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Séance en hémicycle du 22 octobre 2008 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009 (nos 1127, 1198).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

J'appelle, dans le texte du Gouvernement, les articles de la première partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 129 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, mes chers collègues, en ce début de soirée, nous sommes pleins d'enthousiasme – et je vois madame Lagarde pleine d'optimisme. Vous avez raison, puisque la Bourse de Paris a encore chuté de cinq points... Heureusement que vous aviez dit : « La confiance est revenue. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous croyez ? Vous êtes vraiment dans l'aveuglement de la foi ! Même Benoît XVI est plus ouvert que vous sur la réalité, il est moins dans la croyance obtuse. (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Monsieur Brard, vous étiez censé parler de l'amendement n° 129

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

En effet, monsieur le président, mais nous ne nous éloignons guère de notre sujet : il faut bien trouver comment établir un dialogue avec des gens qui sont autistes et qui ont la foi du charbonnier.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Et c'est un communiste qui dit cela ! C'est la meilleure !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Revenons à notre amendement.

Depuis plusieurs années, et quoi qu'en dise M. Woerth, nous assistons à un recul préoccupant de la justice fiscale, à un recul des principes républicains, à un recul connexe de la réduction des inégalités, autant de contradictions avec la Déclaration des droits de l'homme de 1789. Rappelons que, avant les réformes intervenues sous la précédente législature – réduction du nombre de tranches de l'impôt sur le revenu, d'une part, mise en place du bouclier fiscal, d'autre part –, l'impôt sur le revenu intervenait encore pour 38 % dans la réduction des inégalités constatées. Tel n'est plus le cas aujourd'hui.

Ajoutons que votre politique s'est traduite par l'accumulation sans précédent des niches fiscales. Affichant la plus ferme résolution, vous affirmez que vous allez les combattre. C'est aussi crédible que lorsque vous dites que vous allez combattre les paradis fiscaux... Des mesures fiscales dérogatoires ont contribué à miter et à pervertir l'impôt sur le revenu au point de permettre à certains contribuables, parmi les plus aisés, d'annuler dans les faits leur impôt – chacun a en mémoire l'héritière des Galeries Lafayette.

La commission des finances s'est penchée sur le problème. Le rapport de juin 2008 a permis de dresser le constat du coût budgétaire faramineux des niches fiscales : 73 milliards d'euros en 2008, dont 34,2 milliards pour le seul impôt sur le revenu. Que 100 000 contribuables réduisent leur impôt chacun en moyenne de 15 240 euros et que, parmi eux, cent parviennent à le rogner de 1,132 million d'euros – chacun ! – voilà qui ne semble pas vous émouvoir outre mesure. L'idée d'un plafond général des niches fiscales a donc refait surface. Le fait est révélateur du dévoiement de l'impôt sur le revenu, d'une rupture avec le principe affirmé par l'article XIII de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, selon lequel tous les citoyens contribuent « en raison de leurs facultés ».

Par-delà le nécessaire débat sur les choix qu'il faudra opérer en manière de plafonnement et sur les modalités techniques de ce dernier, sur lesquelles nous reviendrons car elles intéressent la question du rétablissement de la progressivité de l'impôt, une première mesure utile serait de revoir à la hausse le nombre de tranches de l'impôt sur le revenu, de revenir à des modes de calcul équitables et profitables à tous, et non seulement, comme vous le faites, aux plus riches. Tel est le sens de l'amendement n° 129 que nous défendons avec conviction et par principe, même si, je le sens bien, il faudra que nous multipliions encore nos efforts pour parvenir à vous convaincre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur Brard, nous avons eu ce débat il y a trois ans et la réforme de l'impôt sur le revenu, qui est entrée en vigueur en 2007, n'en a pas altéré la progressivité ; elle s'est, au contraire, efforcée de la préserver. Ainsi, 10 % des ménages acquittent 70 % de l'impôt : c'est est bien la preuve qu'il est progressif. Il est vrai que l'on peut échapper à la progressivité par le biais de la défiscalisation grâce à des mécanismes de déplafonnement. Or, lorsque, dans trois semaines, nous aborderons la seconde partie du projet de loi de finances, nous introduirons un plafond sur les quatre niches fiscales qui n'en ont pas, l'impôt sur le revenu sera redevenu « pur » et parfaitement progressif.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le ministre du budget, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 129 .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Même avis que la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce que le rapporteur général affirme avec une telle conviction ne correspond pas à la réalité. S'il le permet, je vais prendre mon exemple personnel : il vous prouvera que, du fait de la défiscalisation, il n'est pas vrai que la progressivité soit maintenue. Je n'ai, pour ma part, jamais fait de la politique pour l'argent et, sur les bancs où je siège, les députés ont toujours été payés comme un ouvrier hautement qualifié de la métallurgie en région parisienne. Tout en ayant pris quelque espace avec le parti communiste français, j'ai continué de m'appliquer cette règle. Je reverse donc une partie de ce que je perçois. Or je viens de recevoir de votre administration, monsieur Woerth, un chèque de plus de 4 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Non, monsieur le rapporteur général, c'est le résultat de la défiscalisation. J'ai 2 700 euros nets par mois pour vivre, plus le salaire de ma femme, et voilà qu'on me rend 4 000 euros : vous trouvez cela normal ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Moi, je n'investis pas contre l'intérêt du peuple français : c'est la différence avec certains de nos collègues. Je ne boursicote pas. Il faut vivre de son travail, un point, c'est tout.

Ne nous dites pas que vous avez maintenu la progressivité de l'impôt : ce n'est pas vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Cela doit être de la fraude fiscale...

(L'amendement n° 129 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 130 .

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Nous vous proposons de relever le taux des deux plus hautes tranches de l'impôt sur le revenu et de rétablir le taux marginal afin de revenir à davantage de justice fiscale. On voit bien à quoi l'on aboutit lorsqu'on favorise des revenus qui – contrairement à ceux de mon collègue Brard – se réfugient dans les opérations spéculatives. Il est urgent de s'attacher à rétablir une vraie progressivité de l'impôt.

La montée des inégalités dues aux allégements successifs de la fiscalité du patrimoine et à la mise en oeuvre de mesures iniques, tel le bouclier fiscal, appelle une réforme en profondeur de notre fiscalité. Mais la volonté désormais affichée par le Gouvernement de s'attaquer au dossier du plafonnement des niches fiscales nous laisse sceptiques, car, si ce plafonnement se limite aux réductions et crédits d'impôt, comme cela semble devoir être le cas, il restera sans effet en termes de limitation de la défiscalisation et de baisse de la dépense fiscale. Les premiers effets du paquet fiscal, dont le bénéfice, à l'instar des mesures fiscales adoptées sous la précédente législature, est concentré sur une minorité de contribuables, les effets pervers du mécanisme du revenu fiscal de référence, qui aboutissent à faire payer davantage d'impôt sur le revenu et de taxes d'habitation aux bénéficiaires de la PPE effectuant des heures supplémentaires, tout cela invite à sortir du bricolage et à revenir à une conception claire de la notion de progressivité, loin des effets d'annonce.

(L'amendement n° 130 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 2 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 153 , tendant à insérer un article additionnel après l'article 2.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Dans le langage populaire, on dit que c'est au pied du mur qu'on voit le maçon. Je ne sais pas si M. Woerth a déjà manié la truelle, mais l'occasion va lui être donnée de traduire en actes ce qu'il affirme sur toutes les antennes. Notre amendement lui fournit en tout cas une occasion de concrétiser sa volonté si souvent affirmée de réduire le nombre et le coût des niches fiscales.

L'importance de ces niches est l'un des grands problèmes de nos finances publiques : elles représentent, sous les formes les plus diverses, un total de 73 milliards d'euros pour 2008 – encore ce montant est-il en augmentation permanente et rapide. Nombre de ces niches constituent des privilèges fiscaux économiquement injustifiés et moralement injustes. On voit d'ailleurs bien ce que les gens qui sont riches ont fait de cet argent : ils ont spéculé.

L'accumulation de ces privilèges a pour conséquence de dispenser du paiement de l'impôt sur le revenu certains contribuables parmi les plus riches. Le dispositif d'amortissement dit Robien a été créé, nous a-t-on dit, pour un excellent motif, le soutien de l'investissement locatif. À l'époque, nous n'avions pas été convaincus et la suite, hélas ! nous a donné raison : au lieu d'être un soutien à l'investissement locatif, de manière à répondre aux besoins en logement de la population, ce régime d'amortissement est avant tout un produit fiscal et financier qui contribue à alimenter la crise du logement et la flambée des loyers. Didier Migaud se rappelle certainement que ce dispositif Robien a quelques liens de parenté avec le dispositif Pons pour les DOM-TOM. Ce dispositif Robien permet à des investisseurs de payer moins d'impôts, de loger des ménages aux revenus souvent très confortables, voire, de plus en plus souvent, de créer de la vacance. Il est donc possible d'économiser 400 millions d'euros qui seraient beaucoup plus utiles pour stimuler l'emploi au moment où il replonge.

Le rapporteur général nous dit que ce dispositif figure dans le plafonnement, mais ce que nous proposons est beaucoup mieux : ce n'est pas le plafonnement de cet avantage, mais sa suppression pure et simple. Si nous avons bien compris la logique du Gouvernement, nous allons vers un déficit extraordinaire : ces 400 millions qui resteraient dans les caisses de l'État seraient les bienvenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Défavorable. Le dispositif Robien est inspiré du dispositif Besson, lui-même lointain héritier du dispositif Quilès : c'est dire la continuité de nos efforts à tous pour favoriser l'investissement locatif !

Le dispositif Robien a d'ailleurs fait la preuve de son efficacité : pour 300 000 logements construits chaque année voici une décennie, il s'en construit plus de 400 000 aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il est un fait que l'investissement locatif a permis de détendre le marché du logement. Certes, environ 2 % des opérations dites Robien répondaient à une intention fiscale davantage qu'à un besoin de logement. Nous le reconnaissons, et c'est pourquoi la loi sur le logement que nous discuterons bientôt permettra de supprimer le dispositif Robien dans les zones C, qui sont les moins tendues. De surcroît, c'est précisément aujourd'hui, alors que le marché immobilier est en difficulté, qu'il faut soutenir le logement.

J'ajoute à l'attention de M. Brard, si préoccupé par l'encadrement des dispositifs fiscaux, que la commission des finances travaille à proposer un dispositif de plafonnement global des niches fiscales, y compris les dispositifs Robien et Borloo.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Même avis. Je confirme les propos de M. le rapporteur général, qui connaît parfaitement son sujet. Le dispositif Robien, qui a déjà une longue histoire, a démontré son efficacité. Il a été remanié dans la loi sur le logement que présente en ce moment Mme Boutin.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Avec un certain succès, en effet. Le recentrage de ce dispositif sur les zones en tension permet de répondre aux critiques qui lui furent un temps faites.

(L'amendement n° 153 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous en venons à l'amendement n° 227 , sur lequel je suis saisi par le groupe Nouveau centre d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte du Palais.

La parole est à M. Charles de Courson, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

L'amendement n° 227 est inspiré par la dérive de certaines sentences arbitrales relatives aux préjudices moraux. Jusqu'ici, les magistrats professionnels français avaient pour coutume d'accorder pour préjudice moral des sommes ne dépassant pas 50 000 euros – de l'ordre de 30 000 à 50 000 pour les victimes de l'amiante, et de 10 000 à 30 000 pour les victimes d'accidents de la route, par exemple.

En tant que dommages, ces sommes étaient naturellement non imposables. Dès lors qu'une sentence arbitrale, devenue décision de justice, a estimé un préjudice moral à 45 millions d'euros, il y a grand danger à ne pas réagir au plan fiscal ! Rendez-vous compte : une telle disposition pourrait faire jurisprudence, de sorte que l'on finirait par transformer un préjudice économique en préjudice moral dans le seul but de contourner le droit fiscal – le second n'étant pas imposable, contrairement au premier.

Nous proposons donc avec l'assentiment de la commission, de fixer un plafond équivalent à six fois celui de la sécurité sociale, soit 200 000 euros – c'est ce même plafond que nous retenons pour les parachutes dorés et d'autres dispositifs similaires. En deçà de ce seuil, l'exonération sera maintenue ; au-delà, l'indemnité sera considérée comme un revenu, et deviendra imposable.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission s'est longuement interrogée sur le principe consistant à imposer une indemnité pour préjudice moral. Après réflexion, elle a accepté l'amendement.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le caractère dérogatoire à l'imposition du préjudice moral est un principe constant de notre droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Un préjudice à 45 millions... Il ne faut tout de même pas charrier.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Il ne s'agit pas d'un problème de montant, mais de principe. Pourquoi le seuil que vous proposez de fixer à 200 000 euros ne serait-il pas plus ou moins élevé ? En outre, les décisions des tribunaux pourraient être influencées par un tel seuil.

Chacun aura compris que cet amendement était lié à une affaire qui a…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Exactement. J'ai toujours quelque peine à retrouver le défraiement… (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Voilà qui m'étonne fort, venant de vous... Et pour Tapie ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Cet amendement, disais-je, est lié à une affaire qui a défrayé la chronique. Ne légiférons pas à partir d'une seule affaire : la dérogation à l'impôt des indemnités pour préjudice moral est un principe général du droit. Il doit le demeurer. Restons-en donc là, de peur de faire varier ce seuil au gré des affaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Des scandales comme celui-ci, il s'en produit peu !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'amendement est intéressant, mais votre réaction plus encore, monsieur le ministre. Le Président de la République, à chaque fois qu'il peut disposer d'une estrade…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Vous le citez plus souvent que nous !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais moi, je ne l'idolâtre pas... Je conserve à son égard – comme au vôtre – ma lucidité et mon esprit critique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ne confondez pas le marxisme, qui est une méthode philosophique, et le stalinisme qui en a fait un catéchisme !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Certainement : M. Leonetti m'entraînait sur d'autres terrains…

Ainsi que le disait M. le ministre, cette affaire a donc défrayé la chronique. Et pour cause : elle défie la morale. Madame la ministre, qui avez été au coeur de cette affaire dans des conditions dont la commission des finances a eu l'occasion de discuter, vous savez combien elle a été contestée – de même que le fait d'avoir vous-même donné instructions aux hauts fonctionnaires vous représentant de donner aval à l'arrangement dans son ensemble. Certains en ont conclu, à tort ou à raison, que celui-ci était la somme de plusieurs petits arrangements – hypothèse à laquelle la présence récente de l'intéressé dans la cour de l'Élysée a donné quelque crédit.

Loin de proposer une fiscalité à la carte, M. de Courson nous soumet un principe clair et moralisant. Comment justifiez-vous que l'on accorde à quelqu'un dont la morale reste à démontrer un préjudice moral de 45 millions d'euros, alors que la veuve d'un ouvrier mort de l'amiante n'en reçoit que 30 000 ? Il ne suffit pas de parler de morale. Vous avez là l'occasion d'aider le Président de la République à agir conformément à ses paroles, ce qu'il n'a pas fait pour les parachutes dorés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Non : il avait promis une loi, mais y a déjà renoncé, car elle aurait concerné ses copains !

Moralisons et votons donc cet amendement comme le demande M. de Courson !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Il est certes difficile d'écarter d'un revers de main l'argumentation aussi loyale envers le Président de le République que sobre dans son expression que nous a donnée M. le ministre. Le droit est incontestable, et nous le connaissons. Quelle légitimité y a-t-il à légiférer à partir d'un cas particulier, fût-il aussi notoire que celui de M. Tapie, puisque c'est bien de lui qu'il s'agit ?

Si tout responsable est fondé à rappeler les règles de droit dès lors qu'il s'agit de cas usuels, inscrits dans une tradition et faisant l'objet de décisions de justice régulièrement rendues, il l'est moins à appeler ces mêmes règles à la rescousse d'un cas manifestement dérogatoire au regard, sinon du code de procédure civile, en tous cas de la décence, de l'usage et, au fond, de la simple pudeur. Dès lors, l'amendement de M. de Courson se justifie pleinement.

Il s'agit en effet d'un cas extraordinaire, dont chacun peut espérer qu'il ne constituera pas un précédent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Une indemnité de 45 millions d'euros a été attribuée pour préjudice moral. Or ledit préjudice ne semble pas avoir le moins du monde affecté la victime ou sa famille : les auditions menées par la commission des finances ont révélé qu'il n'avait changé ni de mode de vie ni de lieu de résidence. Ainsi, ce préjudice moral est, dans son essence même, parfaitement contestable. Dois-je rappeler que la cour d'appel de Paris, ayant rendu une décision favorable sur le fond à l'égard de M. Tapie, ne lui a pourtant accordé qu'un euro symbolique pour préjudice moral ?

Il ne s'agit pas par cet amendement de porter un jugement sur le litige commercial qui oppose M. Tapie au liquidateur. Néanmoins, en matière de préjudice moral, il en va de la crédibilité du législateur que de faire savoir, par son vote, ce qui franchit la limite de la simple décence. Le groupe SRC votera donc cet amendement, et la représentation nationale s'honorerait d'exprimer son consensus sur ce sujet pour démontrer, en cette période où les difficultés frappent une très grande majorité de nos concitoyens, que l'on ne peut, passées certaines limites, couvrir certains arrangements, et ce quel que soit le niveau auquel ils ont été conclus.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 227 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 50

Nombre de suffrages exprimés 49

Majorité absolue 25

Pour l'adoption 33

Contre 16

(L'amendement n° 227 est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Et, de grâce, monsieur le ministre, pas de deuxième délibération !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 177 .

La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Cet amendement correspond à la volonté partagée par beaucoup d'entre nous d'introduire sinon davantage d'équité, en tous cas davantage de justice fiscale dans la loi. En effet, au fil des lois de finances, beaucoup s'aperçoivent sur le terrain que certains contribuables combinent habilement les dispositifs permettant de réduire soit l'assiette imposable, soit la cotisation d'impôt exigible par l'État, de sorte que des revenus confortables, voire considérables, échappent à l'impôt.

Dès lors que le Gouvernement et sa majorité ne souhaitent pas revenir sur le principe du bouclier fiscal, la logique commande de prévoir une cotisation d'impôt minimale, sauf à imaginer que, combinant savoir fiscal et pratique adéquate, certains, qui devraient cotiser et contribuer à l'effort national, aient le droit de ne plus le faire.

Si donc, vous décidez, mes chers collègues, de maintenir le bouclier fiscal, nous proposons l'établissement d'une cotisation d'impôt minimale afin que, sinon l'équité, à tout le moins un début de justice fiscale commence à s'instaurer dans ce pays, qui en a bien besoin par ces temps où certains en appellent à l'union nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a rejeté cet amendement, pour deux raisons.

Premièrement, nous travaillons actuellement à un amendement instaurant un plafonnement global des dépenses fiscales, ce qui va dans le sens que vous souhaitez, M. Cahuzac.

Deuxièmement, vous avez employé le mot d'« équité ». Ce dispositif ne pouvant être rétroactif, il n'a pas lieu de figurer dans la première partie du projet de loi de finances. Nous aborderons donc ce sujet dans trois semaines, lors de la seconde partie.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Comme l'a dit le rapporteur général, nous aurons ce débat important sur le plafonnement dans quelques semaines. C'est pourquoi, je vous suggère, monsieur Cahuzac, de retirer cet amendement.

Le Gouvernement a indiqué les principes qu'il respecterait durant cette discussion. Nous ne pourrons aborder cette question qu'en deuxième partie, car il n'est pas possible de taxer certains contribuables en faisant « sauter » aujourd'hui un certain nombre de bénéfices auxquels ils pensent avoir droit sur leurs revenus de 2008. Ce débat doit avoir lieu lors de la deuxième partie, qui portera sur les revenus de 2009, taxables à partir de 2010. C'est affaire de justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Je comprends pour ma part que cet amendement ait été déposé en cet endroit du texte, ne serait-ce que pour rappeler que ce débat est d'actualité. Nous devons à tout prix trouver, à l'occasion de cette discussion budgétaire, une formule allant au-delà du plafonnement dépense fiscale par dépense fiscale. C'est toute la question du plafonnement global des niches ou de la création d'une imposition minimale. Nous avons, toutes sensibilités politiques confondues, formulé ces propositions dans le cadre d'un rapport de la commission des finances. Les membres de la commission, dans leur diversité, sont attachés à trouver une proposition visant à un plafonnement global. La rétroactivité peut certes poser question, selon que l'on situe le plafond à un niveau ou à un autre. Mais je suppose que M. Cahuzac souhaite le fixer à un niveau raisonnable.

Quoi qu'il en soit, j'insiste sur ce point et je souhaite que la discussion budgétaire soit l'occasion de trouver une solution. On dit souvent que, si le plafonnement global des niches ne fait pas partie de la législation française, c'est en raison d'un recours déposé par certains députés et d'une décision du Conseil constitutionnel. Je trouve cette observation inélégante et inappropriée, dès lors que le dispositif voté était d'une complexité telle qu'il était inapplicable – c'est en tout cas ce qu'a jugé le Conseil constitutionnel. Cela a été rappelé au début de la discussion budgétaire, mais je souhaitais expliquer à nouveau pourquoi, aujourd'hui, nous n'avons toujours pas établi de plafonnement global. J'espère que nous y parviendrons à l'occasion de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Il fallait le dire, et qu'on ne l'entende plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Il n'a échappé à aucun des membres de la commission des finances qu'un travail était en cours et que ce problème serait abordé, chiffres à l'appui, lors de la deuxième partie du budget. Mais il n'a pas non plus échappé à certains que le plafonnement proposé est très, voire trop raisonnable. Il ne vous a pas non plus échappé que ce plafonnement, tel qu'il était envisagé, permettrait précisément à certains qui n'en bénéficient pas aujourd'hui de profiter du bouclier fiscal. Autrement dit, le rendement serait probablement inférieur à ce qu'en attendent les promoteurs eux-mêmes de ce dispositif – dont l'initiative vient davantage du pouvoir exécutif que du Parlement.

Pardonnez-moi de ne pas retirer cet amendement, mais le débat est important, et les parlementaires doivent se prononcer publiquement, par leur vote, sur le principe même de ce plafonnement : il a au moins, par rapport au précédent dispositif, le mérite de la simplicité. Si celui-ci a été censuré, comme l'a rappelé Didier Migaud, c'est en raison de son extrême complexité, dont on peut même se demander si elle n'a pas été délibérément voulue afin de le rendre inapplicable…

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Pour une fois, tout le monde est d'accord sur le principe. Mais le plafonnement est un art très difficile. Nous avons commencé à y travailler avec le Gouvernement, et je vous assure que, lorsque nous examinerons l'amendement en deuxième partie, même avec la meilleure volonté du monde, ce ne sera pas simple.

Il conviendrait que nos collègues retirent cet amendement et que nous travaillions tous ensemble pour trouver une solution.

(L'amendement n° 177 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 261 .

La parole est à M. Philippe Boënnec.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Boënnec

J'ai déposé cet amendement afin d'aider à la permanence des soins, ou tout au moins de plaider en sa faveur.

La permanence des soins est un service public, offert à l'ensemble des Français, qui permet la prise en charge sanitaire entre vingt heures et huit heures du matin pour les actes non urgents, mais aussi pour les actes non programmés.

Nous avons fait deux constats.

D'abord, il existe une grande disparité entre les territoires. J'ai remis hier un rapport, intitulé Des zones noires de blouses blanches, qui reflète bien ce qui se passe. Si certaines zones, en France, sont relativement bien pourvues, comme les centres urbains, d'autres le sont beaucoup moins, notamment les zones suburbaines ou les zones rurales.

Ensuite, on observe une grande désaffection de la profession de médecin de premier recours : seuls 6 % des médecins formés exercent ces missions difficiles. En effet, un médecin de premier recours travaille, dans son cabinet ou à l'extérieur, soixante-dix heures par semaine, et doit en outre exercer des gardes le soir, ainsi que le samedi et le dimanche. Il est donc très difficile de trouver ce type de médecin dans une société de loisirs baignant dans l'atmosphère des 35 heures. Et, lorsqu'on a travaillé soixante-dix heures, on est en droit, comme les autres, de vouloir profiter de sa famille et de son temps de loisirs.

Mon amendement n° 261 porte sur trois points.

Le I introduit une exonération de cinq jours de rémunération par an pour l'ensemble des médecins qui pratiquent le service public de permanence des soins.

Le II, à mes yeux le plus important, vise à exonérer d'impôt une somme correspondant à soixante-dix jours de rémunération de permanence des soins dans les zones sous-dotées où il n'y a plus de médecins pour assurer ce service public.

Le III introduit une exonération de dix jours de rémunération par an au bénéfice des médecins participant à la régulation téléphonique de l'aide médicale urgente de la permanence des soins dans les centres d'appel du SAMU – le numéro 15 que chacun d'entre nous peut appeler dès lors qu'il a besoin d'un médecin pour des actes non urgents ou des actes non programmés.

La profession de médecin de premier recours connaît aujourd'hui une très grande désaffection. Je n'y reviens pas, mais je vous renvoie au rapport que j'ai évoqué tout à l'heure. Nous avons beaucoup de mal à mettre en place, de façon équitable, ce service public sur l'ensemble du territoire français.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a rejeté l'amendement n° 261 . Je reconnais qu'il faut inciter à exercer la permanence des soins et que le problème est d'autant plus aigu qu'on se trouve dans une zone où la présence médicale est insuffisante ; mais la rédaction présentée pose problème. Nous devons la retravailler, car nous ne pouvons adopter en l'état cet amendement.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur Boënnec, je vous suggère de retirer votre amendement. Nous pourrions examiner son II, qui pose effectivement problème, lors du collectif. Cela nous laisserait le temps de faire le point sur le sujet avec la caisse d'assurance maladie. Il y a sans doute une modification à apporter ou une incitation supplémentaire à trouver. Voilà la proposition, constructive, que je vous fais, monsieur le député.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Boënnec

Monsieur le ministre, je suis très attentif à votre réponse et je ne veux pas encombrer la discussion ; aussi vais-je retirer mon amendement. Je souligne toutefois que, si les points I et III sont importants, le point II est majeur et qu'il mérite un examen très attentif, dans l'intérêt même des finances de l'État.

(L'amendement n° 261 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 120 .

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

J'appelle, par le biais de cet amendement, l'attention de Mme et de M. les ministres sur certaines situations difficiles non réglées par la loi. J'ignore si mon amendement pourra résoudre le problème, mais je souhaite avant tout provoquer le débat, afin que ces situations ne perdurent pas.

S'agissant du régime de prestation compensatoire, la loi du 30 juin 2000 a fait du versement de cette prestation sous forme d'un capital la règle et du versement sous forme d'une rente l'exception. Cette réforme permet de régler de façon satisfaisante les situations postérieures à la loi de 2000.

Le problème se pose pour les débiteurs de rentes viagères attribuées avant la loi de 2000 – et ils sont nombreux –, qui continuent de supporter le versement de rentes à un niveau très élevé, qui n'est plus pratiqué aujourd'hui. Nombre d'entre eux ne sont pas imposables, sont souvent dans une situation difficile et ne bénéficient pas de la déduction qu'ils pourraient faire du montant de ces rentes de leur revenu imposable. Leur préjudice est donc réel par rapport à ceux dont la situation relève de la loi du 30 juin 2000. C'est pourquoi je propose qu'un avantage spécifique leur soit attribué.

J'ignore si cette solution peut être retenue. Mais, à travers cet amendement, je souhaite poser le problème afin que le Gouvernement propose une solution permettant de répondre à ces situations, lesquelles méritent d'être prises en considération.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission n'a pas adopté l'amendement n° 120 , tout en reconnaissant l'existence du problème. Elle a estimé qu'il fallait le traiter au plan civil plutôt que fiscal. Cela étant, il y a manifestement une inégalité qui crée des situations très difficiles, notamment pour les personnes non imposables.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Monsieur le président Migaud, vous soulevez un problème réel et sur lequel il convient effectivement d'intervenir. Nous ne savons pas si c'est la bonne façon de rédiger un amendement certainement délicat. Je vous propose de nous en remettre à Mme la garde des sceaux pour régler les problèmes de droit civil qui se posent avant de chercher à résoudre les difficultés fiscales. Peut-être pourrons-nous alors suivre ensemble ce travail. Nous procéderons, ensuite, à la modification fiscale, si elle s'impose.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Nous devons examiner ce sujet rapidement pour que des solutions soient trouvées, d'ici à l'examen du collectif budgétaire. En effet, ces situations profondément injustes méritent d'être prises en considération. Les décisions ne doivent pas être retardées. Ce ne doit pas être si difficile que cela. Je suis toutefois d'accord pour reconnaître la nécessité de travailler en liaison avec Mme la garde des sceaux pour que soit, au préalable, traitée la question civile.

Puisque vous venez de vous engager à résoudre ce problème, je suis prêt à retirer mon amendement.

(L'amendement n° 120 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 148 .

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Mme Parisot exerce un métier vraiment bien difficile. Après avoir été contrainte de faire la police chez les patrons et fustiger la caisse noire et antigrève de l'Union de l'industrie et des métiers de la métallurgie, voilà qu'elle doit maintenant mettre de l'éthique dans la gouvernance des grandes entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

C'est peut-être le plus difficile, en effet !

Mme Parisot vient donc de présenter le nouveau code de gouvernement d'entreprise élaboré par le MEDEF. C'est formidable : elle est donc juge et partie ! En dépit de toutes ces difficultés, c'est vraiment le bonheur absolu ! Le MEDEF veut ainsi donner l'impression de s'attaquer aux scandales à répétition liés, notamment, à la pratique des parachutes dorés accordés aux dirigeants d'entreprise. La patronne des patrons a assuré qu'aucun des éléments de la rémunération ne devait être mis de côté, qu'il s'agisse de la partie fixe, de la partie variable, des stock-options, des retraites supplémentaires, des jetons de présence ou de tout autre avantage particulier. Il va sans dire que ce code ira vraisemblablement garnir quelques étagères ! Il n'est, en effet, assorti d'aucune sanction effective. La plupart des préconisations sont laissées à la libre initiative de chaque entreprise. Ce code de conduite ne fait qu'avaliser et normaliser les pratiques actuelles. C'est ainsi que les fameux parachutes dorés pourront encore équivaloir, demain, à deux ans d'un salaire déjà fort conséquent !

Le plus choquant n'est pas que le patronat propose un code de conduire qui n'en est pas un, mais que le Gouvernement laisse entendre que ce seul code pourrait tenir lieu de loi et qu'il n'y aurait pas lieu de légiférer. Pourtant, l'autorégulation patronale, cela ne marche pas. Mais, voilà, il se trouve que Mme Parisot a dit qu'il ne fallait surtout pas de loi pour limiter les revenus excessifs des patrons... Toutes les déclarations du Gouvernement et du chef de l'État sur la moralisation du secteur de la finance apparaissent, en définitive, pour ce qu'elles sont, c'est-à-dire de la poudre aux yeux.

Nous vous proposons donc à nouveau d'intervenir par voie législative et de taxer l'avantage excessif constitué par les parachutes dorés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission n'a pas retenu cet amendement.

Vous avez la main un peu lourde, monsieur Sandrier : 95 % d'impôts sur le revenu, plus les cotisations sociales, dont 11 % de CSG, cela signifie que le bénéficiaire devra rendre une partie de son indemnité !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Le fait est que ces indemnités sont soumises à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, et ce dans les mêmes conditions que les indemnités de licenciement. En droit commun, que l'on soit mandataire social ou simple salarié lorsqu'on perd son emploi, on reçoit une indemnité de départ qui n'est pas imposée jusqu'à six fois le plafond de la sécurité sociale, autrement dit jusqu'à un niveau d'environ 200 000 euros. Au-delà, elle est bien entendu imposée au titre de l'impôt sur le revenu ou des prélèvements sociaux. C'est la règle qui s'applique pour les indemnités visées par votre amendement. En revanche, ces parachutes dorés – indemnités dites différées – peuvent être aujourd'hui déduits en totalité en tant que charges dans le compte d'exploitation de l'entreprise. Dès lors, le contribuable en paie 33 %, correspondant au taux de l'impôt. La commission des finances a adopté à l'unanimité un amendement, que nous étudierons un peu plus tard, consistant à utiliser le même plafond – six fois le plafond de la sécurité sociale – pour définir la déductibilité ou la non-déductibilité dans les comptes de l'entreprise. Donc, jusqu'à six fois le plafond de la sécurité sociale, l'entreprise pourra déduire de telles indemnités de ses comptes, mais plus au-delà. Cet amendement, que vous avez vous-même voté, monsieur Sandrier, propose un système tout à fait équilibré : fiscalisation, s'agissant de l'impôt sur le revenu, plutôt au taux marginal de 40 %, prélèvements sociaux et non-déductibilité au-delà de 200 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme la ministre de l'économie, pour donner l'avis du Gouvernement.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Le Gouvernement est défavorable à votre amendement, monsieur le député Sandrier, pour des raisons identiques à celles exposées par le rapporteur général auxquelles j'en ajouterai deux. Vous vous souvenez que, dans l'article 17 de la loi TEPA, nous avions fixé le principe selon lequel toutes les indemnités qui pouvaient être attribuées aux dirigeants en cas de départ devaient être assorties des obligations de performance et nécessitaient, en particulier, l'examen des performances avant l'attribution des indemnités. De surcroît, on peut toujours critiquer Pierre, Paul, Jacques ou Laurence, mais c'est aussi à l'initiative de tous les partenaires sociaux – organisations syndicales comme patronales – qu'un accord est intervenu en janvier 2007 qui a permis un certain nombre d'avancées qui se sont ensuite ajoutées à l'ensemble des dispositions du droit social. Là aussi, le Gouvernement a fait une demande et les organisations patronales – AFEP et MEDEF – suggéré un certain nombre de propositions.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Le Gouvernement demande donc très simplement que tous les conseils d'administration des sociétés cotées concernées reprennent l'ensemble du code à leur compte. Si tel ne devait pas être le cas…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

… dans un délai de six mois, le législateur se substituera.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Il est légitime de laisser les parties privées fixer des règles d'éthique tout simplement parce qu'il est normal qu'elles établissent des règles dans le cadre de l'affectio societatis d'une société.

Donc, je le répète, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Je précise d'ores et déjà que son amendement n° 148 a été rectifié : il convient de lire non pas « 95 % », mais « 75 % ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Effectivement, monsieur le président. Le rapporteur général a dit que nous avions la main lourde. C'est son avis, dès que l'on touche aux riches ! Dans un accès de mansuétude, nous proposons donc de nous limiter à 75 % !

Cela dit, madame la ministre, qui donc est Laurence ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pour ce qui nous concerne en tout cas, nous n'avons pas suffisamment d'intimité avec les dirigeants du MEDEF pour nous laisser aller à les appeler par leur prénom !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Et si c'est Lawrence, il n'est plus de ce monde : ce serait difficile !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Et D. H. Lawrence n'a jamais dirigé le MEDEF ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce que vous avez dit est très intéressant, madame la ministre. Si des gens sont dans les tribunes, beaucoup suivent également nos débats en direct sur Internet. Vous noyez le poisson ! En effet, dans son discours de Toulon, le Président de la République a dit : « Nous allons légiférer avant Noël. » J'imagine que Mme Parisot est immédiatement venue lui dire en ces termes –puisque c'est ainsi que l'on se parle dans votre monde : « Nicolas, tu exagères, tu n'y penses pas ! À défaut de relever le niveau de la morale, tu vas mettre le moral des grands patrons à zéro ! » (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est ainsi que l'on en arrive à renoncer à légiférer ! Comme vous sentez bien que cela va poser problème dans l'opinion, vous précisez que les conseils d'administration devront adopter le nouveau code. Je n'ai pas en mémoire que vous ayez traité de la même façon les petites gens qui s'étaient laissés aller à quelque fraude sur le RMI ! Là, vous n'avez pas dit qu'un code serait établi et qu'il serait demandé à ceux qui pourraient le violer de le respecter, mais vous avez appliqué la loi, la loi d'airain qui est la vôtre dès lors qu'il s'agit des petites gens !

J'en reviens à ceux pour lesquels vous avez toutes les attentions. Vous procédez de la même façon pour les banquiers ! Vous laissez ainsi une majorité de banquiers gérer la société chargée de prêter les 320 milliards ! Vous ne voulez pas que l'opinion sache que vous couvrez toutes les immoralités ! M. Forgeard, ex-dirigeant d'EADS, a jeté des milliers de salariés sur le pavé à EADS, et est parti avec 7 millions d'euros dans sa poche ! Qu'avez-vous fait pour corriger ce vol, cette immoralité ? Rien du tout, parce que vous êtes entre vous ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Qu'avez-vous fait, lorsque Mme Russo et M. Tchuruk, qui ont des milliers de licenciements sur la conscience, ont quitté Alcatel-Lucent avec chacun des millions d'euros dans les poches ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Voilà la schizophrénie de votre pouvoir : d'un côté, le Président de la République qui gesticule…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…dans le meeting UMP de Toulon en disant « On va faire la loi ! » et le même Président de la République qui se met à genoux devant les représentants du patronat ! C'est votre loi : celle du capital et des actionnaires ! Notre loi à nous, c'est celle de la morale. Nous vous demandons donc de nous suivre sur chemin ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 148 , tel qu'il vient d'être rectifié, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 149 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne comprends pas que cet amendement soit situé ici ; je l'aurais, quant à moi, placé juste avant celui de notre collègue Charles-Amédée de Courson. Mais, puisqu'il en est ainsi, discutons-en.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'amendement n° 149 tend à mettre fin au véritable scandale que nous avons eu l'occasion de dénoncer ces derniers mois, plus particulièrement, soyons clairs, lors de l'audition de M. Tapie. Chacun se rappelle cette audition scandaleuse, au cours de laquelle on a pu mesurer l'arrogance et l'aplomb de celui qui a toujours acheté des entreprises sans dépenser ses sous, en mettant sur le pavé les salariés des entreprises reprises et en ramassant, à l'occasion, la monnaie avec la complicité du pouvoir d'État et du Crédit lyonnais en particulier !

Mon amendement tend donc à remettre un peu de morale dans cette affaire qui a fort légitimement choqué nos concitoyens. En effet, la sentence arbitrale rendue en juillet dernier avec l'aval du Gouvernement, dans l'affaire opposant le groupe Tapie au consortium de réalisation chargé de liquider les actifs douteux du Crédit lyonnais, a stupéfié et indigné nos concitoyens qui pensent que l'État de droit et la justice républicaine doivent primer sur les dérèglements de la puissance financière et sur les petits arrangements. En outre, comme nous l'avons souligné, l'arbitrage est une formule fort coûteuse, car la rémunération des trois arbitres, hormis ce qui a été consenti à M. Tapie, atteint plus de 900 000 euros. Le résultat de l'arbitrage a, qui plus est, été très favorable au groupe et à la famille Tapie.

Tout à l'heure, je me suis trompé, ce dont je vous prie de bien vouloir m'excuser, quand j'ai cité l'exemple de la veuve d'un ouvrier, victime de l'amiante. En effet, l'indemnité consentie n'est pas de 30 000 euros – c'est la somme est versée en cas de décès d'un enfant, par exemple dans une cour d'école, et que la juridiction décide d'indemniser la famille, comme c'est souvent la règle. Pour un ouvrier mort des suites d'une exposition à l'amiante, l'indemnité s'élève à 45 000 euros.

Autrement dit, pour le préjudice de M. Tapie, on donne mille fois plus que pour le décès d'un ouvrier à cause de l'amiante… D'où notre amendement.

D'autant plus que tout doit être tenté pour préserver les deniers publics : vous faites vibrer la corde, monsieur le ministre, avec des trémolos dans la voix, en répétan que les caisses sont vides.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est vrai qu'elles sont vides puisque c'est vous qui les avez vidées ! Il faut rappeler que le total des indemnités accordées à Bernard Tapie et consorts est de 285 millions d'euros et que c'est le contribuable qui va payer, depuis le RMIste jusqu'à l'ouvrier de chez Renault,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…en passant par les fonctionnaires de l'Assemblée nationale.

C'est pourquoi nous proposons de taxer les indemnisations très généreuses parfois accordées pour préjudice moral par des sentences arbitrales, même si chacun comprend bien qu'il n'y a ni préjudice ni morale dans cette affaire.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Défavorable. On a épuisé le sujet tout à l'heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Le sujet vous gêne. Alors vous dégagez. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Poursuivez votre chemin, il n'y a rien à voir. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. Mallié, qui défend le travail du dimanche, lui, n'hésite pas à couvrir de sa voix un débat qui n'a pas lieu ! Le Gouvernement ne veut pas que nos compatriotes entendent que ce pouvoir, c'est celui des privilégiés et qu'il couvre tout ce qui est immoral du moment que cela bénéficie aux amis !

(L'amendement n° 149 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 178 .

La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Défavorable.

(L'amendement n° 178 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 225 rectifié .

La parole est à M. Charles de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Cet amendement essaie, maladroitement d'ailleurs, de poser un problème difficile.

Lorsqu'un couple, qu'il soit marié, pacsé ou en concubinage, a des enfants, il a droit à des demi-parts. Quand les enfants partent et que le couple se sépare, chacun garde une demi-part supplémentaire. Quel est le fondement de cette demi-part que certains qualifient de récompense de la rupture ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Ce n'est pas un problème de moralité, c'est un problème de logique fiscale. Celui qui est resté célibataire ne bénéficie pas d'une demi-part supplémentaire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il arrive que des gens aient élevé seuls des enfants, chers collègues !

C'est tout de même une anomalie de notre droit fiscal. Comment sortir de cette situation qui m'apparaît totalement injustifiée aujourd'hui ? Je ne parle pas de la demi-part des veuves ; je ne parle que des couples qui se séparent.

Nous avons discuté à plusieurs reprises de cette question en commission. C'est un vrai problème. Nous en avons rediscuté avec le rapporteur général. L'idée serait de supprimer la demi-part pour ceux qui se séparent puis, pour « le stock », ceux qui en bénéficient aujourd'hui, d'essayer de sortir progressivement en « sifflet » ou en biseau, si je puis dire, de ce dispositif dont on voit mal la justification.

Il serait intéressant de savoir ce qu'en pense le Gouvernement. Mon amendement est loin d'être parfait et je suis prêt à le retirer, quitte à ce qu'on le retravaille techniquement, voire qu'on le bascule en deuxième partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Voilà un sujet qui nous préoccupe depuis des années et je remercie M. de Courson de l'avoir évoqué – même si son amendement n° 225 rectifié , il est le premier à le reconnaître, n'est pas parfait. Quoi qu'il en soit, madame la ministre, monsieur le ministre, nous devons absolument le traiter.

Un ménage, marié, pacsé ou vivant en concubinage dit notoire,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

… qui élève des enfants bénéficie évidemment de demi-parts. Si les conjoints se séparent alors que les enfants sont partis du foyer et ont formé leur propre foyer fiscal, cinq ans, dix ans après le départ des enfants, ils vont bénéficier chacun d'une demi-part supplémentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ah ! Où est l'amour, dans un foyer fiscal ? (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cela n'a aucun intérêt du point de vue de la politique familiale, et cela crée un effet pervers. M. Dupont, qui a divorcé de Mme Dupont, ne pourra pas épouser Mme Durand, qui a divorcé de M. Durand, même s'ils s'aiment d'amour tendre, parce que, s'ils le font, ils perdront chacun une demi-part. (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Mais c'est horrible, ce que vous dites ! Il faut faire quelque chose pour les aider !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

S'ils calculent comme ça, il n'y a pas d'amour ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Notre souhait, c'est qu'ils régularisent leur situation ; pour leur permettre de le faire, il faut supprimer ces demi-parts.

Cette demi-part, acquise à vie pour une personne qui a élevé seule un enfant, a été créée après la guerre : il y avait alors, malheureusement, un grand nombre de veuves qui élevaient seules leurs enfants et qu'il fallait aider, ainsi que des mères qui avaient perdu leurs enfants. D'où la demi-part. Le problème est que, en matière fiscale, vous le savez, on sédimente : sitôt qu'une mesure est prise, elle reste gravée dans le marbre. On en ajoute une autre et, finalement, on en vient à perdre le sens de toutes ces dispositions successives.

J'ai souligné lors du débat sur le financement du RSA, alors qu'il fallait trouver 1,5 milliard,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

… que la demi-part acquise à vie, sans aucun effet en général sur la politique familiale, représentait 1,6 milliard d'euros. Il faut tout de même faire certains rapprochements !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Ce que nous proposons avec Charles de Courson, c'est de traiter exclusivement la question des ménages qui se séparent une fois que les enfants sont partis du foyer. Dans un an ou deux, pour ne prendre personne de court, on pourrait ne plus accorder cette demi-part aux nouveaux séparés. Pour ceux qui l'ont déjà, parce qu'ils se sont séparés il y a un an, deux ans ou cinquante ans,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cinquante ans ? Il y a prescription ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

… on imaginerait un dispositif de réduction progressive sur quelques années, pour ne pas les pénaliser. Cela permettrait de dégager probablement 100, 200 ou 300 millions d'euros, pour aider notamment les jeunes femmes seules, qui ont de nombreuses difficultés à élever seules leurs enfants et pour lesquelles il serait important de redéployer ce type de crédits.

Bref, l'idée, c'est de supprimer la demi-part quand elle n'a aucune relation avec la politique familiale pour disposer de moyens permettant d'améliorer la politique familiale pour ceux qui en ont vraiment besoin. Dans ces temps où l'argent public est rare, notre devoir, c'est de dépenser mieux en dépensant moins. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

La proposition de Charles de Courson est intéressante. C'est un vrai problème de justice fiscale. Curieusement, il s'est instauré une sorte de prime au divorce, : c'est mieux de divorcer que de rester marié une fois les enfants élevés.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

C'est la réalité, il y a bel et bien une prime fiscale.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Vous élevez à deux des enfants, qui partent ensuite du foyer. Si vous vous séparez, vous avez droit chacun à une demi-part. Si vous ne vous séparez pas, vous ne l'avez pas. C'est un vrai problème de justice fiscale, et non un problème de droite ou de gauche. Il faut examiner tranquillement la question, en deuxième partie, parce que cela ne peut porter que sur l'année suivante, sous l'angle de la justice fiscale, et purger enfin cette affaire dont on parle depuis trop longtemps. Il doit être possible d'aboutir à une solution équitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je crois qu'il ne faut pas confondre l'amour et la fiscalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Pour ce qui vous concerne, vous avez choisi ! (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

La position du ministre me paraît raisonnable. Nous devons travailler pour arriver à un dispositif équilibré et sortir de cette situation tout à fait anormale.

Je suis donc d'accord pour retirer mon amendement, nous le redéposerons en deuxième partie.

(L'amendement n° 225 rectifié est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement no 195 .

La parole est à M. Dominique Baert.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements nos 195 et 194 .

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

L'amendement n° 195 a une histoire. Je l'avais déjà présenté l'année dernière, mais il n'avait pas eu la chance de bénéficier de votre soutien, monsieur le ministre.

Il part d'un constat simple. Les anciens combattants peuvent bénéficier d'une demi-part supplémentaire au titre de l'impôt sur le revenu à partir de soixante-quinze ans, mais un grand nombre de ceux qui ont été engagés en Afrique du Nord n'y ont pas encore droit. Nous sommes donc quelque part devant une disposition fiscale miroir : elle annonce une déductibilité dont on ne peut bénéficier. Voilà pourquoi le droit à cette demi-part est devenu à juste titre et à bon escient une revendication légitime des associations du monde combattant.

Si l'on regarde le budget des anciens combattants, on est obligé de constater un vide abyssal. Il est en diminution pour 2009, et il est annoncé également en diminution pour 2010 et pour 2011. Rien n'est prévu pour les retraites, rien pour la rente, rien pour les campagnes doubles.

Nous avons l'opportunité de faire un geste en direction des associations du monde combattant, d'autant plus que cette année est chargée d'histoire : c'est le quatre-vingt-dixième anniversaire du 11 novembre 1918, mais aussi le cinquantième anniversaire de la Constitution de 1958, dont la naissance est intimement liée à la crise de l'Afrique du Nord.

L'an dernier, monsieur le ministre, vous aviez refusé notre amendement pour des raisons budgétaires. Nous persistons et nous le représentons car cette revendication nous paraît légitime et elle prend cette année un caractère tout particulier.

Au cas où vous ne vous rangeriez pas à cette proposition, vous pourriez tout de même voter notre amendement de repli n° 294 pour deux raisons. Tout d'abord, si vous nous objectez une nouvelle fois le coût du passage de soixante-quinze à soixante-dix ans, nous vous proposons de montrer au moins que le Gouvernement a la volonté de faire un geste, en octroyant le bénéfice de cette déductibilité à soixante-treize ans. D'autant plus que – et c'est la seconde raison – quelqu'un qui avait vingt ans dans les Aurès en 1956 n'en aura soixante-quinze qu'en 2011, et n'aura pas aujourd'hui à cette déductibilité ; mais si nous votons l'amendement n° 294 , ce ne sera plus un leurre, puisqu'il en bénéficiera en 2009. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission n'a pas adopté ces amendements. La réduction d'impôt proposée ne concerne, par définition, que les personnes imposables, autrement dit les anciens combattants retraités dont les revenus excèdent 15 000 euros annuels. C'est pourquoi le Gouvernement a préféré s'engager dans la voie de la revalorisation de la retraite du combattant.

Depuis 1978, cette retraite était restée inchangée, ne dépassant pas 33 points de l'indice de la fonction publique. Nous l'avons augmentée pour la première fois il y a quatre ans, pour la porter progressivement, à raison de deux points de majoration chaque année, à 39 points aujourd'hui. J'ajoute que ceux de nos collègues qui ont examiné ce matin, en commission, le budget des anciens combattants, ont adopté un amendement qui vise à la porter à 41 points, l'objectif étant de parvenir, à terme, à 48 points. Nous avons ainsi tenu nos engagements sur la retraite du combattant, et cette revalorisation bénéficie à tous les anciens combattants, imposables ou non.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement, qui s'était déjà exprimé sur les mêmes amendements l'année dernière, n'a pas changé d'avis. Nous augmentons régulièrement la retraite du combattant, et je pense que nous pouvons nous en tenir à cette revalorisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

Votre refus est un choix politique !

(Les amendements nos 195 et 194 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 222 .

Voulez-vous défendre par la même occasion l'amendement n° 223 , monsieur Charles de Courson ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Volontiers, monsieur le président.

Mes chers collègues, vous savez que le Nouveau Centre était défavorable à la création d'un nouvel impôt de 1,1 % pour financer le RSA. Nous avions donc proposé au Gouvernement deux grandes mesures de substitution : un plafonnement des niches pour chaque contribuable ainsi que des réductions ciblées de huit niches fiscales, de façon à dégager 1,5 milliard d'euros.

Après bien des débats, le Gouvernement a accepté le principe du plafonnement, à hauteur d'environ 200 millions. On pourrait aller un peu plus loin, ce dont nous discuterons en seconde partie. Par ces propositions, il s'agissait pour nous de montrer que d'autres moyens de financement pouvaient être trouvés, et que le Nouveau Centre ne critique jamais quoi que ce soit sans proposer des solutions alternatives.

L'amendement n° 222 reprend quatre de ces propositions. La quatrième est celle dont nous venons de parler ; elle concerne la demi-part en cas de rupture des conjoints. La deuxième, adoptée par la commission, consiste à légèrement abaisser les plafonds des emplois de service, actuellement de 12 000 euros, pour les porter à 11 000 euros. Il s'agit, enfin, de porter de 20 à 18 % le plafonnement de l'ensemble des dons, et de 40 et 30 % à 30 et 25 % les deux taux d'une autre niche. De nombreux collègues, dans la majorité mais aussi dans l'opposition, considéraient qu'il était possible de financer le RSA par de simples réajustements de ce type, sans créer un nouvel impôt.

L'amendement n° 223 procède du même esprit et concerne, quant à lui, cet incroyable abattement qui peut aller jusqu'à 40 % pour nos concitoyens résidant en Guyane et jusqu'à 30 % pour ceux qui sont domiciliés en Guadeloupe, en Martinique ou à la Réunion. Un tel dispositif se justifiait à l'époque où le coût de la vie était considérablement plus élevé dans ces collectivités, notamment en raison de l'absence de moyens de transport, mais il faut aujourd'hui absolument réduire un avantage qui a perdu sa raison d'être. Encore le faisons-nous de manière très modérée, puisque nous ne l'abaissons que de dix points.

J'aimerais connaître la position du Gouvernement sur ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a rejeté ces amendements, tout en adhérant à la démarche de M. de Courson : si nous voulons maîtriser la dépense publique, il faut en effet regarder non seulement les crédits budgétaires, c'est-à-dire les dépenses stricto sensu, mais aussi les dépenses fiscales.

Tout à l'heure, en votant la loi de programmation pluriannuelle, nous avons adopté un principe très fort : il ne sera désormais plus possible de créer une dépense fiscale nouvelle sans la gager par une économie sur une autre dépense fiscale. Un mécanisme pervers s'était instauré ces dernières années : lorsqu'un ministre n'obtenait pas les crédits souhaités, il inventait des mécanismes d'incitation fiscale détournant la norme de maîtrise budgétaire. C'est ainsi que nous en sommes arrivés, je le disais tout à l'heure, à 450 niches fiscales, pour un montant total de 70 milliards. J'ajoute qu'en 2008, les crédits de l'État – les dépenses stricto sensu – ont augmenté de 2 %, tandis que les dépenses fiscales ont augmenté de plus de 6 %.

Grâce au travail des ministres sur la loi de programmation pluriannuelle, nous nous sommes dotés de règles de bonne gouvernance pour les dépenses fiscales. Par ailleurs, nous avons adopté un amendement du président Didier Migaud qui demande la réalisation d'une évaluation de l'ensemble des dépenses fiscales existantes, dont les conclusions devraient nous être connues au 30 juin 2011. Cela nous permettra, dans le prolongement du travail accompli par le Nouveau Centre, d'examiner les possibilités d'abandon ou de révision de certaines dépenses ainsi cette demi-part qui ne joue plus aucun rôle en termes de politique familiale.

Il s'agit donc de mener un travail systématique. Les propositions de M. de Courson ne portant que sur quelques aspects de la question, la commission les a repoussées, sans pour autant nier leur intérêt.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je voudrais à mon tour tirer un coup de chapeau au Nouveau Centre pour sa proposition visant à regrouper un certain nombre de dispositifs afin d'afficher des économies. S'il est toujours facile de demander davantage de dépenses, les économies sont plus difficiles à trouver.

Cela étant dit, monsieur de Courson, je ne vous cache pas que nous ne sommes pas d'accord sur tout. En ce qui concerne l'outre-mer, le Gouvernement fait déjà un gros travail, sur les indemnités de résidence, la déductibilité des charges, et d'autre sujets à venir. On ne peut pas dire que la situation dans ces collectivités soit la même que celle qui prévalait il y a deux ans ou de l'année dernière. Comme vous pouvez vous en rendre compte tous les jours, le Gouvernement propose de nombreuses réformes concernant l'outre-mer sur chaque texte ; ce sera encore le cas dans le PLFSS.

S'agissant de l'avantage fiscal au titre de l'emploi des salariés, nous en discuterons tout à l'heure. S'agissant des dons, notre politique fiscale consiste à vivifier le tissu associatif et l'activité des fondations, et je ne suis pas sûr que nous puissions véritablement réaliser là une économie utile en baissant le taux à 18 %, car il est important que les dons bénéficient d'un tel avantage fiscal, lequel est, du reste, déjà plafonné en termes à la fois de montants et de revenus. Le niveau de 20 % a l'air de fonctionner. Enfin, nous venons d'évoquer le quotient familial pour les parents séparés, je n'y reviendrai pas.

En tout cas, je ne peux que vous féliciter pour cette démarche, qu'il faudra poursuivre ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

J'interviendrai contre l'amendement de M. de Courson, car ce qu'il a dit de la cherté de la vie dans les DOM-TOM ne correspond pas à la réalité.

Mon cher collègue, il y a bien un surcoût de la vie outre-mer, qui est d'ailleurs inégal selon les territoires, de même que le sont les compensations accordées par l'État, ce qui est un facteur de rupture de l'égalité et d'injustice.

Le véritable problème, duquel notre collègue ne dit mot, est celui de la formation des prix. Réduire ces avantages fiscaux ne supprimerait pas la cherté de la vie, qui tient à des raisons objectives. La première est liée à l'éloignement ; encore pourrions-nous donner la possibilité à nos compatriotes des Antilles, par exemple, de se ravitailler dans les îles environnantes, alors que ce commerce est actuellement découragé et que nous leur imposons de s'approvisionner en métropole, avec des frais de mer exorbitants. Le fond de l'affaire, cependant, c'est que des monopoles de la distribution contrôlent les circuits et maintiennent des prix artificiellement élevés. Or de cela vous ne parlez pas !

Si nous nous attaquons à ce problème de la formation des prix, nous réduirons le coût de l'approvisionnement des populations à l'outre-mer. Cet avantage nouveau en termes de pouvoir d'achat bénéficierait pour le coup à tout le monde, aux fonctionnaires aussi bien qu'aux salariés du privé. Certes, il faut aller vers des règles plus égales entre la métropole et les DOM, mais à condition que cela ne se traduise pas par une réduction du pouvoir d'achat ! L'amendement de notre collègue de Courson, pas plus que les mesures du Gouvernement qui, notamment dans le Pacifique, ne s'attaquent pas aux voleurs, mais aux petites gens, n'apportent aucune solution, comme le savent ceux de nos collègues qui représentent ces territoires.

le président. Monsieur de Courson, retirez-vous vos deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le Gouvernement a fait quelques ouvertures : je reconnais que c'est bien la première fois qu'il essaye de bouger sur l'ensemble des problèmes des DOM-TOM. Je suis de ceux qui pensent que les coefficients d'abattement de l'impôt sur le revenu ne concernent pas les petites gens puisqu'il n'y a que 30 % à 35 % d'imposables dans ces territoires. Au nom de quoi un ingénieur à Kourou, qui gagne très bien sa vie, ne devrait être fiscalisé que sur 60 % de son revenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Mais cette exception existe, mon cher collègue, et c'est précisément dans ce type de cas que les taux d'abattement sont les plus élevés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On ne change pas une règle à cause d'une exception !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je pensais, monsieur Brard, que vous auriez plutôt appuyer ma proposition en disant qu'elle va dans le sens d'une plus grande égalité entre les contribuables mais qu'il faut aussi travailler sur les autres éléments. C'est pourquoi j'ai été quelque peu étonné de votre intervention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'égalitarisme bureaucratique n'est pas ma tasse de thé, monsieur de Courson !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

En outre, je rappelle que l'on parle depuis des années du problème des retraites. Tout le monde reconnaît qu'il n'est pas digne d'une République qui a placé le principe d'égalité dans sa devise d'accepter que les fonctionnaires français qui n'ont jamais mis les pieds dans ces territoires bénéficient, quand ils s'y retirent, d'une majoration de 75 % de leur retraite ! (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le Gouvernement fait un vrai effort pour essayer de sortir progressivement de ce dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

J'aimerais que le Gouvernement soit aussi plus ouvert à l'idée d'atténuer – je ne propose pas de supprimer – cette distorsion anormale en matière d'abattements. Ou alors, supprimons le principe d'égalité de la devise de la République française ! En attendant, je retire mes amendements.

(Les amendements n°s 222 et 223 sont retirés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 181 , qui fait l'objet d'un sous-amendement n° 284 .

La parole est à M. Frédéric Lefebvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Cet amendement me tient tout particulièrement à coeur puisqu'il concerne le codéveloppement.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Nous avions voté dans cet hémicycle, il y a quelques mois, à l'unanimité, un livret épargne codéveloppement. Il a été mis en place…

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Nous avions auditionné en commission des finances Charles Milhaud, à l'époque président des caisses d'épargne…

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Il nous avait expliqué que ce dispositif posait des difficultés sur un certain nombre de points, et qu'il faudrait le retravailler pour aboutir à un dispositif efficient.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

J'ai donc travaillé avec les associations et avec le ministère des finances pour aboutir à un dispositif efficace, basé sur la création de sociétés de financement du développement – SOFIDEV –, et prévoyant une liste, déterminée par voie d'arrêté, des pays susceptibles de recevoir, dans ce cadre, des investissements directs.

Mon amendement n° 181 vise à remplacer l'aide d'État à État, dont on sait malheureusement qu'elle est souvent virtuelle, par une autre formule. En effet, s'agissant de l'aide publique aux pays en voie de développement, on sait parfaitement à qui on verse l'aide, beaucoup moins où elle va ensuite – ou parfois, on ne le sait que trop ! L'objectif est donc de développer au maximum les aides directes de citoyen à citoyen, et des investissements dans les tissus économiques de ces pays en voie de développement.

L'amendement prévoit aussi que le Gouvernement remettra au Parlement un rapport dressant le bilan de l'activité des sociétés de développement afin d'avoir une vision précise de l'application du dispositif. Nous pourrons ainsi défalquer le coût que représentera pour l'État cette aide fiscale au codéveloppement de l'aide d'État à État. Il s'agit d'aller petit à petit vers une aide plus efficiente et plus efficace.

Le rapporteur général m'a fait remarquer en commission que mon amendement posait un problème de rétroactivité. Quand bien même celle-cine soulève pas de difficultés juridiques, dans la mesure où elle est favorable au contribuable, j'avais substitué le 1er novembre au 1er octobre, comme date d'entrée en vigueur du dispositif, la commission n'ayant pas encore examiné l'amendement le 1er octobre. Mais Gilles Carrez m'a indiqué que l'avantage fiscal proposé par l'amendement est subordonné à l'agrément du capital des sociétés concernées, et que cet agrément n'ayant pas de base légale avant le vote de la loi de finances pour 2009, il convienait de repousser la date au 1er janvier. C'est l'objet de son sous-amendement n° 284 . Reste que mon objectif, en proposant une date anticipée, est évidemment de lancer le mouvement le plus rapidement possible. J'aimerais savoir si le Gouvernement serait favorable à ce que le dispositif soit amorcé dès maintenant afin de démarrer au plus vite, dès le 1er janvier, avec les agréments. Je ne verrais alors que des avantages à ce que l'on adopte mon amendement sous-amendé par le rapporteur général. Mais j'ai besoin de savoir si les premières applications pourraient commencer immédiatement, afin que le mouvement s'enclenche sans perdre de temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir le sous-amendement no 284 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 181 .

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Frédéric Lefebvre a raison d'essayer de développer, en l'occurrence par le biais d'incitations fiscales, le codéveloppement, avec l'espoir que cette forme d'aide en vienne progressivement à remplacer une partie de l'aide publique. Tout le monde est conscient de l'intérêt d'une telle approche.

J'ai fait toutefois une réserve, non pas sur le point de la rétroactivité, mais sur la question de l'agrément. En effet, celui-ci sera nécessaire pour pouvoir créer une SOFIDEV. S'il s'agissait d'une SOFICA, la rétroactivité ne poserait pas de problème puisqu'une telle structure existe déjà. Or les SOFIDEV n'existeront juridiquement que le jour où le projet de loi de finances aura été promulgué, soit vers le 30 décembre. Je ne vois pas comment on pourrait, au mois de janvier, leur conférer un agrément rétroactif leur permettant de bénéficier d'une aide fiscale courant sur l'année 2008.

En revanche, monsieur Lefebvre, rien n'interdit de commencer à lancer d'ores et déjà des appels à l'épargne, étant entendu qu'ils ne produiront des effets fiscaux qu'à partir des revenus perçus en 2009, lesquels bénéficieront donc d'une réduction d'impôt au titre de l'impôt payé en 2010 sur 2009.

Tel est l'objet de mon sous-amendement n° 284 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement et le sous-amendement ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Le Gouvernement est très favorable à cet amendement dont il lève le gage.

Il s'agit en effet d'une forme nouvelle et moderne d'aide au développement. Aujourd'hui, en particulier dans des pays d'Afrique, on constate sur le terrain que non seulement les mécanismes d'aides publiques classiques ont du mal à fonctionner, mais aussi que certains pays, jusqu'ici rarement présents sur le continent africain, deviennent extrêmement actifs. Si la France souhaite maintenir, voire développer son influence, elle a intérêt à peaufiner des outils tels que celui que vous avez proposé, monsieur Lefebvre. C'est un bon outil.

Il est possible, monsieur le rapporteur général, de voter l'amendement n° 181 en l'état ; aussi vous demanderai-je de retirer votre sous-amendement n° 284 , au bénéfice des explications que je vais vous donner. Dès lors qu'un projet, constitué, consisterait à affecter des fonds pour la constitution de sociétés, la création d'activités et l'emploi de nationaux dans les pays destinataires de l'aide au développement, il me serait tout à fait possible d'agréer, sous réserve de l'entrée en vigueur du texte, les dites opérations issues du projet approuvé. Si évidemment le texte n'était pas voté, ces agréments tomberaient, et ceux qui mettraient en place l'action de développement en cause devraient en prendre en charge le risque. Il est donc mécaniquement tout à fait possible, monsieur le rapporteur général, de mettre en place l'agrément, sous la condition suspensive de l'entrée en vigueur du texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

L'amendement non modifié concernerait donc des investissements décidés entre le 23 octobre et le 31 décembre. Or, lorsque nous prenons des dispositions fiscales, nous faisons généralement en sorte qu'elles n'interviennent pas avant le début d'année. Mais je me réfère plus à une pratique qu'à un texte juridique.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Mes observations portent moins sur le fond de l'amendement que sur la question de principe qu'il pose, dans la mesure où, comme vient de le remarquer le rapporteur général, il s'agit d'une nouvelle niche fiscale. (« Bien sûr ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Madame la ministre, monsieur le ministre, comment cette nouvelle création pourrait-elle être rendue compatible avec la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques que nous venons d'adopter ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Elle entrera vraisemblablement en vigueur avant la prochaine loi de finances. Or elle prévoit, à l'article 10, que « les créations ou extensions de dépenses fiscales, ainsi que de réductions, exonérations ou abattements d'assiette […] sont compensées par des suppressions ou diminutions de mesures » de nature équivalentes. À peine avons-nous voté ce texte que nous voilà déjà invités à créer une nouvelle niche fiscale ! Compte tenu de la règle de gouvernance que nous nous sommes donné, comment surmontez-vous cette contradiction ? Quelle compensation budgétaire nous proposerez-vous, soit durant l'examen du PLF, soit au cours de l'année qui vient ? (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je vais donner quelques précisions, en complément de ce que vient d'indiquer Christine Lagarde : certes, il s'agit d'une niche, mais elle est plafonnée et sa durée déterminée, ce qui n'est pas si courant.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

En outre, nous gagerons cette niche supplémentaire si nécessaire, c'est-à-dire si le solde global de toutes les niches fait apparaître un surcroît de dépenses fiscales. Mais nous respecterons, bien évidemment, le texte de la loi de programmation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Voilà une étrange proposition. Rappelons tout d'abord que le dispositif des livrets épargne codéveloppement n'a pas fonctionné ; il serait peut-être bon de se demander pourquoi. C'est apparemment un texte très technocratique qui nous est maintenant présenté. Après examen, ceux qui connaissent les problèmes du codéveloppement en Afrique doivent constater que cette proposition est hors du réel. Mme Lagarde nous dit que c'est une forme nouvelle d'aide au développement. Taratata ! C'est une forme d'investissement en fin de compte assez banale. Jacques Godfrain et moi-même avions imaginé de créer des livrets d'épargne bonifiés pour aider des projets de codéveloppement.

Que nous est-il proposé ? Non pas des projets de codéveloppement, mais des facultés d'investissement. Il s'agit d'une démarche néocoloniale classique : le blanc dominateur décide pour le noir, parce que les Africains ne savent pas ce qu'il leur faut – c'est bien connu – alors que les blancs, eux, savent…

Cette tradition n'est pas la nôtre ; notre tradition anticolonialiste nous porte à considérer le codéveloppement comme un moyen de continuer notre combat anticolonial en travaillant en partenariat. Les migrants transfèrent beaucoup d'argent en Afrique, et le dialogue pourrait justement permettre de constituer ce qu'à Bercy vous nommeriez des « véhicules » susceptibles de récupérer ces fonds pour les orienter vers des investissements aidés, les crédits de la coopération venant « booster »davantage encore cette épargne. Or, ce n'est pas du tout ce qui nous est proposé.

Le sujet prête pourtant à des propositions modernes en vue d'une autre solidarité, qui contribueraient à établir une autre vision des rapports entre les pays du nord et du sud, dans le respect de l'égalité entre partenaires également respectables. Las, ce n'est pas la proposition qui nous est faite. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

À la lecture de cet amendement, et à l'écoute des explications données par les uns et par les autres, qui ne ressent comme une gêne, pour ne pas dire un malaise diffus dans cet hémicycle ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Cet amendement de quatre pages, qui comprend probablement plus de signes que le projet de loi en faveur des revenus du travail examiné au début de la session extraordinaire, fait référence à des éléments aussi simples que l'article 1er-1 de la loi 85-695 du 11 juillet 1985 ou le décret n° 2002-772 du 3 mai 2002… Voilà un amendement tout à fait impressionnant ! Il faut rendre hommage à notre collègue : rédiger seul – puisqu'il en est l'unique signataire – un amendement d'une telle complexité technique…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

… est quelque chose de tout à fait admirable. Monsieur Censi, M. Lefebvre n'a pas besoin de vous pour se défendre !

Mais, au-delà de l'admiration pour la technique, nous nous posons quelques questions. Il s'agit en effet d'une niche fiscale. Or, nous venons de décider que toute création d'une nouvelle niche devait donner lieu à la suppression d'une autre. De surcroît, nous ne connaissons même pas le coût du dispositif proposé, chose étonnante après un tel travail technique…

Je vais donc poser les questions que tout le monde se pose, puisque notre collègue Lefebvre tient manifestement à une forme de rétroactivité. Qui, à ce jour, a procédé à ces investissements en Afrique, où, et pour combien ? Et qui demande au Parlement de défiscaliser ces investissements ? Telles sont les réponses qu'appelle cet amendement de quatre pages, et auxquelles nous aurons un jour une réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Puisque nous devons voter sur cet amendement, autant le faire dans la plus parfaite transparence. Puisque certains s'apprêtent à le voter, qu'ils sachent au moins qui a investi, combien, où et pourquoi faire – et qui, par conséquent, espère qu'une majorité des députés présents votera cette mesure de défiscalisation ?

J'ignore si cet amendement est présenté sous les auspices de ce qu'on appelle la Françafrique. J'ai constaté la gêne des membres du Gouvernement : manifestement, un accord préalable a dû intervenir. Tout cela se fera naturellement sans nous. Nous vous renvoyons à votre responsabilité, en espérant que nous apprendrons bientôt qui se trouve derrière tout cela et que, ce jour-là, ceux qui ont prêté la main à cette petite manoeuvre en aient honte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Ce que nous venons d'entendre est passablement choquant…

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

… mais je voudrais, plutôt que m'y attarder, revenir sur un ou deux points. D'abord, notre collègue Brard a évoqué le travail effectué avec Jacques Godfrain, et le livret d'épargne bonifié. C'est exactement ce dont je parlais tout à l'heure. La création de ce livret a été votée, il y a un an, lors de l'examen du projet de loi sur la maîtrise de l'immigration – que j'ai suivi, contrairement à M. Brard…

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

J'ai été, avec Jacques Godfrain, à l'origine de cette mesure, sur laquelle votre groupe et des sénateurs avaient travaillé, et qui a été votée. À l'époque, le président des caisses d'épargne avait été auditionné en commission, et vous pourrez lire dans le compte rendu que M. Milhaud, que j'avais interrogé sur le dispositif, nous avait expliqué que celui-ci, tel qu'il était bâti, ne pouvait fonctionner, et m'avait par conséquent invité – le président Migaud s'en souvient – à l'améliorer. C'est ce que j'ai fait, avec l'aide de Bercy.

Car je n'ai nullement prétendu, monsieur Cahuzac, avoir écrit cet amendement tout seul. J'ai au contraire expliqué, en le présentant, avoir travaillé avec Bercy, à la suite de cette audition, pour construire un dispositif plus efficace.

Gilles Carrez s'est interrogé sur la rétroactivité. La rédaction de l'amendement traduit mon souci de laisser du temps pour le montage des dossiers. Les insinuations de M. Cahuzac sont donc totalement déplacées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Ce ne sont pas des insinuations, ce sont des questions !

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Toutefois, Mme la ministre m'ayant assuré que les SOFIDev pourraient obtenir l'agrément avant leur création juridique officielle, je me rallie volontiers au sous-amendement du rapporteur général. Ce qui compte, c'est que les SOFIDev, destinées à aider les pays en voie de développement, voient le jour. Lors du débat sur le livret épargne codéveloppement, certains députés du groupe socialiste, comme Mme Pau-Langevin, avaient compris que le but était d'aider au développement du tissu économique de ces pays, et avaient voté la mesure.

Monsieur Cahuzac, vous avez tort de vous laisser aller à votre mauvaise foi habituelle (Protestations sur les bancs du groupe SRC), car tous les gens qui s'intéressent au codéveloppement savent que ces pays se heurtent, surtout en Afrique, à une difficulté majeure : leurs systèmes bancaires sont extrêmement déficients.

Quant à vous, monsieur Brard, comment pouvez-vous dire qu'il s'agit d'un amendement pour les blancs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce n'est pas ce que j'ai dit ! J'ai parlé du blanc dominateur !

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Il y a dans notre pays des noirs à même d'investir ! Il n'y a pas que les blancs qui en soient capables ! Tout ce débat est absurde, d'un autre âge.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Dans le cadre d'une discussion de fond comme celle que nous avons eue sur la maîtrise de l'immigration, nous n'aurions pas ce genre d'échanges.

Je souhaite ardemment que soit adopté cet amendement, qui apporte une réponse beaucoup plus efficace que les aides d'État à État : celles-ci n'arrivent pas forcément là où elles seraient nécessaires, notamment dans les villages d'Afrique en manque d'investissements. Si vous voulez, je peux vous faire un dessin !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Mme la ministre a clairement indiqué qu'elle pouvait conférer l'agrément à la société avant la promulgation de la loi qui créé ladite société. Cette assurance juridique rend mon sous-amendement devient sans objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Et voilà !

(Le sous-amendement n° 284 est retiré.)

(L'amendement n° 181 , modifié par la suppression du gage, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 211 rectifié .

La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Cet amendement reprend l'objectif de l'article 13 du projet de loi en faveur des consommateurs, qui avait emporté l'adhésion du mouvement consumériste. Il s'agit de remédier à une iniquité, qui veut que seules les associations de consommateurs d'origine syndicale puissent bénéficier d'un système de cotisations déductibles, à l'exclusion des autres. Je suis certain que la représentation nationale, si sensible au développement d'actions – imprécises à nos yeux – en Afrique, ne manquera pas d'adopter un amendement qui aura des conséquences extrêmement tangibles pour la défense des consommateurs dans notre pays.

(L'amendement n° 211 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 229 .

La parole est à M. Philippe Vigier.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

Chacun a bien compris que le soutien aux PME est un combat qu'il nous faut mener tous ensemble. Bien que certaines mesures gouvernementales déjà adoptées y contribuent déjà, nous proposons une nouvelle aide spécifique aux PME, car, si l'État est disposé, en cas de nécessité, à entrer dans le capital des banques, le soutien public aux PME est nettement plus limité.

En dehors de l'accès au crédit, ces entreprises se heurtent à une véritable difficulté : la faiblesse de leurs fonds propres. L'amendement vise à les renforcer, au moins temporairement, en augmentant la réduction d'impôt sur le revenu dont peuvent bénéficier les personnes physiques qui souscrivent au capital de PME – que ces personnes appartiennent ou non à la famille de l'entrepreneur ou à l'environnement géographique de l'entreprise. Les PME ont besoin, dans la tourmente actuelle, d'un soutien accru, et la mesure proposée va dans le sens des actions récentes du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission n'a pas adopté cet amendement, car une mesure importante a été décidée entre-temps : une dépense fiscale de 620 millions d'euros – par imputation sur l'ISF – a été consentie pour soutenir les fonds propres des PME. Le cumul de cette mesure avec le dispositif Madelin, dont le coût est de 180 millions d'euros, et qui répond au même objectif vital en ces temps de resserrement du crédit et d'augmentation des taux, nous paraît suffisant.

Il faudra de toute façon, dans un an, procéder à une évaluation de ces deux dispositifs. Nous verrons alors s'il y a lieu de déplacer les curseurs. Pour l'heure, votre proposition, monsieur Vigier, nous semble prématurée.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Même avis, pour la même raison – à laquelle j'en ajouterai cependant deux autres.

D'une part, le plafond du dispositif Madelin a été relevé régulièrement ces derniers temps. D'autre part, la souscription peut être étalée sur cinq ans, ce qui permet un investissement total de 100 000 euros.

Je précise au passage que le taux de 25 % n'a jamais été révisé depuis la mise en place du dispositif Madelin. Or, comme le taux d'impôt sur le revenu a baissé entre-temps, l'avantage comparatif de celui-ci s'en est trouvé accru.

Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable, bien que l'objectif poursuivi soit légitime.

(L'amendement n° 229 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 136 .

La parole est à M. Dominique Baert.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

Je ne doute pas que cet amendement, qui se comprend aisément, rencontrera l'assentiment du rapporteur général et du Gouvernement.

Ne s'adressant qu'aux seules personnes imposables, le mécanisme de la réduction d'impôt pour les dépenses liées à l'hébergement de personnes dépendantes exclut de son bénéfice la moitié des foyers fiscaux qui n'est pas imposable à l'impôt sur le revenu, alors qu'il s'agit justement des personnes les plus modestes.

Nous proposons donc de transformer en crédit d'impôt l'actuelle réduction d'impôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Parce que nous avions déjà émis un avis défavorable l'an dernier. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est plutôt de l'entêtement, voire de l'aveuglement !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, comme l'année dernière.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

D'un côté, il y a une réduction d'impôt, mais de l'autre, il y a l'APA. Le système me semble donc parfaitement équilibré.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

En fait, vous n'aimez ni les vieux, ni les anciens combattants !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Monsieur le ministre, je ne comprends pas bien votre argument. À ma connaissance, l'APA n'est pas soumise à condition de ressources. Je ne comprends pas la séparation que vous semblez dessiner entre ceux qui paient l'impôt sur le revenu et bénéficient d'un crédit d'impôt, d'une part, et ceux qui, non imposables, toucheraient l'APA, d'autre part. On peut très bien bénéficier de l'APA et avoir à payer l'impôt sur le revenu !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le calcul de l'APA tient compte des revenus du bénéficiaire : plus ceux-ci sont faibles, plus le montant de l'APA est élevé – à niveau de dépendance égale.

Il y a donc bien, d'un côté, une réduction d'impôt pour les personnes imposables, tandis que les personnes non imposables bénéficient toutes de l'APA – même si, je le sais, on peut aussi être imposable et percevoir l'APA.

(L'amendement n° 136 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de trois amendements, nos 174 , 74 et 13 , pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 74 fait l'objet d'un sous-amendement n° 280 .

La parole est à M. Jérôme Cahuzac, pour soutenir l'amendement n° 174 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Chacun en conviendra, on ne peut pas dire que les ressources budgétaires soient florissantes au point que nous puissions nous en réjouir et envisager avec sérénité l'évolution du déficit budgétaire.

L'amendement n° 174 vise à ramener les dépenses fiscales à des niveaux plus raisonnables. Certes, ces niveaux ont déjà fluctué dans le passé, mais ce n'est pas une raison pour considérer que le système doit rester figé. Nous estimons qu'il faut abaisser le plafond des dépenses déductibles de l'assiette de l'impôt sur le revenu. Cela nous paraît d'autant plus légitime dans une période où chacun doit consentir un effort pour revenir, le plus rapidement possible, à l'équilibre de nos finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je viens d'être saisi d'un amendement du Gouvernement, portant sur le même sujet. Je vais suspendre la séance quelques instants, le temps que cet amendement soit distribué.

Après l'article 2

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures trente-cinq, est reprise à vingt-trois heures quarante.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre du budget, pour soutenir l'amendement n° 285 rectifié .

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Plusieurs amendements portant sur les emplois à domicile ont été présentés : par le groupe UMP, par le groupe socialiste et par le groupe Nouveau Centre. Ce sujet, très sensible et très important pour l'emploi, mérite que l'on s'y attarde.

Le plafond de la réduction d'impôt accordée au titre des sommes versées pour l'emploi d'un salarié à domicile n'a pas varié depuis plusieurs années, alors que les salaires eux-mêmes ont évolué. Il serait normal que ce plafond de suive l'évolution des salaires.

Nous proposons donc, à l'initiative du groupe UMP et du groupe Nouveau Centre – que je remercie –, qu'il soit porté de 12 000 à 12 400 euros et relevé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu. Il me semble qu'il s'agit là d'une mesure de sagesse et de responsabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Frédéric Lefebvre, pour soutenir l'amendement n° 74 .

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Je présente cet amendement en tant que rapporteur spécial du budget de l'emploi, que j'aurai du reste l'occasion, le 5 novembre, de rapporter avec Gaëtan Gorce – et je présenterai à cette occasion un autre amendement, également relatif aux emplois familiaux. Avant de se lancer dans des réflexions hâtives, il faut se demander à quoi servent les services à la personne.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Le secteur des emplois familiaux est celui qui connaît le plus fort dynamisme depuis 2005 : plus 25 % par an, ce qui est un taux de progression exceptionnel. Ce dynamisme s'explique par des facteurs sociaux que chacun connaît : le taux de natalité, la liberté des femmes de travailler, le vieillissement de la population. La France compte 4 millions d'employeurs familiaux et 1,6 million de personnes employées dans ce cadre, un même salarié ayant le plus souvent plusieurs employeurs. Des efforts importants ont été réalisés en matière de formation, des conventions collectives ont été signées, des augmentations de cotisations pour les employeurs ont été décidées il y a quelques mois. On a donc pris collectivement conscience que les emplois familiaux étaient un gisement d'emplois considérable.

Je propose de porter à 15 000 euros le plafond du crédit d'impôt et de la réduction d'impôt sur le revenu accordés au titre des sommes versées pour l'emploi d'un salarié à domicile, et de procéder ainsi à un rattrapage.

Lorsque l'opposition actuelle était au pouvoir, elle n'avait pas supprimé ce dispositif, car elle avait bien compris que ce n'était pas pensable. Néanmoins, elle en avait abaissé le plafond, si bien que des salariés gagnant 1,3 fois le SMIC ont rebasculé vers le travail au noir.

Le Gouvernement propose, par son amendement, d'indexer le plafond de déduction et de le porter de 12 000 euros à 12 400 euros pour anticiper sur l'indexation à réaliser pour cette année. Cela va dans le bon sens. Ayant proposé moi-même un rattrapage, je voterai cet amendement avec beaucoup d'entrain. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Nous avons devant nous la discussion du budget de l'emploi, dont je suis le rapporteur spécial, puis le débat au Sénat. Nous aurons donc l'occasion de mesurer les évolutions intervenues depuis la dernière modification du plafond. Dans mon rapport, j'indiquerai à quel niveau il convient de le fixer pour que le rattrapage soit complet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Il est retiré.

(Le sous-amendement n° 280 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le rapporteur général pour défendre l'amendement 13 .

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je le répète, nous voulons être sérieux, et nous ne voulons pas le statu quo pour autant. Nous proposons donc une solution alternative à celle que propose le Gouvernement. La déduction pour emplois familiaux constitue l'une des huit niches fiscales sur lesquelles nous voulons agir, en plus du plafonnement global.

La commission a approuvé notre amendement tendant à réduire le plafond de 1 000 euros, ce qui rapportera de l'ordre de 50 millions. Cet ajustement modeste s'insérait toutefois dans une logique plus globale, que le Gouvernement n'a hélas pas retenue.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

M. Lefebvre a tout à fait raison sur le fond : les emplois familiaux sont utiles, et sont une réussite. Mais là n'est pas la question : il s'agit de savoir s'il faut ou non réévaluer le plafond de déduction. À sa création, en 1994, ce plafond était de 90 000 francs. Il a été réduit de moitié en 1998, puis porté à 10 000 euros en 2003 et à 12 000 euros en 2005, plus 1 500 euros par enfant ou personne de plus de 65 ans à charge.

Mais – j'y insiste – toutes ces modifications ont eu lieu en deuxième partie de la loi de finances. Le faire en première partie et augmenter le plafond en fin d'année, c'est faire profiter d'un pur effet d'aubaine des ménages qui ont déjà recruté un salarié à domicile. C'est pourquoi, en 2003 et en 2005, nous avions choisi de le faire en deuxième partie – et il en avait été de même lorsque le plafond avait été abaissé, afin de ne pas pénaliser les ménages.

Si nous n'avons pas modifié le plafond depuis 2005, c'est que nous estimons être parvenus à un équilibre. Il faut l'indexer, certes, car il est très lié à la politique familiale…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Prenons l'exemple d'une famille qui a un enfant de moins de trois ans – à partir de trois ans, en effet, les enfants sont à l'école dans la journée – qu'elle fait garder à domicile par une personne employée à plein temps, pour un salaire net de 1 032 euros, soit un peu plus du SMIC. Les cotisations patronales, d'un montant de 871 euros, sont exonérées, dans le cas d'un emploi familial, à hauteur de 510 euros. De plus, cette famille touche la prestation pour l'accueil du jeune enfant, qui est fonction des ressources du ménage. Pour une famille moyenne, c'est-à-dire dont les revenus sont compris entre 22 000 euros et 49 000 euros, le montant restant à charge, pour un salarié à plein temps, s'élève, compte tenu des éléments que j'ai indiqués, à 13 476 euros. Le plafond actuel de 12 000 euros, plus 1 500 euros pour un enfant, est donc tout à fait adapté. L'augmenter de quelques centaines d'euros n'aura aucun effet sur l'emploi, car la famille n'embauchera pas une deuxième personne : tout au plus fera-t-elle faire à son employé quelques heures supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je trouverais donc quelque peu gênant d'accorder à 3 % des ménages un avantage supplémentaire dont l'effet sur l'emploi n'est en rien démontré. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Il est certes légitime, comme le propose le Gouvernement, d'indexer le plafond, mais j'espère avoir convaincu M. Lefebvre que le porter de 12 000 euros à 15 000 euros n'a qu'un intérêt très limité. Mieux vaut consacrer l'argent disponible à des mécanismes plus incitatifs en faveur de l'emploi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Le dispositif lui-même est familier à la gauche, puisque c'est Martine Aubry qui l'a créé afin de favoriser l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…ainsi que de lutter, en effet, contre le travail au noir.

Cette mesure s'est révélée très utile. Elle a été accentuée une première fois en 1994 par le ministre du budget de l'époque, qui était M. Sarkozy. Le relèvement du plafond est venu, M. Sarkozy ne s'en est d'ailleurs nullement caché, en substitution d'une réforme de l'impôt sur le revenu. À l'époque, certains s'en souviennent…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…proposait une diminution très sensible du barème de l'impôt sur le revenu, et il le faisait avec insistance, car c'était un homme opiniâtre, qui défendait ses idées jusqu'au bout – au point d'agacer M. Sarkozy (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC), qui lui avait fait valoir, en séance, que la hausse du plafond de déduction pour l'emploi d'un salarié à domicile était bien plus intéressante que la baisse du barème de l'impôt sur le revenu. De fait, le soir même, dans l'avion qui me ramenait à Grenoble – et qui existait encore à l'époque –, j'ai expliqué à l'un de mes compagnons de voyage que cette mesure allait lui permettre de réduire sensiblement le montant de son impôt, et il ne pouvait en croire ses oreilles !

Le plafond de 12 000 euros – plus 1 500 euros par enfant à charge – permet à un couple ayant deux enfants d'économiser jusqu'à 7 500 euros d'impôt. C'est beaucoup. Ce n'est plus un simple avantage fiscal destiné à favoriser la création d'emplois : c'est un privilège fiscal, avec, de surcroît, un très fort effet d'aubaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Mais si ! La Cour des comptes a démontré, dans un rapport récent, que la quasi-totalité des contribuables concernés n'utilisaient pas pleinement cet avantage. En outre, la mesure a un caractère rétroactif, car elle s'applique à des emplois existants. Elle n'incitera donc personne à en créer. Ce n'est pas juste.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Une telle proposition aurait, à la rigueur, davantage de sens en deuxième partie de la loi de finances, mais mes objections de fond resteraient valables.

Si, de surcroît, l'on indexait le plafond de la déduction sans indexer celle en faveur des personnes handicapées,…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…il y aurait rupture d'égalité.

Je n'ai jamais vu, du reste, qu'une niche fiscale soit indexée. Le quotient familial l'est, mais le rapporteur général a excellemment exposé la différence entre une niche de ce type et le quotient familial, et nous affirmons tous deux, dans notre rapport commun, qu'il ne faut pas comparer ce qui n'est pas comparable. On peut donc concevoir que le quotient familial soit indexé, mais pas cette niche ; car que répondrez-vous lorsque nous vous proposerons d'indexer la prime pour l'emploi ?

J'insiste donc sur la gravité du précédent que vous vous apprêtez à créer, et qui me laisse stupéfait. Je souhaite que, dans un élan de sagesse, l'amendement soit retiré. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Renvoyons-le en commission, la nuit porte conseil !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Comme vient de le suggérer notre collègue Jean Launay, cet amendement aurait dû être renvoyé en commission.

Il faut reconnaître que Nicolas Sarkozy a de la suite dans les idées. On sait bien, en effet, que, lorsque Frédéric Lefebvre parle, c'est la voix de l'Élysée qui s'exprime, tant il est vrai qu'il est l'une des deux béquilles du Président de la République au sein de la commission des finances… (Rires sur les bancs des groupes GDR et SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Qui est l'autre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'autre est, je ne dirai pas plus sympathique car cela serait désobligeant pour notre collègue Lefebvre, mais plus souriant : il s'agit, bien sûr, de Jérôme Chartier. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Didier Migaud vient d'évoquer les débats que nous avons déjà eus ici sur le sujet qui nous occupe. J'avais surnommé cette disposition l'« allocation vison » (Sourires), car elle revenait à distribuer quelques piécettes supplémentaires, dont elles n'ont pas besoin, aux bourgeoises du 16e arrondissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Et que l'on ne vienne pas nous dire qu'il s'agit d'une mesure en faveur des salariés et de la création d'emplois : cela n'a rien à voir, même s'il est incontestable qu'elle a permis de blanchir du travail au noir.

Il faudrait que Frédéric Lefebvre nous dise – puisque dans vos milieux vous vous appelez par vos prénoms (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) – si Benjamin – de Rothschild, pour ceux qui ne lui sont pas familiers –, ou Ginette – Moulin – ou Pierre – Fabre – ou bien Yves – Rocher – ou encore Patrick – Ricard – sont venus, avec leurs familles, le voir dans sa permanence pour lui dire : « On n'y arrive plus ! Il faut nous aider ! N'aidons-nous pas déjà beaucoup l'économie nationale en achetant du foie gras, du caviar ? » (Sourires.)

La vérité que vous n'osez pas avouer, c'est que ce dispositif permet en outre à ceux qui se trouvent dans les situations presque immorales que décrivait M. de Courson, c'est-à-dire à des personnes qui ne sont même pas mariées, qui vivent en concubinage (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC), qui n'appartiennent pas au même foyer fiscal, d'avoir deux domestiques – et payés par qui ? (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.) Payés, via la TVA, par les chômeurs, les allocataires du RMI, les petits retraités… (Même mouvement.) En d'autres termes, vous plumez les pauvres pour donner de l'argent aux nantis !

Au moment où vous dites vous-mêmes qu'il n'y a plus d'argent dans les caisses, il faut tout de même un sacré culot pour, non seulement proposer une « indexation » – je reprends là le vocable choisi de Frédéric Lefebvre –, mais pour simplement maintenir ce privilège. Didier Migaud a évoqué Gilbert Gantier, alors assis là-haut, sur son banc, et je me rappelle la confrontation que nous avions eue à propos de ces gratifications accordées aux archiduchesses décaties du 16e arrondissement… (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Il n'y a jamais eu d'archiducs en France, monsieur Brard !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il y a aussi celles de Neuilly, sans oublier, monsieur le ministre, celles de Chantilly.

Madame Lagarde, vous qui venez des États-Unis, vous savez bien qu'il n'y existe pas de telles prébendes. Pourquoi donc ne les supprimez-vous pas chez nous, puisque vous jurez toujours par le modèle d'outre-Atlantique ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Sur le vote de l'amendement n° 285 rectifié , je suis saisi d'une demande de scrutin public par le groupe SRC.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Hervé Mariton.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Ce débat pourrait paraître superflu. Je pense qu'il est en fait très révélateur du complexe que nous éprouvons à propos de l'avantage fiscal accordé pour l'emploi d'un salarié à domicile. Dès lors que nous considérons qu'il s'agit d'une politique intelligente pour l'emploi, dès lors que nous estimons que cette politique permet la réalisation de missions très diverses – couvrant bien d'autres domaines que la seule garde d'enfants évoquée par le rapporteur général –, dès lors enfin que nous jugeons que ce dispositif s'est révélé utile pour faire sortir du travail au noir certaines activités, nous devons nous montrer parfaitement à l'aise pour le défendre.

Je souhaite qu'après ce débat qui nous prend du temps, nous cessions de considérer comme un privilège, comme une action anormale de l'État, l'avantage fiscal ainsi consenti. Il s'agit, j'y insiste, d'une politique intelligente, qui répond aux trois objectifs que je viens d'énoncer.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Lors de la préparation du budget pour 2005, nous avions décidé d'intensifier cette politique. Reste qu'il est anormal que le niveau de l'avantage n'ait pas été réévalué depuis.

Je me rends aux arguments du rapporteur général, qui considère qu'il ne doit pas y avoir d'effet d'aubaine et qui propose donc d'intervenir en deuxième partie. J'entends aussi la position du président de la commission des finances, et nous devrions avoir le courage paisible de considérer que cette politique intelligente n'a pas vocation à être contestée chaque année, mais au contraire à être mise à jour régulièrement afin de pouvoir donner sa pleine mesure. Non pas en suivant une logique d'indexation dont on peut redouter les effets pervers, mais en redéfinissant, paisiblement, année après année, le plafond. Peut-être pourrons-nous avoir cette discussion en deuxième partie.

Je fais par ailleurs observer au Gouvernement que son amendement, ainsi que l'a souligné le président Migaud, ne mentionne que le montant principal de 12 000 euros, et non les suppléments pour personnes à charge – au risque de vider progressivement ceux-ci de leur substance. Un vrai problème de cohérence se pose, et le Gouvernement devrait prendre l'engagement de réévaluer également la majoration de 1 500 euros par enfant ou personne âgée à charge, et agir de même en ce qui concerne le dispositif prévu pour les personnes handicapées.

Je souhaite enfin éclairer mes collègues sur le problème posé par l'article 81 du projet de loi de finances, qui vise à réduire le taux de l'abattement de cotisations patronales de sécurité sociale applicable aux particuliers employeurs. Cette mesure, en effet, revient à reprendre – et même au-delà – l'avantage que le Gouvernement propose de consentir par l'amendement actuellement en discussion.

La majorité comme l'opposition – puisque celle-ci a défendu en son temps une telle politique et justifié l'existence de tels avantages fiscaux – se doivent de reconnaître clairement que ces avantages sont nécessaires et qu'il faut les faire évoluer dans le temps pour tenir compte de l'évolution des salaires. Il conviendrait toutefois, afin de prendre également en considération l'argument de l'effet d'aubaine, l'objection légitime sur l'emploi du terme même d'indexation, et la dimension familiale de cette politique, de voter ces dispositions en deuxième partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

J'observe que nous discutons depuis trois quarts d'heure d'un éventuel avantage fiscal supplémentaire qui profiterait à 3 % des ménages.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Ce simple fait me paraît révélateur. Cela dit, si nous avons un important point de désaccord, il existe aussi de nombreux points de convergence.

Ainsi l'existence même d'une politique d'incitation fiscale aux emplois à domicile recueille-t-elle l'assentiment général. Le président de la commission des finances l'a rappelé : c'est Martine Aubry, alors ministre du travail dans le gouvernement d'Edith Cresson, qui a créé ce dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Aucune majorité ne l'a supprimé depuis, même si des majorités successives ont jugé bon de modifier, dans un sens ou dans un autre, le plafond attaché à ces avantages. Il ne s'agit donc pas d'une question de principe, mais de niveau. Je me permets d'y insister, car M. Mariton m'a donné l'impression d'opposer ceux qui seraient partisans de cette politique et ceux qui y seraient hostiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

La réalité est toute autre : c'est un gouvernement que vous ne souteniez pas qui est à l'origine de cette mesure, et par la suite un autre gouvernement, de même orientation, en a réduit le montant, mais sans remettre en cause, tant s'en faut, le principe.

Nous sommes donc d'accord pour maintenir l'existence du dispositif, et le président de la commission des finances en a parfaitement indiqué les raisons : outre qu'il correspond à certains besoins, il a puissamment contribué à légaliser des emplois précédemment non déclarés. Inutile de chercher des motifs de querelle là où il n'y en a pas : nous en avons suffisamment sur d'autres sujets.

Le président de la commission et le rapporteur général sont également d'accord, manifestement, sur le fait qu'il n'est pas nécessaire de relever le plafond actuel, celui-ci étant, dans les faits, loin d'être saturé. De deux choses l'une, donc : soit cette proposition de relèvement constitue une volonté, que d'aucuns pourraient qualifier de dogmatique, d'affichage politique – et il appartient alors à chacun de prendre ses responsabilités ; soit il s'agit vraiment de donner son plein effet au dispositif, auquel cas le plafond actuel le permet, puisque 12 000 euros plus 1 500 euros par enfant à charge suffisent à 97 % des contribuables concernés. L'exemple donné par Gilles Carrez le démontre à l'envi et vaut tous les raisonnements : Napoléon ne disait-il pas qu'un bon schéma valait mieux qu'un long discours ?

Nous avons, en revanche, un net désaccord en ce qui concerne l'indexation : si cette niche était la seule indexée, on serait en droit de se demander pourquoi la représentation nationale indexe le plafond d'une niche non saturée, alors qu'elle s'apprête selon toute probabilité à refuser d'indexer la prime pour l'emploi, laquelle touche nettement plus de familles – et des familles qui ont plus besoin d'un effort de la collectivité nationale que les 3 % de ménages concernés par l'amendement.

Bref, monsieur Mariton, nous ne nourrissons aucun complexe au sujet d'un dispositif qui a été créé par la gauche, puis maintenu et renforcé par la droite, puis maintenu et réduit par la gauche, puis maintenu et augmenté de nouveau par la droite. Nous retenons de l'exemple donné par le rapporteur général qu'adopter en l'état, et en première partie, l'amendement du Gouvernement, serait scandaleux. Comment peut-on prétendre qu'il aurait un effet incitatif à la création d'emplois, dès lors qu'il bénéficierait à celles et ceux qui l'utilisent déjà ? Je ne crois pas que les finances de l'État soient dans une situation telle que nous puissions admettre un effet d'aubaine aussi patent, en faveur de ménages qui, objectivement, n'ont pas besoin de ce coup de pouce supplémentaire.

Si la majorité acceptait de renvoyer l'amendement en deuxième partie, ce ne serait pas entièrement satisfaisant à nos yeux, mais au moins le pire serait-il évité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Gilles Carrez espérait m'avoir convaincu. Je suis désolé de lui répondre que je ne l'ai pas été, et ce pour une raison simple : comme je l'ai dit tout à l'heure, les emplois dont il s'agit ici ne sont pas des emplois à temps plein qui ne concerneraient qu'une personne ayant un employeur. La structure même de ces emplois, c'est 2,3 employeurs pour un salarié.

Il a été dit que la mesure proposée ne concernerait que 3 % des 4 millions d'employeurs. Mais s'il y a ne serait-ce que 100 000 ou 120 000 employeurs susceptibles d'embaucher quelqu'un ou de le payer davantage, l'impact sur l'emploi sera important et immédiat.

Notre collègue Cahuzac a dit que personne n'avait supprimé le dispositif. C'est vrai, mais Didier Migaud a rappelé que, lorsque le plafond a été considérablement augmenté, l'opposition de l'époque l'a attaqué. Or, c'est à ce moment-là que nous avons constaté un effet massif en termes d'embauche et de régularisation du travail au noir. C'est pourquoi je suis parfaitement d'accord avec Hervé Mariton : en cette affaire, il ne faut surtout pas avoir de complexes, bien au contraire, car il s'agit de favoriser l'emploi.

Je ne souscris pas du tout, en revanche, à l'idée qu'il existerait un effet d'aubaine, et je suis donc en désaccord total avec ce qu'ont dit Jérôme Cahuzac et Gilles Carrez. J'en discutais tout à l'heure avec Jérôme Chartier, et nous en avons beaucoup parlé en commission des finances.

Vous semblez oublier que le SMIC a été augmenté à de nombreuses reprises, et que les particuliers employeurs ont eu à subir ces augmentations. (Exclamations sur les bancs SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Vous semblez aussi oublier ce que je n'ai fait qu'évoquer brièvement tout à l'heure : des conventions de formation ont été signées, ce qui est nouveau, et s'est traduit par des augmentations de cotisations pour ces familles.

Il y aurait un effet d'aubaine s'il n'y avait pas tout cela. Nous retrouvons ici la logique des dispositions de la loi TEPA sur les heures supplémentaires. Les familles employeurs ont supporté depuis un certain nombre d'années des surcoûts dont le poids se fait sentir à un moment où, on le sait, tout est plus difficile pour tout le monde. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Il faut en finir avec cette obsession à n'envisager les choses que du côté de l'employeur, jamais de celui de l'employé. Nous aurons à discuter, à l'occasion du budget de l'emploi dont je suis rapporteur spécial, des exonérations de charges sociales. L'objectif est de ne pas faire sortir des salariés du dispositif, car cela aurait pour effet de les faire rebasculer dans le travail au noir. Grâce aux mesures qui ont été prises, 70 % de ces salariés, en l'espace de deux ans, sont passés au réel. Ils sont payés au SMIC et bénéficient d'une plus grande stabilité. Il faut aussi penser à ces gens dont la situation demeure difficile. (Même mouvement.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

À un moment où nous connaissons des tensions sur l'emploi, nous devons nous montrer raisonnables et, donc, adopter le dispositif proposé. Celui du Gouvernement ne va pas aussi loin que je le souhaitais, mais il a au moins le mérite de procéder au rattrapage nécessaire et d'adresser un signal à ces familles, pour qu'elles continuent d'embaucher. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Je me réjouis que nous ayons pu avoir ce débat très important.

L'indexation est une mesure sage. J'ai bien entendu ce qu'a dit le président de la commission des finances, mais il est logique d'indexer sur une base qui est, grosso modo, celle de l'inflation, puisque les salaires versés augmentent. C'est d'ailleurs pourquoi le plafond avait été relevé à nouveau en 2005.

La prime pour l'emploi ne relève pas de la même logique, car il y a, de l'autre côté, le revenu de solidarité active, soit 1,5 milliard d'euros.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

S'agissant des modalités de calcul, et en particulier de l'éventuel relèvement de la majoration pour personne à charge, je propose d'en rester pour l'instant à l'amendement du Gouvernement, et d'introduire des corrections le cas échéant lors de l'examen par le Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je voudrais redire que l'amendement que nous propose le Gouvernement pose des problèmes de rédaction, qu'a soulignés Hervé Mariton.

Mais je voudrais ajouter un autre argument – dont Hervé Mariton se souvient certainement très bien puisque nous étions intervenus, l'un et l'autre, il y a deux ans, sur cette discussion. Lorsqu'un enfant est gardé à l'extérieur, ses parents bénéficient d'un crédit d'impôt, qui s'articule à la présente réduction d'impôt. Par conséquent, la rédaction de l'amendement s'insère mal dans le code.

Je souhaite donc que le Gouvernement ait la sagesse de réserver cette question pour la deuxième partie, comme nous l'avons toujours fait depuis que le dispositif existe.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je retiens de notre discussion que nous ne pouvons pas travailler de façon improvisée. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable à l'amendement du Gouvernement, à moins qu'il ne soit renvoyé à la deuxième partie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP et du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je crois que nous nous acheminons vers une conclusion sage, à laquelle le rapporteur général essaie de nous amener, et surtout d'amener la majorité.

Je voudrais attirer votre attention, mes chers collègues du groupe UMP, sur l'accumulation des mesures que vous êtes en train de prendre. Plusieurs intervenants, et notamment le rapporteur général, ont démontré que l'effet de l'amendement sur l'emploi serait nul, puisque le plafond n'est pas saturé. En réalité, vous vous apprêtez à procurer un avantage supplémentaire à une catégorie de population qui n'en a pas besoin.

Cette proposition vient s'ajouter à plusieurs autres, et ce dans un climat général auquel vous devriez être attentifs. Il ressort en effet de la discussion sur le financement du RSA que les bénéficiaires du bouclier fiscal échapperont à la contribution et au prélèvement correspondants.

D'autre part, cet après-midi, la commission des affaires sociales, à l'initiative du président Méhaignerie et de M. Bur, a voté, s'agissant de la prise en charge des frais de transport, une disposition défavorable aux salariés.

Enfin, alors même que le Gouvernement voulait s'attaquer, dans une certaine mesure, aux parachutes dorés en les soumettant à contribution, un amendement au PLFSS a été adopté en commission, qui tend à les exonérer en deçà d'un million d'euros.

En d'autres termes, le Gouvernement affiche de vagues intentions que la majorité contredit ensuite en adoptant des mesures qui, loin de favoriser l'emploi, procurent des avantages supplémentaires aux plus riches de nos concitoyens, lesquels n'en ont nul besoin.

Nous souhaitons donc que l'amendement du Gouvernement ne soit pas voté, et que soit adopté, en revanche, celui déposé par le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement demande une brève suspension de séance.

Après l'article 2

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le jeudi 23 octobre 2008 à zéro heure vingt-cinq, est reprise à zéro heure trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre du budget.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le Gouvernement propose, après en avoir discuté à la faveur de cette brève suspension de séance, de repousser l'examen de l'amendement en deuxième partie, au moment où nous examinerons le budget de l'emploi, afin que les choses soient bien claires. Cela permettra également d'étudier la question des majorations familiales auxquelles il a été fait allusion.

Il me semble que cette démarche pourrait recueillir l'agrément de l'Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Comme je le disais tout à l'heure en présentant l'amendement n° 74 , il s'agit du pendant du dispositif de l'article rattaché au budget de l'emploi – budget dont je suis le rapporteur spécial. Débattre de l'ensemble au moment de l'examen de ce budget, plutôt que des articles non rattachés, nous permettra de prendre le temps d'examiner également les propositions d'Hervé Mariton et d'un certain nombre de nos collègues, et de compléter ainsi le dispositif. Le débat sera alors clair, car nous envisagerons à la fois l'aspect social et l'aspect fiscal des choses.

Je retire donc mon amendement.

(L'amendement n°74 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Le Gouvernement a pris une très sage décision en acceptant de traiter de cette matière en deuxième partie. Dans ces conditions, je retire également l'amendement de la commission.

(Les amendements nos 13 et 285 rectifié sont retirés.)

(L'amendement n° 174 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, il est dommage que vous n'ayez pas jugé utile de me donner la parole avant le vote.

Je voulais simplement faire une remarque d'ambiance. J'ai beaucoup apprécié l'intervention de Frédéric Lefebvre. Je me disais que, décidément, il n'y a pas d'heure pour avaler son chapeau (Rires sur les bancs des groupes GDR et SRC), et ce grâce au débat que nous, à gauche, avons mené contre une proposition inique et illégitime.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La suite de la discussion de la première partie de la loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Prochaine séance, ce matin, jeudi 23 octobre, à neuf heure trente :

Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2009.

La séance est levée.

(La séance est levée à zéro heure trente-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma