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Séance en hémicycle du 23 juin 2010 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées et de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées.

La Conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, le droit, c'est l'ensemble des règles qui permettent à nos concitoyens de vivre ensemble paisiblement et sereinement. Le droit a une vocation pacificatrice des relations dans la société.

Encore faut-il que cette règle soit ressentie comme appliquée par tous, par une justice à l'écoute des citoyens, proche d'eux et de leurs préoccupations, et par une justice moderne, en phase avec le fonctionnement de la société. Seule une telle justice est capable d'établir un lien de confiance. Nos concitoyens doivent avoir confiance en la justice, qu'il s'agisse de la justice civile, commerciale ou pénale. Ils doivent faire confiance à l'ensemble des professionnels du droit qui font vivre la justice au quotidien.

C'est justement l'objet du projet de loi de modernisation des professions juridiques et judiciaires réglementées que j'ai l'honneur de vous présenter. C'est également le but de la proposition de loi du sénateur Laurent Béteille relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions.

Ces deux textes procèdent d'une même vision de la justice : sa nécessaire modernisation doit répondre aux attentes de nos concitoyens. Une même volonté les anime : rapprocher la justice des citoyens, adapter son fonctionnement aux exigences et aux techniques de la modernité. Une même conviction les réunit : la modernisation de la justice civile et commerciale suppose la rénovation de son fonctionnement et doit être réalisée avec l'ensemble des professionnels du droit.

Vous tous, sur ces bancs, partagez les trois priorités de ces deux textes : renforcer la sécurité juridique, simplifier les procédures, moderniser l'exercice des professions du droit.

Le renforcement de la sécurité juridique est le premier objectif du texte. La norme se complexifie, d'autant plus si l'on y ajoute la norme internationale et en particulier européenne. Elle se diversifie, se spécialise. Ce phénomène vaut pour tous les domaines et en particulier pour le droit économique.

Le justiciable reste souvent désemparé face à des textes qu'il a beaucoup de mal à comprendre et dont il ne perçoit pas toujours la logique ni la cohérence. Voilà qui crée un sentiment d'éloignement de la justice. Or les particuliers comme les entreprises ont besoin d'un droit prévisible, bref d'être rassurés. Notre devoir est de faire en sorte que le justiciable ne reste pas démuni face à une opacité croissante de la norme.

Cette prise en compte de l'inquiétude de nos concitoyens est à l'origine de la création de l'acte contresigné par un avocat. Cette disposition complète l'intervention du notaire – elle ne s'y substitue pas – et améliore la sécurité juridique des actes.

L'acte contresigné par un avocat renforce la sécurité des actes quotidiens par lesquels on s'engage sans toujours savoir à quoi. De nombreux actes sous seing privé, parfois complexes, sont effectués dans des conditions qui ne permettent pas d'assurer une sécurité juridique suffisante.

L'acte contresigné attestera que les parties concernées ont reçu l'assistance juridique d'un avocat qui a pu leur expliquer à quoi elles s'engageaient réciproquement, manière de les rassurer. En même temps, cet acte engagera la responsabilité de l'avocat, façon de renforcer le soin mis à l'explication et au passage de l'acte.

Nous devons, dans la société actuelle, encourager un recours plus fréquent à des professionnels du droit. Parce que le droit est complexe, parce que les situations juridiques sont complexes, il est important que, dans les entreprises ou auprès des particuliers, le recours à un juriste devienne sinon une norme, du moins un réflexe. J'y insiste souvent en ce qui concerne les entreprises mais cela vaut pour de nombreux autres domaines.

L'acte contresigné par un avocat n'est pas un acte authentique. Notaires et avocats ont un statut différent, leurs missions sont différentes. Il est par conséquent logique que cette différence se retrouve dans les actes qui leur sont confiés.

Seule l'authentification donne à un acte la même force exécutoire qu'un jugement. Seule l'authentification lui donne une telle force probante qu'il ne peut être contesté que par la procédure de l'inscription de faux.

Si ces actes sont de nature différente, leur but, j'y insiste, est le même : conforter la sécurité de nos concitoyens quand ils sont amenés à passer des actes juridiques. Bien sûr, plus ces actes sont lourds de conséquences, plus il est important que cette garantie soit donnée.

C'est pourquoi renforcer la sécurité juridique, c'est aussi conforter l'intervention des notaires, qui sont des professionnels de l'acte authentique, et donc d'une sécurité juridique absolue.

Le projet de loi les conforte dans leurs missions essentielles. En matière foncière, seul un acte authentique permet de procéder aux formalités de publicité foncière. Ce principe figurait dans un décret ; j'ai proposé son inscription dans la loi dans le but de le renforcer.

Votre commission a décidé de confier au notaire la mission de créer une base des données immobilières. J'y suis favorable. En matière de droit de la famille, dans ces relations juridiques si fondamentales pour les individus mais aussi pour la société, le rôle des notaires est renforcé.

Lorsque le notaire a rédigé une convention de PACS, il pourra procéder lui-même à son enregistrement, sans passer par le greffier. Pour le citoyen, c'est un gain de temps, de simplicité, d'efficacité, d'argent, de sécurité. L'un d'entre vous m'a saisie d'une situation où deux personnes avaient passé un acte devant le notaire, l'une d'entre elles étant décédée avant l'enregistrement de la convention, l'autre partie ne pouvant dès lors être considérée comme « pacsée » et ne pouvant donc bénéficier des effets découlant du PACS. C'est pourquoi le présent dispositif permet de rassurer nos concitoyens en confortant leur sécurité juridique.

Pour la constitution des dossiers de mariage, les notaires se verront confier l'établissement des actes de notoriété. En matière d'adoption, ils seront seuls habilités à recueillir le consentement de la part de l'adopté.

Le premier but de cette série de dispositions est de conforter la sécurité de nos concitoyens et de conforter chacun dans son coeur de métier.

La situation, il faut le dire, n'était pas très évidente au départ.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Nous sommes parvenus à un équilibre…

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

…grâce à la compréhension, au dialogue établi entre les uns et les autres. Nous avons abouti à un texte rédigé en commun et quand nous nous heurtions à quelque difficulté, les uns et les autres sont venus avec leurs propres experts. L'équilibre du projet de loi repose par conséquent sur un accord entre les professions.

J'ai engagé cette concertation dès mon arrivée au ministère de la justice et je suis heureuse, ce soir, de constater que ce texte reflète le consensus trouvé entre les revendications légitimes des uns et des autres.

Je souhaite que les professions du droit puissent s'entendre sur le fondement du respect du rôle et des compétences des uns et des autres. Je tâche de conforter la concorde entre les professions du droit. C'est important pour le législateur, pour nos concitoyens, pour l'image de la justice. Pour préserver la concorde entre les professions du droit, je crois indispensable de préserver l'accord obtenu. C'est l'intérêt de la justice comme celui du justiciable.

Le deuxième objectif poursuivi par les textes que je vous présente consiste à simplifier les procédures.

Une complexité excessive en la matière nuit à l'accessibilité de la justice et à son acceptation par le citoyen. Elle en compromet parfois même l'efficacité. C'est vrai dans tous les domaines et en particulier en matière civile et commerciale.

Une procédure plus lisible, favorisant le règlement amiable des litiges doit nous permettre de mieux répondre aux attentes du justiciable. C'est pourquoi une meilleure répartition des contentieux est prévue afin de concilier lisibilité et efficacité.

Aujourd'hui, vous l'avez constaté dans vos permanences, lorsqu'une décision de justice est rendue et qu'elle n'est pas exécutée, le justiciable ne sait pas à qui s'adresser. Trop de décisions de justice ne sont pas suivies d'exécution, bien que la décision soit rendue.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

La crédibilité de la justice, du droit, de la loi en souffre, mais également la confiance des justiciables.

La proposition de loi, quant à elle, rationalise la répartition des contentieux entre le tribunal de grande instance et le tribunal d'instance en matière d'exécution des décisions de justice.

Des blocs cohérents de compétences faciliteront l'accès du justiciable à l'autorité judiciaire : la partie qui a gagné pour obtenir l'exécution d'une décision, la partie perdante pour obtenir des délais ou contester une mesure d'exécution. Ce sont là les deux blocs de compétences que nous séparons.

Le juge de l'exécution est ainsi recentré sur les difficultés liées aux voies d'exécution. Le juge d'instance se voit confier la compétence en matière de surendettement – c'est le texte qui a été voté par votre commission.

La procédure participative a pour finalité de favoriser le règlement amiable des conflits. Nous le voyons bien, depuis quelques années, notre pays est soumis à une montée de la judiciarisation de l'ensemble des relations publiques. Nous avons malheureusement pris ce défaut, sans doute, aux États-Unis. Mais aujourd'hui, c'est quelque chose que nous contestons de plus en plus.

Face à cette judiciarisation, et face aux attentes de nos concitoyens, qui se plaignent de la lenteur de la justice, de son coût, des lourdeurs procédurales, le droit civil ne peut se limiter au règlement contentieux des litiges. C'est la raison pour laquelle je vous propose de développer, chaque fois que cela est possible, un règlement amiable.

L'avantage du règlement amiable, ce n'est pas seulement d'éviter la lourdeur d'une procédure contentieuse qui va jusqu'à son terme. Ma conviction profonde, notamment au regard de ce que j'ai pu observer dans certaines sociétés différentes de la nôtre, c'est que le règlement amiable va également dans le sens d'une société plus apaisée. Quand un contentieux est tranché au terme d'un procès, vous avez de toute façon deux mécontents : celui qui a gagné estime toujours qu'il n'a pas gagné tout ce qu'il aurait voulu, et celui qui a perdu, bien entendu, n'est pas content. Le résultat, c'est que les gens restent dans une situation d'antagonisme.

Je pense qu'il faut au contraire, en rapprochant les points de vue en amont, tenter d'éviter un antagonisme, et surtout un antagonisme qui dure. Bien entendu, ce n'est pas toujours possible. Mais dans un certain nombre de cas, quand on peut, par la conciliation, arriver à rapprocher les points de vue, je pense que l'on fait un travail qui répond aux attentes de nos concitoyens, mais qui est aussi globalement utile en ceci qu'il essaie de privilégier la continuation des relations entre les justiciables même si, à un moment, il y a eu des divergences d'intérêts.

La procédure participative instituée par la proposition de loi n'écarte pas pour autant l'avocat. Au contraire, elle le renforce, elle le conforte dans son rôle d'assistance et de conseil.

La convention de procédure participative offre un cadre adapté à la résolution amiable d'un conflit, alors même que les parties ont déjà saisi un avocat. Si l'on arrive à faire signer cette convention, elle sera alors homologuée par les juridictions.

Bien sûr, on n'arrivera pas forcément à concilier. Mais même si un désaccord demeure, tout le travail préalable de mise en état aura permis d'accélérer ensuite les procédures et de simplifier le rendu du jugement.

Bien entendu, cette procédure nouvelle ne remet pas en cause les autres formes de règlement amiable des conflits qui existent déjà dans notre droit : la conciliation, la médiation, ou encore les règlements amiables auxquels parviennent avec succès les assureurs dans le cadre des contrats de protection juridique.

Mais nous avons là une procédure qui nous permet d'avancer vers la recherche de meilleures solutions, et de solutions plus rapides.

Le troisième objectif des deux textes qui vous sont soumis, c'est de moderniser l'exercice des professions du droit.

Toutes les professions, mais encore plus celles du droit, doivent aujourd'hui s'adapter, se moderniser pour faire face aux demandes de la clientèle et aux exigences d'un marché internationalisé.

Les deux textes soumis à votre examen modernisent, d'une part, le cadre d'exercice, et d'autre part, les pratiques professionnelles.

S'agissant de la modernisation du cadre d'exercice, le rapprochement des professions est un facteur de modernisation et une réponse à la concurrence internationale. J'ai bien dit un rapprochement, je n'ai pas dit un mélange, ni un empiètement. Ma conviction, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, c'est que chacun doit faire ce dans quoi il est spécialisé, ce pour quoi il a été formé et a un certain nombre de compétences. Mais cela ne veut pas dire que chacun doit ignorer l'autre. Il faut toujours avoir à l'esprit l'intérêt du justiciable, qui ne connaît pas forcément toutes les différences entre les uns et les autres.

Il faut également prendre en compte le fait que, dans d'autres pays, qui sont parfois nos voisins, il y a d'autres modes d'organisation.

Plusieurs objectifs sont visés par le projet de loi.

Le premier, soyons clairs, c'est de garantir la pérennité des cabinets et des offices, par un régime de responsabilité qui soit adapté aux risques juridiques.

Le deuxième, c'est d'assurer leur financement, car ils sont aujourd'hui confrontés à des problèmes de surface financière. C'est pourquoi le projet de loi imagine de nouvelles solutions, par exemple la possibilité pour des holdings de prendre des participations dans des sociétés d'exercice libéral d'avocats et de notaires.

Le troisième est de préserver le dynamisme des professions, en facilitant l'insertion des jeunes professionnels.

Le quatrième est de renforcer leur dimension internationale, en permettant des regroupements avec des avocats venus d'autres pays de l'Union européenne.

Mais, encore une fois, le rapprochement des professions doit se faire dans le respect de l'identité de chacun. C'est pourquoi je parle d'interprofessionnalité « capitalistique ». C'est au niveau du capital qu'il peut y avoir un renforcement réciproque. Mais il ne s'agit pas d'une interprofessionnalité d'exercice des professions.

S'agissant maintenant de la modernisation des pratiques professionnelles, je crois sincèrement que les mesures prévues bénéficieront à l'ensemble des professionnels du droit, et pas seulement aux avocats et aux notaires.

C'est également vrai des huissiers, par exemple. La proposition de loi leur donne des moyens modernisés, qui prennent simplement en compte des réalités quotidiennes. Ainsi, la délivrance des actes est facilitée.

Cela passe par des mesures toutes bêtes, sans doute, mais qui répondent à de vrais problèmes au quotidien. Quand vous devez, par exemple, remettre des actes en main propre à un destinataire, vous pouvez vous heurter à un hall d'immeuble fermé, ce qui est de plus en plus le cas.

Cela passe aussi par la possibilité de s'adresser directement aux administrations susceptibles de communiquer l'adresse et l'employeur du débiteur, ou les comptes bancaires dont il est titulaire.

L'intervention des huissiers en matière de successions est facilitée par la proposition de loi. Certaines mesures conservatoires prises après un décès sont aujourd'hui accomplies par les greffiers en chef des tribunaux d'instance. Je pense à l'apposition des scellés, ou à la réalisation des états descriptifs du mobilier. Désormais, ces mesures conservatoires seront confiées aux huissiers.

Au-delà, plusieurs mesures prévues par la proposition de loi renforceront les pratiques de l'ensemble des professions du droit. L'obligation de suivre une formation tout au long de la vie sera étendue à toutes les professions du droit.

L'indépendance des instances disciplinaires sera renforcée, notamment par le fait que les procédures disciplinaires seront traitées à l'échelon régional, et non plus à l'échelon local, où il peut y avoir en effet, de par la fréquentation quotidienne ou habituelle des gens, certaines difficultés ou certaines suspicions, même injustes.

Mesdames, messieurs les députés, les mesures qui vous sont aujourd'hui proposées ont, au fond, une même finalité : faire en sorte que la justice réponde toujours mieux, à travers les différents professionnels qui y participent, aux attentes de nos concitoyens. N'oublions jamais, en effet, que tous les professionnels du droit contribuent ensemble à l'oeuvre de justice.

Ma responsabilité est de leur permettre de travailler ensemble, toujours dans l'unique but de satisfaire le justiciable et de faire respecter le droit.

Mon ambition, c'est donc de renforcer l'entente, la solidarité entre les hommes et les femmes qui sont unis par les mêmes valeurs et par la même passion du droit.

En modernisant la justice civile et commerciale, en facilitant la mission de celles et ceux qui la font vivre, ces deux textes nous font franchir une nouvelle étape dans la modernisation de notre justice. Par là même, ils apportent une pierre de plus à la consolidation de notre État de droit.

Je suis heureuse de voir que, très symboliquement, un projet de loi et une proposition de loi sont rapprochés et discutés ensemble, ce qui montre bien que nous partageons cette grande ambition de faire vivre le droit, de faire vivre la justice, parce que c'est ainsi que nous faisons vivre la démocratie en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La parole est à M. Yves Nicolin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui deux textes qui vont compter dans l'avenir de l'organisation de notre justice. Tous deux tendent à moderniser les professions du droit et à améliorer l'exécution des décisions de justice, deux objectifs extrêmement importants pour nos compatriotes.

Notre assemblée est ainsi amenée à se prononcer, en première lecture, d'une part sur le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées, déposé le 17 mars dernier sur le bureau de l'Assemblée nationale, et d'autre part sur la proposition de loi relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées, quant à elle adoptée par le Sénat le 11 février 2009.

Ces deux textes proposent de traduire dans la loi les nombreuses réflexions et proposition issues des rapports Guinchard et Darrois tendant notamment à l'amélioration du fonctionnement de la justice et à la modernisation des professions du droit.

Ces deux textes proposent des innovations attendues, quelquefois depuis longtemps, par l'ensemble des professions judiciaires et juridiques concernées.

J'ajoute que l'ensemble des dispositions de ces deux textes me parait tout à fait équilibré.

S'agissant du projet de loi, je ne mentionnerai que quelques articles.

L'article 1er met en oeuvre l'une des préconisations essentielles du rapport Darrois, la création d'un « acte contresigné par avocat ».

Je souligne dans mon rapport que, comme vous l'avez dit, madame la ministre, l'acte contresigné par avocat n'a pas vocation à constituer un troisième type d'acte. Il s'agit de conférer à l'acte sous seing privé, lorsqu'il est contresigné par un avocat, une efficacité juridique renforcée, et ce dans le souci d'accroître la sécurité juridique offerte à nos concitoyens.

Je souligne également dans mon rapport les différences entre cet acte contresigné et l'acte authentique.

L'article 2, quant à lui, permettra d'encourager l'activité des avocats français à l'étranger en leur donnant la possibilité de s'associer avec un avocat exerçant en Europe.

Le texte réaffirme par ailleurs le rôle essentiel du notaire et de l'acte authentique. Afin de conforter le rôle irremplaçable des notaires, notamment dans les transferts de propriété immobilière, et d'asseoir une meilleur sécurité juridique, il est proposé d'inscrire dans le code civil les règles de publicité foncière, et de supprimer les mentions manuscrites des actes authentiques. Vous retrouverez aussi dans ce texte une mesure tendant à assurer la pérennité de la caisse de retraite et d'assistance des clercs de notaires.

D'autres articles vont simplifier l'enregistrement et la modification des PACS passés par acte authentique, transférer aux notaires l'acte de notoriété suppléant, en cas de mariage, l'acte de naissance, donner la possibilité aux organes chargés de la représentation des professions judiciaires et juridiques de se constituer partie civile et de mieux lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Enfin, une série de dispositions permettra de développer l'interprofessionnalité en prenant davantage appui sur des structures capitalistiques, et donnera à nos professionnels du droit la possibilité de mieux se défendre face à leurs confrères étrangers.

L'article 19, par exemple, modernise le régime des sociétés civiles professionnelles, notamment en assouplissant les règles entourant leur dénomination ainsi qu'en substituant un régime de responsabilité conjointe à la responsabilité solidaire actuelle des associés. L'article 21 propose que les sociétés de participations financières de professions libérales prennent des participations dans des sociétés d'exercice libéral concernant des activités juridiques où judiciaires différentes – SEL de notaires et d'avocats, par exemple –, de manière à privilégier les rapprochements capitalistiques interprofessionnels.

Plusieurs articles du projet de loi visent, enfin, à simplifier les démarches de nos concitoyens. C'est le cas de l'article 8, qui permet à nos concitoyens résidant à l'étranger de s'appuyer sur un notaire dans leurs démarches.

Sur ma proposition, la commission des lois a apporté plusieurs modifications au texte en débat aujourd'hui.

L'article 1er bis précise les conditions dans lesquelles un avocat peut exercer les fonctions de mandataire sportif.

L'article 1er ter permet aux bâtonniers de déléguer leurs prérogatives juridictionnelles et l'article 2 bis consacre, au niveau législatif, la fonction de vice-bâtonnier.

Les articles 8 bis et 9 bis rendent obligatoire l'alimentation, par les notaires, d'une base de données immobilières. L'accès aux informations simples serait gratuit, que la personne soit un particulier ou un professionnel, et deviendrait payant dès lors qu'un certain niveau de précision dans l'information serait sollicité.

Ces amendements permettent des avancées significatives qui ne remettent pas en cause le bon équilibre du projet de loi obtenu par les riches concertations menées par le Gouvernement.

La proposition de loi, quant à elle, tend à favoriser l'exécution des décisions de justice et à améliorer les conditions d'exercice des professions réglementées.

Au titre de la meilleure exécution des décisions de justice, d'abord.

En matière de droit de la consommation, son article 1er va permettre de mettre à la charge du professionnel condamné l'intégralité des frais d'exécution forcée, pour le cas où il ne remplirait pas ses obligations.

La commission des lois a rétabli l'article 2, supprimé par le Sénat, afin de renforcer la valeur probante des constats établis par les huissiers de justice. Les huissiers pourront accéder aux dispositifs d'appel des immeubles pour leurs missions de signification. La commission a souhaité leur permettre d'accéder également aux parties communes. De même, ils auront accès, sans le truchement du parquet, aux informations nécessaires à la mise en oeuvre d'un titre exécutoire. L'article 4 a été complété par la commission afin que les huissiers puissent également être informés de l'état du patrimoine immobilier de la personne concernée.

La commission a en outre adopté, sur ma proposition, un dispositif favorisant la reprise des locaux abandonnés par le locataire, à l'article 3 bis.

L'article 9, dans sa rédaction adoptée par la commission des lois, limite le transfert du tribunal de grande instance au tribunal d'instance du seul contentieux du surendettement des particuliers et de la procédure de rétablissement personnel, afin de tenir compte de la jurisprudence récente de la Cour de cassation.

Au titre de l'amélioration des conditions d'exercice des professions réglementées, ensuite.

À l'article 18, la commission des lois a adopté, sur mon initiative, un amendement visant à permettre à un tiers, qui peut être un huissier de justice, de réaliser un état des lieux locatif dans un cadre amiable.

L'obligation de formation continue va être étendue aux huissiers, notaires, greffiers des tribunaux de commerce ou commissaires priseurs judiciaires. J'ai également souhaité que les avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation soient explicitement concernés.

La commission a également adopté plusieurs amendements permettant aux huissiers de justice, à l'article 16, et aux commissaires-priseurs judiciaires, à l'article 29, d'adopter un règlement national concernant les usages de la profession.

Les attributions des instances disciplinaires, les modalités de la négociation collective ou le rôle des associations ont été précisées.

La commission a également souhaité renforcer le contrôle de la profession d'expert judiciaire.

Par ailleurs, la convention de procédure participative va permettre d'offrir à nos concitoyens de disposer d'un nouvel outil de règlement des différends. Sur ma proposition, la commission des lois a étendu cette convention au divorce et à la séparation de corps, en excluant le recours en matière prud'homale.

Compte tenu de la reprise des travaux sur le rapprochement des professions d'avocat et de conseiller en propriété industrielle, la commission des lois a, enfin, décidé de supprimer les dispositifs adoptés par le Sénat, prévoyant la fusion de ces deux professions.

Au total, ces deux textes forment un tout équilibré qui permet de doter nos professions du droit d'une législation améliorée pour leur permettre de mieux répondre aux défis d'aujourd'hui et de demain.

Après de longues et fructueuses auditions menées depuis le printemps 2009, soit pendant plus d'un an, la commission des lois de notre assemblée a engagé un travail dense. Je tiens à remercier les collègues de toutes sensibilités qui m'ont accompagné pour ce travail, ainsi que les services, notre président de la commission des lois, mais aussi les collaborateurs du cabinet de Mme la garde des sceaux, et la ministre d'État elle-même. Je vous invite donc, à l'instar de la commission des lois, à adopter ce projet et cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

J'ai reçu de M. Jean-Claude Sandrier et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement, sur le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques.

La parole est à M. Marc Dolez.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques que vient de nous présenter Mme la garde des sceaux, par son aspect technique, se veut rassurant. Équilibré et consensuel, il serait à même de renforcer la sécurité juridique, de simplifier les procédures, de moderniser l'exercice des professions du droit.

Cette présentation quelque peu idyllique masque les enjeux réels du texte et les conséquences très graves que son application ne manquerait pas d'entraîner à terme pour notre système juridique, qui pourrait s'en trouver déstabilisé et s'engager vers l'alignement sur le droit anglo-saxon.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

C'est la raison pour laquelle je défends cette motion de rejet préalable.

La philosophie du texte se trouve dans le rapport de la commission présidée par Me Darrois, chargé par le Président de la République de relever les défis de la concurrence internationale dans le domaine du droit. C'est à ce rapport que se réfèrent constamment et de manière très appuyée l'exposé des motifs, l'étude d'impact et même le rapport de M. Nicolin.

Les objectifs fixés par le Président de la République dans sa lettre de mission étaient très clairs : création d'une grande profession du droit, à l'instar des grands cabinets anglo-saxons, promotion d'une réforme profonde des structures d'exercice des professionnels du droit pour favoriser « la concurrence et leur compétitivité interne et internationale ».

Évidemment, le rapport Darrois, pas plus que le projet de loi, ne reprend l'objectif d'une grande profession du droit. D'ailleurs, madame la garde des sceaux, vous n'en auriez pas eu les moyens compte tenu des oppositions très fortes que cela n'aurait pas manqué de susciter. Toutefois, ce rapport émet des recommandations qui, à notre sens, se situent dans cette perspective, lointaine certes mais visée tout de même, et dans celle d'un rapprochement de notre système juridique avec celui du Common Law, rendu indispensable par la mondialisation. Je vous renvoie en particulier aux pages 10 et 11, où l'on peut lire ces observations élogieuses, pour ne pas dire admiratives, sur les professionnels du droit américains et britanniques : « Les contrats qu'ils rédigent tendent à prévoir et résoudre tous les événements susceptibles de se produire au cours de leur exécution. Cette façon de travailler est donc facilement exportable et adaptable aux règles locales. La puissance économique et financière des États-Unis comme du Royaume-Uni, la volonté des États et des entreprises de demander à leurs avocats de les accompagner et de les conseiller dans leurs opérations nationales ou internationales, ont permis aux firmes anglo-saxonnes, après avoir assuré leurs marchés nationaux, de se développer dans le monde entier ».

Votre projet de loi, madame la garde des sceaux, reprend en fait les deux recommandations essentielles du rapport Darrois : la création d'un acte contresigné par avocat et l'instauration de sociétés capitalistiques et de sociétés interprofessionnelles d'exercice. Ces deux innovations interviennent aux articles 1er et 21, articles sur lesquels je concentrerai mon intervention car ils constituent le coeur du projet.

L'acte contresigné par avocat, d'abord. Le droit des obligations contractuelles repose jusqu'à présent sur deux piliers essentiels, intangibles depuis 1804 : l'acte sous seing privé et l'acte authentique. Pourquoi, soudainement, le besoin d'un acte intermédiaire, l'acte contresigné, se fait-il sentir ? Quelle évolution et quelle exigence justifient-elles la création d'un acte juridique nouveau ? L'acte contresigné répond-il vraiment aux besoins de souplesse, d'adaptabilité et de sécurité juridique qui sont mis en avant ?

En intercalant l'acte contresigné entre les deux piliers actuels, on introduit une gradation qualitative quant au contenu par rapport à l'acte sous seing privé. Mais en exaltant sa valeur probatoire, qui en justifierait la nécessité pratique et qui ne céderait qu'avec la procédure d'inscription de faux, on ne peut que se demander, pour reprendre l'expression du conseiller à la Cour de cassation Jean-Louis Gallet, si « le tir n'est pas davantage dirigé contre l'acte authentique que contre l'acte sous seing privé ».

S'agissant de la sécurité juridique, entendue au sens de protection accordée au contractant le plus faible, la loi est d'ailleurs intervenue à plusieurs reprises pour donner à des actes sous seing privé un formalisme protecteur dans des domaines aussi important que la consommation et le crédit, où la contractualisation est intense.

J'ajoute que, de plus en plus dans la pratique, et notamment dans la pratique des affaires, l'acte sous seing privé est établi en présence d'un professionnel du droit, essentiellement un avocat, et par lui. La signature qu'il pourrait apposer sur l'acte apporterait la preuve de cette intervention, qui ne fait d'ailleurs pratiquement jamais l'objet de contestation, mais ne paraît guère de nature à modifier ni la qualité juridique de l'acte, toujours fonction de la compétence de son auteur, ni les conditions de sa responsabilité civile.

C'est pourquoi il convient de s'interroger sur le point de savoir si les avantages invoqués de l'acte contresigné sont à apprécier au regard de l'acte sous seing privé plutôt qu'au regard de l'acte authentique.

Contrairement à la présentation qui en est faite, la création de l'acte contresigné par avocat aura un impact important sur l'ordonnancement juridique et sur les actes authentiques. L'acte contresigné bénéficiera en effet d'une force probante au moins égale à celle de l'acte authentique, s'agissant de l'identité et de la capacité des parties, dans la mesure où l'avocat, rédacteur de cet acte, sera beaucoup plus difficilement attaquable que le notaire, rédacteur d'un acte authentique et directement confronté, vous le savez, à la sévérité de la jurisprudence.

Selon l'alinéa 4 de l'article 1er :« En contresignant un acte sous seing privé, l'avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu'il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte ». Celui-ci serait donc légalement présumé, par sa simple signature, avoir donné un conseil éclairé, alors que les notaires doivent se ménager eux-mêmes la preuve écrite du conseil qu'ils ont délivré.

Ce même alinéa confirme que l'avocat, par statut et par destination, est essentiellement le défenseur d'un seul client, alors que la loi du 25 Ventôse an XI contenant organisation du notariat, définit le notaire comme l'officier public qui concilie et authentifie la volonté de l'ensemble des parties.

À cet égard, la question est aussi posée de savoir si l'intervention de deux professionnels du droit, chacun intervenant aux côtés de chaque cocontractant, n'est pas de nature à maintenir la persistance d'intérêts antagonistes qu'il s'agit de préserver respectivement, d'autant que chaque avocat pourrait avoir en vue les éventuels prolongements judiciaires nés de l'acte.

Il découle du dispositif proposé un véritable déséquilibre dans le régime de l'administration de la preuve entre le devoir d'information de l'avocat qui contresignerait un acte sous seing privé et celui du notaire instrumentaire dont le conseil ne s'attache pas aux seules conséquences juridiques d'un acte qu'il a même parfois le devoir de déconseiller.

L'alinéa 5 de l'article 1er dispose : « L'acte sous seing privé contresigné par les avocats de chacune des parties ou par l'avocat de toutes les parties fait pleine foi de l'écriture et de la signature de celles-ci tant à leur égard qu'à celui de leurs héritiers ou ayants cause ».

Cet acte serait en conséquence nettement renforcé par rapport à un acte sous seing privé habituel qui n'offre aucune garantie quant à l'identité de ses signataires lorsque « l'écriture et la signature des parties » n'ont pas été reconnues au sens des dispositions de l'article 1322 du code civil. Dans ces conditions, l'absence de référence à cet article 1322 aggrave encore la portée de l'acte contresigné par avocat, la seule signature de ce dernier produisant le même effet que la reconnaissance, par une ou plusieurs parties intervenant sous seing privé, de l'écriture de celui-ci et de leurs signatures.

Dès lors, la seule signature de l'avocat faisant « pleine foi de l'écriture et de la signature des parties », la référence à la procédure de faux, apparemment superfétatoire puisque cette procédure s'applique à tous les actes sous seing privé contestés, confirme que l'acte contresigné par avocat détient bien une incontestable force probante,

L'alinéa 6 conforte ce constat puisqu'il dispose que « l'acte contresigné par avocat est, sauf dérogation expresse, dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi ». Or, jusqu'à présent, seuls les actes authentiques étaient dispensés des mentions manuscrites exigées par la loi. Cela ne fait que conforter une identité de valeur entre l'acte sous seing privé contresigné par avocat et l'acte notarié.

La conclusion est simple : l'acte sous seing privé contresigné par avocat constituerait un acte spécifique d'une nouvelle catégorie, contrairement à ce qui est affirmé dans l'exposé des motifs. Cet acte posséderait, par de nombreux aspects, la même force probante qu'un acte authentique dont il s'approprierait même certaines vertus jusque-là exclusivement réservées à ce dernier. C'est en ce sens qu'il réduit le champ d'application et déséquilibre la portée de l'acte authentique.

Si les dispositions du projet de loi ne remettent pas encore en cause le monopole de l'acte authentique, elles s'attaquent bel et bien aux fondements de l'authenticité. Elles ne constituent probablement qu'une première étape – même si, madame la ministre, vous en avez aujourd'hui officiellement écarté la perspective – qui pourrait, un jour, mener au fichier immobilier…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

…comme le demandent avec insistance des voix parmi les plus autorisées du Conseil national des barreaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Enfin, cet acte entraînerait inévitablement une augmentation des coûts pour le justiciable.

À la différence de ce qui se passe pour les actes notariés, l'intervention de deux avocats comporte le cumul d'honoraires et il est facilement prévisible que l'augmentation des primes d'assurance garantissant les avocats pour cette nouvelle activité aura nécessairement une répercussion pour le justiciable.

L'étude d'impact reconnaît implicitement l'inéluctabilité de cette augmentation puisqu'elle précise, page 30 : « Le coût de l'acte contresigné par avocat ne sera pas tarifé, les honoraires étant généralement libres ».

Ma deuxième série de remarques portera sur l'interprofessionnalité, prévue à l'article 21.

Ici aussi, l'analyse du texte dément, voire contredit un affichage pour le moins équivoque. L'article 21 élimine en fait toute interrogation par sa clarté et sa précision. Il prévoit expressément la possibilité, pour les membres des Sociétés de participations financières de professions libérales, de détenir des actions ou des parts dans des Sociétés d'exercice libéral « ayant pour objet l'exercice de deux ou plusieurs des professions d'avocats, de notaires, d'huissiers de justice ou de commissaires-priseurs judiciaires ». Cet article concrétise ainsi, de manière décisive, la possibilité d'une interprofessionnalité capitalistique, de même que la possibilité de croiser des participations entre les deux types de sociétés, les porteurs d'actions des sociétés de participation pouvant, l'un ou plusieurs d'entre eux, exercer leur activité dans les sociétés d'exercice dans lesquelles ils détiendraient des participations.

Le projet de loi assouplit considérablement les règles de détention du complément de capital d'une société d'exercice, puisque ce complément pourrait désormais être détenu par une société constituée selon les dispositions de l'article 220 quater A du code général des impôts, si les membres de cette société exercent leur profession au sein de la société d'exercice, ou par une Société de participation, la condition d'exercice de leur métier par les membres de cette société de participation au sein de la société d'exercice étant supprimée ; cette suppression ouvre la porte à l'entrée de capitaux étrangers et extérieurs, avec les conséquences redoutables que l'on devine aisément.

Ainsi, dans le prolongement des préconisations du rapport Darrois, le projet de loi permettrait désormais à ces différentes professions de se regrouper au sein d'une société de participation « ayant pour objet exclusif la détention de parts ou d'actions» dans des sociétés ayant elles-mêmes pour destination l'exercice de deux ou plusieurs de ces professions.

Dès lors, on peut imaginer que le capital d'une société d'exercice ayant pour objet l'exercice de deux professions juridiques différentes – par exemple, l'activité de notaire et celle d'avocat – pourrait être détenu en majorité par des avocats, soit directement, à la condition que ceux-ci exercent leurs activités au sein de cette société d'exercice multiprofessionnelle, soit par l'intermédiaire d'une société de participation qu'ils auraient créée, préalablement ou non à l'exercice par l'un ou plusieurs d'entre eux d'une activité au sein de la société d'exercice.

Je précise que les avocats, contrairement aux notaires et aux huissiers de justice, sont visés par la directive services, entrée en vigueur en droit français le 28 décembre 2009, qui a pour objet de faciliter encore davantage la liberté d'installation en France de tout prestataire de service et, par conséquent, des avocats, résidant dans l'un des pays de l'Union européenne.

Dans ces conditions, plusieurs questions lourdes restent posées, à commencer par celle de la provenance des capitaux extérieurs.

Les premiers intéressés seront sans doute les grands cabinets anglo-saxons, dont les investisseurs sont bien souvent des possesseurs de capitaux aux objectifs étrangers aux finalités des professions juridiques, et au premier rang desquels se trouvent les fonds de pension.

Les seconds seront les établissements bancaires de dimension internationale, soucieux d'accéder à de nouveaux marchés, et notamment au marché du droit.

Dans tous les cas, cet actionnariat décidera des orientations des sociétés d'exercice qu'il aura filialisées et qu'il soumettra à la seule loi d'un profit à fort rendement.

À la fin d'un tel processus, les sociétés d'exercice seront destinées inéluctablement à devenir les sous-traitants de sociétés de participation exclusivement tournées vers la rotation et le rendement de leurs capitaux.

Dans un tel contexte de rapprochement des cabinets de plaideurs et des officiers notariés – c'est une autre question très lourde –, comment le notaire pourra-t-il continuer à officier au nom de la République française et du peuple français ? Comment pourra-t-il conserver le sceau et le monopole de l'authenticité ?

On ne peut que partager les inquiétudes manifestées par le syndicat des notaires et, il faut bien le dire, de l'immense majorité des notaires de France, non par corporatisme, mais par attachement profond à notre système juridique et à l'intérêt général.

Je cite : « Par capillarité, par transitivité, sous l'effet d'un automatisme irrépressible, quelques années suffiraient aux capitaux qui auraient investi les sociétés d'exercice libéral pour déborder, submerger et faire exploser les barrières, les clôtures, les obstacles…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

…que l'on aurait prétendu installer pour préserver l'autonomie des professions intéressées, notamment de celle, le notariat, dont l'indépendance constitue le socle biologique sur lequel s'appuient le caractère spécifique, la légitimité et la nécessité de la fonction et de la mission ».

S'exprimant il y a quelque mois sur la place essentielle et irremplaçable de l'authenticité dans notre système de droit, le président du Conseil constitutionnel rappelait que les qualités de l'acte authentique sont liées au fait qu'il est reçu par le notaire en sa qualité d'officier public et concluait son propos en ces termes : « Je sais que ce concept paraît aujourd'hui, à certains, passé de mode. Mais il se trouve que je crois toujours à l'État et à la puissance publique ».

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Pour notre part, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, nous croyons aussi à l'État et à la puissance publique dans ce pays qui a offert au monde le code civil. Nous refusons de nous engager sur la voie du rapprochement de notre système juridique avec celui du common law, rapprochement induit par votre texte et par les textes qui ne manqueront pas de suivre dans les années à venir. Car le système du common law se caractérise par la dictature du marché, les manipulations de la concurrence et le profit à très court terme.

C'est pour toutes ces raisons de fond que les députés communistes, républicains et du parti de gauche invitent ce soir l'Assemblée, en vertu de l'article 91-5, à adopter cette motion de rejet préalable. En l'adoptant, mes chers collègues, vous reconnaîtrez que le texte qui nous est proposé est contraire aux principes généraux de notre droit et qu'il n'y a donc pas lieu d'en délibérer.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, garde des sceaux.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur le président, je m'en voudrais de ne pas répondre, par courtoisie, à M. Dolez.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je lui sais gré, d'ailleurs, d'avoir précisé, à la fin de son propos, qu'il s'exprimait notamment au nom du groupe communiste. En effet, certains des arguments qu'il a développés correspondent à la logique du parti communiste, dont nous connaissons l'attachement à l'État, position que les pays, dans leur quasi-totalité, considèrent d'ailleurs comme dépassée et évitent, en dehors de la Corée du Nord, de mettre en oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Il y a certainement d'autres arguments à opposer à mon intervention !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Bien entendu et je répondrai à tous vos arguments ! Je pense toutefois qu'un certain éclairage m'a paru inspirer vos propos.

Vous avez développé essentiellement quatre arguments. Je n'entrerai pas dans les détails puisque la discussion des articles et des amendements nous permettra de le faire.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

J'ai noté, en premier lieu, votre crainte de nous voir nous aligner sur le droit anglo-saxon.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je vous répondrai que c'est exactement le contraire.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Vous le savez d'ailleurs parfaitement. Je considère pour ma part, et j'ai eu l'occasion de le souligner dans cet hémicycle, que le droit continental est effectivement le seul qui permet d'avoir des sociétés juridiquement apaisées. Vous le savez du reste aussi bien que moi,. Je me rends régulièrement dans nombre de pays pour les convaincre, profitant justement de ce que la crise financière et économique a mis en lumière, de rallier le droit continental plutôt que le droit anglo-saxon quand ils rédigent leur nouveau code. Je considère aujourd'hui en toute logique que le droit continental réunit en réalité plus de 60 % de l'ensemble des pays développés. Je veux que ce soit le droit continental, notre système de droit, qui s'impose. Pour cela, il doit être fort. En conséquence, il convient de renforcer ce qui supporte notre droit. Rejeter, comme vous le faites, l'idée de concurrence, c'est ne pas vouloir regarder la réalité, à savoir – et je le dis très clairement – qu'à l'heure actuelle des cabinets anglo-saxons prennent des parts de marché.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je veux quant à moi que nos cabinets et nos études prennent des parts de marché, les conservent dans notre pays et sachent les conquérir à l'extérieur. Si je me suis notamment rendue en Jordanie et au Liban, accompagnée du président du Conseil national des barreaux et du président des Notaires de France, c'est bien pour établir des relations de coopération entre les professions, en plus de celles existant entre les ministères de la justice et entre les magistrats, donc pour conforter notre système et nos protections. Je n'ai pas honte de le dire, parce que je pense que c'est également une façon d'aider nos entreprises à investir dans ces pays, qui ont le même type de droit, les mêmes professionnels, ou qui recourent aux nôtres, à y développer des contrats, donc à exporter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) En effet, ce qui m'intéresse, c'est la force de la France, son rayonnement et sa puissance économique ! En conséquence, la logique du texte que je vous présente aujourd'hui est une logique de renforcement des professions et de notre droit.

À votre question : « Pourquoi changer les piliers intangibles que nous avons depuis 1804 ? », je réponds que c'est parce qu'ils datent justement de 1804 et que l'équilibre a quelque peu changé depuis. Monsieur le député, ce ne sont pas les valeurs de notre droit qui sont en cause : j'estime en effet qu'elles sont intangibles ! Il convient toutefois de distinguer les valeurs et la façon dont on applique le droit. Autant les valeurs doivent demeurer parce qu'elles représentent la démocratie française, la République française, autant, si nous voulons être efficaces et concurrentiels – je n'ai pas peur du mot –, nous devons savoir aussi nous adapter et adapter nos professions. C'est bien ce que nous faisons. Nous sommes à l'heure d'internet et non à celle de la plume d'oie !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Il est inutile de caricaturer mes propos ! Répondez-moi sur le fond !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Or vous nous proposez de rester à la plume d'oie alors que nous devons tous travailler aujourd'hui avec internet !

Vous avez également soutenu – c'est votre troisième argument – qu'il s'agit d'une attaque contre l'acte authentique. Monsieur le député, nous ne sommes pas là pour entretenir le soupçon, la méfiance et pour faire peur – ce que vous cherchez pour votre part à faire !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Dès mon arrivée à ce ministère, j'ai réuni autour d'une table les présidents représentant les deux professions afin de mettre fin à leur méfiance réciproque ! Il est indispensable de travailler ensemble. C'est ainsi que nous serons forts. La division nous rend moins compétitifs face à ceux qui veulent porter leurs activités sur notre territoire ou qui veulent nous limiter à notre territoire ! Les professions doivent se respecter et s'entendre. Ce texte a été signé et présenté à la même conférence de presse par les présidents représentant les deux professions !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Le président des notaires, les 6 500 notaires que j'ai rencontrés au Zénith…

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

… et les 3 000 que j'ai rencontrés à Bordeaux m'ont applaudie lorsque j'ai parlé du système d'équilibre auquel nous avons abouti. Monsieur le député, je ne travaille pas dans le secret ou dans l'ambiguïté. Tout ce que je fais, je le fais à texte ouvert ! Vous avez les textes. Chaque mot peut être étudié. C'est là où l'on voit réellement ce qu'il en est. Non, il ne s'agit pas de remettre en cause l'acte sous seing privé et l'acte authentique. Nous ne créons pas une troisième catégorie d'acte, je vous l'ai dit. Nous tirons simplement la conclusion selon laquelle un acte rédigé par un professionnel du droit et du contentieux, à savoir l'avocat, a des conséquences différentes : notamment, les parties signataires d'un acte sous seing privé ne pourront pas contester leur signature. Vous ajoutez que le coût augmentera. Il n'est pas obligatoire de prendre un avocat et de passer un acte contresigné. Ne dites pas que ce sera une obligation supplémentaire pour le justiciable. C'est totalement faux et vous le savez. En effet, il s'agit de toute façon d'un acte sous seing privé. Vous reconnaissez vous-même – et c'est là que vous vous contredisez, d'ailleurs – que les gens ont très souvent aujourd'hui recours à un avocat. Cela ne change donc rigoureusement rien, sauf pour ce qui est de la responsabilité de l'avocat en la matière.

Votre dernière argumentation – et je n'entre pas dans les détails car nous y reviendrons lors de la discussion des articles et des amendements – concerne l'interprofessionnalité capitalistique. Ce que vous affirmez est faux, monsieur le député. Non, les banques n'interviendront pas dans le capital. En effet, le projet de loi permet à des professionnels limitativement énumérés – des juristes en exercice ou qui l'ont été – de créer des holdings qui peuvent détenir des participations.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Vous parlez de porte ouverte mais on peut tout imaginer,…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

C'est cela le problème ! On s'engage dans une voie dangereuse !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

… et notamment qu'il y ait un jour d'autres majorités dans cet hémicycle,…

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

… qui changeront tout et décideront qu'il y aura une profession unique du droit. Cela se produira peut-être dans trente ans. Ni vous ni moi ne serons sans doute là pour le voir, mais c'est aussi la règle de la loi !

Pour ma part, je vous présente aujourd'hui un texte le plus adapté possible à notre temps, qui permet aux professionnels – chacun dans sa spécialité – de se conforter, de travailler ensemble et de répondre à la modernité des temps. Non, monsieur le député, nous ne pouvons pas faire comme si rien n'était intervenu depuis 1804. Il est irresponsable de penser que nous pouvons travailler ou raisonner aujourd'hui comme il y a cinquante ans. Nous en avons assez du modèle réactionnaire qui ne peut que rétrécir notre pays et fragiliser nos positions. Je veux pour ma part une France moderne, une France grande, une France qui sache s'exporter et qui fasse confiance à ses professionnels ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. Jean-Pierre Schosteck.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Schosteck

Nous avons entendu l'exposé des motifs de cette motion de rejet préalable. J'ai alors eu le sentiment que l'on me décrivait le énième avatar d'une volonté farouchement conservatrice de la gauche : elle ne veut rien changer et ne veut pas que notre société, qui en a pourtant bien besoin, s'adapte à notre monde moderne !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Elle ne veut pas changer notre système juridique !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Schosteck

Ce texte a fait l'objet d'une très large concertation avant et pendant son élaboration et au cours de la discussion budgétaire. Il n'y a par conséquent vraiment aucune raison de vous suivre, mon cher collègue. Le groupe UMP votera donc contre cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Madame la garde des sceaux, je vous ai connue plus sereine dans vos réponses aux interventions de l'opposition !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

À vos interventions, monsieur Vaxès ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Permettez-moi de noter comme un certain nombre de parlementaires, quels que soient leurs bancs, un agacement de votre part, un énervement…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

… qui n'est pas la manifestation d'une assurance !

Je veux en quelques mots, si mes collègues l'acceptent, défendre la motion présentée par notre collègue Marc Dolez.

Le fameux rapport Darrois, qui a très largement inspiré ce projet de loi, s'est lui-même appuyé – et vous ne pouvez le nier – sur le rapport britannique Clementi portant sur le même objet. Les similitudes entre les deux rapports sont telles que la revue britannique juridique de référence, The Law Gazette, titre à propos du rapport Darrois : « La France poursuit sa réforme de type Clementi ».

Le secrétaire général du Conseil des barreaux de l'Union européenne, M. Goldsmith, représentant plus de 700 000 avocats, n'a quant à lui pas caché son enthousiasme à la lecture du rapport Darrois, considérant qu'il allait ouvrir une voie sans précédent pour le continent, contrairement à ce que vous venez d'affirmer. Tout est dit !

Néanmoins, il y a une absence réelle de coordination européenne. Pourquoi la France ne se rapproche-t-elle pas du modèle médian du notaire européen ? En effet, aucun autre pays européen ne permet les sociétés de notaires de capitaux. D'ailleurs, partout, excepté en France, il n'y a qu'un notaire par acte, car son rôle est de contrôler la légalité des actes et de prévenir et corriger de manière impartiale les faiblesses d'une partie, donc indépendamment de toute pression, lui permettant ainsi de rester l'ombre irréprochable de la société sur le contrat. Le statut d'officier public impose l'incompatibilité avec toute dépendance statutaire ou financière privée. Votre « interprofessionnalité » porte en elle, au contraire, tous les risques d'abriter des intérêts contradictoires. Nous ne pouvons cautionner toutes les dérives de ce texte.

Je vous invite donc avec insistance, mes chers collègues, à voter la motion défendue par Marc Dolez, pour toutes les raisons excellentes qu'il vous a exposées.

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. Jean-Pierre Schosteck.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Schosteck

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, notre système juridique doit s'adapter à l'évolution de notre société. Pour être réussie, cette évolution doit se faire autour de l'ensemble des professionnels du droit.

Cette rénovation est l'ambition du projet de loi de modernisation des professions juridiques et judiciaires réglementées ainsi que de la proposition de loi adoptée par le Sénat à l'initiative du sénateur Laurent Béteille, relative à l'exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions. Certaines mesures sont d'ailleurs attendues depuis longtemps par les professions concernées.

Un grand nombre de propositions contenues dans ces textes s'inspirent des réflexions des excellents rapports de M. Guinchard et de M. Darrois, chargés de réfléchir à la modernisation des professions du droit et à l'amélioration du fonctionnement de la justice.

Ces textes ont fait l'objet d'une longue concertation entre les professions, en particulier entre les avocats et les notaires, à votre initiative, madame la ministre. Cette concertation a permis d'aboutir à un consensus favorable à tous.

S'agissant du projet de loi, je souhaiterais revenir sur plusieurs dispositions.

L'article 1er met en oeuvre l'une des principales préconisations du rapport Darrois, l'acte contresigné par avocat. Cette disposition vise à renforcer l'efficacité de l'acte sous seing privé lorsqu'il est contresigné par un avocat. Cela permettra de renforcer la sécurité juridique. Les Français signent de plus en plus de contrats, parfois très importants. Cet acte apportera à nos concitoyens des garanties juridiques supplémentaires en engageant l'expertise et la responsabilité d'un avocat. Le risque de contentieux sera ainsi limité. Néanmoins, cet acte n'a pas vocation à remplacer l'acte authentique, pilier de notre système juridique. Seul ce dernier, réalisé par les notaires, donne à un acte la même force exécutoire qu'un jugement.

L'article 2 confirme le rôle essentiel des notaires, en particulier dans le domaine des transferts de propriété immobilière. Le projet de loi propose d'inscrire dans le code civil les règles de publicité foncière et la dispense de mentions manuscrites sur les actes authentiques. Il est également prévu une mesure visant à assurer la pérennité de la caisse de retraite et d'assistance des clercs de notaires.

Dans le domaine du droit de la famille, le rôle des notaires est renforcé. Le notaire ayant rédigé une convention de PACS ne sera plus obligé de passer par un greffier, il pourra réaliser lui-même l'enregistrement de la convention. Pour nos concitoyens, cette mesure allégera les formalités ainsi que les frais qui en découlent. Comme l'a rappelé Mme la ministre, cela évitera un certain nombre de situations désagréables. En outre, il est proposé de transférer aux notaires la responsabilité de réaliser l'acte de notoriété suppléant en cas de mariage l'acte de naissance.

Le projet de loi propose par ailleurs de moderniser et de renforcer les structures d'exercice de l'ensemble des professions libérales réglementées.

Il est tout d'abord proposé de développer l'interprofessionnalité. Compte tenu de l'internationalisation croissante des cabinets d'avocats, il convient d'offrir aux structures ayant des bureaux à l'étranger la possibilité d'intégrer parmi leurs associés des avocats exerçant non pas en France mais dans l'un de leurs bureaux.

Par ailleurs, entreprises et particuliers ont parfois besoin de recourir à plusieurs professionnels du droit. Il est tout à fait opportun de permettre à différentes professions du droit de travailler ensemble, car leurs activités sont souvent complémentaires. C'est la raison pour laquelle des rapprochements capitalistiques interprofessionnels sont prévus.

Le projet de loi propose également une réforme des structures d'exercice des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé. Ainsi, l'article 19 modernise le régime des sociétés civiles professionnelles, notamment en assouplissant les règles entourant leur dénomination et en substituant un régime de responsabilité conjointe à la responsabilité solidaire actuelle des associés.

La commission des lois, en particulier sous l'impulsion de son excellent rapporteur Yves Nicolin, a enrichi le projet de loi. Un amendement a ainsi précisé les conditions dans lesquelles un avocat peut exercer les fonctions de mandataire sportif. Par ailleurs, dans le souci de permettre la diffusion d'informations pertinentes sur l'évolution du marché immobilier, la commission des lois propose de rendre obligatoire l'alimentation par les notaires d'une base de données immobilières. Cette disposition sera de nature à fluidifier le marché de l'immobilier et donc à favoriser l'accès à la propriété de nos concitoyens.

La proposition de loi issue du Sénat, quant à elle, tend à favoriser l'exécution des décisions de justice et à améliorer les conditions d'exercice des professions réglementées.

Tout d'abord, elle rationalise la répartition des contentieux entre le tribunal de grande instance et le tribunal d'instance en matière d'exécution des décisions de justice. Cela va dans le sens d'une plus grande lisibilité pour le justiciable.

Autre avancée notable, elle met en place la procédure participative. La commission sur la répartition des contentieux, présidée par Serge Guinchard, proposait d'instituer un nouveau mode alternatif de règlement des conflits, la négociation assistée par avocat, dite participative.

Son rapport rappelait qu'il était particulièrement intéressant d'inciter les parties à parvenir à une solution négociée de leurs différends, tout en préservant davantage leur accès effectif à la justice. Il apparaît nécessaire de favoriser le règlement amiable des conflits et d'éviter dans la mesure du possible le passage, souvent douloureux pour les parties, devant un juge. En cas de désaccord, le travail réalisé en amont sera de nature à accélérer la procédure judiciaire.

Par ailleurs, la proposition de loi modernise les pratiques professionnelles de l'ensemble des professions du droit. Les huissiers pourront accéder plus facilement aux immeubles et s'adresser directement aux administrations pouvant leur communiquer, notamment, les comptes bancaires dont l'individu est titulaire.

Elle prévoit en outre l'extension de l'obligation de formation continue aux notaires, huissiers, greffiers des tribunaux de commerce ou commissaires-priseurs judiciaires. En matière disciplinaire, l'indépendance des instances sera renforcée.

La commission des lois a enrichi la proposition de loi, notamment en sécurisant davantage les états des lieux, en renforçant la valeur probante des constats d'huissier et en donnant davantage de moyens aux huissiers afin qu'ils soient plus à même d'exécuter les décisions de justice. Elle a par ailleurs supprimé les dispositifs de fusion entre la profession d'avocat et celle de conseil en propriété industrielle, en raison de l'absence d'accord entre ces deux professions.

Les deux textes soumis à notre examen sont équilibrés et sont le fruit d'une longue concertation entre les professions. Ils permettront aux professions juridiques et judiciaires de s'adapter à notre société moderne tout en garantissant une justice plus efficace pour nos concitoyens. Telles sont les raisons essentielles pour lesquelles le groupe UMP les votera, dans l'enthousiasme presque général. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, le projet de loi et la proposition de loi Béteille touchent à des aspects importants de la nécessaire évolution de nos institutions et de nos procédures judiciaires.

L'autorité judiciaire a un poids essentiel dans notre pays. Selon que les professionnels du droit, magistrats, avocats, huissiers, sont plus ou moins compétents et indépendants, l'organisation des procédures peut avoir un impact fondamental sur la vie de nos concitoyens, la paix des familles, la sécurité des transactions, voire l'identité des gens.

Nous savons que, compte tenu des déplacements internationaux, de la construction européenne mais aussi des nouveaux moyens de communication comme internet, nous ne pouvons plus exercer le droit comme nous l'avons fait autrefois. Il faut donc procéder aux actualisations nécessaires afin que les méthodes d'organisation et de travail des juristes soient à la hauteur des besoins de nos concitoyens mais aussi pour que la justice garantisse la paix sociale en prévenant et en réglant au meilleur coût les inévitables litiges qui surviennent dans toute société humaine.

L'ambition est donc grande. Pourquoi faut-il, madame la ministre, que ces textes copieux nous laissent sur notre faim ?

Nous voyons un grand nombre de modifications plus ou moins importantes, de retouches sur des procédures, qui paraissent souvent utiles mais qui donnent une impression de fouillis, comme un catalogue de grand magasin par correspondance, voire un inventaire à la Prévert.

Pour la plupart des mesures, ce n'est pas le détail qui nous dérange. Certaines d'entre elles peuvent sembler de bon aloi, comme celle qui réaffirme le rôle des notaires pour ce qui concerne le droit de propriété, les transactions immobilières ou les actes relatifs à la famille. Vous proposez aussi des solutions pour des difficultés pratiques que peuvent rencontrer les huissiers, en facilitant par exemple l'obtention de renseignements sur les comptes des débiteurs. On évoque même les enlèvements internationaux d'enfants. Bref, il y a un peu de tout dans ces textes, et des choses qui ne sont pas désagréables.

Ce qui manque, c'est une vision d'ensemble sur ce que seront demain les professions juridiques et judiciaires. Vu la crainte du modèle anglo-saxon, comme l'ont souligné nos amis communistes, il aurait sans doute été préférable d'avoir une telle vision.

Il n'y a pas d'arbitrage très clair entre deux possibilités, une grande profession du droit où chacun pourrait tout faire, ou la spécialisation de chacun sur ce qu'il sait faire, avec un développement de l'interprofessionnalité. Vous parlez de l'interprofessionnalité et, dans l'intérêt des justiciables, il est effectivement nécessaire d'améliorer les liens entre les professions du droit, ce qui permettra aux professionnels de faire des économies de fonctionnement et aux usagers d'avoir une approche plus globale de leurs problèmes, mais vous n'allez pas au bout de la démarche esquissée.

L'acte avocat est une piste intéressante pour renforcer la sécurité juridique de certains actes. La loi du 31 décembre 1971 avait énuméré les professionnels habilités à pratiquer le conseil juridique, mais les professionnels se sont diversifiés. Certains d'entre eux qui faisaient du conseil à titre accessoire en ont fait quasiment une activité première, et la lisibilité du système au quotidien en est un peu affectée. De surcroît, de nombreux actes sont rédigés par des officines n'offrant aucune garantie de compétence au justiciable. Il est donc nécessaire de mettre un peu d'ordre dans tout cela.

Réaffirmer que la rédaction d'un acte juridique nécessite une compétence et doit être le fait d'un professionnel qualifié ayant une pratique rigoureuse me paraît normal. Actuellement, en dehors des actes authentiques établis par les notaires et les huissiers dans certains domaines, la plupart des actes concernant les baux, les transactions ou les fonds de commerce sont rédigés par les anciens conseils juridiques devenus avocats. La création de cet acte ne modifiera donc pas significativement la pratique et donnera un peu plus de sécurité aux particuliers pour rechercher la responsabilité du professionnel. En fait, cela ne changera pas fondamentalement la situation.

Il y a aussi un problème de méthode : nous n'avons été consultés et informés qu'à la marge. Nous n'avons pas participé à la plupart des discussions et nous nous rendons bien compte que de nombreuses négociations ont lieu non pas au Parlement mais à côté. Pour la fusion avec les conseils en propriété industrielle, par exemple, on nous a proposé un texte en nous disant de ne pas trop discuter car tout avait été vu avec les professionnels concernés. Nous avons ensuite appris que, finalement, ces derniers n'étaient pas si d'accord que cela, et on nous propose aujourd'hui de tout supprimer. Ce n'est pas très satisfaisant pour le Parlement de procéder de la sorte.

Par ailleurs, comme vous avez créé cet acte d'avocat sans qu'il y ait une frontière très nette entre pratique du droit à titre principal et pratique à titre accessoire, cela a entraîné une surenchère entre les professions.

Des répartitions ont certainement été décidées entre elles, sans être forcément le résultat d'un processus transparent et logique. Les tractations à l'arrière-plan ne nous paraissent pas des plus claires.

En compensation pour l'acte d'avocat, vous avez ainsi proposé un certain nombre de compétences à d'autres professions, huissiers de justice et notaires. Pourquoi pas ? Nous ne mettons nullement en cause la compétence de ces professions ; cela pose cependant quelques problèmes.

Il y en a tout d'abord un qui est pour nous un problème de principe et qui tient au PACS. Vous accordez aux notaires la possibilité de rédiger ces actes. Nous souhaitons quant à nous qu'ils continuent d'être passés devant les officiers d'état civil, car le PACS n'est pas seulement un contrat mais aussi un engagement humain. La plupart des associations que nous connaissons ne sont pas favorables à cette nouveauté. À gauche, nous souhaitons que les PACS soient célébrés dans les mairies. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

Par ailleurs, il y aura des unions à deux vitesses : ceux qui peuvent payer un notaire bénéficieront d'un contrat plus sécurisé et plus rapide. Nous trouvons cela regrettable.

En outre, il nous semblerait important que les PACS soient indiqués sur les actes de décès, ce qui n'est pas le cas actuellement, avec cette conséquence que les droits du partenaire ne sont pas garantis.

S'agissant des huissiers de justice, un certain nombre de dispositions visent à leur faciliter la vie. Encore une fois, pourquoi pas ? Ce qui nous gêne, toutefois, c'est que vous avez dû transférer ces attributions à des professionnels parce que vous avez d'abord supprimé un certain nombre de tribunaux d'instance et que vous vous êtes rendu compte que les fonctions que ces derniers remplissaient devenaient dans certains cas d'un accès trop difficile, car trop distant, pour les justiciables. Vous avez donc souhaité corriger le tir.

Par ailleurs, depuis la réforme de la carte judiciaire et la stagnation des budgets – hors budget pénitentiaire –, les tribunaux sont submergés, et vous avez donc été obligés de transférer à des professionnels, qui devront être, très légitimement, rémunérés, des fonctions qui étaient précédemment remplies par des fonctionnaires. Nous estimons que c'est de nature à creuser les inégalités sociales dans l'accès au droit, alors que vous avez déjà creusé les inégalités géographiques.

Ce qui nous gêne surtout, c'est ce qui manque dans ce projet. Celui-ci règle certaines difficultés entre professionnels du droit pour des clientèles solvables mais il ne prend pas en considération ce qui nous semble l'essentiel, à savoir le problème de l'accès à un conseil juridique de qualité pour les gens modestes. Pour cela, il faudrait développer le réseau des maisons de justice et du droit, les points d'accès au droit, l'aide juridictionnelle, notamment le conseil juridique. Nous en sommes encore loin.

Enfin, nous souhaitons le développement de l'action de groupe, car ce serait une bonne manière d'aider les consommateurs à se prémunir contre les agissements de certaines sociétés qui abusent de leurs clients. Malheureusement, une proposition de loi en ce sens déposée par notre groupe a été rejetée.

En conclusion, ce texte comporte certaines avancées, il comble des lacunes – dont plusieurs, cependant, sont de la responsabilité de votre prédécesseur –, il va clarifier plusieurs points, mais il ne prend pas suffisamment en considération les difficultés du justiciable moderne ainsi que la question de la sécurité du conseil sur internet. C'est pourquoi ce texte ne nous enthousiasme pas outre mesure. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Gorges

Contradictoire : « C'est bien, tout ça, mais on n'en veut pas ! »

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, les deux textes que nous examinons aujourd'hui s'inscrivent dans une seule et même logique, celle de la marchandisation de notre droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Je consacrerai l'essentiel de mon propos au projet de loi relatif à la modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées.

Lors de son examen en commission, le 9 juin dernier, Mme la ministre d'État et M. le rapporteur se félicitaient de l'accord obtenu des professions sur ce texte, et plus particulièrement sur l'acte d'avocat. À cet égard, une mise au point s'impose. Il est vrai, madame la ministre d'État, que vous avez obtenu l'accord du Conseil supérieur du notariat, établissement public placé sous votre tutelle et dirigé depuis de nombreuses années par vos amis politiques, mais à aucun moment vous n'avez obtenu l'accord des professionnels. Il ne faudrait pas confondre l'ordinal et le syndical, l'applaudissement de courtoisie et celui d'approbation.

Bien évidemment, vous ne sauriez les confondre, aussi devrais-je plutôt dire qu'il ne faudrait pas entretenir la confusion auprès des néophytes qui s'intéressent au débat. L'accord de l'ordre n'est pas l'accord des notaires. Par exemple, vous n'avez pas obtenu l'accord du Syndicat national des notaires, le plus important de la profession, qui, depuis plusieurs mois, vous fait part de ses désaccords et de ses inquiétudes. Sans compter les nombreux notaires qui nous ont saisis individuellement dans chacune de nos circonscriptions.

Quant aux huissiers de justice, dont vous dites qu'ils ne contestent pas l'acte contresigné, leur chambre nationale a adressé à tous les députés, le 14 juin dernier, un courrier dans lequel ils rappellent sans équivoque leur opposition à l'introduction en droit français d'un acte contresigné par avocat.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

En dépit de l'enthousiasme que vous avez tenté de nous faire partager en commission, nous vous confirmons, pour notre part, notre hostilité à ces textes qui ne visent qu'à « relever les défis de la concurrence internationale dans le domaine du droit », comme se plaît à l'énoncer le rapport Darrois, qui trouve son inspiration, comme je l'ai rappelé tout à l'heure, dans un autre rapport. Le Gouvernement reprend le rapport Darrois dans l'exposé des motifs. Il poursuit son travail minutieux et méthodique d'ouverture d'une ère d'hyper-concurrencialisation sur le « marché du droit » au détriment des justiciables, d'alignement de notre droit sur le système anglo-saxon, dont la crise économique et financière a pourtant démontré les énormes lacunes.

Ce fameux rapport, rédigé par Me Darrois, avocat à la tête du cabinet Darrois-Villey-Maillot-Brochier, premier au classement des cabinets d'avocats d'affaires de la revue Décideurs 100, ambitionnait de créer une grande profession du droit. Ce texte, qui s'en inspire largement, a choisi dans un premier temps d'exacerber la concurrence entre les professionnels du droit, en accentuant sa marchandisation.

Certains se plaisent à croire que, lorsque les professions concernées prennent position sur les différentes réformes en cours, elles n'ont qu'une réaction corporatiste. Certes, elles cherchent à survivre dans ce futur supermarché du droit où, inévitablement, les grandes surfaces feront disparaître les artisans de proximité. Mais peut-on leur en vouloir de se battre pour leur survie ? Bien sûr que non, et il nous faut même les remercier de nous donner à voir ce que sera demain notre système juridique national : un monde où chacune des professions qui le composent, traditionnellement au service de la justice et du citoyen, devra désormais, au service de la finance, se consacrer à la recherche du client.

La dérégulation de notre système juridique national et la dérive administrative et politique vers le droit anglo-saxon se feront au détriment du droit des Français à un service public national de la justice. Les professionnels délégataires d'une mission de service public sont menacés d'une disparition progressive au profit d'une grande profession du droit privatisée. Les « usagers », quant à eux, sont menacés d'une braderie de leur sécurité juridique au profit de sociétés anglo-saxonnes dont le seul moteur est la finance.

Vous avez, comme nous, pris connaissance de la campagne de pub des notaires, audacieuse et humoristique, qui met en avant les avantages du notariat : garantie d'un conseil solide, impartial et désintéressé, sécurité, tarif dégressif fixé par l'État et indexé sur l'objet, incontestabilité et conservation illimitée des actes. Cet humour prend des accents pathétiques à la lecture de la présentation de cette campagne de communication, véritable manuel de survie dans un système juridique concurrentiel : « Aujourd'hui, le notariat est concurrencé par d'autres professions. Pour leur communication, celles-ci investissent fortement dans les médias en consacrant les budgets les plus importants à leurs publicités. Pour faire face à cette situation, deux solutions sont possibles pour le notariat : soit disposer de budgets de communication supérieurs pour occuper un espace publicitaire plus important et donc plus visible que celui de ses concurrents, soit faire preuve d'audace pour jouer de l'effet de surprise, pour faire en sorte que la campagne du notariat soit la campagne dont on parle. »

Les huissiers, eux aussi, se plaçant sur le terrain de l'humour, se sont lancés dans le marketing viral. Voilà à quoi ils en sont réduits ! La France est le seul pays européen où les officiers publics sont contraints de faire de la réclame pour appâter le client. Ils sont soumis à une pression financière et à une surdensité telle qu'ils doivent désormais créer des entreprises qui « tournent ». Leurs impératifs économiques ne pourront les conduire qu'à des comportements de moins en moins éthiques, où l'intérêt du justiciable sera à ranger dans la colonne des pertes. Plus que jamais, le justiciable devra écouter Balzac, qui conseillait de choisir un notaire « bien riche et bien gras, à l'abri des tentations qui font fléchir les gens de loi ».

Alors permettez-nous, madame la ministre d'État, monsieur le rapporteur, de douter quand vous présentez ces réformes comme étant pensées dans l'intérêt du citoyen. La création de l'acte d'avocat en est la simple illustration : il n'a pas été conçu pour le besoin de l'usager mais pour le besoin d'une profession, pour changer la donne dans un marché concurrentiel. Comment prétendre raisonnablement instituer une concurrence, dans l'intérêt du citoyen, entre un officier public, soumis à un statut strict justifié par les besoins de sécurité des citoyens, représentant de l'État dans sa fonction de régulation, et une profession qui « s'inscrit dans une économie de marché régie par la loi de l'offre et de la demande », comme se définit lui-même le Conseil national des barreaux ?

Cette mise en concurrence ne renforcera pas la sécurité des usagers ; c'est faux, ce n'est pas très honnête de le dire. Oui, je persiste à affirmer, avec les notaires et les huissiers, que ce nouvel acte bâtard va affaiblir la sécurité juridique en bouleversant les règles de fond du droit français. Il n'offrira pas de garanties supplémentaires en termes de sécurité juridique pour le justiciable. En définitive, comme le disait en 2009 Jean-Louis Gallet – j'y reviendrai à l'article 1er –, conseiller à la première chambre civile de la Cour de cassation, dans le cadre d'un colloque sur l'acte sous signature juridique : « On peut se demander si la proximité incontestable de l'acte authentique et de l'acte sous signature juridique ne traduit pas plus un conflit de champs d'activité entre deux professions qu'une compétition entre les avantages respectifs des actes en question. »

Ce texte, qui soumet l'officier public à l'influence économique des participations capitalistiques, dont la seule éthique sera celle de la perception des dividendes, présente des risques réels et ne vise qu'à aligner notre droit sur le droit anglo-saxon, pour satisfaire l'appétit de leurs grands cabinets, déjà majoritaires sur la place de Paris. Plus de 80 % du marché du droit des affaires est déjà entre les mains de cabinets anglo-saxons ! La création de l'acte d'avocat ne repose que sur une demande des sollicitors, qui contestent le monopole de l'acte authentique par les notaires. Eux seuls sortiront gagnants de cette nouvelle architecture que le Gouvernement s'applique à dessiner pour notre système juridique national.

Vous-même, madame la garde des sceaux, l'avez dit, à propos de l'acte d'avocat : « Les avocats isolés des zones rurales seront moins enclins à le faire que ceux des grands cabinets. » Ce sont en effet les plus gros cabinets d'avocats parisiens et anglo-saxons, voire les groupes financiers, qui vont bénéficier de cette loi.

« Impartial et désintéressé », disait le conseiller Réal devant le Corps législatif lors des débats de la loi du 25 ventôse an XI, à propos du notaire, qui « empêche les différends de naître entre les hommes de bonne foi et enlève aux hommes cupides, avec l'espoir du succès, l'envie d'élever une injuste contestation ». Oui, parce que sa vocation est d'être impartial et désintéressé, il protège la partie la plus faible de la partie la plus forte. Pourra-t-il l'être encore quand il s'inscrira dans une « interprofessionnalité capitalistique » à la recherche du seul profit ?

Dans la droite ligne du rapport Attali de la commission dite « Pour la libération de la croissance française », ces textes considèrent les notaires et les huissiers, comme hier les avoués, comme des freins à l'économie ! Ne perdez pas de vue, mes chers collègues, qu'il n'est pas dans leur attribution de la dynamiser. Ils ont pour mission, au contraire, de la contrôler pour protéger la société.

Vous l'avez compris : les députés communistes, républicains et du Parti de Gauche voteront contre ces textes, pensés pour les sollicitors au détriment des intérêts de la société et donc des justiciables.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Marin

Madame la ministre d'État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, dans cette discussion générale commune du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées, et de la proposition de loi du sénateur Laurent Béteille, j'interviens pour apporter l'éclairage qui me paraît nécessaire après les conclusions auxquelles je suis parvenue dans le rapport sur les professions réglementées que j'ai réalisé avec mon collègue Jean-Pierre Marcon pour le groupe UMP, à la demande de Jean-François Copé.

L'une des principales dispositions du projet de loi, c'est la création de l'acte contresigné par un avocat. Elle répond à un objectif mis en avant par le rapport Darrois : celui d'accroître la sécurité juridique des accords entre particuliers, alors que, par exemple, le recours régulier à des modèles de contrats mis en ligne risque de fragiliser les parties qui ne seraient pas en mesure de juger en toute connaissance de cause de la portée de leur signature. Cette intention est tout à fait louable, elle va dans le sens d'une saine adaptation de la profession d'avocat à un besoin réel de notre société, ainsi que du renforcement de cette profession dans un environnement de forte concurrence internationale.

Néanmoins, j'insiste sur la nécessité de prendre garde à ne pas porter atteinte à un équilibre acquis depuis de longues décennies entre notaires et avocats dans l'intérêt de tous. Les notaires français, par leurs compétences, par les assurances que donne leur formation, par leur exceptionnel maillage territorial et par leurs prérogatives sur l'acte authentique apportent à la France une sécurité juridique qu'il serait dangereux de remettre en cause, en particulier dans les opérations immobilières et foncières. C'est autant pour ne pas déstabiliser une profession qui rend des services au pays que par souci objectif de préserver toutes les garanties nécessaires à cette sécurité juridique – sans laquelle notre société serait polluée continuellement par des conflits de toutes sortes – qu'il faut préserver un équilibre entre ces deux professions du droit. Je sais, madame la ministre d'État, que le projet de loi est le fruit d'une concertation nourrie entre notre majorité et les représentants des deux professions. Je sais aussi que le maintien des ventes de biens fonciers et immobiliers dans le giron des notaires est assuré, et je m'en félicite. Je forme le souhait que nous soyons conséquents dans notre vigilance pour préserver cette délimitation. Je pense ainsi à une disposition, à mon sens essentielle, concernant les sociétés civiles immobilières, qui prévoit que les échanges de parts au sein de celles-ci soient conclus par acte authentique et non par acte d'avocat. Sur ce sujet, notre majorité doit réellement s'assurer qu'on n'ouvre pas la boîte de Pandore.

Au-delà de la création de l'acte d'avocat, de nombreuses autres mesures sont contenues dans ce projet de loi et cette proposition de loi. Le seul fait que cette discussion générale soit commune aux deux textes témoigne bien qu'il s'agit quasiment d'un petit aggiornamento des professions juridiques et judiciaires réglementées. On aurait pu y apporter un complément, qui aurait été un accord définitif sur la fusion des professions d'avocats et d'avoués car, on le sait, le niveau d'indemnisation des avoués, porté avec le soutien du Gouvernement à 100 % par notre assemblée lors de la première lecture de la réforme, a été relevé à 125 % par le Sénat, sans qu'on ait pu aboutir depuis à une solution pérenne. Je veux souligner que les avoués attendent une décision de notre majorité :…

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Marin

…le pire pour eux est aujourd'hui l'incertitude et l'expectative. C'est pourquoi, madame la ministre d'Etat, je tiens à vous assurer de tout mon soutien pour que le Gouvernement débloque le plus rapidement possible cette situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Marin

Plus largement, et sans stigmatiser qui que ce soit, on voit bien que, dans ce contexte où une forme de répartition des tâches entre les professions du droit est en jeu, il est permis de se poser la question de l'opportunité d'un certain encadrement du nombre d'avocats. Cette profession judiciaire et juridique a la caractéristique, par rapport aux autres professions réglementées, de ne pas faire l'objet d'un accès limité quantitativement. Ces vingt dernières années, comme nous le rappelle fort justement l'étude d'impact du projet de loi, le nombre d'avocats est passé de 18 076 à 50 314 dans notre pays. Or si un plus grand nombre d'avocats peut concourir à un renforcement de la profession française du droit afin d'être à la hauteur des enjeux de la société contemporaine, une augmentation sans bornes nuira à terme à leurs collègues des autres professions judiciaires et juridiques, mais aussi aux avocats eux-mêmes. La commission Darrois n'a-t-elle pas soulevé les déséquilibres de revenus au sein de la profession ? Il n'est donc pas scandaleux de se poser la question de l'instauration d'un numerus clausus, avec un nombre annuel de places disponibles pour l'examen d'aptitude à la profession d'avocat.

La modernisation des professions du droit est nécessaire dans notre pays. Cela nécessite parfois de décloisonner, de faire bouger des lignes, d'introduire plus de souplesse, d'ouverture à l'international, à l'Europe. Mais cela demande également, ne l'oublions pas, du pragmatisme et de la mesure afin de ne pas perdre en stabilité et en sécurité dans un monde en crise qui a aussi besoin de repères, en particulier dans les professions du droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Clément

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons ce soir un projet de loi relatif aux professions judiciaires et juridiques réglementées, que l'intitulé même du texte se propose de moderniser, et une proposition de loi relative à l'exécution des décisions de justice. Ambitieux textes, après la proposition de notre collègue Étienne Blanc, il y a déjà bientôt deux ans.

2008 avait été une année à hauts risques pour les professions réglementées : la commission Attali avait fait vaciller les lignes de défense de celles-ci, pourtant habituées aux attaques répétées des économistes et des libéraux. Dans le domaine qui nous occupe, les professions du droit, les premiers touchés furent les avoués, dont on ne sait pas encore quand ils vont disparaître du paysage. Mais peut-être, madame la garde des sceaux, allez-vous nous informer au cours de ce débat des suites qui seront données au texte les concernant.

Le rapport Darrois, lui, devait ouvrir un débat dont l'objectif affiché était d'aboutir à une grande profession du droit. La lecture de ce rapport nous apprend deux choses, que nous ont confirmées ceux qui ont participé à son élaboration : la mobilisation des professions du droit a été totale, traduisant une agitation qui ne s'est pas démentie tout au long des auditions que vous avez conduites, monsieur le rapporteur, avec les nombreuses sollicitations dont nous avons été l'objet ; l'accès au droit a occupé une grande partie des débats, démontrant qu'il ne sert à rien dans un État de droit de réformer les professions chargées de son application si les citoyens n'y ont pas un égal accès. Mes collègues reviendront sur ce dernier sujet qui me tient à coeur, et je ne le développerai donc pas maintenant.

L'examen de ces deux textes, c'est aussi l'occasion de revenir et de s'arrêter sur notre paysage juridique vu sous l'angle des professions qui l'exercent, puisqu'il nous invite à nous intéresser à nombre d'entre elles.

Un premier constat s'impose : les professions d'officiers publics ou ministériels du droit s'inscrivent plus que toutes les autres dans la catégorie des professions fermées. Direct héritage de l'Ancien Régime, héritage réaffirmé par les ordonnances de 1945, notaires, huissiers de justice, avocats près le Conseil d'État et la Cour de cassation, greffiers des tribunaux de commerce ou encore avoués près les cours d'appel constituent de véritables corporations qui protègent l'acquis historique : un tarif réglementé, un monopole, un numerus clausus, c'est-à-dire des rentes considérables. Autant de professions non remises en cause par ces deux textes – les avoués constituant un cas à part que j'ai déjà évoqué.

Cette situation, dont il est rarement fait publicité, est pourtant choquante pour chaque citoyen, qui en subit le coût.

Tout d'abord, ces rentes sont prélevées sur l'économie : les notaires prélèvent pour leur rémunération, selon un rapport de la Cour des comptes, 0,825 % des transactions immobilières, lesquelles s'élevaient à 266 milliards d'euros en 2007. En dix ans, les revenus liés au simple tarif proportionnel des notaires sur l'immobilier ont été multipliés par 2,5. Alors que leur activité n'a changé en rien ! De même, en 1998, un rapport parlementaire sur les greffiers des tribunaux de commerce pointait du doigt « des entreprises extrêmement rentables basées sur un monopole légal et dégageant des bénéfices de plusieurs millions de francs ». En effet, une charge de greffier s'échangeait alors pour une somme équivalent à 1,2 million d'euros. On lit même dans le rapport « qu'il y a incontestablement des dynasties de greffiers de tribunaux de commerce ». Et pourtant rien n'a changé.

En outre, il faut souligner le fait que le numerus clausus qui s'applique aux charges accordées aux professionnels est injuste. En vertu du principe d'égalité républicaine des chances, toute personne ayant obtenu son diplôme devrait pouvoir s'installer. Si une sélection apparaît indispensable, elle ne devrait être fondée que sur les mérites professionnels ou éventuellement sur un concours, et non sur d'obscures procédures de nomination mélangeant patrimoine et arbitraire. Pour la profession d'avocat près le Conseil d'État et la Cour de cassation, en raison de la directive Services, les barrières à l'entrée, très élevées, sont de plus en plus contestées. La commission sur les professions du droit le reconnaît, soulignant malgré tout que la position actuelle est « de ne rien changer ». Il convient néanmoins de prendre en compte le fait que l'Europe est devenue le cadre de référence de la réforme des professions réglementées. La Commission européenne pourrait ainsi être le principal aiguillon d'une profonde évolution des professions réglementées dans les prochaines années. Les professionnels l'ont d'ailleurs compris et n'hésitent pas à mener à Bruxelles des actions soutenues de lobbying.

Cependant, ces luttes n'opposent plus seulement les économistes aux professionnels ; elles opposent désormais les professionnels entre eux. Les auditions nous l'ont confirmé : les corporatismes sont plus vivants que jamais lorsqu'il est question d'unifier la profession. Comme s'il s'agissait de prendre un arrêté de péril imminent !

Face à ces sollicitations, restent les textes que nous examinons aujourd'hui, dont l'une des dispositions a pu cristalliser l'expression de tous les corporatismes : l'acte contresigné par avocat. La profession d'avocat cherche aussi un marché supplémentaire, pourquoi le nier ? Mais une telle mesure à un triple intérêt : offrir à tout citoyen la liberté de prendre pour conseil le professionnel de son choix ; affirmer la force d'un acte dans un environnement concurrentiel de plus en plus internationalisé ; fournir une sécurité juridique renforcée aux usagers, consommateurs de services et de prestations juridiques. C'est pour toutes ces raisons que ce contreseing d'acte sous seing privé doit être accessible à tous. Il apportera une sécurité juridique renforcée aux consommateurs de prestations juridiques, non pas en raison de l'acte lui-même, mais en raison de la qualité de l'auteur du contreseing. C'est la qualité particulière de cet auteur, en termes de compétences, d'obligations déontologiques ou encore de responsabilité qui permettra de s'assurer que chacune des parties à l'acte aura été pleinement éclairée sur toutes les conséquences juridiques de celui-ci.

J'ajoute que l'obligation de conseil supplémentaire obligera le rédacteur de l'acte à un travail additionnel de conseil, conférant aux parties une plus grande garantie. Le contreseing implique du rédacteur l'appréhension et la prise en compte de l'ensemble des conséquences juridiques attachées à un acte particulier, c'est-à-dire une plénitude de compétences juridiques et une pratique contentieuse du droit, permettant de se projeter dans l'avenir pour analyser toutes les conséquences possibles de l'acte ainsi rédigé. Anticiper sur le conflit constitue en effet un des éléments de la qualité de l'acte rédigé. L'exposé des motifs du projet de loi le souligne : « L'avocat en tant que professionnel du droit pratiquant une activité contentieuse, est le mieux placé pour anticiper les difficultés d'application et d'exécution d'un acte, ce qui lui confère une expérience et une compétence particulières. ». Je le crois en effet.

S'agissant de la revendication des autres professions du droit de pouvoir recourir à cette forme d'acte, elle se heurte selon moi au cadre même des règles qui en font des professions réglementées.

Ainsi, les experts-comptables n'ont qu'une vision parcellaire du droit puisque leur intervention est circonscrite dans les domaines directement liés à l'accessoire de leurs travaux, principalement le droit fiscal, le droit des sociétés et le droit du travail.

Quant aux huissiers, qui nous ont beaucoup sollicités, ils sont eux aussi dans une situation particulière, car le décret de 1956 précise qu'ils ne peuvent procéder à aucune négociation lorsqu'ils établissent des actes sous seing privé. Ils ne peuvent donc s'immiscer dans la phase de négociation préparatoire à l'acte sous seing privé. En outre, ils n'ont pas de pratique contentieuse puisqu'ils interviennent justement au terme de celle-ci pour en faire exécuter les décisions.

Restent les notaires. Qu'ils se rassurent ! Faisons un peu d'histoire, comme en commission. Les notaires français tiennent leur situation de la contrainte où s'est trouvé le roi Henri IV de remplir les caisses de l'État en créant des charges qu'il a vendues à l'issue des guerres de religion. L'État n'est pas prêt à leur racheter leurs études, je pense, l'exemple des avoués est là pour le rappeler.

Par ailleurs, 94 % de leur chiffre d'affaires provient de la rédaction d'actes authentiques dont le projet de loi vient d'élargir le champ des possibles.

Ne nous y trompons pas, c'est à Bruxelles que se joue, calmement mais sûrement, l'avenir des professions réglementées.

Madame la garde des sceaux, une autre procédure mérite l'attention : la procédure participative de négociation assistée par avocat. Cette procédure consacre le mérite de la négociation préalable comme mode alternatif du règlement du conflit. Elle vise à favoriser la participation des parties à la solution négociée de leurs différends.

Inspirée du droit collaboratif développé en Amérique du Nord, cette procédure repose sur la mise en oeuvre par les parties, assistées de leurs avocats respectifs, d'une convention au terme de laquelle elles s'engagent à tout mettre en oeuvre pour aboutir à une solution négociée de leur litige. Je pense que cette procédure est utile et que nous devons l'expérimenter.

Si elle est séduisante, elle suppose toutefois que chaque partie dispose des mêmes armes, financières notamment, pour y recourir. De plus, l'idée n'est sans doute pas exempte d'une arrière-pensée : transférer le coût du traitement des conflits vers les usagers.

Ce projet de loi et cette proposition de loi contiennent aussi de nombreuses dispositions qui accompagnent le désengagement de l'État, transférant des prestations payantes et tarifées vers des professionnels. Il ne faudrait pas, en instituant de nouveaux modes de règlement des conflits, que le recours au juge devienne l'exception.

Mieux que le rapport Darrois, ces deux textes auront été l'occasion de mesurer la distance qui reste à parcourir entre certains de nos concitoyens, les professionnels du droit et notre justice. Certains se demandent comment accéder à la justice ; d'autres craignent une augmentation des tarifs de consultation liée à l'existence de ces actes et procédures.

Une réforme juste est une réforme accessible à tous. Ne dit-on pas que le progrès se mesure à son accès pour les personnes qui en sont le plus éloignées ? À cette aune, je crains que ces deux textes ne soient pas un progrès pour l'accès au droit du plus grand nombre. C'est là leur faiblesse et je le regrette. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Gérard

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, c'est avec une attention toute particulière que j'ai suivi les travaux qui ont accompagné ces deux textes très importants pour l'évolution de notre justice et la sécurité juridique de nos concitoyens.

Essentiel pour la modernisation de notre justice, je l'ai dit, ces deux textes, l'un d'origine gouvernementale, l'autre d'origine parlementaire, sont issus des profondes réflexions qui ont mené aux conclusions rendues par les rapports Darrois et Guinchard, mais aussi à la proposition de loi de notre collègue Etienne Blanc sur l'acte d'avocat.

Je m'arrêterai en premier lieu sur ce nouveau dispositif qu'instaure l'article 1er du projet de loi. Celui-ci a suscité et suscite encore des débats entre les diverses professions du droit, alors même qu'un accord a été trouvé.

Sur ce point, je soutiens le Gouvernement et les travaux de la commission des lois, convaincu de la pertinence et de l'efficacité d'un tel acte, qui consistera à dire que le consentement des parties a été donné de manière éclairée. Il s'agit donc d'un gage de sécurité extrêmement important pour l'accord des parties.

L'acte d'avocat consiste aussi à apporter à l'accord des parties la garantie d'un professionnel du droit. En ce sens, il engage sa responsabilité. Mes chers collègues, à tous ces justiciables qui viennent dans nos permanences se plaindre de la lourdeur des procédures et de la durée des contentieux, nous pourrons bientôt dire que l'acte d'avocat est une machine à supprimer du contentieux. Qui pourrait être contre ?

Aussi, durant les débats qui ont entouré l'élaboration de ce dispositif, j'ai refusé de prendre part à toute querelle de clocher, à tout corporatisme, à toute caricature d'où qu'elle vienne,…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Gérard

…soucieux simplement de respecter tant la profession de notaire que celle d'avocat.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Gérard

On a souligné à plusieurs reprises que l'acte sous seing privé contresigné par l'avocat ne constituait pas un troisième type d'acte et qu'il ne venait pas concurrencer l'acte authentique. Il est créé dans l'intérêt du justiciable et il améliorera le fonctionnement de la justice au quotidien.

L'acte d'avocat reste facultatif et il n'a pas, contrairement à l'acte authentique, force exécutoire. Il démontre simplement que les parties ont été bien informées des conséquences de leurs actes qui engagent leur quotidien ou leur avenir.

Sa possible extension aux autres professionnels du droit a fait naître des divergences. Je ne crois pas que cette extension soit pertinente dans la mesure où les compétences et l'identité de chaque professionnel doivent être respectées.

Les experts-comptables, par exemple, avec tout le respect que je porte à leur profession et à leur rôle capital, sont avant tout des professionnels du chiffre, et leur donner la possibilité de procéder à ce genre d'acte reviendrait à faire de l'accessoire le principal.

Convaincu de la nécessaire modernisation du fonctionnement de notre justice, j'approuve une autre mesure inscrite dans la proposition de loi : la procédure participative de négociation assistée par avocat. Il s'agit d'un bon outil pour limiter le recours au contentieux et désengorger nos tribunaux.

Je pense aussi que la réintroduction du divorce dans le champ d'application de ce texte, via un amendement du rapporteur en commission, est une bonne chose. Je militais dans ce sens et j'accueille avec intérêt cette nouvelle procédure qui vient renforcer le rôle de conseil et d'assistance des avocats au service de nos concitoyens et pour une plus grande proximité de la justice.

En ce qui concerne le projet initial de fusion des professions de conseils en propriété industrielle et d'avocats, je partage l'avis du rapporteur. Il me semble en effet qu'une telle mesure n'a pas sa place dans un texte législatif tant que les discussions entre les deux professions n'ont pas abouti. Les travaux sont donc à suivre sur ce point.

Enfin, ces deux textes importants traduisent la volonté de réforme et de modernisation du Gouvernement, en vue d'adapter notre système à un monde qui change, dans lequel les normes nationales et internationales évoluent, tout en prenant en compte les nouveaux défis dans un contexte de plus en plus international.

À cet égard, les mesures proposées pour une modernisation de l'exercice des professions du droit sont capitales. J'en citerai deux : l'obligation pour tous les professionnels du droit de suivre une formation tout au long de leur carrière ; la possibilité pour les Français résidant à l'étranger d'être accompagnés par un notaire dans leurs démarches.

Madame la ministre d'État, mes chers collègues, j'espère que les travaux que nous débutons aujourd'hui en séance, en première lecture, permettront de lever les inquiétudes exprimées et de parvenir à une relation apaisée entre les différents professionnels du droit au service du bon fonctionnement et de la modernisation de notre justice.

Les outils pour parvenir à cet équilibre ont été mesurés, mûrement analysés, débattus et réfléchis sous votre bienveillante autorité, madame la ministre d'État, avant de s'inscrire dans ces textes que je soutiens avec conviction. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Hostalier

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi a pour objet « d'améliorer l'exécution des décisions de justice » et de « redéfinir l'organisation et les compétences des juridictions », mais je pense qu'elle vise surtout à rapprocher le justiciable de la justice.

Il m'a aussi semblé qu'à travers ce texte il était question de simplifier les attributions des professions qui ont à voir avec la justice – avocats, notaires, huissiers, etc. – et de tenter de simplifier ou de clarifier certaines procédures.

Si ce texte est complexe pour la profane que je suis, je vous fais confiance, madame la ministre d'État, pour que, réellement, grâce à ce genre d'initiative, nous parvenions à rendre la justice moins impénétrable.

Ces derniers temps, à travers de nombreuses initiatives, de colloques et de rapports, comme celui de la commission Guinchard, il a beaucoup été question de remettre le justiciable au coeur du système judiciaire. Ce texte est l'une des étapes qui devrait y contribuer.

Dans ce sens, j'ai noté avec intérêt la proposition d'étendre au champ du divorce la procédure participative. En effet, nous rencontrons souvent dans nos permanences des personnes en grand désarroi moral et financier, enlisées dans une procédure de divorce longue, complexe et coûteuse. Cette procédure participative pourrait sans doute apaiser bien des situations.

Cela étant, rapprocher la justice c'est aussi la rendre accessible à tout un chacun et surtout aux personnes les plus fragiles. Je pense aux personnes qui voient la justice comme un monde totalement à part, à celles qui maîtrisent mal les codes sociaux et pour lesquelles son accès – qui se fait souvent dans des situations déjà difficiles – devient insurmontable si elles ne sont pas accompagnées voire sécurisées.

Au cours des rares débats qui avaient précédé la réflexion sur la réforme de la carte judiciaire, tout cela avait été rappelé avec force. Cela n'avait provoqué à l'époque aucun écho au ministère de la justice. Les décisions, parfois brutales, souvent arbitraires qui avaient été prises se mettent en place et toutes seront effectives le 1er janvier prochain.

Sans remettre en cause l'intérêt de la réforme, quelques aménagements intéressants pour toutes les parties devraient pouvoir être regardés à la loupe. Je voudrais citer un exemple.

Le secrétaire d'État à la justice, Jean-Marie Bockel, est venu récemment à Hazebrouck, où sa présence courageuse a été appréciée. Il a pu voir que la fermeture du TGI suscite beaucoup plus de problèmes qu'elle n'en résout.

Les personnels vont devoir quitter la ville, voire la région, mais le transfert est surtout dommageable pour les justiciables. Certaines personnes n'auront plus accès au droit, uniquement parce que le transfert du TGI à Dunkerque contribuera à un éloignement matériel et fonctionnel.

Le secrétaire d'État nous a expliqué que ces fermetures de tribunaux seront accompagnées de la mise en place de bornes ou de facilités de procédures à distance. Mais vous savez bien, madame la ministre d'État, que pour certaines catégories de population cela ne fera que creuser le fossé, cette fois numérique. Sans l'accompagnement que peut assurer le greffier à l'accueil ou l'avocat de proximité, ces « facilités » resteront inaccessibles.

C'est pourquoi je souhaiterais vous interroger sur la mise en place de ce qui avait été prévu à un moment : les tribunaux d'instance renforcés en remplacement des TGI supprimés.

Lorsque la demande est avérée et qu'il y a une volonté locale, cela permettrait tout simplement de maintenir au plus près de la population les éléments de justice dont elle a le plus besoin, à savoir les affaires familiales, les petits contentieux, les tutelles, etc. Je pense que cela permettrait même à l'État de faire des économies.

C'est l'objet de deux amendements que j'ai déposés. L'amendement n° 20 tend à permettre cette redistribution des compétences ; l'amendement n° 21 vise à prévoir une évaluation de l'application de la carte judiciaire. J'espère, madame la ministre d'État, qu'ils retiendront votre attention. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, depuis plusieurs années, la représentation nationale a été appelée à se prononcer sur une multitude de textes dont bon nombre prétendent avoir vocation à améliorer le fonctionnement de l'institution judiciaire, la qualité et l'efficacité de la justice.

Je ne saurais prétendre aujourd'hui dresser un bilan de l'action des gouvernements successifs en la matière, mais il me semblait indispensable, à l'occasion de l'examen du projet de loi sur la modernisation des professions judiciaires et juridiques, d'approfondir l'une des bonnes questions qui sous-tendent l'efficience du service public de la justice.

Lorsqu'on évoque cette notion, on doit s'interroger sur la situation de l'usager de ce service, et naturellement sur l'accès au droit.

L'évolution que peuvent et doivent connaître toutes les professions du droit, du conseil et de l'aide au justiciable ne peut être envisagée sans s'interroger sur l'effet qu'elle induit pour lui, ce qu'elle lui apporte vraiment.

Ce projet de loi fait suite au rapport Darrois, mais il ne visite qu'une hypothèse de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées. Le rapport Darrois présentait aussi des préconisations pour « mieux satisfaire les besoins des justiciables » et garantir l'accès au droit.

Avec ce projet de loi, je regrette que le justiciable ne soit appréhendé que sous l'aspect réducteur de sujet des prestations rendues par les professionnels du droit. Est-ce cet enjeu fondamental d'accès au droit que vous avez voulu évoquer pour le renforcer ? J'en doute.

La durée de mon intervention étant limitée, je souhaite prendre l'exemple du contreseing de l'avocat. Quelle question avons-nous voulu régler ?Celle du devoir de conseil et d'information de l'avocat à l'égard de son client qui, tout à coup, serait prescrit par la loi ? Mais ce devoir, chers collègues, c'est le fondement de la profession : « Je jure, comme avocat, d'exercer la défense et le conseil avec conscience, dignité, indépendance et humanité. »

Alors pourquoi faire dire par la loi, à l'alinéa 4 de l'article 1er, qu'en contresignant un acte sous seing privé l'avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu'il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte ? Mais, mes chers collègues, c'est son travail !

S'agit-il de rappeler l'exigence de compétence qu'il doit assumer ? Mais cette exigence est elle aussi inhérente à l'exercice de la profession d'avocat ! Elle est d'ailleurs bien plus qu'une exigence, comme l'a souvent rappelé Robert Badinter, qui évoquait « une morale de la compétence et du travail bien fait », dont il disait même qu'elle pouvait être une « morale du renoncement » – nous sommes évidemment bien loin du texte.

En outre, l'article 9 du décret du 12 juillet 2005 prescrit que « l'avocat rédacteur d'un acte juridique assure la validité et la pleine efficacité de l'acte, selon la prévision des parties ». Pourquoi, alors, dans l'exposé des motifs du projet de loi, prétendre que, « par son contreseing, l'avocat reconnaîtra qu'il a bien exécuté cette obligation et engagera sa responsabilité » ? Pourquoi ajouter qu'« associé à la préparation de l'acte, attentif à sa rédaction et à la vérification de l'identité des parties, l'avocat pourra, par son contreseing, attester de l'origine de l'acte » ? Cela fait des décennies, madame la ministre d'État, que les avocats ont l'impérieuse obligation morale d'exercer une telle compétence, qui relève d'ailleurs de la responsabilité ordinale et engage même leur responsabilité civile en cas de manquement. Bref, toutes les obligations dont vous considérez qu'elles résultent du contreseing sont déjà contenues dans la mission de l'avocat et engagent déjà sa pleine et entière responsabilité.

Je suis donc au regret de vous dire que, contrairement à ce que vous indiquez, le contreseing n'apportera pas davantage de sécurité juridique. Il ne provoquera même pas la réduction escomptée des actions en justice, car il n'empêchera évidemment ni les erreurs, ni les incompétences – d'ailleurs nombreuses dans la profession d'avocat –, ni l'habileté d'un autre plaideur. Une plus grande difficulté à contester la validité d'un acte contresigné au moyen de la procédure d'inscription de faux n'altérera pas la volonté du justiciable convaincu d'avoir été mal conseillé ou d'avoir vu traduire imparfaitement ses droits ou ses volontés.

Qui plus est, la responsabilité de l'avocat, y compris dans son cadre assurantiel, n'en sera pas plus renforcée, ni plus accessible pour le justiciable. Peut-être même cette réforme provoquera-t-elle un surcoût que le même justiciable devra en définitive supporter.

À quoi vise-t-elle donc ? Voulez-vous protéger les avocats sur le sujet de la rédaction des actes, tâche dont tant d'autres s'acquittent si mal ? En ce cas, interdisez la rédaction des actes à toute autre profession qu'aux avocats ! Choisissez ce chemin, mais gardez-vous de faire ce pas, qui n'est pas anodin, vers l'acte authentique. Celui-ci émane en effet d'un officier ministériel, à qui la République donne une mission précise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

L'avocat, auxiliaire de justice, à qui la République donne une autre mission, n'est pas neutre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

C'est là, madame la ministre d'État, la conviction d'un député qui, bien qu'il n'exerce plus la profession d'avocat, n'a jamais oublié que ses maîtres en droit lui ont toujours conseillé d'être le moins neutre, mais le plus actif dans l'intérêt des justiciables.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, compte tenu du temps qui m'est imparti, je consacrerai l'essentiel de mon intervention à l'article 1er du projet de loi, qui concerne la création, dans notre droit, d'un acte contresigné par l'avocat disposant de prérogatives particulières en matière probatoire.

Si j'ai choisi de porter mon attention sur cet article, c'est que je ne partage pas la position de Mme la garde des sceaux sur la portée d'une telle innovation, qu'elle justifie par la recherche d'une sécurité juridique accrue pour les justiciables. J'affirme au contraire que notre assemblée n'a probablement pas évalué suffisamment, à cette heure, les conséquences d'une telle mesure.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Celle-ci, de mon point de vue, bouleverse notre droit de la preuve en créant, qu'on le veuille ou non, un acte intermédiaire dont la portée et les conséquences sont encore incertaines.

Les interventions des professions du droit et du chiffre sur cette question ont été nombreuses. J'ai vu beaucoup de pétitions de principe et d'affirmations gratuites, une vive inquiétude des notaires, des experts-comptables et des huissiers de justice, et une grande fierté des avocats devant ce qu'ils estiment être un pas supplémentaire dans l'extension de leurs activités. Pour les représentants de cette dernière profession, il ne fait en effet guère de doute que l'acte contresigné par eux sera quasi authentique. L'acte contresigné fera pleine foi de l'écriture et de la signature des parties. Il se substituera aux mentions manuscrites, qui sont supprimées, mettant fin, à mon avis un peu imprudemment, à plusieurs décennies de législation consumériste.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Cet acte fera donc « pleine foi », expression que l'article 1319 du code civil applique précisément à l'acte authentique. Un contemporain du code civil écrivait, je cite : « En disant qu'il fait pleine foi, la loi dit au juge et au magistrat : vous aurez une entière confiance dans les actes authentiques, vous tiendrez pour véritables les faits qu 'ils attestent. »

Je comprends que beaucoup d'entre nous puissent estimer que la réforme est technique et que, a priori, elle apportera une garantie supplémentaire aux justiciables. L'objectif avéré n'est-il pas d'ailleurs de les inciter à faire appel aux avocats pour davantage d'actes de la vie courante, qui bénéficieront ainsi du concours d'un professionnel du droit ?

Cependant, en conclusion du seul colloque consacré à cette question à l'initiative de la Cour de cassation, donc d'une autorité par hypothèse neutre et experte en la matière, le président de chambre Jean-Louis Gallet concluait que le sujet n'était « pas encore parvenu à maturité ». Si je rappelle ce qu'affirmait M. Gallet en conclusion de son rapport, c'est parce qu'il exprime beaucoup mieux que quiconque, et dans un langage clair, les interrogations qui sont les miennes : « En définitive, on peut se demander si la proximité incontestable de l'acte authentique et de l'acte d'avocat ne traduit pas plus un conflit de champs d'activité entre deux professions qu'une compétition entre les avantages respectifs des actes en question. Y a-t-il l'arrière-plan que l'acte authentique est obsolète ? En ce cas, ne vaut-il pas mieux le dire expressément, mais avec la précaution fondamentale d'en vérifier préalablement la pertinence et les enjeux ? Si tel n'est pas le cas, il apparaît indispensable de définir et d'évaluer le réel besoin, pour les membres de la société civile, de cet acte intermédiaire, en ayant à l'esprit qu'à l'identité de prestations doit sans doute correspondre une identité de déontologie, d'obligations professionnelles, de contraintes et de contrôles. »

J'ai bien conscience que la Chancellerie, dans son projet de loi, nie qu'il y ait identité de prestation. Pour elle, l'acte contresigné par avocat a une portée probatoire limitée ; il n'a aucunement pour objectif de concurrencer l'acte authentique, ni même de porter atteinte à son autorité dans la hiérarchie des normes. Mais je suis désolé de dire que les arguments déployés ne sont pas pertinents.

Peut-on indiquer que l'acte contresigné reste indiscutablement dans la catégorie des actes sous seing privé ? Un alinéa, et j'y reviendrai lors de la discussion de l'article 1er, lui donne la foi de l'acte authentique et restreint de fait considérablement le droit de contestation des contractants devant le juge.

Peut-on mettre en exergue l'autorité de l'acte authentique en disant qu'il ne peut être contesté que par la procédure de l'inscription de faux, alors que l'on va parallèlement supprimer, pour l'acte contresigné, la procédure de vérification de signature prévue à l'article 287 du code de procédure civile et obliger le contestataire à prouver le faux ?

La signature de l'avocat, qui peut se limiter à la signature d'un seul avocat pour l'ensemble des parties, aura, au regard de notre droit civil, la même conséquence que la reconnaissance d'une partie sur la portée de son engagement – en clair, de son aveu.

Je veux, toujours dans la lignée de la réflexion à laquelle nous invite la Cour de cassation, mettre en cause cette affirmation que l'on entend trop souvent dans le débat, selon laquelle l'acte authentique serait un acte lourd, qui devrait être réservé à des situations extrêmes expressément prévues par la loi, alors que l'acte contresigné serait réservé à des situations de la vie courante. C'est totalement inexact.

L'acte authentique n'a aucune autre lourdeur que les formalités liées au respect de procédures protectrices pour l'ensemble des citoyens, donc pour l'intérêt général. Cela peut passer par des contraintes, mais ces contraintes sont la contrepartie de la sécurité juridique ; et quelle meilleure contrepartie, pour les actes solennels auxquels notre société reconnaît une importance particulière dans la vie des personnes, que d'être rémunérés selon un tarif fixé par les pouvoirs publics ?

Dans les actes de la vie courante, le contreseing peut sembler offrir une plus grande sécurité. Mais il est aussi facteur de risque si une partie ou les parties peuvent se faire piéger par l'institution d'une force probatoire non contrôlée. Le particulier qui sollicitera de son banquier un prêt à la consommation – sujet sur lequel nous venons de voter un texte pour lutter contre les abus de position dominante – sera-t-il protégé parce que l'avocat de la banque, qui sera naturellement seul, contresignera le prêt, alors que toute mention manuscrite sera supprimée ? Je ne le pense pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Les avocats ont fréquemment évoqué l'exemple du contrat de bail ou du contrat de prêt, signés le plus souvent sur la base d'une formule type, sans l'intervention d'un professionnel. Une telle pratique a pour contrepartie la possibilité pour chacune des parties de contester ses engagements. Dans ces cas précis de bail ou de prêt, l'intervention d'un avocat, qui pourrait être unique et choisi par une partie avec le consentement plus ou moins tacite de l'autre, facilitera-t-elle la sécurité juridique si elle interdit postérieurement au locataire ou à l'emprunteur de nier le contenu des engagements qu'on lui a fait prendre ? Pour le bail ou pour le prêt, l'acte authentique n'est jamais inaccessible lorsque les parties le souhaitent ; et je note que le texte donne l'apparence de vouloir conforter son domaine d'intervention, notamment pour les actes de vente immobilière et la publicité foncière. Il est vrai que la crise des subprimes a bien montré les limites du tout contractuel, souvent synonyme du « tout est permis » que certains appellent de leurs voeux. La loi que nous votons, mes chers collègues, n'est pas une norme supplétive que l'on appliquerait seulement lorsqu'un contrat bien ficelé par un juriste n'en contourne pas l'application.

L'acte authentique a pour avantage de permettre la prédominance de l'intérêt général comme arbitre et juge de paix entre les prétentions respectives des parties. Il est dressé et reçu par un officier public qui assure un service public s'agissant de la régularité et de la force probante des actes juridiques. L'État répond de ces officiers parce qu'il les nomme, les contrôle et fixe leurs émoluments, alors que l'avocat exerce une profession libérale indépendante. Conférer une force probante supérieure à l'acte sous seing privé en raison de l'intervention d'un avocat risque de brouiller complètement les repères et la sécurité de nos concitoyens, l'État ne pouvant en aucune manière répondre de l'activité des avocats. Cette catégorie intermédiaire d'actes, sans équivalent à l'étranger, risque d'avoir un impact social désastreux car le citoyen va perdre le droit de contester l'acte sans avoir la sécurité qui, seule, justifie cette perte.

En conclusion, je veux rappeler que chaque profession du droit apporte une contribution éminente à la sécurité juridique et, au-delà, à l'efficacité économique comme à l'harmonie sociale de notre pays. Mais si ce texte vise à moderniser les professions concernées, il ne me semble pas à la hauteur de l'ambition affichée. J'aurais tendance à dire que le problème est pris par le petit bout de la lorgnette. L'acte contresigné par avocat, qui figure à l'article 1er, apparaît comme la clef de voûte de tout le reste du dispositif. Il constitue un pilier bien fragile et bien complexe pour éclairer la construction d'ensemble. On tentera ensuite de donner aux autres professions du droit quelques maigres contreparties.

Le législateur – c'est-à-dire nous, parlementaires – sera probablement conduit à vérifier que le texte répond aux résultats d'une négociation menée entre les avocats, les notaires, les experts-comptables ou les huissiers de justice. Plusieurs communiqués pourraient témoigner que des armistices ont été conclus. Mais, déjà, plusieurs déclarations – je pense aux articles ou aux interviews de Paul-Albert Iweins, Jean-Charles Krebs, Thierry Wickers et Christian Charrière-Bournazel –, témoignent que les hostilités pourraient bientôt reprendre. J'en veux pour preuve une affiche élaborée par le bâtonnier de Lille, que j'ai trouvée placardée à la fenêtre d'une mairie de ma circonscription, alors même que le texte n'a pas encore été voté par notre assemblée.

Si les hostilités reprennent, aurons-nous réellement joué notre rôle de législateur ? Aurons-nous eu à notre disposition une étude d'impact précise et impartiale, indispensable dans un tel débat ? La Cour de cassation semblait, à juste titre, répondre par la négative. Je regrette personnellement que nous en soyons aujourd'hui réduits à authentifier, en quelque sorte – ou à contresigner, si vous préférez –, les résultats de négociations interprofessionnelles dont nous ne connaissons ni la portée réelle, ni le degré de liberté qu'elles ont offert à l'expression de chaque profession.

C'est pourquoi il me semble que le Parlement doit pleinement jouer son rôle, et ne pas hésiter à amender un texte qui comporte beaucoup d'ambiguïtés et d'obscurités, au moins pour limiter les risques de certaines de ses dispositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Blanc

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, beaucoup ayant déjà été dit, je me contenterai de quelques brèves observations. Les textes qui nous sont soumis entendent répondre à trois objectifs : renforcer la sécurité juridique au profit des Français, simplifier les procédures – ce qui, eu égard à la complexité que chacun connaît, ne peut être qu'opportun – et moderniser l'exercice et les pratiques des professionnels du droit.

Deux exemples montreront que les objectifs poursuivis sont satisfaits par ces dispositions.

Le premier concerne la simplification du droit pour les huissiers de justice. Le monde dans lequel nous vivons est tout de même curieux : grâce à internet, l'information y circule rapidement, mais les procédures imposées aux huissiers pour signifier des actes, qui circulent librement de manière dématérialisée, sont devenues totalement désuètes. Ces textes apportent les simplifications attendues. Il est déjà compliqué d'obtenir un jugement, il est insupportable de ne pouvoir l'exécuter pour des raisons de procédure.

Vous avez d'autre part souhaité, madame la garde des sceaux, faire en sorte que les professionnels du droit français soient plus compétitifs, qu'ils puissent « régater » avec les cabinets européens ou américains qui sont leurs concurrents. En permettant aux sociétés d'avocats d'accueillir des avocats étrangers, en autorisant l'ouverture du capital, nous remplissons parfaitement cet objectif.

Au coeur de ces textes – à l'article 1er du projet de loi – figure l'acte d'avocat, qui a fait l'objet d'une discussion de fond. Que n'avons-nous pas entendu à ce sujet ? Il s'agirait d'un être juridique innommé, d'une création qui va déstabiliser le droit français. J'ai lu, comme certains d'entre vous, un opuscule qui explique que, la Chine s'étant inspirée du droit français et ayant transposé dans son droit positif les principes fondamentaux de l'acte authentique, nous allions déstabiliser le droit chinois. Nous avons même appris que la note AAA de la France en matière de sécurité financière et de garantie des paiements pourrait être compromise par l'acte d'avocat, car nous allions nous rapprocher du droit anglo-saxon et ébranler un édifice ancien hérité de Cambacérès, voire d'Henri IV.

Il n'y a rien de tout cela dans ce texte, qui se fonde au contraire sur un constat : les Français doivent aujourd'hui appliquer 8 000 lois et 400 000 décrets. Pour cela, ils ont recours à des conseils ou – de plus en plus souvent hélas – vont chercher sur internet des formules toutes faites ou, dans diverses publications, des formulaires qu'ils remplissent un peu à l'aveuglette et qui sont de véritables nids de contentieux. Pour remédier à cette situation, il est aujourd'hui proposé de créer l'acte contresigné par avocat. Il ne s'agit pas de créer un acte authentique bis, mais de renforcer l'acte sous seing privé, de lui donner plus de force et de permettre à ceux qui le rédigent d'être mieux reconnus, voire respectés.

Un avocat français me disait, lors d'une audition, qu'il était tout de même étonnant qu'il ne puisse pas signer un bail commercial qu'il a préparé avec un cabinet anglo-saxon, alors que l'avocat étranger qui a conseillé l'une des parties peut le faire. Tel est le problème de fond. Il s'agit de donner au droit français un outil juridique nouveau qui lui permettra de mieux relever les défis de la concurrence internationale. En signant l'acte, l'avocat attestera de la capacité à contracter des parties. Il attestera aussi, le cas échéant, de l'origine des fonds – on pourra dire qu'il l'a vérifiée. Il attestera de son rôle de conseil. Il attestera de l'identité des parties. L'acte ainsi contresigné aura une force probante renforcée et fera foi de son origine.

En quoi cela fragilise-t-il l'acte authentique ? L'activité des notaires reste ce qu'elle est. Aucun élément ne permet aujourd'hui de penser que l'acte sous signature d'avocat empiétera sur le champ d'activité des notaires. L'acte authentique sera d'ailleurs, dans notre droit, le seul acte qui conservera la force exécutoire, car il est revêtu de la formule exécutoire. Rappelons que, pour être exécuté, l'acte sous signature d'avocat devra être soumis au juge, qui pourra éventuellement lui donner une force exécutoire.

Je ne crois pas que cet être juridique nouveau qui surgit dans notre droit positif bouleversera le droit français. Il sera utile à une profession, mais il le sera surtout aux justiciables, aux utilisateurs du droit, aux Françaises et aux Français.

Permettez-moi de regretter qu'à l'occasion de ce débat on ait présenté ce projet, hérité de la commission Darrois, comme un sujet de conflit entre des professions. Nous ne sommes pas là pour favoriser telle ou telle profession. Nous sommes là, d'abord et avant tout, pour répondre aux besoins de sécurité juridique des Français. Dans un monde de plus en plus judiciarisé, elle leur est indispensable. L'acte sous signature d'avocat contribuera à la leur donner. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Monsieur le président, madame la ministre d'État, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un projet de loi visant à moderniser les professions judiciaires et juridiques réglementées, projet largement inspiré par les recommandations du rapport Darrois.

Les dispositions contenues dans ce texte me semblent aller dans le bon sens. Nous souhaitons que nos amendements, qui complètent utilement le texte, fassent l'objet d'un examen attentif. Nous en avons parlé tout à l'heure. Ma collègue George Pau-Langevin a présenté ces quelques ajouts, notamment ceux, à l'article 6, concernant le PACS.

Dans le temps qui m'est imparti, je voudrais – même si cela peut paraître paradoxal – axer mon intervention sur ce qui ne figure pas dans ce texte, qui constitue une occasion manquée. Je veux parler de l'accès au droit, et plus particulièrement de l'aide juridictionnelle et de ses difficultés de mise en oeuvre. J'espère d'ailleurs que le ballon d'essai lancé par Mme Rachida Dati il y a quelques mois et visant à remettre en cause la gratuité totale de l'aide juridictionnelle n'est plus à l'ordre du jour.

La question de l'accès à la justice pour les plus démunis s'est toujours posée avec acuité. Autrefois, le problème était résolu par les « audiences de charité » et par l'obligation qui était faite aux avocats de prendre des dossiers pro bono, c'est-à-dire « pour le bien » – dossiers d'ailleurs non rémunérés. L'augmentation considérable des actions en justice relève à la fois d'une judiciarisation de plus en plus importante de la société et de l'inflation législative. Cette situation a conduit l'État à prendre en charge le coût de l'accès à la justice pour ceux à qui leurs moyens l'interdisaient.

Aujourd'hui, le fonctionnement de l'aide juridictionnelle ne va pas sans poser de nombreux problèmes et doit évoluer, car il est loin de ce que l'on peut attendre d'une défense de qualité. Sa réforme, son adaptation sont une urgente nécessité, et fondamentales pour la défense des plus démunis.

Le constat est plutôt sévère. Notre pays consacre à l'aide juridictionnelle des sommes relativement faibles, par rapport à ses voisins membres du Conseil de l'Europe : quelque 90 millions d'euros. C'est vous-même qui citez ce chiffre, madame la ministre, dans un article des Échos que j'ai lu attentivement.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

En totalité, c'est 300 millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Très bien. Avouez néanmoins que, par rapport aux besoins, cette somme est relativement faible. Depuis 1991, les admissions à l'aide juridictionnelle – totale ou partielle – ont augmenté de 160 %. Le système actuel est notoirement insuffisant. En théorie, le principe est excellent. L'aide juridictionnelle –sorte de sécurité sociale judiciaire – s'applique à toutes les matières et permet d'obtenir un avocat gratuit, ou pas cher. Toutefois, les barèmes d'accès sont à revoir : moins de 916 euros de revenus pour être totalement pris en charge ; moins de 1 367 euros pour une prise en charge partielle. Ces plafonds laissent totalement de côté les justiciables qui ne sont pas totalement pauvres, mais qui sont tout sauf riches et ont un mal de chien à payer leur avocat.

Simple en principe, le système d'obtention de l'aide juridictionnelle n'est pas satisfaisant. Le justiciable doit déposer, au bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance, un dossier justifiant de ses revenus et charges – ce qui est bien normal –, avant de se voir notifier la décision et attribuer un avocat. Dans la pratique, c'est moins simple. Nombre de dossiers sont rejetés par manque de pièces qui s'avèrent souvent inutiles. Je songe à l'exemple d'une jeune femme majeure, sans aucun revenu, placée avant sa majorité, à qui l'on a demandé un avis de non-imposition qu'elle ne pouvait fournir, car elle était rattachée fiscalement à sa mère avec qui elle n'avait plus aucun contact. On l'a fait patienter pendant des mois.

S'ajoute à cela la longueur des délais : il faut compter six mois dans les grandes villes pour obtenir l'aide juridictionnelle. Pendant ce temps, le divorce, par exemple, n'avance pas ou mal, le justiciable ne comprend pas et l'avocat plaide quand même sans être sûr de l'aboutissement de la demande d'aide juridictionnelle. L'aide juridictionnelle devrait être prioritaire. Or ce n'est pas le cas, faute de moyens, faute d'une réelle politique d'aide, alors que la justice s'adresse plus souvent aux citoyens démunis qu'aux gens aisés.

Un autre problème concerne la rémunération de l'avocat. Dans le cadre de l'aide juridictionnelle, celui-ci n'est pas rémunéré mais indemnisé, et seulement à la toute fin de la procédure. Il ne perçoit donc pas de provision et avance tous les frais. La procédure peut être longue. Il ne touchera son indemnisation qu'en fin de mission, sans compter les délais et le passage par la CARPA. En pratique, pour pouvoir assurer la défense de ses clients à l'aide juridictionnelle, l'avocat doit faire payer ses autres clients. Ce système n'est évidemment pas satisfaisant.

Si nous ne revoyons pas l'indemnisation de l'avocat, nous continuerons d'avoir des avocats désignés plutôt inexpérimentés ou se bornant au minimum syndical. Cette situation est grave pour le justiciable et entraîne, de fait, une justice à deux vitesses qui n'est pas acceptable.

Soyons clairs : aujourd'hui, l'avocat qui accepte l'aide juridictionnelle accepte une mission de solidarité qui lui coûte de l'argent. Il paye pour travailler avec tout ce que cela peut engendrer soit de médiocrité, soit de difficultés, pour lui mais surtout pour le justiciable.

Nous devons réfléchir à l'évolution du dispositif, aux moyens qui sont mis à sa disposition, et donc à sa réforme. Les avocats s'en préoccupent d'ailleurs : le 25 juin, à Lille, ils organisent les états généraux de l'aide juridictionnelle. Il faudra nous inspirer de leurs travaux pour entreprendre cette réforme indispensable. Nous devrons aussi nous inspirer du rapport de M. Roland du Luart, présenté dans le cadre de la commission des finances du Sénat en octobre 2007 et qui a avancé diverses recommandations, ainsi que du rapport Darrois, qui propose notamment de mieux rétribuer les avocats.

L'aide juridictionnelle se situe au coeur de toute réforme destinée à moderniser et à humaniser le droit. Elle concerne donc au premier chef la réforme des professions du droit. Je crois savoir qu'à l'initiative de son président, la commission des lois va se saisir de ce sujet. J'espère, madame la ministre, que vous tiendrez compte de ses réflexions et de ses travaux dans un avenir proche.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La discussion générale commune est close.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je tiens à répondre, ne serait-ce qu'en quelques mots, à chacun des intervenants, et à les remercier tous de leurs analyses, même si elles ne convergent pas forcément avec les vues du Gouvernement. Je pense qu'il est toujours bon d'écouter tout le monde et d'être attentif aux craintes qui peuvent être exprimées. Cela permet aussi de lever des ambiguïtés ou de dissiper des soupçons.

Je remercie tout d'abord – à tout seigneur, tout honneur – M. le rapporteur Yves Nicolin de son travail de réflexion et, surtout, de ses nombreux apports par voie d'amendement en commission : sur les avocats mandataires de sportifs, sur les bases de données immobilières, la valeur probante des constats d'huissiers de justice, l'accès des huissiers aux fichiers sans filtre du parquet, la procédure participative, et j'en passe. M. Nicolin a substantiellement enrichi ce texte.

Je remercie Mme Pau-Langevin des appréciations positives qu'elle a formulées sur certains éléments des deux textes discutés aujourd'hui. Cette réforme présente des lignes directrices, même s'il n'est pas toujours facile de les repérer. C'est pourquoi j'ai essayé de montrer ce qu'elles étaient dans ma présentation générale.

Nous reviendrons aux différents aspects de son intervention lors de la discussion des articles, mais je tiens à dire dès à présent qu'il n'y a pas eu de tractation à l'arrière-plan. Ayant trouvé à mon arrivée au ministère une situation caractérisée par des oppositions entre les professions, j'ai cherché à rétablir un dialogue, pour que les gens se parlent et pour que nous puissions voir s'il était effectivement possible de parvenir à un texte qui confortât chacun. C'est ainsi que les choses se sont faites. Bien sûr, tout le monde n'est pas associé à la démarche, cela se passe tout d'abord au sein d'un petit groupe. Ensuite, au fur et à mesure, on associe et on élargit.

Par ailleurs, cette réforme n'a pas de lien direct, madame la députée, avec la réforme de la carte judiciaire, que vous avez longuement évoquée. Le seul lien que l'on puisse établir, c'est que nous essayons de réformer l'ensemble de l'organisation et du fonctionnement de la justice. Pour ma part, je souhaite recentrer l'institution judiciaire sur ses missions essentielles, alors que des évolutions l'exposent à un risque de dilution.

Je remercie M. Schosteck de son soutien efficace. Il a raison d'affirmer que nous cherchons à moderniser et renforcer les professions. Je crois, comme lui, que ces textes, tant le projet de loi que la proposition de loi, répondent à de nombreuses attentes. C'est en tout cas ce que j'ai entendu, et je ne doute pas que nos discussions nous permettront d'y répondre encore mieux.

Monsieur Vaxès, nous nous connaissons bien ; nous savons aussi que nos visions s'opposent sur bien des points. L'expression de marchandisation de notre droit n'a aucun sens pour qui considère le statut des professions juridiques.

S'agissant de l'accord qui s'est fait sur l'acte contresigné, je vous rappelle que le président du Conseil supérieur du notariat est élu par l'ensemble de ses pairs. Le Syndicat national des notaires compterait pour sa part, selon les informations de la Chancellerie, 200 à 300 adhérents sur un total de plus de 8 000 notaires. Il me paraît donc normal de travailler avec le président du Conseil supérieur du notariat, élu par la profession. C'est ainsi que l'on peut avancer de façon efficace. Nous essayons de mener la concertation avec ceux qui représentent effectivement leur profession.

Par ailleurs, j'ai voulu montrer aux professions l'intérêt qu'elles avaient à se développer ensemble. Elles ont effectivement à faire face à d'autres concurrences, dangereuses pour elles-mêmes, dangereuses également pour les justiciables. Certains d'entre vous ont ainsi évoqué les risques auxquels expose ce que l'on trouve sur internet. C'est là une réalité. En l'absence de vérifications, des erreurs peuvent avoir des conséquences graves pour les justiciables, et aussi pour les professions. On ne gagne donc rien à opposer les professions les unes aux autres.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Pour ma part, je continuerai de travailler pour que les gens se comprennent mieux, s'entendent mieux, travaillent ensemble et fassent ensemble des efforts de nature à mieux assurer la mise en oeuvre de notre droit.

Mme Marin, qui est l'auteur d'un rapport sur les professions réglementées remis en 2009, a évoqué l'acte contresigné par avocat. Je la remercie de la position qu'elle a exprimée sur ce point. Je souscris entièrement à l'idée d'un nécessaire équilibre entre les professions de notaire et d'avocat. C'est précisément la raison pour laquelle ses propos relatifs aux sociétés civiles à prépondérance immobilière suscitent des réticences de ma part : je crois important de préserver l'équilibre obtenu grâce à l'accord conclu entre les professions. Faisons donc attention. Tout a été rédigé en commun, dans une totale transparence. Il ne faudrait pas, en introduisant in extremis un déséquilibre, remettre en question l'ensemble du consensus. Je ne pense pas que nous le souhaitions.

M. Jean-Michel Clément a demandé quand serait examiné le texte sur les avoués. Ce sera le plus rapidement possible. (Sourires sur les bancs du groupe SRC.) Attendez ! Je veux dire que cela dépend des possibilités d'inscription dans l'agenda parlementaire. Mais ce texte devient effectivement urgent, et il est indispensable qu'il soit bouclé avant la fin de l'année. Nous avons d'ores et déjà réglé quantité de problèmes, notamment celui des salariés, sur lequel l'Assemblée nationale et le Sénat sont parvenus à un accord. En outre, les postes que nous apportons existent toujours, tout comme leur financement.

Reste une divergence entre les deux chambres, qui porte sur le taux d'indemnisation des avoués. L'Assemblée nationale a voté un taux de 100 %, mais le Sénat souhaite intégrer d'autres éléments pour dépasser les 100 %. J'ai espéré, à un moment donné, un rapprochement entre les deux rapporteurs, qui n'a pu avoir lieu. Nous constaterons donc les divergences en deuxième lecture et prendrons alors les décisions nécessaires. En tout cas, la question est très importante, puisque de plus en plus d'avoués me disent qu'ils se sont arrangés pour se dégager très rapidement et que leurs salariés sont en train de partir ; ils me demandent donc ce qu'ils doivent faire. C'est pourquoi cette inscription à l'ordre du jour est urgente. J'espère donc votre soutien à ce propos, monsieur le président de la commission des lois.

Je ne reprendrai pas mon argumentation en faveur de l'acte contresigné, mais je crois que la concertation que j'ai menée a été l'occasion de dépasser les corporatismes. Je pense que c'est important non seulement pour le présent texte, mais aussi pour l'avenir des deux professions.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Quant à la procédure participative, elle ne traduit pas un désengagement de l'État mais correspond à une recherche de solutions plus adaptées.

Je veux remercier M. Gérard de son soutien à l'esprit général du texte, aussi bien pour les dispositions relatives à l'acte contresigné et à la procédure participative que pour les efforts de rapprochement entre les avocats et les conseils en propriété industrielle.

Mme Hostalier a beaucoup insisté sur le problème de la carte judiciaire, qui n'est pas l'objet de ce texte. La carte judiciaire répond à certains besoins, notamment celui de laisser une compétence spécifique à un certain nombre de tribunaux, qui pouvaient être mis en cause par un très faible nombre d'actions, à l'instar des maternités fermées par suite d'un trop faible nombre d'accouchements. S'il importe effectivement de maintenir un certain lien de proximité, on peut y parvenir par plusieurs moyens, notamment celui des audiences foraines, qu'il ne faut pas ignorer.

Je pense que nous devons encore travailler sur des moyens qui se rapprochent encore plus des justiciables que les maisons de la justice et du droit, notamment dans les petites communes où de telles maisons ne peuvent exister. J'attends de voir les résultats de l'expérimentation des bornes dans les maisons de la justice et du droit pour voir comment mettre en place, y compris dans de petites communes, un système certes simplifié, mais qui permette d'établir une relation directe avec nos concitoyens et de répondre immédiatement, avec une très grande proximité, à leurs besoins.

Contrairement à ce que soutient M. Le Bouillonnec, le contreseing de l'avocat apporte bien – je l'ai dit dans mon propos introductif – une sécurité juridique à l'acte sous seing privé ; c'est évident. Il s'agit d'une garantie supplémentaire pour nos concitoyens.

S'agissant des rapports entre les deux professions, je souscris, en revanche, à ses propos : avocats et notaires ont des statuts différents ; par conséquent, leurs actes auront des conséquences juridiques différentes.

Monsieur Huyghe, nous avons déjà discuté ensemble de tous ces sujets. Vous prétendez que les circonstances de l'accord passé ne sont pas connues ; je vous invite à faire attention et à faire preuve de respect aussi bien pour ceux qui ont participé à la concertation que pour le ministre. Rien n'est fait en secret, rien n'est fait « dans le dos ». J'essaie toujours d'être constructive et d'agir en toute transparence, les choses étant parfaitement claires pour tout le monde. C'est pourquoi, je le répète, j'ai voulu que l'accord se fasse sur un texte rédigé, non sur des idées ou des déclarations, car il serait alors possible de revenir sur certains engagements, et l'incertitude n'est pas ma façon de travailler. Vous me connaissez depuis suffisamment longtemps, monsieur le député, pour le savoir. Peut-être mon caractère me porte-t-il quelque peu à foncer. En revanche, faire les choses par derrière, moi, jamais ! Les coups tordus, jamais ! Ce n'est donc pas du tout dans cet esprit que les choses se sont passées.

Aujourd'hui, il faut bien dire une chose : non, monsieur Huyghe, l'acte contresigné n'est pas une catégorie d'acte intermédiaire ; non, il n'a pas la même force probante que l'acte authentique. Contrairement à ce que vous affirmez, l'acte authentique est renforcé par le projet de loi, puisque, aux termes de ce dernier, lui seul peut donner accès aux fichiers immobiliers. Vous devriez savoir que cela répond à une demande ancienne.

Je pense que ce texte est effectivement un texte d'équilibre et d'apaisement entre les professions, qui les conforte plutôt.

Je remercie Étienne Blanc de son soutien et de son appel à l'accord entre les professions, qui me paraît effectivement indispensable.

S'agissant de la signification électronique, je suis d'accord avec vous, monsieur le député, sur la nécessité de renforcer les moyens d'exécuter les jugements et de développer le rôle des nouvelles technologies au service de la justice.

Je pense effectivement, monsieur Vuilque, que nous approuvons tous deux l'esprit du projet de loi. Nous verrons ensuite quels amendements vous proposez. Vous le savez, d'une façon générale, je suis très favorable aux amendements parlementaires qui permettent d'améliorer un texte sans le dénaturer. Nous examinerons les vôtres le moment venu.

Comme vous le savez également, je me suis penchée dès mon arrivée au ministère de la justice sur la question de l'aide juridictionnelle, pour toutes les raisons que vous avez très justement notées, auxquelles j'en ajoute une qui a trait à l'intervention des experts. Celle-ci vient renchérir le coût et n'est pas prise en compte.

Nous avons beaucoup travaillé, notamment avec les compagnies d'assurance, et s'il n'est pas possible aujourd'hui de régler cette question, qui excède l'objet des textes que nous examinons, je pense pouvoir vous faire un certain nombre de propositions à très court terme, à l'issue des discussions en cours. En cette matière aussi, j'essaie de parvenir à un accord qui tienne compte des besoins réels de nos concitoyens.

Voilà ce que je voulais, mesdames et messieurs les députés, vous répondre, tout en vous remerciant de vos contributions. Sans doute, monsieur le président, allons-nous maintenant entrer dans le vif du sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

J'appelle maintenant dans le texte de la commission les articles du projet de loi portant modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées.

Mes chers collègues, je vous informe que la Conférence des présidents ayant prévu une séance demain à neuf heures trente, nous disposons encore d'une heure de travail, qui peut être productive.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

À l'article 1er A, je suis saisi d'un amendement n° 34.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Favorable.

(L'amendement n° 34 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

L'amendement n° 35 de M. Nicolin est également rédactionnel.

(L'amendement n° 35, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 1er A, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 8.

La parole est à M. Jean-Michel Clément.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Clément

Cet amendement s'intéresse à la situation de nos collaborateurs parlementaires, qui accomplissent à nos côtés un travail remarquable. Nombre d'entre eux sont titulaires de formations juridiques de haut niveau et travaillent avec nous depuis de nombreuses années. Ils doivent pouvoir, compte tenu de la situation de précarité inhérente à leur fonction et à celle de parlementaire, se prévaloir le moment venu, si bon leur semble, tout à la fois de leur expérience et de leur compétence pour revendiquer l'accès à la profession d'avocat et l'inscription à un barreau, au même titre que d'autres professions, puisque la loi prévoit des passerelles. Je pense aux juristes d'entreprise ou à certaines personnes assimilées à des fonctionnaires de catégorie A.

Nous ne sommes pas les seuls à avoir suggéré cette idée car l'amendement n° 1, qui aurait fait l'objet d'une discussion commune s'il avait été défendu, a été cosigné par de nombreux députés de la majorité. Il serait bon que, comme d'autres professions, nos collaborateurs puissent bénéficier de cette dérogation, à l'image de ce que la jurisprudence nous enseigne : les rédacteurs de contentieux des caisses de sécurité sociale, les employés au service juridique de sociétés d'assurances, les inspecteurs de contentieux des URSSAF. Toutes ces professions ont été reconnues et peuvent se prévaloir de la passerelle juridique pour devenir avocat.

La passerelle n'est pas automatique ; elle est soumise, d'une part, à l'avis du barreau et, d'autre part, en cas de difficultés, à l'arbitrage du juge. Dans cette perspective, nous serions honorés que nos collaborateurs, dès lors que les mêmes compétences, la même expérience leur seraient reconnues, puissent accéder à la profession d'avocat par le métier qui est le leur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Avis défavorable.

Certaines professions peuvent avoir accès à cette dérogation, selon l'article 98 du décret du 27 novembre 1991. Néanmoins, il faut pouvoir justifier de huit années de collaboration. Et la durée moyenne d'exercice d'un collaborateur parlementaire est bien souvent inférieure à ce nombre d'années.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

L'auteur de l'amendement a souligné que l'accès à la profession d'avocat se fait pour des professions extérieures d'une façon dérogatoire et relativement restreinte.

Premièrement, il ne s'agit pas du tout de l'objet de ce texte, où il n'est nulle part fait allusion à l'accès à la profession d'avocat.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Deuxièmement et surtout, une telle mesure relève du décret et non pas de la loi. Ce sujet doit sans doute être examiné entre les assemblées et la profession, mais on ne peut pas, par amendement à un texte qui n'a rien à voir et en dehors de toute concertation, prendre une décision de cette nature.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vuilque

M. Nicolin vient de démontrer par l'absurde la pertinence de notre proposition. Nous connaissons des collaborateurs de parlementaire qui exercent leur activité depuis plus de huit ans. Il invoque donc une fausse bonne raison.

Mme la garde des sceaux nous indique que la mesure relève du domaine réglementaire. Dont acte ! Mais il nous a semblé intéressant d'aborder dans cet hémicycle le cas d'une profession qui participe au travail parlementaire et qui compte de nombreux professionnels du droit.

Jean-Michel Clément a cité un certain nombre de professions qui peuvent avoir accès à la profession d'avocat. Pourquoi les assistants parlementaires, à partir du moment où ils ont les qualifications requises et les huit années d'ancienneté nécessaires, ne pourraient-ils pas bénéficier de cette procédure ?

Madame la ministre, vous avez raison : c'est du domaine réglementaire. Mais pensons-y pour l'avenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Clément

Le critère des huit années se suffit à lui-même. On dispose ou non de l'expérience. C'est assez simple.

Madame la ministre, vous venez de nous dire qu'il s'agit du domaine réglementaire. Très bien, mais le décret de 1991 évoque les juristes d'entreprise. La notion d'entreprise a d'ailleurs donné lieu à de nombreuses interprétations discutables. La jurisprudence a essayé de tracer une ligne, mais on voit des barreaux donner leur accord à des juristes dont l'activité recouvre de nombreuses réalités car la notion d'entreprise recouvre un champ très vaste.

Aujourd'hui, pour les collaborateurs de parlementaire, on ne trouve dans aucun texte une définition qui pourrait permettre d'assimiler leur employeur à une entreprise. Si demain nous disposions de cette précision réglementaire, nous pourrions parvenir à cette assimilation.

Je souhaite que les choses évoluent, afin de sécuriser les parcours professionnels de nos collaborateurs, car nous savons, en commission des lois, que tous ceux qui travaillent à nos côtés sont très largement capables d'exercer la fonction d'avocat.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Nous allons y travailler ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Clément

Si vous nous dites vouloir y travailler, madame la ministre, je retire volontiers l'amendement.

(L'amendement n° 8 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 1er.

La parole est à M. Sébastien Huyghe.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Madame la garde des sceaux, vous avez voulu apaiser nos inquiétudes quant aux effets de la réforme instituant les actes contresignés. Vous affirmez clairement que cette réforme ne modifierait pas notre droit de la preuve puisque l'acte contresigné, acte privé, n'aurait en aucune manière les mêmes effets que l'acte authentique, acte public.

Pourtant, le texte de l'article 1er , et notamment de l'alinéa qui introduit un article 66-3-2 dans la loi du 31 décembre 1971, me semble avoir des conséquences beaucoup plus fondamentales. Il y est en effet indiqué que l'acte contresigné par avocat « fait pleine foi de l'écriture et de la signature [des parties], tant à leur égard qu'à l'égard de leurs héritiers ou ayants cause ». Or c'est la reproduction quasi exacte des dispositions de l'article 1319 du code civil, qui est, lui, relatif à la force probante de l'acte authentique. Si les mots ont un sens, l'expression de « pleine foi », commune aux deux actes, ne peut pas être sans conséquence. Ce concept n'était jusqu'à présent associé qu'à l'acte authentique ou à l'acte sous seing privé reconnu par la partie qui l'a signé.

Certes, on pourra faire valoir que cette foi, qu'en droit on appelle la « force probante », ne peut être combattue par les parties à la convention pour ce qui concerne l'acte authentique que par la procédure d'inscription de faux. Pour l'acte contresigné, c'est la procédure de faux prévue par le code de procédure civile qui sera applicable. Mais ainsi, la procédure de vérification d'écriture prévue par notre droit pour l'acte sous seing privé est écartée par l'acte contresigné. Et justement, les procédures de faux et d'inscription de faux sont proches. La distinction entre les deux réside principalement dans des différences de procédure peu contraignantes pour le justiciable et peu significatives pour le professionnel.

Autrement dit, la force probante de l'acte contresigné est très proche de celle de l'acte authentique. Les possibilités de contestation sont quasiment aussi difficiles pour les deux actes ; elles reposent en effet sur la contestation de l'intervention du professionnel.

On pourrait considérer que cette harmonisation est normale puisqu'elle concerne deux professions voisines. Je prétends que c'est une mauvaise harmonisation car les conditions d'intervention du notaire et de l'avocat sont très divergentes. L'acte authentique est rédigé par un officier public qui intervient sous le contrôle de l'État, dans des conditions d'organisation et de conservation précisément fixées par la loi, alors que l'acte contresigné est placé sous un régime de liberté totale, rien ne précisant dans le projet de loi les conditions et les modalités de contrôle du contreseing.

Fort heureusement pour notre démocratie, il est hors de question que l'État contrôle l'activité des avocats. Mais, du fait de la combinaison entre ce statut de liberté et ces nouvelles prérogatives de puissance publique qu'on confère aux avocats en termes probatoires, le droit du justiciable de contester une obligation qu'on lui oppose sera restreint dans des conditions qui apparaissent démesurées. Il s'agit pourtant d'un droit à valeur constitutionnelle, que l'État n'a limité, s'agissant de l'acte authentique, qu'en contrepartie de strictes conditions d'organisation et de contrôle. Ces statuts particuliers des notaires et de l'acte authentique constituent pour le citoyen un facteur incomparable de garantie. Ils sont la contrepartie nécessaire de la force probante, c'est-à-dire des limites apportées par le droit de la preuve à la contestation judiciaire des obligations.

Cette problématique me semble la conséquence la plus grave, et aujourd'hui probablement la moins évaluée, de la création de l'acte contresigné par avocat. Le texte soumis au vote de notre assemblée est-il bien conforme à la Constitution, dans la mesure où il prive les citoyens d'un droit à valeur constitutionnelle, celui de contester un engagement incompris, ou non pris, au seul motif que serait intervenu un professionnel du droit qui n'est soumis à aucun contrôle de l'État ? Pour ma part, j'en doute très fortement.

C'est pourquoi les dispositions instaurant une pleine foi et écartant les possibilités actuelles de contestation de signature doivent être exclues du régime de l'acte sous seing privé contresigné.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Blanc

Je serai très bref, car je me suis longuement expliqué dans la discussion générale.

Le notariat craignait la référence à l'article 1322 du code civil, car il pouvait y avoir confusion avec l'acte authentique. Dans la proposition de loi que j'avais déposée, j'avais mentionné cette référence. Ce fut le sujet central de la discussion que nous avons eue avec les notaires. Il n'est plus fait référence à l'article 1322 ; il n'y a donc plus de difficultés sous cet angle-là.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Monsieur Blanc, il est dommage que vous n'ayez pas eu cette discussion avec le seul notaire présent sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit que l'objectif visé par le Gouvernement à l'article 1er était de donner plus de sécurité juridique aux contrats passés entre personnes privées. Est-ce vraiment cela qui a motivé la création de cet acte contresigné par avocat ? De quels défauts seraient atteints l'acte authentique et l'acte sous seing privé pour que notre droit des obligations contractuelles ait besoin d'un nouvel acte venant trouver sa place entre eux ?

Vous dites, madame la garde des sceaux, que « l'acte contresigné apportera une garantie supplémentaire en constituant un élément de preuve, ce qui rassurera les cocontractants ». N'étant pas juriste, permettez qu'avec beaucoup d'humilité j'emprunte mes analyses à une personne autorisée, M. Jean-Louis Gallet, déjà cité dans nos débats, conseiller à la première chambre civile de la Cour de cassation. Je ne crois pas que vous puissiez le soupçonner de partager les idées qui sont les miennes.

Concluant un colloque sur l'acte sous signature juridique, il se pose la question suivante : « S'agissant de la valeur probatoire que l'on met en avant pour promouvoir l'acte sous signature juridique, l'acte sous seing privé souffre-t-il de tant d'indignité ? » Rappelant les articles 1316-4, 1134 et 1320 du code civil, il précise : « L'acte sous seing privé fait foi entre les parties, sauf preuve contraire, en cas de contestation, preuve contraire soumise tout de même à des conditions de recevabilité strictes qui conservent à cet acte sous seing privé une suffisante sécurité juridique au plan de la valeur probatoire, étant ajouté que les cocontractants sont libres de le faire enregistrer [...]. Somme toute, au regard de la multitude d'actes sous seing privé, les contestations sérieuses sont relativement restreintes. »

Alors, pourquoi ce nouvel acte ? Voici son appréciation : « La proximité incontestable de l'acte authentique et de l'acte sous signature juridique [...] traduit [plus] un conflit de champs d'activité entre deux professions qu'une compétition entre les avantages respectifs des actes en question. »

Madame la garde des sceaux, que répondez-vous à ces propos ?

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur Huyghe, et ma réponse s'adresse également à M. Vaxès, ce texte n'est pas arrivé de nulle part. Ce n'est pas une création de la Chancellerie. Les mots « pleine foi » ont été retenus à dessein. La suppression de la référence à l'article 1322, qui posait problème, a été décidée en toute connaissance de cause. Avocats et notaires ont consulté leurs experts universitaires sur ces termes. Nous y avons passé des heures. Cette formulation a été retenue d'un commun accord.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Certes, on imite toujours quelque chose. Si on avait choisi la direction inverse, vous diriez qu'il s'agit d'une imitation de l'acte sous seing privé.

Les modalités de contestation sont différentes entre l'acte contresigné et l'acte authentique, et ce n'est pas parce que l'on retrouve le même mot que cela signifie qu'il s'agit de la même procédure. Nous n'allons pas reprendre cette discussion qui a déjà eu lieu. Chacun peut rester sur ses convictions. Je me contente de vous décrire le processus de décision pour lever toute ambiguïté et pour que vous ne vous disiez pas qu'il y a eu des pressions. Tout a été soigneusement pesé et la formule retenue ressort d'un accord entre les deux professions.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 15 tendant à supprimer l'article 1er.

La parole est à M. Michel Vaxès.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Ce nouvel acte, introduit pour satisfaire la demande des sollicitors qui contestaient le monopole des notaires sur l'acte authentique, n'a pas été imaginé pour répondre aux besoins des justiciables. A-t-on d'ailleurs entendu pareille demande de leur part ? Si leurs intérêts étaient pris en compte, il faudrait alors modifier le texte de cet article afin d'entourer l'acte authentique de véritables garanties. Cela, vous ne le pouvez pas. L'accord que vous avez trouvé avec le Conseil supérieur du notariat est bien trop fragile pour risquer de le compromettre.

La chambre des notaires de Paris a d'ailleurs fait savoir son opposition à toute modification de texte qui aboutirait de manière directe ou indirecte à une confusion entre l'acte authentique et l'acte sous seing privé. C'est là que le bât blesse.

Soit vous conférez à ce nouvel acte toutes les garanties offertes aux justiciables par l'acte authentique et vous seriez alors confrontés à une confusion avec l'acte authentique : je pense notamment à la charge de la preuve et au coût pour le justiciable, soit vous n'en faites rien et, dans ce cas, ce sont les justiciables qui seront les perdants.

Le droit en vigueur offre déjà un niveau très élevé de sécurité juridique puisque les parties peuvent choisir pour passer un contrat, hors le cas où l'acte authentique est obligatoire, de le faire établir par acte authentique, de s'adresser pour le rédiger à un professionnel du droit ou un autre professionnel autorisé par la loi de 1971, ou encore de dresser un acte sous seing privé sans intervention d'un tiers. Par conséquent, sur le fond, l'acte contresigné n'offrira pas de garanties supplémentaires en termes de sécurité juridique et en offrira même moins aux justiciables. C'est la raison pour laquelle nous demandons sa suppression.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

La discussion a déjà eu lieu. Avis défavorable.

(L'amendement n° 15 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

L'amendement n° 30 sera appelé après l'amendement n° 33 puisqu'il s'agit d'un amendement de conséquence qui modifie le titre du chapitre Ier bis.

Je suis saisi d'un amendement n° 16.

La parole est à M. Marc Dolez.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

L'amendement de suppression n'ayant malheureusement pas été adopté par notre assemblée, nous vous proposons un amendement de repli pour garantir une plus grande sécurité aux parties signataires de l'acte sous seing privé. En effet, pourquoi, dans le cas des actes notariés, la preuve pèserait-elle sur le notaire et, dans le cadre du contreseing de l'avocat, serait-elle à la charge des parties ? Où se situe l'intérêt des parties si, dans le cas d'un conseil insuffisamment ou mal donné, elles doivent en fournir la preuve ? Comme le souligne le Syndicat national des notaires, cet article crée un véritable déséquilibre dans le régime de l'administration de la preuve entre le devoir d'information de l'avocat qui contresignerait un acte sous seing privé et celui du notaire instrumentant dont le conseil ne s'attache pas aux seules conséquences juridiques d'un acte qu'il a même parfois le devoir de déconseiller.

Dans l'intérêt du justiciable et non dans le seul intérêt de l'avocat, nous proposons cet amendement qui énonce que « lors du contreseing d'un acte sous seing privé, l'avocat doit éclairer pleinement la ou les parties qu'il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte et attester par écrit de cette information ». Faute de quoi, l'avocat rédacteur de cet acte sera, au détriment de la clientèle, beaucoup plus difficilement attaquable que le notaire rédacteur d'un acte authentique.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

En effet.

De plus, par un formalisme excessif, cet amendement demande aux avocats de ménager la preuve écrite du conseil qu'ils ont délivré. Très sincèrement, cette obligation de conseil est clairement énoncée dans le texte proposé, qui s'appuie sur la déontologie de la profession. Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

L'objectif poursuivi est en fait déjà atteint par la rédaction actuelle du projet de loi. Je rappelle que la Cour de cassation, en application du décret de 2005 relatif aux règles déontologiques de la profession d'avocat et du règlement intérieur de la profession, considère sans ambiguïté qu'il revient à l'avocat de prouver qu'il a rempli son obligation légale. Votre amendement, monsieur Dolez, est satisfait.

(L'amendement n° 16 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je vous propose, monsieur Huyghe, de présenter ensemble les amendements n°s 29 et 31.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Je souhaite les soutenir l'un après l'autre, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

C'était pour vous être agréable. Mais vous avez la parole sur l'amendement n° 29.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

L'article 1er crée un nouvel acte, l'acte contresigné, dont la réalisation est confiée à l'avocat. Or réserver ce type d'acte à une seule profession est en contradiction avec les conclusions de la commission Darrois, qui inspirent pourtant ce projet de loi. Elles allaient en effet dans le sens de la création d'une véritable communauté de juristes. Il est donc paradoxal que la première disposition traduite dans la loi ne concerne qu'une seule profession. De nombreux professionnels sont autorisés par la loi du 31 décembre 1971 à donner des consultations juridiques et à rédiger des actes sous seing privé dont la valeur juridique n'est pas moindre que celle des actes établis par les avocats. Il est donc anormal qu'ils ne puissent pas les contresigner.

Cet amendement vise à autoriser l'ensemble des professionnels cités par la loi de 1971 – huissiers, notaires, mandataires liquidateurs, avoués, professeurs de droit – à s'engager, par leur contreseing, sur les actes qu'ils rédigent. Il concerne également des personnes qui pratiquent le conseil à titre accessoire, tels que les experts-comptables, compétents pour rédiger des contrats de travail ou des statuts de société.

L'amendement n° 29 n'a rien à voir avec l'accord signé par le Conseil supérieur du notariat, le Conseil national des barreaux et la Chancellerie – je prends mes précautions…– puisqu'il concerne des professions non signataires. Il vise à donner à ces dernières la possibilité de rédiger des actes contresignés. Une telle disposition serait conforme à la logique qui sous-tend la typologie des actes accessibles à nos concitoyens. Le premier est l'acte sous seing privé qui permet à des parties de signer librement une convention, parfois à partir d'un simple formulaire téléchargé sur internet. Le deuxième acte, l'acte contresigné, est établi par le professionnel qui a conseillé les parties, le contreseing valant engagement de responsabilité sur le contenu de l'acte. Enfin, le troisième acte est l'acte authentique avec toutes les garanties que nous lui connaissons.

Au nom de quoi l'acte contresigné devrait-il être réservé à une seule profession ? Les conseils prodigués par les professionnels du droit cités par la loi de 1971 ou les actes sous seing privé qu'ils sont autorisés à rédiger sont-ils de moins bonne qualité que ceux des avocats ? Refuser à ces professions la possibilité de donner leur contreseing est une façon de dévaloriser leurs compétences.

Je m'étonne que les avocats s'arc-boutent sur la volonté d'être les seuls titulaires du contreseing alors que, lors de leur assemblée générale extraordinaire de 2006, le Conseil national des barreaux réclamait la création d'un acte sous signature juridique ouvert à l'ensemble des professionnels du droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Après un long débat, la commission a repoussé cet amendement. L'article 1er est le fruit d'un long travail qui a abouti à un très bon équilibre. Il apparaît que la profession d'avocat est la plus adaptée pour mettre en oeuvre cette première procédure. Par conséquent, nous sommes défavorables à la possibilité de l'ouvrir à d'autres. Le rapport Darrois précise qu'il faut éviter que toutes les professions fassent tout.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Cet amendement va à l'encontre des dispositions du projet de loi. La loi du 31 décembre 1990 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques a précisé qu'il convenait que l'activité de rédaction des actes juridiques soit exercée sous le statut d'avocat compte tenu des exigences de ce dernier en termes d'expérience, de déontologie et de responsabilité. Ce sont les termes mêmes de la loi de 1990.

Je vous ai dit que je souhaitais que les professions travaillent mieux ensemble, chacune se recentrant sur son coeur de métier, là où il y a une formation, une spécialité. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Vous m'objectez l'existence d'un accord, madame la ministre. Pour ma part, je parle de professions qui ne sont pas parties à l'accord.

Si vous leur refusez le contreseing, il faut en tirer les conséquences : il faut modifier la loi de 1971 pour leur interdire de rédiger des actes sous seing privé. Ou alors on reconnaît qu'il y a des conseils de première zone, ceux qui ont le droit de contresigner leurs actes, et des conseils de seconde zone, ceux qui ne font que des actes sous seing privé de base.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

M. Huyghe ne tire pas toutes les conséquences de la loi de 1971 ; elle prévoit bien qu'un certain nombre de professions peuvent rédiger des actes, mais elle précise que c'est dans le cadre des activités définies par leurs statuts respectifs. Des professions rédigent des actes de façon habituelle, d'autres sont autorisées à le faire de manière accessoire à une autre activité. Par conséquent, si on les autorise dorénavant à rédiger des actes d'une manière très large, on ne respecte pas la loi de 1971.

Par ailleurs, il ne semble pas que l'accord doive être élargi à des professions qui, pour l'instant, n'ont rien réclamé. Les administrateurs judiciaires et les mandataires liquidateurs conviennent que ce n'est pas leur activité principale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Houillon

Il est de nombreux points sur lesquels j'aimerais répondre, mais je m'en tiendrai à une question technique qui disqualifie l'amendement de M. Huyghe.

M. Huyghe a cité l'exemple, que je reprendrai, des huissiers de justice. Imaginons qu'un huissier concoure à un acte, puis qu'un litige oppose deux ou plusieurs parties à cet acte. Puisque, comme vous le savez, l'huissier doit obligatoirement satisfaire à la réquisition dont il fait l'objet, il se trouverait alors confronté à un problème déontologique qui empêche d'envisager ce type de solution pour toutes les professions.

Voilà pourquoi, comme vient de le dire Mme la garde des sceaux, il faut recentrer chaque profession sur son coeur de métier.

(L'amendement n° 29 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 31.

La parole est à M. Sébastien Huyghe.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Je commencerai par répondre aux objections à l'amendement précédent, qui n'est pas sans rapport avec l'amendement n° 31 ce dernier étant de repli.

Tout d'abord, les membres des autres professions ne seraient évidemment autorisés à contresigner les actes sous seing privé que dans le domaine où ils sont déjà autorisés à les rédiger. Ainsi, la loi de 1971 sera respectée, la seule différence étant le contreseing. Il n'y a donc aucun problème, aucune contradiction.

Ensuite, monsieur Houillon, aujourd'hui, dans la pratique déontologique, les huissiers se déportent quand ils rédigent des actes sous seing privé,…

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

…, comme la loi de 1971 les y autorise. Vous dites qu'il faudra les amener à le faire ; mais le vote d'une loi est suivi de décrets d'application, et l'un de ces décrets pourra autoriser un huissier à se déporter.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

C'est le cheminement habituel : les lois sont suivies de décrets qui en permettent l'application. Je le répète, cela ne pose aucun problème.

J'en viens à l'amendement n° 31, amendement de repli qui étend la possibilité de contresigner les actes aux seuls professionnels exerçant le droit à titre principal, puisque l'on m'a objecté que le champ serait trop large si l'on y incluait ceux qui l'exercent à titre accessoire. Pourquoi ne pas reconnaître la qualité de leur travail et leur engagement auprès de leurs clients, à l'égal des avocats ?

La loi de 1971 autorise déjà les huissiers de justice à rédiger des baux pour leurs clients. Je viens de le dire, leur pratique déontologique leur interdit le cas échéant d'instrumenter pour les mêmes parties ; ils se déportent alors vers un confrère. Si on craint qu'ils ne le fassent pas, il suffit de modifier le décret.

D'autre part, contrairement à ce que j'ai entendu, l'extension des actes contresignés ne fragiliserait absolument pas l'acte authentique, puisqu'elle ne concernerait que le domaine propre où les professionnels de chaque catégorie interviennent déjà et où ils pourraient alors engager leur responsabilité par leur signature.

J'ajoute qu'en visant les articles 56 et 57 de la loi de 1971, l'amendement autorise également les professeurs de droit, qui établissent déjà des actes juridiques, à les contresigner.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

J'ai déjà cité, outre la loi de 1971, celle de 1990.

Avis défavorable.

(L'amendement n° 31 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 25.

La parole est à M. Sébastien Huyghe.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Nous proposons de supprimer l'alinéa 5, qui donne pleine foi d'écriture et de signature à l'acte contresigné.

L'amendement tire les conséquences de ma précédente démonstration. En effet, l'avocat ne dispose d'aucune délégation de puissance publique pour donner pleine foi à l'écriture et à la signature de l'acte contresigné.

L'alinéa 5 pose donc de sérieux problèmes. Il introduit une confusion entre l'acte authentique et l'acte contresigné. En outre, il prive le justiciable d'un droit, celui de contester sa signature, sans qu'aucune délégation de puissance publique de la part de l'État ne vienne justifier cette privation.

Il s'agit d'un véritable problème constitutionnel : on ne peut priver nos concitoyens d'un droit ou de la possibilité d'un recours que dans un cadre strict où l'État leur apporte sa protection. Ce n'est manifestement pas le cas s'agissant de l'acte contresigné, puisque l'avocat n'est soumis à aucun contrôle de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Selon M. Huyghe, il y aurait une confusion entre l'acte authentique et l'acte contresigné. Mais le débat a montré qu'il n'en était rien.

L'alinéa 5 définit l'acte contresigné : le supprimer reviendrait à vider le dispositif de sa substance. La rédaction de l'article est très précise, afin d'éviter toute confusion avec l'acte authentique.

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

L'amendement procède d'une mauvaise compréhension des dispositions de l'article 1er, mais aussi d'une confusion entre la procédure de vérification d'écriture et la procédure de faux.

Il ne peut donc absolument pas être accepté : avis défavorable.

(L'amendement n° 25 n'est pas adopté.)

(En conséquence, l'amendement n° 27 tombe.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 26 rectifié.

La parole est à M. Sébastien Huyghe.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Il s'agit d'un amendement de repli, qui porte toujours sur l'alinéa 5.

Il permet de préserver le droit de recours de nos concitoyens, droit à valeur constitutionnelle que j'évoquais tout à l'heure. En effet, il s'agit, sans conférer à l'avocat de prérogative de puissance publique, d'inverser la charge de la preuve en prévoyant une présomption simple d'écriture et de signature.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Cet amendement réduit de fait l'acte contresigné à un acte sous seing privé classique. Il permettrait de dénoncer les signatures aussi facilement que pour tout autre acte sous seing privé.

Or cet acte a précisément l'intérêt d'apporter une double sécurité juridique à nos concitoyens : par le conseil du professionnel du droit et par les garanties qui entourent la signature du document. En remettant en cause l'un de ces aspects, on ferait donc perdre à l'acte une grande part de son intérêt.

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Il reste la garantie de l'avocat, du conseil donné et de la responsabilité engagée : ce n'est pas rien.

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Simplement, l'acte ne fait pas pleine foi ; il n'a donc pas, j'en conviens, la valeur probatoire de l'acte authentique. Mais les garanties que j'ai mentionnées demeurent.

(L'amendement n° 26 rectifié n'est pas adopté.)

(En conséquence, les amendements n°s 28, 33 et 30 tombent.)

(L'article 1er est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 17.

La parole est à M. Michel Vaxès.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Selon le Conseil national des barreaux, la concurrence pouvant s'exercer au bénéfice des consommateurs en l'absence de tarifs imposés, l'acte d'avocat sera moins onéreux qu'un acte authentique, tout en renforçant véritablement la sécurité du client.

Pourtant, l'acte contresigné entraînera nécessairement une augmentation des coûts pour le justiciable. D'abord, parce que les assurances exigeront une augmentation des primes pour les avocats qui dresseront de tels actes ; ensuite, parce qu'on incitera en pratique les parties à se faire représenter par leur propre avocat lors de la rédaction de l'acte contresigné.

Du reste, les avocats auront le monopole du contreseing des actes sous seing privé, dont le champ d'application sera particulièrement large, selon l'étude d'impact et les informations fournies par le Conseil national des barreaux. Ces actes concerneront des contrats aussi divers que les baux, les contrats de travail ou les contrats de prêt.

Or, contrairement à ce qui caractérise la procédure d'établissement d'un acte authentique, le projet de loi ne donne aucune indication sur le tarif de l'intervention de l'avocat, pourtant monopolistique. Par cet amendement de repli, nous vous demandons de pallier cette insuffisance, dans l'intérêt du justiciable et aux fins de prévisibilité des coûts et d'accessibilité du droit. Il s'agit non d'aggraver la confusion entre l'acte d'avocat et l'acte authentique, mais de servir l'intérêt du justiciable.

Au demeurant, comme le disait Jean-Louis Gallet, conseiller à la Cour de cassation, il paraît indispensable de définir et d'évaluer la nécessité de cet acte intermédiaire pour les membres de la société civile, en ayant à l'esprit le fait que, si les prestations sont identiques, la déontologie, les obligations professionnelles, les contraintes et le contrôle doivent sans doute l'être également.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

D'abord, il me semble que l'on ne peut fixer de tarifs à une profession dont les honoraires sont libres ; ce serait même contraire aux règles de la concurrence.

Ensuite, n'oublions pas que le recours à l'acte contresigné est facultatif : c'est aux parties de décider de faire appel ou non à un avocat.

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Même avis.

On ne peut soutenir que l'intervention soit monopolistique puisqu'elle est facultative. En outre, les avocats ne sauraient s'entendre sur leurs honoraires. On ne peut donc fixer un tarif.

(L'amendement n° 17 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 10.

La parole est à Mme George Pau-Langevin.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

À nos yeux, l'accès au droit est essentiel, notamment la possibilité, pour des particuliers, d'être conseillés à un tarif acceptable ou à titre gratuit. C'est ce qui leur assurera une plus grande sécurité lorsqu'ils s'adresseront à des professionnels pour rédiger des actes.

Dans cette optique, les maisons de la justice et du droit et les points d'accès au droit représentent une avancée très intéressante pour les particuliers. Notre rencontre avec leurs responsables à Paris nous l'ont confirmé.

Nous souhaitons donc que l'on fasse le point sur ce qui existe et que l'on étudie les moyens de développer et de généraliser les maisons de la justice et du droit, ainsi que les points d'accès au droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Ce sujet est très intéressant, mais il est quelque peu éloigné de notre débat, où les maisons de la justice n'ont pas tout à fait leur place.

Cela étant, à la suite de l'examen de cet amendement en commission des lois, le président Warsmann a proposé à la commission, qui a accepté cette proposition, de créer une mission d'information sur l'accès au droit et à la justice.

Je vous invite donc à retirer votre amendement, madame la députée, comme vous en aviez évoqué l'éventualité en commission.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je suis très favorable à ce que le fonctionnement des maisons de la justice et du droit fasse l'objet d'un rapport dans quelques mois. Nous avons besoin d'un peu de recul, car il s'agit d'une création récente. Mais, à la fin de l'année 2010, je serai en mesure de vous transmettre un rapport, d'autant plus bienvenu que nous devrons également décider de reconduire ou non certaines expériences.

L'amendement n'ayant pas de rapport direct avec le texte, il serait préférable, madame Pau-Langevin, que vous le retiriez. En contrepartie, je le répète, je m'engage à vous transmettre ce rapport dans le courant de l'automne, une fois que nous disposerons du recul nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Étant donné l'engagement de Mme la ministre et la perspective de la mission sur l'accès au droit, j'accepte de retirer mon amendement.

(L'amendement n° 10 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Je rejoins Mme Pau-Langevin. J'ai parlé à la tribune de l'aide juridictionnelle. Nous souhaiterions tirer, dans ce domaine également, les leçons de l'expérience – avant le 31 décembre 2011 plutôt qu'avant le 31 décembre 2010, contrairement à ce qu'indique l'amendement.

Il s'agirait d'étudier la traduction concrète de l'acte contresigné, voire d'y étendre l'aide juridictionnelle. Pourquoi pas, madame la ministre ? Vous hochez la tête. Qu'en sera-t-il dans le cas de l'acte contresigné par un avocat ? La rémunération ne sera pas fixée, et l'on peut imaginer que, pour certains actes importants, les honoraires demandés aux contractants ou aux cocontractants ne seront pas négligeables. Il y a des citoyens ayant besoin de cet acte juridique qui pourraient avoir des difficultés à rémunérer leur avocat.

Il serait donc intéressant de disposer d'une évaluation de ce dispositif au bout d'un an afin de savoir notamment si l'aide juridictionnelle pourrait s'appliquer à d'autres actes.

Toutefois, je suis prêt à retirer cet amendement car je pense que nous aurons l'occasion d'en reparler. Reste qu'il ne faut pas laisser de côté cette possibilité d'étendre l'aide juridictionnelle à la rédaction d'actes contresignés par avocat.

(L'amendement n° 9 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi de deux amendements de précision de la commission, n° 36 et n° 37.

(Les amendements n° 36 et n° 37, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 38.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Favorable.

(L'amendement n° 38 est adopté.)

(L'article 1er bis, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 18.

La parole est à M. Marc Dolez.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Cet amendement vise à supprimer l'article 2, qui est à mettre en relation avec l'article 21 sur lequel je me suis longuement appesanti en défendant la motion de rejet préalable. L'article 2 comme l'article 21 tendent à favoriser une interprofessionnalité de nature capitalistique au sein des professions du droit.

Pour satisfaire les exigences de la directive « services » transcrite dans notre droit au mois de décembre dernier, ces articles ont pour objet d'ouvrir la porte des sociétés de participations financières de professions libérales, et par filiation des sociétés d'exercice libéral, à des capitaux extérieurs, étrangers à la culture, à la déontologie, aux statuts et aux pratiques des officiers publics que sont les notaires et les huissiers de justice, lesquels, je vous le rappelle, sont exclus du champ d'application de la directive.

Cet article visant à favoriser la concurrence internationale en permettant aux avocats étrangers et donc aux grands groupes anglo-saxons d'imposer leur hégémonie en France au détriment des professionnels du droit français et des justiciables, nous en demandons la suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Avis défavorable. Contrairement à ce qu'indique l'exposé sommaire de cet amendement, l'article 2 ne participe pas de « l'ère d'hyperconcurrentialisation sur le marché du droit au détriment des justiciables » mais tend à faire en sorte que les cabinets français disposent des mêmes atouts que leurs homologues étrangers. Donnons à nos cabinets les moyens de se battre à armes égales. Supprimer cet article aboutirait au contraire à les condamner davantage.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je veux développer à l'étranger et notre droit continental, et la capacité de nos cabinets à agir. Je ne peux donc qu'être défavorable à cet amendement de suppression.

(L'amendement n° 18 n'est pas adopté.)

(L'article 2 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 19, portant article additionnel après l'article 2.

La parole est à M. Michel Vaxès.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement, au plus tard le 6 avril 2011, un rapport sur la proposition de création d'un internat du barreau ayant pour mission d'assurer la défense civile et pénale des personnes éligibles à l'aide juridictionnelle.

Madame la garde des sceaux, vous vous étiez engagée à mettre en place à la mi-2010 un système à même de répondre, dans la durée, aux besoins des justiciables les plus démunis.

Cette proposition de création d'un internat du barreau, qui reprend une recommandation de Me Soulez Larivière, permettrait de résoudre les difficultés actuelles en mettant à la disposition des plus démunis des avocats qui se consacreraient exclusivement à leur défense, des avocats sélectionnés parmi les meilleurs car nous ne saurions accepter que les ressources soient un critère déterminant dans la qualité de la défense.

Aujourd'hui, les avocats qui traitent les dossiers relevant de l'aide juridictionnelle travaillent dans des conditions qui ne sont pas acceptables : ils sont payés peu et avec des mois de retard et nombre d'entre eux font acte de militantisme en prenant ces dossiers en plus de leur charge de travail habituelle dans leur cabinet. Ils ne cessent de le dire : une simple revalorisation ne suffit pas. Ce dont ont besoin la justice et les justiciables concernés, c'est une grande réforme de l'aide juridictionnelle. La création d'un internat du barreau participerait de cette réforme.

Sans entrer dans le détail – le moment n'est pas venu –, il s'agirait de créer un concours ouvert aux avocats titulaires du CAPA depuis de moins de cinq ans. Ils seraient ensuite affectés dans les barreaux en fonction des besoins de chacun d'entre eux et se consacreraient exclusivement à la défense des personnes éligibles à l'aide juridictionnelle, pour une durée de cinq ans pendant laquelle ils seraient payés dans les mêmes conditions que les magistrats.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Il y aura bientôt un débat sur l'aide juridictionnelle. Je ferai alors des propositions et nous pourrons reparler de votre suggestion.

Pour l'heure, l'avis du Gouvernement est défavorable.

(L'amendement n° 19 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi de deux amendements de précision de M. Nicolin, nos 39 et 40.

(Les amendements n°s 39 et 40, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)

(L'article 2 bis, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

La parole est à Mme George Pau-Langevin, inscrite sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

L'acte authentique étant le seul à donner lieu à des formalités de publicité foncière, il n'y a pas d'assimilation possible avec l'acte contresigné par avocat. Je le dis à l'intention de M. Huyghe, qui a exprimé des inquiétudes à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 55 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Cet amendement vise à instaurer le virement comme règle de base pour les transactions immobilières afin d'éviter le chèque de banque, souvent coûteux, et de sécuriser les versements internationaux.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Favorable.

(L'amendement n° 55 rectifié est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 20.

La parole est à M. Michel Vaxès.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Cet amendement est défendu.

(L'amendement n° 20, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 5 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 12.

La parole est à Mme George Pau-Langevin.

Debut de section - PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Comme nous l'avons souligné dans la discussion générale, la difficulté pour nous est la nouvelle procédure proposée pour le PACS. Je ne dis pas qu'il soit impossible d'imaginer des conventions de PACS rédigées par des notaires, car ils ont toutes les compétences requises, mais j'estime que ce dispositif aurait mérité un débat plus approfondi. Cette évolution ne correspond pas à ce que demandent les associations, qui souhaitent voir confier la conclusion d'un PACS aux officiers d'état civil dans les mairies.

En l'état actuel des choses, la modification proposée nous semble donc prématurée.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Cette question relève d'un débat plus vaste : ce n'est pas l'objet de notre discussion d'aujourd'hui. À droit constant, nous essayons de simplifier les procédures pour les partenaires d'un PACS. J'ajoute que le surcoût lié à cette modification est extrêmement modique. La rédaction d'une convention est aujourd'hui tarifée à 182 euros et il s'agirait seulement de 10 euros supplémentaires, sans que les gens aient à se déplacer.

Je le répète, dans l'état actuel du droit, il s'agit d'une avancée. C'est la raison pour laquelle je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, l'avis du Gouvernement sera défavorable.

(L'amendement n° 12 n'est pas adopté.)

(L'article 6 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 13.

La parole est à M. Jean-Michel Clément.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Clément

Cet amendement entend corriger une situation un peu douloureuse vécue par certains de nos citoyens. Il vise à établir un parallélisme des formes entre personnes mariées et personnes pacsées.

Le PACS est mentionné en marge de l'acte de naissance de chaque partenaire mais pas de l'acte de décès. L'article 79 du code civil précise en son 4° que « l'acte de décès énoncera les prénoms et nom de l'autre époux, si la personne décédée était mariée, veuve ou divorcée » mais ne précise rien de tel pour les personnes pacsées.

Nous proposons donc d'ajouter un 4° bis à cet article pour que soient mentionnés les prénoms et nom de l'autre partenaire si la personne décédée était pacsée. Cette modification permettrait au partenaire survivant d'un PACS de faire valoir ses droits.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Cette proposition nous paraît un peu hors sujet.

Par ailleurs, la mention du partenaire d'un PACS dans l'acte de décès d'une personne n'apportera rien de plus, de mon point de vue, au partenaire survivant, qui peut facilement prouver qu'il était lié par un PACS à la personne décédée.

Enfin, la notion de « personne pacsée » n'existe pas en droit. L'amendement est mal rédigé.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Avis défavorable également. Ce n'est pas le lieu d'introduire une telle modification. Cela dit, nous pourrons avoir un autre débat à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Dire et répéter que ce n'est pas le lieu d'aborder cette question est la meilleure manière de l'éluder. Nous avons connu des textes où des articles additionnels ont été introduits qui n'avaient pas grand-chose à voir avec le fond du sujet et qui ont quand même été votés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Oui, ce sont des cavaliers.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Je ne vais pas reprendre ce qu'a dit excellemment Jean-Michel Clément. J'indiquerai seulement que je ne vois pas pourquoi on ferait deux poids deux mesures entre personnes mariées et personnes pacsées. Où est le problème ?

Cela me paraît être, au contraire, l'occasion ou jamais d'introduire cette modification technique. De plus – pardonnez-moi l'expression –, elle ne mange pas de pain. Elle paraît tellement évidente que personne n'y trouvera à redire. Profitons de ce texte pour compléter l'article 79 du code civil.

(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 42.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Il s'agit d'un amendement de précision.

(L'amendement n° 42, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 8 bis, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

À l'article 9, je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 21.

La parole est à M. Michel Vaxès.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

La caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires, la CRPCEN, connaît de vraies difficultés. Cela étant, instaurer une cotisation sur les pensions de retraite servies par la caisse est un choix d'une iniquité flagrante.

En effet, malgré leur augmentation en janvier 2010, les cotisations employeurs restent grandement insuffisantes. Du reste, l'intersyndicale CFDT-CFE-CGC-CGT note que, malgré cette iniquité, le problème de l'équilibre financier de la CRPCEN demeure puisque les décisions du conseil d'administration ont volontairement laissé subsister un déficit de l'ordre de 100 millions d'euros, qui représente près de 15 % du montant total des pensions en cours !

La seule solution serait un retour rapide à l'équilibre par un recours équitable aux ressources pour ne pas remettre en cause le montant des pensions. L'intersyndicale a tiré les conséquences de cette situation et a demandé que deux mesures urgentes soient prises : la mise à niveau des cotisations des employeurs, non réalisée par le décret du 30 décembre 2009 ; la constitution de ressources par la cotisation sur émoluments, en contrepartie de la diminution puis de la suppression de la compensation spécifique vieillesse entre régimes spéciaux.

Nous espérons que, comme le demande l'intersyndicale, l'ensemble des partenaires sociaux seront associés aux prochaines négociations.

Dans cette attente, nous demandons la suppression de l'article 9, qui s'attache à atteindre l'objectif que s'est fixé le Gouvernement de ne jamais tendre à une meilleure répartition des richesses.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Même avis.

(L'amendement n° 21 n'est pas adopté.)

(L'article 9 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Sur l'article 10, je suis saisi par M. Nicolin d'un amendement n° 43, qui est de précision.

(L'amendement n° 43, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 44.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Le dispositif proposé permet de renforcer les mesures de prévention pour les entreprises en difficulté. Le rejet de cet amendement risquerait de renforcer la frilosité des chefs d'entreprise à aller volontairement vers les procédures qui permettent de sauver ce qui peut l'être. Cette possibilité donne de la souplesse et apporte de la confidentialité. Voilà pourquoi la commission a accepté cet amendement.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Si cet amendement était accepté, risqueraient d'échapper à toute sanction les infractions découvertes dans des domaines aussi sensibles que les procédures amiables applicables aux entreprises en difficulté, où l'intervention du ministère public est des plus réduites, ou encore l'administration de sociétés ou de copropriétés en difficulté. Je pense que l'opinion publique ne le comprendrait pas.

Par ailleurs, l'obligation de révélation imposée par le code de procédure pénale est liée à un statut ou à une profession et non pas à des activités. Dès lors, il est incohérent de la prévoir par éclipses. Voilà pourquoi, monsieur le rapporteur, je ne peux pas être favorable à cet amendement qui ne serait pas compris. Je vous demande de le retirer.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 56 rectifié, portant article additionnel après l'article 10.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Cet amendement habilite le conseil des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires à mettre en place une plate-forme nationale de dématérialisation sécurisée.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Le dispositif que vous proposez n'a pas été suffisamment étudié.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Peut-être, en effet, n'a-t-il pas été assez travaillé. Cela dit, repousser sa mise en application d'une année permettrait de motiver tout le monde.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur le rapporteur, je partage pleinement votre objectif. Mais nous sommes dans un domaine du droit extrêmement sensible. Les actes concernés entraînent des droits ou des déchéances pour les parties prenantes, et en particulier pour les créanciers.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

La voie dématérialisée doit garantir le plus haut niveau possible de sécurité juridique. Ce n'est pas vous, c'est moi qui suis en retard à ce propos. J'ai besoin d'une expertise, que je n'ai pas encore eu le temps d'organiser. Voilà pourquoi je vous demande, monsieur le rapporteur, de retirer cet amendement, tout en vous garantissant qu'en deuxième lecture je vous donnerai des précisions.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Les articles 11 à 18 ne font l'objet d'aucun amendement.

(Les articles 11 à 18, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Sur l'article 19, Je suis saisi d'un amendement n° 22.

La parole est à M. Marc Dolez.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Monsieur le président, si vous en êtes d'accord, je défendrai en même temps l'amendement n° 23 à l'article 20.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Je m'en doutais.

Les articles 19 et 20 visent respectivement à supprimer la solidarité entre associés de sociétés civiles professionnelles et entre associés de sociétés de participations financières de professions libérales.

La suppression de la solidarité entre les associés à l'égard des tiers est particulièrement inappropriée au regard de la sécurité qu'elle apporte aux clients. C'est dans cet esprit d'ailleurs que le Syndicat national des notaires développe un argumentaire que je reprends volontiers ici :

« La suppression de la solidarité entre les associés à l'égard des tiers pourrait paraître inopportune sur le plan de l'image de la profession notariale et de la sécurité qu'elle apporte à ses clients. Cette suppression ne donnerait-elle pas, en effet, l'impression à la clientèle d'une diminution de la protection que le notariat lui réservait jusqu'alors ? Cette suppression serait également trompeuse puisqu'en réalité, d'un point de vue juridique, elle serait peu décisive. En effet, la jurisprudence permet au requérant de mettre indifféremment en cause la responsabilité civile professionnelle, soit du seul notaire fautif, soit de la SCP dans laquelle il détient des parts. La SCP serait donc elle-même susceptible d'être condamnée à l'égard des tiers. Dès lors, tous les associés restant tenus indéfiniment des dettes sociales pourraient être obligés au paiement de l'indemnité mise à la charge de la SCP et non pas seulement le notaire fautif. »

C'est la raison pour laquelle l'amendement n° 22 vise à supprimer l'alinéa 8 de l'article 19 et l'amendement n° 23 l'alinéa 10 de l'article 20.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Conformément aux propositions du rapport sur les professions du droit remis en mars 2009, le projet de loi se borne à faire entrer le régime de responsabilité des associés de SCP dans le droit commun de la responsabilité conjointe. Il n'en résultera pas un affaiblissement des garanties pour les justiciables puisque les professions juridiques et judiciaires répondent à des règles de responsabilité collective via leur instance représentative. La commission est donc défavorable à ces amendements.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je partage pleinement l'analyse du rapporteur.

J'ajoute que les SCP sont des sociétés civiles. Or ce type de société est en principe régi par le mécanisme de la responsabilité conjointe et non de la responsabilité solidaire. Pour ces deux raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

(L'amendement n° 22 n'est pas adopté.)

(L'article 19 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

L'amendement n° 23 a été défendu.

(L'amendement n° 23, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 20 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Sur l'article 21, je suis saisi d'un amendement n° 24.

La parole est à M. Michel Vaxès.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Cet amendement vise à supprimer les alinéas 4 à 12 de l'article 21.

Ces alinéas prévoient expressément la possibilité, pour les membres des SPFPL, de détenir des actions ou des parts dans les SEL « ayant pour objet l'exercice de deux ou plusieurs des professions d'avocat, de notaire, d'huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire », concrétisant ainsi, de manière décisive, la possibilité d'une interprofessionnalité capitalistique.

Parce que cette faculté n'est envisagée que pour ouvrir le marché du droit à la concurrence, et non pas dans l'intérêt du justiciable, nous demandons la suppression des nouveaux articles 31-1 et 31-2 de la loi du 31 décembre 1990.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Même avis.

(L'amendement n° 24 n'est pas adopté.)

(L'article 21 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

À l'article 23, je suis saisi par M. Nicolin de huit amendements, nos 45 à 52.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Avis favorable.

(Les amendements nos 45 à 52, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

(L'article 23, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Je suis saisi d'un amendement n° 53.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Favorable.

(L'amendement n° 53 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

L'amendement n° 54 de M. Nicolin est rédactionnel.

(L'amendement n° 54, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 24, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi.

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et les votes par scrutin public sur l'ensemble du projet et de la proposition de loi auront lieu le mercredi 30 juin, après les questions au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Prochaine séance, aujourd'hui, à neuf heures trente :

Questions orales sans débat.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 24 juin 2010, à une heure quarante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma