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Commission des affaires économiques

Séance du 15 novembre 2011 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • COV
  • agriculteur
  • blé
  • brevet
  • obtenteur
  • semence
  • semences de ferme
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  • végétale

La séance

Source

La commission a auditionné sur la question des « semences de ferme » M. Jean-Marc Bournigal, directeur de cabinet du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, M. Daniel Segonds, président du Groupement national interprofessionnel des semences et plants (GNIS), M. Guy Kastler, délégué général du Réseau semences paysannes, membre de la Confédération paysanne, M. François Lucas, premier vice-président de la Coordination rurale, et M. Xavier Beulin, président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA).

PermalienPhoto de Serge Poignant

La commission des affaires économiques a débuté la semaine dernière l'examen de cette proposition de loi.

De nombreux points font consensus : chacun admet qu'il importe de privilégier le principe du certificat d'obtention végétale (COV) par rapport à celui du brevet, car il est plus souple que le système du brevet, qui rend impossible, quels qu'en soient la forme ou l'objet, l'utilisation d'une variété brevetée ou de ses fruits sans l'accord du propriétaire et sans versement de droits ; il existe alors un risque de placer l'utilisateur dans une situation de dépendance totale.

Néanmoins, l'article 14 relatif aux semences de ferme a suscité des interrogations, sur son principe même – faut-il réglementer l'usage des semences de ferme ? – et sur les modalités pratiques de sa mise en oeuvre.

Avant que nous ne reprenions l'examen du texte et afin de recueillir les informations complémentaires dont vous avez souhaité disposer, j'ai donc proposé que nous auditionnions aujourd'hui plusieurs personnalités, que je remercie d'avoir bien voulu être parmi nous : M. Jean-Marc Bournigal, directeur de cabinet du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, M. Daniel Segonds, président du Groupement national interprofessionnel des semences et plants, M. Guy Kastler, délégué général du Réseau semences paysannes, M. François Lucas, premier vice-président de la Coordination rurale, et M. Xavier Beulin, président de la FNSEA.

Je vous propose de procéder de la manière suivante : les propos liminaires étant inutiles après les débats de la semaine dernière, les personnalités présentes répondront aux questions brèves que poseront les orateurs inscrits. L'examen des articles pourra ainsi commencer aux alentours de 17 h 45.

PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur le président, je vous remercie d'avoir organisé si vite cette séance. Je remercie également les personnalités qui ont bien voulu répondre à votre invitation. Une fois n'est pas coutume : même si nous préférons que le ministre puisse apporter lui-même des réponses à nos questions, j'ai accepté au nom du groupe SRC que, compte tenu des délais, il soit représenté ce soir par son directeur de cabinet.

Le texte que nous examinons n'a rien d'anodin. Les certificats d'obtention végétale sont certes préférables aux brevets, mais le fait de sacrifier les semences de ferme risque de coûter très cher aux agriculteurs. L'échange que nous avons ce soir est donc particulièrement bienvenu.

PermalienPhoto de Michel Raison

Je m'associe aux remerciements de M. Brottes.

Quels risques l'Assemblée prendrait-elle en refusant ce texte, au regard notamment de la promotion par la France du système du COV face au brevet ?

Par ailleurs, étant bien entendu que la proposition de loi protège le recours à la semence de ferme, qu'en sera-t-il du paiement ? Faut-il monter une « usine à gaz » pour en assurer la perception ? Qui paiera, et comment ? Une variété entrée dans le domaine public donnera-t-elle aussi lieu à paiement ? Comment recenser les agriculteurs concernés – certains échapperont-ils au dispositif ? Il faut répondre à ces questions pour que les collègues les moins convaincus disposent de tous les éléments nécessaires.

PermalienPhoto de Germinal Peiro

La commission était unanime pour privilégier les certificats d'obtention végétale face aux brevets et pour reconnaître que le travail de recherche devait être rémunéré. Nous étions cependant nombreux à considérer que le droit de réutiliser une partie de sa récolte pour ensemencer était également un droit inaliénable des agriculteurs. Du reste, sur le plan économique, l'agriculture française peut-elle subir 30 millions d'euros de taxation supplémentaire ?

Quels sont, par ailleurs, les avantages environnementaux des semences de ferme en termes de biodiversité et de protection des sols ?

PermalienPhoto de Claude Gatignol

Quelle définition peut-on donner de la « semence de ferme » ? Est-elle liée à une surface cultivée, à une espèce ou à une quantité produite ?

Qu'en est-il par ailleurs de l'auto-consommation – animale lorsqu'il s'agit des animaux de la ferme, mais aussi agricole lorsqu'il est question du réensemencement d'une parcelle ?

Enfin quelle serait l'instance de coordination chargée d'évaluer l'éventuelle redevance ? Quels seront la destination et le circuit de cette redevance ?

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Les variétés nouvelles se dégradant rapidement, quel intérêt y a-t-il à payer des royalties pour un produit qui a perdu ses qualités originelles ?

D'autre part, quel contrôle pourra-t-on exercer pour les semences fourragères, qui relèvent d'un système déclaratif ? Il faudrait alors rétablir des gabelous dans les campagnes.

Lorsque j'étais sélectionneur d'animaux, le prix de l'animal était défini une fois pour toutes lors de la vente : si l'acheteur de l'un de mes cochons reproducteurs voulait en faire de la charcuterie, rien ne l'en empêchait ! Ne faudrait-il donc pas intégrer tous les coûts dès le prix de vente de la semence ? Les meilleures semences seraient mieux rémunérées, car les agriculteurs en achèteraient davantage, alors que le système de péréquation proposé profitera aussi aux producteurs de produits de moindre qualité.

PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

À ma connaissance, les semences paysannes ne sont nullement concernées par la proposition de loi. Quant aux semences de ferme, le texte les légalise. La question est donc de savoir si les utilisateurs de ces semences de ferme participeront à l'effort de recherche. Pour ma part, je souhaite que ce soit le cas, à charge pour nous et pour les services techniques de trouver le meilleur moyen de le faire.

Il est faux de dire que le dispositif prévu reviendrait à interdire aux agriculteurs d'utiliser les semences de ferme. C'est tout le contraire !

Enfin, lorsqu'un virus peut faire le tour de la terre en moins d'une journée, il est indispensable de disposer, pour le règne végétal, et particulièrement pour les semences, d'une véritable traçabilité.

PermalienPhoto de Frédérique Massat

A-t-on chiffré le montant de la taxe supplémentaire qu'entraînerait l'application du texte ?

Qu'en est-il, par ailleurs, de la réduction de 50 à 60 % des intrants phytosanitaires que permettrait, comme nous l'avons entendu, l'utilisation des semences de ferme ?

Quel est enfin l'impact des semences de ferme sur la biodiversité, l'aménagement du territoire et l'emploi local ?

PermalienPhoto de Annick Le Loch

L'enjeu d'aujourd'hui me fait penser à la situation de l'ostréiculture : à cause d'une sélection trop poussée, qui a limité la biodiversité, les ostréiculteurs ont perdu une grande partie de leur naissain, et ils ont beaucoup de mal à le reconstituer. Les semences de ferme ne sont-elles pas précisément l'alternative au manque de variété ?

En produisant leurs semences, les agriculteurs garantissent la pérennité du premier maillon de la chaîne alimentaire. Une sélection trop poussée ne nuira-t-elle pas à la diversité et à la qualité des variétés ?

PermalienPhoto de Francis Saint-Léger

Soyons concrets. Quel serait le coût de ce texte pour un producteur cultivant 100 hectares ?

Comment les fonds recueillis seront-ils utilisés pour la recherche ? Qu'apporte la recherche en termes d'amélioration variétale, par exemple pour la résistance aux maladies ou à la verse, ou en termes de rendement ?

PermalienPhoto de William Dumas

De nombreux agriculteurs, et notamment parmi les moins de 35 ans, utilisent des semences de ferme. La proposition de loi ne privera-t-elle pas les agriculteurs de la possibilité d'adapter les variétés végétales aux particularités climatiques et au terroir de leurs territoires ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Nicolas

Je rappelle que ce texte était à l'étude au Sénat depuis 2006. La différence entre les COV et les brevets paraît évidente. Le texte protège les semences de ferme, qui n'étaient pas protégées jusque-là, et il permettra que ces semences contribuent au financement de la recherche.

Pourrait-on préciser ce que l'on entend par « petits agriculteurs » ?

PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Cette proposition de loi se situe aux antipodes du Grenelle de l'environnement.

D'autre part, les trieurs à façon et les agriculteurs font de plus en plus souvent l'objet de contrôles de la part des agents du Groupement national interprofessionnel des semences détachés à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), sur les chantiers de triage. Le fait que des agents de l'interprofession privée semencière accompagnent les agents de la répression des fraudes dans leurs missions de service public ne comporte-t-il pas le risque d'un conflit d'intérêts ?

PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Du débat que nous avons engagé la semaine dernière se dégagent deux questions. La première est celle de la légitimité de la perception de royalties sur les semences de ferme – qui sont, me semble-t-il, reconnues comme étant génétiquement le même produit que la semence achetée, même si la « galénique », c'est-à-dire l'enrobage, peut différer. La deuxième question est de savoir si la résistance de la pratique de la semence de ferme s'explique par le coût, ou par des questions phytosanitaires liées à l'enrobage.

Ensuite, il y a la question des modalités de paiement : s'il est possible d'appliquer des royalties sur les semences livrées, cela semble difficile pour les semences autoconsommées. Un forfait ne serait-il pas préférable à un système déclaratif, qui ne fait guère partie de la culture paysanne – en particulier dans le sud de la France ?

PermalienPhoto de Henri Jibrayel

Cette proposition de loi vise à interdire aux agriculteurs d'utiliser une partie de leur propre récolte comme semences pour les obliger à acheter celles de l'industrie ou, dans le cas de certaines espèces comme le blé, à les y autoriser en échange du paiement de royalties. Comment expliquer que l'industrie, qui n'a jamais rien payé pour utiliser toutes les semences qu'elle a prises dans les champs de ces paysans afin de sélectionner les siennes, puisse aujourd'hui exiger des royalties aux agriculteurs qui les réutilisent ?

PermalienPhoto de Alain Suguenot

Qui paie ? Comment ces contributions seront-elles prélevées ? Le forfait pourrait être une formule intéressante : plutôt qu'une « Hadopi » de la semence évoquée par boutade la semaine dernière, ne faudrait-il pas envisager une forme de « licence globale » ?

PermalienPhoto de Jean Launay

Ma question sera brutale, mais simple : n'existerait-il pas un lien entre les semences de ferme, les certificats d'obtention végétale et les OGM ?

PermalienJean-Marc Bournigal

, directeur de cabinet du ministre de l'Agriculture. La proposition de loi a pour objectif de faire face à trois grands enjeux. D'abord, consolider notre modèle de protection de la propriété intellectuelle sur les obtentions végétales et nous prémunir contre le risque de prévalence de certaines firmes privées. C'est là que s'éclaire la différence entre le certificat d'obtention végétale et le brevet. Le premier limite la protection aux usages commerciaux de la variété et de ses fruits, tandis que l'utilisation à des fins de recherche, y compris pour la création de nouvelles variétés, reste possible. Le brevet, au contraire, rend impossible, quels qu'en soient la forme ou l'objet, l'utilisation d'une variété brevetée ou de ses fruits sans accord du propriétaire et versement de droits, y compris pour la recherche. Le COV donne donc beaucoup plus de liberté et permet des avancées en matière de sélection végétale. C'est le choix qu'avait fait la France en 1961 lors de la Convention de l'Union internationale pour la protection des obtentions végétales.

S'agissant de l'utilisation des semences de ferme, je rappelle qu'aujourd'hui, un agriculteur ayant acheté des semences de variétés protégées par un COV national n'a pas le droit de ressemer les graines récoltées : la loi permettra donc aux agriculteurs d'utiliser ces semences issues de la récolte dans un cadre légal.

Le troisième grand objectif consiste à assurer une juste rémunération de la recherche. Depuis des décennies, l'évolution des rendements est liée à la sélection variétale développée par la recherche, qui demande, dans le domaine végétal, une mobilisation d'une dizaine d'années en moyenne, avec des coûts très importants. Compte tenu de ce que nous attendons de la sélection végétale – qu'il s'agisse de l'amélioration des rendements, de la résistance aux maladies en évitant l'usage des pesticides, de la moindre consommation d'engrais chimiques, de l'adaptation aux évolutions climatiques ou de l'amélioration de la qualité nutritionnelle et organoleptique –, il convient de mobiliser les moyens nécessaires.

La loi n'a pas pour objet d'interdire l'utilisation des semences de ferme, mais bien au contraire de l'autoriser. Pour ce qui est des modalités de rémunération, on a choisi de laisser se dégager la voie la plus consensuelle possible dans le cadre d'un débat interprofessionnel, afin d'éviter de monter des usines à gaz. Certaines solutions sont cependant plus simples que d'autres. Un accord interprofessionnel s'applique déjà au blé – mais il est vrai qu'il est plus facile de prélever une partie de la rémunération en cas de vente de produits et qu'il faudra sans doute trouver des systèmes différents pour la partie fourragère. Des discussions interprofessionnelles semblent être le meilleur cadre pour trouver la solution la moins compliquée – sans exclure, monsieur Dionis du Séjour, le système déclaratif qui existe chez certains de nos voisins.

Quant à savoir si l'agriculture peut absorber une trentaine de millions d'euros de prélèvements par an, il me semble que ce montant reste assez faible par rapport au chiffre d'affaires du monde végétal, a fortiori si l'on tient compte de l'ensemble des enjeux.

L'autoconsommation recouvre plusieurs réalités. Mais, l'alimentation du bétail, qui oriente directement une partie de la sélection vers l'amélioration des végétaux – en recherchant par exemple, des plantes produisant plus de protéines ou d'oméga 3 –, n'entre pas dans cette définition.

Le texte prévoit, en outre, des tolérances pour les petits agriculteurs – soit jusqu'à 92 tonnes.

PermalienDaniel Segonds, président du Groupe national interprofessionnel des semences et des plants, GNIS

Les principes de la rémunération de la recherche et de la protection de la propriété intellectuelle – sur lesquels vous êtes d'accord – constituent la question essentielle.

Participant à de nombreux forums internationaux, je peux témoigner que certains considèrent le COV comme beaucoup trop laxiste et insuffisamment protecteur par rapport au brevet. La France et, plus largement, l'Europe doivent donc mener un combat qui n'est pas gagné d'avance, l'adhésion de notre pays à l'Union des protections des obtentions végétales (UPOV) de 1991 constituant une étape majeure dans ce processus. 21 Etats membres de l'Union européenne ont d'ailleurs déjà ratifié la convention UPOV.

En permettant à tout chercheur, sélectionneur ou agriculteur d'utiliser une variété protégée par le COV pour en créer une autre, la propriété intellectuelle est « open source » et conforte ainsi le progrès génétique. Il est difficile, de ce point de vue, de prétendre que les agriculteurs soient volés, la sélection variétale ayant commencé voilà plus de deux cents ans à partir des populations de pays – ce qui n'est évidemment plus possible aujourd'hui, d'où les 14 % de notre chiffre d'affaires que nous consacrons à la recherche. Nous créons ainsi de nouvelles variétés grâce au COV en nous appuyant sur celles qui sont dans la nature et, parmi elles, celles de nos concurrents.

Les semences de ferme, quant à elles, sont issues d'une partie de la récolte que l'agriculteur a engrangée, et sont utilisées à des fins de reproduction - les 21 espèces traditionnellement répertoriées sont celles qui se reproduisent à l'identique. Un agriculteur qui choisit d'utiliser l'une de nos variétés pour la réutiliser à des fins commerciales profite du même progrès génétique que celui qui l'a achetée la première fois, et il n'y a aucune raison qu'il n'en paie pas le prix – lequel reste à déterminer. Si l'on admettait que les semences de ferme soient exemptées de redevance, cela reviendrait à faire payer certains et à dispenser d'autres de toute contribution – d'autant plus que, contrairement à ce que l'on pense, les petits agriculteurs ne sont pas toujours les premiers utilisateurs de semence de ferme, en raison des équipements que cette pratique requiert. De même, il n'y a aucune raison pour que l'autoconsommation soit exemptée.

Alors, combien cela coûtera-t-il ? S'agissant du blé tendre, la redevance représente de 3,5 à 4 euros par hectare, somme modique par rapport aux progrès obtenus, puisque les nouvelles variétés entraînent une augmentation de la production d'un quintal à l'hectare par an, et que le quintal se vend 18 euros.

Par ailleurs, il ne faut pas amalgamer COV et objectifs ou objets de créations variétales. La juste rémunération de la recherche permet aux 70 sociétés semencières que compte notre pays d'investir plus encore afin de répondre aux exigences du Grenelle de l'environnement visant à promouvoir des variétés requérant moins d'intrants, d'eau et de pesticides. Ce sont de vastes champs de recherche qui s'ouvrent devant nous – et nous avons intérêt à trouver des variétés aussi diverses que possible.

PermalienPhoto de Serge Poignant

En moyenne, combien rapporte un hectare de blé tendre ?

PermalienDaniel Segonds, président du Groupe national interprofessionnel des semences et des plants, GNIS

Cela dépend des zones mais dans l'Aveyron, par exemple, cela peut représenter 1 500 euros.

PermalienFrançois Lucas, premier vice-président de la Coordination rurale

Cela dépend des années : ce revenu peut varier du simple au double.

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Comment mettre en place cette redevance dans le cas d'une autoconsommation totale ?

PermalienDaniel Segonds, président du Groupe national interprofessionnel des semences et des plants, GNIS

Dans le cadre d'accords interprofessionnels, ou par une modalité déclarative.

PermalienGuy Kastler, délégué général du Réseau semences paysannes, membre de la Confédération paysanne

La Confédération paysanne défend le principe du COV – nettement préférable à celui du brevet – à condition que ce dernier demeure « open source » : la vente de semences de la variété concernée est ainsi protégée, rémunération logique de l'effort de recherche, mais cette variété demeure libre pour d'autres utilisations, notamment afin de produire d'autres variétés. Un tel système a d'ailleurs fait la puissance des obtenteurs français et européens, sachant que le premier fonds génétique a été constitué par les sélections paysannes effectuée tout au long des siècles. J'ajoute que, jusqu'en 1991, la liberté de réutiliser les semences de ferme n'a jamais été remise en cause dans le cadre du COV parce qu'elle permet de réalimenter constamment ce fonds dans lequel puisent les sélectionneurs – il suffit de prêter attention aux discussions actuelles sur les collections de ressources génétiques, auxquelles ils sont très attachés.

Cette PPL, dites-vous, vise à privilégier le COV plutôt que le brevet. Si nous sommes d'accord sur ce principe, une menace n'en pèse pas moins via le brevet sur l'information génétique visant à protéger un seul gène présent par injection ou contamination dans une variété. Une telle protection ne manquera pas d'être étendue à l'ensemble des plantes dans lesquelles il se trouve et le texte que vous défendez ne prévoit aucune protection à cet égard. En fait, vous vous préparez à laisser les multinationales détentrices de brevets s'emparer de la totalité des variétés protégées par des COV, ce dont notre industrie ne manquera pas de souffrir.

Vous proposez, de surcroît, de transformer le COV en brevet, en interdisant de facto les semences de ferme. Vous prétendez que ces dernières, jusqu'ici, n'étaient pas légales, mais c'est faux depuis le règlement européen d'application directe de 1994, concernant 21 espèces. Or, la part des COV français par rapport aux COV européens est faible. Vous prétendez d'autre part que les redevances perçues favoriseront le développement de la recherche. Mais non ! M. Segonds, par exemple, est sélectionneur de soja. L'interdiction des semences de ferme a-t-elle entraîné une explosion du nombre de variétés et de cultures en ce domaine ? Non ! La solution réside dans l'application du Plan protéines et relève de la politique agricole.

De plus, Monsieur Bournigal, cette PPL ne règlera pas les problèmes liés au COV français de la loi de 1970, car elle vise à mettre en place une usine à gaz permettant de prélever des redevances sur l'ensemble des semences de ferme, y compris celles qui sont protégées par un COV européen et qui sont les plus nombreuses.

La redevance sur le blé tendre, qui existe depuis 2001, résulte d'un accord interprofessionnel mais elle est en porte-à-faux par rapport à la réglementation européenne qui la considère comme une taxe parafiscale. Or, le règlement de 1994 interdit le prélèvement d'une telle redevance par l'État car elle devient alors un impôt. Et le versement du produit d'un impôt à une catégorie professionnelle, cela s'appelle une subvention, ce qui soulève un problème concurrentiel. Comment pouvez-vous songer à généraliser un mécanisme contesté par la Commission européenne ?

De plus, cette contribution volontaire obligatoire (CVO) ne sera pas remboursée à un agriculteur qui n'aurait pas acheté de semences certifiées, qui aurait utilisé une variété tombée dans le domaine public ou qui aurait sélectionné ses propres semences. Un tel mécanisme est donc absolument inique !

Par ailleurs, l'obligation de traçabilité nous impose d'indiquer la variété que nous avons semée mais les obtenteurs sont-ils d'accord pour mentionner les ressources génétiques qu'ils utilisent pour sélectionner leurs variétés ? Non ! Cela relève du secret professionnel. Les agriculteurs n'auraient donc pas droit à la confidentialité de leurs propres informations professionnelles ?

Comment appeler un fichier, qui plus est disponible sur Internet, contenant le nom des agriculteurs utilisant des semences de ferme, sinon un fichier de clientèles pour les représentants en semences qui ne manqueront pas dès lors de venir nous déranger chaque jour ?

La concurrence entre semences de ferme et semences commerciales constitue le meilleur moyen de maintenir des prix équilibrés, alors que la généralisation du droit de licence souhaitée par M. Segonds entraînerait une hausse considérable, comme le montre déjà l'exemple du maïs : le prix de la semence est le plus cher à l'hectare, car la semence de ferme est en l'occurrence impossible.

Qui gagnerait sa vie avec les seuls droits de propriété intellectuelle – COV ou brevets – aurait intérêt à ce que chaque variété soit cultivée sur d'immenses surfaces, ce qui implique l'utilisation d'engrais chimiques et un enrobage des semences avec des insecticides. Quid, dans ces conditions, de la biodiversité ? Les semences de ferme, en revanche, sont adaptées localement. Loin de se dégrader, elles évoluent, et nous pouvons nous aussi procéder à des sélections, afin de favoriser une adaptation aux changements climatiques.

Enfin, vous avez voté les lois du Grenelle de l'environnement tendant à rendre accessibles les variétés-populations en les inscrivant au catalogue officiel, et vous défendez maintenant une PPL qui l'interdira de facto en raison d'une incompatibilité des définitions. Où est la cohérence ?

PermalienFrançois Lucas, premier vice-président de la Coordination rurale

Nous sommes attachés au COV pour toutes les raisons qui ont été évoquées, mais la question de la redevance appelle celle de l'argent facile : quoi de plus confortable que de regarder des paysans s'échiner pendant que l'on encaisse les royalties ?

Les obtenteurs n'ont pas eu besoin de la redevance jusqu'ici pour effectuer un bon travail. Curieusement, la courbe de productivité concernant le blé tendre ascendant de 1960 à 1998, a eu tendance à baisser depuis 2001, année où l'on a institué la redevance. C'est sans doute que la relation n'est pas aussi directe que certains l'assurent, entre le financement de la recherche, l'utilisation des semences de ferme et la productivité des cultures.

Du reste, à qui la recherche et la hausse de la productivité ont-elles profité ? Je me suis installé en 1972 : avec 40 quintaux de blé à l'hectare, je vivais bien ; aujourd'hui, je suis en déficit en deçà de 60 quintaux. Qui donc a profité de la sélection ? Sans doute le consommateur et la collectivité. Mais alors, à qui revient-il de la financer ?

S'agissant de la contribution des producteurs-éleveurs dont les bêtes consomment la production de blé tendre, je me félicite de l'imperfection du dispositif proposé : heureusement qu'ils n'auront pas à payer ! Lorsque l'interprofession institue des organismes stockeurs agréés qui perçoivent la CVO, cela va tout seul, mais comme tel n'est pas le cas dans cette branche, il ne sera pas possible d'aller chercher vos quelques euros annuels chez chaque éleveur.

Le montant de la redevance peut certes sembler anecdotique au regard du chiffre d'affaires agricole français, mais il le sera moins pour des agriculteurs qui perdent de l'argent. De surcroît, peut-on extrapoler les chiffres connus pour le blé tendre à l'ensemble des productions ? Sans compter que ce type de contribution n'évolue jamais à la baisse, et que nous mettons le doigt dans un engrenage redoutable.

Au cours de ma carrière de céréalier, j'ai observé qu'en matière de semence, les agriculteurs recherchaient d'abord la sécurité. En ce qui me concerne, entre mon installation, en 1973, et aujourd'hui, je n'ai utilisé que cinq variétés de blé tendre : je n'en change que lorsqu'une nouvelle semble apporter des améliorations et davantage de sécurité.

S'agissant de la contribution à l'hectare, on peut certes estimer qu'à raison d'un rendement moyen en France de 6 tonnes à l'hectare, une cotisation de 0,50 euro par tonne ne représenterait qu'une contribution de 3 euros à l'hectare, ce qui n'est pas grand-chose. Toutefois, il y a eu cette année une sécheresse épouvantable dans ma région ; du coup, je n'ai fait que 4 tonnes à l'hectare. Devrais-je néanmoins apporter ma contribution au progrès et financer l'obtention végétale, qui a produit des « Ferrari » inutilisables dans mes champs ? On nous fournit un matériel génétique censé être excellent, mais dont on ne peut pas tirer le maximum, parce qu'il n'a pas la rusticité nécessaire ; en d'autres termes, on nous fournit des chevaux de course, quand on aurait besoin de chevaux de trait.

Suivant que le blé se vend à 100 ou à 200 euros la tonne, la question la productivité ne se pose pas de la même façon : à 100 euros, on cherchera une variété qui ne coûtera pas cher à produire ; à 200 euros, on peut utiliser plus d'intrants, parce qu'on aura un bénéfice au bout. Là aussi, il existe un décalage entre la démarche des obtenteurs et celle des agriculteurs.

Par le passé, les agriculteurs étaient très proches des obtenteurs. Ils leur achetaient la semence G 4, c'est-à-dire une variété nouvelle de bonne qualité. Les obtenteurs invitaient les agriculteurs à visiter leurs champs d'essais et leur présentaient les nouveautés ; on examinait, on réfléchissait, éventuellement on revenait pour acheter – très cher ! – une petite quantité de semence, que l'on testait ; si le résultat était satisfaisant, on la reproduisait. Les agriculteurs payaient ainsi la redevance directement à l'obtenteur.

Là, on met en place un écran : celui de la multiplication. M. Dionis du Séjour voulait connaître les raisons du succès des semences de ferme. La première est que cet écran de multiplication a un coût : on paie les intermédiaires, la manutention, le traitement – qu'il est difficile d'éviter lorsqu'on achète une semence certifiée, alors qu'en ce qui me concerne, cela fait 25 ans que j'utilise des semences de ferme non traitées. Ensuite, fiez-vous au bon sens des agriculteurs : si la qualité génétique des variétés ressemées se détériorait aussi rapidement, ils achèteraient tous des semences certifiées ! J'ai cultivé pendant 15 ans un blé Beauchamp destiné à la biscuiterie ; comme il n'existait plus au catalogue, je le reproduisais moi-même, sans altération notable ni de sa qualité, ni de son rendement ; je n'ai cessé de le cultiver que le jour où mon client, qui avait été repris par un groupe coopératif, eut la consigne de ne plus en acheter.

En termes de biodiversité aussi, la semence de ferme est intéressante : si l'on compare le catalogue, qui regorge de semences, et les variétés réellement cultivées en France, qui peuvent se compter sur les doigts d'une main, on observe qu'il existe un « entonnoir », parce que la demande est standardisée. L'agriculteur qui utilise des semences de ferme décide en toute autonomie ce qu'il va cultiver, sans être démarché par un technico-commercial qui l'engagera à acheter une variété plutôt qu'une autre parce que c'est le choix de la coopérative et qu'on lui fera un prix.

On y gagne également en termes de sécurité alimentaire : si, en 1956, on n'avait pas ressemé, la France aurait connu une famine ! Cela reste vrai : il y a deux ans, dans le cadre du « plan protéines », on a souhaité relancer les cultures de protéagineux, avec des incitations financières ; mais sans les stocks de la récolte précédente, les superficies cultivées n'auraient jamais augmenté de 50 % d'un coup ! L'utilisateur de semences de ferme a donc une utilité, qu'il convient de reconnaître.

Pour conclure, mon organisation est favorable aux COV, mais elle considère qu'il revient à l'obtenteur de persuader l'agriculteur que la variété qu'il propose est meilleure – comme c'était le cas jusqu'à présent.

PermalienXavier Beulin, président de la FNSEA

Je me réjouis de l'intérêt que vous portez à ce débat très important, auquel j'ai tenu à participer personnellement, car je considère qu'il y va de l'avenir de l'agriculture française et de la capacité de nos agriculteurs à disposer d'un potentiel de semences et de génétique à la hauteur de nos ambitions.

Je rappellerais tout d'abord que la création variétale répond aux demandes du marché. Contrairement à ce que l'on dit, il ne s'agit pas uniquement d'accroître les rendements : en termes de diminution des besoins en intrants, de tolérance aux maladies, de résistance au stress hydrique ou de qualités nutritionnelles, les variétés actuelles n'ont rien à voir avec celles utilisées il y a 10 ou 20 ans.

Permettez-moi ensuite de donner quelques éléments macro-économiques. Le secteur des semences est un des pôles d'excellence français. Nous sommes le premier producteur de semences en Europe, et le quatrième dans le monde, derrière les États-Unis, la Chine et le Japon. Avec la filière des multiplications, la création variétale concerne au total 23 000 agriculteurs en France ; il s'agit souvent d'exploitations diversifiées, aux surfaces relativement faibles, mais dont la valeur ajoutée tient à l'activité semences. Le chiffre d'affaires consolidé de cette activité est d'environ 2 milliards d'euros, avec une balance commerciale excédentaire de quelque 800 millions d'euros. Ces chiffres méritent réflexion.

Nous sommes tous d'accord pour dire que la création variétale doit être financée. La proposition de loi prévoit de renforcer le COV, en protégeant la variété contre des utilisations commerciales non consenties par leur obtenteur, tout en autorisant le libre usage par la recherche. J'estime, moi aussi, que le véritable enjeu de ce texte est de défendre le système du COV contre celui du brevet. Cela fait des années qu'au COPA, le Comité des organisations professionnelles agricoles de l'Union européenne, nous ferraillons pour que les 27 ratifient la convention UPOV de 1991. Or, si 21 États membres l'ont déjà fait, la France, pourtant à l'origine de cette initiative, est à la remorque.

Ne nous trompons pas de débat : nous revendiquons, nous aussi, la possibilité d'utiliser des semences de ferme. La question est de savoir si on leur applique ou non une forme de redevance, qui permettrait aux obtenteurs de continuer à faire leur travail et rétablirait une certaine équité entre ceux qui choisissent d'acheter les variétés directement auprès des obtenteurs et des distributeurs, et ceux qui préfèrent les reproduire avec des semences fermières.

Examinons les chiffres : on a collecté cette année en France 32 millions de tonnes de blé ; la redevance étant de 0,50 euro par tonne, cela représente une recette totale de 16 millions d'euros, sur lesquels 10 millions sont retournés aux producteurs, la règle voulant que l'on reverse 2,50 euros par quintal de semences achetées. Il reste donc 6 millions, sur lesquels 5 vont aux obtenteurs et 1 million à un fonds de recherche, qui a été constitué au sein du GNIS au moment où la contribution volontaire obligatoire sur le blé avait été instituée.

Je ne vois pas en quoi la reproduction d'une variété à la ferme serait un facteur de biodiversité ! D'ailleurs, la Commission des ressources génétiques pour l'agriculture et l'alimentation n'a jamais considéré que la sélection fût néfaste à la biodiversité. Qu'il y ait un débat sur la biodiversité dans le cadre des suites du Grenelle de l'environnement, c'est un fait, mais cela n'a rien à voir avec les semences de ferme. J'avoue avoir du mal à comprendre l'argument.

Le régime d'utilisation des semences de ferme ne concernait à l'origine que 21 espèces. Toutefois, le texte adopté par le Sénat, s'il était confirmé par l'Assemblée, offrirait la possibilité d'ouvrir le dispositif à d'autres espèces. Je pense, pour ma part, qu'il serait bon d'inclure dans la liste les cultures intermédiaires pièges à nitrate (CIPAN), semées après les récoltes de céréales – en général en août ou en septembre – et désormais utilisées à grande échelle dans notre pays. Je ne pense pas que cela pose le moindre problème.

S'agissant du mécanisme de prélèvement, que certains ont qualifié d'usine à gaz, il convient de préciser les choses. Pour le blé tendre, on peut considérer que les choses sont actées. Pour le maïs, le tournesol et le colza, cela ne posera guère de problème, dans la mesure où il s'agit d'hybrides et que les agriculteurs ont de plus en plus tendance à se tourner vers des semences certifiées. La situation est plus délicate pour l'orge –où il y a beaucoup d'autoconsommation- et pour les plantes fourragères, mais je suis de l'avis de Daniel Segonds : c'est au GNIS, en tant que groupement interprofessionnel et délégataire de service public, de faire des propositions en la matière. En tout cas, je ne pense pas que ce soit un obstacle en soi.

J'ajoute, pour finir, que ce qui doit nous animer avant tout, c'est la volonté de préserver ce pôle semencier français. Sinon, nous risquons, dans une ou deux décennies, de nous réveiller en faisant le constat amer qu'il ne reste que quatre ou cinq producteurs de semences au monde, soit anglo-saxons, soit chinois. Si nous souhaitons préserver notre spécificité, il convient de prendre des mesures pour que le progrès génétique – ramené à la situation française et européenne où certaines technologies ne sont pas autorisées – nous permette de rester dans la course. Le dispositif prévu par la proposition de loi me semble aller dans le bon sens. Certes, il ne s'agit pas d'une garantie tous risques, mais cela devrait nous éviter d'être demain pieds et poings liés face à DuPont, Monsanto ou Pioneer.

PermalienPhoto de Germinal Peiro

Je souhaiterais quelques précisions complémentaires.

Certains d'entre vous ont dit que les semences de ferme étaient autorisées par des COV européens, alors que M. Bournigal a affirmé qu'elles étaient interdites. Qu'en est-il exactement ?

J'ai bien compris que vous étiez tous d'accord pour autoriser les semences de ferme ; toutefois, certains souhaitent rendre leur utilisation payante, tandis que d'autres préfèrent que la situation actuelle reste inchangée.

Par ailleurs, on nous a dit que 50 % des semences certifiées étaient enrobées de pesticides, contre 20 % des semences de ferme.

Enfin, ne pensez-vous pas que l'on va aboutir à une augmentation globale du prix des semences ?

PermalienJean-Marc Bournigal

Du point de vue réglementaire, il convient de distinguer deux choses.

Au niveau communautaire, on a en effet anticipé la mise en oeuvre de la convention UPOV et autorisé les semences de ferme sur certains COV ; toutefois, il est nécessaire que l'agriculteur s'accorde préalablement avec l'obtenteur sur le niveau de rémunération de la recherche, sinon il s'expose à un conflit. Cela a été le cas avec les pommes de terre.

Au niveau français, en revanche, le cadre juridique n'autorise pas les semences de ferme. On se trouve donc actuellement dans une situation juridique très fragile.

Par ailleurs, nous refusons l'assimilation du COV à une taxe, et la Cour de justice a été saisie à ce sujet. La CVO sur le blé a d'ailleurs été validée par Bruxelles.

PermalienDaniel Segonds, président du Groupe national interprofessionnel des semences et des plants, GNIS

Le grand avantage de ce texte est en effet de nous mettre en conformité avec la législation européenne, et d'éviter que deux systèmes coexistent sur notre territoire.

S'agissant du traitement des semences, il est réalisé à la demande de l'agriculteur : c'est l'utilisateur qui nous indique ce qu'il veut acheter, et l'enrobage qu'il souhaite. Quoi qu'il en soit, si l'on pense que les semences de ferme contiennent moins de produits d'enrobage, cela doit inciter à les autoriser ; c'est précisément ce à quoi s'emploie le texte.

Le GNIS regroupe non seulement les obtenteurs, mais aussi les utilisateurs et les agriculteurs multiplicateurs de semences certifiées ; tous font la promotion de ce texte, qui ne leur apporte pas que des avantages, puisqu'il va aboutir à légitimer les semences de ferme, qui étaient jusqu'à présent en grande partie interdites, ce qui fera concurrence aux semences certifiées. Contrairement à ce qui a été dit, il conviendra donc de justifier le prix de celles-ci, en mettant en avant leur avantage qualitatif et le fait qu'elles répondent à des besoins variés. Sur le long terme, ce sera une contrainte plutôt qu'un avantage.

PermalienXavier Beulin, président de la FNSEA

C'est précisément parce que nous sommes attachés au droit ancestral de ressemer une partie de la récolte précédente que nous avons besoin du COV. La situation actuelle est intenable, l'insécurité juridique étant trop grande. C'est pourquoi nous avons tant insisté pour que cette proposition de loi vienne en discussion.

PermalienGuy Kastler, délégué général du Réseau semences paysannes, membre de la Confédération paysanne

Le règlement européen permet des accords interprofessionnels ou globaux, mais il ne les rend pas obligatoires. Quand il n'y a pas d'accord, il revient à l'obtenteur de prouver qu'il y a contrefaçon. Or, les obtenteurs ne peuvent y parvenir, puisque nous adaptons les variétés !

S'agissant du prix des semences, il a été dit que les royalties sur le blé tendre s'élevaient à 16 millions d'euros. Si l'on étend le système à toutes les espèces, il faut multiplier ce montant par dix ; et si, comme le demandent les semenciers, on triple le montant des royalties, ce sera une multiplication par trente. Et si les prix des semences certifiées augmentent en même temps que les prix des semences de ferme, je vous laisse calculer la facture totale !

PermalienFrançois Lucas, premier vice-président de la Coordination rurale

À en croire M. Segonds, les semences de ferme, étant interdites par la loi, ne seraient pas pratiquées aujourd'hui. Cela fait pourtant des décennies que 60 % du blé tendre français sont récoltés à partir de telles semences !

Par ailleurs, monsieur Taugourdeau, il n'y a pas plus traçable que la semence de ferme, puisqu'elle vient de la ferme !

PermalienFrançois Lucas, premier vice-président de la Coordination rurale

Chez l'obtenteur !

Enfin je précise que nos grands concurrents, que sont l'Ukraine, le Canada, l'Australie, l'Argentine ou le Brésil, ne connaissent pas ces débats : là-bas, on sème et on ressème.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Messieurs, je vous remercie pour ce débat fort intéressant.

La Commission en vient à l'examen des articles de la proposition de loi.

PermalienPhoto de Germinal Peiro

Le groupe SRC vous remercie, monsieur le président, d'avoir organisé en un temps record cette audition qui nous permet d'être à présent parfaitement éclairés. Nous sommes tous défenseurs du certificat d'obtention végétale, mais nous ne le sommes pas tous de la « contribution volontaire obligatoire »… Notre groupe votera ce texte à condition que la taxation des semences de ferme en soit soustraite. Pour ne pas faire durer les débats en commission sur les douze amendements que nous avons déposés, je n'en dirai rien de plus ce soir. Mais nous proposerons en séance publique un amendement expliquant que nous jugeons inacceptable une nouvelle taxe sur la moitié de la production de céréales à paille en France, puisque c'est ce dont il s'agit, ainsi que sur les autres variétés qui seront ajoutées.

PermalienPhoto de Thierry Lazaro

J'émets un avis défavorable sur tous ces amendements.

PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Au nom du groupe UMP, je me félicite aussi de cette audition éclairante. La proposition du groupe SRC me paraît très dangereuse au regard de la position européenne sur ce sujet. Le directeur de cabinet du ministre a souligné que COV et accord sur la rétribution des obtenteurs vont de pair ; s'il n'en est pas ainsi, le dispositif tombe et cela présente un grand risque pour nos agriculteurs car on se dirigera alors vers le brevet. En reproduisant les semences de ferme, les agriculteurs évitent d'acheter aux semenciers et ne rétribuent donc pas la recherche.

PermalienPhoto de Germinal Peiro

Un accord conclu au sein de l'interprofession devrait conduire à ce que la semence soit payée à un certain prix, afin que sa reproduction ne soit pas taxée.

PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Le groupe Nouveau Centre votera la proposition de loi. J'étais perplexe lorsque le débat s'est engagé mais je considère à présent que la méthode proposée pour rétribuer la recherche est la bonne. L'audition a permis de répondre aux interrogations sur la génétique. Reste en suspens l'épineuse question de la galénique – l'enrobage de pesticides – mais elle est sans incidence sur le fond : la juste rémunération de la propriété intellectuelle. On peut seulement frémir à l'idée que le texte renvoie la fixation des règles à un décret en Conseil d'État.

PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Il faudra obtenir de l'interprofession qu'elle se prononce.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Le ministre fera des propositions en ce sens, cela a été dit.

CHAPITRE IER : Dispositions modifiant et complétant le code de la propriété intellectuelle

Article 1er A (nouveau) (articles 14412-1, L. 623-16, L. 623-7, L. 623-8, L. 623-23 et L. 623-24 du code de la propriété intellectuelle) : Modernisation du statut de l'autorité nationale chargée de délivrer les certificats d'obtention végétale

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 1er B (nouveau) (articles L. 661-8 à L. 661-18 (nouveaux) du code de la propriété intellectuelle) :

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CE 1 et CE 2 de M. Germinal Peiro.

Puis elle adopte l'article sans modification.

Article 1er (article L. 623-1 du code de la propriété intellectuelle) : Définition de la notion de variété végétale

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 2 (articles L. 623-2 et L. 623-3 du code de la propriété intellectuelle) : Définition de la notion de variété végétale

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 3 (articles L. 623-4 du code de la propriété intellectuelle) : Droits accordés à l'obtenteur d'une variété nouvelle

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CE 3 de M. Germinal Peiro.

Puis elle adopte l'article sans modification.

Article 4 (article L. 623-4-1 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle) : Droits accordés à l'obtenteur d'une variété nouvelle

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CE 4 de M. Germinal Peiro.

Puis elle adopte l'article sans modification.

Article 5 (article L. 623-5 du code de la propriété intellectuelle) : Caractère nouveau d'une variété végétale

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CE 5 de M. Germinal Peiro.

Puis elle adopte l'article sans modification.

Article 6 (article L. 623-6 du code de la propriété intellectuelle) : Modalités de demande de certificat d'obtention végétale

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 7 (article L. 623-12 du code de la propriété intellectuelle) : Prise en compte lors de l'instruction de la demande de COV les résultats d'examens effectués par le demandeur lui-même

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 8 (article L. 623-14 du code de la propriété intellectuelle) : Opposabilité des actes relatifs aux COV

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 9 (article L. 623-15 du code de la propriété intellectuelle) : Modification de référence

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 10 (articles L. 623-22-3 et L. 623-22-4 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) : Nouveau cas de licence obligatoire d'intérêt public

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 11 (article L. 623-23 du code de la propriété intellectuelle) : Clarification rédactionnelle concernant la déchéance du droit d'obtention

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 12 (article L. 623-23-1 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle) : Cas de nullité des COV

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 13 (article L. 623-24 du code de la propriété intellectuelle) : Droits des salariés à l'origine des inventions en matière de brevets

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 14 (articles L. 623-24-1 à L. 623-24-5 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) Régime juridique de l'utilisation de semences de ferme pour les variétés protégées par un COV national

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements CE 6, CE 7 et CE 8 de M. Germinal Peiro.

Puis elle adopte l'article sans modification.

Après l'article 14

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements CE 9, CE 10, CE 11 et CE 12 de M. Germinal Peiro.

Article 15 (articles L. 623-25 du code de la propriété intellectuelle) : Sanction des atteintes aux droits du détenteur du COV

La Commission adopte l'article sans modification.

CHAPITRE Ier bis : Conservation des ressources phytogénétiques françaises pour l'agriculture et l'alimentation

Article 15 bis (nouveau) (articles L. 660-2 à L. 660-4 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) : Conservation des collections de variétés anciennes

La Commission adopte l'article sans modification.

CHAPITRE II : Conservation des ressources phytogénétiques françaises pour l'agriculture et l'alimentation

Article 16 : Application du nouveau régime des obtentions végétales aux COV déjà délivrés

La Commission adopte l'article sans modification.

Article 17 : Application de la loi en Nouvelle-Calédonie, dans les Terres australes et antarctiques françaises et à Wallis et Futuna

La Commission adopte l'article sans modification.

Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi.

◊ ◊

Informations relatives à la commission

La commission a nommé M. Pierre Gosnat rapporteur sur la proposition de loi n° 3868 relative à l'encadrement des loyers et au renforcement de la solidarité urbaine.

La commission a nommé M. André Chassaigne rapporteur sur la proposition de loi n° 3745 visant à encadrer les prix des produits alimentaires.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 15 novembre 2011 à 16 h 15

Présents. - M. Jean Auclair, M. Bernard Brochand, M. François Brottes, M. Louis Cosyns, Mme Catherine Coutelle, M. Jean-Michel Couve, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Claude Gatignol, M. Jean Gaubert, M. Bernard Gérard, Mme Pascale Got, M. Jean Grellier, M. Louis Guédon, M. Henri Jibrayel, Mme Laure de La Raudière, M. Thierry Lazaro, Mme Annick Le Loch, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-René Marsac, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Germinal Peiro, M. Michel Piron, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. Michel Raison, M. Francis Saint-Léger, M. Alain Suguenot, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alfred Trassy-Paillogues, Mme Catherine Vautrin, M. Jean-Michel Villaumé

Excusé. - M. Jean-Yves Le Déaut

Assistaient également à la réunion. - Mme Sophie Delong, M. Jean Launay, Mme Anny Poursinoff