La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
M. le président de l'Assemblée nationale a reçu, le 14 avril 2008, de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales une communication faite en application de l'article L.O. 179 du code électoral l'informant que, le 13 avril 2008, M. Dominique Souchet a été élu député de la cinquième circonscription de Vendée.
Monsieur le président, madame la ministre de la santé, mes chers collègues, cette proposition de loi visant à lutter contre les incitations à la recherche d'une maigreur extrême ou à l'anorexie permettra à l'Assemblée nationale – sans doute pour la première fois, et c'est tout un symbole – de se prononcer sur cette question majeure trop longtemps occultée dans le débat public.
Au déni qui caractérise si profondément cette affection, à la souffrance et à l'isolement des malades, au sentiment d'impuissance qui envahit souvent leurs proches, il est temps, en effet, d'opposer un signe fort marquant la prise de conscience et la mobilisation des pouvoirs publics contre ce fléau.
L'extrême minceur et l'anorexie ne sont pas seulement un grand enjeu de santé publique, elles constituent aussi, comme vous l'avez très justement souligné, madame la ministre, « le symptôme d'une sorte de malaise dans la civilisation, sur lequel les médecins mais aussi les philosophes, les sociologues et les psychologues auraient beaucoup à dire et beaucoup à nous apprendre ».
Avant de vous présenter l'objet et la finalité de cette proposition de loi, je voudrais commencer par souligner très clairement ce qu'elle n'est pas.
Il ne s'agit en aucun cas de stigmatiser des malades ou encore de faire croire qu'à lui seul, un texte de loi pourrait répondre à l'ensemble des questions soulevées par cette maladie, notamment celles relatives à sa prise en charge, qui relève bien évidemment, en premier lieu, des professionnels de santé.
S'il propose de créer une nouvelle incrimination pénale, ce texte n'a pas simplement une vocation répressive, il a aussi une vocation dissuasive. Il s'inscrit par ailleurs dans la continuité d'une politique globale, équilibrée et particulièrement volontariste destinée à mieux protéger la santé des jeunes, s'agissant tout particulièrement des troubles du comportement alimentaire tels que l'anorexie ou l'obésité.
Il ne s'agit évidemment pas non plus de laisser penser que les incitations à l'anorexie, telles que celles que l'on retrouve sur certains sites Internet, ou, plus généralement, l'environnement socio-culturel seraient les seules et uniques causes de l'anorexie, tant est complexe cette maladie psychique, dont le diagnostic n'est d'ailleurs pas récent, loin s'en faut – il y a fort longtemps qu'elle a été décrite. Notre assemblée n'a évidemment pas vocation à se substituer au travail, ô combien essentiel, des médecins, des psychothérapeutes ou encore des psychanalystes pour la compréhension de cette pathologie. Il ne s'agit en aucun cas de prendre la place des équipes médicales.
En revanche, le Parlement est pleinement dans son rôle lorsqu'il entend prévenir certaines dérives afin de mieux protéger la santé des plus vulnérables, mais aussi, au-delà du problème particulier de l'anorexie, lorsqu'il s'interroge sur l'ensemble des problèmes liés aux représentations du corps, et tout particulièrement de la femme, dans notre société.
L'anorexie et la recherche d'une maigreur extrême sont en effet des problèmes majeurs en termes de santé publique car cette maladie est particulièrement grave et invalidante. Je rappelle que l'anorexie est un trouble du comportement qui se caractérise par un amaigrissement important, un rapport angoissé à l'alimentation, une obsession pour un surpoids supposé et une déformation de l'image corporelle. En France, de 30 000 à 40 000 personnes en seraient aujourd'hui atteintes, dont environ 90 % de femmes, essentiellement des jeunes filles. Les répercussions sanitaires de l'anorexie, à court ou à long terme, sont souvent très graves : ostéoporose, anémie, perte des capacités physiques et musculaires, voire détérioration des organes vitaux et problèmes cardiaques. Le taux de mortalité serait ainsi l'un des plus importants parmi les troubles psychiques : à l'échéance de dix ans, il atteindrait 5 % et avoisinerait 20 % à plus long terme.
Dès lors, la valorisation excessive de la maigreur, voire de l'anorexie, qui tend à se développer depuis quelques années apparaît extrêmement préoccupante. L'anorexie est une affection psychique, dont l'analyse des causes, sans doute multiples, est particulièrement complexe. De manière générale, certains spécialistes suggèrent que le comportement alimentaire pourrait dépendre de facteurs individuels, en particulier psychologiques, qui agissent en étroite interaction avec des facteurs environnementaux et socio-culturels.
Au-delà du problème particulier de l'anorexie, la représentation du corps dans notre société soulève de nombreuses questions. La pression sociale autour de l'image du corps féminin, véhiculée notamment par les médias, contribue au développement de pratiques alimentaires et corporelles abusives qui, selon certaines analyses, pourraient même favoriser chez certaines femmes vulnérables le début de conduites alimentaires pathologiques consécutives à l'instauration d'un régime. Et comment ne pas s'interroger sur ces troubles du comportement alimentaire dans une société de consommation qui semble parfois valoriser à l'excès l'image, le contrôle de soi, la minceur, la recherche de la performance ou l'éternelle jeunesse ?
Par ailleurs, il est très préoccupant de voir se développer des incitations à une maigreur excessive de façon directe ou à travers différents médias, notamment les sites Internet « pro-anorexiques ». Les membres du mouvement « pro-ana » y font l'apologie ouverte de l'anorexie et diffusent des recommandations particulièrement inquiétantes, qui peuvent conduire certaines personnes vulnérables à adopter des comportements alimentaires dangereux. Dans les cas les plus extrêmes, des pratiques à la limite de la manipulation mentale ne sont pas sans évoquer certaines dérives sectaires.
Faut-il dès lors continuer d'observer, impuissants, le développement incontrôlé de telles pratiques, qui mettent en péril la santé, voire la vie, des plus vulnérables, le plus souvent des mineurs, et, par notre silence, consentir à l'idée que l'on puisse faire de ces corps décharnés des icônes ? La réponse est clairement « non ». C'est pourquoi il apparaît nécessaire de renforcer la lutte contre les incitations à la recherche d'une maigreur excessive ou à l'anorexie.
À cette fin, la proposition de loi prévoit d'incriminer l'incitation à la recherche d'une maigreur excessive. Ainsi, « le fait de provoquer une personne à rechercher une maigreur excessive en encourageant des restrictions alimentaires prolongées ayant pour effet de l'exposer à un danger de mort ou de compromettre directement sa santé » sera puni d'une peine maximale de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
Cette formulation permet d'exclure du champ de ce nouveau délit les incitations à des pratiques alimentaires dont la finalité première n'est pas la recherche d'une maigreur excessive, telles que les jeûnes religieux, les actes à finalités thérapeutiques, les régimes diététiques ou les grèves de la faim revendicatives.
De plus, s'il apparaît que cette provocation a entraîné la mort de la personne concernée, les peines seront portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. L'échelle des peines apparaît ainsi cohérente et proportionnée à la gravité des actes commis, au regard notamment des peines prévues pour les délits de mise en danger d'autrui et de provocation au suicide.
En outre, si le délit est commis par voie de presse écrite ou audiovisuelle, les modalités de détermination des personnes responsables obéiront aux mêmes règles que celles actuellement prévues en cas de provocation au suicide.
Par ailleurs, deux amendements adoptés par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ont permis de clarifier et d'étendre le champ de la proposition de loi. Il est en effet apparu nécessaire d'introduire de nouvelles dispositions sanctionnant la publicité, quel qu'en soit le mode, en faveur de produits, objets ou méthodes préconisés comme moyens de parvenir à une maigreur excessive et qui ont pour effet de compromettre directement la santé d'une personne. Cette infraction serait également punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
Ainsi, la proposition de loi permettra de lutter non seulement contre les provocations directes à des comportements anorexiques, c'est-à-dire visant une ou plusieurs personnes déterminées, mais aussi, de façon plus large, d'incriminer clairement la diffusion de contenus, quel qu'en soit le support, qui préconisent des moyens de parvenir à une maigreur excessive, ce qui s'appliquera donc notamment à certains sites internet « pro-ana ».
Si la création d'une sanction pénale est un symbole fort, elle n'épuise évidemment pas l'ensemble des questions liées à la prévention et à la prise en charge de l'anorexie, et plus largement des problèmes posés par les représentations du corps dans notre société. La création de ce délit n'est pas une fin en soi, elle s'inscrit au contraire dans le cadre d'une politique globale visant à renforcer la protection de la santé des jeunes, en particulier des femmes.
Dans ce sens, plusieurs actions ambitieuses ont d'ores et déjà été engagées par le Gouvernement, à travers notamment le programme national nutrition santé et la présentation, en février dernier, du plan « Santé des jeunes », qui ont pour objectif de prévenir l'adoption de certains comportements alimentaires.
Je me félicite par ailleurs de la signature, le 9 avril dernier, de la Charte d'engagement volontaire sur l'image du corps et contre l'anorexie, préparée par le groupe de travail coprésidé par le professeur Marcel Rufo, pédopsychiatre, et le sociologue Jean-Pierre Poulain,...
...sous l'égide de Mme la ministre. Cette charte constitue en effet le premier engagement significatif des professionnels du mannequinat, de la communication, de l'habillement, de la santé et des pouvoirs publics dans ce domaine.
Il me semble cependant possible d'aller plus loin. C'est pourquoi je vous proposerai cinq amendements visant à renforcer le suivi médical des modèles ou des mannequins ; à prévoir qu'une photographie commerciale retouchée par un logiciel de traitement d'image ou tout autre moyen technique soit accompagnée de la mention « photographie retouchée », afin d'éclairer le consommateur sur ces pratiques qui conduisent à diffuser une représentation altérée de l'image du corps ; à veiller à ce qu'un suivi régulier de l'indice de masse corporelle, soit réalisé en milieu scolaire et qu'un dépistage des troubles du comportement alimentaire soit organisé à l'occasion des visites médicales approfondies de prévention auxquelles sont soumis les élèves dans leur sixième, neuvième, douzième et quinzième année ; à prévoir qu'un enseignement spécifique sur les troubles du comportement alimentaire soit dispensé au cours des études médicales.
D'autres initiatives sont envisageables, sur lesquelles, madame la ministre, vous pourrez peut-être nous donner votre sentiment. Ainsi, des actions d'information et de sensibilisation sur l'anorexie pourraient être organisées à la condition de prendre en compte les caractéristiques particulières de cette affection. Il serait également intéressant de mener une grande enquête de santé publique pour mieux connaître les conséquences d'une extrême maigreur, en particulier à long terme. Par ailleurs, des structures telles que les maisons des adolescents pourraient être développées, afin de mieux dépister les troubles du comportement alimentaire, mais aussi d'apporter un soutien aux familles. Enfin, une initiative européenne pourrait être prise en ce domaine.
Pour conclure, mes chers collègues, je suis convaincue que nous devrions pouvoir nous retrouver aujourd'hui pour adopter cette proposition de loi qui permettra non seulement de prévenir certaines dérives, mais aussi, je l'espère, d'ouvrir un très large débat sur ce problème majeur en termes de santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, l'anorexie est devenue un véritable enjeu de santé publique. C'est pourquoi je tiens d'emblée à rendre hommage à votre engagement ainsi qu'au remarquable travail accompli par votre rapporteure, Valérie Boyer, que je remercie pour sa présentation.
L'anorexie est une maladie qui n'est pas toujours reconnue comme telle. L'obsession de la maigreur, entretenue par nos modes, constitue elle-même un phénomène social récent qui rend plus difficile encore la mise en oeuvre des moyens nécessaires au traitement de cette maladie.
Le paradoxe de l'anorexie réside précisément dans le rôle qu'elle fait jouer à la volonté. L'anorexie se donne l'aspect d'une volonté pure, dont l'exercice prétend accomplir le triomphe de l'esprit, affranchi des exigences de la vie, sur le corps. La pulsion de vie est ainsi en quelque sorte absorbée par la pulsion de mort.
Les faits sont là : l'anorexie figure parmi les plus mortelles des maladies du psychisme. Le taux de mortalité à dix ans est de 5 %. Il avoisinerait les 20 % à plus long terme, car la santé de celles et ceux qui en réchappent demeure irréversiblement fragilisée.
Vous l'avez rappelé, madame la rapporteure, la France compte actuellement 30 000 à 40 000 anorexiques, en majorité des jeunes filles et des jeunes femmes. Si l'anorexie entraîne dans un premier temps amaigrissement et anémie, associés souvent à une aménorrhée, ses conséquences somatiques à moyen ou à long terme peuvent être très lourdes : perte de capacités musculaires, problèmes cardiaques, ostéoporose, notamment.
Les parcours scolaire, universitaire ou professionnel des anorexiques, leur parcours de vie enfin, sont considérablement affectés. Leur famille et leur entourage sont également suspendus à la maladie, car la nourriture et les conflits autour de l'alimentation finissent par prendre le pas sur toute autre considération.
Il reste que, si les médecins sont en première ligne pour soigner celles et ceux chez qui la maladie s'est déclarée, nous disposons de leviers pour prévenir l'apparition des premiers symptômes et agir sur les représentations susceptibles d'inciter jeunes gens et jeunes filles à tomber dans la spirale de l'anorexie.
Si la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui n'a pas pour ambition de répondre, à elle seule, à toutes les interrogations que soulève l'anorexie, elle se situe dans la perspective d'un ensemble de mesures volontaristes. Aujourd'hui, les pouvoirs publics, les acteurs de la société civile et les représentants du monde médical travaillent, tous ensemble, dans le même sens.
Dans cet esprit, le plan « Santé des jeunes », que j'ai présenté au conseil des ministres en février dernier, déploie un arsenal de mesures ambitieuses qui nous donnent les moyens de lutter contre l'anorexie sur plusieurs fronts.
Je tiens d'ores et déjà à souligner l'importance de la prévention dans ce domaine.
Les visites médicales à l'école et à l'université, qui comportent un bilan de l'état de santé physique et psychologique des enfants et des jeunes, constituent une voie d'accès privilégiée au dépistage des troubles du comportement alimentaire. Ce dépistage figurera désormais dans le référentiel des consultations médicales obligatoires chez les enfants de douze ans. Je m'y engage fermement. De même, à l'université, le dépistage et la prise en charge de l'anorexie entreront dans le contrat-cadre de partenariat en santé publique entre les ministères de la santé, de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur. Ces visites permettront de renforcer le dépistage aux deux moments clé d'apparition de la maladie : au seuil de l'adolescence à douze ans et à l'entrée dans l'âge adulte à l'université.
J'ai également souhaité que l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l'INPES, fasse davantage porter l'accent sur le dépistage de l'anorexie et de la boulimie. D'un point de vue général, il convient de doter de guides tous les médecins, pour les aider à mieux assurer leur mission de prévention. Pour ce faire, la formation constitue l'un des piliers essentiels pour améliorer la prise en charge. À cette fin, j'ai confié au professeur Martin une mission sur la formation des professionnels de santé en matière de nutrition. J'attends prochainement la remise de son rapport, et j'examinerai les recommandations à mettre en oeuvre, avec notamment le soutien actif du ministère de l'enseignement supérieur et de Valérie Pécresse.
Je souhaite en effet que les études médicales permettent aux étudiants d'intégrer ces problématiques de santé publique. Dans cette perspective, je serai particulièrement attentive à ce que la prévention et les soins liés aux troubles du comportement soient mieux pris en compte.
Passé le stade de la prévention, l'amélioration de la prise en charge des anorexiques constitue également une priorité. C'est pourquoi j'ai demandé à la Haute autorité de santé, la HAS, de travailler à des recommandations précises pour permettre aux médecins de mieux prendre en charge cette maladie complexe. Le déni de la pathologie, quand ce n'est pas le refus de soins, retarde en effet très souvent cette prise en charge.
De nombreuses complications somatiques accompagnent l'anorexie mentale. La prise en charge requiert donc une meilleure coordination des soins somatiques et psychiatriques, ainsi qu'une articulation au long cours de l'hôpital et de la médecine de ville. Praticiens hospitaliers et médecins doivent ainsi conjuguer leur action pour un dépistage le plus précoce possible, pour un suivi des patients coordonné, mais aussi pour échanger leurs expériences à partir d'un socle commun de bonnes pratiques.
Les recommandations de bonnes pratiques nous permettront également d'envisager les parcours de soins les plus appropriées. Actuellement les prises en charge en hospitalisation sont effectuées dans divers services spécialisés en fonction de la symptomatologie, de l'âge et de l'existence de complications : médecine interne, psychiatrie, pédiatrie, endocrinologie, maisons des adolescents avec hospitalisation. Les maisons des adolescents ont en effet un rôle crucial à jouer pour aider au repérage de cette pathologie, pour orienter les personnes dépistées, pour les prendre en charge ou les accompagner, voire pour les hospitaliser lorsque ces structures sont adossées à des centres hospitaliers. À cet égard, je souscris à l'objectif clairement désigné par la défenseure des enfants, Mme Versini, d'une maison des adolescents par département d'ici à la fin de la législature.
Je veux également rendre un hommage appuyé à l'action de certaines pionnières, notamment à Mme Bernadette Chirac, et à l'établissement La maison de Solenn, qui fait figure, à juste titre, de centre de référence.
Les causes de cette maladie sont protéiformes et mal connues. Seule la conjugaison d'actions plurielles, venues de plusieurs directions, nous permettra de mettre en oeuvre une démarche cohérente et efficace pour combattre l'anorexie.
C'est pourquoi je me réjouis de pouvoir compter aujourd'hui sur l'engagement volontaire des professionnels de l'image du corps dans notre pays. Des représentants du monde de la mode, des médias et de la publicité ont travaillé ensemble pendant un an, sous la direction du pédopsychiatre Marcel Rufo et du sociologue Jean-Pierre Poulain, avec des experts et des représentants des associations. Je viens de signer une charte d'engagement volontaire avec les représentants des acteurs économiques membres de ce groupe de travail ; elle marque un tournant dans la prise de conscience générale que requiert la lutte contre l'anorexie.
La charte « Anorexie – Image du corps » distingue deux populations à risque.
La première comprend les professionnels qui vivent de l'image de leur corps : mannequins, danseurs, professionnels de la diététique ou de l'esthétique. Ces personnes sont soumises, dans l'exercice de leur métier, à des contraintes évidentes. Notre responsabilité est de tout faire pour éviter que l'obéissance à de telles règles de vie ne porte préjudice à leur santé.
La deuxième catégorie de population est beaucoup plus large. Il s'agit de jeunes personnes, en grande majorité des jeunes filles, tiraillées entre le désir de se conformer aux canons esthétiques de notre temps, mais aussi de se distinguer, de s'opposer et de sortir du rang.
Par cette charte, les professionnels s'engagent à faire évoluer les comportements et à refléter, dans les représentations qu'ils en donnent, la diversité des morphologies dans notre société. Le succès récent de certaines campagnes publicitaires mettant en scène des formes de beauté différentes, de tous âges, a prouvé aux publicitaires le potentiel d'une telle démarche. Les annonceurs savent aujourd'hui qu'ils ont tout à gagner à mettre en valeur des beautés plurielles plutôt que stéréotypées.
Ils s'engagent également à ne pas stigmatiser les physiques hors normes et les personnes qui souffriraient de surpoids. Il est d'autant plus nécessaire que nous adoptions sur ce point un comportement exemplaire que le prestige de la mode française, mais aussi de notre culture et de notre qualité de vie, rayonne à travers le monde et nous oblige à la responsabilité.
Nos exigences éthiques pourraient aussi bien, d'ailleurs, stimuler l'imagination des créateurs. Nous pourrions ainsi universaliser nos valeurs tout comme nous exportons nos modes.
Pour autant, je n'ai pas souhaité assigner des objectifs irréalistes aux rédacteurs des magazines – nous savons bien qu'un grand nombre de nos concitoyens ne sont pas satisfaits de leur poids. J'ai simplement demandé aux représentants des organes de presse de s'engager à assortir leurs propositions de régimes de conseils sanitaires avisés, appelant chacune et chacun à la mesure et alertant les lecteurs contre toute dérive possible.
Je travaille actuellement, avec Xavier Bertrand, à donner un contenu prescriptif aux visites médicales imposées aux jeunes mannequins adultes ou mineurs âgés de plus de seize ans. Le respect de seuils précis de poids et d'indice de masse corporelle sera ainsi requis pour défiler.
Notre propos ici n'est pas de tendre un doigt accusateur vers les responsables supposés de l'anorexie, milieux de la mode, des médias ou de la communication. Nous devons en revanche nous mobiliser vigoureusement contre un phénomène récent : l'apparition sur Internet de sites « pro-ana », dont Mme la rapporteure faisait état à l'instant, sites encourageant l'anorexie et travestissant cette maladie pour lui donner les atours d'une supposée éthique – avec un h...
Grâce à certains de vos collègues de l'Assemblée, je pense à Valérie Boyer mais également à Pascale Gruny, que je remercie, elle aussi, pour son remarquable travail, vous êtes désormais bien au fait du contenu de ces sites, de ces blogs, de ces forums où des jeunes filles, et ceux qui les manipulent, rédigent des journaux intimes à l'adresse d'Ana, personnification de l'anorexie. Ces sites représentent un danger réel pour leurs lecteurs, fragilisés et malades.
Face à ce qui constitue une réelle menace pour la santé et l'ordre public, j'ai la conviction que nous devons prendre des mesures dissuasives et interdire tout propos incitant à des restrictions alimentaires déréglées. Cette interdiction ne devra pas se limiter à Internet, mais concerner tous les médias.
À la suite du décès de deux jeunes mannequins sud-américains, l'Espagne s'est rapidement dotée d'une législation protectrice visant à lutter contre l'anorexie. Mais ces événements datent maintenant de quelques années ; la proposition de loi présentée par Valérie Boyer, mûrement réfléchie et rédigée à froid, ne procède donc, je tiens à le souligner, d'aucun désir de céder à l'urgence de l'actualité.
Comme le disait un psychanalyste, « l'inconscient ne connaît pas la dénégation » !
La présente proposition de loi donne une réponse adaptée à un enjeu décisif de santé publique. C'est pourquoi je ne peux qu'apporter mon soutien à la création d'une incrimination spécifique pour la provocation à la recherche d'une extrême maigreur ou pour l'apologie de l'anorexie. Donner aux jeunes filles des conseils pour mentir à leurs médecins, leur indiquer les aliments les plus faciles à régurgiter, les inciter à se mortifier après toute absorption de nourriture ne relève pas de la liberté d'expression ; ce sont des messages de mort ! Notre pays doit disposer des moyens de poursuivre et condamner ceux qui se cachent derrière de tels sites.
Internet ne connaît pas de frontières. Si, dans d'autres pays européens, comme l'Italie, les pouvoirs publics ont témoigné de leur volonté de lutter contre l'anorexie, je souhaite que la présidence française de l'Union européenne soit l'occasion de porter plus loin ce débat et de proposer à nos partenaires de s'engager sur un socle commun de mesures.
Mesdames et messieurs les députés, la proposition de loi que vous examinez aujourd'hui est une avancée importante dans la lutte contre l'anorexie ; elle permettra également d'ouvrir plus largement le débat public autour de cette maladie et, ainsi, d'éveiller les consciences. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, c'est avec une réelle motivation que je participe à l'élaboration de cette loi, car je souhaite profondément que nous inaugurions une nouvelle démarche, plus active, plus percutante et plus préventive face aux dangers que représente l'anorexie pour notre société.
Cette maladie – car il s'agit d'une maladie, d'une pathologie grave et invalidante – touche aujourd'hui 30 000 à 40 000 personnes en France. L'anorexie mentale se manifeste par une volonté irrépressible de maigrir et une incapacité à voir son corps tel qu'il est. Le taux de mortalité serait l'un des plus importants parmi les troubles psychiatriques : 5 % de décès par dénutrition après dix ans d'évolution, et un risque de décéder par suicide multiplié par 22. Le traitement de ces troubles est long et difficile, et comme c'est une maladie qui touche surtout des personnes jeunes, de 17-18 ans, elle entraîne de lourdes difficultés scolaires et sociales.
Depuis longtemps conscients de ces dangers, les pouvoirs publics ont mis en place des politiques de prévention, de soutien et de prise en charge médico-sociale. Je me réjouis que nous soyons de plus en plus capables de soigner cette maladie, mais j'apprécie que, désormais, nous travaillions aussi à ce qu'il y ait de moins en moins de malades.
Avec la signature de la Charte d'engagement volontaire sur l'image du corps et contre l'anorexie, qui avait été commandée en janvier 2007 par votre prédécesseur, Xavier Bertrand, et qui vient de vous être remise, madame la ministre, une première étape proactive vient d'être franchie. En réunissant les principaux acteurs pouvant influencer l'image du corps dans notre société, vous avez privilégié une approche globale de la prévention de l'anorexie. La proposition de loi de Valérie Boyer complète les engagements de cette charte par un volet répressif qui, jusqu'alors, n'existait pas. En nous attaquant, de manière volontaire, à un déclencheur identifié de la maladie, nous espérons faire disparaître un des « hameçons » qui attirent les jeunes filles dans la spirale infernale de l'anorexie.
Évoquant les sites Internet les plus directement visés par sa proposition de loi, les sites « pro-ana », Valérie Boyer parle de « pratiques à la limite de la manipulation mentale » et de « dérives sectaires ». C'est bien ce que j'ai ressenti en les visitant moi-même – car il est on ne peut plus simple d'y avoir accès. En deux clics, vous êtes devant des recettes miracles à base de quarts de pomme et de litres d'eau, ou devant les « Dix commandements » de l'anorexique : « Tu ne peux jamais être trop mince », « Tu ne mangeras point de nourriture calorique sans te punir après coup »… Il apparaît vite que les jeunes filles qui se rendent sur ces sites envisagent leur trouble alimentaire comme un choix de vie et se confortent mutuellement dans cette idée. Quoi de plus dangereux qu'être malade et nier sa maladie, en y étant incité par des personnes extérieures, inconnues et manipulatrices ?
C'est pourquoi je trouve le format juridique choisi particulièrement adéquat. Quand on entend : « Être mince est plus important qu'être en bonne santé », on est face à une pratique en tout point analogue à la mise en danger d'autrui et à la provocation au suicide. L'échelle des peines, qui va de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende, en cas d'infraction simple, à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende si la recherche de la maigreur excessive a entraîné la mort, apparaît donc cohérente eu égard à la gravité des actes commis, la mise en danger de la vie d'autrui et la provocation au suicide étant punissables respectivement d'un an et de trois à cinq ans d'emprisonnement. La rédaction de l'article unique permet en outre de s'attaquer, au-delà d'Internet, aux délits commis via la presse écrite ou audiovisuelle, la détermination des personnes responsables suivant les mêmes règles qu'en cas de provocation au suicide – leur responsabilité est à mon sens bien plus grave, car les auteurs jouent de la détresse des victimes. Le champ ainsi couvert est assez large pour permettre de lutter efficacement contre toutes les forces d'incitation à l'anorexie et de mieux protéger la santé des plus faibles.
Mais les débats que nous consacrons depuis longtemps à cette maladie et qui se poursuivent avec le présent texte nous ont aussi permis d'ouvrir d'autres portes, d'envisager d'autres solutions. Mme Roselyne Bachelot a, je le sais, entendu nos préoccupations, et je lui fais toute confiance pour prendre des engagements forts et donner suite à nos propositions en empruntant les voies qui sont celles de son ministère. La voie pénale, nouveauté dans le domaine de la lutte contre l'anorexie, doit en effet faire partie d'une politique de santé publique plus globale et ambitieuse.
Le professeur Marcel Rufo parle de chercher d'autres solutions pour aider les adolescents à apprivoiser leur appétit de vivre et retrouver un autre rapport au monde. Pour ma part, je souhaite vivement que soient mises en application toutes les bonnes idées issues de la réflexion collective, comme des campagnes d'information et de prévention à grande échelle ou des mesures spécifiques à l'intention des mannequins, public particulièrement menacé par cette maladie. Je soutiens aussi la création de structures adaptées aux troubles du comportement alimentaire, en mettant tout particulièrement l'accent sur le soutien aux familles. Sa capacité à détruire l'équilibre familial est en effet une autre caractéristique de la maladie : les anorexiques prétendent ne pas avoir besoin d'aide, alors que tout leur comportement est source de préoccupations ; plus elles rejettent la sollicitude des autres, plus elles les inquiètent et les laissent désemparés. Si elles ne sont pas nécessairement dans le refus de vivre, l'idée de mort plane autour d'elles – et il n'est pas de situation plus angoissante pour des parents que de se sentir impuissant à éviter le pire. Il est important, à mes yeux, de cesser de rendre l'entourage responsable des événements, afin qu'il puisse jouer un rôle actif dans le processus de guérison et que la vie de famille ne tourne pas autour de la seule maladie.
Je réitère ma confiance et mon soutien à Mme Bachelot pour améliorer l'offre de prise en charge médicale et psychologique. Il me semble ainsi tout à fait opportun de mettre l'accent sur les aspects médicaux du dépistage, en intégrant dans les études de médecine l'enseignement de la prise en charge des troubles du comportement alimentaire et en systématisant le dépistage lors des visites médicales scolaires et universitaires.
Avec cette proposition de loi, qui pénalise les incitations à la recherche d'une maigreur extrême et les comportements allant à l'encontre d'une saine image du corps, mais aussi avec la Charte d'engagement volontaire sur l'image du corps et contre l'anorexie ainsi que toutes les autres pistes issues de nos débats, nous inaugurons une démarche nouvelle, qui vise à ce que notre société évolue vers une meilleure acceptation de la diversité corporelle. Je me félicite de cette avancée et resterai attentive au suivi des engagements pris, ainsi qu'à la mise en place des nouvelles mesures. Bien entendu, je voterai, avec l'ensemble du groupe de l'UMP, cette excellente proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Très bien !
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, l'anorexie est une maladie grave, qui touche très durement nombre de jeunes filles, mettant en danger leur santé, et souvent leur vie.
Plutôt que de parler d'entrée de fléau ou de drame pour la société, je veux d'abord penser aux malades et à leurs familles qui, pendant des années, vivent dans une inquiétude perpétuelle, sans même savoir comment remplir ce qui est en définitive le premier devoir de qui fonde une famille : nourrir son enfant. Je pense aussi aux difficultés des équipes soignantes – car cette maladie n'est pas facile à soigner, et ceux qui sont impliqués dans ce combat font preuve, en dépit des difficultés, de beaucoup de courage ; j'imagine que certains d'entre vous ont déjà été en contact avec ces équipes et savent la violence de la confrontation avec le malade.
Je ne crois pas que l'anorexie puisse être considérée comme un problème de nutrition, ni que sa cause réside en un phénomène d'imitation. Ce texte repose sur un raisonnement défectueux parce qu'il confond un problème de société – celui, j'y reviendrai, de la définition de la norme sociale : les maigres et les gros – et une maladie, l'anorexie. D'ailleurs, comme vous le savez, un des symptômes de l'aggravation de la maladie est son alternance avec des cycles de boulimie : cela prouve bien qu'on est loin de la logique d'imitation dont parlent certains.
Il n'est pas interdit de se référer à la littérature médicale pour essayer de comprendre l'anorexie. Il existe deux approches principales.
L'approche clinique perçoit l'anorexie comme un trouble du comportement alimentaire et, dans le cadre plus général des troubles de la santé mentale, comme un des comportements à risque dont sont de plus en plus victimes les adolescents des pays développés. Il s'agit donc d'abord et avant tout d'une maladie psychique. Or il convient de faire preuve de prudence sur ces questions : ce n'est pas la première fois que des problèmes de santé mentale interpellent douloureusement notre société et que l'on risque d'y apporter des réponses fausses.
L'autre approche est celle de la santé publique – c'est celle de l'OMS. Les travaux de Mme Marie Choquet, épidémiologiste spécialisée dans la santé des adolescents, montrent que les comportements de ce type résultent d'une montée de la violence en tant que pathologie sociale, due à l'évolution non contrôlée des modes de vie de nos sociétés contemporaines.
Cette violence s'exprime chez les filles par une tendance plus grande au suicide, à l'automutilation et à l'anorexie : elles la tournent plus volontiers contre elles-mêmes que les garçons qui, au contraire, auront plutôt tendance à diriger les troubles et le métabolisme de cette violence vers l'extérieur au travers de comportements d'addiction – notamment par le recours à la drogue – ou sociopathiques, lesquels s'expriment parfois dans la délinquance.
C'est exact !
Nous attendons donc que des réponses soient données à la fois aux interpellations cliniques – j'ai évoqué la santé mentale – et de santé publique, qui mettent en cause le problème de la montée de la violence chez les jeunes.
Les équipes aujourd'hui disponibles et compétentes pour aider, notamment en matière de soins, ces jeunes filles – ce sont elles qui sont le plus souvent concernées –, et leurs familles, que la présence en leur sein d'un enfant anorexique interpelle très violemment, ont donc besoin de la mise en place, sur l'ensemble du territoire, d'une politique permettant un véritable accès à des soins de qualité Mais il convient aussi de ne pas oublier le dépistage : en effet, la maladie progresse et les premiers symptômes ne sont pas toujours détectés à temps. Sans doute faut-il adopter une attitude plus précise, notamment en matière de santé scolaire, madame la ministre, laquelle est, chacun le sait, une des grandes oubliées des politiques de santé dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Il faut de surcroît mener une réflexion globale sur la santé de l'adolescent, débat récurrent avec cette majorité puisque nous avons déjà eu quasiment le même lors de l'examen du projet de loi sur la prévention de la délinquance. C'est une évidence que certains des aspects de la délinquance touchent à l'ordre public et relèvent de la répression. Il n'en est pas moins vrai que la montée de la violence et de la délinquance chez les jeunes a également une dimension qui relève de la santé publique. Du reste, le projet de loi présenté par M. Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, avait tenté d'aborder la question sous cet angle, mais à mon avis de manière stigmatisante et maladroite. Pourtant, c'est bien sous l'angle de la santé publique que la délinquance juvénile est traitée dans tous les pays développés. Que ce soit chez les Hollandais, les Américains ou les Canadiens, chacun comprend que la montée de la violence correspond chez les jeunes à un problème de santé mentale et qu'il convient d'adopter une attitude de prévention globale et de dépistage précoce, tout en respectant évidemment les libertés du jeune et les droits du malade.
Nous sommes très loin d'un tel recours systématique avec cette majorité qui veut toujours traiter les problèmes de santé publique dans un cadre pénal. Aussi êtes-vous complètement à côté de la plaque,…
…d'une part, en laissant pendantes pour l'essentiel les questions de santé publique : offre de soins ou politiques de prévention et de dépistage – que fait-on aujourd'hui en matière de santé scolaire et quels soins propose-t-on aux adolescents ? – ; d'autre part, en présupposant que l'anorexie viendrait d'une stratégie d'imitation, alors qu'on ne trouve dans la littérature scientifique internationale aucun élément en ce sens, contrairement à ce qui se passe pour l'obésité. Pour l'anorexie, en effet, rien ne prouve que les pratiques d'imitation seraient un des éléments déterminants de sa progression.
Le projet de loi ne dit pas cela !
Le projet de loi repose sur l'idée que les gens sont malades parce qu'on les incite à imiter des comportements anorexiques !
Ce n'est pas à mon sens un diagnostic juste et le projet de loi ne saurait donc apporter une réponse, d'autant que le code pénal, que vous voulez mobiliser pour lutter contre la santé publique,…
Quoi ? Pour lutter contre la santé publique ?
…prévoit d'ores et déjà toutes les incriminations nécessaires pour mise en danger de la vie d'autrui ou incitation au suicide, situations auxquelles, ne soyons pas naïfs, on peut effectivement se trouver confronté. Il n'y a donc pas besoin de cette loi ! La mise en danger de la vie d'autrui, je le répète, est déjà inscrite dans le code pénal et il suffirait, madame la ministre, que vos services arrivent à convaincre les procureurs de faire usage de cette incrimination et que des moyens réels existent pour que des poursuites pénales puissent être engagées dans les cas juridiquement fondés.
Ce texte est donc inutile puisqu'il ne traite pas l'essentiel du problème en raison de la confusion qu'il entretient sur les causes de cette maladie, causes qui ne tiennent pas tant à l'influence de la société sur les jeunes que, plus fondamentalement, à leurs difficultés en termes de santé mentale, ce qui n'est pas vrai de l'obésité, comme le montre, là aussi, la littérature scientifique internationale. En effet, si, pour une part, l'obésité trouve son origine dans un trouble du comportement alimentaire qui a les mêmes racines que pour l'anorexie, en revanche, pour une part beaucoup plus substantielle, elle est le fruit d'une pression environnementale et économique si forte qu'on peut parler d'épidémie à propos de cette pathologie. Il est dès lors parfaitement légitime d'intervenir, en légiférant en termes de santé publique, sur le cadre environnemental dans lequel s'inscrivent les problèmes d'obésité et, comme nous le demandons depuis plusieurs années, il serait même souhaitable d'agir pour que l'environnement commercial ne pèse plus sur les jeunes en les poussant à devenir obèses. Il est donc inexact d'assimiler les deux maladies.
Un des aspects de votre projet de loi concerne un autre débat, celui des modèles sociaux. Or il n'y a pas de liaison nécessaire entre pathologie et normalité, en l'occurrence le normal et le pathologique ne se rejoignent pas. Il est vrai que l'interrogation sur la normalité mérite un débat : vaut-il mieux être maigre que gros ? que nous dit la société à ce sujet ? C'est en ce sens que je trouve positive la charte qui a été signée et qui se place, précisément, sur le terrain du débat social. Si je prends l'exemple italien, qui met en avant la question des mannequins en situation d'anorexie, il ne s'agit pas tant de lutter contre l'incitation à l'anorexie que contre, à la fois, le développement de normes sociales stigmatisantes et le fait d'exposer, pour des raisons commerciales, des personnes en grande souffrance, les campagnes commerciales relevant du voyeurisme tout en constituant un déni de compassion au regard de ce qu'elles sont. Il s'agit d'une question posée à la société et non du simple fait qu'en montrant une personne anorexique on chercherait à promouvoir l'anorexie. Ce qui est choquant dans de telles campagnes, c'est qu'on se sert de la souffrance d'autrui pour une démarche commerciale. C'est donc bien sur le plan éthique et non, en premier lieu, sur celui de la santé mentale, que nous trouvons justifiée la condamnation de ce type de campagnes commerciales.
De la même façon, il est parfaitement légitime de lutter dans la publicité contre des formes de stigmatisation éventuelle visant des personnes trop maigres ou, ce qui est le cas le plus fréquent, trop grosses – je reprends des termes simples. Nous devons être attentifs à ce que les normes sociales ou les comportements culturels ne stigmatisent pas des personnes.
Madame la ministre, madame la rapporteure, votre intuition n'est pas exacte, même s'il est parfaitement légitime d'insister sur la gravité de cette maladie qu'est l'anorexie et sur l'acuité de la souffrance qu'elle révèle chez les jeunes et qu'elle produit dans leurs familles : en ce sens, il est bon de mettre en oeur du débat social et, plus largement, au sein de la culture de la société, toute attitude de stigmatisation. En revanche, nous avons l'impression que, du fait même de son inutilité, cette nouvelle incrimination pénale, loin de résoudre le problème posé par l'anorexie, n'est qu'un simple exutoire venant masquer les véritables causes, enfouies dans notre société, de la montée, d'abord chez les jeunes, mais pas seulement, des comportements violents, y compris contre soi-même – automutilations, suicide ou toxicomanie. Je reconnais bien volontiers qu'aucun d'entre nous n'a de solution toute faite. Toutefois, il ne faudrait pas que votre projet de loi – c'est un des reproches que je lui fais –, tout en n'apportant aucune solution, nous éloigne des éléments nous permettant de comprendre les difficultés, voire les drames auxquels les jeunes sont confrontés. Ce texte masque les insuffisances à cet égard de la politique de santé publique et d'offre de soins, du reste difficile à mettre en oeuvre. Je ne suis pas de ceux qui disent qu'il suffit d'appuyer sur un bouton pour pouvoir disposer, sur le territoire national, au double plan quantitatif et qualitatif, des structures de soins adéquates. Je le répète : la mise en oeuvre d'une telle politique reste difficile. Toutefois, plutôt que de dépenser notre énergie, notamment celle des parlementaires, à donner de fausses réponses à de mauvais diagnostics, il vaudrait mieux l'utiliser pour tenter de faire comprendre à la société dans son ensemble que notre jeunesse a trop souvent des problèmes de santé mentale, eux-mêmes trop souvent mal dépistés et mal traités. Non seulement l'offre de soins est insuffisante, mais nous ne portons pas non plus sur les jeunes un regard suffisamment juste. (Mme Catherine Coutelle et Mme Marisol Touraine applaudissent.)
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est soumis traite indéniablement d'un sujet essentiel puisque l'anorexie mentale est une affection grave qui touche entre 30 000 et 40 000 personnes, principalement des jeunes. Outre le danger de mort que peut présenter à terme cette maladie, la dépression qui l'accompagne entraîne des tendances suicidaires dans un nombre non négligeable de cas. Il est donc légitime d'agir pour éviter ces drames que traversent beaucoup de familles et qui se terminent parfois par le terrible traumatisme du décès d'un enfant.
Toutefois ce texte me paraît hors sujet. L'anorexie mentale est une maladie connue de longue date – vous l'avez rappelé, madame la ministre –, qui n'a pas commencé avec les magazines, la publicité, la télévision ou les médias modernes. Elle relève d'abord de l'état psychologique de la personne concernée, même s'il est vrai que l'image du corps véhiculée par certains médias et les professionnels de la mode peut constituer sinon un déclencheur, du moins, particulièrement chez les personnes fragiles, un facteur aggravant de cette pathologie, quand la maigreur, érigée en modèle, devient la norme. Nous connaissons du reste les sacrifices que certains sont prêts à consentir pour « entrer dans la norme », surtout pendant la période de recherche identitaire qu'est l'adolescence.
C'est pourquoi la démarche entreprise visant à mettre en place un groupe de travail pluridisciplinaire constitué de médecins, de mannequins et de professionnels de la mode et des médias, placé sous la responsabilité des professeurs Marcel Rufo, pédopsychiatre, et Jean-Pierre Poulain, sociologue, afin de réfléchir et de rédiger une « charte d'engagement volontaire sur l'image du corps », nous paraît intéressante et utile.
Merci.
Il s'agit en effet de modifier les conceptions dominantes de la beauté, qui conduisent à une maigreur excessive, et, par là, d'en réduire les conséquences sur les comportements des jeunes. Cette démarche paraît donc intéressante, à condition – et c'est là mon souci – qu'elle s'inscrive dans un ensemble beaucoup plus large de dispositions, notamment en matière de santé publique et d'éducation à la santé ; ce n'est hélas pas le cas.
Nous sommes donc pour le moins réservés sur le contenu du texte. D'abord parce qu'il est réducteur face à l'ampleur et à la complexité du problème – voire hors sujet, je l'ai dit –, ensuite parce que nous doutons de son utilité. En effet, l'article 223-14 du code pénal prévoit déjà que « la propagande ou la publicité, quel qu'en soit le mode, en faveur de produits, d'objets ou de méthodes préconisés comme moyens de se donner la mort est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende ». Cet article a été adopté après la sortie du livre intitulé Suicide, mode d'emploi. Si la loi ne fait pas référence expressément à l'anorexie, il semble inutile de préciser que « l'incitation à ne plus se nourrir » entre dans son champ d'application.
Il nous paraît tout aussi inutile, voire exagéré, de créer ce qu'il est convenu d'appeler un nouveau délit à chaque exemple que nous rencontrons d'incitation dangereuse pour la santé. Pourquoi, en effet, ne pas créer également un délit « d'incitation à la boulimie », qui pourrait s'appliquer au mouvement « pro-mia », le pendant du mouvement « pro-ana », ou bien aux feeders, ces psychopathes qui exercent une domination psychologique sur leurs femmes, les obligeant à des excès alimentaires à l'origine d'une obésité pouvant altérer gravement leur santé voire entraîner leur mort ? Tout cela ne nous semble pas sérieux, d'autant que l'article 121-3 du même code prévoit déjà la possibilité de sanctionner une personne pour « mise en danger délibérée de la personne d'autrui », que ce soit de manière directe ou non. Par conséquent, nous pensons que les moyens juridiques de lutte contre ces incitations dangereuses existent déjà.
Nous nous interrogeons par ailleurs sur l'applicabilité du présent texte, donc sur son efficacité. Sur le fond, nous sommes préoccupés par le flou, en droit, de la notion de « maigreur excessive », et par la quasi-impossibilité de prouver que l'encouragement à des restrictions alimentaires, de la part de tel site internet ou de tel média, a pu avoir pour effet « de l'exposer à un danger de mort ou de compromettre directement sa santé ». Comment les juges pourront-ils statuer sur de telles situations ?
Que l'on intervienne pour empêcher les sites faisant ouvertement l'apologie de l'anorexie tels que ceux qui diffusent les idées du mouvement « pro-ana », me paraît légitime, mais réduire l'action contre un phénomène aussi complexe à la mise en place de sanctions supplémentaires me paraît tout à fait illusoire. C'est en effet facile, cela donne bonne conscience et, surtout, cela coûte moins cher que de payer des professeurs ou des intervenants extérieurs pour enseigner la nutrition aux enfants et aux jeunes, que de former et de rémunérer des médecins pour suivre les adolescents qui en ont besoin, que de traiter enfin les maladies psychiatriques.
Vous présentez ce texte au moment où vous réduisez partout l'accès aux soins, en fermant des lieux de santé de proximité, en mettant en place des franchises inaccessibles aux moins fortunés, donc aux jeunes. Vous nous présentez ce texte alors que vous vous apprêtez à supprimer 11 000 postes de fonctionnaires, personnels enseignants et encadrants, dans l'éducation nationale. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je vous agace : c'est bon signe ! J'évoque des points importants et cela devient en effet plus difficile pour vous.
Comment, dans ces conditions, chers collègues, vous qui protestez, mettre en place une véritable politique de prévention, une véritable politique de santé publique, sans passer par des campagnes d'information dans les écoles, les collèges, les lycées et les universités, sans compter sur la présence de personnels qualifiés pour repérer les jeunes en souffrance et les aider à libérer leur parole auprès de psychologues scolaires, par exemple, dont nos établissements manquent si cruellement ?
Vous proposez, madame Boyer, madame la ministre, d'utiliser un indice de masse corporelle pour chaque enfant en milieu scolaire. C'est une bonne idée.
Mais avec quels moyens ? Quelles infirmières ? Quels médecins scolaires ?
Il n'y a pas besoin de médecins pour calculer un indice de masse corporelle !
Vous ajoutez une mission à celles qu'ils ne peuvent déjà plus remplir faute d'effectifs suffisants. Les déclarations d'intention ne suffisent pas, ni la signature de contrats en tous genres ! Il faut des moyens concrets pour travailler.
Notre pays figure parmi ceux qui enregistrent le plus grand nombre de suicides : entre 10 000 et 12 000 par an selon la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la DREES.
Le suicide est la première cause de mortalité chez les jeunes : un bien triste record qui devrait nous conduire à travailler cette question très sérieusement.
C'est ce que je fais !
Les jeunes rencontrent tôt des difficultés importantes dans une société où la violence s'accroît dans des proportions préoccupantes, et qui contribuent à les déstabiliser, qu'il s'agisse de difficultés sociales et financières pour nombre d'entre eux, de difficultés de formation et d'insertion, d'une précarité angoissante, de la peur du lendemain. Toutes les études les concernant soulignent leur mal-être et leur pessimisme face à l'avenir. Ce constat doit nous préoccuper au plus haut point et nous amener à mobiliser notre énergie et nos moyens pour prendre les dispositions nécessaires afin de surmonter ces difficultés complexes, multifactorielles, et de modifier cette situation.
Ce n'est hélas pas votre choix. Vous décidez de privilégier les cadeaux fiscaux aux plus aisés au détriment de l'intérêt général et de la prévention (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), au détriment de la santé publique et au détriment de la jeunesse. Là est la question de fond, là se situe notre divergence essentielle. Nous n'avons pas les mêmes priorités pour l'utilisation des moyens dont dispose le pays.
Notre société est en profonde mutation. Les moyens modernes d'expression et de communication peuvent beaucoup plus qu'auparavant influer sur la construction de la personnalité des jeunes et perturber les plus fragiles. C'est pourquoi nous ne nous opposerons pas à ce texte…
…réside davantage dans l'affichage, la bonne conscience, la dissimulation de l'insuffisance de notre politique de santé, que dans l'efficacité concrète face à un vrai et douloureux problème. Nous ne le voterons donc pas car le renforcement du code pénal ne saurait tenir lieu de politique de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Quelle vision réductrice ! Le parti communiste ne change décidément pas et se montre toujours aussi caricatural !
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, on constate assez vite à quel niveau nos collègues socialistes ou communistes placent le débat. Or il convient de ne pas détourner l'attention de la finalité du texte.
Nous vivons dans une société malade et nombre des maux sociaux s'expriment par des conduites addictives. Le législateur est déjà intervenu à plusieurs reprises sur de telles conduites, qu'il s'agisse du tabac, de l'alcool, mais aussi de l'obésité. La question est ici de savoir si l'anorexie mentale et ses conséquences sur la société et surtout sur les jeunes doit donner lieu à une intervention du législateur.
Qu'en est-il ? J'ai bien entendu M. Le Guen faire allusion à la différence entre l'anorexie et l'obésité. Vous l'avez dit, cher collègue, certaines anorexies conduisent à des attitudes boulimiques et l'on sait qu'il s'agit d'une forme grave de la maladie. Tous les professionnels de santé concernés savent aussi que le passage de l'anorexie à l'obésité est relativement fréquent.
En effet, les personnes ainsi atteintes expriment d'une manière très particulière un trouble social ou un trouble psychique. La différence entre ces deux maladies est que l'obésité, beaucoup plus largement répandue, touche souvent des couches sociales plus défavorisées, tandis que l'anorexie, maladie pourtant souvent proche, touche des classes sociales favorisées, de jeunes femmes ou de jeunes filles parmi les plus intelligentes, les plus perfectionnistes, souvent suicidaires et autodestructrices.
La question est de savoir s'il existe des dérives sociales qui incitent à ce comportement. Nous avons été amenés à légiférer sur l'obésité parce que certains lobbies – notamment dans le secteur agroalimentaire – jouaient un rôle susceptible de modifier les conduites alimentaires de la population. Il en est de même pour l'anorexie. C'est d'ailleurs tout le sens de ce texte.
Il faut savoir que l'anorexie comporte une phase de réversibilité, tant sur le plan psychiatrique que sur le plan clinique, et que, à cause d'une incitation, elle peut comporter une phase irréversible et donc dramatique. Aussi le texte vise-t-il à aider les professionnels de l'image, du comportement, à éviter de commettre certains excès, à faire en sorte que leur action n'ait pas d'effet négatif sur les populations fragiles.
Le législateur doit-il intervenir ? Oui, lorsque certaines pratiques risquent d'accentuer ces phénomènes et de mettre en danger les personnes concernées. Puisqu'il s'agit d'une véritable maladie sociale, il est important que la société se prononce. Oui, le législateur doit intervenir lorsque des pressions peuvent s'exercer. Or, on l'a dit, certains sites Internet très dangereux poussent les personnes fragiles dans la phase non réversible de l'anorexie.
Nous ne sommes pas les seuls à nous intéresser à ce sujet : depuis quelque temps, plusieurs pays ont pris des mesures. L'Espagne s'est rapidement émue et a agi en faveur des mannequins pour définir des standards éloignés de ceux pouvant se révéler dangereux, le danger se situant dans un extrême comme dans l'autre. L'Italie a également décidé de faire bénéficier ces professionnelles de garanties médicales afin qu'elles ne tombent pas dans ces excès.
Seulement, un certificat médical est-il suffisant ? Ainsi la notion de « critères objectifs » a-t-elle été définie. Par exemple, l'indice de masse corporel – je regrette, madame Fraysse –, ne demande pas d'énormes moyens pour être calculé.
Il suffit de définir une courbe et d'effectuer une règle de trois, ce qui n'est tout de même pas très compliqué. On n'a pas besoin pour cela d'enseignants ni d'infirmières.
Il suffit de demander aux parents – c'est un problème d'éducation – de calculer l'indice de masse corporelle de leurs enfants : c'est très facile ! Et l'on sait à quel moment l'enfant peut basculer d'un côté ou de l'autre. Il ne faut donc pas tout ramener à une question de moyens.
C'est la raison pour laquelle des pays comme les États-Unis réfléchissent aussi à des propositions de loi sur ce thème.
À partir du moment où existent des dangers et des dérives, qui pourraient conduire à une certaine exploitation de cette situation, le législateur peut intervenir.
La démarche de cette proposition de loi est davantage préventive que curative. Il s'agit surtout de dire : « Attention, ne dépassez les bornes. Et si vous ne les dépassez pas, vous ne risquez pas d'être sanctionné. »
Si Valérie Boyer a défini des critères de référence au niveau du code pénal, c'est pour montrer l'impact et l'importance que cette pathologie peut avoir sur la société.
C'est la raison pour laquelle il est important que nous votions ce texte, qui va dans le sens d'un meilleur équilibre, sans pour autant vouloir normaliser à tout prix notre société et faire en sorte que nos enfants soient uniformes. Il s'agit de dire : « Attention, ne dépassons pas les bornes ! » Et cela vaut autant d'un côté que de l'autre.
Les dangers sont réels. Et à partir du moment où l'on tombera dans la phase d'irréversibilité, la partie sera perdue. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous examinons ce matin, dans l'urgence, une proposition de loi visant à combattre l'incitation à l'anorexie.
L'anorexie mentale est un véritable enjeu de santé publique, nul ne le conteste. Près de 40 000 personnes en souffrent. C'est une maladie d'autant plus préoccupante, tous les orateurs l'ont dit, qu'elle conduit, dans environ 10 % des cas, à un décès. Il est donc urgent d'agir, cela ne fait aucun doute.
Pourtant, la proposition de loi dont nous débattons ce matin ne va pas dans le bon sens, et ce pour trois raisons.
Le première, c'est la précipitation, qui n'autorise pas la réflexion. Depuis que j'ai été élue députée, au mois de juin 2007, j'ai pu constater avec quelle précipitation nous examinons des textes de loi qui se succèdent à un rythme soutenu, trop soutenu pour qu'il soit possible de travailler correctement.
Comment justifiez-vous cette précipitation ? J'ai consulté le calendrier de nos travaux tel qu'il était établi à la date du 31 mars dernier : l'examen de cette proposition de loi n'était pas prévu dans l'agenda prévisionnel du mois d'avril. Vous avez déposé votre texte le 3 avril, et il est discuté ce matin, 15 avril.
Y a-t-il des événements d'une exceptionnelle gravité et d'une actualité brûlante qui l'exigent ?
Certes, des cas d'anorexie tragiques avaient mis sur le devant de la scène cette question préoccupante : la mort de jeunes mannequins, dont une mannequin brésilienne en novembre 2006, ou encore une publicité racoleuse interdite sur les chaînes de télévision françaises, mais qui a circulé sur Internet ou dans les magazines.
Mais récemment, rien de tel, alors que votre initiative bouscule l'ordre du jour de l'Assemblée et relègue à jeudi matin la discussion sur la révision générale des politiques publiques.
Sujet de société dramatique, l'anorexie, cela a été dit, touche principalement les jeunes filles – dix filles pour un garçon –, et particulièrement dans nos sociétés occidentales. Face à ce que vous considérez, selon votre rapport, comme une priorité de santé publique, face à ce phénomène multiforme qui peut être mutilant, voire mortel, pourquoi ne pas avoir pris le temps de réunir des familles, des médecins, des psychologues, des psychiatres pour conduire une mission approfondie sur la manière la plus efficace d'aborder la question ?
D'ailleurs, vous-même reconnaissez dans l'introduction à la loi que « nous avons encore beaucoup à apprendre sur ce sujet et le présent texte n'a pas pour ambition de traiter de tous les problèmes soulevés par l'anorexie ».
L'actualité de votre texte est sans doute liée à la signature de la charte qui met en place des règles éthiques afin de lutter contre l'image de maigreur excessive renvoyée par les mannequins. Mais, de l'avis même des professionnels qui en sont signataires, si c'est un premier pas, cette charte n'est guère contraignante.
Certains, d'ailleurs, souhaitent déjà aller plus loin.
Lorsque Xavier Bertrand avait, en janvier 2007, dans le cadre du deuxième programme de nutrition, missionné MM. Rufo et Poulain pour créer un groupe de travail afin d'élaborer ce code de bonne conduite, il avait déclaré : « Il est important, au moment où les jeunes filles regardent les mannequins, de s'interroger sur le véritable impact de ces images sur les comportements. La loi n'est pas l'alpha et l'oméga pour régler ce type de sujet. Je ne suis pas persuadé, sur ce dossier-là, qu'il faille légiférer ».
C'était il y a un an. Depuis, il y a eu rupture, et nous légiférons dans l'urgence.
La deuxième raison pour laquelle votre texte ne va pas dans le bon sens, c'est qu'il ne traite pas ce sujet sous l'angle de la santé publique, comme l'ont dit les orateurs qui m'ont précédée.
Quel objet et quelle utilité présente votre proposition ? Vous souhaitez combattre l'incitation à l'anorexie en complétant un article du code pénal – et le code pénal n'est pas un code de santé – qui poursuit l'acte de provoquer au suicide, en ajoutant : « et à la maigreur excessive ». Vous visez ainsi les incitations provenant de moyens de communication.
L'anorexie n'existait-elle pas avant Internet ? Avant la mode des mannequins outrancièrement maigres ? Et est-ce le levier efficace pour la combattre ?
Nous connaissons tous des jeunes filles, des jeunes femmes – moins de jeunes garçons – victimes d'anorexie mentale ou de troubles du comportement alimentaire. Le phénomène serait même en augmentation. Il toucherait 1 % des 12-19 ans dans sa forme anorexique, et 2 à 3 % dans sa forme boulimique, celle qui augmente le plus, et qui n'est pas traitée dans cette proposition de loi. En France, on estime à 40 000 le nombre de personnes concernées.
D'origine psychique, le trouble du comportement alimentaire provoque des conduites de restriction alimentaire ou de boulimie entraînées par une préoccupation tyrannique de l'apparence, la peur de vieillir, de voir le corps se transformer. Les causes sont multiples. Au départ, il y a une indicible souffrance qui conduit à un programme de survie afin de s'anesthésier contre des douleurs, expression d'un désir mis à mal, d'un désarroi immense, mal compris, dont on peine à deviner la souffrance.
Les causes sont complexes. Et selon la psychiatre Virginie Megglé, il n'y a pas une anorexie, ni une seule cause dont la découverte assurerait la guérison, mais divers degrés d'anorexie. Multiples sont les événements d'une famille à l'autre, mais leur éclosion est souvent déterminée par un événement ou une série d'événements qui les induisent. Selon elle, « il faudrait discerner les causes des éléments déclencheurs ».
À ces facteurs complexes s'ajoutent les nombreuses difficultés auxquelles se heurtent les traitements. L'une de ces difficultés peut être une détection tardive par les proches, qui ne perçoivent pas toujours les symptômes. À cet égard, nous disons et redisons que des médecins scolaires plus nombreux et plus attentifs, ou des infirmières en plus grand nombre, pourraient aider à détecter les symptômes.
La difficulté peut provenir de la personne elle-même, qui veut et pense contrôler son corps. Les échanges et conseils lus sur des blogs en donnent un aperçu.
Les traitements qui réussissent le mieux sont les modes de prise en charge par des équipes pluridisciplinaires, avec le soutien de la famille. Ces traitements sont toujours longs et connaissent parfois des rechutes.
C'est un véritable sujet de santé publique, comme vous le disiez, madame la ministre. Aussi, nous sommes en droit de nous poser la question de l'efficacité de cette proposition, qui ne comporte aucune mesure visant à lutter contre les troubles du comportement alimentaire : campagnes de prévention, développement de structures, prise en charge pluridisciplinaire des malades et accompagnement des familles. Rien de tout cela ne figure dans la proposition de loi que vous nous suggérez d'adopter.
D'ailleurs, dans son rapport, notre collègue Valérie Boyer a la prudence de déclarer que le texte « n'a pas pour objectif de répondre à l'ensemble des questions soulevées par cette maladie complexe, notamment celle relative à sa prise en charge psychologique et médicale, qui relève en premier lieu de professionnels compétents. Toutefois, poursuit notre rapporteure, en insérant de nouvelles dispositions dans le code pénal, la proposition de loi permettra de prévenir certaines dérives et ne pas se résoudre à l'idée que l'on puisse faire des icônes de ces corps décharnés ».
C'est la troisième critique que je formulerai : votre seule approche du problème est celle de la répression pour lutter contre l'image véhiculée par les médias.
L'INSERM souligne que la pression sociale exercée par les médias sur l'image du corps pourrait contribuer à entraîner des pratiques alimentaires abusives.
Eliette Abécassis, que vous citez également dans votre rapport, parle de « corset invisible », sous la forme de pression exercée par des modèles de minceur et de maigreur et une injonction de ne pas vieillir.
Le professeur Philippe Jeammet, de l'Institut Montsouris, souligne que « la mode n'a pas créé l'anorexie, mais peut favoriser le trouble en favorisant l'extrême minceur. La mode, la danse, la gymnastique sont des milieux à risque. »
Comme le dit encore la psychiatre Virginie Megglé, ancienne anorexique elle-même, « face à l'anorexie, il y a le visible et l'invisible ». Votre approche consiste à ne traiter que le « visible ». C'est la démarche de la charte, règle de conduite signée par les milieux de la mode. Pourquoi ne pas avoir complété ce dispositif par une politique de santé publique d'envergure pour lutter contre ces maladies, plutôt que d'ajouter ce volet répressif en s'attaquant à la médiatisation de l'incitation, ce qui n'est ni pertinent ni suffisant ?
Il semble que vous visiez plus particulièrement Internet et des sites nommément désignés, les sites « pro-Ana ». Ce mouvement, lancé aux USA vers 2000, est arrivé en France il y a deux ans environ. À travers ce texte, je crains que nous lui fassions, involontairement, de la publicité. Ces sites sont actuellement cités dans tous les articles de presse qui évoquent cette proposition de loi.
Lorsque l'on tape « pro-Ana » sur un moteur de recherche comme Google, il y a 92 000 réponses. Et 5 620 blogs de filles peuvent être consultés. Les sites que vous visez particulièrement sont très divers. Certains ont d'ailleurs été fermés par leur hébergeur, sans doute en raison de leur dangerosité. Ce n'est pas suffisant.
Que faut-il en penser ? Pour le professeur Rufo, il faut éradiquer ces sites en tant qu'outils de propagande en faveur de l'anorexie. Mais Véronique Megglé nous met en garde : « Ces filles sont déjà rejetées par la société. Elles se sentent exclues. Faut-il encore plus les stigmatiser ? Si l'on interdit ces modes d'expression, on sait très bien que cela va réapparaître sous d'autres formes plus néfastes. Les interdire ne servirait qu'à donner bonne conscience aux politiques. En revanche, il est important de mettre en garde les adolescentes sur les dangers de ces sites ». Ces jeunes filles, faut-il les sanctionner ou les soigner ?
Qu'en sera-t-il des séries télévisées dans lesquelles joueront des mannequins trop maigres ? Qu'en sera-t-il des magazines ? Et en quoi votre texte peut-il être utile ou efficace ?
Les troubles du comportement alimentaire sont des sujets de santé publique importants, angoissants pour les familles qui y sont confrontées et graves pour les jeunes filles et les jeunes hommes qui y sont plongés. Ils mériteraient d'être traités avec une autre ambition et d'autres moyens. Surtout, ils devraient s'inscrire dans le cadre d'un plan national de santé des adolescents, et non pas abordés sous ce seul aspect répressif.
Votre texte, ma chère collègue, ne serait-il, au final, qu'un coup de pub contre la pub ? Ce texte est décevant, il n'est pas à la hauteur des attentes. Car ce n'est pas seulement aux sites Internet qu'il faut s'attaquer, c'est à l'anorexie elle-même. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, à la fin du XIXe siècle, Pierre-Auguste Renoir, dans Les Grandes Baigneuses, peignait des corps de femmes nues bien en chair, car l'esthétique dominante du beau et le symbole de la féminité étaient à l'époque aux femmes rondes. (Sourires.)
Certes, notre société a évolué depuis. L'une des questions qu'aborde ce texte est de savoir si le standard de la beauté féminine est la maigreur et si, pour cela, il faut inciter les femmes à être maigres.
Pour certains, l'extrême maigreur renverrait à une image de perfection, perfection liée à la maîtrise de son corps par l'esprit.
Pour moi, cette conception du corps et de l'image de soi confine à la négation de la réalité de la femme, qui a des formes, et l'installe dans un caractère androgyne, asexué et morbide.
Qu'est-ce que la beauté ? Qu'est-ce que tout le monde trouve beau ? Si l'on nous demandait ce qu'il trouve beau chez une femme ou chez un homme, chacun de nous aurait – du moins je l'espère – une réponse différente, et c'est bien normal. C'est l'un des charmes de l'humanité.
Aujourd'hui, je tiens à saluer le travail de notre collègue Valérie Boyer, qui a su trouver les mots justes pour proposer de combattre l'incitation doctrinaire à l'anorexie et travailler avec vous, madame la ministre, pour que cette avancée soit soutenue par le Gouvernement.
De votre côté, madame la ministre, vous avez engagé un travail efficace, même si d'aucuns le trouvent insuffisant, sur la « charte d'engagement volontaire sur l'image du corps », avec les professionnels de la mode, pour les rendre à la fois responsables et conscients de leur impact sur les jeunes, via le mannequinat.
En effet, personne, aujourd'hui, n'est habilité à définir les canons de la beauté. Sous prétexte d'ériger des standards médiatisés, on pousse des jeunes filles ou des jeunes garçons – on a rappelé ce matin que 10 % des anorexiques sont de jeunes hommes – à s'installer progressivement dans la maladie. Car du simple régime, on peut, progressivement, basculer vers un dérèglement psychique qui met en danger la vie d'une personne.
Répondre efficacement à ces incitations était devenu un devoir pour notre société. D'autant que ceux qui incitent à l'anorexie, via ce mouvement « pro-Ana » dont on fait malheureusement trop la publicité, se servent insidieusement de l'action des pouvoirs publics en faveur de la promotion de la nutrition et du bien-être par le sport chez les étudiants pour justifier leur discours et leur propagande.
Il nous faut également, bien sûr, être plus à l'écoute des questions des adolescents, à cet âge propice aux doutes et donc aux influences les plus néfastes. C'est dans cet esprit que j'ai proposé la mise en place à Nancy d'une maison des adolescents, guichet unique d'accueil et d'orientation qui s'inscrit, comme vous le souhaitez, madame la ministre, dans l'effort de détection le plus en amont possible de ce type de pathologie.
Madame la rapporteure, je vous félicite pour votre travail. Je vois dans cette coproduction législative avec le Gouvernement une avancée qui souligne que, pour notre majorité, toutes les questions doivent être abordées sans tabou. Cette initiative, en portant un coup d'arrêt aux incitations à l'anorexie, apportera une réponse concrète au drame que vivent quotidiennement plus de 40 000 familles dans notre pays. Elle participe de notre devoir de protection du bien-être collectif. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mesdames, messieurs les députés, je vous remercie d'avoir contribué à une discussion générale aussi intéressante. Je répondrai à certains points que vous avez évoqués au cours de la discussion des amendements, mais il en est un que je veux d'ores et déjà aborder : l'incrimination de mise en danger de la personne.
Selon certains, il serait inutile d'aller plus loin dans la procédure juridique puisque le code pénal offre déjà tous les instruments nécessaires. C'est totalement faux. L'article 223-1 parle de « danger immédiat », alors que l'anorexie est un processus de mort lente, un danger en devenir. Le nouveau code pénal ne nous permet donc en aucun cas d'incriminer la démarche que nous souhaitons poursuivre et le texte qui vous est présenté est absolument indispensable pour protéger les plus faibles de nos jeunes. L'incrimination de la mise en danger de la vie d'autrui visait à l'origine les conducteurs dangereux.
L'incitation au suicide qui aurait pu être retenue ne s'applique pas ici, car le danger n'est pas inéluctable. L'anorexie est en effet un processus qui peut conduire à la mort s'il n'est pas soigné. Nous n'avons donc actuellement aucun moyen juridique pour poursuivre l'appel à cette mort lente que lancent les sites incitant à l'anorexie. Je remercie donc Valérie Boyer de son initiative. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'appelle maintenant la proposition de loi dans le texte de la commission.
Cet article ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais le mettre directement aux voix.
(L'article unique est adopté.)
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article unique.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour soutenir l'amendement n° 1 .
L'utilisation fréquente des logiciels de traitement d'image pour modifier l'apparence corporelle d'une personne sur des photographies commerciales contribue à diffuser une représentation erronée de l'image du corps. Aussi est-il proposé d'en informer clairement le consommateur, en prévoyant que ces photographies soient accompagnées de la mention : « Photographie retouchée afin de modifier l'apparence corporelle d'une personne ». En cas de non-respect de cette obligation, la publicité sera considérée comme une pratique commerciale trompeuse au sens de l'article L. 121-1 du code de la consommation.
Si je comprends l'objectif poursuivi, force est de reconnaître qu'un grand nombre de photos de magazines sont retouchées pour des raisons très diverses. Je me suis même laissé dire que certains candidats aux élections font parfois retoucher les photos de leurs affiches de campagne. Faudrait-il le signaler ? (Sourires.)
S'agissant plus précisément de la lutte contre l'anorexie, il serait très difficile de distinguer les retouches qui visent à amaigrir le mannequin de celles qui relèvent d'une démarche créative. Une mention générale de retouche ne renseignerait qu'insuffisamment le lecteur sur notre objectif de lutte contre l'anorexie. De plus, certains journalistes spécialisés m'ont indiqué que cela pourrait être considéré comme attentatoire à la liberté de création et d'expression. Enfin, pour les photos qui sont achetées par les magazines à des journalistes, le contrôle paraît difficile à organiser et la responsabilité engagée difficile à déterminer. Même si je souscris à la philosophie de l'amendement, les difficultés qu'il pourrait susciter me conduisent à en demander le retrait.
Dans la discussion générale, j'ai tenté de démontrer que l'article unique qui vient d'être adopté n'était pas le simple outil de santé publique qu'il prétendait être, mais qu'il procédait de la volonté d'édicter des normes, ce que confirme le présent amendement, comme la plupart des suivants. Bien sûr, la préservation de la santé publique nécessite de fixer des normes sociales et, pour ma part, j'ai toujours été partisan, s'agissant de l'alcool ou du tabac, d'une position normative. Ainsi, l'interdiction de fumer dans les lieux publics est le résultat d'un travail scientifique, reconnu au niveau international, pas d'une intuition d'un certain nombre de parlementaires ou de médecins. Un rapport avait été établi entre les risques quant à la liberté et les bénéfices pour la sécurité sanitaire : la balance penchant clairement en faveur de la sécurité sanitaire, il fallait donc bousculer certaines libertés individuelles. Nous ne sommes plus ici dans le même cas de figure, mais dans l'inflation pénale. Vous quittez le domaine de la médecine et de la santé publique pour entrer dans celui de la normalisation sociale, avec une absence totale de précaution, et l'atteinte à la liberté d'expression que représente cet amendement pousse cette démarche jusqu'à la caricature. Bien sûr, nous ne le voterons pas puisqu'il n'est que le prolongement d'un texte bancal.
Si mes collègues en sont d'accord, je propose de retirer cet amendement dans la mesure où les explications de Mme la ministre répondent tout à fait à nos interrogations. (Approbations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il s'agit, d'une part, d'organiser un dépistage des troubles du comportement alimentaire dans le cadre des visites médicales auxquelles sont soumis les élèves au cours de leurs sixième, neuvième, douzième et quinzième années ; d'autre part, de préciser qu'un suivi régulier de l'indice de masse corporelle doit être réalisé à l'occasion des examens médicaux effectués au cours de la scolarité afin de favoriser le dépistage des troubles du comportement alimentaire, telle l'anorexie.
Par ailleurs, le contrat-cadre de partenariat en santé publique, conclu entre les ministères chargés de l'éducation et de la santé, pourrait être modifié afin d'inscrire les troubles du comportement alimentaire, tels que l'anorexie ou l'obésité, parmi ses objectifs prioritaires, en particulier en milieu universitaire.
Je partage les objectifs de Mme la rapporteure mais je dois lui signaler que cette disposition ne relève pas du domaine législatif.
Par ailleurs, je souhaite répondre aux orateurs de l'opposition qui ont présenté la proposition de loi de Valérie Boyer comme l'alpha et l'oméga de la politique gouvernementale en faveur de la santé des jeunes. Je rappelle que celle-ci est l'un de mes objectifs prioritaires de santé publique, et que j'ai présenté en conseil des ministres un plan extrêmement ambitieux. Je suis ainsi attachée à combattre le suicide des jeunes, en particulier chez les populations à risque telles que les jeunes homosexuels, où le taux est six fois plus élevé que la moyenne. Nous travaillons à une restauration de l'image avec l'aide du cinéaste si plein de délicatesse André Téchiné, qui a produit des oeuvres magnifiques sur ce sujet.
Valérie Boyer nous propose aujourd'hui un outil de lutte contre l'anorexie, qui est un complément, et non l'alpha et l'oméga de notre politique de santé des jeunes ! Je remercie d'ailleurs ceux des députés de l'opposition qui ont bien voulu reconnaître l'intérêt de notre démarche avec la charte volontaire…
…et les travaux conduits sous l'égide de M. Rufo et de M. Poulain.
S'agissant plus précisément de l'amendement, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance a instauré quatre visites médicales à six, neuf, douze et quinze ans, pour tous les enfants au cours de leur scolarité. Ces visites doivent comporter un bilan de l'état de santé physique et psychologique. La loi précise que le ministre chargé de la santé détermine le contenu des visites par voie réglementaire et que le Haut conseil de la santé publique est saisi du sujet. Cette mesure, qui avait fait consensus lors de la discussion de la loi, répond de façon intéressante à l'amendement. Je serai attentive à ce que le dépistage des troubles alimentaires figure dans le contenu de ces visites.
En ce qui concerne les étudiants, le contrat-cadre de partenariat en santé publique entre les ministères de la santé et de l'éducation nationale, qui date de 2003, est en cours de révision pour prendre en compte les nouvelles priorités de santé publique. Un comité de pilotage, au sein duquel siégeront les services universitaires de médecine préventive – les SIUMPPS – auxquels il revient d'organiser une visite médicale pour les étudiants, sera installé dans les prochains jours. La question du dépistage des troubles du comportement alimentaire sera également étudiée dans ce cadre.
Je suis extrêmement attachée à ce que des actions de prévention et de prise en charge soient menées. L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, l'INPES, travaille ainsi à la réalisation d'un outil qui permettra aux professionnels de santé – médecins, pharmaciens, infirmières – d'aborder les questions de prévention et d'éducation à la santé avec les jeunes qu'ils rencontrent. Cet outil pourrait constituer un nouveau support pour le dépistage des troubles du comportement alimentaire. Vous voyez donc, madame la rapporteure, que nous menons avec détermination un travail à la fois curatif et préventif. Nous vous avons entendue.
Mme la ministre ayant apporté des précisions qui répondent totalement aux interrogations soulevées dans cet amendement, je propose à mes collègues de le retirer. (« Encore ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je suis saisi d'un amendement n° 3 .
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le soutenir.
Afin d'améliorer le dépistage et la prise en charge des troubles du comportement alimentaire tels que l'anorexie, cet amendement prévoit qu'un enseignement spécifique leur soit consacré au cours des études de médecine.
Je crois que certains, ici, caricaturent la démarche de Mme la rapporteure à propos de ses amendements. Ils sont intéressants car ils me permettent de répondre sur des questions précises.
Nous comprenons bien que c'est important ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
C'est important, bien sûr !
Monsieur Le Guen, il est en effet important que le ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative puisse s'exprimer complètement devant la représentation nationale, étant donné les propos parfois caricaturaux que vous avez tenus.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Tout à fait !
Le contenu des études médicales et leur adaptation à de nouveaux enjeux de santé publique est une vraie question. Je remarque d'ailleurs que de nombreux médecins sont présents ce matin sur les bancs de l'Assemblée.
Les professionnels de santé sont, je crois, les premiers à reconnaître que le contenu des études dont ils ont bénéficié ne leur permet pas, parfois, d'affronter toutes les questions qui leur sont posées dans l'exercice quotidien de leur métier.
Madame la rapporteure, votre amendement n° 3 est bienvenu mais ne il relève pas du cadre de la loi.
Le professeur Martin, que j'ai cité dans mon propos liminaire, doit me remettre prochainement un rapport sur la formation des professionnels en matière de nutrition, notamment des médecins, dans le cadre de la formation professionnelle initiale et continue, et des professionnels non médicaux. Mon ministère et celui chargé de l'enseignement supérieur envisageront la façon de prendre en compte ces recommandations, en particulier dans les programmes de formation en ce qui concerne le dépistage et la prise en charge de l'anorexie.
Je suis très attachée, comme beaucoup d'entre vous, à ce que les études médicales soient en phase avec les problématiques et les priorités de santé publique. Je veillerai attentivement au respect de cet enjeu dans l'enrichissement des études médicales auquel nous sommes en train de procéder. Il serait dommage, madame la rapporteure, d'envisager cette affaire de manière aussi segmentée que vous le proposez.
Madame la ministre, je vous remercie de ces explications. Il est important, en effet, que les études de médecine soient réformées dans le sens que vous venez d'indiquer. Je suis donc prête à retirer l'amendement n° 3 . (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Vous aviez, madame la rapporteure, une spontanéité législative, un enthousiasme : où sont-ils passés ? J'espère que ce n'est pas notre débat qui vous frustre et vous amène à adopter une attitude de retrait, de repli.
Au-delà des questions posées, un travail mieux préparé aurait peut-être été plus utile.
L'amendement n° 3 est retiré.
Je suis saisi d'un amendement n° 4 rectifié .
La parole est à Mme la rapporteure, pour le défendre.
L'amendement n° 4 rectifié a été accepté par la commission. Il vise à mieux protéger la santé des modèles ou mannequins en prévoyant, d'une part, qu' ils – ou elles – bénéficient de visites médicales plus fréquentes, au minimum tous les six mois, et non plus tous les ans, afin qu'on puisse s'assurer du maintien de leur aptitude à exercer l'emploi considéré, et, d'autre part, que cette aptitude soit appréciée en prenant notamment en compte leur indice de masse corporelle.
Si la signature de la Charte sur l'image du corps et contre l'anorexie, le 9 avril 2008, constitue une réelle avancée, la nécessité de renforcer la protection de ces personnes pourrait justifier la mise en place de dispositifs plus contraignants, en fixant par exemple des seuils d'IMC en deçà desquels leur santé serait altérée et où elles seraient dans l'incapacité de travailler, notamment si des progrès significatifs n'étaient pas accomplis dans le domaine de la prévention.
Ce sujet ne relève évidemment pas du domaine législatif. Il reviendrait à mon collègue Xavier Bertrand de répondre sur la médecine du travail.
Toutefois, je vais vous fournir quelques éléments.
Le plan « Santé des jeunes », que j'ai présenté le 27 février dernier, comprend différentes mesures permettant de prendre en compte ce qui existe déjà en matière de médecine du travail.
Des dispositions législatives et réglementaires, récemment complétées par le décret du 27 août 2007, prévoyaient déjà le suivi médical des mineurs employés dans les spectacles ou la mode, et des mannequins adultes.
En ce qui concerne les mineurs soumis à l'obligation scolaire, leur emploi par une entreprise de spectacles ou en vue d'exercer une activité de mannequin fait l'objet, en sus des dispositions du code du travail régissant l'emploi des mineurs, d'une législation et d'une réglementation spécifiques. Ainsi, les textes prévoient un examen médical, tous les trois mois pour les enfants de moins de trois ans, tous les six mois pour ceux de trois à six ans et tous les ans pour ceux âgés de plus de six ans.
Le contenu de cet examen doit être déterminé par arrêté. La rédaction d'un cahier des charges est actuellement en cours, en collaboration avec le ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité.
En ce qui concerne les mannequins adultes ou les mineurs de plus de seize ans, non soumis à l'obligation scolaire, le décret prévoit que la visite médicale d'embauche qui permet de vérifier leur aptitude reste valable un an si le mannequin est employé par une seule agence ou six mois s'il est employé par plusieurs agences. Cette périodicité peut être modifiée en cas de besoin. En effet, si le médecin du travail constate que le l'IMC du mannequin nécessite un suivi médical plus fréquent, il lui appartient de fixer la date d'une nouvelle visite.
Trois mesures ont été décidées à la suite des négociations menées lors des travaux sur l'image du corps, et donc sur la santé des jeunes.
Premièrement, il a été prévu de renforcer le contenu des visites médicales des mannequins adultes ou mineurs de plus de seize ans. Cette action sera menée avec la détermination que manifeste le ministère dont j'ai la charge. Nous avons élaboré un référentiel relatif au contenu de ces visites, des examens requis, en partenariat avec la médecine du travail. Le pesage et l'IMC, avec des seuils précis, feront partie des critères sanitaires d'aptitude à défiler.
Deuxièmement, il a été prévu de rapprocher le rythme des visites médicales.
Troisièmement, il a été prévu de demander à tout organisateur de manifestation de fournir un certificat d'aptitude des mannequins datant de moins d'un mois.
Comme vous le voyez, madame la rapporteure, mon collègue Xavier Bertrand et moi-même avons élaboré de nouvelles mesures très fortes, qui sont de nature réglementaire et non législative.
C'est en effet probable.
Je comprends que l'on puisse se focaliser sur les conditions de travail d'une catégorie particulière de nos concitoyennes et de nos concitoyens qui sont particulièrement menacés. Lorsque nous légiférons dans cet hémicycle sur la santé au travail, nous parlons des mannequins. Il est vrai que, maintenant, cette profession est reconnue en haut lieu et que la sollicitude qu'on lui témoigne est toujours la bienvenue.
C'est vraiment d'un goût douteux !
Ce qui est d'un goût douteux, c'est de lancer un débat de santé publique dans la presse people autour de ce type de question.
Ce qui est d'un goût douteux, madame la ministre, c'est de traiter les problèmes de l'anorexie en s'intéressant essentiellement à ce qu'en penseront un certain nombre d'articles de la presse people. J'estime que ce n'est pas le lieu idéal pour traiter de santé publique. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plus sérieusement – et je pose la question avec une certaine gravité –, va-t-on déclarer des gens aptes ou inaptes au travail sur la base d'un critère qui serait celui de l'indice de masse corporelle ?
Si un examen médical doit être fait pour prendre en compte l'adaptabilité au travail, ce doit être par rapport à un ensemble de signes cliniques, et non à un signe biologique. Ce serait une innovation introduite dans la loi, une approche caricaturale de l'activité médicale.
, rapporteure. Madame la ministre, compte tenu des explications très détaillées que vous avez fournies sur le suivi de ces personnes, je retire l'amendement.
Sur le titre de la proposition de loi, je suis saisi d'un amendement n° 5 .
La parole est à Mme la rapporteure pour défendre cet amendement.
L'amendement n° 5 a été accepté par la commission.
Il vise à préciser que la proposition de loi a pour objectif de lutter contre les incitations à l'anorexie, mais aussi à une maigreur extrême que certaines personnes peuvent être encouragées à rechercher sans pour autant être malades, par exemple si elles sont sous l'emprise d'une personne ou d'un mouvement sectaire.
Je suis choquée par la façon dont nos propos sont déformés et caricaturés. Je comprends la frustration de certaines personnes qui ne peuvent pas s'exprimer autant qu'elles l'auraient souhaité sur certains sujets.
Ce texte visant à modifier le code pénal s'inscrit, je le répète, dans une démarche globale. Nous avons la chance d'avoir en France, comme l'a excellemment rappelé Mme la ministre, deux programmes particulièrement ambitieux pour la santé des jeunes : d'une part, le plan Santé des jeunes et, d'autre part, le plan national Nutrition santé, dans lesquels les troubles de l'alimentation sont largement traités.
La France peut à cet égard être érigée en modèle de santé publique, parce qu'il y a peu de pays qui peuvent s'enorgueillir d'accorder autant d'importance à la santé de leurs jeunes et de traiter de façon aussi détaillée et approfondie les troubles de l'alimentation.
La semaine dernière a été signée une charte qui réunit différents professionnels, et nous l'avons longuement évoquée dans cet hémicycle. Cette charte est un élément extrêmement nouveau. La France est, là aussi, en pointe pour la prise en charge de l'image du corps et pour l'expression des diversités corporelles. Elle prend en compte toutes les souffrances liées à l'anorexie et l'ensemble des troubles de l'alimentation.
Le dispositif que nous vous proposons aujourd'hui a pour objectif de créer un nouveau délit afin de pouvoir sanctionner les comportements les plus extrêmes. Il a aussi une valeur dissuasive.
Je le répète : je suis choquée que mes propos aient pu être caricaturés à ce point. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Avis favorable.
S'il s'agit de lutter contre les sectes, il existe déjà une législation. J'ai d'ailleurs cru comprendre que, à certains moments, elle avait été un peu fragilisée. Dans cette assemblée, tout le monde souhaite à l'évidence la renforcer, mais faut-il pour autant le faire par le biais de la lutte contre la maigreur extrême ?
En élargissant le titre de la proposition de loi, au nom d'un combat légitime contre les sectes et contre les formes scandaleuses d'expression de leur puissance, qui agit sur le corps, par la soumission à des commandements, nous passons d'une question de santé publique – l'anorexie définie par des tableaux cliniques – à une appellation plus large de « maigreur extrême », sans en donner de définition, en se référant à un concept de normalité.
Cette proposition de loi déborde l'aspect médical et de santé publique – on peut comprendre ses intentions, même si elles sont, à mon avis, dangereuses du point de vue législatif – pour prendre en compte des normes sociales.
J'avais exprimé des doutes lors de la discussion générale : ils sont confirmés.
Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne votera pas ce texte, hors sujet, qui ne répond pas au problème complexe et douloureux qu'il prétend résoudre. Il s'agit d'une question de santé publique ; or, en la matière, nous manquons cruellement de moyens. La misère de la santé scolaire en est une illustration. Vous souhaitez vouloir contrôler l'indice de masse corporelle des enfants et des jeunes, mais vous n'indiquez pas avec quels personnels et quels moyens nouveaux cette tâche supplémentaire sera accomplie.
Il s'agit à mes yeux d'un texte d'affichage bien léger. Quand j'entends disserter, par exemple, sur le contenu des études médicales, je voudrais vous dire – peut-être l'ignorez-vous – que les études médicales comportent un enseignement de psychiatrie et accordent une place particulière à l'anorexie mentale dans l'enseignement de la psychiatrie.
Alors, affirmer – la main sur le coeur – qu'il faut renforcer cet enseignement ne mange pas de pain !...
C'est le cas de le dire ! (Sourires.)
…mais cela ne trompe personne.
Le débat qui vient d'avoir lieu me conforte dans l'opinion que j'ai exprimée lors de la discussion générale. Les amendements Mme Boyer, retirés un à un, sont de nature à confirmer cette opinion.
Leur retrait allait plutôt dans votre sens !
Il s'agit bien d'un texte d'affichage visant à donner la parole à Mme la ministre, mais surtout à vous donner bonne conscience face à l'insuffisance de votre politique de santé publique. Pour notre part, nous ne cautionnerons pas cette démarche dangereuse.
Les réticences que nous avions au début de la discussion demeurent : le débat qui a eu lieu n'a pu que nous conforter dans nos appréhensions.
Le Gouvernement et la commission ont réagi, voire sur-réagi à un réel problème de santé publique ; en tout cas, ils ont répondu à côté. Ressort de cette proposition de loi une grande confusion. En fait, ce texte participe de l'inflation législative, car nous disposons déjà des instruments nécessaires pour mener – si nous le souhaitions véritablement – une politique de santé publique plus intense et plus efficace pour lutter contre cette maladie qu'est l'anorexie mentale, et renforcer le soutien aux familles – je n'oublie pas cette dimension essentielle du problème. Mais, en l'occurrence, j'estime que vous êtes à côté de la plaque.
La volonté de « surlégiférer » conduit à la confusion dans l'écriture législative. La santé publique doit, certes, savoir imposer des règles contraignantes à la société. Mais pour respecter l'équilibre entre les libertés et la sécurité, elle doit le faire à bon escient. Or tel n'est pas le cas avec ce texte.
Loin de moi l'idée de polémiquer. L'examen de cette proposition de loi a permis le débat sur un sujet particulièrement préoccupant pour les jeunes concernés et leurs familles.
Nous avons eu une discussion approfondie. Nous sommes parvenus à un texte répressif. La Charte d'engagement volontaire sur l'image du corps apportera des recommandations sur les bonnes pratiques. Les amendements de notre rapporteure ont permis d'obtenir de nombreuses réponses de la part de Mme la ministre.
Nous pouvons, ce matin, être fiers de notre travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je ne doute pas que les familles concernées nous apportent leur soutien car il y va de la mise en péril de la santé et, parfois, de la vie de leurs enfants.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera cette proposition de loi présentée par Mme Boyer, que je remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant modernisation du marché du travail.
La séance est levée.
(La séance est levée à onze heures trente-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma