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Commission des affaires économiques

Séance du 28 septembre 2010 à 17h00

Résumé de la séance

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  • métier

La séance

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Commission des affaires économiques

La commission a entendu M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, sur le bilan du statut d'auto-entrepreneur.

PermalienPhoto de Patrick Ollier

Mes chers collègues, en notre nom à tous, je souhaite la bienvenue aux membres d'une délégation parlementaire de l'Assemblée nationale du Burkina Faso, en voyage officiel dans notre pays : M. Jacob Ouedraogo, président de la Commission des affaires générales, institutionnelles et des droits humains ; MM. Mahama Sawadogo, Lassané Savadogo, Hama Arba Diallo et Yacouba Savadogo, membres de cette commission ; et M. Seydou Coulibaly, assistant.

PermalienPhoto de François Brottes

Monsieur le président, le groupe SRC souhaiterait que la Commission étudie l'impact de la réforme de la taxe professionnelle sur notre industrie. Il semble en effet que les mesures prises soient beaucoup plus favorables au secteur tertiaire qu'au secteur industriel, ce qui n'était pas l'objectif poursuivi.

Cette question majeure ne doit pas relever exclusivement de la Commission des finances. Les membres de notre Commission sont attachés au développement du secteur industriel, et il ne faut pas oublier n'y aurait pas de secteur tertiaire sans industrie.

PermalienPhoto de Patrick Ollier

Monsieur Brottes, la Commission des finances a une compétence directe en matière de fiscalité. Néanmoins, nous sommes également en droit de nous intéresser aux conséquences que peut avoir cette fiscalité sur la compétitivité des entreprises. Notre emploi du temps n'est pas trop chargé cette session et je vais voir ce que l'on peut faire.

Monsieur le ministre, je ne compte plus le nombre de fois où nous vous avons accueilli, que ce soit dans le cadre de l'examen d'un texte – par exemple les projets de loi relatifs aux réseaux consulaires ou à l'entreprise individuelle à responsabilité limitée, l'EIRL – ou, comme aujourd'hui, dans le cadre d'une audition portant sur un sujet déterminé : le statut de l'auto-entrepreneur.

J'avais souhaité, dans le cadre de la Commission des affaires économiques, dresser un premier bilan de l'application de la loi de modernisation de l'économie. Ce fut l'objet du rapport confié à Jean-Paul Charié – que j'ai relayé après son décès – et à Jean Gaubert. Nous nous penchons aujourd'hui sur le bilan du statut de l'auto-entrepreneur, qui est votre création.

Je sais la part que vous avez prise pour convaincre les responsables des administrations et le Gouvernement de la nécessité de mettre en place ce magnifique projet. De fait, en juillet 2009, on enregistrait déjà 182 000 inscriptions : 17 000 micro-entreprises adhérentes au nouveau statut et 165 000 créations d'entreprises. On compte aujourd'hui 440 000 auto-entrepreneurs. C'est un véritable engouement, sachant que les auto-entrepreneurs créent leur affaire en premier lieu dans le domaine des services – pour 48 % –, puis dans celui du commerce – pour 40 % – et, ce qui peut paraître plus étonnant, dans celui de la construction – pour 12 %.

Avant de vous passer la parole, monsieur le ministre, je vous poserai trois questions. La première concerne la pérennité des affaires créées sous ce statut. Des études et des témoignages montrent que l'auto-entrepreneur gagne difficilement sa vie et qu'il doit souvent conserver une autre profession en parallèle. Ces affaires sont-elles viables ? Disparaissent-elles au bout de quelques semaines ou de quelques mois ? Avez-vous des indications sur la façon dont elles évoluent ?

Ma deuxième question porte sur les relations entre les auto-entrepreneurs et les autres acteurs de la vie économique, en particulier les banques. Celles-ci acceptent-elles volontiers de leur octroyer des crédits ? Avez-vous des chiffres à nous fournir sur le sujet ? Le Médiateur du crédit doit-il intervenir et dans quelle proportion ?

Ma dernière question concerne le monde de l'artisanat, qui se manifeste de plus en plus souvent auprès de nous. Il se plaint de ce qu'il considère comme une concurrence déloyale de la part des auto-entrepreneurs : le régime fiscal et social de ces derniers est fondé sur le chiffre d'affaires effectivement réalisé, alors que celui des artisans indépendants est beaucoup plus complexe ; les auto-entrepreneurs peuvent établir des factures sans TVA, alors que les entreprises relevant du droit commun doivent prendre en considération la TVA applicable. Ces différences de traitement entraîneraient des distorsions de situation. Pouvez-vous le confirmer ?

PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

J'ai grand plaisir à me retrouver parmi vous. Il faut dire que j'entretiens avec votre Commission des affaires économiques des liens quasiment institutionnels, puisque sa compétence englobe nombre d'activités de mon ressort ministériel.

Le bilan d'évaluation 2009 du régime de l'entrepreneur, que vous avez entre les mains, n'est pas encore public à l'heure où je vous parle. Mais j'ai tenu à ce que votre Commission en soit le premier dépositaire.

Comme vous l'avez rappelé, le statut de l'auto-entrepreneur, voté il y a deux ans au tout début de la crise, a rencontré un succès fort et immédiat : 322 000 créations d'entreprises en un an, et plus de 530 000 en dix-huit mois ; 921 millions d'euros de chiffre d'affaires ont été déclarés en 2009, 1,1 milliard d'euros l'a été au seul premier semestre 2010, et nous nous attendons à 2,5 milliards d'euros voire 3 milliards d'euros pour l'année 2010. Pourquoi un tel engouement ?

Malgré de significatifs progrès ces dernières années, les Français, pourtant désireux de créer des entreprises, avaient du mal à passer à l'acte : d'où la réforme de la création d'entreprise et l'institution du régime de l'auto-entrepreneur.

Ce régime est moderne en ce qu'il épouse l'avènement et le développement d'une société de service, une société où la première demande des entreprises et des particuliers est de trouver des réponses ponctuelles, rapides et individualisées à des problématiques particulières. Par ailleurs, c'est la première fois qu'il est possible de créer une entreprise sur internet. De fait, aujourd'hui, 80 % des inscriptions se font en ligne.

Cette modernité permet une révolution administrative : celle de la simplicité. Elle permet une révolution culturelle et sociétale puisque tout le monde peut tenter sa chance et devenir auto-entrepreneur, qu'il soit chômeur, retraité, salarié, jeune et, sous certaines conditions, fonctionnaire. Bien sûr, certains connaîtront l'échec, mais d'autres réussiront. L'échec de quelques-uns est le prix à payer pour une opportunité nouvelle ouverte à tous, et ce prix à payer n'est pas trop fort.

Déjà, depuis l'autre innovation très forte que constitue l'entreprise individuelle à responsabilité limitée issue de la loi du 15 juin 2010 – et votée en grande partie grâce au soutien constant du président de cette Commission, que je veux remercier –, les entrepreneurs individuels n'auront plus à répondre de leurs engagements professionnels sur la totalité de leur patrimoine personnel. Le dispositif de l'EIRL sera opérationnel à partir du 1er janvier 2011. En pratique, à partir de cette date, pourront être créées des auto-entreprises à responsabilité limitée – AERL –, un dispositif qui combinera la simplicité du régime de l'auto-entrepreneur, avec la protection du patrimoine personnel apportée par l'EIRL.

Comme je m'y étais engagé devant vous, j'ai lancé des travaux d'évaluation du régime de l'auto-entrepreneur. Vous avez sous les yeux le résultat de travaux menés sur la base de données de l'Agence centrale des organismes de Sécurité sociale – ACOSS – qui gère les comptes des auto-entrepreneurs, de celle de l'INSEE, ainsi que sur des enquêtes menées par l'institut de sondage IPSOS auprès des auto-entrepreneurs, des entreprises « classiques », et des particuliers. Un comité dont la composition était volontairement large, puisqu'il associait les organismes de Sécurité sociale, les organisations professionnelles concernées dont l'Union professionnelle artisanale – UPA –, les chambres consulaires, les réseaux d'accompagnement des auto-entrepreneurs et les services de l'administration, a été consulté. Une version quasi définitive de ce rapport m'a été remise récemment. Je l'ai transmise le plus rapidement possible au président Ollier et à vous-mêmes. Ce rapport permet de répondre à certaines des interrogations et des craintes légitimes que suscite ce nouveau régime. Avec lui, vous avez les pièces pour juger.

Le régime de l'auto-entrepreneur marque une inflexion dans les courbes de créations d'entreprise : 322 000 entreprises créées sous ce régime en 2009, soit les trois quarts de la création d'entreprises individuelles sur cette période ! Ce chiffre est d'autant plus significatif que l'effet de substitution avec d'autres formes d'entreprise individuelle est très limité : moins de 11 %. Le chiffre d'affaires moyen des auto-entrepreneurs reste toutefois modeste à ce stade : environ 6 300 euros par an, si on prend en compte l'ensemble des données.

Lorsque les auto-entrepreneurs sont employés par des particuliers, ceux-ci leur confient des petits travaux : leur prix est inférieur à 500 euros dans 80 % des cas. De la même manière, lorsque les entreprises confient aux auto-entrepreneurs des tâches en sous-traitance, elles le font principalement pour faire face à un pic d'activité, il en va ainsi dans 65 % des cas dans le secteur de la construction.

Cette étude permet de mieux cerner les motivations des nouveaux entrepreneurs : 40 % d'entre eux s'inscrivent dans une optique de complément de revenu. Ces entrepreneurs à temps partiel s'accommodent très bien et durablement des plafonds de chiffre d'affaires de 32 000 et de 80 000 euros, pour les services et pour le commerce. Quant aux autres entrepreneurs, qui sont majoritaires, l'objectif à terme reste bien de développer une entreprise à part entière.

Les auto-entrepreneurs sont en moyenne plus diplômés que les créateurs d'entreprises individuelles. Les obligations de qualifications professionnelles, qui s'imposent à eux comme aux autres créateurs d'entreprises, ne semblent donc pas constituer un obstacle.

Sur le plan social, l'étude permet de battre en brèche quelques idées reçues. Par exemple peu d'auto-entrepreneurs – 1,5 % seulement – affirment avoir créé leur entreprise à la demande de leur ancien ou de leur futur employeur. Pour autant, il n'est pas question de baisser la garde et de laisser se développer des pratiques de faux auto-entrepreneurs, pas plus que de faux sous-traitants, de faux mandataires ou de toute autre forme de salariat déguisé. L'arsenal jurisprudentiel pour combattre ces abus n'a, fort heureusement, pas attendu l'auto-entrepreneur pour se construire et se consolider. Je ne demande pas autre chose pour les auto-entrepreneurs que de leur appliquer le droit.

Il est frappant de constater que 23 % des auto-entrepreneurs déclarent avoir « professionnalisé une activité déjà exercée avant la mise en place de la réforme ». En pratique, ils ont régularisé leur activité. Combien de réformes peuvent se targuer d'avoir fait rentrer autant d'activités dans les circuits économiques ? Ainsi, la meilleure arme de lutte contre le travail au noir est aujourd'hui le régime de l'auto-entrepreneur.

Ce régime a permis également à des chômeurs de retrouver une activité : ils représentent 15 % des créations d'auto-entreprises. Ces reprises d'activité ont d'ailleurs été rendues compatibles avec le RSA et les dispositifs d'aide à la création d'entreprise.

En dépit de ces chiffres qui vont dans le bon sens, j'ai procédé à plusieurs ajustements, comme c'est naturel lors du lancement d'une réforme.

Nous avons rétabli des règles de compensations plus justes entre la CIPAV – la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, c'est-à-dire le régime de retraite des libéraux non réglementés – et les autres régimes de sécurité sociale. Ces nouvelles règles de compensation budgétaire entre régimes de retraite limitent l'impact comptable du régime de l'auto-entrepreneur pour la CIPAV ; son président m'a écrit pour me dire qu'il était satisfait de ces modifications. Par ailleurs, les règles de validation des trimestres de retraite ont été alignées sur le droit commun par un décret du 24 juin 2010.

Par la signature d'une convention, nous avons compensé, pour un montant de 5 millions d'euros, les frais de formation professionnelle qu'occasionnent les auto-entrepreneurs aux organismes consulaires.

Nous avons prévu dans la loi de finances rectificative de 2009 l'immatriculation au registre des métiers des auto-entrepreneurs exerçant leur activité à titre principal. En outre, depuis le 1er avril, la qualification professionnelle des artisans comme des auto-entrepreneurs est contrôlée par la chambre des métiers avant la création de leur entreprise. C'est une avancée majeure, qui n'est sans doute pas suffisamment connue ni commentée et qui alimente des polémiques qui n'ont pas lieu d'être.

Monsieur le président, vous avez soulevé la question de l'accès au crédit des auto-entrepreneurs. Je m'en suis préoccupé dès le début en favorisant la signature d'une convention avec la Banque Postale, pour assurer aux auto-entrepreneurs qui déclaraient leur entreprise sous cette forme des avantages s'ils passaient par elle.

Le fait est que les auto-entrepreneurs, comme le souligne l'étude, recourent rarement au crédit : 60 % d'entre eux puisent dans l'épargne le financement nécessaire à leur activité, et 5 % seulement utilisent des emprunts bancaires et 2 % du micro-crédit. Cela montre le peu d'appétence des banques pour favoriser l'activité des auto-entrepreneurs. Nombre d'auto-entrepreneurs m'ont signalé l'indifférence des banques à leur égard. Et en pratique, la médiation du crédit, théoriquement compétente pour ce type de public, n'intervient pratiquement pas.

Ces refus bancaires ont pour conséquence que les auto-entrepreneurs ne peuvent pas accéder aux financements d'OSEO, tels que les prêts à la création d'entreprise ou les garanties renforcement de trésorerie. Ces refus sont probablement motivés non par le niveau de risque de crédit, mais plutôt par le fait que les crédits demandés ont des montants trop faibles pour les réseaux des banques commerciales. Je compte interroger les banques à ce sujet lorsque je les réunirai le 7 octobre à Bercy pour examiner la question du financement des EIRL et des auto-entreprises.

Certains avancent que le régime de l'auto-entrepreneur serait trop avantageux. Il l'est sans doute par sa simplicité, mais il ne s'agit en aucun cas d'un régime subventionné. Il n'introduit pas non plus de concurrence déloyale en termes de niveaux de charges. Une étude de l'Ordre des experts comptables, actualisée en avril dernier, a bien montré que le niveau de charges était équivalent.

On compare souvent à tort le taux de taxation des artisans de droit commun (45 %) à celui des auto-entrepreneurs (21,3 %). C'est oublier que ces taux s'appliquent à des assiettes différentes : l'artisan est imposé sur ses bénéfices, alors que l'auto-entrepreneur est imposé sur son chiffre d'affaires. En d'autres termes, l'auto-entrepreneur ne peut déduire aucune charge et est imposé sur l'intégralité de son chiffre d'affaires. Le régime de l'auto-entrepreneur est d'ailleurs très peu attractif en cas d'investissements significatifs, synonymes de charges élevées.

Il est exact que l'auto-entrepreneur n'est pas assujetti à la TVA. C'est d'ailleurs le cas aussi du régime de la micro-entreprise qui existe depuis près de vingt ans et qui, à ma connaissance, n'a pas fait l'objet de polémique. Mais en contrepartie de cette exonération de TVA, l'auto-entrepreneur achète ses fournitures et ses matières premières toutes taxes comprises et il ne peut déduire la TVA de ses achats de matières premières, qui sont souvent élevés dans le domaine du bâtiment et des travaux publics.

Dès lors que le régime de l'auto-entrepreneur n'engendre pas de concurrence déloyale, il n'est pas justifié de limiter ce statut dans le temps. C'est évident pour les activités complémentaires, qui peuvent durablement être exercées sans dépasser les plafonds de chiffre d'affaires applicables au régime. C'est également le cas pour les entrepreneurs à temps plein qui ne souhaitent pas tous faire croître leur activité et qui peuvent légitimement vouloir bénéficier durablement d'un cadre comptable, administratif, fiscal et social simplifié.

Monsieur le président, limiter la durée d'application du régime de l'auto-entrepreneur reviendrait à adresser un signal négatif à toutes les personnes qui se sont engagées dans cette voie, avec les risques que cela implique. Du reste, le régime de la micro-entreprise, dont s'inspire nettement le régime de l'auto-entrepreneur, n'est pas limité dans le temps, pour les mêmes raisons.

Je rappelle que le régime de l'auto-entrepreneur n'a pas vocation à remplacer les statuts classiques des entreprises, mais à encadrer des activités générant un chiffre d'affaires limité – 80 300 euros pour les activités commerciales, 32 100 euros pour les activités de service en 2010. Lorsque l'activité génère un chiffre d'affaires supérieur aux seuils, les auto-entrepreneurs deviennent des entrepreneurs individuels soumis aux règles communes ou créent leur société.

J'ai indiqué que nous souhaitions faire bénéficier l'ensemble des entrepreneurs individuels – 1,5 million en France – des avantages de simplicité du régime de l'auto-entrepreneur. La novation du régime de l'entrepreneur était de permettre l'inscription en ligne. Nous allons faire de même pour l'ensemble des entrepreneurs individuels de ce pays. Par ailleurs, sur le thème de la création d'entreprise, mais au-delà du régime de l'auto-entrepreneur, François Baroin et moi-même avons donné une impulsion forte au guichet unique qui doit simplifier la création d'entreprise pour tous les travailleurs indépendants. Cela prendra la forme d'un groupement d'intérêt public dans lequel tous les acteurs concernés trouveront leur place et qui bénéficiera d'un soutien financier public fort, à travers le versement sur trois ans d'une dotation de 5 millions d'euros. Ce GIP devrait être pleinement opérationnel dans le courant du mois de novembre.

Mais le chantier de la simplification s'étend bien au-delà de l'acte de création d'entreprise. C'est pourquoi j'ai également engagé, comme je vous l'avais précédemment indiqué, une réflexion avec François Baroin, sur les moyens de simplifier l'ensemble des cotisations sociales pour tous les entrepreneurs individuels en les adaptant au mieux à leurs contraintes de trésorerie. Nous avons réussi, avec l'auto-entrepreneur, à supprimer les cotisations minimales forfaitaires qui étaient une hantise et un frein à la création d'entreprises pour les entrepreneurs individuels. Nous travaillons sur cette simplification et sur un lissage pour coller au niveau de l'activité des entrepreneurs individuels. Il y a un paradoxe à ce que, lorsque l'activité décroît, on supporte des charges plus importantes qui reflètent une activité passée. Le sujet est essentiel pour nos petites entreprises pour lesquelles l'accès au crédit court terme s'est considérablement durci au cours de la crise et continue d'être difficile.

Ce groupe de travail associant les administrations ainsi que les professionnels concernés s'est réuni régulièrement depuis juin. Il remettra ses conclusions à François Baroin et à moi-même, et nous ferons les propositions qu'il convient avant la fin du mois d'octobre.

Encore une fois, ce rapport ne vous a été distribué que tardivement, et je vous prie de m'en excuser. Mais il n'est disponible que depuis hier. J'ai souhaité que vous l'ayez au moins en avant-première. Il nous permettra malgré tout de discuter des différentes faiblesses, supposées ou réelles du régime de l'auto-entrepreneur et d'écarter les polémiques qui sont nées dans l'année qui a suivi sa création.

PermalienPhoto de Patrick Ollier

Merci, monsieur le secrétaire d'État, pour les chiffres que vous nous avez fournis et pour le rapport que vous avez adressé hier soir à la Commission. Nous voyons maintenant les choses d'un autre oeil.

PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le président, je m'aperçois que je ne vous avais pas répondu sur la pérennité de l'auto-entreprenariat : une partie des auto-entrepreneurs s'inscrit et s'arrête là. Mais parmi les 235 000 auto-entrepreneurs qui ont lancé effectivement leur activité au cours des trois premiers trimestres 2009, seuls 12 % ont renoncé.

PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Je tiens à saluer sans réserve cette réforme de l'auto-entrepreneur, qui répond à une attente très forte des Français. Le succès est là, avec plus de 320 000 auto-entrepreneurs fin 2009.

Cette réforme répond aussi à un besoin de simplicité. La création d'entreprise a longtemps relevé du parcours du combattant. Certes, différents textes, en particulier celui de 2006 sur l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée – EURL –, avaient simplifié les procédures. Mais on n'avait pas imaginé, à l'époque, pouvoir créer une entreprise sur internet. Monsieur le secrétaire d'État, certains de vos collègues seraient, eux aussi, bien inspirés de simplifier la réglementation administrative. Mais je remarque qu'il est aujourd'hui beaucoup plus compliqué de fermer une entreprise que de la créer. Est-ce normal, quand il n'y a aucun problème financier ?

Cette réforme a rendu la création d'entreprise accessible à la plupart des Français. Le dispositif est souple, permettant d'exercer une activité à temps complet pour des revenus relativement modestes, ou une activité à temps partiel ; il peut être un premier pas vers une entreprise plus importante.

Le bénéfice de ce régime n'a pas lieu d'être limité dans le temps, car il s'agit bien, dans certains cas, d'une activité pérenne, à temps complet ou partiel. Certains collègues proposaient en effet d'en fixer la durée à deux ou trois ans.

Vous l'avez dit, des critiques infondées sur le régime de l'auto-entrepreneur ont été formulées, s'agissant notamment des charges sociales. L'auto-entrepreneur paie des charges sociales, mais le système qui lui est appliqué est souple et équitable. Pourquoi ne pas en faire bénéficier les micro-entreprises ? Ne pourrait-on pas éviter que les entreprises doivent faire des avances de trésorerie sur les charges sociales ? C'est dans cette voie qu'il faut aller si l'on veut défendre les entreprises et les emplois.

Par ailleurs, j'aimerais que tous les auto-entrepreneurs artisans, que ce soit leur activité principale ou secondaire, puissent avoir une obligation d'assurance vis-à-vis de leurs clients. Ces derniers seraient ainsi assurés d'avoir la garantie décennale.

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Il y a au moins un point sur lequel nous pouvons vous féliciter : votre grande productivité en matière de statuts – vous nous avez d'ailleurs promis une nouvelle version pour le 1er janvier 2011 ! Mais nous aurons encore l'occasion d'en discuter, d'autant que les organisations professionnelles sont un peu moins enthousiasmes qu'elles ne l'étaient au moment du vote.

Vous comprendrez bien que nous n'avons pas eu le temps d'examiner au fond le rapport qui nous a été transmis. Mais le sommaire à lui seul m'a déjà fourni des indications très intéressantes. Ainsi, les intitulés des points 3. et 4. du chapitre 2 sont respectivement : « Les auto-entrepreneurs masculins sont plus performants », et « La performance des auto-entrepreneurs augmente avec l'âge ». On ne manquera pas d'en tenir compte… Quant au point 6. il a pour titre : « Pour près de la moitié des créateurs "déclarants", le chiffre d'affaires a augmenté au cours des trimestres. » Cela signifie que pour plus de la moitié, il a baissé.

D'une façon générale, si j'en crois les chiffres du rapport Marini – sénateur de la majorité –, la déclaration moyenne baisse au fil des trimestres : elle était, sur le premier trimestre 2009, de 4 000 euros, et sur le quatrième trimestre, de 3 383 euros ; et elle aurait encore baissé depuis. Ainsi, un peu moins de la moitié des entreprises verraient leur activité croître, et un peu plus de la moitié la verraient décroître. Cette constatation devrait vous inciter à la prudence.

Vous dites qu'il n'y a pas de problème de concurrence avec ce dispositif qui, je le reconnais, a permis de régulariser les travailleurs au noir. Mais les artisans s'interrogent, à un moment où les métiers du bâtiment connaissent une certaine dépression.

Certes, de nouveaux métiers ont été ainsi créés : j'ai reçu dernièrement à ma permanence quelqu'un dont le métier est « analyseur de rêves » !

Le profil des auto-entrepreneurs est également intéressant : il y aurait moins de chômeurs que ce que l'on avait imaginé, et plus de salariés à temps partiel. Le nouveau statut serait le moyen de trouver un complément de revenus. Simplement, si l'on se réfère aux sommes qui sont déclarées, cela ne fait pas beaucoup de revenus : 3 200 euros pour un trimestre, ce n'est pas énorme, surtout s'il a fallu s'équiper en matériel.

On peut se demander quelle sera l'incidence de ce régime sur la retraite des intéressés, en particulier de ceux qui ne sont pas, par ailleurs, salariés. Comment seront-ils pris en compte par le système de retraite ?

Nous avons également le sentiment qu'ils sont bien plus de 1,5 % à être poussés par leur employeur à devenir auto-entrepreneur.

On a évoqué le problème des charges. Vous le savez, si on achète des matériaux pour les revendre, on augmente le chiffre d'affaires. Mieux vaut travailler en prestations de services, et faire acheter les matériaux par le maître de l'ouvrage. C'est en général ce qui se fait. Que les intéressés ne puissent pas se faire rembourser la TVA n'a donc aucune conséquence sur la marge de leur entreprise.

M. Marini écrivait par ailleurs que « l'absence d'obligation de déclarer un chiffre d'affaires, même nul, empêche les organismes de sécurité sociale d'assurer un contrôle fiable sur la réalité de l'activité des entrepreneurs. C'est pourquoi il serait opportun d'imposer la déclaration, y compris lorsqu'il n'y a pas de chiffre d'affaires. » Une déclaration trimestrielle n'est pas longue à faire, en effet.

Enfin, ne faudrait-il pas, pour certains métiers, prévoir une limite dans le temps ?

PermalienPhoto de Thierry Benoit

Je tiens à mon tour à saluer ce régime de l'auto-entrepreneur, notamment la simplicité qui préside à la création de l'entreprise. C'est un moyen d'encourager l'initiative et de stimuler l'esprit d'entreprendre.

Vous avez cru bon de distinguer deux secteurs d'activité à l'intérieur du régime de l'auto-entrepreneur : la vente et la prestation de services. Pour ce qui est de la vente, les choses se régulent naturellement puisque, au-delà de 80 000 euros, la bascule vers un autre régime se fait automatiquement. Mais je m'interroge à propos des activités de prestations de services, dont le seuil a été fixé à 32 000 euros. En effet, dans ce domaine, on vient « flirter » avec un secteur d'entreprise qui travaille aussi dans le domaine de l'économie non marchande. Le législateur ayant fixé un taux de TVA de 5,5 % sur les activités de services à la personne, il y a certainement là une source de concurrence. Cela m'amène à cette première question : dans le temps, n'aurait-on pas intérêt à limiter ce statut de l'auto-entrepreneur pour les activités dites de service ?

Ma seconde question concerne la proratisation du chiffre d'affaires lors de l'année de lancement, sachant que lorsque le chiffre d'affaires est déclaré sur les derniers mois de l'année, l'administration fiscale a pour habitude de le multiplier par deux sur une année entière : un professeur de gymnastique dont l'activité, qui a débuté un mois de septembre, a été euphorique jusqu'en décembre mais très faible ensuite, risque donc de se trouver exclu du dispositif. Ce problème a-t-il été réglé ?

PermalienPhoto de Daniel Paul

L'engouement constaté, qui est réel, pour le régime mis en place est lié à la conjoncture. Par temps de crise, lorsque l'on n'arrive pas à trouver du travail, lorsque le pouvoir d'achat baisse, le fait de pouvoir se transformer, en un clic, en auto-entrepreneur, et ajouter ainsi un peu de « beurre dans ses épinards », n'est pas à négliger : c'est ce qui explique le nombre de chômeurs ou de retraités ayant adhéré à ce nouveau statut.

Le phénomène entraîne, dit-on, une baisse du chômage. Mais à partir du moment où un chômeur, auto-entrepreneur, déclare un minimum d'activité, il est rayé des listes sans pour cela avoir un revenu lui permettant de vivre. Il faudrait affiner les chiffres, de façon à pouvoir se faire une idée un peu plus précise en la matière.

Comme Jean Gaubert, j'estime que le pourcentage avancé de 1,5 % de personnes à être poussées par leur employeur à devenir auto-entrepreneurs est sous-estimé : on risque bien d'aboutir, avec ce système, à des entreprises sans salariés. Après tout, rien semble-t-il n'empêche aujourd'hui plusieurs auto-entrepreneurs de se réunir et de constituer une entreprise réunissant tous corps d'État.

Je rejoins les propos Mme de la Raudière concernant la garantie décennale. Instituer cette obligation d'assurance mettrait à égalité les auto-entrepreneurs avec les artisans et les entreprises, en cas de travaux conséquents.

J'ai repris les questions écrites qui vous ont été posées depuis quelques mois. J'y ai retrouvé une même préoccupation concernant le creusement des déficits de la Sécurité sociale : 32 millions d'euros en 2009, 191 en 2010 pour la branche concernée du fait d'un afflux de bénéficiaires sans cotisation ou avec des cotisations extrêmement faibles. J'aimerais obtenir quelques précisions sur ce point.

Vous avez également annoncé la simplification des cotisations sociales pour aligner non pas les auto-entrepreneurs sur les artisans, mais les artisans sur les auto-entrepreneurs.

PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Les entrepreneurs individuels.

PermalienPhoto de Daniel Paul

Cela ne risque-t-il pas d'entraîner une réduction des recettes pour la caisse concernée ?

J'aurais préféré que ce bilan, dressé au bout d'un an, l'ait été dans deux ou trois ans. Quoi qu'il en soit, j'aimerais connaître le taux de disparition de ces entreprises par rapport au nombre d'entreprises créées.

Enfin, au Sénat, on vous avait proposé de limiter à trois ans le bénéfice de ce système. Êtes-vous prêt à faire évoluer le statut de l'auto-entrepreneur ?

PermalienPhoto de Frédérique Massat

Selon les chiffres de l'Assemblée permanente des chambres des métiers et de l'artisanat, un tiers des auto-entrepreneurs exerce une activité artisanale. Ce modèle économique est loin de correspondre à l'artisanat, qui est fondé sur la qualification et la création d'une véritable entreprise qui investit et qui embauche, et surtout, qui transmet un véritable savoir-faire, notamment par l'apprentissage.

Ce régime d'auto-entrepreneur n'est pas aligné sur celui des entreprises. On a parlé de la TVA qui est une réalité, mais également du mode de calcul et de paiement simplifié des cotisations sociales. Enfin, les auto-entrepreneurs ne s'acquittent pas des contributions liées à la formation professionnelle.

Je souhaiterais revenir sur les difficultés de la Caisse nationale d'assurance vieillesse qui avait demandé, notamment, d'appliquer un palier de compensation fixé à 50 % du montant des prestations servies par le régime, d'axer le régime de l'auto-entrepreneur sur le démarrage de l'activité professionnelle en accordant ces avantages au cours des trois premières années d'installation, d'instaurer un seuil de revenus en deçà duquel la cotisation au titre du régime d'assurance vieillesse de base ne serait pas due, et d'exonérer de cotisation vieillesse les auto-entrepreneurs. Avez-vous répondu à ces demandes ?

PermalienPhoto de Jean-Marie Morisset

Si l'on s'en tient au nombre d'immatriculations, la mise en place du régime de l'auto-entrepreneur est une réussite. Vous avez tenu compte de nos observations et fait évoluer le dispositif en rectifiant certaines mesures. Il subsiste cependant des inquiétudes dans le monde de l'artisanat et des organismes professionnels. J'évoquerai trois points : la qualification professionnelle, l'assurance et la formation.

L'obligation de qualification professionnelle s'applique désormais de plein droit aux auto-entrepreneurs. Est-il dans votre intention de faire évoluer le décret pour que cette obligation s'applique à tous, y compris à ceux qui sont en activité secondaire et non principale ? Vous avez indiqué qu'un contrôle de la qualification était effectué avant la création de l'entreprise. Or j'ai ici des courriers, notamment de la Chambre des métiers, qui expriment quelques inquiétudes : le site de l'auto-entrepreneur ne permettrait pas un contrôle suffisant lors de l'inscription. C'est un point à éclaircir.

Je partage le point de vue de plusieurs de mes collègues sur l'obligation d'assurance. Compte tenu du champ d'application de la garantie décennale pour certains travaux, quelques compléments d'information me semblent nécessaires.

Enfin, je remarque que les auto-entrepreneurs peuvent se former sur les fonds de la formation payée par les artisans, sans contribution spécifique. Certes, les 23 % de charges pourraient éventuellement payer la formation, mais il semble que le fléchage ne soit pas fait entre l'Urssaf et les fonds de formation.

PermalienPhoto de Pascale Got

Monsieur le secrétaire d'État, vous pourriez apparaître comme l'auto-entrepreneur du bonheur ou du rêve ! Sauf que le succès de l'auto-entrepreneur est davantage dû à un chômage élevé et que, faute d'un emploi salarié, les demandeurs d'emploi utilisent la souplesse de cet outil pour se trouver une hypothétique rémunération. Or, derrière ce statut, se cache souvent la désillusion. J'en veux pour preuve qu'en 2010, plus d'un entrepreneur sur deux n'a pas déclaré de chiffre d'affaires.

Ce statut pose également la question du contournement du droit du travail : des employeurs peu scrupuleux incitent, voire imposent à leurs salariés de prendre ce statut afin de s'exonérer des cotisations, notamment des charges patronales. Même si ces abus restent, pour le moment, marginaux, quels seront les moyens mis en place pour contrôler et stopper ces dérives ?

PermalienPhoto de Francis Saint-Léger

Globalement, le régime de l'auto-entrepreneur peut être considéré comme tout à fait satisfaisant. Il répond aux attentes de simplicité et de souplesse. Mais, dans le secteur du bâtiment, tous les organismes, par exemple la Fédération française du bâtiment – FFB – ou la confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment – CAPEB –, sont farouchement contre et ils vous demandent son retrait pur et simple dans l'artisanat. Le président Patrick Ollier l'a souligné, ils mettent en avant la distorsion de situation avec les entreprises et les artisans, surtout lorsqu'il s'agit de travaux de main-d'oeuvre sans apport principal de fournitures. Ils dénoncent aussi une certaine forme de protection du travail au noir sous couvert de ce statut. Que leur répondez-vous ? N'avez-vous pas l'impression d'avoir raison contre tout le monde dans ce secteur ?

PermalienPhoto de Marie-Lou Marcel

Bien que vous nous ayez présenté le régime de l'auto-entrepreneur de façon idyllique, il constitue un traumatisme pour les artisans et déstabilise leur secteur, selon les propres termes du président de la chambre des métiers de l'Aveyron. Dans ce département, en année pleine, on a enregistré 90 entreprises en moins et 400 auto-entrepreneurs de plus. Si les mesures adoptées en avril 2010 ont permis un ajustement, de nombreuses petites entreprises rencontrent de grandes difficultés.

Les statistiques révèlent en effet une amélioration au premier semestre de 2010, car les auto-entrepreneurs qui exercent une activité artisanale à titre principal sont tenus de s'inscrire au registre de la chambre de métiers, mais pas de suivre le stage préalable à l'installation ; au surplus, ils ne paient pas leur inscription et ne sont pas assujettis à la taxe pour frais de chambres de métiers.

Bref, non seulement le système ne règle rien, mais il nuit à l'artisanat et aux chambres de métiers. De plus, les auto-entrepreneurs qui exercent à titre secondaire – point sur lequel les chiffres de l'institut OpinionWay diffèrent de votre rapport – le font sans contrôle de qualification et sans acquitter aucune taxe, ce qui entraîne une concurrence déloyale avec les autres entrepreneurs : en avez-vous, monsieur le secrétaire d'État, mesuré les conséquences ?

PermalienPhoto de Annick Le Loch

Je partage l'avis du président de la Commission sur l'inquiétude du secteur de l'artisanat, où la contestation ne faiblit pas. L'UPA, syndicat pourtant modéré, se montre très critique à l'égard de l'auto-entrepreneuriat, dont il estime qu'il crée, malgré les correctifs apportés en matière de qualification et d'immatriculation, une concurrence déloyale, notamment sur les prix, en raison de la franchise de TVA. L'UPA craint également la dissimulation d'activité au voisinage des seuils.

Vous avez institué ce statut pour alléger les formalités liées à la création d'entreprise ; mais n'aurait-il pas mieux valu commencer par cette simplification ? Vous avez mis en place un groupe de travail afin d'étendre la simplification à tous les artisans. Si cette idée aboutit, supprimerez-vous le statut d'auto-entrepreneur ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Nicolas

Tout ce qui permet de développer l'économie et de réduire le chômage va dans le bon sens : chacun en convient. La simplification des procédures est à cet égard un levier intéressant. Nous n'avons pas encore pu prendre connaissance de l'ensemble du rapport, mais il nous permettra sans doute d'affiner notre point de vue.

Vous avez indiqué que les auto-entreprises allaient générer un chiffre d'affaires de 2,5 milliards d'euros en 2010 ; mais quelle est la part prise au travail au noir ? Quels sont les secteurs concernés par les 23 % d'auto-entrepreneurs ayant légalisé leur activité ?

J'approuve par ailleurs ce qui a été dit au sujet de la garantie décennale.

Vous avez également indiqué que peu d'auto-entrepreneurs avaient recours au crédit. Est-ce parce qu'ils ne le sollicitent guère, ou parce que les banques sont frileuses, vu que seuls deux tiers des auto-entrepreneurs envisagent de poursuivre leur activité ?

Quant à la qualification, un partenariat étroit avec les chambres de métiers me semble nécessaire, car elles sont encore vent debout contre l'auto-entrepreneuriat alors que – faut-il le rappeler ? – des élections vont bientôt avoir lieu.

PermalienPhoto de Michel Lefait

Vous avez détaillé les statistiques contenues dans le rapport avec une certaine jubilation, mais je veux revenir sur un effet pervers du système. Certains entrepreneurs poussent en effet leurs employés à accepter un licenciement à l'amiable en leur promettant de leur fournir du travail et de les payer davantage. Vous avez dit que seuls 1,5 % des auto-entrepreneurs étaient concernés, mais permettez-moi de douter de ce chiffre. Quoi qu'il en soit, ceux qui se livrent à de telles pratiques, même s'ils ne sont pas nombreux, doivent être sanctionnés.

Je veux également me faire l'écho de l'inquiétude et même de la colère du monde de l'artisanat, lesquelles ne relèvent ni de la polémique ni du fantasme. Aux yeux des artisans, l'auto-entrepreneuriat crée une concurrence déloyale et un dumping sur les prix aisément vérifiable, qui menace la pérennité de leurs entreprises. Il faut assurer une vraie égalité de traitement entre les artisans traditionnels et les auto-entrepreneurs.

PermalienPhoto de Jean-René Marsac

S'agissant du chiffre d'affaires, quelle est la fiabilité des déclarations et quel contrôle s'exerce sur elles ?

Les revenus des auto-entrepreneurs varient évidemment beaucoup selon que cette activité est pour eux principale ou secondaire : quel est le revenu net de ceux qui ne vivent que de leur auto-entreprise ?

Les cotisations sociales sont certes liées au chiffre d'affaires ; mais quel est le volume de cotisations minimal pour ouvrir des droits ? Qu'en est-il de la protection sociale des auto-entrepreneurs n'ayant pas d'autre statut ?

Puisque 60 % des auto-entreprises sont créées grâce à un apport personnel, quel est le niveau moyen de cet apport ? Cette question pose celle de la frilosité des banques : ont-elles la même confiance que vous dans l'avenir du système ? Quelles solutions financières alternatives pourrait-on proposer aux auto-entrepreneurs ?

PermalienPhoto de Louis Cosyns

Le statut d'auto-entrepreneur, contrairement à ce que l'on a prétendu, est une réussite. Néanmoins, certaines difficultés demeurent en matière de qualification, notamment dans le secteur du bâtiment : peut-on demander davantage à l'auto-entrepreneur qu'à l'artisan maçon, lequel peut s'installer sans avoir de qualification ?

J'aimerais aussi en savoir un peu plus sur l'accompagnement, qui peut se faire à différents niveaux.

Quant à l'assurance, elle pose un réel problème. Les sociétés qui proposent la garantie décennale évoluent en effet dans un secteur très tendu. Les plafonds de garantie sont si hauts que les revenus bruts des auto-entrepreneurs ne suffisent pas : il faut donc réfléchir à une couverture assurantielle.

Un tutorat doit par ailleurs être créé entre les chambres consulaires et les auto-entrepreneurs, lesquels ont besoin de suivi et de formation, la plupart d'entre eux ayant vocation à évoluer vers l'entreprise classique.

PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Les cas d'optimisation se multiplient : de plus en plus de retraités, par exemple, développent une activité sous le statut d'auto-entrepreneur. Quelle est votre position à ce sujet ? Combien de cadres ou d'employés ont pu, par ce biais, facturer à une entreprise le travail qu'ils effectuaient pour elle comme salarié ? Quel impact le statut a-t-il eu sur la diminution du travail au noir ? Avez-vous mis en place des indicateurs sur ce point ? Enfin, un tiers des auto-entrepreneurs n'ont déclaré aucun chiffre d'affaires. La durée pendant laquelle ils ne sont pas tenus, en cas de chiffre d'affaires nul, d'effectuer une déclaration, a d'ailleurs été étendue de 12 à 36 mois. Est-ce vraiment pertinent ?

Si le statut était destiné à combattre le chômage par la création d'entreprise, il est un peu détourné par certains employeurs, pour lesquels il remplace les contrats de travail. Quelle est votre position sur ce point ?

PermalienPhoto de Louis-Joseph Manscour

Dans les outre-mer, où le taux de chômage est trois fois supérieur à celui de la métropole – 24 % en moyenne aux Antilles, un peu plus à La Réunion –, le régime d'auto-entrepreneur a suscité un formidable espoir. Vous avez fait preuve d'autosatisfaction, mais il reste des zones d'ombre. Le chômage n'a d'ailleurs pas diminué aux Antilles, et les problèmes se sont multipliés. Avez-vous pris contact avec des présidents de chambre de métiers ? Beaucoup de jeunes chefs d'entreprise sont en effet confrontés à une concurrence déloyale. Dans ma commune, trois petites entreprises emploient sept à huit salariés ; deux d'entre eux, devenus auto-entrepreneurs, les mettent désormais en péril par une concurrence déloyale, et ce sans avoir reçu de formation. Avant de crier victoire, il faudrait corriger les très nombreux inconvénients liés au système.

PermalienPhoto de Lionel Tardy

Je tiens également à saluer le succès et la simplicité du dispositif, notamment le principe, que l'on pourrait éventuellement étendre, selon lequel on ne paie rien tant que l'on n'a rien encaissé.

Le régime d'auto-entrepreneur répond à l'aspiration de nos concitoyens à créer leur entreprise, aspiration encouragée par deux facteurs : d'une part, la crise économique, à l'origine de nombreuses pertes d'emploi ; d'autre part, une communication efficace sur la simplicité de la procédure. Il est indispensable de conserver cet engouement intact, tout en dressant, comme nous le faisons aujourd'hui, des bilans quantitatifs et qualitatifs réguliers.

Si la création des auto-entreprises est simple, on peut s'interroger sur leur pérennité, leur chiffre d'affaires moyen cumulé n'atteignant que 7 000 euros, soit 830 euros par mois. C'est trop peu pour développer une activité autonome.

Par ailleurs, les auto-entreprises sont, pour une part non négligeable, peu actives, et 12 % des personnes inscrites sous ce statut ne le sont plus aujourd'hui : 37 % d'entre elles ont dû cesser leur activité car celle-ci ne marchait pas, et 44 % ont abandonné leur projet. Pourriez-vous nous donner des éclaircissements sur ce point, monsieur le secrétaire d'État ?

Enfin, des difficultés sont susceptibles d'apparaître lors de l'activité : dans le bâtiment, on l'a vu, les auto-entrepreneurs doivent se soumettre à des obligations assurantielles décennales. Les compagnies accepteront-elles d'assurer les auto-entrepreneurs et, si oui, à quel coût ? Des craintes demeurent également quant au statut, avec des risques de distorsion de concurrence. Vous avez parlé d'améliorations s'agissant de la qualité professionnelle et de l'accompagnement des auto-entrepreneurs, via leur immatriculation au registre des métiers. Le gros problème reste néanmoins le devoir de loyauté de l'auto-entrepreneur vis-à-vis de son employeur d'origine, surtout lorsqu'il exerce une activité dans le même domaine. Enfin, l'une des vertus du dispositif est de permettre la régularisation d'activités non salariées ; cependant, de nombreuses auto-entreprises ne déclarent aucune activité : je pense que, au-delà d'un certain nombre d'années, il faudrait les dissoudre.

PermalienPhoto de Patrick Lebreton

À La Réunion, selon l'INSEE, seules 30 % des entreprises créées sont des auto-entreprises – contre plus de 60 % à l'échelon national –, alors que l'activité est traditionnellement dynamique dans ce département. D'aucuns, pour expliquer ce chiffre, font valoir que l'auto-entreprise permet d'abord de contourner le droit du travail. Quel est votre sentiment sur ce point ?

Certains ont parlé d'une limitation dans le temps de l'auto-entreprise, d'autres d'une diminution des seuils de chiffre d'affaires : envisagez-vous une adaptation du dispositif actuel, comme demandent les artisans ?

PermalienPhoto de Catherine Coutelle

Dans la Vienne, 70 % des activités artisanales sont assurées par les auto-entreprises, et les enregistrements des entreprises classiques ont diminué de 30 %, ce qui inquiète les chambres de métiers. Ainsi, le bâtiment continuera à souffrir de la concurrence des auto-entreprises en 2010 et en 2011.

Dans ma circonscription, un auto-entrepreneur garagiste, qui s'était installé dans une petite maison particulière en utilisant le trottoir pour réparer les voitures, vient de disparaître : j'ignore quels sont les recours pour les clients qui seraient mécontents des réparations !

Aviez-vous réellement prévu ce statut pour l'artisanat ? Est-ce en empilant les différents statuts que l'on simplifiera la création d'entreprise ?

PermalienPhoto de Daniel Fasquelle

L'auto-entrepreneuriat a atteint ses trois objectifs : permettre un complément d'activité, lutter contre le travail au noir et, surtout, mettre le pied à l'étrier de ceux qui envisagent de développer une activité indépendante. La crise économique a forcément faussé les données, et c'est à son aune qu'il convient de lire le rapport que vous nous avez remis.

On a déjà évoqué les inquiétudes des artisans ; je n'y reviens pas.

Il faut sans doute prendre le chiffre de 12 % de cessations d'activité avec du recul, puisqu'un certain nombre d'auto-entreprises ont été créées sans générer aucune activité. S'agit-il cependant de cessations exclusivement volontaires ? Y a-t-il eu des faillites et, si oui, dans quelle proportion ?

Enfin, qu'en est-il des ordonnances concernant l'EIRL, qui est complémentaire du système ? Ce statut entrera-t-il bien en vigueur à partir du 1er janvier prochain ?

PermalienPhoto de William Dumas

Tout le monde n'est pas aussi satisfait que vous, monsieur le secrétaire d'État. Dans mon département, le nombre d'immatriculations d'entreprises artisanales s'est effondré, passant de 2 200 en 2008 à 1 500 en 2009. Six entreprises artisanales créées sur dix sont des auto-entreprises. Selon votre rapport, sur 6 824 auto-entrepreneurs enregistrés dans le Gard en avril 2010, 2 278 ont déclaré un chiffre d'affaires positif – de 6 000 euros en moyenne – en 2009, ce qui signifie que les deux tiers ne déclarent aucun chiffre d'affaires. Quid, dès lors, de leur pérennité ?

Je pense moi aussi qu'il y a plus de 1,5 % d'auto-entrepreneurs qui correspondent à des embauches déguisées sous le couvert du statut d'auto-entrepreneur. Selon votre rapport – page 10 –, 10 % des entreprises « ont recours à la sous-traitance auprès des auto-entrepreneurs », et – page 11 –, près de 20 % des entreprises ont fait appel à des auto-entrepreneurs « pour des prestations de sous-traitance ou pour des travaux divers » : d'où vient la différence entre ces deux chiffres ?

Enfin, la garantie décennale pose un gros problème, car peu de compagnies acceptent d'assurer les auto-entrepreneurs. Je pense aussi que les banques seront réticentes à financer des entreprises ayant un chiffre d'affaires aussi bas, quand il n'est pas nul.

PermalienPhoto de Colette Langlade

Vous avez dressé un bilan du chiffre d'affaires des auto-entrepreneurs, de leurs domaines d'activité, de leurs qualifications et de leurs motivations ; on aurait pu aussi parler de ceux qui exercent en zone rurale, dans les communes de moins de 500 habitants, où le tissu économique reste fragile et le taux de chômage élevé.

Les artisans du bâtiment sont particulièrement inquiets, car le régime de l'auto-entreprise a créé des inégalités quant aux droits et aux devoirs. Ainsi, l'allégement de charges sociales et fiscales et, surtout, l'exonération de TVA sont des avantages considérables qui entraînent une concurrence déloyale, notamment dans le secteur des services à la personne. De nombreux artisans et commerçants expriment leur mécontentement à ce sujet : quelles mesures entendez-vous prendre pour répondre à leurs préoccupations ?

PermalienPhoto de Jean Proriol

À en croire votre rapport, page 42, il y aurait plus de diplômés chez les auto-entrepreneurs que chez les entrepreneurs classiques, et 13 % d'entre eux n'auraient aucune formation ou un diplôme équivalent au brevet. Si vous n'aviez pas créé ce régime, que seraient devenus les quelque 300 000 auto-entrepreneurs diplômés ?

Le graphique qui figure page 45, intitulé « Source de financement à la création de l'auto-entrepreneur », me semble énigmatique car les chiffres additionnés donnent un total de 150 %. N'y a-t-il pas un petit problème d'arithmétique ?

Présidence de M. Jean Gaubert, vice-président de la Commission.

PermalienPhoto de Jean-Luc Pérat

Le Réseau des ruches d'entreprises du Nord, que je préside, comprend de 18 à 20 % d'entreprises féminines. Mes questions portent sur l'auto-entrepreneuriat au féminin. Vous avez indiqué, monsieur le secrétaire d'État, que, pour 40 % des intéressés, l'auto-entreprise était une activité complémentaire. Mais qu'en est-il pour les femmes ? L'auto-entreprise est-elle leur activité principale ?

Quelles pistes entendez-vous suivre pour encourager l'auto-entrepreneuriat des femmes ? Quels sont les secteurs en retard sur ce point ?

Il semble par ailleurs que les crédits soient difficiles à obtenir, et que la formation et la responsabilité restent des questions majeures : que comptez-vous faire en ces domaines ?

PermalienPhoto de Alain Suguenot

Nous ne pouvons que vous tirer un coup de chapeau pour avoir mené à bien une expérimentation sur la simplification procédurale.

Outre cette audace bienvenue, vous avez su donner le goût d'entreprendre, succès que ne saurait expliquer la crise économique. Il reste néanmoins des inquiétudes, notamment au sujet du régime social des indépendants. La mesure d'exemption de déclaration du chiffre d'affaires pendant trois ans peut générer des abus, par exemple de la part d'auto-entrepreneurs tentés de dissimuler une part de leur chiffre d'affaires pour rester en deçà du seuil. Il faudrait donc prévoir une obligation de déclaration annuelle, même en cas d'activité nulle.

Enfin, le président de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales – CNAVPL – s'est inquiété de l'afflux d'auto-entrepreneurs à faibles revenus, afflux qui pourrait menacer l'équilibre financier de cet organisme.

Si des garde-fous semblent donc nécessaires, la simplification doit être étendue car elle permet à de nombreuses personnes de retrouver le goût d'entreprendre.

PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Je remercie les membres de la Commission d'être venus si nombreux, ce qui prouve que l'auto-entrepreneuriat, même s'il ne fait pas l'unanimité, suscite l'intérêt.

À écouter certaines interventions, je serais l'auteur du rapport que je vous ai remis ; or il n'en est rien. Ce rapport, qui m'a été demandé par le Parlement et pour lequel j'ai estimé qu'il se justifiait après un an de fonctionnement, a été suivi par un comité de pilotage où étaient représentées l'Union professionnelle artisanale, les organisations consulaires, les administrations de Bercy et de la sécurité sociale et l'Agence pour la création d'entreprise. Enfin, il a été réalisé par un prestataire, l'institut Ipsos pour ne pas le nommer, sur la base de sondages car nous n'avons pas encore tous les éléments chiffrés : avec une marge d'erreur de 2 ou 3 %, la présente étude donne donc une évaluation globale.

Selon Laure de La Raudière, on pourrait étendre la simplification du régime auto-entrepreneurial à la micro-entreprise ou à l'ensemble des entrepreneurs individuels. Un groupe de travail a précisément été constitué sur ce point, en association avec le ministère du budget ; il remettra ses conclusions fin octobre.

S'agissant des obligations d'assurance, elles s'imposent, dans une centaine de professions, à tous, entrepreneurs comme auto-entrepreneurs. Si certains d'entre ces derniers, dans le secteur du bâtiment, ne parviennent à obtenir une garantie décennale, ils doivent saisir le Bureau central de tarification, lequel désignera un assureur.

M. Gaubert et M. Paul m'ont interrogé sur les chiffres d'affaires des auto-entrepreneurs. En 2009, ceux-ci ont déclaré 3 700 euros par trimestre, contre 3 200 euros en 2010. Cette légère baisse, désormais stabilisée, s'explique par le développement de l'auto-entreprise comme activité accessoire. Vous avez raison, monsieur Paul, de dire qu'il faudra attendre trois ans pour procéder à une véritable évaluation ; mais si je ne vous avais pas présenté ce rapport aujourd'hui, vous me l'auriez à bon droit reproché. Nous sommes donc amenés à faire des bilans d'étape.

Contrairement à ce que beaucoup d'entre vous ont dit, je ne suis nullement autosatisfait. Je me félicite bien sûr des conclusions du rapport, qui vont dans le sens de ce que je souhaite ; mais si les conclusions avaient été inverses, je vous les aurais présentées de la même façon.

M. Gaubert a posé une question intéressante au sujet des métiers nouveaux : de fait, l'auto-entrepreneuriat en a créé beaucoup – ce qui explique au passage les chiffres d'affaires encore modestes –, notamment dans le secteur des services.

Vous avez été nombreux à vous inquiéter d'éventuels abus, le chiffre d'affaires n'ayant pas à être déclaré s'il est nul, ce qui pose en effet un problème. Je réfléchis donc à l'idée d'imposer une telle déclaration, comme à un éventuel raccourcissement de la durée, actuellement de trois ans, au terme de laquelle l'absence de déclaration du chiffre d'affaires entraîne la radiation.

Comme l'a observé M. Benoit, les entrepreneurs du BTP se voient appliquer, pour les travaux effectués chez les particuliers, une TVA à 5,5 %, et peuvent déduire, pour les achats de matériaux, une TVA à 19,6 %. Les auto-entrepreneurs, eux, ne bénéficient pas de ces dispositions, et s'en trouvent, pour le coup, désavantagés : évitons donc les visions un peu manichéennes.

M. Benoit a aussi évoqué ce sujet majeur qu'est la proratisation. Lorsque le chiffre d'affaires est déclaré sur les six premiers mois de l'année, l'administration fiscale a pour habitude de le multiplier par deux, si bien que des milliers d'auto-entrepreneurs ont été radiés pour avoir dépassé le plafond. La proratisation n'a aucun sens pour l'auto-entreprise, dont les activités ne sont pas régulières : elle sera donc supprimée pour tous les régimes de micro-entreprise, dont celui d'auto-entrepreneur, dans le projet de loi de finances rectificative. Quant aux seuils de 32 000 et de 80 000 euros, ils s'appliqueront l'année de création, quelle que soit la date.

Monsieur Paul, le lien entre le développement de l'auto-entrepreneuriat et la crise est évident, puisque le désir des individus de s'en sortir est décuplé ; mais ne faut-il précisément pas se réjouir que, dans une telle période, des centaines de milliers de Français aient créé une activité ? C'est une très bonne nouvelle, qui montre que l'État n'est pas le seul à pouvoir résoudre leurs problèmes.

Avec le ministre du travail, j'ai par ailleurs écrit à la CIPAV ainsi qu'à la CNAVPL, pour leur confirmer un changement des règles comptables en juillet prochain. Ainsi, les auto-entrepreneurs ne réalisant aucun chiffre d'affaires ne seront pas comptabilisés pour le calcul de la compensation démographique ; en outre, les cotisations des auto-entrepreneurs ne seront pas versées en priorité aux caisses d'assurance vieillesse, mais aux caisses de la branche maladie ; de cette façon, les auto-entrepreneurs réalisant un faible chiffre d'affaires ne seront pas comptabilisés pour le calcul de la compensation démographique, et leur impact comptable restera limité à moins de 50 millions d'euros, ce qui satisfait le président de la CNAVPL.

Pourquoi le statut d'auto-entrepreneur serait le seul dont nous devrions limiter la durée ? Au nom de quoi les retraités, les mères de famille ou les étudiants qui créent leur auto-entreprise seraient-ils limités à deux ou trois ans ? Cela n'a pas de sens ; j'y suis résolument défavorable.

Environ un tiers des auto-entrepreneurs, madame Massat, travaillent dans le bâtiment, secteur où le régime concentre l'essentiel des critiques. Toutefois, comme l'Ordre des experts comptables l'indique lui-même, les dispositions particulières relatives à la TVA et aux charges n'entraînent pas de concurrence déloyale, l'exonération de TVA ayant aussi ses inconvénients puisqu'elle empêche certaines déductions.

M. Morisset a relayé des inquiétudes auxquelles j'ai répondu, qu'il s'agisse de l'assurance décennale ou de la formation professionnelle. Celle-ci est prise en charge par l'État – qui a versé 5 millions d'euros aux chambres consulaires cette année –, mais, à l'avenir, elle devra être financée par les contributions des auto-entrepreneurs.

La loi Raffarin de 1996 oblige tous les artisans, auto-entrepreneurs ou non, à une obligation de qualification professionnelle, et ce même si l'activité est exercée en complément d'une autre. J'ai pris un décret permettant aux chambres de métiers de contrôler la qualification professionnelle lors de la déclaration d'activité. Mais, je le répète, ce décret s'applique également aux artisans traditionnels : auparavant, la qualification n'était pas contrôlée.

Il est vrai, madame Got, que le taux de chômage élevé explique en partie le succès des auto-entreprises : pourquoi empêcher ceux qui connaissent des difficultés de tenter leur chance ? Quant à l'obligation de déclarer les chiffres d'affaires, même nuls, j'en ai parlé. Nous sommes déterminés à lutter contre les abus.

Non, monsieur Saint-Léger, je n'ai pas raison contre tous puisque, je le répète, je ne suis pas l'auteur du rapport que vous avez entre les mains, lequel a fait l'objet d'un suivi, y compris des artisans eux-mêmes. Il est, à ce stade, la seule évaluation objective et complète dont nous disposions. Si je suis prêt à faire évoluer le régime de l'auto-entreprise, je me refuse à en limiter la portée.

Je ne crois d'ailleurs pas, madame Marcel, qu'il mette en péril les chambres de métiers : si l'on additionne créations d'auto-entreprise et créations d'entreprise artisanale traditionnelle, on s'aperçoit que les activités régies par les chambres de métiers vont croissant. Notre priorité n'est donc pas d'affaiblir ce régime bénéfique aux chambres de métiers elles-mêmes, mais d'accompagner les auto-entrepreneurs dans leur évolution jusqu'à l'entreprise. Pour ce faire j'ai défini trois orientations : le renforcement de la coordination entre tous les acteurs de l'accompagnement ; l'amélioration de la qualité de l'information – un agrément sera ainsi donné aux sites internet spécialisés, et le guide de l'auto-entrepreneur vient d'être actualisé – ; le développement de l'accompagnement individualisé.

Madame Le Loch, si nous n'avions pas créé le statut d'auto-entrepreneur, nous aurions pris du retard en matière de simplification des procédures : je pense notamment au guichet unique, qui servira d'interface entre les porteurs de projet et l'administration. La simplification pourra donc s'étendre à l'ensemble du processus de création d'entreprise.

M. Nicolas m'a demandé des précisions sur les chiffres d'affaires. En 2009, sur un chiffre d'affaires global de 1 milliard d'euros, 122 millions ont été réalisés dans le secteur de la construction, 224 millions dans le commerce et 163 millions dans le soutien aux autres entreprises pour ne citer que les principaux secteurs d'activité.

M. Lefait doute, comme M. Villaumé et d'autres, que seuls 1,5 % des auto-entrepreneurs le soient devenus à la demande de leur employeur d'origine ; mais c'est une réalité ! Le sondage a été réalisé de façon anonyme, et l'on ne peut qu'invoquer une marge d'erreur statistique. En tout état de cause, le chiffre est inférieur à 5 %, ce qui, sans être négligeable, reste marginal. Quant aux charges sociales et aux questions de concurrence, j'en ai déjà parlé.

Le contrôle est en effet nécessaire, monsieur Marsac ; mais pourquoi contrôler les auto-entrepreneurs plus systématiquement que les autres entrepreneurs ? Je suppose que nul, ici, ne veut stigmatiser telle ou telle catégorie, d'autant que 20 % des auto-entrepreneurs sont d'anciens chômeurs. Néanmoins, nous devons rester vigilants : des instructions claires ont été données aux administrations compétentes.

J'ai répondu sur l'accompagnement des auto-entrepreneurs et sur l'assurance décennale, monsieur Cosyns

PermalienPhoto de Louis Cosyns

Le Bureau de tarification impose en effet un coût d'assurance, mais l'auto-entrepreneur n'a pas les moyens d'y souscrire compte tenu du montant de la cotisation et du plafond des garanties, qui est de l'ordre de 10 millions d'euros pour un maçon. Il faudrait donc trouver une solution équilibrée, avec un régime d'assurance simplifié.

PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Nous allons travailler au problème, en effet fondamental, du niveau des garanties.

Je veux rappeler à M. Villaumé que 23 % des auto-entrepreneurs reconnaissent avoir légalisé une activité. S'agissant de la déclaration de chiffre d'affaires, je suis, comme je l'ai dit, disposé à réduire le délai de trois ans.

L'auto-entrepreneuriat peut être, je crois, bénéfique aux DOM-TOM ; c'est pourquoi nous avons adapté le régime à ces territoires en le fusionnant avec les dispositions relatives aux exonérations de charges. Je suis néanmoins disposé à examiner les choses de plus près.

J'ai répondu à M. Tardy sur l'assurance décennale et à M. Lebreton sur les déclarations de chiffre d'affaires.

Votre lecture du graphique, monsieur Proriol, n'est pas la bonne : le total atteint 150 % parce qu'il peut y avoir plusieurs sources de financement.

PermalienPhoto de Jean Proriol

J'y avais pensé, mais le graphique ne me semble guère pertinent.

PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Vous avez posé une autre question pertinente : que seraient devenus les intéressés si le statut n'avait pas existé ? La réponse est simple : notre pays compterait beaucoup moins de créateurs d'entreprise.

Je répondrai à M. Pérat sur l'auto-entrepreneuriat des femmes ; quant à M. Suguenot, je souscris à tout ce qu'il a dit.

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Merci, monsieur le secrétaire d'État, pour le temps que vous nous avez consacré.

Membres présents ou excusés

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mardi 28 septembre 2010 à 17 heures

Présents. - M. Jean-Pierre Abelin, M. Jean-Paul Anciaux, M. Thierry Benoit, M. Bernard Brochand, M. François Brottes, M. Louis Cosyns, Mme Catherine Coutelle, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Jean Gaubert, Mme Pascale Got, M. Jean-Pierre Grand, M. Jean Grellier, M. Louis Guédon, M. Henri Jibrayel, Mme Laure de La Raudière, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Claude Lenoir, M. Jean-Louis Léonard, M. Louis-Joseph Manscour, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-René Marsac, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Patrick Ollier, M. Daniel Paul, Mme Josette Pons, Mme Anny Poursinoff, M. Jean Proriol, M. Francis Saint-Léger, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Michel Villaumé

Excusés. - M. Gabriel Biancheri, Mme Geneviève Fioraso, M. Pierre Lasbordes, M. Michel Lejeune, M. Serge Poignant

Assistaient également à la réunion. - Mme Colette Langlade, M. Patrick Lebreton, M. Jean-Luc Pérat