La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision (nos 1209, 1267).
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 1209%2C1267/675">675 , portant article additionnel après l'article 1er.
La parole est à M. Didier Mathus.
Madame la présidente, nous avons terminé la séance précédente sur une information importante et surtout inquiétante : de la propre bouche de Mme la ministre, nous avons appris que la convention collective de l'audiovisuel était remise en cause et que tout était renégociable,…
…ce que l'on peut comprendre dès lors que, sur le plan juridique, il ne s'agit plus de la même société. Mais, madame la ministre de la culture et de la communication, vous auriez pu vous engager à ce que la nouvelle convention collective garantisse un niveau social au moins équivalent à celui appliqué dans les conventions existantes.
C'est dire si votre annonce mérite la plus grande réflexion. Pour entretenir depuis des années des contacts avec l'intersyndicale de France Télévisions et les milieux de l'audiovisuel en général, les spécialistes de la question, dont Christian Kert et plusieurs d'entre nous, savent le prix que ceux-ci attachent à cette convention collective. Sa remise en cause d'une façon aussi explicite par Mme la ministre va, me semble-t-il, profondément inquiéter et choquer ces personnels.
Une fois de plus dans la discussion de ce projet de loi, c'est incidemment que nous apprenons les choses essentielles, soit à l'occasion d'un amendement, soit lorsque nous pressons de questions Mme la ministre, qui se montre décidément peu loquace. C'est son droit, bien sûr, mais cela nous oblige à insister pour obtenir enfin quelques réponses – et en l'espèce, celle qu'elle a fini par nous donner est de taille. Mon groupe, et plus largement l'opposition dans cet hémicycle, prend donc acte de l'annonce de la remise en cause unilatérale, uniforme et sans appel de la convention collective de l'audiovisuel public.
La parole est à M. Christian Kert, rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi organique relatif à la nomination des présidents des sociétés de l'audiovisuel public et le projet de loi sur le service public de la télévision.
Car ce qu'il semble découvrir aujourd'hui est écrit dans en toute lettre dans un rapport que je trouvais jusqu'à présent excellent – mais je dois être le seul. (Sourires.)
Il est ainsi indiqué à la page 144 : « Les conventions collectives ou accords d'entreprise des sociétés absorbées tomberont dans les conditions prévues par l'article L. 2261-14 du code du travail ». Si vous aviez pris la peine de lire ce rapport, vous n'auriez pas été surpris. À défaut d'être déjà gravé dans le marbre de la loi, cela figure expressément dans les commentaires que j'ai rédigés sur ce projet de loi.
La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Ce que j'ai dit à la fin de la précédente séance ne constituait aucune espèce de révélation. Je n'ai fait que rappeler ce que tout le monde sait parfaitement et qui est la simple application du code du travail – je l'avais déjà dit en commission en réponse aux questions et nous en avions discuté avec M. Rogemont : on ne peut être favorable au principe de la création d'une société unique, comme plusieurs d'entre vous l'ont dit, sans en accepter les conséquences. Quelque forme que prenne la nouvelle entité, sa création fera tomber les conventions collectives et ouvrira une phase de renégociation. Nous faisons toute confiance aux partenaires sociaux pour aboutir, dans les délais prescrits par le code du travail, à une convention collective qui convienne à toutes les parties.
La parole est à M. Didier Mathus.
Je ne peux laisser Christian Kert imaginer un seul instant que je n'aurais pas lu scrupuleusement son rapport. J'avais bien sûr vu le passage qu'il a cité, mais j'attendais que Mme la ministre nous assure que le Gouvernement veillerait à ce que le niveau social garanti par l'actuelle convention collective de l'audiovisuel public soit à tout le moins maintenu dans les futures négociations. Or c'est plutôt l'inverse que j'ai compris, à savoir que tout était remis en cause et renégociable. C'est cet aspect de l'annonce qui m'a choqué, indépendamment des considérations juridiques et formelles.
On aurait pu penser que le Gouvernement, alors qu'il annonce une diminution drastique des moyens de France Télévisions et qu'il laisse planer le mystère sur les effectifs – neuf cents suppressions, nous dit-on un jour, beaucoup plus à croire M. Lefebvre –,…
Il n'y a aucune diminution des moyens. Ils n'ont jamais été aussi élevés et ils sont garantis par l'État.
…aurait à coeur de rassurer les personnels, déjà soumis à rude épreuve en ce moment,…
…sur sa volonté de faire en sorte que la future convention collective ne se traduise pas par une dégradation des droits qui leur étaient reconnus jusqu'à présent.
Nous faisons confiance aux partenaires sociaux. Le contrat c'est le contrat !
Nous en revenons à l'examen des amendements portant articles additionnels après l'article 1er.
La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l'amendement n° 675 .
Au risque de surprendre nos collègues de la majorité, je dirai que cet amendement est d'inspiration typiquement sarkozyste.
Chacun a, je pense, encore en tête les propos péremptoires du Président de la République qui s'était pris, avant l'été dernier, à la fois pour le président de France Télévisions – après tout, il le nommera et le révoquera à sa guise si ce funeste projet de loi est voté –,…
…pour le responsable de la ligne éditoriale des chaînes du groupe et pour le directeur des programmes. À l'entendre, il fallait un projet de loi – le sien, évidemment –, pour qu'enfin on distingue les émissions des chaînes publiques de celles des chaînes privées.
Avec beaucoup de courage et un certain panache, M. de Carolis, dès le lendemain, a vertement réagi dans un interview sur une radio périphérique en qualifiant les réflexions du Président de la République de « stupides ».
Cette stupidité ne nous a guère étonnés, surtout celles et ceux qui regardent la télévision et qui savent reconnaître au premier coup d'oeil les programmes de TF 1 et ceux de France 2. Il y a tout de même une différence, et c'est heureux…
Bref, nous avons pensé que la loi était le meilleur support pour transcrire la forte pensée du Président de la République. C'est ainsi que nous vous proposons d'y graver que la télévision et la radio publiques n'ont de sens que si elles se distinguent nettement, dans leur nature même, des chaînes du secteur privé. Il a donc tout lieu de croire que l'amendement n° 675 sera voté à l'unanimité.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
Je crains fort que l'unanimité ne soit pas au rendez-vous, monsieur Bloche…
Pouvez-vous raisonnablement imaginer que nous acceptions un amendement, fût-il directement inspiré de propos du Président de la République, et très réussi sur le plan du romantisme, mais qui n'est pas de nature législative ?
Le Président n'a rien d'un romantique. Il ne lit pas La Princesse de Clèves !
On peut concevoir que vous ayez compris que l'esprit de cette loi était de faire en sorte qu'il y ait une grande différence entre le secteur public et le secteur privé, à commencer par le fait qu'il n'y aura plus de publicité sur le secteur public. Cette différence apparaîtra donc clairement dès janvier 2009. Reste que l'écrire en des termes aussi peu juridiques et législatifs pourrait apparaître en quelque sorte comme un dysfonctionnement de notre part. C'est la raison pour laquelle la commission a repoussé votre amendement, tout en reconnaissant bien volontiers qu'il rejoint la préoccupation essentielle du projet de loi : différencier clairement, comme le président de Carolis a commencé à le faire, le secteur privé et le secteur public.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. Je ne pense pas qu'il ait sa place dans le texte.
La parole est à M. Marcel Rogemont.
Monsieur le rapporteur, la présence ou non de la publicité n'est pas nécessairement un critère de qualité, à même de permettre de distinguer les chaînes publiques des chaînes privées. La meilleure preuve que l'on puisse en donner est BBC One en Angleterre : elle programme régulièrement des émissions de téléréalité que le secteur privé aimerait produire. Même sans publicité, on peut avoir des émissions « strash ».
Trash, si vous voulez. Je suis trop heureux d'entendre enfin la parole de l'UMP…
Votre argumentation aurait été parfaite, monsieur le rapporteur, si la publicité était en soi un critère permettant de distinguer une chaîne de service public répondant à des exigences de qualités conformes aux attentes exprimées par Patrick Bloche. Malheureusement, tel n'est pas le cas. C'est pourquoi je souhaite que vous nous fournissiez d'autres arguments afin que je puisse éventuellement me rallier à votre position.
(L'amendement n° 675 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 676 .
La parole est à M. Didier Mathus.
Toute cette série d'amendements vise à définir notre ambition pour la télévision publique, y comprist en termes d'audience. J'ai été choqué par le débat qui s'est instauré sur le présupposé au sujet de la publicité, et qui laissait à penser qu'à partir du moment où la télévision était populaire, regardée et à même de recueillir une certaine audience, cela devenait suspect… Étrange raisonnement ! Je comprends que pour certains la télévision « populaire » – entendez : qui touche le plus de monde – ne peut être que celle des amis du Président, et que la télévision publique se contentera de diffuser de l'opéra serbo-croate non sous-titré tous les soirs à vingt heures trente. (Sourires.)
Nous pensons que la télévision publique doit avoir une autre ambition et être à même de proposer une offre de programme qui concourt à faire de chacun de nous un citoyen libre et éclairé.
Merci de le reconnaître, monsieur le rapporteur. C'est en effet une belle ambition pour la télévision publique, même si elle n'est pas nouvelle : depuis le XVIIIe siècle, c'est la volonté des défricheurs de la connaissance. La télévision est l'un des plus beaux outils de conquête de la connaissance. Je vous renvoie à l'incipit de L'Encyclopédie de Diderot – forcément très beau : « Pour que chacun puisse participer, selon ses moyens, à la lumière du monde. »
C'est ce que nous demandons aujourd'hui à la télévision publique. Encore faut-il qu'elle ait des téléspectateurs et qu'on la confine pas dans un réduit, un ghetto, alors que sa mission est précisément de toucher le plus grand nombre et d'aider à fabriquer des citoyens qui soient à la hauteur des enjeux de la société contemporaine. C'est là une noble tâche qui mérite d'être soulignée dans la loi et encouragée par la représentation nationale. Je vous invite donc à adopter l'amendement n° 676 .
Quel est l'avis de la commission ?
Monsieur Mathus, vous auriez pu citer Blaise Pascal, qui, faisant référence aux seuls moyens de communication de l'époque, disait : « C'est la main de l'intelligence. » La télévision serait donc devenue l'outil de l'intelligence. Tant mieux si notre ambition commune est de faire de chacun de nous des citoyens libres et éclairés – le temps des Lumières n'est finalement pas si loin…
Reste que la commission est défavorable à cet amendement, non par esprit de clan, mais par le fait qu'il n'a aucun caractère juridique, quand bien même les intentions sont des plus louables et les références à l'histoire et l'actualité des plus pertinentes. Quels que soient les auteurs auxquels nous faisons allusion, ils ont tous vocation à cette formidable aspiration d'un citoyen libre et éclairé dans une société humaine, qui se reconnaît ainsi.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui n'a aucun caractère juridique, même si nous partageons les objectifs d'audience exprimés par M. Mathus – et qui figurent d'ailleurs dans le cahier des charges.
Si l'on exigeait de tous les amendements d'avoir un caractère juridique, cela se saurait… Surtout pour les amendements de M. Lefebvre !
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Mon collègue Bloche a tout à fait raison, d'autant que l'amendement n° 676 tentait de réconcilier le texte du projet de loi avec l'exposé des motifs rédigé par Mme la ministre, dont le lyrisme mérite que l'on en cite quelques extraits : « La culture est un défi pour la télévision publique. Ni le privilège d'une élite, ni l'apanage des noctambules, elle doit irriguer les grilles de programmes et se partager aux heures de grande écoute, avec le souci de s'adresser à tous. Le patrimoine est une passion française, tout comme la chanson. La télévision publique doit savoir porter ces passions à l'écran. Elle doit inviter les téléspectateurs au théâtre, à l'opéra. Faire naître le frisson du cinéma et le plaisir de la lecture, les deux pouvant d'ailleurs se rencontrer à travers des adaptations de notre patrimoine littéraire. »
Le projet de loi, article après article, dément tellement ces intentions si pures et si lyriquement exprimées que nous ne pouvions faire autrement que d'essayer de réconcilier le texte avec les intentions officielles…
Madame la ministre, vous avez émis des doutes sur les réactions, que je vous avais rapportées, des Britanniques à l'égard de votre projet. Aussi vais-je vous lire l'extrait d'un article prouvant que la réforme française inquiète jusqu'aux scénaristes britanniques.
Dans une lettre adressée à Maurice Gourdault-Montagne, ambassadeur de France en Grande-Bretagne la Writer's Guild Center, qui regroupe 2 300 membres, demande au gouvernement français de « reconsidérer son projet de réforme ». Si elle ne remet pas en cause la suppression de la publicité sur la télévision publique, la WGC explique qu'affaiblir France Télévisions, c'est « s'exposer à une baisse de qualité sur l'ensemble du secteur audiovisuel, toutes chaînes confondues ». Citant son « expérience » en Grande-Bretagne, la WGC estime que, pour être « crédible », un service public de l'audiovisuel doit réunir deux conditions : « un financement adéquat et pérenne provenant d'une source publique, assuré sans conditions » et « des structures robustes et transparentes à même d'assurer la séparation et l'indépendance du diffuseur public vis-à-vis des organes du gouvernement et de l'État ». On ne saurait être plus clair.
Nos amendements n'ont d'autre but que de chercher à apporter quelques assurances, au moment où certains membres de l'UMP, qui siègent dans cet hémicycle, portent sur France Télévisions un regard dénué de toute bienveillance, où le service public garde certes le droit de s'exprimer, mais assez modérément, sur la crise du pouvoir d'achat des Français, où enfin la mission qui porte le beau nom de service public ne cesse d'être décriée par des personnalités éminentes de la cette majorité. Vous nous feriez beaucoup de peine, monsieur le rapporteur, si vous mainteniez votre avis défavorable sur l'amendement n° 676 .
(L'amendement n° 676 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 677 .
La parole est à M. Marcel Rogemont.
L'amendement n° 677 vise à insérer un article 43-10 ainsi rédigé : « La liberté de communication s'applique au service public de l'audiovisuel en assurant aux téléspectateurs et aux auditeurs une liberté de choix dans le pluralisme de l'expression et dans les programmes. »
La précision importante, indispensable même quand on sait le regard « attentif » que le Président de la République porte sur la télévision publique… Si encore ce n'était qu'un regard ! Dois-je rappeler certains propos qu'il a tenus ? « Personne n'est là pour m'accueillir. » « Toute cette direction, il faut la virer. » « Je ne peux pas le faire maintenant, mais ils ne perdent rien pour attendre. Cela ne va pas tarder. » Après de telles menaces, on comprend mieux pourquoi un projet de loi sur l'audiovisuel a été déposé… Certes, pour l'heure, la liberté de communication dans le service public est, en pratique, parfaitement assurée. Mais n'y a-t-il pas de quoi s'inquiéter en entendant de telles déclarations ?
Autre commentaire de M. Sarkozy, au sujet d'une émission de France Télévisions au sujet d'un conflit sur une entreprise : « J'ai déjà vu des reportages malhonnêtes, mais de cette nature, c'est assez rare. Je vous félicite, madame – la journaliste qui a réalisé le reportage –, c'est vraiment très rare, c'est quand même plus compliqué que le reportage sommaire et quelque peu politique que vous avez osé présenter. » Lorsqu'un Président de la République se permet ce genre de considérations…
…il est bon de rappeler quelques principes et d'inscrire dans la loi que la liberté de communication s'applique au service public de l'audiovisuel en assurant aux téléspectateurs et aux auditeurs une liberté de choix dans le pluralisme de l'expression – je ne reviens pas sur le temps dont dispose l'opposition dans les médias – et dans les programmes. La liberté d'expression des personnels de France Télévisions doit être garantie. Afin que cette liberté intellectuelle soit préservée, il est nécessaire, selon nous, de la faire figurer dans la loi, tant le Président s'occupe de tout, jusqu'au sein de France Télévisions. C'est la raison pour laquelle j'invite chacun d'entre vous à voter cet amendement.
Quel est l'avis de la commission ?
La commission a repoussé cet amendement pour les mêmes raisons que précédemment : il n'a aucun fondement juridique. Ajoutons que la vie au quotidien du Président de la République ne peut tout de même pas servir de base à la rédaction d'amendements ! Ne pourrait-on parler d'autre chose ?
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Également défavorable. Pour ce qui est du pluralisme des opinions, je vous renvoie à mon exposé des motifs que Mme Mazetier vient de citer, ce dont je la remercie : « Fenêtre ouverte sur le monde, elle doit être un modèle de pluralisme et d'indépendance. Intransigeante sur la liberté d'expression et respectueuse de toutes les opinions, elle donnera des espaces pour de vraies confrontations d'idées. » Quant au pluralisme des programmes, il est inscrit à l'article 1er, d'ores et déjà adopté.
La parole est à M. Michel Françaix.
Même lorsque nous faisons des propositions concrètes qui ne vous engageraient pas beaucoup, vous nous opposez une fin de non recevoir, quitte à l'agrémenter d'une petite réponse amicale et indulgente du style « pourrait mieux faire » !
La question est de savoir si l'on croit au service public. Si oui, est-on capable d'énoncer que ce que le service public peut faire et ce que les télévisions privées, aussi intelligentes et positives soient-elles, ne feront jamais ? Dès lors, n'est-il pas intéressant de redéfinir les missions du service public et d'en faire mention quelque part ? Ne serait-il pas utile d'écrire noir sur blanc que le service public doit tisser du lien social, fédérer les publics, apporter du sens, faire oeuvre de citoyenneté et permettre, comme le souhaite Mme la ministre, l'émergence de nouveaux talents ?
À chaque fois, que nous vous demandons de définir un service public fort afin d'assurer un équilibre avec les télévisions privées, vous nous rétorquez que cela va de soi et que c'est inutile. Et lorsque nous vous poussons dans vos retranchements, vous faites valoir que la seule différence qui existerait entre le service public et la télévision privée, c'est la publicité. Certes, je suis content de vous voir adopter, sous l'impulsion du Président Sarkozy, une position d'extrême gauche en cherchant à arracher le service public à l'esprit marchand, puisque sans esprit marchand, il n'y a pas de bonne publicité… Entre puritanisme ou tartufferie, choisissez ! La publicité fait partie de la vie et, à dose raisonnable, ce n'est pas cela qui fera la différence entre le public et le privé.
Si nos propositions vous paraissent trop vagues, aidez-nous au moins à les approfondir afin que nous aboutissions à une définition claire. Osons dire que les télévisions privées sont nécessaires. Au demeurant, sans François Mitterrand, nous en serions encore au temps de l'ORTF et nous n'aurions pas augmenté leur nombre ! Mais osons dire aussi que le service public joue un rôle crucial dans un certain nombre de domaines.
C'est la raison pour laquelle nous vous soumettons quelques définitions. Je veux bien admettre que l'on peut en trouver de meilleures, mais j'ai du mal à accepter que vous décrétiez ce débat inutile, que, de toute façon, vous ferez comme bon vous semblera et que prétendiez avoir sauvé le service public parce que vous aurez supprimé la publicité. C'est inacceptable !
C'est un peu court et j'ose espérer que, dans la suite du débat, vous finirez par admettre que ce genre de réponse ne peut suffire.
Vous inventez des fantômes pour vous faire peur !
(L'amendement n° 677 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 710 .
La parole est à M. Patrick Bloche.
L'amendement n° 710 tend à préciser que la liberté de communication doit garantir au sein du service public de l'audiovisuel une information pluraliste et indépendante. Par cet amendement fondateur, nous souhaitons rappeler que la communication audiovisuelle est libre – article 1er de la loi de 1986 – et que l'exercice de cette liberté doit respecter « le caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion ».
En l'inscrivant dans la loi, nous déclinons une obligation qui a valeur constitutionnelle. Le 18 septembre 1986, le Conseil constitutionnel précisait que le respect du pluralisme est une des conditions de la démocratie, aussi bien dans le cadre du service public que dans celui du secteur privé. Le Conseil rappelait par ailleurs que l'objectif à réaliser est que les auditeurs et les téléspectateurs soient à même d'exercer leur libre choix sans que les intérêts privés comme les pouvoirs publics puissent y substituer leur propre décision, ni qu'on puisse en faire les objets d'un marché. Notre amendement vise ni plus ni moins à inscrire dans la loi ce que, dans sa grande sagesse, le Conseil constitutionnel, avait déjà dit voilà maintenant vingt-deux ans.
Toujours à propos de cette nécessité du pluralisme et de l'indépendance de l'information, nous avons à l'esprit les belles intentions de l'exposé des motifs de votre projet de loi, madame la ministre. « La mission d'une télévision publique est aussi d'éclairer les grands enjeux de société, de donner aux téléspectateurs les moyens de comprendre et surtout de participer aux débats. Fenêtre ouverte sur le monde, elle doit être un modèle de pluralisme et d'indépendance. Intransigeante sur la liberté d'expression et respectueuse de toutes les opinions, elle donnera des espaces pour de vraies confrontations d'idées ».
France 3 a voulu à cet égard montrer l'exemple pour éclairer notre débat actuel. J'ai ainsi eu l'honneur et le plaisir de débattre avec le président Copé et plujsieurs professionnels de l'audiovisuel dans l'émission de Frédéric Taddei. Malheureusement, pour ce qui est de la confrontation d'idées, j'ai été affreusement déçu en fin de semaine dernière. Un journaliste de France 3 m'avait contacté pour me demander si j'acceptais de débattre, dans le cadre d'une émission enregistrée, avec Mme Albanel, samedi dernier à onze heures. Le débat devait être diffusé ensuite dans le Soir 3, le jour même. Ce n'était pas du direct et, comme quelques autres socialistes, j'avais une semaine chargée, mais j'ai tenu à assumer mes responsabilités. Quelle ne fut pas ma surprise d'apprendre la veille que le cabinet de Mme la ministre avait fait savoir à la chaîne qu'elle ne souhaitait pas débattre avec moi.
Mais non !
Je me suis étonné de ce refus dans la mesure où je suis un député de l'opposition, avec la légitimité que me confère le suffrage universel. À la place, France 3 suggérait de faire venir M. Jack Ralite, sénateur communiste pour lequel nous avons par ailleurs un immense respect. Finalement, il n'y eut pas de débat du tout…
Si je raconte cette anecdote, madame la ministre, c'est pour la mettre en regard avec votre exposé des motifs qui vante le débat et la confrontation d'idées. C'est beau de l'écrire, mieux vaudrait le mettre en application en ne fuyant pas le débat ! Et lorsque l'opposition vous présente un amendement qui décline votre exposé des motifs, il serait bienvenu de le voter !
Quel est l'avis de la commission ?
Pour ma part, monsieur Bloche, j'affrontais sur France 3 Méditerranée un de vos collègues, député des Hautes-Alpes, et cela s'est très bien passé ! Le débat est donc possible.
La commission a repoussé cet amendement pour les mêmes raisons que précédemment.
Je n'ai entendu personne, monsieur Françaix, dire que le critère principal de différentiation entre le secteur public et le secteur privé était la perte de publicité.
J'ai seulement dit que c'était l'un des critères qui pouvait concourir à une différenciation.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Défavorable également. L'article 43-11 de la loi de 1986 dispose explicitement que les chaînes publiques « offrent au public, pris dans toutes ses composantes, un ensemble de programmes et de services qui se caractérisent par leur diversité et leur pluralisme, leur exigence de qualité et d'innovation, le respect des droits de la personne et des principes démocratiques, constitutionnellement définis. » Autrement dit, votre amendement n'est que pure redondance.
Pour ce qui est de l'attaque personnelle dont je viens de faire l'objet, je précise à M. Bloche que je devais rencontrer Mme Tasca dans le cadre d'un débat, qu'elle a annulé. En aucun cas, je ne me suis dérobée. J'avais simplement pris un autre engagement.
La parole est à M. Didier Mathus.
Cette énumération, monsieur Kert, vous éclairera sur les raisons pour lesquelles nous sommes tant attachés à inscrire l'objectif du pluralisme dans le marbre législatif,
Octobre 2005 : M. Sarkozy intervient pour empêcher la publication d'un livre sur Cecilia Sarkozy.
Février 2006 : M. Nicolas Sarkozy conseille la direction d'Europe1 pour la nomination d'un journaliste au service politique.
Juin 2006 : le directeur de Paris-Match, Alain Genestar, coupable d'avoir publié en couverture une photo de l'épouse du président de l'UMP, est licencié.
Octobre 2006 : une journaliste de l'AFP se voit supprimer son accréditation pour avoir publié un reportage sur des perquisitions policières menées par erreur aux Mureaux.
Mai 2008 : la direction de l'UMP lance une campagne de dénigrement de l'AFP à l'occasion d'une décision de justice impliquant Ségolène Royal. Quelques semaines plus tard, un rapport du parti gouvernemental préconise le changement de statut de l'Agence. Aujourd'hui même, les journalistes de l'AFP ont publié un communiqué qui alerte l'opinion sur la transformation du statut de l'AFP, à l'initiative de l'UMP qui souhaite asservir cette agence comme elle le fait avec d'autres médias.
Septembre 2008 : M. Poivre d'Arvor, qui n'a pourtant rien d'un rebelle notoire, est « débarqué » de TF1.
Selon lui, des pressions élyséennes se sont exercées après qu'il eut traité d'« enfant » le Président de la République lors d'une interview.
Dans ces conditions, vous comprendrez qu'avec un hyper-Président de la République qui veut exercer tous les pouvoirs, nommer les journalistes, choisir les animateurs et décider des programmes, la question du pluralisme est essentielle pour nous.
(L'amendement n° 710 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 716 .
La parole est à M. Patrick Bloche.
Je comprends mal que Mme la ministre ait pris pour une attaque personnelle l'évocation d'un débat qui n'a pas eu lieu – ce que je regrette. Vous expliquez, madame la ministre, que vous aviez des engagements ; dans ce cas, je ne comprends pas pourquoi, après m'avoir contacté, on m'a expliqué que M. Ralite, par ailleurs un camarade et un ami, m'avait été préféré sur votre proposition. Peu importe ; quoi qu'il en soit, il ne s'agissait nullement d'une attaque à votre endroit.
Aux termes de l'amendement n° 716 , qui nous paraît tout à fait essentiel, « la Nation doit garantir à l'audiovisuel public des moyens suffisants pour remplir ses missions et se développer sur tous les supports existants ». Sincèrement, mes chers collègues, nous ne voyons pas comment vous pourriez refuser de le voter : il ne fait que décliner une grande partie du discours par lequel M. Copé nous a vanté les mérites de l'entreprise unique et promis que le global media se développerait presque miraculeusement après le vote du projet de loi, dégagé de toute contrainte et libre de déverser ses programmes sur tous les supports existants.
Vous l'aurez compris : c'est la diversification qui est en jeu. Au moment où nous examinons ce projet de loi, chacun comprend qu'Internet est en passe de devenir – si ce n'est déjà fait – le premier média. S'il s'agit d'élaborer un projet de loi historique, qui témoignerait d'un phénoménal courage et d'une éclatante modernité, ne perdons pas de vue que les contenus audiovisuels, quels qu'ils soient, se développeront inévitablement de plus en plus sur des supports numériques que l'on ne saurait restreindre à l'« étrange lucarne ». Aussi proposons-nous d'inscrire dans la loi un principe fort, essentiel, que devra traduire le contrat d'objectifs et de moyens : l'audiovisuel public doit disposer des moyens de se diversifier. Je me souviens de mes échanges sur ce sujet avec Patrice Martin-Lalande et avec l'excellent Gilles Carrez…
…au sein de l'atelier « Financement » de la commission Copé. D'évidence, la diversification suppose de commencer par dépenser de l'argent et réaliser des investissements afin non seulement de procurer de nouvelles ressources à l'audiovisuel public, mais également et surtout de lui permettre d'être présent sur des supports qui vont bien au-delà de ceux qui existent actuellement.
En d'autres termes, on doit pouvoir retrouver sur les réseaux la mission de service public assurée par France Télévisions.
En votant l'amendement n° 716 , la représentation nationale inscrira dans la loi la garantie, pour France Télévisions, de disposer des moyens de son développement et de sa diversification.
Nous tenons d'autant plus à cet amendement que, à nos yeux, le compte n'y est pas : un financement pérenne de l'audiovisuel public n'est nullement assuré à ce jour.
Quel est l'avis de la commission ?
La commission a repoussé cet amendement pour les mêmes raisons que les précédents.
Du moins celui-ci me rassure-t-il, car il montre que vous avez parfaitement compris l'esprit du projet de loi qui vous est soumis. « Garantir à l'audiovisuel public des moyens suffisants pour remplir ses missions », c'est précisément ce que dit le projet de loi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.) Lorsque nous vous garantissons que ce financement sera assuré par l'État, vous dénoncez une erreur et poussez des cris d'orfraie (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et voilà maintenant que vous demandez à la nation de le garantir ! Je ne peux que vous en remercier : vous avez tout à fait raison…
Nous préférons que ce soit inscrit dans le texte, car nous n'avons pas confiance !
…mais, cette précision n'étant pas de nature juridique, il est inutile de l'inscrire dans la loi.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Avis défavorable : l'article 18, consacré à la compensation de la suppression de la publicité, répond à la question posée en précisant l'engagement de l'État dans le financement de France Télévisions.
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
Les amendements défendus par nos collègues socialistes posent le problème de la spécificité de l'audiovisuel public. C'est un bon sujet ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) De fait, la loi de 1986 y consacrait son titre III et son article 43-11. Aussi, monsieur le rapporteur, avec tout le respect que je vous dois, vous ne pouvez donc affirmer que cette préoccupation n'est pas juridique, que vous l'approuviez ou non. La commission a même adopté un amendement de MM. Braouezec et Mamère, qui complète l'article 43-11.
Mme la ministre, a invoqué l'équilibre de la compensation, sur lequel nous reviendrons puisqu'il est au coeur de notre débat. Mais M. Bloche insistait plutôt sur la fin de l'article qu'il propose d'ajouter, c'est-à-dire sur le développement de l'audiovisuel public à travers tous les supports existants.
Avons-nous, oui ou non, l'ambition de développer un média global ? Voulons-nous faire de notre audiovisuel public un champion européen, à l'instar de tous les secteurs de notre industrie ? De ce point de vue, l'amendement n° 716 est intéressant : il prolonge l'article 43-11 et défend ces ambitions pour le service public. Le groupe Nouveau Centre le votera.
La parole est à M. Victorin Lurel.
Les réponses du rapporteur et de la ministre ne nous satisfont vraiment pas.
C'est délibérément que nous invoquons de manière aussi solennelle la Nation, qui doit garantir des moyens suffisants à l'entreprise unique France Télévisions.
Or, nous pouvons déjà le dire, la compensation de 450 millions que vous prévoyez est insuffisante : il faudrait le double. Qui plus est, vous envisagez un plan social qui amputera les ressources humaines de l'entreprise.
Ainsi, pour la seule RFO, soixante-cinq personnes travaillant pour la régie publicitaire sont concernées.
D'autre part, vous proposez de compenser par 450 millions d'euros la suppression de la publicité, mais vous n'envisagez aucun financement des heures ainsi libérées.
Vous invoquez également l'égalité de moyens, censée permettre à France Télévisions de se développer sur Internet et dans le secteur de la téléphonie mobile, mais vous la privez de ressources !
Notre demande est donc parfaitement justifiée. L'actuel président de France Télévisions l'a reconnu devant notre commission : le compte n'y est pas ! La précision et l'engagement solennel que nous réclamons n'ont donc rien de redondant ni de superfétatoire.
Ajoutons que votre proposition de financement est d'emblée biaisée, car elle rejaillira sur les usagers. En d'autres termes, il s'agit une fois de plus de faire les poches des Français ! Où est la compensation ?
Enfin, du fait de la fongibilité budgétaire, le produit de la taxe que vous proposez sera versé au budget de l'État, c'est-à-dire, je l'ai dit, dans un puits sans fond ! Rien ne garantit que, demain ou après-demain, il sera affecté à France Télévisions.
Nous sommes au coeur de votre projet. Vous prétendez que la suppression de la publicité donnera naissance à une télévision de qualité et que l'État la compensera ; mais, après les démantèlements auxquels vous procédez, après la disparition consommée de RFO, comment être sûr que France Télévisions disposera des moyens nécessaires à son épanouissement ?
(L'amendement n° 716 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 722 .
La parole est à M. Marcel Rogemont.
Aux termes de cet amendement, « l'audiovisuel public développe la démocratisation de la culture par son soutien à la création artistique et à sa diffusion ».
Chacun comprend le sens de cet article 43-10 que nous proposons d'ajouter à la loi de 1986, tant il est vrai que la démocratisation culturelle est une préoccupation partagée sur tous les bancs.
Rapporteur du budget de la culture pour 2009, j'ai pu mesurer que la démocratisation culturelle en France était plutôt une réussite, contrairement à ce que prétend tel ou tel – fût-il Président de la République. Mais si c'est un échec, comme l'a écrit dans la lettre de mission qu'il vous a adressée, madame la ministre, il faut donc consacrer à la démocratisation culturelle les moyens publics nécessaires. En outre, France Télévisions étant, je le rappelle, l'un des grands financeurs de la création et de sa diffusion, il faut naturellement conforter cette vocation.
Tel est le sens de l'amendement n° 722 : nous souhaitons que France Télévisions dispose de tous les moyens lui permettant de continuer d'accomplir les missions qu'elle exerce déjà. Redite, m'objecterez-vous ; mais il faut affirmer que la démocratisation culturelle constitue un objectif essentiel des politiques du Gouvernement en la matière et que l'audiovisuel public y joue un rôle privilégié.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Rogemont, rapporteur des crédits de la culture, est trop fin connaisseur de ces questions pour ignorer les efforts que France Télévisions consacre à la création.
Vous les avez du reste soulignés, mais vous auriez également pu rappeler quelques chiffres que vous connaissez aussi bien que moi. En 2007, France Télévisions a consacré 352 millions d'euros à la production ; en 2008, 365 ; la somme atteindra 37 millions en 2009, 385 en 2010, et est estimée pour 2012, année du tout numérique, à 420 millions. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Si l'on peut toujours espérer faire mieux, on ne saurait donc reprocher à France Télévisions, premier donneur d'ordres en matière de production audiovisuelle, de ne pas développer suffisamment la production et la création.
Le but du projet de loi est aussi d'inciter France Télévisions à faire encore plus d'efforts dans ce sens. Nous sommes donc à l'abri du danger que vous craignez. Et nous serions les premiers à le dénoncer avec vous s'il venait à se manifester.
La commission a donc repoussé cet amendement, au prétexte ou à l'argument,…
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Je rejoins le rapporteur. Ces préoccupations, essentielles, figurent d'ailleurs à la page 6 de l'exposé des motifs ; elles sont évidemment inscrites dans le contrat d'objectifs et de moyens – c'est tout le sens de l'engagement en faveur de la création – et viennent d'être à nouveau consacrées par les accords interprofessionnels que nous avons signés. Dans un communiqué publié aujourd'hui par l'AFP, Pascal Rogard n'hésite d'ailleurs pas à qualifier ces accords d'historiques, expliquant qu'ils ont enfin pacifié l'ensemble du secteur, notamment les relations entre producteurs et diffuseurs – ce qui a son importance.
La parole est à M. Michel Françaix.
Madame la ministre, nous ne vous demandons pas de nous rappeler à tout instant votre souhait de voir le service public fonctionner et la diversité culturelle assurée. Je suis persuadé que telle est bien votre volonté. Et comme j'ai déjà eu l'occasion de vous le dire, j'aurais tendance à vous demander, comme dans Les Fourberies de Scapin : Que diable allez-vous faire dans cette galère ? Il suffit de voir le peu d'énergie que vous mettez à défendre certaines dispositions du texte pour se rendre compte que vous ne partagez pas totalement la position du Président de la République. De ce point de vue, les choses sont tout à fait claires.
Quant à vous, monsieur le rapporteur, je ne demande qu'à vous croire quand vous affirmez que le secteur public est différent du secteur privé.
Mais il ne faut pas oublier que c'est le Président Sarkozy qui, il y a encore peu, déclarait qu'entre l'un et l'autre, on ne voit pas beaucoup la différence.
Je suis tout prêt à croire Mme la ministre et M. le rapporteur quand ils déclarent qu'ils veulent agir. Le seul problème, c'est que rien de tout cela n'est inscrit définitivement dans la loi.
La question est donc claire : le service public est-il utile dans notre pays ? Ceux qui pensent que oui doivent le dire.
Si nous n'inscrivons pas ce principe dans la loi, cela revient à considérer que notre pays n'a pas besoin d'un service public populaire ni de diversité culturelle, et que la Cinq et Arte sont largement suffisants. Et je ne m'étonnerais pas qu'une partie de nos collègues ici présents le pensent.
Je ne doute pas de votre bonne foi, madame la ministre, monsieur le rapporteur ; je veux juste que les choses soient écrites noir sur blanc dans la loi, car je crains fort qu'une partie de vos amis n'en aient rien à faire. Nous ne serons plus députés dans cinquante ans, du moins pour ce qui me concerne, et j'aimerais que ces principes perdurent au-delà des manifestations de la bonne foi d'une ou deux personnes présentes ce soir.
(L'amendement n° 722 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 727 .
La parole est à M. Patrick Bloche.
L'un des aspects les plus intéressants de la discussion de ces amendements, ce sont les réponses de M. le rapporteur – que nous remercions pour le soin qu'il y apporte, même si ses avis ne sont pas favorables – et de Mme la ministre. Il est frappant de constater que l'argument financier de la compensation prévue à tel ou tel article revient cycliquement. Mais au-delà de cette compensation – que nous contestons –, le problème le plus crucial aujourd'hui, si nous voulons un grand service public de l'audiovisuel, une belle télévision publique du XXIe siècle, un média global à nul autre pareil, une superbe entreprise unique, ce sont ses ressources : il ne suffit pas de compenser, il faut des ressources à la hauteur d'une telle ambition.
En matière de soutien à la création audiovisuelle et cinématographique, je m'étonne d'ailleurs d'entendre Mme la ministre citer comme seule référence culturelle une personne que nous connaissons bien les uns et les autres, et pour laquelle nous avons le plus grand respect, je veux parler de M. Pascal Rogard, qui, comme chacun sait, est le vice-ministre de la culture de note pays. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ignorer de la sorte les quarante-quatre organisations, dont beaucoup d'organisations culturelles, qui ont participé au mouvement du 2 juin, me paraît quelque peu grossier.
L'amendement n° 727 tend à rappeler une exigence qui s'impose à toutes celles et ceux qui aiment l'audiovisuel public : le service public de l'audiovisuel doit avant tout être au service du public et répondre à ses attentes, à ses besoins et, n'ayons pas peur des mots, à ses espérances. (Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP.) . Pour cela, mesdames, messieurs de la majorité, il ne s'agit pas seulement de compenser : on dirait que vous n'avez que ce mot à la bouche ! Non, il faut des ressources supplémentaires, nécessaires pour soutenir la création culturelle et audiovisuelle qui souffre tant dans notre pays aujourd'hui, pour diversifier France Télévisions et lui permettre d'être présente sur tous les supports existants. Vous ne vous en sortirez pas autrement.
Quel est l'avis de la commission ?
J'ose espérer qu'il s'agit du dernier des amendements incantatoires de cette série.
Il n'est pas incantatoire, seulement un peu moins juridique que les autres !
Ce qui ne nous empêchera pas de le traiter avec le sérieux qui lui sied.
Même sans le secours du vice-ministre Rogard, Mme la ministre est pleinement consciente du fait que le service public doit être au service du public.
Je m'insurge contre votre affirmation selon laquelle nous n'aurions que le mot « compensation » à la bouche. Il ne s'agit que d'un outil au service d'une puissante ambition, qui reste notre véritable mot d'ordre – mais peut-être ne l'avez-vous pas tout à fait saisi.
Oui, mais sans outils en quantité suffisante, il n'y a pas d'ambition possible !
Vous ajoutez que le service public doit répondre aux attentes du public, à ses attentes, et même – vous avez osé le mot – à ses espérances. Nous pouvons nous retrouver sur cet objectif, mais il nous semble inutile de l'inscrire dans loi.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Avis défavorable également. Si nous sommes tous animé par d'immenses espérances, il n'en demeure pas moins que ce projet de loi est un grand projet. Je le soutiens avec force dans tous ses aspects, je tiens à le redire. La compensation et l'indexation de la redevance sont autant de moyens au service d'une vaste ambition. Nous saurons la faire vivre à travers les contrats d'objectifs et de moyens, qui prévoient une augmentation de l'ordre de 3 % en moyenne sur les trois prochaines années. L'audiovisuel public disposera très largement des moyens nécessaires pour réaliser l'ambition culturelle que nous lui donnons.
La parole est à M. Didier Mathus.
Je ne peux laisser le rapporteur qualifier notre amendement d'incantatoire : il s'agit au contraire d'inscrire dans le marbre de la loi une notion essentielle, devenue centrale depuis deux mois.
Il ne vous a en effet pas échappé, chers collègues, que la notion même de service public a soudainement changé de nature. En quelques semaines, l'opinion publique est devenue plus réceptive à l'idée selon laquelle l'intérêt général peut s'incarner dans le service public. La notion de régulation publique a même trouvé parmi vous des défenseurs alors qu'il y a seulement trois mois, vous n'aviez pas de mots assez durs pour condamner tout ce qui pouvait ressembler à l'expression de l'intérêt collectif. C'était la réussite des champions qui primait, comme le prônait le grand mouvement des idées qui s'est développé après l'élection de Ronald Reagan en 1980 et qui a submergé le monde pendant près de vingt-huit ans. Aujourd'hui, cette période est révolue et le camp politique que vous représentez, incarnation de la théorie intellectuelle selon laquelle l'intérêt collectif doit être sacrifié à l'intérêt particulier et, au bout du compte, à celui à l'argent, voit poindre la fin d'un cycle. (Rires sur les bancs du groupe UMP.)
Dès lors, il est essentiel de rappeler ce que représente le service public, service du public.
Nous avons eu un débat analogue en commission à propos de la place des téléspectateurs. Nous y reviendrons à travers quelques amendements. C'est bien de cela qu'il s'agit : la télévision publique est d'abord faite pour être regardée ; lui assigner comme mission de répondre aux attentes, aux besoins et aux espérances du public, c'est, me semble-t-il, lui fixer un très bel horizon.
Je ne comprends pas que le rapporteur, chez qui j'ai cru sentir, au fil des années, une réelle sympathie à l'égard de la télévision publique, soit si radicalement hostile à nos amendements, faisant preuve d'un sectarisme que nous ne lui connaissions pas. Je suis parfois très surpris par ses prises de position. Comment refuser d'inscrire dans la loi la nécessité de répondre aux espérances du public ?
Il est parfois question en ce moment d'allumer les étoiles ; je vous invite, monsieur le rapporteur, à en allumer au moins quelques unes avec nous.
L'amendement n° 33 tend à préciser que les missions du service public « participent à l'éducation à l'environnement et à sa protection et au développement durable ». Contrairement, à nos collègues Mamère et Braouezec, nous avons tenu à intégrer cette dernière notion qui figure à l'article 7 du cahier des charges. Cela a donné lieu à un débat largement ouvert en commission sur les notions d'écologie, de développement, de développement durable, au terme duquel la rédaction que nous vous présentons a été retenue, de préférence à l'amendement de nos collègues Braouezec et Mamère, très proche, dont le seul inconvénient est de ne pas faire figurer cette notion.
Enfin, M. Mathus a employé cette très belle expression « allumer les étoiles »,…
On a les références qu'on peut… Chez Copé, c'est plus Johnny que Jaurès !
...a écrit que ceux qui savaient allumer les étoiles étaient des faiseurs de lumière. Eh bien, j'espère que nous serons des faiseurs de lumière. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Patrick Braouezec, pour soutenir l'amendement n° 806 .
J'entends bien l'argument de M. le rapporteur, mais l'expression de « développement durable » est désormais devenue un mot-valise que chacun met à toutes les sauces. J'avoue même que je suis de plus en plus sceptique devant la façon dont cette expression est récupérée, y compris par les grands monopoles, qui dévoient ce principe au lieu d'en faire une règle. C'est pourquoi Noël Mamère et moi-même avons préféré nous en tenir à l'environnement et sa protection, ce qui permet de mieux cibler les missions d'éducation du service public audiovisuel.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements?
Bien que partageant l'esprit de ces amendements, je trouve qu'ils auraient plus leur place dans le cahier des charges…
Aussi m'en remets-je à la sagesse de l'Assemblée.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Malgré tout le respect que m'inspire la poésie du rapporteur, j'avoue être surprise par le paradoxe qui consiste à repousser tous nos amendements, tout aussi poétiques que le sien, et à présenter l'amendement n° 33 .
Qu'entend-on concrètement par « elles participent à l'éducation à l'environnement et à sa protection et au développement du durable » ? Vous voilà bien loin de la réalité et du caractère opérationnel – sans parler du fondement juridique… Quelle incidence peut avoir un tel amendement sur les missions du service public de l'audiovisuel ?
Rappelons enfin que la question social est au centre du développement durable. Proposer un texte qui sous-finance le groupe France Télévisions, qui prévoit des réductions de postes, des départs à la retraite non remplacés et un plan social que d'aucuns considèrent d'ores et déjà comme notoirement insuffisant, avouez, monsieur le rapporteur, que cela a peu de choses à voir avec le développement durable ; cela augure mal de la participation à l'éducation à l'environnement et à sa protection et au développement durable, que vous souhaitez voir inscrits dans ce texte.
On a parlé d'allumer les étoiles – d'autres d'allumer le feu, témoignant d'une culture un peu plus proche de celle du Président de la République. Pour ma part, je me demande s'il ne faudrait pas chanter comme Michel Polnareff : « Je te donnerai, tous les bateaux, tous les oiseaux, tous les soleils »…
Cela participerait peut-être à cette passion pour la chanson française reprise dans l'exposé des motifs de cette loi ainsi qu'à l'éducation à l'environnement et à sa protection et du développement durable. Sinon, je ne vois pas très bien ce que signifie cet amendement.
La parole est à M. Patrick Bloche.
Comme nous écrivons la loi, il serait bon que nous n'y ajoutions pas des mots qui s'empilent sans grande cohérence.
Inscrire dans la loi qu'« elles participent à l'éducation à l'environnement et à sa protection a un sens, puisque c'est une préoccupation liée à la protection de l'environnement ; mais y ajouter « et au développement durable » me paraît non seulement superfétatoire, mais surtout incohérent. Car le développement durable recouvre trois piliers : le développement économique, c'est-à-dire la croissance et l'emploi, la justice sociale et la protection de l'environnement. Ce qui fait l'amendement n° 33 de M. le rapporteur, même s'il se veut consensuel, donne finalement peu de sens à la loi : il aurait été plus compréhensible s'il n'avait été centré que sur une seule préoccupation.
Enfin, nous comprendrions mal que cet amendement soit accepté après avoir refusé tous ceux que nous avons présentés après l'article 1er au motif qu'ils n'avaient aucune valeur juridique ! Car si vous trouvez que celui-ci en a une, il va falloir le prouver !
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
Tous les amendements de cette série – qu'on les aime ou qu'on ne les aime pas – sont parfaitement légitimes : le but est de compléter l'article 43-11 de la loi de 1986, modifiée par la loi 2006-396 de 2006, qui définit les grands principes du secteur public de la communication audiovisuelle. Cet article dispose que ces sociétés mettent en oeuvre des actions en faveur de la cohésion sociale, de la diversité culturelle ou encore qu'elles concourent au développement et à la diffusion de la création intellectuelle et artistique. Faut-il le modifier ? Que l'on soit pour ou contre, on ne saurait répondre que cela n'a rien à voir avec la loi. Ou alors, il faut abroger l'article 43-11.
Pour ce qui est de l'amendement n°33 , on ne peut pas avoir voté le Grenelle de l'environnement et fait de l'environnement et de sa protection ainsi que du développement durable une priorité de notre nation et voter contre cet amendement. Pour notre part, nous le voterons.
La parole est à M. le président de la commission spéciale.
Je rejoins, pour une large part, le propos fort sage que vient de tenir M. Dionis du Séjour.
L'article 43-11 a suscité de mauvaises habitudes. En effet, s'il peut paraître sympathique de demander au législateur d'entrer dans le détail de la mission de service public déolue la télévision publique, la liste vous montre que tout cela est souvent question de mode. Peut-être cela a-t-il un intérêt historique puisque cela permet de se souvenir de ce qui intéressait les gens à telle époque. Y ajouter le développement durable permettra de se rappeler qu'on s'y intéressait en 2008… C'est touchant. Que rajoutera-t-on dans la prochaine loi ? Peut-être ferons-nous référence aux extraterrestres !
Mme la ministre s'en remet à la sagesse de notre assemblée, ce qui est flatteur… Au vu des litanies que nous avons entendues depuis cet après-midi, on peut se demander si nous sommes vraiment sages ! En tout état de cause, sitôt qu'on parle de contenu, chacun a une idée sur la question.
Depuis le début de la discussion, nos collègues socialistes, communistes et Verts n'ont de cesse de nous critiquer. Mais ils ont fini par se prendre au jeu : eux aussi ont leur une idée sur la télévision publique.
Aussi proposent-ils de rajouter des éléments supplémentaires. J'en viens à me dire qu'ils progressent. Le temps passant, peut-être en viendront-ils à considérer que cette réforme n'est finalement pas si mauvaise que cela.
Mais, comme M. Dionis du Séjour, j'estime que point trop n'en faut et qu'il est grand temps d'avancer, à moins que M. Ayrault ne vienne nous rendre sa visite quotidienne...
...aux alentours de minuit, pour nous faire le coup du quorum ! C'est sa valeur ajoutée – chacun la sienne… (Rires sur les bancs du groupe UMP.)
Je le répète, il est grand temps de passer à la vitesse supérieure. Nous avons tellement de sujets passionnants à aborder que si nous devons égrener chaque pan de la société humaine pour l'inscrire dans l'article 43-11, non seulement nous ne sommes pas couchés, mais nous risquons de ne pas pouvoir achever l'examen de ce texte avant la fin de l'année. Ce serait dommage, alors que les équipes de France Télévisions sont dans les starting-blocks pour mettre en oeuvre l'une des réformes les plus ambitieuses qui soient pour la télévision française. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ils ne vous ont pas attendus pour travailler !
(L'amendement n° 33 est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 806 tombe.
La parole est à M. Didier Mathus.
Fondé sur quel article ?
Sur l'article 58, bien sûr !
..concerne les propos de M. Copé, inutilement blessants pour l'opposition (Protestations sur les bancs du groupe UMP), méprisants pour le président du groupe socialiste, ce qui est inhabituel de la part d'un autre président de groupe. Afin que M. Copé puisse se rasséréner, je demande une suspension de séance.
La suspension est de droit.
Rappel au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures dix.)
La séance est reprise.
Je suis saisie d'un amendement n° 87 rectifié de la commission, qui fait l'objet d'un sous-amendement n° 438 rectifié .
Madame la présidente, notre collègue Victorien Lurel, qui est cosignataire de cet amendement, pourrait le présenter.
La parole est à M. Victorin Lurel.
Au cours de nos débats en commission, plusieurs de nos collègues ont présenté des propositions allant dans le même sens, que nous avons mutualisées et fondues en un seul et même amendement. Celui-ci vise à introduire explicitement dans la loi la promotion des langues régionales et la mise en valeur de la diversité du patrimoine culturel et linguistique de la France.
C'est une bonne chose, car, dans le texte de 1986, cette préoccupation ne figurait explicitement que pour France 3 et RFO. L'amendement n°87 rectifié tend à imposer une obligation à l'entreprise unique que constituera le groupe France Télévisions.
Ce serait d'autant plus utile que la création de l'entreprise unique pourrait faire oublier la vocation et la mission qui sont celles de France 3, de défendre, de promouvoir, de développer, de participer à la promotion des langues régionales. L'adoption de cet amendement permettrait d'éviter, si j'ose dire, en termes un peu compliqués, la glottophagie, l'univocité et le monolinguisme au sein du groupe unique France Télévisions.
Tout cela participe de ce qui nous anime tous ici : la défense de la diversité culturelle et de la création, la différence des regards, et donc, la promotion des langues qui figure à l'article 75 de la Constitution. J'indique au passage que, personnellement, je n'ai pas apprécié de voir la promotion des langues figurer à cet endroit : celles et ceux qui ont quelque mémoire se souviennent que c'est ce même article qui traitait de ce qui restait de l'empire colonial français. Comme si le basque, le corse, l'occitan ou le breton étaient colonisés par Paris ! Cela ne nous semblait guère heureux et nous avions presque tous ici plaidé pour que ce point figure plutôt à l'article 2. Les voies mystérieuses des cheminements parlementaires l'ont fait se retrouver à l'article 75-1 – juste après l'article 75 garantissant le maintien du statut personnel : je n'oublierai jamais que c'est ici, au petit matin blême comme eût dit Aimé Césaire, vers trois heures du matin, lors de l'examen d'un texte sur l'outre-mer, que l'on a fait disparaître, par une sorte d'ethnocide culturel, la polygamie à Mayotte.
La reconnaissance des langues régionales figure à l'article 75-1 de la Constitution. C'est ainsi. Le patrimoine de la France doit être défendu. L'introduction explicite de la défense des langues et de la diversité culturelle de la France est la symétrie de ce que nous avions demandé, en son temps, à savoir la suppression du mot « race ». Il serait donc heureux que cette précision soit apportée ici.
Quel est l'avis de la commission ?
Favorable.
Elle a accepté, par ailleurs, le sous-amendement 438 rectifié de M. Robert, qui le complète opportunément, eu égard aux explications que vient de donner M. Lurel.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Favorable à l'amendement, puisque la diversité linguistique que l'on veut mettre en valeur est désormais reconnue par la Constitution.
Sur le sous-amendement, en revanche, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée, car il me semble que la notion à laquelle il se réfère est déjà incluse dans l'amendement.
La parole est à M. Victorin Lurel.
En tant qu'originaire des outre-mers, je suis personnellement très content. Toutefois, un collègue de l'hexagone, qu'il soit ou non de ma famille politique, pourra dire que la France se compose de la métropole et de ses outre-mers. J'avais naguère déposé un amendement tendant à supprimer le mot « métropole », qui a une connotation quelque peu négative à mon sens, puisque la métropole est un centre qui a une périphérie, des « colonies ». Mais, le terme « métropole » ayant été reconnu par une décision du Conseil constitutionnel, il n'est plus temps d'y revenir.
La proposition contenue dans ce sous-amendement me satisfait totalement, mais je me mets à la place des Bretons, des Corses, des Occitans ou des Alsaciens. Je ne demande pas que soit créé un ghetto qui serait celui de l'outre-mer. Je serai donc d'accord avec ce sous-amendement si l'on traite également les autres langues régionales de France.
La parole est à M. Marcel Rogemont.
Je partage totalement la remarque de Victorin Lurel. Je suis, pour ma part, d'origine corse, mais élu en Bretagne, ce qui complique un peu les choses…
Cela dit, éviter de parcelliser la France ne serait pas une mauvaise chose. La France est certes composée de régions, mais elle est la France ! Je partage totalement la réflexion de M. Lurel, s'agissant de l'ajout des « outre-mers ». Cette précision est-elle bien utile, alors que les outre-mers font partie de la France ?
Pourquoi ne pas ajouter, pour faire bonne mesure, la Corse, ou même toutes les îles, qui ne sont pas forcément outre-mer, comme, par exemple, l'île de Batz ou l'île d'Ouessant ? La France, c'est tout cela !
La parole est à M. le rapporteur.
Il y a celle du Gouvernement, monsieur le président !
Ce sous-amendement a été accepté par la commission, qui n'y a pas été contrainte. Vous vous en remettez à la sagesse de l'Assemblée, madame la ministre. Je ne m'accrocherai pas, pour ma part, aux mots « ses outre-mers ».
Je vis, quant à moi, en Provence, où les controverses sur l'unicité ou la non-unicité de la langue provençale sont déjà vives. Si le sous-amendement choque jusqu'aux gens de l'outre-mer,…
…je crois que l'on peut parfaitement y renoncer et voter l'amendement tel quel. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(Le sous-amendement n° 438 rectifié n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 87 rectifié est adopté.)
Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 275 à 278 , 281 , 674 rectifié et 807 .
La parole est à M. Didier Mathus, pour soutenir l'amendement n° 275 .
Il convient de trouver un bon compromis entre ce que l'on appelle en langage technocratique l'optimisation – ou la rationalisation – du management de France Télévisions et l'aspiration à la créativité que nous avons ici le devoir de protéger. La question des unités de programmes nous est donc posée.
Ce débat nous divise tous un peu. Autant la mise en commun des fonctions transversales, générales, de la société France Télévisions nous semble légitime et de bon sens, autant le formatage généralisé de l'offre potentielle de programmes – c'est-à-dire des unités de programmes – soulève un problème majeur.
Par cet amendement, nous essayons de résoudre cette difficulté en proposant que les unités de programmes soient maintenues au sein des chaînes. L'émulation entre des identités éditoriales différentes permettra au secteur de la création audiovisuelle de disposer de plusieurs guichets, et dopera ainsi la créativité de même que la diversité culturelle.
La notion d'entreprise unique n'est pas contradictoire avec le métier de la télévision, qui est par définition un métier d'acrobate, où il faut toujours travailler avec la flamme de la création, où l'on est, d'une certaine façon, dans le domaine de l'irrationnel, et où l'homogénéisation ne saurait donc prévaloir totalement. Le maintien d'unités de programmes favorisera justement cette diversité culturelle.
La parole est à M. Michel Françaix, pour soutenir l'amendement n° 276 .
Cet amendement est dans la droite ligne du précédent… (Sourires.)
La défense du service public doit être dynamique. Elle passe par l'amélioration des contenus et par la rénovation de la gestion. Cela ne me gêne pas de reconnaître qu'il faudra sans doute, demain, moins de bureaucratie, moins de corporatisme et plus de créativité, de souplesse et d'initiatives. Toutefois, il ne me dérange pas non plus d'admettre qu'il faille conforter la culture d'entreprise, ce qui ne veut pas dire gommer la diversité des chaînes. Toute la difficulté est de concilier les deux. Notre proposition permettrait justement de jouer sur les deux tableaux, d'avoir deux forces au lieu de deux faiblesses.
Parler de « média global » peut donner, par une sorte d'ébriété technologique, l'impression d'être « dans le coup ». Nous sommes favorables au média global, mais à condition que l'on s'en donne les moyens. Nous voulons créer une entreprise moderne, mais cette entreprise, qui n'est pas comme les autres, doit garder sa diversité. Je voudrais que nos collègues de droite l'entendent !
La parole est à M. Marcel Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 277 .
Ceux qui ont proposé l'entreprise unique avaient uniquement en tête de réaliser des économies. Ils ont donc commencé par sortir leurs calculettes avant même de réfléchir. Mais comment ne pas s'interroger sur une perte de recettes de 800 millions d'euros ? Et, surtout, comment la compenser ?
Mon amendement, s'il est d'inspiration comparable aux deux précédents, est de plus grande portée. (Sourires). L'entreprise unique ne doit pas conduire à faire des économies sur la création. Si nous sommes d'accord pour que soit réuni tout ce qui relève de la logistique, il nous semble fondamental que les chaînes aient une garantie d'unité de décision en matière de programmes et de ligne éditoriale.
Il vous est donc proposé de compléter le deuxième alinéa de l'article 43-11 de la même loi par une phrase qui pourrait être rédigée ainsi : « Elles s'engagent à garantir le maintien d'unités de programmes et de décisions qui leur sont propres et spécifiques afin de veiller à ce que leur ligne éditoriale, en particulier en matière d'oeuvres patrimoniales, contribue à l'expression de la diversité des regards et de la création française. » Qui peut se dire contre l'expression de la diversité des regards ?
La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l'amendement n° 278 .
Je suis presque ennuyé de le défendre, car il risque d'être désagréable, pour ceux qui viennent de présenter les amendements précédents, de m'entendre dire qu'il va plus loin. (Rires.)
, président de la commission spéciale. Ça fait plaisir de les voir s'amuser comme ça !
Le sujet est sérieux. Entreprise unique – global media comme le dit si bien le président Copé – ne veut pas dire centralisation.
, président de la commission spéciale. Ce n'est pas possible ! Il ne connaît pas le sujet, il le découvre !
S'il faut effectivement une entreprise unique à même de constituer un groupe puissant face à la concurrence des chaînes privées et un média de dimension internationale, les unités de programmes doivent garder leur autonomie et leurs spécificités.
Puisque Mme la ministre a cité à deux ou trois reprises son « vice-ministre », M. Pascal Rogard, directeur général de la SACD, je me permets de vous lire un document écrit par ce dernier et datant de ce mois. Je pense que nous en mesurerons tous la portée.
« La vocation principale de ce projet de loi est d'assurer la transformation de France Télévisions en média global et en entreprise unique via une réforme profonde de structure et de gouvernance et le rattachement de France 2, France 3, France 4, France 5 et RFO à une seule entité juridique. Si la rationalisation souhaitée ne nous heurte pas en soi, en revanche, nous sommes inquiets de la centralisation annoncée des unités de programmes et de la concentration des décisions dans les mains de quelques décideurs. En effet, elles ne peuvent que nuire à une diversité aussi recherchée que nécessaire. Pour conforter la spécificité des chaînes publiques et créer les conditions d'une offre de programmes différenciés, il nous semble indispensable de maintenir l'existence d'unités de programmes – jeunesse, fiction, documentaire… – dans chacune des chaînes publiques afin de permettre à des créations et à des productions diverses d'avoir toute leur place sur les antennes d'un service public qui témoignera ainsi du rôle majeur qu'il entend jouer dans la défense et la promotion de la création française et de la diversité culturelle.
« La pérennisation d'unités de programmes multiples et spécifiques à chaque chaîne ne remettrait d'ailleurs nullement en cause le projet de constitution d'une entreprise unique car il n'aurait pas d'autres vocations que de favoriser l'expression des sensibilités et des identités éditoriales qui, de toute façon, ne sont pas gommées par la réforme, mais bien plutôt encouragées. »
Compte tenu de ce que je viens de vous lire, cet amendement est presque un amendement de cohérence. Oui à l'entreprise unique, mais non à la disparition des unités de programmes !
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour défendre l'amendement n° 281 .
Je ne suis pas sûre que cet amendement aille aussi loin que celui de Patrick Bloche (Sourires), mais il participe de la même volonté d'éviter de céder à cette tentation réductrice de la centralisation.
À l'heure où chacun d'entre nous, sur son territoire, défend la décentralisation et la richesse qu'elle peut apporter, je crois que vous serez tous sensibles, mes chers collègues, à cette nécessité de garantir le maintien d'unités de programmes et de décisions pour chacune des chaînes du groupe France Télévisions.
Nous n'allons pas reprendre le débat que nous avons eu à l'article 1er sur l'entreprise unique. Nous ne sommes pas hostiles, par exemple, au gain de temps que constituera, pour le président de France Télévisions, le fait de ne pas avoir à siéger dans une multitude de conseils d'administration. Nous ne sommes pas non plus hostiles à une politique d'achat commune à l'ensemble des chaînes, destinée à éviter qu'un même prestataire pratique des tarifs totalement différents d'une unité de programme à l'autre.
Pour autant, il ne nous semble pas que ce souci de rationalisation nécessite une centralisation ni la disparition d'unités de programmes et de décisions propres au sein de l'entreprise unique France Télévisions.
C'est pourquoi, même si mon amendement est nettement plus modéré que celui que vient de vous présenter Patrick Bloche, je crois qu'il pourrait offrir une solution de repli. (Sourires.)
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour soutenir l'amendement n° 674 rectifié .
J'ai fait partie de la commission Copé et je suis fier d'y être resté jusqu'au bout, ce que n'ont pas fait certains de mes collègues.
Le rapport de la commission Copé nous explique excellemment – page 33 – une organisation « matricielle » qui m'évoque bien des souvenirs, étant donné que j'ai passé les premières années de ma vie active dans l'industrie. Elle rappelle en effet ce qui se passe dans ce secteur, où il y a des lignes de produits, des « directions produits » et des directions commerciales qui gardent toujours la haute main sur le choix des produits et des modalités de leur mise en oeuvre.
Si j'ai cosigné cet amendement dont la paternité est multiple, c'est parce qu'il repose sur un principe de bon sens, en phase avec l'orientation la plus positive, à mon avis, de la commission Copé, qui visait – les choses se sont un peu durcies par la suite – à adapter cette organisation matricielle au monde de l'audiovisuel.
La parole est à M. Patrick Braouezec, pour défendre l'amendement n° 807 .
Je pourrais m'inscrire dans la ligne humoristique de mes collègues socialistes, prétendre qu'ils ont joué « petit bras » en rédigeant leurs amendements et que le mien a davantage d'envergure, mais je m'en abstiendrai, car je ne fais pas mienne leur part d'optimisme quant aux vertus de l'entreprise unique.
Certes, l'entreprise unique existe désormais puisque le principe en a été voté – reste à voir, cela dit, si le projet le sera –, mais le doute demeure sur la possibilité qu'auront les chaînes de rester maîtresses de leurs programmes. M. Dionis du Séjour, qui a voté tout à l'heure pour l'entreprise unique, a d'ailleurs émis des réserves, craignant qu'elle ne remette en question leur autonomie.
Par ailleurs, pour que cette entreprise unique puisse rivaliser avec les autres entreprises d'audiovisuel européennes, il faut lui en donner les moyens. Or ce n'est pas le cas. Sans rappeler tous les chiffres que j'ai donnés en défendant la motion de renvoi en commission – j'aurai sans doute l'occasion de le faire dans la suite de la discussion –, j'insisterai simplement sur le fait que ce sont 800 millions qui vont manquer à France Télévisions, qui ne pourra, dans ces conditions, être à la hauteur des grands médias européens que sont la BBC ou ZDF.
Cet amendement, qui ressemble beaucoup aux précédents (Sourires), mériterait l'attention de la commission et de Mme la ministre, qui auraient ainsi l'occasion de montrer que leur volonté n'est pas de donner tous les pouvoirs à l'entreprise unique, sans unités de programmes au niveau de chacune des chaînes.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble ces amendements ?
La concurrence est rude, en effet, mais il y a un petit problème de chronologie, et il semble que quelque chose ait échappé à leurs auteurs. Lorsque, au cours de l'intéressante discussion de fond que nous avons eue à l'article 1er, nous avons abordé le problème de la société unique et fait part de notre crainte commune de voir s'ouvrir un guichet unique, crainte qui nous a conduits à voter un amendement défendu par Frédéric Lefebvre.
Cet amendement, n° 615 , tendait à insérer après l'alinéa 4 un alinéa important, qui va largement dans le sens que vous souhaitez, et qui est ainsi rédigé :
« France Télévisions veille à ce que sa nouvelle organisation garantisse l'identité des lignes éditoriales de ses services. Cette organisation assure le pluralisme et la diversité de la création, de la production et de l'acquisition des oeuvres audiovisuelles et cinématographiques d'expression originale française et européenne. »
Je ne prétends pas qu'on ne puisse pas faire mieux, mais il me semble que ce n'est déjà pas si mal, et que c'est assez rassembleur pour que vous vous y retrouviez. C'est d'ailleurs pourquoi, le problème de fond étant réglé par l'adoption de cet amendement à l'article 1er, nous avons repoussé les vôtres.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Comme vient de le rappeler le rapporteur, il existe déjà de multiples dispositions qui vont dans ce sens.
L'article 1er, qui définit les missions de France Télévisions, prévoit que la société doit assurer, par l'ensemble des services qu'elle offre, la diversité et le pluralisme des programmes.
Allant plus loin encore, l'amendement n° 615 , dont il vient d'être question, dispose que France Télévisions doit veiller à ce que sa nouvelle organisation garantisse l'identité des lignes territoriales de ses services et assure le pluralisme et la diversité de la création et de la diffusion.
Je crois donc que toutes les garanties sont désormais réunies pour assurer le pluralisme au sein d'une société unique qui devra mettre en place des mutualisations – comme elle a d'ailleurs commencé à le faire, puisqu'il existe déjà une direction des sports pour les différentes chaînes ainsi qu'une unité de programmes pour la jeunesse.
La parole est à M. Didier Mathus.
J'ai une question pour nos collègues de l'UMP : y a-t-il encore des giscardiens dans la salle ? S'il y en a, ils se souviendront peut-être – ou auront entendu leurs parents raconter – que M. Giscard d'Estaing avait accompli en 1974 un acte d'une ébouriffante modernité en scindant l'ORTF, que la doctrine gaulliste avait jusqu'alors maintenue, et dont on estimait, dans les années 1970, qu'il s'agissait d'une construction trop soviétique pour incarner la modernité giscardienne. On a donc créé des sociétés de télévision distinctes – TF 1, Antenne 2, FR3 – en en détachant la radio, la SFP et l'INA.
Aujourd'hui, vous nous proposez de faire le chemin inverse, c'est-à-dire de reconstituer l'ORTF. Je ne vois pas en quoi ce serait faire preuve de modernité, ni comment cela favorisera la bonne marche de cette entreprise…
… qui possède d'ailleurs déjà, avec la holding, les moyens de rationaliser et d'optimiser son fonctionnement au quotidien. Qui, dans cet hémicycle, est capable de citer le nom du directeur général de France 2 ? Personne ! Cela montre que la holding s'est imposée et que les directeurs généraux des chaînes ont aujourd'hui un rôle beaucoup plus modeste. Ce ne sont plus eux qui décident de la stratégie ou des programmes. C'est donc une fausse bonne idée que de vouloir unifier tout cela.
Monsieur le rapporteur, il n'y a pas de problème de chronologie. Nous avons pris acte de l'article 1er de la loi et nous ne proposons pas de reconstituer des filiales, mais de maintenir des unités de programmes identifiées, distinctes, pour préserver les capacités de création. Quand on parle de télévision, la question essentielle qu'il faut se poser est : comment favoriser la création ? Ce n'est pas une affaire de technocrates, mais d'artistes. Les unités de programmes, c'est une façon de ne pas tomber dans le guichet unique, qui serait une perte pour la création.
La parole est à M. Patrick Bloche.
Notre rapporteur, en faisant référence à ce qui a déjà été voté, a répondu imparfaitement à la question posée. L'élément clé de nos amendements est le maintien d'unités de programmes. C'est écrit noir sur blanc, ne dites donc pas que cela n'a pas de valeur juridique, car cela en a une ! Au-delà, il s'agit d'une garantie sollicitée auprès de la représentation nationale par toutes celles et tous ceux qui participent à la chaîne de la création audiovisuelle et cinématographique.
Partout où nous avons pu nous rendre – au festival de la fiction télé de La Rochelle, où j'ai participé à un débat avec M. Lefebvre, à la journée organisée par la SACD, où j'ai débattu avec M. Copé… –, des créateurs inquiets ont exprimé le souhait que les chaînes gardent leur identité au sein de l'entreprise unique – admettons que cela soit acquis –, mais aussi qu'il y ait une multiplicité de prescripteurs par le maintien des unités de programmes. Il ne faudrait pas que ce soit seulement le cas pour les programmes de jeunesse, madame la ministre : il faut que cela vaille aussi pour la fiction et les documentaires.
Tout ne va pas commencer avec le vote de la loi. Il y a des professionnels aguerris, des décideurs, des équipes bien identifiées. Pour répondre à l'inquiétude des créateurs, de ces acteurs culturels éminents et essentiels, nous devons donner un signal fort, et le maintien des unités de programmes serait à cet égard tout à fait déterminant.
La parole est à M. Franck Riester.
Je voudrais revenir une minute sur ce qu'a dit M. Mathus. Je n'ai pas eu la chance de vivre l'époque merveilleuse de l'ORTF, mais beaucoup de choses ont changé en trente-cinq ans, notamment l'arrivée des nouvelles technologies.
L'un des objectifs de ce projet de loi est de donner à France Télévisions les moyens de s'adapter à ces nouvelles technologies.
Le média global, et donc l'entreprise unique, cela consiste à coordonner la programmation sur tous les supports : les chaînes, certes, mais aussi les supports nouveaux comme Internet, la téléphonie mobile ou la TMP. Les créateurs ont besoin d'une organisation qui leur permette de programmer leur création sur tous les supports. C'est ce que nous rendons possible par ce projet de loi. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Françaix.
Il ne faudrait tout de même pas que vous ayez le sentiment que, dès lors nous parlons des formes d'expression et de création, ce serait une coquetterie d'élus égarés, un peu plus âgés que d'autres, et qui auraient une vision totalement dépassée. Personne ne dit qu'il ne faille pas s'intéresser aux nouvelles technologies ni que le média global ne soit nécessaire dans la vision d'une entreprise moderne.
Permettez-moi tout de même de vous dire qu'à mes yeux le contenu a plus d'importance que le tuyau, et que l'histoire de la peinture ne se résume pas à l'histoire des pinceaux ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ce n'est pas parce qu'il y a de nouveaux outils technologiques et que le service public doit, bien sûr, les utiliser pleinement, qu'il faut nous répéter « global media, global media, global media », tels les opposants au général de Gaulle qui s'écriaient, selon lui, « l'Europe, l'Europe, l'Europe » !
Limiter la réflexion au média global est un peu court – et je n'ajouterai pas « jeune homme », bien que vous le méritiez… (Sourires.) Il faut constituer le média global, qui est absolument nécessaire,…
…tout en essayant de donner de l'importance à la diversité culturelle. Voilà pourquoi mon amendement, même s'il va moins loin que celui de mon collègue Patrick Bloche (Sourires), mériterait d'être voté.
(Les amendements identiques nos 275 à 281 , 674 rectifié et 807 ne sont pas adoptés.)
Je suis saisie de deux amendements, nos 436 rectifié et 839 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
L'amendement n° 839 fait l'objet d'un sous-amendement n° 858 .
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour présenter les deux amendements.
Je voudrais saluer la preuve par l'absurde que viennent de nous fournir nos collègues socialistes, qui défendaient la diversité et qui ont réalisé l'unité de programme – au moins sur les amendements, puisqu'ils ont tous défendu le même, dont on sait d'ailleurs avec qui il avait été préparé…
Personne ne doit avoir honte, puisque nous avons nous-mêmes hésité à déposer un amendement identique, et que l'amendement n° 615 adopté tout à l'heure à l'article 1er avait été préparé avec la même personne pour répondre exactement à la même préoccupation.
Notre volonté à tous, même si nos collègues viennent de passer quarante minutes à tenter de faire croire le contraire, c'est qu'il y ait de la diversité et non un guichet unique.
Les présents amendements concernent également la diversité, mais cette fois dans les effectifs. Je vois bien – et, à titre personnel, je le regrette – que l'Assemblée n'est pas encore mûre pour l'action positive, qui est l'objet de l'amendement n° 346 rectifié .
J'espère toutefois que les travaux actuellement menés sur le Préambule de la Constitution nous permettront de progresser dans ce sens.
En attendant, je souhaite que l'amendement n° 839 soit voté, car il permettrait d'aller plus loin que ce que fait déjà France Télévisions, dont on rappelé l'action et la bonne volonté, encore insuffisantes cependant.
Il s'agit d'écrire dans la loi que la politique des ressources humaines de France Télévisions doit tenir compte de la diversité. Après les amendements déjà adoptés sur les rapports et sur les programmes, nous pourrons dire, si cet amendement est adopté, que nous avons voté une obligation de moyens pour que France Télévisions développe une véritable politique en faveur de la diversité.
Cela ne va pas aussi loin que je le souhaiterais, mais je ne doute pas que nous avancerons à l'avenir vers l'« action positive », et nous aurons au moins envoyé le signal que France Télévisions devra et pourra faire plus de diversité. J'espère d'ailleurs que les autres chaînes suivront son exemple.
Quel est l'avis de la commission ?
L'amendement n° 436 rectifié vient s'ajouter aux dispositions que nous avons prises concernant les rapports de la HALDE sur les questions de recrutement et de gestion du personnel et du CSA sur les programmes et l'antenne. Mais la commission, bien qu'elle ait compris votre intention, mon cher collègue, l'a repoussé en raison du risque d'inconstitutionnalité.
En premier lieu, en effet, l'article 5 de la directive européenne du 29 juin 2000 relative à la mise en oeuvre du principe d'égalité de traitement entre les personnes – dont vous reprenez les dispositions dans vos deux amendements –, dispose que, pour assurer la pleine égalité dans la pratique, le principe de l'égalité de traitement n'empêche pas un État membre – mais ne l'y oblige pas non plus – de maintenir ou d'adopter des mesures spécifiquement destinées à prévenir ou à compenser des désavantages liés à la race ou à l'origine ethnique. La précise donc seulement que le cadre européen n'interdit pas aux États qui le veulent de faire de la discrimination positive en faveur des minorités visibles. Cela ne veut en aucun cas dire qu'elle oblige les États à le faire.
En second lieu, notre Constitution, norme première dans la hiérarchie des normes, interdit en pratique ce type de dispositif puisque l'article 1er dispose que la France « assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion ». De même, le Préambule de la Constitution de 1946 dispose que « le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés ». Je vous rappelle que ce principe est également présent à l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. »
Si le type de disposition proposé par ces amendements pourrait apparaître comme eurocompatible, inscrire dans la loi des mesures destinées à compenser des désavantages liés à « la race » ou à « l'origine ethnique », selon les termes de vos amendements, serait clairement inconstitutionnel. Je vous invite à retirer l'amendement no436 rectifié car la commission propose de retenir l'amendement n° 839 , sous réserve que son sous-amendement soit voté.
Monsieur Lefebvre, maintenez-vous votre amendement n° 436 rectifié ?
En présentant les deux amendements, j'ai regretté qu'en l'état actuel du droit nous ne puissions voter l'amendement n° 436 rectifié – comme vient de le confirmer le rapporteur –, ce qui, dans mon esprit, signifiait que je le retirerais. J'ai ajouté que j'espérais, compte tenu des travaux en cours sur le Préambule de la Constitution, que nous pourrions, dans les mois qui viennent, aller jusqu'à adopter l'« action positive ».
Je tiens à préciser un point qui me paraît très important : la directive indique qu'il s'agit d'« assurer la pleine égalité dans la pratique ». C'est bien l'esprit du dispositif que je propose, et c'est pourquoi je milite pour que cela soit inscrit dans le Préambule. On voit donc bien que l'objectif d'égalité inscrit dans la Déclaration des droits de l'homme, et qu'a rappelé le rapporteur, est le même que celui de mes amendements car c'est en menant une politique d'action positive que l'on peut atteindre l'égalité. Ensuite, toute la question est de savoir si on modifie le préambule de la Constitution pour permettre l'action positive. C'est pourquoi mes deux amendements ont fait l'objet d'une présentation commune. J'exprime encore une fois l'espoir que le second sera voté par tous, car il crée une obligation de moyens sans faire référence à l'action positive.
(L'amendement n° 436 rectifié est retiré.)
Je comprends évidemment fort bien les intentions de M. Lefebvre. Je rappelle que diverses dispositions ont été adoptées, notamment hier, relatives au contrôle de la HALDE. Celle-ci rendra chaque année un rapport sur la politique salariale de France Télévisions, et donc sur sa gestion des ressources humaines.
Ces dispositions sont déjà importantes. Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée.
La parole est à M. Didier Mathus.
C'est un sujet important. Je souligne qu'une fois encore nous n'avons pas eu de réponse claire du Gouvernement.
Mais si !
Si l'action positive, dont la transposition de cette directive permettrait la légalisation, n'est pas aujourd'hui dans la loi française, c'est parce que le Gouvernement ne l'a pas voulu. Si Mme la ministre nous disait que le Gouvernement s'apprête à transposer la directive pour inscrire l'action positive dans la loi française, ce serait de nature à changer le débat. Mais ce n'est pas le cas.
J'observe que si ce type d'amendement surfe sur un mouvement sympathique,…
…il n'a pas grand rapport avec le fond du projet de loi. On éprouve tout de même un certain malaise en comprenant qu'il s'agit de donner un caractère un peu plus sympathique à la loi en y intégrant un sujet dont sont friands les médias en cette période d'obamania...
Je crois que cette démarche repose sur un profond contresens. En France, depuis la victoire de Barack Obama, on se demande s'il serait possible qu'une personne dite de couleur – puisque tel est l'euphémisme en vigueur – accède à des fonctions de cette importance, et on fait mine de croire que la question est raciale. À cet égard, je trouve curieux le vocabulaire employé par M. Lefebvre dans son amendement, qui est très maurassien : il y est question de « race » et d'« origine ethnique ».
Je rappelle que le groupe socialiste a déposé une proposition de loi pour bannir le mot « race » de nos textes, considérant qu'il n'est utilisé aujourd'hui qu'avec une connotation négative. Il y a dans un tel vocabulaire des accents maurrassiens qui nous mettent assez mal à l'aise. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je répète qu'il y a un vrai malentendu, en France, sur la victoire de Barack Obama, avec des discussions un peu vaines, comme si la question était raciale, alors qu'elle est d'abord sociale.
Une majorité comme la vôtre, dont le chef, alors président de l'UMP, disait vouloir karchériser les enfants des cités (Protestations sur les bancs du groupe UMP), qui compte dans ses rangs Brice Hortefeux, qui est allé jusqu'à pourchasser les enfants jusque dans les cours d'écoles (Mêmes mouvements),…
…devrait savoir que la vraie approche de la diversité réside avant tout dans la réalisation concrète d'une politique sociale audacieuse à l'égard de cette partie de la population plutôt que dans la volonté de surfer sur des effets de mode en considérant que la lutte contre les discriminations se mène sur les plateaux de télévision.
C'est l'un des vôtres, Azouz Begag, qui disait qu'il faut se méfier de « l'Arabe qui cache la forêt ». (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Il y a derrière son jeu de mots quelque chose d'assez profond, et je vous invite à méditer ses propos.
La parole est à M. Victorin Lurel.
Je comprends l'intention de Frédéric Lefebvre (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), mais je n'approuve pas l'amendement tel qu'il est rédigé. Je ne vais pas faire ici un cours de droit constitutionnel en rappelant le corpus philosophique républicain auquel nous sommes tous adossés. Je rappelle cependant que j'ai été le premier signataire d'une proposition de loi visant à supprimer le mot « race », proposition que 205 députés socialistes ont signée ; je me suis escrimé, jusqu'à l'épuisement, à proposer des textes visant à supprimer ce mot des lois organiques ou des lois ordinaires.
Vous me regardez, mes chers collègues : oui, je suis de couleur différente, et j'admets avec vous tous que la Constitution française, l'histoire de France enseignée à l'école et nos textes sont, comme disent les Américains, color blind puisque nous ne voulons pas parler de race ou de couleur. Mais les discriminations, voire le racisme, existent, et je serais mal placé pour prétendre le contraire. Cela étant, le mot « race » a certaines connotations. Souvenons-nous de ce que cette notion a déchaîné au cours de l'histoire, y compris la nôtre. Chez moi en Guadeloupe, il y a eu Louis Delgrès, et Toussaint Louverture en Haïti. Il a fallu se battre pour universaliser ce qui est inscrit en lettres de feu dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. » Je suis d'accord avec Frédéric Lefebvre pour reconnaître que ce principe existe dans nos textes, qu'il contribue à notre vivre ensemble et qu'il fait la force de nos valeurs, mais il y a, dans la pratique, un problème de pleine égalité.
Faut-il, dès lors, renier toutes ces avancées et légitimer le mot « race », lui donner une valeur positive en gommant l'aspect négatif qui figure dans nos textes – puisque, quand ce mot est employé dans la loi, c'est pour lui dénier toute valeur ? Je rappelle que l'affirmative action a été supprimée aux États-Unis en 1978, suite à un arrêt fameux de la Cour suprême : toute discrimination ou toute action positive à base de préférence raciale a été abrogée.
Je rappelle également que Manuel Valls et moi-même avons déposé, avec nos collègues du groupe socialiste, une proposition de loi visant à généraliser l'accès aux classes préparatoires aux grandes écoles, non pas sur la base de la préférence raciale ou de la couleur de la peau, mais sur la base des origines géographiques. Je suis le premier président de région à avoir souscrit un contrat de partenariat avec Richard Descoings, directeur de Sciences-Po – non sans m'être assuré qu'il ne s'agissait pas de discrimination positive. Il s'agit d'une troisième voie : ce sont les mêmes concours, les mêmes programmes et les mêmes difficultés pour les élèves concernés par ce partenariat que pour les autres élèves. Je peux vous dire que les jeunes Guadeloupéens réussissent maintenant massivement à entrer à Sciences-Po Paris.
Le sous-amendement de la commission aurait pu conserver la phrase de la directive commençant par les mots : « Le principe de l'égalité […] », mais en substituant aux mots : « liés à la race ou à l'origine ethnique », les mots : « liés aux origines ». Il peut en effet s'agir d'origines géographiques ou culturelles. Nous avions proposé de remplacer le mot « race » – je n'aime pas plus le mot « ethnie » – par le mot « origines ». Certes, parmi les origines, il y a la couleur. Je suis convaincu qu'un racisme sur la base des couleurs existe. Mais les races, je le rappelle, n'existent pas dans l'espèce humaine. Il n'y a qu'une seule race, c'est l'espèce humaine.
Il existe au sein de notre espèce un polymorphisme génétique. Le mot « race » relève de la zoologie. C'est un concept qui ne s'applique qu'aux animaux.
La parole est à M. Patrick Braouezec.
Qu'ajouter à ce que vient de dire M. Lurel ? S'agissant du mot « race », qui figure effectivement dans cet amendement, il a tenu les propos que je voulais tenir : il n'y a qu'une seule race humaine, diversifiée selon les ethnies, les origines.
Je vois bien où veut nous mener M. Lefebvre. Il surfe sur la mode actuelle, sur l'obamania, mais pour mieux occulter les discriminations qui sont les plus fortes dans notre pays, à savoir les discriminations sociales. M. Mathus a eu raison de les évoquer. Cela ne veut pas dire qu'il n'y ait pas de discrimination liée à la couleur de la peau. Mais des personnes d'origine ethnique différente, des personnes de couleur, qui ont les moyens de vivre dans les beaux quartiers, trouvent leur place dans la société. En revanche, lorsque l'on vit dans des quartiers défavorisés, dans des quartiers où les origines sociales ne sont pas celles que l'on retrouve le plus fréquemment dans cet hémicycle, on peut être victime, que l'on soit de couleur ou non, de discriminations très fortes, pour lesquelles l'amendement ne propose aucune solution. Ce n'est d'ailleurs pas l'intention de son auteur.
Je vois bien, monsieur Lefebvre, où vous voulez en venir avec ces amendements. Malgré les arguments développés par M. le rapporteur, je pense que je ne pourrai pas les voter – du moins celui que vous n'avez pas retiré et qui est révélateur de l'état d'esprit que je viens de décrire.
En outre, je pense que cet amendement n'a pas sa place à cet endroit du texte. Nous aurons l'occasion de revenir sur le thème que vous évoquez, mais en l'abordant sous tous ses aspects, y compris l'aspect social. L'enjeu est d'amener France Télévisions mais aussi toutes les entreprises publiques ou privées, à prendre en compte la question de l'égalité, et non pas celle de la discrimination ou de l'action positive.
La parole est à M. Patrick Bloche.
Pour ne pas être répétitif à cette heure tardive, je ne reviendrai pas sur la référence au mot « race » et la gêne qu'elle provoque chez les élus de notre groupe, gêne qu'a particulièrement bien expliquée Victorin Lurel.
En revanche, je voudrais revenir sur l'action positive, liée à la transposition de la directive européenne du 29 juin 2000 qui vise à lutter contre les discriminations. La transposition de cette directive offre la possibilité de mettre en oeuvre lesdites actions positives destinées à lutter contre les discriminations.
Madame la ministre, puisque vous représentez le Gouvernement, j'ai une question très précise à vous poser, si vous aviez l'extrême obligeance de m'écouter…
Veuillez poursuivre, monsieur Bloche.
En mai dernier, le Gouvernement a saisi le Parlement afin de transposer cette directive dans notre droit interne, mais il a refusé, lors des débats, d'y intégrer un article autorisant l'action positive. Plutôt que d'invoquer simplement la sagesse de l'Assemblée comme vous l'avez fait, madame la ministre, j'aimerais que vous nous disiez quelle est la position réelle du Gouvernement sur ce sujet. Transcrira-t-il bientôt dans notre droit interne la possibilité de mener des actions positives, afin de lutter contre les discriminations ?
La parole est à M. le rapporteur.
Si notre collègue Braouezec croit voir où cet amendement veut en venir, je sais, pour ma part, où la commission ne veut pas aller : vers une différenciation entre races. C'est la raison pour laquelle nous avons très rapidement écarté l'amendement n° 436 rectifié .
Pour que vous ayez bien en tête ce que donne, une fois sous-amendé, l'amendement n° 839 , je me permets de vous le lire :
« Les sociétés nationales de programme visées à l'article 44 de la même loi mènent une politique de développement des ressources humaines visant à lutter contre les discriminations, notamment ethnoculturelles, et à mieux refléter la diversité de la société française. »
En l'état, et avec les réserves qu'elle a pu émettre à l'égard de l'amendement précédent, la commission a considéré pouvoir accepter celui-ci, qui permet de promouvoir une politique des ressources humaines évitant toute discrimination.
Il ne m'appartient pas de répondre à la place de Mme la ministre, mais force est de reconnaître que nous avons momentanément délaissé les conduits et les tuyaux de France Télévisions, pour nous plonger dans l'humain. C'est tout à notre honneur que d'avoir atteint, en partant de la gestion de la télévision, un niveau de réflexion sur l'humain qui nous dépasse tous et qui, tout en nous dépassant, nous rapproche aussi un peu, me semble-t-il. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Frédéric Lefebvre.
Juste un mot en réponse à M. Braouezec, car les propos du rapporteur sont parfaitement clairs. Monsieur Braouezec, vous avez indiqué que vous ne vous opposeriez pas à l'amendement sur les programmes. Or, une fois sous-amendé par le rapporteur, celui dont nous débattons est exactement le même, appliqué aux effectifs.
Nous ne pouvons pas être contre, ce qui ne veut pas dire que nous sommes dupes !
Vous avez souhaité, les uns et les autres, que nous retirions le mot « race » qui figure dans la directive européenne. À partir du moment où il est retiré, reste le débat sur la possible inscription de l'action positive dans le Préambule de la Constitution. Avec ces deux armes, nous avons les moyens de faire progresser la diversité. Si vous vous y opposez, vous montrerez que vous faites peu de cas de la défense de la diversité, ce qui serait quand même dommage.
La parole est à M. Patrick Braouezec.
Monsieur Lefebvre, vous jouez sur du velours : nous ne pouvons pas voter contre. Mais puisque vous ne ciblez que les discriminations ethnoculturelles ou basées sur l'origine, nous pourrions sous-amender le texte proposé par le rapporteur afin d'y inclure la lutte contre les discriminations sexistes ou sociales qui existent et pèsent aussi d'une manière très forte.
Si nous voulons aller jusqu'au bout, incluons toutes les formes de discriminations qu'elles soient fondées sur la couleur, le sexe ou l'origine sociale. À partir de là, nous pourrons parler d'une entreprise publique qui joue complètement son rôle dans la société pour l'égalité de traitement et d'accès de tous les citoyens.
Prochaine séance, lundi 1er décembre, à seize heures :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
La séance est levée.
(La séance est levée, le vendredi 28 novembre 2008, à zéro heure trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma