Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a entendu M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, sur le schéma national d'infrastructures de transport (SNIT), ainsi que sur la mise en application de la loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports.
Monsieur le ministre, il ne s'est écoulé que peu de temps depuis notre audition commune avec la commission des affaires européennes sur l'ouverture à la concurrence du marché ferroviaire et je vous remercie d'honorer ce nouveau rendez-vous dont nous étions convenus de longue date. Je vous propose de nous entretenir de deux sujets principaux : en préalable aux travaux de la mission d'information sur la mise en application de la loi ORTF, emmenée par MM. Yanick Paternotte et Maxime Bono, votre appréciation générale sur l'application de ce texte et sur le démarrage des travaux de l'ARAF ; après la présentation de son avant-projet en juillet dernier, une description du schéma national des infrastructures de transport (SNIT) prévu à l'article 16 de la loi « Grenelle I ».
Mesdames et Messieurs les députés, je vois derrière le visage de chacun d'entre vous une route, un port, un aéroport ou une aérogare qui vous tiennent à coeur… (sourires) et je remercie le président Jacob de son invitation.
J'en viens à l'avant-projet de SNIT, présenté le 12 juillet dernier au Comité national du développement durable et du Grenelle de l'environnement (CNDDGE), au sein duquel siègent Serge Grouard pour l'Assemblée nationale et Bruno Sido pour le Sénat. Cet avant-projet représente la première mouture d'un document d'orientation qui dessine la politique d'infrastructures de notre pays pour les trois prochaines décennies. Le SNIT définit des axes prioritaires pour aménager les réseaux de transport selon une stratégie multimodale. Si chaque mode a un rôle à jouer, la priorité est clairement donnée aux alternatives à la route et à l'aérien. Conformément aux engagements du Grenelle de l'environnement dont Jean-Louis Borloo a présenté ce matin une première évaluation, la part des transports ferroviaires, maritimes et fluviaux doit, d'ici à 2022, passer de 14 % à 25 %.
A ce stade de son élaboration, les propositions du SNIT se déclinent en près de 60 actions, dont 26 projets ferroviaires, 9 projets portuaires, 3 projets fluviaux et 19 projets routiers. Tous sont jugés prioritaires à moyen terme.
Le schéma national comporte des projets de LGV, tels que Sud-Europe-Atlantique (SEA), Rhin-Rhône et Provence Alpes Côte d'Azur, de fret ferroviaire avec l'électrification de la ligne Serqueux-Gisors ou la création du Lyon-Turin, ou encore de transport fluvial, comprenant notamment la desserte des grands ports maritimes ou le canal Seine-Nord-Europe. Il inclut également les projets de transports collectifs urbains, dans le cadre du Grand Paris en Ile-de-France et des appels à projets de transports collectifs en site propre (TCSP) dans les régions. Le SNIT comprend en outre des projets d'optimisation du transport aérien, de lutte contre le désenclavement et de sécurité routière.
Le SNIT ne mentionne pas les dix projets routiers ayant d'ores et déjà fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique (DUP), tels que l'A 45 entre Lyon et Saint-Etienne ou l'A 831 Bordeaux-Saintes-Nantes. Contrairement à ce qu'ont pu laisser entendre certains organes de presse régionaux, ces projets ne sont pas abandonnés ; c'est bien parce qu'ils sont déjà engagés qu'il n'était pas nécessaire de les faire figurer dans l'avant-projets. Toutefois, en vue de donner plus de lisibilité au schéma, ces projets dits « coups partis » seront intégrés dans la version consolidée.
Pour figurer dans le SNIT, les projets d'infrastructures doivent être structurants et présenter une envergure nationale ou au moins régionale. Ce qui relève déjà des CPER ou des PDMI – comme la RN 164 en Bretagne – n'a pas vocation à l'intégrer. Je tenais, Mesdames et Messieurs les députés, à vous livrer cette « méthode de lecture » du SNIT pour prévenir tout malentendu.
Ayant pour but de développer les alternatives à la route, le SNIT ne retient qu'assez peu de projets de construction de routes nouvelles. C'est ainsi que ne figurent plus dans l'avant-projet 900 kilomètres de programmes d'infrastructures routières arrêtés lors du CIADT de décembre 2003, d'où un possible redéploiement de 15 milliards d'euros vers les autres modes.
Je tiens également à rappeler que le SNIT est un schéma d'infrastructures de l'État, qui n'intègre pas les projets relevant de la compétence des autorités organisatrices de transport (AOT) ou d'opérateurs privés. Reste le cas des autoroutes de la mer, qui se situent pour ainsi dire à la limite du SNIT, et des grandes gares ferroviaires, que je souhaite voir figurer dans la version consolidée du schéma en tant que grands équipements structurants.
Le SNIT est un document d'orientation et non un outil de programmation, car celle-ci relève de la responsabilité conjointe de l'État et du Parlement. La concertation en cours débouchera sur un projet consolidé, chaque projet retenu devant ensuite faire l'objet d'un passage devant le CNDDGE, d'une DUP et d'un plan de financement.
Le schéma national évalue à 170 milliards d'euros le montant des investissements à réaliser au cours des 20 à 30 prochaines années. Au regard des engagements financiers antérieurs, ce chiffre me semble tout à fait réaliste puisqu'il correspond à un investissement public annuel de 4 milliards durant 25 ans, ce qui est l'équivalent de la dotation accordée chaque année par l'État et les collectivités à l'AFITF depuis 2008.
Réaliste, ce programme d'investissements n'en reste pas moins extrêmement ambitieux et sa réalisation profitera de l'introduction dès 2012 de l'éco-redevance poids lourds, laquelle générera une recette annuelle au profit de l'AFITF d'environ 1,2 milliard d'euros.
S'agissant du SNIT, rien n'est encore figé et les concertations en cours avec les élus ont déjà permis des ajouts importants. La version consolidée sera plus robuste que celle que vous connaissez déjà. Prochainement, le document sera l'objet d'échanges interministériels, d'une consultation des élus locaux, du Conseil économique social et environnemental (CESE) – dont la mise en place aura été plus tardive que prévu – et, avant la fin de l'année, d'un débat public au Parlement. Ce calendrier permet d'augurer la mise au point définitive du schéma national dans les tout prochains mois.
J'en viens au deuxième thème de mon intervention qui porte sur la mise en application de la loi du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires (ORTF) et portant diverses dispositions relatives aux transports. Qu'il me soit tout d'abord permis de saluer une nouvelle fois l'excellence de la collaboration entre le Parlement et le Gouvernement, et de remercier votre rapporteur, Yanick Paternotte, de s'être autant impliqué dans le traitement de sujets qu'il connaît bien. Quant à la mise en place rapide d'une mission d'information conduite par MM. Paternotte et Bono pour veiller à sa bonne application, c'est du bon travail parlementaire ! Il est bien d'aller aussi vite dans ce qu'il est convenu d'appeler, depuis la révision constitutionnelle de 2008, le « service après-vote ».
Cette loi permet notamment d'ouvrir à la concurrence certains services internationaux de voyageurs, sous le contrôle d'une autorité de régulation, l'ARAF, dont le Secrétaire général, Michel Vermeulen, est aujourd'hui présent parmi nous. Ce faisant, le texte met la France en conformité avec le règlement européen OSP du 23 octobre 2007, notamment pour ce qui concerne l'organisation des transports collectifs de voyageurs en Ile-de-France.
Comme l'a prévu la loi « Grenelle II », l'ARAF sera pleinement opérationnelle à compter du 2 décembre prochain. Je remercie Pierre Cardo d'en avoir accepté la présidence, de même que les autres membres du collège de l'Autorité nommés par un décret du 20 juillet dernier : M. Dominique Bureau, désigné par le président de l'Assemblée nationale, M. Jacques Bernot, désigné par le président du Sénat, M. Daniel Tardy, désigné par le président du CESE, ainsi que MM. Jean Puech, Claude Martinand et Henri Lamotte, toutes personnes expérimentées et fines connaisseuses du secteur de la concurrence.
Au plan juridique, l'installation de l'ARAF a été finalisée par la publication de deux décrets et d'un arrêté. Le décret du 1er septembre 2010 porte sur l'organisation et le fonctionnement de l'autorité ; il adapte les procédures existantes en soumettant la fixation des redevances d'infrastructure liées à l'utilisation du réseau ferré national – les péages – à l'avis conforme de l'ARAF et en précisant le régime applicable aux recours contre les décisions de l'autorité devant la Cour d'appel de Paris. Un autre décret fixe au Mans le siège de l'ARAF. Enfin, l'arrêté du 7 octobre dernier rend opérationnel le dispositif assurant le financement de l'autorité publique indépendante. Sur le réseau ferré national, il s'agit d'un droit perçu à partir d'une assiette sur les péages ; cette ressource garantit l'autonomie financière de l'ARAF, gage de son intégrité et de son indépendance.
L'article 1er de la loi du 8 décembre 2009 ouvre à la concurrence les services internationaux de transport ferroviaire de voyageurs à compter du 13 décembre 2009 et autorise le cabotage sous deux conditions strictes : l'objet principal du service doit rester international et l'équilibre économique des services existants ne doit pas être compromis par l'activité de cabotage.
Le décret du 24 août 2010 définit quant à lui la procédure que doit suivre toute entreprise ferroviaire exploitant en France un service international de transport ferroviaire de voyageurs comprenant des dessertes intérieures ou candidate à l'exploitation d'un tel service. Comme vous le constatez, nous n'avons pas tardé dans la prise des décrets d'application et nous sommes à ce jour quasiment au point !
Les candidats à l'entrée sur le marché ne se sont pas pressés. Trenitalia a présenté sans le finaliser un projet de liaison Milan-Lyon-Paris et la Deutsche Bahn manifeste un intérêt soutenu pour nombre de projets, en particulier la liaison Rhin-Rhône qui lui offrirait de nouveaux débouchés ou la liaison Francfort-Londres.
Le projet de décret relatif au fonctionnement de la direction des circulations ferroviaires (DCF) de la SNCF est en cours d'examen devant le Conseil d'État. Ce service joue un rôle essentiel puisqu'il est chargé de veiller, selon les principes définis par RFF, au respect des règles d'une concurrence libre et loyale entre opérateurs. Le directeur de ce service, M. Bertrand, qui est un ancien dirigeant d'Eurotunnel, sera bientôt nommé. Un second décret, qui prévoit que la gestion des gares est assurée par une direction autonome de la SNCF, sera publié début 2011 : l'enjeu est de définir le modèle économique des gares, à destination des AOT, de RFF et de la SNCF elle-même. Le Conseil d'État en sera saisi dans les prochaines semaines.
J'en viens aux transports collectifs de voyageurs en Ile-de-France. Deux projets de décrets précisent les évolutions du rôle de la RATP et du STIF. Le premier porte sur les missions de gestionnaire d'infrastructures exercées par la RATP et sur les transferts d'actifs entre le STIF et la RATP. Le second traite de l'organisation des services de transport en Ile-de-France et sera prochainement transmis au Conseil d'État.
La loi prévoit également la remise de deux rapports au Parlement : le premier, relatif aux modalités et à l'impact d'un transfert à RFF des gares de fret, sera transmis prochainement ; le second, censé présenter des solutions pour le remboursement de la dette de RFF nécessite un travail préalable de révision de la trajectoire économique de l'EPIC, suite à la crise économique de 2009.
La loi ORTF comporte également plusieurs dispositions relatives au transport routier, en matière de concessions autoroutières et de régulation du transport routier.
Le décret portant les conditions du transfert de la RN 205 à la société « Autoroutes et tunnel du Mont-Blanc » (ATMB) a été publié le 28 avril 2010 pour un transfert effectif au 1er mai. Cette opération permet au département de la Haute-Savoie de disposer d'une infrastructure routière et autoroutière concédée cohérente dans son exploitation.
Le décret relatif au cabotage et au détachement dans les transports routiers et fluviaux est intervenu le 19 avril dernier. Il dote les autorités d'un pouvoir de contrôle qui permettra de stabiliser le secteur.
Le décret autorisant des dessertes routières intérieures d'intérêt national dans le cadre de services réguliers internationaux de voyageurs est en cours de signature après avoir reçu un avis favorable du Conseil d'État. Je rappelle que ces services, de type Eurolines, ont démontré tout leur intérêt et leur réactivité lors de l'épisode du volcan islandais.
Au final, il y a lieu de se féliciter du travail accompli. Sur onze décrets concernant le secteur ferroviaire, sept ont été publiés et un, nominatif, est sur le point de l'être. S'agissant des transports collectifs en Ile-de-France, les deux décrets d'application seront pris cette année. En ce qui concerne le transport routier, sur cinq décrets, deux ont paru et trois sont imminents.
Merci, Monsieur le ministre, pour cette présentation très complète des deux thèmes de votre audition. Je cède dans un premier temps la parole aux orateurs des groupes.
La réflexion sur les transports comprend au moins deux composantes : les services offerts à l'usager, les infrastructures concourant à la réalisation de ces services. Tout document de planification tel que le SNIT doit prendre en compte ces deux dimensions.
Revenant sur les décisions du CIADT du 18 décembre 2003, le SNIT, issu de la loi « Grenelle I » du 3 août 2009, relève le défi du climat et de la préservation des ressources énergétiques. Il s'agit d'un exercice cohérent, qui promeut le transfert modal et l'optimisation des réseaux.
Selon moi, pour gagner en efficacité et devenir vraiment opératoire, le SNIT devrait être complété d'études visant à présenter la demande de transport et ses perspectives d'évolution à l'horizon 2020. Il convient de raisonner à partir des différentes échelles de déplacement et de la diversité des territoires, en prenant en compte aussi bien les attentes de désenclavement local qu'une réflexion prospective de portée nationale, sans négliger pour autant les exigences de financement. A cet égard, je rappelle que, depuis la funeste décision de Dominique de Villepin de les privatiser, l'on ne peut plus compter sur les dividendes des SEMCA, d'où une perte de recette de 2,4 milliards d'euros pour l'AFITF. S'agissant du deuxième appel d'offres relatif aux transports urbains de voyageurs, vos annonces, Monsieur le ministre, ne lèvent pas nos inquiétudes.
S'il constitue un outil d'aménagement du territoire sans doute utile, le schéma national des infrastructures de transport en reste trop au plan des généralités. Il gagnerait à se décliner en trois degrés : d'abord, la perspective mondiale et européenne – incluant notamment la problématique des ports et de leur hinterland, ensuite, l'échelon national et interrégional, enfin, les bassins d'activité et de vie, et, le cas échéant, leur nécessaire désenclavement. Il est indispensable de moduler les réponses en fonction de la situation de chaque territoire et c'est dans cet esprit que nous appelons de nos voeux depuis longtemps la mise au point de véritables schémas de services collectifs.
Je conclus en faisant part d'une critique et d'un doute.
Ma critique, c'est que le SNIT développe une vision des transports extrêmement restrictive alors que chacun sait qu'il s'agit d'une filière économique à part entière et d'un gisement de valeur et d'emploi.
Quant à mon doute, il porte sur l'efficacité des solutions envisagées pour conduire une politique de transfert modal réellement efficace. Qui ne souscrirait pas à votre plaidoyer en faveur des modes alternatifs à la route ? Mais à l'heure où 82 % des voyageurs et 87 % du fret restent acheminés par la route, sans parler de la difficulté des opérateurs ferroviaires de proximité à émerger, est-ce autre chose qu'une pétition de principe ?
Monsieur le ministre, comment le Gouvernement entend-il résorber les besoins de financements du SNIT évalués à 170 milliards d'euros ? Existe-t-il des objectifs chiffrés de transfert modal ? Quid de la maintenance des infrastructures existantes ?
Je me félicite de la vision stratégique globale développée dans le SNIT, qui intègre les modifications rendues nécessaires par le Grenelle de l'environnement aux orientations adoptées par le dernier CIADT. A ceux qui disent que la marge de progression reste importante, je réponds que la conversion écologique des esprits pourrait être beaucoup plus rapide qu'on ne le croit généralement.
L'avant-projet de SNIT a de grands mérites, mais sans doute aussi deux défauts légers. Le premier est la conséquence d'une finalisation du document postérieure à la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris. Peut-être certains éclairages régionaux auraient-ils ainsi été opportuns, en lien avec les contrats de projet État-régions. Par ailleurs, faute d'un accord entre RFF et la SNCF, il y manque à mon sens l'interconnexion ouest LGV. Le projet de LGV Paris-Normandie est un vrai débat : à un horizon de vingt ou trente ans, la fiabilisation du réseau LGV et européen rend une telle connexion absolument nécessaire.
Je m'interroge sur l'articulation de nos choix stratégiques avec les orientations retenues au plan européen. Il nous faut dépasser une vision purement hexagonale des dossiers, ce qui pourrait nous conduire à travailler, par exemple, sur des documents régionaux transfrontaliers.
J'éviterai de poser des questions de « conseiller général » (plusieurs députés SRC : « de conseiller territorial ! »), mais je voudrais mentionner le fait que le SNIT évoque deux possibilités de liaison Londres-Paris par Amiens. Pour avoir participé au débat Picardie – Roissy, je me demande si tout n'était pas en réalité décidé d'avance et si, de ce fait, nous n'aurions pas pu faire l'économie de débats parfois vigoureux entre l'Île-de-France et la Picardie. Je m'interroge en toute hypothèse sur la viabilité du système « pendulaire » présenté par RFF comme étant la solution pour la desserte d'Amiens.
S'agissant de la loi sur l'organisation et la régulation des transports ferroviaires et, plus particulièrement, de « l'amendement RATP » à l'article 3bis, quel degré de sécurité juridique au regard du droit européen s'attache à l'octroi d'une concession de durée trentenaire ?
Je m'interroge enfin sur le modèle économique que les transports aériens seront susceptibles de suivre dans les années à venir. Ne sommes-nous pas confrontés à une crise de croissance de nature à remettre en cause l'ensemble des équilibres économiques et sociaux ?
Monsieur le ministre, je souhaiterais vous interroger sur le volet du SNIT relatif au transport fluvial et notamment sur le canal à grand gabarit Seine – Nord Europe. Il s'agit là d'une opération structurante majeure, considérée comme un dossier essentiel pour l'activité économique de toute la Picardie et des territoires situés à l'est de la Somme.
Il me semble donc qu'il y a urgence à lancer enfin le dialogue compétitif entre les parties intéressées. L'Association Seine-Nord Europe a récemment souligné les dangers qui s'attachent à une prolongation indéfinie du statu quo au motif que le bouclage financier n'est pas terminé à ce jour, et en particulier l'atteinte à la crédibilité d'ensemble du projet dans les milieux socio-économiques. Pourriez-vous donc donner une date très précise de lancement de la procédure de dialogue compétitif ?
S'agissant de la loi ORTF, qui a abouti à la création de l'ARAF, pourriez-vous dresser un tableau synthétique de la manière dont nos partenaires européens, notamment le Royaume-Uni et l'Allemagne, abordent la question de la régulation en matière ferroviaire ? Quel retour d'expérience pouvons-nous en retirer ?
Par ailleurs, il me semble que l'ARAF ne doit pas seulement jouer un rôle de « gendarme du rail », mais aussi celui d'un régulateur du réseau : pourriez-vous nous faire part de votre point de vue sur ce sujet ?
Je reconnais bien volontiers que, dans sa rédaction actuelle, le SNIT est effectivement améliorable quant à l'analyse de la demande, les différentes échelles, etc. car les hypothèses en matière de transfert modal constituent effectivement un pari sur l'avenir.
En ce qui concerne le fret, il est évident que les récents mouvements sociaux vont faire perdre à la SNCF un certain nombre de clients. La baisse de chiffre d'affaires qui en résultera est impossible à évaluer à ce jour, mais la perte est certaine. Les dirigeants de la SNCF nous le disent déjà.
Les besoins de financement du SNIT se montent à 23 milliards d'euros sur vingt-cinq ans, soit 6 milliards par an dont 4 milliards d'euros de fonds publics.
La participation de l'État à la modernisation des infrastructures se déploie dans le cadre des contrats de projet État-régions et du contrat entre l'État et RFF, mais je reconnais volontiers que l'apport des collectivités territoriales reste très important. S'agissant des TCSP, je souhaite qu'on puisse arriver au chiffre de 500 millions d'euros que j'ai annoncé. L'écart est probablement moindre qu'on peut le penser, car il faut tenir compte des dates réelles de démarrage des projets. Le financement de l'AFITF est bouclé jusqu'en 2014, avec une subvention budgétaire de 974 millions d'euros par an.
L'interconnexion ouest de Paris est un sujet difficile, car tout dépend de la manière dont on « boucle » l'arrivée du TGV normand. Part-on de la gare Saint-Lazare ou de la Défense ? Mais il est vrai qu'il existe une incompatibilité entre le projet de ligne Paris-Amiens-Londres et la prolongation des lignes normandes vers le tunnel sous la Manche. La ligne d'accès au tunnel devra être doublée, en toute hypothèse. Mais il faudra que le Parlement tranche entre les deux options, celle du Grenelle de l'environnement et celle proposée dans le SNIT.
La question de la durée de la concession dans le cadre de la loi ORTF est en cours d'examen par la Commission européenne.
Sommes-nous confrontés au risque d'une crise de croissance des transports aériens ? Je ne le crois pas. Mais les compagnies européennes seraient bien inspirées de s'interroger sur les stratégies déployées par les compagnies émiraties. Les trois grands hubs européens Londres, Paris et Francfort sont désormais confrontés à la concurrence des hubs situés dans les Émirats pour toutes les lignes vers l'Asie du Sud-est et les destinations du Pacifique. On peut aussi s'interroger sur le modèle low cost pour les longs courriers : est-il viable à long terme, par exemple entre l'Asie et l'Europe ?
Pour ce qui concerne le canal Seine – Nord Europe, le protocole d'intention entre les régions et l'État a été signé le 11 mars 2009. L'appel à candidatures a été lancé le 3 avril dernier et deux groupements ont été retenus. Le plan de financement avec les collectivités territoriales est en voie de finalisation. Si tout se passe bien, il y a espoir de commencer les travaux fin 2011 et d'envisager une mise en service à l'horizon 2016.
Il me semble que le SNIT est un document doté d'une très grande cohérence même s'il reste évidemment perfectible. Je note la rapidité de mise en oeuvre par rapport aux investissements engagés : le schéma d'ensemble est d'ores et déjà partiellement mis en oeuvre, alors que les lois Grenelle I et II viennent à peine d'être votées. Pour ne prendre que les transports collectifs en site propre (TCSP), il ne s'agit de rien moins que de 6,5 milliards d'euros, dont 800 millions pris en charge par le budget. Cela va permettre de construire, en l'espace de quelques années, 400 kilomètres de voies nouvelles, soit l'équivalent du « stock » actuel de 430 kilomètres, fruit de trente ans de développement de ce type de transport.
En matière de fret ferroviaire, l'objectif très ambitieux – une progression de 25 % dans les deux ans à venir- est-il tenable ? Où en est le projet CAREX d'utilisation des sillons de nuit aux heures creuses ? Compte tenu des difficultés de mise en oeuvre de l'éco-taxe poids lourds, à quel stade de réalisation nous trouvons-nous ?
S'agissant des lignes TGV, les financements partagés entre l'État et les collectivités territoriales sont extrêmement lourds. Le risque existe de ne pas réaliser tout ce qui était prévu d'ici dix ou vingt ans. Je pose dès lors la question : plutôt que de réaliser un réseau « neuf », ne serait-il pas préférable de modifier les concepts afin d'entrer dans une logique de raccordement à l'existant pour pouvoir réaliser concomitamment tous les investissements prévus pour l'ensemble du transport ferroviaire ? On a beaucoup parlé, lors du Grenelle de l'environnement, de biodiversité et de préservation des paysages. Ne devrait-on pas s'orienter vers la réalisation de grands corridors de transport, qui, le cas échéant, pourraient suivre le tracé de corridors autoroutiers existants, qui déstructurent déjà nos paysages, en leur adjoignant les lignes TGV nouvelles ? Je connais d'ores et déjà les réponses de RFF et de la SNCF : elles ne me satisfont pas.
Dans le cadre de la loi ORTF, un amendement du Gouvernement organisait le transfert des actifs du Syndicat des transports d'Île-de-France (STIF) à la Régie autonome des transports parisiens (RATP). Où en sommes-nous de la préparation du décret de transfert et quelles sont les perspectives d'un contentieux avec la région Île-de-France ? Ce texte offrira-t-il des garanties suffisantes quant aux priorités d'investissement de la RATP sur des projets intéressant les déplacements des Franciliens, et non sur des projets de nature différente ?
Force est de constater que le fret ferroviaire s'effondre, avant même les grèves récentes. Nous demandons depuis longtemps une évaluation de l'ouverture à la concurrence du fret ferroviaire, sachant que la Commission européenne a l'intention de procéder, de son côté, à un examen des politiques de libéralisation et de leurs résultats. Le transport international de voyageurs va s'ouvrir également à la concurrence avec un risque « d'écrémage » des lignes les plus rentables par les nouveaux opérateurs, au détriment peut-être de la SNCF. Le modèle économique du TGV n'est plus aussi rentable qu'il l'était. Des commandes n'ont donc pas été passées, comme celle de cette merveilleuse machine qu'est l'AGV. On a donc l'impression que c'est l'ensemble du secteur ferroviaire qui est aujourd'hui malmené. Qu'envisagez-vous donc dans ce domaine industriel, quelles sont vos orientations ?
Je nourris une forte inquiétude quant au dossier Eurostar, puisque les questions relatives à la sécurité des rames Siemens ne semblent pas avoir été retenues.
S'agissant du SNIT, certains ont souligné l'absence de perspectives de financement. Je crains que la taxe poids lourds ne suffise pas au financement de l'AFITF. La France est aujourd'hui l'un des pays où le taux d'épargne est le plus élevé : n'y a-t-il pas moyen d'orienter cette épargne vers la réalisation de grandes infrastructures de transport ?
Le grand port maritime de La Rochelle est inscrit sur la carte, c'est l'action G. Mais la nomenclature s'arrête à la lettre F… Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?
Je veux revenir un instant sur certains des projets routiers – qui représentent 900 kilomètres – qui ne figurent pas dans le projet de SNIT, et notamment celui d'autoroute Amiens-Arras-Lille. Ce projet joue de malchance en dépit du fait qu'il présente de sérieux atouts pour améliorer la sécurité routière sur l'axe Paris-Lille, notamment parce qu'il double l'autoroute A1. Si ce projet ne devait jamais voir le jour, ce que je déplorerais, il faudra que l'État prenne ses responsabilités en réalisant lui-même les travaux d'infrastructures nécessaires pour améliorer la sécurité de la route nationale 25.
Je reprends par ailleurs à mon compte l'analyse de notre collègue Stéphane Demilly sur la desserte TGV d'Amiens, qui pâtit de la décision prise il y a quelques années d'adopter un tracé « Paris-Mauroy-Delebarre », je veux dire Paris-Lille-Dunkerque. Or cette décision a fait fi de l'intérêt de cette desserte qui permettrait notamment d'améliorer le temps de transport entre Paris et Londres de 15 minutes, et constituerait le trajet le plus direct pour joindre Lille depuis Paris. Elle a été votée, avec difficulté certes, dans le cadre du Grenelle, grâce à une action collective des élus picards et à la pugnacité du député-maire du Touquet. Je veux souligner que, si le projet concurrent figurant dans le SNIT était réalisé, Amiens, capitale régionale, se verrait entourée d'infrastructures de transports qui ne la desserviront pas : après une autoroute A1 et une LGV passant à 40 kilomètres à l'est, elle se verrait dotée d'une seconde ligne LGV, également distante de 40 kilomètres … à l'ouest ! Nonobstant, je suis conscient de l'intérêt du tracé qui a été envisagé, dans le cadre du Grand Paris, pour relier Paris à la Normandie.
Je voudrais mettre l'accent sur le problème de l'inaccessibilité aux Alpes du Sud, qui restent classées en niveau 5 – le plus haut – par la DATAR. Les deux départements concernés, les Hautes Alpes et les Alpes de Haute Provence, qui vivent à 80 % du tourisme, souffrent d'un enclavement ferroviaire, aérien et autoroutier. À ce sujet, je suis favorable, si elle existe, à une alternative crédible à l'autoroute Gap-Grenoble, véritable « serpent de mer » de l'aménagement de nos territoires.
Sur le plan ferroviaire, dans le cadre du plan État-région, des études en vue du débat public ont débuté sur le raccordement entre Briançon et l'Italie, qui est en réalité une liaison franco-française puisque le tracé envisagé passe par l'Italie pour rejoindre la France. Ce même raccordement fait l'objet d'une étude par la Commission intergouvernementale pour les Alpes du Sud, et ce depuis deux ans. Néanmoins, mes collègues au sein de cette commission m'ont fait savoir que si ce raccordement ne figurait pas au SNIT, cette étude serait arrêtée. Or ce raccordement transfrontalier est le seul à même de nous relier au réseau ferroviaire national, et il ne s'agit pas d'une autoroute ferroviaire, avec toutes les nuisances induites, comme la liaison Lyon-Turin. Qu'en est-il donc de son inscription au SNIT ? S'il n'y figurait pas, cela signifierait un « no future » au développement touristique de toute une partie du territoire national.
Je partage tout à fait la philosophie générale qui a guidé l'élaboration du SNIT. Cependant, il me semble que l'ouest est le grand oublié de ce nouveau schéma d'aménagement, et que cet oubli risque de conduire à une asphyxie de ce territoire, à l'horizon 2030-2040, alors même qu'il constitue la façade atlantique de l'Europe. Le concept d'Arc atlantique prôné par Olivier Guichard nous rappelle que ce territoire est indispensable pour renforcer l'ancrage européen de l'ouest de la France.
Il dispose pourtant de nombreux atouts : une économie dynamique et diversifiée qui en fait la quatrième région industrielle, une démographie tonique - ne dit-on pas que dans 20 ans 80 % de la population mondiale vivra sur les littoraux – et des infrastructures de transport structurantes avec l'aéroport Notre Dame des landes, le grand port maritime et la métropole Nantes-Saint-Nazaire qui comptera bientôt plus d'un million d'habitants. Pour développer leur activité et leur intermodalité, elles ont aujourd'hui besoin de liaisons plus performantes avec l'hinterland par la route, c'est-à-dire d'une prolongation vers l'ouest de l'autoroutes des estuaires - qui permettra la prolongation des liaisons de l'Angleterre vers le Portugal via Le Havre - ce qui implique un franchissement de la Loire à l'ouest de Nantes. Elles ont aussi besoin d'un plan ambitieux pour le port maritime de Nantes-Saint-Nazaire, car aujourd'hui beaucoup de pétroliers et de porte-conteneurs croisent devant, sans s'y s'arrêter, pour décharger à Rotterdam, Anvers ou Amsterdam.
Cette logique a d'ailleurs été retenue par la directive territoriale d'aménagement de l'estuaire de la Loire, validée par le Conseil d'État, et confortée par le Gouvernement qui a demandé au préfet, le 14 septembre dernier, et par la voix du Premier ministre, de reprendre les études concernant l'accès à la plate-forme aéroportuaire de Notre-dame-des-Landes et du grand port maritime.
Pour toutes ces raisons, il ne faut pas que l'ouest soit la grande oubliée du SNIT, car son échéance – 2040 – n'est pas si éloignée si l'on veut réellement s'atteler à son désenclavement.
Je suis choquée qu'un niveau territorial, le niveau départemental, soit à ce point stigmatisé. Or pas un dossier d'infrastructures de transport n'aboutit sans l'engagement et le financement des conseils généraux. S'agissant du volet routier du SNIT, on ne peut qu'adhérer à la volonté de ne plus développer notre réseau, sauf quelques exceptions motivées par des impératifs de sécurité, de désenclavement, d'équité territoriale, d'enjeux sociaux et économiques particulier, et de réduction de la congestion.
Or la mise à deux fois deux voies de la route nationale 147 – qui fait la liaison centre-Atlantique – satisfait l'ensemble de ces critères. M. Benoist Apparu m'a répondu en votre nom, avant que le SNIT ne soit rendu public, que la seule question pendante était de savoir s'il était opté pour une mise à deux fois deux voies sur site ou pour une concession autoroutière. Or je suis inquiète car ce projet ne fait pas partie des 19 projets routiers retenus dans le SNIT. Fait-il donc partie des fameux 900 kilomètres passés par pertes et profits ? Une chose est sûre, son omission ne peut être due au fait qu'il avait déjà fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique (DUP), car il n'avait pas encore atteint ce stade.
Ceci étant, pour corroborer les propos tenus par Serge Grouard, je plaide en faveur d'une réalisation concomitante de ce projet et du barreau LGV Limoges - Poitiers, ce qui reviendrait à optimiser les tracés en fonction des situations locales et des modes de transport, en vue notamment de minimiser l'impact environnemental. Les régions enclavées n'ont pas à payer un plus lourd tribut à la politique environnementale que celles dans lesquelles ont été par le passé réalisées de grandes infrastructures de transport, sans réelle prise en compte de leur bilan carbone ni de leur impact sur la biodiversité.
Le SNIT est un excellent document, même si on peut regretter que, concernant la multimodalité, il ne reprenne pas les objectifs de report définis par la loi « Grenelle I », ni les 25 % d'augmentation du fret non routier, pas plus que la référence au réseau transeuropéen de transport. Comment les différents modes vont-ils s'articuler entre eux ? Pourquoi les plateformes multimodales, qui permettent des jonctions entre les différents modes de transport, n'ont-elles pas fait l'objet d'une description ? Cet élément revêt une importance particulière dans la mesure où, par exemple, elle bloque actuellement le développement de l'autoroute ferroviaire sud-Atlantique.
S'agissant de la consommation d'espaces, et conformément aux recommandations de l'Autorité environnementale, le SNIT prévoit la consommation de 300 km2. La même autorité a indiqué que, dans le cadre du SNIT, une réduction de la consommation des espaces agricoles et naturels était souhaitable. Cela est-il réaliste, dans la mesure où les effets combinatoires de l'urbanisation ainsi que des infrastructures des collectivités territoriales n'ont pas, à mon sens, été suffisamment pris en compte ?
Les projets autoroutiers inscrits au SNIT - qui correspondent à un accroissement de 7,5 % du réseau - semblent disproportionnés dans un pays qui compte le réseau le plus dense d'Europe. Pouvez-vous enfin préciser le scénario de référence retenu pour les comparaisons et le suivi du SNIT ? Contient-il en particulier la liste des opérations irréversiblement engagées ?
Même si on ne peut que comprendre les objectifs des projets routiers inscrits au SNIT, ce document de planification ne donne-t-il pas le signal d'une véritable relance de la politique autoroutière de notre pays, comme le craignent certaines associations, puisque les projets impliquent une augmentation d'environ 8 % du réseau ? Comment ne pas être frappé des contradictions de ce document, qui prévoit par exemple la construction de 4 000 kilomètres de lignes de TGV, alors que le réseau traditionnel pâtit d'un entretien insuffisant, ou qui s'inscrit dans la politique de développement durable de notre pays, mais qui conduit à une fragmentation des espaces naturels et donc à une perte de biodiversité ? Il faut garder à l'esprit que 20 à 45 des 1 100 espaces naturels non fragmentés de plus de 100 km2 - de même que 12 % des zones Natura 2000 - pourraient être touchés par les projets inscrits.
La procédure d'adoption du SNIT, même si elle est relativement longue et précise, suscite quelques interrogations. Les arbitrages interministériels, qui devaient s'achever fin septembre, sont-ils définitivement terminés ? Quand et selon quelles modalités aura lieu le débat public ? De quelle façon les élus locaux seront-ils associés à ce débat ? Quand aura lieu le débat au Parlement ?
Je souhaite revenir sur la nécessaire modernisation de la route nationale 12, axe historique reliant Paris à la Bretagne par les villes d'Alençon, Mayenne, Ernée et Fougères. Les enjeux de ce projet, qui répond à l'objectif d'optimisation du système de transport existant, sont l'amélioration de la sécurité routière, le développement durable, mais aussi le maillage et la continuité des territoires. J'insiste sur le fait que les villes moyennes des départements de la Mayenne, de l'Orne et de l'Ille-et-Vilaine ne disposent pas, en dehors de cette modernisation, de solution de désenclavement. Il en va de leur attractivité, de leur développement économique mais aussi de leur capacité à accueillir de nouvelles populations. Le contournement routier de ces agglomérations, en même temps que le traitement des zones particulièrement accidentogènes de la RN 12, s'imposent comme des nécessités pour ces territoires. L'inscription de projet au SNIT est donc à mes yeux prioritaire.
À un niveau territorial encore inférieur, celui du pays de Haute-Gironde, je désire évoquer la réouverture de la ligne Blaye-Saint-Mariens-Clérac, actuellement désaffectée. Comme vous me l'aviez indiqué lorsque vous m'aviez reçu en 2008, la construction de la LGV Tours - Bordeaux par le groupe Vinci offre aujourd'hui une opportunité de concrétiser enfin ce projet qui permettrait de désenclaver le pays blayais. Las, ce même groupe ne m'a laissé aucun espoir quant à l'utilisation du port de Blaye et de la ligne Blaye-Saint-Mariens pour le transport des matériaux, et notamment des granulats, nécessaires aux chantiers, arguant que l'appel d'offres dont il était devenu attributaire ne contenait aucune disposition contraignante en ce sens.
Par ailleurs, je souhaiterais vous interroger sur le bilan de votre ministère, car si on ne peut nier votre implication dans les projets de LGV, dont celui que je viens de mentionner et qui me tient particulièrement à coeur, force est de constater que le moratoire sur les grandes infrastructures routières, que je soutiens, n'a pas été respecté. Parallèlement, le développement du fret ferroviaire a pâti de la fermeture de nombreuses lignes, dues uniquement à l'application de critères de rentabilité dans une logique libérale, alors même que la taxe « camions » était repoussée aux calendes grecques.
Le SNIT que nous examinons aujourd'hui constitue un vibrant plaidoyer pour le développement de solutions de transports multimodales alternatives à la route, mais n'y figurent pas en regard les investissements qui auraient permis de concrétiser cette orientation, et qui auraient dû lui valoir l'appellation de « plan Marshall pour les transports ». Ne s'agit-il pas là d'un rendez-vous manqué ?
Je vais concentrer mes questions sur deux projets : le contournement routier de Lyon par l'ouest et la situation du port de Marseille.
S'agissant du premier, dont l'importance en conditionne beaucoup d'autres, dont celui du tronçon ouest du périphérique et le déclassement de l'autoroute A7 dans Lyon intra-muros, notamment dans le quartier de Perrache, pouvez-vous nous confirmer la volonté de l'État de faire avancer ce dossier, dont semble témoigner la première réunion organisée récemment par le préfet du Rhône ?
En ce qui concerne le second, je déplore la situation de blocage permanent du port de Marseille, qui bénéficie pourtant d'atouts géographiques sans équivalent, car cette situation a un impact négatif sur le trafic du port Edouard-Herriot et sur tout le secteur de la batellerie rhodanienne. Il faut que cette situation cesse car elle est insupportable.
En tant que président du conseil général de l'Hérault, j'ai pris récemment l'initiative de réunir mes neuf homologues de tous les départements - l'Isère, le Rhône, l'Ardèche, la Drôme, le Vaucluse, le Gard, l'Hérault, l'Aude et les Pyrénées orientales - pour évoquer l'embolie structurelle que connaît l'arc languedocien et l'autoroute A9. Qu'observe-t-on ? Il manque entre autres, depuis des années, pour compléter la LGV Séville-Amsterdam, un tronçon de 115 kilomètres de la frontière du Perthus jusqu'à Manduel près de Nîmes… Le report modal du fret de la route vers le fer ne pouvant s'opérer du fait de cette rupture de charge, la route concentre l'essentiel du trafic et la situation devient dramatique.
S'agissant du fret fluvial, nous avons sur le canal du Rhône à Sète un problème de gabarit à résoudre, qui permettrait au port de Sète de devenir un carrefour entre au sud la mer Méditerranée et les autoroutes de la mer, et au nord le réseau fluvial du sud-est de la France. Vous comprendrez dans ces conditions que nous ne pouvons nous satisfaire de l'annonce faite récemment par Voies navigables de France (VNF), par la voix d'un de ses représentants, d'une étude sur la mise au gabarit pour… 2019.
Enfin, les neuf départements que j'ai mentionnés investissent dans les infrastructures routières 1 milliard d'euros par an, prenant ainsi la mesure des nouvelles responsabilités qui leur ont été confiées. J'ai fait le calcul suivant : si les investissements des régions, de l'État et de l'Union européenne étaient d'un niveau et d'une régularité comparables, tous les problèmes que je viens d'évoquer trouveraient une solution.
J'aborderai la question des infrastructures de transport fluvial qui sont une alternative au « tout routier » ; nous devrions mettre en place un « plan Marshall » du fluvial et développer un véritable réseau notamment par des liaisons interbassins facilitant le report modal. Le port de Marseille, par exemple, est menacé d'isolement aujourd'hui, avec les investissements de Tanger-Med au Maroc qui pourra accueillir 10 millions de containers. Le schéma national des infrastructures de transport est fondé, indiquiez-vous, sur trois hypothèses : Saône-Moselle seule, Saône–Rhin seule et les deux liaisons avec un phasage à définir. Or la liaison Saône–Rhin n'est mentionnée qu' « éventuellement », ce qui ne paraît pas conforme aux orientations du Grenelle.
Je vous réponds tout de suite. C'est une coquille… Les deux liaisons sont prises en compte « également ».
Le cahier des charges de l'étude Saône–Rhin ne prend pas en compte le tracé de l'actuel canal Rhône au Rhin par le Doubs, ce qui peut remettre en cause la crédibilité du débat public annoncé sur ce thème. Le Réseau transeuropéen de transport (RTET) va être révisé pour le printemps prochain : y intégrera-t-on les projets Saône-Moselle et Saône-Rhin ?
J'évoquerai les questions routières. Pendant de longues années, la seule « 2 fois 2 voies » existant dans le Gers était plus large que longue... (sourires) : la RN21 qui traverse le département du Nord au Sud est restée nationale et bien que constituant un axe particulièrement meurtrier, elle n'est pas mentionnée dans l'avant-projet de schéma national des infrastructures de transport, la voie Toulouse-Ariège paraissant privilégiée. Deux questions se posent : envisagez-vous de ne pas retenir définitivement la RN21 dans le SNIT dans sa partie Limoges-Pyrénées ? Ou pensez-vous prendre malgré tout en compte cet axe au titre de deux actions identifiées au SNIT : le renforcement de l'accessibilité des populations sur des territoires se trouvant à l'écart des réseaux de services publics et l'amélioration de la sécurité des infrastructures ?
Une clarification s'impose s'agissant du désenclavement du Massif Central : le passage à « 2 fois 2 voies » de la RN88 entre Lyon et Toulouse n'a-t-il pas été oublié dans le SNIT, alors que les fuseaux ont été arrêtés et que tous les CIADT depuis 1993 ont confirmé l'intérêt de cette réalisation, qui répond d'ailleurs aux exigences de sécurité mentionnées dans le SNIT. La RN88 n'a pas fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique qui justifierait sa non-inscription au schéma national. Je suis sûr que vous aurez à coeur de réparer cet oubli.
Vous avez évoqué le doublement envisagé de la liaison entre Paris et le tunnel sous la Manche. Les Picards ont pu s'exprimer sur ce sujet. Depuis le début du XIXè siècle, l'on n'a pas gagné une minute sur le trajet en train entre Boulogne-sur-Mer et Paris. Il y a donc beaucoup à faire en matière d'aménagement du territoire pour la région Picardie. Il aurait pu être utile, par ailleurs, de ne pas oublier, dans l'intérêt de cette région, le projet de troisième aéroport. Les collectivités devraient aller dans le même sens en matière d'électrification des lignes permettant d'envisager une liaison nationale sur la façade littorale. Lorsqu'il y a une implication des collectivités locales, il importe que la SNCF ne supprime pas les « intercités » ni les liaisons avec les TGV.
Des inquiétudes se sont manifestées sur les arrêts Eurostar de la gare internationale de Fretin. Qu'en est-il, alors que le Président de la SNCF a fait allusion à l'allègement du nombre des TGV et notamment des liaisons avec les communes de la région ? Ceci ne paraît pas normal car, lorsque la collectivité investit, un « retour » devrait être opéré par la SNCF. Comment donc faire en sorte que Fretin garde son statut de gare internationale ? Enfin, qu'en est-il des réseaux secondaires, en particulier de la nécessité de réorganiser les compétences des autorités organisatrices ferroviaires, notamment dans les zones portuaires ?
Vous avez évoqué quelques projets autoroutiers déjà déclarés d'utilité publique, indiquant qu'ils figureront dans la version consolidée du SNIT comme « projets engagés ». L'A831 pose à cet égard question : des études complémentaires ont été demandées de façon inédite après la déclaration d'utilité publique à la LPO. Quel sort réservez-vous aux préconisations de la LPO ? Le calendrier ne risque-t-il pas d'être affecté ?
Par ailleurs, plusieurs collectivités territoriales ont demandé l'inscription dans le SNIT du projet de franchissement de la Loire en aval de Nantes afin de permettre la desserte Sud–Loire du nouvel aéroport Notre-Dame-des-Landes. Cette demande sera-t-elle prise en compte dans la version consolidée du SNIT ?
Je salue le travail considérable effectué dans le cadre du schéma ainsi que son indéniable virage environnemental. Sur 25 % du territoire national relevant de la « loi montagne », des comités de massifs ont su conclure, notamment dans les Alpes, des conventions interrégionales de massifs identifiant de manière consensuelle des schémas de transport. Ces actions seront-elles prises en compte dans le SNIT ? Je rappelle que dans les zones de montagne, la population est de faible densité mais qu'elle connaît des variations saisonnières importantes. La prise en compte des zones touristiques y est difficile, alors que, dans des pays concurrents, les infrastructures de transport permettent d'amener les touristes en sites propres.
Où en est-on ensuite du projet de « tram-train » de Chamonix, dossier emblématique depuis plus de dix ans ? Vous êtes le ministre des remontées mécaniques : celles-ci - et c'est là une « bonne nouvelle » - ont réalisé un chiffre d'affaires de 1,2 milliard d'euros. Enfin, le Conseil national de la montagne dont je suis le Président réfléchit actuellement à l'adaptation des délégations de service public qui doivent évoluer, compte tenu de la nature et du montant des investissements.
J'aborderai les problèmes de l'Estuaire de la Seine et de la ligne à grande vitesse Paris-Rouen-Le Havre.
Paris étant au troisième rang des villes mondes, il importe de la doter d'une façade maritime performante. Quelle liaison parmi les cinq envisagées sera privilégiée précisément lors du débat public qui se tiendra au premier semestre de 2011 sur cette question ?
J'ai un regret : l'abandon à partir du mois de décembre de la ligne Le Havre-Rouen-Roissy-Strasbourg, qui permettait d'arriver directement sur Roissy. La SNCF a-t-elle fait la communication nécessaire pour développer cette ligne ?
Où en est-on du développement du transport aérien régional, alors, par exemple, que la Chambre de Commerce et d'Industrie du Havre a abandonné son soutien financier de la ligne Le Havre-Lyon ? L'État soutiendra-t-il ces lignes régionales ?
L'autoroute Yvetot-Rouen est-elle abandonnée ? Le conflit du grand port maritime du Havre connaîtra-t-il enfin un aboutissement alors qu'un gros effort est nécessaire pour maintenir son développement ?
Ma question concerne le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise. La partie Nord est à l'étude, mais qu'en est-il de la partie Sud en direction de la vallée du Rhône ?
Monsieur Serge Grouard, pour le projet Carex, beaucoup dépendra du travail effectué par Yanick Paternotte : ce projet auquel nous tenons connaît des avancées, mais il est difficile à mettre en oeuvre, car il nécessite l'usage de trains adaptés et l'accord des grands transporteurs aériens internationaux.
J'indique à tous que le calendrier de la mise en oeuvre de l'éco-redevance est respecté. Le choix du concessionnaire devrait être opéré avant la fin de cette année, pour une mise en oeuvre en 2012, ce qui sera techniquement difficile. Mais il faut y croire !
S'agissant des lignes à grande vitesse, 780 kilomètres doivent être lancés en 2011, plusieurs chantiers étant ouverts ainsi dans le même temps, ce qui est évidemment nouveau. Nous utiliserons, le cas échéant, les lignes existantes pour des raccordements comme cela s'est fait dans le passé par exemple avec la ligne Paris-Bordeaux dont seul le tronçon Paris-Tours est à grande vitesse. Nous essaierons de coordonner les diverses infrastructures pour éviter les saignées dans le paysage. Mais les concepteurs de projets oublient quelquefois cette solution simple qui a été retenue sur la liaison Paris-Lille mais oubliée dans le Sud-Ouest.
Le projet de décret STIF-RATP a fait l'objet d'une concertation ; la convention sera négociée prochainement pour définir les conditions d'exploitation du réseau.
Maxime Bono a demandé si la concurrence ferroviaire était positive ? Oui, si l'on observe les exemples du fret britannique, qui est revenu alors qu'il avait disparu, ou du fret allemand, avec les opérateurs ferroviaires de proximité. En ce qui concerne l' « affaire Eurostar », le Gouvernement français « tiendra bon » en toute hypothèse pour des raisons liées à la sécurité. Notre industrie ferroviaire doit s'européaniser sur les grands projets. Nos grandes entreprises doivent aller à l'international ensemble sur les projets de lignes à grande vitesse : il y a des projets en Chine, au Brésil ou aux Etats Unis. Pour le grand port de La Rochelle, l'opérateur ferroviaire est allemand ; il faudra à terme un contournement ferroviaire spécifique et l'État devra lancer des études sur ce point.
Je ne partage pas l'avis d'Alain Gest, le tronçon commun Paris-Lille-Londes-Bruxelles était une excellente idée d'aménagement du territoire, même si a priori ce n'était pas le chemin le plus direct, mais je reconnais que c'est souvent le cas en matière de transport. Aujourd'hui il y a deux tronçons saturés Paris-Lille et Paris-Lyon, qu'il faut donc envisager de doubler. Il faudra envisager aussi une desserte d'Amiens, sans doute à partir de la ligne normande. Quant à l'autoroute A24, elle n'avait pas de débouché en Belgique et n'a donc pas été retenue par le « Grenelle de l'environnement ».
Je dirai à Joël Giraud que le projet de tunnel du Montgenèvre n'est pas abandonné ; les discussions avec l'Italie vont se poursuivre.
Je rappelle à Philippe Boënnec et à Dominique Souchet qu'une mission de préfiguration a été confiée au préfet de région Pays-de-Loire pour le nouveau franchissement de la Loire, afin d'améliorer la desserte de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes.
En ce qui concerne l'autoroute des estuaires A831 de Nantes à Bordeaux, le tronçon Rochefort-sur-Mer-Les-Herbiers devait faire l'objet, à la demande de Jean-Louis Borloo, d'une étude environnementale qui a été menée par la LPO car cette autoroute devrait traverser des zones de marais mouillé. Une partie des préconisations de la LPO sera retenue, l'appel à concessions devant être opéré avant la fin de 2011 ; il faudra en toute hypothèse rester dans le cadre de la déclaration d'utilité publique qui reste valable jusqu'en 2015.
De manière générale, l'ouest n'est pas oublié, avec l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, les liaisons Paris-Nantes et Paris-Rennes en deux heures, Paris-Brest en trois heures.
Monsieur Boënnec, en toute hypothèse, on ne bâtira plus d'aéroport international qui ne bénéficie d'une desserte ferroviaire en site propre, d'où la nécessité pour les collectivités locales de s'engager à une desserte de ce type pour relier le nouvel aéroport à Nantes. La liaison par autoroute ne suffit pas, d'ailleurs l'autoroute des estuaires s'arrête à Nantes. Il faudra éviter les erreurs commises dans le passé notamment pour les aéroports de Paris ou de Lyon.
Marie-Françoise Pérol-Dumont a évoqué le volet routier du SNIT. Il est vrai que la liaison autoroutière entre Poitiers et Limoges n'est pas retenue puisque priorité est donnée à la ligne ferroviaire. La route nationale 147 reste cependant un axe dangereux et accidentogène dont il faudra poursuivre l'aménagement dans le cadre du PDMI. Nous travaillons sur la déviation de Lhommaizé, dans le département de la Vienne, ainsi que sur l'axe Bellac-Limoges. Mais nous ne pouvons édifier en même temps voie ferrée à grande vitesse et autoroute entre deux mêmes villes. Or nous considérons que, comme le Limousin a pris l'initiative d'être actionnaire de la LGV Sud Europe Atlantique, il est normal que le SNIT intègre Poitiers-Limoges. Il y aura une seconde desserte par la ligne Paris-Orléans qui descendra au sud vers le Berry, ou ailleurs, pour se raccorder à Clermont puis à Lyon
J'ai bien noté l'interrogation de Bertrand Pancher sur les « coups partis ». Je ne manquerai pas de lui apporter des précisions par écrit.
Jean-Paul Chanteguet demande s'il est bien pertinent de construire 4 000 kilomètres de lignes TGV. Il suffit de se dire que l'Espagne a déjà dépassé la France sur ce point, même s'il ne s'agit pas d'une course. Quand on ouvre une ligne TGV, on libère une ligne classique : l'achèvement de la liaison Tours-Bordeaux en 2016 permettra une meilleure couverture du sud de Tours par les services de fret. De la même façon, on acheminera davantage de marchandises sur la ligne reliant Paris à Clermont une fois en service le trajet Paris-Orléans-Clermont-Lyon. C'est aussi valable pour la desserte de la vallée de la Seine avec Caen, Rouen et Le Havre. Il ne faut pas considérer le TGV comme un produit de luxe, c'est maintenant un aménagement indispensable à notre pays. J'ai décrit précédemment quelles étaient les procédures de concertation avec les élus locaux ; je pourrai communiquer des éléments complémentaires par écrit si la commission le souhaite. Quant à la régénération ferroviaire, dont le coût est élevé, elle est passée en quatre ans de 400 à 1 000 kilomètres annuels – chiffre jamais atteint depuis 1981.
Yannick Favennec est intervenu à propos de la modernisation de la route nationale 12, chère au coeur des élus de Mayenne. Il existe une étude stratégique en cours sur sa partie ouest – Pays de Loire et Basse-Normandie – qui doit permettre de définir les modalités d'un futur aménagement. Nous n'avons aucun préjugé sur les préconisations qu'elle formulera. Il faut à la fois satisfaire les besoins de mobilité et assurer un financement. Je suis prêt à tenir une réunion de travail sur cet axe, afin que mon successeur reçoive un dossier en bon état d'avancement.
Philippe Plisson a évoqué la ligne Blaye-Saint-Mariens, à laquelle j'ajouterai la gare de Clairac. Il est vraiment dommage que le port de Blaye se trouve délaissé. Je pense que la desserte de Blaye peut être revue, notamment par un raccordement de Saint-Mariens à la ligne Nantes-Bordeaux. Il faudrait trouver un opérateur ferroviaire de proximité pour les silos de Blaye de façon à exploiter la liaison. Nous rouvrirons d'ailleurs de la même façon la ligne Saujon-Cozes en Charente-Maritime, à la demande du groupe Colas qui a besoin d'une desserte de fret pour l'activité de ses carrières, et parce qu'un opérateur ferroviaire s'est proposé. Je propose de rechercher une opportunité similaire dans la région girondine, en concertation avec opérateurs portuaires de Blaye et les autres acteurs économiques locaux.
Je m'inscris en faux contre l'assertion d'un développement nul du transport par rail. Les autoroutes ferroviaires ont progressé. Les faisceaux portuaires devraient également densifier les trafics. La difficulté de la SNCF tient en grande partie à la problématique du wagon isolé, à laquelle nous tentons de répondre par les trains multi-lots et multi-clients.
Michel Havard a fait état des conséquences du blocage du port de Marseille sur la batellerie du Rhône. J'espère que nous ne souffrirons pas trop durement des conséquences des mouvements sociaux actuels qui pourraient entraîner des reports modaux. Il faudra s'attacher à retrouver les flux redirigés depuis de Marseille vers Gênes, Barcelone, Tanger, Tunis ou encore Malte. La réforme portuaire ira à son terme, Jean-Louis Borloo l'a encore répété aujourd'hui lors des questions d'actualité, et il faut dorénavant reconquérir l'image de Marseille. Ce sera compliqué, mais c'est très important pour l'axe rhodanien qui est la meilleure desserte du port provençal grâce à un réseau fluvial qui remonte jusqu'à Châlons.
En ce qui concerne le contournement de Lyon par l'ouest, l'État souhaite faire progresser la réflexion avec le concours du président du conseil général du Rhône. Toutefois la géographie locale et les spécificités environnementales rendent l'exercice difficile.
André Vézinhet évoquait le prolongement de l'actuelle LGV jusqu'à Perpignan. Le contournement de Nîmes et Montpellier sera signé au premier trimestre de l'année prochaine. Le débat public relatif au tronçon Montpellier-Perpignan est sur le point de s'engager pour permettre une déclaration d'utilité publique en 2014. Quant à la modernisation du canal du Rhône à Sète, je le juge très pertinent : le port de Sète, géré par la région Languedoc-Roussillon, a d'ailleurs grandement mis à profit les évènements de Marseille pour récupérer d'importantes parts de trafic qu'il pourrait conserver.
Françoise Branget a soulevé un point auquel je souscris totalement : il faut étudier de la même manière les canaux Saône–Rhin et Saône–Moselle. C'était un engagement du Gouvernement devant l'Assemblée nationale et devant le Sénat. Après Seine-Nord, c'est l'autre volet fluvial d'importance du Grenelle et du SNIT. Ce n'est plus le projet Rhin-Rhône tel qu'il avait été envisagé par le passé, mais une ambition nouvelle et plus opérationnelle car moins pharaonique.
Philippe Martin a décrit la vétusté de la route nationale 21. Elle est considérée, dans le cadre du SNIT, comme une desserte locale qui ne justifie pas un aménagement par voie de concession. Elle relève donc d'une problématique locale et des PDMI. La priorité reste la section reliant Agen et Villeneuve-sur-Lot ainsi que la déviation de Bergerac. Il n'y a certes pas de projet d'ensemble sur l'itinéraire, mais son poursuivons les améliorations par tranches successives. Un autre projet revêt une importance capitale pour la région Midi-Pyrénées, c'est la traversée centrale des Pyrénées qui ouvrirait une troisième voie de communication avec l'Espagne à côté de Perpignan et d'Hendaye. L'Espagne y est très favorable, consciente que ses relations avec le continent sont menacées d'engorgement en l'absence d'un axe passant par l'Aragon, et elle nous a rejoint dans un groupement d'intérêt économique. Ce n'est pas une vision plus folle que Lyon-Turin. Je pense qu'elle sera concrétisée dans vingt à trente ans tant elle est nécessaire à la péninsule ibérique.
Francis Saint-Léger s'est inquiété de la modernisation de la route nationale 88. Comme je l'ai dit à l'instant à Philippe Martin pour la route nationale 21, un grand nombre d'aménagements sont prévus tout au long de cet axe structurant, dont certains figurent au SNIT. Mais nous n'avons pas de projet d'ensemble pour la rénovation de l'itinéraire.
Frédéric Cuvilliez a exprimé une colère que je partage en ce qui concerne la remise en cause par la SNCF des arrêts opérés par l'Eurostar à Fretin. Je constate que les autorités anglaises conduisent une politique bien différente. Les axes TGV doivent concourir à l'aménagement du territoire. Par ailleurs, Londres demande l'autorisation de faire transiter par le tunnel leurs rames de conception japonaise, ce qui pose le même problème de sécurité que les trains Siemens dans la mesure où leurs dimensions ne leur permettent pas de traverser la Manche dans les meilleures conditions. La région Nord-Pas-de-Calais a pris la bonne initiative de TGV régionaux qui utilisent le réseau des LGV. Je continuerai de solliciter de la SNCF le maintien d'une desserte correcte de Fretin. Egalement, le fait qu'Eurotunnel et sa filiale Europort aient pris la gestion des lignes ferroviaires du port de Dunkerque, qui occupe déjà la première place nationale pour le trafic par rail, l'ouverture du raccordement de Saint-Georges et son futur doublement, tout ceci m'incite à une grande confiance pour le développement du port du Nord. Il faut enfin observer la situation de Boulogne, dont les améliorations ont été minimales et qui manque aujourd'hui de qualité. Je suis prêt à organiser une réunion sur ce dernier point.
Il me semble avoir répondu par avance à Dominique Souchet sur l'autoroute 381 et sur le projet de franchissement de la Loire en aval de Nantes.
Martial Saddier suggère à juste titre l'intégration des conventions de massif dans le SNIT. En ce qui concerne la ligne Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse (CEVA), nous avons un problème de financement dans la mesure où les prévisions du contrat de plan Étatrégion sont dépassées. Une discussion doit avoir lieu avec le canton de Genève et différentes collectivités pour aplanir cette difficulté. J'ai bien noté les remarques relatives au tram–train de Chamonix. Quant au secteur des remontées mécaniques, il n'a rien d'anecdotique : je pense par exemple au funiculaire de Grasse, ou encore à la société française Poma qui vient d'inaugurer une ligne téléphérique à haute densité à Manhattan. Les ensembles urbains envisagent avec sérieux le recours à ces techniques de remontée mécanique dans lesquelles les entreprises françaises disposent d'un savoir-faire reconnu. C'est le cas par exemple à Medellin où la municipalité a fait le choix de télécabines nommées « Metrocable ».
Je regrette, comme Daniel Fidelin, l'abandon vraisemblable de la ligne TGV entre Strasbourg et Le Havre. Je déplore également, et je le dis à Marie-Françoise Pérol-Dumont, la remise en cause de la desserte de Brive-la-Gaillarde. En ce qui concerne le transport aérien régional, la politique des lignes d'aménagement du territoire reste d'actualité, en dépit de la baisse des crédits alloués par l'État qui conduit, d'une part à des renégociations avec les collectivités, d'autre part à une nouvelle répartition de l'enveloppe financière. L'autoroute YvetotRouen est déjà en cours de réalisation, ce qui explique qu'elle n'apparaisse pas dans le SNIT. Quant au port du Havre, c'est notre dossier portuaire le plus intéressant du fait du centre intermodal prochainement opérationnel et de l'électrification de la connexion SerqueuxGisors. Nous sommes tous d'accord pour qu'une poursuite des investissements permette la meilleure desserte possible du Havre.
Raymond Durand a évoqué le contournement de Lyon par l'utilisation de la voie ferrée classique. Michel Mercier et moi-même nous sommes rendus sur place pour réfléchir à la meilleure façon de procéder pour intégrer le trafic à l'ouest de Sibelin sur la rive droite du Rhône. Les riverains ont ressenti les pires craintes devant la perspective avancée par RFF de quatre cents trains de fret quotidien au milieu des vignes de l'appellation Côte Rôtie. Un vigneron pensait même ne plus pouvoir aller de ses vignobles à son chai ou à sa cave, du fait de la fermeture permanente du passage à niveau les séparant. C'est une vision excessivement optimiste du report modal... Seuls des aménagements limitant le bruit seraient nécessaires, car les prévisions de flux sont bien inférieures à ce qui a été annoncé. Il y a un autre problème sur la rive droite du Rhône, c'est qu'il s'agit d'une des seules lignes de France réservées au fret. Le président de la région Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne, réclame une ouverture au trafic régional de passagers. Je peux le comprendre, mais alors que les TER circulent sur l'autre rive du fleuve, je suis réservé à l'idée de soustraire des sillons au transport de marchandises. Mais les discussions se poursuivent à l'heure actuelle et nous trouverons certainement un compromis.
Je remercie chaleureusement Dominique Bussereau pour avoir, comme à son habitude, apporté, à chacun, des réponses d'une grande précision.
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Informations relatives à la commission