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Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Séance du 26 janvier 2011 à 16h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi Bioéthique

Mercredi 26 janvier 2011

La séance est ouverte à seize heures trente.

(Présidence de M. Alain Claeys, président)

La Commission spéciale poursuit l'examen, sur le rapport de M. Jean Leonetti, du projet de loi relatif à la bioéthique (n° 2911).

TITRE VI : ASSISTANCE MÉDICALE À LA PROCRÉATION

La Commission est saisie de plusieurs amendements portant article additionnel avant l'article 19.

Elle examine tout d'abord, en discussion commune, les amendements AS 195 du rapporteur et AS 127 de Mme Valérie Boyer.

Article additionnel avant l'article 19 : Don d'ovocytes par des femmes n'ayant pas encore procréé et autorisation d'absence au bénéfice des donneuses

PermalienPhoto de Jean Leonetti

La pénurie d'ovocytes est patente en France. Ce n'est pas pour autant que nous souhaitons autoriser leur commercialisation comme l'a fait l'Espagne, où les donneuses d'ovocytes sont rémunérées et où les femmes qui ont besoin d'ovocytes les achètent. Refusant de nous orienter dans une telle voie, nous avons néanmoins réfléchi aux moyens de mieux indemniser les donneuses et de « compenser » les contraintes qu'imposent la stimulation et les ponctions ovariennes, lesquelles comportent en outre toujours un risque, même minime. Nous avons hier voté la reconnaissance symbolique de la Nation aux donneurs d'organes, de tissus et de cellules, sous une forme qui reste à déterminer : les donneuses d'ovocytes seront bien sûr concernées. Après examen de diverses propositions, nous en sommes restés à l'idée d'améliorer le remboursement des frais aujourd'hui accordé par les établissements hospitaliers et d'en raccourcir les délais, en restant fidèles à nos principes d'anonymat et de gratuité.

Une autre difficulté tient au fait que le don d'ovocytes n'est aujourd'hui permis qu'aux femmes ayant déjà un enfant. Une mission de l'IGAS réfléchit, à la demande de l'ancienne ministre de la santé, aux moyens d'améliorer le don d'ovocytes en France. Ouvrir le don d'ovocytes aux nullipares permettrait à la fois d'accroître la quantité d'ovocytes recueillis, mais aussi d'améliorer leur qualité, et partant les résultats de l'AMP, car ils seraient prélevés chez des femmes plus jeunes. En contrepartie de leur geste altruiste, on offrirait à ces femmes la possibilité de conserver à leur profit certains de leurs ovocytes, pour le cas où elles deviendraient ultérieurement stériles et auraient besoin d'une AMP. C'est ce que je propose dans mon amendement. N'y était initialement posée aucune limite d'âge spécifique pour l'utilisation de ces ovocytes. Il me semble qu'on pourrait raisonnablement en fixer une à 36 ans, ce qui est également l'âge limite fixé pour le don.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Le Gouvernement n'est pas opposé à cet amendement. Dans l'attente des conclusions de la mission de l'IGAS, il s'en remet à la sagesse de votre commission.

PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

Pour pouvoir donner des spermatozoïdes, les hommes doivent avoir déjà des enfants, c'est-à-dire qu'on exige d'eux qu'ils aient été confrontés à la paternité. Si cet amendement était adopté, des femmes n'ayant, elles, jamais connu la maternité, pourraient donner leurs ovocytes. Cette différence de traitement pose, me semble-t-il, des problèmes éthiques. Je ne suis donc pas favorable à cet amendement.

PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Il me paraît au contraire aller dans le bon sens. Il répond d'ailleurs à une demande du corps médical. Je m'interroge en revanche sur l'idée d'instaurer une limite d'âge. Méfions-nous des couperets. Pourquoi ne pas laisser aux médecins une liberté d'appréciation face à la diversité des situations possibles ?

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Si mon amendement n'est pas rectifié, les donneuses pourront utiliser leurs ovocytes jusqu'à 43 ans, âge limite d'accès à l'AMP dans notre pays. Pourquoi pas ? La seule réserve est qu'on ignore si on peut conserver indéfiniment des ovocytes sans qu'ils s'altèrent. Mais c'est là un problème technique, pas éthique.

PermalienPhoto de Laurence Dumont

Je comprendrais mal qu'on fixe la limite à 36 ans, alors qu'elle est de 43 ans pour l'accès à l'AMP.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Je suis très attachée à l'égalité entre hommes et femmes, et donc à ce que les deux sexes soient traités de la même manière, chaque fois que c'est possible. Mais voilà près de quarante ans que seuls les hommes pouvaient conserver leur patrimoine génétique sans que cette inégalité ait jamais choqué personne ! Les femmes le pourront désormais aussi, si nous autorisons par la loi la congélation ultrarapide des ovocytes. Encore interdite en France, cette technique constituerait un grand progrès. La seule solution, aujourd'hui, pour nos jeunes concitoyennes souhaitant préserver leur fertilité future, avant de subir par exemple un traitement anti-cancéreux potentiellement stérilisant, est de se rendre à l'étranger, notamment en Espagne, pour y faire congeler leurs ovocytes selon cette technique. J'espère que nous allons enfin l'autoriser dans notre pays. Il faudrait en outre que le décret d'application soit pris le jour même de la publication de la loi ainsi que je le propose plus loin par l'amendement 122. Chaque jour qui passe représente une perte de chances pour ces femmes.

PermalienPhoto de Xavier Breton

Je partage plutôt l'avis de Paul Jeanneteau. Si on a jusqu'à présent exigé des personnes qu'elles aient déjà des enfants pour pouvoir donner des gamètes, c'est pour s'assurer qu'elles mesurent bien la signification de leur don et la façon dont il pourrait interférer avec leur propre paternité ou maternité. Une personne qui a déjà procréé est en mesure de donner un sens à son don par rapport aux enfants qu'elle a déjà. Je comprends qu'on cherche à développer le don d'ovocytes. Il n'en faut pas moins conserver les conditions initialement posées, qui ne l'ont pas été par hasard.

En outre, si des personnes sans enfant, ayant donné leurs spermatozoïdes ou leurs ovocytes, devenaient, pour une raison quelconque, ultérieurement stériles, ne risqueraient-elles pas de rechercher les enfants issus de leurs gamètes, comme certains enfants conçus par don de gamètes recherchent aujourd'hui l'identité de leur donneur ? Nous aurions créé un nouveau problème.

PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Aucune décision en ce domaine délicat n'est dénuée d'inconvénient. La ponction d'ovocytes est beaucoup plus contraignante, lourde, et même risquée, sur le plan médical que le recueil de sperme, et on manque cruellement d'ovocytes dans notre pays. La proposition du rapporteur me paraît tout à fait raisonnable. Elle se justifie même sur le plan médical.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Si un don de gamètes est bien un don, je ne crois pas qu'il soit indispensable d'avoir expérimenté soi-même la paternité ou la maternité pour y procéder. Ce don est sans rapport avec le projet parental que l'on peut nourrir pour soi.

Pour lever toute ambiguïté et être sûr que cette possibilité de conservation de leurs ovocytes offerte aux donneuses ne crée pas, incidemment, un nouveau cas de recours à l'AMP, mieux vaudrait indiquer clairement que ces gamètes ne pourront être récupérés que si les conditions posées pour bénéficier d'une AMP sont remplies.

PermalienPhoto de Philippe Nauche

La « compensation » proposée par le rapporteur pour le don d'ovocytes soulèvera inévitablement le problème de l'accès aux techniques d'AMP pour des raisons et dans des conditions autres que celles aujourd'hui prévues dans la loi. Sans vouloir nous inspirer de certaines pratiques qui ont cours à l'étranger, nous ne pourrons pas éviter le débat.

PermalienPhoto de Alain Claeys

L'honnêteté intellectuelle exige de le souligner. Mais, pour ma part, je pense qu'il faut préciser qu'il ne s'agira que d'AMP dans un cas d'infertilité, comme prévu par la loi aujourd'hui.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Il est beaucoup plus difficile de prélever des ovocytes que de recueillir des spermatozoïdes. La stimulation ovarienne et les ponctions ne sont pas des actes médicaux anodins. Il n'est donc pas scandaleux qu'on traite de manière différente les deux types de dons.

Pour ce qui est d'avoir déjà été parent avant de pouvoir donner ses gamètes, je ne vois pas ce que cela apporte et j'ai du mal à justifier cette condition. D'ailleurs, soyons cohérents dans nos votes. Nous avons décidé que le don de gamètes, précisément parce qu'il était un don, devait rester anonyme.

La pénurie d'ovocytes est aujourd'hui telle dans notre pays qu'elle constitue une situation scandaleuse que, de fait, nous acceptons. Les femmes ayant besoin d'ovocytes qui amènent avec elle une donneuse, passent avant les autres. Est-ce satisfaisant sur le plan éthique ? Quid des principes d'anonymat, voire de gratuité ? Je ne suis pas sûr que la donneuse soit dans tous les cas totalement désintéressée…

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Une jeune femme peut avoir besoin qu'on lui sauvegarde des ovocytes parce qu'elle risque de devenir stérile, alors qu'elle n'est pas encore en âge de procréer ou ne vit pas encore en couple. Il faut lever toute ambiguïté à ce sujet et ne pas lier la conservation du patrimoine génétique féminin à un projet parental immédiat.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Il me semble évident qu'on vise bien l'AMP dans les conditions de notre droit positif actuel. J'accepte néanmoins d'ajouter dans le I, après « assistance médicale à la procréation », les mots « dans les conditions prévues au titre IV du livre I de la deuxième partie du code de la santé publique ».

La Commission adopte ce sous-amendement du rapporteur.

Puis elle adopte l'amendement AS 195 ainsi sous-amendé.

En conséquence, l'amendement AS 127 tombe.

La Commission examine ensuite l'amendement AS 196 du rapporteur.

Article additionnel avant l'article 19 : Suppression de l'agrément individuel des praticiens exerçant des activités d'AMP ou de DPN

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Cet amendement supprime l'agrément individuel des praticiens ayant des activités d'AMP et de DPN. Ce sont les laboratoires qui seront agréés, pas les praticiens. Ceux-ci devront en revanche être en mesure de prouver leur compétence en ces domaines pour que les établissements puissent être agréés. Le respect de cette condition sera contrôlé à l'occasion de la visite de conformité.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Avis défavorable. L'autorisation des structures répond à un objectif de planification et de régulation : il s'agit de parvenir à leur répartition la plus équilibrée possible sur l'ensemble du territoire. L'agrément individuel des praticiens vise, lui, à s'assurer de leur compétence et de leur expérience. Le retrait de son agrément au praticien d'une structure ne fait pas perdre à celle-ci son autorisation. Il ne nous paraît donc pas judicieux de lier agrément et autorisation.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

La mission d'information avait recommandé la suppression de l'agrément individuel des praticiens. Tout d'abord, le nombre de refus était extrêmement faible et selon l'Agence de la biomédecine elle-même, l'organisation de leur formation et l'excellent niveau des enseignements ne justifiaient pas une telle procédure. Ensuite, d'autres dispositifs permettent d'inciter les professionnels à améliorer la qualité des pratiques comme une directive européenne du 31 mars 2004 qui fixe désormais des normes de qualité et de sécurité dans l'obtention et le traitement des cellules et tissus humains. Enfin, le régime d'autorisation des établissements habilités à pratiquer l'AMP et le DPN vise aussi à garantir la qualité de la prise en charge médicale globale. Cette suppression ne représente aucun risque pour les patients.

La Commission adopte l'amendement AS 196.

Article 19 : Autorisation des procédés utilisés en assistance médicale à la procréation ; règles de bonnes pratiques en matière de stimulation ovarienne

La Commission examine l'amendement AS 152 de M. Jean-Yves Le Déaut.

PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Cet amendement prévoit que la liste des procédés biologiques utilisés en assistance médicale à la procréation est déterminée, non par arrêté ministériel comme prévu dans le projet de loi, mais par l'Agence de la biomédecine, sans recours à un décret en Conseil d'État pour préciser les modalités et les critères de leur inscription sur cette liste. S'il était adopté, Mme Boyer aurait toute assurance que la congélation ultra-rapide des ovocytes, dite aussi vitrification, soit très rapidement autorisée !

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Même avis.

La Commission rejette cet amendement.

Elle en vient à l'amendement AS 122 de Mme Valérie Boyer.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Alors qu'il y a un an, la congélation ultra-rapide des ovocytes, encore méconnue, semblait irréaliste, voire dangereuse, la communauté scientifique et médicale est aujourd'hui unanime sur son innocuité. Plusieurs études randomisées, qui ont fait l'objet de publications, ont démontré la faisabilité, l'efficacité et la supériorité incontestable de cette technique par rapport à la congélation lente. Partout en Europe et dans le monde, sauf en France, la vitrification est désormais autorisée pour les FIV et les dons d'ovocytes. Plus de mille enfants sont déjà nés à partir d'ovocytes vitrifiés.

Alors que notre pays était jusqu'ici réputé pour son excellence en matière de médecine de la reproduction, cette technique innovante y est toujours interdite. Les demandes d'évaluation déposées par plusieurs praticiens ont été refusées par l'AFSSAPS et l'Agence de la biomédecine en raison d'une interprétation particulièrement discutable des lois de bioéthique par le Conseil d'État qui, dans un avis de mai 2009, a assimilé la vitrification des ovocytes à une recherche sur l'embryon, ce qui, de fait, interdit l'utilisation de cette technique.

Pour faire naître les premiers bébés issus d'ovocytes congelés en France, le professeur Frydman a dû utiliser la congélation lente, dont le taux de réussite ne dépasse pas 2 à 3%, quand celui de la vitrification atteint 40 à 45%, soit à peu près le même niveau qu'avec des ovocytes frais. L'interdiction de cette technique, qui ne présente que des atouts sur le plan à la fois médical et éthique, est incompréhensible et inacceptable.

Afin que notre pays rattrape son retard et que les femmes aient rapidement accès à cette technique, il faut absolument, tel est l'objet de cet amendement, que l'arrêté ministériel et le décret en Conseil d'État nécessaires soient pris le jour même de la promulgation de la loi.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Je comprends bien votre intention mais comment accepter un amendement ainsi rédigé ? Si l'arrêté et le décret n'étaient publiés ne serait-ce que le lendemain de la promulgation de la loi, ils seraient illégaux. Ce qu'il faut, c'est que le Gouvernement s'engage à ce que les textes d'application soient publiés rapidement.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Nous attendons toujours la liste qui, selon la loi de 2004, aurait dû être établie par arrêté ministériel. Combien de temps devrons-nous attendre encore ? Des engagements ne peuvent suffire. Je n'y crois plus.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, impossible à satisfaire en pratique. L'élaboration des décrets exige une concertation et prend donc du temps. Soyez toutefois assurés que nous mettrons tout en oeuvre pour que le décret en question soit publié le plus rapidement possible. Je m'y engage.

Je fais par ailleurs observer que la vitrification des ovocytes n'est pas interdite aujourd'hui en France lorsqu'il s'agit de préserver les chances de fécondité ultérieure d'une femme. Il est vrai en revanche que, dans l'attente de la publication des textes nécessaires, il n'est pas possible de féconder des ovocytes vitrifiés.

PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Notre pays doit impérativement rattraper son retard. N'écartons pas cet amendement d'un revers de main, au seul motif d'une maladresse de rédaction. Écrivons au moins que le décret doit être pris « le plus rapidement possible. » Les propos de la secrétaire d'État ne m'ont pas rassuré : on nous dit toujours la même chose.

PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Cet amendement, à lui seul, ne résoudrait rien car de toute façon, la vitrification ne fait pas partie des techniques autorisées d'AMP. Si la liste de ces techniques était fixée non par arrêté ministériel mais par l'Agence de la biomédecine, comme je le proposais tout à l'heure, le problème serait réglé depuis longtemps.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Soyons des législateurs responsables. Nous ne pouvons pas écrire dans la loi que le décret doit être pris « le jour même de la publication de la loi », ce qui est impossible, ni « le plus rapidement possible », ce qui n'a aucune portée normative.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Nous attendons depuis 2004. Comprenez notre impatience. Tous les jours, des femmes pâtissent du retard pris.

PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Certaines lois disposent qu'un décret en Conseil d'État sera pris dans un délai maximal. Un délai de six mois me paraîtrait raisonnable.

PermalienPhoto de Yves Bur

Le Gouvernement pourrait aussi, comme il l'a fait lors de la discussion de certains textes, présenter en séance publique, une ébauche du décret ou de l'arrêté. Ce serait la meilleure manière de prouver que ces textes sont quasiment prêts et que la défiance de certains de nos collègues est infondée.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Je pourrais être d'accord avec un délai maximal de six mois. Pour l'instant, il n'y a pas d'ébauche de décret.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

La présentation en séance publique des grandes lignes du décret et de l'arrêté rassurerait en effet. Pour l'heure, je suggère que cet amendement soit retiré.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Je le maintiens, et s'il est rejeté, j'en proposerai un similaire au titre de l'article 88, en espérant avoir obtenu d'ici là des engagements concrets. Si nous en sommes réduits à cette façon de travailler, dont j'ai bien conscience qu'elle n'est pas satisfaisante, c'est que nous attendons depuis trop longtemps. Mais notre discussion n'aura pas été vaine.

La Commission rejette l'amendement AS 122.

Elle examine ensuite l'amendement AS 197 du rapporteur.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

L'alinéa 3 dispose que les critères d'autorisation des techniques d'AMP se fondent sur le respect des principes fondamentaux de la bioéthique énoncés aux articles 16 à 16-8 du code civil. Par prudence, cet amendement précise qu'ils peuvent se fonder également sur d'autres principes, notamment du code de la santé publique, comme ceux d'anonymat, de gratuité et de consentement.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Avis favorable.

La Commission adopte cet amendement.

Elle examine l'amendement AS 198 du rapporteur.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Il est prévu que les critères d'autorisation des techniques d'AMP s'attachent à l'efficacité des procédés et à la sécurité de leur utilisation pour la femme et l'enfant à naître. Cet amendement ajoute le critère de reproductibilité, pour garantir toute fiabilité.

La Commission adopte cet amendement.

Puis elle adopte successivement l'amendement de coordination AS 199 et l'amendement rédactionnel AS 200 du rapporteur.

Elle est ensuite saisie de l'amendement AS 20 de M. Xavier Breton.

PermalienPhoto de Xavier Breton

Nous devrions fixer dans la loi un objectif de limitation du nombre d'embryons surnuméraires congelés. Il y en a aujourd'hui plus de 150 000, ce qui pose problème à de nombreux couples pour lesquels ils ont été conçus lorsqu'ils n'ont plus de projet parental, sans compter que ce stock important attise la convoitise de l'industrie pharmaceutique.

Nous proposons donc d'ajouter après l'alinéa 5 un alinéa ainsi rédigé : « La mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation privilégie les pratiques et procédés qui permettent de limiter la conservation des embryons. L'Agence de biomédecine doit rendre compte dans son rapport annuel des actions engagées et des résultats obtenus pour atteindre cet objectif. »

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Les nouvelles techniques d'AMP, dont la vitrification des ovocytes, conduiront automatiquement, il faut s'en réjouir, à la diminution souhaitée du nombre d'embryons congelés. Parler de « limiter la conservation des embryons » ne me paraît pas approprié. Il faudrait dire plutôt « limiter le nombre d'embryons congelés ». Il ne me semble pas non plus qu'on puisse parler « d'objectif ».

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Avis défavorable. Cet amendement est satisfait dans le cadre des bonnes pratiques et le développement des nouvelles techniques entraînera en effet mécaniquement une réduction du nombre d'embryons surnuméraires.

PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Notre idée est de lier très étroitement les FIV aux projets parentaux et de réduire le nombre d'embryons qui seront soit détruits, soit utilisés pour la recherche.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Cette idée forte mérite de figurer dans la loi. Je serais, pour ma part, favorable à l'amendement rectifié dans le sens proposé par le rapporteur.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

En réalité, je préférerais qu'il soit retiré et que nous réfléchissions sereinement à une meilleure rédaction. La loi ne peut imposer d'objectif particulier à la science.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Il ne s'agit pas là de la science, mais des pratiques.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Je m'en remets finalement à la sagesse de votre commission.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Je mets aux voix l'amendement ainsi rectifié par son auteur : « La mise en oeuvre de l'assistance médicale à la procréation privilégie les pratiques et les procédés qui permettent de limiter le nombre d'embryons congelés. L'Agence de la biomédecine rend compte dans son rapport annuel des actions engagées et de l'évolution du nombre d'embryons congelés. »

La Commission rejette l'amendement AS 20 rectifié.

Elle examine l'amendement AS 77 de M. Olivier Jardé.

PermalienPhoto de Olivier Jardé

Toutes les nouvelles techniques médicales doivent être évaluées, notamment de manière observationnelle. Cet amendement vise à ce que les enfants nés des nouvelles techniques d'AMP fassent l'objet d'un suivi annuel obligatoire jusqu'à l'âge de dix ans.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Je comprends l'objectif mais je crains que ce suivi, sans apporter de sécurité supplémentaire, place ces enfants dans une situation singulière. Nous ne voudrions pas qu'ils se sentent comme les résultats d'une expérimentation.

PermalienPhoto de Philippe Nauche

Un échantillon suffit à l'évaluation des techniques et le nombre d'enfants spontanément suivis est suffisant.

PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Je partage cet avis, d'autant qu'un suivi spécifique obligerait à informer l'enfant de son mode de conception, car il s'interrogera nécessairement. L'intention est louable, mais il en résulterait de nombreux problèmes pratiques.

PermalienPhoto de Olivier Jardé

En matière de recherche médicale, on distingue recherche avec risque, recherche sans risque et recherche observationnelle. Pour cette dernière, il faut un échantillon suffisant. Or, lorsqu'on commence à mettre en oeuvre de nouvelles pratiques, cet échantillon est nécessairement limité. Il est donc indispensable d'inciter, sinon d'obliger, à ce suivi, faute de quoi aucune évaluation n'est possible. Pour le reste, un examen médical annuel n'a rien d'anormal ni de traumatisant pour un enfant.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Cela oblige ses parents à l'informer de son mode de conception, sauf à lui mentir.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Les parents qui ont dû recourir à ces techniques ont souvent envie de tourner la page. Pourquoi obliger à un suivi médical spécifique, comme s'il risquait d'arriver quelque chose d'anormal alors qu'il n'arrivera rien, et interférer avec le droit le plus élémentaire des parents de ne pas informer l'enfant de son mode de conception s'ils ne le souhaitent pas ? Il ne serait pas bon de les pousser à lui mentir.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Avis défavorable. La loi confie déjà à l'Agence de biomédecine le suivi des conséquences éventuelles de l'AMP sur les personnes qui y ont eu recours et les enfants qui en sont nés. Un suivi individuel spécifique de ces enfants reviendrait à les stigmatiser. On pourrait imaginer une étude conduite avec le consentement des parents, mais il n'est pas possible d'inclure ainsi a priori tous les enfants dans une étude.

La Commission rejette l'amendement AS 77.

Elle examine l'amendement AS 123 de Mme Valérie Boyer.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Cet amendement précise expressément que la technique de congélation ultra-rapide des ovocytes est autorisée. Je doute en effet que l'article 19, tel qu'actuellement rédigé, l'autorise.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Mieux vaut un régime général d'autorisation pour toutes les nouvelles techniques – incluant la vitrification –, après s'être assuré qu'elles répondent aux critères d'efficacité, de reproductibilité et de sécurité. A énumérer dans la loi celles autorisées, nous risquerions de n'être jamais exhaustifs et ne pourrions suivre au plus près toutes les évolutions.

PermalienPhoto de Jean-Sébastien Vialatte

Cet amendement pose un véritable problème éthique car il revient à autoriser la création d'embryons pour la recherche. Son deuxième alinéa dispose en effet que l'Agence de la biomédecine mène une étude de qualité sur cette technique « permettant d'évaluer la préservation du gamète femelle par l'appréciation de son taux de survie, de sa fécondabilité et de sa faculté à supporter le développement embryonnaire préimplantatoire. »

PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

C'est pour cette raison là que je le soutiens. Il autoriserait en effet la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Ce serait un signal très positif pour le monde de la recherche. Lors de son audition, le professeur Frydman a regretté que la vitrification, autorisée partout ailleurs en Europe, soit interdite en France. Nous sommes toujours en retard d'un train, ce qui confirme d'ailleurs que le recours à un arrêté ministériel pour dresser la liste de ces techniques n'est pas la bonne option. Et ce sera encore pire lorsque les lois de bioéthique ne seront plus périodiquement révisées.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Si la loi ne prévoit pas expressément cette autorisation, je vois mal comment le Conseil d'État et l'Agence de la biomédecine pourraient se déjuger.

La Commission rejette l'amendement AS 123.

PermalienPhoto de Alain Claeys

De peu ! Il y avait égalité des voix, ce qui vaut rejet.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Il n'est pas exact de dire qu'avec la future loi, dont nous enrichissons le texte par nos amendements, la vitrification des ovocytes ne sera pas possible. Je m'en suis entretenu avec des scientifiques, notamment René Frydman. Si on mentionne expressément cette technique dans la loi aujourd'hui, faudra-t-il légiférer de nouveau à chaque nouvelle découverte ? Je comprends qu'on puisse faire valoir l'urgence et déposer des amendements d'appel pour interpeller l'exécutif. Ce n'est pas pour autant que nous pouvons inclure dans la loi des dispositions qui n'en relèvent pas. La loi doit être cohérente et édicter des principes généraux.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Nous avons là un point de divergence sur ce que René Frydman appelle « l'innovation thérapeutique ». C'est un sujet important sur lequel il est normal que des divergences s'expriment dans notre commission.

PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Je ne suis pas d'accord avec le rapporteur. Si on ne mentionne pas expressément la vitrification des ovocytes dans la loi, son autorisation restera subordonnée à la publication d'un décret et d'un arrêté ministériel. Or, comme vous le savez, pour l'instant, d'après l'interprétation du Conseil d'État, cette technique est assimilée à une recherche sur l'embryon, laquelle est interdite en France sauf dérogation – et ce cas ne constitue pas une dérogation.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Nous n'allons pas faire figurer dans la loi des dispositions réglementaires au motif que les décrets tardent à être publiés.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Je mets maintenant aux voix l'article 19 tel que modifié par les amendements adoptés.

La Commission rejette l'article 19 modifié.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Vote malheureux qui supprime toute possibilité de nouvelle technique d'AMP dans notre pays !

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Je suis favorable à ces nouvelles techniques, d'autant que certaines d'entre elles permettront de limiter le nombre d'embryons surnuméraires. Nous avons eu tout à l'heure un large débat à ce sujet. Certains d'entre nous souhaitent clairement une limitation du nombre d'embryons congelés. Le fait qu'on ne nous entende pas explique vraisemblablement pourquoi cet article a été rejeté.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Je propose que nous y revenions à la fin de nos travaux.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Cela est sage. Plutôt que d'additionner les oppositions à certains amendements, nous ferions bien d'additionner les adhésions à l'objectif de permettre des avancées en matière d'AMP afin d'adopter cet article, même s'il ne peut donner satisfaction à tous. Mettons à profit le temps qui nous est donné, avant que nous y revenions, pour nous assurer que l'article 19, modifié par les amendements adoptés, autorisera bien toutes les nouvelles techniques d'AMP.

Après l'article 19.

La Commission examine l'amendement AS 124 de Mme Valérie Boyer, portant article additionnel.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Il s'agit d'autoriser les centres d'AMP à conserver les gamètes. Le caractère privé des établissements ne remet pas en cause l'application de la législation qui encadre le prélèvement, la conservation ou le don de gamètes à titre gratuit, surtout depuis la loi HPST.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

La définition de l'AMP devant être modifiée à l'article 19 pour inclure la conservation des gamètes, l'amendement est satisfait. Défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Article 20 : Affirmation de la finalité médicale de l'AMP ; accès à l'AMP des partenaires d'un PACS sans condition de délai

La Commission examine, en discussion commune, les amendements AS 136 et AS 137 de M. Alain Claeys et AS 113 de M. Noël Mamère.

PermalienPhoto de Philippe Vuilque

L'amendement 136 vise à ouvrir l'accès à l'AMP aux couples de femmes et aux femmes célibataires en âge de procréer, qu'elles soient fertiles ou pas. En outre, il supprime la condition de durée minimum de vie commune, qui ne permet pas de juger de la stabilité d'un couple et diminue les chances de succès de l'AMP au-delà d'un certain âge.

PermalienPhoto de Noël Mamère

Avec l'article 20, nous abordons un point de divergence, celui de l'accès des couples homosexuels à l'AMP. Dans le cadre légal actuel, l'AMP relève de la logique médicale. Nous pensons pour notre part qu'elle a trait aux notions de projet de couple et de projet de famille, notions que nous avons défendues hier lors de la discussion sur l'anonymat des dons de gamètes.

Les couples et les familles d'aujourd'hui ne ressemblent pas à ceux du XIXe siècle ; les progrès scientifiques ont rendu possibles des projets de couples et de famille jusqu'alors inimaginables. On nous opposera que ce n'est pas à la loi de satisfaire le désir d'enfant d'un couple homosexuel et que le désir d'enfant des femmes célibataires peut être comblé par l'adoption. Mais les sociologues, les spécialistes de la famille et les philosophes que nous avons auditionnés considèrent que le moment est venu d'autoriser l'accès des couples homosexuels à l'AMP. N'en restons pas à la situation de 2004, ouvrons cette possibilité qui ne chamboulera pas l'ordre social de notre pays et permettra à la France de rejoindre un certain nombre de pays membres de l'Union européenne.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Défavorable. L'accès des couples homosexuels à l'AMP, dont il a été débattu aux états généraux de la bioéthique, modifie la frontière entre le biologique et l'éducatif, entre le médical et le social, entre la satisfaction d'une souffrance et la compensation d'une anomalie.

Si l'on considère, de façon peut-être simpliste, que la bioéthique a trait à la médecine et que la médecine a pour but de prendre en charge et de remédier aux pathologies et aux anomalies, la ligne de partage paraît évidente : les avancées sociales ou sociétales n'appartiennent pas au domaine de la bioéthique, mais à un champ législatif autre.

Je fais la différence entre un couple homosexuel élevant un enfant né d'une précédente union et dont l'un des membres est considéré comme un partenaire éducatif, un tiers, un « beau-parent » – situation dans laquelle l'enfant peut s'épanouir en toute harmonie – et le couple homosexuel qui demande à la médecine de compenser son infertilité « sociale ».

Estimant que l'orientation sexuelle procède d'un choix, que l'homosexualité n'est pas une pathologie et que l'infertilité qui en découle n'est pas une maladie, je pense qu'il n'appartient pas à la médecine de répondre à cette demande et de compenser cette insatisfaction. Par ailleurs, dans un système de santé solidaire comme le nôtre, la médecine est gratuite, et l'aide apportée aux couples tout autant. Je rappelle que l'accès à l'AMP est payant dans les pays qui l'ont ouvert aux couples homosexuels.

En revanche, si l'AMP a pour objet de remédier à une infertilité médicalement constatée, le statut social du couple importe peu. Les références au mariage, au PACS ou au concubinage n'ont pas lieu d'être ; je vous proposerai donc de les supprimer. Par ailleurs, il n'appartient pas au législateur de fixer une durée de vie commune attestant de la stabilité du couple. Tout au plus cette question peut-elle être évoquée par le médecin, qui conduit son interrogatoire médical comme il l'entend.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Je partage le point de vue du rapporteur et je suis défavorable à ces amendements.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Considérer qu'il existe des situations différentes, auxquelles le législateur apporte des réponses différentes n'est pas faire preuve de discrimination. Si la société n'a pas à se prononcer sur l'homoparentalité de fait, situation où deux personnes de même sexe élèvent ensemble des enfants issus de relations hétérosexuelles passées, la revendication d'une homoparentalité ab initio s'inscrit dans un tout autre cadre. Portée par le « droit à l'enfant », elle demande à ce que la médecine, grâce à l'AMP, et la société, grâce à l'adoption, compensent l'absence du biologique et permettent au projet parental d'aboutir. Je distingue donc entre la parentalité « ordinaire », où le biologique joue tout son rôle et la parentalité « extraordinaire », où son absence est réparée par la médecine.

Ces amendements ouvrent aussi l'accès de l'AMP aux femmes célibataires. Mais au nom de quoi le projet affectif ne serait-il pas porté par plus de deux personnes ? La médecine et la société ne devraient-elles pas permettre des projets en « indivision », présentés par des groupes de trois personnes ou plus ? Cela déboucherait sur des schémas très complexes, qui, pour satisfaire le « droit à l'enfant », ne seraient ni dans l'intérêt de l'enfant, ni dans celui de la société.

L'exigence d'une durée minimum de vie commune permet au médecin de vérifier la réalité du projet de couple. Je comprends la position du rapporteur, mais je crains que la suppression des deux ans ne comporte un risque de dérive. Un médecin militant pourrait s'emparer de cette nouvelle possibilité pour soutenir des démarches différentes de celles pour lesquelles l'AMP a été conçue.

PermalienPhoto de Noël Mamère

Monsieur le rapporteur, je ne crois pas que l'on puisse isoler comme vous le faites les questions médicales du champ social. Si les lois de bioéthique sont révisées, c'est qu'elles ont une implication dans la société et si nous avons maintenu hier l'anonymat sur les dons de gamètes, c'était précisément pour favoriser la construction sociale de la famille. Votre démonstration est quelque peu contradictoire.

Monsieur Mariton, le législateur n'a pas imposé une durée minimum de vie commune aux couples mariés, alors qu'ils peuvent divorcer le lendemain des noces. S'agissant du nombre de personnes pouvant être impliquées dans le projet parental, vous raisonnez par l'absurde. N'ayez crainte, nous sommes législateurs et responsables : notre proposition est réaliste et ne vise pas à transformer la France en un immense phalanstère !

PermalienPhoto de Patrick Bloche

Notre groupe s'est prononcé en 2004 en faveur du mariage et de l'adoption pour les couples homosexuels. En toute cohérence, nous souhaitons aujourd'hui que ces couples puissent avoir accès à l'AMP.

Il existe un clivage certain entre l'opposition et la majorité sur la reconnaissance de l'homoparentalité. Je suis bien aise que nos collègues de droite constatent et acceptent l'homoparentalité de fait : on ne va tout de même pas empêcher des hommes et des femmes d'élever leurs propres enfants parce qu'ils vivent avec une personne de même sexe ! Mais hormis les prises de position marginales de Mme Bachelot et de Mme Morano, je crois savoir que la majorité présidentielle ne souhaite pas permettre à des personnes de même sexe d'avoir et d'élever ensemble des enfants.

Le rapporteur veut supprimer la durée minimum de vie commune et autoriser l'accès de l'AMP aux couples – hétérosexuels, bien sûr –, quels que soit leur statut et la durée de leur union. Dans un même souci de cohérence, l'amendement AS 137 propose d'ouvrir l'AMP aux femmes seules en âge de procréer, les personnes célibataires ayant déjà accès à l'adoption sous réserve de l'obtention d'un agrément. Une telle disposition rapprocherait la législation française de celles en vigueur en Belgique, au Danemark, en Espagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Le nombre de familles monoparentales qui existent dans notre pays rend inutile tout débat sur la nécessité pour un enfant de grandir entre un père et une mère.

PermalienPhoto de Olivier Jardé

L'AMP est un traitement de l'infertilité, proposé au titre de la solidarité nationale. Elle ne constitue pas un fait sociétal. Il me semble que les femmes célibataires et infertiles devraient pouvoir en bénéficier.

PermalienPhoto de Laurence Dumont

Le raisonnement du rapporteur est très cohérent. Ai-je bien compris qu'il serait prêt à traiter de l'accès des couples homosexuels à l'AMP dans un texte qui ne serait pas de bioéthique, à condition de débattre de la gratuité de cette aide ?

Contrairement à ce qu'affirme Hervé Mariton, la société doit se prononcer sur « l'homoparentalité de fait » : les droits et les devoirs du deuxième parent doivent faire l'objet d'un examen législatif.

PermalienPhoto de Michel Vaxès

J'estime que l'infertilité pathologique d'une célibataire doit ouvrir droit à l'AMP et je ne vois pas d'objection à ce que les couples homosexuels puissent adopter. Mais je ne soutiens pas ces amendements, qui procèdent d'un glissement du médical vers le social. Ils ouvrent droit à des demandes qui ne sont pas motivées par une pathologie ou par un risque de maladie grave. Si l'on accepte que ce glissement se produise, au nom de quel principe refusera-t-on demain les demandes de confort visant le diagnostic préimplantatoire (DPI) et la gestation pour autrui (GPA) ? Une mission d'information pourrait se pencher avec intérêt sur cette question.

PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Je ne soutiendrai pas ces amendements car il me semble difficile, en l'état actuel de nos travaux, de prendre une décision aussi importante. La question de l'extension de l'aide à la procréation, hors du cadre médical, mérite d'être posée et ses conséquences correctement mesurées. En termes de coût, d'abord : l'AMP est remboursée par la sécurité sociale, tout comme la chirurgie esthétique réparatrice. Ce n'est pas le cas de la chirurgie esthétique pour convenance personnelle. Par ailleurs, si l'AMP est ouverte aux couples de femmes, la cohérence et le souci d'égalité voudront que l'on soit favorable, comme Noël Mamère, à la GPA, au bénéfice des couples d'hommes.

PermalienPhoto de Yves Bur

Sortir du cadre médical, qui justifie le recours aux techniques de l'AMP, ouvrirait une brèche dans notre droit bioéthique et ferait tomber progressivement l'ensemble des barrières que nous avons posées.

La Commission rejette les amendements AS 136, AS 137 et AS 113.

Puis elle examine l'amendement AS 17 de M. Xavier Breton.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Le PACS n'étant qu'un contrat patrimonial, il n'y a pas lieu d'aligner son régime sur celui du mariage et d'ouvrir l'AMP aux couples pacsés.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Défavorable. L'AMP est un acte médical, autorisé sur critère médical. Pourquoi établir une distinction ou une hiérarchie entre les différents types d'union sociale ?

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Défavorable.

PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

L'intérêt de l'enfant doit primer. Or, le mariage suppose un engagement des futurs époux à pourvoir à l'éducation des enfants – article 213 du code civil –, ce qui n'est ni le cas du PACS, ni a fortiori du concubinage.

PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Cet amendement est rétrograde : rétablissant l'exigence d'une durée minimum de vie commune, il fait du PACS un pacte avec le diable, ignorant son importance sociale. Le PACS est un engagement, qui peut découler, comme le mariage, d'un projet familial !

PermalienPhoto de Olivier Jardé

Faut-il rappeler que 52 % des enfants sont nés hors mariage l'année dernière ? L'AMP est un traitement médical : seul l'état médical de la personne doit être pris en compte.

PermalienPhoto de Michel Vaxès

Vous ne pouvez pas à la fois rejeter l'accès des couples homosexuels à l'AMP, sous prétexte qu'il s'agit d'une demande sociale, et empêcher l'accès à l'AMP aux couples pacsés pour des raisons sociétales et idéologiques !

PermalienPhoto de Noël Mamère

Les personnes qui ont trahi les engagements pris en vertu des articles 213 à 215 du code civil sont légion. Pourquoi luttez-vous encore contre le PACS, dont nous pouvons aujourd'hui mesurer le succès social ? Comme vous y a invités Olivier Jardé, soyez cohérents et allez jusqu'au bout de votre logique : si l'AMP est un traitement médical de l'infertilité, tous les couples infertiles, même pacsés, doivent pouvoir en bénéficier !

PermalienPhoto de Hervé Mariton

L'amendement du rapporteur supprimant la condition de durée de vie commune minimum vient après le présent amendement. S'il venait à être adopté, il n'y aurait effectivement plus de raison de distinguer les différents types de liens conjugaux. Dans le cas contraire, il me paraîtrait cohérent d'apprécier différemment ces liens, qui, en vertu de la loi, entraînent des obligations différentes, ne se défont pas de la même manière, et portent des projets de durée variée.

PermalienPhoto de Xavier Breton

Les articles 213 à 215 du code civil ne sont pas seulement destinés à être lus le jour du mariage ; ils entraînent des obligations dont le non-respect est sanctionné en cas de divorce, ce qui n'est pas le cas pour la rupture du PACS.

PermalienPhoto de Patrick Bloche

J'ai l'impression d'être revenu à l'hiver 1998, dans l'hémicycle ! Les mêmes arguments étaient avancés alors.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Nous n'avons pas contesté la légitimité du PACS !

PermalienPhoto de Patrick Bloche

Notre collègue Olivier Jardé a rappelé que 52 % des enfants naissaient hors mariage. Certes, l'officier d'état civil donne lecture de l'article 213 du code civil, mais, et c'est heureux, les parents ont à l'égard de leurs enfants des obligations identiques, qu'ils soient mariés, pacsés ou qu'ils vivent en concubinage !

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Notre code civil dissocie la filiation du statut du couple. Considérant que l'AMP est un ensemble de techniques pouvant bénéficier à un couple dont l'infertilité est médicalement constatée, le mode d'union de ce couple ne doit pas entrer en compte dans l'appréciation du médecin.

Hervé Mariton craint que des couples de circonstance ne se forment pour obtenir une AMP qui bénéficierait in fine à la femme, vivant en réalité avec une autre femme. Rappelons que l'infertilité doit être médicalement constatée, ce qui implique que ces femmes trouvent un volontaire stérile. Imaginer une telle arnaque me semble bien compliqué, plus compliqué que d'emprunter le Thalys pour se rendre en Belgique !

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle rejette, suivant l'avis défavorable du rapporteur, l'amendement AS 114 de M. Noël Mamère.

Elle est ensuite saisie de l'amendement AS 201 du rapporteur.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Cet amendement vise à supprimer toute mention du mode d'union du couple pour ne considérer comme critère d'accès à l'AMP que l'élément de l'infertilité, dont le caractère pathologique doit être médicalement diagnostiqué. La stabilité du couple pourra s'apprécier tout au long du parcours de procréation !

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Défavorable. Si le législateur a souhaité faire de la stabilité du couple un critère d'accès à l'AMP, c'est dans l'intérêt de l'enfant. Je crains que la suppression de la condition d'une durée minimum de vie commune ne donne accès à l'AMP à des couples de circonstance.

PermalienPhoto de Olivier Jardé

Les rendez-vous et les différentes démarches médicales précédant la mise en oeuvre des techniques d'AMP s'étalent sur une période de dix-huit mois, pratiquement incompressible. Cela équivaut presque aux deux ans requis jusqu'alors.

La Commission adopte l'amendement.

En conséquence, les amendements AS 5 de M. Jean-Sébastien Vialatte et AS 138 de M. Alain Claeys n'ont plus d'objet.

La Commission est saisie de l'amendement AS 78 de M. Olivier Jardé.

PermalienPhoto de Olivier Jardé

En cas de décès brutal du conjoint, cet amendement vise à autoriser, à titre exceptionnel et dans un délai de trois mois, le transfert post-mortem d'un embryon ayant été conçu par AMP dans le cadre d'un projet parental.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

La mission d'information avait donné un avis favorable, sous certaines conditions drastiques, au transfert d'embryon post-mortem. Les états généraux se sont déclarés opposés à une telle disposition.

Si le conjoint décède après l'implantation de l'embryon, la femme peut décider de subir un avortement, ou de poursuivre sa grossesse. Mais si le conjoint décède avant l'implantation de l'embryon, la femme doit choisir entre trois possibilités, dont aucune ne semble humainement acceptable. Elle peut consentir à ce que l'embryon soit accueilli par un autre couple, à ce qu'il fasse l'objet d'une recherche ou à sa destruction.

Naître d'un père décédé constitue certes un handicap. Mais beaucoup d'enfants grandissent sans la présence de leur père. On peut considérer que le père, même décédé, est encore un père et une référence pour l'enfant.

Il faut par ailleurs garder présentes à l'esprit les conséquences successorales d'un transfert post-mortem. Afin de permettre à l'enfant d'hériter à sa naissance du père décédé, il conviendrait de prévoir un gel de la succession et la mise sous tutelle temporaire des biens du défunt. Le règlement de la succession serait alors subordonné à l'aboutissement de la grossesse.

Enfin, le transfert post-mortem pourrait donner lieu à un transfert de deuil pathologique. Mais n'est-ce pas le lot des orphelins que de devenir l'objet d'un transfert et de porter en eux le deuil d'un parent ? Aucune loi de bioéthique ne permettra de l'éviter.

Sous réserve d'expertise sur les conséquences juridiques en matière de droit civil et d'une réflexion sur le délai à respecter avant d'autoriser le transfert, je suis favorable à cette idée.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Je suis entièrement d'accord. Il est dans cette affaire un argument complètement dérisoire : celui, repris par tous les gouvernements successifs, du problème de la succession. J'ai souvenir d'une réunion d'arbitrage à Matignon où un éminent fonctionnaire de la Chancellerie n'en démordait pas !

Cette question du transfert post mortem est aussi abordée par deux amendements identiques après l'article 20, l'un de Mme Aurillac et l'autre que j'ai cosigné avec M. Le Déaut. Peut-être serait-il plus clair de les présenter maintenant.

PermalienPhoto de Martine Aurillac

Mon amendement est dans la droite ligne de l'exposé du rapporteur. Je rappelle que la question avait suscité l'accord de l'Académie de médecine et du Comité national d'éthique.

Une telle disposition doit être rigoureusement encadrée. D'abord, par des délais : le transfert ne doit pas avoir lieu avant six mois, afin de laisser du temps au travail de deuil et pour que la décision ne soit pas prise sous le coup de l'émotion et du chagrin, mais il doit être réalisé dans les dix-huit mois après le décès. Ensuite, il est soumis à autorisation de l'Agence de la biomédecine. Enfin, l'homme doit avoir donné son consentement qui est révocable à tout moment de son vivant.

En l'absence d'un tel dispositif, il ne reste plus à la femme que le choix entre le don à un autre couple – ce qui paraît assez extravagant s'agissant de son propre enfant, qu'elle a fait avec l'homme qu'elle aimait au point de vouloir élever l'enfant seule –, la destruction ou le don à la recherche. S'il n'est pas question d'écrire des lois de façon trop émotionnelle, cela n'empêche pas de les imprégner d'un peu de compassion et d'humanité.

Enfin, l'argument de la succession me choque tout autant que le président, et je suis étonnée, connaissant son humanisme, que le rapporteur le mette en avant. Il est évident que cette disposition doit être assortie de modifications dans le droit civil, en matière de filiation autant que de succession. Nous proposons que l'enfant soit réputé enfant vivant du père, avec une administration provisoire de la succession.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Les amendements déposés après l'article 20 me paraissent plus complets que le AS 78. Ils traitent notamment du problème de la succession. M. Jardé voudra peut-être se rallier à un amendement commun.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Sauf que son amendement vise explicitement l'hypothèse d'un décès brutal. Je ne suis pas sûr que les vôtres puissent s'appliquer dans un tel cas.

PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Nous partageons ce qui vient d'être exposé. Les cas sont rares, mais ils doivent être pris en compte. Et nous ne pouvons obliger la femme à choisir entre le don et la destruction de l'embryon. C'est une deuxième mort. Le dispositif paraît suffisamment encadré, avec le délai de six à dix-huit mois, la reconnaissance automatique de la filiation et les règles en matière de succession. Un amendement commun susciterait peut-être l'unanimité de la Commission.

PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

Je serais désolé de paraître manquer d'humanité ou de compassion, mais je suis très réservé. D'abord parce qu'on fait naître ainsi un enfant orphelin, et j'ai du mal à comprendre qu'on puisse délibérément faire ce choix. Ensuite parce que cet enfant portera d'emblée le poids psychologique très lourd de la réparation. Ce sera une sorte d'enfant thérapeutique. Enfin, sur un autre plan, je me demande sur quoi reposent vos délais : pourquoi six mois ? À cinq, le deuil n'est pas fini mais à sept, on ne prend plus sa décision sous le coup de l'émotion ?

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

Je donne un avis défavorable à ces amendements. Ne parlons pas du cas où l'insémination a déjà été faite : c'est la situation d'une femme enceinte qui a perdu son mari. Mais si, bien que le projet ait été engagé, le décès du père a lieu avant le transfert, vous demandez à la société de s'engager à faire naître un orphelin, sans prêter la moindre attention aux difficultés psychologiques auxquelles sera confronté l'enfant né d'un deuil. On ne mesure pas suffisamment l'impact que cela aurait sur lui. On oublie son intérêt au profit de celui de la mère. Je ne veux pas avoir à imaginer la naissance d'un enfant deux ans après la disparition de son père.

PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

J'ai cosigné cet amendement, déjà présenté lors des deux lois précédentes. En 1994, il y avait eu une stricte égalité, il n'a donc pas été adopté. En 2004, il a été adopté en première lecture mais pas en deuxième. On est confronté aux mêmes arguments : vous nous reprochez de faire naître un orphelin. Mais de votre côté, vous rompez un contrat puisque c'est un projet parental, construit du vivant du père, qui a conduit à la conception d'un embryon in vitro. Et l'enfant, que vous dépeignez en si grande difficulté, reste l'enfant de l'amour de la mère et du père décédé.

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

C'est un amour qui coûte très cher à l'enfant.

PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Mais il faut alors admettre qu'il soit détruit, alors que la mère souhaite l'élever… Le Parlement s'honorerait de mettre fin à dix-sept ans de non-droit.

PermalienPhoto de Valérie Boyer

Je soutiens ces amendements. Les diverses considérations qui ont trait à la psychologie ou à l'amour ne relèvent pas de la loi : chacun son histoire. En revanche, nous avons à régler le cas d'un embryon bien vivant, issu d'un couple qui a un projet parental. Le projet d'enfant existe, le projet de la grossesse est engagé ; il faut autoriser la femme à poursuivre.

PermalienPhoto de Philippe Vuilque

Beaucoup d'orphelins n'ont pas connu leur père, parce qu'il est mort au front par exemple. Dès lors qu'un projet parental existe, une volonté précise exprimée par les deux parents, la position de la ministre me paraît difficilement explicable.

PermalienPhoto de Xavier Breton

Ce sont des cas rares qui sont en cause, mais douloureux. Je rejoins les arguments de Paul Jeanneteau : il me semble important de distinguer entre les circonstances de la vie qui font un orphelin et le fait de créer volontairement cette situation. Par ailleurs, si l'on autorise la femme à poursuivre le projet du couple, que doit-on faire pour l'homme qui devient veuf ? La seule réponse, c'est la gestation pour autrui ! Si l'on va au bout de votre raisonnement, comment la société pourrait-elle refuser à l'homme dont la femme décède et qui a un embryon congelé, de l'utiliser ? Cela pose des questions immenses, y compris celle de la différence fondamentale entre hommes et femmes.

PermalienPhoto de Yves Bur

Un cas de conscience supplémentaire dans cette discussion… En l'occurrence, j'aimerais connaître le nombre de situations visées. Il me semble qu'on aboutirait à légiférer en quelque sorte à l'unité. Je suis sensible aux arguments des deux côtés, mais peut-être un peu plus à celui du poids psychologique : il ne sera pas facile d'être cette sorte d'enfant témoin. Sans compter que la mère peut refaire sa vie… Le minimum me semble de recueillir l'assentiment du père, soit au début de la démarche de procréation assistée, soit en cours de pathologie. Mais compte tenu du fardeau imposé à l'enfant, je reste assez réticent.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Nous devons d'abord nous prononcer sur l'amendement AS 78 à l'article 20 de M. Olivier Jardé.

L'amendement est retiré.

La Commission adopte l'article 20 modifié.

Après l'article 20.

La Commission est saisie des amendements identiques AS 1 de Mme Martine Aurillac et AS 139 de M. le président Alain Claeys.

Article additionnel après l'article 20 : Autorisation du transfert d'embryon post-mortem

PermalienPhoto de Alain Claeys

Ces amendements ont été présentés à l'instant.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

On voit bien que le débat sur la bioéthique ne se résume pas à ceux qui savent contre ceux qui ne savent pas – au bien contre le mal. C'est généralement un bien contre un bien – l'épanouissement qu'on souhaite à un enfant à naître, mais contrarié par la mort prématurée de son père. On peut vivre sans père et devenir Albert Camus ou Philippe Séguin. Chacun finit par trouver un chemin d'accomplissement.

Si l'on fait un parallèle avec le cas de ceux qui doivent subir une chimiothérapie ou une radiothérapie et qui conservent leurs gamètes pour s'en servir après la maladie, ces gamètes sont détruits en cas de décès. On n'hérite pas d'un produit biologique de son conjoint et il est normal que le sperme soit détruit à la suite du décès de l'homme.

Enfin, je ne voudrais pas que cette disposition généreuse ouvre un champ quelque peu mortifère, laissant imaginer à des couples dont l'homme serait atteint d'une pathologie incurable, avec une mort prévisible à brève échéance, qu'ils pourraient entamer une PMA, créer un embryon puis le faire implanter après le décès. Il faut trouver une formulation qui évite cela. L'expression de « décès brutal » qui figurait dans l'amendement AS 78 ne peut convenir, parce qu'elle n'a pas de définition. Mais on peut au moins préciser que le décès ne devait pas être prévisible au moment de la procréation – une notion qui existe en médecine. Seriez-vous favorables à un sous-amendement qui aille dans ce sens ?

PermalienNora Berra, secrétaire d'état chargée de la sant

De mon point de vue, il ne changerait rien.

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Le père doit dire s'il consent à la poursuite de l'assistance médicale à la procréation dans l'éventualité de son décès. C'est à ce moment là qu'il faut établir qu'il n'est pas atteint d'une maladie à l'échéance fatale prévisible. Le quatrième alinéa des amendements se lirait donc ainsi : « Le transfert des embryons peut être réalisé à la suite du décès de l'homme dès lors que celui-ci a donné par écrit son consentement à la poursuite de l'assistance médicale à la procréation dans l'éventualité de son décès non prévisible au moment du consentement à l'AMP ».

PermalienPhoto de Alain Claeys

Le texte initial des amendements est celui qui avait été adopté par l'Assemblée en première lecture.

PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

Ce sous-amendement est encore pire ! On a droit au transfert post mortem si l'on meurt d'un accident, pas si l'on est emporté progressivement !

PermalienPhoto de Jean Leonetti

Vous paraît-il envisageable qu'un homme atteint d'une maladie incurable à l'issue proche essaye de faire un embryon pour léguer à sa femme un enfant à naître ? Sans compter les conséquences successorales… Je renonce à ce sous-amendement écrit trop vite, mais j'attire votre attention sur ce danger.

PermalienPhoto de Alain Claeys

Nous verrons cela en séance. Pour l'instant, les amendements sont mis aux voix tels quels.

La Commission adopte les amendements identiques AS 1 et AS 139.

La séance est levée à dix-neuf heures vingt.