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Commission élargie : commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, commission de la défense et des forces armées

Séance du 11 octobre 2010 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

(Application de l'article 120 du Règlement)

Lundi 11 octobre 2010

La réunion de la commission élargie commence à quinze heures.

Projet de loi de finances pour 2011

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je suis heureux, monsieur le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants, de vous accueillir avec mon collègue Guy Teissier, président de la Commission de la défense nationale et des forces armées, pour l'examen en commission élargie des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » du projet de loi de finances pour 2011.

Comme vous le savez, la procédure de la commission élargie est destinée à privilégier les échanges avec le Gouvernement à travers les questions que les parlementaires souhaitent lui poser. L'expérience ayant montré l'utilité de ces débats vivants, la Conférence des présidents a décidé que la présente mission pouvait pour la première fois en faire l'objet, et ce en dépit de délais très courts, dans lesquels M. le rapporteur spécial a dû rédiger son projet de rapport, ce dont je le remercie au nom de tous nos collègues.

La brièveté de ces délais tient à l'adoption tardive du projet de loi de finances en Conseil des ministres, le 29 septembre dernier. La date de notre réunion d'aujourd'hui a été décidée, quant à elle, par la Conférence des présidents sur demande de l'exécutif. Néanmoins, les rapporteurs ont reçu la quasi-totalité des réponses aux questions qu'ils vous ont posées, monsieur le secrétaire d'État : je vous remercie, ainsi que vos services, pour cet effort.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je veux pour commencer, me faisant l'interprète de tous les députés de la Commission de la défense mais aussi de certains membres de la Commission des affaires sociales, dire que je regrette vivement les conditions qui nous sont imposées cette année pour examiner les crédits de cette mission. J'avais admis, après qu'on m'en eut informé, de les voir examinés en commission élargie, puisque la majorité des missions – dix-huit sur vingt-huit – le sont désormais. Je vois d'ailleurs avec bonheur que notre salle de réunion permet à tous les présidents d'association qui l'ont souhaité, que je salue, d'assister à nos débats.

Il n'est en revanche pas acceptable que les crédits soient examinés dès aujourd'hui. Cette année est importante pour les anciens combattants, puisque nous allons notamment débattre de la revalorisation de la retraite et des mesures de décristallisation. Ce sont là des sujets lourds de conséquences, notamment financières. Par ailleurs, le moins que nous puissions faire – vous l'admettrez sans mal, mes chers collègues – est d'écouter et de discuter avec les anciens combattants : c'est une façon de leur témoigner la reconnaissance que nous leur devons. Or, en nous réunissant dès ce 11 octobre, nous avons obligé les associations à venir le matin même de l'adoption en Conseil de ministres du projet de loi de finances ; ce qui, vous l'avouerez, pose problème. Je souhaite donc, monsieur le président de la Commission des finances, qu'un minimum d'échanges et d'information s'instaure entre les commissions pour que la mission soit, l'année prochaine, examinée dans de meilleures conditions.

À la suite des débats que nous avons eus, je tiens à affirmer que, bien que nous soyons tous conscients des efforts à faire compte tenu de la situation des finances publiques, nous ne pouvons oublier ceux et celles qui ont combattu pour notre pays. C'est pourquoi j'aioeuvré avec les deux rapporteurs ici présents pour que la retraite du combattant soit revalorisée en 2011.

Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement n'a pas encore, semble-t-il, fait suite à la volonté de la représentation nationale quant à l'attribution de la carte du combattant au titre des Opérations extérieures, les OPEX. Vous allez, je l'espère, nous donner de bonnes nouvelles sur la publication du décret nécessaire à ce sujet. J'ai d'ailleurs l'intention, puisque les questions relatives aux anciens combattants sont désormais du ressort de la Commission de la défense, d'instituer une mission de suivi des textes et des crédits, à l'instar de ce que j'ai fait il y a une dizaine d'années pour les crédits de la défense. Je soumettrai cette idée lors d'une prochaine réunion de notre bureau.

Je donne à présent la parole au rapporteur spécial, Jean-François Lamour, puis au rapporteur pour avis de la Commission de la défense, Patrick Beaudouin. Je sais qu'ils ont beaucoup travaillé ensemble, et en concertation étroite avec tous les députés qui suivent ces questions. M. le secrétaire d'État pourra répondre à leurs interrogations.

PermalienPhoto de Jean-François Lamour

Si l'examen en commission élargie est intéressant pour une mission telle que celle-ci, nous nous réunissons à une date très avancée, pour ne pas dire inédite au regard du calendrier habituel : la Commission des finances a reçu lundi dernier le projet annuel de performances, et la grande majorité des réponses à mon questionnaire ne me sont parvenues qu'au milieu de la semaine dernière – et même ce matin pour la dernière d'entre elles. C'est donc un euphémisme de dire que les délais ont été brefs.

Le montant des crédits inscrits sur la mission s'élève à 3,3 milliards d'euros, dont 3,07 milliards inscrits sur le programme 169, destiné à la mise enoeuvre des droits des anciens combattants. Je constate que l'ensemble des droits à réparation des anciens combattants est garanti, avec l'inscription de 14,53 millions d'euros pour la revalorisation des pensions militaires d'invalidité, de la retraite du combattant et des rentes mutualistes, au titre de l'application du rapport constant. À ce propos, monsieur le secrétaire d'État, j'ai deux questions à vous poser : en quoi la version modifiée de l'indice de référence mis en place en 2010 prendra-t-elle mieux en compte les évolutions de la grille indiciaire ? Quand l'augmentation de 0,5 %, au 1er juillet dernier, du point d'indice de la fonction publique sera-t-elle appliquée à la valeur du point PMI ?

Les droits à réparation sont également garantis par l'inscription de 27,91 millions d'euros destinés à assurer l'extension, en année pleine, de la progression de 41 à 43 points d'indice de la retraite du combattant. Les anciens combattants vont également bénéficier de quelques avancées.

En ce qui concerne les OPEX, un projet de décret vise à prendre en compte la spécificité des opérations effectuées lors des missions d'interposition ou de maintien de la paix pour l'attribution de la carte du combattant. Quels effectifs sont concernés, et à quelle échéance ?

Par ailleurs, la loi du 5 janvier 2010, ainsi qu'un décret de juin 2010, prévoient une procédure d'indemnisation pour les personnes atteintes de maladies cancéreuses radio-induites résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants lors des essais nucléaires français. Une nouvelle action avait été créée en 2010 au sein du programme 169 afin d'identifier les crédits destinés à l'indemnisation des victimes de ces essais nucléaires. Cette action a bénéficié de l'inscription de 10 millions d'euros en 2010 et en 2011, crédits dont le projet annuel de performances indique qu'ils constituent des provisions. Quand le dispositif entrera-t-il en vigueur ? À quelle échéance les crédits seront-ils consommés ? Quel est le nombre de personnes concernées ?

D'autres avancées ont été obtenues, même si elles ne concernent pas les crédits de la présente mission : un décret paru en juillet dernier permet l'octroi de la campagne double pour les ressortissants du code des pensions civiles et militaires de retraite ayant servi en Afrique du Nord ; les pensions civiles et militaires de retraite seront entièrement décristallisées pour les personnes ayant passé au moins quinze ans au service de la France avant l'indépendance de leur pays d'origine, pour un coût annuel de 82 millions d'euros. Le processus de décristallisation engagé en 2007 pour les prestations du feu sera ainsi entièrement achevé.

Nous avons bien compris que ce projet de budget a été élaboré dans un contexte de nécessaire maîtrise des dépenses publiques, et que la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » participe pleinement à l'effort général visant à les réduire. C'est pourquoi, comme l'indique le projet annuel de performances, l'inscription de mesures nouvelles a été différée.

Depuis le 1er juillet 2006, la retraite du combattant est tous les ans revalorisée de deux points. Elle est ainsi passée de 33 à 43 points en quatre ans. Les anciens combattants sont conscients de l'effort budgétaire qu'une telle hausse signifie. Je pense néanmoins que, au nom du respect de nos engagements, cette dynamique ne doit pas être interrompue en 2011 : avec beaucoup de mes collègues, monsieur le secrétaire d'État, j'ai eu l'occasion de vous transmettre ce message et je me réjouis que vous l'ayez entendu, puisque vous avez déposé pour revaloriser la retraite du combattant d'un point à compter du 1er juillet 2011 un amendement qui permettrait de concilier les exigences de maîtrise des dépenses publiques et les promesses faites aux anciens combattants.

Je crois également qu'un effort supplémentaire doit être consenti en faveur des conjoints survivants des plus grands invalides, dont le taux de pension était de 12 000 points au moins : j'ai déposé un amendement en ce sens. Quels efforts le Gouvernement est-il prêt à faire pour améliorer la situation de ces personnes ?

En ce qui concerne les avancées, je souhaite évoquer le programme 158 et le rapport Audouin relatif à l'indemnisation des orphelins. Une commission nationale a proposé un nouveau cadre juridique, et vous êtes chargé, avec le ministre de la défense, de préparer un projet de décret pour remplacer et compléter les deux décrets existants. J'ai bien noté que l'élargissement du dispositif aux orphelins de tous les conflits ne saurait être envisagé, tant pour des raisons de principes que de coût. Où en est le projet de décret ? Quid du nouveau dispositif juridique et financier que vous entendez mettre enoeuvre ? Quelles seront ses modalités d'application ?

J'en viens à la réforme de l'administration des anciens combattants, qui aboutit notamment à la disparition de la DSPRS – la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale – et de ses dix-huit directions interdépartementales, ainsi que le transfert de ses missions à l'ONACVG, l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre, ou à d'autres organismes du ministère de la défense. Je me félicite que le calendrier fixé pour les transferts de compétences et les fermetures de site ait été respecté. Pouvez-vous rassurer l'ensemble de mes collègues sur les moyens dont disposeront ces organismes, notamment l'ONACVG, pour assurer un service de qualité ?

Je suis particulièrement sensible au sort des personnels qui doivent être reclassés. Au 31 juillet dernier, 67 % d'entre eux avaient trouvé une solution de reclassement ou partaient en retraite avant la fin des restructurations. Qu'en est-il aujourd'hui ? Ce taux a-t-il augmenté ? Des agents, notamment ceux de la direction interrégionale des anciens combattants de Montpellier, rencontraient des difficultés particulières : ont-elles été aplanies ? Je sais que le ministère de la défense fournit des efforts importants pour accompagner les agents de la DSPRS qui bénéficient du plan d'accompagnement des restructurations, mais il n'est pas toujours aisé, pour les intéressés, d'entamer eux-mêmes des démarches pour trouver un nouveau poste : je l'ai constaté en rencontrant quelques-uns d'entre eux au Val-de-Fontenay. Pouvez-vous nous assurer, monsieur le secrétaire d'État, qu'un accompagnement individualisé sera bel et bien assuré, notamment pour les cas les plus difficiles ?

S'agissant de l'organisation du ministère ainsi que du pilotage et du suivi budgétaire, la Cour des comptes, dans sa note d'exécution budgétaire, constate, pour les programmes 167 et 169, que l'organisation administrative fait intervenir de trop nombreux acteurs, du secrétariat général pour l'administration et la sous-direction du pilotage, en passant par les quarante-trois unités opérationnelles centrales du ministère de la défense et d'autres ministères par délégation de gestion, ainsi que tout un réseau d'ordonnateurs secondaires.

La Cour constate également, au vu de l'empilement des applications de gestion, que la qualité de l'information budgétaire est perfectible. Des réorganisations sont-elles prévues ? Elles induiraient probablement une baisse des dépenses, peut-être imputées sur des programmes support plutôt que sur la présente mission.

J'en viens enfin à la Journée d'appel et de préparation à la défense, la JAPD, qui deviendra la Journée défense et citoyenneté à compter du 1er janvier 2011, dans le cadre de la restructuration de la direction du service national. Pouvez-vous faire le point sur les restructurations en cours ? Le soutien apporté par les bases de défense fonctionne-t-il ? La mutualisation des moyens, notamment au sein des établissements du service national, est-elle déjà mise enoeuvre ? Quel premier bilan tirer des ces restructurations ?

PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

Alors qu'un récent sondage plaçait le secrétariat d'État aux anciens combattants parmi ceux que les Français supprimeraient en premier, je suis heureux que cette première commission élargie, qui sera, j'en suis certain, riche et animée, nous donne l'occasion de réaffirmer la place émérite qu'occupe le monde des anciens combattants dans le coeur et la mémoire de nos compatriotes.

Si nous y sommes tous attachés pour les valeurs qu'il fait partager et la mémoire qu'il nous transmet, le monde combattant n'appartient pas au passé : il comprend aujourd'hui plus de 3,5 millions d'ayants droit, que viennent enrichir chaque année de nouveaux venus issus des conflits contemporains dont la spécificité sera bientôt prise en compte dans le futur décret relatif aux OPEX.

Une administration vivante et réactive s'occupe non seulement du monde combattant mais aussi, je le rappelle, du lien avec la nation et de la mémoire. J'ai procédé à l'audition de la plupart de ses responsables et je tiens à souligner l'étonnante capacité de réforme de cette administration qui, dans un cadre budgétaire très contraint par la nécessaire réduction des dépenses publiques, se transforme sans heurt tout en améliorant la qualité du service rendu.

Après deux années de préparation, le transfert des missions de la DSPRS vers l'ONAC et l'INI, la direction des ressources humaines et le service de santé des armées, est ainsi entré en début d'année dans sa phase opérationnelle. Décidé en 2007, ce transfert doit permettre, à la fin de 2011, la reprise complète des activités de délivrance de cartes, de versement des retraites, d'indemnisation et d'entretien des nécropoles, de la prise en charge des problèmes liés à l'appareillage, offrant ainsi un service unique de proximité au monde combattant qui permettra de réduire les délais de traitement tout en diminuant les ressources consacrées à ces actions.

Il s'agit là d'une réforme exemplaire car elle consiste à supprimer purement et simplement une direction d'administration centrale comprenant plus de 1 300 agents. En 2010, douze sites ont déjà été fermés et 70 % des agents de la DSPRS ont fait l'objet de mesures de reclassement. Tout au long de l'année, le personnel continuait naturellement à assurer le service aux anciens combattants en attendant la reprise par les services départementaux de l'ONAC. Le séminaire « Retour d'expérience » organisé la semaine dernière a permis de constater qu'aucun dysfonctionnement majeur n'avait été enregistré cette année, pas plus dans le transfert proprement dit que dans l'information du public.

La direction du service national procède également à une importante réorganisation de son administration : outre le déménagement à venir de sa direction de Compiègne à Orléans, cinq établissement du service national vont se substituer d'ici à 2012 aux directions interrégionales. Cette réforme comprend en outre le transfert des archives au service historique de la défense et la suppression de plus de 700 postes à l'horizon 2014 grâce à la mutualisation des moyens. La DSN va également mettre enoeuvre à partir du 1er janvier 2011 la nouvelle Journée défense et citoyenneté, qui comprendra une présentation du service civique tandis que les tests de détection de l'illettrisme seront maintenus ; s'y ajouteront d'ailleurs les premiers tests de santé de nos jeunes concitoyens. La coopération interministérielle devrait permettre de mieux partager les données et le suivi de ces jeunes par les différents acteurs de l'insertion.

J'en profite pour dire mon attachement au dispositif dit « défense deuxième chance » : outre que ses résultats sont en constante amélioration depuis cinq ans, ses coûts ont diminué de 14 % par jeune et par an. La formule est aujourd'hui victime de son succès, et je souhaite vivement que les capacités d'accueil des centres existants soient augmentées, comme à Marseille, et que d'autres centres soient ouverts dans les zones où ils sont encore absents – Midi-Pyrénées et Lorraine notamment. Il s'agit là d'une exigence républicaine d'égalité des chances.

L'année 2010 a été marquée par un cycle exceptionnel de commémoration. La direction de la mémoire, du patrimoine et des archives, la Délégation à la communication et à l'information de la défense et l'Établissement de communication et de production audiovisuelle de la défense ont également accompli un travail remarquable dont les célébrations du 18 juin ont constitué le point d'orgue.

S'agissant des mesures nouvelles, je me contenterai de quelques remarques. La Commission de la défense a reçu et entendu il y a dix jours les principales associations d'anciens combattants. Nous sommes sensibles à leurs principales préoccupations. Dans le laps de temps qui m'a été imparti, j'ai reçu individuellement celles et ceux qui le pouvaient. Pour eux, qui ont tant donné et qui sont, selon une expression que j'affectionne, des « citoyens plus », le projet de budget pour 2011 ne répond peut-être pas à toutes les attentes. Mais je sais également qu'ils sont conscients des efforts engagés par la majorité présidentielle depuis de nombreuses années déjà et des contraintes budgétaires très importantes auxquelles nous devons faire face. Plusieurs associations nous ont demandé, monsieur le secrétaire d'État, comment vous preniez en compte la décroissance naturelle des effectifs des anciens combattants dans l'établissement de votre projet de budget : pourriez-vous nous apporter quelques éléments d'information sur ce point ? Nombreux sont ceux qui estiment qu'il est possible d'élargir les financements à d'autres actions compte tenu de cette décroissance démographique.

Je me réjouis naturellement de la décristallisation totale des pensions mise enoeuvre par ce projet de loi de finances, car elle traduit concrètement la fraternité des armes vécue sur les champs de bataille. La France fait ainsi preuve d'une grande générosité à l'égard de ceux qui ont combattu pour elle. L'importance des sommes engagées, plus de 100 millions d'euros par an, mérite, je crois, d'être rappelée dans le contexte d'un budget en diminution. J'aimerais, monsieur le secrétaire d'État, que vous nous précisiez les mesures d'information que vous avez prévues auprès des ayants droit qui vivent loin de nos frontières.

La fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie, des combats du Maroc et de la Tunisie sera installée prochainement. Elle accomplira, j'en suis persuadé, uneoeuvre salutaire pour rapprocher les mémoires des deux rives de la Méditerranée. Quand commencera-t-elle ses travaux ? Comment son conseil d'administration sera-t-il constitué ?

Le décret accordant le bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord a été publié. Il tire ainsi pleinement les conséquences de la loi du 18 octobre 1999 reconnaissant la guerre d'Algérie, en alignant le sort de ses anciens combattants sur le régime de droit commun. Plusieurs associations d'anciens combattants nous ont néanmoins fait part de leur inquiétude quant aux modalités d'application de cette mesure : pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous les préciser ? Quel est par ailleurs l'état d'avancement du projet d'extension de la carte du combattant au-delà du 2 juillet 1962 ? Pourriez-vous également nous détailler les conditions d'application du futur décret d'attribution de la carte du combattant aux forces de soutien des OPEX ?

Après une augmentation de dix points en cinq ans, le projet de budget initial ne prévoyait pas d'augmentation du point de retraite du combattant ; grâce au travail de Jean-François Lamour, du président Teissier et de mon collègue Georges Colombier, ainsi qu'à l'implication de M. le secrétaire d'Etat, nous sommes parvenus, je pense, à trouver les manoeuvres – pardon, les marges de manoeuvres – pour financer un point d'augmentation l'année prochaine, ce qui permettra de préserver le cycle vertueux que nous avons ouvert en 2006 : notre commission proposera un amendement en ce sens.

Enfin, je suis également attentif à l'amélioration du sort des veuves des très grands invalides de guerre qui, par le temps qu'elles leur ont consacré, ont rendu de grands services à la nation et dont la pension de réversion reste insuffisante. Il serait donc souhaitable d'adopter l'amendement que je vous proposerai tout à l'heure sur ce point.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je souscris aux remarques de M. le président Teissier quant à l'organisation très serrée de nos travaux, et je lui donne acte des efforts qu'il a fournis auprès de la Conférence des président pour que notre commission élargie se réunisse plus tard ; mais le Gouvernement est maître de l'ordre du jour…

Seconde remarque quant au calendrier : le projet de régulation financière et bancaire étant examiné en séance publique à seize heures, je serai obligé de quitter la commission élargie ; Dominique Baert me remplacera alors pour la coprésider.

Par ailleurs, puisque l'on envisage de porter l'indice de 43 à 44 points, pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous indiquer le coût de cette augmentation pour l'État si elle intervenait, non au 1er juillet mais au 1er janvier ? Sous quels délais estimez-vous raisonnable d'atteindre les 48 points, puisque des engagements forts avaient été pris à cet égard ?

Enfin, je veux rappeler le rôle important que le Conseil constitutionnel a joué, dans le cadre de la question prioritaire de constitutionnalité récemment introduite par la révision constitutionnelle, en faveur de la décristallisation, sujet essentiel au regard de la reconnaissance que nous devons aux anciens combattants.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Messieurs les présidents et rapporteurs, je vous remercie.

Depuis plus d'un an, j'ai l'honneur et le plaisir d'assumer la responsabilité politique visant à assurer la reconnaissance de la Nation envers toutes les générations du feu. C'est ainsi qu'il me revient de moderniser la politique de la mémoire pour en faire mieux partager le sens au grand public et à la jeunesse mais, également, de veiller au renforcement du lien entre la Nation et ses armées. Pas un instant je ne doute de l'importance et de l'utilité de cette mission !

De ce point de vue, 2010 est une année emblématique. Je retiens, en particulier, la force de l'évocation du soixante-dixième anniversaire de l'Appel du 18 juin 1940 et l'écho remarquable qu'ont suscitées auprès de nos concitoyens l'ensemble des manifestations et créations littéraires, muséales ou audiovisuelles – je songe, en particulier, à Apocalypse, qui a réuni 13 millions de téléspectateurs, mais aussi au succès du film La Rafle et des nombreux ouvrages publiés ces derniers temps. Le sondage évoqué par M. Beaudouin, quant à lui, s'explique sans doute par la manière obsolète dont résonne le mot « ancien » dans la formule « anciens combattants » : parler de « mémoire combattante » me semblerait en l'occurrence autrement plus judicieux.

Qui qu'il en soit, le monde combattant est là et bien là, présent dans l'ensemble de nos territoires qu'il contribue d'ailleurs grandement à faire vivre : en effet, on ne dénombre pas moins de 1,4 million de titulaires de la carte du combattant, 3,6 millions de ressortissants de l'ONACVG, anciens combattants et victimes de guerre, 23 000 associations qui comptent 2,6 millions d'adhérents et de grandes fédérations dont j'ai pu mesurer le dynamisme – qu'il me suffise de nommer l'UFAC, la Fédération Maginot, l'UNC, l'Union fédérale ou la FNACA. Chacun, où qu'il se trouve, y apporte le meilleur de lui-même pour faire vivre les valeurs du monde combattant : solidarité, sens du devoir, attachement à la patrie, mémoire, fraternité unissant les compagnons d'armes et toutes les générations du feu. Tous méritent notre respect, notre reconnaissance et notre affection. Je l'ai dit lors du débat sur l'identité nationale : un pays sans histoire ni mémoire n'a pas d'identité, mettons-les en avant plus que jamais !

Quatre principes fondent ce budget.

Tout d'abord, ce dernier parachève la mise enoeuvre de la réforme du service rendu au monde combattant et lui confère l'intégralité des moyens nécessaires à sa réussite.

Je tiens à remercier MM. les rapporteurs pour l'appréciation positive qu'ils portent sur cette réforme majeure tout comme, d'ailleurs, Mme la sénatrice Janine Rozier et M. le sénateur Jean-Marc Todeschini : tous témoignent ainsi, par-delà les clivages politiques, combien cette réforme est correctement engagée.

Voilà un an, dans l'hémicycle, je prenais devant vous trois engagements…

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

…sur cette dernière, à laquelle j'ai d'ailleurs étroitement associé l'ensemble des organisations du monde combattant dont je remercie les présidents pour leur présence parmi nous aujourd'hui.

M. Régis Juanico. Ils sont moins nombreux que d'habitude…

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Premier engagement : tenir le calendrier prévu pour les transferts de mission réalisés dès le 1er janvier 2010 et les fermetures des services déconcentrés de la DSPRS, dont les premières sont intervenus au mois de mars. Cela a été fait, tout comme nous tiendrons le calendrier cadencé qui doit aboutir à l'achèvement complet de la réforme au 31 décembre 2011 – aucun retard n'est à signaler.

Le deuxième : faire en sorte que les transferts de mission s'opèrent dans les meilleures conditions humaines, financières et techniques possibles. Le retour d'expérience, sept mois après les premières fermetures de directions interdépartementales, est très positif : nous n'avons pas été confrontés à des difficultés majeures pas plus que n'avons assisté à une rupture dans la continuité ou la qualité du service rendu. En fin d'année, quand les outils informatiques seront à niveau, nous franchirons une nouvelle étape permettant d'accélérer et d'améliorer le traitement de toutes les demandes. Je salue, à ce propos, la mobilisation remarquable des services et des agents, qu'ils appartiennent à des directions qui ferment ou à des organismes repreneurs tels que l'ONACVG la sous-direction des pensions de la Rochelle, la Caisse nationale militaire de sécurité sociale de Toulon et le Service de santé des Armées.

S'agissant des moyens, je tiens à rassurer MM. les rapporteurs : les repreneurs, en particulier l'ONACVG, bénéficient en 2011 comme en 2010 du transfert de l'intégralité des moyens humains et financiers accompagnant le transfert des missions. Après avoir obtenu cet été la levée de la réserve de 6 %qui pesait sur la subvention de l'Office, j'ai veillé à ce que son budget 2011 – lequel augmente de 8 % – soit présenté sans réserve de précaution : l'ONAC, qui doit être le seul établissement public de l'Etat dans ce cas, sort donc renforcé de la réforme et devient le coeur du dispositif, le contrat d'objectifs et de moyens étant quant à lui pleinement appliqué.

Troisième engagement : la poursuite du reclassement des personnels de la DSPRS. En effet, les fermetures de plusieurs échelons et services déconcentrés ont causé en 2010 d'importants mouvements de personnels dont les postes étaient supprimés ou qui ne pouvaient pas suivre le transfert géographique de leurs missions vers de nouveaux services. Ces derniers bénéficient des mesures prévues par le plan d'accompagnement des restructurations (PAR) du ministère de la défense. La commission d'information et de concertation des personnels civils de la DSPRS s'est quant à elle réunie à onze reprises depuis le début de la réforme et les directeurs des services déconcentrés de la Direction ont pris contact avec les préfets afin de mieux prendre en compte ces situations, notamment dans le cadre des plateformes interministérielles régionales.

Au 30 septembre 2010, 70 % des agents de la DSPRS ont d'ores et déjà été reclassés alors que les plus grosses directions ne fermeront qu'au second semestre 2011. J'ajoute que ce chiffre inclut toutes les formes de reclassements : mutations, détachements, affectations, mises à disposition ou retraites. Le total des aides en faveur des personnels représente à ce stade 2,28 millions. Personne n'est laissé au bord de la route : la recherche d'une solution pour chaque agent se poursuit après la fermeture de sa direction et pendant tout le temps nécessaire. Dans la plupart des directions fermées, la quasi-totalité des personnels est d'ailleurs reclassée même si nous devons trouver des solutions pour des agents de Montpellier et Dijon – notamment, en raison de l'éloignement géographique des opportunités d'emploi. Quoi qu'il en soit, chacun dispose au moins d'une solution provisoire sous la forme d'une mise à disposition au bénéfice d'un service de l'Etat.

J'y insiste : je veux faire de la réforme du service rendu au monde combattant un modèle de mutation partagée et réussie pour le monde combattant, pour les finances publiques ainsi que pour le ministère.

Comme l'ont souligné les rapporteurs, pour être moins visible, la réforme de la direction du service national n'en est pas moins importante. Il s'agit, d'une part, d'une réorganisation complète accompagnée d'une très forte rationalisation des effectifs et des budgets, d'autre part, de la transformation de la Journée d'Appel et de Préparation à la Défense en Journée Défense et Citoyenneté (JDC) en application de la mission que m'avait confiée Hervé Morin. La JDC a bénéficié d'une pédagogie entièrement revue et modernisée dont le contenu est à la fois recentré sur sa mission principale – la sensibilisation aux enjeux de défense – et élargi aux questions de sécurité.

Elle est également améliorée sur trois points : renforcement du versant « citoyenneté », accompagnement auprès des organismes compétents des jeunes qui auront été détectés comme illettrés ou en difficulté, enfin, contribution au plan santé pour les jeunes. J'ajoute que cette JDC fonctionne dès à présent sur plusieurs sites et qu'elle sera généralisée en 2011.

S'agissant du soutien, s'il est trop tôt pour tirer un bilan de la mise en place des établissements du Service national ainsi que du soutien apporté par les bases de défense – lesquelles sont encore en cours de mise en place – le budget 2011 tient compte de ces évolutions puisque ne demeurent dans les crédits du programme 167 que les dépenses strictement liées aux JDC : module secourisme, alimentation et transport des jeunes, des animateurs et des encadrants, tout le reste étant désormais mutualisé dans le programme 178 de la mission Défense.

Les divers amendements prennent tous des gages sur le programme 167 et les crédits de la JDC. Je sais qu'il s'agit avant tout d'amendements d'appel pour demander au Gouvernement de prendre des mesures nouvelles sur le programme 169 mais il faut bien prendre conscience que le programme 167 ne dispose d'aucune marge : prenez sur la JDC et vous supprimerez ou reporterez ces journées, qui concernent 800 000 jeunes par an et qui sont, je vous le rappelle, une obligation légale ! Prenez sur la « mémoire » et c'est l'entretien des nécropoles, le respect dû à nos morts ou les commémorations qui seront sacrifiées !

Ensuite, ce budget préserve intégralement le droit à réparation des anciens combattants et victimes de guerre ainsi que l'ensemble de leurs avantages, y compris sur un plan fiscal. Il s'inscrit en effet dans une perspective financière inédite, les équilibres budgétaires et la nature même des arbitrages préparés ayant été rendus caducs par la crise économique et financière : passer de 152 milliards de déficit en 2010 à 92 milliards en 2011, voilà qui résume l'effort à consentir pour redresser une situation qui serait autrement intenable ! Si j'évoquerai dans un instant les conséquences de la priorité absolue donnée par le Président de la République et le Premier ministre à la maîtrise des dépenses publiques ainsi que sur l'absence de mesure nouvelle coûteuse au sein de notre budget, je tiens tout d'abord à insister sur un point fondamental à mes yeux : aucun droit acquis par les anciens combattants et victimes de guerre ni aucun avantage ne seront remis en cause ou modifiés, les avancées de l'an passé et de cette année demeurant intégralement financées.

En matière fiscale, si les avantages légitimes consentis au monde combattant – demi-part fiscale, avantages de la retraite mutualiste du combattant, de la défiscalisation des PMI et de la retraite du combattant – ne sont donc pas remis en cause, chacun comprendra toutefois que les demandes de hausse du plafond – pour la rente mutualiste du combattant – ou d'abaissement en dessous de 75 ans de l'âge ouvrant droit à la demi-part fiscale ne sont pas réalisables.

S'agissant du rapport constant, monsieur Lamour, l'article L. 8 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre demeure la référence : il n'est pas question de changer ce mécanisme qui permet de réviser la valeur du point de pension militaire d'invalidité (PMI) proportionnellement à l'évolution de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l'État tel que défini par l'INSEE, à la date de cette évolution.

Depuis le 1er janvier 2010, « l'indice des traitements de la fonction publique » de l'INSEE, qui servait jusqu'alors au calcul de la valeur du point PMI dans le cadre du rapport constant, a été remplacé par « l'indice de traitement brut - grille indiciaire » publié conjointement par l'INSEE et le service statistique de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP).

Ce nouvel indice, trimestriel, nécessite un délai de mise à jour un peu plus long que le précédent indicateur mais son évolution a été comparable pendant la période 2001-2009. Comme cela était le cas auparavant, à chaque publication de la nouvelle valeur de l'indice et en cas d'évolution de ce dernier, un arrêté sera pris pour revaloriser la valeur du point de la PMI. Ceux qui en bénéficient, ainsi que ceux qui perçoivent la retraite du combattant, recevront le cas échéant un rappel. L'utilisation du nouvel indice sera neutre dès la fin de l'année 2010, dès que la période de transition liée au passage d'un indicateur mensuel à un indicateur trimestriel sera terminée. Bien entendu, la revalorisation de 0,5 % des traitements de fonctionnaires intervenue au 1er juillet 2010 sera appliquée, dès le nouvel indice validé, par un arrêté pris conjointement avec mon collègue François Baroin, avant la fin de l'année, avec rattrapage au 1er juillet.

S'agissant de l'action sociale de l'ONACVG, je souligne avec force que la subvention de l'Etat est maintenue à son niveau de 2010. En particulier, la dotation de cinq millions destinée à financer l'allocation différentielle en faveur des conjoints survivants (ADCS) est reconduite et sanctuarisée dans le budget de l'Office. L'état de la consommation de l'enveloppe 2010 d'une part et les prévisions pour 2011 d'autre part – compte tenu des réévaluations probables des divers minima sociaux – ne permettent pas de relever le montant de l'ADCS au 1er janvier – lequel s'élève aujourd'hui à 817 euros, ce qui représente une progression de 48 % depuis 2007. En revanche, si des marges devaient apparaître, je proposerais au Conseil d'administration de l'ONACVG une revalorisation avant la fin de l'année – certaines hypothèses de calcul permettent notamment de penser qu'un relèvement à 834 euros serait ainsi envisageable.

S'agissant du droit à réparation des conséquences sanitaires des essais nucléaires français, la loi du 5 janvier 2010 permet d'indemniser les personnes – militaires, travailleurs civils, populations civiles – qui ont résidé dans des zones définies par le texte au Sahara ou dans le Pacifique et qui présentent des pathologies cancéreuses considérées comme radio-induites. Un comité d'indemnisation composé notamment de scientifiques de haut niveau examine les dossiers et présente au ministre de la défense un projet de décision d'indemnisation ou de rejet. Ce dispositif est désormais opérationnel : le décret d'application de la loi pris le 11 juin 2010 comporte la liste des 18 pathologies prises en compte, définit précisément les zones d'exposition et indique la procédure applicable aux demandes d'indemnisation ainsi que les voies de recours.

J'ajoute que les membres du comité d'indemnisation présidé par Madame Aubin, conseiller d'État, ont été nommés par un arrêté du 3 août 2010. Parallèlement, une structure administrative dédiée s'est mise en place – il s'agit du secrétariat de la commission d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (SCIVEN), installé à Arcueil – laquelle a commencé à examiner les premiers dossiers déposés, environ 150 à ce jour. Une provision de dix millions est inscrite en loi de finances au programme 169 pour couvrir les premières indemnisations et les dépenses liées au fonctionnement du dispositif – je songe, notamment, aux frais d'expertise ; elle a vocation à être abondée en cours de gestion si elle se révélait insuffisante pour couvrir les besoins.

Par ailleurs, ce budget est durement marqué par la nécessité impérieuse de rétablir les finances de l'État et ne bénéficie donc d'aucune mesure nouvelle coûteuse, l'effort pour la réduction du déficit public devant être partagé.

Comme tel, ce budget est donc responsable. Je comprends la surprise du monde combattant et sa déception …

M. Pascal Deguilhem. Le mot est faible !

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

anciens combattants. …quant à l'absence de revalorisation de la retraite du combattant en 2011. Je sais que l'an passé, dans l'hémicycle, la question était celle du rythme pour atteindre les 48 points en 2012.

Lors de l'élaboration du budget pour 2011, j'ai bien sûr plaidé pour une augmentation de trois points, via l'utilisation des marges dégagées par la déflation démographique. Vous imaginez bien en effet que la démographie est un des paramètres dont nous tenons compte dans la construction du budget. Mais, conformément à l'arbitrage rendu par le Premier ministre, la décision prise par le Gouvernement au vu d'une situation générale qui bouleverse tous nos repères, pour le budget des anciens combattants comme pour les autres, a été d'affecter toutes les économies « naturelles » à la réduction des dépenses. Je le dis donc clairement : il n'y a pas de marge de manoeuvre pour augmenter de trois, ni même de deux points la retraite du combattant en 2011.

Le devoir de vérité que nous avons envers les anciens combattants nous impose de rappeler que le Gouvernement qui se résout à cet arbitrage difficile est le seul qui ait augmenté de 36 % en quatre ans la retraite du combattant. Seul le cas de force financière majeure a fait reculer le Gouvernement, dont la volonté de poursuivre la revalorisation reste intacte.

C'est pourquoi, avec les rapporteurs Jean-François Lamour et Patrick Beaudouin et le Président Teissier, nous avons travaillé à une hypothèse qui préserve l'élan impulsé, mais qui soit réaliste financièrement : nous sommes tombés d'accord sur la possibilité d'accorder un point de hausse au 1er juillet 2011. La dépense, de 4,7 millions d'euros en 2011 et 18,44 millions d'euros en année pleine pour 2012 et 2013, est précisément gagée sur des économies identifiées par rapport aux prévisions effectuées pour construire le budget du programme 169, sur l'abondement aux rentes mutualistes du combattant et sur les PMI. C'est pourquoi le Gouvernement, en réponse aux amendements d'appel de MM. Beaudouin et Lamour, cosignés par 98 députés, dont votre président, a déposé ce matin un amendement qui porte à 44 points la retraite du combattant au 1er juillet 2011.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Mesdames et Messieurs les députés, nous devons constamment témoigner à nos invalides et à leurs ayants droit le respect et la solidarité de la Nation, en veillant à ce que leur prise en charge soit la plus satisfaisante possible. C'est la raison pour laquelle nous nous battons pour l'Institution nationale des invalides. C'est également la raison pour laquelle je partage votre souhait de voir améliorer la situation des veuves des plus grands invalides de guerre. Ces femmes ont renoncé à une activité professionnelle pour s'occuper de leur conjoint gravement blessé. Dans cette perspective, et après l'effort consenti l'an dernier, je suis prêt à donner un avis favorable à l'amendement de vos rapporteurs qui vise à instituer un supplément de pension de 360 points au bénéfice des conjoints des invalides dont le taux de pension est le plus élevé, soit 12 000 points, c'est-à-dire ceux dont la dépendance aux soins du conjoint est la plus forte, afin de limiter la chute de revenu de personnes qui ont souvent dû abandonner leur travail depuis des années. Le coût de cet amendement – 250 000 euros par an – est soutenable financièrement et ne conduit pas à donner plus aux veuves qu'aux invalides eux-mêmes.

Monsieur le rapporteur, le programme 158, qui met enoeuvre les mesures d'indemnisation des orphelins de déportés et de victimes de la barbarie nazie, est placé sous la responsabilité du Premier ministre, et non du secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. Suite aux travaux de la commission Block, nous avons, avec Hervé Morin, remis nos propositions au Premier ministre. Le 7 juillet, celui-ci nous a donné un mandat précis pour rédiger un décret unique, qui devra répondre à l'exigence de lisibilité et de correction des principales imperfections constatées, tout en restant fidèle à la spécificité d'une réparation liée à la notion de barbarie nazie. Un projet de décret sera proposé au Premier ministre à la fin de ce mois.

Mesdames et Messieurs, le budget que je vous présente prépare l'avenir.

Tout d'abord, et même si les crédits nécessaires ne sont pas inscrits au budget des anciens combattants mais à celui des pensions de retraite, il convient de souligner que l'article 100 du PLF institue, au 1er janvier 2011, la décristallisation totale des pensions militaires de retraite de nos anciens « tirailleurs ». Nous leur devons bien cette mesure de solidarité, à laquelle je m'étais engagé au lendemain de l'annonce faite par le président de la République, le 13 juillet dernier. Ce sont 32 000 personnes qui devraient bénéficier de cette mesure, dont le coût prévu est de 82 millions d'euros en 2011, 100 millions d'euros en 2012 et 125 millions d'euros en 2013, accroissement qui traduit une probable montée en puissance des demandes. En effet, si la revalorisation du point est automatique au 1er janvier 2011, la revalorisation des indices suppose une demande de l'intéressé visant à la reconstitution de sa carrière et à la prise en compte de sa situation de famille. Un décret d'application pris simultanément précisera les conditions d'information des intéressés, celle-ci ayant été jugée insuffisante par la cour des Comptes lors de la décristallisation de 2007. Je serai très attentif à ce point.

S'agissant des combats d'Afrique du Nord, la situation budgétaire ne permettant pas d'inscrire les crédits nécessaires à l'augmentation du nombre des retraites du combattant correspondant, la mise enoeuvre de la mesure d'extension de l'attribution de la carte du combattant pour quatre mois après le 2 juillet 1962, pourvu que l'intéressé y ait été présent avant le 2 juillet 1962, n'est pas prévue pour 2011. J'ai dit et écrit à de nombreuses reprises que j'étais favorable à cette proposition équilibrée, et je la mettrai enoeuvre dès que seront dégagées les marges financières suffisantes pour financer un surcoût de l'ordre de 4,6 millions d'euros par an.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Monsieur le rapporteur, cher Patrick Beaudouin, je souhaite lever tout de suite le malentendu qui nous oppose à certaines associations d'anciens combattants concernant le décret du 29 juillet dernier instituant le bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d'Afrique du Nord.

Le bénéfice de campagne prévu au Code des pensions civiles et militaires de retraite, le CPCMR, permet de majorer pour la retraite la durée des services militaires accomplis en temps de guerre. Alors que la campagne simple permet de compter deux fois les services accomplis, la campagne double permet de les tripler. Pour les opérations qui se sont déroulées en Afrique du Nord, seule la campagne simple a été accordée dès l'origine.

PermalienPhoto de Jean-Claude Viollet

Elles n'étaient alors pas considérées comme guerre !

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Je précise que ce dispositif, qui s'applique aux fonctionnaires et aux bénéficiaires des régimes spéciaux assimilés, n'a d'intérêt que pour ceux qui n'ont pas encore le nombre de trimestres nécessaires pour bénéficier d'une retraite à taux plein. Pour les autres, cela ne change évidemment rien.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

La loi n° 99-982 du 18 octobre 1999 a substitué à l'expression « opérations effectuées en Afrique du Nord », l'expression « guerre d'Algérie » ou « combats en Tunisie et au Maroc » dans certaines dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. C'est pourquoi des associations ont demandé l'attribution de la campagne double aux ressortissants du code des pensions civiles et militaires de retraite ayant servi en Afrique du Nord. Par une décision du 17 mars, Le conseil d'État leur a donné raison.

Le décret que le Gouvernement a pris le 29 juillet dernier est absolument conforme à la décision du conseil d'État.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Surtout, il va au maximum de ce qui peut être fait par voie réglementaire.

On me dit que la condition de participation aux actions de feu et de combat posée par l'article 2 est trop restrictive et inapplicable.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Pourtant, elle satisfait strictement le principe d'égalité de traitement entre générations du feu et les exigences du conseil d'État, qui, dans un avis du 30 novembre 2006, avait demandé aux ministres chargés des anciens combattants et du budget, de définir « les circonstances de temps et de lieu » permettant d'identifier les « situations de combat » ouvrant droit à la bonification. Le décompte des journées de feu et de combat sera fait, à la demande des intéressés, au vu des journaux de marche dépouillés par le service historique de la Défense.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

J'entends aussi dire que l'article 3 priverait la mesure de tout effet. Elle lui donne au contraire une pleine efficacité, puisque le décret du 29 juillet 2010 permet de réviser toutes les pensions de retraite liquidées à compter du 19 octobre 1999, date de l'entrée en vigueur de la loi.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Comme parlementaires, vous savez très bien que la rétroactivité de ces dispositions avant le 19 octobre 1999 ne pourrait être assurée que par une loi.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

J'entends bien que certains sont déçus, notamment ceux qui ont liquidé leur pension avant le 19 octobre 1999

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

…en particulier les cheminots et les autres bénéficiaires de régimes spéciaux, qui sont partis en retraite à 55 ou 52 ans. Mais je vous rappelle, mesdames et messieurs les députés, que c'est nous qui réparons la carence de l'État dans l'application de la loi de 1999.

M. Michel Voisin. Eh oui !

M. Jean-Claude Viollet. C'est petit…

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

S'agissant de la mémoire des combats d'Afrique du Nord, j'installerai le 19 octobre prochain le conseil d'administration de la Fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie, des combats du Maroc et de Tunisie, qui, à l'instar des grandes fondations de mémoire de la Seconde Guerre mondiale, est appelée à devenir un centre de ressources de référence, non seulement de ressources documentaires mais aussi de recueil de la mémoire orale. Ce sera également une maison commune ouverte aux historiens et sociologues, auxquels elle offrira un espace de réflexion et de débat inscrit dans l'histoire du conflit, mais aussi du temps long et de l'espace méditerranéen. Il est temps, s'inspirant de l'exemple donné en 1963 par le Général de Gaulle et le chancelier Adenauer, de réconcilier les mémoires qui s'opposent encore s'agissant d'un conflit dont les zones d'ombre sont encore trop nombreuses.

Je voudrais achever ce propos en reliant par les fils de la mémoire combattante les générations du feu.

Ce budget rend hommage aux Poilus de la Grande Guerre puisqu'une mesure nouvelle de 1,5 million d'euros, reconductible en 2012 et 2013, permettra d'accélérer la rénovation de nos nécropoles afin que nous n'ayons pas honte de leur tenue lors du centenaire de la Grande guerre. Vous êtes d'ailleurs nombreux à me demander de consentir un tel effort en faveur des nécropoles de vos circonscriptions.

Il poursuivra, en axant l'effort sur la Résistance, le cycle commémoratif du soixante-dixième anniversaire de la Seconde Guerre mondiale, après l'année mémorielle exceptionnelle que nous avons portée autour de la bataille de France et du 18 juin, sans oublier le cinquantenaire des indépendances africaines.

Il ouvre grand les portes à la nouvelle génération du Feu, celle des OPEX, celle de nos combattants d'aujourd'hui dont le comportement magnifique fait honneur à notre drapeau partout dans le monde, en particulier en Afghanistan. En effet, le décret modifiant les critères d'octroi de la carte du combattant pour les OPEX, validé par le conseil d'État le 14 septembre, est en cours de signature. Il devrait permettre d'augmenter de 25 à 50 % le nombre de bénéficiaires de la carte du combattant.

C'est la relève du monde combattant que nous préparons là, ainsi qu'un lien plus fort entre nos soldats et la Nation. Vingt ans après la guerre du Golfe, il convient également de donner à cette longue génération des OPEX, qui commence avec la Corée, en 1950, la première OPEX d'après guerre, une dimension mémorielle, une cohérence, une unité, par-delà la diversité des opérations. Ce sera un chantier nouveau pour le ministère, auquel seront étroitement associés l'état-major des armées et la délégation à l'information et à la communication de la défense, la DICOD. Avec les OPEX, la mémoire rejoint le présent, nos engagements, et le lien présent entre l'Armée au combat et la Nation.

PermalienPhoto de Jean-Claude Viollet

Mes observations, monsieur le secrétaire d'État, porteront à la fois sur la méthode et sur le fond.

Quant à la méthode, le président Guy Teissier a justement fait remarquer que c'est la première fois que le budget des anciens combattants est examiné en commission élargie, et non dans l'hémicycle. Ce n'est pas là un point de détail à mes yeux. Le budget des anciens combattants n'est pas un budget comme les autres : il traduit un droit imprescriptible à réparation et un devoir de mémoire. D'autres l'ont dit avant moi : les anciens combattants ont des droits sur nous et sur la représentation nationale. Pour ma part, je m'honorais que nous débattions de ce budget dans l'hémicycle. Ce n'est pas un faux procès que je vous fais : c'est le constat d'un état de choses que je déplore.

Je déplore également les délais qui enferment l'examen de ce budget, comme d'autres, ou encore l'absence de bleu papier, le bleu dématérialisé ne nous ayant quant à lui été accessible que la veille du dépôt des amendements. Siégeant depuis quelques années dans cette assemblée, je pense qu'il est temps que nous reconnaissions, les uns et les autres, que ce ne sont pas là de bonnes conditions de travail, surtout lorsqu'on affiche la volonté de renforcer les droits du Parlement…

Quant au fond, votre affirmation selon laquelle, face à la crise, les anciens combattants devraient participer à l'effort est sujette à débat. Non qu'on puisse nier l'existence d'une crise et la nécessité de consentir des efforts et de les répartir équitablement – même si le sens de cette notion est débattu sur l'ensemble de ces bancs. En revanche, à la question de savoir si les anciens combattants doivent être appelés à participer à cet effort, ma réponse est non : comment pourrait-on les appeler à la réduction des déficits publics alors qu'ils ont déjà tout donné, sans compter, jusqu'à payer le prix du sang ? S'il est légitime qu'ils contribuent à l'effort commun en tant que citoyens, en tant qu'anciens combattants ils ne sauraient être traités de la même façon que les autres.

C'est précisément parce qu'il ne s'agit pas d'un budget comme les autres que nous devons veiller à son exécution avec un soin particulier. En tant que traduction de la reconnaissance de la Nation envers les anciens combattants, ces sommes doivent être effectivement affectées aux anciens combattants. Quand, pour des raisons démographiques ou autres, ce budget n'est pas intégralement consommé, nous devons veiller à ce que les crédits soient redéployés au bénéfice des anciens combattants. Je salue de ce point de vue l'initiative du Président Teissier de charger une commission du suivi de l'exécution du budget de la défense, et je serais heureux si nous profitions de cet examen en commission élargie pour décider d'étendre cette initiative au budget des anciens combattants. Cela nous permettrait d'évaluer, année après année et en cours d'année, l'exécution de ce budget et apporter les corrections nécessaires pour que les anciens combattants bénéficient effectivement de l'intégralité de la reconnaissance votée par la Nation à travers la représentation nationale.

La retraite du combattant est précisément la première reconnaissance de la nation envers les anciens combattants. Sans vouloir entrer dans une polémique stérile, je voudrais rappeler l'engagement pris par la nation, et par nous tous, envers les anciens combattants : la retraite du combattant devait atteindre les 48 points d'indice en 2012. Or voilà que vous nous expliquez que du fait de la crise, elle ne serait revalorisée que d'un point en 2011. À ce rythme, comment serait-il possible d'atteindre l'objectif en 2012 ? Faut-il comprendre que c'est impossible dès lors que vous nous renvoyez à 2013 ? Comme on dit dans ma campagne, d'une manière certes un peu triviale, « on ne compte pas lesoeufs dans le cul de la poule » : tenons-nous en à 2011, au plus tard à 2012. Sera-t-on alors aux 48 points, oui ou non ? Si on ne doit pas y être, il faut le dire, et il faut expliquer pourquoi, alors que certains crédits pourraient être redéployés : nous le devons aux anciens combattants.

La question de la campagne double est un débat en soi. À l'inverse de la campagne simple, qui bénéficie à la majorité des anciens combattants, la campagne double n'est attribuée qu'aux anciens combattants fonctionnaires et assimilés pour le temps passé sous l'uniforme en temps de guerre. Or ce n'est que depuis 1999 que la loi reconnaît aux événements d'Algérie la qualité de guerre, et cela à l'initiative, comme vous l'avez vous-même souligné, de la majorité parlementaire de l'époque. Selon la décision du Conseil d'État que vous avez évoquée, le bénéfice de la campagne double devait être attribué à tous ces anciens combattants ayant participé à des opérations de guerre, à charge pour vous de vérifier la réalité de cette participation. Je doute qu'on dispose de tous les journaux de marche et que ceux-ci mentionnent toutes les actions de combat, le critère des quatre mois de présence ayant été retenu précisément parce qu'on était incapable de déterminer le nombre de jours passés au combat. Si les journaux de la gendarmerie sont les plus complets de ce point de vue, celle-ci n'était pas présente sur tous les lieux de combat. C'est pourquoi je vous avais demandé par le biais d'une question écrite de m'indiquer le nombre d'anciens combattants éligibles à la campagne double, et celui de ceux qui en bénéficieront effectivement.

En outre, la plupart de ces anciens combattants d'Afrique du Nord ayant liquidé leur retraite avant 1999 – cela concerne, non seulement des cheminots, mais également des infirmiers hospitaliers, des fonctionnaires de police, des postiers, etc. – qui bénéficiera en définitive de ce décret ? Là non plus, monsieur le secrétaire d'État, je ne cherche pas à vous faire un mauvais procès en soulevant cette difficulté, évoquée par le Conseil d'État lui-même. Je constate simplement que, du fait du traitement particulier qu'on réserve aux anciens combattants d'Algérie, très peu d'entre eux bénéficieront effectivement de la campagne double, à laquelle tous les combattants des autres conflits ont droit. Il me semble que tout ce qui touche à cette guerre est déjà suffisamment complexe pour qu'on n'aggrave pas encore ces difficultés. Si la loi de 1999 a omis de tirer toutes les conséquences de la reconnaissance de la situation de guerre, le Parlement ne devrait-il pas prendre l'initiative de rectifier le tir ?

PermalienPhoto de Dominique Baert

J'interviens au titre de porte-parole du groupe SRC. Nous sommes nombreux à considérer que cet examen précipité, quasiment en catimini, est indigne de la cause des anciens combattants. Les associations elles-mêmes ont exprimé leur profonde déception quant au montant des crédits et le rapporteur spécial a eu bien du mérite à mettre en exergue les points positifs de ce projet de budget.

À trois égards, ce budget est un budget de renoncement. Il s'agit d'abord d'une stratégie récessive et pluriannuelle : La baisse des crédits, de 3,89 % pour 2011 se poursuivra en 2012 et en 2013, puisqu'elle sera de 3,7 % puis de 3,2 %.

Par ailleurs, ce projet ne renferme pas d'avancée majeure. La plaquette que vous nous avez distribuée fait largement mention des chiffres de 2010 mais ne contient aucune annonce financière pour 2011.

Enfin, ce projet revient sur des promesses qui, d'évidence, ne seront pas respectées. Il est regrettable qu'il ait fallu attendre votre discours en commission, monsieur le ministre, pour apprendre l'existence de certaines avancées, dont nous ne pouvons que nous réjouir.

S'agissant de la retraite du combattant, la plaquette fait état d'un gel des 43 points. Cela écorne deux engagements, celui du Président de la République de passer de 43 à 48 points d'ici à la fin de la législature et celui que vous aviez pris en séance l'année dernière sur le rythme qui serait consacré à cette revalorisation, un passage de 43 à 46 points dans la loi de finances pour 2011 et de 46 à 48 points dans la loi de finances pour 2012.

Pour vous aider à faire aboutir cette revendication, je me permets ici d'établir un parallèle : passer de 43 à 46 points représente environ 27 millions d'euros, soit moins que la somme restituée à Mme Liliane Bettencourt au titre du bouclier fiscal…

Vous venez d'annoncer une augmentation d'un point. C'est un jeu curieux auquel nous assistons une nouvelle fois, puisque vous vous contentez de vous faire l'écho d'une proposition du rapporteur pour avis, en donnant suite à l'un de ses amendements. Patrick Beaudouin a d'ailleurs commis un lapsus révélateur, en parlant de « manoeuvres » au lieu de « marges de manoeuvre ». La ficelle, en effet, paraît un peu grosse…

Tout à l'heure, Jérôme Cahuzac vous a demandé ce que coûterait d'avancer la date d'entrée en application du point supplémentaire au 1er janvier. Si vous envisagiez une telle mesure, où pourriez-vous trouver les crédits nécessaires ?

S'agissant de la campagne double pour les anciens combattants d'Afrique du Nord et des conditions restrictives d'attribution pour les pensions liquidées après le 19 octobre 1999, dans la mesure où ceux qui avaient vingt ans en 1955 ont fait valoir leurs droits à la retraite en 1995, je m'interroge comme Jean-Claude Viollet sur la portée de ce décret et sur le nombre de personnes qu'il concerne effectivement.

La plaquette ne fait pas non plus mention d'une quelconque revalorisation de l'allocation différentielle en faveur des conjoints survivants. Vous avez évoqué l'idée de relever le plafond à 834 euros en 2011. Mais que vaut un tel engagement à quelques semaines d'un remaniement ? Comment comptez-vous financer cette mesure en cours d'année ?

Le seul point positif de ce projet de budget est l'avancée de la décristallisation. Mais le fait qu'elle ait été imposée par le Conseil constitutionnel relativise quelque peu sa portée…

Toute lyrique qu'ait été votre évocation de films à succès, celui-ci ne doit rien à l'action du secrétariat d'État… Ce budget est mauvais ; les arbitrages ne vous ont pas été favorables et sans doute en êtes vous conscient. Pour autant, j'espère que ce débat vous permettra de demander quelques marges de manoeuvre. Dans cet esprit, vous pourriez accepter nos amendements et faire ainsi en sorte que ce budget ne soit pas celui du renoncement.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Tout d'abord, sachez que je n'ai pas demandé à ce que le budget soit examiné dans le cadre d'une commission élargie plutôt qu'en séance publique. Fort de mes vingt-deux ans d'expérience parlementaire, je ne redoute pas les débats dans l'hémicycle, mieux je les apprécie. Cette procédure, qui m'a été imposée, ne nous interdit toutefois pas de débattre, en toute transparence.

Oui, j'ai dit que l'effort de réduction des dépenses publiques devait être partagé. Nul ne peut nier la réalité de cette crise. Ce contexte exceptionnel nous force à composer avec 80 milliards de recettes en moins, alors que nous disposions autrefois de 12 milliards de recettes supplémentaires. Pour autant, aucun droit acquis des anciens combattants n'est remis en cause. La baisse démographique permet une économie que nous affectons à la réduction des dépenses publiques.

L'honneur de notre Gouvernement est d'avoir augmenté la retraite du combattant de 36 % en quatre ans. Que ne l'avez-vous fait lorsque vous étiez au Gouvernement, qui plus est dans un contexte budgétaire favorable ? Cette année, nous consentons un effort supplémentaire, ce qui nous pousse à trouver à l'euro près les 9 millions nécessaires. Si nous avons choisi la date du 1er juillet et non du 1er janvier, c'est qu'il nous était impossible de gager un total de 18 millions.

S'agissant de la campagne double, seule une loi pourrait permettre d'appliquer la rétroactivité avant 1999. Nous ne sommes pas fermés à une telle hypothèse, monsieur Viollet. Par ailleurs, la demande étant individuelle – chaque dossier est soumis à l'examen d'une commission – il m'est difficile de vous donner un chiffrage.

L'allocation différentielle a été portée à 817 euros l'an dernier, grâce à l'action du Gouvernement. Une nouvelle revalorisation, que j'appelle de mes voeux, pourra avoir lieu en 2011, continuité de l'État oblige. Je suis par ailleurs certain que les services sociaux de l'ONACVG, dont nous avons augmenté de 8 % les crédits, veilleront à appliquer cette mesure.

PermalienPhoto de Jacques Desallangre

Monsieur le ministre, votre budget se réduit année après année comme peau de chagrin, ce qui est en quelque sorte un défi, le seul que vous releviez : depuis 2002, 35 % de votre budget se sont évaporés.

L'année dernière, le budget était amputé de 50 millions ; cette année, il le sera de 110 millions. Nous avons droit, chaque fois, au même numéro, celui d'un ministre et de rapporteurs satisfaits d'eux-mêmes, tentant de nous faire croire à un budget satisfaisant, bien qu'en baisse.

La semaine dernière, à l'occasion des questions au Gouvernement, vous avez affirmé que vous favoriseriez les solutions à budget constant. Mais les chiffres sont têtus. Répéter un mensonge n'en fait pas une vérité et les anciens combattants ne s'y sont pas trompés !

Vous vous étiez engagé à revaloriser de deux points par an la retraite du combattant, mais une telle mesure n'apparaît pas dans ce projet de budget. Vous faites ainsi sur le dos des anciens combattants une maigre économie – approximativement 8 millions d'euros, avec une valeur du point inférieure à 14 euros.

J'ai cru comprendre, chers collègues de la majorité, que vous aviez été autorisés à proposer une revalorisation d'un point au 1er juillet ; cessons les manoeuvres de dernière minute, abandonnons les comportements partisans et cosignons tous un amendement de revalorisation de 3 points au 1er janvier. Ainsi, vous aurez respecté votre parole et nous aurons la satisfaction d'avoir défendu la cause des anciens combattants.

Concernant l'attribution de la campagne double, après des années de tergiversation et divers rapports prônant d'attribuer le même régime aux anciens combattants d'Afrique du Nord qu'à leurs aînés, vous avez été contraint par le Conseil d'État de publier un décret.

Celui-ci est perçu comme une véritable insulte car il limite la révision des pensions en fixant de manière scandaleuse la date d'effectivité de cette mesure. De manière très injuste, la campagne double n'est accordée que par journée ayant donné lieu à une action de feu. Outre l'incertitude de la fiabilité des journaux de marche, c'est faire peu de cas de la réalité du terrain : pensez-vous que lorsque nous tendions une embuscade ou que nous traquions dans les montagnes les troupes adverses, nous n'étions pas en guerre ? Nous risquions notre vie, et quand bien même l'affrontement n'était pas direct, la menace était réelle et diffuse. C'était une réalité, et ce bien avant que la loi donnant enfin à cette guerre son véritable nom n'ait été votée.

Le Gouvernement a franchi la limite de la décence avec ce décret outrageant. Nous vous en demandons solennellement le retrait et exigeons la publication d'un nouveau décret qui assure à tous la campagne double, pour l'ensemble des périodes durant lesquelles nos soldats ont été engagés sur le terrain. C'est au Gouvernement qu'il revient de prendre cette initiative.

L'année dernière, face à nos demandes réitérées, votre prédécesseur s'était engagé à revaloriser le plafond de l'allocation différentielle. Vous l'avez fait, en utilisant la partie des crédits non consommés. Nous préférerions qu'une telle mesure soit inscrite dans le projet de loi de finances. J'en appelle à votre humanité : portons le montant de l'allocation différentielle au moins au niveau du seuil de pauvreté – 950 euros en 2010. Dans un pays tel que le nôtre, il n'y aurait pas de quoi pavoiser !

Ce budget ne comporte aucune mesure nouvelle. Les pensions militaires d'invalidité baissent de 4,5 %, alors qu'en dix ans, la valeur du point de la fonction publique a chuté de près de 10 % par rapport à l'inflation.

Le plafond de la rente mutualiste reste le même, bien que, depuis 2006, vos prédécesseurs se soient engagés devant les associations d'anciens combattants à atteindre les 130 points. Nous vous proposons de tenir ces promesses en augmentant, dès cette année, le plafond de 3 points supplémentaires.

Le dossier de l'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie n'a pas avancé : vous refusez toujours d'étendre le bénéfice aux pupilles de la nation dont les parents sont « morts pour la France ». Depuis les décrets imparfaits de 2000, 2001 et 2004, les pupilles de la nation, orphelins de guerre, ont le sentiment d'être laissés pour compte et ne voient pas leur souffrance reconnue. Nous avons déposé un amendement afin que ces oubliés de l'Histoire reçoivent un traitement égalitaire et qu'il soit mis un terme à cette profonde injustice.

Monsieur le ministre, il est encore temps d'échapper au jugement sévère que porteraient sur vous les anciens combattants. Allez au-delà des déclarations de bonne intention et des souhaits généreux, entendez nos propositions.

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Le monde des anciens combattants est conscient des contraintes qui pèsent sur l'élaboration de ce budget, mais il est déçu. Le Gouvernement ne tient pas ses engagements en matière de retraite du combattant et d'allocation différentielle, ce qui est mal ressenti dans une région comme la mienne, où les anciens combattants vivent avec de modestes retraites agricoles et sont, peut-être, plus attentifs que d'autres aux mesures de revalorisation.

Suite à l'arrêt du Conseil d'État, vous avez pris un nouveau décret pour l'attribution de la campagne double. À la complexité du calcul des journées passées au feu s'ajoute une difficulté supplémentaire, qui tient au type de guerre menée en Algérie. La notion de journée au feu est en effet restrictive et décrit mal l'action des unités, qui cherchaient le contact avec l'adversaire, sans pourtant parvenir à l'établir.

Enfin, les anciens combattants, dont beaucoup prennent part de façon bénévole à ses différentes commissions, sont très attachés à l'ONACVG et à son ancrage dans chaque département. De nombreux problèmes se sont fait jour, tels que ceux, liés à un dysfonctionnement informatique, qui accompagnent l'attribution de la carte du combattant. J'insiste pour que ces problèmes, qui créent un malaise profond, soient rapidement réglés.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Jamais le gouvernement en place à l'époque n'a pris les décrets d'application de la loi de 1999. Nous ne faisons que réparer cet oubli, ou cette carence de l'État. Pardonnez-moi de rappeler ce fait à votre mémoire et d'user d'un ton polémique dont je pensais que le thème de nos débats nous tiendraient éloignés…

Contrairement à ce que vous dites, le budget ne rétrécit pas. Les crédits diminuent en fonction de la démographie, qui veut, hélas, qu'entre 30 000 et 60 000 anciens combattants disparaissent chaque année. C'est précisément le fait démographique qui nous permet de participer à l'effort collectif de réduction des dépenses. Mais aucun des droits acquis n'est remis en cause.

PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Je vous prie d'excuser François Rochebloine, retenu en séance publique, et l'associe à mes propos.

La nouvelle procédure de discussion du budget est en cours de rodage. Pour autant, nous souhaiterions que l'examen des crédits aux anciens combattants – l'un des plus suivis par nos concitoyens – ait lieu dans l'hémicycle, cadre à forte charge symbolique, mieux adapté à la reconnaissance que nous devons à ceux qui ont versé leur sang pour la France.

C'est bien cette majorité, plus précisément sous cette législature, qui a permis des avancées notables. Pourtant, et comme chaque année, nous demandons à ce que le budget soit stabilisé et que les crédits dégagés du fait de la démographie soient utilisés à satisfaire l'ensemble des revendications du monde combattant.

Certes, les circonstances budgétaires sont exceptionnelles. Peut-être une partie seulement des 110 millions économisés du fait de la démographie pourrait-elle être consacrée à l'engagement principal pris par la majorité de porter l'indice de la retraite de combattant à 48 points. Les 18 millions que coûterait un relèvement de deux points représenteraient ainsi moins de 20 % de la somme dégagée. Même si cela a été critiqué, je comprends parfaitement qu'un tel relèvement n'intervienne qu'en milieu d'année, afin que la montée en charge soit progressive. En tout état de cause, une telle mesure ne grèverait pas de façon majeure le budget du pays.

La majorité s'était également engagée à revaloriser le plafond majorable de la retraite mutualiste. J'entends parfaitement la réponse que vous faites, monsieur le ministre, à ceux qui vous donnent des leçons sans avoir pris des mesures similaires lorsqu'ils en avaient l'occasion. Pour autant, les personnes concernées comptent parmi les plus défavorisés de nos concitoyens.

La majorité a relevé de façon progressive le montant de l'allocation différentielle, avec l'idée que celui-ci ne devait pas se situer au-dessous du seuil de pauvreté, tant il paraissait insoutenable que des personnes dont le conjoint a combattu pour la nation soient obligées de vivre avec si peu. Pourriez-vous indiquer, monsieur le ministre, le nombre actuel d'allocataires ? Cela nous permettrait de mieux évaluer l'effort budgétaire que représenterait une revalorisation de 17 euros, telle que vous l'envisagez, ou de 70 euros, que nous revendiquons.

Je trouve justes vos observations relatives à la campagne double, notamment sur les nouvelles dispositions que vous avez été amené à prendre. Les conditions d'ouverture des droits doivent en effet, comme vous l'avez exposé, être les mêmes que pour les autres générations du feu. Il reste – j'ouvre plutôt une piste de réflexion – que cette guerre-là n'est pas comparable aux autres. Même si je conçois la difficulté d'établir des critères, il me paraît difficile de considérer que des types de conflits radicalement différents ne donnent pas lieu à différentiation.

Monsieur le ministre, je souhaite aussi, à la fois comme parlementaire et maire de Drancy, ville symbole de la déportation, vous faire part de mon attente, ainsi que de celle de nombreuses familles et associations, à l'égard des orphelins. Le budget ne s'y intéresse malheureusement pas. Or, chaque semaine, ou presque, des demandes de renseignements me sont adressées, en tant que maire, sur la destinée de tel ou tel des 76 000 déportés passés par le camp de Drancy. La reconnaissance est nécessaire, et ce d'autant plus qu'elle relève plus du symbole que de la compensation financière. Ne pas s'y attacher, c'est marquer une réticence de notre pays à reconnaître sa part de mémoire, voire, parfois, de responsabilité.

Enfin, et je m'en réjouis, les efforts de décristallisation accomplis sous la précédente et l'actuelle législatures rendent à la France, auprès de ses anciennes colonies, une part de son honneur perdu. Comment ne pas être étranglé par la honte à la vue, dans leur propre pays, de personnes misérables, voire miséreuses, et arborant la Légion d'Honneur ?

Même s'il y a fallu un jugement, voire des films, et s'il est regrettable que l'action de la société ait précédé la procédure parlementaire, nous pourrons mieux regarder en face notre histoire et ces populations, qui, colonisées à l'époque, ont été appelées pour défendre et libérer notre pays. Ignorées trop longtemps par celui-ci, c'est cette majorité et ce Gouvernement qui leur auront rendu justice aux yeux de l'Histoire.

PermalienPhoto de Georges Colombier

Quoique n'étant membre ni de la Commission de la défense, ni de celle des finances, je voudrais remercier nos collègues Guy Teissier, Patrick Beaudouin et Jean-François Lamour pour les échanges menés et le travail réalisé pendant l'été.

Le remplacement de la discussion du budget dans l'hémicycle, en séance publique, par une discussion en commission a soulevé l'émotion et l'opposition des anciens combattants. Je m'associe aux propos de notre collègue Jean-Christophe Lagarde. Cette modification a ajouté un mécontentement à celui qu'avaient entraînées les restrictions budgétaires.

Les membres du groupe UMP sont tous persuadés que l'effort de maîtrise des comptes publics engagé par le Gouvernement est une nécessité absolue. Par ailleurs, tout en contribuant à l'effort commun d'assainissement des finances publiques, le projet de budget des anciens combattants garantit le maintien des droits à réparation des anciens combattants, y compris, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, dans sa dimension fiscale. Nous pensons cependant qu'un effort supplémentaire aurait pu être consenti en leur faveur.

Force est de constater que le budget des anciens combattants pour 2011 ne comporte comme seules mesures nouvelles que la décristallisation complète des pensions, les bonifications de campagne, l'indemnisation des victimes des essais nucléaires et celle de la quasi-totalité des incorporés de force dans les formations paramilitaires non combattantes nazies, à savoir le Reichsarbeitsdienst (Service du Travail du Reich) et le Kriegshilfsdienst (Service auxiliaire de guerre) – RAD-KHD –, à la suite de la convention signée le 17 juillet 2008.

La différence de traitement entre les anciens combattants français et africains était vécue comme une injustice. La décristallisations complète de toutes les pensions représente un effort exceptionnel. Je ne peux donc que me réjouir de cette disposition voulue et attendue, qui est à la mesure de la reconnaissance de l'engagement et du sacrifice des tirailleurs. Cependant, par son poids très lourd sur le budget des anciens combattants, elle compromet, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, d'autres marges de manoeuvre pour répondre aux attentes des anciens combattants. Je regrette cet aspect.

La retraite du combattant reste notre priorité à tous. C'est un véritable témoignage de reconnaissance de la Nation pour les services rendus ! Cette reconnaissance ne doit pas se limiter aux mots mais se traduire dans les faits. Le Président de la République, alors candidat, avait pris auprès du monde combattant l'engagement de porter la retraite du combattant à 48 points d'indice d'ici la fin de la législature, en 2012. Même si la maîtrise des comptes publics est une nécessité pour le Gouvernement, je trouve regrettable de rompre le cercle vertueux que notre majorité présidentielle, vous avez eu raison de le rappeler, a mis en place depuis 2005.

Nous sommes nombreux, dans notre groupe, à avoir consigné un amendement tendant à accroître d'un point le montant de la retraite du combattant. Monsieur le ministre, j'ai entendu votre position. Si un point de plus est toujours bon à prendre, la situation n'en suscite pas moins en moi un regret pour le monde combattant.

Vous connaissez fort bien le progrès indéniable qu'a constitué la création, en 2007, de l'allocation différentielle en faveur des conjoints survivants de ressortissants de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG). Au 1er avril 2010, cette allocation se monte à 817 euros mensuels. Cinq millions d'euros sont inscrits au budget 2011 pour en assurer le financement. En tant que représentant de l'Assemblée nationale au conseil d'administration de l'ONACVG, je fais confiance à son directeur général et à ses services pour procéder le plus vite possible, en cours d'année, et comme vous l'avez souhaité, à son augmentation progressive.

Un amendement a été déposé au profit des conjoints survivants de très grands invalides. Eu égard à la disproportion considérable entre la pension que percevait l'invalide et celle qui est versée au conjoint survivant, celui-ci se trouve fréquemment démuni lors du décès de l'ouvrant droit, alors qu'il doit faire face seul aux frais du ménage et aux difficultés causées par le décès. Cette disproportion est d'autant plus choquante que, dans presque tous les cas, le conjoint survivant a apporté ses soins à l'invalide, permettant souvent d'éviter une hospitalisation qui aurait été onéreuse pour la collectivité et créé pour l'invalide une difficulté supplémentaire. Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'appui que vous apportez à cet amendement.

Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, lancée en juillet 2007, l'ONACVG voit son rôle renforcé. Grâce à son important réseau de 102 services départementaux, il devient, au plan local, l'interlocuteur unique du monde combattant. Pour lui permettre de jouer pleinement ce rôle, le projet de budget pour 2011 maintient l'effort en sa faveur. En tant que représentant de l'Assemblée nationale au sein du conseil d'administration de l'ONACVG, je suis particulièrement attentif à cette évolution.

Lors de l'examen du budget des anciens combattants, le 2 novembre 2009, nous avions été plusieurs à vous interroger sur l'attribution de la carte du combattant aux anciens militaires qui ont servi en Algérie et peuvent justifier de quatre mois de présence sur place au-delà du 2 juillet 1962. Á cette occasion, vous vous êtes exprimé en faveur de l'attribution de la carte du combattant pour quatre mois de présence après le 2 juillet 1962 à condition expresse que l'arrivée sur le sol algérien soit antérieure au 2 juillet 1962, les militaires présents en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964 pouvant bénéficier du titre de reconnaissance de la Nation.

Je me réjouis que vous jugiez légitime cette revendication, qui, pour vous, trouve sa justification dans le fait que le climat d'insécurité qui régnait en Algérie a perduré au-delà du 2 juillet 1962, et que vous soyez donc favorable à sa satisfaction. Néanmoins, pour les raisons que nous savons, le budget pour 2011 ne comporte aucune disposition en ce sens. J'ai entendu votre réponse. Pour moi, il serait pourtant tout à fait indiqué d'accéder à cette demande qui ne concerne de surcroît qu'un nombre limité de bénéficiaires.

Je me réjouis en revanche que l'on prévoie d'attribuer la carte de combattant aux participants aux OPEX et que le décret soit maintenant, nous avez-vous dit, au stade des signatures.

S'agissant de l'attribution des bonifications de campagne, je me suis exprimé hier au congrès national de la FNACA. J'ai aussi entendu vos explications, monsieur le ministre.

C'est en raison de la difficulté à établir un lien de causalité entre la contamination par les essais nucléaires et des maladies qualifiées de « sans signature » que le ministre de la défense, Hervé Morin, s'est engagé dans un dispositif de reconnaissance et de droit à réparation pour les victimes. J'ai été très attentif au cheminement du texte. Il pose enfin le principe de la réparation intégrale des conséquences sanitaires des essais nucléaires français. La loi du 5 janvier 2010 et son décret d'application du 11 juin 2010, créent un dispositif spécifique, au profit non seulement des anciens militaires mais aussi des civils, pour la réparation des conséquences sanitaires des essais qui ont eu lieu entre 1960 et 1996 au Sahara et en Polynésie française. J'ai bien entendu, monsieur le ministre, que si 10 millions d'euros étaient provisionnés à cette fin, ces crédits seront abondés si nécessaire.

Je suis extrêmement soulagé que le « rabotage » des budgets cet été ait épargné la rente mutualiste.

La création de la « fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie, des combats du Maroc et de la Tunisie » répond à une attente de longue date. Elle sera installée le 19 octobre prochain et commencera ses travaux en 2011. Elle aura pour mission de faciliter l'accès du public aux archives, de favoriser les travaux scientifiques français et internationaux, et de transmettre la mémoire d'une période souvent mal connue. Nous serons très attentifs à ses initiatives et ses réalisations.

Enfin, monsieur le ministre, vous connaissez ma position sur la date du 19 mars 1962. Elle n'a jamais varié. Je renouvellerai ma demande auprès de vous afin que les autorités civiles et militaires puissent être présentes lors des cérémonies organisées localement à titre associatif. Même si cette date ne fait pas l'unanimité, très nombreux sont les anciens combattants, voire les citoyens qui considèrent que les autorités de l'État devraient assister aux cérémonies.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Je remercie MM. Jean-Christophe Lagarde et Georges Colombier du soutien des groupes du Nouveau Centre et de l'UMP. Monsieur Lagarde, je vous prie de transmettre à votre collègue François Rochebloine mon estime pour son action. Lui-même et Georges Colombier sont, depuis longtemps, assidus dans la défense des droits des anciens combattants.

L'allocation différentielle, monsieur Lagarde, concerne 5 000 personnes environ.

Les orphelins relèvent du programme 158 « indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale », géré par le Premier ministre. Je travaille actuellement, avec le ministre de la défense, à l'élaboration d'un décret prenant en compte vos demandes. Sans préjuger des décisions du Premier ministre, je note que le budget consacré aux orphelins est en augmentation de 20 millions d'euros.

Considérer que le secrétariat d'État aux anciens combattants n'aurait pris aucune part à Apocalypse, La Rafle, ou à d'autres actions, comme la commémoration de l'appel du 18 juin, est erroné. Nous consacrons au contraire un budget notable à ce type de productions : elles constituent des éléments de poids pour la mémoire. Nous ouvrons aussi l'ensemble des archives permettant leur élaboration. Avec le ministère de la défense, nous y contribuons donc collectivement.

Monsieur Colombier, les préfet et les personnels de l'administration de l'État ne sont pas empêchés de se rendre devant les monuments aux mort lors des cérémonies organisées le 19 mars. Une circulaire actuellement en vigueur les y autorise. Lorsque le contexte local s'y prêtait, certains préfets l'ont déjà fait.

PermalienPhoto de Jean-Claude Viollet

Il faut aller au-delà d'une simple autorisation !

M. Jacques Desallangre. Et les y inciter !

PermalienJean-Jacques Candelier Pour détendre l'atmosphère, je dirai

qu'en vous écoutant, monsieur le ministre, – avec beaucoup d'attention – j'ai pensé à cette réplique d'une célèbre partie de cartes, « Tu me fends le coeur ! » : oui, vous m'avez fendu le coeur !

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Mon accent vous gêne-t-il à ce point, monsieur le député, que vous croyiez nécessaire de faire cette référence pagnolesque ? C'est l'accent des Côtes de Provence, où a commencé la Libération de notre pays. J'en suis fier. Je ne l'ai jamais abandonné. Que l'on cesse donc de s'en moquer !

M. le président Guy Teissier. Le président de la Commission de la défense, qui partage cet accent, insiste sur le nécessaire respect ici de notre langue et de nos traditions.

PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

C'est seulement pour détendre l'atmosphère que j'ai fait allusion à Raimu, monsieur le ministre. J'apprécie votre accent chaleureux. Je parle moi-même avec l'accent chti.

Pour la première fois, le débat sur le budget des anciens combattants n'a pas lieu en séance publique, dans l'hémicycle, mais en catimini, dans une salle de l'Assemblée.

Cette décision est un symbole du renvoi à la marge des anciens combattants. La forme accompagne le fond. Les crédits de cette mission pour l'année prochaine sont en baisse de 3,89 %.

Autant je ne saurais dire qu'aucune action n'a été conduite ces dernières années, autant il faut bien convenir que, pour l'année prochaine, pratiquement aucune mesure nouvelle n'est prévue en faveur des anciens combattants.

La majorité ne devrait pas se féliciter du maintien des prestations et des droits à réparation attribués au monde combattant : le simple maintien des prestations est en réalité un net recul par rapport, d'une part, à l'inflation, d'autre part, aux engagements pris par le Président de la République.

Les députés communistes, républicains et du parti de gauche proposent donc d'amender ce projet de budget très insuffisant, dans les limites bien sûr du cadre restreint qu'impose l'article 40 de notre Constitution. Si celui-ci nous empêche d'augmenter globalement les dépenses, la diminution continue du nombre des anciens combattants fait qu'un simple maintien constant des crédits, d'une année sur l'autre, par le Gouvernement, permettrait de satisfaire leurs revendications légitimes.

Ce n'est pas la voie qui a été choisie. En le déplorant, je ne pense pas être isolé. J'ai même l'impression que ce projet de budget met la majorité particulièrement mal à l'aise. En attestent les tentatives pour accorder quelques miettes de dernière minute, notamment pour accroître d'un point, ou plutôt d'un demi-point, la retraite du combattant.

Mesdames et messieurs de la majorité, les assemblées générales d'anciens combattants approchent. Il faudra rendre des comptes ! Nous ne sommes pas dupes du jeu auquel se livrent désormais habituellement majorité et Gouvernement.

Quant à nous, ce n'est pas un ou deux , mais trois points de plus que nous proposons pour revaloriser la retraite du combattant.

Tout est question de volonté politique. Ne nous cachons pas derrière le contexte économique et budgétaire. Prenons l'argent là ou il est ! Il est trop facile de dire qu'il n'y a pas d'argent pour les anciens combattants quand les plus riches sont épargnés grâce au bouclier fiscal.

Au lieu, comme il le faudrait, de revenir sur les cadeaux faits aux banques, aux plus riches et aux spéculateurs, le Gouvernement et sa majorité préfèrent s'en prendre aux fonctionnaires, aux retraités, aux collectivités territoriales, aux services publics – comme l'école et les hôpitaux – et, désormais, aux anciens combattants.

Par nos amendements, nous voulons au contraire renforcer les moyens financiers au profit des conjoints survivants d'anciens combattants les plus démunis pour que le montant de l'allocation différentielle atteigne 950 euros –soit le seuil de pauvreté tel que l'a calculé l'INSEE – ; financer réellement le bénéfice de la campagne double pour les anciens d'Afrique du Nord ; relever le plafond majorable de la rente mutualiste à 130 points d'indice dès 2011 ; augmenter la valeur du point des pensions militaires d'invalidité (PMI) de façon à les faire évoluer parallèlement au coût de la vie ; mettre fin à la discrimination dont sont victimes les pupilles de la Nation et les enfants de parents « morts pour la France ».

Le coût de ces justes mesures ne serait pas très élevé. Pour les financer, il suffirait, selon les propos du rapporteur général du budget lui-même, notre collègue Gilles Carrez, d'agir sur les recettes budgétaires. Depuis 2000, les diminutions de recettes fiscales – mesures relatives à l'impôt sur les sociétés, baisse de l'impôt payé par les plus riches – ont entraîné une perte de 100 à 120 milliards d'euros pour le budget de l'Etat. Ne faudrait-il pas penser à récupérer ces recettes ? Les députés communistes, républicains et du parti de gauche proposent une ample réforme fiscale. Il s'agit de faire rentrer tous ces milliards dans les caisses, d'en prélever d'autres sur les revenus financiers, – étant entendu qu'il n'est pas question de supprimer l'ISF – et de rétablir un impôt sur le revenu réellement progressif.

PermalienPhoto de Gilbert Le Bris

Monsieur le président de la Commission de la défense, je fais miennes vos remarques sur les délais d'examen des crédits des anciens combattants et le choix de la procédure d'examen en commission élargie.

Le budget des anciens combattants n'est pas un budget comme les autres. Cette conviction personnelle, profonde, est, si j'en juge par les interventions précédentes, largement partagée. C'est en effet le budget du droit à réparation, du sang versé, des douleurs subies, le budget du devoir de mémoire et celui de la gratitude de la Nation envers celles et ceux qui l'ont servie dans les heures sombres de son histoire.

Le droit au respect, l'un de ceux que les anciens combattants ont sur nous, passe par l'examen des crédits qui leur sont consacrés dans une enceinte à forte valeur symbolique, psychologique, historique : l'hémicycle du Palais-Bourbon. Même si la salle où nous sommes réunis est fonctionnelle, elle n'est ni le lieu de l'histoire parlementaire de notre pays ni celui de l'Histoire en marche qu'élaborent nos délibérations. Je souhaite donc que la discussion de ces crédits revienne dans l'hémicycle.

Je répugne aussi à l'utilisation qui est faite de cette terrible et implacable loi biologique et démographique. Les crédits budgétaires laissés sans emploi par la disparition des ayants droits devraient être utilisés au bénéfice exclusif des anciens combattants, pour la satisfaction de leurs légitimes revendications. Au contraire, ils sont en diminution. Le droit à réparation ne doit pas être assimilé à une simple niche fiscale !

La retraite du combattant va passer de 43 à 44 points. Ce progrès, certes souhaitable, nous laisse loin des 48 points. Les modalités de cette augmentation me rappellent aussi le jeu qui se pratiquait autrefois au Parlement pour la fixation du budget de la SNSM, la Société nationale de sauvetage en mer. Le Gouvernement présentait un budget reconduit à l'identique par rapport à l'année précédente ; les députés votaient par amendement une augmentation qui satisfaisait tous et chacun. Je souhaite au contraire que dès sa présentation, le budget des anciens combattants comporte une visibilité susceptible de permettre à la retraite du combattant d'accéder très rapidement aux 48 points.

Il est bon que soit mis définitivement fin au déni de justice qu'est la cristallisation des pensions. En revanche, les procédures doivent être claires. En 2006, lors de la décristallisation des pensions militaires d'invalidité – l'une des prestations du feu – il avait été décidé qu'elle ne pourrait avoir lieu que sur demande des intéressés. L'État n'ayant ensuite pas organisé l'information adéquate, sur 9 594 ayants droits recensés, 510 demandes seulement ont été déposées ! L'application de la mesure dépendra donc des modalités de sa mise enoeuvre. Monsieur le ministre, comment envisagez-vous de diffuser l'information nécessaire ?

Deuxième point, depuis de nombreuses années, nombre de dossiers d'orphelins de la barbarie nazie sont bloqués, c'est-à-dire ni acceptés, ni refusés. Or ils concernent des pupilles de la Nation, des enfants de pères « morts pour la France ». Depuis la parution des décrets du 13 juillet 2000 et du 27 juillet 2004, des associations mènent des actions pour la justice et l'équité. Quelle action comptez-vous conduire pour que ces dossiers reçoivent, sinon des réponses positives – comme ce serait bien sûr souhaitable – au moins tout simplement des réponses ?

Eu égard à la conjoncture contrainte dans laquelle vous vous situez, j'évoquerai pour terminer non pas l'allocation différentielle de solidarité, l'indexation des pensions militaires d'invalidité, ou encore la rente mutualiste – qui le mériteraient pourtant – mais tout simplement la reconnaissance de la date du 19 mars 1962 comme date anniversaire de la fin de la guerre d'Algérie. Je ne comprends pas l'absence de consensus autour d'elle. Mais pour en tenir compte, monsieur le ministre, il serait souhaitable que comme pour la date du 5 décembre, une circulaire des autorités de l'État invite – et non pas simplement autorise – les autorité civiles et militaires à participer aux cérémonies du 19 mars 2011. Monsieur le ministre, envisagez-vous d'agir en ce sens ? Le coût de cette mesure de justice serait très modeste.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Monsieur Le Bris, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention. La France est diverse, et nous devons en être fiers. Pour ce qui est de la décristallisation, des procédures claires seront précisées par décret et nous enverrons un courrier d'information à chacun des ayants droit. Quant aux orphelins, un décret va être pris pour débloquer la situation. Enfin, ainsi que je l'ai déjà dit, la circulaire du 19 février 2009 fixe les conditions de participation des représentants de l'État aux cérémonies du 19 mars. Personne n'est empêché de s'y rendre.

PermalienPhoto de Robert Lecou

Mon collègue Dino Cinieri s'associe à cette question. Vous avez dit, monsieur le ministre, de bien belles choses sur la mémoire. Le budget que vous défendez avec passion et conviction est l'honneur d'une société digne, qui met l'humain au coeur de l'action. En traitant de mémoire, de solidarité et de reconnaissance, il s'adresse aussi à la jeunesse. Il est important d'amener les collèges et les lycées aux monuments aux morts. Il est important que les jeunes puissent, grâce aux anciens combattants, sentir que la mémoire permet de construire le présent.

Il s'agit donc d'un budget essentiel et si la réunion publique d'aujourd'hui est loin de se tenir en catimini, selon l'expression malheureuse d'un de nos collègues, je regrette tout de même qu'elle ne se tienne pas dans l'hémicycle, lieu du débat démocratique. Le symbole est important.

Dans un contexte budgétaire difficile, duquel chacun doit prendre sa part, il est normal que les crédits des anciens combattants diminuent : ils ne font que suivre la démographie. Un budget qui resterait constant, comme certains le réclament, deviendrait vite absurde. En revanche, il faut remplir les engagements qui avaient été pris. Comment arriverons-nous aux 48 points avec une augmentation d'un seul point cette année ? Porter d'une part l'allocation différentielle des veuves, qui ne sont pas très nombreuses, au seuil de pauvreté, d'autre part la rente mutualiste à 130 points me semblent des objectifs essentiels. Faisons le maximum d'efforts pour ce budget, qui est l'honneur d'une société digne.

Je me souviens avoir expliqué à des jeunes de 30 ou 35 ans qui portaient une revendication que l'on n'avait des droits spécifiques que lorsqu'on était dans une situation spécifique. Qui est plus fondé à le faire que les anciens combattants, au titre de leur don de soi, de leur temps et de leur santé ? Il s'agit donc d'un budget essentiel.

Les anciens combattants, monsieur le ministre, sont très attachés à leur office, l'ONACVG, dont la pérennité mérite d'être réaffirmée une fois de plus. Pouvez-vous les rassurer sur son avenir ?

PermalienPhoto de Régis Juanico

Je déplore à mon tour que cette réunion, pour la première fois, ne se tienne pas dans l'hémicycle, et j'ai une pensée amicale pour François Rochebloine, dont c'est aussi la première absence en vingt-deux ans… Je regrette également votre absence ce week-end, monsieur le ministre, au congrès national de la FNACA. Il serait intéressant d'en connaître les raisons, s'agissant de la première organisation d'anciens combattants.

Le budget pour 2011 est en baisse de près de 4 %, soit 110 millions. Circulez, il n'y a rien à voir ! Vous trouvez une justification dans le contexte économique et financier, mais la crise était pourtant bien commencée déjà lorsque vous avez pris des engagements, l'an dernier, dans l'hémicycle ! Avec quelques dizaines de millions seulement, il était possible de traduire en 2011 un certain nombre de ces engagements, notamment l'extension de l'attribution de la carte du combattant aux militaires arrivés en Algérie avant le 2 juillet 1962 et justifiant de quatre mois de présence avant ou après cette date. Cela représentait 4,6 millions : une somme, certes, mais tout à fait réaliste avant que le budget ne soit réduit de 110 millions !

Et il y a surtout la retraite du combattant, qui doit être portée à 48 points d'ici 2012. L'an dernier, j'avais proposé d'inverser le calendrier, en augmentant la retraite de trois points en 2010 et de deux points en 2011 et 2012 – car c'est maintenant qu'il faut agir : les bénéficiaires ne sont déjà plus qu'un million trois cent mille, deux cent mille de moins qu'en 2007 ! Nous avions été rejoints par le rapporteur spécial, Jean-François Lamour, qui avait cependant suggéré de procéder à l'augmentation de trois points plutôt en 2011. Vous aviez alors pris l'engagement de faire ainsi – vous aviez dit que nous pouvions le faire. Avec une augmentation d'un seul point en juillet, vous tirez à fond sur le frein à main ! S'il y avait un poste sur lequel faire un effort, c'était bien celui-ci. N'attendons pas qu'ils ne soient plus là !

Pour ce qui est de l'allocation différentielle pour les conjoints survivants, beaucoup de choses ont déjà été faites. Il faut maintenant parvenir à ne plus avoir une seule veuve en dessous du seuil de pauvreté, ce qui représente 940 points – les 834 que vous proposez n'étant que la traduction naturelle de l'augmentation de l'allocation de solidarité aux personnes âgées en avril prochain. Mais ne faudrait-il pas surtout étendre ce dispositif, au-delà des veuves, aux anciens combattants les plus modestes ?

Que comptez-vous faire par ailleurs pour donner leur place dans la mémoire nationale aux victimes de l'OAS ? Il n'y a aujourd'hui aucune plaque sur le domaine public qui rappelle leur souvenir. L'épisode de l'inscription, au mémorial du quai Branly, des noms des victimes civiles de la manifestation insurrectionnelle de l'OAS à Alger, le 26 mars 1962 – la manifestation de la rue d'Isly – a été vécu par beaucoup d'anciens combattants comme une humiliation. Vous me direz que les noms sont inscrits sur la colonne blanche, pas sur la bleue ou la rouge, mais peu importe : l'épisode a laissé des traces. La nation doit faire quelque chose pour reconnaître les victimes de l'OAS.

Enfin, les cérémonies du 19 mars sont incontestablement celles qui regroupent le plus grand nombre d'anciens combattants. Les autorités civiles et militaires doivent y être présentes, alors que la circulaire actuelle ne fait que leur en donner la possibilité. L'an dernier, en Rhône-Alpes – juste avant les régionales – le préfet de région avait visiblement donné des consignes aux préfets de département pour invoquer le devoir de réserve électoral. Et, bien que vous ayez levé ce devoir de réserve par instruction ministérielle, un certain nombre de préfets ne sont pas venus aux cérémonies… Cela aussi a été très mal ressenti. Comment pouvez-vous garantir la participation des autorités civiles et militaires aux cérémonies du 19 mars ?

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Merci, monsieur Lecou, de votre soutien. Je vous garantis que la réforme de l'ONACVG a assuré son avenir – la meilleure preuve en est l'augmentation de 8 % de son budget. Cette réforme a été bien comprise par l'Office, comme votre représentant au conseil d'administration, Georges Colombier, peut en attester. Elle a été votée à la quasi unanimité et j'ai pris des engagements forts en faveur de cette institution qui participe pleinement à la mise en place de la politique des anciens combattants.

M. Juanico me demande des comptes sur mon emploi du temps. Je n'ai pas à me justifier mais je lui rappelle que je suis un élu de terrain depuis 1971, sans discontinuité, et que j'ai beaucoup, beaucoup, de respect pour les anciens combattants d'Afrique du nord. Je suis d'une génération qui a vécu directement ce drame. J'ai été longtemps maire d'un village qui a accueilli les premiers harkis, j'ai partagé beaucoup de choses avec eux. Mais les rapports que chacun d'entre nous entretient, dans sa mission de mémoire, avec la direction des associations – la FNACA n'étant au passage pas la première d'entre elles : c'est la Fédération Maginot – doivent justement être basés sur la dignité. Or le président de la FNACA est allé trop loin dans ses propos à mon égard pour que cette dignité ne soit pas atteinte. C'est la seule raison qui explique mon absence de l'assemblée générale de dimanche, alors que je suis très attaché à la FNACA et aux problèmes de ses membres, et que j'aurais aimé les accompagner. Il y a une ligne jaune à ne pas franchir.

Bien sûr, les victimes de l'OAS figureront sur la colonne blanche du quai Branly, comme toutes les autres ! Aucune différenciation n'est faite. Toutes les victimes civiles seront inscrites sur la colonne blanche, à leur demande et après instruction. Je viens de signer la circulaire à cet effet, qu'on ne me fasse pas de procès ! Certains propos très durs ont été tenus à mon égard, que je n'admets pas – que je ne mérite pas. Soyez assuré que toutes les victimes seront inscrites après la procédure normale de vérification, comme il y a eu une procédure normale de vérification des victimes de la rue d'Isly.

PermalienPhoto de Michel Voisin

On doit le même respect à toutes les victimes civiles, mais on le doit également aux combattants. Inscrira-t-on aussi sur les colonnes les noms des harkis qui ont été décimés par le FLN ?

Comme chaque année depuis que nous la dotons, la ligne budgétaire consacrée aux victimes de la barbarie et aux orphelins de déportés est en augmentation. Comme chaque année, je demande donc si l'on s'était tellement trompé dans l'estimation de départ. Pouvez-vous nous donner la liste des dossiers en attente ?

Enfin, je dois soulever à nouveau la question des sépultures des soldats qui reposent à Cao Bang et sur la RC 4, au Vietnam, depuis la guerre d'Indochine. Il semble que les associations aient accompli de nombreuses démarches. En tant que président du groupe d'amitié France-Vietnam, j'avais pour ma part rencontré votre prédécesseur à ce sujet. J'avais aussi rencontré notre attaché de défense à Hanoi, qui semblait ne rien connaître du dossier – mais il venait d'arriver. Les associations ne demandent pas, comme à Dien Bien Phu, le rapatriement des corps mais un simple ossuaire, ou au moins un repos décent.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Tous les morts pour la France figurent sur les colonnes bleue et rouge du quai Branly. Les harkis aussi : ils sont morts pour notre drapeau. Quant aux disparus au Vietnam, je vais reprendre le flambeau. Rapprochez-vous de mes services. C'est une question qui mérite toute notre attention et qui doit avancer très vite.

PermalienPhoto de Marc Dolez

Vous déployez beaucoup d'efforts, monsieur le ministre, pour défendre un budget dont vous avez dit au détour d'une phrase qu'il n'avait pas été arbitré dans le bon sens. Je reconnais volontiers que vous n'avez pas la tâche facile. Je vous reconnais aussi une certaine clarté : vous avez expliqué comment, pour le Gouvernement, le budget des anciens combattants est tout à fait comme les autres – qu'il n'y a pas d'exception à faire pour lui et que les anciens combattants sont appelés eux aussi à payer, en 2011, une crise qui n'est pas la leur.

Vous avez employé tout à l'heure l'expression de « déflation démographique ». Cela signifie qu'il y a de moins en moins d'anciens combattants chaque année et que, pour vous, l'économie ainsi réalisée doit servir à la réduction du déficit. Pourtant, il suffirait de maintenir les crédits de l'an dernier pour satisfaire l'ensemble des revendications des anciens combattants – et c'est maintenant qu'il faut le faire, si l'on veut que leur légitime droit à réparation se concrétise ! Il y a de la part du Gouvernement un cynisme certain à jouer la montre : plus il attend, moins il y aura de bénéficiaires…

En matière de carte du combattant notamment, vos propositions ne sont pas acceptables. L'augmentation d'un point à partir du 1er juillet représente 9 millions pour le budget 2011. Ne pas respecter l'engagement qui a été pris, c'est grave, d'autant que c'était possible en maintenant une partie des crédits supprimée par rapport à l'an dernier. Ce n'est pas rien, dans une République, de renier ainsi l'engagement solennel du Président de la République et celui de la représentation nationale. C'est en outre un mauvais traitement fait aux anciens combattants, dont vous avez expliqué à plusieurs reprise qu'ils méritaient respect, dignité et affection. Vous ne l'avez pas encore dit clairement mais il est évident qu'avec cette seule augmentation, l'engagement de parvenir à 48 points d'ici la fin de la législature ne sera pas respecté.

Enfin, je dois rappeler l'attachement indéfectible de beaucoup d'entre nous à la date du 19 mars 1962, seule date officielle possible de commémoration de la guerre d'Algérie. À défaut de l'instaurer, pouvez-vous préciser clairement que les autorités publiques et militaires n'ont pas simplement l'autorisation d'assister aux cérémonies, mais qu'elles ont l'obligation d'y participer ?

PermalienPhoto de Kléber Mesquida

Vous avez dit qu'aucun droit acquis n'était remis en cause. C'est heureux, mais en réalité il y a bien une récession du pouvoir d'achat des anciens combattants, puisque vous n'actualisez même pas leurs avantages au niveau de l'inflation. Vous avez bien parlé de « déflation démographique ». Je conçois qu'il y ait de moins en moins de bénéficiaires ; un certain nombre de collègues de la majorité reconnaissent néanmoins – à l'extérieur de cette enceinte – qu'il y a récession et qu'on ne répond pas aux aspirations du monde combattant. Mais lorsque nous, membres de l'opposition, vous posons ces questions, nous avons le sentiment de vous agacer : vous êtes obligé de nous resservir des arguments que nous connaissons – et que nous combattons. Nous ne sommes pas là pour flagorner, mais pour constater une réalité : ce budget, qui est celui de la mémoire et du respect, a subi non un coup de rabot, mais un coup de hache, puisqu'il est réduit de 110 millions d'euros, après 50 millions l'an dernier. On a beau nous expliquer qu'il a augmenté de 32 % depuis 2002, le Gouvernement a sabré dans vos moyens !

Quant à la retraite du combattant, la revalorisation au 1er juillet ne revient qu'à un demi point dans l'année budgétaire, puisque l'année fiscale commence le 1er janvier. Un demi point ne représente que 9 millions d'euros. On est loin de ce qui a été promis, sauf à repousser l'obtention des 48 points à l'horizon 2017 ou 2022, ce que nous ne pouvons accepter. La somme nécessaire pour un point d'augmentation est dérisoire par rapport à la baisse de ce budget.

Que les classes 54 à 59 bénéficient de la campagne double serait une mesure de justice puisqu'elles ont combattu.

L'allocation au conjoint survivant a été obtenue grâce à la ténacité des associations et des parlementaires. Vous avez dit qu'elle était sanctuarisée dans ce budget. Le paradoxe est que les veuves d'anciens combattants sont désormais mieux loties que les anciens combattants les plus démunis. Aussi demandons-nous l'extension de cette allocation différentielle à ces derniers. Lorsqu'on perçoit 817 euros – 834 à terme, dites-vous, mais seulement à certaines conditions – on est en effet en dessous du seuil de pauvreté.

La dotation de l'ONACVG augmente de 8 %. Mais c'est la traduction des transferts de charges du ministère, en aucun cas d'une augmentation du budget de l'Office.

Je ne fais certes que redire ce qu'ont dit mes collègues, mais je tenais à le faire, car les anciens combattants, quoique de moins en moins nombreux, méritent que l'effort budgétaire en leur faveur soit maintenu.

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

J'ai toujours plaisir à débattre et ne suis nullement agacé de vous entendre vous opposer à ce budget, Monsieur Mesquida – je l'ai fait moi-même lorsque j'étais à votre place. Cela me permet de vous rappeler que vous avez été au pouvoir de 1981 à 1986, de 1988 à 1993 et de 1997 à 2002. Quel a été votre plan d'évolution de la retraite du combattant dans ces périodes ?

PermalienPhoto de Régis Juanico

Vous ne pouvez nier ce que nous avons fait !

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Vous êtes donc mal placés pour mettre nos intentions en doute ! Vous savez que nous traversons une crise financière qui n'a pas d'équivalent dans l'histoire et qu'il faut réduire les déficits publics. Or malgré cela, nous ne touchons pas à un euro des droits des anciens combattants !

Je n'ai jamais parlé de « déflation démographique »…

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

J'ai dit que la démographie doit être prise en compte comme, par exemple, dans le calcul de la DGF.

Nous avons augmenté la retraite du combattant comme nul gouvernement ne l'a fait. Et nous poursuivons l'effort dans un contexte très difficile, pour ne pas briser la dynamique. Nous le ferons à compter de juin-juillet, car c'est toujours à cette période qu'intervient la revalorisation des droits ; et je pense que les anciens combattants apprécieront.

PermalienPhoto de Michel Voisin

Je rappelle à M. Juanico que depuis 1978, rien n'avait été fait pour la retraite du combattant ; et autant que je sache, ce n'est pas vous qui l'aviez mise en place !

PermalienPhoto de Didier Quentin

Je m'apprêtais à le dire !

À l'instar de Georges Colombier et d'autres collègues de mon groupe, je regrette que ce débat budgétaire – qui est l'un des plus suivis depuis les tribunes – n'ait pas lieu comme les années précédentes dans l'Hémicycle. J'espère donc que cette année restera une exception.

Je m'associe également à ce qu'a dit notre collègue Voisin à propos des harkis. Ce ne serait que justice.

Nous prenons acte de la revalorisation d'un point de la retraite du combattant, même si nous restons très attachés à l'objectif de 48 points. Il ne faudrait pas que l'horizon soit cette ligne imaginaire qui recule à mesure que l'on s'en approche…

Nous prenons de même acte du supplément de pension accordé aux conjoints survivants et aux plus grands invalides de guerre, et ce dans un contexte budgétaire très contraint.

S'agissant du devoir de mémoire je vous félicite – ainsi que votre administration – pour la très grande qualité du magazine du ministère : il mérite d'être largement diffusé.

Je vous interroge enfin à mon tour sur l'application du décret du 29 juillet dernier relatif à l'attribution du bénéfice de la double campagne aux anciens combattants d'Afrique du Nord. Ce décret prévoit que le bénéfice de la campagne double est accordé aux appelés et aux militaires d'active qui ont été exposés à des situations de combat au Maroc, en Tunisie, en Algérie entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962, pour toute journée durant laquelle ils ont pris part à une action de feu ou de combat ou subi le feu. L'article 3 précise que les pensions liquidées à compter du 19 octobre 1999 pourront être révisées en application du décret. Or la date de référence retenue rend impossible l'attribution du bénéfice de la campagne double aux blessés de la guerre d'Algérie. Tous les participants aux conflits d'Indochine, de Corée et du Golfe ont bénéficié de la campagne double pour toute la durée du conflit. Entendez-vous réexaminer les conditions d'application de ce décret avec les associations du monde combattant, dans le souci d'établir une égalité de droits entre toutes les générations du feu ?

PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Je vous remercie pour votre soutien en faveur de ce décret. Je vois mal en quoi les blessés ne seraient pas pris en compte, mais nous pouvons proposer aux associations de dresser un bilan de l'application du décret dans un an, pour réparer d'éventuels oublis.

Quant à l'horizon, je crois que nous avons le même – car cette France de la diversité, nous l'aimons que nous soyons de droite ou de gauche.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je vois aux sourires de tous que la conclusion du ministre est partagée !

Nous en avons terminé avec les questions. Merci, Monsieur le ministre, de nous avoir répondu si courtoisement – je n'ai pas ressenti chez vous le moindre agacement…

Je retiens à présent les députés de la Commission de la défense, afin que nous nous prononcions sur les crédits de la mission pour 2011.

La réunion de la commission élargie s'achève à dix-huit heures quinze.

Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,

Michel Kerautret© Assemblée nationale