la concurrence sont les piliers du pouvoir d'achat et qu'à ce titre, l'amendement de M. Chassaigne est hors sujet.
Je veux par ailleurs lui rappeler que l'une des premières tâches dont a dû s'acquitter la nouvelle majorité en 2002 a consisté à remettre de l'ordre dans la pagaille laissée par le gouvernement précédent avec les 35 heures et pas moins de six SMIC différents…
Finalement, je n'attendrai peut-être pas jusqu'au dîner pour vous répondre, monsieur le rapporteur !
…très peu réévalués durant les cinq années de gouvernement de M. Jospin.
Au contraire, nous pouvons être fiers d'être revenus à un seul SMIC et de l'avoir augmenté de 11 % en procédant à un alignement sur le taux le plus élevé. Dans ces conditions, nous ne pouvons accepter que vous prétendiez nous donner des leçons sur les salaires. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La commission a repoussé cet amendement hors sujet.
Le Gouvernement vient de lancer un cycle de conférences avec les partenaires sociaux – que M. Chassaigne souhaite qualifier de « Grenelle » – sur l'emploi et le pouvoir d'achat. Par ailleurs, comme l'a dit M. le rapporteur, le précédent gouvernement a revalorisé le SMIC de 23,2 % entre 2002 et 2007, tout en l'unifiant.
Toutefois, ainsi que cela a été dit lors de la conférence « Emploi et pouvoir d'achat » du 23 octobre dernier, cette revalorisation du SMIC conduit à un écrasement de la grille des salaires : entre 1994 et 2006, la proportion de salariés payés au SMIC a presque doublé, passant de 8 % à 15 %. C'est pourquoi nous proposons qu'une commission indépendante soit dorénavant chargée de remettre un avis au Gouvernement et aux partenaires sociaux sur les évolutions souhaitables du SMIC, en s'inspirant de ce qui se fait déjà dans d'autres pays.
Nous avons également indiqué, lors de la conférence du 23 octobre, que nous souhaitions conditionner le bénéfice des allégements de charges à la tenue de négociations collectives annuelles sur les salaires dans les branches et les entreprises soumises à cette obligation. Notre politique consiste à favoriser le dynamisme des négociations salariales pour tous les niveaux de salaires, en évitant que l'évolution du SMIC n'écrase l'ensemble de la grille salariale.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 313 .
Je regrette que M. le rapporteur se laisse aller à la provocation, en cette fin de séance, en voulant nous imposer sa façon de voir…
Je rappelle qu'entre 1997 et 2002, le pouvoir d'achat des Français a augmenté de plus de 3 % en moyenne par an, alors que le gouvernement actuel se contente d'environ 2 %.
Mais la croissance, c'est nous qui avons su la trouver ! En 1997, M. Juppé a proposé de dissoudre l'Assemblée parce qu'il n'y arrivait plus !
Je suis saisi d'un amendement n° 314 rectifié .
La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.
Je crois que le président Ollier devrait être satisfait par cet amendement qui a sa place au coeur du débat, puisqu'il a trait aux produits de première nécessité.
Si le problème numéro un en matière de pouvoir d'achat est bien celui des salaires, nombreux sont les ménages à se plaindre de la hausse des prix, alors même que l'inflation est censée être limitée. Loin des explications psychologiques douteuses selon lesquelles les Français seraient d'éternels insatisfaits, l'analyse des statistiques officielles fournit des clés précieuses pour comprendre le décalage entre la perception de l'inflation et les chiffres donnés par l'INSEE.
L'indice des prix à la consommation calculé par l'INSEE comporte un certain nombre de limites – que vous avez vous-même évoquées tout à l'heure, monsieur le président de la commission. Ainsi, un indice de prix n'est qu'une moyenne, qui ne peut rendre compte de la diversité des situations des ménages. Par exemple, l'inflation subie depuis dix ans par un locataire a été plus forte que celle subie au cours de la même période par un propriétaire. De même, l'inflation a davantage pesé sur les ménages qui se chauffent au gaz que sur les autres.
La seule référence aux données de l'INSEE relatives à l'inflation ne saurait donc rendre compte de l'évolution réelle du pouvoir d'achat. Aujourd'hui, si certains biens de consommation voient leur prix diminuer – je pense notamment aux ordinateurs portables ou à d'autres produits de haute technologie –, la flambée des prix de l'alimentation de base – le lait, la farine, la viande, etc. – pèse fortement sur les ménages les plus modestes. La hausse des prix agricoles s'est traduite par une augmentation du prix du pain en septembre, et les prix des produits laitiers et de certaines viandes ne devraient pas tarder à suivre.
Pour reprendre l'analyse de l'association de consommateurs CLCV, « les dépenses contraintes ont explosé depuis trois ou quatre ans, qu'il s'agisse du fioul domestique, du logement, des produits alimentaires ou encore des frais de santé non remboursés. Notre principal problème de pouvoir d'achat est là. Le super sans plomb a augmenté de 15 % depuis un an. Dans le monde rural, il est fréquent de devoir faire 30 à 40 kilomètres en voiture pour se rendre à son travail. Le budget transport des familles s'envole. Et trois pleins, c'est presque 200 euros ». Enfin, la flambée des prix de l'énergie alourdit les factures de chauffage et le coût des déplacements domicile-travail.
Selon Familles rurales, la consommation d'environ 400 grammes de fruits et de légumes par personne et par jour – soit le niveau recommandé par l'Organisation mondiale de la santé – représente un budget mensuel de 57 euros pour un couple et de 115 euros pour une famille avec deux enfants de plus de dix ans, soit entre 5 % et 12 % du SMIC.
Il apparaît donc nécessaire que le Gouvernement établisse, avant le 31 janvier 2008, un rapport sur l'évolution des coûts des produits de première nécessité depuis 2002, afin que nous disposions d'un outil intéressant pour l'examen de la prochaine loi sur la consommation.
J'ai deux bonnes nouvelles pour M. Chassaigne. La première, c'est que son amendement n'est pas hors sujet. La seconde, c'est que je suis entièrement d'accord avec lui sur le fond : l'évolution des prix des produits de première nécessité est effectivement très préoccupante, en particulier pour les bas salaires, comme nous avons souvent l'occasion de le constater dans nos permanences respectives. La création de l'Observatoire des coûts et des prix annoncée par Mme Lagarde devrait permettre de suivre l'évolution de ces prix.
Votre amendement, monsieur Chassaigne, pose le problème de la qualité et de la fidélité de l'indice des prix. Vous avez raison de dire que l'évolution des prix doit faire l'objet d'une analyse plus fine, que la seule utilisation des moyennes ne permet pas. Si l'on prend l'exemple des produits laitiers, la notion de moyenne ne veut strictement rien dire, dans la mesure où le lait entre pour 10 % dans le prix d'un yaourt, et pour 80 % dans l'emmental.
Certes, il existe un décalage entre l'évolution de cet indice et la perception des consommateurs – je dis bien la perception car tout n'est pas faux dans les indices de l'INSEE. Beaucoup a déjà été fait pour que le consommateur dispose d'un outil de mesure reflétant plus fidèlement ce qu'il vit au quotidien, notamment avec la mise en place, en 2005, du « chariot type », qui lui permet de construire son propre indice en fonction de son profil de consommation.
Vous nous avez habitués à demander beaucoup de rapports. Le président de la commission des affaires économiques nous propose une formule efficace – la mission d'information –, qui a souvent porté ses fruits.
Nous avons eu notamment une mission d'information sur les relations commerciales, présidé par M. Luc Chatel, dont nous entendons encore aujourd'hui les excellents rapporteurs.
La création en commission, demain, d'une mission d'information commune participera à la mesure des grands indices économiques. Cela devrait permettre de procéder sur cette question à une analyse statistique de fond. Je crois d'ailleurs que M. Jean-Louis Gagnaire, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, devrait occuper des responsabilités importantes dans cette mission d'information.
Vous voyez donc, monsieur Chassaigne, que nous sommes d'accord. Vous ne pouvez donc pas faire autrement que de retirer l'amendement n° 314 rectifié , puisqu'il est satisfait.
Même avis !
Monsieur le secrétaire d'État, vous répondez toujours de la même manière. Vous nous dites : « C'est trop tôt ! » ou « Cet amendement est déjà satisfait ! » …
… ou, si vous voulez être gentil avec nous : « Vous avez de bonnes idées ! » Ce n'est pas parce que nous avons de bonnes idées, qu'il vous est interdit de donner les bonnes réponses. Celles qui nous sont fournies ne sont pas, à mon avis, excellentes.
Quel est le rôle du Parlement ? Il contrôle, à un moment donné, le Gouvernement. Cela fait partie de nos attributions, même si on l'oublie parfois au sein de notre assemblée. Chaque fois que l'on demande des moyens – comme le propose l'amendement n° 314 rectifié , défendu par M. Chassaigne – pour contrôler le Gouvernement, vous nous répondez par la négative, arguant que ce serait un rapport supplémentaire.
Le Parlement doit disposer de rapports fiables. Je lis dans la presse : « Président : plus 18,8 % ! » Il ne s'agit pas de la cote de popularité de M. Sarkozy (Sourires), mais, d'après M. Leclerc, de l'augmentation de prix du camembert Président.
Quand je vois l'augmentation du prix des pâtes, nationales, mais aussi italiennes – 30 % –, ou du prix de l'énergie, j'en conclus que le pouvoir d'achat baisse.
Prenez l'exemple de la simple baguette. Certains d'entre vous ont connu la baguette à un franc.
La « baguette à un franc » existe toujours ! Les meilleures baguettes coûtent plus cher ; les moins bonnes, moins cher.
Il semble que nous ne fréquentions pas les mêmes boulangeries. J'aimerais que M. Charié nous dise où il trouve encore des baguettes valant quelques centimes d'euros.
Aujourd'hui, la baguette de base coûte 85 centimes d'euros et d'autres, dites à l'ancienne, sont à plus d'un euro. Cela a donc augmenté.
M. Chassaigne a donc raison de dire, en citant quelques exemples – sans même parler du prix des carburants –, que le pouvoir d'achat des familles les plus modestes a fortement baissé dans notre pays.
Il est normal qu'il veuille disposer chaque année pour contrôler le Gouvernement des éléments d'information permettant de l'interpeller. C'est le fondement même du rôle du Parlement. Je m'étonne que les arguments de M. Chassaigne ne vous aient pas convaincus.
Je tiens à remercier M. le rapporteur et M. le secrétaire d'État de répondre sur chaque amendement présenté, même si l'on peut, bien sûr, discuter l'argumentation avancée, que nous ne partageons pas forcément. C'est un fait suffisamment rare pour qu'on le souligne. Je souhaite qu'il en soit ainsi jusqu'à la fin de la discussion du projet de loi.
Nous obtenons des réponses précises, qui marquent la volonté de satisfaire les interrogations des parlementaires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je voudrais revenir sur les deux réponses qui viennent de m'être apportées.
Vous avez parlé, monsieur le secrétaire d'État, de l'observatoire mis en place par Mme Lagarde. Je pense que cela signifie que, grâce aux travaux de cet observatoire, nous obtiendrons une évolution du coût des produits de première nécessité. Dans la mesure où vous pensez que cela permettra de répondre à mes interrogations, j'accepte de retirer l'amendement.
Monsieur le rapporteur, vous dites que la commission des affaires économiques va mettre en place une mission d'information. Je ne doute pas que ses objectifs seront précisés, en particulier quant à l'évolution des coûts des produits de première nécessité.
Dans ces conditions, monsieur le président, il n'y a plus lieu de maintenir l'amendement n° 314 rectifié , puisque j'ai obtenu une double réponse et que nous aurons, dans six mois, toutes les précisions nécessaires.
L'amendement n° 314 rectifié est retiré.
Nous avons terminé l'examen des amendements portant articles additionnels avant l'article 1er.
La suite de la discussion du projet de loi est renvoyée à la prochaine séance.
Ce soir, à vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, n° 351 :
Rapport, n° 412, de M. Michel Raison, au nom de la commission des affaires économiques ;
Avis, n° 408, de M. Bertrand Pancher, au nom de la commission des lois.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton